textes intro guerre[1].docx

download textes intro guerre[1].docx

of 4

Transcript of textes intro guerre[1].docx

  • 8/11/2019 textes intro guerre[1].docx

    1/4

    CLASSES PREPARATOIRES AUX GRANDES ECOLES DINGENIEURS IBNYOUNES,ELJADIDA

    MP Franais philosophique Anne scolaire 2014/2015

    LArt de la guerre , Sun Tzu(VIe sicle av. J.-C.Ve sicle av. J.-C.). La guerre est dune importance vitale pour lEtat. Cest le domaine de la vie et de la mort : la conservation oula perte de lempire en dpendent ; il est imprieux de le bien rgler. Ne pas faire de srieuses rflexions sur ce

    qui le concerne, cest faire preuve dune coupable indiffrence pour la conservation ou pour la perte de ce quona de plus cher, et cest ce quon ne doit pas trouver parmi nous.

    Cinq choses principales doivent faire lobjet de nos continuelles mditations et de tous nos soins, comme le fontces grands artistes qui, lorsquils entreprennent quelque chef-duvre, ont toujours prsent `a lesprit le butquils se proposent, mettent profit tout ce quils voient, tout ce quils entendent, ne ngligent rien pour

    acqurir de nouvelles connaissances et tous les secours qui peuvent les conduire heureusement leur fin.Si nous voulons que la gloire et les succs accompagnent nos a rmes, nous ne devons jamais perdre de vue: la doctrine, le temps, lespace, le commandement, la discipline.

    LIliade , Homre: (entr e 850 et 750 av. J.-C)

    La guerre de Troie touche sa fin. Hector, hros des Troyens, a tu le grec Patrocle. Achille, hros des Grecs,

    fou de rage et de douleur, provoque Hector en duel pour venger la mort de son meilleur ami. Zeus prend parti

    pour Achille.

    Hlas, [dit Hector] il ny a plus de doute ! Les dieux mappellent la mort. [] Cest mon destin. Mais je nemourrai pas sans combat ni sans gloire ni sans un exploit dont les gnrations futures se souviendront. Hectortire le grand glaive1 aigu suspendu sa hanche et prend son lan tel un aigle.Achille bondit aussi, saisi dune fureur sauvage. Il se protge de son beau bouclier faonn par Hphastos2.

    Son casque tincelant la splendide crinire dor va et vient sur son front. Comme ltoile du soir, la plus belle du firmament3, la pique aiguise quAchille brandit dans sa main droite brille de tous ses feux. Le fils de

    Ple4 rflchit la manire de tuer Hector, cherchant des yeux le meilleur endroit o latteindre. Les belles

    armes de bronze quil a voles Patrocle, aprs lavoir tu, protgent tout son corps. Un seul endroit reste nu,

    l o la clavicule spare lpaule de la gorge. Cest l quon perd le plus vite la vie, cest l quAchille enfoncesa javeline5. La pointe traverse le cou dlicat de part en part. Cependant, la trache nest pas perce et Hectorpeut encore prononcer quelques mots. Et tandis quil scroule dans la poussire, Achille triomphe : Hector, tu croyais peut-tre ten sortir indemne quand tu dpouillais Patrocle ! [] Hector au casque tincelant rpond dune petite voix :

    Je ten supplie, ne laisse pas les chiens me dvorer prs des navires achens6. Accepte autant de bronze etdor que tu voudras, accepte les cadeaux de mes dignes parents et rends -leur mon corps pour quils leramnentchez moi et que Troyens et Troyennes puissent mimmoler par le feu7. Achille lui lance un regard mauvais et lui rtorque :

    Non, chien, ce nest pas la peine de me supplier ! Si je ncoutais que moi, je dcouperais ton corps pour le

    dvorer tout cru, pour me venger du mal que tu mas fait ! Ta tte nchappera pas aux chiens. [La mort enveloppe Hector.]Alors Achille imagine un sort dshonorant pour Hector. Il lui perce les tendons entre la cheville et le talon, y

    passe des courroies quil attache son char, en laissant traner la tte. Il monte sur son char avec les armesillustres8 dHector et fouette ses chevaux qui partent au triple galop. Le cadavre, ainsi tir, soulve un nuage de

    poussire. Ses cheveux noirs se dploient et sa tte, autrefois si belle, trane sur le sol. Notes :1 pe. 2 Dieu du feu, de la forge et des volcans. 3 Ciel. 4 Achille. 5 Petit javelot au fer long etaigu. 6 Grecs. 7 Brler mon corps. 8 Clbres.

    La Fontaine, Les deux coqs :

    Deux Coqs vivaient en paix : une Poulesurvint,Et voil la guerre allume.Amour, tu perdis Troie ; et c'est de toi que vintCette querelle envenime,

    Il aiguisait son bec, battait l'air et ses flancs,Et s'exerant contre les ventsS'armait d'une jalouse rage.Il n'en eut pas besoin. Son vainqueur sur lestoits

  • 8/11/2019 textes intro guerre[1].docx

    2/4

    CLASSES PREPARATOIRES AUX GRANDES ECOLES DINGENIEURS IBNYOUNES,ELJADIDA

    MP Franais philosophique Anne scolaire 2014/2015

    O du sang des Dieux mme on vit le Xantheteint.Longtemps entre nos Coqs le combat semaintint :Le bruit s'en rpandit par tout le voisinage.

    La gent qui porte crte au spectacle accourut.Plus d'une Hlne au beau plumageFut le prix du vainqueur ; le vaincu disparut.Il alla se cacher au fond de sa retraite,Pleura sa gloire et ses amours,Ses amours qu'un rival tout fier de sa dfaitePossdait ses yeux. Il voyait tous les joursCet objet rallumer sa haine et son courage.

    S'alla percher, et chanter sa victoire.Un Vautour entendit sa voix :Adieu les amours et la gloire.Tout cet orgueil prit sous l'ongle du Vautour.Enfin par un fatal retour

    Son rival autour de la PouleS'en revint faire le coquet :Je laisse penser quel caquet,Car il eut des femmes en foule.La Fortune se plat faire de ces coups ;Tout vainqueur insolent sa perte travaille.Dfions-nous du sort, et prenons garde nousAprs le gain d'une bataille.

    Phdre(1677) , Racine

    THERAMENEUn effroyable cri, sorti du fond des flots,Des airs en ce moment a troubl le repos ;Et du sein de la terre, une voix formidableRpond en gmissant ce cri redoutable.Jusqu'au fond de nos curs notre sang s'est

    glac ;Des coursiers attentifs le crin s'est hriss.Cependant, sur le dos de la plaine liquide,S'lve gros bouillons une montagne humide ;

    L'onde approche, se brise, et vomit nos yeux,Parmi des flots d'cume, un monstre furieux.Son front large est arm de cornes menaantes ;Tout son corps est couvert d'cailles

    jaunissantes ;Indomptable taureau, dragon imptueux,Sa croupe se recourbe en replis tortueux.Ses longs mugissements font trembler le rivage.Le ciel avec horreur voit ce monstre sauvage,La terre s'en meut, l'air en est infect ;

    Le flot qui l'apporta recule pouvant.Tout fuit ; et sans s'armer d'un courage inutile,Dans le temple voisin chacun cherche un asile.Hippolyte lui seul, digne fils d'un hros,Arrte ses coursiers, saisit ses javelots,Pousse au monstre, et d'un dard lanc d'une mainsre,Il lui fait dans le flanc une large blessure.De rage et de douleur le monstre bondissantVient aux pieds des chevaux tomber en

    mugissant,Se roule, et leur prsente une gueule enflammeQui les couvre de feu, de sang et de fume.La frayeur les emporte, et sourds cette fois,Ils ne connaissent plus ni le frein ni la voix ;

    Voit voler en clats tout son char fracass ;Dans les rnes luimme, il tombe embarrass. Excusez ma douleur. Cette image cruelleSera pour moi de pleurs une source ternelle.J'ai vu, Seigneur, j'ai vu votre malheureux filsTran par les chevaux que sa main a nourris.Il veut les rappeler, et sa voix les effraie ;Ils courent ; tout son corps n'est bientt qu'une

    plaie.De nos cris douloureux la plaine retentit.

    Leur fougue imptueuse enfin se ralentit ;Ils s'arrtent non loin de ces tombeaux antiquesO des rois ses aeux sont les froides reliques,J'y cours en soupirant, et sa garde me suit.De son gnreux sang la trace nous conduit,Les rochers en sont teints, les ronces dgoutantesPortent de ses cheveux les dpouilles sanglantes.J'arrive, je l'appelle, et me tendant la main,Il ouvre un oeil mourant qu'il referme soudain :"Le ciel, ditil, m'arrache une innocente vie.

    Prends soin aprs ma mort de la triste Aricie.Cher ami, si mon pre un jour dsabusPlaint le malheur d'un fils faussement accus,Pour apaiser mon sang et mon ombre plaintive,Dislui qu'avec douceur il traite sa captive,Qu'il lui rende..." A ce mot, ce hros expir

    N'a laiss dans mes bras qu'un corps dfigur,Triste objet, o des dieux triomphe la colre.Et que mconnatrait l'oeil mme de son pre.

  • 8/11/2019 textes intro guerre[1].docx

    3/4

    CLASSES PREPARATOIRES AUX GRANDES ECOLES DINGENIEURS IBNYOUNES,ELJADIDA

    MP Franais philosophique Anne scolaire 2014/2015

    En efforts impuissants leur matre se consume ;Ils rougissent le mors d'une sanglante cume.On dit qu'on a vu mme, en ce dsordre affreux,Un dieu qui d'aiguillons pressait leur flanc

    poudreux.

    A travers des rochers la peur les prcipite.L'essieu crie et se rompt : l'intrpide Hippolyte

    Stendhal, La Char treuse de Parme, Ire partie, ch. 3 (1839)Nous avouerons que notre hros tait fort peu hros en ce moment. Toutefois la peur ne venait chez lui qu'en

    seconde ligne ; il tait surtout scandalis de ce bruit qui lui faisait mal aux oreilles. L'escorte prit le galop; ontraversait une grande pice de terre laboure, situe au-del du canal, et ce champ tait jonch de cadavres.

    -- Les habits rouges ! les habits rouges ! criaient avec joie les hussards de l'escorte, et d'abord Fabrice necomprenait pas ; enfin il remarqua qu'en effet presque tous les cadavres taient vtus de rouge. Une

    circonstance lui donna un frisson d'horreur ; il remarqua que beaucoup de ces malheureux habits rougesvivaient encore, ils criaient videmment pour demander du secours, et personne ne s'arrtait pour leur endonner. Notre hros, fort humain, se donnait toutes les peines du monde pour que son cheval ne mt les piedssur aucun habit rouge. L'escorte s'arrta ; Fabrice, qui ne faisait pas assez d'attention son devoir de soldat,galopait toujours en regardant un malheureux bless.

    -- Veux-tu bien t'arrter, blanc-bec ! lui cria le marchal des logis. Fabrice s'aperut qu'il tait vingt pas surla droite en avant des gnraux, et prcisment du ct o ils regardaient avec leurs lorgnettes. En revenant seranger la queue des autres hussards rests quelques pas en arrire, il vit le plus gros de ces gnraux qui

    parlait son voisin, gnral aussi, d'un air d'autorit et presque de rprimande ; il jurait. Fabrice ne put retenirsa curiosit ; et, malgr le conseil de ne point parler, lui donn par son amie la gelire, il arrangea une petite

    phrase bien franaise, bien correcte, et dit son voisin:-- Quel est-il ce gnral qui gourmande son voisin ?-- Pardi, c'est le marchal !-- Quel marchal?-- Le marchal Ney, bta ! Ah ! o as-tu servi jusqu'ici ?Fabrice, quoique fort susceptible, ne songea point se fcher de l'injure ; il contemplait, perdu dans une

    admiration enfantine, ce fameux prince de la Moskova, le brave des braves.Tout coup on partit au grand galop. Quelques instants aprs, Fabrice vit, vingt pas en avant, une terre

    laboure qui tait remue d'une faon singulire. Le fond des sillons tait plein d'eau, et la terre fort humide, quiformait la crte de ces sillons, volait en petits fragments noirs lancs trois ou quatre pieds de haut. Fabrice

    remarqua en passant cet effet singulier ; puis sa pense se remit songer la gloire du marchal. Il entendit uncri sec auprs de lui : c'taient deux hussards qui tombaient atteints par des boulets ; et, lorsqu'il les regarda, ilstaient dj vingt pas de l'escorte. Ce qui lui sembla horrible, ce fut un cheval tout sanglant qui se dbattait surla terre laboure, en engageant ses pieds dans ses propres entrailles ; il voulait suivre les autres : le sang coulaitdans la boue.

    Ah ! m'y voil donc enfin au feu ! se dit-il. J'ai vu le feu ! se rptait-il avec satisfaction. Me voici un vraimilitaire. A ce moment, l'escorte allait ventre terre, et notre hros comprit que c'taient des boulets quifaisaient voler la terre de toutes parts. Il avait beau regarder du ct d'o venaient les boulets, il voyait la fume

    blanche de la batterie une distance norme, et, au milieu du ronflement gal et continu produit par les coupsde canon, il lui semblait entendre des dcharges beaucoup plus voisines ; il n'y comprenait rien du tout.

    Jean Giono , Je ne peux pas oublier

    Je ne peux pas oublier la guerre. Je le voudrais. Je passe des fois deux jours ou trois sans y penser etbrusquement, je la revois, je la sens, je l'entends, je la subis encore. Et j'ai peur. Ce soir est la fin d'un beau jourde juillet. La plaine sous moi est devenue toute rousse. On va couper les bls. L'air, le ciel, la terre sont

  • 8/11/2019 textes intro guerre[1].docx

    4/4

    CLASSES PREPARATOIRES AUX GRANDES ECOLES DINGENIEURS IBNYOUNES,ELJADIDA

    MP Franais philosophique Anne scolaire 2014/2015

    immobiles et calmes. Vingt ans ont pass. Et depuis vingt ans, malgr la vie, les douleurs et les bonheurs, je neme suis pas lav de la guerre. L'horreur de ces quatre ans est toutjours en moi. Je porte la marque. Tous lessurvivants portent la marque.J'ai t soldat de deuxime classe dans l'infanterie pendant quatre ans, dans des rgiments de montagnards.Avec M.V., qui tait mon capitaine, nous sommes peu prs les seuls survivants de la premire 6ecompagnie.

    Nous avons fait les Eparges, Verdun-Vaux, Noyon-Saint-Quentin, le Chemin des Dames, l'attaque de Pinon,Chevrillon, Le Kemmel. La 6ecompagnie a t rempli cent fois et cent fois d'hommes. La 6ecompagnie tait unpetit rcipient de la 27edivision comme un boisseau bl. Quand le boisseau tait vide d'hommes, enfin, quandil n'en restait plus que quelques-uns au fond, comme des grains colls dans les rainures, on le remplissait denouveau avec des hommes frais. On a ainsi remplie la 6 ecompagnie cent fois et cent fois. Et cent fois on est allla vider sous la meule. Nous sommes de tout a les derniers vivants, V. et moi. J'aimerais qu'il lise ces lignes. Ildoit faire comme moi le soir: essayer d'oublier. Il doit s'asseoir au bord de sa terrasse, et lui, il doit regarder lefleuve vert et gras qui coule en se balanant dans des bosquets de peupliers. Mais, tous les deux ou trois jours, ildoit subir comme moi, comme tous. Et nous subirons jusqu' la fin.Je n'ai pas honte de moi. En 1913 j'ai refus d'entrer dans la socit de prparation militaire qui groupait tous

    mes camarades. En 1915 je suis parti sans croire la patrie. J'ai eu tort. Non pas de ne pas croire: de partir. Ceque je dis n'engage que moi. Pour les actions dangereuses, je ne donne d'ordre qu' moi seul. Donc, je suis parti,je n'ai jamais t bless, sauf les paupires brles par les gaz. (En 1920 on m'a donn puis retir un pension dequinze francs tous les trois mois, avec ce motif: "Lger dchet esthtique.") Je n'ai jamais t dcor, sauf parles Anglais et pour un acte qui est exactement le contraire d'un acte de guerre.

    Rousseau Mais quand il serait vrai que cette convoitise illimite et indomptable serait dveloppe dans tous les hommesau point que le suppose notre sophiste encore ne produirait-elle pas cet tat de guerre universelle de chacuncontre tous, dont Hobbes ose tracer l'odieux tableau. Ce dsir effrn de s'approprier! Toutes choses est

    incompatible avec celui de dtruire tous ses semblables; et le vainqueur qui, ayant tout tu, aurait le malheur derester seul au monde, n'y jouirait de rien par cela mme qu'il aurait tout. Les richesses elles-mmes, quoi sont-elles bonnes, si ce n'est tre communiques; que lui servirait la possession de tout l'univers s'il en taitl'unique habitant? Quoi? Son estomac dvorera-t-il tous les fruits de la terre? Qui lui rassemblera les

    productions de tous les climats ; Qui portera le tmoignage de son empire dans les vastes solitudes qu'iln'habitera point? Que fera-t-il de ses trsors, qui consommera ses denres, quels yeux talera-t-il son pouvoir?J'entends. Au lieu de tout massacrer, il mettra tout dans les fers pour avoir au moins des esclaves. Cela change l'instant tout l'tat de la question ; et puisqu'il n'est plus question de dtruire, l'tat de guerre est ananti.

    G.W.F. Hegel, Pri ncipes de la phi losophie du droi t

    La guerre, en tant que situation o l'on prend au srieux la vanit des biens et des choses de ce monde, quid'ordinaire a coutume d'tre une fonction difiante, est ainsi le moment en lequel l'idalit du particulier (1reoit son droit et devient effectivit; - elle a la signification suprieure suivant laquelle, comme je l'ai annonc

    ailleurs, elle conserve aussi bien la sant thique des peuples en son indiffrence vis--vis des dterminationsfinies [ ...] que le mouvement des vents prserve les mers de la putridit dans laquelle un calme durable les

    plongerait, comme le ferait pour les peuples une paix durable ou a fortioriune paix perptuelle"