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DOSSIER UN VOYAGE EN CARTOGRAPHIE LA 25 e CONFÉRENCE CARTOGRAPHIQUE INTERNATIONALE S’EST TENUE CET ÉTÉ À PARIS. FAITES AVEC NOUS LE TOUR DE L’ACTUALITÉ CARTOGRAPHIQUE, EN DIX ÉTAPES. N°64 OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 ign.fr ET LA GÉOGRAPHIE PREND VIE ZOOM SUR LES ARPENTEURS DE LA FORÊT FRANÇAISE LE 1 er JANVIER 2012, L’INVENTAIRE FORESTIER NATIONAL (IFN) ÉPOUSERA L’IGN. QUELLES SONT LES MISSIONS DE SES 190 AGENTS ? RÉPONSES… EN FORÊT.

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DOSSIER

UN VOYAGEEN CARTOGRAPHIELA 25e CONFÉRENCE CARTOGRAPHIQUEINTERNATIONALES’ESTTENUECET ÉTÉÀPARIS.FAITESAVECNOUSLETOURDE L’ACTUALITÉCARTOGRAPHIQUE, ENDIX ÉTAPES.

N°64 OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 ign.fr

ET LA GÉOGRAPHIE PREND VIE

ZOOM SUR LES ARPENTEURS DE LA FORÊT FRANÇAISELE 1er JANVIER 2012, L’INVENTAIRE FORESTIER NATIONAL (IFN) ÉPOUSERA L’IGN.QUELLES SONT LES MISSIONS DE SES 190 AGENTS ? RÉPONSES… EN FORÊT.

AUSOMMAIREDUNUMÉRO64 OCTOBRE,NOVEMBRE,DÉCEMBRE2011

OCTOBRE12 ET 13Orly (Val-de-Marne)AéroSpaceDays, le rendez-vousdes filières aéronautique et spatiale.

21AU24Paris Porte de VersaillesSalon Kidexpo. 20 000m2

d'animations, 300 exposants.

NOVEMBRE

18Saint-Mandé (Val-de-Marne)Colloque du groupement d’intérêtscientifique sur les sols avec l’IFN.

22Paris, la Chesnaie du Roy(Bois de Vincennes)Journée professionnelle de l’IGN.

24Innoparc, à Auch (Gers)Lamêlée géomatique, ou le rendez-vous des acteurs de l’informationgéographique enMidi-Pyrénées.

29ET30Dunkerque (Nord)7es assises de l’économie maritimeet du littoral à Dunkerque.

DÉCEMBRE6ET7Montargis (Loiret)Colloque «Les indicateurs forestiers surla voie d’une gestion durable ?»,organisé par l’IFN, le Cemagref deNogent-sur-Vernisson et le GIP Ecofor.

3AU 11Paris Expo (Porte de Versailles)Salon nautique international.

9AU 11Paris, Espace ChamperretSalon spécial grandes écolesde commerce et d’ingénieurs.

TRIMESTRIEL DE L’INSTITUTGÉOGRAPHIQUE NATIONAL

Direction générale et siège social73, avenue de Paris, 94165 Saint-Mandé Cedex.Tél. : 01 43 98 80 00.ISSN : 1624-9305.

Directeur de la publication Patrice Parisé.Directrice de la rédaction Véronique Lehideux.Rédacteur en chef Philippe Truquin.Rédacteur en chef adjoint Jean-Marc Bornarel.Comité de rédactionE. Aracheloff, M. Bacchus, B. Bèzes, S. Carvalheiro,C. Cecconi, S. Couturier, J.-E. David, X. Della Chiesa,V. Deregnaucourt, M. Laniesse, F. Lecourt,C. Parisot, N. Ruiz-Lambert, A. Sandrin, J.-M. Viglino.Ont participé à ce numéroGeneviève de Lacour, Bernard Bèzes,Frédéric Cantat, Marc Provot,Alain Puiseux, Franck Tertre.Conception éditoriale et graphique

Agence Cinquième Colonne,tél. : 04 73 87 15 27www.agencecinquiemecolonne.com

CouvertureAgence Cinquième Colonne

Impression IGNDépôt légalOctobre 2011

Juillet 2011 a été uneoccasion exceptionnelle

pour la communautécartographique française deprofiter des travaux derecherchemenés dans lemonde entier, elle quifréquente, jusqu’à présent,trop peu les congrèsinternationaux. Avec les 1500congressistes venus de104 pays pour le congrès del’Association cartographiqueinternationale (ACI), elle abénéficié d’un programmescientifique riche et complet,ouvert par une conférence deJean-Christophe Victormontrant l’importance de lacartographie pour l’analysegéopolitique. Le dossier de cenuméro d’IGN Magazineévoque la variété desapproches qui ont étéprésentées au congrès et, àtravers elles, on devine deslignes de force de larecherche actuelle :l’application à la gestion des

risques, l’analyse del’évolution des territoirespar comparaison dedocuments d’époquesdifférentes, de nombreuxtravaux de sémiologie,précédés d’un hommage àJacques Bertin.Mais ce fut aussi une trèsbelle manière de montrer àtous ceux qui ont approchéle lieu du congrès ou desmanifestations associées quela cartographie est partout,qu’elle est riche d’un pouvoirconsidérable et qu’il fautapprendre à la connaîtrepour exercer le sens critiqueque doit garder toutcitoyen…Le développementde la formation tout commela sensibilisation desenfants figurent aussi dansles axes de travail de l’ACI etdu Comité français decartographie. Autour de luidoit maintenant sestructurer la dynamiquelancée cet été.

2 / IGN MAGAZINE OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011

ACTUALITÉ EDITORIALAGENDA

LA CARTOGRAPHIEESTPARTOUT »

En famille 6 juillet 2011 : des géographes dumonde entier participent à la « balade méridienne », à travers Paris.

L’éditorial de...HélèneRichardPrésidentedu Comité françaisde cartographie

ERICBIERNACKI

UN VOYAGE EN CARTOGRAPHIELa 25e conférence internationalede cartographie (presque) commesi vous y étiez : des cartes mentalesà celle de la bilharzioseet de la chasse aux tiquesà la numérisation des portulans,dix sujets à la loupe.

DOSSIER 6-12

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EN POINTE

Une journée IGN pour les professionnelsde l’information géographique� L’IGN organise le 22 novem-bre prochain une journée pro-fessionnelledédiée auxélus, auxinstitutionnels et aux profes-sionnels de l’information géo-graphique. Cette journée auralieudans les salonsde réceptiondeLaChesnaieduRoy, situéeenbordure du parc floral, dans lebois de Vincennes.Une nouvelle fois, l’utilisation

des données géographiquesdans lamise enœuvre des poli-tiques publiques et l’activité denombreuses entreprises privéesdu secteur de la géomatiqueseront mis en valeur. Troisgrands thèmes structurerontles débats: la recherche et l’in-novation, l’expertise et leconseil, et les activités demétro-logie-géodésie à travers un cycle

de conférences sur les travauxde l’IGN dans ces domaines. Lepoint sera fait aussi sur l'ac-tualité de l’IGN et de ses par-tenaires, incluant les dernièresévolutions du RGE et du Géo-portail.Réunion plénière d’ouverture,ateliers, conférences et tablesrondes seront ponctués par desrencontres au village de l’inno-

vation. En clôture de journée,l’Institut national de l’infor-mation géographique et fores-tière constitué, dès le 1er janvier2012, par la fusion de l’Institutgéographique national et del’Inventaire forestier national,sera présenté avant la remisedes prix du concoursGéoportail2011, animéepar le présentateurJérôme Bonaldi.

IGN

3DPrésentation de levéthermographique 3Dpar Nicolas Paparoditis,directeur du laboratoireMatis de l’IGN.

OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 IGN MAGAZINE / 3

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ACTUS 3-5

Les nouveautéscartographiquesL’IGN dans la presse50 ans de travauxspéciaux, ça se fête !La conférence Inspire 2011fait le point en Ecosse

ZOOM 18-21

L’Inventaireforestier nationalPourquoi et commentses agents recensentles arbres de nos forêts :reportage à couvert.

QUESTIONS,RÉPONSES 13

GÉOPORTAIL16-17

Posez vos questionssur ign.fr

CARTESSURTABLE 22

ZuheirAltamimiNotre Terre est (un peu)moins ronde qu’ellen’en a l’air !

La carte des forêtset des essences disponiblesur le Géoportail

ACC

ACCIGN

CARTOGRAPHIE14-15Fin 2011, premier référentielnumérique sur la Guyane

L’EUROPEÀLACARTEL’IDÉE Claire et facile à lire, la sériede sept cartes européennes IGNvous permet de préparerprécisément vos itinéraireset de vous repérer rapidementpendant vos trajets. Les cartescomprennent des légendestraduites dans les principaleslangues de l’Union, le plandes villes principales pour la cartede chaque Etat, et des informationstouristiques détaillées.LA COLLECTION La collection Europe,dont l’échelle varie du 1 : 303 000au 1 : 2 500 000, se composeactuellement de l’Europe, l’Espagne/Portugal, l’Italie, le Benelux,l’Allemagne, le Royaume-Uni/Irlande et la Suisse.

ATLASFRANCE2012-2013LE CONCEPT Cet atlas routier et touristique spiralésera le compagnon de tous vos déplacements.Il offre deux niveaux d’échelle permettant dedéfinir rapidement son itinéraire : le 1 : 250 000pour les cartes régionales, et le 1 : 1 250 000pour la cartographie nationale.LA PARTICULARITÉ Exclusivité IGN, les zoomssur dix grandes agglomérations (Paris, Bordeaux,Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Rennes,Strasbourg et Toulouse) facilitent les voyages etpointent les richesses touristiques des métropoles françaises.LES INFORMATIONS L'atlas propose aussi le réseau autoroutiergratuit ou payant, des plans de villes avec index des rues, un indexde toutes les communes et des informations touristiques détaillées.LE PETIT FRÈRE L’IGN édite aussi un atlas à prix mini, à dos collé,comprenant quatre zooms sur Paris, Marseille, Lyon et Lille.

TOURISMEETDÉCOUVERTE :LESTOP 100,VERSION2LE CONCEPT Encore plus claire, plus précise et pratique,la nouvelle TOP 100, seule carte « 3 en 1 » du marché,est idéale pour découvrir une région à pied, à vélo eten voiture. Elle est dérivée de la base de donnéesBD Carto ®, qui possède une précision décamétrique etest mise à jour en continu par les collecteurs de l’IGN.Les données altimétriques (points cotés, courbes deniveau) sont issues de la BD Alti ®.L’ajout d’un quadrillage UTM la rend compatibleavec les applications GPS.LES POINTS FORTS Ils sont nombreux : les utilisateursprofiteront de la mise à jour de la cartographie,de l'amélioration de la lisibilité (la représentationdu bâti et la lecture du réseau routier ont été

simplifiées), de l'enrichissement de l'information touristique(patrimoine historique et naturel, églises, châteaux, grottes et pointsde vue), des tracés de tous les itinéraires de randonnée, des courbesde niveau, et de la compatibilité avec les GPS.

SIBÉRIE,D’OLIVIERROLIN� Fleuves géants, déserts glacés,taïga sans limites, températuresextrêmes : en Sibérie, la géographien'y va pas demainmorte.L'histoire non plus, qui en a faitla terre des bagnards,et des déportés, l'un des nomsduMalheur auXXe siècle. On peutpourtant trouver un charme secret àcette partie dumondequi désigne assez bien le vieuxmotde solitudes, et qui est commele grand large sur terre.Les chroniques ici réuniestémoignent à leur façon d'uneinclination contre nature…Inculte éditions, 13,90€

ENBIBLIOTHÈQUE

4 / IGN MAGAZINE OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011

ACTUALITÉ PROSPECTIVE

Gestiondurable :nos forêtsà la loupe�L’Inventaire forestier nationala publié un document intituléIndicateurs de gestion durabledes forêts françaises métropoli-taines. Ce rapport, réalisé tousles cinq ans depuis 1995, té-moigne de la constance des en-gagements pris par la Francedans le cadre des conférencesministérielles pour la protectiondes forêts en Europe (six confé-rences depuis 1990).Les informations produites parplus d’une trentaine d’orga-nismes renseignent des indica-teurs structurés selon sixgrands critères : ressources fo-restière et en carbone, santé desécosystèmes, production de

bois, diversité biologique, fonc-tions de protection et élémentssocio-économiques. Les 35 in-dicateurs de niveau européensont complétés par 19 indica-teurs nationaux plus spéci-fiques à la France, dont la di-versité des essences.Le document est disponible enligne sur le site de l’IFN(www.ifn.fr), en français et pro-chainement en anglais. Un col-loque organisé les 6 et 7 dé-cembre 2011 à Montargis parl’IFN, le Cemagref et le GIPEco-for, portera sur l’améliorationde ces indicateurs.

IGN

IFN

FFCTDAMIENROBILLARD

IGN

NOUVEAUTÉSCARTOGRAPHIQUES

Vaillants13 000 randonneurscyclotouristes françaiset étrangers ont participé,du 31 juillet au 7 août,à la 73e semaine fédéralede la Fédération françaisede cyclotourisme.Basés à Flers, ils ontsillonné les routes normandes.L’IGN s’était associé à la fêteen cartographiant les circuitsqui leur étaient proposés.

DR

13000 cyclos à Flers,carte IGN en poche

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POINTSDE REPERES

L’Institutgéographiquenationalse regroupe

Fleuron de la cartographiefrançaisemais ausside la recherche eningénierie de l'informationgéographique, l'Institut

géographique national (IGN)s'implante [...] à Saint-Mandé,aux côtés du Servicehydrographiqueet océanographiquede lamarine (Shom), entitésbientôt rejointes parMétéoFrance. Depuis hier, quelque300membres des directionsgénérale, commercialeet de la communicationde l'IGN prennent possessiondu bâtiment sièges(pour sièges sociaux)tout juste terminé, qui offreses 110mde façade et septétages sur l'avenue deParis.

I 500 personnes sur le siteLes 450météorologuesarriveront, eux, en octobre(Météo France conserveson centre principal d'activitéà Toulouse). […] « Une foisl'ensemble des travauxachevés, nous serons1500 sur le site », préciseJean-Philippe Grelot, directeurgénéral adjoint. « L'opérationglobale nous permetde rajeunir les locaux,et l'on va connaître une chosejusqu'alors inconnue,la cohabitation avec des gensqui ne sont pas tout à faitcomme nous », ajoute-t-il ensouriant […] « Ce seral'occasion d'échanges et detravaux communs assurémentfructueux », même si certainsont déjà eu lieu, comme lacoopération au moment de latempête Xynthia, qui a dévastéune partie du littoral françaisen 2010, ou, pour les GPS,la géolocalisation précisedes lieux. Du côté du public— visiteurs de la cartothèqueou photothèque —, les chosesvont un peu changer. II n'yaura plus qu'une seule entréepour ceux qui souhaitentles consulter. «Maisla numérisationdes photographies aérienneset des cartes d'hieret d'aujourd'hui fait que,de plus en plus, le public lesconsulte via Internet, sur notreGéoportail », affirme le DGA.

LE PARISIEN

Edition du Val-de-Marne, 2 août 2011

La Conférence Inspire 2011fait le point en Écosse� Avec plus de septcents participants, troisséances plénières, qua-rante-huit sessions pa-rallèles et vingt-troisateliers, la cinquièmeconférence Inspire aconfirmé, du 27 juin au1er juillet à Édimbourg,qu’elle était une ins-tance majeure du suivide la mise en œuvre decette directive dans lesÉtats membres, comme dans les autres payseuropéens qui ont décidé de l’appliquer.La Commission européenne a rappelé l’impor-tance de la directive, publiée en 2007, mais dontles travaux préparatoires avaient débuté en2001. Le portail européen, mis enœuvre fin 2012avec des outils libres, en sera un résultat concret:il permettra l’accès à toutes les informations géo-graphiques et environnementales mises à dis-position en Europe.

Les pays et organismesreprésentés ont renducompte des travaux encours: stratégies natio-nales, mises en œuvretechniques, impacts so-cio-économiques, ap-plications environne-mentales…L’objectif de la direc-tive est le même pourtous, mais la mise enœuvre dépend aussi

de choix politiques nationaux.La France était bien représentée via le minis-tère du développement durable, la région Pro-vence-Alpes-Côte d’Azur, la région Midi-Pyré-nées et bien sûr l’IGN, qui ont mis en valeur dif-férents développements français. Un bravoparticulier à l’École centrale de Nantes dont lestravaux sur l'interopérabilité lui ont valu le prixd’excellence Inspire 2011 CEN/TC 287.http://inspire.ec.europa.eu/events/conferences/inspire_2011.

L'IGN fête cinquante ansde «travaux spéciaux»�Dès lemilieudesannées 1950,l’IGNest sollicitépourdes chan-tiers particuliers nécessitantd’adapter les techniques de géo-désie à des opérations locales.Ces travaux se confirmant lesannées suivantes, ladirectiondelagéodésiecréeen1961uneunitédédiée, les «travaux spéciaux».Cela fait donc 50 ans que desdemandes diverses et variées,commepar exemple l’implanta-tion de réseaux de référence detrèshauteprécision (laserméga-

joule à Bordeaux) ou bien lecontrôle de stabilité d’ouvragesd’art (viaducdeMillau)ouencorela surveillance en continu dezones urbaines soumises à destravaux souterrains (métrod’Amsterdam), conduisent les«travaux spéciaux» à fairepreuved’imagination,d’innova-tion, de rigueur et de flexibilitéafinde répondreàdesexigencessans cesse plus fortes.L’équipedes«travauxspéciaux»fêteces50ansavecenthousiasme,

et l’envie de continuer à réaliserces types de travaux qui, sommetoute, n’ont rien d’autre despécialqued’être tousdifférents,et donc de nécessiter chacunune réflexion spécifique. Le22 novembre, lors de la journéeprofessionnelle organisée parl’IGNàlaChesnaieduRoyàParis(lire p. 3), ces chantiers serontévoqués lors de conférences.Certains des commanditaires del’IGN témoigneront à l’occasionde cet anniversaire.

HauteprécisionLors de la constructiondu viaduc de Millau, en 2003,des mesures de haute précision,et sous haute surveillance.

IGN

IGN

OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 IGN MAGAZINE / 5

6 / IGN MAGAZINE OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011

Ils sont souriants, d’unegentillesse extrême, etimplacables : lorsqu’il

s’agit de dépassement d’horaire les« chairmen », les présidents deséance de la 25e conférence carto-graphique internationale, n’ontplus aucun humour. Chaque in-tervenant a 22,5 minutes pour ex-poser l’état de ses travaux, re-cherches ou expériences. Et pasune de plus. Parfois, c’est dom-mage. Mais tant pis : c’est le seulmoyen de faire en sorte que laconférence tienne sa promesse :faire le tour, en cinq jours de l’ac-tualité cartographique mondiale.Du 3 au 8 juillet, au Palais desCongrès de Paris, elle a été tenue.Morceaux choisis…

1. Où l’on apprendque toutes les cartesne sont pas joliesLa figure tutélaire de la conférences’appelleJacquesBertin—sémiologuefrançais, 1918-2010.Jacques Bertin est l’inventeur de lasémiologie graphique : avant lui, lescartes sont des placards en cou-leurs que l’on accroche auxmurs del’école, de la caserne ou de la pré-fecture. On y voit le réseau hydro-graphique français, les limites dudépartement ou les casemates deMaginot. Avec lui, elles commen-cent à avoir du sens, dit JacquesPalsky, professeur à Sciences-Po.Sur les cartes produites par JacquesBertin sont représentés le lieu d’ha-

bitation et les trajets des ouvriers deRenaultBillancourt (en 1952), unande déplacements d’une jeune filledu XVIe arrondissement, ou lapopulation française et sa réparti-tion sur une carte de France, grâceà des plots plus oumoins gros, plusoumoins gras : les «pointsBertin».Jacques Bertin, dit Gilles Palsky,est passé « des cartes à lire auxcartes à voir». Il a illustré des atlashistoriques, inventé les cartessynoptiques, annoncé l’histoireglobale. Les chercheurs en scienceshumaines, les historiens ont défilédans son bureau de l’École deshautes études en sciences sociales,boulevard Saint-Michel, leurs don-nées sous le bras. Et lui les a ren-dues visibles. Il a édité deux syn-

Du 3 au 8 juillet, Paris accueillait la 25e conférence cartographiqueinternationale. Comment rendre compte de 500 interventionsde 22,5 minutes proposées par les sommités de la cartographie mondiale?Peut-être en voyageant au hasard (ou presque) des conférences. En route !

DOSSIER

Changementd’échelleCi-dessus,en superposant le plandumétro parisien etune carte du (trèsgrand) bassinméditerranéen,l’agence cartographiquede la RATP joue àmettre en perspectivedeux images mentales.Pour la stationTamanrasset,empruntez la ligne 8,direction Araouane !

UNVOYAGEENCARTOGRAPHIE

OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 IGN MAGAZINE / 7

thèses fondamentales : Sémiolo-gie graphique, et La graphie et letraitement graphique de l’infor-mation. Il a cherché à dessiner unlangage évident, composé à partirde quatre éléments : la forme, la va-leur, la dimension et la texture.«Une bonne carte doit donner unmaximum de réponses en un mi-nimum de temps.» Elle doit s’em-poigner aussi facilement qu’unmanche d’outil. Elle doit être im-médiate, pas symbolique. «La car-tographie a acquis [avec lui] sa di-gnité scientifique», dit encoreGillesPalsky. Dès les années 1970, bienavant Internet, Bertin avait pariéque l’image perdrait bientôt safixité. En 2005 paraît son dernierouvrage, l’Atlas historique de l’hu-manité.Jean-Paul Bord, professeur de géo-graphie et de cartographie à l’uni-versité de Montpellier 3, ancienélève de Bertin, fait un constat peuflatteur pour la cartographie nu-mérique : «Les géographes onttraîné des pieds. [Aujourd'hui]Lesrègles de Bertin sont peu ou pas

utilisées, les utilisateurs des SIGméritent un zéro pointé en matièrede cartographie. » Applaudisse-ments dans la salle, et interventiond’un contradicteur américain:—«Mais il y a de plus en plus decartes, elles sont tout autour denous !»— «Oui, il y a de plus en plus demauvaises cartes.»Lors de la séance d’ouverturehommage a été rendu à JacquesBertin, devant sa femme et ses en-fants, présents dans la salle, et trèsémus.

2. Où l’on voitapparaîtredes cartes mentalesDes cartes en couleur de l’intérieurde notre cerveau? De nos penséesintimes? Peut-être : ici, des cartesmontrent l’inquiétude d’une po-pulation — en l’occurrence de-vant un risque industriel — etson éventuelle capacité à réagir.Elles ont été dressées par deschercheurs de l’université de Caen,

travaillant pour des laboratoires duCNRS. Elles couvrent Le Havre ettoute l’embouchure de la Seine :400 000 habitants pour 25 éta-blissements classés Seveso, ou l’in-verse. Comment mesurer laconscience du risque? En deman-dant à près de 700 habitants dedessiner, sur un fond de carteidentique, la zone qu’ils pensentconcernée par un risque d’explo-sion ou de contamination. Le ré-sultat donne 678 zones dessinéesau feutre. Superposez-les : vous ob-tenez une pelote de laine. Traitezles superpositions par ordinateur :vous obtenez une «enquête de per-ception».Ce qu’il faut y voir, ce ne sont pasforcément les zones à risques des-sinées par les habitants. Ce sontsurtout les zones dans lesquellesils se sentent à l’abri, explique l’undes auteurs. Et souvent, sur cepoint, les habitants se trompent.Le prouvent ces cartes de simu-lation de l’explosion d’une cuve dechlore. «Les deux conclusions quenous en tirons, c’est que 10% de la

AGENCE CINQUIÈME COLONNE

La règledu jeu

1Dans chaque salleles présentationsse succèdent par sériesde quatre, durant quatreséquences de 90mn.

2Au Palais desCongrès de Paris,

huit salles ouvertessimultanément pendantcinq jours ont ainsipermis à plus de 500présentations d’avoir lieu.

3Une sélectionde contributions

a été éditée par l’IGNet Springer, en anglais,sous la direction d’AnneRuas, directrice dulaboratoire Cogit de l’IGN.

AGENCE CARTOGRAPHIQUE DE LA RATP

population seulement connaît réel-lement les consignes de sécurité,quand l’ensemble de la populationse croit bien informé. Les habitantspensent que le risque concernesurtout les autres, et sous-estimentle leur. Les gens croient qu’il n’y ade risque que là où il y a desusines.»

3. Où le satellitetraque desmollusqueset efface des clichésLa bilharziose infecte deux mil-liards de Terriens, dont une bonnepart d’Africains. Elle est provo-quée par un mini-mollusque dequelques millimètres. On peut letraquer dans les mares. On peutaussi le traquer depuis le ciel. C’estce que fait Adonis Kouamé, carto-graphe à l’université Cocodyd’Abidjan.Prenez une zone test d’un peumoins de 10000km², la région del’Agnéby. Sur images satellitales(Landsat), faites ressortir la topo-graphie, la couche « couverture

végétale », l’humidité de surface, latempérature. Croisez avec des don-nées épidémiologiques et cellesdes stations pluviales. Ajoutez le ré-seau hydrographique. Sachant quele mollusque préfère les altitudesinférieures à 120 mètres, une plu-viométrie de1 200 à1 300 mm, etque la zone de risque s’arrête à1,5 km d’un point d’eau, vous ob-tenez une carte du risque — bi-nairement classé fort ou faible—debilharziose.En fait, reconnaît Adonis Kouamé,la conclusion est que le risque estélevé… presque partout. Et la pré-cision reste à améliorer. Mais ellene demande qu’à s’améliorer. Àterme, l’enquête pourrait concer-ner toute la Côte d’Ivoire et sauverdes vies.Un peu plus au Nord, au Mali, enpays dogon, une cartographe del’université d’Angers travaillantaussi pour le CNRS a étudié, parcomparaison de photographiesaériennes, les arbres locaux. Elledisposait de photos noir et blancde 1952, peu piquées, de vues

GoogleEarth de 2004 et d’imagesprises par Spot 5 en 2007, avecune résolution de 2,5 mètres. Letout sur la région de Sadia, auMali.Comme dans un bon film poli-cier, on commence par se fier auxapparences. Oui, les grands ar-bres disparaissent. C’est connu,l’Afrique se désertifie. Mais regar-dez mieux : les grands arbresreculent, oui, mais parce que lesagronomes locaux les remplacentpar d’autres espèces. Souvent pluspetites. Ou encore jeunes. Les aca-cias, les faidherbia albidaprennent la place des karités oudes nérés.Résultat : le satellite remet encause une désertification «baséesur des clichés largement diffusésde déclin de l’environnement enAfrique et de l’impact des séche-resses. Il remet aussi en cause lastigmatisation des populations,présentées comme agents des-tructeurs de l’environnement ».La géographie, c’est peut-êtred’abord apprendre à regarder.

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En famille6 juillet 2011 :de la cité internationaleuniversitaire de Parisà Montmartre,les géographes-marcheurs posent sur letracé exact du méridiende Paris.

PoisonLes tiques (ci-dessous)transmettent la maladiede Lyme. Comment leséradiquer ? En pistantles promeneursdes grandes forêtsde région parisienne…

JEAN-LUCARNAUD/CNRS/CARTOMUNDI

DOSSIER UN VOYAGE EN CARTOGRAPHIE

©STAPHY / FOTOLIA.COM

4. Où l’on pistedes renardset des enfantsVoici la cartographie sur ciblemouvante : autour deGrenoble, cesont des animaux sauvages que l’ona pistés à l'aide de colliers GPS.Quels trajets font-ils, quels sontleurs corridors de prédilection,comment et où se jouent-ils desobstacles ? Faute de zèle des ani-maux (ils refusent les lignes droites

entre deux points GPS), et de pré-cision des données, l’expériencereste en suspens.Les enfants de Chantepie ont étéplus coopératifs. Ils étaient douze,équipés eux aussi d’un GPS pen-dant 48 heures. Chantepie setrouve dans la proche banlieue deRennes : c’est une commune rési-dentielle et aérée. Des pavillons, de

petits immeubles, quatre écoles.Lorsque les enfants s’y rendent àpied, isolément, sous la conduited’un adulte ou en pédibus, quel iti-néraire choisissent-ils? L’enquête aregroupé les efforts d’une psycho-logue, SandrineDepeau, et de deuxgéographes, travaillant pour leCNRS et l’université de Rennes 2.Depuis sa thèse Sandrine Depeauétudie ce que l’on appelait « lechemin de l’école», quand il existait.Et la marche à pied, quand les en-

fants nemarchent plus. «Je voulaisétudier l’influence du paysage surles trajets », dit-elle. Les cartesdressées par l’équipe confirment unparadoxe : quand les aménageursdéveloppent les zones vertes dansles villes, les piétons les fuient. Sur-tout les plus jeunes. Ils préfèrentdes artères plus polluées, plus dan-gereuses, sur le plan de la sécurité

routière. Mais plus fréquentées,donc plus rassurantes. Conclu-sion : «Le vert peut être socialementpeu attractif . »

5. Où l’onpistedes voitures,des vélos et des tiquesÀAtlanta, Géorgie, le problème nese pose pas : on circule en voitureou on ne circule pas. D’où embou-teillages, pollution et retards. Bien

sûr, la circulation est suivie entemps réel. Mais le départementdes transports de l’État amené uneétude cartographique pour com-parer le taux d’engorgement desroutes à leur capacité théorique, etcomprendre pourquoi certaines,qui auraient pu absorber plus detrafic, restaient presque fluides.Superposez la carte des embou-

OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 IGN MAGAZINE / 9

JacquesBertinLa 25e conférencede l’Associationcartographiqueinternationale étaitdédiée à Jacques Bertin,inventeur et théoriciende la sémiologiegraphique. Au dessus,feuille de l’Aiguilledu Midi au 1 : 10 000réalisée par l’IGN.

CirculationLa géomatiqueet le suivi du trafic(ci-dessus à gauche)au service des plansde circulation:l’application est utiliséepartout sur la planète.

ApplicationUne carte desavalanches peut sauverdes vies, à conditionqu’elle indique aussises propres limites(lire en page 10).

Conclusion : les aménageurs développent les zones vertesdans les villes, mais les piétons les fuient. Ils préfèrent des artèresplus polluéesmais plus fréquentées, donc plus rassurantes. »

DR

IGN

© KALLE KOLODZIEJ / FOTOLIA.COM

© ERIC BARGIS / FOTOLIA.COM

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teillages ordinaires à celle-ci, etvous avez quelques idées d’amé-nagement. Dans cette banlieue deMelbourne en Australie, ce sontmoins des cartes que des bases dedonnées que la RMITUniversity autilisées pour apparier les stationsrelais du Vélib local au réseau detransport public. Données de base :une banque d’adresses, et les dis-tances des habitations aux haltesexistantes. Résultat : l’implanta-tion des stations de Vélib à Knox,et de garages sécurisés pour les au-tres vélos, n’a rien du quadrillageque l’on pourrait attendre. Aucontraire, la plupart des stationssont regroupées. Il est pourtant ra-tionnel et équitable.Changement d’échelle : le conseilrégional d’Île-de-France veut éra-diquer les tiques. Elles colportentune bactérie qui déclenche la bor-réliose de Lyme. Les forêts (lire enpage 19) s’étendent, les banlieuesaussi : les pavillons sont souvent enlisière de bois, et les bois de plus enplus fréquentés. Une étude a étémenée en forêt de Sénart, une fo-

rêt de 3200hectares à 20kmdePa-ris, presque cernée par la ville. Oùsont les zones à risque, commentles pointer ? En 2009, les enquê-teurs ont demandé à 187 prome-neurs de retracer leurs déplace-ments sur une carte. Les trajets ontété numérisés, puis vectorisés. Sur-prise : les promeneurs s’écartenttrès peudes sentiers rectilignes queles chasses royales parcouraient augrand galop. Pourtant, les tiquess’attrapent en sous-bois. Et lesmé-decins confirment une recrudes-cence de la maladie de Lyme.En 2007, une étude avait étémenéeen forêt de Fontainebleau, à l’aidede GPS. Mais, reconnaît-on, lestraitements informatiques ont ten-dance à agréger les résultats, etdonc à négliger les «tracés margi-naux ». Qui sont les plus risqués,donc les plus intéressants pour lestraitements. Alors ? La solutionviendra, promet-on, des téléphonesintelligents: nous avons presquetous un transpondeur en poche,qui pourrait trouver une nouvelleutilité.

6. Où l’incertitudeapparaîtsur la carteÀ l’institut de cartographie de Zü-rich, Mélanie Kunz étudie les re-présentations des risques naturels.Une carte des avalanches peut sau-ver des vies. Mélanie a voulu bâtirun outil accessible, interactif, ethonnête.Visible sur http. ://kunz.cartogra-phy.ch, basé sur l’atlas suisse inter-actif, son modèle expérimental af-fiche les massifs en 3D. Tous leszooms et déplacements sont possi-bles, ainsi que des superpositionsavec les cartes traditionnelles etleurs courbes de niveau. Les para-mètres— cours d’eau, couloirs, gla-ciers—apparaissentàvolonté.Nou-veauté, lemodèleafficheaussi ses in-certitudes et les limites de ses pré-visions. Celles-ci sontnotées à l’aidede points Bertin, qui expriment lesécarts entre les différentes simula-tions compilées par l’auteur. Oùl’avalanche s’arrêtera-t-elle?Quandla carte ne le sait pas, elle le dit.

G.BITELLI

G.BITELLI

DOSSIER UN VOYAGE EN CARTOGRAPHIE

NumérisationAu départ, unevue scénographiquede Bologne, dessinéeen 1702…

RestaurationRestaurée, la cartea ensuite été numériséepar l’université deBologne. Les bâtimentsen ont été extraits pourêtre replacés en 3D…

Exploitation…sur une vue extraited’une BDmoderne,permettant toutesles exploitationshistoriques,architecturaleset topographiques.

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7. Où l’on croiseune petite sociologiedes collectionneurs«La collection, quel qu’en soit l’ob-jet, est à la fois une maladie et unethérapie. Elle peut tourner à l’ob-session — sans doute celle ducontrôle.» Constat sévère, et auto-risé : Chris Perkins, de l’universitédeManchester, sait de quoi il parle.Bien sûr, ce sont les cartes qu’il col-lectionne — parce qu’on en trouvepartout, et qu’elles ne sont paschères. Cartographe, donc métho-dique, il a stratigraphié ses sem-blables et leurs pratiques. Il les di-vise endeux catégories : la premièrefréquente les antiquaires et lesmarchands spécialisés. Elle est oc-cidentale et urbaine. Elle aime lescartes rares, chères, et anciennes.Elle s’honore d’un rapport de client— et surtout pas de consommateur— à marchand, basé sur laconfiance et le toucher. On n’in-vestit que dans ce que l’on a palpéet admiré. Elle vénère les experts.Elle est persuadée que le bon goût

est unemarque de distinction. Par-fois, elle spécule: comme les pho-tos anciennes, les cartes anciennesont leurs cotes et leurs flambées. Laseconde, plébéienne, collectionneles cartes routières imprimées, depréférence d’une série ou d’unthème uniques. Elle préfère lesfoires auxboutiques chic et n’est passnob.Cela dit, ajouteM. Perkins, Internetefface aussi les frontières cultu-relles : de plus enplus, les amateursdeviennent vendeurs. Tout se perd.

8. Où les contoursd’un archipeldeviennent un logoDepuis la Nouvelle-Zélande il y a«abloody longway toanywhere ».Disonsqu’oùque vous alliez, ce serasacrément loin. Le professeur Do-naldPreston exerce à l’université deWellington. Il vient de ce paysformédedeux îles siamoises, qui setrouve « dans le coin inférieurgauche des cartes du monde »,quand il s’y trouve. Et il a analysé la

curieusemanière dont une identiténationale faite d’insularité et d’iso-lement — d’humour anglais, aussi— se confond aujourd’hui avec lescontours d’un pays. La Nouvelle-Zélandevueduciel, ce sontdeux îlesqui se donnent la main. Une si-lhouette aérienne, une virgule quiévoqueun logo bien connu. Elle estdéclinée en tee-shirts, en logos, dé-tournée dans les publicités, les en-seignes ou les campagnes. Elle estun emblème, une fierté. Et un casrared’identification cartographique.

9. Où l'onse promèneà Bologne en 1702La carte date de 1702, mesure unpetitmètre carré. Elle est signée Fli-lippo deGnudi et représente la villede Bologne, dans ses remparts.C'est une vue scénographique, fu-sion d'une vue du ciel et d'une vueen perspective, qui représente uneà une toutes les fenêtres orientéesvers le nord-ouest. Bologne àl'époque comptait 70 000 habi-

Hors solUtiliser les codesde la cartographie pourreprésenter les réseauxsociaux : c’est le pari deMarco Salvini (Zürich).Sur sa carte (en hautà gauche), le monde telque le redessinentles liaisons aériennesen 2004.

Dans lapeauLa silhouettede la Nouvelle-Zélande(en haut) est devenueun emblème, un logo,un symbole.

G.BITELLI IGN

D.PRESTON

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D.PRESTON

MARCOSALVINI

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Rendez-vous des géographes dumonde entier, la conférence aaussi permis de rencontrer desresponsables pour qui les cartessont essentielles. Ainsi de Jean-Marc Philius, venu d’Haïti dansle cadre d’un programme fi-nancé par l’Etat haïtien etl’Union européenne.

Quel est l’étatde la cartographie en Haïti?Depuis une dizaine d’années,nous avons initié la cartogra-phie en Haïti via le Comité na-tional d’informatique et degéospatialisation, le Cnig, quiest un peu notre IGN. Nouscommençons à comprendre l’importance de lacartographie, et du SIG comme outil de déve-loppement de l’administration publique. Au-jourd’hui, on compte quelques dizaines dejeunes professionnels qui intègrent l’adminis-tration publique, ou le privé. J’ai moi-même étéformé à Rennes, dans le cadre d’un projet fi-nancé par Haïti et l’Union européenne. Je suisresponsable de la section cartographie, le se-crétariat technique du CIAT. C’est une structurequi renforce d’abord la planification. Nous fai-sons des cartes à l’échelle nationale ou dépar-tementale. Ce sont souvent des cartes de limitesadministratives, calquées sur lemodèle français.Le référentiel est produit par le Cnig. Nous uti-lisons tous les logiciels, mais surtout Agis.

De quand datent les données,et quels types de référentielsutilisez-vous?Les données haïtiennes datent de1950, 1960. La carte topographiquea été produite par l’armée améri-caine. En 2008, nous avons réaliséune campagne de photos aériennes.Elle a été actualisée après le trem-blement de terre du 12janvier 2010.Mais les données ne sont pas tou-jours superposables : des métho-dologies différentes donnent desproduits différents.Après le 12 janvier, énormémentd’ONG ont financé des missionsd’acquisition des données. Mais l’in-teropérabilité n’est pas assurée.

Quelles sont les cartesqui manquent en Haïti?Il manque des cartes de géomorphologie dessols, utiles en cas de séisme : les données quenous avons sont à l’échelle nationale. Ducoup, on ne peut pas faire un zoom sur unepartie donnée du territoire.Nous avons pourtant besoin de savoir quelsmatériaux, quelles textures sont dans le sol.Nous disposons parfois de données tech-niques sur une zone ou une autre, mais il y aune discontinuité dans la gestion de la don-née : en la matière les ONG s’intéressentuniquement à la portion de territoire qui lesconcerne.

3 questions à...Jean-MarcPhiliusResponsablede l’unité cartographieet informatique au Comitéinterministérield’aménagementdu territoire de Haïti (CIAT)

LA CARTOGRAPHIE ESTUNOUTIL DEDÉVELOPPEMENT »

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DOSSIER UN VOYAGE EN CARTOGRAPHIE

ImmatérielQue veut dire la géographie au temps de Twitter et Facebook ? Et si la distance ne se mesurait plus enmiles mais en nombre de followers ou de messages ? Une étude menée par l’université de l’Arizona.

tants. Pour le compte de l'univer-sité locale, Gabriele Bitelli a géo-codé et géoréférencé la merveille,et utilisé toutes les ressources de lanumérisation. La carte gagne unetroisième dimension — la hau-teur— et devient une base de don-nées qui permet l'insertion dans etla superposition avec les cartesactuelles, l'étude des distorsions, lasuperposition avec des images sa-tellitaires, et surtout la recréationdupaysage en 3Daprès applicationde textures sous Photoshop.

10. Où les cartess'affranchissentdes distancesIl y a le monde réel, géographique,il y a celui des rêves, et puis il y a letroisième : celui des réseaux so-ciaux. Comment représenter unmonde nouveau? Comment visua-liser le fait, dit Monica Stephens(université de l'Arizona) que biendes Américains se sentent plusproches de Lady Gaga (11 millionsde followers surTwitter) quede leurvoisin de palier, qui n’en a aucun ?Comment passer « de la distancespatiale à la distance sociale» ?Marco Salvini n'a pas encore résolule problème,mais il l'a approché. Iltravaille à l'université de Zürich,sous la responsabilité de Sara Fa-brikant. Il a décidé pour représen-ter des données « non spatiales »d'utiliser les ressources de la carto-graphie traditionnelle.«Quand nous représentons direc-tement les réseaux sociaux dit-il,nous voyons bien que nous nevoyons rien. » Il est revenu auxcartes, qui sont d'excellentesméta-phores. Lesnotionsd'échelle, dedis-tance, de frontière, de centralité, decontinents sont luespar tous. Lui lesa appliquées non à Twitter (pourl'instant) mais aux relations aé-riennes entre les grandes villes dumonde en 2004. Il a redessiné unmondedans lequel Johannesbourget Sydney font partie du mêmecontinent, oùTel Aviv se trouve en-treNewYork etLosAngeles. Il le re-connaît, « le modèle n'est pas par-fait—Francfort est devenu une île—, mais la méthode est valable. Etle résultat est lisible, grâce aux va-leurs de Jacques Bertin.» �

ACC

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QUESTIONS RÉPONSES

1. Peut-on télécharger gratuitement les cartes anciennesde l’IGN visibles sur www.geoportail.fr?� Au dernier trimestre 2011, ilsera possible de téléchargergratuitement sur www.ign.frou geoportail.fr les 181 cartes deCassini de la fin du XVIIIe siè-cle dans leur dernière éditiongravée et imprimée en taille-douce, donc monochrome, au-trement dit en noir et blanc…Sur le Géoportail qui présenteun exemplaire particulier de laBibliothèque nationale deFrance, aquarellé à la main,l’internaute peut la survoler encouleurs.Depuis le 6 juin dernier, les 978

dessins-minutes au 1: 40000 del’authentique carte de l’état-major, composée de manus-crits originaux en couleursconservés à la cartothèque del’IGN, sont également en libreaccès numérique sur le sitewww.ign.frIl suffit d’aller dans la «boutiqueloisirs » et de cliquer sur lebouton de recherche cartogra-phique (comme pour les cartesde randonnée). Grâce à la com-pression au format JPEG2000,les fichiers obtenus à l’issue dutéléchargement sontd’excellente

qualité. Ils comprennent nonseulement la surface utile car-tographiée mais également lesmarges des documents, fort in-téressantes pour l’historien quisommeille en chacun de nous.Par ailleurs sous l’onglet « pa-trimoine» et en cliquant sur lapremière ligne «espace photosIGN», on accédera bientôt à unmillion de photographies aé-riennes anciennes couvrant laFrance entière, à raison d'unsurvol tous les dix ans environdepuis la création de l’IGN en1940…

Bernard BèzesChef-adjoint du servicede la documentationgéographique de l’IGN.

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2. De quels produits IGN les chercheurset les enseignants peuvent-ils bénéficier gratuitement?� Les bases de données éditéespar l’IGN sont accessibles gra-tuitement aux chercheurs etaux enseignants dans le cadre dela licence recherche et de lalicence enseignement.Ces deux licences couvrent res-pectivement les activités :• d’enseignement initial délivrépar les organismes d’enseigne-ment public et les établisse-ments d’enseignement privésous contrat avec l’Etat,• de recherche publiable (sansrestriction de confidentialité)et dont tous les résultats sont ai-sément accessibles à toute per-

sonne qui en fait la demande,aux seuls coûts de mise à dis-position et sans délai.Pour obtenir une telle licence,l’organisme de recherche oud’enseignement doit simple-ment ouvrir un compte donnantaccès au téléchargement desdonnées sur www.ign.fr. Il fautpour cela :1. télécharger, remplir et impri-mer l’acte d’acceptation desconditions d’utilisation des don-nées.2. le faire signer par un respon-sable habilité.3. le retourner à : Institut géo-

graphique national, diffusionélectronique, 2-4, avenue Pas-teur, 94165 Saint-Mandé cedex.Une fois la demande reçue etaprès vérification de l’éligibilitéde l’organisme, un compte estcréé. Les correspondants dési-gnés dans la demande reçoiventune notification de l’ouverturedes droits par e-mail. Le télé-chargement sur internet desdonnées proposées dans desformats et projections stan-dards est alors gratuit.Pour plus d'informations :https://professionnels.ign.fr/22/tele-chargements/pour-la-recherche-ou-l-en-seignement.htm

Frédéric CantatChef du servicedu marketing à la directioncommerciale de l’IGN.

IGN

TémoignageExtrait de la cartede l’état-majorde 1820 (Paris-Est).

IGN

L'Amazonie est en partiefrançaise ! À la fois forêt

vierge et paradis des chercheursd'or, légaux ou non, la Guyaneaccueille aussi le centre spatial deKourou d'où partent les fuséesAriane. Et pourtant, à l’exceptionde la zone côtière où se concentrel'essentiel de la population, biencouverte parune carte au 1 : 25000et une base de données récente, leplus granddes départements fran-çais (83 846 km2) ne possédait pasencore de cartographie homogène.Fin 2011, ce sera chose faite.

UN RÉFÉRENTIEL INNOVANT

Le référentiel géographique guya-nais (RGG) est un projet financépar leministère de la défense, l’Of-fice national de l’eau et desmilieuxaquatiques (Onema) et l’IGN. Sacomposante hydrographique estdérivée de la BDCarthageGuyane,projetmajeurqui fut initié et portédès2005par laDirection régionalede l’environnement (DIREN).«LeRGG,résultatd’unecoopérationfructueusequianotamment impli-qué un soutien logistique des forcesarmées en Guyane, permet auministèrede ladéfenseetdesancienscombattants de disposer, pour lapremière fois, d’informations géo-graphiques (cartes,vecteurs, orthoi-mages)homogènes,précises et com-plètes sur la Guyane. Cesinformationscontribuerontausou-tien géographique des actionsmenées dans le cadre de nos mis-sions ou des responsabilités réga-liennes de l’Etat » souligne le

colonelLaude-Bazin,chefdubureaugéographie, hydrographie, océano-graphie et météorologie de l’état-major des armées.Initié en 2006 à la demande duministère de la défense, d'autoritésetd'organismes locaux,confortéparla mise en service de la station deréceptiond'imagessatellitairesSpotdeCayenneetpar lanécessitépour

l'Onema de constituer une base dedonnées hydrographiques, le RGGa trois composantes :� une composante image avec laproduction d'une mosaïque Spot« dénuagée » de résolution 2,5 m,coproduitepar l'IGNetSpot-Imagedès 2009 ;� une composante vecteur avec laproductionde laBDTOPO®consti-

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LA GUYANE BIENTÔTCARTOGRAPHIÉELe plus grand des départements français ne disposait pas encored'une cartographie homogène : ce sera chose faite fin 2011grâce au référentiel géographique guyanais, né d'unmélange inéditd'images satellitaires et de cartographie traditionnelle.

OUTRE-MER

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IGNESPACEW

Nouvelle carteExtrait cartographiquesur Saül en Guyane.A gauche l’ancienneesquisse au 1 : 100 000(échelle non respectée),à droite la nouvellecarte au 1 : 50 000.

tuée à partir de toutes les sourcesdisponibles et d'éléments de saisiescomplémentaires sur lamosaïque,notamment sur l'occupation dusol. Cette base de données intègreles données de la BD Carthageguyanaise représentant 200000kmde cours d'eau et les points d'in-térêt recueillis sur le terrain par lesmilitaires ;� une composante cartographiqueavec la production d'une carte au1: 50 000 demandée par le minis-tèrede ladéfense (sériedite "E793")et de cartes dérivées au 1: 100 000et au 1: 500 000. L’ensemble de lacartographie sera disponible fin2012. Ceprojet piloté à l'IGNpar lamaîtrised'ouvragedéléguéeduser-vice public (MODSP) et la direc-tion défense et espace, suivi par ladirection technique, amobiliséplu-sieurs services.

UNE PRÉFIGURATION

LeprojetcoordonnéparIGNEspaceà Toulouse a mobilisé les compé-tencesdesservicesdesbasesdedon-nées vecteurs, de la cartographie etde l’information en ligne. Il s’estappuyésur ladirectiondesactivitésinternationales et européennes(DAIE).Des échanges avec le ministère desaffaires étrangères ont permis d’af-finer le tracédes frontièresencohé-renceavec lestraités internationaux.

La saisie initiale de la base de don-nées vecteurs, commencée en juin2010, a été achevée en septembre2011. La série cartographiqueE793qui offre, pour lapremière fois, unecouverture cartographiqueprécisede l'ensemble du département en84 feuilles, est dérivéedirectementdu RGG. Cette cartographie quirépond aux besoins tant civils(conseil général, ONF, DEAL, etc.)que militaires s'achèvera en jan-vier 2012 et sera ensuite mise enligne sur le Géoportail.Cette première version a vocation àêtremise à jour et enrichie dans lesannées à venir, notamment aumoyende partenariats et grâce à lamise enplace de réseaux de recueilde données. Elle préfigure aussi cequepourrait être une coproductionaérien - satellite à l'IGNsurd'autresterritoires.

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TempscouvertLes images aériennesou satellites doiventêtre traitées sur logiciel.Ci-contre avec la couchenuageuse…

JungleL’essentiel du département estoccupé par la forêt, vierge ou non :les cartographes ont dû s’adapterà des conditions très particulières.

Tempsclair…puis la mêmeimage, une fois traitée :toute la canopéedevient visible.

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IGNESPACE

IGNESPACE

IGNESPACE

Le satellite Spotau secours de la cartographie !Pour faire des cartes, il faut des images. La difficulté

enGuyane vient de son climat équatorial très humide :les nuages très fréquents rendent les prises de vuesaériennes ou satellitaires difficiles. L'installation d'une stationSpot à Cayenne en2006a permis d'augmenter la capacitéd'acquisition d'images satellitaires. Une programmationintensive a été effectuée en2007 et 2008. Le choix préalabledes images s'est fait grâce à des tests sur des imagessous-résolues à 120m. L'IGN a acquis ensuite les imagesles plus pertinentes (192 parmi 700) à pleine résolution(pixel de 2,5m) puis les amodélisées géométriquementet orthorectifiées. Ensuite a eu lieu un long travailde « dénuagement » par superposition de ces images, pourobtenir au final une image composite presque entièrementdénuagée. Unemosaïque globale rendue homogèneradiométriquement a été alors fabriquée. Elle figure aujourd'huisur le Géoportail dans une version pseudo couleurs naturelles(Spot acquiert dans unmode dit « fausses couleurs »).

De la base de donnéesà la cartePour produire le RGG, laméthode choisie a été d'examiner

toutes les données disponibles et d'utiliser lesmeilleures.Ainsi, par exemple dans le nord de la Guyane, on utilisela BD TOPO® et dans le sud lamosaïque Spot. Lamosaïquea servi dans un premier temps à l'élaboration de laBDCarthage®, base de données hydrographique àmoyenneéchelle. Celle-ci a été réalisée pour l'Onema par les sociétésSIRS et Nevantropics. La couverture végétalemasquant unegrande partie du sol a nécessité le recours aumodèlenumérique de surface SRTM (Shuttle Radar TopographyMission), un système radar installé sur la navette spatiale quimesure l'altimétrie. La basede données en cours deconstitution à l'IGN sera aumodèle BD TOPO®.

Réception satelliteL’antenne de réception d’imagesSpot-Envisat du site de CayenneMontabo.

MARINTALBOT

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MNEModèle numérique d’élévation

obtenu à partir d’un système radaraltimétrique installé sur la navette spatiale.

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DIAMANTSSURCANOPÉELa carte forestièreV2de l’IFNcouvre aujourd'hui une trentainededépartements.Disponible sur leGéoportail et via sonAPI, superposable à la couchemultithèmevégétationde laBDTOPO®, elle est unoutil de premier planpourqui se préoccupede sylviculture oud’aménagementdu territoire.Bonnes feuilles.

Version 1 (V1) :six posteset2,25hadesurfaceminimale

Forêt Beauvoir, près de Niort.

La carte forestière V1 a été réaliséepar l'IFN à partir de photographiesaériennes en infrarouge couleurprises entre 1987 et 2004.Basée sur une nomenclaturedépartementale variantd'une douzaine à une soixantainede postes, elle est présentéesur le Géoportail sous la formed'une couche nationale en sixpostes : forêt fermée de feuillus,forêt fermée de conifères,forêt ferméemélange de feuilluset de conifères, forêt ouverte,peupleraie et lande. La plus petitesurface représentée est de 2,25 ha.

Version2 (V2) : unenomenclaturede trenteposteset0,5hadesurfaceminimale

Forêt Beauvoir, près de Niort.

Depuis 2006, l'Inventaire forestiernational travaille en partenariatavec l'IGN à la réalisation de la carteforestière V2. La nomenclaturenationale basée sur la couverturedu sol, la densité du couvertet la composition en essencescomprend une trentaine de postes.Toute entité forestière ou semi-naturelle de plus de 0,5 haest cartographiée. La V2 couvreà ce jour une trentainede départements. Chaque année,dix nouveaux départementsviendront enrichir le Géoportail.

GÉOPORTAIL

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EssencesCarte

de localisationet liste

exhaustivedes postes

de légende desformationsarborées

cartographiéespar l’IFN et l’IGN.

QuandlaBDTOPO®

et laV2secomplètent

Environ de Tarbes(Hautes-Pyrénées).

La combinaison de la couchemulti-thèmes végétationde la BD TOPO® et de la carteforestière V2 de l'IFN permetd'obtenir une cartographie détailléede l'ensemble des formationsarborées, c'est-à-dire des forêts,mais aussi des bois (entité boiséeinférieure à 0,5 ha), des vergerset des haies.Cette information, constituéeconjointement par l'IFN et l'IGN,est disponible pour une trentainede départements.Elle est particulièrement adaptéeaux problématiques liéesaux continuités écologiqueset à la trame verte.

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IFN

L'Inventaire forestier national> Le programme d'inventaire forestier national permanent a été lancé en 1958. Aujourd’hui, tousles pays développés procèdent à un tel inventaire, indispensable pour suivre la gestion et l’exploitationforestière, et fonder la politique forestière. L'établissement public occupe 190 agents environ.Le 1er janvier 2012, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, l’IFN et l’IGN serontréunis. L'IFN réalise également la carte forestière ; il fournit dans un premier temps la couche multi-thème végétation de la BD TOPO® de l’IGN, puis enrichit la partie forestière. Sur la base de ses chaînesstatistique et cartographique de collecte d’informations, l’IFN diffuse une information variée sur la forêtet réalise sur demande des travaux ou des études spécifiques.

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C’est un chêne, mais on n’enfera pas le chêne de Saint-Louis.Pour le rôle, ilmanque d’épaules.

C’est une grande tige qui grimpe en zigzagsvers la lumière, aumilieud’unepente de châ-taigniers à l’abandon. Dix-sept mètres ma-lingres.Onn’en feramêmepasdes planches:il faudrait qu’il se redresse. Pourtant, depuisune heure, l’arbre numéro2 est au centred’une petite liturgie forestière célébrée parune équipe d’agents de l’IFN, et qui se répètechaque année à environ 7 000 reprises aufond des bois de métropole.Cette fois, nous sommes en Dordogne, à20km au sud de Périgueux. Une départe-mentale, un hameau de pierre blonde. Lechemin cahotemais file droit. On stoppe de-vant un champ de maïs. Descendre lapente entre les épis déjà hauts, enjambertout en bas un muret de pierres avalé parle sol et le squelette d’une moto. Grimperde 200mètres sous le couvert des charmes,puis des châtaigniers. L’arbre numéro2, lechêne débutant, est là, presque au centred’une placette circulaire imaginaire de

25 mètres de rayon, soit 20 ares au sol, cra-quante de feuilles sèches. Au centre exact,un piquet portant une boussole de préci-sion. Cette placette, c'est un échantillon deforêt française.

PONCTION LOMBAIRE

Dans un rayon de six mètres, le cœur de ci-ble, les trois officiants ont mesuré avec soinetunmètreà ruban le tourde tailledechaquearbre à 1,30m du sol, sa distance centimé-trique au point central, son azimut, sa hau-teur, et son état de santé. Ils ont aussi estimélaqualitéde sonbois. Le chênenuméro2aeudroit à une ponction lombaire; dix tours detarière pour lui emprunter une carotte exa-minéeà la loupe, quidénonce, endixièmesdemillimètres, sa croissancedurant chacunedescinq dernières années. Total: 15,2mm.De la précision des mesures et du respectde laméthode dépend, tout simplement, lavaleur des statistiques qui seront extrapo-lées à l’ensemble de la forêt française.Dans les zones concentriques suivantes (9,15 et 25 mètres) les enquêteurs vont me-

IFN: LE PLEIND’ESSENCESLe premier janvier2012, les personnels de l’Inventaire forestiernational (IFN) rejoindront l’IGN. Quelles sont leurs missions,comment procèdent-ils? À quoi leurs relevés servent-ils ?Pour le savoir, un seul moyen: direction les grands bois.

ZOOM

PedigreeSur l’étiquette d’un arbre du cœur de cible,dans le sens des aiguilles d’une montre,son numéro, sa croissance dans les quatredernières années, son âge, ses hauteurs(à 1,30m du sol, à la première découpe…),son azimut et sa distance au point central.

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surer les arbres moyens et gros, procéder àun relevé de la flore, ausculter le sol et no-ter la composition en essences. Autrefois no-tées sur des formulaires, les données sontsaisies dans un ordinateur de poche, qui lesdéversera ensuite directement dans les

ACC

OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 IGN MAGAZINE / 19

ACC

A l’anciennePatrick Dostes, chef du groupe de contrôlenational de l’IFN, et les perches de fibrequi permettent de mesurer les arbres,surtout tordus. Aujourd’hui, on leur préfèrele dendromètre à ultrasons.

Papier bibleUn outil de base, et de la plus hauteimportance : une flore forestière de 1200pages (pour le tome 1)… que les enquêteursconnaissent quasiment par cœur.

serveurs de l'Inventaire. Les bûcheronscoupent les arbres. L’Office national des fo-rêts (ONF) les gère, s’ils sont publics. Etl’IFN, pour Inventaire forestier national, lesrecense…

L’INSEE DES ARBRES

Combien d’arbres en France, combien demètres cubes, de quelles essences? Et com-bien dans les années à venir ? Combien àcouper, combien à naître, et où ? Avecquelles fleurs à leur pied, et qui témoignentde quel état du sol? L’IFN, c’est l’Insee desarbres, un fournisseur indépendant de sta-tistiques forestières, indispensables à la ges-tion durable de cette ressource lentementrenouvelable qu’est le bois. L’IFN emploie(lire encadré) un peu moins de 200 agents

Est considérée comme forêtune terre d'au moins 50 ares,

d'au moins 20 mètres de largeur,et dont le couvert arboré, supérieurà 10 %, est fourni par des essencespouvant atteindre au moins 5 mètresà maturité in situ.

• Un arbre est « un végétal ligneuxayant une tige nue et non ramifiéeà la base », susceptible d'atteindreau moins 5 mètres de hauteur.

• La forêt occupe en métropole16,1 millions d'hectares, soit 29,2 %

du territoire. 95 % peuvent être utiliséspour la production du bois.

• La surface de forêt en Frances'accroît d'environ 60 000 ha par andepuis un siècle, soit chaque annéel'équivalent de deux fois la forêtd'Orléans, plus grande forêtdomaniale de France.

• Les cinq régions les plus boiséessont la Corse (55 % de forêt),Provence-Alpes-Côte d'Azur (48%),la Franche-Comté (44%), le Languedoc-Roussillon et l'Aquitaine (43 %).

L'état de la forêt française :quelques données et définitions(inventaire 2005-2009)

qui, le 1er janvier 2012, seront intégrés àl’IGN. Parmi eux, 70 agents de terrain mu-nis de chaussures adaptées, de guêtres (àcause des tiques et des broussailles) et d’unescience rare, rattachés par paires à l'une oul'autre des cinq directions interrégionales.D’ordinaire, ils travaillent en binôme. Là, ilssont trois, et non des moindres.Patrick Dostes est le chef du groupe decontrôle national, qui revient sur 4% desplacettes déjà inspectées pour l’étalon-nage. Ce retour scrupuleux permet d'esti-mer lesmarges d'erreur. David Belletier estson coéquipier habituel — à eux deux, pasloin d’un demi-siècle de comptages. VincentLiébard est le responsable national des opé-rations d’inventaire, chargé de coordonnerla réalisation de chaque campagne et defaire évoluer lesméthodes et les procédures,

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20 / IGN MAGAZINE OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011

L'infrarougecouleur(IRC, enhaut)

présenteunatoutsupplémentaire pourplacer précisément lepoint d’inventaire :les étangssont plusvisiblesqu'encouleurnaturelle, le châtaignierest plus facile à distinguer(rose), onpeut voir le pinmaritime isolé àquelquesmètresde la placette…L'IRCétait utilisépar les agentsde terraindans l'ancienneméthoded’inventaire. Sonusageavait disparu avecla nouvelle, depuis2004,en raisondesanon-disponibilité (lesmissionsaériennesnumériquesde l'IGN, à leursdébuts,ne l’intégraient pas).La couverture estdésormais complèteen Lambert2étendumais pasenLambert93.Nousespéronspouvoir bénéficierde la couverture totaleavecà la fusionde l’IFNet de l’IGN.

Ce qu’ilfaut voirparVincentLiébardresponsable nationaldes opérationsd'inventaire à l'IFN

des « habitats » biologiques, conforme auglossaire Natura 2000, etmême l’ordre desopérations. Pour les agents de terrain, la col-lecte, le relevé et l’enregistrement d’environ70 données botaniques, géologiques ouécologiques dans un boîtier de saisie por-table exigent plusieurs heures. « Et noussommes dans une parcelle facile», sourit Pa-trick Dostes.

AU LIDAR ET À LA LOUPE

Une parcelle facile, cela veut dire que sa voi-ture de service est garée à dix minutes demarche, quand cela aurait pu être deuxheures. Que le terrain est à peine pentu.Qu’il n’a pas été obligé de se frayer un che-min dans des taillis. Que nous ne sommespas en équilibre sur une crête des Alpes, ou

au bord d’une autoroute. Chaque fois, la col-lecte commence comme un jeu de piste.Depuis 2004, la France est quadrillée en car-rés d’un kilomètre de côté. Dans 8000 car-rés, chaque année, un ordinateur désignealéatoirement le point central d’une pla-cette, comme on désigne un point sur lacarte en fermant les yeux. Les agents re-çoivent une photo aérienne. Dans un coin,un agrandissement: leur cible. Le GPS per-met une approche à quelques mètres près,quand les conditions sont bonnes. Sinon ilstravaillent à la loupe, et à l’expérience.Jusqu’en 2004, la collecte était départe-mentale. Chaque département était étudiéà fond… tous les dix ans. Depuis 2004, lecrible est national. Dans cinq ans, chacundes carrés de forêt française aura été

qui peuvent être modifiées chaque année.Le manuel de la campagne 2011, qui se ter-minera en novembre, est un cahier d’envi-ron 200 pages, bien serrées. L’orientation dela tarière lors d’un carottage, lamanière demesurer un tronc, la manière de mesurerla hauteur d’un arbre au dendromètre à ul-trasons (qui a remplacé les tiges de fibre deverre hissées à bout de bras) sont codifiées.Comme le sont la nature du sol, les essences,les autres plantes, la manière de compen-ser une pente, ou de définir une haie, la liste

Pour les agents de terrain,la collecte, le relevéet l’enregistrementd’environ 70 donnéesbotaniques, géologiquesou écologiques dans un boîtierde saisie portableexigent plusieurs heures.

ZOOM

échantillonné.

AGRÉGATS GRENUS, CODE 34

En cinquante ans, les outils aussi ontchangé. Un Lidar — une dizaine de kilosavec la batterie — est expérimenté. Il per-met des captures automatisées de lasilhouette des arbres pour en déduire le vo-lume de bois. Les photos qui permettent decartographier la France sylvestre et de re-pérer les placettes sont empruntées à la BDOrtho® de l’IGN, quand il y a une vingtained’années l’IFN réalisait ses propres survols.Mais il faut toujours un œil de spécialistepour identifier, entre dix châtaigniers, unpin sylvestre isolé.Patrick Dostes finit de creuser un trou. Lafosse de 60 cm permet d’examiner les

TransmissionLes dizaines de données recueilliespour chaque placette sont saisiesdans un PDA, qui les transmetensuite automatiquement aux ordinateurscentraux de l’IFN.

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que peut retenir le sol. C’est l’un des para-mètres de la croissance des arbres.Le plus dur dans ce job, sourit David, cen’est pas de piocher, ni de porter deux sacsà dos de matériel au fond des bois. C’estla solitude. À part quelques propriétaireslorsque les parcelles sont clôturées, àpart quelques chasseurs en saison, lesagents de l’IFN rencontrent plus de picsverts que d’humains. Les forestiers quit-tent chaque lundi matin leur centre de rat-tachement dans leur voiture de service

pour ne revenir qu’en fin de semaine, aprèsquatre nuits dans des gîtes, hors saison.Métier de taiseux, mais d’amoureux desarbres, des bois, des plantes, et même desprotocoles. Les bois, ils sont parfois lesseuls ou les derniers à y pénétrer. « Lesforêts se referment », dit Patrick Dostes.Et cette herbe têtue, là, sous votre se-melle, est un Carex pilulifera, dit laîcheà pilules. Lorsqu’on l’arrache, elle sent lecamphre, l’embrocation d’avant-match.Mais elle est déjà dans l'ordinateur. �

Que deviennent les données recueilliessur les placettes?Les données brutes intègrent une base dedonnées : le type de sol, par exemple, la hau-teur, la circonférence et l’essence des arbres,la flore rencontrée, etc. La deuxième phaseconsiste en des calculs qui prennent encompte l’ensemble du plan d’échantillon-nage. Elle permet de produire ce que nousappelons les résultats d’inventaire, au pre-mier rang desquelsla surface de la forêt, levolume de bois ventilé selon de nom-breuses catégories (essence, diamètre, etc.).À partir de ces données, nous publions desbrochures très détaillées. Nous avons unemission de restitution aux niveaux nationalet régional. Au niveau écologique, la resti-tution de l’information se fait par sylvo-écorégion. Tous les résultats sont aussi dis-ponibles sur notre site (www.ifn.fr).

À quoi ces informationsservent-elles ?En premier lieu, à connaître à toutmomentl’état des ressources forestières du pays ensurface, volume, essence, dimensions, etc.de façon à fournir au ministère chargé desforêts les éléments nécessaires à la défini-tion, à lamise enœuvre et à l’évaluation desorientations de la politique forestière na-

tionale, comme le précise lecontrat d’objectifs de l’établis-sement.Nous menons aussi beaucoupd’études prospectives sur laressource et sa disponibilité.Nous en avons réalisé une avecl’Ademe, il y a deux ans, sur lesressources en bois énergie àl’horizon 2020. Les études sontaussi régionales, comme enNormandie ou en Aquitaineaprès la tempête Klaus. Pources études, nous partons denos données, puis consultonsles professionnels sur des scé-narios sylvicoles, avant demodéliser les évo-lutions.L’IFN a beaucoup travaillé sur les dégâts destempêtes, notamment après Klaus en jan-vier 2009. Le nouveau dispositif d’inven-taire, installé en 2004, nous a permis demontrer notre réactivité. Cela a aidé les pro-priétaires et la filière à connaître précisé-ment et de manière objective l’ampleur dela catastrophe. Nous disposons aussi dedonnées écologiques et pédologiques, decartes de répartition d’espèces avec 140 000points inventoriés selon lemême protocole.

Comment se portela forêt française?Elle a crû de 60000 hectarespar an depuis plus d’un siè-cle, principalement du faitde la déprise agricole et,dans une moindre mesure,des plantations réaliséesaprès guerre. Effet de cettereconquête forestière,le stock de bois sur pieds’est accru en moyennede 25 millions de mètrescubes chaque année durantle dernier quart de sièclemalgré une récolte annuelle

de l’ordre de 40 millions de mètres cubes.Cette augmentation n’est homogène nidans le temps ni dans l’espace. En résumé,les dynamiques d’expansion et les consé-quences des tempêtes de 1999 et 2009 ontdéplacé et déplacent la localisation des res-sources en bois des régions forestières tra-ditionnelles du nord-est et du sud-ouestvers d’autres régions. Le défi majeur à re-lever dans les prochaines années sera l’ex-ploitation durable de cette ressource nou-velle que le travail de l’IFN permet de ré-gionaliser et de qualifier.

3 questions à...Stéphanie LucasResponsable de l’unitédiffusion et relationsavec les utilisateursde l’Inventaire forestiernational

UNOUTIL AU SERVICEDE LA POLITIQUE FORESTIÈRE FRANÇAISE »

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strates, la nature du sol, et de comprendreson fonctionnement. Celui-ci est blond et li-moneux, avec agrégats « grenus » : il seraclassé en code 34. Le pH est vérifié. Patrickdéterre des galets de silex, qui rendentquand on les cogne le bruit des billes dansune cour d’école. Ils sont dessinés sur un for-mulaire : leur volume permettra aux ordi-nateurs de calculer le volume d’humidité

ChênaieLa forêt de Recreuse,dans la Vienne.

IFN / SERGE LATHERRADE

CARTES

SURTABLE

1958 Naissance au sud d’Amman (Jordanie)d’une famille d’origine palestinienne.

1976 Arrive en France, et commencepar apprendre le français.

1977 Entre dans les classes préparatoiresde l’Ecole spéciale des travaux publics.

1979 Entre à l’ENSG.1982 Devient Ingénieur des travauxgéographiques et cartographiques.

1990 Obtient une thèse de doctoraten géodésie spatiale de l’Observatoirede Paris, et en 2006 son habilitation àdiriger des recherches à l’Université Paris-IV.

2002 Première publication de l’ITRF.2011 Reçoit le prix Antoine-d’Abbadiedécerné par l'Académie des sciences.

Lignes de vie

OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2011 IGN MAGAZINE / 23

De la Jordanie à l’IGN, quel parcours…Je suis né en Jordanie,mais les Altamimi sont ori-ginaires de Palestine, du côté d’Hébron. Mes pa-rentsme voyaientmédecinmais je voulais deve-nir ingénieur. Je ne voulais pas me confronter àla souffrance des gens. J’avais envie de faire de larecherche. C’est aumilieu des années 1970 que jeme suis envolé pour la France. À cette époque laJordanie qui avait besoin de construire son pro-pre IGN y a envoyé une trentaine d’étudiants seformer aux techniques de l’IGN. J’ai profité de ceprogrammede coopération. De toute façon j’avaisenvie de partir, d’aller à l’étranger. J’ai vite apprisle français, fait mes classes préparatoires puis jesuis entré à l’ENSG. De ma promotion, je suis leseul à avoir intégré l’IGN où j’ai eu la chance derencontrer Claude Boucher. Ilm’a permis de faireune thèse sur un travail de combinaison des qua-tre techniques de géodésie spatiale permettant ladétermination d’un repère de référence terrestreglobal. J’ai saisi ma chance.

Quel est, selon vous, le rôle de la géodésie?Très brièvement, c’est la science qui étudie les troispropriétés fondamentales de la Terre: sa forme, sarotation dans l’espace et son champ de gravité,ainsi que les variations temporelles de ces para-mètres. La géodésie, permettant de se positionnerà tout instant partout dans l’espace et dans letemps, est la seule science capable de réaliser unsystème de référence terrestre global; le socle in-dispensable à la navigation satellitaire et aux ap-plications en science de la Terre.S’il est possible de déterminer la distance entredeux points distants de 10 000 kmavec une exac-titude de l’ordre de 6 mm, c’est grâce à la géodé-sie. Que ce soit pour la navigation terrestre ouma-

ritime, un système de positionnement est indis-pensable. D’où l’importance pour l’Europe de pos-séder le sien propre, Galileo.

Quels en sont les enjeux sociétaux ?Quelle est la vitesse actuelle de la montée du ni-veau de la mer dans les différentes régions duglobe? Comment la Terre se déforme-t-elle sousl’effet de la dérive des continents, des phénomènessismiques ou de la fonte des calottes glaciaires?Ces questions, océanographes, géophysiciens etclimatologues se les posent constamment. Montravail consiste donc à leur fournir un système deréférence précis. Actuellement c’est la variabilitéspatio-temporelle du niveaumoyen desmers quifait débat. Les satellites estiment que l’augmen-tation est de l’ordre de 3,4mmpar an là où lesma-régraphes positionnés depuis plus de 100 ans en-registrent une remontée annuelle de 1,7 mm.

A quoi un système de référence sert-il ?Il permet, par exemple, de calculer d’unemanièreprécise les orbites des satellites, c’est-à-dire leur po-sition à tout instant, et d’y exprimer les paramè-tres desphénomènes géophysiquesqui gouvernentnotre planète.Mamission est de produire une ré-férence géodésique à l’échelle de la planète. Le re-père international de référence terrestre rassem-ble et publie les coordonnées et les vitessesmoyennes de 500 instruments de géodésie spa-tiale: antennes GPS, balises Doris, télescopes La-ser et antennes VLBI (interférométrie à trèslongue base). L’idée de construire ce système in-ternational (ITRF pour International TerrestrialReference Frame) date des années 1980. Cettemis-sion a été confiée à l’IGN par les instances inter-nationales. Au laboratoire de recherche en géo-désie nous sommes quatre chercheurs à travail-ler à son amélioration constante.Nous collaboronsavec une vingtaine de centres de recherche dansle monde qui nous fournissent les coordonnéestemporelles collectées grâce auxquatre réseauxdif-férents. Notre rôle est d’unifier ces données.

BiblioEn 2002,

il publie avec sescollaborateurs del’IGN un article surl’ITRF 2000 qui a étéidentifié depuiscomme l’un des pluscités dans le domainede la science spatiale.

En 2007, il publiel’ITRF 2005, puis en2010 l’ITRF 2008 :soit le repère deréférence employéactuellement par lesscientifiques.

En préparation :un article sur lemouvement desplaques tectoniquess’appuyant sur lesrésultats del’ITRF 2008.

Zuheir AltamimiZuheir Altamimi, expert en géodésie, a reçu le prix Antoine-d’Abbadieen mai 2011. D’origine palestinienne, c’est en France qu’il a apprisà mesurer la Terre, et contribué depuis à la mise en placedu système international de référence terrestre.

Lamission de construirele système de référencea été confiée à l’IGN

par les instances internationales. »

AGENCECINQUIEMECOLONNE

«Lemondedem

eureunpuzzle

»Undessin

deHayden

Livingstone(Nouvelle-

Zélande),distinguédans

lacatégorie

12-15ans

lorsdel’exposition

dedessins

d’enfantsdelaconférence

cartographiqueinternationale

(lirepages

6à12).