Collection dirigée par Hélène Fréchet

28

Transcript of Collection dirigée par Hélène Fréchet

Page 1: Collection dirigée par Hélène Fréchet
Page 2: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Collection dirigée par Hélène Fréchet

Agrégée d'histoire et de géographie

QUESTIONS D'HISTOIRE

ÉDUCATION ET CULTURES DANS L'OCCIDENT CHRÉTIEN

DU DÉBUT DU XII SIÈCLE AU MILIEU DU XVe SIÈCLE

Georges JEHEL Philippe RACINET Professeur Professeur

d'histoire médiévale d'histoire et d'archéologie à l'université de Picardie médiévales

à l'université de Picardie

avec la collaboration de Jean-Olivier GUILHOT

Conservateur en chef du service régional de recherches archéologiques de Picardie

Simone JEHEL Agrégée de lettres classiques

EDITIONS DU TEMPS

Page 3: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Illustration de couverture : Discussion sur le Coran entre Raymond Lulle et un savant musulman © La Documentation française

C'est vers le Moyen Âge énorme et délicat Qu'il faudrait que mon cœur en panne naviguât

Paul Verlaine, Sagesse, X, 2-3

ISBN 2-84274-032-7 © éditions du temps, 1998. 23 rue des Cloÿs, Paris 18 Tous droits réservés. Toute représentation ou reproduction même partielle, par quelque procédé que ce soit, est interdite sans autorisation préalable (loi du 11 mars 1957, alinéa 1 de l'article 40). Cette représentation ou reproduction constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal. La loi du 11 mars 1957 n'autorise, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, que les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective d'une part, et, d'autre part, que les analyses et les citations dans un but d'exemple et d'illustration.

Page 4: Collection dirigée par Hélène Fréchet
Page 5: Collection dirigée par Hélène Fréchet
Page 6: Collection dirigée par Hélène Fréchet
Page 7: Collection dirigée par Hélène Fréchet
Page 8: Collection dirigée par Hélène Fréchet

INTRODUCTION Que peut-on entendre par culture ?

Au début du XX siècle, un grand débat s'est ouvert entre les Allemands et les Français autour du concept de culture opposé à celui de civilisation. Civilisation et culture, selon Thomas Mann, sont des contraires, leur oppo- sition est une des formes qui différencient l'homme de la nature qu'il veut régenter. Dans cette perspective, la culture prend une extension globalisan- te qui la porte à intégrer tout ce qui tend vers une herméneutique explicati- ve à vocation anthropologique, aussi bien dans l'ordre du religieux ou de l'irrationnel sous les formes comportementales les plus élémentaires que dans celui de la réflexion savante.

Sans essayer d'approfondir plus avant ce mot redoutable, il convient d'en saisir au moins sommairement la portée, ne serait-ce que pour en cerner l'aire d'extension et l'usage que l'on peut en faire en l'appliquant à l'histoire.

Bien qu'il fût utilisé dans un sens autre que celui qui touche au travail de la terre pour lequel au Moyen Âge on employait le mot couture, le mot culture n'est pas sans rapport avec celui-ci dans la mesure où il insiste sur l'idée de transformation du milieu social par des pratiques, des représenta- tions ou des mises en cause critiques de l'ordre en place. La culture procède donc, par remaniements successifs des idées et des usages, à des ajuste- ments entre les projets et les réalités qui s'affrontent au sein des sociétés par le biais des idéologies et des contraintes de la conjoncture. Elle constitue également un témoin du dialogue entre les différentes composantes d'un état de la civilisation. Elle peut en orienter les modalités. Elle peut aussi en subir les contrecoups. Elle constitue en dernier ressort l'articulation prin- cipale de la double postulation de la condition humaine vers la matière et vers l'esprit. Ainsi, une guerre, une famine, une invention, un caprice de la sensibilité ou de l'imagination issu par exemple, de la révélation inopinée, de la confrontation de deux visions du monde, ont à voir avec la culture. Même si la culture tend vers une expression sublimée des pulsions à partir d'expériences individuelles, elle reste un des facteurs principaux de la cohé- sion du groupe autour de valeurs sociales, morales, politiques ou esthéti- ques visant à l'universalité. La culture débouche donc sur les codes et les moyens de communication qui définissent une de ses étapes et lui permet- tent de s'intégrer au continuum de l'histoire. C'est ainsi qu'elle est, dans un présent donné, le lieu de la reconnaissance des héritages et celui d'une ouverture sur l'avenir, hésitant toutefois entre une accessibilité généralisée de ses contenus, matérialisée, par exemple, par le recours aux langues ver- naculaires, et une restriction élitiste de ses bienfaits enclose dans le latin des savants. La langue étant le premier support et le premier révélateur de la culture et l'éloquence son aboutissement le plus remarquable. Ainsi la

Page 9: Collection dirigée par Hélène Fréchet

culture culmine avec un style, une manière d'être qu'illustrent tour à tour le dolce stil nuovo conduisant à Dante ou l'expression du moi dans la poésie de Charles d'Orléans. Style de vie ou art de vivre, la culture reflète non seule- ment les savoirs acquis et ce que l'on veut en faire mais aussi les finalités et les objectifs de la vie collective. Si depuis le début du Moyen Âge, elle se nourrit des formes de la foi religieuse puisée dans les Écritures, inondant de sacré tout ce qui touche au pouvoir en le magnifiant, elle découvre par son exercice même les vertus du profane qui l'intéressent à l'homme. Dans le combat qui oppose la théologie et le droit, le champ de la culture médié- vale s'ouvre au social en même temps qu'il s'élargit à l'Antiquité pré-chré- tienne. Par le religieux, il touche à la sensibilité, à l'expression du beau où les architectures s'efforcent de restituer l'harmonie céleste, à la morale par l'exaltation de la vertu, qu'elle soit celle du chevalier ou celle du moine. Par le politique, elle touche aux rapports sociaux, à ceux qui relient l'individu au groupe, le citoyen à la cité. Exaltant le prince, elle peut aussi légitimer le rôle du peuple dans la conduite des affaires - surtout quand on prend le mot peuple au sens italien popolo qui implique la référence au populus ro- main - ce qui n'épuise pas la signification médiévale du terme.

Mais dans le dialogue nécessaire avec la nature que l'homme poursuit à travers les siècles, la part médiévale n'est pas négligeable, en particulier du XII au XV siècle. Sous sa forme scientifique ou proto-scientifique, il déve- loppe ses curiosités à travers les sciences spéculatives, mathématiques, la logique, les sciences d'observation, la botanique ou la zoologie. On pense aussi bien à l'herboristerie qui, appuyée sur Dioscoride, connaît un développement large dans les milieux monastiques et médicaux à travers tout le Moyen Âge pour aboutir à Andres Laguna, qu'à la géographie, la cosmographie ou l'astrologie En somme ce que recouvre la culture concerne tout ce par quoi l'homme s'efforce de comprendre le monde qui l'entoure et sa relation à celui-ci. Physique, optique, sciences dans lesquelles de réels progrès ont été réalisés au Moyen Âge aussi bien que médecine ou alchimie participent de sa sphère. Mais si on doit y associer tous les instruments qui permettent son acquisition, sa diffusion et son enrichis- sement au premier rang desquels viennent le manuscrit et le livre, il faut surtout faire une place à l'expression de la sensibilité, c'est-à-dire aux arts qui sont autant que les livres, les vecteurs d'une connaissance mais y ajoutent ce supplément d'âme qui en font un langage à vocation universelle et transcendent les siècles. C'est en effet par l'art sous toutes ses formes, sculpture, peinture, littérature, poésie, musique et d'une manière générale, les arts dits d'agrément que la culture s'élève au niveau de la civilisation.

1. Le De universa medicina de Dioscoride contient la description de six cents plantes médicinales ; écrit en grec, utilisé par Galien, traduit en latin et en arabe, il eut une influence durable en Occident bien au-delà du Moyen Âge. Au milieu du XVI siècle, Andrès Laguna le traduisit en espagnol, assorti d'un album reproduisant les illustrations dont un Italien avait orné le texte original de Disocoride.

Page 10: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Celle-ci implique les conditions et les moyens d'une élévation des mœurs au niveau d'un art de vivre. C'est pourquoi il convient d'introduire dans l'étude de la culture ce qui concerne le cadre de vie, l'habitat, le mobilier, le vêtement et même la table des repas qui est le lieu d'expression d'un goût qui s'apparente lui-même à un art. Cet élargissement de la culture se justifie d'autant plus que c'est entre le XIIIe et le XV siècle que sous l'influence de divers facteurs dont en particulier l'intensification des relations avec l'Orient, la civilisation occidentale effectue une transformation déterminan- te. Il convient à ce propos de préciser la part encore incertaine mais de plus en plus prégnante de la culture matérielle dans ces différents domaines Mais encore faut-il en établir les limites.

On considère que la culture matérielle recouvre les domaines de la production, de la transformation du milieu, des forces de production, des objets, outils, instruments et autres accessoires qui y contribuent ainsi que les produits eux-mêmes. Cela concerne donc l'agriculture, la métallurgie, la céramique, la verrerie, l'artisanat textile, le travail du bois, tant pour l'habi- tat que pour la construction navale ou d'autres activités où l'archéologie se trouve fortement engagée. Mais peut-on intégrer indifféremment tous ces domaines à celui de la culture ? Cela paraît démesuré. Sans aucun doute, tout ce qui relève de la technologie, la fabrication d'une carène aussi bien que celle d'un rabot, participe d'une démarche intellectuelle qui se fonde sur la maîtrise d'un savoir théorique et expérimental de haut niveau, mais, dans la plupart des cas, c'est à l'histoire économique et sociale que renvoie l'histoire matérielle C'est ainsi que l'association des céréales, blés, orge, mil et autre granum que l'on voit affleurer dans la documentation, peut avoir des incidences sur les conditions de travail, les marchés, la démographie, mais son impact culturel est modeste. Il en est de même pour la diffusion de la charrue en fer ou du collier d'épaule. Au contraire, l'apparition du citron, celle de la canne à sucre, ou encore de cette gomme à mâcher diffu- sée par les Génois sous le nom de mastic sont des faits de culture indubita- bles, de même que l'apparition de la fourchette qui introduit une médiation culturelle de premier ordre dans la relation à la nourriture Que dire de ces couteaux de réfectoires conventuels qui ont des portées d'un chant d'action de grâce gravées sur leur lame, pour que les moines puissent remercier Dieu de la nourriture qu'ils recevaient !

Quant à l'éducation, qui en tant que système est à la fois un instrument et un produit de la culture, elle en est aussi le médium qui permet son assimi- lation et sa pérennisation. Son évolution qui accompagne celle de la société est en prise aussi bien sur les grands débats qui agitent le monde savant,

1. Pour tous ces aspects voir J.-M. Pesez, « Histoire de la culture matérielle » dans J. Le Goff, R. Chartier, J. Revel (dir.), La Nouvelle Histoire, Paris, Complexe, 1978, p. 98-130.

2. On sait que la fourchette, connue depuis l'Antiquité, ne s'est vraiment généralisée qu'au XVI siècle à l'initiative d'Henri III. Du XIII au XV siècle, c'est un instrument précieux, en argent, en or, voire en cristal, mais le plus souvent en fer, utilisé surtout en Italie pour les fruits.

3. Voir B. Laurioux, Le Moyen Âge à table, Paris, A. Biro, 1989, p. 26.

Page 11: Collection dirigée par Hélène Fréchet

que sur les transformations de la société urbaine ou rurale au niveau le plus humble comme à celui de l'opulente bourgeoisie d'affaires, sans laisser in- différente l'aristocratie nobiliaire.

Face à cet imposant dispositif qui façonne la culture occidentale, à tra- vers des évolutions politiques d'importante envergure, qu'il s'agisse de la guerre de Cent Ans ou de l'arrivée des Turcs en Occident, provoquant le reflux d'une partie de l'élite byzantine ou arménienne en Italie, avec dans ses bagages d'importantes collections de manuscrits, il paraît utile d'attirer l'attention sur tout un underground culturel plus ou moins apparent et toléré qui n'en participe pas moins activement au remaniement des savoirs. Si la démonologie, la chiromancie, ou encore l'astrologie renvoient plus à l'an- thropologie qu'à l'histoire culturelle au sens étroit du terme, leur dévelop- pement traduit les pulsions, les tensions, les curiosités voire les obsessions qui ont excité l'imagination, aiguisé le sens créatif et produit, tant sur le plan littéraire que plastique, des œuvres que l'on ne peut ignorer.

Page 12: Collection dirigée par Hélène Fréchet

PREMIÈRE PARTIE Les fondements de la culture occidentale

au XII siècle

La diversité socioculturelle de l'Occident L'aristocratie Société seigneuriale et aristocratie laïque L'histoire sociale du XII siècle est actuellement en plein renouvellement

et fait l'objet de débats scientifiques passionnés. Pour ce tableau très som- maire, nous avons préféré nous en tenir au schéma traditionnel, celui qui est développé dans la plupart des grands manuels, mais nous proposons au lecteur désirant approfondir cette question de se reporter aux travaux les plus récents des professeurs E. Magnou-Nortier et D. Barthélemy.

Tout d'abord, la société seigneuriale domine le monde rural. « Nulle terre sans seigneur » ou presque. La terre et les paysans sont intégrés dans un système dominé par l'aristocratie, laïque et ecclésiastique, dans le cadre de la seigneurie foncière. C'est ensuite un modèle d'organisation sociale par le biais d'un réseau hiérarchisé fondé sur des liens de dépendance d'homme à homme. Un guerrier à qui un puissant confie une terre en fief est seigneur des paysans qui y travaillent mais il est vassal de son bienfaiteur.

Nobiles signifie étymologiquement hommes notables, qui sortent du commun. Avant 1200, c'est davantage une qualité qu'une distinction juridi- que clairement déterminée. La noblesse se transmet par le sang (« on naît noble ») mais « est noble celui qui est réputé comme tel » : l'attitude physi- que, le mode de vie et l'application d'un code de comportements définissent aussi le noble. On distingue généralement trois strates. Au sommet, la haute noblesse des princes et des comtes est issue de la vieille aristocratie des temps carolingiens. Ensuite, les châtelains ou seigneurs ont une origine obscure. Enfin, les chevaliers, milites, sont, à l'origine, de simples auxiliaires armés de la seigneurie. A partir de 1030, ils entrent dans les réseaux vassa- liques des seigneurs et accèdent peu à peu à la noblesse.

L'exemple du Mâconnais permet de préciser une composition sociale qui n'est guère différente dans les autres régions françaises ou en Angleterre. Tout d'abord, la haute aristocratie y regroupe dix à vingt famil- les de châtelains ou barons. Ces castellani sont seigneurs ruraux et urbains. Ce sont les maîtres des paysans à l'intérieur d'une circonscription où ils exercent des droits de justice et de commandement (ban) : mandement, dé-

1. G. Duby, La société aux XI et XII siècles dans la région mâconnaise, Paris, EHESS, 1982.

Page 13: Collection dirigée par Hélène Fréchet

troit, potée ou ferté. Maîtres également des ministériaux, ils gèrent et protè- gent des exploitations tout en étant suzerains de dix à vingt lignages cheva- leresques. Leur château est le centre de la vie mondaine. Ce groupe est dé- pensier par son train de vie fastueux, par les frais d'administration et par sa générosité (à ses chevaliers, aux églises). Ensuite, les chevaliers sont assez nombreux (environ une famille par paroisse). C'est un groupe héréditaire assez fermé au XII siècle et impénétrable aux ruraux. Le rite d'initiation est l'adoubement. Ces milites sont attachés à la fois à leur lignage et à leur sei- gneur par les liens vassaliques. Sans pouvoir politique réel, ils habitent des maisons-fortes dans les villages et sont à la tête d'une exploitation foncière. Cette dernière permet à une famille chevaleresque de vivre et d'assurer les services dus. Au XIII siècle cependant, se pose le problème des fortunes : partages successoraux et dons parfois trop importants aux monastères rui- nent ou affaiblissent certaines familles. Leur fonction principale est guer- rière. Enfin, les ministériaux détiennent une autorité déléguée par les sei- gneurs. Ils sont souvent serfs, et leur pouvoir provient de leur office, sorte de fief héréditaire. Leurs ressources sont assurées par des terres à statut particulier et privilégié. Au XII siècle, on constate un effacement des servi- tudes qui se transforment en liens de fidélité ; parallèlement, ce groupe montant (sergents, prévôts, gruyers) s'enrichit.

Chevalier et vassal dans la littérature du X I I siècle :

l'exemple d 'Aiol

L'épopée anonyme d'Aiol, écrite peu avant 1173, développe trois thèmes principaux qui sous-tendent trois idéologies.

L'idéologie vassalique s'inscrit dans l'histoire même du roman. Le roi Louis, mal conseillé par son entourage de parvenus, a chassé de ses fiefs le duc Élie, sa femme et son fils Aiol. Élevé en exil et misérablement, ce der- nier ignore tout des usages aristocratiques. Mais il a hérité de son père la grandeur d'âme, la vaillance, la piété, le sens de la justice et de l'honneur. Aiol demande à son père de l'adouber et de lui donner son vieux cheval, ce qui marque l'importance de cet animal dans ce groupe de la société. Il part pour la cour de France afin de réhabiliter son père aux yeux du roi et pour lui faire restituer ses domaines. Il est alors engagé comme chevalier dans une lutte contre un seigneur révolté, le comte de Bourges. C'est dans cet épisode que s'affirme la double fidélité vassalique et lignagère. En effet, Aiol combat le comte de Bourges sans connaître son identité (c'est son cou- sin) ni la raison de sa révolte (l'injustice commise par le roi envers Élie). Lorsqu'il l'apprend, notre héros promet de libérer le comte en payant sa rançon. Aiol triomphera de tout et le roi rétablira Élie dans tous ses privilèges.

1. J. Flori, « L'idéologie aristocratique dans Aiol », Cahiers de Civilisation Médiévale, n°107, juillet- septembre 1984, p. 205-215.

Page 14: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Cette aventure, dans laquelle le héros a restauré l'ordre ancien perturbé, témoigne du conservatisme de l'ordre social établi et de l'idéal d'un roi-su- zerain. Aiol est bien le porte-parole de l'idéologie vassalique lorsqu'il rap- pelle au roi ses devoirs de suzerain : Ne devès pas vos homes mal baillir / Ains les devès aidier et maintenir / Et tenir à droiture grans et petis

Le roi idéal prôné par Aiol apparaît comme un personnage puissant grâ- ce à ses barons. Le plus souvent lointain, il représente le royaume qu'il est chargé de défendre par l'intermédiaire de ses vassaux. Il s'agit bien de la re- vendication d'une alliance entre la royauté et l'aristocratie par le biais de la vassalité.

Les nombreuses allusions et références à la noblesse et à ses vertus pro- posent une idéologie aristocratique qui repose sur trois points fondamen- taux : le détachement vis-à-vis de l'argent, la vaillance et la naissance, où intervient l'importance du lignage. Lorsqu'Aiol recommande à ses écuyers de se comporter vaillamment dans la bataille, ceux-ci répondent qu'il n'a rien à craindre car ils sont preudons par hérédité : Bien nous vient de linage que cascun soit prudom.

La qualité de la naissance ne peut pas passer inaperçue. Elle confère une dignité, une allure particulière qui transparaît même dans les circonstances les plus défavorables. Géralme, un hôte d'Aiol, pressent qu'il est de haut li- gnage : son cœur le lui dit, c'est là un signe qui ne trompe pas. Par ailleurs, Aiol possède, par naissance, toutes les vertus de sa race, en particulier l'aptitude au combat qui est aussi un moyen d'élévation de niveau de vie pour les no- bles pauvres. Ce sens de la qualité nobiliaire entraîne chez ceux qui la pos- sèdent une certaine manière de se comporter, principalement envers leurs pairs. Cela se voit bien à travers la question de l'hospitalité. Lorsque notre héros, hébergé par Géralme, lui propose le peu d'argent qu'il a, celui-ci répond : Onques nel fist mes peres ne le fist mes ancestres / S'il hebergea franc home ne chevalier honeste, / Que la nuit li vendist ne ostel ne heberge.

L'idéologie chevaleresque réserve aux seuls fils de nobles, au moins par la mère, l'accès à la chevalerie qui n'est d'ailleurs généralement conféré que par un noble, lui-même chevalier. Tous les cas d'adoubement comportent comme élément essentiel le don des outils de travail du futur chevalier : le cheval, le haubert, le heaume et l'épée. Aiol est adoubé par son père qui lui donne l'épée et la colée puis le revêt de tout l'équipement. C'est seulement ensuite qu'Aiol, tout armé, entend la messe : Si a l'enfant Aiol messe chan- tée ; / Aiols trestout armés l'a escoutée.

A chaque fois, l'adoubeur fournit à l'adoubé tout ce qui lui est nécessaire pour combattre en chevalier, ce qui implique, en retour, un service compa- rable au service vassalique. Le prix des armes et des chevaux suffit à expli- quer l'importance de ce rite de passage.

Cette triple idéologie laisse complètement de côté le monde rural et, dans une grande mesure, l'Église. Elle assigne à la bourgeoisie une fonction et une place nettement délimitée. Ce groupe est utile quand il commerce mais

Page 15: Collection dirigée par Hélène Fréchet

devient nuisible et usurpateur quand il s'attribue des fonctions que l'auteur juge spécifique de l'aristocratie : la guerre (par exemple, les contingents des communes urbaines), la justice et le conseil (par exemple, les mauvais conseillers du roi Louis).

Le monde des clercs et des religieux Clercs et religieux sont intégrés dans le système de production. Ils vivent

d'un certain prélèvement sur le produit foncier qui est à la fois général (les dîmes) et individuel ou collectif (les seigneuries) ; ils vivent aussi partielle- ment de redistributions sous forme de « salaires » (messes, enterrements, mariages, baptêmes) et de dons. Ils participent à la production artisanale (scriptoria, ateliers monastiques) et rurale (encadrement des travailleurs de la terre). Ils rendent des services dans les domaines de la santé (pour les malades et les pauvres), de l'éducation et de l'administration.

C'est un monde riche, de privilégiés, et nombreux. En Angleterre, au XIII siècle, il y a 9 000 paroisses (soit environ 40 000 clercs), 340 monastères de moines (soit environ 6 000 moines), 220 monastères de chanoines régu- liers (soit environ 3 500 chanoines réguliers), 150 monastères de moniales et de chanoinesses (3 500) et 200 monastères de mendiants (5 000 frères, aux- quels il faut rajouter environ 600 moines dans les ordres militaires). Avec le personnel des hôpitaux, on arrive au chiffre de 65 000 individus, ce qui représente 1,8 % de la population totale mais 4 % de la population adulte et 6 à 7 % de la population adulte masculine.

Deux tendances partagent inégalement le monde des religieux en parti- sans de la vie solitaire (anachorètes, ermites, reclus) et en moines qui vivent dans une communauté (vie cénobitique) avec un groupe mixte, celui des Chartreux. La vie des religieux est réglée. Les moines suivent la règle de saint Benoît soit sous son interprétation large (les Clunisiens, par exemple), soit sous son interprétation stricte (les Cisterciens, par exemple). Les cha- noines réguliers suivent la règle attribuée à saint Augustin. Des règles par- ticulières s'appliquent à l'Ordo Fratrum (essentiellement les Franciscains), aux Templiers et Hospitaliers ainsi que, dans une certaine mesure, aux Chartreux.

Les futurs religieux subissent un temps d'entraînement, le noviciat, qui est l'occasion d'une formation ascétique, disciplinaire et intellectuelle. Puis, ils prononcent le triple vœu de stabilité (demeurer attaché au monastère), d'obéissance (au supérieur) et de conversion des mœurs. Alors que les Bé- nédictins préconisent la pauvreté individuelle, les Franciscains et les Domi- nicains vont plus loin en proclamant la pauvreté collective.

A côté des moines et des frères, existe tout un monde de religieux émules qui font aussi partie du paysage médiéval. Les ermites et les reclus vivent en solitaires pour les premiers et isolés pour les seconds. Les béguins et bé- guines sont de pieux et pieuses laïcs très bien implantés en Flandre. Ils vi-

Page 16: Collection dirigée par Hélène Fréchet

vent en communauté mais disposent de maisons particulières. Ils font de petits travaux domestiques, enseignent ou encore donnent des soins à do- micile. Le béguinage a des relations étroites avec les ordres Mendiants, en particulier les Franciscains, qui forment l'encadrement spirituel. Les Hospi- taliers et Hospitalières constituent le personnel des hôpitaux et obéissent à une règle souvent locale dans laquelle la piété joue un grand rôle.

Les clercs sont intégrés dans une hiérarchie stricte qui s'est précisée avec la réforme grégorienne. Le pape, successeur de saint Pierre, prince des Apôtres et vicaire de Jésus-Christ, revendique la primauté sur tous les chré- tiens. Il est aussi le patriarche d'Occident. Pour gouverner l'Église, il dispo- se d'un collège de cardinaux désignés par lui. Titulaire d'une dignité, le car- dinal est en fait intégré à la hiérarchie ecclésiastique : il est cardinal-évêque (de l'un des diocèses des États pontificaux), cardinal-prêtre (de l'une des églises paroissiales de Rome) ou cardinal-diacre (de l'une des églises suc- cursales de Rome). De même, le titre de primat est honorifique puisqu'il s'applique à un archevêque : celui de Tolède comme primat d'Espagne ou celui de Cantorbéry comme primat d'Angleterre. La primatie représente en général une « église nationale » et regroupe plusieurs provinces ecclésiasti- ques. Ce sont les archevêques qui sont à la tête de ces provinces. Ils portent le pallium, sorte d'écharpe, conféré par le pape. L'archevêque est également chef de l'un des diocèses de sa province, comme n'importe quel évêque.

Ce dernier constitue l'ossature même de l'Église séculière : c'est le dépo- sitaire de l'autorité pontificale. Il dispose du pouvoir spirituel dans le monopole de la transmission apostolique : il confère des sacrements impor- tants comme la consécration des églises ou la vérification des reliques. L'évêque possède également le magistère intellectuel : c'est lui qui surveille l'instruction laïque, qui éduque les clercs de son diocèse, qui, seul, peut permettre aux clercs de prêcher. Il a enfin une autorité de juridiction : il légifère dans son diocèse par constitutions et synodes, où il promulgue des statuts. Il circonscrit et crée les paroisses, fait construire les églises. Les prêtres lui doivent un serment d'allégeance et c'est le juge suprême dans les affaires spirituelles. Pour gouverner son diocèse, il dispose d'auxiliaires. Tout d'abord, le chapitre des chanoines séculiers attachés à la cathédrale récite les prières qui rythment les heures canoniales. Il est dirigé par un doyen élu par ses pairs et comprend des offices particuliers comme ceux de collâtre (ou écolâtre) qui surveille l'école cathédrale, de chancelier, de chantre ou de trésorier. L'archidiacre est, à l'origine, nommé par l'évêque comme chef des diacres chargé des aumônes et de l'éducation ; son rôle grandissant, il devient tantôt une sorte de vicaire général de l'évêque, tantôt le responsable d'une subdivision du diocèse. L'official est le chef du tribu- nal épiscopal. Enfin, deux laïcs interviennent dans ce gouvernement : l'avoué, protecteur du temporel épiscopal et le vidame, représentant de l'évêque dans les affaires temporelles.

Page 17: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Le dernier échelon, celui de la paroisse, est représenté par le curé. La cure est un bénéfice mineur collatif. C'est le patron de la cure qui désigne le bénéficiaire pour l'investiture épiscopale.

Le peuple dans ses différents états Le monde paysan En Angleterre, les paysans forment la grande majorité de la société :

environ 90 % de la population totale avec, cependant, un léger recul entre 1180 et 1300. Les nobles ne représentent que 25 à 30 000 personnes sur un total de 3,5 millions d'habitants. De plus, les villes sont rares et peu peu- plées (seulement 12 de plus de 10 000 habitants). L'Angleterre est, en effet, plus faiblement urbanisée que la France du Nord ou l'Italie.

Au XII siècle, une petite minorité de paysans travaille sur la réserve domaniale. Eux seuls sont des non-libres. Les autres sont considérés comme libres mais il y a plusieurs catégories :

- les sokemen : ces paysans échappant au régime seigneurial (ils n'ont que de faibles redevances à payer au seigneur et surtout ils ne font pas de cor- vées) sont minoritaires et inégalement répartis dans le pays (surtout dans l'Est et le Sud-Est) ;

- les villageois : ces paysans moyens habitant le village sont rattachés au système manorial et doivent donc des jours de corvées pour l'exploitation de la réserve ; ils sont très majoritaires ;

- les bordiers ou cottiers (environ 20 %) qui habitent en bordure du vil- lage ont été installés après les vilains et occupent des cottages (petites exploitations) ; un certain nombre d'entre eux serait des servi auxquels leur maître aurait accordé une petite terre.

Au XIII siècle, se produit une évolution importante. Les non libres for- ment certainement la majorité de la population rurale (environ 70 %). Il est probable qu'une grande partie des bordiers et des vilains a glissé dans la servitude dès la fin du XII siècle. Cependant, au sein de ces non libres de fait, on continue de distinguer les vilains et les natifs de sang qui sont les descendants des vrais non libres.

Cette évolution est liée à celle du régime manorial. Au XII siècle, il y a un recul de la réserve, comme sur le continent. Cette désagrégation est faite par les seigneurs qui transforment leur réserve en tenures et en afferment une partie. Les seigneurs avaient besoin de moins de corvées et ont voulu une commutation définitive de ces services en redevances annuelles. Ainsi, les vilains du XII siècle n'accomplissant plus de corvées, se sont considérés comme entièrement libres. Mais au XIII siècle, à la suite de transformations sociales, c'est la politique inverse. Les seigneurs ont repris leur réserve et ont même cherché à l'augmenter. Il leur a donc fallu de plus en plus de corvées qu'ils ont exigées de leurs tenanciers, les tribunaux publics étant plus favorables aux seigneurs.

Page 18: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Les vilains ont alors des charges extrêmement lourdes : personnelles et réelles, régulières et exceptionnelles. On peut distinguer trois sortes de vi- lains au point de vue économique et social :

— les paysans aisés qui possèdent entre 10 et 15 ha et qui sont considérés comme privilégiés (un peu plus de 20 %) ; ils ont une vie sobre et frugale mais profitent des surplus qu'ils commercialisent pour acheter des terres qu'ils font travailler par de petits tenanciers ou qu'ils louent en métayage à part égale ; ce sont de « petits seigneurs » en puissance qui ont des chances de pénétrer dans la Gentry ; ils ont souvent un rôle de prêteur et d'usurier ;

- le groupe moyen qui possède entre 3 et 5 ha (un peu plus de 30 %) et qui vit du travail intensif de ses propres terres ; en période de prospérité agricole, une famille de cinq personnes peut vivre normalement ;

- les pauvres, ou cottagers, possèdent de 1 à 2 ha et représentent environ 50 % ; ils ont d'autres moyens pour vivre, dans l'artisanat (cuir, bois, fer, tuile, textile) ou comme employés communaux (bergers) ; ils peuvent aussi travailler occasionnellement ou de façon continue sur les terres des riches (seigneurs ou paysans) pour la moisson, le fauchage des prés...

En France aussi, les paysans sont intégrés au système seigneurial. Vers 1120-1130, l'apparition d'un nouveau vocabulaire (homo de capite, homo li- gius, homo proprius, famulus, prebendarius, provendarius, tributarius) traduit une mutation. Dans certains villages, la majorité des familles est atteinte par le nouveau servage. Ce dernier est créé en même temps que se fortifie le régime seigneurial. Les gens soumis par certaines obligations de ce régi- me (taille, formariage...) sont considérés comme des non-libres. Ainsi, cer- taines charges lourdes et infamantes présument de la non liberté : il existe des terres de servitude ou des tenures serviles. La diffusion de ce nouveau servage est cependant très inégale et touche plus particulièrement la moitié sud de la France ; dans certaines régions, comme l'Ouest ou la Picardie occi- dentale, la classe servile a presque complètement disparu. Par ailleurs, à partir de la fin du XIIe siècle, certaines régions connaissent des affranchis- sements massifs liés à la fois à la volonté des seigneurs (profit et piété) et à la pression des paysans : Orléans (1180), Blois (1196), Châteaudun (1197)... Enfin, certains paysans obtiennent des seigneurs un certain nombre de pri- vilèges consignés dans des documents écrits qui sont les chartes de franchi- ses. Plusieurs modèles existent : celle de Beaumont-en-Argonne a été diffu- sée et adoptée par diverses communautés de l'est de la France. Par sa dé- fense contre l'arbitraire du seigneur, cette charte a une valeur juridique. Elle définit les droits de justice, les redevances, la liberté de vendre ou de trans- mettre les biens. Grâce à des tractations et à des pressions, elles font tache d'huile. Dans l'Ouest de la France, le mouvement des libertés rurales se dif- fuse parallèlement à un type d'habitat : le bourg peuplé d'artisans (foulons, maçons, forgerons, boulangers, merciers...). Quant aux hôtes, nombreux, ils sont privilégiés et implantés en dehors du régime domanial traditionnel. Ils

Page 19: Collection dirigée par Hélène Fréchet

sont attirés par divers avantages mais, si leur condition se répand, elle se détériore également rapidement.

Les milieux urbains La ville n'est pas un ensemble social uni et homogène. Par des phénomè-

nes de promiscuité et de concurrence stimulante, c'est un creuset sociologi- que qui renouvelle fortement le profil général de la société. La ville n'est pas une enclave particulariste : comparée au milieu rural elle développe des formes de mobilité et d'accélération dans l'évolution. Nous nous contenterons d'un tableau sommaire des structures sociales urbaines.

La noblesse urbaine (potentes) jouit de privilèges en justice, ne paie pas de taxes et se déplace en armes. Les recherches récentes tendent à montrer que le patriciat primitif est issu de la ministérialité : c'est dans la familia du seigneur, laïque ou ecclésiastique, que l'on a acquis richesse et puissance, en devenant les agents d'un pouvoir seigneurial qui trouve en ville un lieu pri- vilégié d'exercice du ban. Au XII siècle, c'est un groupe composite : fils de chevaliers, descendants d'officiers domaniaux, simples domestiques de la familia comtale ou épiscopale, parents de chanoines... Plusieurs traits les rassemblent pourtant : la possession du sol, la force militaire et une struc- ture familiale ample.

Le développement de la catégorie des marchands spécialisés dans le commerce interrégional et lointain est lié à l'essor général du XI siècle. C'est en Flandre que les marchands furent les plus nombreux et jouèrent très tôt un rôle évident dans l'histoire des villes. A côté, se développa au XII siècle la catégorie des maîtres des métiers. Leur fortune était moins im- portante dans la mesure où la production dont ils réglementaient les nor- mes, était destinée à la vente et où le contrôle de cette dernière appartenait aux marchands. Au XIII siècle, la bourgeoisie d'affaires (surtout les grands marchands) cherche à évincer l'ancien patriciat du gouvernement urbain, en s'appuyant parfois sur les corporations de métiers et la frange supérieu- re du « peuple » urbain.

Outre la fiscalité, la distinction entre « peuple gras » et « peuple menu » s'exprime souvent dans la sociotopographie urbaine. Dans toutes les villes, petites ou grandes, les artisans sont les plus nombreux. Ils se partagent pro- gressivement en deux catégories : ceux qui vendent eux-mêmes dans leur échoppe ou au marché ce qu'ils élaborent et ceux qui ne participent qu'à une étape de la transformation d'un produit. A partir du XII siècle surtout, ils sont organisés en métiers qui ne cessent de se multiplier avec la différen- ciation progressive du travail (environ 150 associations professionnelles à Paris au XIII siècle).

Les maîtres-artisans font travailler deux catégories de personnes. L'ap- prenti passe un contrat d'apprentissage devant les jurés du métier. Il paie

1. Voir G. Jehel et Ph. Racinet, La ville médiévale. De l'Occident chrétien à l'Orient musulman (V-XV siècle), Paris, A. Colin, 1996

Page 20: Collection dirigée par Hélène Fréchet

une somme pour être formé. L'âge moyen d'entrée en apprentissage se situe vers 12 ans. La durée de l'apprentissage est variable, plus il paie et moins de temps il reste apprenti (de 2 à 12 ans). Le valet ou compagnon passe un contrat avec le maître. Il est payé à la semaine, à l'année ou encore à la jour- née dans le bâtiment. La vie des ouvriers salariés est assez mouvementée et sa condition souvent précaire. Les engagements sont en général de courte durée et l'ouvrier est parfois obligé de se déplacer pour rechercher une meilleure fortune, ou tout simplement pour trouver du travail.

Enfin, il y a ceux que les historiens désignent sous le terme de « margi- naux », ceux qui ne sont pas intégrés : les étrangers et les juifs, les ouvriers temporaires (chantiers de cathédrales ou de palais...), la faune des grandes villes (bandits, prostituées...).

Malgré une tendance quasi inévitable à la fusion et à la standardisation des comportements sociaux, une discrimination effective subsiste entre les différentes composantes du corps social urbain : juridique et institution- nelle (participation ou non à la vie publique), fiscale, topographique.

Les héritages Dès le début du Moyen Âge, un renouveau s'est opéré dans le domaine

de l'enseignement sur la base de l'héritage considérable légué par l'Anti- quité, bousculé dans le monde gallo-romain et germanique par les fortes perturbations dues aux invasions, complètement remanié dans le monde ibérique par l'implantation des Wisigoths puis des Arabo-berbères qui don- ne au substrat chrétien une coloration originale. C'est surtout dans les espa- ces profondément imprégnés de culture gréco-latine que le passage se fait vers l'enseignement médiéval sans solution de continuité marquée.

Latin, grec, arabe, hébreu La tradition scolaire s'est maintenue en Italie du Nord par la persistance

d'une notabilité et d'un notariat lombard qui rédige des actes à l'intention de marchands, médecins, artisans qui exercent à Milan et à Pavie. L'ensei- gnement se donne essentiellement dans des écoles cléricales qui sont le plus souvent attachées à des églises. A Vérone, à Arezzo, à Lucques, à Florence, on a des mentions pour le VIII siècle de maîtres d'école qui sont des prê- tres, presbyteri magistri, dont le lieu d'exercice, la scola se trouve près du portique de la cathédrale. L'enseignement s'adresse, surtout dans les écoles ecclésiastiques, aux jeunes clercs. Il est donc d'un niveau qui dépasse le simple apprentissage de la lecture, de l'écriture et du calcul. Regroupés dans l'école épiscopale, le notariat, le scriptorium et l'école proprement dite forment un ensemble de lieux et de matières d'étude. Si on en juge par des inventaires de manuscrits des scriptoria attachés à ces écoles, l'histoire avec Isidore et le Liber Pontificalis, le comput avec des traités sur la division du

Page 21: Collection dirigée par Hélène Fréchet

temps, l'ars mumeri de Pythagore, l'Histoire naturelle de Pline l'Ancien, des ouvrages sur la technique de la peinture ou de l'orfèvrerie intéressant les apprentis appelés à travailler pour la décoration des églises sont au pro- gramme. On étudie aussi le chant qui tient une si grande place dans les offices. L'enseignement reste théorique, sommaire ou pratique puisque bien des clercs reconnaissent ne pas savoir écrire.

Pavie est un centre intellectuel de haut niveau depuis le VII siècle. L'éco- le épiscopale forme des lettrés qui rivalisent avec ceux de Ravenne ou de Tolède. Milan, Ravenne, Cividale au Frioul ne sont pas moins importants. Rome est redevenue un centre de culture important. On y pratique le grec aussi bien que le latin. Des moines grecs qui ont dû fuir Byzance sont installés sur l'Aventin. La schola cantorum est une pépinière des cadres pon- tificaux. Dès l'époque carolingienne, des écoles laïques y fonctionnent pour les enfants de l'aristocratie

Les évolutions politiques, et en particulier l'irruption de l'islam dans l'es- pace occidental du monde, renouvellent et enrichissent considérablement les acquis de la civilisation antique. La forte implantation de communautés juives, d'abord dans l'Antiquité dans le monde méditerranéen puis dans l'Europe du Nord, en Champagne, en Lorraine, en Rhénanie notamment, était depuis longtemps une composante du patrimoine culturel de l'Europe. L'Orient musulman beaucoup plus que l'Occident chrétien a su préserver le savoir antique. Ce qui a été sauvé de cette connaissance par les clercs caro- lingiens ne représente en vérité que bien peu de choses lorsqu'on le compa- re à l'héritage recueilli par les musulmans. L'œuvre essentielle de sauvegar- de du patrimoine littéraire et scientifique de l'Antiquité hellénique est due aux califes abbassides et plus particulièrement à deux d'entre eux, Harun al-Rashid (786-809) et al-Ma'mun (813-833), qui sont à l'origine de la fondation de la principale bibliothèque qui est aussi atelier de traduction du Moyen Âge oriental : le Bayt al-hikma ou Maison de la sagesse de Bagdad. Les œuvres antiques ainsi rassemblées puis traduites notamment sous l'autorité de grands savants de confession nestorienne comme Hunayn b. Ishaq se diffusèrent dans les siècles qui suivirent dans leur version arabe vers tout le monde musulman et notamment l'Andalus et à l'Ifriqiyya d'où elles at teignirent ainsi à par t i r du Xe siècle mais sur tout à part ir du XI I l'Occident chrétien. Les modes de diffusion sont des plus divers : la conversion de savants musulmans qui émigrent en Occident avec leurs manuscrits comme Constantin l'Africain, l'émigration vers le sud de la France des savants juifs persécutés par le pouvoir almohade plus intolérant envers les dhimmis, le mécénat des souverains siciliens envers des savants musulmans comme le géographe al-Idrissi qui vint s'installer à la cour de Roger II ou enfin la Reconquista qui permet à des bibliothèques arabes comme celle de Tolède de passer sous le contrôle chrétien.

1. Voir P. Riché, Éducation et culture dans l'Occident barbare VI-VIII siècle, Paris Seuil, 1962.

Page 22: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Les écoles de traduction Le transfert d u savoir antique et de la science arabe à l 'Occident au X I I

siècle s'est effectué essentiellement par l'intermédiaire d'ateliers de traduc- tion situés en Espagne et en Italie. Le rôle des États latins d'Orient dans cette transmission fut quasi inexistant ; la conservation du savoir n'était visiblement pas une préoccupation majeure des croisés qui s'empressèrent par exemple après la prise de Tripoli en 1109 de brûler la bibliothèque qu'avaient constituée depuis un demi-siècle les Ban 'Ammar, gouverneurs musulmans de la cité.

En Italie en revanche, et notamment dans les territoires contrôlés par la famille normande des Hauteville, l'intérêt pour la science antique et arabe ne se démentit pas durant tout le siècle. Ce transfert se fit par les hommes et par les livres que ceux-ci amenaient avec eux et traduisaient pour les souverains ou les institutions de la péninsule. Un précurseur en la matière fut Constantin l'Africain (t 1087), né sans doute à Carthage et ayant étudié la médecine en Égypte. Son arrivée en Italie dans le dernier quar t d u X I siècle est sans doute due aux contacts qu'il avait noués avec les princes normands de Sicile et d'Aversa. Il s'installa au monastère du Mont-Cassin avec les manuscrits qu'il avait emportés avec lui. Constantin ne donne pas le nom des auteurs qu'il traduit et il a fallu que la critique moderne se penche sur ces textes pour les identifier : on a ainsi pu reconnaître des tex- tes d'Hippocrate et de Galien ainsi que des ouvrages arabes très fortement inspirés du galénisme comme le Pantegni d'al-Majusi. Ces traductions ont été fortement critiquées du fait de la connaissance insuffisante du latin de Constantin l'Africain, ce qui rend ses traductions confuses et souvent fautives. Néanmoins, elles constituent indéniablement un premier apport du savoir médical oriental en Occident qui trouve avec la faculté de méde- cine de Salerne une diffusion quasi immédiate. Par ailleurs, Constantin l'Africain eut des disciples au Mont-Cassin originaire du monde musulman comme Jean Afflacius ou de l'empire byzantin comme Azo qui poursui- virent son œuvre de transmetteur entre Orient et Occident.

L'école de Tolède constitue un mode de transfert du savoir un peu diffé- rent. Elle n'est pas le fruit d'une émigration de savants d'Orient vers l'Occi- dent avec leurs manuscrits. Elle doit sa naissance à la Reconquista et notam- ment à un événement majeur de cet affrontement entre chrétiens et musul- mans : la prise de Tolède par le roi de Castille en 1085. La bibliothèque de la cité constituée à partir des souverains umayyades d'al-Andalus fut dans un premier temps préservée par les chrétiens puis quelques décennies plus tard exploitée par eux notamment grâce à l'initiative du primat d'Espagne, l'archevêque de Tolède Raimond (1126-1152). Il fut à l'origine du plus grand atelier de traduction de l'Europe chrétienne qui fonctionna essentiellement au XIIe siècle et qui sut attirer des savants de l'Europe entière. On y rencontre en effet des Anglais, comme Robert de Chester, qui traduit en latin le Coran et l'Algèbre d'al-Khawarizmi, ou encore Michel

Page 23: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Scot, qui travaille sur l'ouvrage astronomique d'al-Bitruji, qu'il fera connaître à Frédéric II lorsqu'il entrera à son service dans les dernières années de sa vie. Parmi les savants italiens venus à Tolède, on peut citer Platon de Tivoli qui traduisit de l'hébreu en latin l'œuvre de Savasorda traitant des équations du second degré ainsi que les œuvres astrologiques de Ptolémée. Cependant le plus illustre représentant de cette école, est aussi italien, en la personne de Gérard de Crémone (1114-1187) qui donne des traductions longtemps considérées comme définitives de l'Almageste de Ptolémée, de la Physique d'Aristote et surtout du Canon d'Avicenne qui fut enseigné jusqu'au XV siècle et même au-delà dans les facultés de médecine d'Europe occidentale. On peut à son époque véritablement parler de l'école de traducteurs de Tolède car, à l'instar de ce qui se pratiquait à l'école de Bagdad dirigée au IX siècle par Hunayn b. Ishaq, Gérard de Crémone dirigeait un groupe de traducteurs qui livrait une première version des œuvres en traduction, ensuite révisée par le maître.

Le rôle des juifs dans la transmission du sa voir A travers l'étude des Talmuds de Jérusalem (fin IV s.) et de Babylone

(fin V s.), les savants juifs ont, durant tout le Moyen Âge, porté un intérêt constant aux sciences. Ces deux ouvrages se penchent sur des problèmes comme celui du calendrier pour fixer les fêtes juives ou s'intéressent à la zoologie pour des questions de rituels afin de distinguer les animaux purs et donc consommables des animaux impurs. Cette connaissance sans cesse renouvelée durant le Moyen Âge atteignit sans doute son apogée dans le domaine médical, où le rôle des savants juifs fut essentiel dans l'entourage des souverains ainsi que dans le fonctionnement des facultés de médecine qui émergent aux XII et XIII siècles, comme Salerne ou Montpellier.

Maïmonide (1135-1204), de son véritable nom Moses b. 'Abd Allah, est sans doute le représentant le plus remarquable de cette lignée de médecins juifs. Il est en fait originaire d'Andalus où il fut l'élève du célèbre Averroès. Sous la dynastie almohade, plus intolérante vis-à-vis de sa communauté, il s'exila au Proche-Orient où il devint le médecin du sultan Saladin. Maïmonide comme la plupart des savants juifs de son époque fut influencé autant par la science talmudique que par les auteurs grecs ou encore les médecins arabes comme Rhazès. Par ailleurs, la médecine ne fut pas son unique centre d'intérêt : on le voit tour à tour s'intéresser à l' astronomie ou aux horloges solaires. Cependant les traités qu'il nous a laissés, écrits en arabe, sont avant tout des œuvres médicales portant essentiellement sur les relations entre maladies du corps et maladies de l 'esprit. Plusieurs de ses œuvres furent traduites au XIII siècle en hébreu et en latin par Armengaud Blaise et touchèrent ainsi l'Occident et notamment l'université de Montpellier.

Nombre de médecins juifs enseignèrent dans les facultés d'Italie comme Salerne ou du sud de la France comme Montpellier ou Avignon. Ils furent

Page 24: Collection dirigée par Hélène Fréchet

même souvent parmi les premiers enseignants de ces facultés et contri- buèrent grandement à leur développement enseignant parfois en hébreu comme cela nous est signalé à Salerne pour un certain Helinus. L'œuvre majeure de ces hommes fut, sans doute par le biais des traductions qu'ils ef- fectuèrent et, de l'enseignement qu'ils donnèrent, de transmettre la science arabe à l'Occident. La plus célèbre famille de ces médecins traducteurs est celle des Tibbonides, famille originaire de Grenade qui émigra à Lunel après l'arrivée au pouvoir des Almohades en Andalus. Les deux premiers représentants de cette famille, Samuel et son fils Moses, s'illustrèrent au même titre qu'Armengaud Blaise dans la traduction des œuvres de Maïmonide, la plupart des traductions qu'ils effectuèrent se firent de l'arabe en hébreu mais parfois aussi en latin. Les relations qu'ils avaient pu mainte- nir avec les communautés juives de l'Andalus leur permettaient de conser- ver un contact avec la science arabe. A la génération suivante, le plus illus- tre représentant de la lignée, Jacob connu sous le nom de Profeit Tibbon, devint vers 1300, doyen de la faculté de médecine de Montpellier.

En fait, comme le montre assez bien l'exemple de la famille des Tibboni- des, la plupart des traductions, au XII siècle notamment, s'effectuèrent avec la collaboration de deux personnages. A l'instar de ce qui s'était pro- duit au IXe siècle à Bagdad autour de la maison de la sagesse, où les œuvres de l'antiquité avaient souvent été traduites d'abord en syriaque puis du syriaque à l'arabe, dans l'Espagne du XII siècle, les traducteurs juifs servent souvent de premier traducteur rendant les textes arabes accessibles en hébreu ou en langue vulgaire tandis que le second personnage, chrétien le plus souvent, effectue la traduction en latin.

La part de l'Eglise Au XII siècle, l'Église apparaît plus riche, plus savante, plus indépen-

dante également car mieux séparée de la société laïque grâce à la réforme grégorienne qui aboutit, vers 1120, à une distinction plus nette du spirituel et du temporel On assiste aussi à un raffermissement de tous les degrés hiérarchiques de l'Église séculière sous l'autorité d'une Papauté libérée de la tutelle impériale.

La puissance et les richesses nouvelles acquises durant le XI siècle ont grandement servi à réaliser plus pleinement encore l'idéal monastique, et plus particulièrement clunisien, de magnificence liturgique. L'accomplis- sement de l'art roman s'effectue au début du XII siècle. Symbole, modèle et fleuron de cette architecture et de cette sculpture, l'église abbatiale de Cluny, la troisième (Cluny III), commencée en 1088, est presque achevée en 1120. A la sculpture désormais largement représentative, s'ajoute la pein-

1. Voir G. Duby et R. Mandrou, Histoire de la civilisation française, t. I, Paris, A. Colin, 1964, p. 96- 124.

Page 25: Collection dirigée par Hélène Fréchet

ture murale qui vient se développer sur les murs intérieurs des églises du Poitou, du Val de Loire, d'Italie et d'ailleurs.

L'enseignement par l'image : la façade de Saint-Trophime d'Arles

Page 26: Collection dirigée par Hélène Fréchet

La perfection romane ne sert pas seulement à glorifier la divinité, c'est aussi un moyen d'éducation du peuple, une pédagogie religieuse, comme nous le montre l'exemple du portail de Saint-Trophime d'Arles.

Le porche de la cathédrale Saint-Trophime d'Arles (cf. illustration), un des sommets de la sculpture romane de l'École de Provence, présente l'or- dre du monde tel qu'il est conçu et présenté au public du XII siècle par l'Église.

Son caractère dominant demeure ses attaches avec l'Antiquité romaine par ses formes architecturales (pilastres à cannelures des piédroits), par sa composition d'ensemble en arc de triomphe, par la perfection de son appa- reil, par sa décoration (palmettes, moulures), par les gestes et les draperies, jusqu'à certaines parties de l'iconographie (Hercule).

Tout paraît s'ordonner par rapport à la figure supérieure et centrale du Dieu de Majesté : les « meilleures places » se situant le plus près possible de la droite du Seigneur. Au-dessous, se déroulent plusieurs niveaux symboli- ques. Dans la frise supérieure (n°1 à 12), est développé le thème de la survi- vance de l'âme après la mort avec, à droite, les élus (n°5) entre le Pèsement des âmes (n°6) et les scènes de la Résurrection (n°7), et, à gauche, les dam- nés. La frise suivante (n°13 à 20) constitue le niveau de l'épopée divine avec l'histoire de l'Homme-Dieu : Annonciation, Nativité... Derrière la colonnade (n°21 à 30) se trouve le niveau intermédiaire des intercesseurs, les saints patrons de l'Église. Enfin, au plus près du « lecteur », le niveau inférieur (n°31 à 36) montre l'homme en proie au péché grâce à une iconographie qui récupère le paganisme antique.

Ce programme iconographique expose une image de la religion qui véhicule une angoisse, un sentiment de culpabilité mais aussi un espoir. C'est l'expression d'une « féodalité de l'âme » où les liens d'hommes à Dieu sont comparables à ceux d'hommes à hommes : le Dieu est un seigneur banal, donc justicier, entouré de ses serviteurs (les anges de la voussure) et de sa Cour (les saints).

Dans les pays du nord-ouest de l'Europe, plus précisément entre Nor- mandie, Picardie et Angleterre, une nouvelle technique de couverture, la croisée d'ogives, va renouveler l'esthétique et l'art religieux. L'art gothique localise d'abord son développement dans les villes. Les cathédrales et les collégiales urbaines remplacent peu à peu les foyers de culture qu'étaient les grands monastères ruraux.

Le rayonnement de certaines écoles capitulaires, comme celles de Chartres, Laon, Paris, s'affirme à partir de la fin du XI siècle. Ces foyers d'étude renouvelés attirent de plus en plus d'auditeurs. Les écoles s'organi- sent ; l'écolâtre s'adjoint des maîtres auxiliaires titulaires de la « licence » d'étudier. La concentration progressive des gens d'étude en quelques cen- tres privilégiés, l'apparition de spécialistes de l'enseignement devenus pro-

1. J. Sourris, Évocations de la Provence médiévale. L'église et la foi, CRDP Marseille, 1978.

Page 27: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Cette collection s'adresse aux candidats des concours externes et internes du CAPES et de l'Agrégation d'Histoire et Géographie. Présentant les aspects essentiels d'une question du programme, chaque volume peut être le point de départ de l'étude de ce thème et l'instrument de la révision généra- le avant les différentes épreuves. Il est aussi proposé des articles spécialisés, qui complètent les cours dispensés dans les universités.

Ces ouvrages sont également destinés aux enseignants et à toute person- ne que l'Histoire et la Géographie intéressent.

Éducation et cultures dans l'Occident chrétien du XII au XV siècle, après une définition de la culture, présente les facteurs sociaux, politiques et intellectuels qui la conditionnent. L'ouvrage analyse ensuite les aspects de la culture savante nouvelle qui se développe au XIII siècle et connaît une dif- fusion appréciable dans les milieux intellectuels : thomisme, droit, histoire, sciences, encyclopédies. Le volume n'oublie pas que tous les aspects de la vie quotidienne des clercs et du peuple appartiennent à la culture : métier, cui- sine, fêtes, instruction, qu'elle soit dispensée par les universités ou les « petites écoles », et même art de la guerre. Un chapitre original décrit les cultures parallèles, qui traduisent l'attitude envers la mort. Une partie très importante est consacrée à tous les domaines de l'humanisme, que favorise le mécénat pontifical, royal ou princier, et qui, en Italie surtout, annonce la Renaissance.

Page 28: Collection dirigée par Hélène Fréchet

Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement

sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle.

Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire qui a servi à la numérisation.

Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF.

La couverture reproduit celle du livre original conservé au sein des collections

de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

*

La société FeniXX diffuse cette édition numérique en vertu d’une licence confiée par la Sofia ‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒

dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.