Biomarqueurs en cancérologie: comment sélectionner le meilleur médicament pour un patient donné?...

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Biomarqueurs en cancérologie: comment sélectionner le meilleur

médicament pour un patient donné?

Docteur Elisabeth LUPORSI

Centre Alexis Vautrin - CHU

Nancy

SFCP Ajaccio

11 mai 2012

www.nature.com/reviews

202/ march 2012 /volume 11

Constat

Pourcentages de réussites

suivant les phases d’essais cliniques

Problématique actuelle

Cancer du sein le plus courant (70% des cas) : T1, N0, ER+, Grade 2. Seule 1 patiente (mais laquelle) sur 100 bénéficiera de façon optimalede la chimiothérapie

Décision de phase III : « go or no go » décision

Taux de réponse > 20 %

Taux de réponse < 20 %, PK

favorables,

Inhibition cibles

Inhibition cibles seules

Pas d’activité biologique

Toxicité

significative

Phase III Phase IIIRetourner en phase I et II

Arrêter le développement

modeste

Phase III inutile, phase II suffisante

Phase IIIPhase III si potentiel et

cytostatique

Arrêter le développement

Activité biologique

Roberts JCO 2003, oct 1; 21 (19) 3683-95

Réponse Susceptibilité Toxicité

Situation de la R et D (Recherche et Développement clinique)

En 2000 la FDA, l’Université d’Arizona, le Stanford Research Institute publient un rapport: « Critical Path Initiative List ».

Ce rapport traduit une inquiétude face au faible taux de rentabilité du développement classique (limites des essais avec augmentation du risque d’erreur car comparaisons statistiques multiples, analyses intermédiaires inopinées)

En 2004 quelques chiffres :

• - développement d’un nouveau médicament 10 à 15 ans

• - coût moyen de développement d’un médicament = 1,5B$

• - faible productivité (1 mise sur le marché pour 5000 composés testés)

Raison : absence d’outils méthodologiques d'analyse probabiliste efficaces en phases I et II

Les 6 recommandations du « Critical Path Opportunities Report » de 2006

Développement de biomarqueurs à partir de modèles expérimentaux pertinents : « surrogates endpoints » prédictifs de l’efficacité et de la toléranceRationalisation clinique efficace : sécurisation des patients, avec contrôle d’innocuité (méthodologies probabilistes modernes)BioinformatiqueQualité de fabricationLutte contre les infections émergentesRecherche clinique en pédiatrie

Méthodologies adaptatives « adaptive designs » Renouveau actuel constaté aux US

Critères de jugement des essais

  Biais Puissance

Survie globale AucunFaible car nécessite beaucoup de patients

Qualité de vieBeaucoup de variables inconnues

Faible car nécessite beaucoup de patients

Survie sans maladie (adjuvant)

Survie sans progression (métastatique)

Critères peu adaptés aux traitements ciblés

Correcte mais subjectivité

Taux de réponseCritères peu adaptés aux traitements ciblés

Correcte mais subjectivité

BiomarqueurOui (mais contrôles qualité)

Excellente : mesure objective

Les biomarqueurs

Définition d’un biomarqueur

Caractéristique mesurée objectivement (avec précision et reproductibilité suffisantes) et évaluée comme indicateur de processus physiologique ou pathologique ou de l’action de médicaments

Variable au sens statistique dans la perspective du niveau de preuve

http://www.nih.gov/biomarkershttp://www.cancer.gov/biomarkers

Type de biomarqueurs

Physiopathologiques (définition d’une cible thérapeutique)Diagnostiques (classification des individus)Pronostiques (prédiction de l’issue spontanée)De réponse thérapeutique (prédiction de l’issue traitée)D’effets délétères (toxicité)Pharmacogénétiques

trouver le bon biomarqueur (qui peut être composite)

Her2, BCR-ABL, Braf, Alk, EGFR, Kras, BRCA…

2007 : marché mondial des biomarqueurs

48% pour la découverte des médicaments

43% pour le diagnostic moléculaire

9% pour les essais cliniques (efficacité et toxicité d’un médicament candidat)

marché théranostique (approche translationnelle)

companion test (1 biomarqueur associé à une molécule): her2 et trastuzumab

www.biotech-finances.com

Le concept de biomarqueur n’est pas récent mais il évolue

Les technologies nouvelles d’approches analytiques et de criblage à haut débit ont permis l’expansion en particulier de la métabolomique (ensemble des molécules de faible poids moléculaire synthétisées par un organisme) permettant la caractérisation des phénotypes métaboliques, (modifications génétiques et/ou conditions environnementales) et d’établir le lien entre phénotypes et génotypes.

définir un médicament en passant par l’ADN, l’ARN, la protéine et la cible thérapeutique.

ASCO 2001 : système d’évaluation des biomarqueurs

TMUGS (Tumor Marker Utility Grading System) reposant sur :

Des recommandations pour la conduite des phases d’évaluation : protocoles établis, hypothèses claires, définitions des populations et des sous populations, techniques de dosages analytiques répondant à des critères de qualité et mises en place de contrôles de qualité.

2 principes : le concept d’utilité (puissance) et le degré d’évidence (niveau de preuve)

nécessité d’une méthodologie appropriée

Harris JCO nov 2007, vol 25, 33Hayes

2 types de biomarqueurs utiles

Sélection des patients qui doivent répondre

Mesure de la réponse à un traitement

Les 2 sont nécessairesLes 2 doivent être à l’épreuve de schémas

d’essais cliniques innovants et de nouvelles méthodologies permettant de valider leur niveau de preuve et leur utilité clinique

Biomarqueurs de caractérisation de la maladie

Biomarqueurs de réponse

Standardisation des phases d’évaluation

Hypothèse :Cible moléculaire potentielle

Phase 1

Objectif : caractérisation et mesure de la cible : définition de la méthode analytique

Acteur(s) : laboratoire de recherche Méthodes : étude de faisabilité

Phase 2

Objectif : standardisation, contrôle

Acteur(s) : laboratoire expert

Méthodes : étude pilote

Phase 3 Objectif : utilité clinique

Acteur(s) : réseau de laboratoires et groupes cliniques

Méthodes : études rétrospectives, méta-analyses

Phase 4

Objectif : valeurs pronostique et/ou prédictive

Acteur(s) : groupes cliniques

Méthodes : essai prospectif dédié

Utilité et Preuve

Utilité clinique Niveau de preuve

+ + + - Critère spécifique de la décision clinique

- Standard dans la pratique clinique

Niveau I (LOEI)

-Activité clinique du biomarqueur

-Métaanalyse

-Validation par un essai prospectif ou l’analyse des marqueurs est l’objectif principal

+ + - Information nouvelle et indépendante

- Doit être pris en considération dans des conditions spécifiques

Niveau II (LOEII)

-Technique analytique validée

-Études prospectives

-Analyse des marqueurs en objectif secondaire

+ - Signification biologique

- inutilisable

Niveau III (LOEIII)

-Hypothèse biologique

-Large étude rétrospective

-Analyse rétrospective des marqueurs

TMUGS modifiée – méthode d’évaluation d’un marqueur biologique

LOE Type d’étude Validation

IA Essai clinique randomisé qui vise l’évaluation du marqueur. Les échantillons sont collectés et analysés en temps réel

Pas nécessaire mais souhaitable si possible

IB Etude prospective randomisée qui ne vise pas l’évaluation du marqueur. Les échantillons sont stockés pendant l’étude et analysés après la fin de l’étude suivant un protocole

Au moins deux études avec des résultats cohérents

IIA Etude prospective randomisée qui ne vise pas l’évaluation du marqueur. Les échantillons sont stockés pendant l’étude et analysés après la fin de l’étude suivant un protocole

Une seule étude, ou plusieurs études avec des résultats incohérents

IIB Etude rétrospective non randomisée pour l’analyse du marqueur, après échantillons collectés de patients suivis dans un registre observationnel (traitement et suivi standards)

Au moins deux études avec des résultats cohérents

III Etude rétrospective non randomisée pour l’analyse du marqueur, après échantillons collectés de patients suivis dans un registre observationnel (traitement et suivi standards)

Une seule étude, ou plusieurs études avec des résultats incohérents

IV-V Aucun aspect de l’étude est prospective Pas nécessaire, car ce type d’étude ne permet pas d’évaluer l’utilité clinique

23Simon et al JNCI 2009;21:1446-52

Guidance pour les biomarqueurs en essais cliniques (1)

Guidance pour les biomarqueurs en essais cliniques (2)

Guidance pour les biomarqueurs en essais cliniques (3)

Guidance pour PET (1)

Guidance pour PET (2)

Les méthodes adaptatives

Les études adaptatives permettent :

Une acquisition dans un temps court d’une information sécurisée pertinente pour orienter la stratégie de développement sur des bases conformes à la réalité du produit à l’étudeLa recherche de dose optimaleLa détection rapide du bénéfice d’un traitementLa limitation du nombre de patients exposés aux risques toxiquesLe réajustement de la taille de l’échantillonLe changement de l’échelle de dosesLa redéfinition au cours de l’essai des critères de jugementLa création de critères composites ( combinaison de plusieurs biomarqueurs)

Nécessité d’avoir des marqueurs mesurés objectivement, d’acquisition rapide sur une courte période de temps

Exemple de modèle : Approche Bayésienne

Méthodologie largement utilisée en sciences fondamentales et en aide à la décision

La probabilité est la traduction numérique d’un ensemble de connaissances cliniques (collaboration forte cliniciens- anatomopathologistes-biologistes-méthodologistes)

L’expérience personnelle et les connaissance acquises permettent la modélisation au début de la recherche de notions éventuellement subjectives

L’information est accumulée et traitée mathématiquement

Analogie avec approche professionnelle de tous les acteurs Lien information-crédibilité pour établir des propositions

utilisables dans le modèle Formule de Bayes (probabilités conditionnelles, « si, alors sinon »)

Adaptation et formation

Complexité des réponses biologiques à un médicament, importance des facteurs environnementaux (importance de l’interaction)

Variable continue ou classes de variables , réponse dichotomique (2 classes), problème de la zone grise (seuil)

Difficultés éthiques : utilisation de données de pharmaco-génomique et génétique

Implication des professionnels : utilisation adaptée des biomarqueurs et des bénéfices apportées par le test

SPY trial 2 : 720 patients sur 4 ans phase II et 120 patients en phase III

Les essais cliniques

évoluent…

Les essais avec biomarqueur existent (ex:

Combination design) (Freidlin 2010)

Sélection du traitement guidée par le biomarqueur

Essai avec analyse stratifiée par statut biomarqueur

Molecular signature design

Qu’est ce qu’un bon biomarqueur?

Le clinicien a besoin :

- De tests simples à interpréter

- D’assurance qualité

Donc nécessité d’une méthodologie appropriée

Les nouveaux challenges!

Conclusions et perspectives

Obtention rapide de preuves d’efficacité et de toxicité de la thérapeutique en cours de développement Choix de la dose pour l’essai de phase III, diminution du risque de non-démonstration d’effet ou d’effets secondaires trop importants (biomarqueurs du risque thérapeutique)Au final le nombre de sujets doit être suffisant en appui des connaissances acquises sur le domaine Les études pré-analytiques (anatomopathologie en particulier) doivent être correctement réalisées (conditionnement des échantillons)Les analyses biologiques doivent être standardisées avec consensus et contrôles de qualité (traçabilité)Les données sont nombreuses, l’analyse statistique et intégrative est essentielle avec outil et approche progressive standardisée (comparer le nouveau marqueur avec ceux qui sont validés)

Une collaboration multidisciplinaire forte

entre cliniciens, anatomopathologistes,

biologistes, statisticiens, imagiers et industriels

est essentielle