9 choses que vous ne savez (sûrement) pas sur l'origine de la dette

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9 choses que vous ne savez (sûrement) pas sur les origines de la dette … …et que vous découvrirez dans :

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9 choses que vous ne savez (sûrement) pas sur les origines

de la dette …

…et que vous découvrirez dans :

L’argent virtuel n’est pas nouveau, au fait, c’est même l’origine de la monnaie

En effet, la monnaie a été inventée en 600 avant JC, mais les lignes de crédits, les bâtons de pointage (Cf. photo) et les taux d’intérêts composés sont eux, apparus vers 3500 avant JC. Pour une grande partie de l’histoire humaine, la monnaie n’était qu’un outil de comptabilité qui n’était pas utilisé pour acheter et vendre des biens. L’argent devient alors un moyen de calcul des crédits et des dettes. L’instrument de calcul des dettes le plus commun dans les temps anciens était le « bâtons de comptage » : une pièce de bois entaillée pour indiquer les sommes dus, que l’on cassait en deux parties par la suite. Dans l’Angleterre médiévale, la partie conservée par le créancier était appelée « Stock » tandis que le débiteur gardait le « Talon » (un peu comme avec les chèques d’aujourd’hui).Les « stocks » passaient de mains en mains, et devenaient, de fait de l’argent. Bien sûr ils étaient impossibles à contrefaire car jamais deux bâtons ne se cassent de manières identiques.Le terme grec pour ces entailles est « symbolon », d’où le mot français « symbole » dérive. En Chine, ce même type de bâton était appelé « fu », et signifie aussi et encore « symbole ».

Le marché et la monnaie sont apparus comme des effets secondaires aux opérations militaires des gouvernants

Et oui : si les systèmes de crédit a si bien servi depuis des milliers d'années, pourquoi la monnaie fut-elle créer ? Le consensus des historiens est : pour payer les soldats. Originellement c’était eux qui étaient le plus susceptible de parcourir de grandes distances avec des morceaux d’or et d’argent, à la recherche des bonnes choses de la vie, et – étant lourdement armés et itinérant – étaient les dernières personnes au monde à qui un marchant jugeait bon de faire crédit. Aussi, les dirigeants ont réalisé qu’ils avaient simplement à normaliser les morceaux de métal, y apposer leur sceau et les donner aux soldats. Et puis ils ont exigé de tous leurs sujets de leur payer des taxes avec cette monnaie, ils avaient alors trouvé le parfait moyen de forcer les habitants à nourrir et supporter la charge de l’armée. En faisant cela, les marchés impersonnels étaient nés. Cependant, pour une grande partie de l'histoire humaine, ces marchés ont eu tendance à exister principalement aux côtés des armées - les gens ordinaires ont continué à mener leurs activités quotidiennes principalement par le crédit.

Pour éviter les crises sociales, les rois sumériens amnistiaient périodiquement toutes les dettes, il s’agissait alors

d’«effacer les tablettes »

Les emprunts à taux d’intérêt remontent à l’aube de l’histoire mésopotamienne, et ils ont rapidement créé d’énormes problèmes. Les fermiers pauvres empruntaient aux marchands et aux fonctionnaires et tombaient dans l’incurie, voyant leurs vignobles, moutons et éventuellement leurs femmes et leurs enfants enlevés comme remboursement de la dette. En conséquence, un grand nombre prenaient la fuite, rejoignant les groupes semi-nomades sur les bords du désert. Face au risque de crise sociale, les rois sumériens ou babyloniens annoncaient périodiquement des amnisties générales. Il s’agissait d’ « effacer les tablettes ». Toutes les dettes de consommation étaient déclarées nulles (les dettes commerciales n’étaient pas touchées), les terres revenaient à leurs propriétaires d’origine et les otages rentraient dans leur famille. D’ailleurs, le premier mot « liberté » connu dans toutes les langues, le sumérien amargi, signifie littéralement « retour à la mère » – sans doute parce que tous les enfants gardés comme payement de la dette étaient autorisés à rentrer chez eux.

Notre tradition démocratique et constitutionnelle a été largement le fruit de rebellions contre la dette.

En Grèce et dans la Rome antique, les premiers conflits dont nous avons connaissance ont eu lieu à propos de la dette. Plutôt que de fuir, les roturiers endettés étaient plus à même de se révolter – ou, dans le cas de Rome, de se retirer en dehors de la ville en menaçant de faire défection en masse, tant que les patriciens ne répondaient pas favorablement à leurs requêtes. Les réformes de Solon (590 av J.C.) – qui ont conduit les Athéniens sur les chemins de la démocratie, avec son délicat équilibre des pouvoirs – étaient une réponse aux demandes d’allègement de la dette. Mais les anciennes cités-état n’ont jamais été disposées à suivre l’exemple du Moyen-Orient d’annuler entièrement les dettes. Ils tendaient plutôt à penser que les dettes à rembourser étaient une responsabilité de l’ordre du sacrée.

Les grandes religions et philosophies ont commencé par rejeter l’idée que la dette devait être la base de la morale.

La dette ayant été, de tout temps, au cœur du débat politique, il n’est pas étonnant que les grandes religions et les textes philosophiques de l’Antiquité aient dû composer avec. Les mots « dette » et « péché » en Hébreu, Sanskrit et Araméen étaient en fait les mêmes. Dans tous les cas, la conclusion est que toute morale qui se résume à payer ses dettes est insuffisante. Le « Notre père » se lit réellement « Pardonne-nous nos offense, comme nous pardonnons à ceux qui nous doivent de l’argent ». Bien sûr nous ne le faisons pas. Mais cela implique tout de même que nous sommes tous des pécheurs qui détiennent des dettes.

L’investissement capitaliste puise son origine dans le bouddhisme chinois de l’époque médiévale

Quand les grandes religions ont repris en main la régulation des affaires économiques au cours du moyen-âge, ils ont instauré des mesures de protection pour les débiteurs. L’islam et le Christianisme interdisaient complétement le prêt à intérêt. Le bouddhisme a toujours été plus tolérant sur le sujet. Les monastères bouddhistes ont été les premiers à instaurer des boutiques de prêteurs sur gages, pour donner aux pauvres une alternative aux usuriers locaux. Ils développèrent aussi l’idée de la « dette de lait ». Chaque homme a une dette infini envers sa mère pour le lait qui la nourri dans les premières années de sa vie, et la seule façon de la rembourser était de racheter son âme de l’enfer. Ce qui pouvait être accompli en faisant une donation « éternel » et en son nom à un monastère local – par exemple pour soutenir un moine qui priera pour elle. Ces dons étaient éternels parce que l’argent n’était jamais dépensé mais prêté, ce qui permettait au moine de vivre avec les intérêts. En conséquence, entre 500 et 800 après JC, les dotations monastiques sont devenus les premières formes de capital financier. Ils prirent une importance telle sur l’économie locale – en absorbant tout l’argent (qui était parfois fondu pour ériger des statues de Bouddha) –que les gouvernements devaient intervenir périodiquement pour libérer des milliers de serf et faire fondre les statue pour produire à nouveau de la monnaie.

C’est dans l’Islam médiéval que l’on trouve les origines du marché libre

Une grande partie de la popularité des tribunaux islamique médiévaux venait du fait qu’ils ont réussi à réglementer le commerce du Mali jusqu’à Bornéo. Ceci en permettant la création de système de crédits étendus, basés sur la confiance et ne dépendant d’aucun gouvernement – de fait, recouvrant près de la moitié du globe. Ils apportaient aussi d’importantes protections aux débiteurs, en commençant par l’interdiction des taux d’intérêts, de l’esclavage pour dette, du servage et de tous les autres fléaux traditionnels du Moyen-Orient.

Le résultat fut la création progressive du premier marché libre du monde, avec les idées que le marché était bon, que les gouvernements étaient un mal nécessaire et que ces deux entités devaient se développer le plus indépendamment possible. Adam Smith semble avoir pris beaucoup de ces exemples (l’usine de pin), et même certaines lignes, depuis des sources de la Perse médiévale.

Le papier monnaie n’est rien d’autre que la circulation de dettes issues des guerres

Le système de banques centrales qui régit encore les affaires financières mondiales est une parfaite illustration du mariage entre guerriers et financiers. En 1694, un consortium de marchand de Londres a fait un prêt de 1,2 million de £ au roi William pour qu’il puisse partir en guerre contre la France. En échange, ils eurent le droit de créer la « Banque d’Angleterre » et de prêter l’argent que le roi devait en émettant des billets de banque. Ce prêt n'a jamais été remboursé. Il ne pouvait pas l’être, ou l'ensemble du système monétaire britannique cesserait d'exister.

Le système américain actuel, où l'argent est imprimé non par le gouvernement, mais par la Réserve fédérale, est juste une autre version du même système. Beaucoup plus de fumées et de miroirs ont été ajoutés, mais en dernière analyse, les dollars ne sont que des reconnaissances de dette émis par le gouvernement et diffusés par la banque centrale – principalement pour financer les dépenses militaires.

Si la dette américaine disparaissait, le système financier lui-même serait certainement paralysé.

Les révolutions d’aujourd’hui sont aussi, comme elles l’ont toujours été, des insurrections contre la dette.

La vague de fermentation révolutionnaire au Moyen-Orient se concentre souvent sur les mêmes questions. En Égypte, le soulèvement a commencé en réaction à la brutalité policière. Un problème qui touchait de plus en plus de gens depuis que le gouvernement de Moubarack avait essayait de remplacer les prestations sociales par le micro-crédit – dont la police était devenue l’office de recouvrement.

Il est intéressant de constater que le gouvernement Saoudien, craignant une contagion, a récemment annoncé une amnistie générale des dettes envers le royaume, s’imposant comme le premier état moderne à revenir à l’approche de la Mésopotamie antique pour faire face aux troubles sociaux : l’«effacement des tablettes ».

Et bien plus encore dans la traduction française du best seller international passionnant, écrit par l’anthropologue David Graeber, leader des Occupy Wall Street et figurant parmi les 100 personnes les plus influentes du monde pour le magazine

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Dette : Les 5000 premières années (éditions Les Liens qui Libèrent)