Étude de la réponse à l'amputation des phalanges chez la souris : rôle morphogénétique des...

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~ t u d e de la reponse a l'amputation des phalanges chez la souris : r61e morphogenetique des epitheliums, stimulation de la chondrogenese

JEAN-LOUIS REVARDEL ET FARIDA CHEBOUKI Laboratoire de biologie du de'veloppement, Institut de biologie animale, avenue des Faculte's, 33405 Talence CEDEX, France

Requ le 3 juillet 1986

REVARDEL, J.-L., et CHEBOUKI, F. 1987. Etude de la reponse a l'amputation des phalanges chez la souris : r81e morphogCnCtique des CpithCliums, stimulation de la chondrogenese. Can. J. Zool. 65 : 3 166-3 176.

La troisieme phalange de souris se regenere, comme les membres d'urodeles, par Cpimorphose : dkdiffkrenciation, croissance et redifferenciation. Cette aptitude serait due a la persistance locale de caracteres embryonnaires du derme et du squelette et a l'action morphogCnCtique des CpithCliums en prolifkration. L'amputation d'une deuxieme phalange n'est suivie que d'une cicatrisation et du dCveloppement de cals osseux. Ces cals, qui constituent un modele de rCgCnCration tissulaire, peuvent prolifkrer comme les rCgCnCrats chondroblastiques des Anoures s'ils sont stimulCs par des extraits d'CpithClium cicatriciel ou par l'hormone de croissance.

REVARDEL, J.-L., and CHEBOUKI, F. 1987. Etude de la rCponse a l'amputation des phalanges chez la souris: r61e morphogCnCtique des CpithCliums, stimulation de la chondrogenitse. Can. J. Zool. 65 : 3 166-3 176.

The third phalanx of the mouse regenerates through epimorphosis, as it does in Urodela: dedifferentiation, growth, and redifferentiation. This capability would be due to the local persistence of embryonic characteristics in the dermis and the skeleton and to the morphogenetic action of developing epithelia. The amputation of the second phalanx results in scarring and in the formation of bony callosities. When stimulated by extracts of scarring epithelium or by growth hormone, these callosities, which constitute a model of tissue regeneration, can proliferate as do the chondroblastic regenerates in Anura.

[Journal translation]

Les potentialites regeneratrices sont tres faibles chez les Mammiferes et, a notre connaissance, seulement trois cas de regeneration non experimentale peuvent Gtre cites. L'un con- cerne l'embryon de rat a 11 jours de gestation qui, maintenu en croissance in vitro, peut , apres amputation d'un membre, restituer en 44 h un massif conjonctif, mais le developpement ne se poursuit pas au dela (Deuchar 1976). Les deux autres sont plus probants. Des souris igees de 4 semaines (Borgens 1982) et des enfants iges de moins de 12 ans (Douglas 1972; Illingworth 1974; Farrell et al. 1977) peuvent regenerer l'extremite d'une derniere phalange, y compris 1'0s' mais a condition que l'amputation soit situee distalement par rapport au bourrelet germinatif de l'ongle.

Nous nous sommes demande si l'aptitude a se regenerer de la dernike phalange pouvait Stre due a des particularites tissulaires absentes au niveau des phalanges proximales, ce qui nous a conduit a effectuer des amputations a divers niveaux des deuxieme et troisieme phalanges. D'autre part, il reste a determiner si cette regeneration est une epimorphose veritable, faisant intervenir un blasteme issu de la dedifferenciation des tissus anciens, comme chez les Urodeles (Hay 1966; Schmidt 1968; Wallace 198 1)' ou au contraire une regeneration tissulaire prenant naissance a partir de centres de chondrogenese issus de l'activation du perioste, comme c'est le cas chez les Anoures (Goode 1967; Goss 1969; Michael et A1 Sammack 1970; Carlson 1978; Korneluk et al. 1982; Korneluk et Liversage 1984).

Nous verrons que l'etude histologique nous a conduit a considerer deux reponses tres differentes chez la souris : (i) 1'extremitC de la derniere phalange se regenere par epimor- phose, (ii) les autres niveaux du doigt cicatrisent en presentant une grande similitude de reponse avec ceux des Anoures. En consequence, selon qu'il s'agissait de la troisieme ou de la deuxieme phalange, notre expdrimentation a CtC orientCe dans deux voies diffkrentes .

Nous savons que la troisieme phalange ne se regenere chez l'enfant et la souris que si l'amputation est situee distalement par rapport au bourrelet germinatif de l'ongle (Borgens 1982) et

qu'elle est supprimee chez l'enfant (Illingworth 1974) comme chez les Urodeles (Thornton et Bromley 1973)' si un lambeau de peau est rabattu chirurgicalement sur la plaie de fason a fermer celle-ci. Peut-on, dans ces conditions, admettre l'hypothese de Tassava et Mescher (1975)' Mescher ( 1976) et Tassava et Olsen (1982) selon laquelle l'epithelium cicatriciel des Mammiferes ne possederait pas de proprietes morphogenetiques et qu'il serait plus precisement depourvu d'activite dedifferenciatrice, a l'oppose de celui des Urodeles (Polezhayev 1945; Grillo et al. 1968; Revardel et Chapron 1984)? Pour tenter d'evaluer l'influence de l'epithelisation sur les mecanismes de dedifferen- ciation, et ayant remarque que la fermeture de la plaie est habituellement gGnee par le caillot sanguin desseche, nous avons favorise l'epithelisation en diminuant, par une sclerose, l'hemorragie consecutive a l'amputation.

Excepte les trois cas cites, l'amputation d'un membre chez les Mammiferes n'est suivie que d'une cicatrisation et 1'0s sec- tionne ne donne que des cals semblables a ceux qui permettent la reparation d'une fracture. Or, la grande similitude de reponse a l'amputation des Anoures et des Mammiferes (Schotte et Smith 1959; Revardel et al. 1986a) autorise a penser a une parente des mecanismes en jeu dans les deux groupes. Personnellement, nous avons tente de stimuler la regeneration tissulaire chondro- blastique de la deuxieme phalange chez la souris en utilisant les methodes (injections d'extraits d'epithelium cicatriciel, de collagenase et d'hormone de croissance) qui ont permis, chez Rana ridibunda, d'obtenir des regenerats restituant la totalite de la partie perdue du doigt (Revardel 1986; Revardel et al. 1986b). Ces tentatives vont dans le mSme sens que celles deja menees chez la souris a l'aide de la corticostimule (ACTH) et de la cortisone (SchottC et Smith 196 1) et chez le rat de 4 jours a l'aide de l'hormone parathyroi'dienne (Umansky et Kudokotsev 1952).

Modele biologique et methodes Les souris sont des femelles de 10 semaines pesant 26 ii 30 g, de la

race Swiss, souche OF, (Oncin, France, de lere gCnCration) issue en 1965 de la souche CF, (Carworth Farm 1, Missouri), obtenue chez IFFA-CREDO (L'Arbresle, France). Elles sont nourries ad libitum

Printed in Canada 1 ImprimC au Canada

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REVARDEL ET CHEBOUKl

A M P U T A T I O N

FIG. 1. ~~i thkl isat ion en fonction du niveau d'amputation. BG, bourrele EV , Cpiderme ventral.

avec A 0 3, un aliment composk (Usine d'alimentation rationnelle, Epinay , France).

Se'ries expe'rimentales L'amputation est effectuke, comme suit, sur les doigts 2 et 3 de la

patte avant droite (fig. 1) : (i) Amputation au travers de la partie terminale de 1'0s de la

troisieme phalange (fig. 2) : amputation simple ou associCe a une sclerose.

(ii) Amputation a un niveau proximal (au travers de la cavitk mkdullaire) de la troisikme phalange (fig. 2).

A ces deux niveaux, le bourrelet germinatif de l'ongle est respectk, les deux plans d'amputation Ctant obliques l'un par rapport a l'autre. Pour chaque lot, 10 kchantillons provenant de 10 souris diffkrentes sont observks a chaque stade (3, 7, 14, 28 et 35 jours apres amputation).

(iii) Amputation au niveau distal diaphysaire de la deuxikme phalange, en respectant les deux tiers de celle-ci (fig. 14) : amputation simple ou associCe a un traitement aux extraits d'kpithklium cicatriciel, de collagCnase ou d'hormone de croissance.

(iv) Amputation au niveau interphalangien entre les deuxieme et troisieme phalanges (fig. 14) : amputation simple ou associCe a un traitement aux extraits d'kpithklium cicatriciel ou de collagknase.

L'ktude des tCmoins (amputation seule) aux stades 3 , 7, 14 et 35 jours porte sur 10 kchantillons chacun des deux niveaux. L'ktude comparative, entre amputation seule et interventions expkrimentales, est effectuke au stade 21 jours. Le nombre d'kchantillons observks dans ces cas est rkpertorik en figure 21; il varie de 11 a 26.

Amputation et histologie Apres anesthksie de l'animal a l'kther, les doigts sont amputks aux

ciseaux fins. Les plaies ne sont protkgCes par aucun antibiotique ni antifungique et nous n'avons jamais observk d'infection. L'hygiene des animaux est surveillke. Ceux-ci sont dCposCs sur du papier filtre qui absorbe le sang des blessures. Le papier est renouvelk au bout de 2 h. Les animaux sont remis sur une litiere de sciure de bois 8 h aprks amputation. Au moment du prklevement, les kchantillons subissent une depilation a l'aide d'une creme Klorane de copolym2.res quaternaires de vinylpyrrolidone (Laboratoires Klorane, Paris) et sont fixks dans le liquide de Bouin (2 jours). Le squelette est dkcalcifik a l'acide trichloracktique a 5% (3 jours) puis les kchantillons sont dCshydrates au butanol et inclus dans la paraffine (fusion, 56- 58°C) a 70°C, avec

E P I T H E L I S A T I O N

ESSENTlELLEMENT

c d r i V E N T R A L

:t germinatif de l'ongle; EC, kpithklium cicatriciel; ED, kpiderme dorsal;

passage dans trois bains de 24 h chacun. Les coupes de 7 ym d'kpaisseur sont colorkes selon la mkthode trichromique de Masson.

Scle'rose AussitGt aprks amputation, les moignons sont immergks pendant 5 s

dans une solution sclkrosante d'hydroxypolykthoxydodCcane a 0,5% (Polidocanol (Aetoxisclkrol), Laboratoires Dexo, Nanterre) utiliske en thkrapeutique humaine. L'immersion n'est pas suivie d'un rin~age.

Pre'paration et injection d'extraits d'e'pithe'lium cicatriciel Deux quantitCs d'extraits ont kt6 testkes : (i) Dans une premiere skrie, nous avons test6 des quantites analogues

a celles qui avaient donne des rksultats positifs chez Rana ridibunda (Revardel 1986), soit deux injections, les quatrieme et sixieme jours aprks amputation (pkriode de mise en place des centres de chondro- genese), d'extraits de trois CpithCliums cicatriciels du mime animal.

(ii) Les doses utiliskes prCckdernrnent s'Ctant rCvklkes peu efficaces nous avons testk des quantitks plus importantes d'extraits, soit cinq injections, rkparties au cours des cinquieme, sixieme et septieme jours, d'extraits de six kpithkliums cicatriciels d'un animal donneur.

Les extraits sont prkparks extemporankment a partir d'kpithkliums cicatriciels 2gCs de 14 jours (maximum d'kpaisseur) et broyks avec un potter main Kontes dans 70 yL de tampon phosphate Dulbecco (Gibco Bio-culture), pH 7,2. L'homogknat est centrifuge a 500 x g pendant 20 min, a 4"C, de maniere a kliminer les dkbris cellulaires. Les extraits sont injectks, a la base des doigts traitks, a l'aide d'un segment d'aiguille de type court 25G, 518 (Tauzart, Paris), montC sur cathCter servant de reservoir.

Injection de collage'nase La collagknase de type 1 A (Sigma) de Clostridium histolyticum est

injectke, la concentration de 6 y g par microlitre de tampon phosphate, raison de 10 y L a la base de chaque doigt trait6 les quatrieme et sixikme jours aprks amputation.

Injection d'hormone de croissance Deux quantitks ont CtC testkes : (i) Dans une premiere skrie, nous avons testk des quantitks kgales

celles qui avaient donne des rksultats positifs chez Rana ridibunda (Revardel et al. 1986b), soit quatre injections de 4 yg d'hormone de croissance par 10 g de poids de tissus (activitC : 0,8 1 unites USP par milligramme (limites a 95% : 0,66-0,99); National Institutes of

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Health, Bethesda, Maryland), les 6, 8, 10 et 12' jours aprks amputation.

(ii) Aucun rCsultat positif n'ayant CtC obtenu dans les conditions prkcedentes, nous avons teste des quantitks plus importantes, soit 1000 kg d'hormone de croissance par 10 g de poids de tissus, les 6, 8, 10 et 12'jours. Ce sont les rCsultats de ce second lot qui sont consignCs dans cet article.

L'hormone, d'origine bovine, est dissoute ii raison de 300 k g par 100 k L de NaHC03 0,01 M (pH 8,5), puis la solution est ramenCe au pH 7 ii l'aide d'HC1 0,01 M, au moment de l'injection.

Resultats Histologie des doigts aux niveaux ampute's

Histologie de la deuxi2me phalange L'epiderme de la face dorsale du doigt est mince (trois a

quatre assises cellulaires), peu keratinise, avec de nombreux follicules pileux, alors que celui de la face ventrale est epais (six a huit assises cellulaires) et pauvre en follicules. Le derme est separe de l'epiderme par une membrane basale riche en collagene; il comprend deux couches, l'une profonde constituee d'un reseau dense de fibres collagenes et de quelques fibroblas- tes, l'autre superficielle, pauvre en fibres et riche en cellules. Le tissu sous-cutane est de type fibreux liiche; il enrobe les vaisseaux, les nerfs, les tendons et les muscles. Le squelette est totalement ossifie et la cavite medullaire occupe non seulement la diaphyse mais egalement les epiphyses. L'os diaphysaire est tapisse a l'exterieur par le perioste et a l'interieur par l'endoste, enveloppes qui possedent une assise germinative (cambium) accolee a 1'0s et une assise fibreuse. Le cartilage articulaire comprend une ou deux assises de cellules alignees dans une matrice dense. La membrane synoviale, tissu fibroblastique, est ancree sur 1'0s a la limite entre diaphyse et epiphyse (fig. 14).

Histologie de la troisi2me phalange Cette phalange, plus courte que les proximales, presente

plusieurs particularites. L'epiderme ventral est un peu plus epais (8 a 10 assises cellulaires) que celui de la deuxieme phalange. La face dorsale est recouverte, dans la region la plus proximale, par le bourrelet germinatif de l'ongle qui possede une quinzaine de couches cellulaires analogues a celles de l'assise basale d'un epiderme banal. Seule la region proximale de 1'0s est occupee par une cavite medullaire, tandis que dans la zone distale, le tissu osseux est moins compact que 1'0s diaphysaire des premiere et deuxieme phalanges. Le derme a l'apex du doigt est plus liiche que dans les autres zones, il rappelle les tissus mesenchymateux de type embryonnaire, et ses cellules sont disposees de fason radiaire a l'extremite de l'axe squelettique (fig. 3).

Re'ponse a l'amputation Amputation au niveau distal de la troisi2me phalange Apres amputation, la plaie est recouverte d'un caillot sanguin

qui persiste durant 3 a 7 jours. Au stade 3 jours, l'epithelisation est complete dans un tiers

des cas. Alors qu'une amputation au travers d'une phalange proximale est suivie d'une retraction de l'epiderme dorsal sur

une partie de la plaie, ici le bourrelet germinatif de l'ongle prolifere comme l'epiderme ventral. De la sorte, toute la surface d'amputation est recouverte par un epithelium cicatriciel en croissance (fig. I). Le caillot sanguin, desseche a ce stade, se trouve repousse en position plus exteme et, excepte la presence de quelques osteoclastes, la reaction inflammatoire n'est pas encore perceptible (fig. 4).

Au stade 7 jours, tous le doigts ont cicatrise et la reaction inflammatoire est tres accentuee avec presence de nombreuses hematies dans la moelle osseuse. Le moignon osseux subit une digestion osteoclasique localisee a sa surface d'amputation et a la zone superficielle, immediatement adjacente, de la diaphyse. En outre, cette digestion est plus etendue c6te dorsal, face au tissu germinatif de l'ongle. que c6te ventral du doigt. Le tissu sous-cutane subit une dedifferenciation puis une reorganisation dont le principal temoin est l'apparition de neovaisseaux tres dilates en arrike de la zone d'amputation. Cet aspect est retrouve plus tard dans le blasteme tandis que les vaisseaux anciens, plus proximaux et non affectes par le traumatisme, peuvent etre reconnus par leur faible calibre.

La periode de 7 a 14 jours est marquee par une intense proliferation de cellules blastematiques et, a 14 jours, l'ex- tremite du doigt est occupee par un blasteme restituant, dans la plupart des cas, la taille de la partie excisee (fig. 5). Ce blasteme est analogue a celui des Urodeles et se caracterise par des cellules m6senchymateuses a longs prolongements cytoplas- miques et par un reseau de neovaisseaux dilates. A la surface du squelette ancien, des centres de chondrogenese se foment dans les zones ayant subi une digestion ost6oclasique et egalement, semble-t-il, a partir du perioste des zones plus proximales non remaniees .

Entre le 14" et le 21" jour, un deuxieme type de chondro- genese, touchant cette fois la zone axiale du blasteme, apparait (fig. 6). La region peripherique, qui restituera le derme, reste mesenchymateuse (fig. 7). La differenciation gagne dans le sens proximo-distal au sein du blasteme; son apex est encore richement vascularis6 (fig. 8), tandis qu'a sa base, les fibro- blastes (fortement colorables au bleu d'aniline) se chargent de fibres collagenes (fig. 9).

A 28 jours, le neocartilage a subi, dans sa presque totalitk, une ossification enchondrale qui progresse dans le sens proximo-distal.

A 35 jours, l'ossification est complete et seulement quelques ilots sanguins subsistent. La partie perdue de la phalange est totalement restituee (fig. 10).

Cette chronologie est schematisee en figure 13.

Amputation au niveau proximal de la troisi2me phalange Au stade 3 jours, les evenements sont les memes qu'au niveau

distal puis, a 7 jours, un tissu de granulation envahit la cavitk medullaire laissee beante par l'amputation (fig. 11).

Au stade 14 jours, la reaction inflammatoire s'acheve par la pousste d'un tissu conjonctif qui envahit egalement la cavite medullaire (fig. 12). Les remaniements osseux sont tres limites et ne concement que la surface d'amputation.

ABR~VIATIONS : AV, anciens vaisseaux; B, blastkme; BG, bourrelet germinatif; CM, cavite mkdullaire; CS, caillot sanguin; ED, Cpiderme dorsal; EV, kpiderme ventral; NC, nkocartilage; NV, nkovaisseaux; OR, os remanie; OT, os terminal; TM, tissu mCsenchymateux.

FIG. 2. Amputation de la troisikme phalange : (a) au niveau distal; (b) au niveau proximal. x38. Fig. 3. Histologie de la troisikme phalange. L'os terminal est moins dense que 1'0s diaphysaire; le derme est mCsenchymateux. X93,5. Fig. 4-7. Amputation au niveau distal de la troisikme phalange. X 933. Fig. 4. Aprks 3 jours. Prksence d'un caillot sanguin (cas d'une absence de cicatrisation). Fig. 5. Aprks 14 jours. Presence d'un blastkme. Fig. 6. Aprks 21 jours. 0 s remanie dans la zone d'amputation et dCbut de diffkrenciation chondroblastique du blastkme. Fig. 7. Aprks 21 jours. Coupe parasagittale montrant l'aspect des anciens vaisseaux et des nCovaisseaux. Le trait interrompu situe la limite du blastkme.

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Au stade 21 jours, seulement 2 doigts sur 10 ont kt6 le sikge d'une chondrogenkse. Dans un cas, un cal osseux ferme la cavite mkdullaire et un petit massif cartilagineux subsiste a son apex, dans l'autre cas, le cal est limit6 a la surface (en couronne) de 1'0s ancien sectionnk.

La morphogenkse n'Cvolue pas entre 21 et 35 jours et il ne se forme donc pas de blastkme a ce niveau proximal.

Amputation au niveau distal diaphysaire de la deuxiZme phalange

Ce niveau est celui d6ja 6tudi6 par Schott6 et Smith (1959) et par A1 Sammarae (1979); aussi, nous nous limiterons a un rappel des principaux 6vCnements morphog6n6tiques et a quejques remarques personnelles .

Epithe'lisation - Dans les premikres heures, le sang coagule recouvre la plaie. Doivent Gtre notees les observations qui suivent. L'kpiderme dorsal se rktracte sur la plaie qu'il recouvre en partie, alors qu'au contraire 1'Cpiderme ventral ne se dkplace pas et son bord libre s'kpaissit vers 2 a 3 jours par multiplication des cellules germinatives. I1 faut attendre 4 a 9 jours pour que la plaie soit totalement fermke (fig. 15) car l'extremitk osseuse fait parfois saillie a l'exterieur et le caillot desseche n'est pas encore rejet6. L'evolution diffkrente des epidermes dorsal et ventral conduit a la mise en place d'un epithklium cicatriciel dkjetd vers la face ventrale du doigt et donc dissymdtrique par rapport a l'axe du doigt. Cet 6pithCliun1 atteint son maximum d'kpaisseur (16 a 18 couches cellulaires) vers 14 jours et forme ainsi une << coiffe apicale >> analogue a celle classiquement dkcrite chez les Urod2les.

Re'action injlammatoire - Un caillot sanguin recouvre la plaie durant 3 a 7 jours. Deux a 3 jours aprks amputation, le tissu sous-cutand prolifkre. A proximite du plan d'amputation, ce tissu et le derme kvoluent en un tissu de granulation riche en vaisseaux. Entre le 14" et le 21" jour, le tissu de granulation regresse et laisse place a un tissu conjonctif qui forme en definitive un capuchon fibroblastique cicatriciel entre l'ex- trkmitk de l'os et 1'6pith6lium cicatriciel. Ce tissu cicatriciel (fig. 16) pknktre dans la cavit6 medullaire largement ouverte.

Remaniements osseux et chondrogenZse - Aprks amputa- tion, la retraction des tissus internes provoque frequemment la saillie de l'extremit6 osseuse par rapport a la surface de cicatrisation. La region de 1'0s situ6e au contact de 1'6pithklium cicatriciel et du tissu de granulation, riche en ostCoclases, subit une resorption complkte (entre 7 et 14 jours) . Ainsi , un fragment d'os se s6pare puis est englobe et digCr6 par 1'6pithelium cicatriciel (entre 21 et 35 jours).

Dks le stade 3 a 7 jours, des centres de chondrogenkse apparaissent a proximite de la surface d'amputation ou en arrikre de l'kventuelle zone de resorption osseuse. Leur forma- tion est gendralement concomitante d'un remaniement de 1'0s ancien sous-jacent, cependant, il reste difficile de dire s'ils rksultent d'une activation des cellules de la couche germinative du pkrioste ou d'une dediffkrenciation du tissu osseux (fig. 15).

Dks 14 jours, les ndocartilages sont trks vascularis6s et totalement ossifies (fig. 16). I1 faut souligner que ces massifs

osseux sont plus dkveloppks c6t6 ventral que c6t6 dorsal du doigt (18 cas sur 26 6tudiCs). Dans deux cas seulement, la couronne osseuse dCborde 1'extrCmitC de 1'0s ancien mais elle ne ferme pas la zone axiale de la cavitC medullaire envahie par le tissu fibroblastique cicatriciel (rksultats schCmatisCs en fig. 2 1 ).

Amputation au niveau interphalangien entre les deuxiZme et troisiZme phalanges

L'kvolution de l'dpiderme du tissu sous-cutan6 et du derme est identique a celle dkcrite au niveau diaphysaire, mais l'hemorragie et le dkveloppement du tissu de granulation sont discrets. L'Cvknement majeur a ce niveau est la proliferation de la membrane synoviale qui, entre 14 et 21 jours, forme un capuchon fibroblastique cicatriciel a la surface de l'kpiphyse (fig. 17). GknCralement (12 cas sur 19), 1'0s et le cartilage articulaire ne sont soumis a aucun remaniement et il n'y a pas de centres de chondrogenkse. Cependant, de petits cals se develop- pent parfois a la jonction epiphyse-diaphyse (six cas), zone d'ancrage de la synoviale, ou sur le cartilage articulaire (un cas). Enfin, 1'0s diaphysaire, dans un cas, est fortement remanik sur la moiti6 de sa longueur, mais sans qu'il y ait formation de centres de chondrogenkse (resultats schCmatis6s en fig. 21).

EfSet d'une scle'rose aprZs amputation au niveau distal de la troisiZme phalange

Au stade 3 jours, alors que seulement un tiers des doigts tkmoins ont cicatrisk, dans le cas d'une sclkrose, le caillot sanguin est de petite taille et 1'6pithClisation de tous les doigts est complkte.

Au stade 7 jours, le caillot sanguin est totalement r6sorbe et 1'0s a subi des remaniements mineurs. Le blastkme a l'aspect du stade 14 jours chez les tkmoins : sa taille est sensiblement Cquivalente a celle de la partie excisCe.

Aux stades ultdrieurs, les phknomknes sont egalement en avance sur la chronologie des tCmoins. A 14 jours, la moitik du blast2me a subi une differenciation chondroblastique, tandis qu'en absence de sclkrose, cet ktat n'est atteint qu'a 21 jours. L'ossification enchondrale debute avant 21 jours; elle est complkte a 28 jours contre 35 chez les tkmoins.

Action d'extraits d'e'pithe'lium cicatriciel aprts amputation au niveau de la deuxiime phalange, stade 21 jours (re'sultats sche'matise's en fig. 21 )

PremiZre se'rie expe'rimentale : faible dose d'extraits Au niveau diaphysaire, dans 2 cas sur 15, une couronne

osseuse dkborde l'extriimitk de l'os, et un centre de chondro- genkse, encore actif, ferme la cavite medullaire. Dans 10 cas, la couronne osseuse dCborde kgalement l'extrCmit6 de 1'0s mais elle est davantage developpee c6t6 ventral du doigt oh, dans 7 de ces cas, un centre de chondrogenkse reste encore actif a ce stade. Enfin, la presence de cals rudimentaires (un cas) ou leur absence (un cas) peut Gtre rencontrde comme chez les tCmoins non trai tes .

Au niveau interphalangien, 1'0s diaphysaire est remanit5 dans 12 cas sur 15. Ce remaniement est plus 6tendu c6t6 ventral que

ABRI~VIATIONS : Ch, chondroblastes; EC, epithelium cicatriciel; EV, Cpiderme ventral; F, fibroblastes; NC, neocartilage; NV, neovaisseaux; 0, 0s; OA, os ancien; TC, tissu conjonctif; TG, tissu de granulation; TM, tissu mesenchymateux; TV, travees vasculaires.

FIG. 8- 10. Amputation au niveau distal de la troisieme phalange. Fig. 8 . Apres 2 1 jours. Region distale indiffkrenciee du blasteme. X 249. Fig. 9 . Apres 21 jours. Region proximale du blasteme en cours de differenciation chondroblastique. Surface de 1'0s ancien (trait interrompu) recouverte d'un neocartilage. x 249. Fig. 10. Apres 35 jours. Ossification et regression vasculaire. x 98. FIG. 1 1 et 12. Amputation au niveau proximal de la troisieme phalange. x 98. Fig. 1 1 . Apres 7 jours. Dkveloppement d'un tissu de granulation. Fig. 12. Apres 14 jours. Reaction conjonctive, absence de blastkme.

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jours

jours jou jours

ABR~VIATIONS : B, blastkme; Ch, chondroblastes; CS, caillot sanguin; EC, epithelium cicatriciel; NC, neocartilage; NV, niovaisseaux; 0 , 0s; OAR, os an,cien rernanie; Oc, osteoclastes; TG, tissu de granulation; TM, tissu rnCsenchyrnateux.

FIG. 13. Etapes de la regeneration de la troisikme phalange. Aprks 3 jours, cicatrisation; 7 jours, reaction inflammatoire; 14 jours, croissance du blastkme; 21 jours, differenciation chondroblastique; 28 et 35 jours, ossification.

c6te dorsal du doigt e t , dans un cas, il touche toute la zone epiphysaire.

Deuxieme se'rie expe'rimentale :forte dose d'extraits Les six doigts observes au niveau diaphysaire (notes 6+ e n

figure 2 1) presentent un developpement du neocartilage tres superieur a celui des echantillons d e la premiere serie. L a surface d'amputation est totalement remaniee, le cartilage periostique deborde l'extremite d e 1'0s e t la coiffe totalement (fig. 18 e t 19). C e cal n'a encore subi aucune ossification contrairement aux cals des temoins non traites e t deja ossifies a 14 jours. La taille d e ce regenerat tissulaire est approximative-

ment egale a 1 ,4 fois celle du diametre d e l 'os, soit un cinquieme de la longueur d e la phalange.

Action de la collage'nase upres amputation au niveau de la deuxieme phalange, stade 21 jours (re'sultats sche'matise's en fig. 21)

Au niveau diaphysaire, 12 cas sur 2 8 presentent une couronne osseuse qui, comme chez les temoins, est plus developpee c6te ventral. Dans deux autres cas, cette couronne deborde legere- ment l'extremite osseuse e t tend a refermer la cavite medullaire. Enfin, dans les quatre autres cas, les cals dkveloppes unique- ment sur la face ventrale ont une forme en << bec d e perroquet >>

ABR~VIATIONS : CC, centre de chondrogenkse; CF, capuchon fibroblastique cicatriciel; CO, cal osseux; EC, epithelium cicatriciel; ED, ipiderme dorsal; EV, Cpiderme ventral; NC, neocartilage; 0 , 0s; Phl , Ph2 et Ph3, phalanges 1, 2 et 3; R, regenerat tissulaire.

FIG. 14. Histologic normale, coupe parasagittale ne passant pas par la cavitk medullaire des premikre et deuxikme phalanges (les traits interrompus representent les niveaux d'amputation). X 38. FIG. 15 et 16. Amputation au niveau distal de la deuxikme phalange. Fig. 15. Aprks 7 jours. Dkveloppement d'un centre de chondrogenkse a partir du pkrioste. X 93,5. Fig. 16. Aprks 14 jours. Cal totalement ossifie, formation d'un capuchon fibroblastique cicatriciel. x38. FIG. 17. Amputation au travers de l'articulation entre les deuxikme et troisikme phalanges. Aprks 21 jours. Formation d'un capuchon fibroblastique cicatriciel. X 1 19. FIG. 18 et 19. Traitement aux extraits d'ipithelium cicatriciel. Fig. 18. Aprks 21 jours. Detail d'un centre de chondrogenkse issu du pkrioste, zone pkriphirique encore en croissance. x238. Fig. 19. Aprks 21 jours. Massif de neocartilage (regenerat tissulaire) dibordant l'extremite de l'os. X93,5. FIG. 20. Traiternent a l'hormone de croissance. Aprks 21 jours. Formation d'un regenerat tissulaire. x 238.

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FIG. 21. Morphologie des nCoformations obtenues apres amputation seule ou suivie d'un traitement. Stade 21 jours. Pour chaque expkrience, l'effectif total est consign6 a l'angle droit infkrieur de chaque case et la rkpartition est indiquCe sous chaque representation. Le c6tC ventral du doigt est a droite sur les schCmas. Le rep2re + (6') indique les Cchantillons ayant reGu une forte dose d'extraits d'CpithClium. Les rkgions en pointill6 reprisentent les parties cartilagineuses des cals et les rCgions pleines, les parties osseuses.

tkmoin (amputation seule)

dont l'extremite, encore cartilagineuse, est orientee en direction proximale.

Au niveau interphalangien, dans 6 cas sur 14, et contraire- ment aux temoins, un remaniement intense de 1'0s apparait dans la zone d'insertion de la membrane synoviale et il peut affecter toute l'epiphyse. Dans cinq des ces cas, le cal qui resulte de ce remaniement est encore cartilagineux dans sa region ventrale. Dans cinq autres cas, des remaniements de faible etendue, mais affectant toute l'kpaisseur de la diaphyse, apparaissent a divers endroits de 1'0s. Enfin, dans trois cas seulement, et comme il est de regle chez les temoins, aucun remaniement n'existe.

Action de l'hormone de croissance apres amputation au niveau de la deuxierne phalange, stade 21 jours Cfig . 20; r&sultats sch&matis&s en fig. 2 1 )

Les rksultats sont comparables a ceux obtenus en prksence d'extraits d'epithelium cicatriciel. Dans tous les cas, le massif de neocartilage dkborde I'extrCmitC osseuse et, dans 3 cas sur 11, il mesure environ le cinquikme de la longueur de la phalange. Aucun indice d'ossification n'existe encore a ce stade. L'hor- mone de croissance a Cgalement pour effet d'accroitre le diametre de 1'0s diaphysaire.

epi thk l ium c i ca t r i c i e l

Discussion Alors que l'epimorphose des extremitks de membres n'ktait

connue que chez les Urodeles, cette etude la revele Cgalement possible au niveau de la zone terminale de la troisikme phalange chez la souris. I1 est probable que la regeneration du doigt de l'enfant de moins de 12 ans soit de meme nature, car elle necessite le respect du bourrelet germinatif de l'ongle, comme chez la souris, et l'absence de fermeture de la plaie par un epideme ancien, comme chez les Urodeles.

col lag6nase

Comment expliquer que seule l'extremite de la dernikre phalange soit apte a l'epimorphose? Une premiere particularite est le recouvrement de toute la surface de la plaie par un epithelium en proliferation emanant du bourrelet germinatif et de l'epiderme ventral, alors qu'au niveau des phalanges proximales, l'epiderme dorsal se retracte sur la plaie qui n'est ainsi que partiellement recouverte d'un epithelium cicatriciel. Or, plusieurs faits sont en faveur d'une activite morphoge- netique des epitheliums en prolifkration chez la souris. En effet, les remaniements osseux, la dkdifferenciation osseuse et la diffkrenciation chondroblastique du blasteme s'installent en premier lieu, et sont plus intenses, a proximite du bourrelet germinatif et de 1'CpithClium cicatriciel emanant de sa prolifkra- tion. D'autre part, une sclerose locale, effectuee immkdiate- ment apres amputation, limite l'hkmorragie et la rkaction inflammatoire, mais accelere Cgalement l'kpithklisation qui n'est plus gCnCe par la presence du caillot. Dans ces conditions, on constate que la periode de dedifferenciation est corrklCe a la date d'epithklisation. I1 s'ensuit que la mise en place du blasteme ainsi que les autres phases se trouvent avancees de 1 semaine .

La prksence d'un kpithelium en proliferation ne saurait suffire a expliquer l'aptitude de la derniere phalange a se rkgknerer, car une amputation au niveau de sa zone proximale, bien que respectant le bourrelet germinatif, n'est pas suivie d'epimor- phose. Selon nous, ce sont les caracteres embryonnaires de 1'0s terminal, moins compact que 1'0s des autres niveaux diaphy- saires, et du derme, mCsenchymateux a cet endroit du doigt, qui rendent ces tissus aptes a la dediffkrenciation. En effet, comme chez les Urodeles, les cellules blastkmatiques sont issues de la proliferation de cellules dediffkrencikes derivkes des tissus anciens, plus particulierement du tissu sous-cutane et du derme

corticostimuline

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et, secondairement, de l'os. La zone de dedifferenciation peut etre reconnue, en arrikre du plan d'amputation, grice au developpement de neovaisseaux de gros calibre. La mise en place du blastkme remplace la reaction conjonctive (reaction fibroblastique) des phalanges proximales; elle fait suite a la formation du tissu de granulation (reaction macrophagique). L'amas cellulaire, en debut de croissance, a le meme aspect qu'un tissu co~jonctif (fibroblastes fusiformes). 11 ne peut etre design6 comme << blastkme >> que dans la mesure ou l'histolo- gie des stades ulterieurs revkle son aptitude a s'organiser.

L'amputation d'une phalange proximale de souris est suivie d'une cicatrisation et de la formation de cals osseux. La cicatrisation peut etre dkfinie ici comme l'ensemble des processus morphogiiniitiques consecutifs a l'amputation et qui, a eux seuls, ne peuvent conduire a l'edification d'un regenerat. L'hkmostase est plus lente lorsque l'amputation affecte la moelle osseuse que lorsqu'elle passe au travers d'une articula- tion, ce qui pourrait s'expliquer par le caractkre lacunaire du compartiment sanguin medullaire. L'hemorragie qui suit l'am- putation provoque la formation d'un caillot qui, en se des- &chant, gene la retraction de l'epiderme ancien sur la plaie. En definitive, ces phenomenes retardent l'epithelisation qui, en fonction de l'importance du caillot, s'installe de fason variable en 2 a 7 jours. De plus, dans certains cas, le moignon osseux fait saillie en avant de la surface d'amputation et, bien que peu a peu englobe et digere par l'epithelium cicatriciel, il peut retarder 1'6pithelisation jusqu'au 14" jour. Comme chez les Urodkles et les Anoures, l'iipithelium cicatriciel s'epaissit durant quelques jours en une coiffe apicale.

La reaction inflammatoire debute par la formation du tissu de granulation trks vascularise (reaction macrophagique) et se poursuit par une reaction conjointe (ou reaction fibroblastique) du tissu sous-cutane, du derme, et egalement de la synoviale si l'amputation passe au travers d'une articulation. L'amas de tissu co~jonctif forme en avant de l'os sectionne, bien que presentant des similitudes d'aspect avec un jeune blastkme, est inapte a se differencier. Ce tissu conjonctif a tendance a penetrer dans la cavite medullaire qui reste beante. Contrairement a Neufeld (1985), nous n'avons pas constate que la cavite medullaire etait fermee par le tissu osseux se formant aprks dkdifferenciation de l'os ancien a la surface d'amputation. I1 semble que l'accroissement de la masse cellulaire obtenue chez la souris par traitement au NaCl (Neufeld 1980) corresponde plut8t a une exageration de la poussee conjonctive qu'a l'obtention d'un blasteme susceptible de s'organiser ulterieure- ment. En definitive, la poussee conjonctive aboutit a la mise en place d'un capuchon fibroblastique cicatriciel interpose entre l'extremite du squelette et l'epithelium cicatriciel. Les Mam- mifkres n'ont pas l'exclusivite de cette evolution tissulaire qui est deja rencontree au niveau interphalangien chez les Anoures (Revardel et al. 1986a) et meme chez les Urodkles (Revardel et Chapron 1987).

La chondrogenese se limite a la formation de cals ne debordant pas l'extremite de 1'0s sectionne. Cette particularite a ete recemment soulignee par Neufeld (1985). Ceux-ci se developpent a proximite du plan d'amputation par activation du perioste ou, secondairement, a partir de 1'0s remanie par une digestion osteoclasique. Les centres de chondrogenese se developpent preferentiellement c8te ventral du doigt, a proxi- mite de l'epiderme ventral qui, en proliferant, dome l'epith6lium cicatriciel. Cette dissymetrie dans la localisation des cals, bien qu'observable dans des cliches publies anterieurement (Schotte et Smith 1961)' n'a jamais ete mentionnee. Elle constituerait

selon nous un nouvel argument en faveur de l'hypothkse d'une activite morphog6netique des iipitheliums en proliferation, et ceci au meme titre que la prkdominance de la dedifferenciation osseuse et de la differenciation du blastkme a proximite du bourrelet germinatif de l'ongle. Enfin, le cartilage articulaire se montre particulikrement inerte et il n'est que trks rarement le lieu de remaniements. Cette inertie de la zone epiphysaire a deja ete soulignee par Schotte et Smith (1959).

Les extraits d'epithelium cicatriciel favorisent la proliferation des centres de chondrogenkse. Ces resultats sont comparables a ceux obtenus chez Rana ridibunda oh les extraits accroissent tant la frequence de regeneration des doigts que la taille des regenerats (Revardel et al. 1986 b). L'effet des extraits mirite d'etre souligne car, dans le cas de simples amputations, les cals ont une position laterale et ne debordent que trks rarement l'extremitk de 1'0s (2 cas sur 26). De meme, apres traitement a la corticostimuline (Schotte et Smith 1961)' le gain de taille des cals reste trks modeste. Dans le cas present, toute la surface d'amputation est activee et le massif de neocartilage se developpe en direction distale. Dans les meilleurs cas, sa longueur peut etre igale a un cinquieme de la longueur de la phalange.

La chondrogenkse est principalement favorisee a partir du perioste et parfois a partir d'une dedifferenciation de l'os sur la surface d'amputation. Par contre, les extraits sont inefficaces sur le cartilage articulaire; celui-ci reste inerte comme chez les temoins. D'autre part, la collagenase bacterienne favorise de fason importante les remaniements osseux, mais moderement la chondrogenkse, et ceci seulement au voisinage de l'epithelium cicatriciel et de l'epiderme ventral. Cette localisation de la neomorphogenese laisse supposer une sommation des effets de l'enzyme et des secretions des epitheliums.

Contrairement aux hypotheses de Tassava et Mescher (1975) et Tassava et Olsen (1982)' l'epithelium cicatriciel des Mam- mifkres (et, au sens large, les epitheliums en proliferation), posskde une activitk morphogenetique. Dans les conditions de simple amputation, cette action est malgre tout insuffisante pour permettre une proliferation importante des cals. En resume, les epitheliums en proliferation permettent (i) la dedifferenciation des tissus anciens dans le cas d'une epimorphose de membre d'urodkle (Revardel et Chapron 1984) ou de derniere phalange de mammifkre; (ii) l'activation des cellules chondroblastiques dans le cas d'une regeneration tissulaire (regeneration chon- droblastique) d'une phalange d'anoure ou d'une phalange proximale de mammifere .

Nous emettons l'hypothkse que, dans tous les cas, il s'agit d'une action proteolytique touchant les matrices extracellulaires et les surfaces cellulaires et propice a la proliferation. Une telle activite a deja kte obtenue a l'aide de trypsine et de CaC12. Elle permet le developpement de regenerats rudimentaires du doigt chez le rat de 2 jours (Scharf 1961) et stimule la chondrogenkse du membre et de la queue sectionnes chez le rat de 1 jour (Kudokotsev et Kuntsevich 1965).

L'hormone de croissance, comme les extraits d'epithelium cicatriciel, stimule la croissance des centres de chondrogenese et permet aussi le developpement de petits regenerats d'une taille egale au cinquieme de la longueur de la phalange.

En resume, la reponse des neocartilages de souris au traitement par les extraits d'epithelium cicatriciel et par l'hor- mone de croissance est similaire a celle des regenerats chon- droblastiques rudimentaires d'Anoures. Ainsi ces traitements allongent la periode de croissance des neocartilages et retardent l'ossification :

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(i) Chez Rana ridibunda, les regenerats non traites achkvent leur croissance a 70 jours et s'ossifient entre 7 et 12 mois alors que les regenerats traites se developpent pendant 5 a 7 mois (Revardel 1986).

(ii) Chez la souris, les cals non traites sont ossifies a 14 jours alors que les cals traites se developpent encore a 14 ou 2 1 jours. Les traitements aux extraits d'epithelium cicatriciel et a l'hor- mone de croissance, en permettant d'une part les remaniements des matrices extracellulaires et des surfaces cellulaires et d'autre part la proliferation des chondroblastes, maintiennent le carti- lage dans un etat juvenile et favoriseraient ainsi la secretion, par celui-ci, de substances tendant a son automaintien (Kudokotsev 1960) et plus particulikrement celle du facteur antivasculaire (Brem et Folkman 1975). L'hypoxie qui en resulte, retarde l'ossification.

Si l'epimorphose, typique chez les Urodkles (regeneration blastematique), disparait chez les Anoures et ne laisse place qu'a la regeneration tissulaire, il n'en demeure pas moins possible de stimuler experimentalement les regenerats rudi- mentaires de telle sorte qu'ils restituent, en definitive, l'organe perdu (regeneration chondroblastique). A ce titre, les cals osseux des Mammifkres, qui s'avkrent aptes a proliferer lorsqu'on stimule la chondrogenkse, peuvent etre consideres comme les vestiges des regenerats chondroblastiques des Anoures .

Si l'on escompte induire une regheration des phalanges proximales chez les Anoures et les Mammifkres, il semble prometteur de stimuler la regeneration tissulaire plut6t que de tenter d'induire une epimorphose comparable a celle des Urodkles .

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