Una Vida en Color

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Je tiens à remercier ici toutes les personnes qui, d’une façon ou d’une autre, ont contribué à la réalisation de ce livre. Cette collaboration m’a été très précieuse. L’auteur ©éditions Oméga International – F- 31360 Boussens Edition numérique autorisée par l’auteur Numérisation © 2004 Pam-PC Informatique Offert par © 2004 Shekina.com

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la vida en colores

Transcript of Una Vida en Color

  • Je tiens remercier ici toutes les personnes qui, dune faon ou dune autre, ont contribu la ralisation de ce livre. Cette collaboration ma t trs prcieuse.

    Lauteur

    ditions Omga International F- 31360 Boussens Edition numrique autorise par lauteur Numrisation 2004 Pam-PC Informatique Offert par 2004 Shekina.com

  • PREFACE

    Cela fait des annes que je connais Carlo et Michle Brugnoli; leur profond engagement pour l'vanglisation et la mission ont t pour moi un dfi constant. Raison pour laquelle je ne peux que vous les recommander chaleureusement.

    J'ai travers le Sahara avec Carlo lors de son premier voyage en Afrique de l'Ouest. C'est l que j'ai vu natre son amour pour ce continent. Au fil des annes, son engagement n'a cess de s'approfondir. Je crois que cette passion a quelque chose de contagieux!

    Ce livre nous raconte comment une poigne de jeunes a dcid de prendre Dieu au mot au cur de l'Afrique. Dans des circonstances parfois inextricables, ils se sont confis en Lui et ont vu Sa main agir.

    Depuis toujours, Dieu a plac des jeunes dans des situations qui les dpassaient. Souvenez-vous de David, ce jeune berger, qui en affrontant le gant, Goliath, tait plus concern par la rputation de Dieu que par sa propre scurit. C'est parce que le Seigneur lui avait donn la force de vaincre le lion et l'ours, qu'il a renonc l'armure du roi Sal, ne comptant que sur Dieu. C'est arm d'une simple fronde et de cinq petits cailloux, et proclamant que ce combat tait celui du Seigneur, qu'il a vaincu Goliath. De par le monde, des gants spirituels provoquent le peuple de Dieu et le dfient. Ils tiennent captifs de nombreuses nations sous leur emprise tnbreuse. O sont les jeunes "David" qui, revtus de la force divine, iront les anantir et voir le royaume le Dieu s'tablir parmi elles?

    Beaucoup d'autres rcits devraient tre crits pour relater les victoires sur les gants qui oppriment les nations.Votre vie pourrait servir crer la prochaine histoire si vous laissez Dieu vous utiliser.

    Joe Portale

    Fondateur des ministres francophones de Jeunesse en Mission. Doyen Adjoint de la Facult des Ministres Chrtiens de luniversit des Nations.

  • Toute l'quipe remonte dans le bus. Au bout de quelques kilomtres, on sent une odeur de brl... Certains pensent que cela vient du dehors, des feux de bois sur lesquels cuisent les aliments par exemple. Je penche la tte dehors. L'air est pur. Par prcaution, je m'arrte. Maryline s'exclame: Le dessous du bus brle ! J'arrache l'extincteur, qui se trouve derrire moi, et saute de mon sige. Il faut savoir que le rservoir d'essence avait des fuites... A notre arrive Ouahigouya, le garagiste l'avait ressoud et avait fix un sac de jute entre le sol et le rservoir, afin de le protger des pierres projetes par les roues. Ce sac, mal pos, touchait le tuyau d'chappement et venait de prendre feu! Pendant que l'on vacue le bus, je projette le contenu de l'extincteur sur le sac, qui s'teint partiellement. Tandis que quelques-uns intercdent avec ferveur, les autres vacuent la sono et le jerrycan de rserve d'essence. L'extincteur est vide et le feu reprend. Je demande de l'eau mais quelqu'un, pensant que c'est l'essence qui brle, s'exclame: Non, surtout pas d'eau !. Nous jetons alors du sable et de la terre sur le sac, mais il continue flamber sous le rservoir. Je me dcide alors saisir le Coolman, grand thermos de huit litres contenant la citronnade prvue pour le pique-nique, et en dverser le contenu sur le foyer, qui s'teint compltement. Ouf! Il tait temps! Henri-Pierre, qui n'a pas perdu son sang-froid, propose d'aller pied faire la runion en plein air prvue 2 km de l. Pendant ce temps, aid d'un frre africain, j'enlve ce qui reste du sac carbonis. Par miracle, le feu n'a pas atteint l'essence: le plancher de bois est intact, et la carrosserie aussi. Lorsque je rejoins le groupe une demi-heure plus tard, Marianne est en train d'apporter le message et Michle anime une runion l'cole du village! Je constate que le seul avoir t branl dans cette situation, c'est moi...

    L'aprs-midi, nous tenons encore deux runions. La premire chez un chef de village que nous sommes venus saluer. Une centaine d'coliers nous rejoignent pendant la prdication d'Henri-Pierre. Il raconte justement l'histoire de deux singes imprudents Toko et Toukou. Les enfants sont suspendus ses lvres. Auront-ils le temps d'couter la leon en tirer avant la cloche? Non, il est 15 h et les voil partis, telle une nue de moineaux! Une minute plus tard, ils sont de retour! Le matre leur a donn cong jusqu' la fin du message... Au village, nous prchons sur la croix et sa signification. Je tmoigne de la protection de Dieu exprimente le matin mme, et, en conclusion, je dis ces Africains que nous aimons: Nous avons risqu notre vie pour venir jusqu' vous, mais Jsus-Christ, Lui, a donn sa vie pour vous. Personne n'ose rpondre publiquement l'appel. En un sens, cela me rassure: je sais qu'ils sont touchs et qu'ils mesurent la profondeur d'un tel engagement, en rponse l'amour du Crucifi.

    Avant le dpart, le pasteur nous invite dans une case. Des plats sont disposs terre. Leur contenu? Du riz et du poulet, menu d'honneur pour les visiteurs. A la fin du repas, un homme dsire nous voir. Il veut se convertir. Le pasteur le connat bien et atteste que sa dcision est sincre. Nous nous agenouillons tous ensemble, et cet homme donne sa vie Christ.

    Mais au fait... Comment tout cela a-t-il commenc? Et pourquoi prendre des risques quand on a un avenir bien assur en Europe?

  • CHAPITRE 1

    QUAND LA ROUTINE RENCONTRE LA VIE

    J'ai t lev d'une manire tout fait traditionnelle dans une famille modeste du Jura

    suisse, Tramelan. Mes parents se sont donns bien du mal pour nous offrir le meilleur d'eux-mmes, durant toutes les annes de notre enfance, Rosine, ma sur ane, et moi-mme. J'aimais cette vie simple, anime par l'cole, les sorties vlo avec des amis, les jeux d'checs, les pique-niques en fort, l'aide qu'il fallait apporter dans une fabrique d'horlogerie o mon pre tait jardinier concierge et ma mre dcalqueuse (travail qui consiste imprimer le cadran des montres). Les nettoyages, la tonte du gazon, ou le dblaiement de la neige qui, plus de 900 m d'altitude, tombe en abondance, faisaient partie de notre vie quotidienne.

    J'aimais particulirement les vacances. Je les considrais comme la rcompense de l'anne. Nous les passions sur la Riviera italienne, o habite la moiti de ma famille. L encore, tout tait bien rgl, baignades le matin et l'aprs-midi, promenades le soir avec, pour couronner la journe, les gelati aux dlicieux parfums. Je n'imaginais pas que la vie puisse tre plus belle autrement, d'autant que mes oncles et tantes nous recevaient toujours avec beaucoup d'amour. Avec les annes, cet amour tait devenu rciproque. Quelle joie de se retrouver! Mes projets d'avenir taient trs simples: avoir un bon mtier, gagner suffisamment pour acheter une jolie maison, fonder une famille heureuse avec la femme qui me plairait et passer trois semaines tous les ans au bord de la mer.

    Reconnaissant envers Dieu et mes parents cette enfance, j'en garde beaucoup de bons souvenirs. Pourtant quelqu'un allait bientt tout bouleverser. Je suivais fidlement mon instruction religieuse et, pour moi, l'existence de Dieu ne faisait aucun doute. Je savais que l'ternit existait rellement et, cause de cela, je voulais remplir toutes les conditions pour plaire Dieu: aller l'glise le dimanche matin, suivre rgulirement le catchisme, prier. En ma prire consistait dire: Mon Dieu, fais que j'aie de bonnes notes l'cole. Malheureusement, cela ne marchait pas toujours et je me rvoltais. Ensuite je demandais pardon Dieu puis... je recommenais.

    La tente romande (une tente servant l'vanglisation des enfants comme des adultes), fit son apparition dans la localit. Des amis m'y conduisirent. L'animateur nous posa une question: Qui lit la Bible tous les jours ? Je ne pus lever la main et j'en fus honteux; quelque chose me disait que c'tait l un des secrets d'une vie russie. Ds lors, j'ajoutai un nouvel lment mes pratiques religieuses. J'empruntai la vieille Bible noire de ma mre et commenai la lire. Je l'ouvrais n'importe o, lisais quelques secondes et refermais le livre sans rien comprendre, ou presque. Quelque temps plus tard, des voisins m'offrirent un calendrier biblique. Quelle aubaine, il me suffisait de lire le verset du jour pour prtendre lire la Bible tous les jours!

    Puis vint la fin de l'cole secondaire. Nous voquions, un jour, mon avenir professionnel avec ma mre. Elle me dit: Quelqu'un peut t'aider si tu le lui demandes . Elle faisait allusion Dieu. Je priai alors: Mon Dieu, fais que je trouve le bon travail.

    Quelque temps aprs, j'tais engag pour quatre ans, comme apprenti radio-lectricien,

    dans un magasin de radio-tlvision du village. A cette poque-l, tout commena changer. J'avais deux bons amis, frre et sur, qui habitaient cinquante mtres de chez nous: Paul et Louise Neuenschwander. Ils taient

  • chrtiens. A mes yeux, tous les habitants de l'Europe taient chrtiens. Mais avec le temps qui passait, je me rendais compte qu'ils parlaient de Jsus avec plus de libert que je n'en avais. Je sentais qu'ils l'aimaient et lui taient attachs. Pour moi au contraire, Jsus tait quelqu'un de religieux qui me rendait seulement service de temps en temps... Depuis l'ge de cinq ans nous passions, ces amis et moi, de bons moments ensemble sans jamais rater l'occasion de nous inviter mutuellement tous les anniversaires et Nol. Je me rjouissais beaucoup de ces soires, animes par des projections de diapositives, des parties d'checs ou autres jeux, que partageaient nos familles.

    Ces amis en vinrent ouvrir leur maison le samedi, aux jeunes qui dsiraient faire de la musique. Un jour, ils dcidrent d'organiser un souper canadien, chacun apportant quelque chose partager avec tous, et nous y invitrent, ma sur Rosine et moi. J'apprhendais cette soire, car le pre de famille avait 1'habitude de prier avant le repas, et je m'imaginais qu'il me dsignerait pour le faire. Toute la journe, j'essayai de composer une prire pour le cas o il en serait ainsi. Le soir arriva et... il pria lui-mme! Ouf!

    Mais l'ambiance m'impressionna. Il rgnait une amiti vraie, joyeuse, entre ces jeunes. J'avais l'habitude de l'atmosphre du travail et de l'cole, o le plus fort l'emporte, o chacun essaie de se faire bien voir pour ne pas tre rejet, o l'on emploie le langage "politiquement correct" et o l'on s'habille comme tout le monde, de peur d'tre tax d'extravagance. L, rien de semblable. Aprs le repas, accompagns d'une ou deux guitares, l'on se mit chanter.

    A l'cole, le hros tait celui qui chantait le plus faux et russissait exasprer le professeur jusqu' se faire mettre la porte. Le cad? Celui qui se faisait dfinitivement exclure du cours de solfge. Et j'avais devant moi des jeunes de mon ge qui chantaient tout simplement des churs joyeux et entranants. Sans que je m'en doute, cette soire allait marquer un tournant dans ma vie. J'avais senti une atmosphre empreinte d'amour. Je n'tais ni malheureux, ni drogu, mais j'aspirais de tout mon tre vivre cela. Aussi, quand on dcida de renouveler cette rencontre le samedi suivant, je m'en rjouis beaucoup. Rapidement, cela devint une habitude. Il y avait des jeunes de la plupart des communauts chrtiennes du village. On se runissait 16 heures, et l'on commenait chanter. Aprs une interruption pour le repas, 18 heures, les chants reprenaient jusqu' 22 ou mme 23 heures. Cela me parat incroyable aujourd'hui, mais ces moments taient si profondment imprgns de l'amour de Dieu que nous aurions pu continuer longtemps encore.

    Un samedi soir, Grard, l'un des ans du groupe, proposa un moment de prire spontane. Chacun se mit parler avec Dieu. Comme tous le faisaient, tour tour, je me lanai aussi en tremblant. Il n'y avait pas de prdication. On ne comprenait pas bien ce qui se passait. Mais on commenait percevoir que Dieu lui-mme tait la source de cet amour. Bientt ces deux vrits bouleversrent ma conception de Dieu: d'une part, je me sentais parfaitement connu de lui, je savais que l'gosme animait ma vie. Tout tournait autour de moi. Mes prires elles-mmes taient centres sur ma personne. Mes projets d'avenir me plaaient au centre de tout. Et Dieu savait tout cela. Mais d'autre part, Dieu m'aimait plus que personne ne l'avait jamais fait. J'en tais illumin comme par un puissant rayon de soleil! Je compris peu peu que Christ avait donn sa vie sur la croix pour porter non seulement les pchs du monde entier, mais aussi les miens. A cause de cela, je pouvais tre pleinement pardonn et connatre Dieu comme un Pre. Jsus prit ainsi la premire place dans ma vie. Tout eut un sens nouveau. Extrieurement ma vie restait la mme: travail, cole, collgues, clients, mais mon cur avait chang... J'aimais rellement chacun de mes collgues, et je commenais prier pour eux; j'prouvais dsormais un vritable intrt pour les clients - en fait, ils n'taient plus uniquement des clients, je voyais en eux des personnes avec leurs besoins. Lorsque nous allions rparer les tlviseurs domicile avec mon chef d'atelier, je me mettais apprcier les contacts extrmement varis que nous offraient les grands immeubles, les fermes ou les

  • somptueuses villas. Je comprenais que Dieu avait un but plus important pour moi que les connaissances techniques. Il voulait m'apprendre connatre les gens, les aimer, communiquer avec eux sans timidit. Il voulait m'enseigner la disponibilit en toutes circonstances: qu'il s'agisse de monter sur un toit, ramper dans la paille pour installer une antenne, prendre un caf avec un directeur, grimper sur un pylne ou rparer une tlvision. Je me trouvais dsormais l'cole de la vie, l'cole de Dieu, quel privilge!

    Un feu s'tait allum en moi. Je dsirais servir Dieu de tout mon tre; je brlais du dsir de partager la Bonne Nouvelle.

    A Pques 1973, nous fmes, en famille, un voyage organis Paris. J'avais entendu parler d'un mouvement chrtien qui y tmoignait et je dsirais le rencontrer. Je priai: Seigneur, aide-moi les trouver dans cette immense ville.

    Ds notre arrive, je remarquai des affiches tonnantes placardes sur les places: Un seul chemin Jsus. C'tait le mouvement Opration Mobilisation qui vanglisait Paris. Le lendemain je rencontrai des membres de ce mouvement, prs du sacr-cur. Ils tmoignaient et distribuaient des invitations pour des soires d'vanglisation. Je demandai une jeune fille s'il me serait possible d'avoir un paquet distribuer, elle acquiesa volontiers. J'avais si longtemps attendu une telle occasion que j'aurais saut de joie!

    Le lendemain, je m'arrangeai pour passer l'aprs midi avec eux en partageant leurs activits dans la rue. Ce fut inoubliable. Je parlai avec bien des gens, dont un homme qui vendait des tickets pour un spectacle immoral; il m'accosta. J'prouvais de la jalousie pour Dieu, j'tais surpris de ma propre raction; je laissai parler mon cur et exhortai avec force ce vendeur changer de mtier. Dieu l'aimait et avait un tout autre but pour sa vie; cet homme offrait l'immoralit moyennant finances, tandis que Dieu lui proposait gratuitement la puret, l'amour et une vie nouvelle. Quelques personnes tonnes s'arrtrent pour couter, les autres vendeurs taient ennuys et napprciaient pas ce contretemps. Je sentais la misre de cet homme qui, pour gagner son pain, devait faire violence sa conscience. Personne ne lui avait probablement jamais parl ainsi. Mais son regard trahissait son approbation cache et une soif de vie nouvelle et propre. Cent mtres plus loin, un jeune homme m'accosta: T'as pas un franc? C'tait la premire fois que je voyais cela. Avant de les lui donner, je lui parlai de Celui qui pouvait lui donner bien plus et combler sa vie. J'avais rv de la tour Eiffel depuis l'ge de 4 ans, mais ce monument d'acier me parut bien terne. Rien faire, toute mon attention tait centre sur les Parisiens. Je les aimais intensment, et cet amour ne venait pas de moi. Je passai ce week-end prolong leur parler de Jsus, abandonnant le programme officiel du parfait touriste.

    Quelque temps avant ce voyage Paris, un serviteur de Dieu tait venu Tramelan nous

    parler du Saint-Esprit, qui confre la puissance de Dieu pour le tmoignage. Il tait revenu une semaine plus tard, pour prier avec ceux qui le dsiraient. Il y avait l des jeunes et des moins jeunes, de diverses dnominations. Il pria pour plusieurs personnes. Je n'osais rien dire, ni demander, parce que je venais de subir une semaine de dfaite spirituelle et pourtant, combien je dsirais ce revtement de puissance promis ceux qui le demandent. A ce moment-l, Dieu manifesta sa bont mon gard: le pasteur discerna mon dsir muet et pria pour moi en terminant la runion. Rien d'extraordinaire ne se produisit, mais le fardeau de l'vanglisation devint de plus en plus pressant pour moi. Depuis un an dj, je dsirais passer par les eaux du baptme: la prire et la lecture de la Bible m'avaient convaincu qu'un engagement adulte et public tait ncessaire. Le voyage Paris raviva en moi ce dsir. C'est ainsi que je fus baptis avec sept autres jeunes du groupe du samedi. Ce moment restera grav dans ma mmoire. Avant de m'immerger dans l'eau, le

  • pasteur prophtisa. Il me donna un mot d'ordre, un encouragement de la part du Seigneur. J'en fus boulevers, car il ne connaissait rien de moi ou presque: Mon fils, dit-il, j'ai un ordre pour toi. Je mettrai mon Esprit sur toi, je t'utiliserai comme un outil. Je te conduirai et je t'emploierai pour parler en temps voulu avec ceux qui sont fatigus. Sors pour arroser les chemins, et pour relever celui qui est tomb. Tu pourras faire ces choses par le Saint-Esprit. Je te conduirai, mon fils. Je t'utiliserai, c'est pourquoi regarde vers moi, car les heures que je te donne seront des heures o tu te livreras... Beaucoup d'mes, des milliers ne sont pas sauves et se perdent dans les tnbres. C'est pourquoi marche sous Mon onction, dans Mon humilit et Mon brisement ; rassemble et sauve ceux qui se laissent sauver. Bientt le jour viendra o il n'y aura plus de grce, bientt se lvera le matin et le temps de grce prendra fin. A cause de cela, sauve ce qu'il y a sauver. Laisse-toi remplir maintenant par le Saint-Esprit. Ainsi parle l'Esprit de Dieu.

    Je voulais faire ma valise sur-le-champ et partir vangliser... mais o aller? Quel billet de chemin de fer prendre... ? Je n'avais pas encore compris que Dieu parle parfois l'avance, afin de nous prparer et de nous donner un but. Mes parents exigrent que j'achve d'abord mon apprentissage... J'apprcie aujourd'hui ce sage conseil. Mais j'avais compris que ces quatre annes n'taient qu'une tape. Je voyais beaucoup de gens esclaves du petit cran; la dsolation dans laquelle les plongeait une soire sans tlvision en tait la preuve. Qui donc avait le plus besoin de rparation? Eux ou leur appareil? Pour ma part, la rponse devint de plus en plus vidente et dtermina mon choix. Ma vie serait consacre proclamer Dieu, qui non seulement rpare, mais cre des choses nouvelles dans la vie des hommes. Le monde crie: Pour russir dans la vie, utilise les hommes et aime les choses. L'Esprit de Dieu murmure: Pour russir ta vie, aime les hommes et utilise les choses.

    Nous allmes en week-end avec le groupe de jeunes aux Rasses, dans le canton de Vaud. On attendait un groupe de chanteurs. Il arriva en retard... c'tait Jeunesse en Mission ! Linda McGowen et Stella Rochat en faisaient partie. Leurs visages taient illumins de l'amour de Dieu. Quel genre de relation avec Lui connaissaient-elles?

    Aprs le chant, elles prsentrent une documentation relative un service d'vanglisation, pendant l't, ... Paris! Je m'inscrivis pour deux semaines, en juillet 1973. Heureusement, les quatre jours de Pques m'avaient familiaris avec cette mtropole. Car j'ignore si le montagnard que j'tais, aurait eu le courage d'affronter les changements de train et de mtro pour parvenir au camping de Maisons-Laffitte.

    Ce furent deux semaines marquantes. J'tais dans la cellule de prire1 dirige par Linda. Sa douceur et son attachement au Seigneur taient un dfi constant. Nous mangions trs modrment et quand, avec un grand sourire, elle proposait de jener le matin, je n'osais pas dire non! Un jour sur deux, nous allions Paris. Nous tions environ trois cents, dont dix pour cent seulement de francophones, rpartis en onze groupes. Pour la premire fois de ma vie, je rencontrai de jeunes marxistes convaincus. Notre prsence leur tait insupportable. Un aprs-midi, une prostitue vint au milieu de nous; elle voulait embrasser tous les gars et provoquait pas mal de perturbation. Notre chef nous demanda de nous mettre en prire sur place, non pas cause de cette situation critique, mais pour un autre groupe au Quartier Latin; ce que nous fmes. La jeune fille se calma. Et nous apprmes le soir que le groupe du Quartier Latin s'tait fait attaquer et menacer par de jeunes rvolutionnaires. Le Seigneur tait intervenu au moment correspondant notre intercession... Une guerre spirituelle invisible avait rellement eu lieu. La police n'apprciait pas non plus notre travail et nous interdisait de distribuer les imprims. Ce n'tait pas trs mchant, on nous disait

    1 Cellule de prire : groupe compos de 6 8 personnes permettant de sexprimer dans le partage et la prire et se runissant chaque matin.

  • d'aller le faire ailleurs. Une quipe se fit tout de mme embarquer au poste... et relcher aprs avoir chant quelques cantiques! Malgr cela, le Saint-Esprit agissait, il y eut des conversions. On distribua des dizaines de milliers d'Evangiles de Jean, dits sous forme de journal. Je dcouvris autant d'idologies que je contactai d'tudiants. Au travers de ces changes, je constatai leur recherche de vrit, leur connaissance philosophique, mais aussi leur vide intrieur. Leur conclusion: La vie n'a pas de sens, contrastait avec la joie de vivre et l'enthousiasme qui bouillonnaient en nous.

    Je revins de vacances profondment enrichi. Mais il fallait aussi tmoigner de cette vie nouvelle chez moi... Nous sortions quelquefois avec le groupe de jeunes le dimanche aprs-midi, ou le samedi, lors de ftes rgionales. Mais en semaine? Je dcidai, un jour, de mettre une inscription sur le dos de ma veste. Avec Louise, j'crivis de haut en bas: Le Chemin, la Vrit, la Vie: Jsus. C'tait la veste de tous les jours que je portais au travail, y compris quand j'allais faire des rparations domicile. Parfois, j'tais content de ce tmoignage, mais d'autres moments, j'avais limpression de porter un poids de trente kilos sur le dos! A ma surprise, presque personne ne faisait de remarques. Il y eut cependant des moments pleins d'humour, comme le jour o mon chef d'atelier emprunta ma veste... il s'attira plus de remarques en dix minutes que moi en deux ans. Il ne s'y attendait vraiment pas! L'un des nou-veaux ouvriers tait communiste militant athe; nous formions un curieux duo. Notre collaboration cependant fut cordiale. En fin d'apprentissage, j'eus la possibilit d'emporter quelques vangiles avec le matriel de rparation et de les distribuer titre personnel. Chaque semaine, j'avais des cours Saint-Imier, village situ treize kilomtres de chez moi. La plupart du temps, le Seigneur pourvut aux moyens de dplacements en mettant cur des automobilistes de me prendre en stop. Le premier matin, la temprature tait glaciale, je n'avais nullement l'intention de m'y rendre par ce moyen. En allant chercher le vlomoteur de mon pre, je rencontrai un ami qui devait se rendre au mme endroit.

    - Comment y vas-tu? - En stop. - Mais tu vas arriver en retard! - Et toi? - En vlomoteur. - Mais tu vas arriver mort !

    Il fallait en effet franchir un col plus de 1 200 m d'altitude. Aprs rflexion, je me joignis lui. Ces nombreux dplacements en auto-stop me donnrent des occasions uniques de tmoignage. Je priais pour que la bonne personne s'arrte. Un matin, un jeune de mon quartier s'arrta, j'eus le temps d'changer quelques mots avec lui et de lui remettre un peu de littrature. Trois jours plus tard, il se tuait en s'crasant contre un arbre. Il n'tait pas toujours vident de rendre tmoignage l'cole professionnelle. On me respectait cependant. Un jour, nos professeurs nous emmenrent visiter diffrentes usines d'lectronique et la journe se termina par un excellent repas au restaurant. Malheureusement, comme c'est frquemment le cas en ces occasions, c'tait qui boirait le plus d'alcool... Nous reprmes le car pour rentrer. Les effets de la beuverie se manifestaient bruyamment. Que faire? Je ressentais si fortement que Dieu avait quelque chose dire tous ces jeunes... Une pense me traversa l'esprit: Va au micro et prie. Je rpondis: Seigneur, si cette pense est de toi, permets que le prochain nom prononc dans ce car soit le Tien. Aussitt cette prire clair termine, quelqu'un entonna le chant tristement clbre: J'ai bien mang, j'ai bien bu... merci petit JESUS ! Le nom de Jsus venait de retentir avec force dans le vhicule! Mon cur commena battre la chamade. J'tais assis l'arrire, et le couloir tait bloqu par un camarade qui avait commenc danser. Seigneur, quand le moment sera venu, libre le passage ! Je n'eus pas le temps de terminer ma phrase... Mon camarade s'effondra sur les siges. Je m'avanai jusqu'au chauffeur et lui demandai le micro. Il me l'accorda sans

  • difficult, pensant, peut-tre, que j'allais sortir la meilleure blague de la soire... Mais je dis simplement: Vous avez chant: merci petit JESUS, moi j'aimerais dire: merci SEIGNEUR Jsus pour toute cette journe vcue ensemble; tes-vous d'accord pour que je prie ? Ouais! rpondirent-ils en chur! Sans attendre, je me mis prier. Tous coutrent en silence... l'ambiance du car tait transforme. Durant l't 1974, Lausanne accueillit le Congrs international d'vanglisation mondiale. Une quipe de Jeunesse en Mission travaillait simultanment en ville. J'en faisais partie. J'avais deux responsables formidables, Eliane Vuffray, maintenant Eliane Lack, et Andr Sivager, qui me parla de l'Ecole d'Evanglisation de JEM. Je commenais y penser srieusement pour l'anne suivante, aprs mon examen final. Un soir, Eliane me rendit tmoignage de la fidlit de Dieu dans le domaine des finances. Ce point prcis de la vie par la foi m'inquitait un peu: Tu vois, me dit-elle, il m'arrive de n'avoir que 5 francs en poche, mais cela ne m'empche pas d'acheter une glace, car nous avons un Pre cleste plein de bont qui veille sur nous . J'avais trs envie d'exprimenter une telle dpendance de Dieu.

    Deux ans auparavant, l'appel avait t clair. Mais maintenant mon apprentissage achev, il me fallait avancer par la foi. Je travaillai dans ma profession pendant quatre mois et m'inscrivis au service d't2 de Jeunesse en Mission qui dbutait en Hollande. Au cours d'un bref coup de tlphone, Andr Sivager m'encouragea chercher la face du Seigneur: Tu te souviens, me dit-il, soumets tes plans au Seigneur, rsiste l'ennemi, et coute la voix de Dieu. Il n'y eut ni tonnerre, ni main crivant sur le mur de ma chambre, mais la paix de Dieu remplit mon cur. Je dcidai de donner ma dmission. Aprs avoir pass une semaine en Hollande, je vins terminer mon travail durant trois semaines. Les quipes de JEM s'taient disperses en sept ou huit lieux diffrents en Europe. Laquelle rejoindre? C'tait un jeudi, jour de la runion de prire. Je savais que le pasteur Gaston Ramseyer serait prsent. Je priai: Seigneur, permets que ce frre parle ce soir de la

    rgion o tu m'appelles et o se trouve l'une des quipes en ce moment. Et voici qu'il mentionna les Ardennes, et seulement les Ardennes! Je savais qu'une quipe tait Marche en Belgique, dans les Ardennes. Deux jours plus tard, j'eus l'occasion de partir en voiture avec lui jusqu' Charleville. Mais juste avant de quitter mon pays, les responsables de l'Assemble de la Tanne o j'avais t baptis deux ans auparavant m'envoyrent en m'imposant les mains. L'un d'eux s'exprima de la part du Seigneur : Mon fils, c'est moi qui t'envoie et tu as bien fait d'obir. C'est donc avec une grande joie que je rejoignis l'quipe des Ardennes. Deux mois plus tard, je commenai l'Ecole d'Evanglisation Lausanne avec 27 autres tudiants. On posa tous la question suivante: Qui voudrait continuer l'Ecole d'Evanglisation en traversant le Sahara

    2 Service dt : service dvanglisation pendant les vacances

  • et une partie de l'Afrique noire ? J'avais des difficults renoncer mes propres ides. Il me fallait donc choisir entre l'cole biblique o j'avais projet d'entrer la suite de cette priode, et le voyage en Afrique. Je pesai le pour et le contre et restai indcis, jusqu' un certain aprs-midi o je m'assis dans le grand et vieux fauteuil de ma chambre d'tudiant, rsolu de ne pas en sortir avant d'avoir reu la direction divine. Je repris mon cours sur le discernement de la voix de Dieu et le mis en pratique point par point. C'est alors que la douce voix de l'Esprit me souffla: Afrique. L'accord de mes responsables vint confirmer, par la suite, qu'il s'agissait du bon choix. Restait la question financire. Il me manquait 1.500 francs suisses, et cette somme devait obligatoirement tre verse avant le dpart. C'tait la premire fois que je devais m'attendre Dieu pour cela. Sans rien dire personne, je rentrai Nol la maison pour une semaine de vacances. Le lundi, je reus une lettre anonyme contenant 100 francs, et une parole d'encouragement. Le mardi, nouvelle lettre anonyme... je l'ouvris devant ma mre, elle contenait encore 100 francs. Maman commena comprendre ce que signifie vivre par la foi. Ce sujet lui posait tant de questions! Je reus ainsi d'une quinzaine de personnes, qui ne s'taient pas concertes, qui ignoraient mon besoin et ne m'avaient, ma connaissance, jamais soutenu financirement, exactement la somme ncessaire, avec 30 francs d'argent de poche en plus! Je donnai la dme de ces dons au fur et, mesure. Mais de retour Lausanne, je versai tout au service de la comptabilit sans prlever la dme du dernier don. Je compris rapidement mon erreur. Ce jour-l, je me rendis une soire la cathdrale et interrogeai le Seigneur ce sujet. Il me sembla qu'Il me demandait de faire le possible. En sortant, je donnai donc les quatre dernires pices de 5 centimes qui me restaient en poche. Vingt mtres plus loin, un ami s'approcha: Voil pour ton voyage. Il me remit 100 francs, soit cinq cents fois plus que ce que je venais de donner!

    La joie de dcouvrir lAfrique

  • CHAPITRE 2

    O PEUT MENER UN PREMIER VOYAGE

    Sitt aprs la confrence de Mission 763 Lausanne, nous nous retrouvmes dix-neuf pour le voyage en Afrique. Il y avait l Joe Portale, notre responsable, Charles Tramaux avec Esther, sa future pouse, et Hubert Ballaman, tous trois co-responsables de lquipe. Le matin du dpart, nous devions repasser par le centre de JEM. Lun des bus failli sortir de la route sur le parcours verglac. Nous avions prs de 15.000 km devant nous, ce ntait pas le moment de faire de la casse! Quelques instants plus tard, nous tions runis dans la salle de cours, o tant de richesses spirituelles nous avaient t communiques. L, en effet, quelques semaines auparavant, un orateur sud-africain avait t l'instrument d'un mouvement de repentance parmi les tudiants. Beaucoup d'entre nous avions crit des lettres en vue de restitutions, demandant pardon tel ami ou tel parent pour une offense passe; la crainte de Dieu tait descendue dans nos vies. Elle allait nous tre infiniment prcieuse pendant ce voyage, nous gardant dans l'unit et forgeant des amitis solides et durables entre nous.

    Loren Cunningham, responsable de JEM au plan mondial, prsent ce matin-l, pria pour nous.

    Chacun devait avoir pay le montant total de son voyage avant de partir. A 8 h, Hubert n'avait toujours pas reu la somme ncessaire... Quelques instants plus tard, son voyage tait pay et il nous rejoignait dans le bus. Personne ne le savait ce moment-l, mais c'est lui qui devait, durant de nombreuses annes, diriger le premier centre de JEM Afrique francophone. Je me rjouissais la pense de descendre vers le sud afin de trouver de la chaleur. La premire tape fut Montpellier, puis Catalayou au centre de l'Espagne. Il tait presque minuit notre arrive, et il nous fallut trouver une auberge pour la nuit. Ce fut ensuite la visite du Centre de JEM Madrid, et de la Casa de Jsus4 prs du dtroit de Gibraltar. Nous franchmes le dtroit en bateau le lendemain. Nous tions tout excits la pense de passer la frontire marocaine.

    Nous dcouvrmes le monde musulman et sa culture. Nous visitmes les magnifiques souks de Fs. Notre ministre tait cach et consistait surtout prier pour ce pays.

    Nous tions en janvier 1976. C'tait la guerre entre le Maroc et l'Algrie. Nous fmes bloqus cette frontire-l pendant une semaine. Nos responsables dcidrent alors de rejoindre l'Afrique noire par le Sahara espagnol. Nous retraversmes tout le pays, mais Rabat, on nous dconseilla vivement daffronter, avec des bus VW, une piste qui exige des vhicules tout terrain. Nous repartmes dans la direction oppose, pour tenter nouveau de passer la frontire algrienne. Aprs une nuit d'attente, le Seigneur ouvrit la porte. Les douaniers nous indiqurent l'itinraire obligatoire qui nous convint parfaitement. Et bientt s'offrait nos yeux la splendeur du dsert, ses sites infiniment varis, ses grandes parois rocheuses, ses dunes et ses paysages lunaires...

    Tous les soirs, nous mettions les vhicules en cercle. Au centre, une planche faisait office de table, et nous mangions autour. Une quipe de JEM Allemagne voyageait avec nous,

    3 Mission 76 : congrs international sur la mission. 4 La Casa de Jsus : Communaut chrtienne daccueil au sud du pays.

  • compose galement de dix-neuf personnes. Deux couples franais non chrtiens avaient demand, en outre, de faire quipe avec nous pour la traverse du dsert. Nous avions au total onze vhicules.

    Le matin, avant de partir, nous chantions et priions. Le Seigneur nous amenait vivre dans

    une relation intime avec lui et nous rapprochait les uns des autres. Dans ce lieu dsertique, nous dpendions de lui dune manire plus radicale. Nous savions quil aurait suffi d'un conflit srieux pour transformer en enfer la bndiction dans laquelle nous vivions. Il fallait beaucoup de patience. Onze vhicules solidaires les uns des autres doivent constamment s'attendre et navancent pas vite. Certains jours nous parcourions peine trente kilomtres. Aux endroits particulirement sablonneux, les deux Land Rovers cherchaient le meilleur passage, puis tout le monde descendait de voiture. Chaque chauffeur prenait alors tout son lan pour faire franchir son vhicule le passage dlicat. Si un bus ralentissait et commenait enfoncer, les gars poussaient des deux cts de toutes leurs forces. La difficult franchie, cent mtres plus loin, les filles applaudissaient. Quelle ambiance de rodo! On s'attendait ainsi les uns les autres. Comme chauffeur, je profitais aussi de ces nombreux arrts pour lire la Bible. Javais en effet dcid de la lire entirement en quatre mois et ces pauses me permettaient davance.

    A la fin de la journe, nous tions couverts dune poussire rouge des pieds la tte et leau disponible pour la toilette tait rationne un bol par personne et par jour !

    Une pice important de la 2 CV dun couple qui nous accompagnait se cassa. Le mari et Joe Portale partirent avec la pice rparer pour Arlit, petite ville situe 200 km de l. Nous les attendmes en plein Sahara, pendant deux jours. Il faisait suffisamment chaud pour dormir la belle toile, du moins pour les plus courageux, car on apercevait le matin de petites traces de scorpions dans le sable.

    Aprs trois semaines de traverse, nous arrivmes Agads, o chacun apprcia tout nouveau les douches et la piscine. Nous pmes encourager les missionnaires de La Portes Ouverte 5 qui se trouvaient l et partager leur fardeau pour lvanglisation de cette rgion musulmane. Aprs nous tre spars de lquipe allemande, qui avait pour but le Nigria, nous arrivmes Niamey, capitale du Niger. La premire nuit y fut terrible. La plupart dentre nous navaient pas de moustiquaire et les moustiques, rassembls au bort du fleuve, ne nous pargnrent pas. Deux d'entre nous tombrent malade. Joe et Charles allaient en ville tous les matins pour essayer de vendre un de nos bus afin de renflouer la caisse. Cela faisait partie de notre plan, mais le combat fut rude.

    Au bout de deux semaines, enfin, nous repartions en direction de Ouagadougou. Tous ces vnements avaient malheureusement retard notre expdition de trois semaines. Il fallut renoncer au ministre prvu en Haute-Volta (aujourd'hui Burkina Faso) pour parvenir le plus vite possible Abidjan. L'humidit de la fort tropicale succdait la scheresse du dsert: on avait l'impression d'tre dans une cuisine remplie de bue! Au terme de milliers de kilomtres de piste, ce fut une fte de retrouver les quatre cents kilomtres de route goudronne qui menaient la capitale de la Cte d'Ivoire. Le Seigneur nous avait avertis par une prophtie que nous n'avions pas nous inquiter du logement. On nous accueillit dans une cole chrtienne.

    Quelques jours plus tard, une famille suisse qui partait en vacances nous prta sa magnifique villa, au bord de la lagune. Quel luxe de retrouver une salle de bain, des chaises, une table et mme du gazon!

    Nous avons alors laiss Joe, Hubert et Charles Abidjan avec la mission de chercher une 5 La Porte Ouverte : centre de retraite spirituelle avec cole missionnaire situe prs de Chlon-sur-Sane, en France

  • habitation dfinitive. Nous comptions, en effet, laisser une quipe sur place afin d'tablir une base de JEM en Cte d'Ivoire. Puis nous sommes partis pour une tourne d'vanglisation l'intrieur du pays, sous la direction d'Andr Sivager qui nous avait rejoints par avion. Dieu avait surtout agi l'intrieur de nos propres vies jusqu' ce moment-l, mais nous aspirions maintenant partager la Bonne Nouvelle. Ainsi avons-nous visit, pendant deux semaines, nombre d'coles et de communauts. Nous tions, chaque fois, accueillis par les pasteurs africains ou les missionnaires. Nos soires taient trs simples: aprs quelques chants et tmoignages, nous formions de petits groupes de discussion avec nos auditeurs. Nous tions trs tonns de leur dsir de connatre la Parole et l'amour de Dieu. Beaucoup demandaient prier avec nous, pour donner leur vie Dieu et recevoir son pardon. Depuis longtemps, je priais et demandais le privilge de conduire cinq personnes au Seigneur durant ce voyage. Dieu exaua pleinement cette prire.

    De retour Abidjan, les tudiants se prparrent rentrer en Europe par avion, tandis que Rolf et moi prenions le bateau, en embarquant la Land Rover pour la ramener en Suisse. J'avais au cur un amour naissant pour l'Afrique, et je disais tous: Si le Seigneur m'appelle, je reviendrai ! A bord, nous prmes un repas avec un couple franais dont le mari nous lana cyniquement le dfi de convertir l'quipage. Cet homme resta Abidjan, tandis que sa femme fit le voyage avec nous. L'humour du Seigneur voulut qu'en fait ce fut elle qui reut le mieux notre tmoignage au cours des quinze jours de traverse.

    J'tais particulirement maigre en quittant l'Afrique mais les petits djeuners avec ufs au

    plat, les dners avec poisson et viande, rsolurent le problme et c'est bien remplum que je me prsentai ma famille l'arrive! La vie bord tait trs confortable. Nos lits taient faits par un steward! Nous utilisions chaque instant pour tudier la Bible et d'autres livres et pour prier. Ce fut une retraite intensive, o nous priions avec ferveur pour un rveil spirituel dans nos vies, sur le bateau et parmi les nations.

    Nous avons dbarqu Ste. Quelques heures plus tard, nous tions Lausanne. La boucle tait ferme. Une tape s'achevait, mais que de bndictions dans nos curs! Et maintenant? Que sont devenus tous ces tudiants? Permettez-moi de vous en prsenter quelques-uns:

    - Rolf Schneider, notre chantre, a pous deux ans aprs Maryse Lapios, notre dvoue infirmire. Ils sont l'origine de l'quipe de louange de JEM et du groupe musical Visa. Des dizaines de milliers de personnes ont bnfici de leurs concerts, cassettes et CD, tant en Europe qu'en Afrique et au Canada.

    - Charlotte Oppliger notre comptable: quelle foi ne lui fallut-il pas! Responsable du secrtariat de JEM pour le monde francophone pendant des annes, elle est aujourd'hui marie et missionnaire Paris.

    - Monique Lachat s'est engage JEM-France au niveau des publications. Des milliers de colis de livres et cassettes ont t fidlement envoys depuis son bureau pendant des annes. Elle s'est marie en 1982 et habite prs de Lyon.

    - Martine Werner, au cur d'vangliste, s'est oriente vers l'Institut biblique d'Emmas et a pous Nicolas Long, aumnier au C.H.U.V. de Lausanne.

    - Raymond Serex a servi le Seigneur la base de M'Pouto prs d'Abidjan. Il a eu un rle-cl comme pionnier en Afrique. D'abord en Cte d'Ivoire, puis au Burkina Faso et au Togo o cinq implantations de JEM ont t lances dont une formation universitaire chrtienne l'Universit des Nations. A sa suite, plus de cent ouvriers de JEM ont fond des bases et ministres en Afrique francophone. Avec son pouse Irne, ils sont aujourd'hui coordinateurs pour la Cte d'Ivoire, le Togo, le Bnin et le Cameroun.

  • - Louise Neuenschwander s'est d'abord consacre au ministre musical avec Linda et Rolf Elle a ensuite lanc le ministre des Fabricants de Joie, qui forme les enfants partager leur foi au travers de tournes musicales dans le monde francophone. Avec son mari Philippe Aubry, elle revient d'un sjour missionnaire en Cte d'Ivoire.

    - Gun Menar, Sudoise, travaille comme missionnaire dans son pays. - Marcia Jonhson sert le Seigneur en Californie - Et enfin les responsables: Joe Portale, cause dune trs grave hpatite, a d renoncer

    lAfrique. Il a rejoint Loren Cunningham Hawa o il a aid lancer Luniversit des Nations . Il est aujourdhui de retour Lausanne, toujours aux cts de Loren, comme responsable de la facult des ministres chrtiens.

    - Charles a pous Esther. Ils ont quatre enfants. Ils se sont engags dans la bade de JEM Burtigny6 o Charles a pu utiliser toutes ses comptences techniques pour en restaurer et construire les btiments. De l, il a rayonn dans beaucoup de bases pour la rfection des locaux.

    - Hubert sest mari Abidjan avec une Anglaise, Pauline. Aprs avoir servi ensemble le Seigneur la base de MPouto durant des annes, ils sont revenus en Suisse, avec leur petit Jonathan.

    La salle de cours o tant de richesses nous avaient t communiques

    Le centre de JEM Lausanne

    6 Burtigny village situ entre Lausanne et Genve o se trouve un centre de Jeunesse en Mission (ancien orphelinat chrtien, comprenant aussi une ferme, lgu JEM en 1979).

  • CHAPITRE 3

    UN DIEU PRAGMATIQUE Pendant que JEM, au cours de lt 1976, concentrait son effort dvanglisation sur les Jeux Olympiques de Montral, je dirigeais une petite quipe de quatre personnes en France. Au dpart de notre tourne en bus VW, nous avions 80 francs suisses. Le Seigneur pourvut si bien nos besoins que la somme ntait pas mme entame un mois plus tard notre retour ! Au cours de cette tourne nous fmes la connaissance du pasteur Iwulski Laon. Pendant quil prchait, une forte crainte du Seigneur sempara de moi. Je reus la conviction que le Seigneur me rappelait en Afrique : je devais obir.

    Aussi, lorsqu'en fin d'anne, l'autocar de JEM prit la direction de Ble pour l'Afrique avec Tom et Cynthia Bloomer, directeurs de l'Ecole d'Evanglisation, j'tais l avec Raymond Serex et les tudiants de cette nouvelle cole. La base d'Abidjan tait implante. Des vhicules nous attendaient sur place. Le priple africain commencerait par la Cte d'Ivoire. Nous devions embarquer Bruxelles bord d'un avion de la Sabena pour Abidjan.

    Mais, revenons au dbut de ce voyage. Que d'aventures ! Laissez-moi vous en conter quelques-unes. Nous avions quitt le Chalet--Gobet vers 20h. En nous arrtant prs de Berne, nous avons vu un bus bien connu s'approcher de nous... Voil la pharmacie, vous l'aviez oublie dans le hall d'entre !... Un peu avant Ble, l'arrire du car se mit pencher bizarrement; les douaniers refusrent de nous laisser poursuivre la route. Le chauffeur entreprit en pleine nuit une longue rparation. Nous avons tlphon Lausanne pour demander une pice de rechange indispensable. Trois bus VW sont arrivs au milieu de la nuit, prts nous emmener Bruxelles. Mais comme la rparation tait presque acheve, nous sommes repartis avec le car. Nous avons fait halte Strasbourg o Raymond est descendu la recherche de Tom. Ils se sont manqus... Et, finalement, Tom est remont dans le car pendant que Raymond restait en rade... Nous nous en sommes aperus une heure aprs. Trop tard! Il fallait continuer rouler. A 15 h 30, nous arrivions l'aroport: l'avion tait parti...

    Heureusement la Sabena comprit tous ces contretemps et nous renregistra pour le vol prvu trois jours aprs. Pendant ce temps, nous avons t logs la base d'Opration Mobilisation dans la banlieue bruxelloise.

    Et Raymond? Vtu d'une petite veste par une temprature de moins 12 degrs et sans un centime sur lui, il russit tlphoner un ami pasteur... Il nous rejoignit en train 48 h. plus tard.

    Quelques jours aprs, nous partions d'Abidjan avec deux bus VW, laissant une partie de l'quipe sur place la base de M'Pouto. Le Seigneur n'avait pas fini de nous enseigner... la mcanique! Comme je relaterai un voyage ultrieur de manire plus approfondie, je me contenterai de partager ici quelques manifestations de la fidlit de Dieu dans ce domaine prcis. Nous sommes donc arrivs, le premier soir, dans une petite ville appele Katiola, 370 km de la capitale. Jusqu' ce moment-l, la route tait goudronne et traversait la fort tropicale du sud de la Cte d'Ivoire. Mais le lendemain commenait la piste, avec ses passages troits, ses trous et ce phnomne particulier qu'on appelle tle ondule : des vagues de terre, de cailloux et de sable qui se forment rgulirement tous les 20 50 centimtres. Un trax7 doit

    7 Trax : engin 4 roues motrices, muni dune grande lame dacier qui racle le sol de terre et lgalise

  • rgulirement les aplanir pour rendre la circulation possible. De plus, des troupeaux de chvres et de moutons traversent constamment les pistes, des dindons et des poules s'y promnent, et les enfants y jouent! Il faut aussi compter avec les dos d'ne trs marqus et se mfier d'un ventuel poids lourds venant toute allure en sens inverse. Il est parfois trs difficile de se croiser. Le klaxon devient donc un instrument indispensable, et l'un des ntres tait justement en panne. Daniel Siegenthaler, notre mcanicien, se dirigea donc vers un vendeur de pices dtaches. La rponse fut claire: Y'a pas. Mais Daniel allait apprendre avec toute l'quipe que Dieu est le matre des circonstances. Il insista. Le vendeur se rendit dans l'arrire boutique et rapporta... un klaxon!

    Le matin du second jour, Tom nous conduisit dans une prire de foi. Nous avions deux postes frontires traverser, des centaines de kilomtres de piste parcourir et les missionnaires nous attendaient le soir mme Sikasso au Mali. Nous nous sommes unis dans cette requte: Seigneur, nous Te demandons de nous faire arriver ce soir destination. Nous avons parcouru sans problmes les deux cents premiers kilomtres, mais alors, un amortisseur cassa sous l'intensit des vibrations. Nous tions en pleine brousse, quarante kilomtres de la ville la plus proche, dans l'impossibilit de continuer notre route. Seigneur, tu n'as pas oubli notre prire! Que faut-il faire ?

    Nous avons alors dcid d'aller, Daniel et moi, la ville de Ferkessdougou dans l'espoir d'y trouver un amortisseur de rechange. Nos recherches aboutissaient toujours la mme rponse : Y'a pas. On nous dit que la seule solution tait de retourner 200 km au sud, la seconde ville du pays, ou mme Abidjan, 600 km de l. Nous avions emprunt le second bus pour cette recherche et il tait impossible de laisser nos dix-sept quipiers sans nouvelles. Dans un autre garage, la rponse fut: Je n'ai pas d'amortisseur pour bus VW. Une ide lumineuse nous vint alors l'esprit: Avez-vous d'autres amortisseurs ? Oui, pour des Peugeot 404. Pouvons-nous les voir ?. Nous dcouvrmes qu'ils taient de la mme longueur et avaient la mme fixation que ceux des bus VW ! Deux heures plus tard, notre quipe repartait dans la joie. Les douaniers furent particulirement conciliants et rapides et, le soir, nous tions Sikasso !

    Nous passmes plusieurs semaines au Mali, puis en Haute-Volta. Entre-temps, trois nouveaux membres nous avaient rejoints dans une Land Rover amene par bateau. Un jour o nous nous dirigions vers Kaya,8 les vibrations devinrent de plus en plus fortes. Les ondulations de la piste n'avaient pas t aplanies depuis longtemps. On se serait cru un concert de batteries infernales! Soudain, l'incroyable se produisit. Le support moteur cassa et le moteur tomba sur la piste, restant cependant accroch au bus par la bote de vitesses. Nous l'avons remis en place, tant bien que mal, avec des fils de fer, puis nous avons remorqu le bus avec la Land Rover. Comme par hasard, le missionnaire qui nous attendait avait un poste de soudure l'arc et l'un de nos jeunes savait souder. Ainsi le support fut soud et le moteur remis en place. Il redmarra et tint bon pendant les 1200 km qu'il nous restait parcourir.

    Quelque temps plus tard, une pice matresse de la direction d'un bus cassa. C'tait une pice d'environ 60 cm de longueur. Nous tions nouveau dans une petite ville de brousse, o l'on ne trouve pas mme un pot de peinture. Je me demande si aujourd'hui je trouverais cette pice Lausanne!

    Notre cher Daniel apprit que le dispensaire local employait un mcanicien allemand. Celui-ci avait achet une carcasse de bus VW abandonne quelque part en brousse - il faut prciser que, gnralement, une carcasse abandonne est compltement pille par les

    8 Kaya : prfecture au nord du Burkina Faso.

  • passants, qui rcuprent jusqu'aux jantes de roues pour forger - ils se rendirent ensemble sur les lieux, retournrent l'pave et y trouvrent la barre recherche. Elle avait exactement les mmes dimensions et tait de la mme anne de fabrication que notre pice casse !

    Jai beaucoup apprci ce voyage aux cts de Tom, dautant plus que tout le poids de la responsabilit reposait principalement sur ses paules. Cela me permettait de me consacrer entirement au ministre auprs des tudiants et prparer et donner mes premiers messages dvanglisation. Nous tions tonns de la gnrosit de ces peuples et de leur ouverture la Parole de Dieu.

    Peu peu, le Seigneur a donn une nouvelle orientation ces voyages, les occasions de ministres se sont multiplies et, par l mme, les conversions.

  • CHAPITRE 4

    LA PREMIERE BASE EN CTE DIVOIRE

    Lquipe, de retour Abidjan aprs un priple de deux mois, nous quitta pour rentrer en Europe. Nous nous sommes retrouvs huit, puis six membres, pour continuer luvre la petite base de MPoulo situe 8 km dAbidjan. Hubert Ballaman en tait le responsable. Jtais son aide. Il y avait galement Pauline Davies, venue dAngleterre, Gisle Niderkorn, de Belgique, Carmen Dengler, de France, et Raymond Serex, de Suisse. Tout tait vraiment nouveau pour nous : le climat, le travail, la mentalit, la nourriture Et nous tions des milliers de kilomtres de toutes nos relations. Nous avons commenc nous organiser pour les travaux, les achats hebdomadaires en ville et la lessive.

    Je pris personnellement la responsabilit de la comptabilit. Quelle exprience! Au dbut de chaque mois, il fallait payer la location des deux maisons, soit 350 francs suisses. Personne ne s'tait engag nous soutenir financirement. Cela reprsentait au total un budget de plus de 1.000 francs par mois. Nous avions appris la leon thorique Lausanne, il fallait maintenant passer l'exprience pratique. Dieu peut-il vraiment subvenir aux besoins de six personnes en Afrique sans que celles-ci n'en fassent part personne ? Le oui dont je tmoigne ici me rchauffe le coeur et reprsente tant de miracles que j'en suis boulevers

    L'quipe Si mon peuple, dirige par Rolf Schneider, nous envoya plusieurs dons importants. Au mois de septembre de cette anne-l, un rassemblement europen de JEM se tenait en Norvge. Dem membres de notre quipe de Cte d'Ivoire devaient S'y rendre. On nous envoya un don juste temps, ce qu permit Pauline et Hubert d'entreprendre le voyage Ils en revinrent vraiment enthousiasms et, ma grande surprise, nous annoncrent leurs fianailles. Ils se marirent en janvier 1978, Abidjan.

    Quant nos autres besoins financiers, nous les prsentions Dieu, au fur et mesure, dans la prire C'est si bon de dpendre de Lui pour tout! Il nous arrivait d'avoir du mal joindre les deux bouts et Raymond dut, une fois, payer lui-mme une partie du loyer. Chacun, en effet, disposait son gr de son argent de poche. Nous nous tions simplement engags payer une participation d'environ 70 francs suisses par mois pour la nourriture.

    Un lundi matin, je criai Dieu, lui disant mon dsir de servir fidlement et humblement

    dans toutes les obligations matrielles, mais demandant avec ferveur quil maccorde le privilge damener une personne Christ au cours de la semaine.

    Peu aprs, alors que nous nous rendions laroport pour accueillir un visiteur, un enfant de neuf ou dix ans commena me harceler, dans le hall darrive, pour cirer mes chaussures. Je navais ni les moyens, ni lintention de le laisser faire, mais il ne voulut rien entendre et, muni de son attirail, il me suivait presque comme mon ombre. Finalement, me souvenant de ma prire, je me demandai si cet enfant ne mtait pas envoy par Dieu. Une brve conversation avec lui me le confirma : il tait plus que dsireux de confier sa vie Christ ! Cest donc dans une atmosphre climatise, et dans les confortables fauteuils de laroport dAbidjan, que Dieu mutilisa pour tre tmoin de la dcision de ce jeune garon. Le lundi suivant, je refis la mme prire. Aucune activit dvanglisation ntait prvue, mais mon dsir damener quelquun Christ primait sur tout le reste. Je ne demandai ni la sant, ni des finances, ni quoi que ce soit d'autre, me concentrant uniquement sur l'objectif principal : le salut d'un tre humain...

  • Le mardi, un visiteur inconnu, g d'une vingtaine d'annes, se prsenta notre porte. Selon la coutume de l-bas, il venait simplement nous saluer. Je lui rendis son salut en lui annonant Jsus-Christ. Il le reut personnellement lors du troisime entretien de la mme semaine.

    La semaine suivante, un alcoolique du village eut un songe... et vint spontanment nous trouver pour mettre sa vie en rgle devant Dieu. La quatrime semaine, sa femme, genoux aux cts de son mari, donnait son tour sa vie Christ.

    Au cours de cette anne, le Seigneur nous fit un cadeau tout particulier. Sans se concerter, nos quatre surs, celle d'Hubert, de Pauline, de Raymond et la mienne (Gisle et Carmen nous avaient quitts en juillet), nous rendirent visite successivement. La sur d'Hubert n'tait pas encore engage avec Christ. Nous ne fmes aucune pression sur elle mais l'unit dans laquelle nous vivions la toucha profondment. Un soir, elle accepta que je prie avec elle et demanda Dieu de lui rvler Son amour. Elle s'ouvrit cet amour, et sa vie en fut transforme.

    Que se passait-il au fil des semaines? Les maisons que nous habitions n'taient pas acheves. Dans la petite maison, nous avions poser les plafonds de bois et peindre. Dans la seconde maison deux tages, il fallait installer un systme pour pomper l'eau du puits et l'amener dans les tonneaux en haut du btiment. Il fallait aussi amnager la tuyauterie pour les lavabos, les douches, etc... Et puis installer l'lectricit, peindre les murs, s'occuper du jardin. Il y avait enfin remettre en tat les vhicules, en vue du voyage suivant. Ainsi avions-nous tous les jours cinq heures de travail manuel. Tel tait notre programme quotidien: petit djeuner 7 h, puis louange et intercession jusqu' 9h, culte personnel de 9 10 h, puis travaux divers. La cuisine, les achats et la lessive taient assurs par Pauline avec un courage extraordinaire.

    Tous les lundis soir, je donnais une tude biblique sur l'Evangile de Jean quelques Africains. Avec le temps, ils devinrent de prcieux amis. Nous avons consacr plus de trente heures aux dix premiers chapitres. Nous recevions en profondeur cette nourriture spirituelle. Un soir, au moment o nous achevions de mditer sur la femme adultre, les voisins nous interrompirent. Ils nous amenrent un voleur surpris dans l'autre maison, pendant que nous tions tous runis dans la premire. Que faire? Ces amis avaient oubli ce qu'ils tudiaient et voulaient traiter ce voleur leur manire. Ils avaient dj des pierres en main... Aprs avoir remerci les voisins, nous avons parl au voleur: Va, et ne pche plus. Malheureusement, il rcidiva quelque temps aprs. Il nous parut alors souhaitable, pour lui, de le laisser en assumer les consquences. Prions pour lui car il s'est endurci dans son vice, aprs plusieurs sjours en prison.

    Parmi ces jeunes, se trouvait Isaac Berth, un Africain peau blanche. Il s'tait converti l'anne prcdente grce au ministre d'Andr Sivager, membre de l'quipe pionnire. Ce jeune et un autre, Lamine, devinrent nos tudiants pour la premire Ecole de Disciples de JEM en Afrique francophone. L'cole dbuta en octobre. Ils coutaient pendant deux heures des enseignements sur cassette, avec l'un d'entre nous. Ils prenaient des notes, posaient des questions et priaient avec nous. Nous partagions entirement notre vie avec eux. Ils grandirent merveilleusement en Christ. Lamine s'tait converti de l'Islam, et le combat fut dur pour lui. Il dsirait rejoindre son Seigneur. C'est ce qu'il nous disait parfois. Il mourut un an et demi plus tard, l'hpital baptiste de Ferkessdougou, la suite d'une hpatite complique sans doute d'une pneumonie. Pourquoi? Nous sommes rests dans une paix parfaite ce sujet. Nous l'aimions beaucoup. Il tait aussi prcieux qu'un ami d'Europe: nous ne remarquions mme plus la diffrence. J'ai l'impression que le Seigneur avait besoin de lui. Il l'a promu plus haut.

  • Quant Isaac, il est devenu pasteur, tout en restant un vangliste mrite. C'est ce titre qu'il est venu nous aider lors des campagnes d'vanglisation, ou en tant qu'enseignant dans les coles de disciples. Mari en 1995, il se consacre maintenant au dveloppement de JEM en Cte d'Ivoire.

    Le mardi soir, nous nous runissions avec un groupe de prire compos de missionnaires et de lacs, blancs et noirs. Ces runions de prire charismatiques taient comme un courant vivifiant et encourageant. Elles nous aidaient affronter la lassitude qui s'insinue parfois dans le train-train quotidien. Ce fut l'occasion de faire la connaissance des Morin. Lui, professeur d'ducation physique l'universit, s'tait converti lors d'une runion avec Joe Portale. Elle, l'tait depuis longtemps. Tous deux, accompagns de leurs trois fillettes, venaient passer leur dimanche aprs-midi au village.

    Le vendredi soir, c'tait l'agape traditionnelle, puis le samedi, jour de cong. Cette vie simple a surtout t une cole d'approfondissement o le Saint-Esprit nous prparait pour l'avenir.

    Cette base, ce pied--terre de plusieurs quipes en Afrique allait mourir... Cette situation me fait penser l'histoire dAbraham. Lorsqu'il reut l'ordre d'offrir son fils

    en holocauste, il obit sans discuter. Mais quel malheur l'et atteint, si, lorsque l'ange lui ordonna de retirer sa main et de ne pas frapper l'enfant, il let fait quand mme, sous prtexte que Dieu le lui avait ordonn... Ainsi, M'Pouto eut son commencement, sa priode fructueuse avec une petite cole, un dispensaire, un dbut d'vanglisation, divers travaux et des relations avec les glises, mais aussi sa fin, cinq ans plus tard. Qu'en resta-t-il ? A mon avis, surtout une poigne de jeunes qui aiment l'Afrique et les Africains, et qui taient prts y retourner renouvels et enrichis, lorsque le Matre les appellerait. La vision de JEM francophone ne se limitait plus maintenant la Suisse, la Belgique, la France, et au Canada: les vingt-deux pays d'Afrique o l'on parle franais taient dsormais inscrits dans nos curs. N'tait-ce pas l le plus grand rsultat?

    Une cellule de prire

  • CHAPITRE 5

    MARIAGE

    Pendant ces deux premiers sjours en Afrique, lun de trois mois et lautre de quinze, la question du mariage ne me proccupa gure. Ce ntait pas le cas de mon cher ami Raymond qui men parlait de temps autre. Jestimais quil fallait vivre au maximum pour Christ, et les passages bibliques o Paul voque sa vocation me parlaient beaucoup. Amener le plus grand nombre de personnes Christ, tel tait le but de mon existence. Je ne voulais en aucun cas que le mariage y fit obstacle. Trs mathmaticien de nature, je priais souvent ainsi : Seigneur, si le clibat peut me permettre damener ne serait-ce quune seule personne de plus dans Ton royaume, alors je veux rester clibataire. Dans le cas contraire, permets que je me marie . Quelque temps aprs, la piscine de lhtel Ivoire Abidjan o nous allions parfois lors de notre cong le samedi, je rencontrai un vangliste de grande exprience, Joe Ost. On raconte quil tait si connu quil reut un jour une lettre ladresse suivante : Joe Ost, Cte dIvoire . Nous avions eu de merveilleuses conversations ensemble, et une relle amiti nous unissait. A brle pourpoint, il me lana : Alors, Carlo, tu nes toujours pas mari ? Ne sais-tu pas que un peut en vaincre cent et deux dix mille ? Sans sen rendre compte, il venait de frapper au cur de mon esprit calculateur ! Ce ntait pas l une rponse universelle, mais une rponse prcise de Dieu ma prire des annes prcdentes. Les mois passaient De retour en Europe, je me sentais de plus en plus engag dans les quipes mobiles dvanglisation. Fallait-il que je prenne la responsabilit de ces quipes ? Cest la question quun jour Tom Bloomer, Heinz Suter et Daniel Shaerer, nos responsables francophones, se posrent devant le Seigneur mon sujet. Ils reurent dans la prire un texte quelque peu surprenant : 1 Tim 3 :2 Il faut donc que le dirigeant soit irrprochable, mari dune seule femme, sobre, modr.. . Quand Tom me fit part de cette rponse, je rtorquai que Paul faisait certainement allusion la polygamie. Mais mes responsables avaient la conviction que Dieu m'avait prpar une aide semblable moi, qui m'accompagnerait dans le ministre.

    Daniel Schaerer m'exhorta. Il avait compris par sa propre exprience qu'il ne faut pas attendre passivement: un couple chrtien se prpare par une intercession srieuse. L'ennemi de nos mes connat l'enjeu d'une telle dcision, et il ne manque pas de nous tendre des piges si nous ne sommes pas vigilants. Ainsi commenai-je prier pour celle qui m'tait destine, sans la connatre.

    Je savais que l'Esprit Saint nous formait l'un et l'autre en vue d'un service Sa gloire et qu'un jour, nos chemins se croiseraient. On me posait bien des questions : Comment pourras-tu te marier sans salaire? Crois-tu que ta femme acceptera de te suivre? Comment ferez-vous quand vous aurez des enfants ? Je n'avais pas de rponse sinon celle de la fidlit de Dieu. Je rpondais par d'autres questions: Un vangliste na-t-il pas le droit de se marier? Doit-il changer de ministre pour cela? Dieu cesserait-t-il de pourvoir ses besoins ?

  • Mais comment choisir une pouse? Comme je suis reconnaissant envers le Seigneur d'avoir clarifi mes penses ce sujet! Nous sommes crs corps, me et esprit. Un couple doit donc se plaire, s'apprcier, se dsirer physiquement. C'est une ralit merveilleuse, mais insuffisante, c'est le lien du mariage en ce qui concerne le corps. En second lieu, les personnes formant un couple doivent se complter harmonieusement sur le plan psychique, quant aux objectifs poursuivis, quant la manire de penser et de ressentir les choses. En d'autres mots: tu seras pour ton pouse son meilleur ami, et elle sera l'amie la plus intime que tu aies jamais connue, non seulement avant, mais surtout aprs le mariage. Tel est le second lien.

    Enfin, sur le plan du ministre, de la vie spirituelle, Dieu veut nous donner une aide semblable nous, une pouse que l'on peut emmener avec soi comme le faisait l'aptre Pierre, selon 1 Cor.9 :5. Une pouse avec laquelle on peut prier, lire la Parole, exercer l'hospitalit, vivre pleinement le ministre. C'est le troisime lien. Comme cette parole de l'Ecclsiaste est pleine de sagesse: La corde trois brins ne se rompt pas facilement ! (Ecc.4 :12). C'tait l ma rfrence, comme le fil plomb pour le maon, durant ces annes d'attente. A JEM, nous ctoyons des centaines de jeunes chaque anne, et sans l'aide du Saint-Esprit, on va au devant de bien des checs et blessures. C'est la raison pour laquelle nos responsables aiment nous conseiller dans ce domaine, tout en respectant la libert de chacun.

    L't 79 approchait, avec le service Avignon. Depuis deux ans je priais plus intensment et je fis alors une de ces prires un peu folles, comme il nous arrive d'en faire: Seigneur, je te demande de placer ma future femme dans ma cellule de prire Avignon. Mon excitation fut bien vite calme en dcouvrant que je n'tais pas chef de cellule mais chef de groupe, c'est--dire que j'avais veiller sur six cellules et encadrer leurs responsables respectifs. Tant pis, cette prire ne devait pas tre inspire... Je ne reus aucune rvlation ce sujet pendant les six semaines d'vanglisation qui suivirent. Mais en septembre, je me trouvais la confrence annuelle des membres de JEM francophone, prs de Paris. Je fis, de nouveau, une prire qui semblait folle: Seigneur, si ma future femme est ici, montre-la moi !. Nous tions cent vingt...

    Je dcidai de partir une heure dans le joli bois voisin, afin de m'entretenir une fois encore avec mon cher Conseiller et Sauveur. En descendant l'escalier qui donnait sur la cour, je rencontrai Michle Yapoudjian. Rien d'extraordinaire cela... Je l'avais dj connue en 1977, au cours du voyage en Afrique dont Tom tait le responsable et moi son adjoint. Elle avait ensuite fait divers sjours Grasse, dans le midi de la France, dans le cadre de JEM. Nos chemins ne s'taient plus croiss depuis cette poque. Rien de plus... mais son visage me restait prsent et l'entretien avec le Seigneur avait trouv son thme. Dieu, j'en ai aujourd'hui la conviction, me rappela alors l'engagement total de Michle dans l'vanglisation, sa joie communicative et son zle dans la prire. Et puis, curieusement, je compris qu'elle serait aime et accepte par ma famille, en particulier par les membres de la branche italienne de San Remo; je compris qu'elle serait une amie, mon amie. Et soudain, je tombai amoureux d'elle, comme je n'imaginais pas que ce ft possible! Elle devint subitement la plus jolie fille de l'univers! Pour la premire fois je percevais la corde trois brins. Il m'tait arriv de penser d'autres jeunes filles mais il manquait toujours un ou deux brins... il manquait surtout la paix de Dieu. Un dtail d'Avignon me revint alors : je n'tais pas res-ponsable d'une cellule, mais Michle tait l'un des six chefs de cellule dont j'tais le berger! Le moment n'tait pas encore venu l'poque, tout simplement. Mais, ce jour-l, le 22 septembre 1979, je ne marchais plus, je volais! Cependant les rgles de JEM m'interdisaient d'en parler tout de suite, notamment Michle. Quelle preuve! Je passai donc des heures

  • prier dans ce joli bois, et poser les fondements spirituels de l'avenir. Je savais que ma bien-aime quittait JEM le soir mme, pour reprendre son travail d'assistante sociale dans la rgion parisienne. Quand la reverrai-je? Seigneur, donne-moi un signe d'encouragement ! Au repas du soir, nous nous rpartissions par tables de six. Cela reprsentait donc une vingtaine de tables. Je m'assis prs d'Andr Sivager, un vieil ami. La place situe ma droite tait encore vide. Quelqu'un prit alors la parole: J'ai rserv cette place pour Michle, je n'ai pas pu la voir durant tout le week-end. Mais pas de Michle 1'horizon... Aprs la prire, la voici! Elle entre dans la salle manger... Son amie n'hsite pas faire de grands signes pour lu indiquer SA place. C'en est trop! Mon cur bat tout rompre. J'en ai l'apptit coup! J'arrive cependant changer quelques mots avec elle, comme un bon responsable doit le faire envers son ex-quipire Michle m'a avou par la suite qu'elle avait terriblement faim, mais n'osait pas se servir devant un garon si frugal!

    J'avais dj fait part de l'vnement Tom et Cynthia au cours de l'aprs-midi. Tom m'avait promis de prier avec Don Stephens9 les jours suivants. Jusque-l motus et bouche cousue ! Qu'allait-il donc penser en nous voyant attabls l'un ct de l'autre?

    Michle partit sans mme que je puisse la saluer Elle ne pouvait tout de mme pas dire au revoir cent vingt personnes! Tom avait t surpris par ma confidence. Il prit son temps pour prier ce sujet. Cinq jours aprs, il me dclara que Cynthia, Don Stephens et lui-mme taient en paix la pense de ce projet. Mais il ne fallait pas, pensaient-ils, que cela influence Michle quant la reprise de son travail. Ils me demandrent donc d'attendre trois semaines pour lui crire. Comme j'apprcie de tels responsables ! Je partais alors avec une quipe mobile. Voici donc la lettre expdie de Clermont-Ferrand le 16 octobre direction de Mantes-La-Jolie, o habitait Michle :

    Chre Michle, C'est de cette belle ville du Massif Central que je t'cris... J'espre que tout va bien pour toi dans le champ de mission o le Seigneur t'a place !

    Lors de la confrence du personnel Paris, j'ai eu de nombreuses occasions de me promener en communion avec le Seigneur et je crois qu'il m'a parl au sujet de l'avenir. Tu sais que depuis quelques annes dj, ma vie a t consacre l'vanglisation et je suis profondment reconnaissant au Seigneur pour la joie qu'il me donne dans ce ministre. Depuis quelques temps dj je priais notre Pre cleste au sujet dune compagne avec qui tout partager et alors que je le faisais, la paix et une conviction profonde on envahi mon cur. Deux choses taient claires: notre vie ensemble se compltant harmonieusement et notre ministre: proclamer la bonne nouvelle de l'Evangile. Les deux choses sont si troitement lies, quil ma sembl juste de les partager ensemble avec toi, afin que tu puisses les considrer dans la prire. Ton amour et ton zle pour le Seigneur m'ont toujours rjoui et encourag et, si tel est bien le plan de Dieu, j'aimerais que nos vies s'unissent pour Le glorifier dans un chemin de lumire o beaucoup trouveront le salut en Jsus... J'aimerais aussi te dire mon profond respect de ta libert et de ta dcision. Malgr mon amour pour toi, je prie pour que, si je me trompe, le Seigneur m'arrte et que nous restions frre et sur. Si au contraire, la mme conviction remplit ton cur, le Seigneur nous conduira dans une relation nouvelle...

    9 Don Stephens : ancien responsable de JEM pour lEurope, lAfrique et le Moyen Orient ; aujourdhui responsable du bateau Anastasis et des bateaux dentraide

  • Sois aussi libre de parler tes parents. Je te laisse mditer un passage qui m'a beaucoup

    touch: Gense 24 et aussi le psaume 100 pour ce qui concerne le ministre. Dans l'attente de ta rponse, reois, chre Michle, toute mon affection en Jsus.

    Carlo

    Une semaine aprs, je recevais cette rponse: Bien cher Carlo, Lorsque j'ai reu ta lettre a a t d'abord une grande surprise, mais aussi une grande

    joie, car tu as ma confiance et mon estime. Ma seconde raction a t de me tourner vers le Seigneur pour demander Son avis, Lui,

    en Lui laissant la responsabilit de me guider droite ou gauche : il me fallait vraiment une conviction avant de pouvoir te rpondre.

    Et le Seigneur ma clairement rpondu oui . Bien sr, jai parl de toi mes parents parce que jai pleine confiance dans leur discernement qui ma t dun grand secours plusieurs reprises. Leur raction, tous deux, a t tonnant pour moi car je mattendais une certaine rserve. Eh bien ! Non, ils ont t tous deux trs positifs et trs heureux

    Pour moi, javoue que cest important et vritablement, jy vois la bont de notre Seigneur Berger qui sait combien ses enfants ont besoin de connatre la voie suivre avec certitude

    Je tapprcie beaucoup, Carlo, et je me rends compte que le Seigneur me donne une paix profonde ton gard En attendant de tes nouvelles, reois toute mon affection en Jsus.

    Michle

    En dcembre, nous avons pass quelques jours ensemble Mission 8010, aprs quoi

    Michle fit la connaissance de ma famille, de mon village natal et... des descentes en luges ! Un seul point de dsaccord entre nous : la vitesse idale en descente !

    Nouvelle sparation de janvier mars. Elle continuait son travail et je partais en Afrique avec la nouvelle promotion d'tudiants. C'est de l que je la demandai officiellement en mariage, pour le mois de septembre de la mme anne, aux plus chaleureux beaux-parents dont j'aie jamais rv. Ils acceptrent cette demande qui leur paraissait un peu prcoce. Je rentrai donc d'Afrique avec cet objectif.

    Ma situation financire tait la suivante: francs Suisses: 0, francs CFA: O. Je n'ai pas le souvenir d'avoir jamais t sans le sou ce point! Le diable ricanait Et tu veux te marier en septembre !.

    A mon arrive en Suisse, je contractai une dette d'un franc trente cinq pour tlphoner ma famille. Bah, me dis-je, je rentre chez moi Tramelan, ce week-end, le Seigneur pourvoira...

    Il pourvut l'aller et au retour en voiture, mais sans plus. Et je me retrouvai avec ma dette d'un franc trente cinq... Seigneur que se passe-t-il ? Je suis ton fils et je m'attends un magnifique mariage pour Ta gloire.

    Personne ne connaissait ma situation, sauf mon Pre cleste. Le soir, dans mon courrier, je

    trouvai une enveloppe anonyme. A l'intrieur, trois mots: Pour ton mariage, et 270 francs suisses. A partir de ce jour, ce fut une pluie de bndictions financires. Je n'avais jamais vu

    10 Mission 80 : congrs international sur la mission, Lausanne, runissant plus de 7000 jeunes Europens

  • a ! Mais plus merveilleuse encore tait ma certitude de pouvoir dsormais me confier

    totalement en Dieu. Je pouvais compter sur Lui, non seulement pour mes besoins personnels cela je lavais expriment pendant 4 ans mais aussi pour ceux de ma femme et de nos futurs enfants, si Dieu nous en accordait. Quelle joie et quelle paix infinie !

    Michle travailla encore jusqu la fin du mois de juin, puis nous nous sommes retrouvs Avignon pour un nouveau service dt. Trois semaines aprs, nous sommes alls Burtigny, en Suisse, pour les derniers prparatifs du mariage. Jean, le frre de Michle, infirmier, avait prvu de se marier le 6 septembre avec une jeune infirmire galement. Fallait-il nous marier le mme jour ? Un mariage nest-il pas un vnement unique ? Nous avons donc dcid, Michle et moi, de clbrer le ntre le 13 septembre dans mon glise, une jolie chapelle situe quelque 1000 m daltitude, non loin de Tramelan, dans le Jura Bernois. Par la foi, on tabla sur cent quatre-vingts invits. Le nombre de places assises, de portions de glace, etc. fut prvu sur cette base. Mais nos amis taient si nombreux quon pouvait sattendre tout ! Il en vint dun peu partout : dAbidjan, (nos amis Morin, en cong cette date), de Paris Beaucoup de membres de JEM se chargrent de lanimation avec chants et chorgraphie. Il y avait aussi quelques amis denfance quil est si bon de revoir, des voisins qui mavaient vu natre. Ma famille d'Italie tait galement reprsente.

    Tom donna le message. Il parla d'Alice, l'hrone du livre de Lewis Carroll: Alice au pays des merveilles. Dans ce pays du miroir, disait-il, il faut s'loigner des choses pour s'en approcher11. Tom nous fit comprendre que le bonheur ne se trouve pas en le cherchant, en le poursuivant, mais au contraire, en se perdant pour les autres. Nous choisissions de tourner le dos une vie tranquille, un chez-soi agrable, un standing de vie normal aujourd'hui. Mais le ministre d'vangliste allait nous satisfaire au-del de toutes choses. La transformation des vies, la bndiction et le bonheur de servir Dieu accompagnent ceux qui perdent leur vie pour Jsus. Combien cette parole fut prophtique! Le chemin parcouru deux dans quelque 40 voyages en Afrique, sans parler de la France, la Suisse et ailleurs, nous l'ont dmontr. Dieu nous a accord, selon son abondante richesse, d'abord un magnifique voyage de noces sur la Riviera italienne, puis une voiture, un pied terre sympathique dans une base de JEM... Et nous n'avons pas manqu d'un centime! Cent soixante-quinze invits nous ont entours en cette journe ensoleille de septembre. Quant l'avenir? Je n'ai pas d'autre rponse: Dieu est fidle, Lui soit la gloire!

    11 Autrement dit : en sapprochant de limage dun objet rflchi dans un miroir, on tourne le dos cet objet et on sen loigne en ralit

  • CHAPITRE 6

    PREPARATION DU SERVICE DETE A OUAGADOUGOU

    Quelque temps aprs mon mariage, Tom, Daniel, Heinz, Linda, Rolf et moi, avons

    pris deux jours de rflexion. Il y avait des annes que nos curs taient ouverts lAfrique, mais quelques pays africains seulement avaient t sillonns par certaines de nos quipes. Alors surgit cette question : Pourquoi ne pas organiser un grand service dt Ouagadougou ? . Cest la capitale dun pays francophone largement ouvert lEvangile, o les glises locales nous accueillent tous les ans avec joie ; de plus, les billets davion sont exceptionnellement bon march. Les circonstances, certes, ne doivent pas nous diriger, mais nous ne pouvons fermer les yeux devant une telle occasion. On retint prcieusement cette ide jusqu lt 81 o, retirs dans la cure du temple de la Fusterie Genve durant le service dt, nous avons nouveau pri : Seigneur, veux-tu que nous allions Ouaga lt prochain ? Chacun reut une impression positive, Daniel Shaerer en particulier. Ds cet instant, il sengagea y aller. Raymond et Irne Serex acceptrent de se rendre sur place mi-avril pour tout prparer. Quand moi, je pourrais assurer la liaison entre tous, de Lausanne o je me trouverais cette priode, avec laide de Charlotte, responsable du secrtariat francophone. Je pourrais galement prparer le dpart des Europens.

    Il y eut un autre moment dcisif Lausanne, juste avant le dpart de Raymond et d'Irne.

    Nous savions qu' partir de ce jour-l, Daniel serait Paris, les Serex Ouagadougou et moi Lausanne. L'unit et une bonne communication entre nous seraient donc de premire importance. Nous joignmes les mains tous ensemble au centre du cercle que nous formions. Notre ennemi, tel un Goliath, nous rservait des surprises, nous semblait-il, et nous ne connaissions pas ses armes. Mais notre tonnement, le Seigneur nous donna, par prophtie, l'assurance que le chemin serait plus facile que nous le pensions, car Il aplanirait tout. Chacun prit sa part de responsabilits: comptabilit, visas, logements, inscriptions et littrature. Mais comment faire face aux inscriptions et annulations de dernire heure ? Daniel eut alors une ide qui nous vita bien des ennuis - nous l'ignorions alors, mais la prophtie commenait se raliser. Son ide? Etablir une liste d'attente et, par la foi, tabler sur un nombre approximatif de cent dix Europens.

    Ainsi avons-nous retenu cent dix billets la compagnie Point Air, sans indiquer de noms. Au cours de la priode prcdant le dpart, nous recevions presque tous les jours des lettres du genre: J'ai chang de travail, je suis dsol, mais veuillez annuler mon inscription pour Ouaga. Et dans le mme courrier : Je sais qu'il est trop tard pour s'inscrire pour Ouaga, mais je sens que Dieu m'y appelle. Faites-moi savoir s'il y a un espoir. Il n'y eut pas moins de vingt changements, mais le 9 juillet, cent neuf personnes taient prsentes l'aroport de Lyon-Satolas !

    Pendant ce temps, que se passait-il Ouagadougou? On avait dcid de parler franais

    pour favoriser l'unit des cellules de prire, tant donn la multiplicit des langues des participants. Plus d'une centaine d'Arncains s'inscrivirent: des pasteurs d'un peu partout, des tudiants d'coles bibliques, des collgiens... Nous avions adapt le prix de ce service d't au niveau de vie local, en essayant de le maintenir le plus bas possible. Nous demandions pour cinq semaines: 1 270 francs suisses tout compris, pour les Europens, 8 000 francs CFA ou

  • 56 francs suisses pour les africains salaris et 35 francs suisses pour les non salaris. Cela reprsentait un effort correspondant aux possibilits de chacun. Dieu bnit abondamment. Comment ? Le plus grand miracle fut le logement. En effet, comment loger 240 jeunes au centre de Ouagadougou ? La rponse normale tait vidente : Impossible !

    Une semaine aprs son arrive, Raymond rencontra le commandant du P.M.K., cole militaire o les jeunes gens peuvent trouver un enseignement ds lge de 7 ans, avec, par la suite, la possibilit de sengager dans larme ou de reprendre la vie civile.

    Cette cole se trouve au centre de la ville. Le commandant accepta de nous accueillir durant cette priode de cong scolaire. A quel prix ? Gratuitement ! Nous navons rien eu payer : ni eau, ni lectricit, ni loyer. Nous tions logs en dortoirs. Quant lautorisation dvangliser, on en fit la demande au gouvernement. L, encore, la rponse officielle nous laissa rveurs. Nous pouvions vangliser partout et sans aucune restriction Ouagadougou et dans les villes environnantes, en utilisant une sonorisation, pendant cinq semaines. Cette libert nous merveilla. Nous avions encore prsents la mmoire les semaines de dmarches ncessaires pour obtenir lautorisation similaire Genve, place de la Fusterie, et pour deux heures par jour seulement !

    Une magnifique salle de 2500 places, appele Maison du Peuple , se trouve au centre de la capitale. Cest le plus vaste auditorium du pays. Fallait-il le louer? Aurions-nous davantage de monde l'extrieur? La saison des pluies nous causait quelques soucis...

    Pour ma part, lide me paraissait trop belle. Quelles ne furent pas ma surprise et ma joie

    dapprendre que Raymond lavait rserve pour huit soires. Comme lentre tait gratuite, et puisquil sagissait de lEvangile, la ville nous laccorda pour le tiers de son prix, soit environ 160 francs suisses par soire. Dieu nous bnissait dans nos finances, ctait vident.

    Quant aux glises protestantes de la ville, elles furent unanimes dlguer auprs de nous un certain nombre de leurs membres respectifs. Ainsi les soires seraient communautaires et les aprs-midi seraient consacrs au travail demand par les Eglises.

    Cinq quipes se rendraient, cet effet, dans les diffrents quartiers de la ville et vangliseraient en plein air.

  • CHAPITRE 7

    OUAGADOUGOU : IMPOSSIBLE NEST PAS FRANAIS

    Parmi les 180 passagers de Point Air , cent neuf au moins partaient dans le but de proclamer lamour du Christ pendant trois cinq semaines, selon la dure des vacances de chacun. Trente seulement taient membres de JEM plein temps. Lhtesse se demandait pourquoi tant de personnes lisaient la Bible : ce fut une premire occasion de tmoignage. Les deux kilomtres et demi de la piste dfilrent sous le train datterrissage, et lappareil simmobilisa sans incidents aprs quatre heures cinquante de vol. Une jeune fille navait pas de passeport et pensait que sa carte d'identit suffirait. Les douaniers, heureusement, lui firent grce. Nous avions deux grosses sonos et beaucoup de matriel. Un passage de douane avait t spcialement amnag pour nous. Nous fmes cependant les derniers sortir de l'aroport. Ds le dpart, nous avions dcid que Noirs et Blancs auraient les mmes conditions de vie. La nourriture serait simple, mais suffisante, tantt africaine, tantt europenne, avec bon nombre de plats internationaux tels que riz, viande de buf, salade, bananes, etc... Chacun gagna son dortoir. Les cellule de prire taient toutes mixtes et diriges par le plus de responsables africains possibles. La premire semaine fut consacre l'enseignement. Il est difficile de dcrire l'avidit avec laquelle nos frres, les Burkinab notamment, buvaient Parole de Dieu! Cet effort d'enseignement porta des fruits magnifiques. Nos jeunes sont revenus du camp transforms nous ont dit par la suite de nombreux pasteurs. Les orateurs n'taient que les instruments bnis de Celui qui nous transforme Son image. Des liens solides se tissrent entre nous. Le moment venu d'vangliser la ville, il n'y avait plus ni Noirs, ni Blancs. Nous tions devenus un en Christ par la grce de Dieu et contre toute esprance! Il n'y pas d'orateur attitr. Daniel Schaerer, notre responsable, fit plusieurs tudes sur la vie de disciple, missionnaires, des pasteurs locaux et d'autres responsables de JEM prirent la parole. Tout convergeait dans la mme direction: que Christ soit Seigneur dans nos vies et Ouagadougou.

    Nous mangions dans un grand rfectoire et chacun faisait la queue pour remplir son assiette et pour la laver aprs le repas. Serait-ce d un manque d'hygine ? - nous tions pourtant trs prudents - ou un virus ramen d'Espagne par certains? Nous ne le savons pas, mais ds le troisime jour, une srie de problmes intestinaux se manifesta dans le camp. Les toubabous (nom que donnent les Africains aux Blancs) tombrent comme des mouches: dix, puis vingt, puis quarante... Finalement trs peu d'entre nous chapprent un ou deux jours de diarrhe. Nos infirmiers et infirmires ne suffisaient plus la tche et certains d'entre eux furent aussi atteints. Quant nos amis africains, ils nous tmoignrent une compassion et un amour dont nous leur sommes reconnaissants aujourd'hui encore. L'preuve fut de courte dure pour la plupart d'entre nous. Cependant, une dizaine durent garder le lit plusieurs jours et cinq rentrer prmaturment. Quelques-uns demandrent la prire avec onction d'huile, et l encore, le divin Mdecin intervint.

    Chacun avait hte de rencontrer cette population pour laquelle nous priions depuis des mois. Personne ne fut du. Le premier soir, plus de mille personnes prirent place sur les siges en gradins de la Maison du Peuple. Le samedi soir, tous les siges taient occups. Rolf tait charg du programme. La soire dbutait par les chants des chorales locales, des tmoignages et des mimes. Puis venait le moment tant attendu de la pice chorgraphique intitule : LAmi . La foule ne voulait rien perdre des faits et gestes des acteurs : les anges, le combat cleste contre Satan, la venue du mal sur la terre, la mort du Crucifi et, surtout, le

  • moment inoubliable du glorieux triomphe de Christ sur la mort qui faisait crpiter les applaudissements de toutes parts. Suivaient ensuite un bref message rsumant la soire et un appel la conversion. Jen fus charg les deux premiers soirs. Je demandai ceux qui voulaient rpondre lappel de se lever leur place. Courageusement, une vingtaine, puis une trentaine de personnes se levrent. Elles descendirent ensuite les gradins pour rencontrer des conseillers. Le soir suivant, on donna la parole au directeur de lcole biblique des Assembles de Dieu. Celui-ci nhsita pas faire monter les gens sur le podium. Certains soirs, des dizaines de personnes se dcidrent et, partout, des groupes de prires se formrent spontanment.

    A la fin du Ramadan, les musulmans en fte se rassemblent sur une grande place ; prs de cinquante mille personnes peuvent alors se ctoyer. Que faire ce jour-l ? Les avis taient partags : ne provoquer personne, disaient les uns ; surtout ne pas manquer une telle occasion, disaient les autres.

    Aprs avoir tenu conseil, nous dcidmes d'y envoyer des volontaires, encadrs par Rolf et moi. La place tait couverte de monde, mais le soir venu, un ou deux endroits seulement taient clairs et aucune manifestation n'tait organise.

    Nous nous installmes bien l'cart, sur la place. Notre gnrateur de courant ne voulait pas fonctionner. Bien des jeunes intercdrent en silence pour que la situation se dbloque. Finalement un ronronnement se fit entendre: trois projecteurs s'allumrent et la sono se mit en marche. Nous avons commenc adorer notre Sauveur, en chantant, en toute simplicit et sans commentaires. Les centaines de personnes qui nous entouraient taient tonnes de voir Africains et Europens unis autour d'un mme message d'amour. Puis Rolf prit la parole et conta une fable de la jungle: Le grand mur qui nous spare de Dieu. Cette fois, la glace tait rompue. La foule tantt riait, tantt recevait avec srieux la vrit ainsi illustre. Au moment de l'appel, je soufflai Rolf: Si tu te mettais genoux au milieu et si je demandais simpleme