Témoignage du quotidien de la Seconde guerre...

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1 CPES Histoire 2012-2013 FAYE Etienne Témoignage du quotidien de la Seconde guerre mondiale dans le Sud de la France de l’Occupation à la Libération : CPES Classe Préparatoire aux Études Supérieures Mémoire de spécialité histoire Sous la direction de M. Didier LAVRUT Lycée Alphonse Daudet, Nîmes.

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CPES Histoire 2012-2013

FAYE Etienne

Témoignage du quotidien de la Seconde guerre mondiale

dans le Sud de la France de l’Occupation à la Libération :

CPES Classe Préparatoire aux Études Supérieures

Mémoire de spécialité histoire

Sous la direction de M. Didier LAVRUT

Lycée Alphonse Daudet, Nîmes.

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Table des matières :

Introduction ................................................................................................ 3

I. L’invasion du Sud : un processus aux origines complexes ....... 4

II. Un quotidien sous tension.............................................................. 6

III. Se reconstruire ................................................................................ 12

Conclusion ................................................................................................. 13 Annexe ........................................................................................................ 14

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Avant de commencer ce mémoire, je tiens à remercier ma grand-mère pour m’avoir

accordé de son temps pour pouvoir vous présenter mon travail.

Je tiens de même à remercier spécialement Monsieur Lavrut, pour ses conseils et cette

idée de projet qui sans lui, n’aurait pas pu aboutir.

"Mon projet s'établit sur le témoignage de ma grand-mère paternelle qui a aujourd'hui 88 ans. En effet, elle avait 15 ans au début de la guerre et 19 ans vers sa fin, ce qui représente à peu près toute son adolescence, et ce qui fait d'elle un témoin de première importance. Dans ma présentation, je ferai en sorte de mettre le témoignage de ma grand-mère dans des cadres pour faciliter la compréhension.

J’ai interrogé ma grand-mère, par téléphone, dans un but de reconstitution de la Seconde Guerre mondiale à travers ses yeux. Je tenterai de raconter un quotidien sous cette période qui s'est avéré rude."

Mais avant de pouvoir parler de quotidien, il serait intéressant de contextualiser. Ma grand-mère est née dans le Nord-est de la France, vers Epinal. La raison qui l'a fait venir dans le sud à Draguignan, c'était la guerre. En effet, son père fournissait des maquis de résistance, or sûrement dénoncé par un collaborateur, il s'est fait attraper alors même que sa famille ne savait rien de ses actions, ce qui les a fait fuir sous des noms d'emprunt dans le Var.

Fuir était nécessaire, à cette époque on enlevait les familles pour soutirer des informations. Sous une fausse identité, ainsi appelée Yvette Imberg, elle a pu fuir à Nice par l'aide d'un pasteur. Mais en 1942, ce qu’elle avait pu fuir revenait envahir la France profonde. Dans cette optique, il est intéressant de voir ce qui a pu bien se passer durant l'adolescence de ma grand-mère une fois qu'elle fut arrivée dans le Sud de la France. Ainsi, je mettrai en lumière les rapports qui se sont créés dans le Sud avec les Allemands lors de l'invasion tout comme l'espoir d'une défaite de l'Allemagne. Ensuite, je soulignerai ce qui en a découlé au niveau du quotidien de la population du Sud. Enfin je montrerai que le refoulement de la frustration a abouti à une purification nécessaire.

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L’invasion du Sud:

Prise du pouvoir par l'ennemi:

« Pétain était un héros, ou du moins au début. "On est sauvé" disait mon arrière-grand-père. Cette confiance venait de son ex-statut de héros de la bataille de Verdun, mais Pétain était "plus ou moins gâteux", il s'est laissé avoir par Laval, "le traître des traîtres" avec son gouvernement d'extrême droite. Il a cru sauver la France. »

Ce processus est connu sous le nom de maréchalisme. En effet, suite à la défaite française face aux forces allemandes, le désarroi était total. Cette France complètement perdue et stupéfaite par ces derniers évènements s'est rattachée, confiante, au symbolique vainqueur de Verdun, le chef désintéressé et patriote, l’insoupçonnable Pétain.1 Mais en quoi l'arrivée de Pétain aurait permis cette possibilité de se considérer comme sauvés ? On peut voir dans ce cadre l'arrivée de Pétain comme salvatrice pour une principale raison : la France n'a plus d'unité, le rassemblement autour du plus illustre des français offre le moyen autour du gouvernement de Vichy d’une tentative indispensable de redressement et de reconstitution de la solidarité française. En effet, la nation s'était affichée solidaire lors de la bataille de Verdun. Aussi l'accès au pouvoir de Pétain, ancien héros de la nation, est vu comme une chance.2 En ce qui concerne Laval, même s’il n’est pas excusable, il faut relativiser son statut. En effet, il était moins antisémite que le maréchal Pétain. Son antisémitisme pouvait être qualifié d’opportuniste, politiquement ; il voulait intégrer la France au régime germanique en tant qu’internationaliste et « pacifiste » convaincu. D’ailleurs, même si l’opinion accuse Laval de la rafle du Vélodrome d’Hiver, il n’en était pas l’initiateur, mais il en a saisi l’opportunité pour améliorer économiquement les relations franco-allemandes. Il a donc laissé la politique antisémite s’installer.3

1La France des années noires : De l’Occupation à la Libération page 345

2La France des années noires : De l’Occupation à la Libération page 348

3La France des années noires : De la défaite à Vichy page 318

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Les allemands arrivent dans le sud:

L'invasion allemande était très mal perçue, l'ennemi envahissait l’arrière-pays. Une des premières mesures a été l’imposition du couvre-feu. Ils sont arrivés en chantant. On craignait les Allemands, ne serait-ce qu'un qui tombait, c'étaient 50 otages qu'ils prenaient en retour. Il était nécessaire de se méfier constamment, il fallait apprendre à se taire, notamment ne rien dire à propos du nazisme ou des Allemands. Écouter Radio Londres, le canal pour la résistance se faisait illégalement, caché des Allemands. Cette radio diffusait des messages codés telle que la célèbre expression : "Les carottes sont cuites".

Si on peut noter l’invasion allemande de la zone sud en 1942, c’est qu’il y a eu tout un processus qui a obligé les Allemands à intervenir. Ce processus peut s’expliquer par l’inadaptation de la politique vichyssoise notamment au niveau de la jeunesse devenant par le biais de mouvements associatifs de potentiels résistants. Le cas emblématique serait celui de l’école d’Uriage dans l’Isère où cette école quand bien même elle enseignait le patriotisme, le civisme, a produit le contraire. L’Allemagne nazie a dû ainsi intervenir. D’ailleurs, on peut ajouter que la politique d’envoi de travailleurs volontaires en Allemagne a pu également favoriser l’action entreprise par l’Allemagne.4 En outre, le sud-est particulièrement possédait les capitales de la résistance : Grenoble par exemple devient « la capitale des maquis », Marseille « capitale intellectuelle de la France non occupée ».5 Si ma grand-mère fait mention d’une crainte dans le quotidien et de la possibilité de se faire attraper, il faut notamment réfléchir au collaborationnisme. Même si les Allemands pouvaient attraper dans certaines circonstances des résistants ou des personnes pouvant avoir des liens avec la résistance, la plupart des arrestations étaient liées à la délation, c’était le collaborationnisme. Il y avait certes le collaborationnisme d’Etat mais notamment celui des partisans (militants) ou celui du peuple. Il y avait même un groupe officiel nommé groupe Collaboration, institutionnalisé en 1940 qui regroupait en mai 1944 : 42 283 adhérents dont 9 401 en zone sud. Ce collaborationnisme s’exerçait en quasi-totalité en zone urbaine par des indépendants, des employés ou des fonctionnaires, mais presque jamais par des ouvriers ou des paysans. Il y avait sinon un collaborationnisme lié à l’adhésion aux nazis.6

4La France des années noires : De la défaite à Vichy page 508-511

5La France des années noires : De l’Occupation à la Libération page 183

6La France des années noires : De la défaite à Vichy page 403

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L’expression « les carottes sont cuites » était fortement utilisée à la radio par les résistants. En effet, celle-ci annonçait des actions résistantes. On utilisait l’expression en référence à la dureté de la carotte, or résister, c’est montrer cette dureté.

Partie 2 : Un quotidien sous tension:

Se rationner au quotidien:

Il était complexe de s’alimenter à cette époque, notamment du fait que le rationnement se faisait par ticket. Ma grand-mère m'a décrit un système qui se faisait par 7 catégories d'âge: -Le ticket E destiné aux enfants de 0 à 3 ans. Ils n'avaient le droit à presque rien... -Le ticket J1 de 3 à 6 ans -Le ticket J2 de 6 à 14 ans

-Le ticket J3 de 14 à 21 ans

-Le ticket A (adulte) -Le ticket V (vieillard) Ma grand-mère a ainsi bénéficié du ticket J3, elle ne pouvait espérer que 250 grammes de pain par jour. Les autres tickets en donnaient moins, il y avait un poids dessus qui indiquait la quantité à laquelle on pouvait accéder. Tout était rationné : le sucre, le lait, etc. Même certains produits avaient disparus, le café par exemple. Cette situation est vécue par l’ensemble de la population. La cause de cette pénurie était la mainmise allemande sur toutes les récoltes. Pour pallier cela, il existait des marchés noirs où on trouvait par exemple de l'huile ou d'autres aliments tels que du lait supplémentaire. On notera de même que les villes étaient plus affamées que les campagnes. En campagne on pouvait davantage se nourrir grâce à des récoltes propres. Suite à l'épisode de la Seconde Guerre mondiale, le système de rationnement s'est perpétué jusqu'en 1948 où à cette date, ma grand-mère a pu commencer à manger librement. D'ailleurs, en guise d'anecdote, la première chose qu'elle ait pu manger était du boudin noir, à volonté, ce qui l'en a écœurée. Le problème du système était tel que l'attente était très longue, il y avait des queues interminables du fait que tout était pesé... Si ce n'était pas pour de la nourriture, les tickets avaient d'autres usages, tel que celui de la vaisselle, des matériaux... Le tissu était très rare, on faisait des vêtements directement dans des couvertures. A la fin de la guerre, les Américains ont distribué des boites de conserve et du savon aux Français.

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Le système de rationnement de base avait déjà des problèmes de carence, or il a eu des moments de faiblesse notamment en 1944 où la pénurie faisait rage. En effet, les tickets à partir du débarquement n’étaient plus qu'exceptionnellement honorés, le pain devenant lui-même précieux.7 Si ce système était aussi strict, c’est que Vichy avait fait le choix de préserver l'avenir de la France dans le futur espace économique allemand, refondant ainsi en tant que vaincu toute sa politique économique d'une manière dirigée pour l'envahisseur.8 Vis-à-vis des marchés noirs, ils étaient pour la plupart accaparateurs, et ceux qui ne se contentaient que de tickets de rationnement étaient condamnés à vivre seulement de privations.9 Il faut noter que sous l'Occupation, le monde paysan, dans son ensemble était beaucoup moins sensible à la faim que les villes où la ration officielle de calories y permettait seulement d'éviter les problèmes de malnutrition. De fait, les campagnes ont été largement favorisées permettant presque l'autoconsommation avec aisance. On notera de même que cela a pu être une revanche envers les citadins qui considéraient la campagne comme des moins que rien.10 On pourrait croire que la production s’était effondrée en France, néanmoins, ce n'est pas le cas. Notre appareil industriel a été poussé, tout comme beaucoup de nos productions. D'ailleurs le chômage a aussi largement baissé passant de 400 000 personnes en 1941 à moins de 50 000 en 1942.11 A propos des Américains, cela semble assez dérisoire quand on regarde l'état de pénurie à la Libération, mais on notera des efforts même au sortir de la guerre avec notamment 40 grammes de fromage et un litre de vin pour certains sur les tickets du 4 et 5 mai.

7La France des années noires : De la défaite à Vichy page 453-454

8La France des années noires : De la défaite à Vichy page 455

9La France des années noires : De la défaite à Vichy page 453

10La France des années noires : De l’Occupation à la Libération page 376

11La France des années noires : De la défaite à Vichy page 460

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1 La France des années noires: De la défaite à Vichy page 472

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Propagande médiatique et scolaire:

La France sous Vichy a connu un système d’encadrement à partir de 1940. Bien qu’autoritaires, les programmes installés n’avaient pas initialement la vocation d’asservissement de la jeunesse. La première période de Vichy de 1940 à 1942 tentait de relier l’État et la société civile sans pour autant intégrer une éducation fascisante. Le noyau familial et les associations de jeunesse étaient en cela prônés. Néanmoins, même si Vichy était l’instigateur de l’institutionnalisation de ces mouvements de jeunesse, il dut prendre des attitudes fascistes dans le cas où ces associations se sont révélées prendre trop d’indépendance. En cela, Pétain choisit de défendre les associations chrétiennes principalement.12 Beaucoup de français allaient au cinéma, notamment la jeunesse. Néanmoins Vichy contrôlait les actualités, cela dès 1941 et officiellement en 1942, il contrôlait dans les deux zones par le biais d’une société franco-allemande, toutes les actualités du cinéma.

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La France des années noires : De la défaite à Vichy page 497

« C'est Vichy qui a instauré le chant à la gloire de Pétain dans les écoles. Ma grand-mère à l'époque était encore dans le système du collège et a donc dû chanter devant le drapeau français tous les matins dans sa cour de récréation le chant de Pétain "Maréchal, nous voilà ! ". » En cela reposait un enjeu. Faire de la propagande, sans doute mais aussi se légitimer. Dans ce même état d'esprit, ma grand-mère se souvient que : « le cinéma était assez présent, c'était un cinéma à la gloire de l'Allemagne industrielle. On avait sinon une propagande contre les juifs, les communistes, les francs-maçons exposée sur de grandes affiches placardées dans les rues. Vichy utilisait aussi beaucoup la radio pour nous toucher.

Mon frère a été en quelque sorte victime de la propagande, il a été enrôlé dans les chantiers de jeunesse instaurés par Vichy pour apprendre à travailler dans les champs, la maçonnerie. Cela était bien sûr obligatoire. »

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Vis-à-vis de la presse, les mesures du régime de Vichy ont été telles qu'elles ont donné une juste conception de ses devoirs. En cela, il faut entendre le culte du Maréchal, une refonte des conditions de censure et un développement du conditionnement de l'opinion.13

Pour la radiophonie, Vichy s’était doté de la radiodiffusion nationale dans laquelle le gouvernement tenait un discours très partisan, même si elle était devancée par Radio-Paris sous tutelle de la Propagandastaffel. 14 Mais il faut surtout noter que la Résistance possédait elle aussi un vaste réseau radiophonique, d’ailleurs, la France libre n’aurait pas pu commencer sans la radio, étant le seul moyen d’accès à l’opinion publique métropolitaine.15

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La France des années noires : De l’Occupation à la Libération page 72 14

La France des années noires : De la défaite à Vichy page 182 15

La France des années noires : De la défaite à Vichy page 233

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2 La France des années noires: De la défaite à Vichy page 505

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Se reconstruire:

Se débarrasser de la menace allemande :

« Il fallait se reconstruire, les Allemands tout comme les Américains ont fait des dégâts, mais à ces derniers "je ne leur en veux pas". Les bombardements étaient nécessaires, même si des innocents sont morts, l'éradication nazie était nécessaire. D'ailleurs le bombardement de Draguignan s'est focalisé comme beaucoup d'autres sur les moyens de transport dont notamment la gare, les routes ... Mais aussi pour anecdote, le pont d'Anthéor qui finalement n’a abouti à rien puisque tous les obus ont raté leur cible. D'ailleurs, ma grand-mère a failli être tuée lors d'un de ces bombardements ce qui lui a permis de témoigner (voir annexe). » Il y eut aussi l’épuration, avec le rasage de crâne des femmes ou la mort des collaborateurs … »

La population espérait ce débarquement, mais redoutait les combats à venir. Par exemple les bombardements des 26 et 27 mai 1944 à eux seuls ont fait sur les dix principales agglomérations françaises dont Marseille, près de 6 000 morts, autant que de blessés, aussi bien allemands que français.16 Mais ces morts n’ont pas été les seules dans le camp français. En effet, c’est dès l’été 1944 que le processus d’épuration a commencé. Il reste le célèbre exemple des tondues mais aussi les nombreuses morts extrajudiciaires s’élevant à 1 600 exécutions. Par la suite, ce sont les tribunaux à la demande des autorités qui ont jugé les collaborateurs. Sur 100 000 français condamnés pour collaboration, il y a eu 7 055 peines de mort.17

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La France des années noires : De l’Occupation à la Libération page 424 17

La France des années noires : De l’Occupation à la Libération page 475-476

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Conclusion : Vivre sous Vichy, c'était vivre dans un monde de carence, de manipulation. On a pu voir à travers l’exemple de ma grand-mère que la France de cette époque était très contrôlée, organisée et assujettie face à l’Allemagne nazie. Pourtant on a pu voir que la Résistance s’est vite mise en place même si sa force armée était relativement restreinte surtout si l’on compare avec le nombre de collaborateurs. Et au final, même si la Résistance exigeait une épuration des collaborateurs en fin de guerre, malgré les clivages politiques, la solidarité française a fini par ressurgir. D’une part contre l’humiliation nationale par l’engagement de beaucoup dans l’armée, d’autre part, par une revanche courte et temporaire. Par ailleurs, même si Pétain était très tourné vers le catholicisme, cela n’a pas débouché sur une vague d’anticléricalisme.

Pour en revenir à mon objet d’étude, faire ce projet sur le témoignage de ma grand-mère s’est révélé être enrichissant dans une perspective historique. En effet, même si l’objet d’étude semble sujet à controverse notamment par la dérive sociale mémorielle, il n’en demeure pas moins que le témoignage oral est un objet d’étude comme un autre. D’ailleurs, le témoignage de ma grand-mère comme base de mon travail m’a permis de structurer mes connaissances sur le quotidien des Français pendant la Seconde Guerre mondiale.

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Annexe :

Article de Var Matin du 1er

février 2010 sur le bombardement de Draguignan :

C'était le 15 août 1944. Mais c'est encore hier dans la mémoire de Simone Faye. Ce jour-là, les Américains pénètrent dans la cité du Dragon et libèrent la ville de l'emprise allemande. Mais avant les scènes de joie, Draguignan a vécu l'horreur. Pendant de « trop longues heures », la ville a essuyé les bombardements alliés. « C'étaient des avions américains ou anglais », confie cette dame âgée de bientôt 85 ans. « Une pluie de bombes s'abat sur la caserne de Chabran, où créchaient les Allemands ».

A l'époque, elle avait 19 ans. Ce 15 août là, vers 7 h, elle doit rendre visite à son

fiancé pour vendre des légumes avec son cher et tendre. Mais sur la route... «

J'ai entendu un long et strident sifflement ». Ce sont les bombes qui fendent l'air.

« Je n'en avais jamais entendu. Mais j'ai tout de suite su que c'était ça. » Malgré

la peur, ce petit bout de femme garde son sang-froid. « Mon père, qui avait fait

la guerre de 1914-1918, m'avait prévenu que pendant les bombardements, il

fallait se coucher face contre terre », raconte-t-elle. Le jour-J, Simone s'est bien

souvenue du précieux conseil de son papa. « Je me suis jetée à terre et j'ai dit

aux gens autour de moi de faire la même chose. » Geste salvateur. Sa vie est

sauve.

Peut-être d'autres bombes à Saint-Léger

« J'ai quand même failli être tuée. J'ai senti le souffle de la bombe me raser. Si

je ne m'étais pas couchée, j'aurais été éventrée ! Je venais d'échapper à la mort

», confie Simone. Mais pendant cet « arrosage », tous n'ont pas eu sa présence

d'esprit. Selon Simone, une personne a été tuée. D'autres ont été blessées. « C'est le seul jour où Draguignan a été bombardé. »

Dès lors, Simone n'a pas du tout été surprise d'apprendre dans nos colonnes la

découverte d'une bombe de 250 kg sur le chantier de la Zac Chabran. « Pas

étonnée. Pas étonnée », répète-t-elle. Pire, Simone pense que cette découverte

ne sera pas la seule. « A l'époque, le quartier Saint-Léger avait été également

lourdement bombardé. Là-bas, il n'y avait qu'un pré avec une ferme. Après le

déluge de bombes, il y avait des cratères partout. Cela ne m'étonnerait pas qu'il y ait quelques bombes là-bas... »

Var matin.

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Bibliographie Jean-Pierre AZÉMA, François BÉDARIDA (sous la direction de), La France des années noires, 2 tomes, Paris, Seuil, collection Points histoire, 1993 : Tome 1 : De la défaite à Vichy. Tome 2 : De l’Occupation à la Libération