Pour  citer  cet  article  :

Charon  (René),  L’assistance  des  enfants  anormaux.  Rapport.  Congrès  des  aliénistes  et  neurologistes  de  France  et  des  pays  de  langue  française.  XVIIIe  session,  Dijon,  août  1908,  Paris,  

et  classements  »,  p.  12-­19

L'assistance desenfants anormaux /

rapport présenté par M.René Charon,... ;

Congrès des aliénisteset neurologistes de [...]

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Charon, René (Dr). L'assistance des enfants anormaux / rapport présenté par M. René Charon,... ; Congrès des aliénistes et neurologistes de France et des pays de langue

française. XVIIIe session, Dijon, août 1908. 1908.

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II

DEFINITIONS, DESCRIPTIONSET CLASSEMENTS

AU POINT DE VUE CLINIQUE

On entend généralement par anormaux psychiques, ouarriérés. « tous les enfants atteints à des degrés diversd'infériorité ou de déficience intellectuelle, depuis l'idiotvégétatif jusqu'au simple débile qui confine à l'enfantnormal le moins bien doué (Jacquin), cl, à défaut de cri-tère uimtonio-palhologiquc, l'anormàlilé psychique ouarriération peut être définie, avec Rourneville, « un syn-drome morbide qui consiste en un arrêt de '.développe-ment congénital ou acquis des facultés intellectuelles,morales et all'ciiives, simple ou compliqué (paralysie,épilepsie, chorée, rachitisme, scrofule, sUrdi-mulitéetc),accompagne ou non de. perversion des inslincls ».

C'est Sauvages qui, le premier clans la littérature'médicale du xviu 11siècle, parait avoir décrit et tenté dé-classer les diverses formes'd'infirmités psychiques con-génitales. Dans sa Nosologia-mèthodica \\ en faisait legroupe Amentia, comprenant les ameutes, les démenteset les imbéciles.

Pinel et Fodéré, sous le terme général et nouveautYidiotisme, rangeaient Ions les degrés d'oblitération desfacultés intellectuelles et affectives, qu'un peu plus lardEsquirol divisait en deux grandes formes, lïnibécililé cll'idiotie.

Relhomme, dans son célèbre lissai sur l'Idiotie, cl à sasuite EciTUs, Eoville, Félix Voisin, reconnaissent, troisdegrés d'inibéeililé et deux degrés d'idiotie, et Dubois(d'Amiens), dans ses Nouvelles inductions philosophiques,divise « les idiots en trois classes et cela sans exception,à quelque variété des auteurs qu'ils appui tiennent, qu'ilssoient crétins, cagneux, imbéciles, capots,' colibcls,

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gahets etc. ». Dans la première sont compris les idiots,qui présentent le plus haut degré d'abrutissement et sontréduits à l'automatisme ; dans la deuxième, ceux qui nepossèdent que des instincts; le troisième comprend ceuxqui possèdent à la fois des instincts el des déterminationsraisonnables.

Rourneville a conservé dans ses descriptions, le termegénérique d'idiotie, avec les variétés: idiolie complète oudu ae degré, idiolie profonde ou du 1er degré, imbécililéproprement dite, imbécililé légère ou arriération intellec-tuelle simple, instabilité mentale simple, ou lice à l'inibé-cililé et à l'arriération.

Avec Magnan, Legrain, Thtilié, Régis, les anormauxpsychiques, constituent le groupe des Dégénérés infé-rieurs el avec Blin celui des Débiles mentaux. Solfierdans sa Psychologie de l'Idiot et de l'Imbécile, laissantde côté, connue nous, les simples d'esprit ou arriérés,classe les dégénérés en trois catégories, en prenantcomme critère syinplomalique, l'attention, qu'il lientpour la « clef de voûle du développement intellectuel » :l'idiotie absolue, caractérisée par l'absence complète ell'impossibilité de l'attention, l'idiotie simple (faiblesse etdifficulté de l'attention), l'imbécilité (inslabililéde l'atten-tion).

Depuis quelques années des essais de classement plusanalytiqucsonl été proposés par certains cliniciens. Groz-iiiann divise les enfants psychiqucmcnl anormaux encinq classes: i° les anormaux de naissance (idiots, imbé-ciles, fous criminels el pervertis moraux); a0 les anor-maux atteints d'anomalies congénitales (épileptiques,aveugles el soiirds-nuiels) ; 3° les anormaux atteints d'ar-rôl de développement : f\° les atypiques, déviés du typemoyen comprenant les névropathes el neurasthéniqueset les atypiques à développement relardé; 5* les pseudo-atypiques (maladies accidentelles, croissance trop rapide,éducation dillicile etc). Les trois premières classes cons-titueraient vraiment le groupe pathologique, dans lequelle traitement est beaucoup moins ellicace que chez lesatypiques, qui doivent être traités de bonne heure.

Dans ce travail, comme dans un certain nombre île plusrécents, se manifeste une tendance à distinguer dans,l'anormalllé psychique deux groupes distincts: le groupepathologique el le groupe atypique. Grozmann, cepen-dant, reconiiaîl pour l'un comme pour l'autre la nécessitéet l'utilité du Iruitcmctil médico-pédagogique, ce quiimplique pour lotis l'idée de maladie.

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En 1900, au Congrès des aliénistes et ncurologistes de-Rçiuics, le Dr Dide proposa une 'nouvelle' classificationdes maladies mentales, dans laquelle une classé spécialedes étals congénitaux comprend, sous le terme génériquelYAgnèsies psychiques, l'idiotie, l'imhécilité, la débilitémentale, la débilite morale el les obsédés impulsifs.

Le Df Decroly, dans un travail paru en igo5 dans leBulletin de la Société de médecine mentale de Belgique,critiquait les différentes classifications proposées jus-qu'alors : éliologiques, morphologiques, symploniolagi-queset mixtes, dont il montrait rinsullisance et l'obscuritéparticulièrement pour les formes légères de t'anorinalilémentale et morale. Il rcjeltail aussi bien la dégénéres-cence que Yarrièration cl Yanormalité, dont les descrip-tions et les classements sont -disparates et insuperposa-bles.

Reconnaissant la supériorité du critère psychologique,il admettrait (pie tous ces états sont des irrégularités,dues surtout à des influences de milieu. Lesirrégulieessediviseraient en irréguliers pour causes intrinsèques etirréguliers pour causes ..extrinsèques. Dans les premiersprendraient place les irréguliers des fonctions végétativeset les irréguliers des fonctions de relation. Ces derniers,qui seuls nous intéressent ici, se subdiviseraient en irré-guliers des sens, des mouvements, irréguliers 'mentauxcl'affectifs ; les irréguliers extrinsèques étant ceux qui nesont atteints d'aucune anomalie personnelle el dont l'irré-gularité est seulement sous 1'iiilluence du milieu familial,scolaire ou social.

Déjà en 190a, au cours d'un article de la Hevuede l'sj'-chiatric sur les débilités mentales, le 1)' Rlin déploraitles inconvénients d'une terminologie, qui se fait de plusen plus complexe et demandait qu'un Congrès ou unesociété savante autorisée fui appelée à arrêter un classe-ment méthodique des enfants psyehiqueinenl anormaux.

Dans un livre récent sur les Enfants anormaux, d'al-lure semi-officielle, et sous le couvert d'une très liante ettrès estimée personnalité du monde philanthropique,MM. Billet et Simon font état de celte confusion termino-logique reconnue par les spécialistes, pour démontrerTerreur des doctrines classiques et-l'inanité de; l'oeuvredes aliénistes dans l'assistance des anormaux psychiques.Raillant légèrement les médecins aliénistes —n'oublionspas que l'un d'eux esl aliénistc —MM. Binet et Simonrapportent qu'ils ont comparé plusieurs centaines dediagnostics, portés sur les mêmes enfants pat 1 les méde*

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cins de Sainte-Anne, de Ricèlre, de la Salpèlrière et deVaucluse cl que. « sans exagération ils se ressemblaientautant que si on les avait tirés au hasard d'un sac », etils proclament que, pour sortir de cette confusion, ilsuffit d'adopter les conventions suivantes, qu'ils consi-dèrent connue la base d'une doctrine nouvelle « beaucoupplus rapprochée de la vérité » :

Les anormaux psychiques se divisent en deux catégories : lesarriérés et les instables. Les arriérés (ceux qui nous intéressentici) se subdivisent eux-mêmes en idiots, imbéciles et débiles.

Est idiot, tout enfant qui n'arrive pas à communiquer par la pa-role avec ses semblables.

Est imbécile, tout enfant qui n'arrive pas à communiquer parécrit avec ses semblables.

Est débile, tout enfant qui sait communiquer avec ses semblables

par la p-irole et par écrit, mais qui montre un relard de deux outrois ans dans le cours de ses éludes.

MM. Rinet et Simon, forts de ce que nous n'avonspoint de connaissances précises sur les lésions palhogno-moniques des divers états d'arriération psychique, s'élè-vent contre les prétentions médicales qui rapportent eesétats à des maladies définies. — « Nous nous en tenons,disent-ils, à la formule, provisoire suivante : l'arriérationet l'imbécilité sont des états mentaux particuliers, qu'ilest fréquemment impossible de rattacher à des états pa-thologiques déterminés. » Par ailleurs, ils déclarent :« L'anormal ne ressemble nullement à un normal ralentiou arrêté dans son développement; il n'est pas inférieuren degré, il esl autre. » Et plus loin : « L'anormal pré-sente te plus souvent trois caractères : i° un relard de dé-veloppement ; a0 un défaut d'équilibre : 3° un trouble àcachet pathologique des facultés mentales. »

Les aliénistes ne seront pas seuls à relever l'obscuritéet la contradiction de ces formules et à estimer qu'unedoctrine qui établit qu'un enfant est idiot pendant tout letemps qu'il ne sail pas parler, ou imbécile pendant toutle temps qu'il ne sail pas écrire et conséqueinment, cessed'être idiot ou imbécile le jour où il parvient à parler ouà écrire, peut être tenue pour nouvelle et originale, maisqu'elle n'est point de nature à jeter une vive lumière dansles questions qui se rapportent à la clinique, ni au trai-tement, ni même à la psychologie des enfants anormaux.

En vérité, ce qui se dégage du livre de MM. Binct etSimon, ce n'est pas une doctrine, mais une thèse, laquelle

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peut se résumer : L'anormalilé psychique comprend deuxdegrés, le "premier, l'arriération duc à des lésions anato-iniques définitives.contre lesquelles il n'y a rien à faire,n'est justiciable d'aucun Iraileineiit et ne relève plus dela médecine; le deuxième, l'instabilité, état particulier,non pathologique, appartient exclusivement à la pédago-psychologie et non à la médecine. En l'étal actuel, c'estmoins qu'une thèse, c'est une hypothèse à laquelle s'op-pose jusqu'à nouvel ordre cette opinion qui a pour ellel'expérience et le temps : L'étal de santé, aussi bien aupoint de vue psychique qu'au point de vue physique, c'estl'état normal ; l'anormal psychique à tous les degrés esldonc un malade qui relève de la médecine et qui doit êtretraité médicalement..

Sans doute, il est fâcheux que la classification desanormaux psychiques ne soit pas cri fermée dans un cadreprécis et dans une terminologie rigoureuse. Mais, à toutbien prendre, et malgré une synonymie

-inévitable* ellen'est point tellement confuse qu'il soit impossible de s'yreconnaître. Les anormaux psychiques sont, parles mé-decins, qualifiés débiles, arriérés ou dégénérés, selon laprédominance du critère considéré : symptômes, évolu-tion ou ctiôlogic. Il suffirait, peut-être, de renoncer, dansces appellations génériques, au mot débiles, et de diffé-rencier |es mots arriérés cl dégénérés, pour obtenir, dansla classification tout entière, une fixité terminologiqueacceptable par tous.

Les anormaux psychiques forment deux grands groupesentre lesquels la transition est difficile à établir au pointde vue syinplômalique, mais qui se différencient licite-ment par le. caractère des réactions. Les uns, les moinsatteints,-sont el restent sociables, el sont susceptiblesd'être éduqués parties moyens spéciaux dans la vie ordi-naire ; on pourrait les désigner, et eux seulement, par leterme Arriérés, ainsi que vient de le proposer la Com-mission de l'instruction publique, chargée d'étudier le pro-jet de loi relatif à leur enseignement ; les autres, les plusmalades, les insociables, dont le traitement comporte desmesures de surveillance et de restriction, seraient appe-lés Dégénérés, ainsi qu'il est déjà fait par des aliénistesdes plus autorisés.

Le groupe des dégénérés pcul se diviser en 'deuxclasses :

1° Les imbéciles, qui jouissent de toute la gamme desfacultés de relation, dont les anomalies afiatoino-riiorpho-logiques sont peu accentuées, liniis dont les facultés psy-

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chiques, soit dans la sphère intellectuelle, soit dans lasphère morale, soit dans la sphère ell'cclive, présententdes troubles quantitatifs cl qualitatifs dont le caractèreest la forme lacunaire.

a» Les idiots, qui sont privés de tout ou partie des fa-cultés de relation, dont les anomalies analomo-niorpho-logiques sonl plus ou moins accentuées et généralisées eldont les facultés psychiques présentent des troubles quan-titatifs cl qualitatifs à forme globale.

Chacune de ces deux classes comprend i\cux genres,dilférenciés par le degré de gravité de leurs caractèrespathologiques, el chaque genre se divise en variétés,d'après la prédominance des troubles qualitatifs chez lesimbéciles ou des causes éliologiques chez les idiots. Ondistingue ainsi chez les imbéciles du tet degré, selon queles lacunes intéressent surtout l'attention, la réflexion,rall'cclivité ou la volonté, les instables, les indisciplinés,les pervers; chez les imbéciles du 2e degré, les impulsifs,les amoraux, les apathiques; chez les idiots du /"" degré,les idiots hydrocéphales, microcéphales el inyxoédénia-tcux : chez les idiots du ae degré, les idiot congénitaux etles idiots par lésions acquises.

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Ariiérés.....

I [ Imbéciles du ( jns1t.aM,'f/\ l-detti*. Indisciplinés.]

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I Imbéciles. <I J t i • -i„ i„ ( Impulsifs.1 / IniliiH'iles ou \ , t1 F o- u„>4 Amoraux.1 [ z degré. / ..... \ Apathiques.MMVKflfe l I1 [ ( Hydrocéphales. \I i Miots du I" degré ! Xlicrocéphnle.s. jI 1 ( Mv.xoudéinateux.I Idiols. (I j | Congénitaux par

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AU POINT DE VUE DES MODES D'ASSISTANCE

La connaissance des degrés de sociabilité, d'cdueabilitéet de curabilité, qui découle des caractères cliniques, con-duit à la détermination des modes d'assistance et de trai-tement médico-pédagogique pour chacune des variétésd'enfants psyehiqucnicnl anormaux.

Au premier échelon de l'anonnalité, les arriérés, dontles travaux récents du Comité girondin de l'Allianced'hygiène sociale et du Groupe régional lyonnais pourl'étude et la protection de l'enfance anormale, ont montrél'importance numérique,'dont le régime scolaire a faitl'objet de remarquables études du docteur Manheimer-Gontez dans la Revue pédagogique, de M. Baguer dansla Hernie philanthropique, du professeur Régis dans unRapport à la municipalité de Bordeaux— et dont unrécent projet de loi détermine les modes d'éducation —forment le groupe des anormaux d'école (Régis).

A l'autre extrémité de l'échelle des anormaux, les idiotsdu deuxième degré, définitivement insociablcs et incura-bles, compliqués ou non de troubles névrosiques ouparalytiques, relèvent de l'assistance pure cl simple, dansdes établissements à caractère d'hospice. Ce sont lesanormaux d'hospice ou d'asile (Régis).

Entre ces deux extrêmes sont les imbéciles du premieret du deuxième degré, et les idiots du premier degré dontle double caractère est l'insociabilité avec perfectibilité,et à qui doit être assuré, avec l'assislanec, le traitementmédico-pédagogique. Ce sonl les anormaux d'hôpital.

Dans ce dernier groupe, l'observation et les résultatsdu traitement conduisent à la détermination de deuxcatégories nouvelles : i°ceux qui d'emblée ou progressi-vement manifestent des tendances vicieuses et des per-versions graves, incorrigibles par les moyens de douceur,susceptibles de corrompre leur entourage, cl justifientl'application d'une surveillance et de méthodes de redres-sement spéciales : ce sont les anormaux de maison deréforme (Bégis) ; — 2" d'autres sur qui le traitement estresté impuissant ou a produit tout son clfet utile cl qui,tout en restant hisocîablcs, peuvent être occupés, uldi-ses sotts une surveillance moins étroite et avec la jouis*sauce d'une libellé relative : on petit les désigner sous lenom iYanormaux de colonie.

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Classement par modes d'assistance des enfantspsychiquement anormaux.

Arriérés anormaux d'école jan0lmaux J* basses spéciales.

( — d école de perfectionnement.anormaux d'hôpital.

Dégénérés anormaux médicaux ]~ d'hospice.

j — de colonie.— de maison de réforme.