Intoxications par les organophosphorés BOUCHET Jean-Baptiste DESC Réanimation médicale...

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Intoxications par les organophosphorés

BOUCHET Jean-Baptiste

DESC Réanimation médicale

Montpellier – Février 2009

Introduction• Deux utilisations principales:

– Insecticides (domestiques et industriels) depuis 1935 (remplaçant des organochlorés)

– Neurotoxiques = arme chimique

– Shampoing antipoux, liquide de nettoyage…

Épidémiologie

• Incidence en augmentation

• Plus de 300 000 morts/an, essentiellement en Asie

• Intoxications: - volontaires le plus souvent (15 à 30% mortalité en Asie)

- accidentelles + rares

• Armes neurotoxiques (guerre Iran/Irak, Guerre du Golfe, attentat Tokyo au gaz Sarin…)

Comparaison entre pays des méthodes utilisées pour les suicides

Self poisoning with pesticides, Eddleston M, BMJ, 2004;328;42-44

Jaffna = Sri Lanka

Physiopathologie• Organophosphorés = Dérivés esters, amides ou souffrés des acides

phosphorique, phosphonique, phosphorothioique ou phosphonothioique.

• Peu hydrosolubles, peu volatils mais très liposolubles (franchissement facile des barrières biologiques)

• Fixation de façon covalente aux cholinestérases (par phosphorylation du site estérasique de l’enzyme),d’abord réversible puis irréversible (par déalkylation = phénomène d’« aging » ou vieillissement de l’enzyme)

Physiopathologie

Fixation des organophosphorés sur les cholinestérases (acétylcholinestérases et butyrylcholinestérases)

Inactivation des cholinestérases.

Accumulation d’Acétylcholine par défaut de dégradation

Hyperstimulation des récepteurs à l’Acétylcholine(SNA, du SNC et de la jonction neuromusculaire)

Réponse exagérée des récepteurs cholinergiques(muscarinique ou nicotinique)

Physiopathologie

Libération d’ACh

Fixation de l’ACh sur son recepteurDégradation de l’ACh

par les cholinestérases

Recapture de la Choline

Organophosphorés

SYSTEME NERVEUXCENTRAL

SYSTEME NERVEUX

SOMATIQUE

SYSTEME NERVEUXAUTONOME

(ortho)sympathique

parasympathique

SYSTEME NERVEUXPERIPHERIQUE

ORGANE EFFECTEUR

acétylcholine (n)

acétylcholine (n)

acétylcholine (n)

acétylcholine (m)

fibre postganglionnaire

fibre préganglionnaire

médullo-surrénale

adrénaline(épinéphrine)

noradrénaline(norépinéphrine)

fibre postganglionnaire

fibre préganglionnaire

muscle lisse,muscle cardiaque,

glande

muscle squelettique

acétylcholine (n)

ganglion

ganglion

Physiopathologie: Système nerveux

• Système nerveux autonome

- Syndrome muscarinique (parasympathique)- Myosis- Bronchospasme- Hypersécrétion (lacrymale, sudorale, nasale, salivaire et bronchique)

- Vomissements, Diarrhées, Coliques- Bradycardie et HypoTA

- Syndrome nicotinique ( sympathique)- Mydriase- Tachycardie et HyperTA

• Système nerveux central- Confusion, Coma, Agitation, Convulsion - Dépression respiratoire

• Jonction neuromusculaire- Fasciculations, Paralysie musculaire

Signes cliniques: La crise cholinergique

Formes cliniques• Multiples et variées, en fonction de la porte d’entrée et du type de

toxique.

• Classiquement, syndrome muscarinique au premier plan (parasympathique) associé à une détresse respiratoire.

• Porte d’entrée:- inhalation: oppression thoracique et signes généraux rapides - cutanée: fasciculations en regard, paralysie - ingestion: signes digestifs puis signes généraux plus tardifs

• Type de produit:Symptomatologie des neurotoxiques (NOP) insecticides (IOP)

• 2 formes retardées:- Paralysie proximale survenant 1 à 4 jours après l’intoxication

sans syndrome cholinergique = « syndrome intermédiaire » NEJM, 1987;316;761-763

- Polyneuropathie démyélinisante 1 à 3 semaines après l’intoxication.

Diagnostic

• Diagnostic: Anamnèse + signes cliniques

• Biologie (si doute diagnostic):- Butyrilcholinestérases plasmatiques diminuées: sensible pour le diagnostic, utile pour le suivi (élimination), mais pas en tant que marqueur de sévérité.

- Acétylcholinestérases globulaires diminuées: bon marqueur de sévérité mais techniquement difficile.

Traitement

1- Décontamination

2- Traitement symptomatiqueRéanimation respiratoire Réanimation

cardiovasculaireTraitements

anticonvulsivants

3- Traitement spécifiqueAnticholinergiques =

AtropineLes Oximes

Décontamination• Décontamination digestive (aucune preuve scientifique)

- Lavage gastrique:si stabilisé et conscient ou intubési délai < 2 heures

- Charbon activé: très discuté

• Décontamination cutanéeDéshabillage + Lavage eau et savon

Eddleston M: A randomized controlled trial of multiple dose activated charcoal in acute-self poisoning. Lancet 2008,371(9612):579-587

Traitement symptomatique• Airway, Breathing and Circulation• Position PLS, Proclive• Oxygénothérapie, si besoin MHC voire Intubation• Remplissage Amines• Valium 5-10 mg si agitation ou convulsions

Traitement spécifique• Atropine

- Action par compétition avec ACh mais pas d’action sur les cholinestérases

- Débuter précocement

- Si présence de signes cliniques (myosis, sueurs, difficultés respiratoires…)

- Doses élevées bien tolérées

AtropineExemple de protocole

- Bolus initial de 1 à 3 mg d’atropine IV

- Évaluation clinique régulière avec 3 objectifs essentiels: 1- Auscultation pulmonaire avec disparitions des crépitants ou

sibilants 2- Fréquence cardiaque > 80 bpm

3- PAS > 80mmHg

- A 5 min, réévaluer et doubler la dose du bolus précédent et ce toutes les 5 min jusqu’à normalisation clinique.

- Une fois stabilisé, débuter de l’atropine IV en continu avec un débit = 10 à 20% dose totale de titration / heure.

- Réévaluer régulièrement: sous dosage ou surdosage (délire, agitation, fièvre, iléus, rétention urinaire…)

Protocole Atropine: Exemple

Eddleston M.Early management after self poisoning with an organophosphorus or carbamate pesticide – a treatement protocol for junior doctor. Critical Care 2004;8;R391-R397

Traitement spécifique: Les oximes

• Réactivateur des cholinestérases

• Découvert et utilisé depuis années 1950 Namba T, JAMA, 1958

• 3 actions: - hydrolyse liaison enzyme – inhibiteur - hydrolyse l’inhibiteur - atropine like (action synergique)

• Inefficace si « aging », donc utilisation précoce

• Utilisé de manière empirique sur raisonnement physiopathologique mais aucune preuve de son efficacité clinique.

• Néanmoins recommandé par l’OMS: Pralidoxime en bolus de 30 mg/kg puis 8mg/kg/h

Evaluation of antidote for poisoning by organophosphorus pesticides; Emergency medicine 2000

Aucun bénéfice sur la mortalité

Pas de bénéfice non plus en terme de:

- Nécessité de VM

- Nécessité de mesure de réanimation

- Incidence de syndrome intermédiaire

Neurotoxiques organophosphorés

• 2 types:- les agents G : tabun, sarin, soman

volatils action par voie respiratoire

peu ou non persistants

- les agents V

très peu volatils action par voie cutanée

persistants risque de transfert de contamination

• Mécanisme d’action identique aux IOP• Symptomatologie + marquée (↑ affinité pour les

cholinestérases et ↑ lipophilie): convulsions+++• Tt identique + anticonvulsivants systématique

Clonazepam ou Midazolam en curatif

Diazepam uniquement en préventif Afssaps, juillet 2003

Neurotoxiques organophosphorés

Traitement spécifique

SFAR 1999

Conclusion• Mortalité élevée

• Rare en France (Asie+++)

• Hétérogénéité clinique (>100 toxiques différents)

• Syndrome cholinergique

• Diagnostic clinique ± biologique

• Traitement: Réanimation + Atropine

• Manque de données pour décontamination et les oximes.

Bibliographie

• Intoxications par les organophosphorés. Conférences d’ actualisation SFAR – Médecine d’urgence 1999

• Management of acute organophosphorus pesticide poisoning, BMJ 2007;334:629-634

• Medical management of Acute Organophosphorus Pesticide Self-Poisoning, Lancet 2008;371(9612):597-607

• Neurotoxiques organophosphorés, Afssaps 2003