| LOISIRS | JARDINAGE
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La “permaculture”qu’est-ce que c’est ?
Ce mot ne vous dit rien ? Pourtant il pourrait devenir un conceptpionnier pour nourrir la terre demain, à l’échelle du monde ou devotre potager. Rencontre avec Charles Hervé-Gruyer, créateur de
la ferme permacole du Bec Hellouin, en Haute-Normandie.
Faire comme la nature “Permaculture ou culture permanente,
le mot ne dit pas grand-chose aux gens…
Et puis, souvent, on réduit la permacul-
ture à une super méthode de jardinage
naturel. Or les enjeux vont bien au-delà.
Il s’agit vraiment d’inventer le monde de
demain. Bien évidemment à partir du
moment où l’on décide d’imiter la nature,
il y a plein d’applications possibles au jar-
din. Mais quelque part, c’est aussi une
remise en question de pratiques ancrées
en nous depuis des siècles. Je pense au
besoin de décompacter la terre et de la
retourner (bêchage, labour) et de la “net-
toyer”. La permaculture étant avant tout
un système d’organisation des espaces
(que l’on appelle Design), sa première
application au jardin est d’en repenser
l’organisation générale. Favoriser la diver-
sité, reconnecter des éléments de l’éco-
système entre eux pour qu’ils interagissent
(arbres, mare, animaux, insectes, légumes,
fleurs, fruitiers, haies, plantes sauvages...).
Du coup, le jardin est conçu comme un
tout. Les arbres, par exemple donneront
une récolte, favoriseront un micro-climat,
contribueront à abriter des auxiliaires
utiles, fertiliseront le sol en remontant
des minéraux…”
Culture sur buttes“L’un des grands mérites de la perma-
culture a été de reprendre une technique
millénaire qui est la culture sur butte per-
manentes. On réalise des buttes de terre
arable (1,20 m de large sur 60 à 80 cm
de haut est un bon compromis), tout sim-
plement en pelletant la terre des allées,
et éventuellement en y ajoutant du com-
post. Ensuite on ne va plus labourer ou
retourner ces buttes (sauf éventuellement
un décompactage à la grelinette). On y
trouvera plein de bénéfices : la vie du sol
(vers de terre, bactéries, champignons)
qui est un précieux capital, ne sera plus
détruite par le passage du labour ou du
motoculteur. Donc tout naturellement le
sol va s’améliorer d’année en année. Tout
cela, et le fait que l’on laisse en terre cer-
taines racines des légumes cultivés qui
vont continuer à aérer, à apporter de
l’azote ou à transporter les minéraux dans
le sol.”
Paillage organique“Comme dans la nature où le sol n’est
jamais à nu, on préconise aussi de le cou-
vrir d’un paillage organique à chaque fois
que c’est possible (fumier de cheval bien
La ferme du Bec, 2000 m2 au naturelCréée en 2004, cette ferme maraîchère qui allie beauté du paysage comes-tible et productivité, fait aujourd’hui référence en matière d’agriculturenaturelle. 800 variétés de fruits et légumes, petits fruits, médicinales etaromatiques sur les 2 000 m2 cultivés (sur les 1,8 ha du site), sur les buttesdes deux îles-jardins entourées de l’eau dérivée du canal du Bec, le jardinmandala, la forêt-nourricière (fruits-lianes et arbres à coques, haie fruitière),forment un agro-écosystème hautement productif et durable. Étudiée tout à fait sérieusement par l’Inra et Agro Paris Tech, elle démontrela pertinence sociale, économique et écologique de cette nouvelle manièred’être paysan au XXIe siècle (pratiquement sans mécanisation). La fermedu Bec Hellouin a reçu en 2013 la mention spéciale, Espoir de l'Agriculturedurable du ministère de l'Agriculture.
Visites : 1, sente du Moulin au Cat, 27800 Le Bec Hellouin : les groupes à partir de 15 per-sonnes sont accueillis sur rendez-vous, toute l’année ; Tarifs : 8 € , comprenant une visiteguidée d’1 h 30 à 2 heures. Stages week-end et formation à l’éco-centre, se renseigner au02 32 44 50 57 sur [email protected] et sur www.fermedubec.com.
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décomposé, tontes, orties ou végétaux
broyés de taille, paille ou tapis de fougères
dans les allées…) qui, lui aussi, aura plu-
sieurs fonctions : nourrir le sol, parce que
c’est une forme de compostage en place,
protéger de l’érosion et du lessivage, limi-
ter la croissance des adventices (mauvaises
herbes), garder l’eau dans le sol…Fina-
lement tous ces éléments contribuent à
faire de la culture sur butte une technique
à la fois simple, facile à mettre en œuvre,
pas fatigante, ce qui peut devenir inté-
ressant quand on prend de l’âge. Elle est
surtout extrêmement productive, car on
peut y planter les légumes beaucoup plus
serrés (en quinconce tous les 15 ou
20 cm, avec une ligne centrale pour les
cultures sur rames, par exemple). À pro-
duction égale, la butte de culture sera tou-
jours plus petite qu’un espace bêché avec
des rangs en ligne.”
Jardins d’Eden“Avec la permaculture, on agit plutôt
en confiance avec les forces de vie à
l’œuvre dans les jardins. Une sorte de
nouvelle alliance, créée en conscience
par une humanité qui se rend compte
de l’impasse dans laquelle l’a menée une
modernité débridée et qui aspire à recréer
un état d’harmonie avec la Création. Bill
Mollison et David Holmgren, les fon-
dateurs de la permaculture, disent en
exergue de leur premier ouvrage (Per-
maculture 1) : “peut-être allez-vous penser
que l’on cherche à recréer le jardin d’Eden ?”
Et pourquoi pas ? De tout temps les jar-
dins ont été des lieux heureux. Et pour-
quoi pas imaginer des jardins qui seraient
à la fois extrêmement naturels et extrê-
mement productifs ? C’est ce qu’on expé-
rimente ici, à la ferme maraîchère du Bec
Hellouin.”Christine Grandin
• Retrouvez les compléments de cette interview surwww.magazine-racines.fr. Pour suivre, dans notreédition de novembre : Je débute mon jardin perma-culturel.
Pour aller plus loin : Perma-culture, guérir la terre, nourrirles hommes (2014), Perrineet Charles Hervé-Gruyer,Actes sud, collection Do-maine du possible, 367pages, 22,80 €. L’aventuremaraichère et humaine de laferme du Bec Hellouin ra-contée par leurs créateurs.
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Le jardin permaculturel redessine complètement la production potagère sur des buttes de culture qui font partie de l’écosystème qui les entoure (fruitiers, arbres, petites mares, cultures étagées, animaux etc…)
Charles Hervé-Gruyer.La butte autofertile est alimentée en permanenceen matière organique décomposée ou non.
Reportage photos surwww.magazine-racines.fr
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