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TIC ET JEU CONCURRENTIEL Le cas des places de marché électroniques Sébastien Tran Lavoisier | Revue française de gestion 2007/4 - n° 173 pages 157 à 169 ISSN 0338-4551 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2007-4-page-157.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Tran Sébastien, « TIC et jeu concurrentiel » Le cas des places de marché électroniques, Revue française de gestion, 2007/4 n° 173, p. 157-169. DOI : 10.3166/rfg.173.157-169 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Lavoisier. © Lavoisier. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.234.146.125 - 12/07/2012 00h54. © Lavoisier Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.234.146.125 - 12/07/2012 00h54. © Lavoisier

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TIC ET JEU CONCURRENTIEL Le cas des places de marché électroniquesSébastien Tran Lavoisier | Revue française de gestion 2007/4 - n° 173pages 157 à 169

ISSN 0338-4551

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2007-4-page-157.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Tran Sébastien, « TIC et jeu concurrentiel  » Le cas des places de marché électroniques,

Revue française de gestion, 2007/4 n° 173, p. 157-169. DOI : 10.3166/rfg.173.157-169

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Les places de marché, en

tant que système

d’information inter-

organisationnel, ne se

limitent pas à une simple

dimension transactionnelle.

En effet, celles ayant

survécu à la phase de

consolidation ont

progressivement élargi

leurs fonctions et

contribuent à une nouvelle

dynamique concurrentielle.

Cette dernière est à

l’origine de la

reconfiguration des

relations interentreprises

qui reposent sur la

formation d’organisations

réticulaires plus souples et

mieux adaptées aux

évolutions du jeu

concurrentiel de plus en

plus complexe.

Les recherches menées depuis plusieurs annéess’accordent pour souligner que les technologiesde l’information et de la communication (TIC)

jouent un rôle majeur dans la restructuration des rela-tions entre les firmes (Cash et Konsynski, 1985 ; Maloneet al., 1987 ; Benghozi, 2001). Les places de marchés’inscrivent dans le phénomène de l’intermédiation élec-tronique (E-Bay, Amazon, etc.) ayant pour objet demettre en relation des acteurs en profitant des propriétésdes réseaux électroniques tels qu’Internet, mais dans lecadre des relations B-2-B (Tran, 2004). Elles ont connuune période d’intense développement liée aux afflux defonds provenant des sociétés de capital risque entre lesannées 1997 et 2000. À cela, l’effet de mimétisme et laprime accordée au premier entrant n’ont fait que démul-tiplier les initiatives. Ainsi, l’Association européennedes places de marché (AEPDM) recensait plus de1200 plates-formes début 2000 en Europe et la Federal

D O S S I E R

PAR SÉBASTIEN TRAN1

TIC et jeu concurrentielLe cas des places de marchéélectroniques

1. L’auteur remercie le Fonds social européen pour son support finan-cier à cette recherche.

DOI:10.3166/RFG.173.157-169© 2007 Lavoisier, Paris.

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Trade Commission (FTC) en comptabilisaitenviron 2000 rien que pour les États-Unis.Toutefois, l’éclatement de la bulle spécula-tive sur les marchés financiers en 2001 etles premiers retours d’expériences ont misfin à l’engouement pour les places de mar-ché car les résultats sont loin d’avoiratteints les prévisions très sur-estimées dansl’ensemble. Les places de marché sont ren-trées dans une importante phase de consoli-dation avec la disparition de nombreusesplates-formes, notamment celles de typestart-up2. Néanmoins, l’intérêt des placesde marché n’est pas totalement remis encause sur un plan stratégique car elles s’ins-crivent désormais dans une logique d’opti-misation des processus reposant sur les fluxd’information et les nouvelles exigences decompétitivité des entreprises.Dans une première partie, nous soutenonscette hypothèse en soulignant quels peuventêtre les principaux avantages concurrentielsd’une adhésion à une place de marché quine se limitent pas à un aspect purementtransactionnel, et en filigrane de réductiondes coûts. Dans une seconde partie, nouschercherons à déterminer quelles peuventêtre les implications des places de marchéau niveau du jeu concurrentiel interentre-prise, ainsi que dans l’évolution de l’orga-nisation industrielle des secteurs. Enfin,nous illustrerons nos propos par l’étude decas du secteur de la grande distribution,pionnier en matière de création de places demarché.

I. – LES AVANTAGESCONCURRENTIELS GÉNÉRÉS PAR LES PLACES DE MARCHÉ

Dans une optique stratégique classique, lessystèmes d’information interorganisation-nels permettent la mise en place de straté-gies de domination par les coûts ou de stra-tégies de différenciation, conférant ainsi un avantage concurrentiel aux firmes (Bernasconi, 1996). Les places de marchés’inscrivent dans le cadre de ces deux dimen-sions, et souvent de manière simultanée, cequi constitue un réel avantage mais au détri-ment d’une certaine lisibilité en termes depositionnement pour les utilisateurs.

1. Le leitmotiv de la réduction des coûtsdans les échanges interentreprises

Les TIC sont perçues comme des outilspermettant de réduire les coûts, et ce, auniveau de l’ensemble des différentes phasestransactionnelles des achats interentreprisesqui représentent actuellement plus de 50 %du chiffre d’affaires des firmes industrielles(Shaw et Subramanian, 2002) et constituentdonc une source potentielle d’économies.De nombreux outils basés sur les propriétésdes réseaux électroniques tels qu’internetsont apparus pour répondre à ce souci deréduction des coûts, notamment à deuxniveaux.Le premier concerne les coûts relatifs auxdifférentes phases liées à la transaction enelle-même, à savoir les coûts de transaction(recherche de produits, qualification ducontractant, comparaison des offres, etc.).

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2. Ces places de marché sont issues de l’initiative d’acteurs indépendants qui ont trouvé rapidement des capitauxauprès d’investisseurs, notamment des sociétés de capital risque. Or, selon une étude académique menée aux États-Unis, plus de 80 % de ces nouveaux entrants ont fait faillite ou ont été rachetés (Day et al., 2003).

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Les systèmes d’information interorganisa-tionnels permettent de réduire ces coûts àpartir des propriétés intrinsèques desréseaux électroniques3 (réduction des coûtsde recherche, des menu costs, automatisa-tion des tâches, etc.). Par ailleurs, les placesde marché s’apparentent à des instrumentsde normalisation des processus, tant tech-niques qu’organisationnels, dans leséchanges interentreprises. L’enjeu est stra-tégique car les standards et les normesreprésentent des facteurs de réduction descoûts de développement, d’apprentissage etd’utilisation4.Le second niveau d’explication concernele coût direct d’achat des biens. D’unepart, internet a réduit le coût de collecte,de traitement et de diffusion de l’informa-tion. En conséquence, les acheteurs ont

accès à une meilleure information relativeà la transaction, notamment en ce quiconcerne les prix. D’autre part, les placesde marché peuvent constituer un pointfocal entre l’offre et la demande dans unsecteur, ce qui élargit le champ concurren-tiel avec l’apparition de nouveaux contrac-tants situés en dehors du réseau relationneldes adhérents. Les mécanismes transac-tionnels tels que les enchères ou les appelsd’offres électroniques matérialisent cettestratégie de domination par les coûts. Lesfournisseurs ont donc été très réticentsdans un premier temps (Grey et al., 2005)de crainte de voir leur marge se réduire5

mais ils sont souvent fortement incités àadhérer aux places de marché étant donnéles volumes d’achat et la pression de leursdonneurs d’ordres.

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3. Sur ces aspects, voir les travaux de Malone et al. (1987).4. On peut citer à titre d’exemples que dans l’industrie automobile, Covisint et SupplyOn sont membres de Galia etOdette, deux des principaux organismes de normalisation5. Bakos (1997, 1998) a développé un support formalisé pour démontrer l’hypothèse que les places de marché élec-troniques favorisent la concurrence par les prix et réduisent le pouvoir de marché des vendeurs.

Tableau 1EXEMPLES DE TRANSACTIONS EN LIGNE PAR DE GRANDS

GROUPES INDUSTRIELS

Groupe

Péchiney

Alstom

Suez

TotalFinaElf

Lafarge

Date

2002

2002

2004

2004

2004

Volumes des transactions et/ou estimations des gains.

5 % du CA dans le secteur aluminium réalisé via les places demarché (hors EDI), soit 227 millions d’euros de transactions.

Les appels d’offres électroniques ont représenté 700 millionsd’euros et les économies sont estimées à 13 % sur les achats.

Gain estimé à 5 euros par facture avec le e-procurement et à 5-6 % avec les enchères électroniques.

L’e-sourcing représente 5 % des achats au total dont 90 %d’appels d’offre et 10 % d’enchères.

55 appels d’offres en ligne sur les biens de production pour unmontant total de 200 millions d’euros de CA.

Source : synthèse des conférences EBG entre 2002 et 2005.

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Pour autant, malgré la communication sansdoute trop allusive aux mécanismes tran-sactionnels telles que les enchères qui sontnéanmoins le cœur de l’offre de quelquesplates-formes (Freemarkets…), les placesde marché6 n’ont pas pour principal objetde réduire les prix ou les coûts mais plutôtd’optimiser l’offre et la demande au sein decommunautés professionnelles (Bloch etCatfolis, 2001). Ainsi, l’ensemble des ser-vices proposés aux adhérents s’est progres-sivement élargi à des fonctions d’intégra-tion logistique entre les différentes firmes,notamment par l’amélioration des proces-sus d’échanges d’informations.

2. Du commerce électronique à l’electronisation des relationsinterentreprises?

L’une des principales évolutions dans l’or-ganisation industrielle des secteurs depuisplusieurs années est le pilotage de la pro-duction depuis l’aval de la chaîne de valeur.Parallèlement, on assiste à une désintégra-tion verticale des grandes firmes au profitd’une relation client/fournisseur essentiel-lement supportée par les TIC. Internet estdonc apparu comme un support particuliè-rement approprié à cette nécessité d’inter-connexion des différents acteurs, notam-ment dans les systèmes de productionsynchrone. En théorie, la valeur ajoutée des

places de marché repose, en tant que hub deconnexion, sur l’intégration et la connexiondes différents systèmes d’information afind’éviter une discontinuité dans la circula-tion des flux d’informations (états desventes, prévisions de ruptures de stocks,systèmes productifs en juste à temps, etc.).L’une des principales difficultés dans cettelogique d’intégration virtuelle de l’en-semble des acteurs est l’implication desentreprises de petites tailles telles que lesPME qui sont généralement sous-équipéescomparativement aux grandes entreprises7

et qui ne voient pas l’intérêt de l’investisse-ment dans des systèmes d’information dontla maîtrise reste confinée quasi-exclusive-ment à leurs principaux clients ou donneursd’ordres. Encore aujourd’hui, de nom-breuses petites entreprises utilisent seule-ment le téléphone et le fax comme uniquesmoyens de communication (Stefansson,2002). L’un des objectifs des places de mar-ché est de mieux intégrer les PME en leurfaisant adopter de nouvelles technologiestelles que le web-EDI ou en leur procurantun accès plus aisé à certains outils informa-tiques en mode ASP8. Par ailleurs, l’inter-opérabilité et les standards ne doivent passeulement exister dans les réseaux de com-munication et les données transmises autravers de ces réseaux mais également dansles processus métiers et de produits qui for-

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6. À ce titre, lors de nos entretiens semi-directifs, certains fondateurs n’utilisaient plus le terme de « place de mar-ché » pour qualifier leur plate-forme jugeant le concept mal approprié (voir synonyme de mauvaise publicité).7. Les analyses économétriques mettant en œuvre des modèles de régression qualitatifs à partir du modèle logit per-mettent de montrer que pour une technologie donnée, les différences de niveau d’équipement dépendent beaucoupplus de la taille de la firme que du secteur d’activité, l’ensemble des secteurs ayant investi dans les technologies del’information. Les entreprises industrielles sont d’autant plus équipées en technologies de l’information qu’ellessont de grande taille : quel que soit l’équipement modélisé, la probabilité d’être équipée augmente fortement avecla taille de l’entreprise (Feuvrier et Heitzmann, 2000).8. Application Service Provider : applications logicielles accessibles en ligne (internet ou réseau privé) pour unedurée déterminée moyennant une redevance.

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ment le socle d’une économie de réseau9

(Choi et Whinston, 2000). Les TIC permet-tent alors à des entreprises indépendantesde maintenir entre elles des liens étroits enremplaçant des coordinations de type hié-rarchique par des coordinations à based’échanges et de transactions électroniques(Benghozi, 2001).

II. – QUELLES IMPLICATIONS AUNIVEAU DU JEU CONCURRENTIEL

INTERENTREPRISE?

Malgré la phase de consolidation, les placesde marché contribuent à redéfinir les rela-tions interentreprises comme les précé-dentes générations de systèmes d’informa-tion sans pour autant introduire devéritables ruptures. Les places de marchéimpactent quant à elles trois principalesdimensions caractérisant le jeu concurren-tiel entre les entreprises, même si ces évo-lutions se situent dans un contexte plusgénéral qui n’est pas propre forcément auxTIC.

1. La confirmation d’un phénomène: la coopétition

La recherche d’une taille critique, la mutua-lisation des coûts à certaines étapes ducycle de vie des produits et l’instauration debarrières à l’entrée apparaissent souventcomme les principaux motifs d’une « colla-boration concurrentielle ». Or, dans certainscas, les TIC jouent un rôle-clé en favorisantla mise en place de pratiques simultané-ment concurrentielles et coopératives sur le

marché (Cash et Konsynski, 1985 ; Konsynski, 1993) et s’inscrivent ainsi dansune dialectique parfois paradoxale entre desstratégies concurrentielles et des stratégiescollectives (Ibert, 2004).En effet, certaines places de marché sontissues du regroupement de plusieurs acteursmajeurs du secteur qui sont pourtant desconcurrents directs sur le marché (GNX,Transora, SupplyOn, etc.). Elles sont appa-rues rapidement après les premières placesde marché start-up afin de bloquer l’arrivéede ces nouveaux entrants et ont adopté unestructure capitalistique en consortium où lapropriété, et donc la gouvernance, est répar-tie entre les différents fondateurs propor-tionnellement au montant de leur apportfinancier. Ces places de marché permettentaux différentes firmes concurrentes de créerdes fonctionnalités complexes et à fortevaleur ajoutée, mais aussi coûteuses, quisont proposées aux adhérents moyennantune rétribution sous forme d’abonnementdans la plupart des cas (outils de co-concep-tion dans l’automobile, systèmes d’infor-mation logistiques tels que la gestion parta-gée des approvisionnements dans la grandedistribution, etc.).Les principales places de marché en consor-tium ont survécu à la phase de consolida-tion et sont progressivement intégrées dansles usages des grandes firmes10 (Ordanini,2005). Par ailleurs, la prise de participationau sein d’une place de marché en consor-tium évite une duplication des investisse-ments dans des actifs spécifiques. Toute-fois, la gouvernance des places de marché

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9. Par exemple, l’intégration des ERP, la standardisation des objets et la concordance avec les référentiels métierssont autant de problèmes à résoudre pour la mise en place de la facturation électronique.10. L’étude du SESSI (2004) montre en France que les places de marchés sont utilisées par 20,1 % des grandesentreprises (plus de 500 salariés) interrogées pour leurs achats et par 21,2 % d’entre elles pour réaliser des ventes.

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s’avère délicate à mesure que le nombre defondateurs est important (certaines placesde marché comptent plusieurs dizaines defondateurs) car les divergences de points devue sont plus nombreuses. Il convient doncd’être prudent quant à une évolution versdes réseaux coopératifs matérialisés par lesplaces de marché car les fondateurs demeu-rent souvent des concurrents directs.

2. Vers un déplacement du centre de gravité de la concurrence : des entreprises aux organisationsréticulaires

Les places de marché, plus particulièrementcelles en consortium, s’apparentent à descommunautés d’affaires car elles rassem-blent des acteurs guidés par des intérêtscommuns. Elles permettent aux entreprisesde s’encastrer dans de nouveaux schémasorganisationnels à partir de leurs systèmesd’information et de créer de nouveauxliens. Les adhérents d’une place de marchébénéficient d’externalités cognitives dif-fuses liées aux interactions avec les autresmembres, créant alors des phénomènes depolarisation. La concurrence peut alors sedéplacer d’une dimension individuelle àune dimension plus collective.Si l’on suppose que les participants d’uneplace de marché obtiennent un avantageconcurrentiel, ne serait-ce que temporaire,sur leurs principaux concurrents, on peutémettre l’hypothèse du déplacement duchamp concurrentiel des entreprises auxplaces de marché. Tout dépendra du nombrede plates-formes en activité, de leur posi-tionnement au sein de la chaîne de valeur,ainsi que de la masse critique d’adhérents

qu’elles auront atteint. Du point de vue desfirmes, l’adhésion à une place de marchédevient stratégique car il ne s’agit plus seu-lement de choisir un outil technologiquemais plutôt un réseau de partenaires (Coatet al., 2002), ces derniers pouvant être desclients, des fournisseurs mais égalementdes concurrents.Deux éléments-clés d’analyse apparaissentquant au rôle des places de marché au seindes relations interentreprises. D’une part, laconcurrence ne s’exerce donc plus seule-ment entre des firmes isolées mais entre desgroupes d’entreprises constitués en réseauxet, d’autre part, elle concerne plus leurs pro-cessus et leurs schémas organisationnelsque leurs produits (Jallat, 2002). La ques-tion qui résulte de cette analyse est desavoir à quelle plate-forme adhérer.Excepté les critères strictement écono-miques et organisationnels (coût de l’adhé-sion, nombre de participants, environne-ment technologique de la plate-forme, etc.)dans cette décision, les relations préexis-tantes avec les fondateurs de la place demarché jouent un rôle important en matièred’incitations11.

3. L’élargissement des frontières de la firme via les places de marché

Les TIC sont susceptibles non seulementd’influencer chaque activité dans sa compo-sante physique et informationnelle maiségalement la façon d’exploiter les liensentre les activités, à la fois à l’intérieur et àl’extérieur de l’entreprise. L’une desmeilleures illustrations est leur impact surles choix stratégiques concernant l’intégra-tion, l’externalisation ou la coopération

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11. À titre d’exemple, seuls 5 % des fournisseurs ont refusé de participer aux différents catalogues électroniquesmis en place par Alstom (Séminaire EBG, Paris, juin 2003).

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pour certaines activités. Les places de mar-ché représentent ainsi pour leurs fondateursune opportunité pour élargir leurs frontièreset prendre en charge de nouvelles activitésgénératrices de plus de valeur ajoutée,notamment dans une logique servicielle.La première dimension est naturellement lafrontière géographique. Les multiples pos-sibilités d’accès à la plate-forme et sesfonctionnalités comme nous avons pu levoir précédemment permettent aux fonda-teurs et aux participants de réaliser des transactions d’achat et de vente avec desentreprises situées sur des marchés géogra-phiques plus éloignés et dont les coûts derecherche s’avéraient auparavant dissuasifs.Certaines places de marché se sont ainsispécialisées sur l’achat et la revente debiens et services basés sur les avantagescomparatifs de certaines zones géogra-phiques (Agriflow, Pefa, Textilesourcing,etc.).La seconde dimension, évoquée égalementau début de cette analyse, est la création deformes de partenariats horizontaux avec desentreprises du même secteur d’activité, quis’avèrent parfois même être des concur-rents. Ainsi, la collusion et la concurrencesont antinomiques mais la concurrence et lacoopération ne le sont pas. Les places demarché sont une illustration supplémentairedu phénomène de concentration et de lamise en commun de moyens et de res-sources entre plusieurs entreprises concur-rentes, souvent sous la contrainte d’uneintensité concurrentielle ayant changée dedimension et se situant désormais à unniveau international.Enfin, la dernière dimension se situe à unniveau vertical puisque les places de mar-ché peuvent également permettre aux fon-

dateurs de mettre en place des formes d’in-tégration virtuelle, que ce soit vers l’amontou vers l’aval. On assiste dans la continuitédes trajectoires empruntées, non pas à lacréation de véritables réseaux de firmesmais plutôt de firmes réseaux. Ces dernièresconstituent une forme organisationnelleétendue comme un ensemble structuré defirmes reliées dans une dimensiond’échange verticale et piloté par une firmequalifiée de firme-pivot (Fréry, 1998). C’estla question même du contrôle de la chaînede valeur et du pouvoir de marché qui estderrière la notion de réseaux électroniquesavec un donneur d’ordres faisant office depilote pour l’ensemble des acteurs. Les TICpeuvent ainsi favoriser des relations dequasi-intégration verticale en réduisant laspécificité des investissements dans la coor-dination avec les partenaires et en amélio-rant la capacité de la firme à surveiller l’application des contrats (Bakos et Brynjolfsson, 1997).

III. – ILLUSTRATION DE L’ÉVOLUTION DU JEU

CONCURRENTIEL : LE CAS DELA GRANDE DISTRIBUTION

Le secteur de la grande distribution est undes premiers secteurs où se sont dévelop-pées les places de marché. La large diffu-sion des TIC dans le secteur et la présencede grandes entreprises, symbolisées par lesdistributeurs, expliquent l’apparition trèsrapide des places de marché. Nous avonsdonc choisi naturellement ce secteur pourillustrer notre cadre d’analyse avec uneétude en profondeur d’un cas sectorielexemplaire entre 1999 et 2004 (Yin,1994).

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1. Présentation des places de marchédans le secteur de la distribution

Les premières places de marché ont étécréées à l’initiative des distributeurs qui

possèdent une puissance financière et desmoyens organisationnels qui leur permet-tent de développer rapidement des plates-formes d’échanges13. Par ailleurs, les distri-

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12. C’est cette raison qui nous pousse à interroger des acteurs divers (fondateurs de places de marché, consultants,organismes de normalisation, etc.) dans notre étude qualitative.13. Les 15 sociétés leaders de la grande distribution européenne ont réalisé un CA de près de 500 milliards d’eu-ros en 2004 (Xerfi, 2005).

MÉTHODOLOGIE

Notre recherche est menée dans une perspective « positiviste aménagée » (Miles etHuberman, 1991) du fait des caractéristiques de notre objet de recherche. Le processusde création de connaissance passe par la compréhension du sens que les acteurs donnentà la réalité ; la connaissance se situe ainsi dans un contexte. L’analyse du phénomène desplaces de marché est ainsi basée sur la prise en compte des intentions, des motivations,des attentes, des raisons et des croyances des acteurs12. Étant donné la complexité et laplasticité de l’objet de recherche, ainsi que la difficulté d’accès à l’information qui estjugée comme sensible car stratégique dans le contexte de l’étude, nous avons privilégiéune étude de cas d’un secteur d’activité comportant peu de places de marché pour saisirles causalités récursives au sens de Yin (1994). Par ailleurs, ces places de marché étaientfondées par des acteurs majeurs du secteur, ce qui d’une part maximisait leur chance desurvie et leur potentiel de développement, et d’autre part, nous assurait un accès plusaisé à l’information du fait de leur communication plus importante dans la presse géné-raliste et spécialisée. Enfin, ce choix a été conduit naturellement par la fonction emblé-matique de ces places de marché qui ont été mises en avant par leurs fondateurs et lesexperts du secteur en question.Étant donné le caractère sensible de l’étude, la collecte des données a été réalisée par tri-angulation, notamment afin de résoudre les biais sélectifs de la mémoire des acteursinterrogés. D’abord, nous avons recouru à des données primaires issues de quelquesentretiens semi-directifs auprès des principaux prestataires de solutions logicielles (6entretiens) et de créateurs de places de marché (3 entretiens) d’une durée d’une heure àheure trente qui étaient centrés sur le positionnement de la plateforme dans la filière etses fonctionnalités. Ensuite, nous avons réalisé une étude approfondie et suivie pendantplusieurs années des fonctionnalités des trois principales places de marché afin de déter-miner leur champ d’action à partir de leurs documents internes, de séminaires profes-sionnels (EBG, AFNET, Progilog, etc.) et de leur site internet. Enfin, une importante col-lecte de données secondaires (articles de presse, documentation sectorielle, données desorganismes professionnels, etc.) a été réalisée pendant plusieurs années, notammentavec l’aide d’un cabinet d’audit et de conseil international (Ernst & Young) et deux ansaprès avec un cabinet d’études sectorielles (Eurostaf, filiale du groupe Les Échos).

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buteurs sont des « early adopters » enmatière de TIC avec l’utilisation de l’EDI,des ERP, des outils de datamining… Il estpossible de distinguer trois plates-formespour les distributeurs, bien qu’il en existede plus nombreuses en amont de la filièremais elles concernent plus les producteurs.De nombreuses initiatives ont été ainsidéveloppées avec des plates-formes de typeconsortium (CPGMarket, Transora) ou detype « start-up » (Tomatoland, Foodtrader,Tradingproduce, Pefa, etc.).Bien que fondées par des distributeurs quipossèdent le même cœur de métier, les troisplaces de marché n’ont pas adopté exacte-ment le même positionnement :– GlobalNeteXchange (GNX) est une placede marché publique en consortium dévelop-pée initialement par Carrefour et Sears.D’autres distributeurs sont présents maisleur nombre relativement limité fait de laplate-forme un « club privé » où l’accès estrelativement restreint. La stratégie des fon-

dateurs est plutôt axée sur la réduction descoûts et l’accroissement du pouvoir sur lesfournisseurs qui sont membres ;– WorldWideRetailExchange (WWRE) estégalement une place de marché publique enconsortium mais gérée de façon mutualistepar l’ensemble des membres qui sont beau-coup plus nombreux et ouverts que ceux de GNX. La stratégie est basée sur les ser-vices à valeur ajoutée et la gestion de lasupply chain avec des rapports de forcemoins déséquilibrés avec les industriels. Laplace de marché se développe en Europe,en Amérique centrale et en Asie ;– Retaillink peut s’apparenter à une place demarché privée (réservée uniquement auxfournisseurs du donneur d’ordres proprié-taire de la plate-forme) fondée par le distri-buteur américain leader Walmart où seuls sesfournisseurs sont référencés. Walmart, du faitde sa position de numéro un mondial, conti-nue sur sa logique de leader et ne s’est pasassocié aux deux autres places de marché.

TIC et jeu concurrentiel 165

Tableau 2LES PLACES DE MARCHÉ DES DISTRIBUTEURS

Type de place demarché

Date de création

Investissement initial

Actionnariat

Puissance d’achat

GNX

Consortium

28 février 2000

70 millions d’euros

Carrefour, Sears,Metro, Kroger, ColesMyer, Sainsbury’s,Pinault Printemps-Redoute, Karstadt-

Quelle, Oracle

250 milliards de dollars

Retail link

Privée

1997

n.d.

Walmart : le géant de la distribution

américain a refusé departiciper aux deuxautres plates-formes

215 milliards de dollars

WWRE

Consortium

30 mars 2000

100 millions d’euros

11 membres fondateurs(Auchan, Casino,

Kingfisher, Marks &Spencer, Tesco, Ahold,CVS, etc.), environ 53

membres

770 milliards de dollars

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L’objectif principal des places de marchéest de se faire rencontrer au sein d’un mêmeespace électronique les acheteurs (les distri-buteurs) et les vendeurs (les industriels)afin qu’ils puissent réaliser leurs transac-tions. Cependant, pour attirer un nombreimportant de participants, il faut non seule-ment que les firmes puissent trouver desacheteurs ou des vendeurs potentiels maiségalement un certain nombre de servicesqui facilitent la transaction car les processusB-2-B sont relativement longs et complexes.

2. Les enjeux stratégiques des places demarché dans le jeu concurrentiel

Sur le plan de la coopération entre firmesconcurrentes, les distributeurs sontcontraints depuis quelques années demutualiser et de partager certaines res-sources, mouvement de collaborationaccentué par la fin du régime de croissanceextensive (Moati, 2001), ainsi que parl’évolution de l’intensité concurrentiellequi se situe désormais sur un plan mondial.En Europe, les mouvements de concentra-tion (opérations de fusions-acquisitionspour faire face à Walmart…) sont une par-faite illustration de la réaction des distribu-teurs européens qui ont également mis encommun certains actifs tels que les cen-trales d’achat (Lucie qui regroupe les cen-trales de Leclerc et Système U, Opéra quiregroupe celles de Cora et Casino, etc.) ouqui ont créé des Eurocentrales. Les placesde marché s’inscrivent dans cette logique,d’autant plus que leurs coûts de création etde fonctionnement s’avèrent importants eu

égards aux ambitions de ces plates-formesqui doivent allier les fonctionnalités d’e-sourcing, d’e-procurement et de gestionde la supply chain14.La conséquence de la logique de concentra-tion et du renforcement de l’intensitéconcurrentielle fut la création de deuxplaces de marché en consortium (GNX etWWRE) et d’une place de marché privéeappartenant à Walmart. Les deux premièresplaces de marché rassemblent à elles deuxl’ensemble des principaux distributeurs, àceci près qu’en plus aucun distributeurn’est présent sur les deux plates-formes à lafois. Ce constat peut donc nous amener àpenser que les deux places de marché sonten concurrence car leurs actionnaires nesont pas les mêmes alors qu’elles offrentdes fonctionnalités quasi identique. Onconstate ainsi une transposition classiquedes positions et des logiques stratégiquesdes distributeurs dans une structure de mar-ché oligopolistique, Walmart faisant quant àlui cavalier seul face aux autres distribu-teurs15.Concernant l’évolution des frontières de lafirme, on peut constater que les modes derelations « coopératives » entre les distribu-teurs et les industriels se trouvent égale-ment transposés sur les places de marché.Dans ce cadre, les TIC constituent un sup-port à une hiérarchie électronique qui neconduit pas à une intégration verticale desfournisseurs mais à une quasi-intégrationou une intégration virtuelle. Ainsi, les dis-tributeurs peuvent continuer leur remontéede la prise en charge des activités situées en

166 Revue française de gestion – N° 173/2007

14. Casino a investi 4,47 millions d’euros dans WWRE alors que le coût de développement d’une place de marchéprivée avait été estimée à 15,24 millions d’euros selon un appel d’offres lancé par le distributeur stéphanois15. À titre indicatif, les ventes totales de Walmart (248,7 milliards d’euros TTC en 2004) sont très largement supé-rieures à celles de la première enseigne européenne Carrefour (90,9 milliards d’euros TTC en 2004) (Xerfi, 2005).

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amont de la filière (notamment la fabrica-tion), toujours dans le but d’accroître leurpouvoir de marché sur l’ensemble de lachaîne.D’une part, les places de marché permettentla circulation des informations car ellesconstituent un hub centralisateur des don-nées sur lequel les PME peuvent accéder enmode ASP aux outils informatiques etlogistiques déployés par les grands don-neurs d’ordres. L’amélioration de la gestionde la supply chain constitue une prioritéchez les distributeurs mais peu de fournis-seurs atteignent la taille critique pour béné-ficier d’outils performants. Ainsi, l’EDI estseulement développé chez les grandesentreprises industrielles mais ne s’est pasimposé dans les structures plus petites.D’autre part, les distributeurs sont désor-

mais en mesure de piloter les filières de pro-duction avec la co-conception de produits.Les distributeurs sont à la recherche deflexibilité et de réactivité face à la dyna-mique de consommation ; or les outils pré-sents sur les places de marché (ProductDesign and Development chez WWRE)apparaissent comme un moyen de concilierces deux contraintes tout en préservant lamaîtrise du canal de distribution.

CONCLUSION

Les TIC possèdent la particularité de pou-voir supporter à la fois des organisationssouples telles que les « entreprises éten-dues » ou en réseau, et des structures aucontraire très formelles et hiérarchisées(Reix, 1999). Les places de marché confir-

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Figure 1PRÉSENTATION ET POSITIONNEMENT DES FONCTIONNALITÉS DE WWRE

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ment parfaitement cette caractéristique carelles maintiennent différentes modalitésrelationnelles interentreprises plus oumoins étendues. Par ailleurs, elles consti-tuent un support adéquat pour tirer profit dela dynamique des nouvelles relations entreles acteurs en leur permettant de passer plusfacilement d’une relation concurrentielle àun moment à une relation de coopération àun autre, voire même de combiner les deuxtypes de relations simultanément mais àdifférents niveaux de la chaîne de valeur(R&D, production, distribution, etc.). La

diffusion des systèmes d’information inter-organisationnels, dont les places de marchéne sont qu’un exemple, contribue à modi-fier les frontières de la firme qui sont deve-nues perméables avec l’émergence d’unenouvelle dynamique concurrentielle. Lesentreprises peuvent être amenées à évoluer,tant au niveau de leur tissu de relations éco-nomiques que des compétences qu’ellesaccumulent, et ce, à partir d’organisationsréticulaires qui prennent forme avec lesplaces de marché.

168 Revue française de gestion – N° 173/2007

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