21 octobre Campagne de Birmanie Opération Tiger · PDF fileA6M2-N “Rufe”...

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21 octobre Campagne de Birmanie Opération Tiger Le recul japonais continue, mais dans un ordre parfait – les Alliés n’avancent que parce qu’ils disposent de plus de blindés et d’avions que leurs adversaires, mais cet avantage s’estompe, car l’état-major aérien japonais s’efforce de couvrir efficacement le repli, quitte à démunir temporairement l’Indochine. Toute la journée, des combats opposent l’armée anglaise aux survivants des 71 e et 55 e Divisions qui passent la rivière à Ye. Les Japonais sont soutenus par l’artillerie des 9 e et 12 e Divisions, qui sont installées dans le secteur depuis plusieurs jours et se sont disposées en défense. Dans la soirée, les Alliés entrent dans Ye, mais la population a fui et personne n’accueille les premiers éléments britanniques : le Calcutta Light Horse, toujours en pointe, libère une ville fantôme. A l’est, des éléments de la 55 e Brigade Indienne atteignent la rivière qui longe la frontière thaïe, aux Trois Pagodes. Ils ont reçu l’ordre de s’arrêter là « pour le moment ». En fin d’après-midi, un officier de l’armée thaïe se présente après avoir traversé la rivière sur une petite barque. Il déclare que la Thaïlande respectera et fera respecter sa non- belligérance. Il félicite même les officiers alliés pour leur victoire, mais leur annonce que la frontière est pour l’instant fermée « en raison d’une recrudescence des activités de bandits et de pillards » dans la région. Campagne d’Indochine Canal des Bambous, 06h30 – Patrouillant au dessus du cours d’eau, deux Nakajima A6M2-N “Rufe” surprennent trois sampans vietminh transportant du ravitaillement vers Hai Duong. Le puissant armement des appareils japonais (deux 20 mm et deux 7,7 mm chacun) ne laisse aucune chance aux frêles embarcations et quelques minutes plus tard, les hydravions s’éloignent vers Haiphong, ne laissant que des débris à la surface. Dien-Bien-Phu – Sur une hauteur dominant la région, un étrange appareil hérissé d’antennes métalliques jure au milieu de la végétation tropicale. Le premier système radar d’Indochine vient de faire son apparition. Pourtant, les instructeurs anglais trouvaient l’affaire mal partie, au vu de la quantité et du poids des équipements à installer au milieu de nulle part. C’était compter sans l’ingéniosité et le dévouement des coolies vietnamiens. Ceux-ci ont réussi le tour de force transporter les éléments à dos d’homme sur plusieurs kilomètres jusqu’au sommet d’une colline dégagée, au milieu d’une nature peu coopérative. L’emplacement choisi a été aménagé en un tournemain selon la méthode Giap, avec tranchées-abris pour le personnel, murs de terre anti-explosion pour le matériel, le tout masqué par des arbustes de camouflage. Par mesure de précaution, une dizaine de pièces de DCA montent une garde attentive autour de l’engin et de son personnel comme autour des bijoux de la Couronne… Ce matin, les opérateurs britanniques effectuent les derniers réglages avant la mise en service opérationnel. Les avions en patrouille permettent l’entraînement des opérateurs novices, français et vietnamiens. Les premiers essais sont encourageants, bien que l’électronique de l’époque et l’humidité de la région ne soient pas faits pour s’entendre. Opération Manneken Pis Quelque part au Laos – La colonne belge effectue aujourd’hui son plus long déplacement de cette opération en une seule journée : 103 kilomètres au milieu d’un

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21 octobreCampagne de BirmanieOpération TigerLe recul japonais continue, mais dans un ordre parfait – les Alliés n’avancent que parcequ’ils disposent de plus de blindés et d’avions que leurs adversaires, mais cet avantages’estompe, car l’état-major aérien japonais s’efforce de couvrir efficacement le repli,quitte à démunir temporairement l’Indochine.Toute la journée, des combats opposent l’armée anglaise aux survivants des 71 e et 55e

Divisions qui passent la rivière à Ye. Les Japonais sont soutenus par l’artillerie des 9e et12e Divisions, qui sont installées dans le secteur depuis plusieurs jours et se sontdisposées en défense. Dans la soirée, les Alliés entrent dans Ye, mais la population a fui etpersonne n’accueille les premiers éléments britanniques : le Calcutta Light Horse,toujours en pointe, libère une ville fantôme.A l’est, des éléments de la 55e Brigade Indienne atteignent la rivière qui longe la frontièrethaïe, aux Trois Pagodes. Ils ont reçu l’ordre de s’arrêter là « pour le moment ». En find’après-midi, un officier de l’armée thaïe se présente après avoir traversé la rivière surune petite barque. Il déclare que la Thaïlande respectera et fera respecter sa non-belligérance. Il félicite même les officiers alliés pour leur victoire, mais leur annonce quela frontière est pour l’instant fermée « en raison d’une recrudescence des activités debandits et de pillards » dans la région.

Campagne d’IndochineCanal des Bambous, 06h30 – Patrouillant au dessus du cours d’eau, deux NakajimaA6M2-N “Rufe” surprennent trois sampans vietminh transportant du ravitaillement versHai Duong. Le puissant armement des appareils japonais (deux 20 mm et deux 7,7 mmchacun) ne laisse aucune chance aux frêles embarcations et quelques minutes plus tard,les hydravions s’éloignent vers Haiphong, ne laissant que des débris à la surface.

Dien-Bien-Phu – Sur une hauteur dominant la région, un étrange appareil hérisséd’antennes métalliques jure au milieu de la végétation tropicale. Le premier systèmeradar d’Indochine vient de faire son apparition. Pourtant, les instructeurs anglaistrouvaient l’affaire mal partie, au vu de la quantité et du poids des équipements à installerau milieu de nulle part. C’était compter sans l’ingéniosité et le dévouement des cooliesvietnamiens. Ceux-ci ont réussi le tour de force transporter les éléments à dos d’hommesur plusieurs kilomètres jusqu’au sommet d’une colline dégagée, au milieu d’une naturepeu coopérative. L’emplacement choisi a été aménagé en un tournemain selon la méthodeGiap, avec tranchées-abris pour le personnel, murs de terre anti-explosion pour lematériel, le tout masqué par des arbustes de camouflage. Par mesure de précaution, unedizaine de pièces de DCA montent une garde attentive autour de l’engin et de sonpersonnel comme autour des bijoux de la Couronne… Ce matin, les opérateurs britanniques effectuent les derniers réglages avant la mise enservice opérationnel. Les avions en patrouille permettent l’entraînement des opérateursnovices, français et vietnamiens. Les premiers essais sont encourageants, bien quel’électronique de l’époque et l’humidité de la région ne soient pas faits pour s’entendre.

Opération Manneken PisQuelque part au Laos – La colonne belge effectue aujourd’hui son plus longdéplacement de cette opération en une seule journée : 103 kilomètres au milieu d’un

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paysage magnifique d’où la guerre semble absente. La colonne a tourné sur la RC 13 etchemine maintenant cap au sud-est. Le soir, elle parvient aux abords d’un petit villagedénommé Na Thong.

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinNanchang (Jiangxi) – Les premiers éléments de la 200e Division Blindée pénètrent dansNanchang, où les survivants de la 34e Division japonaise ne peuvent opposer qu’unbaroud d’honneur. Pour retarder les Chinois, des incendies ont été allumés dans plusieursquartiers de la ville, au mépris total, cela va sans dire, de leurs habitants.………Wuhan (Hubei) – Des combats acharnés ont lieu toute la journée dans Hanyang, maisgrâce au soutien de leur aviation et de leur artillerie, les Japonais parviennent à reprendrele contrôle de la zone industrielle et notamment de l’arsenal – ou plutôt de ses ruines.Etant donné l’étendue des dégâts et le fait que seule une partie des machines-outils étaientencore sur place (le reste ayant été évacué par le régime nationaliste en 1938), lesJaponais ne chercheront pas à le remettre en état. Les insurgés survivants se replient dansla vieille ville fortifiée.

22 octobreCampagne de BirmanieOpération TigerLe général Slim et l’état-major allié décident de suspendre les opérations offensives, doncde mettre fin à l’opération Tiger : les moyens sont insuffisants pour tenter de traverser larivière près de Ye, d’autant plus que la chaîne logistique part toujours de Rangoon. La 5 e

DI britannique et la 14e Division Indienne sont éreintées, la 19e Indienne est disperséedans les collines entre les précédentes et la 1ère Birmane qui fait face à la frontière thaïe. Al’arrière, la 3e Indienne, lentement acheminée de l’arrière, ne peut pas être utilisée : ellejoue son rôle dans le bluff qui a consisté à menacer la Thaïlande d’une invasion massive,et elle est encore trop inexpérimentée (et trop précieuse) sur ce front. Quant à la 8 e

Indienne et aux deux brigades blindées, elles aussi ont subi des pertes et en face, lesJaponais se sont solidement retranchés, à l’extrémité de lignes de ravitaillementraccourcies.Face à la déception de certains, qui avaient des objectifs beaucoup plus ambitieux pourcette campagne, d’autre soulignent que cela aurait pu se passer beaucoup plus mal : lalogistique était très juste pour autant d’unités. Sans le succès des attaques aériennes et del’opération Tigertooth contre les dépôts et le ravitaillement japonais, Tiger aurait pu êtreun échec. Bref, il faut proclamer la victoire : presque toute la Birmanie occupée a étéreconquise, la Thaïlande est sortie du jeu, les soldats anglais et indiens ont montré qu’ilsvalaient bien les redoutables Japonais, et désormais, l’initiative est fermement entre lesmains des Alliés, d’autant plus que la ligne de chemin de fer jusqu’à Ye est presqueintacte… en dehors des ponts, qui donneront bien du travail au génie.Lorsque les moyens navals nécessaires seront disponibles, des opérations combinées pourront être lancées vers Sumatra et vers la Malaisie.Au chapitre des satisfactions, en dehors des Chindits, l’état-major salue le boncomportement de la 19e Division Indienne. Affectée auparavant au contrôle des lignes decommunications, elle est aujourd’hui à compter parmi les divisions aguerries, ayant

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gagné en expérience sans trop de pertes grâce à des conditions d’engagement favorables.En effet, elle a souvent travaillé en binôme avec une autre grande unité (la 1 ère DivisionBirmane ou la 8e Indienne, voire la 9e Armoured Brigade) et a pu bénéficier ainsi d’unpuissant appui d’artillerie, tandis qu’elle est la division qui a bénéficié du plus grandnombre de sorties d’appui aérien.………Côté japonais, on estime l’avoir échappé belle, d’où un certain soulagement malgré leslourdes pertes.En dépit de ces pertes, de la défection de la Thaïlande et d’une très difficile retraite, lasituation a pu être stabilisée et les lignes de ravitaillement solidement rétablies. L’ennemin’a pas pris pied en Malaisie et ni Singapour ni l’Indochine ne sont vraiment menacées,ce qui empêche toute incursion britannique en Mer de Chine, donc tout risque de coupurede l’approvisionnement de la mère patrie en matières premières et en pétrole d’Indonésie.Mais au total, les quatre divisions de la 7e Armée (9e, 12e, 55e et 71e) n’ont même plus lamoitié de leurs effectifs nominaux, et il faut continuer à se soucier de protéger la côteouest de la Malaisie contre un possible débarquement. Pour cela, il y a en Malaisie les 18e

et 27e Divisions (mais la 27e, qui a fourni les troupes du débarquement raté au début del’année, n’est qu’au tiers de ses effectifs normaux). Singapour est occupée par la 5e

Division et la Division de la Garde (mais les effectifs de ces deux grandes unités,terriblement éprouvées lors des deux sièges, sont à peine de l’ordre de 60 % de la norme).Il faut ajouter à ces forces les troupes de l’Armée Nationale Indienne, qui se trouvent à cemoment à l’entraînement en Johore. Les hommes de la 1 ère Division (général MohamedZaman Kiani) sont des anciens de l’Armée des Indes britannique. La 2e Division (colonelAbdul Aziz Tajik) est au contraire composée de soldats inexpérimentés et son effectif nedépasse pas celui d’une brigade, bien qu’elle comprenne le bataillon “Rani de Jhansi”,entièrement composé de femmes et commandé par le Dr Lakshmi Saghal.

Campagne d’IndochineLa révolte d’HanoiHanoi, 00h30 – Plusieurs séries de petites explosions secouent les postes de gardenippons. Quatre Lysander du GB “Louvre” effectuent des attaques de harcèlement,faisant tourner en bourrique les Japonais. Malheureusement, l’un d’eux prend trop derisque. Alors qu’il survole le Palais de Justice, il passe juste au-dessus d’un affût de20 mm qui le foudroie presque à bout portant. L’appareil percute le Petit Lac, où ils’engloutit avec ses deux hommes d’équipage. Pendant ce temps, deux Lodestar et deux Dakota profitent de la diversion pour parachuterdu ravitaillement aux insurgés. Ils repartent, suivis de loin par quelques traînées de ballestraçantes trop en retard pour les menacer. ………La nuit est aussi propice aux déplacements discrets. Les trois principaux QG vietminh desquartiers rebelles en profitent pour correspondre par messagers – des enfants quitraversent les quartiers tenus par les Japonais. Aucun des courageux coursiers n’estintercepté, mais parfois des balles sifflent à leurs oreilles.Les chefs de la révolte sont arrivés à une conclusion. Dans quelques jours, la soif auraraison des défenseurs s’ils n’arrivent pas à reprendre les pâtés de maisons situésimmédiatement au sud de l’hôpital militaire. Ces bâtiments sont au bord du Dông Nhânalors que les maisons qui se trouvent plus au sud en sont séparées par un terre-plein battu

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par le tir de plusieurs nids de mitrailleuses. Il va falloir attaquer pour reprendre le secteurproche de l’hôpital.

Dien-Bien-Phu, 07h45 – Un petit bip incongru tire l’équipe radar de sa torpeur. Aprèss’être assuré qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle défaillance de leur engin, l’alarme estdéclenchée et les chasseurs en patrouille alertés. Sur l’écran, les opérateurs suivent l’échosolitaire avec attention. Sans aucun doute, c’est le sempiternel Ki-46 II “Dinah” qui vientchaque jour tirer le portrait de la base Epervier. Cette fois, cependant, le radar offrel’occasion de se débarrasser de l’importun. Les chasseurs alliés sont guidés assez efficacement, mais les premiers appareils alertéssont positionnés trop bas et ne peuvent intervenir efficacement dans un ciel nuageux. Parcontre, dès l’alerte donnée, le lieutenant Colin s’est mis à grimper et quand le bimoteurnippon prend le chemin du retour, il est idéalement placé pour l’intercepter en piquant demanière à compenser la vitesse supérieure de sa cible. L’observateur japonais tentebravement de se défendre, mais sa pauvre mitrailleuse de 7,7 mm ne fait pas le poids faceaux quatre .50 du pur-sang de North American… Le soir même, Daniel Colin célèbrera son cinquième succès, tandis que les radaristesanglais seront acclamés pour avoir conduit la première interception radar victorieuse dansle ciel de l’Indochine !

Laos – L’espace aérien de la région continue d’être dominé par les avions alliés, quimultiplient les raids pour maintenir la pression sur la 56 e Division japonaise et sur lagarnison de Vientiane. La DCA japonaise abat un P-40 et avarie sérieusement un B-25. De leur côté, les forces du général Bourdeau se hâtent vers le sud, marchant sur les routesen bon ordre et en plein jour. Les seuls avions qui les survolent sont là pour leurparachuter quelques vivres. Le ciel du Laos appartient tout entier aux Alliés : l’aviationjaponaise a trop à faire du côté de la Birmanie ou du Tonkin.

Opération Manneken PisQuelque part au Laos – La Force Publique atteint la RC 4. C’est la dernière lignedroite !

Campagne du PacifiqueOpération GalvanicFunafuti (îles Ellice, auj. Tuvalu) – Le terrain d’aviation, débarrassé des faux cratèresde bombes qui le camouflaient, est mis en service. Au crépuscule, 24 P-40 venant deSuva (Fidji) s’y posent, conduits par deux B-24, après un vol long et dangereux.

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinWuhan (Hubei) – Les Japonais, qui avaient encerclé la vieille ville de Hanyang à lafaveur de la nuit, donnent l’assaut juste avant l’aube. Les vénérables fortifications, déjàdurement touchées par les bombardements aussi bien sino-américains que japonais, sontmartelées au canon et rapidement prises d’assaut. Par contre, une fois dans le labyrinthed’étroites ruelles de la vieille ville, les assaillants doivent se battre pour chaque maison,quand ce n’est pas chaque étage, voire chaque pièce. Chinois et Japonais s’entretuent aufusil, à la grenade, à l’arme blanche, quand ce n’est pas à mains nues, chacun combattant

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avec une farouche détermination et un complet mépris de la mort. La tombée de la nuit nediminue pas l’intensité des combats.

23 octobreCampagne d’IndochineLa révolte d’HanoiHanoi – Le ciel est gris sombre. Sous un plafond bas, le sol est détrempé par une pluie siforte que les avions restent collés au sol. Impossible de voler sans danger au dessus de lacapitale du Tonkin dans cette purée de pois. Mais les soldats japonais ont retrouvé lemoral. Car cette situation gêne bien plus les insurgés, qui n’ont ni chars ni artillerie.Libérées de la crainte des avions des Yankees et des Colonisateurs, les troupes du tennovont pouvoir utiliser à fond leurs blindés et leurs canons. L’objectif du jour est dereprendre le quartier de Thiên-Quông. C’est ici que l’insurrection a débuté, juste aprèsque les Américains aient bombardé la gare, quand la répression nipponne a enflammé lesrues proches de la voie ferrée. ………L e taii (capitaine) Kamishi montre un plan de la ville à son subordonné le chûi(lieutenant) Ogoura : « D’après les dernières informations, les rebelles tiennent toujoursle sud d’Hanoi avec des forces importantes. Ils ont des tireurs embusqués au sommet desimmeubles et des maisons et ces méprisables lâches ont abattu plusieurs de noscamarades. Votre mission est de descendre la rue Mandarine à partir de la gare et devous emparer des croisements des rues de Reinach, Dufourcq et Mongrand. Nousinstallerons un poste dans un bâtiment à chaque intersection. Mais avant, il faudranettoyer toutes les maisons du secteur jusqu’à l’étang de Thiên-Quông. »Ogoura réussit à garder un visage impassible, mais il sait fort bien que la mission qui luiest confiée revient à nettoyer une cinquantaine de bâtiments potentiellement remplisd’ennemis. On parle de plusieurs milliers de combattants de mieux en mieux armés et queces pourris de Colonisateurs entraînent beaucoup trop bien. L’ordre a été donné, inutile degémir – ils savent tous deux qu’il aurait fallu préparer cette opération par unbombardement aérien ou par un puissant pilonnage d’artillerie.– J’assumerai la responsabilité qui m’est confiée, mon capitaine. Et je réussirai, au nomde l’Empereur ! Banzai !– Banzai.Les officiers montent sur le toit pour observer l’objectif à la jumelle. Ils peuvent suivrependant quelques minutes le trop bref matraquage infligé par la dizaine de piècesdisponibles. A cette distance, cela paraît impressionnant. Mais les hommes concentrésautour de la gare grincent des dents. Ils savent bien que les Viets ont creusé une véritablefourmilière sous la ville. Dès que les obus cessent de tomber, les rebelles sortent de leurstrous et reprennent le contrôle des ruines. Les fantassins sont obligés de faire le gros dutravail et les précédents assauts ont été meurtriers. L’odeur pestilentielle de centaines decadavres en décomposition imprègne l’air. Les trois premiers shotais (pelotons) avancent dans la rue Mandarine. Ils sont précédéspar un char moyen Chi-Ha type 97. Ses premiers tirs frappent la barricade formée par desmonceaux de pierres et de gravats provenant des ruines. Mais le remblai est si épais quele canon de 57 mm l’égratigne à peine. Des tirs claquent, venus des immeubles proches.Ils arrachent des étincelles au blindage. La tourelle pivote, le canon s’élève. Le tir secouele blindé qui crache le feu. Un volcan semble s’ouvrir dans la façade de briques d’un

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bâtiment. Méthodiquement, le char nippon asperge les ouvertures à la mitrailleuse. Lacasemate boulonnée peinte en vert tourne une nouvelle fois et le tube court crache unnouvel obus. Couverte par l’engin qui défonce une position après l’autre – l’ennemi ne semble pasavoir la moindre arme antichar – l’infanterie monte à l’assaut. L’affrontement est un jeude cache-cache mortel. Les Vietminh se dérobent. Il faut les poursuivre. On monte lesescaliers, on passe dans l’immeuble voisin par un trou dans le mur ou en sautant deterrasse en terrasse. Les défenseurs sont avantagés par une connaissance parfaite duterrain. Il faudrait faire intervenir le blindé, mais le conducteur hésite. Les éclaireurs onttrouvé des mines dans les rues adjacentes et qui sait ce que cache la barricade ?Rue Reinach, une mitrailleuse dissimulée fauche les premiers soldats. Une embuscadeparfaitement préparée a été tendue. Des tireurs isolés visent les porteurs de sabres et ceuxqui donnent des ordres. Un gochô (caporal) est tué, un sôchô (sergent-major) blessé.L’assaut piétine. Les Japonais courent dans un dédale, défoncent des portes à coup decrosse, se ruent dans les escaliers… On poursuit des fantômes qui tirent quelques coupsde feu puis se replient.Le radio trouve le lieutenant Ogoura dans une cabane en planches, s’abritant des tirsd’adversaires invisibles. Les nouvelles qu’il apporte ne sont pas bonnes. L’assaut piétine.Sous la pression, les Viets ont abandonné la rue Reinach, mais ils s’accrochent toujoursaux autres passages latéraux ainsi qu’à la rue Mandarine. Au sud, les troupes qui avancentfont face à une riposte venue des villages de paillotes de Trung Phung. Le chûi expérimente lui-même le danger en reprenant son avance. C’est d’abord un tireurposté sous un toit qui, soulevant une trappe couverte de tuiles, l’ajuste et le rate de peu.Peu après, une grenade est lancée d’une fenêtre. Personne n’est touché, mais l’alerte a étéchaude. La mort guette partout, à chaque coin de rue, derrière chaque poutre, chaqueamas de décombres… La ruelle où ils débouchent est coupée par une barrière improvisée avec des meubles etdes cailloux. L’avance des Japonais est interrompue par le tir d’une mitrailleuse postéederrière la barricade. Les balles fauchent plusieurs hommes. Ogoura est touché à lacuisse. En dépit du choc et de l’hémorragie, il se traîne à couvert et dégaine son Nambutype 14. Il tire pour détourner l’attention de l’ennemi – deux de ses hommes se dévouent,plongent dans l’espace battu par l’arme automatique, se saisissent de l’officier et letraînent à l’abri. L’assaut s’enlise lamentablement. Deux sections sont encerclées. Les renforts n’arriventpas à les dégager. On fait intervenir les chars, mais il faudra se battre jusqu’au soir pourarracher les deux sections au piège.Le sergent Matsumata, qui a remplacé le lieutenant Ogoura, fait son rapport au capitaineKamishi. Ce dernier remercie d’un simple hochement sec de la tête. La seule question estde savoir si les rebelles lanceront une contre-attaque cette nuit... Dehors, le vent charriel’odeur des cadavres en décomposition. Démoralisés, minés par les fièvres, les soldatsjaponais dorment à même le sol détrempé, trop épuisés pour avoir peur.

Dien-Bien-Phu – Le mauvais temps a au moins un avantage. Les mécaniciens enprofitent pour effectuer les travaux de maintenance et de réparation indispensables sur lesavions d’Épervier. Ce temps n’est pas non plus gaspillé par les pilotes, qui peuvent enfinse reposer et se détendre après plusieurs semaines de combats intenses.

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Myitkyina – L’activité ne faiblit pas sur les terrains que Belges et Français partagentdepuis quelque temps déjà. Les nouveaux arrivants, frais émoulus des écoles d’Afriquedu Nord, en profitent pour commencer à s’acclimater. Ils arrivent heureusement à unesaison qui les préserve un peu de la moiteur tropicale. Leur entraînement s’achève sous laconduite de vétérans des combats de Birmanie et d’anciens du GC II/40 et du GB I/62. D’ici quelques jours, l’ensemble de l’Escadron 345 sera réuni pour ouvrir une nouvellepage de l’histoire de leur unité : le passage du bombardement de nuit à l’appui-feu diurne.Les pilotes découvrent leur nouvelle monture, le Bell P-39 Airacobra. La plupart desappareils ont fait la campagne de Sicile. Ils viennent juste d’arriver par convoyage etnombreux sont ceux qui arborent l’insigne de la Cocotte blanche.Les navigateurs et radio-mitrailleurs, eux, découvrent le B-25 avec les hommes du GBI/62. Ils formeront un pool de réserve plus que bienvenu pour les équipages des B-25 del’Escadron 343. Quelques-uns, tous volontaires, commencent leur formation au pilotagesur Piper Cub et Stinson. Ils vont rejoindre le 344 pour participer au réglage d’artillerie etaux missions EVASAN, entre autres. Certains, ayant apprécié les opérations de nuit,obtiendront une affectation exceptionnelle au sein du “GB Louvre”, où l’on n’aura qu’àse féliciter de ce renfort.

Opération Manneken PisRégion de Luang-Prabang (Laos) – « Aujourd’hui, je commence vraiment à croire quenous allons la gagner, cette guerre – je veux dire à en être sûr et certain et même à penserque le plus dur est fait. Nous avons vu arriver des renforts européens, enfin, euro-africains : une sorte de brigade belge du Congo, qui a parcouru la moitié du monde pournous donner un coup de main ! Si ce miracle est possible, les Hitlériens et les Japonaissont bien fichus.J’avais été désigné pour commander l’un des petits groupes envoyés guetter l’arrivée desBelges aux environs de Luang-Prabang. J’avais avec moi un sergent de la Légion et troisauxiliaires laotiens, et c’est nous qui avons tiré le gros lot. A une quarantaine dekilomètres de la ville, nous avons aperçu un petit groupe en jeep, roulant lentement dansnotre direction et arborant un grand drapeau noir-jaune-rouge. Nous avons déployé undrapeau français et un moment plus tard, j’étais devant un lieutenant belge, accompagnéde quatre Congolais du plus beau noir. Il s’est mis au garde-à-vous et il a salué :« Lieutenant Debrabant, 1ère Brigade du Corps Expéditionnaire de la Force Publique duCongo Belge ! » J’ai répliqué de mon mieux, malgré l’état de mon uniforme qui neressemblait plus à grand chose : « Sous-lieutenant Müller, 5e Régiment d’Infanterie de laLégion Etrangère ! » Nous sommes tombés dans les bras l’un de l’autre, pendant que nosCongolais et Laotiens s’embrassaient aussi, l’air de s’amuser comme des petits fous !Un moment plus tard, alors qu’il me conduisait vers le gros des troupes belges, il m’aregardé d’un air un peu gêné avant de demander : « Heu, vous avez… un accent… » J’aidû faire une petite grimace, malgré l’habitude : « Je suis Allemand, mon lieutenant.Mais… » J’allais me lancer dans un grand discours sur les Allemands antinazis, quand ils’est esclaffé, soudain très détendu : « Ah bon, je croyais que c’était un accent d’Eupen 1,ou peut-être un accent flamand ! Je me disais bien qu’un officier flamand, dans la LégionEtrangère, ça n’était pas possible… une fois ! »J’ai jeté un coup d’œil à mon sergent, Max DeGroot, natif de Gand (ou de Gent ?), quime regardait en pensant visiblement : « Tu vois, je te l’avais dit : ça n’aurait pas été unebonne idée que je leur souhaite la bienvenue en flamand ! »

1 L’une des petites régions germanophones de Belgique.

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Enfin, tout ça fera sûrement d’excellents Européens, comme dirait la chansonfrançaise… » (Klaus Müller, Lettres à mon frère ennemi)………………………L’opération Manneken Pis était terminée 2.

Campagne du PacifiqueOpération GalvanicNauru – L’aérodrome japonais est attaqué par 38 B-24 de la VIIe Air Force. Venus deSuva, ils ont ravitaillé à Funafuti. Ils sont interceptés par 10 des 16 A6M2 stationnés surplace – ces appareils déjà dépassés ont été déployés ici car le secteur est considérécomme secondaire. Malgré leurs attaques, les B-24 bombardent leur cible avec précision,provoquant de graves dommages et détruisant au sol deux chasseurs et trois avions dereconnaissance.La bataille aérienne se traduit par la destruction de quatre chasseurs japonais (plus troisdémolis à l’atterrissage), en échange de deux B-24 abattus par les chasseurs et un par laDCA au-dessus de l’île, tandis que deux peuvent se traîner au large, où leurs équipagesseront récupérés par des Catalina. Enfin, trois autres Liberator, endommagés, vont seposer (conformément à leurs ordres) dans le lagon de Funafuti pour ne pas bloquerl’aérodrome. Les cinq équipages sains et saufs auront vite droit à une “remonte” : il sortdes chaînes d’assemblage de Consolidated un B-24 par heure…

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinWuhan (Hubei) – Les Japonais viennent à bout des derniers nids de résistance dans lavieille ville de Hanyang. Ceux des habitants de Hanyang et Hankou qui ne s’étaient pasenfuis et avaient survécu aux combats sont la cible de représailles sanguinaires de la partde soldats japonais enragés, avec l’assentiment, quand ce n’est pas les encouragements,de leurs officiers. Les hommes sont sommairement exécutés à la mitrailleuse ou enfermésdans des bâtiments qui sont ensuite incendiés ; les femmes sont violées avant d’êtreachevées d’un coup de baïonnette dans le ventre. Quelques civils sont gardés en vie letemps de traîner les cadavres jusqu’au fleuve et les jeter à l’eau – certains corps serontretrouvés jusqu’aux abords de Nanjing les jours suivants. Ces massacres figureront en bonne place dans les charges retenues lors du procès dulieutenant-général Yokoyama pour crimes de guerre à Tokyo en 1946 – Yokoyama seracondamné à mort.

Opération White SharkChongqing – Linebarger, qui en tant qu’officier des renseignements de l’US Navy, est aucourant de l’échec des démarches de Zhu auprès de Chennault pour obtenir un plusimportant soutien aérien, consulte Tchang Kai-chek quant à l’opportunité de lancerl’opération White Shark. Le Généralissime ayant donné son accord, le Club OB-1 vautiliser ses tactiques de guerre psychologique pour convaincre les Japonais que le refus

2 Bien plus tard, Jo Gérard devait demander au général Gilliaert ce qui l’avait inspiré en baptisantl’opération. « Ah, répondit le général, je savais que l’argent devait jouer un grand rôle dans la réussite dece raid. L’argent n’a pas d’odeur, n’est-ce pas : c’est un dicton dû à l’empereur Vespasien, qui parlait del’impôt levé sur les édicules qui portent aujourd’hui son nom… Et qui servent justement à ce que fait notrepetit Manneken Pis ! »

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de l’USAAF est un symptôme de dissensions de plus en plus graves entre les états-majorschinois et américains.

24 octobreCampagne de BirmanieBirmanie occupée – L’Armée Impériale profite de l’accalmie qui règne depuis deuxjours pour commencer à redéployer ses forces aériennes basées en Thaïlande.Conformément à la nouvelle stratégie du “glacis défensif” décidée à Tokyo, il s’agit demieux soutenir le front birman pour assurer sans esprit de recul le contrôle de la pointesud de la Birmanie, tout en protégeant les lignes de communication entre le Japon et laMalaisie.Le 62e Sentai et les 51e et 70e Chutai indépendants s’envolent pour le nord de la Malaisie.Les 8e, 14e et 31e Sentai partent pour Saigon et ses environs. Enfin, des chasseurs et desavions d’appui commencent à se redéployer sur les terrains les plus proches du front : lesdeux groupes de chasse les plus aguerris, les 50e et 64e Sentai, accompagnés du 1er

Dokuritsu Sentai sur Ki-89, s’installent à Mergui, pendant que les 1er, 11e et 77e Sentaioccupent le terrain de Kampong Ulu, à l’extrémité sud du delta qui marque la frontièreavec l’ancien allié thaïlandais. Ce redéploiement va s’étaler sur une dizaine de jours.

Campagne d’IndochineLa révolte d’HanoiHanoi, la nuit, en l’air – Une légère accalmie permet à deux C-47 et un Lodestar deparachuter un peu de ravitaillement aux insurgés. Les conditions météo sont toujoursexécrables, mais elles masquent l’approche des transports, leur évitant de s’exposer à laDCA qui tiraille tout de même, à l’aveuglette. Les équipages sont des anciens de laSABENA et d’Air France, habitués à voler dans des conditions peu engageantes. Pendant ce temps, deux Lysander jettent, eux aussi à l’aveuglette, quelques bombes surles secteurs tenus par les Japonais, plus pour soutenir le moral des insurgés que pourréellement gêner les soldats nippons.………Hanoi, la nuit, au sol – Une obscurité poisseuse pèse sur la capitale du Tonkin. La pluietombe par intermittences. Les incendies, les traçantes que la DCA japonaise envoie versle ciel, le bruit des avions alliés, celui des bombes… Sons et lumières sont absorbés,estompés, dilués dans cette bruine froide qui transforme les rues en un labyrinthemythologique, une Atlantide engloutie. Le capitaine Kamishi écoute et regarde, maisn’entend ni ne voit. Ses sens échouent à trouver la sortie du labyrinthe, tel Thésée il en estréduit à attendre et à aiguiser sa lame. Dans cette atmosphère étrange, l’ennemi cesse deparaître humain. Il prend des allures de croquemitaine, de bête fantastique… Unminotaure qui rôde, en quête d’une proie à dévorer. A quelques centaines de mètres, l’ambiance n’est guère différente. Les miliciens vietminhqui se glissent d’ombre en ombre ont la peur au ventre, guettant la nuit, anticipant ladouleur, le sang, la mort qui va les frapper. A chaque sortie, un ou deux hommesdisparaissent. Parfois on entend des coups de feu… Parfois, les ténèbres les dévorent ensilence. Les hommes portent de grands containers métalliques. Les bombardiers ont bien joué leurrôle de diversion, d’autres avions sont venus alimenter les « rebelles » qu’insulte la radiojaponaise. Certains ont récupéré les parachutes. Toiles et suspentes seront réutilisées, on

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ne perd rien de ce que le ciel apporte. Le groupe disparaît dans un immeuble en ruine,butant par instant sur les débris qui jonchent le sol. On ouvre les conteneurs. Quelquesarmes, des munitions, des vivres. De quoi tenir quelques jours de plus. Il le faut. Desrenforts ? Peut-être, un jour, dans quelques semaines… Autant dire dans un siècle. Alorsque les révoltés d’Hanoi ne pensent jamais qu’à vivre une journée de plus, une seule. Ici,le temps n’a plus la même signification. Le capitaine Kamishi tend l’oreille. Les avions alliés s’éloignent. Les explosions setaisent. Sa lame polie et repolie, il la fait siffler deux ou trois fois et la rengaine. Il n’atoujours pas sommeil. Il préfère continuer à veiller… à attendre… Il le sent dans ses os,dans son cœur qui pompe l’adrénaline, le danger est là, dehors. Tapi dans les ombres etles bruines, l’ennemi se rassemble. Le guerrier entend le murmure des ombres quis’agitent. ………Hanoi, le jour – L’attaque a été brutale et incisive. Soudain, les Vietminh étaient là. Pasdes miliciens, mais des réguliers casqués, en uniforme vert. Ils ont surgi de maisonsprétendument sécurisées, d’autres ont franchi le Fleuve Rouge près de Dông Nhân. Lagarnison de l’ancien hôpital militaire est de nouveau isolée, assiégée par des assiégés. Dans le solide bâtiment de pierre, les soldats japonais se déplacent avec prudence. A deuxreprises déjà, une balle est entrée par une fenêtre pour blesser ou tuer. Dans les bâtimentsproches, il y a des centaines de Viets. Patients comme la pluie qui s’est remise à tomber,mais aussi meurtriers que l’éclair. Le ventre creux, assoiffés, ils ne se terrent plus.Assiégés dans la ville, ils crient des slogans politiques, tiennent des meetings dont lesrumeurs parviennent jusqu’à ceux qu’ils assiègent, dans l’hôpital. Les gouttes de pluie grossissent et tombent de plus en plus dru. Bientôt l’ondée devientun mur de gouttes qui tambourinent sur les rares vitres intactes. L’eau ruisselle sur lesmurs, pénètre par les fenêtres crevées, le vent fait claquer des portes. Mais rien ne peutchasser l’odeur de décomposition qui imprègne la ville. Seuls les rats sont heureux. Groset gras, trop familiers, ils courent dans les rues en vrais maîtres des lieux. Il y a tant decharognes à dévorer qu’ils sont devenus difficiles.………Hanoi, la nuit – C’est le moment préféré des assiégeants qui cernent l’hôpital. Dès quel’obscurité s’abat sur les rues, commence un étrange manège. D’abord, le silence… long,lourd, trompeur. Il ressemble à un mur. Seuls les cris des crapauds-buffles qui abondentsur les rives du Fleuve Rouge le traverse. Sinon, il engloutit tout. On l’écoute depuisl’hôpital militaire, on l’évalue, on essaye d’entendre ce qu’il cache, des bruits de pas, uncliquètement d’arme, des voix. Soudain, la représentation commence. Une voix hystérique clame à pleins poumons« Tien lien ! » Des centaines d’autres reprennent « Tien lien ! Doc lap ! » Elles serépondent d’un immeuble à l’autre. On entend des bruits de course, comme si les bo-doisse précipitaient vers l’ancien hôpital. Les Japonais qui sommeillaient se précipitent versles fenêtres, ajustent leurs armes. Ils attendent l’assaut… Généralement, au bout dequelques minutes le bruit décroît. Une minute, deux… cinq… On n’entend plus que lescrapauds-buffles, le tapotement infiniment répétitif de la pluie. Une ou deux heures plus tard, le manège recommence. On crie, on se bouscule, on courtautour des défenses japonaises. Encore une fois, c’est une feinte… A nouveau, lesJaponais s’ébrouent, rejoignent leur poste. A la troisième répétition, un soldat japonaistire dans le noir, déclenchant une riposte. La fusillade dure quelques minutes. L’ennemicherche à user les assiégés, à les pousser à la faute, à gâcher leurs munitions pour rien.

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………Haiphong – Pour les pilotes impériaux comme pour les aviateurs alliés, les précipitationsoffrent un répit bienvenu. « La joie de voir arriver de nouveaux pilotes de renforts a été rapidement ternie par ladécouverte qu’il s’agit de novices encore plus jeunes que les précédents. Ils ont si peu depratique qu’il faut souvent reprendre leur formation, ce que nous faisons dés qu’uneaccalmie le permet.De ceux qui formaient avec moi notre Sentai au moment de l’opération Typhon, il nereste plus que le chu-sa, Saejima et cinq ou six autres. En accueillant les nouveaux, nousne pouvons que nous demander combien d’entre eux survivront à leur première mission.Ecoutant le chu-sa grommeler sur l’imbécillité scélérate de nous expédier ces pilotes àpeine sortis de l’adolescence, je me surprend à acquiescer. Comment en suis-je venu àoublier que je suis à peine plus âgé qu’eux ? » (Journal du cho-i Keitaro Urashima)

Le Prince RougeQuelque part dans l’est du Laos – Le lieu : un village perdu du nom de Tang Vay,quelque part sur la célèbre piste Hô Chi-Minh. Le moment : juste après minuit, commedans toute bonne scène de conspiration.Petit, moustachu, un peu empâté, vêtu à l’européenne, le prince Souphanouvong n’a pasla tête d’un redoutable révolutionnaire. Il parle français presque sans accent et s’exprimenon avec des phrases grandiloquentes de tribun du peuple, mais avec des mots précis etréfléchis, exactement comme l’ingénieur des Ponts et Chaussées qu’il est. Pourtant, cettenuit, au milieu des hommes du comité du Laos Libre dont il est le chef, il ne viendrait àl’idée de personne de sous-estimer le Prince Rouge – puisque sa sympathie pour les idéescommunistes l’a fait ainsi surnommer.Outre les principaux membres du Pathet Lao (Etat – indépendant – du Laos), la formationpolitique dont les Lao Issara sont le bras armé, sont présents deux étrangers : une jeuneVietnamienne, envoyée personnelle de Hô Chi-Minh, et un Français nommé Josué-Heilman Hoffet. Géologue, botaniste et zoologue, Hoffet a découvert au Laos, en destemps plus calmes, de nombreux squelettes de dinosaures qui lui ont valu la célébrité.Dès le début du conflit, il s’est engagé dans les services de renseignements français, avantd’organiser des actions de guérilla contre les Japonais après l’invasion 3.Charmeur, comme à son habitude, Souphanouvong prend le temps de remercier chacund’être venu, offrant un large sourire à la seule femme présente.– Madame, Messieurs, il n’y a qu’une raison à notre présence ici : Vientiane. La reprisede notre capitale historique est notre priorité. Les deux premières tentatives ont échouéparce que la garnison thaïlandaise est puissante. De plus, elle est soutenue par del’artillerie déployée sur l’autre rive du Mékong. Et depuis quelque temps, les Japonaisont déployé plus de vingt mille hommes pour assurer leur emprise sur la ville. Ce choixest contestable du point de vue militaire, ils l’ont déjà payé cher et le payeront encore,puisqu’ils laissent les mains libres à nos forces dans le sud du pays. Mais, politiquement,ils marquent des points auprès des Thaïlandais.

3 J.-H. Hoffet est aujourd’hui considéré à la fois comme un héros de guerre, tant par les Français que par lesLaotiens et les Vietnamiens, et par les paléontologues comme le père de l’étude des dinosaures en Asie duSud-est. Le lycée français de Vientiane porte son nom. En 1990, une expédition franco-laotienne adécouvert dans le bassin de Savannakhet un sauropode inconnu vieux de 110 millions d’années. Celui-cisera baptisé Tangvayosaurus hoffeti en hommage à J.-H. Hoffet. Enfin, en 1992, une stèle a été élevée parles trois pays (France, Laos et Vietnam) à la mémoire de Josué Hoffet à l’endroit où il est tombé.

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Souphanouvong s’autorise une pause tandis que son secrétaire distribue quelques feuilletsronéotés aux principaux participants.– Le texte qui vient de vous être remis est une copie du brouillon de l’accord de… disonsde l’accord de paix entre la Thaïlande d’une part, les Américains et les Anglais d’autrepart. Nous avons obtenu ce document grâce au concours de certains Thaïlandais amis duLaos… et désirant assurer leurs vieux jours. Je vous invite à y lire attentivement lepassage concernant le Laos. Fort heureusement, le document en question est assez mince. Tout autour de la table, onentend un bruit de feuilles tournées et retournées avec de plus en plus d’agacement. Undes membres du comité repousse les feuillets : « Mais je ne trouve aucun passageconcernant le Laos ! » Son voisin renchérit : « Moi non plus ! » Souphanouvong sourit : « Parce qu’il n’y en a pas. Nous avons été… oubliés. Notresituation particulière – comme celle du Cambodge, d’ailleurs – est épineuse. A l’heureactuelle, seule la France s’intéresse au Laos. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni préfèrentignorer le sujet. Leurs priorités sont ailleurs. L’Amérique n’a qu’un seul objectif : Tokyo.Quant aux Anglais, tout ce qui peut retarder la reprise de Singapour est pour eux, disons,inopportun. Toutefois, notre situation n’est pas si mauvaise. Qu’en pensez-vous,Monsieur Hoffet ? »Le Français se racle la gorge. L’homme présente une vague ressemblance avec lemilliardaire américain Howard Hugues – même coupe de cheveux, même moustachefine. On remarque en particulier ses yeux enfoncés dans leurs orbites et marqués par desrides en pattes d’oie. Il parle en appuyant ses propos de gestes de la main gauche, ornéed’une chevalière en or. – Vous avez raison. D’abord, je peux vous assurer que les Alliés comptent bien continuerà bombarder les troupes japonaises où qu’elles soient dans la région. Accord avecBangkok ou pas, Anglais, Américains et Belges continueront à soutenir les forcesaériennes françaises en Indochine. Nos forces terrestres sont encore insuffisantes pourchasser les Japonais, mais nous avons reçu des renforts belges qui ont montré leursqualités en Birmanie. Les troupes du général Gilliaert, soit une forte brigade, pourronttrès bientôt rejoindre celles du général Bourdeau. Toutefois, la Belgique et la Thaïlanden’étant pas en guerre, cette brigade ne pourra participer qu’aux opérations contre lesJaponais.J’ai aussi des informations venues de Bangkok, tant de l’opposition au gouvernementthaïlandais que du gouvernement lui-même, par… diverses voies. Monsieur Paribatra,en digne successeur de Phibun, persiste à revendiquer les provinces du Laos et duCambodge que la Thaïlande occupait au siècle dernier et que la France lui a arrachéesen 1893. Ce fait a été entériné par les traités de 1902 et 1904 et les frontièresinternationales telles qu’elles étaient jusqu’en 1940 ont été reconnues par les Nations-Unies... ou devraient l’être sous peu. Mais comme vous le savez, la Thaïlande rejette enbloc les traités de 1902 et 1904 parce qu’ils lui furent imposés par la force et qu’elle lesa ressentis comme une humiliation. Cette humiliation a été la principale raison duralliement du royaume à l’Axe Berlin-Tokyo.Cependant, Mademoiselle, Messieurs, comme vous le savez, si la Thaïlande clame hautet fort qu’elle ne quittera jamais ce qu’elle appelle ses provinces orientales, la réalité esttrès différente. Le royaume s’est retiré du conflit car il ne croit plus en la victoire duJapon. Et la victoire alliée étant aussi celle de la France, le gouvernement thaï ne se faitpas d’illusion. Le Japon vaincu, il lui faudra sans aucun doute revenir aux frontières dutraité de 1904. Mais les Thaïlandais refusent avec énergie l’idée de signer un nouveau

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traité humiliant sur les frontières du Laos (et du Cambodge d’ailleurs) devant lacommunauté internationale. De plus, abandonner les provinces en question sanscombattre serait pour le gouvernement perdre la face vis-à-vis de la population, maisaussi des Japonais.Les membres du Pathet Lao se regardent. « Alors, il va falloir se battre pour leschasser » grogne l’un d’eux. Les visages sont amers. De longs mois de conflit ont assagiles plus belliqueux, la guerre n’est décidément jamais fraîche et joyeuse.Josué Hoffet sourit : « Oui… et non ! Comme je vous l’ai dit, le gouvernementthaïlandais a compris qu’il lui faudrait un jour ou l’autre quitter le Laos. Si nouspouvons lui permettre de le faire d’une manière qui ne l’humilie pas, il jouera le jeu.Pour Vientiane, que personne ne veut voir détruite par les combats, nous avons mis aupoint un plan. » Il s’incline légèrement en direction de Souphanouvong. Le Prince Rouge reprend la parole : « Dans quelque jours, le général Bourdeau vareprendre son offensive au sud du Laos. Les Japonais le croient encore dans le nord et ilsn’auront d’autre choix que de rappeler les éléments de la 56e Division déployés autourde Vientiane. Nous les laisserons partir en les harcelant juste assez pour être crédibles.En fait, nous voulons qu’ils partent le plus vite possible ! Les jours suivants, le plusgrand calme règnera dans le nord du Laos. Le gouvernement thaïlandais proclameraavoir restauré l’ordre dans la région sans l’aide des Japonais.A ce moment, la garnison de Vientiane recevra une information signalant qu’un convoiméo de pâte de pavot 4 au bénéfice des “Colonisateurs” a quitté les Hautes Terres. Cettepâte doit servir à payer les troupes dites “rebelles”, à acheter du ravitaillement, etc. Lecommandant de la garnison y verra une occasion inespérée et tendra une embuscade auconvoi. Il écrasera glorieusement l’escorte et se saisira de la cargaison.Comme d’habitude, c’est ce vieux pirate de Van Dong qui va organiser le transport dupavot. Je l’ai mis dans la confidence car il a toujours scrupuleusement respecté nosaccords ancestraux. Il a bien compris la douloureuse nécessité de sacrifier l’escorte duconvoi, mais – heureuse coïncidence – il a été récemment informé qu’un certain nombrede ses fils bien-aimés s’étaient mis en tête de lui succéder plus tôt qu’il ne lesouhaiterait. Leur confier le convoi et son escorte sera donc une façon convenable dedémontrer qui, de lui ou d’eux, a le soutien des Esprits de la Forêt.Finalement, l’affaire permettra d’économiser pas mal de vies. En effet, de notre côté,nous profiterons de l’occasion pour attaquer la ville, dont les défenses auront étésérieusement affaiblies. La faible garnison restante se défendra avec héroïsme mais seraobligée d’évacuer la ville pour éviter que les assaillants impies ne causent desdommages irrémédiables aux nombreux lieux saints. »C’est Hoffet qui conclut : « Le gouvernement thaïlandais admettra que le commandantde la garnison a eu raison de faire cette sortie, mais le blâmera d’avoir perdu Vientiane.La pâte de pavot permettra à l’officier responsable de se consoler de la période dedisgrâce qui suivra. Tout le monde aura obtenu ce qu’il voulait. »Autour de la table, les visages sont rassérénés. Tout finira donc bien et, qui plus est, dansle respect des traditions.

Campagne du PacifiqueOpération Galvanic

4 La pâte de pavot non raffinée sert à la fabrication de l’opium. C’est une monnaie d’échange très prisée quitrouve toujours acquéreur.

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Nauru – Un nouveau raid de 38 B-24 s’acharne sur l’aérodrome. Il ne reste que sixchasseurs opérationnels pour défendre Nauru. Un B-24 est abattu, un ira tomber en mer etun ira se poser dans le lagon de Funafuti. Mais à la fin du combat, les trois Zérosurvivants sont détruits en tentant de se poser sur un terrain ravagé par les bombes.En pratique, le terrain de Nauru est définitivement éliminé. Des attaques quotidiennes parune douzaine de quadrimoteurs s’assureront qu’il le reste.Mais une vingtaine de membres d’équipage des quatre B-24 abattus au-dessus de l’île endeux jours ont pu sauter. Capturés, ils seront tous décapités quelques jours plus tard. Lecommandant japonais de la base de Nauru sera pendu après la guerre pour ce crime.

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinProvince de l’Anhui – L’état-major japonais a fait transférer dans l’Anhui la 32 e

Division, qui depuis la fin du mois de mars était stationnée dans l’ancien réduitcommuniste du Shaan-Gan-Ning. Son arrivée permet de menacer par le nord la Nouvelle4e Armée et de soulager d’autant la 13e Armée. Il devient ainsi possible d’envoyer la 15e

Division prêter main-forte à la 11e Armée dans le Jiangxi.

25 octobreCampagne de BirmanieFront birman – Bien que l’opération Tiger soit terminée, les combats continuent danscertains secteurs. Le but est d’empêcher les Japonais de se retrancher trop solidement surdes positions avantageuses. Ainsi, la 55e Brigade Indienne (1ère Division Birmane) culbuteles éléments japonais qui lui faisaient face ; en deux jours de combats, elle s’empare de lacote 365, un petit promontoire au nord d’un ensemble de collines dont la ligne de crêtedomine la plaine où progressent les troupes du Commonwealth.

Campagne d’IndochineLa révolte d’HanoiHanoi, la nuit – Vers deux heures du matin, les Viets changent de jeu. Sansavertissement, sans cris de guerre, deux obus de mortier tombent près des murs. Ilsprécèdent une nouvelle fusillade. Des groupes de bo-dois courent dans la rue. Desfenêtres, les Japonais ripostent et touchent quelques hommes qui s’effondrent. Leurscorps rejoignent, mort ou mourants, les autres dépouilles faisandées qui empuantissentl’atmosphère. L’assaut – simple coup de sonde – s’arrête déjà. Les bo-dois disparaissentparmi les ombres et les crapauds-buffles reprennent leur concert. ………Hanoi, le jour – La pluie continue à battre la ville avec violence. L’eau s’infiltre dans lestrous à rats où sont retranchés les Viets. Plusieurs abris sont inondés, il faut déménager enurgence. L’humidité est telle que les pansements pourrissent sur les plaies, qui s’infectent.La fatigue, la fièvre et la faim affaiblissent les blessés au point qu’ils succombent vite.Certains sombrent dans le délire avant de s’éteindre. Leurs gémissements et leurs appelssont vite insupportables. Un coup de feu claque. Le silence revient…Autour de l’hôpital militaire, un prédateur est à l’œuvre. Ce n’est pas un tigre quipoursuit sauvagement ses proies. C’est un chasseur patient qui guette à l’affût. Il se cachesous le rebord d’un toit ou au coin d’une fenêtre. Il a plein d’astuces pour ne pas se fairevoir et en invente d’autres presque chaque jour. Deux assistants l’accompagnent en

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silence. L’un le guide et le protège – deux fois déjà il a été abattu par des tirs destinés auchasseur, deux fois il a été remplacé. Le second porte le matériel – munitions, outils decamouflage. C’est lui qui remplace l’éclaireur quand il tombe. On recrute ensuite unporteur, il ne manque jamais de volontaires.Comme chaque matin, le chasseur a regardé le ciel. Il n’aime pas la pluie. Pour opérer illui faut du soleil. Il s’est installé à un de ses postes préférés, une fenêtre minuscule sousles combles. Le canon de son lourd fusil à lunette a été passé au cirage pour ne pasrenvoyer la lumière. Il s’embusque, s’assure que le canon ne dépasse pas del’ouverture… A présent, il faut attendre. Des heures peuvent s’écouler. Dans la lunette, ilvoit loin mais ne voit pas tout. C’est pourquoi il a besoin d’un observateur. « Deuxièmeétage, quatrième fenêtre ! »A peine un murmure, mais le chasseur a compris. Un Japonais change de place pour allersatisfaire un besoin naturel. Il est plié en deux, on le devine à peine. Le doigt sur ladétente, le tireur contrôle sa respiration… une seconde… une seule seconde… Il a appuyéau moment même où le casque de l’homme s’inscrivait dans la mire graduée. Pas letemps de réfléchir, ses réflexes seuls ont joué. Il y a une explosion écarlate. Le chasseurs’est laissé tomber au sol, il lui faut s’esquiver, changer de nid. Il le fait après chaque tir,réussi ou non. Le prédateur tirera encore deux fois dans la journée. ………Hanoi, la nuit – Lorsque les ténèbres se referment sur la ville martyre, des ombresquittent l’hôpital. Les Vietminh ne sont pas les seuls à se sentir plus libres, moinsmenacés la nuit. Certains Japonais ont eux aussi du goût pour les promenades dansl’obscurité. Trois d’entre eux viennent de s’aventurer dans les rues. Ils craignent, bien sûr,de rencontrer une patrouille ennemie, mais aussi de sauter sur une mine improvisée, carles rebelles aiment cacher des explosifs un peu partout. Ils sont donc très prudents. A leurrythme lent, par petits bonds séparés d’arrêts parfois prolongés, il leur faut bien deuxheures pour atteindre leur objectif. C’est une maison de deux étages, guère différente desautres. Le premier Japonais longe le mur et entre par un trou. Ses deux compagnons patiententen silence, armes prêtes. Tout peut arriver – le déchaînement d’une fusillade, le râle d’unégorgé, la ruée de miliciens armés de sabres d’abatis. L’éclaireur ressurgit et fais un signe. L’un des soldats le suit, l’autre reste à l’extérieur, àfaire le guet. La maison devrait être occupée par des miliciens, mais le rez-de-chausséeest vide. Les deux hommes grimpent l’escalier qui grince un peu. Le premier Nippons’immobilise et se tourne vers son compagnon qui lui fait signe de poursuivre. Ilsmontent, aussi silencieux que possible. On entend un bruit.Il vient d’une chambre qui donne sur la rue, mais aucune porte ne s’ouvre. Les Japonaisterminent leur ascension. Le premier met une main sur la clenche de la première porte del’étage et se tend. Il compte silencieusement. A trois il ouvre en grand. Son compagnonbraque son arme et balaie l’air d’un mouvement circulaire. Dans la chambre, un grandnombre de douilles près de la fenêtre, quelques meubles, mais personne. Les soldatscontinuent, avançant avec prudence. Ils traversent une nouvelle pièce. Le mur mitoyen dela maison voisine est défoncé. De l’autre côté d’un trou béant, on entend des ronflements.Plusieurs hommes dorment dans la pièce au-delà. Les Japonais sortent chacun une grenade de leur paquetage, les amorcent et les laissentrouler. Ils se replient immédiatement. Une violente explosion désintègre une partie dutoit. Sans demander leur reste, les deux hommes se sont mis à courir. Ils ressortent dans la

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rue où leur camarade veille au grain. Il tire sur plusieurs nha-qués qui sortent d’unemaison proche et les disperse. Les trois soldats fuient à toutes jambes, laissant derrièreeux une rue en proie à la panique. Les Vietnamiens croient avoir affaire à une sortie enforce et tiraillent au hasard. Planqué dans une maison en ruine, le commando écoute lestirs s’espacer et le silence revenir. Aux premières lueurs du jour, les trois hommesregagnent l’hôpital sans avoir fait de mauvaise rencontre.

Tuan Giao – L’aménagement de l’aérodrome est ralenti du fait des précipitations. Lesterrassiers doivent creuser de nouveaux fossés de drainage pour soulager leurs collèguesqui s’échinent à finir les abris. Le bon côté de la chose est que ce temps bouché permet detravailler en plein jour. Il n’y a plus de raison de craindre la venue d’appareils nipponstrop curieux. Les travaux sont plus faciles que de nuit et il n’est pas non plus besoin decamoufler l’ouvrage effectué. Continuellement, les coolies cheminent sur les quatre-vingts kilomètres de route et depiste entre la base Épervier et l’aérodrome. Les quelques véhicules japonais récupérésainsi que la demi-douzaine de Jeeps et leurs remorques (1/4 ton trailer) offertes parl’Oncle Sam sont une aide précieuse pour les bo-dois. Ils permettent d’acheminer plusrapidement certains équipements.Finalement, les terrassiers ne souhaitent qu’une chose : que la pluie continue encore detomber quelques jours, juste quelques jours…

Campagne du PacifiqueOpération GalvanicFunafuti – Pour tenter de riposter aux raids américains contre Nauru, huit G4M3 venusde Tarawa attaquent l’atoll. Ils sont interceptés par 16 P-40 guidés par radar et massacrés ;un seul peut s’échapper.Au crépuscule, un Aichi E19A “Fritz” (un He 119 construit sous licence) réussit à prendredes photos de l’atoll. Les Japonais vont être stupéfaits de découvrir déjà plus de 80appareils sur les images, tandis qu’un ravitailleur d’hydravions est mouillé dans le lagon.En fait, un intense travail est en cours sur Funafuti, comme d’ailleurs sur l’île de Canton.A terme, les deux îles abriteront en tout une centaine de B-24, 24 Ventura, 24 Catalina et56 P-40.

Campagne du Pacifique Sud-OuestOpération TransomKupang (Timor-Ouest) – Si les nouvelles venues du Pacifique Central inquiètent fortl’état-major de la Marine Impériale, à Tokyo, elles n’arrivent que très atténuées au nord-ouest de l’Australie. Depuis plusieurs semaines, l’USAAF et la RAAF bombardent l’île àpartir de Darwin. L’Armée Impériale, chargée de monter la garde sur les conquêtesindonésiennes du Japon, se fait du souci. Ces derniers jours, c’est surtout la partie est(théoriquement encore portugaise) et sa capitale, Dili, qui sont visées par les bombardiersalliés, B-24 et B-25, escortés par des P-40 et des P-38.Mais hier, un hydravion de reconnaissance Kawanishi H6K [Mavis] patrouillant dans lesecteur sud-ouest de l’île n’est pas rentré. Du coup, un autre H6K reçoit la même mission,avec pour ordre de rester en communication radio dès son entrée dans la zone oùl’appareil précédent a cessé de se manifester. Et ce second H6K signale, avant dedisparaître à son tour, qu’il est attaqué par des chasseurs monomoteurs « probablement

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anglais ». Dans ce secteur, cela ne peut vouloir dire qu’une chose : il y a au moins unporte-avions. Et sans doute davantage !L e général Yuichi Tsuchihashi, qui commande la 48e Division, chargée de défendreTimor, rend compte à son supérieur, le général Kenzo Kitano (19 e Armée). Celui-ci luiordonne de mettre Timor et les petites îles qui lui sont rattachées en état d’alerte (voirappendice 1), de repérer la flotte ennemie et de lancer un raid aérien contre elle.En fin de journée, les deux premiers ordres ont été effectués. La 48 e Division est prête aucombat et la flotte ennemie a été repérée – du moins, un grand nombre de transports etleur escorte. Ces navires ne laissent aucun doute quant aux intentions des Anglo-Américains : attaquer Timor-Ouest. Les raids aériens sur Timor-Est n’étaient qu’unefeinte ! Une puissante flotte de couverture ne doit pas être loin et la Marine Impériale estalertée… Mais pour l’heure, après l’attaque de Nauru, celle-ci s’attend à un choc venantde l’est contre les Gilbert, qui font partie de son domaine, et non à une menace venant dusud-ouest contre Timor, très loin de là. Elle ne réagit pas, pensant peut-être à une faussealerte.

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinNanchang (Jiangxi) – Les combats cessent à Nanchang, mais la 200e Division Blindéen’a pas le temps de souffler : malgré le préoccupant étirement de son train logistique etl’usure des véhicules, Liu donne l’ordre de reprendre immédiatement l’avance endirection de Jiujiang, sur la rive sud du Yangzi. L’axe de l’offensive chinoise vadésormais longer le lac Poyang vers le nord.

26 octobreCampagne de BirmanieFront birman – Dans la nuit, des éléments de la 98e Brigade Indienne (19e DivisionIndienne) se sont infiltrés autour de Kyai Long en traversant la Yé. Ils préparent lepassage en force de toute la brigade. Cependant, les Japonais savent que ce secteur estvital : en plus de l’encerclement de leurs bataillons les plus avancés, sa conquête par lesAlliés leur permettrait de déborder tout le dispositif au sud de Yé.Les combats durent toute la journée. Attaques et contre-attaques appuyées par toutel’artillerie disponible se succèdent des deux côtés, parfois même avec l’aide des raresblindés survivants des combats du début du mois. L’aviation intervient également : toutela journée, les Hurricane de la RIAF affrontent les Ki-43 de l’aviation de l’Armée. Deuxappareils sont perdus de chaque côté, mais les Japonais arrivent à soutenir plusefficacement leurs troupes avec plusieurs raids de Ki-48 et de Ki-89. En fin de journée,les Anglo-Indiens renoncent et se replient sur l’autre rive de la Yé en laissant unecentaine de morts sur le terrain.

Campagne d’IndochineLa révolte d’HanoiBase Épervier (Dien-Bien-Phu), 04h00 – Les pilotes émergent à grand-peine dusommeil. Leur dortoir est glacial et tous sont épuisés. Ils se lèvent en échangeant unminimum de paroles. Depuis le temps, ils n’ont plus rien d’original à se dire... Les joursse ressemblent au point de se confondre. Se lever, manger rapidement, décoller juste

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avant l’aube, effectuer la mission, revenir et, parfois, recevoir une nouvelle mission.Jusqu’au soir, où l’on peut enfin s’effondrer dans sa couchette.A moins que, le soir, la couchette reste vide. Parfois un message prévient que le pilote aréussi à sauter. D’autres fois, un nouveau, emprunté et fier, vient prendre possession deslieux. Le bleu parle sans cesse, pose plein de questions, s’enthousiasme. Il ne comprendpas le silence des anciens, qui le fuient et s’irritent lorsqu’il cherche à copiner. Il ne serend pas compte qu’un jour ils ont été comme lui. Ils sont arrivés, frais émoulus del’école de pilotage, certains d’être les terreurs du ciel. Ils ont pris possession d’unebannette encore tiède de la chaleur d’un homme qui n’était pas rentré. Ils ont ensuiteconnu l’enfer…………On dit qu’un quart des pilotes meurent avant leur sixième mission. Ce n’est pas unestatistique officielle, et c’est très exagéré. Mais on le raconte aux bleus, pour leur mettreun peu de plomb dans la tête, enfin, façon de parler… Les pilotes tout juste sortis del’école n’ont pas ce petit quelque chose que leurs aînés ont appris à la dure. Qu’onappelle ça “expérience” ou “instinct” n’a que peu d’importance. Dès leurs premièresmissions, les jeunes aviateurs apprennent des choses qu’aucune école n’enseigne jamais.Les professeurs pilotent des appareils ornés du soleil rouge, les pions sont servants deDCA. Ce sont les meilleurs des enseignants, mais ils ne tolèrent pas la moindre erreur etne connaissent qu’une seule sanction… Pour ressortir diplômé de cette école, il fauttransformer le professeur en comète flamboyante. Alors, le diplôme est peint près du nomdu pilote, sur le flanc de son appareil : un petit drapeau frappé d’un soleil rouge. Certainsen affichent plusieurs, d’autres n’ont droit qu’à une tombe anonyme.………Le lieutenant Bonaventure n’est pas pilote de chasse. Il pilote un Douglas DC-3, unappareil de transport sobrement défini par ces caractéristiques : « 28 hommes, 24 civièresou 2,3 tonnes de fret ». Cela résume bien son rôle. Parachutage ou dépôt d’hommes,évacuation sanitaire ou avion-cargo, le DC-3 (le C-47 Skytrain des Américains) est labête de somme de l’Armée de l’Air et de l’USAAF en Asie du Sud-Est. Un rôle tout aussicrucial que celui des bombardiers et des chasseurs, mais bien souvent relégué à l’arrière-plan dans le journal de Pathé Cinéma.Émilien Bonaventure croit en la baraka, il lui suffit de regarder son appareil cribléd’impacts pour le comprendre. Son précédent voyage a bien failli être un aller simple. Ilest rentré dans un avion pissant l’huile et crachant une fumée aussi noire que l’âmed’Hitler (ou de Tojo, de ce côté du monde). Ce n’est qu’en s’immobilisant en bout depiste qu’il a compris qu’il avait survécu.A ses côtés, les deux autres membres de son équipage inspectent l’appareil avant d’enreprendre possession. Abdel Bellatik, le Marocain, contrôle les instruments de navigation.Le mécanicien, le Congolais Fêtenat Kibelo, vérifie le moteur Pratt & Whitney R-1830tout neuf qui remplace celui mort deux jours plus tôt d’une indigestion de plomb.Le lieutenant Barresi, un petit Rital aux sourcils rapprochés, fils d’immigrés italiens, semêle à l’équipage du DC-3 : « Vous retournez sur Hanoi ? »– Je déteste ces parachutages au-dessus de la ville. Il y a tellement de ferraille dans l’airque l’habileté du pilote n’y fait plus rien. Te faire abattre ou pas, ce n’est plus qu’unequestion de chance.Bonaventure soupire. C’est qu’il a du monde à bord. Outre l’équipage, trois rampantssont embarqués à titre de largueurs.

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Barresi lui décoche un petit coup de poing dans l’épaule : « Allez, au moins, côté ciel,t’inquiète pas, on va vous couvrir. »– C’est gentil.Mais le cœur n’y est pas.………Hanoi – Quand le bimoteur arrive au-dessus de la ville, le temps est dégagé. Le rubanargenté du Fleuve Rouge et les étangs se distinguent nettement, ce sont de bons repères.Un tiers de la ville est aux mains des insurgés vietnamiens et la zone de largage est large,entre la voie ferrée et l’ancien village des lépreux, au sud du musée. Cela permet de nepas avoir à descendre trop bas. Occupés à piloter le lourd engin, Bonaventure et Bellatikne voient pas les éclairs des fusils et des FM japonais ouvrant le feu rageusement denombreuses fenêtres. Il ne s’agit que d’armes légères. L’avion est trop rapide et trop hautpour être inquiété.Les premiers colis tombent pile au point visé, entre deux bâtiments. Aussitôt desVietnamiens sortent de nulle part pour s’en saisir.Au deuxième passage, la DCA se réveille. Bientôt, les flocons noirs se multiplient dans leciel. La seconde série de conteneurs est quand même livrée à bon port.Bonaventure serre les dents. Il faut encore un passage. A l’ouest de la ville, les rizièresdéfilent sous la carlingue. Le DC-3 va arriver sous un autre angle pour tenter de dérouterles artilleurs. Alors que les bâtiments se rapprochent, des mitrailleuses allumentl’appareil. Des trous apparaissent dans la coque. On serre les dents, heureusementpersonne n’est atteint. A deux reprises l’avion est violemment secoué. Cette fois, desshrapnels traversent la carlingue, toujours sans blesser personne. La baraka deBonaventure continue de protéger son appareil. A l’arrière, les trois largueurs – deslégionnaires du 1er REP, donc brevetés parachutistes, c’est bien utile en cas d’évacuationrapide – feignent un sang-froid qu’ils sont loin d’éprouver. Ils tressaillent en voyant destrous se matérialiser soudain dans la carlingue. Mais ce n’est rien. Soudain, ils sontprojetés contre la paroi de droite. Le soldat Mansouri ne peut retenir un hoquet de terreur.Le moteur gauche est en feu !Bonaventure n’a pas le choix, il coupe l’arrivée d’essence. A ses côtés, Bellatik, blessé àla main et au visage, semble sonné. Pas le temps de s’en inquiéter, l’aiguille de l’altimètredescend inexorablement. Pas réflexe, le pilote a piqué plein ouest, vers la base, mais ilsait qu’il sera contraint de se poser bien avant.– Pas le choix, on rallie le plus proche maquis viet, on n’ira pas plus loin.Le lieutenant se souvient que le sud-ouest de Hanoi est considéré comme une zone sansJaps. Il poursuit dans cette direction, tentant de garder l’appareil en l’air le pluslongtemps possible, mais le DC-3, sur un moteur, se retrouve bientôt à faire du rase-mottes au-dessus des rizières. Évitant un village, Bonaventure négocie comme il peut unatterrissage sur le ventre dans une rizière. L’aile gauche touche le sol en premier, déviantl’appareil vers la digue toute proche. La boue collante freine l’appareil juste assez pourqu’il la heurte en douceur, ou presque…Les six hommes s’extraient de l’épave couverts d’ecchymoses. Déjà les habitants duvillage accourent. Ils ont reconnu des Français. Un bruit de moteur fait lever des regardsangoissés vers le ciel, mais le sourire revient – ce sont deux Mustang de l’escorte. Ilstournent au-dessus de l’épave et répondent par des battements d’ailes aux signes del’équipage.Bonaventure sourit : « Quand je pense à toute la paperasse qu’il me faudra remplir deretour à Épervier ! »

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– Moi je pense plutôt au nombre de jours de marche dans ce fichu pays, râle Bellatik.Les légionnaires ont retrouvé le sourire. Bon, la marche, ils connaissent : « Au moinsdeux semaines à pinces ! » rigole Mansouri.– Nous plaignons pas, conclut Bonaventure, on est vivants !

Campagne du Pacifique Sud-OuestOpération TransomKupang (Timor-Ouest) – Les Japonais lancent contre la flotte alliée trente Ki-49Donryu escortés par vingt Ki-43 Hayabusa. A l’aube, un hydravion de reconnaissancechanceux a repéré la flotte de combat alliée, mais son rapport – « Au moins trois porte-avions et trois cuirassés » – a été jugé alarmiste (« Typique des équipages trop nerveuxde la Marine » a observé un officier). De toute façon, aucun appareil américain n’a étésignalé – uniquement des avions porteurs de cocardes et non d’étoiles. C’est bon signe :les Japonais restent convaincus que les porte-avions britanniques sont plus petits que lesAméricains et que leurs avions sont moins performants.Le capitaine de corvette Lagadec est à la tête de l’une des formations de chasse qui vontaccueillir les Japonais…« Tout comme j’avais su le 14 Juillet que la guerre était gagnée en Europe, j’ai su cejour-là qu’elle était gagnée dans le Pacifique, même si beaucoup de sang devait encoreêtre versé… Un an et dix mois plus tôt, les Martlet du pauvre Formidable, seul porte-avions allié de la bataille, tentaient d’arrêter des vagues successives d’avions japonais.A présent, nous étions – Corsair et Seafire – au moins aussi nombreux que les attaquants.Ce fut un massacre. Les quelques Japonais qui nous échappèrent se firent écharper parune DCA bien plus efficace qu’en 1941, et ne purent toucher un seul de nos navires.Le soir, comme si c’était la chose la plus importante de la journée, la flotte entièreapprenait que Danny Potter et moi avions tous deux abattu deux Japonais et que nousétions toujours à égalité, avec trente et une victoires chacun ! »En tout, 19 Ki-49 et 10 Ki-43 sont abattus (sans parler des appareils endommagés), enéchange d’un Corsair français et d’un britannique, plus deux Seafire endommagés qui sebrisent en appontant.L’Eastern Fleet et la Force de Raid (voir appendice 2) ont efficacement couvert le convoiallié, qui vient de Fremantle : vingt transports transportant la 1ère Division de la KNIL(Koninklijk Nederlands-Indisch Leger, Armée royale des Indes néerlandaises),reconstituée en Australie à partir des troupes évacuées d’Indonésie dix-huit mois plus tôt.Soit 12 000 hommes appuyés par des éléments blindés. L’opération Transom est bienpartie !

Campagne de Nouvelle-GuinéeCampagne de Salamaua-Lae Bataille de Roosevelt Ridge – La campagne de Salamaua-Lae s’étire depuis plus de troismois…La semaine précédente, l’activité a été circonscrite aux collines Echo 4 et Echo 5. Endépit de bombardement répétés et d’assauts quotidiens, les Japonais se sont accrochésavec leur habituelle obstination. Pourtant, au dixième jour de la bataille, ils commencentà quitter leurs positions, abandonnant Roosevelt Ridge.

27 octobre

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Campagne d’IndochineTonkin – Une éclaircie sur la région d’Hanoi permet l’envoi d’une reconnaissanceaérienne nipponne en début d’après-midi. Cependant, le ciel reste très couvert sur Dien-Bien-Phu et ses alentours, avec des nuages bas et de la pluie. Après avoir tourné en vainpendant une heure, le Ki-46 Dinah repart bredouille. Il n’a rien vu, mais cela ne veut pasdire qu’il n’a pas été remarqué. Nombreux étaient les yeux tournés vers l’écran du radar,à suivre les oscillations de son écho. Les chasseurs n’ont pu décoller pour le suivre dansla purée de pois, mais les hommes ruisselants qui travaillent à la réfection des pistes deTuan Giao s’en moquent. Ils sont certains d’avoir reçu l’aide des dieux de la pluie !

Quelque part en Cochinchine – Le capitaine Schmidt ôte les écouteurs de la radio decampagne et rend l’appareil à son adjoint, le lieutenant Ramon – comme lui, c’est unhomme du 1er REP. Avec un sous-officier, ils ont été parachutés en Cochinchine pourassister le 2e Daï-doï (Commando) Hoa-Hao, dont les cadres, attentifs, entourent les deuxlégionnaires.– Bon, annonce Schmidt, on va partir pour un raid de six jours. L’objectif est le rachGia. Nous ferons mouvement avec les trois autres unités du Hoa-Hao de façonconcentrique pour ratisser toute la région.Sur la carte, le capitaine montre les positions des autres formations. Le 1er et le 4e

Commando sont eux aussi à l’est de la coupure d’eau. Le 3e Commando se trouve au sud.– Nous aurons droit à l’assistance d’un avion d’observation envoyé par Épervier.Assurez-vous d’avoir le plein de munitions, ça pèse lourd mais dites-vous que vous serezplus légers au retour. Pour les vivres, je vous fais confiance !De fait, les Hoa-Hao n’hésitent pas à piller les villages cambodgiens ou chrétiens (bienque vietnamiens), leurs ennemis raciaux et religieux. Ils ne manquent donc jamais de rienet en font profiter les Français (enfin, les légionnaires) qui les accompagnent et qui ontappris à détourner les yeux. Il vaut mieux laisser faire, ces fanatiques pourraient prendreombrage de toute tentative pour s’immiscer dans ce qu’ils considèrent comme leursaffaires personnelles. Les relations sont assez tendues avec eux ces derniers temps, inutiled’en rajouter !L’adjudant Kader grimace, mais lui ne songe pas aux persécutions subies par lapopulation locale. Il s’inquiète plus de savoir s’il aura assez de cartouches à fournir auxIrréguliers. Kader est en charge de la logistique et malgré son nom de commando, l’unitén° 2 représente un bon demi-millier d’hommes ! Et beaucoup d’entre eux n’ont aucunediscipline de feu… ou de discipline tout court.Schmidt continue : « La bonne nouvelle est que le QG confirme l’isolement de lagarnison de Saigon. Avec la révolte d’Hanoi, ils ne reçoivent plus beaucoup deravitaillement par air et comme nous avons coupé les routes et les voies d’eau, leursituation s’aggrave à chaque heure qui passe. » Quelques cris en annamite saluent cetteannonce.Kader passe alors dans les rangs des Hoa-Hao en distribuant cigarettes américaines etbillets de dix piastres. Le Marocain a le don de savoir quand remettre les petits cadeauxqui entretiennent la bonne humeur des volontaires. Il échange un signe de tête avec sonsupérieur. L’atmosphère est bonne, les regards francs. Le colonel Tam, chef nominal du 2 e

Commando Hoa-Hao, reste en retrait, c’est toujours bon signe.Tam est un bon combattant et – pour un soldat amateur – il a bien compris la tactique desembuscades et des coups de main. Le delta du Mékong est son domaine et les Japonais nes’y risquent plus guère qu’en force, pour de rares et symboliques incursions.

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Malheureusement, c’est aussi un fanatique impitoyable. Apparemment obséquieux enversle capitaine Schmidt, il le hait cordialement, car Schmidt est le véritable chef ducommando et Tam ne supporte pas de servir d’homme de paille à un simple capitaine ! Ilnéglige évidemment le fait que Schmidt a mérité ses galons alors que Tam doit les siens àses relations dans la branche politique du Hoa-Hao.Le capitaine conclut : « Départ dans une heure. Mêmes consignes de marche qued’habitude. Que les officiers veillent bien à ne pas laisser leurs hommes se disperser. »Mis à part une trentaine de blessés laissés au cantonnement, les cinq cents hommes ducommando lèvent le camp.

Campagne du PacifiqueOpération TransomKupang (Timor-Ouest) – A l’aube, les Avenger, Dauntless et Barracuda de la flottealliée, escortés par une vingtaine de Corsair, assaillent le principal aérodrome de Timor-Ouest. Une douzaine d’appareils sont détruits au sol, plus cinq Ki-43 en combat aérien,en échange de deux bombardiers et un chasseur alliés.Peu après, les transports alliés se présentent devant la côte au sud de Kupang etcommencent à débarquer la 1ère Division de la KNIL sur les superbes plages de Tuakdaleet Buraen. Pas de bombardement naval spectaculaire en raison de l’absence defortifications de défense côtière, mais un appui d’artillerie précis assuré “à la demande”par la plupart des navires de l’ABDF-Fleet (elle aussi reconstituée – voir appendice 3) :dix croiseurs 5, quatorze destroyers et trois avisos.Les combats font rage et les Japonais se battent avec acharnement, mais leur réaction estmal coordonnée. Beaucoup d’éléments sont encore dispersés dans les différentes localitésde Timor-Ouest. Cependant, ce qui reste d’aviation à Kupang (notamment des Ki-48[Lilly]) s’efforce de réagir, profitant de la proximité de leur aérodrome. En face, lesHollandais – et leurs troupes coloniales d’Indonésie – sont animés par un ardent désir derevanche. Depuis leur humiliante défaite du début de la guerre, bien des choses ontchangé et ils veulent le montrer !Au crépuscule, la 1ère Division de la KNIL a réussi à établir une solide tête de pont, maisles Japonais ont pu constituer une ligne de défense à peu près cohérente, en particulierentre les plages et l’aérodrome.

Campagne de Nouvelle-GuinéeCampagne de Salamaua-Lae Port Moresby – Un avion de transport portant les insignes de la RAAF se pose sur l’undes terrains de Port Moresby. Ses passagers ne doivent pas être des gens ordinaires.Sinon, comment expliquer la présence de nombreux gradés qui attendent l’atterrissage ?Et lorsque la porte d’accès s’ouvre, une frise de soldats aux uniformes soigneusementrepassés se fige dans un garde-à-vous de parade.Ils saluent deux généraux. L’un d’eux n’est autre que le Lt-général Blamey, venu enNouvelle Guinée pour les préparatifs de l’opération Postern : l’attaque directe de Lae. Lesecond est le major-général Berryman, qui accompagne son supérieur pour rencontrerSavige et évaluer ses performances.

Guerre sino-japonaise

5 Jugé peu utile pour cette mission, le croiseur mouilleur de mines Lamotte-Picquet a été laissé à ladisposition de la 7e Flotte.

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Opération ZhulinWuhan (Hubei) – L’insurrection étant matée à Hankou et Hanyang, les Japonais peuventconcentrer leurs forces contre Wuchang. Au cours de la nuit, d’importants renforts sontarrivés dans les quartiers restés sous contrôle japonais, puis, le matin, d’autres forcesdébarquent sur la rive droite du Yangzi et envahissent le quartier des filatures. Malgré larésistance désespérée opposée par les Partisans, ceux-ci ne tiennent plus en fin de journéeque quelques pâtés de maisons. Toute la nuit, l’artillerie va impitoyablement pilonner cesderniers.

28 octobreCampagne de BirmanieRangoon – Ce soir, le mess du Sqn 136 ne désemplit pas. En effet, la formation a étémise au repos le temps de toucher ses premiers Spitfire ! Mieux encore, ces appareils nesont pas de vieux Mk V, mais des modèles encore jamais vus sur ce théâtre : des Mk VIII.Les Hurricane II épuisés du Squadron vont pouvoir rejoindre les réserves (certains irontreprendre du service aux îles Andaman).L’arrivée des beaux Mk VIII est aussi un signe que la guerre en Europe est en train debasculer : il s’était écoulé plusieurs années entre la mise en service du Spitfire enAngleterre et l’arrivée en Inde des premiers exemplaires de la merveille de Supermarine ;pour le Mk VIII, un an environ seulement. Mais les pilotes les plus expérimentés gardentla tête froide – les squadrons volant sur Spitfire V en Birmanie n’auront pas forcémentdemain de nouvelles montures (il est vrai que les Spit V ne s’en sortent pas mal face auxJaponais : les Ki-43 continuent d’être plus nombreux que les Ki-44 et la qualité despilotes baisse peu à peu).

Campagne d’IndochineTonkin – Le soleil ayant repris ses droits dans le ciel tonkinois, un nouveau Ki-46 partdès l’aube vers l’ouest. Mais il est cette fois attendu de pied ferme. Une patrouille du GCIII/40 est déjà en vol et quand le radar d’Épervier repère l’intrus, une autre de l’Escadron340, en alerte, décolle.Avant que le bimoteur ait pu atteindre le périmètre à photographier, il est intercepté par lapremière patrouille. Néanmoins, la coordination entre les radaristes et les pilotes n’est pasencore parfaite et l’équipage du Dinah aperçoit les chasseurs à temps pour se sauver àtoute vitesse.

Quelque part en Cochinchine – Les sampans glissent lentement sur le canal de TanHiep. C’est cette heure particulière qui précède l’aube, où la nuit envahie de brumerésonne des cris des crapauds-buffles. Accroupis au fond des embarcations, les hommess’agrippent à leurs fusils. Un léger choc lorsque l’on touche la rive. Sans un mot, les Hoa-Hao sautent à terre et se déploient. D’autres groupes émergent des ombres, poisseusesd’un brouillard glacial. Des éclaireurs sifflent en réponse à d’autres sifflets. Quelqueslampes s’agitent. L’avance reprend dans l’obscurité. Des centaines de pieds nus ouchaussés de méchantes sandales de paille martèlent la boue.Moins d’une heure plus tard, le 2e Commando a déjà parcouru dix kilomètres. C’est à cemoment que le soleil, déjà haut, dissipe enfin la brume qui s’attardait sur la plaine.L’astre révèle l’approche des Vietnamiens à la petite garnison japonaise – une trentained’hommes – qui occupe un village proche. Courageux mais, pour une fois, pas

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suicidaires, les Nippons abandonnent immédiatement leur position pour s’enfuir endirection du canal de Thot Not, plus au sud.Tandis qu’un groupe prend l’ennemi en chasse, les Hoa-Hao rassemblent les villageoispour les interroger. Ils ne sont pas tendres et les officiers de la Légion doivent souventtempérer leurs ardeurs, mais par bonheur, les mines patibulaires des Partisans délientrapidement les langues. Tam et Schmidt apprennent ainsi que les Japonais construisent unbarrage sur le Thot Not, pour empêcher les raids Hoa-Hao. Tous les paysans des environssont contraints de travailler sur le chantier.L’avance reprend, les commandos courent presque, houspillés par leurs officiers :« Maolen ! Maolen ! » (Plus vite ! Plus vite !). Il faut arriver avant que les Japonais dubarrage puissent se retrancher ou s’échapper. Les combats commencent dès que lespremiers hommes arrivent en vue de la digue. Les Nippons s’accrochent d’abord avecleur habituelle opiniâtreté. Les rafales de FM s’entrecroisent au milieu des explosionsd’obus de mortier. Mais à mesure que les renforts vietnamiens affluent, les sectionsennemies décrochent en tiroir. Dans le climat particulier de la campagne d’Indochine,coupés de tout renfort, les officiers impériaux ont appris à ne pas gaspiller inutilementleurs hommes. Les échanges de tirs continuent pendant près d’une heure. Cependant,ralentis par la traversée de la digue, les Hoa-Hao sont distancés.Pour repartir, il faut d’abord faire traverser le barrage, à bras d’hommes, aux sampans quiont suivi les fantassins en passant par les voies d’eau. L’après-midi est bien avancéelorsque la poursuite reprend.Toutefois, dans l’étrange et mortel jeu de cache-cache que Partisans et soldats japonaisjouent dans le delta, le chasseur et la proie changent parfois de rôle. Alors que les troupestraversent une rizière, des tirs nourris éclatent, couchant les hommes dans la boue. Lelieutenant Ramon se jette à l’abri d’une diguette et répond avec son FM aux tirs quisemblent partir de tous les côtés. Surpris, l’Espagnol comprend que les Nippons leur onttendu un guet-apens de première classe. Avec un grand sang-froid, ils se sont dissimulésdans la boue des rizières pour laisser passer la tête de la colonne et n’ont commencé àtirer que lorsqu’ils ont été sûrs de la prendre de flanc. Courant au milieu des impacts quisoulèvent la boue, deux Hoa-Hao accourent vers le lieutenant, serrant contre eux desmusettes de chargeurs. Mentalement, il leur murmure des encouragements. Sansmunitionnaires, il ne pourrait pas tenir longtemps ! Heureusement, Bouddha sembleveiller sur les deux Vietnamiens qui traversent la grêle de balles sans une égratignure,apparemment inspirés par le calme de leur officier qui riposte posément. Avec de grandssourires, ils lui tendent des chargeurs pleins.A quelques pas, l’adjudant Kader s’est jeté à couvert. Empoignant un lance-grenadejaponais capturé, il arrose un rideau de bambous agité de mouvements suspects. Lesexplosions sont suivies de cris horribles qui s’achèvent par des râles écœurants. Unmortier japonais riposte, mais sans grande précision.Le groupe d’embuscade est bien mieux coordonné que le commando franco-vietnamien.Les Japonais ont des radios, contrairement aux Vietnamiens. Malheureusement pour eux,l’oncle Sam a été généreux avec les Hoa-Hao. Installé sur un des sampans, un affûtdouble de mitrailleuse lourde anti-aérienne entre dans la danse. Son tir cible l’une aprèsl’autre les positions japonaises avec une redoutable efficacité. Profitant de l’accalmie quisuit, le capitaine Schmidt rameute les sections non engagées. Largement déployées, ellescommencent à envelopper la zone où les Japonais se sont embusqués, fouillant lesbosquets de bambous, jetant des grenades au moindre bruit suspect. Les Japonaishésitent. Quelques groupes sortent de leurs abris pour charger à la baïonnette. On

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s’éventre et on meurt sur les digues. Ramon s’est relevé ; le FM à la hanche, il balaye unesection japonaise qui tentait de manœuvrer. Le lance-grenade de Kader crache de plusbelle.Cette fois, les Nippons ont compris que l’embuscade a échoué. Ils décrochent, bien quecertaines sections au contact ne puissent se désengager. Mortiers et FM continuent àmarteler la rizière, avant d’être déplacés et de reprendre le tir de plus loin. Au bout d’unevingtaine de minutes, un calme précaire revient. Schmidt interrompt une nouvelle fois lapoursuite. Il y a de nombreux blessés, des armes et des munitions à récupérer. Puis le soirtombe, c’est l’heure du bivouac.Les trois légionnaires discutent devant le feu de camp. Les dernières nouvelles politiquessemblent bonnes : Nguyen Binh, le Tigre Borgne, doit à présent avoir rencontré HuynhPhu So, le créateur du Hoa-Hao. Ce serait bien si ces deux hommes pouvaient mettre finaux affrontements entre la secte et le Vietminh… mais les légionnaires n’y croient pas. Ilsvivent avec les Hoa-Hao chaque jour et savent bien qu’il est difficile de discuter aveceux. Après tout, le mouvement a été créé pour chasser les étrangers du Vietnam – tous lesétrangers – et pour restaurer les valeurs ancestrales (ou ce qu’ils ont ainsi baptisé). A longterme, comment pourraient-ils faire sincèrement alliance avec les communistes athées duVietminh ? Pas plus bien sûr qu’avec les Français !

Campagne du PacifiqueOpération TransomKupang (Timor-Ouest) – Un peu avant l’aube, alors que les avions japonais de Kupangs’apprêtent à décoller pour éviter d’être surpris au sol, des fusées de signalisations’élèvent des lignes alliées… En réponse, un roulement de tonnerre monte de la mer.C’est l’opération Solenzara.Les cuirassés MN Dunkerque et Strasbourg, qui font partie de l’ABDF-Fleet, avaientd’abord été jugés peu utiles pour cette opération. Mais les Français ont protesté, évoquédes souvenirs pas si vieux… et l’opération Solenzara a été décidée. En février 1941, eneffet, les deux cuirassés avaient effectué un bombardement très efficace de la zoneoccupée par les parachutistes allemands à Solenzara, en Corse. Cette fois, à l’autre boutdu monde, ils interviennent en quelque sorte de façon opposée, puisqu’ils soutiennent lesforces débarquées la veille. Leur tir vise au premier passage l’aérodrome de Kupang et ausecond les principaux points de résistance japonais. Le bombardement est aussi efficacequ’en Corse, mais cette fois, il permet aux troupes au sol, qui attaquent dès le dernierobus tiré, d’atteindre leur objectif – dans le cas présent, d’enlever l’aérodrome. Puis,escortés par les destroyers USS Buchanan, Dewey, Ellett et Ralph Talbot (des vétérans deGuadalcanal), les deux navires de ligne s’éloignent.Les combats sont encore très intenses toute la journée, mais le général Tsuchihashi,démoralisé par la perte de l’aérodrome, décide de regrouper ce qui reste du 1 er Rgt deTaiwan autour de Kupang. C’est pour lui une solution d’attente : en effet, il réclame à coret à cris des renforts à l’état-major de la 19e Armée, mais surtout il décide de faire passerune partie du 47e Rgt Oita de Timor-Est en Timor-Ouest.Les renforts les plus proches de Timor en dehors de l’île sont en réalité sous lecommandement direct de Tsuchihashi, puisqu’il s’agit du 2e Rgt de Taiwan, qui a étédispersé dans différentes petites îles voisines. Mais les quelques petites unités quitenteront de prendre la mer sur les petits caboteurs (qui, en temps normal, assuraient leurravitaillement) seront presque toutes interceptées par la flotte alliée et éliminées.

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Par ailleurs, les quelques avions survivants à Kupang ont pu en décoller pour gagner Dili,mais ce n’est que pour y subir des raids quotidiens lancés par les avions américains etaustraliens basés à Darwin. A Tokyo, l’Armée Impériale a fini par obtenir que la Marine « fasse quelque chose »,mais quoi ? Les marins persistent à considérer l’affaire de Timor comme une diversion etattendent que les Américains lancent la véritable attaque… en quoi ils sont d’ailleurs dansle vrai ! C’est pourquoi ils se contentent, « dans un premier temps » (affirment-ils),d’ordonner à plusieurs sous-marins présents dans la région de converger vers Timor (cequi ne donnera rien) et de faire appareiller de Truk la 5e Division de Croiseurs : lescroiseurs lourds Ashigara et Chokai, accompagnés du croiseur léger Yubari et desdestroyers Akigumo, Maikaze, Michishio et Oshio, peut-être dans l’espoir de rééditerl’exploit de Tanaka lors de la première bataille de Savo. Mais Truk est bien loin…

Campagne de Nouvelle-GuinéeCampagne de Salamaua-Lae Région du Mont Tambu – La bataille du Mont Tambu en est à son quatorzième jour.Le 162e RCT du Lt-colonel Roosevelt et le 2e Btn du 1er Rgt de Paramarines, sous lesordres du Lt-colonel Victor Krulak, ont quitté Roosevelt Ridge pour attaquer les Japonaissur le Tambu. Pour les soutenir, les artilleurs de la McKechnie Force ont mis en batteriequatre obusiers de 75 mm M1 qui commencent à bombarder Salamaua.

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinWuhan (Hubei) – C’est la fin pour les insurgés de Wuchang. Assaillis les uns après lesautres, les derniers nids de résistance sont nettoyés au lance-flamme. Les massacres sansdiscrimination de civils terrifiés, accompagnés du viol systématique des femmes, serépètent une fois de plus.Au total, plus de 150 000 habitants de la conurbation de Wuhan auront trouvé la mort aucours des combats et de la répression qui les a suivis. Le soulèvement de Wuchang auraduré dix-huit jours ; il est commémoré en République de Chine chaque 28 octobre.

29 octobreCampagne de MalaisiePort Blair (îles Andaman) – Avec la fin de l’opération Tiger sur le continent, tout le Sqn60 quitte Rangoon et vient s’installer dans l’archipel. C’est le WingCo Gibbs qui prend lecommandement opérationnel des deux squadrons de Beaufort, 60 et 217.

Campagne d’IndochineToungoo (Birmanie) – En début de matinée, les derniers équipages de l’Escadron 345embarquent pour Myitkyina après avoir confié leurs fidèles Night Battle à leurs collèguesanglais et indiens. Pour beaucoup d’aviateurs belges, cette séparation ne se fait pas sansun pincement au cœur. Regret partagé par leurs camarades de la RAF, de la RIAF et duBVAS, qui garderont un excellent souvenir de ces joyeux gaillards, si compétents, sihappy-go-lucky (boute-en-train) et si bons connaisseurs en bière (pas comme lesFrançais !).

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Quelque part en Cochinchine – La brume est si épaisse que Schmidt doit attendrequ’elle se dissipe avant de donner l’ordre de se mettre en route. Finalement, le 2 e Daï-doïne repart que vers huit heures. Le capitaine enrage, mais il n’y peut rien. La matinée sepasse en ratissages infructueux des rizières. Les Hoa-Hao ne mettent guère de cœur àl’ouvrage. Ils sont épuisés par les combats des deux derniers jours sans même un pillagedigne de ce nom.Vers midi, un éclaireur ramène un villageois à Schmidt. Le paysan raconte que près dedeux cents Japonais – sûrement le groupe que le commando traque depuis la veille – sesont installés dans son village. Immédiatement, l’Allemand lance des ordres.Peu après, le village indiqué est encerclé, mais l’attaque tombe dans le vide. Lerenseignement était pourtant bon. Un havresac oublié, un chargeur vide près d’uneposition de tir abandonnée, les Japonais étaient bien là… et ils ne doivent pas être trèsloin. Les villageois crèvent de peur et ne sont guère loquaces. Ils ont apparemment encoreplus peur des Japonais que des Hoa-Hao. Furieux, Schmidt ferme les yeux lorsque seshommes, décidément intenables, commencent à piller. Les légionnaires recevrontd’ailleurs leur part du butin sous la forme de menus cadeaux de la part de leurssubordonnés. Cadeaux qu’il serait maladroit de refuser, ce serait une insulte ! Les Hoa-Hao quittent finalement le village sans que quiconque ait parlé.Cette loyauté sera bien mal récompensée. Deux jours plus tard, le village sera rayé de lacarte et tous ses habitants massacrés – aujourd’hui encore, on ignore par qui. Hoa-Hao,Japonais, Vietminh ? Toutes les factions de Cochinchine appliquent la même doctrine :qui n’est pas avec moi est contre moi ! Soupçon, ici, vaut condamnation et nul ne prendde gants en matière de répression.L’après-midi s’achève par d’inutiles recherches qui font grommeler les Hoa-Hao.Schmidt doit se fendre d’un petit discours, promettant que dès demain on prendra lechemin du retour. Ravis, ses hommes l’acclament.Le soir tombe. Dans le crépuscule s’élève la voix d’un vieux phonographe qui répète,inlassable, ses chansons d’avant-guerre. La nuit s’annonce paisible, Schmidt fait undernier tour du campement avant de rejoindre son lit de camp. Les sentinelles le saluent.Soudain, il découvre un attroupement qui braille d’indignation. Surpris, il voit le pseudo-colonel Tam en train de haranguer ses hommes. Son annamite n’est pas très bon, maisassez pour comprendre que Tam vitupère contre la traîtrise des « communistes impurs ».– Que se passe-t-il ? Colonel Tam, pourquoi cette réunion ?– Capitaine, Huynh Phu So a été arrêté, condamné à mort après une parodie de procès etexécuté sommairement dès son arrivée au camp des communistes !La voix de Tam vibre de colère. Il jette un regard trouble au capitaine allemand : « Vousdevriez nous laisser, cela vaudra mieux. Beaucoup d’hommes ici se souviennent que lesFrançais s’étaient porté garants de la sécurité de notre Guide. »Schmidt regimbe sous l’accusation, mais comme il jette un regard sur le cercle de visagesfermés qui l’entoure, il ne peut que retenir un frisson. L’hostilité est palpable.– Je comprends. Je vais vous laisser… à votre deuil. Mais de grâce, calmez-vous,colonel. Ne faites rien d’irréfléchi. Je peux vous assurer que mes supérieurs, tantmilitaires que civil, désapprouvent ce qui vient de se passer. Hô Chi-Minh lui-même avaitgaranti la sécurité de votre Guide ! Je pense que Nguyen Binh a…– Peu importe ! Laissez-nous, je n’ai vraiment pas envie d’en discuter maintenant.Schmidt a fait machinalement un pas en arrière face à la colère de Tam. Conscient deperdre la face, il hoche la tête et se fraie un chemin vers sa tente. Kader et Ramon lerejoignent.

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– Je crains le pire. J’ai hâte de rentrer au camp et de demander des instructions parradio.

Hanoi, 23h00 – Deux Lodestar et un Dakota larguent du ravitaillement aux secteursencore sous contrôle du Vietminh. Endommagé par des mitrailleuses de DCA, unLockheed doit être abandonné par son équipage à proximité de Son La.Malgré ce contre-exemple, si les largages de nuit perdent en précision, ils ont l’avantaged’assurer aux transports une relative sécurité contre la DCA. Et bien sûr, les Japonaisn’ont pas de chasseurs de nuit en Indochine.

Campagne du PacifiqueOpération TransomKupang (Timor-Ouest) – Au troisième jour, les forces hollandaises sont solidementimplantées près de Kupang. Elles préparent l’attaque de la ville, notamment endébarquant leur artillerie et leurs éléments blindés (des chars M5 Stuart et quelques M3Lee). Pendant ce temps, les éléments du Génie s’activent frénétiquement sur l’aérodrome,qu’il s’agit de mettre au plus vite en mesure de recevoir des avions.En face, les Japonais essayent de se regrouper, mais la distance est trop grande entre Diliet Kupang pour que les renforts arrivent à temps, d’autant plus que les rares voies decommunication sont mitraillées par les Corsair de la flotte alliée ou par des P-38 venus deDarwin.

Campagne de Nouvelle-GuinéeCampagne de Salamaua-Lae Région du Mont Tambu – Soutenus par des mitraillages de Boomerang et desbombardements de B-25, les Australo-Américains encerclent les positions japonaises duMont Tambu. De violents combats se poursuivent jusqu’au soir, mais le nettoyage despositions japonaises est relativement facile… selon les normes de la Nouvelle-Guinée-Papouasie. Comme toujours les Japonais combattent courageusement, mais ils n’ont aucun espoir devictoire. Affamés, à bout de munitions et assaillis par des troupes trois fois plusnombreuses, les Japonais se lancent dans des charges suicides. Celles-ci butent sur lesmitrailleuses dont sont abondamment pourvus les Alliés.Lorsque le soleil se couche, le Mont Tambu est devenu un cimetière.

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinProvince du Jiangxi – Sollicitée au-delà du raisonnable, la logistique de la 200 e DB finitpar craquer : l’avance vers Jiujiang doit être brutalement stoppée lorsqu’il s’avère que lesréserves de carburants seront épuisées avant d’atteindre l’objectif. Liu Zhi est furieux,mais il ne peut s’en prendre qu’à lui-même, ayant ignoré les mises en garde répétées deZheng Dongguo. La pénurie de carburant n’est pas le seul souci de la 200e Division :l’usure des véhicules et le manque de pièces de rechange entraîne une multiplication despannes et autres incidents techniques. La route suivie par les forces de Zheng est jonchéede véhicules de toutes sortes abandonnés sur les bas-côtés en attendant une hypothétiqueréparation.

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30 octobreCampagne de Birmanie et MalaisieDes Indiens retournésFront birman – La 1ère Division de la nouvelle Armée Nationale Indienne (ANI), forméeà partir de soldats faits prisonniers lors de la chute de Singapour, arrive en Birmanieoccupée après avoir traversé en train (et en toute discrétion) l’extrémité sud de laThaïlande. La division va mettre encore plusieurs semaines à se déployer complètement,tout en terminant son entraînement. Son rôle sera de garder les côtes, les ponts, les dépôtset autres points stratégiques, de patrouiller les routes et d’assurer des fonctions de policedans les agglomérations, soulageant ainsi l’Armée Impériale.De son côté, la 2e Division de l’ANI (qui ne dépassera jamais l’effectif d’une brigade)doit assurer la couverture de la ligne de ravitaillement entre la Malaisie et la Birmanie.Sans tenir compte, bien sûr, du fait que cela l’obligera à pénétrer en territoire thaïlandais,donc en théorie neutre, mais les cartes de la région sont si imprécises…

Opération Fauconneau / FalconetIle d’Elphinstone, face à la côte sud-est de la Birmanie – Rapport mensuel du coloneld’Astier de la Vigerie.Installations – En dépit d’une nervosité bien compréhensible des Japonais, le nombredes patrouilles à la mer a diminué. En revanche, au début du mois, plusieurs patrouillessont allées explorer le secteur de l’équipe birmane, en posant de nombreuses questions.Le fait qu’il n’y ait jamais eu de problème avec nos paysans qui cultivent paisiblement dupavot sur les zones défrichées et qu’ils soient là depuis plus de six mois semble les avoirrassurés.Le camouflage des armes et du matériel dans la région se poursuit. Nous avons puenterrer à un endroit satisfaisant les fûts de carburant que le Surcouf nous a livrés le moisdernier. Nous avons préféré les transporter de nuit en une seule fois.Contacts – Rien de nouveau en ce qui concerne les groupes de Résistants. Les nombreuxmouvements japonais liés à l’intense activité sur le front ont obligé tout le monde à restertrès discret, en dépit du fait que la dernière livraison d’armes ait eu lieu comme prévu. Ilfaut signaler que le nombre de désertions de la milice locale a augmenté.Activités japonaises – La compagnie qui s’était installée le mois dernier est repartie le 9comme elle était venue. Nous avons eu très vite confirmation que les combats avaientrepris sur le front en voyant arriver de nombreux blessés. Comme en février, Mergui estconsidérée comme une position arrière suffisamment sûre pour y monter un hôpital decampagne. Depuis quelques jours, une autre compagnie de la 71e Division est arrivée, ilssemblent vouloir s’installer car ils ont entrepris des travaux pour fortifier le littoral etpour bâtir un nouvel entrepôt. En annexe, vous trouverez un plan de ces travaux.A noter également une augmentation du trafic routier depuis une semaine environ : denombreux camions passent de nuit, venant semble-t-il de Johore, voire de Singapour.………Journal de Jean-Marie de Beaucorps.« Comment décrire les sentiments qui m’animent en cette fin octobre ? D’abord et avant tout la frustration ! Lors de notre dernier contact avec le Surcouf, nousavons appris que nous avions débarqué dans le sud de la France, la reconquête de notrebeau pays a commencé ! Les chleus vont se prendre la dérouillée… et moi je suis là,creusant et pêchant, pêchant et creusant. Beaucoup de mes camarades, comme moi,rongent leur frein, bloqués sur notre île. Le commandant nous rassure en nous disant que

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ce que nous faisons est important ; mais pas très loin (enfin, moins loin qu’en France), enIndochine, ils se battent… et nous, nous sommes en vacances.Au milieu du mois, il y a eu des bruits disant que ça allait mal pour les Japonais et nousnous sommes pris à espérer. A un moment, nous étions sûrs de recevoir bientôt l’ordre derejoindre les Résistants en forêt ou de foncer en Thaïlande avec nos Birmans. Mais rienn’est venu et d’après ce qu’on sait, les Anglais se sont arrêtés à Ye, plus de 200kilomètres au nord.Putain de guerre ! »

Campagne d’IndochineHanoi/Dien-Bien-Phu – Malgré l’échec de la mission du 28, les officiers du 3 e Hikodanrestent déterminés. Deux nouvelles missions de reconnaissance sont lancées sur Dien-Bien-Phu.Encore une fois repéré par radar, le premier bimoteur nippon est accroché par unepatrouille du 76th FS alors qu’il est encore loin de la cuvette. Grâce à l’adresse de sonpilote et à sa vitesse, le Ki-46 parvient à semer les P-40, bien que ceux-ci aient eul’avantage de l’altitude. Son collègue est moins chanceux : il est abattu à quelqueskilomètres de Tuan Giao par une patrouille du 340.………Tuan Giao – Bien que le soleil brille, la zone reste saturée d’eau. Les terrassierss’échinent à aider leurs camarades artilleurs, qui peinent à mettre en place plusieurspièces de DCA dans leurs emplacements de tir. Le terrain encore boueux et ne facilite pasla tâche des bo-dois. Néanmoins, leur responsable remarque avec satisfaction qu’avecl’arrivée de trois Bofors de 40 mm et d’une batterie de quatre Vickers QF 3-inch (dongénéreux de Sa Majesté britannique), les capacités de défense anti-aérienne del’aérodrome ont été notablement améliorées.

Loin de tout…Cochinchine – Après avoir posté un garde qu’il pense fiable devant sa tente, Schmidt amis longtemps à s’endormir. Malgré tout, le sommeil l’a rattrapé. Au contraire, le colonelTam ne s’est pas couché. Allant d’une natte à l’autre, animé d’une agitation contagieuse,il a murmuré quelques mots aux plus fidèles de ses hommes. Tous ont gardé les yeuxouverts.Vers deux heures du matin, Tam gagne la tente de Schmidt, suivi d’un groupe menaçant.Comme le garde tente de l’empêcher de passer, le Hoa-Hao dégaine son arme de serviceet abat sur place le malheureux. Le capitaine se réveille en sursaut. Il croit à une attaqueennemie, mais quelle n’est pas sa surprise désespérée de voir ses propres hommes se jetersur lui, armés de couteaux et de sabres d’abatis ! Touché mortellement à plusieursreprises, il s’effondre.Le lieutenant Ramon a quelques instants pour réagir. Pistolet en mains, il abat deux de sesassaillants avant d’être submergé. Kader, bien que blessé à l’épaule par un coup de sabre,parvient à se jeter dans le rach tout proche, mais ses poursuivants le mitraillent sans pitiéau fusil et à la mitraillette.Au comble de l’exaltation, Tam se lance dans une harangue improvisée contre les traîtres,les étrangers colonialistes et les fils de chien communistes, bref contre tous les ennemisde la vraie religion.

Campagne du Pacifique Sud-Ouest

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Opération TransomKupang (Timor-Ouest) – Au bout de quatre jours, ayant débarqué hommes, armes etravitaillement, les transports s’éloignent vers l’Australie en compagnie d’une partie del’ABDF-Fleet, laissant le reste en appui de la 1ère Division de la KNIL :- CL MN Jeanne d’Arc (commandement) et Emile-Bertin et HrMs Sumatra ;- DD HrMs Tjerk Hiddes, Van Galen, Van Ghent et Witte de With,- avisos MN D’Iberville, HrMs Flores et Soemba ;- dragueurs de mines MN Koh-Chang et Tourane, HrMs Eland Dubois et mouilleur demines HrMs Prins van Oranje.Cette petite flottille, toujours protégée par le parapluie aérien assuré par l’Eastern Fleet etla Force de Raid, a pour tâche de maintenir le blocus du port de Kupang et d’appuyer deson artillerie les actions des troupes de la KNIL – la précision du tir de la Jeanne d’Arcest très appréciée.A terre, les forces hollandaises ont commencé à évaluer les défenses de Kupang – maisleur commandement aimerait ne pas être obligé de pilonner la ville…

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinJiujiang (Jiangxi) – Un raid de 18 B-24 de l’USAAF escortés par 13 P-51 vise le portfluvial pour préparer l’attaque de la ville par la 30 e Armée, mais le bombardement semontre très imprécis et ne cause que des dégâts mineurs. Dix-huit Ki-43 et cinq Ki-44venus de Wuhan prennent les intrus en chasse. L’escorte est débordée et deux Liberator etun Mustang sont abattus, mais les Japonais perdent pas moins de huit Hayabusa dansl’affaire : de plus en plus de pilotes de l’IJAAF sont des novices à la formation abrégée,et leur taux de survie en combat aérien s’en ressent.

31 octobreCampagne d’IndochineLe radar impossibleHanoi – La perte d’un Ki-46 supplémentaire redouble l’inquiétude des chefs du 3 e

Hikodan. Le fait que « l’avion de reconnaissance type 100 modèle 1 » ne bénéficie plusd’une impunité absolue donne des angoisses aux responsables des opérations.Les rapports des pilotes ayant pu s’échapper indiquent que les chasseurs alliés setrouvaient à chaque fois juste sur leur chemin, et plus haut. Une fois, passe, mais cetterépétition ne peut être le fait d’une coïncidence. Beaucoup pensent à un renforcement despostes de guet avancé dotés de moyens radios et à une augmentation des patrouillesaériennes.Un jeune chu-i (lieutenant) suggère que les Occidentaux ont pu installer un système radar.Mais il se fait vertement rabrouer par ses supérieurs : « Un radar ? Comment installerune installation aussi encombrante dans un lieu aussi perdu ? » Étonnamment, le généralKuwana trouve cette hypothèse intéressante, mais il faudrait avoir une certitude…

Une nouvelle monture pour le 345Myitkyina (Birmanie) – L’Escadron 345, désormais au complet, commence saconversion sur P-39. Passer d’un bombardier lent et peu manœuvrant à un chasseurrapide (et, qui plus est, doté d’un train tricycle) force les pilotes à désapprendre certaines

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habitudes. Ce qui ne se fait pas sans quelques frayeurs. Heureusement, les pilotes deconvoyage se chargent aussi de la formation.

Tout va bien au nord du LaosBangkok – Le Lak Mueang, principal journal de Thaïlande, publie en première page uncommuniqué officiel du gouvernement : la situation dans le nord du Laos (ou, d’après legouvernement, « dans le nord-est de la Thaïlande ») est « normalisée ». Il est vrai que lesaffrontements avec les « bandits » ont pratiquement cessé dans toutes les zones occupéespar l’armée thaïlandaise. Le journal accompagne le communiqué par une envolée lyriquecélébrant le rattachement à la Mère Patrie des provinces perdues du nord-est et traînantdans la boue l’infâme traité de 1907, les colonialistes français et les traîtres khmers. ………Le même jour, le gouvernement thaïlandais adresse un courrier des plus officiels (luiaussi), mais couvert par le plus grand secret, à l’ambassade du Japon. Le texte commencepar un rappel de « l’amitié fraternelle liant l’Empire du Japon et le Royaume deThaïlande, unis par leur vision commune d’une Grande Asie prospère et libérée descolonisateurs ». Après cette entrée en matière très protocolaire, le Premier ministrethaïlandais remercie avec émotion le Japon pour l’aide qu’il a accordée à la Thaïlandepour recouvrer ses provinces perdues. En guise de remerciement, le Premier Thaï a joint àson courrier une analyse de la situation par ses services secrets.Ce texte, long de plusieurs pages, est à des lieues de l’optimisme béat officiellementaffiché par le communiqué paru le matin même. En effet, les renseignements déclarentque le calme revenu dans le nord du Laos n’est dû qu’au retrait de la région des troupesdu général Bourdeau (et notamment du 10e Régiment d’Infanterie Coloniale).Or, cette situation a un précédent. Lorsque « les colonialistes français et les bandits quiles soutiennent » (les Résistants) ont tenté d’attaquer la garnison de Vientiane, « laglorieuse armée thaïlandaise les a contraints à une fuite ignominieuse ». Cependant, lesFrançais n’ont pas fui dans les Hautes-Terres, contrairement à ce que l’on avait d’abordpensé. Ils se sont redéployés plus au sud, où ils ont attaqué des positions japonaiseslégèrement tenues et les ont enlevées « par traîtrise et en dépit d’une courageusedéfense ». Il faut cependant relever, cette fois, d’importantes différences quant à la situationprécédente. Ainsi, les colonialistes français ont reçu le soutien des colonialistes belges quileur ont envoyé, certainement en passant par la Chine, « de nombreux soldats nègresdotés de camions et de fusils antichars ». Cette force – estimée à une brigade d’infanterielégère motorisée – bénéficie d’un soutien aérien assuré par la base de Dien-Bien-Phu. Laprésence d’avions de transport belges dans la région est déjà confirmée par plusieurstémoins. Outre ces renforts impérialistes, les Français peuvent aussi compter sur « unnombre important de bandits ». Ces derniers, estimés à 7 000 début juillet, seraient àprésent presque 32 000 !Le rapport conclut que l’objectif des colonialistes est probablement d’attaquer les basesjaponaises du sud du Laos, de manière à couper les communications des éléments del’Armée Impériale occupant Vientiane.………La teneur du message ne surprend pas l’ambassade japonaise. La présence militairenippone dans le même secteur que des unités thaïlandaises met à mal la nouvellepolitique de neutralité affichée par la Thaïlande. Même si le Laos a jusqu’à présent été unsujet soigneusement contourné, les diplomates en poste à Bangkok ont prévenu les

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bureaux du Premier ministre Hideki Tojo, à Tokyo, de l’évolution probable de lasituation. La réponse, fort diplomatique, a été préparée à l’avance. Il suffira juste de lamodifier légèrement pour tenir compte du texte de la lettre qui vient d’être reçue. ………Le soir même, l’ambassadeur du Japon demande et obtient une audience du ministre desAffaires Etrangères thaïlandais. Au terme d’une rencontre fort affable, les deuxdiplomates saluent la victoire remportée en commun contre les colonialistes et larestitution à la Thaïlande des territoires lui appartenant de droit. Le maintien d’une forcede paix destinée à intimider « les bandits et les agents de l’impérialisme français »n’étant plus nécessaire, le Japon va redéployer les troupes impériales restant au Laos dansdes régions encore à libérer des pernicieux agents français. La poignée de main qui suitcet accord, abondamment flashée par les journalistes, met fin à la dernière opérationmilitaire commune entre le Japon et la Thaïlande. ………Avec l’agitation que la Thaïlande connaît depuis plusieurs mois, la moindre action de sesdirigeants est passée au crible par un nombre surprenant d’observateurs. Le fait est quedes gouvernements et des organismes non gouvernementaux, légaux ou non, locaux ouvenus du monde entier, ont leurs agents, leurs informateurs et leurs sympathisants dans lacapitale de la Thaïlande. Avec autant d’yeux et d’oreilles à l’écoute, les événements setrouvent commentés de Tokyo à Washington en passant par Londres et Alger en moins devingt-quatre heures. ………Hanoi – L’officier qui entre dans le bureau du général Rikichi est porteur d’un textevenant directement du déchiffrage. Il a été envoyé par l’ambassade japonaise à Bangkok.En le lisant, le gouverneur militaire ne peut retenir un sourire. En effet, à ce momentprécis, vingt pour cent environ de ses forces sont coincées dans le nord du Laos. Avectoutes les routes transversales coupées jusqu’au Cambodge, la région de Vientiane est àl’extrême bout de la logistique japonaise en Indochine. C’était déjà le cas lorsqu’il avaitdonné l’ordre à la 56e Division de se rendre sur place pour aider ces maladroits deThaïlandais, mais à l’époque, il n’avait guère le choix. Une défaite de l’allié thaï auraitété au moins aussi embarrassante pour lui que pour Bangkok. Mais aujourd’hui, laneutralité soudaine de la Thaïlande crée une situation unique au Laos. On vient enfin delui délier les mains. Un bruit lointain de canonnade lui fait lever la tête. On se bat à Hanoi même ! Il estvraiment plus que temps de récupérer les effectifs engagés au nord du Laos. Le généralRikichi fait signe à son ordonnance : « Un message pour le Q.G. de Vientiane… »

Campagne du Pacifique Sud-OuestOpération Transom / ExporterKupang – La 1ère Division de la KNIL resserre lentement son étreinte autour de la ville.………Mer de Banda (au nord de Timor) – Le groupe des Dunkerque et Strasbourg, quipatrouille au large de Timor, vient de s’enrichir de quatre petits bâtiments. Pour l’œil d’unéventuel avion japonais, il s’agit de quatre destroyers venus renforcer l’escorte des deuxnavires de ligne. En réalité, ce sont d’ex-destroyers : il s’agit des transports rapides(APD) USS Rathburne, Talbot et Thatcher et HMAS Stuart. Les dix bâtiments mettent lecap à l’est-nord-est, apparemment pour continuer de patrouiller contre une éventuelleintervention de la Marine japonaise.

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………Mer de Timor – Pendant ce temps, les transports qui rentrent à vide de Kupang ne sedirigent pas vers le sud-sud-ouest et Fremantle, mais vers le sud-est et Darwin. En pleinemer, sous un ciel dûment contrôlé par les chasseurs basés en Australie, leur convoi encroise un autre, de même importance. Ce dernier, qui vient de Darwin, est escorté par huitdestroyers de la 7e Flotte US. Ces derniers prennent alors en charge les transports venantde Kupang qui se dirigent vers le sud et les transports venant de Darwin poursuivent leurroute vers le nord avec l’escorte du convoi de Kupang.Ce nouveau convoi transporte la 9e DI (AIF), vétéran des combats d’Afrique OrientaleItalienne, et des éléments de la 2nd Armoured Division (AIF). Il est à présent escorté parla partie australo-néozélandaise de l’ABDF-Fleet, renforcée de l’Anglais London :- CA HMS London- CLAA HMAS Hobart (commandement)- CL HMAS Brisbane et HMNZS Achilles et Leander- D D HMAS Warramunga, Napier, Nepal, Nizam e t Norman, Quadrant, Quality,Queenborough, Quiberon et Quickmatch- avisos HMAS Swan et Warrego.Au même moment, les forces aériennes australiennes, américaines et hollandaises baséesdans la région de Darwin, et équipées de B-17, de B-24, de B-25, de P-38 et de P-40,lancent plusieurs raids d’une puissance inusitée contre la capitale de Timor-Est. C’est lepoint d’orgue de la campagne commencée des semaines plus tôt pour “attendrir” lesdéfenses du port et de la ville de Dili, et qui n’avait connu qu’une petite accalmie aumoment de Transom.L’opération Exporter est en route !

Opération GalvanicPearl Harbor – L’état-major de la Marine Impériale – ou, plus exactement, l’amiralYamamoto – avait vu juste. Transom (même avec Exporter, qui a tout juste commencé)est, pour une part au moins, une diversion. Les choses sérieuses commencent aujourd’hui.Le contre-amiral Turner appareille à la tête de la Task Force 52, ou Southern AttackForce. Son escadre se compose de :- trois cuirassés anciens : Pennsylvania (amiral), Colorado et Maryland ; - trois porte-avions d’escorte : Chenango, Sangamon et Suwanee ; - deux croiseurs : Helena et Nashville ;- et 12 destroyers : Gansevoort, Meade, Dale, Worden, Abner Read, Burns, Gridley,Anderson, Morris, Mustin, Russel, Wainwright.Ils escortent six transports emportant un régiment renforcé (Regimental Combat Team) dela 27e DI, trois LST emportant des engins de débarquement LVT-2 et un LST emportantdes chars.………Quelques heures plus tard appareille la Task Force 50, commandée par le contre-amiralPownall, avec :- quatre cuirassés récents : Alabama, Indiana, Massachusetts et South Dakota ; - six porte-avions d’escadre : Enterprise, Hornet, Bunker Hill, Essex, Lexington II etYorktown II ;- quatre porte-avions légers : Belleau Wood, Cowpens, Independence et Princeton ;- deux croiseurs lourds : Baltimore (amiral) et Minneapolis ; - trois croiseurs légers antiaériens : Juneau, Oakland et San Diego ;

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- et 20 destroyers : Aulick, Bradford, Brown, Bullard, Charrette, Chauncey, Conner,Erben, Fletcher, Hale, Izard, Jenkins, Kidd, Kimberly, La Vallette, Nicholas, O’Bannon,Radford, Wilson, Edwards.La mission de cette puissante escadre, équipée des types d’avions les plus récents, estd’écraser les forces aériennes japonaises basées aux Gilbert, de réduire à l’impuissancecelles basées aux Marshall et de combattre la Marine Impériale si jamais elle se montrait.A bord de l’Essex se trouve aussi le vice-amiral Spruance qui, en tant que chef de la V e

Flotte, commande l’ensemble de l’opération Galvanic. Et les TF-50 et 52 ne sont pas sesseules forces.

Guerre sino-japonaiseOpération ZhulinProvince du Hubei – Après la fin des combats à Wuhan, les 40e et 116e Divisionsjaponaises se mettent en route vers l’est afin de contre-attaquer la 1 ère Armée chinoise surson flanc droit, tandis que la 39e Division est transportée par voie fluviale à Jiujiang.