Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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THÈSE Pour l'obtention du grade de DOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS UFR de droit et sciences sociales Équipe de Recherche en Droit privé (Poitiers) (Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006) École doctorale : Droit et science politique - Pierre Couvrat (Poitiers) Secteur de recherche : Droit privé Présentée par : Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à Madagascar : Réalités internes et proposition d'actualisation en référence au droit médical français Directeur(s) de Thèse : Gérard Mémeteau Soutenue le 12 octobre 2013 devant le jury Jury : Président Rivo Ratovo Andrianavalona Maître de conférences HDR - Université de Poitiers Rapporteur Emmanuel Cadeau Maître de conférences HDR - Université de Nantes Rapporteur Cyril Clément Maître de conférences HDR - Université de Paris 8 Membre Gérard Mémeteau Professeur - Université de Poitiers Membre Éric Savaux Professeur - Université de Poitiers Pour citer cette thèse : Tahiry Anja Razafiarison. La responsabilité médicale à Madagascar : Réalités internes et proposition d'actualisation en référence au droit médical français [En ligne]. Thèse Droit privé. Poitiers : Université de Poitiers, 2013. Disponible sur Internet <http://theses.univ-poitiers.fr>

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THÈSE

Pour l'obtention du grade deDOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS

UFR de droit et sciences socialesÉquipe de Recherche en Droit privé (Poitiers)

(Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006)

École doctorale : Droit et science politique - Pierre Couvrat (Poitiers)Secteur de recherche : Droit privé

Présentée par :Tahiry Anja Razafiarison

La responsabilité médicale à Madagascar : Réalités interneset proposition d'actualisation en référence au droit médical

français

Directeur(s) de Thèse :Gérard Mémeteau

Soutenue le 12 octobre 2013 devant le jury

Jury :

Président Rivo Ratovo Andrianavalona Maître de conférences HDR - Université de Poitiers

Rapporteur Emmanuel Cadeau Maître de conférences HDR - Université de Nantes

Rapporteur Cyril Clément Maître de conférences HDR - Université de Paris 8

Membre Gérard Mémeteau Professeur - Université de Poitiers

Membre Éric Savaux Professeur - Université de Poitiers

Pour citer cette thèse :Tahiry Anja Razafiarison. La responsabilité médicale à Madagascar : Réalités internes et proposition d'actualisationen référence au droit médical français [En ligne]. Thèse Droit privé. Poitiers : Université de Poitiers, 2013.Disponible sur Internet <http://theses.univ-poitiers.fr>

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UNIVERSITÉ DE POITIERS

FACULTÉ DE DROIT ET DES SCIENCES SOCIALES

ÉCOLE DOCTORALE DROIT ET SCIENCE POLITIQUE PIERRE COUVRAT – ED 088

LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À MADAGASCAR

RÉALITÉS INTERNES ET PROPOSITION D’ACTUALISATION EN RÉFÉRENCE AU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS

Thèse pour le doctorat en droit privé

présentée et soutenue publiquement le 12 octobre 2013

par

Madame Tahiry Anja RAZAFIARISON

DIRECTEUR DE RECHERCHE

Gérard MÉMETEAU

Professeur à l’Université de Poitiers

SUFFRAGANTS

Emmanuel CADEAU

Maître de conférences HDR à l’Université de Nantes (rapporteur)

Cyril CLÉMENT

Maître de conférences HDR à l’Université de Paris VIII (rapporteur)

Éric SAVAUX

Professeur à l’Université de Poitiers

Ratovo ANDRIANAVALONARIVO

Maître de conférences HDR à l’Université de Poitiers

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LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À MADAGASCAR :

RÉALITÉS INTERNES ET PROPOSITION D’ACTUALISATION EN RÉFÉRENCE AU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS

Afin de répondre aux attentes de la société malgache, une proposition de loi relative à la responsabilité médicale doit être en cohérence avec la vision locale de la pratique médicale. À Madagascar, l’issue d’un acte de soin est supposée émaner de la divinité et ne saurait être maîtrisée par le soignant. De fait, l’aléa thérapeutique s’insère dans le droit médical local. Le médecin n’est pas tenu de réaliser une guérison; il doit prodiguer des soins consciencieux et conformes à la science. Ceci étant, la culture malgache est sensible à toute atteinte corporelle subie par la victime d’accident médical. Le cas échéant, le médecin fait un geste de courtoisie à l’égard de la victime. Ce « geste » peut ne pas représenter l’intégralité du préjudice mais il participe au respect de la victime. Ainsi, à Madagascar, l’obligation médicale de réparer vise la reconnaissance de la douleur du patient et non la réparation quantitative du préjudice. Sur ce poin une divergence se dessine avec le droit français, lequel préconise la réparation intégrale pour les atteintes corporelles. Les modes alternatifs de résolution des conflits présents dans les deux systèmes juridiques, dénouent cette divergence.

Mots-clés en français

Fautes médicales : Faute technique, Faute relationnelle — Modes alternatifs de résolution des conflits médicaux — Mécanismes de prévoyance de dette de responsabilité médicale : structure assurantielle, structure mutualiste.

MEDICAL RESPONSIBILITY IN MADAGASCAR : REAL SITUATIONS AND A PROJECT OF RENOVATION REFERRING TO FRENCH LAW

To come up to the Malagasy society’s expectations a legal act on medical responsibility should be coherent with the local conception of medical practice. In Madagascar, the public opinion is convinced that medical practice has to deal with a divine action out of the physician’s control so that the legal concept of therapeutic risk is therefore accepted. The physician is only required to assume the continuity of the service and to provide his or her best care to patients. Meanwhile Malagasy culture shows an extreme compassion towards people suffering of bodily injuries mainly when these wounds result from a malpractice. To prevent a godly punishment doctors usually have to donate to their injured patient. This helps to preserve the physician’s reputation and his or her relationship with the patient. Medical duty in Madagascar is more a matter of recognition of the patient’s pain than a procedure of compensation. French legal system is different as it promotes the complete compensation in case of malpractice. However, both legal systems are similar when proposing alternative process to resolve conflicts.

Keywords

Medical fault: Technical foul, relational fault — Alternative dispute resolution in medical conflicts —Mechanisms of pension liability: insurance and mutual structure.

NY ADIDY AMAN’ANDAIKITRY NY MPITSABO MALAGASY

Mba hahafahan’ny lalàna mifehy ny fitsaboana mamaly izay andrasan’ny fiarahamonina aminy dia tokony hampifandraisina amin’ny kolontsaina malagasy mikasika ny fitsaboana ny volavolan-dalàna mikasika ny fanonerana ny loza ara-pitsaboana. Amin’ny kolontsaina malagasy, ny loza tsy ampoizina amin’ny asam-pitsaboana dia efa fotokevitra mitoetra satria ny fiafaran’ny asam-pitsaboana dia avy amin’Andriamanitra fa tsy avy amin’ny mpitsabo. Raha mitranga ary ny loza dia miezaka ny dokotera hanao fihetsika amin’ny niharam-boina. Izany fihetsika izany dia tsy voatery hitovy amin’ny taha-ara-bola ny loza nitranga, fa fandraisana anjara ho fanajana ny niharam-boina. Raha fehezina, eto Madagasikara, ny andraikitra ateraky ny fitsaboana mikasika ny fanonerana dia mahakasika kokoa ny fanekena ny fisian’ny fanaintainana nihatra tamin’ny marary fa tsy fanonerana ara-bakiteny ny loza. Tsapa eto ny fahasamihafany amin’ny lalana ara-pitsaboana frantsay izay mifototra amin’ny fanonerana manontolo ny loza. Ny paik’ady ifanarahana no mampifandray ny lalana roa tonta.

ÉQUIPE DE RECHERCHE EN DROIT PRIVÉ EA 1230

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L’université de Poitiers n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

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À la mémoire de mon père,

À ma famille,

À mes sœurs de Congrégation,

À Marthe, à Clément,

À Monsieur le professeur Gérard Mémeteau pour son soutien de toujours,

Et à mes professeurs pour leurs conseils qui ont contribué à la réalisation de ce travail.

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SOMMAIRE

INTRODUCTION ................................................................................................... 6

PARTIE I. L’APPRÉCIATION DE L’ENCADREMENT JURIDIQUE DE LA PROFESSION

MÉDICALE À MADAGASCAR À LA LUMIÈRE DU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS .......... 44

TITRE I. EXISTENCE D’UN PRINCIPE DE RESPONSABILITÉ APPLICABLE À

LA PROFESSION MÉDICALE À MADAGASCAR ........................................................ 50

Chapitre I. Exposé de la nature contractuelle du rapport médecin-patient en droit positif malgache ................................................................................... 53

Chapitre II. Les modalités et l’étendue du droit de la réparation .......................... 96

TITRE II. INEXISTENCE PRATIQUE DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À

MADAGASCAR ...................................................................................................... 116

Chapitre I. Le système assurantiel des médecins face aux accidents thérapeutiques .................................................................................................. 118

Chapitre II. La difficulté de la réalité du lien de causalité ................................... 144 PARTIE II. LES VOIES D’ÉLABORATION DU DROIT DE LA RESPONSABILITÉ

MÉDICALE À MADAGASCAR ............................................................................... 168

TITRE I. VOIE AMIABLE, VOIE CONTENTIEUSE : QUELLE OPTION POUR LE

DROIT MÉDICAL MALGACHE ? ............................................................................. 171

Chapitre I. Le déploiement des résolutions amiables en cas d’accidents médicaux .......................................................................................................... 174

Chapitre II. La compensation pécuniaire : signe de non impunité pour fait médical préjudiciable ................................................................................ 206

TITRE II. LE DROIT MÉDICAL FRANÇAIS : SOURCE LÉGISLATIVE À

MANIPULER AVEC MESURE ................................................................................ 225

Chapitre I. L’incapacité de la loi du 4 mars 2002 à apporter une sécurité juridique intégrale aux parties ......................................................................... 227

Chapitre II. La codification mesurée de la responsabilité médicale à Madagascar ...................................................................................................... 252

CONCLUSION GÉNÉRALE ................................................................................. 272

ANNEXES ......................................................................................................... 288

Code de la santé (Madagascar) ............................................................................. 289

Code de déontologie médicale (Madagascar) ....................................................... 382

Exemple de conditions particulières d’un contrat d’assurance responsabilité d’un professionnel de santé (Madagascar) .............................. 394

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................... 397

INDEX .............................................................................................................. 408

TABLE DES MATIÈRES ...................................................................................... 413

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INTRODUCTION

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De sorte que croire à la médecine serait la suprême folie, si n’y pas croire n’en était pas une plus grande, car de cet amoncellement d’erreurs se sont dégagées, à la longue quelques vérités.

M. PROUST 1

La responsabilité civile médicale n’est pas une exception de responsabilité civile.

A. BACHELLERIE 2

1. Le principe de la responsabilité civile traduit le système d’indemnisation

authentique. — La mise en oeuvre de la responsabilité civile résulte d’un fait

dommageable 3 issu soit de l’inexécution contractuelle 4, soit de la commission d’une

faute « événementielle » 5 hors toute convention (faute délictuelle). Historiquement,

un tel régime reposait sur un concept de responsabilité individuelle où chaque

citoyen devait se conduire correctement afin de ne pas causer de tort à ceux et celles

qui l’entourent 6. La responsabilité civile était ainsi conçue en vue de réguler les

1 M. PROUST, À la recherche du temps perdu, t. 3, Le Côté de Guermantes, Gallimard, 1921-1922.

2 A. BACHELLERIE, L’évolution du contentieux médical et ses conséquences sur la relation médecin-assureur, L’Harmattan, 2004, p. 21.

3 Nommée également fait générateur.

4 D. TALLON, L’inexécution du contrat : pour une autre présentation, RTD civ. 1994, p. 223 ; « Pourquoi parler de la faute contractuelle ? », in Droit civil, procédure, linguistique juridique : écrits en hommage à Gérard Cornu, P.U.F., 1994, p. 429 ; G. VINEY et P. JOURDAIN, Traité de droit civil, sous la direction de J. GHESTIN, Les conditions de la responsabilité, 3e éd., L.G.D.J., 2006, p. 374.

5 Il y a ainsi deux sortes de faute : la faute contractuelle : article 1147 du Code civil français et la faute délictuelle : article 1382 du même Code. L’article 1384 élargit le principe de la responsabilité délictuelle en indiquant qu’on est également responsable du dommage causé par le fait des personnes dont on doit répondre ; c’est le principe de la responsabilité pour « fait d’autrui ». « Autrui » pouvant être représenté soit par les enfants par rapport aux parents, soit par les élèves par rapport aux instituteurs, soit par les préposés par rapport aux commettants ou encore les apprentis par rapport aux artisans. Mais la doctrine confirme que cette extension, n’a pas de pendant en droit d’inexécution contractuelle ; ceci parce que le droit à un remède contractuel suppose seulement l’inexécution d’une obligation contractuelle, à savoir l’écart entre ce qui était promis par le débiteur et ce qu’il a fourni (il y a exécution mais qualifiée de défectueuse) ou n’a pas fourni (l’inexécution totale est consumée). Et le Code civil ne contient pas de dispositions érigeant le « fait d’autrui » ou le « fait des choses » en fait générateur de responsabilité contractuelle ; M. FAURE-ABBAD, Le fait générateur de la responsabilité contractuelle, Th. pour le doctorat en droit, 5 janvier 2002, Université de Poitiers, p. 297 et s., Coll. de la Faculté de droit et des sciences sociales.

6 A. TUNC, La responsabilité civile, Économica, 1981, p. 133. L’auteur relève quatre idées fondatrices de la responsabilité civile : la prévention des comportements antisociaux, l’indemnisation de la victime, la dilution de la charge des dommages et la garantie des droits de citoyens au respect de l’intégrité corporelle soit ; bref la responsabilité civile s’inscrit dans la reconnaissance du préjudice subi. Le désir de mesure et d’équilibre motive la position jurisprudentielle en matière de responsabilité civile. Ainsi, en qualité d’hommes organisés en société, « Chacun d’entre nous est

…/…

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rapports sociaux 7. Le principe de la responsabilité civile assumait à la fois une

mission de prévention face aux comportements contraires à la morale 8 et

consécutivement permet de réparer le préjudice injustement causé à autrui (damnum

injuria datum) 9. Une formule de Domat 10 relative à la responsabilité civile distingue

nettement le contenu des comportements dits contraires à la morale :

Toutes les pertes, et tous les dommages qui peuvent arriver par le fait de quelque personne, soit imprudence, légèreté, ignorance de ce qu’on doit savoir, ou autres fautes semblables, si légères qu’elles puissent être doivent être réparées par celui dont l’imprudence ou autre faute y a donné lieu. Car c’est un

tort qu’il a fait, quand bien même il n’aurait pas eu l’intention de nuire 11 […]. Le défaut de s’acquitter d’un engagement, est aussi une faute qui peut donner

occasion à des dommages et intérêts dont sera tenu l’auteur. 12

tenu par le bon sens, la morale, les règlements et bien d’autres normes encore, à agir ou à ne pas agir […] », J. BELLISSENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf. R. CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, p. 337.

7 Les rapports interindividuels.

8 Ce trait caractéristique de la responsabilité civile marque sa communauté d’origine avec la responsabilité pénale. Historiquement, le droit romain et l’ancien droit français, ne procédaient pas à la distinction des deux ordres de responsabilité, voir : G. VINEY, sous la direction de J. GHESTIN, Introduction à la responsabilité, Traité de droit civil, 3e éd., L.G.D.J., 2008, p. 162. Ce n’est qu’en 1975, que l’existence d’une véritable action civile distincte d’une action publique, fut consacrée par le Code des délits et des peines (Code de Brumaire) dont l’article 5 dispose que : « L’action civile a pour objet, la réparation du dommage que le délit a causé ». L’autonomie de la responsabilité civile par rapport à la responsabilité pénale est alors acquise et fut entérinée par la codification napoléonienne de 1804.

9 M. FAURE-ABBAD, op. cit., p. 3.

10 J. DOMAT, jurisconsulte français, né à Clermont-Ferrand (1625-1696). Son œuvre intitulé, Les loix civiles dans leur ordre naturel, constitue un monument du droit civil français ; œuvre ayant influencé le Code Napoléon de 1804.

11 C’est un point qui différencie la responsabilité civile de la responsabilité pénale. La responsabilité pénale ne saurait en effet, être engagée sans l’élément intentionnel. « Il n’y a point de crime ou délit sans intention de le commettre», dit l’article 121-3 al. 1 du Code pénal.

12 J. DOMAT, Les loix civiles, Livre II, Titre VIII, Section. IV. « La maladresse est une faute technique », Cass. civ. 1ère, 7 janvier 1997, Bull., I, n° 6, p .4 ; Dalloz, 1997, p. 189, note D. THOUVENIN et rapport P. SARGOS ; en l’espèce engage sa responsabilité le chirurgien qui, au cours d’une intervention chirurgicale portant sur une côte, blesse par maladresse une artère. Dans le même sens, encourt la cassation, l’arrêt qui exonère le praticien de toute responsabilité au motif que celui-ci n’avait pas commis de « maladresse fautive ou non admissible », alors que la blessure résultait de son fait. Pour Monsieur le Conseiller P. SARGOS, toute maladresse (chirurgicale) constitue une faute et qu’il n’y aurait pas de maladresse « admissible », in rapport présenté à la Cour de cassation en 1997. Le médecin est tenu spécialement d’une obligation de maîtrise du geste professionnel, Cass. civ 1ère, 23 mai 2000, Bull., I, n° 153, p. 100. Dans le même sens, la Cour de cassation assimile la faute légère à la maladresse engageant de facto la responsabilité médicale. N’a donc pas été censuré l’arrêt de la cour d’appel ayant retenu la responsabilité d’un chirurgien, même si elle a précisé que la réalisation du dommage : perforation du colon, ne suffisait pas à engager la responsabilité du médecin dès le moment où, il a été constaté qu’à l’occasion d’une biopsie hépatique, il avait commis une erreur de trajet constitutive d’une maladresse, Cass. civ. 1ère, 13 octobre 1999, J.C.P., 2000. En somme, la maladresse constitue une « faute technique », CA Douai, 27 octobre 2011.

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En somme, constituent les comportements fautifs engageant la responsabilité

civile 13, l’imprudence, la légèreté, l’ignorance de ce qu’on doit savoir ainsi que le

défaut de s’acquitter d’un engagement.

L’intérêt de la présente étude est de comprendre la déclinaison du principe de

responsabilité civile dans le cadre de la pratique médicale à Madagascar.

2. Le principe de la responsabilité civile médicale à Madagascar. — Transposé

en matière médicale, le régime de la réparation implique le droit de la victime

d’accident thérapeutique à une compensation qui se concrétise par l’indemnisation 14.

Le médecin a des obligations à l’égard du patient dont le non-respect engage sa

responsabilité 15. En outre, conformément au principe de la responsabilité civile

délictuelle, le professionnel est susceptible de répondre aux agissements des

personnes sous son ordre 16 ainsi que du fait des matériaux nécessaires à son art 17.

Pour approfondir les règles applicables à la profession médicale, il importe de savoir

si les agissements préjudiciables dont il est question, relèvent de la faute contractuelle

13 Sur l’étude de la faute entendue comme fondement de la responsabilité civile, voir : G. VINEY,

sous la direction de J. GHESTIN, « La faute, seul fondement de la responsabilité ? », in Introduction à l’étude de droit, Traité de droit civil, 3e éd., L.G.D.J., 2006, p. 108. Parmi les traités et manuels qui traitent du sujet, figurent : R. SAVATIER, Traité de la responsabilité civile en droit français, préface de G. RIPERT, t. 1, 2e éd., L.G.D.J., 1951 n° 274 et s. ; Ph. LE TOURNEAU, avec la participation de C. BLOCH, A. GUIDICELLI, D. KRAJESKI, Droit de la responsabilité des contrats, Dalloz Action, 9e éd., 2012-2013, n° 3437 ; Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, Défrénois-Lextenso, 5e éd., 2011 n° 320 à 324 et notamment n° 323 ; J. FLOUR, J.-L. AUBERT et É. SAVAUX, Droit civil, Les obligations. 2, Le fait juridique, 14e éd., 2011, Coll. Sirey Université, Droit privé, n° 173.

14 A. BACHELLERIE, L’évolution du contentieux médical et ses conséquences sur la relation médecin-assureur, l’Harmattan, 2004, p. 10 ; G. VINEY, Traité de droit civil, sous la direction de J. GHESTIN, Introduction à la responsabilité, 3e éd., L.G.D.J. 2008, p. 77. Voir également : Les travaux du Colloque franco-germano-suisse de Bâle de 1968 portant sur les fondements et les fonctions de la responsabilité civile.

15 Le non-respect des engagements légaux constitue la faute. Ainsi retrouve-t-on, la permanence du principe de la nécessité de la faute pour engager la responsabilité médicale. La notion de « faute » est plus ou moins comprise, au besoin par le recours à des présomptions ( de type res ipsa loquitur : « la chose parle d’elle-même » ), à laquelle les tribunaux français ont été sensibles avant qu’elle ne fût officiellement abandonnée en octobre 1985, P. A. CRÉPEAU, L’intensité de l’obligation juridique ou de l’obligation de diligence de résultat (ou de garantie), Y. BLAIS, 1989, spéc. p. 221 et s., in Cours de droit médical, G. MÉMETEAU, 4e éd., Les Études hospitalières, 2010, p. 472.

16 En droit malgache, le principe de la responsabilité pour fait d’autrui est prévu à l’article 220 de la Loi sur la théorie générale des obligations ou la LTGO malgache (dite aussi TGO). En droit français, l’article 1384 dispose qu’ : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».

17 Ph. MALAURIE, L. AYNÈS ET PH.STOFFEL-MUNCK, op. cit., n° 1006. La responsabilité pour les faits des choses dont on a la garde prévue à l’article 1384 du Code civil français a pour correspondant l’article 206 de la LTGO malgache.

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ou de la faute délictuelle. En droit français, la faute médicale fut longtemps rattachée

à l’ordre délictuel mais pour des raisons pratiques que nous analyserons

ultérieurement (n° 15.), un revirement a été opéré par le célèbre arrêt Mercier 18.

Depuis l’arrêt concerné, la responsabilité médicale a rejoint l’ordre contractuel 19

(actuellement la qualification contractuelle de la relation médecin-malade subit

plusieurs revirements jurisprudentiels que nous verrons également par la suite

(n° 16).

En droit malgache, c’est la loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la théorie

générale des obligations 20 qui règlemente les agissements préjudiciables du médecin.

Sachant qu’en fonction de l’évènement à l’origine du préjudice (fait générateur), la

responsabilité civile peut être délictuelle ou contractuelle 21, la TGO a prévu des

dispositions respectives. Pour la responsabilité civile délictuelle, l’article 204 de

la TGO énonce que « chacun est responsable du dommage causé par sa faute, même de négligence

ou d’imprudence » et pour la responsabilité civile contractuelle, l’article 177 de la TGO

énonce qu’« en cas d’inexécution totale ou partielle d’une obligation contractuelle, ou d’exécution

tardive, le débiteur doit réparer le préjudice causé de ce fait au créancier ». L’article 190 la TGO

confirme quant à lui, le fondement indemnitaire de la responsabilité civile en ces

termes : « Les dommages-intérêts dus par le débiteur représentent le préjudice découlant directement

de l’inexécution de l’obligation et pouvant être raisonnablement prévu par le contrat » 22.

18 Cass civ., 20 mai 1936, D. P. 1936.1.88, concl. P. MATTER, rapp. L. JOSSERAND, RTD civ. 1936,

691, obs. R. DEMOGUE. Selon la Cour, « Il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat comportant pour le praticien l’engagement sinon bien évidemment de guérir le malade […] du moins de lui donner des soins consciencieux, attentifs et réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ; que la violation même involontaire de cette obligation est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle ».

19 J. BELLISENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf. R. CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, n° 804.

20 Loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la Théorie générale des obligations, J.O. n° 486 du 9 juillet 1966, p. 1429. Par usage, on dispose d’une double appellation de la loi relative à la théorie générale des obligations : LTGO ou TGO.

21 Un an, avant la promulgation de la LTGO, la loi n° 65-003 du 9 juin 1965 relative aux sources des obligations civiles a posé la distinction entre Acte juridique et Fait juridique. Leur violation implique respectivement la responsabilité civile contractuelle et la responsabilité civile délictuelle.

22 L’indemnité doit représenter aussi exactement que possible le dommage réel subi par le créancier ; c’est le principe de l’intégralité de la réparation. Le dommage se compose de deux éléments distincts qui sont rappelés à l’article 191, al. 1e r de TGO : la perte subie, c’est-à-dire l’appauvrissement survenu dans le patrimoine du créancier et le gain dont le créancier a été privé du fait de l’inexécution de l’obligation légale contractuelle ou délictuelle. Cette distinction est héritée du droit romain qui appelait le premier élément damnum energens, et le deuxième lucrum cessans.

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La dualité de régime de responsabilité civile (délictuelle et contractuelle) présente

l’intérêt de recourir aux dispositions adéquates. Pour autant, en matière de

responsabilité médicale, la dualité peut prêter à confusion et rend délicat le choix des

dispositions juridiques opportunes. En effet, face à un médecin ayant commis une

négligence ou une imprudence (responsabilité civile délictuelle) durant l’exercice de

son art qualifié par la doctrine de contractuel 23, la question se pose sur la disposition

législative la plus adaptée : celle correspondant à la responsabilité civile délictuelle ou

celle relative à la responsabilité contractuelle ? En définitif, dans le domaine médical,

les fautes délictuelles 24 (dans le sens d’« imprudence » et de « négligence ») qu’un

médecin peut commettre dans l’exercice de son art, correspondent aux fautes

d’inexécution ou de mauvaise exécution de ses obligations contractuelles telles

qu’elles résultent de l’article 88 25 de la TGO. L’analyse est partagée par le droit

comparé qui avance par ailleurs, la théorie de l’unité de la nature de la

responsabilité 26.

Une fois l’appréciation de la responsabilité du praticien résolue, on peut soutenir

que la loi sur la théorie générale des obligations demeure pour les justiciables

malgaches, la source de protection de leur droit et de leur intégrité physique.

Expression de la volonté du peuple 27, elle forme le domaine principal de la logique

juridique du pays 28. Dans un pays comme Madagascar où la responsabilité médicale

23 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre

CMPL, 1984, p. 14, 15.

24 Article 204 de la TGO : « Chacun est responsable du dommage causé par sa faute, même de négligence ou d’imprudence ».

25 Article 88 de la TGO : « Les obligations résultant d’un contrat ont pour objet, soit de fournir une prestation, soit de s’abstenir d’une faculté. La prestation ou l’abstention doit être déterminée ou déterminable. Elle doit être possible. Elle peut être future aussi bien que présente ».

26 P. CHARIOT et, M. DEBOUT, Traité de médecine légale et droit de la santé, éd. Vuibert, 2010, p. 549. En 1930, une théorie médiane a été proposée par A. BRUN ; la théorie de « compromis » laquelle, suppose l’unité de la nature des deux ordres de responsabilité, in Rapports et domaines des responsabilités contractuelle et délictuelle, Th. Lyon 1931.

27 En 1959, l’Assemblée nationale législative, à la suite d’un long débat sur la codification des coutumes adoptait la résolution suivante : « L’Assemblée nationale législative demande au gouvernement de tenir compte, dans la mesure du possible des règles coutumières à chaque province, en attendant l ’extension et l’application à l’ensemble du pays d’une législation unifiée adaptée aux usages des différentes populations de Madagascar et acceptée par elle afin d’aboutir à l’établissement d’une législation moderne, conforme à la volonté d’évolution et de progrès du peuple Malgache. » . Cette législation n’est autre que la Loi sur théorie générale des obligations, A. RAMANGASOAVINA, Rapport de synthèse sur l’état des personnes, Tananarive, l962, p. 1.

28 S. RANDRIANAHINORO, op. cit., p. 19-20.

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n’est pas encore formalisée à travers une loi spécifique 29, la loi sur la théorie générale

des obligations ou la LTGO, occupe une place capitale. La LTGO établit un cadre

juridique malléable pour gérer les obligations juridiques à l’issu d’un fait ou d’un acte

juridique 30. L’application de la loi sur la théorie générale des obligations au domaine

de la responsabilité médicale, se matérialise par le principe selon lequel aucune

personne ne peut échapper à sa responsabilité si son activité a entraîné un dommage

pour autrui 31. En effet, en application des articles 51 32 et 53 33 de la TGO, tout

débiteur est tenu de s’acquitter de ses obligations à l’égard du créancier lequel, en cas

d’inexécution, peut faire appel à la force sociale organisée. Dans un premier temps,

l’exécution forcée se matérialise par une exécution en nature. Le créancier est d’abord

en droit de recevoir la même chose dont il avait été « amputé » 34. C’est seulement

lorsque l’exécution en nature est rendue impossible, qu’il devra se contenter de

recevoir une prestation équivalente. L’exécution par équivalence consiste

normalement en une somme d’argent, que l’on appelle dommages-intérêts 35.

Le devoir d’exécuter des prestations dont on est professionnellement tenu, répond à

un refus social de voir un corps de métier quel qu’il soit, être à l’abri de toute action

en justice en raison d’une compétence présumée sans faille. De surcroît, en matière

de soins aux personnes, il est difficile de passer sous silence la question de la

responsabilité juridique. Le droit français insiste sur le droit à réparation en cas de

préjudice corporel issu d’un accident médical. Étant donné qu’il s’agit d’intervenir sur

29 Si de nombreux droits en faveur des malades ont été établis en France […] grâce à l’évolution

des esprits et que les intérêts portent sur des sujets comme la responsabilité médicale, l’obligation d’information supposant le consentement des malades ou encore la question de fin de vie, à Madagascar, ces sujets sont aujourd’hui au stade de conception, donc fragiles, voir : B. N. RICHARD et V. JULIEN, Consécration règlementaire : Des droits des malades à Madagascar, R.D.S., septembre 2005, n° 7, p. 439.

30 Ph. DELEBECQUE, L’actualité de la théorie générale des obligations malgache (TGO), in, Mélanges en l’honneur du Professeur A. Raharinarivonirina, Éditions Jurid’ika, 2010 et L’Harmattan, 2010, p. 187 et s.

31 D. THOUVENIN, La responsabilité médicale, Analyse des données statistiques disponibles et des arrêts rendus par la Cour de cassation et le Conseil d’État de 1984 à 1992, éd. Médecines-Sciences Flammarion, 1999, p. 2.

32 Article 51 : « Le débiteur est tenu d’exécuter son obligation dès lors que le créancier le prouve […] ».

33 Article 53 : « Lorsque le débiteur n’exécute pas l’obligation, le créancier peut le contraindre par toutes voies de droit ».

34 Dès lors, on retrouve, l’idée de compensation ou de dédommagement octroyé afin de remédier à une perte, soit le principe de la responsabilité civile, article 1382 du Code civile français.

35 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, Edition du centre malgache de promotion du livre CMPL, 1984 p. 11.

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le corps humain 36, il est difficile d’admettre qu’une atteinte 37 sur ce corps, même

involontaire, n’aie pas de réponse juridique 38. Il serait en effet, inadmissible que le

médecin soit préservé des lois applicables à tout citoyen 39. Autrement formulé, si le

praticien commet une faute dans l’exercice de son art, c’est à juste titre que lui soit

appliquée la règle régissant la responsabilité civile fondée sur la notion de faute 40.

Ainsi, par le biais de la loi sur la Théorie générale des obligations ( TGO ),

contrairement aux idées reçues 41, le « vide textuel » 42 ne saurait-être invoqué pour

justifier les lacunes en droit de la responsabilité médicale à Madagascar 43. Mais, le

36 « La relation médicale touche au corps et la vie, aux mystères de l’être », Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et

Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, éd. Défrénois-Lextenso, 2e éd., 2004 n° 321.

37 L’atteinte à l’intégrité physique dans le sens de dommage corporel peut s’agir de blessures plus ou moins graves et à plus forte raison de décès, Y. LAMBERT-FAIVRE, S. PORCHY-SIMON, Droit du dommage corporel, système d’indemnisation, 6e éd., 2009, Dalloz, n° 2 et s. ; Y. LAMBERT-FAIVRE, Le droit et la morale dans l’indemnisation des dommages corporels, Dalloz 1992, Chron. p. 165 et s.

38 L’article 16 du Code civile dispose à cet effet que : « la loi assure la primauté de la personne ». Et que « Chacun a droit au respect de son corps » ; article 16-1 du même Code. Dans le même sens, Ph. MALAURIE et L. AYNÈS, disent : « La relation médicale touche au corps et à la vie, aux mystères de l’être, […] le médecin ne peut être considéré comme un simple prestataire de services », in Les obligations, Défrénois-Lextenso, 5e éd., 2011. Les études sociologiques révèlent également cet impératif de réparation des dommages corporels en évoquant que nos sociétés « ont une aversion forte à l’égard des risques résiduels », PERETTI-WATEL, Sociologie du risque, Repères, La Découverte, 2010, p. 45 et s. Il en résulte une difficulté à admettre que le hasard et la fatalité puissent justifier qu’un dommage reste sans réparation. Ainsi, la majorité des individus n’admette plus le fait qu’une atteinte portée au corps reste sans réparation intégrale. Voir aussi G. DEVERS, Retour sur la responsabilité, Droit et déontologie du soin, Rev. Trim., décembre 2009, Vol. 9, n° 4, p. 393.

39 J. F. LEMAIRE, J. L. IMBERT, La responsabilité médicale, Puf, Coll. « Que sais-je ? », n° 2200, 1985, p. 9. Pour Monsieur le Conseiller P. SARGOS, toute maladresse chirurgicale constitue une faute et que la maladresse « admissible » ne saurait exister, in rapport présenté à la Cour de cassation en 1997 ; dans le même sens, G.VINEY, L’indemnisation des accidents médicaux, L.G.D.J., Actes du colloque du 24 avril 1997, organisé par le Centre de droit des obligations de l’Université de Paris I, p. 3.

40 H., L. MAZEAUD, par A. TUNC, Traité théorique et pratique de la responsabilité délictuelle et contractuelle, 6e éd., Paris, Monchrétien, 1965, n° 36 et s.

41 Si la doctrine africaine constate qu’« En Afrique, le médecin n’est soumis à aucune exigence légale précise et spécifique relative au droit du patient », S. THIAM, La déontologie médicale et la tradition africaine, approche anthropologique sur le rapport médecin-patient, in La déontologie médicale, Actes du Ve Colloque national, Droit, Histoire, Médecine, Aix-en-Provence, 1er et 2 décembre 2006, sous la direction d’A. LECA, P.U. d’Aix-en-Provence 2007, p. 353 ; le fait même de disposer une loi relative aux obligations, donne un cadre juridique à l’activité médicale.

42 F. VIALLA, Les décisions du droit médical, éd. L.G.D.J., Lextensoéditions, 2009, p. 1.

43 D’ailleurs, dans la perspective de proposer de loi relative à la responsabilité médicale à Madagascar, il est intéressant de prendre en considération quelques réflexions de certains éminents juristes français : PORTALIS avertit : « Il ne faut point de lois inutiles ; elles affaibliraient les lois nécessaires (en l’occurrence pour Madagascar, la loi nécessaire est la TGO) ». Et le Doyen CARBONNIER implore de ne pas légiférer qu’en tremblant. Enfin MONTESQUIEU dans son ouvrage Les Lettres persanes de 1721 (commentaire fait par J. CHARPENTIER et MICHEL CHARPENTIER, éd. Nathan, 1993), pose une réflexion philosophique sur la relativité des lois en raison du contexte socio-culturel. D’après le roman, les us, coutumes et règles régissant le quotidien d’une société

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voudrait-elle, la loi ne peut se porter garante de l’effectivité des dispositions qu’elle

stipule 44. Cette tâche incombe aux autorités ayant qualité pour appliquer et

interpréter la loi 45, c’est-à-dire, les juges. Concernant l’application du droit médical

par le juge, la réalité jurisprudentielle à Madagascar, atteste que des efforts restent à

réaliser.

3. La réalité jurisprudentielle de la profession médicale à Madagascar. —

Il est possible de constater que les actions tendant à mettre en cause la responsabilité

des professionnels de santé ou des établissements de santé à l’occasion d’actes de

prévention, de diagnostic, n’a jamais été reconnue explicitement en droit coutumier

malgache ; pas plus que dans la pratique du « droit commun » (la TGO).

Ce phénomène s’explique par le fait que le droit traditionnel (coutumier) ne se

permettait pas d’établir de théories générales d’obligation pour le domaine relatif à la

santé car perçu comme un élément fluctuant. En effet, face à une donnée non

maîtrisable par l’homme qu’est la « santé », l’institution judiciaire traditionnelle ne se

lancait pas à incriminer publiquement le « guérisseur ». L’arrivée des médecins

européens et missionnaires vers le XVIIIe siècle, a certes initié une avancée de la

règlementation de la pratique médicale (voir n° 7) mais très vite, on a compris que

sur la question, il y a eu constamment tiraillement, dans l’esprit des juges. Ils sont

partagés entre le refus d’apprécier juridiquement des faits relevant de la métaphysique

et la culpabilité professionnelle du fait de laisser passer des violations à l’intégrité

physique des patients. Autrement dit, d’une part, il y a le refus de sanctionner les

sujets de droits sur des apparences et, d’autre part, la nécessité de protéger les

patients contre un comportement dangereux 46. La réticence de condamner des faits

surnaturels a été particulièrement affirmée sur le plan pénal 47. Malgré le rôle des

donnée (en l’occurrence, les us et coutumes des occidentaux attirant l’attention de deux étrangers persans, voir : analyse de B. DE BAERE et L. ROVEDA, La satire dans Les lettres persanes, Université Gent Belgique, 2006-2007), qui sont à priori jugés intéressants peuvent au final être remis en question. Cette analyse sur la relativité des mœurs est reprise par MONTESQUIEU dans De l’Esprit des lois, 1758.

44 Formule inspirée des notes de F. VIALLA, in Les décisions du droit médical, éd. L.G.D.J., lextensoéditions, 2009, p. 1.

45 Ibid.

46 Voir : RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de Madagascar-Droit, volume 8, p. 19.

47 Ceci étant, en 1960 le législateur prend tout de même l’initiative de prendre un texte réprimant les comportements de certains individus se prévalant d’être investis de pouvoirs surnaturels et donc disposés à intervenir librement, sur l’état de santé de ses semblables. Entre alors en vigueur, l’ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 portant répression de toutes pratiques de charlatanisme, V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université

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parquets 48, les juridictions ont émis beaucoup de conditions avant d’asseoir leur

verdicts. Dans le cadre de l’ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 portant

répression de toutes pratiques de charlatanisme, les juridictions ne se sont pas

contentées de l’élément moral 49 pour décider d’une condamnation. Dans un premier

temps, elles ont exigé en plus, un acte matériel consistant en l’usage sur la victime

d’une atteinte réelle troublant l’ordre public. Alors pour entrer en condamnation, il

ne suffisait pas à la partie demanderesse, d’établir la relation de cause à effet entre

l’acte et l’atteinte, c’est-à-dire, la preuve des faits occultes, encore fallait-il qu’elle

établisse que leur pratique soit susceptible de troubler l’ordre public et de porter

atteinte aux personnes 50. De cette première étape où les juridictions n’ont fait que

mettre en œuvre les principes généraux du droit pénal, il en résultait de nombreux

acquittements 51. Une des rares inculpations qu’on a pu matériellement retenir 52

concerne des individus qui prétendaient guérir une femme sujette à de convulsions

soi-disant provoquées par un esprit. En brandissant sur elle des tisons, ils

provoquèrent la mort par brûlure et asphyxie 53. Peu à peu, les magistrats ont pris

conscience que beaucoup de pratiques illégales d’actes de soins échappaient à la

répression. Ils n’ont plus alors exigé le caractère manifestement offensif de l’acte

pour pouvoir incriminer. Dès lors qu’un effet préjudiciable a été constaté,

l’incrimination est possible. Avec la disparition de l’exigence du caractère dangereux

des moyens mis en œuvre, s’efface également le lien de causalité. La dernière étape

effectuée par les juridictions en vue de sanctionner les pratiques illégales de soins, fut

celle où la preuve des faits occultes suffise à elle seule pour asseoir un jugement. Le

de Madagascar-Droit, volume 8, p. 3. Sur la question de pratiques occultes, voir : M. RAMALANJAONA, étude parue dans Penant, 1967, n° 718 et n 719.

48 Le Ministère public prenant en charge de la défense de l’intérêt de la collectivité.

49 La preuve de l’intention de nuire.

50 On remarquera que « trouble à l’ordre public » et « atteinte à l’intégrité aux personnes » sont liés par la conjonction « et » et non « ou » ; il s’agit donc là d’une condition exhaustive. Cela complique considérablement la tâche du Ministère public, lequel se retrouve obligé d’apporter simultanément, la preuve de deux faits (atteinte à l’intégrité de la personne et trouble à l’ordre public). Toutefois, on remarquera qu’il n’est pas exigé que la pratique sanctionnée ait réellement causé les faits incriminés, il suffit qu’elle eut été susceptible de les causer, voir : V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de Madagascar-Droit, volume 8, p. 6.

51 Mais peu à peu, devant les multiplications de certains phénomènes inexplicables aboutissant souvent à des situations tragiques, les juridictions ont fini par entrer en condamnation, V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de Madagascar-Droit, volume 8, p. 19.

52 En raison de la difficulté matérielle d’accès aux documents.

53 V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, arrêt inédit, p. 7.

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caractère de dangerosité, de trouble à l’ordre public, d’atteinte aux personnes et

d’effet préjudiciable ne sont plus exigés. Avec cette logique, l’inculpé peut avancer

l’hypothèse d’infraction impossible 54 pour échapper à la répression. Pour y remédier, le

législateur a décidé que du moment où l’acte est susceptible de produire effet, le délit

est constitué. Bref, il n’est plus question de faute avérée du prévenu et encore moins

de lien de causalité. On se retrouve sur le terrain de l’infraction virtuelle 55 supposant

une responsabilité objective 56.

Si la législation pénale a fortement contribué à l’affirmation du droit médical à

Madagascar, elle n’en est pas l’unique. Outre les manifestations prétoriennes récentes

que nous verrons ultérieurement (n° 103), les pratiques coutumières 57 n’étaient pas

moins indifférentes devant l’échec d’un acte médical.

4. La conception traditionnelle de la responsabilité médicale. — Dans la

conception ancestrale malgache, les maladies sont produites par les maléfices jetés

par quelqu’un de la maison (mosavy an-trano) ou par des faiseurs de sortilèges à travers

ce que l’on mange. La maladie tout comme la mort, n’est pas naturelle. Si par

exemple, un membre de la famille tombe brusquement malade, s’il a des coliques, de

la fièvre, de l’ictère, ou de la lèpre, il ne faut pas chercher ailleurs la cause que dans un

sort jeté par le sorcier 58. Pareil, si une personne est brusquement prise de

convulsions (d’ambalavelona), de contractions tétaniques (ramanenjana), d’épilepsie

54 Terme pénal signifiant une tentative infructueuse, une infraction manquée

55 V. RAMANITRA, op. cit., p. 9.

56 Responsabilité objective dans le sens de « responsabilité de plein droit », voir : G. VINEY, Traité de droit civil, sous la direction de J. GHESTIN, Introduction à la responsabilité, 3e éd., L.G.D.J. 2008, p. 29. G. VINEY parle de « l’affaiblissement du rôle de la faute dans la mise en œuvre de la réparation ». Sur le même sujet, voir : G. RIPERT, La règle morale dans les obligations civiles, 4e éd., L.G.D.J., 1949, n° 89 et s., R. SAVATIER, Les métaphores de la responsabilité, sixième Journées R. SAVATIER, Poitiers le 15 et 16 mai 1997, Puf n° 277 et s., A TUNC, La responsabilité civile, 2e éd, Paris Économia, Coll. Études juridiques comparatives, 1989, p. 2.

57 De nombreuses doctrines ont tenté de décrire la coutume : « La coutume exprime avec le maximum d’authenticité les aspirations, les goûts, les tendances des hommes qui l’ont patiemment forgée », P. CHEVALLIER, Introduction à l’étude de droit coutumier malgache, http://madarevues.recherhces.gov.mg. ; elle est « La source la plus ancienne du Droit, chez tous les peuples (mos majorum, consuetudo°) » ; R MONIER, Histoire des institutions et des faits sociaux, des origines à l’aube du Moyen âge, Paris 1955, p. 193 ; « La coutume est l’ensemble d’usages déjà pratiqués par les Ancêtres, qui se transmettent oralement, à une époque où l’écriture est inconnue, ou du moins, peu répandue. D’après le jurisconsulte ULPIEN, « La coutume tire sa force obligatoire, de ce qui a été en vigueur pendant longtemps et avec le consentement tacite de tous». En somme, la coutume est un corpus de principes bien élaboré. Elle est le fruit de l’expérience et le génie de plusieurs générations. Ainsi par essence, la coutume fait partie intégrante de l’évolution de la société.

58 V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de Madagascar-Droit, volume 8, p. 19.

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(androbe) ou d’hystérie (le tromba) c’est certainement le fait du sorcier 59. La maladie et

l’échec d’un acte de soin s’expliquent également par le mépris des Ancêtres suite à

une transgression des tabous (non-respect des interdits) 60. Et dans l’hypothèse où

aucun reproche ne peut être établi à l’égard de celui dont la santé est altérée, l’échec

des soins trouve sa raison dans l’oubli des rituels qui auraient dû être observés :

cérémonie préparatoire, offrande… Partant, la faute incombe à la victime 61.

La conception surnaturelle de la maladie oblige le malade et sa famille à recourir

au guérisseur ou au devin (mpisikidy) qui sont présumés être investis du pouvoir

d’expier le sort 62. Le devin va consulter le sikidy 63 (divination, magie) qui est un

moyen de prédire les causes de la maladie et les remèdes (ody) à y apporter. L’œuvre

59 Ibid., p. 19.

60 B. N. RICHARD, Hôpital et système de santé à Madagascar, l’Harmattan, 2005, p. 16. « Si les vivants se dérobent à leurs devoirs envers les Ancêtres, ils s’attireront des malheurs, d’où la nécessité de respecter scrupuleusement les règles cultuelles destinées à apaiser les mânes (les âmes) des Ancêtres, à se les rendre favorables, à obtenir leur aide et leurs conseils par des sacrifices appropriés », P. CHEVALLIER, Introduction à l’étude du droit coutumier malgache, http://madarevues.recherhces.gov.mg, p. 97.

61 Il arrive que la faute de la victime contribue à la réalisation du dommage ou en constitue la cause exclusive. Si la victime est la seule responsable de son dommage, elle n’a droit à aucune indemnisation. En revanche, si sa responsabilité concourt avec celle du défendeur, on procède à un partage de responsabilité. Le droit romain adoptait sur ce point, une position absolue à travers la règle dite pomponienne (formulée par le jurisconsulte Pomponius). La règle pomponienne interprétée en latin Quod si quis ex culpa sua sentit, non intelligitur damnun sentire, consiste à dire qu’un demandeur est déchu de son droit à réparation dès qu’une irrégularité est susceptible de lui être reprochée. Autrement dit, du moment où la victime participe par sa faute à la réalisation du dommage, elle ne peut rien réclamer, même si sa faute n’a été que l’une des causes du dommage. Avec, le développement de l’individualisation de la responsabilité et de l’atténuation des mécanismes de présomption de responsabilité, la règle pomponienne a été écartée. Dans un arrêt rendu le 17 janvier 2008, la Cour de Cassation rappelle les effets de la faute de la victime dans le domaine médical : « Seule une faute du patient peut exonérer, totalement ou partiellement, le praticien de sa responsabilité. », Cass. civ 1ère . 17 janvier 2008, Q MAMER, N. GOMBAULT, C. PALEY VINCENT, La faute de la victime, cause exonératoire de responsabilité du médecin ?, in. Responsabilité, revue de formation sur le risque médical, septembre 2009, p. 9 à 11. La faute de la victime revêt un intérêt particulier lorsque la responsabilité du défendeur est présumée ; elle permet de combattre la présomption. Ainsi, présente-t-elle, un intérêt pratique considérable ; d’autant plus qu’il n’est pas rare que la victime ait, par sa maladresse, contribué au dommage, M. HALLER, Essai sur l’influence du fait et de la faute de la victime sur le droit à réparation, Th. Paris, 1926.

62 L’attendu d’un arrêt de la Cour d’Appel de Tananarive en date de 1960, relate quelques détails permettant d’identifier les actes du devin guérisseur : « Attendu qu’il est établi que M. X., après avoir consenti à guérir Mme Y., est allé chercher dans la forêt des plantes qu’il fait cuire et données sous forme de bouillon au patient, qu’ayant marqué une croix les articulations, l’épigastre, les tempes et d’autres parties du corps de l’intéressé avec la poudre d’une plante obtenue par frottement, il a provoqué la guérison instantanée du malade… ».

63 Le sikidy consiste à l’interprétation de graines disposées suivant des règles compliquées. L’interprétation de l’arrangement des graines indique en outre, tout ce qu’il faut observer pendant le traitement (cérémonie préparatoire, offrande…).

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du guérisseur conçue comme l’œuvre de Dieu 64 le mettait à l’abri de tout reproche

pour faute 65. Pour cette raison il n’a pas été aisé de traiter l’indemnisation dans le

droit coutumier.

5. Les modalités d’indemnisation de l’époque —. Il a été extrêmement difficile

de trouver des traces de contentieux médical dans l’ancien droit malgache66. Aussi, il

a fallu dans un premier temps dégager l’esprit général du droit coutumier en matière

de réparation. Le déploiement de la réparation repose sur une double tradition

coutumière, à savoir, la primauté accordée aux anciens et le rôle conféré aux groupes

sociales intermédiaires que sont les Fokonolona 67.

Concernant les anciens, en particuliers les Ancêtres que les malgaches nomment

Razana ; ils restent présents dans l’esprit collectif et ils constituent l’instance morale

supérieure dont la personnalité réclame l’obéissance la plus déférente des vivants. Si

ces derniers se dérobent à leurs devoirs, ils risquent de s’attirer des malheurs, d’où la

nécessité de « réparer » en cas de comportement offensif. Concrètement, cela

implique de multiplier les sacrifices de réparation dont l’importance est

64 Malgré les coutumes diverses et particulières du peuple malgache, le pays véhicule une même

croyance, l’existence d’un Dieu Unique que le peuple nomme Andriamanitra (littéralement le Roi parfumé) et à l’intercession des Ancêtres ou Razana, http://r.doziere.pagesperso-orange.fr.

65 Dans l’histoire du droit médical français, il fut un temps où la spiritualité et la médecine ont été souvent mêlées. On pense en particulier au rôle tenu par certains personnages dans les civilisations anciennes, tels les druides, les guérisseurs et autres rois thaumaturges ; « Dans l’antiquité, les hommes pour guérir leurs maux, imploraient l’assistance de la divinité et celle des médiateurs sur la terre : les prêtres. Il ne leur serait point venu à l’esprit de demander à ces prêtres réparation d’une faute commise contre une science qui était un privilège sacré » P. NEGRE, La responsabilité civile dans la pratique de la médecine, Th. Aix-Marseille, éd. Bosc frères, M. et L. Riou ; Lyon 1939, p. 1 et s.

66 En étudiant les pratiques coutumières de l’époque, a pu être établi, l’inventaire des règles constituant l’ancien droit malgache (règles qui ont été très vite influencées par le droit français) : l’état des personnes (état civil), les contrats, l’enregistrement des actes de toute nature, le droit d’immatriculation, le droit des successions qui règlemente et modifie l’ordre des successibles ; il traite en outre, le régime matrimonial du « Kitay telo an-dalàna » dans décret du 5 novembre 1909 ; H. VIDAL, La Cour d’Appel d’Antananarivo et les coutumes de 1897 à 1960, p. 27, 28. Pour information, le « Kitay telo an-dalàna »signifie la règle des tiers des acquêts communs, c’est-à-dire qu’en en cas de séparation, les bien acquis pendant le mariage (les acquêts) sont répartis de 2/3 pour le conjoint et de 1/3 pour la conjointe. Aujourd’hui la règle qui s’applique est le « Zara-mira », les biens communs reviennent aux deux conjoints pour moitié. On remarquera, que l’inventaire ne relève aucune mention relative à l’encadrement normatif de l’activité médicale.

67 Les anciens tant vivants que morts représentent pour les malgaches le socle de la cohésion sociale et la référence par rapport à la notion de parenté. Quant au « Fokonolona » constitué de groupement de personnes composant une ethnie, elle représente une institution sociale régulatrice de la vie des personnes par le biais de ses représentants, voire P. CHEVALLIER, op. cit., p. 96.

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proportionnée à la gravité de la faute 68. Dans les cas les plus habituels, quelques

volailles immolées et de quelques invocations sobres vont suffire. Le vrai sacrifice

concerne les bœufs; ils tiennent une place dominante dans les cultes malgaches 69.

Dans l’ensemble, l’estimation du sacrifice correspond à l’étendue réelle de l’offense

subie par la victime, en l’occurrence les anciens. C’est l’application du principe de la

« réparation intégrale » 70.

Après les anciens, la deuxième entité qui intervient dans la mise en œuvre de la

réparation est le Fokonolona 71. Le Fokonolona est une forme de collectivité

intermédiaire entre les anciens et le peuple dont les membres sont considérés comme

de véritables juridictions traditionnelles. Ils forment les instances garantes de

l’effectivité des rites sacrificiels 72. En tant que garants de la paix sociale 73,

les membres du Fokonolona privilégient le rétablissement de l’équilibre rompu en cas

d’offense vis-à-vis des anciens. A cet effet, ils s’assurent que le responsable ait

accompli son devoir de réparation, soit la compensation en nature (bœufs, produits

alcoolisés, poulets) 74. De toute cette réalité sociologique, on peut dire qu’en cas de

contentieux médical, le Fokonolona en sa qualité de garant de l’équilibre social 75, va

68 H. DUBOIS, La Religion malgache, Essai de synthèse, extrait de l’ouvrage consacré à Madagascar par les

Cahiers Charles de Foucauld, Paris 1950, p. 97.

69 Ibid.

70 Le droit civil français va dans le même sens. À travers le principe du rétablissement de l’équilibre rompu, la Cour de cassation française a depuis longtemps, défini l’objet de la responsabilité civile. Pour elle, Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se trouverait si l’acte dommageable ne s’était point produit. Cass. civ 2e, 1er avril 1963, D., 1963, p. 453, H. MOLINIER ; J.C.P. 1963-II-13408.

71 « Fokonolona » signifie groupement de personnes composant une ethnie.

72 Dans une civilisation très attachée au formalisme (dans le sens protocolaire) et où le droit est resté essentiellement oral, les représentants du Fokonolona (Ray aman-dReny, Olondehibe) en tant que figures de notables, sont des témoins indispensables lors de la conclusion d’acte juridique.

73 En toutes circonstances les membres du Fokonolona, doivent assistance et protection à la Société, A. DANDOUAU, Manuel de géographie de .Madagascar, Paris, 1920, p. 57.

74 P. CHEVALLIER, op. cit., p. 97.

75 Le Fokonolona a de nombreuses attributions : chargé de la police du quartier, prête son concours en cas d’événements calamiteux, veille à la salubrité et à la sécurité de la collectivité, prend en charge les infrastructures, sert d’arbitre dans les affaires qui lui sont soumises. Même si sa fonction reste variable, quelques principes communs s’en dégagent : le Fokonolona est le gardien traditionnel de la paix des familles et il est chargé d’arbitrer les conflits. Il est compétent pour trancher sur de nombreuses causes aussi importantes que le mariage, la répudiation, le divorce, la filiation, l’adoption et le rejet d’enfant, la vente, l’installation sur une terre appartenant à la communauté, l’admission de gens venus de l’extérieur et la mise en culture de nouveaux domaines. Pour aller plus loin, voir les textes capitaux de la période coloniale sur le Fokon’olona : le décret du 9 mars 1902 portant organisation de l’Administration indigène de l’lmerina, et l’ordonnance n° 60-173 du 3 octobre 1960 sur les dinampokonolona (contrat social) qui attribuent

…/…

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solliciter l’auteur du fait dommageable, à apporter une contribution en nature au

profit de la victime. Si la réparation en nature participe considérablement au respect

des victimes souvent repliées sur elles-mêmes, le besoin d’instaurer des sanctions à

caractère répressif s’est aussi exprimé.

6. Option pour la sanction répressive. — Les pratiques médicales ont commencé

à être réglementées au XVIIe siècle quand la justice royale a pris le dessus sur la

justice clanique. Si, généralement, la justice clanique se basait sur le principe de

réparation en nature, la justice royale faisait preuve d’une philosophie plutôt punitive

axée sur le châtiment corporel 76 vis-à-vis de toute pratique médicale mettant en

danger la santé des personnes. C’est ainsi que le Roi Andrianampoinimerina (1745-

1810, Roi de 1787 à 1810) a instauré l’épreuve du tangaina 77 pour l’autorisation

d’exercer de la profession médicale. Cette épreuve consistait, pour les prétendants

guérisseurs, à boire un breuvage élaboré à partir des feuilles d’une plante mortelle.

Ceux qui avaient supporté victorieusement le défi avaient la permission d’exercer la

fonction de guérisseur. Le tangaina attribuait à l’époque, l’équivalence d’un diplôme

d’État de docteur en médecine octroyant une légitimité à l’exercice de la profession

médicale. Bref, l’épreuve du tangaina attribuait une légitimité à la profession de

guérisseur. Que le tangaina repose sur des croyances ancestrales et non sur des

données acquises de la science, n’enlève rien à l’intérêt préventif et normatif qu’il

représente. La réussite de l’épreuve du tangaina tout comme l’obtention du diplôme

d’État permettant de sélectionner les « bons médecins » 78, atteste la qualité du vrai

guérisseur 79. Cet aspect sélectif lui confère une fonction de régulateur. En outre, le

tangaina présente un aspect préventif dans le sens où la dangerosité de l’épreuve

permet une élimination naturelle 80 des faux guérisseurs. Si, toutefois, ces derniers

force exécutoire aux conventions collectives. Pour aller plus loin voir L. SERMET, Une anthropologie juridique de Droits de l’homme. Les chemins de l’océan Indien de L. SERMET, p. 115.

76 B. N. RICHARD, Hôpital et système de santé à Madagascar, l’Harmattan, p. 18.

77 Le « tangaina » est une plante à sécrétion mortelle que l’on trouve dans les campagnes malgaches.

78 Par la certification de la compétence professionnelle de l’impétrant. « La garantie du public réside dans les études et les épreuves par lesquelles, doivent passer les docteurs pour obtenir leurs diplômes », Docteur DOUBLE, Rapport lu à la séance de l’Académie de médecine le 28 septembre 1829. En droit malgache, en application de l’article 72 du Nouveau Code de la santé publique, « Nul ne peut exercer la profession de médecin, d’acupuncteur (trice), d’odontostomatologiste et de sage-femme s’il n’est de nationalité malagasy, titulaire des diplômes ou certificats requis, reconnus par l’État malagasy, et inscrit au Tableau de l’Ordre ».

79 La réussite d’une épreuve aussi éminemment dangereuse que le tangaina présume que le monde des Ancêtres a accepté à l’impétrant, la qualité de guérisseur. Autrement dit, sans l’aval des Ancêtres, il est impossible de réussir l’épreuve du tangaina.

80 Ne pas se hasarder à tenter une épreuve de nature mortelle.

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persistent à exercer l’activité de guérisseur sans passer par ce type d’épreuve, une

sanction morale équivalente à l’exercice illégal de la médecine 81 persiste. En somme,

l’institution de l’épreuve du tangaina a doté l’exercice de la profession de guérisseur

d’une note règlementaire.

7. L’encadrement de la médecine traditionnelle avec l’avènement de la

médecine « moderne ». — Entre 1810 et 1880, sous Radama 1er, divers médecins

européens et missionnaires avaient formé des disciples. Parallèlement, la médecine

traditionnelle continuait de profiter d’un grand prestige. La médecine moderne étant

régie par la législation européenne, son exercice à Madagascar l’était de la même

manière. Quant aux médecins autochtones exerçant la médecine moderne, ils étaient

rattachés à l’Assistance Médicale Indigène (AMI) 82 et de fait, ils ont le statut de

fonctionnaire de l’État colonial donc soumis au droit français. Cette règle reste

cependant discutable dans la mesure où, le législateur européen s’est toujours

prononcé en faveur des institutions coutumières, de telle sorte que l’exercice de la

médecine tant traditionnelle que moderne (exercée par les autochtones) 83, restait

sous l’égide du droit coutumier lequel est composé d’un compromis de justice

clanique traditionnelle (fitsaram-pokonolona) et de justice royale (fitsaran’andriana). En

effet, d’après la logique du législateur européen, la loi applicable aux médecins

malgaches était le droit coutumier exercé par l’autorité royale. En 1881, le Code des

305 articles 84 a restreint l’étendue du pouvoir juridictionnel clanique au profit de la

justice royale. L’ingérence du pouvoir royal progresse davantage, le souverain s’est

81 L’infraction d’exercice illégal de la médecine est prévue à l’article 39 de l’ordonnance n° 62 072

du 29 septembre 1962 portant codification des textes législatifs concernant la santé publique, modifiée par le décret n° 2012-0632, portant Code de déontologie médicale, voir : article 15 du décret prévoyant l’interdiction de l’exercice illégal de la médecine.

82 L’Assistance Médicale Indigène ou l’AMI est une institution hospitalière mis en place par le Général Gallieni en 1895. Elle répond à une mission de soin des malades, de lutte contre les endémies et les épidémies et de promotion de la natalité face au taux de mortalité infantile très élevée, voir : B. N. RICHARD, Hôpital et système de santé à Madagascar, l’Harmattan, 2005, p. 22 à 30.

83 Autant le droit applicable aux soignants pratiquant la médecine traditionnelle, paraît clair : le droit coutumier ; autant le droit applicable aux professionnels exerçant la médecine moderne à cette époque est difficile à trancher.

84 Les dispositions du Code des 305 articles ont été implantées petit à petit dans les deux tiers de l’île soumis aux rois merina. Pour le tiers restant, elles ne se font sentir que d’une manière parcellaire et épisodique ; les coutumes locales étant prédominantes, voir : P. CHEVALLIER, op. cit., p. 89-9. Voir : aussi, E.P. THÉBAULT, Le Code des 305 articles promulgué par la Reine Ranavalona II le 29 mars 1881, texte malgache intégral, éd. Imprimerie officielle Tananarive, 1960. Pour des raisons de commodité, le Code des 305 articles a été répandu dans l’ensemble des tribunaux de la Grande Île. La France a ainsi étendue le droit merina dans des régions qui jusque-là, l’ont ignoré. Bien qu’établies en vue d’une armature à l’organisation du royaume, le Code des 305 articles s’inspire plus ou moins de modèles européens.

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réservé les affaires les plus graves touchant l’ordre public. Il est le juge d’attribution

des « douze crimes capitaux » qu’on peut regrouper en trois types d’infractions : la

rébellion contre le pouvoir en place, le vol important et l’atteinte à l’intégrité

corporelle. Cela implique en ce qui concerne le régime juridique du guérisseur que le

manquement au devoir de soins consciencieux à l’égard du patient, est constitutif

d’atteinte à l’intégrité corporelle passible devant la juridiction royale.

8. L’ancien droit malgache offrait ainsi à l’activité médicale un cadre

juridique digne de son temps en matière de responsabilité professionnelle. Il

précise successivement la compensation en nature et la réparation d’ordre pénal pour

violation de l’intégrité physique. En 1896, l’avènement du droit français a

profondément bouleversé ce paysage juridique.

9. La pénétration du droit français dans un pays à prédominance coutumière. —

Le système traditionnel a dû composer avec l’avènement d’un nouveau système

juridique : le système « colonial ». L’ère coloniale est marquée par un système

juridique dualiste : à côté du régime de droit français applicable aux colons, se met en

place une justice indigène 85, présidée par les administrateurs français 86. Les affaires

entre malgaches 87 sont mentionnées par le décret du 9 juin 1896. Au départ, ces

affaires échappaient à la censure de la cour d’Appel qui reste étrangère aux procès

entre malgaches. En novembre 1896, le général Galliéni 88 crée une hiérarchie des

tribunaux indigènes 89. La cour d’appel de Tananarive reçoit désormais les appels sur

les décisions rendues par les tribunaux du second degré. Les magistrats français ont

85 Article 16 du décret du 9 juin 1896 : « Les Tribunaux indigènes institués par la législation locale sont

maintenues. Ils connaissent conformément aux dispositions de la législation locale, de toutes les affaires civiles ».

86 B. BRUNET-LA RUCHE décrit la structure des justices indigènes à travers le cas du Bénin, de Madagascar, et bien d’autres pays africains en ces termes : « […]. Il s’agit tout d’abord de l’absence d’indépendance des tribunaux indigènes qui sont présidés par un administrateur des colonies cumulant les pouvoirs exécutif et judiciaire », La justice pénale au Dahomey de 1900 à 1960, http://www.memoireonline.com.

87 En vertu de l’article 1e r du décret du 9 juin 1896 : « La justice est rendue à Madagascar et dépendances, par une Cour d’Appel, des Cours criminelles, des Tribunaux de première instance, des justices de paix à compétence étendue (forme ancienne des juridictions de proximité), des Tribunaux indigènes ». Pour aller plus loin, voir : A. ORTOLLAND, Les institutions judiciaires à Madagascar et dépendances de 1896 à 1945, t. 1, L’Harmattan, 1993, p. 73.

88 Général GALLIENI, Gouverneur de Madagascar 1896-1905.

89 La hiérarchie des tribunaux indigènes est structurée de la sorte : un tribunal du premier degré exclusivement malgache ; un tribunal du deuxième degré présidé par un fonctionnaire français assisté par deux assesseurs malgaches et la Cour d’appel de Tananarive, in arrêté publié au J.O.M., 13 novembre 1896, Dareste, I, 1898, 1, p. 53-55.

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pendant longtemps appliqué le droit traditionnel malgache 90. Partant, le droit

malgache a été largement influencé par les théories du droit français qui d’autant plus,

restaient applicables à titre supplétif. En réalité, ces questions provoquaient de vives

tensions. Les arrêts de la cour rendus en matière de droit traditionnel mettent par

exemple face à face, une juridiction française composée en majorité de magistrats

français accoutumés au droit écrit et des coutumes profondément différentes à

caractère principalement oral. Dès lors, dans l’enceinte de la Cour, se rencontraient,

« ou faudrait-il dire se confrontaient 91 », deux droits, l’un écrit ; l’autre oral, l’un européen ;

l’autre malgache. Par-delà la diversité des vocabulaires, des techniques et des

institutions, la rencontre de deux droits implique celle de deux sociétés, de deux

cultures et en définitive de deux conceptions du monde 92. Certes, les juridictions

françaises se sont prononcées dès le début pour « le respect des institutions coutumières » 93,

mais au fond, toute idée d’autonomie et de possibilité d’évolution détachée de l’État

90 La loi du 6 août 1896 dite d’annexion, déclarant Madagascar et les îles qui en dépendent

« colonies françaises », énonce dans l’exposé de ses motifs : « Le Gouvernement n’entend nullement porter atteinte au statut individuel des habitants de l’Île, aux lois, aux usages, aux institutions locales », J.O.M. 27 septembre 1896, p. 1. Le décret du 9 juin 1896, portant organisation de la justice à Madagascar, dispose en son article 16 que : « Les tribunaux indigènes institués par la législation locale sont maintenus. Ils connaissent conformément aux dispositions de la législation locale de toutes les affaires civiles ». L’arrêté du 28 février 1897 en son article 1e r énonce que « Les lois indigènes de l’Imerina sont maintenues dans leurs dispositions qui n’ont pas été abrogées ». En matière répressive, le décret du 9 mai 1909 portant réorganisation de la justice indigène à Madagascar, maintient en vertu de son article 116, les lois et coutumes indigènes en tout ce qu’elles ne heurtent pas les principes de la civilisation française. Ainsi, si la France a corrigé ou complété certains points la législation Malgache, dans l’ensemble, elle l’a respectée. « La meilleure justice à rendre aux indigènes est celle basée sur leurs lois et leurs coutumes », A. GAMON, Traité de la condition des indigènes, in Cahier du Centre d’études des coutumes, éd. Université de Madagascar, Centre d’études des coutumes, 1966, n° 1 à 3, p. 26. Et pour rappel, en 1945 à San Francisco, la Charte des Nations Unies contenant les promesses d’indépendance, fût signée par la France. Elle engage la France à favoriser l’évolution des populations indigènes vers le progrès et vers la capacité d’auto-administration.

91 D’après l’expression de P. CHEVALLIER, Introduction à l’étude du droit coutumier malgache, in Cahier du Centre d’études des coutumes, éd. Université de Madagascar, Centre d’études des coutumes.

92 Le Magistrat français : un rôle assimilateur des valeurs occidentales, in Le Magistrat français au carrefour de deus systèmes juridiques : un double rôle dans la distribution de la justice à Madagascar, F. A. RAZAFINDRATSIMA, Ibid. Mme RAZAFINDRATSIMA dit qu’en matière judiciaire, la réussite de l’œuvre coloniale se réalise dans la reconnaissance de la primauté du droit occidental sur le droit traditionnel. Partant, le législateur s’assigne le devoir de rendre effective les lois modernes. Là où elle est présente, la France travaille pour asseoir sa civilisation, ses principes de justice et de droit. Certes, elle proclame sa volonté de respecter les coutumes locales mais réellement, elle ne concède pas à adopter pleinement les normes traditionnelles qu’elle estime bien circonscrites. Pour la France, la société traditionnelle est de nature empirique faisant obstacle à son projet d’établissement de politique d’assimilation. Voir également : H. VIDAL, La Cour d’Appel de Tananarive et les coutumes malgaches de 1897 à 1960, dans Cahier-coutume, Éditions de l’Université de Madagascar, Centre d’études des coutumes, 1966., n° 1 à 3.

93 Voir : supra, n° 9.

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colonial, est écartée 94. Pour l’autorité française, le maintien des institutions politiques

traditionnelles se justifiait par un certain pragmatisme dans la gestion de la vie

municipale et régionale du pays. En 1960, tout ce phénomène ne pouvait qu’aboutir à

une émancipation législative malgache. Un droit positif malgache émerge des

dispositions des anciens Codes 95 et des coutumes orales. Sur cet héritage, vient se

greffer le droit positif français.

En somme, la cohabitation de deux droits différents a présenté des problèmes

pratiques considérables 96. Afin de les résoudre, le législateur malgache s’est attelé à

un travail général de codification pour l’ensemble des disciplines juridiques, y

compris la règlementation de l’activité médicale.

10. Le premier texte malgache invocable en contentieux médical. — Il s’agit de

l’ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 portant répression de toutes pratiques de

charlatanisme. Cette ordonnance punit d’un emprisonnement d’un an au moins et de

5 ans au plus et d’une amende de 50 000 à 500 000 Ariary (francs malgaches),

quiconque se sera livré à des pratiques de charlatanisme susceptibles de troubler

l’ordre public et de porter atteinte aux personnes. Le charlatanisme est ici entendu

comme l’exploitation de la crédulité des malades en prétendant la maîtrise de l’art de

guérir. Ainsi est charlatan le médecin qui met à disposition de la clientèle des

méthodes thérapeutiques non scientifiquement contrôlées comme l’exige la rigueur et

94 Les textes instituant la dualité du système juridique, n’autorisaient pas le Résident général à

réformer de fond en comble, les justices indigènes. L’établissement des textes formant le droit local, — à savoir les lois coutumières propres à chaque ethnie, les Instructions aux Sakaizambohitra de 1878 de la Reine Ranavalona II, véritable Code pénal en 87 articles ; le Code des 305 articles, et les Règlements aux Gouverneurs de l’Imerina de 1889 composés de 61 articles —, avait pour objectif d’octroyer non une autonomie juridique pour les sujets de droit locaux mais plutôt, d’assurer une bonne administration par le biais d’une justice civile indigène. Bref, la conception d’un droit local s’inscrivait dans une vision plus opérationnelle qu’un objectif d’affranchissement, voir : F. A. RAZAFINDRATSIMA, Le Magistrat français au carrefour de deux systèmes juridiques : un double rôle dans la distribution de la justice à Madagascar, Clio Thémis, n° 4 Rev. électronique d’histoire du droit.

95 Le Code des 305 Articles (1881) ; le Code des 101 Articles de 1868 qui est une ébauche de droit civil ; les Règlements aux « Sakaizambohitra » ou les délégués de l’autorité royale près des communautés de village et les décrets n° 57-463 et 57. 464 du 4 avril 1957 qui évoquent pour la première fois la codification des usages traditionnels malgaches, V. AUBARE et V. FRAISSINIER, Loi écrite et coutume en droit malgache : L’arrêt du 5 mars 1897, Rec. des lois civiles, dispositions générales et droit de la famille, Rapport de synthèse sur l’état des personnes, t. 1, Tananarive, 1964, p. 7.

96 Ce n’est pas chose aisée de conjuguer deux système juridique : « La dualité du système juridique se traduit par : deux ordres de juridiction à mettre en œuvre, deux droits différents à appliquer, supposant deux voies de recours impliquant deux catégories de justiciables », M. ALLIOT, Le droit des successions dans les États africains francophones, Rev. Jur. Poli. Ind. Coo. n° 4 décembre 1972, p. 895.

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le sérieux de la médecine 97. Lorsque le médecin perd la rigueur morale et ne vise qu’à

conserver la « patientèle » au lieu d’indiquer la thérapeutique jugée en conscience,

appropriée, il est coupable de délit de charlatanisme 98. Le droit positif malgache a

prévu des sanctions de tels agissements sur le plan pénal 99, administratif 100 et

97 L. DEROBERT, Droit médical, déontologie médicale, éd. Flammarion 1974, p. 167.

98 L’exercice de la médecine traditionnelle sans l’autorisation du Ministère de la santé est sanctionné par la loi : article 100 du Code de la santé publique malgache. Le charlatan peut être poursuivi pénalement pour infraction d’exercice illégal de la médecine (exercice d’une activité médicale sans être titulaire du diplôme d’État de Docteur en médecine ou du diplôme de l’École de Médecine de Tananarive ou de tout diplôme dont la valeur serait ultérieurement admise). L’article 39 de l’ordonnance n° 62 072 du 29 septembre 1962 portant codification des textes législatifs concernant la santé publique ; mise à jour par la loi n° 2011-002 portant Code de la Santé, a prévue, une amende de 150 000 à 500 000 francs malgache et un emprisonnement de six jours à six mois ou de l’une de ces deux peines seulement. En cas de récidive, 500 000 à 1 000 000 francs avec possibilité de confiscation du matériel médical. La pratique est également sanctionnée par l’article 15 du décret n° 2012-0632 portant Code de déontologie médicale en son.

99 L’article 405 du Code pénal malgache sanctionne l’exercice illégal de la médecine quand il énonce que : « Quiconque, soit en faisant usage de faux noms ou de fausses qualités, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l’existence de fausses entreprises, d’un pouvoir […], ou pour faire naître l’espérance ou la crainte d’un succès, […] ou de tout autre événement chimérique, se sera fait remettre ou délivrer, ou aura tenté de se faire remettre ou délivrer des fonds, des meubles ou des obligations, dispositions, billets, promesses, […], et aura, par un de ces moyens, escroqué ou tenté d’escroquer la totalité ou partie de la fortune d’autrui, sera puni d’un emprisonnement de six mois au moins et de cinq ans au plus, et d’une amende de 180 000 francs au moins et de 1 800 000 francs au plus. Dans tous les cas, les coupables pourront être, en outre, frappés pour dix ans au plus de l’interdiction des droits mentionnés en l’article 42 du présent Code (l’exercice des droits civiques, civils et de famille) ; ils pourront aussi être frappés de l’interdiction de séjour pendant deux à cinq ans ».

100 Un établissement public de santé (EPS) est tenu de recevoir les malades et de leur fournir des soins et des prestations les plus appropriés. Il est tenu d’assurer la sécurité des hommes pour ce qui concerne les installations de plateaux techniques et le fonctionnement correct de l’ensemble des services. Si par les agissements des agents hospitaliers, ces obligations ne sont pas respectées ; la responsabilité de l’établissement est engagée. Deux exceptions doivent être cependant, relevées : le cas du médecin exerçant son activité au sein de l’hôpital sous un contrat d’exercice libéral (exercice d’activité libérale au sein d’un EPS) et le cas du médecin ayant commis une faute détachable du service. La faute détachable du service est la faute qui de par son exceptionnelle gravité ne peut être raisonnablement rattachée au fonctionnement du service. La faute détachable du service peut s’agir d’une malveillance avec une volonté de nuire; bref, tout agissement contraire à la déontologie professionnelle. Est par exemple qualifié de faute détachable du service hospitalier, le fait pour un médecin hospitalier de ne pas informer le patient du traitement à administrer. À ce propos, la Cour de cassation a tranché que : « Le chirurgien d’un service hospitalier est tenu, sauf le cas de force majeure d’obtenir le consentement du malade avant de pratiquer une opération dont il apprécie, en pleine indépendance sous sa responsabilité, l’utilité, la nature et les risques, qu’en violant cette obligation […], il commet une atteinte grave aux droits des malades, un manquement à ses devoirs proprement médicaux qui constitue une faute personnelle se détachant de l’exercice des fonction que l’Administration des hospices a qualité pour règlementer », Cass. civ., 28 janvier 1942, arrêt Teyssier. Et en application du droit commun de la responsabilité administrative, seules les fautes des agents hospitaliers qui se détachent du service par leur inexcusable gravité ou leur caractère intentionnel présentent le caractère d’une faute personnelle, Cass. civ 1ère, 20 février 2008, I. GALLMEISTER, Engagement de la responsabilité personnelle d’un médecin hospitalier, Dalloz actualité 5 mars 2008.

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disciplinaire 101. Sur le plan civil, la présente étude souhaite apporter une spécificité

d’encadrement juridique. Pour ce, il est nécessaire de revisiter les socles du droit civil

malgache.

11. Les socles du droit civil malgache. — D’abord peut être citée, l’ordonnance

n° 62.037 du 19 septembre 1962 102. Elle avait pour objectif d’édifier un nouveau

droit malgache des obligations qui avant 1960, se résumait à la somme de

jurisprudences claniques, royales et coloniales. L’ordonnance de 1962 traitait de

l’« obligation », de ses modalités, de son exécution et de son extinction. Par ailleurs,

elle prévoyait le principe du droit de gage général des créanciers sur le patrimoine du

débiteur. En traitant les obligations civiles indépendamment de leurs sources,

l’ordonnance n° 62.037 était invocable pour tout contentieux civil, y compris

médical. Quatre ans plus tard, l’ordonnance a été fondue avec deux autres textes 103

en une seule loi, la loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 dite « loi sur la théorie générale des

obligations » ou la LTGO. La LTGO traite des principes et des valeurs morales

régissant les liens entre les personnes tel que le respect de la parole donnée dans le

contrat 104 ou encore le devoir de réparer les dommages causés à autrui 105.

Fondamentalement, ces deux principes universels ont vocation à s’appliquer en droit

de la responsabilité médicale. En outre, la doctrine malgache en commentant

l’article 179 de la LTGO reconnaît implicitement le caractère contractuel de la

101 « Considérant que le droit disciplinaire influence le comportement des acteurs et leur propension à préserver

l’intégrité (corporelle d’une personne), il peut être avancé que si un acteur institutionnel adopte un comportement portant atteinte à l’intégrité, il existe quelque part une portion de responsabilité de l’institution d’appartenance pour n’avoir pas su l’encadrer », P.Y. RAFOLISY, Protection juridique de l’intégrité morale et développement durable : le cas de Madagascar, Th. Faculté de Droit et des Sciences Économiques Centre de Recherches sur l’Entreprise les Organisations et le Patrimoine, Limoges, 5 avril 2008, p. 346. L’institution d’appartenance que relève M. P.Y. RAFOLISY peut-être s’agir, de l’Ordre des médecins, d’un établissement public ou privé de santé. Certains auteurs anglo—saxons soulignent qu’en matière disciplinaire, il incombe aux dirigeants institutionnels de s’assurer de l’existence des normes répondant aux objectifs de l’institution et leurs effectivités. Par conséquent, en cas d’accident au sein des institutions, leurs responsabilités est retenues pour présomption de défaut de mise en place des normes concernées, voir : D. R. COQUILLETTE, J. A. MC MORROW, Toward an Ecclesiastical Professional Ethic : Lessons from the Legal Profession, Boston College Law School Legal Studies Research Paper Series, Research Paper n° 65, 16 mars 2005, p. 12.

102 1962 : période où de la dualité de juridictions (droit colonial et droit indigène) a pris fin.

103 L’ordonnance n° 62.007 du 31 juillet 1962 sur les preuves des obligations civiles et la loi 65.003 du 9 juin 1965 sur les sources des obligations civiles.

104 Article 1134 du Code civil français. L’article 91 de la LTGO en est l’équivalent ; il dit : « La clause contractuelle est le but juridique immédiat et direct poursuivi par la partie (par les parties) qui s’oblige ».

105 Article 1382 du Code civil français ; article 204 de la LTGO malgache.

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relation médicale 106. Sans en approfondir l’étendue, elle énonce que l’obligation

médicale est une obligation de moyens imposant au professionnel un devoir de

diligence durant l’exercice de sa fonction.

12. La loi relative à l’exercice de la profession médicale à Madagascar. —

Postérieurement à l’ordonnance n° 62-037 relative aux obligations civiles

indépendamment de leurs sources, un texte relatif à la santé publique a vu le jour :

l’ordonnance n° 62-072 du 29 septembre 1962. Elle a été modifiée par la loi n° 2011-

002 portant Code de la Santé publique. Le Livre II de la loi traite de l’exercice de la

profession médicale. Des innovations remarquables y sont introduites 107 ; telles

sont : les mentions concernant les activités paramédicales et la reconnaissance de la

légalité de médecine traditionnelle. Indépendamment de ces avancées remarquables,

il apparaît que, l’intervention de 2011, n’éclaire pas plus l’encadrement juridique de la

profession médicale. La loi ne comporte pas des principes régulateurs de l’activité

médicale réservant cette tâche au Code de déontologie. L’article 73 du Code de la

santé publique malgache indique en effet, le Code de déontologie pour définir les

devoirs moraux et professionnels des membres des professions médicales et

paramédicales. Il paraît judicieux que le défaut de principes régulateurs de l’activité

médicale au sein d’un Code de la santé publique soit compensé. À ce propos, il faut

reconnaître que le Code de déontologie nouvellement mis à jour par le décret

n° 2012-0632, représente en soi une référence normative supplémentaire. Comme en

droit français, la victime d’accident médical à Madagascar peut l’invoquer à l’appui de

son action en dommages-intérêts et les instances juridictionnelles lors d’un

contentieux médical peuvent s’y référer 108.

106 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre

CMPL, 1984, p. 14, 15.

107 Aux côtés des dispositions déjà connues mais reprécisées, des innovations remarquables sont introduites au Livre II dédié aux professions médicales, paramédicales et à la médecine traditionnelle. De ces innovations, il faut souligner la reconnaissance de la légalité de la pratique de la médecine traditionnelle, laquelle reste assortie de conditions fermes afin d’éviter la prolifération du charlatanisme au sein de la profession. Pour les dispositions relatives à l’exercice de la médecine traditionnelle, voir : article 95, 96 et 100 du Code de la santé publique malgache.

108 Par principe, la codification de la déontologie émane de l’Ordre des médecins et décrétée par le gouvernement, après avis du Conseil d’État. L’intervention régalienne signifie que la déontologie n’est pas seulement un ensemble de règles que les professionnels se donnent entre eux, mais aussi et surtout, un élément de l’organisation sociale. En tant que tel, la déontologie mérite considération dans l’appréciation de la faute du praticien. Cette considération est aujourd’hui acquise après avoir pris forme d’une manière progressive. D’abord, la doctrine était réticent à l’idée que le juge puisse considérer la seule méconnaissance d’une disposition du Code de déontologie médicale comme constitutive d’une faute civile (R. SAVATIER, Encyclopédie Universalis, voir : Déontologie) à moins que ladite disposition soit une reproduction de normes générales de comportement sanctionnées par le droit positif. À partir des années 90, la jurisprudence affirme

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13. Une réflexion prospective d’un cadre juridique de la responsabilité

médicale à Madagascar. — Même si les contentieux en responsabilité médicale

restent relativement rares, les cas relevant du domaine de l’exceptionnel témoignent

que le sujet de droit malgache ne se résigne plus à être victime de la fatalité mais au

contraire cherche un responsable à ses préjudices. Une telle mutation appelle pour les

années à venir à déterminer les réponses face aux problèmes posés par la

responsabilité médicale. Dans cette optique, le présent travail se propose de dégager

quelques ébauches de solutions. La démarche entreprise met en valeur les paramètres

socioculturels précédemment évoqués (n° 4, 5, 6) et elle aborde le droit comparé en

tant que source d’inspiration.

14. Le droit comparé source d’inspiration. — Le droit de la responsabilité

médicale français est passé par plusieurs étapes et continue à connaître d’autres

évolutions 109. Cette expérience lui confère un rôle d’initiateur du droit médical pour

les pays en pleine actualisation de leurs systèmes juridiques médicaux. Seulement

avant toute initiative de transposition, il importe de revisiter les étapes de cette

évolution législative française.

15. L’évolution du droit français de la responsabilité médicale. — En droit

français, la faute médicale fut depuis l’arrêt Thouret-Noroy de 1835 110 rattachée à

que la méconnaissance d’une règle déontologique ayant causé un préjudice à un tiers peut être la source directe de la responsabilité civile du médecin, Cass. civ 1ère, 18 mars 1997 : J.C.P. G 1997, II, 22829, rapp. P. SARGOS. Toutefois, il faut préciser que la considération des règles déontologiques dans l’appréciation de la faute ne lie pas le juge dans son privilège d’appréciation. Autrement dit, les dispositions déontologiques constituent un élément d’appréciation pour le juge et que la seule méconnaissance d’une règle déontologique ne signifie pas automatiquement faute civile. Cette thèse se comprend dans la mesure où, l’élaboration de la règle déontologique émane de professionnels ; il s’agit dès lors de normes à caractère non législatif qu’on ne peut imposer aux juges ; faire autrement revient à commettre une méconnaissance flagrante de la hiérarchie des sources du droit, Cass. com., 29 avril. 1997, D. 1997, jurispr. p. 459, note Y. SERRA ; J.C.P. G 1997, I, 4025, n° 11, obs. G. VINEY.

109 Notamment on voit apparaître, la naissance d’un véritable « droit de la réparation du dommage », « Le mouvement qui tend à extraire la réparation des accidents médicaux du domaine de la responsabilité civile semble inéluctable », J. BELLISSENT, L’hypertrophie de l’obligation contractuelle, in Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, Préf. R. CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, p. 346. Nombreuses doctrines soulignent l’effacement du principe de la responsabilité pour faute contractuelle avec obligation de moyens de la relation médicale, D. BERT, Feu l’arrêt Mercier !, Recl. D. 2010, p. 1801. Mme S. PORCHY souligne l’évolution principalement sur le plan du devoir d’information, in Revirement de la Cour de cassation quant à la sanction du défaut, J.C.P., 2010 p. 788. Enfin, sur les doutes quant à la nature contractuelle de la relation médicale, voir : G. PIGNARRE, Les frontières du consentement, de la confrontation du pouvoir aux marges de l’autonomie, R.D.C. 2011. 611.

110 Cass. req. 18 juin 1835, Thouret-Noroy, D.P. 1835, I, 300, concl., DUPIN, S. 1835. 1. 401, Rec. D., n° 24 du 6 octobre 2010, obs. P. SARGOS, p. 1522. Voir les notes sur les moyens en cassation dans l’arrêt concerné (affirmation de la non-responsabilité juridique du praticien), MM. BAYLE,

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l’ordre délictuel 111. Cet arrêt a mis un terme à la thèse d’irresponsabilité juridique

pour l’exercice de la profession médicale en France 112. Il déclare : « L’abandon

volontaire où le médecin avait laissé le malade en refusant de lui continuer des soins et de visiter son

bras, est au nombre des faits qui peuvent entraîner la responsabilité civile des individus à qui ils sont

imputables, et sont soumis aux dispositions des articles 1382 et 1383 du Code civil, à

l’appréciation du juge ». Ultérieurement, pour des raisons pratiques au niveau procédural,

un revirement a été opéré par le célèbre arrêt Mercier 113 qui consacre la relation

médicale dans le domaine contractuel impliquant une responsabilité médicale de

même nature 114. La construction jurisprudentielle issue de cet arrêt a eu à l’époque

pour but final de faire échapper les victimes au principe de l’unité des prescriptions

civile et pénale 115. L’unité des prescriptions soumettait les victimes au délai très

CAYOL, GIBERT, MARTINET, Revue Médicale, française et étrangère, Journal des procès de la médecine hyppocratique, Au Bureau de la Revue Médicale, 1835, t. 3, p. 133.

111 M. BACACHE, La responsabilité médicale : Principes généraux, n° 472263, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18, p. 4.

112 « Malgré la transcription dans les livres anciens du principe de responsabilité médicale, l’irresponsabilité en cette matière (l’activité médicale) est de rigueur du Moyen Age jusqu’au 18ème siècle », J. SAISON, Le risque médical, éd., L’Harmattan, 1999. p. 9. Les dispositions d’un arrêt du Parlement de Paris en date du 26 juin 1696 s’inscrivent dans ce même sens : « aegrotus debet sibi imputare cir talem emegerit » c’est-à-dire, « le malade ne peut s’en prendre qu’à lui-même puisque c’est lui qui a choisi son médecin », voir : J. F. LEMAIRE, 1696, l’irresponsabilité médicale momentanément consacrée, p. 42 ; voir également : B. HOERNI et M. BENEZECH, L’information en médecine. Évolution sociale, juridique, politique, éd. Elsevier Masson, 1994. Par ailleurs, la loi de Ventôse an XI (1805) relative à l’exercice de la médecine contient implicitement le principe de la non-responsabilité des médecins. Très longtemps, une partie du corps médical souhaitait limiter la responsabilité des médecins à sa plus simple expression. Le Docteur Double déclarait : « La garantie du public réside dans les études et les épreuves par lesquelles doivent passer les docteurs pour obtenir leurs diplômes. Mais la responsabilité des médecins, dans l’exercice consciencieux de leur profession, ne saurait être justiciable de la loi. Les erreurs involontaires, les fautes hors prévoyance, les résultats fâcheux, hors de calcul, ne doivent relever que de l’opinion publique. Si l’on veut qu’il en soit autrement, c’en est fait de la médecine. L’art de guérir ne peut réellement devenir profitable qu’à cette condition », in Rapport à la séance de l’Académie de médecine du 28 septembre 1829. Bref, le médecin en tant qu’homme de l’art ne saurait être tenu responsable d’un accident médical survenu lors d’une intervention. Le soupçon de responsabilité s’il existe, est rattaché à la personne en tant que sujet du droit commun. Autrement dit, l’appréciation de la responsabilité juridique se fonde non sur les agissements professionnels lesquels sont censés validés par le diplôme. L’appréciation de la responsabilité s’apprécie dans l’attitude du sujet de droit face aux obligations préexistantes, c’est-à-dire, le fait d’agir dans le bon sens pour ne pas nuire autrui.

113 Cass civ., 20 mai 1936, D.P. 1936.1.88, concl. P. MATTER, rapp. L. JOSSERAND, RTD civ. 1936, p. 691, obs. R. DEMOGUE.

114 J. BELLISENT, op. cit, p. 351. L’auteur aborde une analyse très minutieuse de la nature réelle de la responsabilité médicale en exposant toute la controverse entre la nature contractuelle ou délictuelle de cette responsabilité. Et il en déduit, L’hypertrophie de l’obligation contractuelle (excès de développement de l’obligation contractuelle).

115 À l’époque, les membres de la haute juridiction ont tiré profit d’un argument de contractualisation, c’est-à dire, le passage d’une qualification délictuelle à une qualification contractuelle, ils ont pu par ce procédé, contourner la position procédurale empêchant de bénéficier d’un délai de prescription plus favorable. Tant que la qualification était délictuelle,

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réduit de prescription de l’action publique 116. La prescription trentenaire du droit

commun leur échappait tant qu’on restait sur le terrain de la responsabilité délictuelle.

La Cour de cassation a alors procédé à une contractualisation de la responsabilité

médicale. Mais au-delà de l’intérêt que représente l’« argument de procédure » 117,

les membres de la haute juridiction ont entériné l’idée de contractualisation de la

relation médicale pour soustraire définitivement l’exercice de la médecine au gré de

l’article 1384, alinéa 1er du Code civil 118. En effet, dans la mesure où l’article 1384,

alinéa 1er du Code civil consacre une présomption de responsabilité, les victimes de

traitement médical impliquant l’utilisation de choses inanimées tels l’usage d’appareils

de radiothérapie 119, n’hésitent pas à l’invoquer. Cette option leur épargne la charge

de la preuve. Pour pallier un excès de mise en responsabilité sur le fondement d’une

la solidarité de prescription du civil au pénal était de principe imposant une prescription triennale.

116 La prescription triennale est le résultat de la combinaison du principe de la solidarité du civil au pénal prévu à l’article 638 du Code de l’instruction criminelle de 1808 en matière délictuelle. La loi du 23 décembre 1980 a mis fin au principe de la solidarité de prescription de l’action publique et de l’action civile. Depuis cette loi, le Code de la procédure pénale dispose en son article 10 ali. 1er que l’action civile se prescrit selon les règles du Code civil ; soit trente ans (à l’époque des faits) à condition que la qualification contractuelle eut été acquise. La loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile a modifié la prescription contractuelle de cinq ans, voir article 2224 du Code civil. Toujours est-il qu’en matière de dommages corporels, les actions en responsabilité se prescrivent par dix ans à compter de la date de consolidation du dommage initial. Ainsi, en matière d’accident médical engageant la responsabilité contractuelle suite à un préjudice corporel, se pose un conflit de délai de prescription : En effet, quelle option prendre entre cinq ans correspondant à la nature contractuelle de la responsabilité et dix ans considérant l’action en responsabilité lié à des dommages corporels ? On peut envisage que le délai le plus opportun est celui qui est le plus favorable à la victime.

117 J. BELLISSENT, Ibid.

118 Dans les premières étapes du procès Mercier en date de mai 1930, la demanderesse fait grief de la violation de l’article 1384, ali. 1er du Code civil à l’encontre du médecin. Les juges avaient écarté sa grief en arguant que : « l’article 1384 concernant la responsabilité délictuelle pour fait d’autrui (en l’occurrence de la chose dont le médecin a la garde), ne saurait être appliqué lorsque c’est la victime qui a sollicité qu’il soit fait à son égard un emploi déterminé de la chose » ; Trib. civ. Marseille, 5 mai 1930, D. H. 1930, p. 389. L’interdiction de tout recours intempestif au régime de l’article 1384, ali 1er du Code civil puise son fondement dans la thèse selon laquelle, la convention intervenue entre les parties, a pour effet de déplacer la cause de la responsabilité que peut encourir celui qui a fait usage de la chose ; c’est-à-dire, ce n’est plus comme gardien qu’il peut être déclaré responsable (responsabilité délictuelle pour fait d’autrui) mais parce qu’il a pris la responsabilité de l’emploi qu’il devait faire de ce cette chose. Bref, la responsabilité relève du domaine exclusif du contrat liant les parties (en l’occurrence, le médecin et le patient), voir : Cass. req., 15 juin 1937, Gaz. Pal. 1937. 2. 411 ; Civ. 3 octobre. 1962, D. 1963. 57, note P. ESMEIN, J.C.P., 1962. II. 12924, note R. SAVATIER.

119 Cas de l’espèce en cause : l’arrêt « Mercier », C.A. Aix-en-Provence, 16 juillet 1931, D.P. 1932. 2. 5, note M. NAST.

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présomption, la Cour de cassation a consacré dans l’arrêt Mercier le 20 mai 1936,

l’existence d’un véritable contrat médical entre le professionnel de santé et le patient :

Il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat comportant pour le praticien l’engagement sinon de bien évidemment guérir le malade […] du moins de lui donner des soins […] consciencieux, attentifs et, réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la

science 120 ; que la violation même involontaire de cette obligation contractuelle est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle.

Confirmant l’acquis jurisprudentiel, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des

malades et à la qualité du système de santé réaffirme le principe de la responsabilité

médicale pour faute contractuelle 121. La faute contractuelle étant si ce n’est le fait de

ne pas réaliser la guérison, le fait de ne pas soigner conformément aux règles de l’art.

Il s’agit pour le médecin d’une obligation de moyens impliquant la charge de la

preuve à la victime. Dans un attendu de principe du 8 novembre 2000, la première

chambre civile condamne de façon sans équivoque, la thèse de l’obligation de résultat

en présence d’un accident médical 122. Les dispositions jurisprudentielles sont fermes

120 D’origine jurisprudentielle et reprise par le Code de la santé publique en son article R. 4127-32,

l’expression « données acquises de la science » a été remplacée par la loi du 4 mars 2002 par la référence : « connaissances médicales avérées ». Elle est mentionnée à l’article L. 1111-5, al. 1e r du Code de la santé publique.

121 L’article L. 1142-1 alinéa premier du Code de la santé publique, issue de la loi du 4 mars 2002 stipule : « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent Code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins, ne sont pas responsables des conséquences d’acte de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute », voir : G. MÉMETEAU, Traité de la responsabilité médicale, éd. Les études hospitalières, 1997 p. 37 ; D. DUVAL-ARNOULD, Conseiller référendaire à la Cour de cassation, La responsabilité civile des professionnels de santé et des établissements de santé privés à la lumière de la loi 4 mars 2002 http://www.courdecassation.fr.

122 Cass. civ 1ère, 8 novembre 2000, P. SARGOS ; rapp. et F. CHABAS ; note, J.C.P. G 2001, II, 10493, L. DUBOUIS, note, R.D.S.S. 2001, P. 154 ; P. JOURDAIN ; obs., R.T.D. civ. 2001 et S. PORCHY-SIMON, Rec. D. 1999, p. 21 ; dans l’ensemble, la doctrine souligne que « Si la Cour de cassation semble en effet assouplir sa position sur le terrain de la faute éthique, l’arrêt du 27 mai 1998 marque, en apparence, sa volonté de maintenir une stricte responsabilité pour faute dans l’exécution de l’acte de soins », in L’accident médical devant la Cour de cassation : confirmation du refus d’indemnisation en dehors de la faute prouvée ». Un arrêt de la cour d’appel de Toulouse en date de 2007, confirme la constance de la jurisprudence judiciaire quant au principe de responsabilité médicale pour faute. Il nous a semblé opportun de rappeler les faits eu égard à la clarté de la position de la Cour. En l’espèce, le patient souffrant de troubles psychologiques sévères a été accueilli au Foyer (ADAPEI) de l’Ariège en 1993 ; dans le même temps, il suit quelques traitements en hôpital psychiatrique. En mars 2004, alors qu’il prenait son repas dans sa chambre au foyer de l’ADAPEI, il s’étouffe, et malgré les secours prodigués, il décède le 17 avril 2004. Les ayants-droit assignent l’ADAPEI devant le TGI de Foix. Déboutés de leur action, ils interjettent appel le 19 juillet 2006 au motif qu’il y a eu mauvaise appréciation de la responsabilité pesant sur ce type de structure ; responsabilité qui d’après les appelants, consistait à assurer la sécurité des patients, autrement dit responsabilité de type sécurité de résultat […] et qu’au moment délicat et dramatique aucun membre du personnel

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sur le principe de la responsabilité pour faute contractuelle pour la responsabilité

médicale. Pour elles, « la réparation de l’aléa thérapeutique n’entre pas dans le champ des

obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l’égard de son patient » 123. Autrement

dit, le patient victime d’un accident médical ne peut pas engager la responsabilité du

praticien que si ce dernier a commis une faute correspondant à une conduite non

conforme aux données acquises de la science 124. Du moment où, la faute est

prouvée, le médecin est tenu de répondre à son obligation de réparation. Pour mieux

répondre à cette obligation, la loi met à la charge des professionnels de santé une

obligation d’assurance 125.

Bien que le mécanisme assurantiel garantisse l’effectivité de la réparation, le

principe même de la responsabilité pour faute écarte certaines victimes de ce

privilège. Afin de remédier à l’incertitude des droits des victimes, il est nécessaire de

trouver une solution législative conciliant deux intérêts : le principe de la

responsabilité médicale pour faute et l’indemnisation automatique des victimes

d’accidents médicaux. Dans cette optique, la loi du 4 mars 2002 tout en maintenant le

principe de la responsabilité pour faute, a mis en place un système d’indemnisation

au titre de solidarité nationale. Depuis cette initiative, un nouvel organisme public

constitutif de fonds indemnitaire est créé : l’Office national d’indemnisation des

accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ou

l’ONIAM 126.

ne surveillait le patient, ce qui a entraîné son décès. L’intimé soutient qu’il ne peut lui être reproché une quelconque faute dans la mesure où le protocole médical, a été strictement respecté, […] que les mesures prises par l’équipe étaient tout à fait adaptées au cas du patient […]. Devant les arguments des parties, la Cour précise la nature spécifique de l’établissement en cause : une structure d’hébergement médicalisé en mesure de fournir un accompagnement spécialisé aux autistes. À ce titre, n’est tenu que d’une obligation de moyens et non de résultat. Ensuite, la Cour apprécie, le contour de l’obligation de moyens à travers le respect du protocole médico-social. En l’espèce ; tant l’immédiateté de la prise en charge d’urgence par l’équipe lors de l’accident que le repect du protocole sont établis.

123 Cass. civ 1ère, 27 mars 2001, D. 2001, somm. 3083, obs. J. PENNEAU.

124 Ainsi, n’engage pas sa responsabilité l’anesthésiste ayant provoqué des lésions dentaires lors de l’intubation nécessaire à l’anesthésie, la responsabilité du médecin étant subordonnée à la preuve d’une faute commise dans l’accomplissement de l’acte médical, 4 janvier. 2005 : J.C.P. G 2005, II, 10061, note P. MISTRETTA. R.D.S.S. Soc. 2005, 332, obs. B. PITCHO. Dans le même sens, n’engage pas sa responsabilité le chirurgien qui a atteint une artère lors de la mise en place d’une sonde, la preuve de la faute technique n’étant pas établie. « Le médecin n’est tenu que d’une obligation de moyens même lorsqu’il procède à la pose d’un appareil sur la personne du patient », J. PENNEAU, Rec. D. 6 février 2004, p. 600.

125 Article L. 1142-2 du Code de la santé publique.

126 Conformément à l’article L.1142-22 du Code de la santé publique, l’ONIAM a été créé par la loi du 4 mars 2002 afin d’assurer l’indemnisation des conséquences des risques sanitaires. Les modalités d’intervention de l’ONIAM sont prévues aux articles : L. 1142-1 (le principe de

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L’intervention de l’indemnisation au titre de solidarité nationale est soumise à

quelques conditions. L’article L. 1142-1, II du Code de la santé publique (modifié par

l’article 112 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009) mentionne en ce sens que :

Lorsque la responsabilité d’un professionnel […] n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène, ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, ouvre droit à ses ayants droit au titre de solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de

gravité, fixé par décret 127, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

À lire ces dispositions, l’intervention de l’indemnisation au titre de solidarité

nationale obéit à une condition préalable négative : l’absence de responsabilité

professionnelle. L’ONIAM ne peut intervenir que si aucune responsabilité ne peut

être mise en jeu à l’encontre du professionnel 128, d’où son rôle palliatif en matière

indemnitaire. Ensuite, trois conditions tenant à la caractéristique du dommage, sont

requises : l’imputabilité par rapport à l’acte médical ; l’anormalité eu égard à l’état de

l’indemnisation au titre de solidarité nationale), L. 1142-1-1 (cas d’infections nosocomiales et avènement de circonstances exceptionnelles) et L. 1142-17 (procédure d’intervention de l’ONIAM) du Code de la santé publique. L’Office est financé essentiellement par dotation de la branche « Assurance maladie » du régime générale de sécurité sociale. Enfin, sur le plan statutaire, l’ONIAM est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé. Concernant son administration, voir : R. 1142-43 du Code de la santé publique.

127 Le décret n° 2003-314 du 4 avril 2003 relatif au caractère de gravité des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, dispose en son article premier qui correspond à l’article D.1142-1 du Code de la santé publique qu’un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale présentent le caractère de gravité mentionné au II de l’article L. 1142-1 du Code de la santé publique lorsque la durée de l’incapacité temporaire de travail résultant de l’accident médical, de l’affection iatrogène ou de l’infection nosocomiale est au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois. À titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu lorsque : 1– la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l’activité professionnelle qu’elle exerçait avant la survenue de l’accident, de l’affection iatrogène ou de l’infection nosocomiale ; ou 2– l’accident médical, l’affection iatrogène ou l’infection nosocomiale occasionnent des troubles particulièrement graves, y compris d’ordre économique, dans les conditions d’existence. La gravité se mesure alors à travers un taux d’atteinte à l’intégrité physique ou psychique. La loi n’exige pas à la victime un seuil de gravité dépassant les 25 % (article L.1142-1 du Code de la santé publique) ; mais le seuil de 24 % est rédhibitoire (article D.1142-1 du Code de la santé publique).

128 En vertu de l’article L.1142-1, II du Code de la santé publique, l’ONIAM ne peut intervenir qu’en cas d’absence de faute professionnelle.

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santé du patient comme de l’évolution prévisible de celui-ci et la gravité appréciée au

regard de la perte fonctionnelle. L’intervention de l’ONIAM est donc subsidiaire 129

par rapport aux autres voies de recours 130. Dans la démarche indemnitaire, l’ONIAM

n’intervient pas directement. La loi le précède de l’intervention de la Commission

régionale d’indemnisation et de conciliation ou la CRCI 131 devenue depuis le décret

du 2 mars 2012, la CCI (Commission de conciliation et d’indemnisation). La

Commission procède à l’examen préalable des causes d’accident afin d’apprécier la

recevabilité des demandes de réparation au titre de solidarité nationale 132. Du côté

des patients, on constate que le système de fonds d’indemnisation a conduit à plus de

revendications. La réparation par le biais de fonds indemnitaire est de plus en plus

sollicitée et tend à l’être 133. Le système intéresse les partisans d’une indemnisation

automatique car il répond à point nommé aux incidences de l’aléa thérapeutique 134.

Bien que favorable aux victimes d’accidents médicaux, la réparation au titre de

129 La doctrine dit le fonctionnement technique des fonds indemnitaires en exposant que :

l’intervention des fonds de garantie est marquée par sa subsidiarité. Les fonds versent les indemnités qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre afin de permettre à la victime d’un accident médical de bénéficier de la réparation. La victime devra alors rapporter la preuve que ses préjudices ne sauraient être indemnisés par une autre voie. Bref, l’ONIAM intervient dans l’hypothèse où aucune faute ne peut être imputée à l’auteur de l’acte origine de l’accident ou encore dans l’hypothèse où il y a défaut d’intervention de l’assureur pour telle ou telle raison (insuffisance de primes d’assurance, inexistence de police d’assurance correspondant à ce type de sinistre), voir : Mr. J. KNETSCH, Le droit de la responsabilité et les fonds d’indemnisation, Analyse en droits français et allemand, Th. en cotutelle, Université Panthéon-Assas, Université de Cologne, 7 octobre 2011, p. 24.

130 Notamment judiciaire.

131 Il est institué dans chaque région, une ou plusieurs commissions de conciliation et d’indemnisation chargées de faciliter le règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes et aux infections nosocomiales. Pour les dispositions légales relatives à la CRCI, voir : articles L.1142-5 à L. 1142-12 du Code de la santé publique et le décret du 2 mars 2012 portant sur les modifications des dispositifs de règlement amiable des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

132 Consécutivement à sa mission d’instruction, la Commission a deux options : soit elle rend un « avis » sur l’opportunité de la réparation au titre de solidarité nationale renvoyant le dossier à la charge de l’ONIAM qui procède à l’indemnisation, soit elle propose une procédure de conciliation, notamment lorsque le dossier ne remplit pas les conditions de recevabilité pour la procédure de règlement amiable ; tel en le cas lorsque le seuil de gravité n’est pas atteint.

133 G. VINEY, Introduction à la responsabilité, Traité de droit civil, sous la direction de J. GHESTIN, 3e éd., L.G.D.J. 2008, p. 60.

134 Le procédé de fonds d’indemnisation répond à la réparation de l’aléa thérapeutique défini comme le dommage accidentel se manifestant par l’avènement des risques de la médecine, voir : aussi la définition citée par F. VIALLA, Les décisions du droit médical, éd. L.G.D.J., lextensoéditions, 2009, p. 592. En effet, les dispositions l’article L. 1142-1, II du Code de la santé publique selon lesquelles : « Lorsque la responsabilité d’un professionnel […] n’est pas engagée, un accident médical, […] ouvre droit à la réparation de préjudices du patient », nécessite la réalité d’une somme affectée pour. Ce qui explique la présence de fonds d’indemnisation financé par dotation de la branche Assurance maladie du régime générale de sécurité sociale.

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solidarité nationale pose toutefois quelques interrogations. Ce qui nous semble

justifié dans la mesure où concevoir un droit de la responsabilité médicale au seul

profit du patient, risque de fragiliser le rapport de confiance au sein du lien médical.

16. La crise issue de l’évolution du droit de la responsabilité médicale

française. — L’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des

malades et à la qualité du système de santé, apporte une réforme de l’indemnisation

des risques sanitaires issus du fonctionnement du système de santé 135. La première

appréciation de cette réforme donne à voir quelques résultats positifs. La loi a permis

un éveil du corps médical sur les exigences de leur profession, elle a rendu les

patients plus concernés et elle a mis un terme au paternalisme 136 couvrant l’activité

médicale. Seulement, à force de voir les dispositions de la loi de 2002 et en particulier

les dispositions du Titre II intitulé : « Démocratie sanitaire », le patient pense que

« tout est possible » 137. Il confond son droit premier qui est celui d’être bien soigné

avec un privilège utopique, le droit sans réserve à la guérison. Dans ce cadre, émerge

progressivement un besoin de justice partisane pour ceux qui ne visent que l’intérêt

135 Voir : J. PENNEAU, Brèves réflexion sur l’avatar d’une loi sur l’indemnisation des accidents médicaux, in

Rupture, mouvement et continuité du droit, éd., Économia 2004, p. 327 et s. ; G. VINEY, L’indemnisation des risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé, R.L.D.A., octobre 2002, n° 53 et s. ; Y. LAMBERT-FAIVRE, La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, D., 2002, p. 1367. L’étude de la loi du 4 mars 2002 révèle qu’elle comporte des mentions relatives à la responsabilité civile des professionnels et des établissements de santé. D’emblée, la loi pose le principe d’une responsabilité légale pour faute concernant les actes de prévention, de diagnostic ou de soins à l’exception des infections nosocomiales et des produits de santé (régis par la règle de sécurité de résultat) ; ensuite, elle prévoit l’obligation d’information à la charge des professionnels. De son côté, la jurisprudence a établi des solutions indemnitaires pour les faits auxquels la loi n’accorde pas réparation induisant à une impasse indemnitaire à l’encontre de la victime. Bref, des possibilités de variations de mécanisme indemnitaire sont avancées par les dispositions normatives nouvelles. Alors que l’aléa thérapeutique ne donnait pas lieu à aucune indemnisation, la Cour de cassation a été conduite à entendre la faute médicale d’une manière non restrictive ouvrant à réparation. Bref, maintenant que les conséquences d’un accident médical sont prises en charge par des fonds de garantie, il est possible de rediscuter le principe de la responsabilité pour faute en matière de réparation d’accidents médicaux. Bref, on assiste réellement à un « avatar d’une loi sur l’indemnisation des accidents médicaux », selon les expressions de Mr. J. PENNEAU., voir : Code des assurances, Appendice, Responsabilités professionnelles et diverses, mise à jour le 24 janvier 2013.

136 Pour précision, le concept paternalisme est ici entendu dans le sens de monopole de l’expertise professionnelle.

137 D’une manière générale, les usagers du système de santé « ont abandonné l’attitude de résignation devant le fatum », qui était celle des prédécesseurs, J. PENNEAU, La responsabilité médicale, éd., Sirey, 1977, p. 3. Longtemps en effet, le contrat médical a été marqué par l’inégalité foncière du médecin et du patient jointe par l’idée de bienfaisance apporté par le professionnel. Mais depuis, le praticien se trouve soumis aux mêmes lois que tous les sujets de droits en ce qui relève de la responsabilité civile professionnelle, voir : J. PENNEAU, La réforme de la responsabilité médicale : Responsabilité ou assurance, R.I.D.C., vol. 42, p. 526 ; Voir également les réactions de A. LECA, Droit de l’exercice médical en clientèle privée, 3e éd., L.E.H, 2012.

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des patients. On oublie souvent que les professionnels de santé sont tenus en raison

du risque d’accident médical lié aux actes de prévention, de diagnostic ou de soins

qu’à une obligation de moyens 138. Ce qui ne veut pas dire que le Titre II intitulé

« Démocratie sanitaire » n’a pas lieu d’être, il a juste besoin d’un réajustement.

Les dispositions relatives à la « démocratie sanitaire», instaurent la participation

active du malade aux décisions thérapeutiques le concernant ; ce qui suppose un

devoir d’information 139 à la charge du médecin. Ainsi, en fonction des informations

qui lui sont données et en concertation avec son médecin traitant, le patient prend les

décisions médicales sous les conditions de l’article L. 1111–4 du Code de la santé

publique 140. Mesure louable mais résultat inquiétant si on envisage la portée du texte.

Il peut s’en suivre si ce n’est la disparition de la décision médicale scientifiquement

prouvée du moins, sa fragilisation. La capacité de compréhension du patient et du

professionnel de la santé diffère largement en matière médicale. Des informations

trop denses risquent de déstabiliser celui qui n’a pas la faculté de comprendre

pleinement 141. Or on sait que l’obligation d’information posée par la loi de 2002,

donne l’accès direct du patient au dossier médical 142. Désormais, le patient a la

138 Le progrès médical a modifié l’état d’esprit de la société ; on pense que la guérison peut toujours

être obtenue. Par conséquent, la complication d’un acte médical ou d’un traitement s’assimile à une faute. En l’absence de faute professionnelle reconnue par l’expertise, la responsabilité repose souvent sur des argumentations juridiques purement techniques et non sur des comportements médicaux éthiquement critiquables. Face à l’exposition à une telle précarité juridique, le corps médical adopte des comportements défensifs dont il ne faut pas minimiser les retombés sur les malades, C. GUÉROT, Responsabilité médicale : où va-t-on ? La Presse Médicale, vol. 35, juin 2006, p. 1031-1034.

139 L’obligation professionnelle d’information prévue à l’article R.4127-35 du Code de la santé publique (article 35 du Code de la santé publique) a comme répondant les dispositions l’article L. 1111-2 Code de la santé publique, soit le droit du patient à l’information prévu à. Elle s’inscrit dans le principe de transparence qui favorise en amont la qualité du consentement du patient à toute intervention thérapeutique le concernant. Effectivement, la transparence permet d’accéder à un consentement éclairé de l’intéressé, Cass. civ 1ère, 27 novembre 2008, Bull. 2008, n° 273.

140 « Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé », article L. 1111–4 du Code de la santé publique.

141 « Des explications très techniques laissent souvent planer le doute chez celui qui n’a pas la capacité de les comprendre pleinement. Elles renforcent l’inquiétude et détruisent la confiance », C.GUEROT, Ibid.

142 L’article 45 de la déontologie correspondant à l’article R. 4127-45 du Code de la santé publique prévoit que les médecins doivent sur demande du patient, transmettre aux médecins qui participent à sa prise en charge ou à ceux qu’il entend consulter, les informations et documents utiles à la continuité des soins. Le droit d’accès au dossier médical est renforcé par la consécration que lui accorde la loi du 4 mars 2002 instituant l’article L.1111-2 du Code de santé publique : « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à

…/…

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possibilité de consulter l’ensemble des informations sur sa santé 143. L’initiative est

louable car on considère le droit du patient à connaître les soins qu’on lui administre ;

cependant, vu l’exigence intellectuelle pour appréhender certaines informations, il y a

aussi le risque de confondre l’intéressé.

Consécutivement à l’état d’esprit de la Société, l’entrée en vigueur de la loi du

4 mars 2002 a influencé la réflexion judiciaire. Elle est marquée par une recherche

acharnée de comportements fautifs. Ainsi, figurent des cas où en l’absence de faute

contractuelle, les juges ne manquent pas de faire appel aux articles du Code de la

santé publique 144 et du Code civil 145. Un tel phénomène implique l’effacement du

fondement contractuel de la responsabilité médicale en matière jurisprudentielle.

Dans des arrêts relativement récents, la Cour de cassation n’hésite plus à se détacher

de l’article 1147 du Code civil 146pour apprécier la faute médicale. Le 28 janvier

2010 147, la Haute Juridiction sur le fondement de l’article L. 1142-1 du Code de la

santé publique, a censuré la décision de la cour d’appel qui a limité l’indemnisation à

la perte de chance d’éviter le dommage pour inopportunité d’intervention

chirurgicale 148. Selon la Cour, « les préjudices découlent de façon directe, certaine et exclusive

l’exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d’impossibilité de la retrouver. Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser […] ». Le droit d’information implique en outre, que le secret professionnel ne puisse être opposé au patient s’agissant des informations qui le concernent, voir : G. MÉMETEAU, Cours de droit médical, éd. L.E.H., 2003, p. 259 à 262.

143 Article L.1111-7 du Code de la santé publique.

144 « En l’absence de faute professionnelle établie par expertise, la responsabilité repose souvent sur des argumentations juridiques purement techniques et non sur des comportements médicaux éthiquement critiquables », C. GUÉROT, Responsabilité médicale : où va-t-on ? La Presse Médicale, vol. 35, juin 2006, p. 1031-1034. Les dispositions de l’article L.1142-1 du Code de la santé publique favorise également le principe d’indemnisation automatique lequel, si ce n’est au titre de la responsabilité civile, l’est au titre de solidarité nationale.

145 Articles 16 et 16-3, article 1382 du Code civil français.

146 Article 1147 du Code civil relatif à la responsabilité contractuelle.

147 Il s’agit d’une faute technique. En l’espèce, une personne victime de violentes douleurs suite à une opération de vagotomie, agit en responsabilité au motif d’erreur dans le choix du traitement; autrement dit au motif d’une erreur de diagnostic.

148 Le fait de ne pas s’abstenir d’une intervention médicalement non requise a eu pour la victime le préjudice de n’avoir pas évité la souffrance d’où l’indemnisation pour perte de chance.

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d’une intervention chirurgicale à haut risque et non justifiée 149, dès lors doivent être réparés

intégralement » 150.

La perte du fondement contractuel de la responsabilité médicale, ne concerne pas

uniquement l’appréciation de la faute technique ; elle touche également l’appréciation

de la faute d’humanisme ; c’est-à-dire, le défaut d’information. Le 3 juin 2010, l’arrêt

d’appel qui a refusé la demande de réparation du patient mal informé des risques, est

cassé sur la base de l’article 1382 du Code civil. L’abandon de l’article 1147 soulevé

pourtant par le pourvoi manifeste un retour en arrière de la jurisprudence. En effet,

force est de constater que l’appréciation de la responsabilité médicale se déploie sur

le terrain délictuel 151. Ces cas sont a priori rares mais ils peuvent remettre en cause

l’acquis jurisprudentiel depuis l’arrêt Mercier 152. Enfin, un arrêt en date du

14 octobre 2010 illustre l’option de la Haute Juridiction pour la responsabilité légale.

Face aux motifs de la de la cour d’appel affirmant que l’absence de soins

consciencieux, attentifs et diligents est à l’origine de la perte de chance d’arriver à

temps à l’hôpital et de survivre, la Cour de cassation s’est fondée sur l’article L. 1142-

1 du Code de la santé publique pour retenir la responsabilité médicale. D’après elle,

« la perte d’une chance présente un caractère direct et certain chaque fois qu’est constatée la

disparition d’une éventualité favorable ». Autrement dit, le retard et le décès découlent

directement, certainement et exclusivement du fait du praticien ; dès lors doivent être

réparés intégralement.

Ces constructions jurisprudentielles conçues pour des raisons compassionnelles 153

génèrent parfois des faits inattendus comme les manifestations de la médecine

défensive 154. La médecine défensive se présente sous deux formes principales :

149 Du côté de la Cour de cassation, ceci correspond à la sanction de l’inexécution contractuelle de

prodiguer les soins appropriés.

150 M. BACACHE, La responsabilité médicale : Principes généraux, n° 472263, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18, p. 5.

151 Qualification abandonnée depuis l’arrêt Thouret-Noroy de 1835.

152 J. BELLISENT parle de « La crise de l’identité de la responsabilité contractuelle », in, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, L.G.D.J., 2001, p. 344. Ceci étant, la jurisprudence peut évoluer.

153 J. BELLISENT relève en ce sens, l’émergence d’un « droit de la réparation des dommages », in, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, L.G.D.J., 2001, p. 346.

154 La médecine défensive concerne toutes pratiques adoptées par le corps médical pour se prémunir des poursuites juridiques. La problématique se pose lorsque la démarche d’autoprotection se concrétise via le devoir légal d’information. Lors de l’entretien médical (colloque singulier), des documents sont soumis à la signature du patient attestant que le respect du devoir légal d’information. Si ce document signifie l’intégration du patient dans le processus

…/…

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le comportement d’évitement et le comportement d’assurance. Le comportement

d’évitement implique tout refus d’actes médicaux à haut risque et le comportement

d’assurance consiste en la taxation de services supplémentaires inutiles afin de

s’assurer que toutes les mesures de précautions ont été respectées 155. Pour illustrer

quelques effets pervers de l’autoprotection de la part du corps médical, la présente

étude s’est permise de retranscrire quelques résultats d’enquêtes menées en

Auvergne, Rouen et Midi-Pyrénées.

En Auvergne, 62 % des médecins interviewés disent avoir prescrit plusieurs examens complémentaires, médicaments et consultations spécialisées pour se protéger en cas d’éventuelles poursuites en justice. Si la prescription de médicaments à effets secondaires est relativement modérée, tel n’est pas le cas pour les renvois vers des confrères spécialisés : 49 % avouent l’avoir fait contre 26,2 % qui se sont abstenus. Pour la prescription d’examens complémentaires, 50 % déclarent avoir prescrit des examens biologiques ou d’imageries contre 26,5 % qui se sont abstenus. Au CHU de Rouen, les enquêtes ont montré une explosion de prescription de radiographies du crâne pour traumatismes crâniens. Enfin, chez des médecins généralistes du Midi-Pyrénées, 87,5 % des

médecins questionnés disent recourir à des prescriptions défensives 156.

Dans les cas d’espèce cités, le recours aux avis de spécialistes et aux examens

complémentaires sont motivés par la crainte des poursuites judiciaires. La qualité des

soins et la mise à profit des avancées de la technique médicale, ne sont que des

prétendues raisons. Dès lors, il s’agit bien d’une médecine défensive telle qu’elle est

définie par l’American Médical Association :

Une altération de la modalité de la pratique médicale induite par la menace de la responsabilité, dont la principale finalité est d’écarter l’éventualité des poursuites par le patient comme de fournir une défense juridique solide dans l’hypothèse où de telles poursuites seraient engagées.

Avec de telles pratiques, la diminution des risques juridiques pour le praticien peut

mettre en danger la vie du patient. En effet, les impacts de la médecine défensive sur

de soins, il assure aussi un rôle probatoire en faveur du corps médical, en cas de contestation, voir : G. BELTRAN et V. VEILLON SOKOLOFF, http://www.formationsantedroit.org.

155 P. É. DESPLATS, N. FAVROLT, L. GERBAUD et T. FAICT, L’influence de la judiciarisation sur les pratiques médicales. Quand Esculape craint Thémis, R.G.D.M., n° 28, 2008, p. 138. Pour J. BARBOT et E. FILLON, la médecine défensive est une médecine de l’évitement dans laquelle la préoccupation des médecins consiste davantage à se prémunir contre le risque judiciaire qu’à dispenser des soins appropriés à leurs malades. Elle est aussi une médecine plus couteuse qui conduit les médecins à prescrire des examens plus souvent inutiles mais destinés, en cas de problème, à prouver aux juges qu’ils n’ont pas été négligeant, in La « médecine défensive » : critique d’un concept à succès, Sciences sociales et santé, vol. 24, n° 2, juin 2006, p. 8.

156 Enquêtes conduites par P. É. DESPLATS, N. FAVROLT, L. GERBAUD et T. FAICT, R.G.D.M., Ibid. Voir aussi, J. E. BOURCIER, La judiciarisation et l’exercice de la médecine générale en 2005, Th. pour le doctorat en médecine juillet 2006, Université Paul Sabatier Toulouse, 2006.

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la santé sont considérables. L’enquête menée en Auvergne révèle par exemple, que

42 % des médecins avouent avoir prescrit plus de radiographies, de scanners ou

d’échographies, malgré la réalité d’exposition au rayonnement ionisant à visée

diagnostique 157. Enfin, il faut savoir que les examens complémentaires nécessitent

parfois des interventions invasives 158. Ce type d’intervention qui suppose de faire

pénétrer du matériel médical dans le corps n’est pas toujours confortable pour le

patient. Souvent, la médecine invasive se déroule dans le cadre d’une hospitalisation

et suivie d’une anesthésie locale ou générale. De fait, elle peut comporter des effets

secondaires, voire des risques d’accident.

Si les pratiques de la médecine défensive sont néfastes pour les patients, elles ne le

sont pas moins pour la situation juridique des médecins. Pratiquées pour se prémunir

des actions en justice, elles peuvent exposer les professionnels aux poursuites 159.

La responsabilité médicale peut être engagée pour la prescription ou la réalisation

d’examens injustifiés au sens de l’article R. 4127-40 du Code de la santé publique 160.

L’exposition des patients à des dangers potentiels constitue une atteinte au corps au

sens de l’article 16-1 du Code civil 161. Le Conseil national de l’ordre des médecins est

157 J. DONADIEU, P. SCANF, P. PIRARD, et B. AUBERT, Exposition médicale aux rayonnements ionisants à

visée diagnostique de la population française : état des lieux fin 2002, étude menée en vue de la mise en place d’un système de surveillance, Bull. apidémiol. Hebd., 2005, p. 102-106. L’étude montre une quasi-stagnation du nombre de radiologies diagnostiques réalisées en France entre 1982 et 2003, mais une augmentation de 90 % du nombre de scanners plus irradiants que les radiographies sur la même période.

158 Les examens invasifs sont des examens qui nécessitent de faire pénétrer du matériel médical dans l’organisme pour pouvoir l’explorer (fibroscopie bronchique, fibroscopie gastrique, coloscopie, …).

159 Fondamentalement, il serait illusoire de penser que la médecine défensive protège des poursuites judiciaires puisque soit disant elle diminue tout échec thérapeutique. Si l’on envisage cette pratique dans son aspect « abstention de toute intervention à risque » (comportement d’évitement) ; la mise en jeu de la responsabilité est possible en invoquant la non-assistance de personne en danger ; et si l’on considère l’aspect « taxation de services supplémentaires » (comportement d’assurance à travers les examens complémentaires), il s’avère que les interventions peuvent présenter des dangers pour la santé des patients (n° 15, ali. 5) de façon à poser la question de la responsabilité professionnelle. La position doctrinale sur la question, est sans équivoque ; elle dit : « D’une part, cette forme de pratique (la médecine défensive) n’écarte aucun danger thérapeutique ; d’autre part ; elle prive le malade des fruits des données acquises de la science auxquels il a droit, et, de ce fait, multiplie le risque médical », G. MÉMETEAU. Et G. DECROIX confirme qu’ : « Il n’est pas acquis que la médecine défensive qui s’est progressivement développée aille dans le sens de la prévention du risque pour le patient comme cela devrait être, et nous pouvons craindre qu’elle s’oriente plutôt vers un protectionnisme excessif des médecins contre leurs patients, qui risque fort de générer une certaine méfiance à l’égard des progrès réalisés chaque année, ce qui serait fort préjudiciable aux malades », Droit et médecins, Les médecins aujourd’hui en France, A.D.S.P. n° 32, 2000, p. 48.

160 Article 40 du Code de déontologie médicale.

161 L’article 16-1 du Code civil dispose que « Chacun a droit au respect de son corps […]. Le corps humain est inviolable […] ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial ». Le principe de

…/…

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aussi vigilant pour tous les examens complémentaires pouvant mettre en danger la

vie des patients. Ainsi, dans une affaire de radiographie, le Conseil a estimé que la

répétition des examens sans justification médicale est de nature à mettre en danger la

santé des patients 162. Enfin, le Code de la santé publique pose la règle de la

protection intégrale des patients en disposant en son article L. 1110-5 que : « Toute

personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le

droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est

reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales

avérées. Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances

médicales, lui faire courir des risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté ». L’une

des limites de l’intervention médicale est donc posée en ces termes : « primum non

nocere » ou ne pas faire courir un risque injustifié 163.

En somme, les critiques doctrinales émises à l’égard du droit médical français, se

résument dans le constat d’une justice partisane. Les dispositions légales qui

favorisent l’intégration des patients dans le processus de soin (la démocratie sanitaire)

produisent inconsciemment un climat de déni de l’aléa thérapeutique. En réaction à

de tel contexte, le corps médical adopte une attitude défensive qui ne manque pas de

bouleverser le « colloque singulier » 164 qui lie le médecin et le patient. Ceci étant, il faut

aussi reconnaître qu’un ensemble de principes en faveur des droits de la personne

émane du droit médical français. En ce sens, le droit médical malgache peut

librement s’en s’inspirer.

l’inviolabilité est naturellement lié à celui de l’intégrité du corps humain tel qu’il est prévu à l’article 16-3 du Code civil. Ainsi, déclarer que le corps humain est inviolable, c’est imposer qu’aucune atteinte ne puisse être portée à son intégrité, voir : F. TERRÉ et D. FENOUILLET, Droit civil, Les personnes, la famille, l’incapacité, Précis Dalloz, 7e éd., 2005, p. 58.

162 Le Conseil national de l’ordre des médecins, a estimé les examens répétitifs sans justification médicale établie dans le cas de radiographies des sinus et du thorax, réalisées tous les mois ou tous les deux mois sur des enfants en bas âges. Il s’agit d’interventions potentiellement dangereuses de nature à faire courir aux patients un risque injustifié, S.A.S. du C.N.O.M., 13 décembre 2006, n° 4193.

163 L’article 8 du Code de déontologie médicale (article R. 4127. 8 du Code de la santé publique) en ce sens que : « Dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance. Il doit, sans négliger son devoir d’assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins. Il doit tenir compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et thérapeutiques possibles.

164 Lequel consiste d’après l’expression de L. PORTES, en « la rencontre d’une confiance et d’une conscience ».

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17. Droit médical français : outil d’inspiration pour une loi relative à la

responsabilité médicale à Madagascar. — Prenant en compte les critiques émises

ultérieurement, la transposition en droit malgache doit se faire avec prudence. C’est à

ce travail de codification mesurée que voudrait se consacrer la présente étude. Pour

ce faire, il convient de prêter attention à deux éléments : l’essence de l’acte médical et

l’équité du procès. Ainsi, se rappeler que la relation thérapeutique est par essence

« une relation d’incertitude » 165 ; la médecine efficace est aussi une médecine dangereuse,

elle ne peut éliminer radicalement le danger et la menace d’accident. L’acte médical

est destiné à soigner, mais il peut aussi par lui-même tuer ou blesser 166. Quant à

l’équité du procès, elle exige à ce que le droit régisse les parties d’une manière

égalitaire. Il y a erreur si le droit favorise une seule partie, en l’occurrence les patients.

Concrètement, les « droits des malades » appelleraient à reconnaître les « droits des

soignants ». Aussi, serait-il préférable au législateur malgache de raisonner à partir du

« droit des soins » ?

18. Délimitation du sujet. — « La responsabilité morale du médecin est immense » 167

rappelait M. Penneau. De celle-ci, il est appelé à faire signe de probité à l’égard de

Dieu, de sa conscience et de ses confrères représentés par l’ordre. Quant à sa

responsabilité juridique, elle se situe sur un autre plan 168. Lorsqu’un dommage

survient au cours d’un acte médical, réparation peut-être demandée. L’acte médical

préjudiciable peut avoir lieu soit dans le cadre de la médecine publique 169, soit dans

165 P. SARGOS, Réflexion sur les accidents médicaux et la doctrine jurisprudentielle de la Cour de cassation en

matière de responsabilité médicale, in La construction de la responsabilité civile de S. CARVAL, Doctrine juridique Puf, 2001, p. 385.

166 Ibid.

167 J. PENNEAU, La responsabilité médicale, éd., Sirey, 1977, p. 3.

168 Ceci étant, l’analogie entre le manquement au devoir déontologique et celui de l’obligation de droit civil, s’est depuis opérée, A. DORSNER-DOLIVET, La responsabilité du médecin, préf. F. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, Pratique du droit, éd. Économia, 2006, p. 409. La Cour de cassation s’est positionnée sur l’appréciation des règles déontologique par rapport à la responsabilité civile médicale. D’après elle, la violation d’une obligation déontologique peut constituer une faute de droit commun. Cette position s’adressait d’abord à la profession de vétérinaire, Cass. civ 1ère, 27 janvier 1982, Bull. civ. I, n° 53 ; J.C.P., 1983, éd. G, II, 19 923, note F CHABAS ; par la suite, s’est étendue aux médecins, Cass. civ 1ère, 18 janvier 1989, Bull. civ. I, n° 19 et Cass. civ 1ère, 4 novembre1992, Gaz. Pal. 1994, I, 79, note A. DORSNER-DOLIVET. C’est ainsi que « La méconnaissance du Code de déontologie médicale peut être invoquée par une partie à l’appui d’une action en dommages et intérêts dirigée contre un médecin », Cass. civ, 1ère, 18 mars 1997, Bull. civ. I, n° 99. Voir également note de bas de page n° 106 ; voir note 12 sur la valeur juridique des dispositions déontologiques.

169 Lorsque la contestation implique un établissement de santé public, les personnels salariés des établissements tant publics que privés bénéficient de l’assurance de leur employeur à lorsqu’ils agissent dans la limite de la mission qui leur a été impartie. « Le médecin salarié, qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui est impartie par l’établissement de santé privé, n’engage pas sa responsabilité à

…/…

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celui de la médecine privée 170. La première relève de la responsabilité administrative

médicale ; la seconde, de la responsabilité civile médicale 171. En outre, il arrive que

l’acte médical préjudiciable atteigne la sensibilité de la société du fait qu’il concerne

l’intégrité physique d’un de ses membres; là intervient la responsabilité pénale. Entre

les trois catégories de responsabilité médicale (administrative, civile et pénale),

la présente étude se consacrera particulièrement à la deuxième.

19. Ce qu’il faut démontrer. — Comment le droit malgache doit-il répondre aux

besoins d’indemnisation des victimes de préjudices corporels issus d’accident

thérapeutique ? Le vœu du présent travail est d’établir un mécanisme d’indemnisation

des accidents thérapeutiques qui se veut compatible au contexte social, culturel et

économique du pays. En effet pour répondre au mieux aux attentes de la population,

les propositions de lois se doivent d’être en harmonie avec l’environnement social.

Dans un premier temps, nous étudierons l’environnement normatif de la

profession médicale à Madagascar, et en deuxième temps, nous aborderons les voies

d’élaboration d’un droit de la responsabilité médicale de ce pays.

Partie I. L’appréciation de l’encadrement juridique de la profession médicale à

Madagascar à la lumière du droit français

Partie II. Les voies d’élaboration de droit de la responsabilité médicale à

Madagascar

l’égard du patient », Cass. civ 1ère, 9 novembre 2004 (consécration de l’ « immunité » posée par la jurisprudence Costedoat, Cass. Ass. plén., 25 février. 2000).

170 Lorsque la contestation implique soit un établissement de santé privé, soit une personne exerçant à titre libéral

171 En 1936 avec l’arrêt Mercier, la responsabilité civile médicale devient contractuelle. Actuellement, elle est sujette à plusieurs revirements jurisprudentiels au point de devenir une responsabilité objective ; c’est-à-dire, une responsabilité de plein de droit. J. BELLISENT parle de « droit de la réparation des dommages ». L’affaiblissement du rôle de la faute contractuelle comme condition de la responsabilité civile et la substitution des organismes d’indemnisation aux responsables est de constat, G. VINEY, Le déclin de la responsabilité individuelle, L.G.D.J., 1965 ; De la responsabilité individuelle à la réparation des risques, Arch. Phil. Droit 1977, p. 5 et s.

Page 45: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 44 —

PARTIE I.

L’APPRÉCIATION DE L’ENCADREMENT JURIDIQUE DE LA PROFESSION MÉDICALE À MADAGASCAR

À LA LUMIÈRE DU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS

Page 46: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 45 —

20. Le droit français s’est doté d’une législation médicale spécifique : la loi du 4 mars

2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Le mérite

reconnu à cette loi est d’avoir uniformisé les paramètres fondamentaux du régime de

la responsabilité médicale, à savoir :

— Les règles applicables aux victimes d’accidents médicaux quel que soit leur

qualité : partie prenante au contrat médical ou par ricochet (consorts) ;

— Les règles applicables aux structures d’accueil quelle que soit leur statut

juridique 172 : public ou privé.

— Et la règle en matière de prescription quelle que soit la nature de la

responsabilité et le lieu d’exercice : dix ans.

L’unification des régimes juridiques opérée par la loi de 2004, facilite

l’appréciation de la responsabilité médicale. À travers elle, s’opère un dépassement de

la distinction traditionnelle des responsabilités – délictuelle et contractuelle – de la

relation médicale 173. En soustrayant la responsabilité médicale de la distinction

bipartite, la loi du 4 mars 2002 contribue à l’unité de régime de la responsabilité en

droit privé et en droit public (hôpitaux) et de fait, stabilise la jurisprudence 174. Elle

172 Les seules différences qui subsistent, résultent de la dualité de compétences juridictionnelles :

les juridictions administratives sont compétentes en matière de responsabilité des établissements publics et les juridictions judiciaires pour les établissements privés et pour l’exercice libéral.

173 Il importe de disposer de régimes spécifiques ou mixtes qui dépassent les frontières naturelles de la responsabilité civile. L’application mécanique des acquis fondamentaux tels que le triptyque « faute-préjudice-lien de causalité » ; la summa divisio responsabilité contractuelle-responsabilité délictuelle suivie par la prohibition du cumul des ordres de responsabilités, […] à la sphère de responsabilité professionnelle entraîne inévitablement des incohérences sources de solutions jurisprudentielles incertaines voire inadaptées, P. SERLOOTEN, Vers une responsabilité professionnelle, Mélanges offerts à P. HÉBRAUD, p. 805. V., également Ph. LE TOURNEAU, Rapport d’ouverture Colloque du 26 et 27 janvier 2001 au Centre de recherches sur le droit de l’activité professionnelle de l’Université de Rouen, La responsabilité professionnelle et la personne du professionnel, in La responsabilité professionnelle : une spécificité réelle ou apparente, Petites affiches, 11 juillet 2001, n° 137, p. 4.

174 Considérant les fluctuations jurisprudentielles en matière de responsabilité médicale, la question se pose si on tend vers un régime spécial de responsabilité légale, voir : M. BACACHE, La responsabilité médicale : Principes généraux, n° 472263, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18, p. 5. Dans l’affirmatif, l’évolution constatée renvoie à une autre interrogation : y a-t-il toujours intérêt à distinguer la nature délictuelle ou contractuelle de l’activité médicale ?, voir : Ph. MALAURIE, La responsabilité civile médicale, Répertoire du notariat Défrenois 2002, n° 23, Doctr. n° 37632, p. 1516. Quoiqu’il en soit, force est de constater l’effacement du fondement contractuel de la responsabilité médicale acquis en 1936, voir : les jurisprudences citées au n° 16. La Cour de cassation n’hésite plus à se détacher de l’article 1147 du Code civil dans l’appréciation de la faute médicale. Désormais, La Haute juridiction appuie certaines de ces décisions au visa de l’article L.1111-2 du Code de la santé publique voire de l’article 1132 du Code civil, Cass. civ 1ère 28 janvier 2010 ; Cass. civ 1ère 3 juin 2010 ; 14 octobre 2010.

Page 47: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 46 —

pose une référence principale en matière de responsabilité : le régime spécial de la

responsabilité médicale fondée sur la faute 175. Sur le plan pratique, cette référence ne

modifie certes pas grand-chose, mais pour la doctrine et la jurisprudence, elle rend

stable les points de repère. L’apport unificateur du régime de la responsabilité

médicale réalisé par la loi du 4 mars 2002 lui vaut pragmatisme et simplicité 176.

Si en France, la loi du 4 mars a permis au droit français de se doter d’un principe

de responsabilité professionnelle autonome, à Madagascar, il n’existe pas de norme

légale qui réglemente de façon spécifique la responsabilité professionnelle du

médecin 177. En soi cette absence n’emporte aucun bouleversement de fond puisque

les règles de la responsabilité délictuelle 178 et contractuelle 179 restent invocables en

matière contentieuse. Après tout, un professionnel est responsable selon les termes

du droit commun 180. Schématiquement, tout sujet de droit est libre d’agir dans la

limite du respect des intérêts légitimes d’autrui, il est de bonne justice d’obliger à

réparer dès l’instant où l’auteur d’un dommage ne s’est pas comporté en homme

« ordinairement capable et prévoyant » 181. Par conséquent, à défaut d’une législation

spécifique à la responsabilité médicale, les litiges relatifs aux dommages physiques et

moraux occasionnés par le médecin, peuvent être envisagés dans le cadre général du

droit commun de la responsabilité. C’est dans ce sens que la loi sur la théorie des

175 Malgré les variations jurisprudentielles, la jurisprudence judiciaire conformément à la loi du

4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, se fonde sur le principe de la responsabilité médicale pour faute, voir, M. BACACHE, La responsabilité médicale : Principes généraux, n° 472263, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18, p. 6.

176 Ph. MALAURIE, La responsabilité civile médicale, Répertoire du notariat Défrénois 2002, n° 23, Doctr. n° 37632, p. 1516 ; F. DREIFUSS-NETTER, Feue la responsabilité civile contractuelle du médecin ?, R.C.A. 2002, Chr. n° 17, L. NEYRET, Spécificité de la responsabilité médicale à la croisée du droit commun et du droit de la santé, R.L.D.C. 2009, n° 57, p. 14.

177 De nombreux droits en faveur des malades ont été établis en France […] : le droit à réparation en cas de faute prouvée (à Madagascar aussi avec comme base juridique la LTGO disposant du principe de la responsabilité civile. Le droit à réparation serait renforcé signifié par une loi spécifique ) ; l’obligation d’information supposant le consentement des malades ou encore la question de fin de vie. À Madagascar, ces sujets sont aujourd’hui au stade de conception, donc fragile, voir : B. N. RICHARD et V. JULIEN, Consécration règlementaire : Des droits des malades à Madagascar, R.D.S., septembre 2005, n° 7, p. 439.

178 Article 204 de la LTGO malgache.

179 Article 177 de la LTGO malgache.

180 En application du principe de la responsabilité professionnelle, le médecin est responsable selon les termes du droit commun, Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, 5e éd., Défrénois, 2011, n° 320.

181 J. BELLISENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, L.G.D.J., 2001, p. 370.

Page 48: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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obligations malgaches 182 est en mesure d’encadrer juridiquement, les contentieux

médicaux sur place. Pour cette raison, on peut dire que l’encadrement juridique de la

responsabilité médicale existe réellement à Madagascar.

Certaines dispositions de la LTGO malgache sont particulièrement invocables

pour asseoir juridiquement la responsabilité du médecin :

— le Chapitre IV des dispositions générales 183, intitulé : « De l’exécution en nature ou

par équivalent » 184 ;

— le Chapitre II du Titre II 185, intitulé « La responsabilité contractuelle » 186 ;

— le Chapitre I du Titre III 187, intitulé « La responsabilité extracontractuelle » 188.

En outre, en application de l’Accord de coopération en matière de justice entre la

République française et la République malgache 189, les dispositions législatives et

réglementaires du droit français, continuent à être applicables par les juridictions

malgaches à défaut de textes malgaches correspondants. En matière de responsabilité

médicale, un tel accord implique la possibilité d’invoquer les dispositions du Code

civil et du Code de la santé publique française. Enfin, le droit pénal malgache reste

invocable en cas de violation à l’intégrité physique de la personne 190.

L’existence de toutes ces dispositions législatives prouve que malgré l’absence de

régime légal propre à l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux, le droit

commun permet de soumettre les médecins aux lois applicables à l’ensemble des

citoyens 191. Après tout, si un médecin commet une faute dans l’exercice de son art,

182 La loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la Théorie générale des obligations ou la LTGO.

183 Les dispositions générales constituent le Titre Premier de la loi relative à la théorie générale des obligations.

184 Articles 51 à 57 de la LTGO.

185 Titre II : « Les actes juridiques ».

186 Article 177 à 196.

187 Titre III : « Les faits juridiques ».

188 Article 204 à 216.

189 « À défaut de textes malgaches, les dispositions législatives et réglementaires du droit français, en vigueur à Madagascar à la date à laquelle prend effet le présent Accord, continuent à être appliquées par les juridictions malgaches », Article 4 de l’Accord de coopération en matière de justice entre la République française et la République malgache. Cet Accord de coopération a été approuvé en 1960 par la loi n° 60-009 du 9 juillet 1960, J.O.R.F. du 20.07.60, p. 6616 ; J.O.R.M. n° 107 du 09.07.1960, p. 1163.

190 Article 319 et 320 du Code pénal malgache.

191 J. F. LEMAIRE et J. L. IMBERT, La responsabilité médicale, Puf, Coll. « Que sais-je ? », 1985, n° 2200 p. 9.

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il est à juste titre que lui soient appliquées 192 les règles de la responsabilité civile

fondée sur la faute. La LTGO en prévoyant aux articles 229 à 242 le principe de la

responsabilité pour faute, affirme sa compétence à régir le contentieux médical à

Madagascar.

21. En droit médical, le phénomène de recours au droit commun en raison de

l’absence de loi spécifique à l’indemnisation, n’est pas en soi critiquable. Par contre, il

l’est quand dépourvu d’effectivité, c’est-à-dire quand le bénéfice d’une réparation

n’est pas garantie. L’effectivité du droit à réparation dépend de l’intervention d’une

compagnie d’assurance qui en définitive, assure l’indemnisation 193. En France, la

mise en œuvre du principe de responsabilité médicale est jointe par l’obligation des

professionnels de santé 194, à souscrire une assurance 195. Cette assurance vise à

garantir la responsabilité professionnelle susceptible d’être engagée en cours d’activité

du fait de dommages subis par des patients. À Madagascar, bien que les compagnies

d’assurances proposent des offres couvrant les activités professionnelles 196, aucune

obligation légale d’assurance n’est rattachée à l’exercice de la profession médicale.

192 H et L. MAZEAUD, Traité théorique et pratique de la responsabilité civile délictuelle et

contractuelle, par A. TUNC, 6e éd., Montchrestien, 1965, p. 1065, n° 36 et s.

193 Y. LAMBERT-FAIVRE et L. LEVENEUR, Concilier l’indemnisation des victimes et la sauvegarde du patrimoine du responsable non fautif, in Droit des assurances, coll. Précis Dalloz, 12e éd., Dalloz 2005 n° 18.

194 L’expression « Tout professionnel de santé » comprend : le professionnel exerçant à titre libéral, l’établissement de santé ou service de santé exerçant des activités de prévention, de diagnostic ou de soin, ainsi que tout producteur, exploitant ou fournisseur de produits de santé, article L.1142-2 du Code de la santé publique, Voir également : A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd., Thémis droit, Puf, 2009, p. 453.

195 Article L.1142-2 du Code de la santé publique. Le législateur a généralisé l’obligation d’assurance qui, jusque-là, n’était imposée que pour les recherches biomédicales et pour les activités de transfusion sanguine. Seuls sont exonérés à l’obligation d’assurance, l’État et les établissements publics d’une certaine envergure car ils sont leurs propres assureurs, article L.1142-2, ali 3 du Code de la santé publique. Quant aux personnels salariés des établissements tant publics que privés, ils bénéficient de l’assurance de leur employeur sous réserve d’agir dans la limite de la mission qui leur a été impartie. « Le médecin salarié, qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui est impartie par l’établissement de santé privé, n’engage pas sa responsabilité à l’égard du patient », Cass. civ 1ère, 9 novembre 2004 (consécration de l’ « immunité » posée par la jurisprudence Costedoat, Cass. Ass. plén., 25 février. 2000).

196 Par exemple, la compagnie d’assurance ARO propose un panel de contrat de prévoyance aux professionnels. Parmi elles, figure l’assurance de responsabilité civile des entreprises comprenant la responsabilité civile professionnelle. L’offre se présente en ces termes : « Pour les personnes exerçant une profession libérale, souscrivez l’assurance de responsabilité civile professionnelle pour préserver votre tranquillité vis-à-vis des tiers quels que soient votre métier et votre activité : entreprise de construction, usine de transformation, commerçant détaillant ou grossiste, hôtelier, pharmacien ou médecin,… », www.aro.mg/ass-accident.html.

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Dans l’hypothèse d’une condamnation pour faute professionnelle, le défaut du

mécanisme assurantiel joue à l’encontre des droits à réparation pour la victime.

Titre I. La faculté d’appliquer le droit commun aux contentieux émergeant atteste

l’existence du principe de responsabilité médicale à Madagascar

Titre II. L’absence du mécanisme assurantiel implique l’inexistence de la

responsabilité médicale à Madagascar

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TITRE I.

EXISTENCE D’UN PRINCIPE DE RESPONSABILITÉ APPLICABLE À LA PROFESSION MÉDICALE À MADAGASCAR

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22. En droit civil malgache, tout comme en droit français, personne n’a jamais

contesté l’obligation du médecin de réparer une atteinte commise à l’intégrité

corporelle du patient 197. Le principe reste cependant flou tant qu’il ne précise pas

sous quel régime de responsabilité traiter la relation médecin-malade : le régime de

responsabilité délictuel ou contractuel ? La précision oblige à connaître la nature de

ladite relation 198. Pour ce, il faut se pencher sur les traits caractéristiques. Autrement

dit, l’analyse des traits dominants du lien médecin-malade permet de comprendre la

manière dont le droit pourra appréhender ce genre de rapport humain d’une nature

toute particulière 199.

La relation médecin-patient suppose de veiller à la situation de la partie faible, en

l’occurrence le malade 200. Elle suppose la protection de la vie et de l’intégrité

physique de ce dernier. Partant, la « relation » exprime une confiance mutuelle entre

le médecin et le patient 201 (le colloque singulier). Le premier accepte de remplir son

devoir déontologique de soigner, le deuxième s’abandonne entre les mains de

l’homme de l’art en qui il reconnaît le « bon père de famille ». Quant au paiement des

honoraires dont est tenu le patient, il consiste en une obligation juridique extérieure

aux soins proprement dits 202. En somme, du devoir synallagmatique entre le

médecin et le patient, on constate un soupçon de consentement mutuel qui d’après la

doctrine, « peut être extrait de la situation de fait et traduit en un contrat » 203. Et lorsqu’au

197 J. PENNEAU, La responsabilité médicale, éd., Sirey, 1977, p. 17.

198 J. BELLISSENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf. R. CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, p. 353.

199 « Il convient de noter que la relation qui s’instaure entre le médecin et son patient présente une réelle originalité », J. BELLISSENT, op. cit., p. 369.

200 M. FAURE-ABBAD, Le fait générateur de la responsabilité contractuelle, Th. pour le doctorat en droit, 5 janvier 2002, Université de Poitiers, n° 22 et s., Collection de la Faculté de droit et des sciences sociales.

201 Un auteur a fait la remarque suivante : « Le malade apporte un risque plus ou moins grave auquel il importe de remédier, et surtout il apporte au médecin comme au chirurgien une confiance telle qu’il se confie à lui avec tous ses secrets, ses espérances, ses craintes. Il remet entre ses mains son corps et sa vie, il obéit aveuglement à des prescriptions qu’il ne comprend pas (forcément), il consent à l’anesthésie qui lui fait perdre tout contrôle […]. Qu’il s’agit bien là d’un acte de foi. », A. PEYTEL, Responsabilité des médecins, Gaz. Pal. 1940, 2, Doctr., p. 50. Voir : aussi n° 15.

202 Il faut dissocier l’acte de soins stricto sensu et l’organisation matérielle du cadre où va se déploie le soin ; voir : J. BELLISSENT, op. cit., p. 350. En effet, « Il convient de distinguer d’une part l’organisation matérielle des soins : paiement des honoraires, visite du malade, assurance de soins continus sans abandon brusque tant que l’état du malade ne le permet pas[…] et d’autre part les soins proprement dit », M. GIRER, Contribution à une analyse rénovée de la relation de soins, Essai de remise en cause du contrat médical, Th. de droit privé soutenue à l’Université Jean Moulin Lyon 3 le 6 décembre 2005, Coll. Th., éd., Les Études Hospitalières, n° 18, 2008, p. 63.

203 J. BELLISSENT, op. cit., p. 337.

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sein de ce lien contractuel, les parties ne remplissent pas leurs engagements, la

responsabilité contractuelle est mise en œuvre.

Chapitre I. Exposé de la nature contractuelle de la responsabilité médicale en droit

positif malgache

Chapitre II. Analyse des modalités de réparation en cas de manquement au

contrat médical

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CHAPITRE I.

EXPOSÉ DE LA NATURE CONTRACTUELLE DU RAPPORT MÉDECIN-PATIENT EN DROIT POSITIF MALGACHE

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23. Avant les considérations de consentement et de fonction sociale justifiant la

conventionalité de la relation médicale ; il faut savoir que l’idée même qu’une

convention puisse s’établir entre médecin et patient s’est manifestée pas à pas.

D’abord, l’appréciation de la nature conventionnelle s’arrêtait au niveau de

l’« organisation matérielle » 204 de la relation médicale. Autrement dit, la

reconnaissance du caractère contractuel était délimitée à la promesse du praticien de

se mettre à la disposition du patient lequel est tenu au paiement des honoraires 205.

Or, admettre l’existence d’un « contrat médical » en limitant son effet à la seule

réglementation des rapports « extra-médicaux » : la charge imposée au patient de

rémunérer et la charge imposée du médecin de se rendre auprès du malade, conduit à

un déséquilibre entre contractants : « En face d’un engagement simplement éventuel dont serait

tenu le médecin qui ne pourrait naître, le cas échéant, que d’un délit ou d’un quasi-délit, le client se

verrait tenu d’un engagement ferme qui naîtrait d’une convention, le paiement d’honoraire » 206.

Le moyen pour remédier à un tel déséquilibre est la contractualisation de la relation

médecin-malade en rajoutant à la charge du premier, l’obligation de soigner

consciencieusement et conformément aux données acquises de la science (l’étape

initiale étant la promesse du médecin de se mettre à disposition du patient).

La situation née de cette extension conduit incontestablement à une qualification

contractuelle et génère des obligations réciproques entre les parties 207.

204 À ce stade, le contrat médical n’a d’autre effet que de mettre à la charge du patient une

obligation de donner une somme d’argent et, à la charge du médecin, une obligation de faire qui consiste matériellement dans le fait de se rendre auprès du malade, voir : J. BELLISSENT, op. cit., p. 350.

205 « Dans le contrat tacite ou écrit qui s’établit entre médecin et patient, ne s’inscrivent que les gestes extérieurs que sera tenu de faire le médecin, les seuls que le client est susceptible de juger. Que demande le client au médecin ? De lui accorder visites, consultations, opérations, bref des divers actes médicaux, à des conditions déterminées. Il fixe le prix de ces actes médicaux, les heures et les jours de consultation au cabinet, les moyens d’appel du médecin à domicile », P. NÈGRE, La responsabilité civile dans la pratique de la médecine, p. 47 et s., Th. Aix-Marseille, 1935.

206 Des auteurs tels que DEMOGUE, obs. Cass civ., 20 mai 1936, RTD civ. 1936. 691 et FALCIMAIGNE, in G. MÉMETEAU, Cours de droit médical, 5e éd., Les Études hospitalières, 2010, p. 330, dénonçaient que circonscrire le contrat médical à la dette d’honoraire produirait un « défaut d’équilibre » de la relation médecin-patient. Pour autant, l’étape d’organisation matérielle de l’activité médicale reste (à côté d’autres paramètres), un aspect fondamental de la conventionalité de la relation médicale. D’abord, l’organisation matérielle pose le principe de rétribution en contrepartie de la prestation médicale fournie (obligation synallagmatique). Et que cette rétribution confirme le rôle économique du contrat, voir : M. FAURE-ABBAD, op. cit. ; elle assure la pérennité d’une activité professionnelle. À ce sujet, un auteur dit : « Devenue une véritable profession, la médecine suppose une gestion du cabinet à la recherche au minimum d’un équilibre entre les dépenses et les recettes », A. DORSNER-DOLIVET, La responsabilité du médecin, préf. F. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, Pratique du droit, éd. Économia, 2006, p. 441 et s.

207 Pour le médecin : de se rendre auprès du malade en vue de procurer des soins consciencieux et conformes aux données acquises de la science et pour le patient : de payer les honoraires (à ce

…/…

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24. Dès l’instant où l’on admet que la relation liant le médecin et le patient est de

nature contractuelle, les règles générales en matière de conventions ont vocation à

s’appliquer 208. En droit malgache ces règles principes relèvent de la loi sur la théorie

générale des obligations ou la LTGO. Le Chapitre II du Titre II 209 de la L.T.G.O.

intitulé : « La responsabilité contractuelle » 210 donne à définir l’étendue du contrat médical

(Section I). Pour le professionnel de santé, le fait de déborder la limite de cette

étendue constitue une faute contractuelle 211 engageant la responsabilité de même

nature. (Section II).

stade de contractualisation car ultérieurement, l’analyse montre que le patient est tenu à une autre obligation).

208 « […], il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat […] que la violation, même involontaire, de cette obligation contractuelle, est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle », Cass. civ., 20 mai 1936, arrêt Mercier. De la sorte, les tenants (condition et fondement de la responsabilité civile) et les aboutissants (étendue du contrat) de cette nature contractuelle sont régis par règles en matière conventionnelle.

209 Titre II : « Les actes juridiques ».

210 Article 177 à 196.

211 La responsabilité délictuelle est issue de la violation d’un devoir général entre personnes tiers l’une à l’autre alors que la responsabilité contractuelle suppose la violation de devoirs dont des personnes se sont mises d’accord à honorer par le biais d’une convention. La faute contractuelle se situe dans l’inexécution des clauses contractuelles, Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, éd. Défrénois-Lextenso, 5e éd., 2011 p. 499.

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SECTION I. L’ÉTENDUE DU CONTRAT MÉDICAL À MADAGASCAR

25. Définir l’étendue du contrat médical revient à exposer la nature des obligations

qu’il comporte. Exposer cette nature consiste à en préciser l’ampleur exacte.

Concrètement l’analyse implique de répondre aux questions suivantes : est-ce que

l’auteur du dommage était tenu de remplir l’obligation qu’on lui reproche de ne pas

avoir exécutée ? Dans l’affirmative, est-ce que les conditions de la responsabilité sont

réunies 212 ? Bref, doit être préalablement tranchée la question de savoir jusqu’où se

déploie l’obligation contractuelle en matière médicale. Est-ce une obligation dite

« déterminée » ou une obligation générale de « prudence » 213. En droit malgache, la

distinction bipartite est consacrée à l’article 179 de la LTGO disposant que

l’obligation de résultat impose au débiteur un résultat bien « déterminé » sans lequel,

il est considéré comme n’ayant pas rempli son obligation alors que l’obligation

de prudence dite aussi obligation de moyens, le contraint seulement à agir avec

le maximum de « diligence » 214.

26. Dans les pays de tradition civiliste 215 (dont Madagascar fait partie pour des

raisons historiques n° 7, 8 ,9), l’étude des rapports juridiques entre médecin et patient

révèle d’un principe presque universellement acquis : la responsabilité médicale est de

212 Dans l’hypothèse où l’auteur était tenu de remplir l’obligation qu’on lui reproche de ne pas avoir

exécuté, il y a faute. Or, « La faute n’est pas à elle seule, suffisante pour engager sa responsabilité. Deux autres conditions doivent être réunies puisque la responsabilité civile suppose également un préjudice relié à une activité du responsable par un lien de causalité », A. DORSNER-DOLIVET, La responsabilité du médecin, préf. F. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, Pratique du droit, éd. Économia, 2006, p. 140.

213 L’intérêt pratique de la distinction des deux ordres de responsabilité se situe au niveau de la charge de la preuve. Pour la victime d’un accident médical, si l’obligation attachée au contrat médical est une obligation générale de prudence, il ne suffit pas de démontrer la non-guérison pour bénéficier de la réparation ; ce qui aurait été le cas en présence d’une obligation déterminée. L’obligation consistant seulement à agir avec diligence, la victime est tenue de prouver l’imprudence reproché à l’encontre du médecin, voir : J. L. AUBERT et É. SAVAUX, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, 13e éd., 2010, éd. Sirey Université, p. 268, 269.

214 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre CMPL, 1984, p. 14, 15.

215 Les pays de tradition civiliste sont aussi appelés : de droit romano-germanique ; de droit romano-civiliste ou de droit continental. Ils ont le droit romain comme fondement de leur système juridique. Ce système se formalise par un système complet de règles habituellement codifiées, appliquées et interprétées par les juges civils. Au sein de ce corpus juridique, vient se greffer, le droit coutumier.

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nature contractuelle 216 impliquant une obligation de moyens 217. Un médecin est

seulement tenu de donner à son patient des soins prudents et diligents 218 (§ 1).

Cependant, en raison de son statut professionnel, ce devoir de diligence pourrait au

demeurant, être qualifié de résultat. En effet, le praticien ne promet-il pas un résultat

bien défini : la thérapie ? 219. Par conséquent, qualifier le contrat médical de moyens

mérite d’être nuancé. Dans la pratique jurisprudentielle, on aura l’occasion de

constater les limites inhérentes à l’obligation de moyens du médecin. Tel est

notamment le cas pour l’obligation contractuelle de sécurité de résultat 220 (§ 2).

§ 1. Responsabilité médicale de nature contractuelle imposant une obligation de

moyens

§ 2. Les limites inhérentes à l’obligation de moyens du médecin : le principe de

l’obligation de sécurité de résultat

216 L’option de contractualiser la relation patient-médecin se situe au niveau de l’échange réciproque

de droit et d’obligation entre les parties : le praticien en contre partie de ses honoraires promet des soins consciencieux, conformes aux données acquises de la science au profit du patient, M. HARICHAUX, L’obligation pour les médecins de respecter les données de la science (à propos du cinquantenaire de l’arrêt Mercier), J.C.P., 1987, 1, 3306, in Cours de droit médical, G. MÉMETEAU, 4e éd., Les Études hospitalières, 2010, p. 328 ; P. JOURDAIN, Réflexion sur la notion de responsabilité contractuelle, in Les métamorphose de la responsabilité, Puf, Coll. Publications de la Faculté de droit et sciences sociales de Poitiers, 1998, p. 65. Sur le principe de la responsabilité contractuelle, voir : G. VINEY, La responsabilité contractuelle en question, in Le contrat au début du XXI è siècle, Études offertes à J. Ghestin, L.G.D.J. 2001, p. 921 ; CH. LARROUMET, Pour la responsabilité contractuelle, in Le droit privé français à la fin du XX è siècle, Études offertes à P. Catala, éd., Litec 2001, p. 543.

217 « Il arrive que l’obligation de sécurité soit une obligation de moyens […] », Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et Ph. STOFFEL-MUNCK, op. cit., 2011 n° 950.

218 Le régime juridique de la relation médicale repose sur le contrat médical affirmé par l’arrêt Mercier du 20 mai 1936, considéré comme décision de principe, Cass. civ., 20 mai 1936, Ibid. En matière de charge de la preuve, cela implique que le malade qui se plaint du traitement médical, soit tenu de démontrer non seulement la non-guérison mais aussi et surtout la preuve d’une attitude d’imprudence ou de négligence à la charge du médecin.

219 Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et Ph.STOFFEL-MUNCK, Les obligations, éd. Défrénois-Lextenso, 5e éd., 2011 n° 321 à 324.

220 Le principe de l’obligation de sécurité de résultat manifeste l’idée que le cocontractant ne subisse pas un dommage corporel. Autrement dit, le seul fait de l’avènement du dommage corporel engage la responsabilité. L’obligation de sécurité de résultat s’identifie alors l’obligation de moyens renforcée, ainsi en est-il de l’hôtelier tenu d’une obligation de sécurité de moyens envers les clients, mais dont la faute est facilement retenue à la moindre inattention (les sièges fragiles…), Ph. MALAURIE, L. AYNÈS ET Ph.STOFFEL-MUNCK, op. cit., n° 950.

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§ 1. RESPONSABILITÉ MÉDICALE : DE NATURE CONTRACTUELLE IMPOSANT UNE OBLIGATION DE MOYENS

27. Considérant les article 204, 205 et 206 de la LTGO malgache, il revient à la

responsabilité délictuelle de régler le problème de la réparation des dommages quelle

que soit leur nature 221. La loi au travers des articles 204 et suivants de la LTGO,

invite chacun à adopter une attitude bienveillante laquelle, pour le médecin

correspond à soigner conformément aux règles de l’art médical. Dans la mesure où

les articles 204 et suivants de la LTGO peuvent gérer les contentieux médicaux, la

question se pose sur l’intérêt d’avoir recours au procédé de contractualisation.

Autrement dit, le transfert d’un devoir aisément qualifiable de délictuel dans la sphère

conventionnelle présente-t-il une utilité réelle 222 ? Pour répondre à cette question, il

est intéressant de revenir sur les hésitations relatives à l’option de

contractualisation 223. Ainsi, observera-t-on dans un premier temps, la trajectoire de

la qualification délictuelle à la qualification contractuelle. Et dans un deuxième temps,

analyser l’ampleur des obligations de moyens attachées au contrat médical.

A. La trajectoire de la qualification délictuelle à la qualification contractuelle

B. La portée de l’obligation de moyens rattachée au contrat médical

221 La doctrine française va dans le même sens. D’après J. BELLISENT, l’idée selon laquelle, la

responsabilité délictuelle serait, en réalité, la seule institution capable d’apporter au dommage corporel une réponse satisfaisante tant juridiquement que socialement, est de plus en plus évoquée, in Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf. R. CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, p. 68. Cette tendance s’appuie sur deux théories : 1. La capacité incontestable des articles 1382 et suivants d’intervenir en matière de réparation. En effet, « Les articles 1382 et suivants du Code paraissent parfaitement indiqués pour gérer, sans exception, toutes les situations dans lesquelles une personne a subi un dommage quelconque du fait d’autrui », J. BELLISSENT, Ibid., 2. L’obstacle posé au recours intempestif à l’article 1384 du Code civil. En contractualisant la relation médicale, la Cour de cassation a entériné la position de la cour d’appel souhaitant extraire l’exercice de l’activité médicale du régime de l’article 1384 du Code civil qui sous-entend une présomption de responsabilité.

222 Une partie de la doctrine française évoque qu’ : « Il peut paraître insolite à celui qui aborde l’étude du droit, et alors que soixante années de pratique entérinent le choix contractuel opéré par la Cour de cassation en 1936, que la jurisprudence a cru pendant plus de cent ans que la responsabilité civile encourue par les praticiens ne pouvait être que délictuelle », voir : C. FALQUE, La responsabilité du médecin, après l’arrêt de la Cour de cassation du 20 mai 1936, Rev. critique législative et jurisprudence 1937, p. 609. Et A. BRETON dans sa note concernant l’arrêt Mercier de 1936, ne manque pas de poser la question « Est-ce bien la peine, oui bien la peine assurément, de changer de jurisprudence ? » ; il apporte aussitôt la réponse en disant : « c’est un scrupule d’exactitude qui a déterminé la Cour suprême à modifier sa doctrine […] en obéissant à la force de l’évidence », note sous Cass.civ 20 mai 1936, Mercier, op. cit., p. 325.

223 En droit français, les défenseurs de la thèse du contrat médical se heurtaient contre la difficulté d’identifier les éléments fondateurs du contrat en matière médicale, C. KAMKAR, Les limites de la faute : Essai sur la détermination de l’obligation de moyens en matière médicale, Th. pour le Doctorat en droit 2006, Université Jean Moulin III, IFROSS, p. 55.

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A. La trajectoire de la qualification délictuelle à la qualification contractuelle

28. Tenant compte des notes évoquées ultérieurement, la contractualisation émane

tout d’abord, de deux raisons d’ordre historique 224 ayant trait à des opportunités

jurisprudentielles 225 : la mise en retrait de l’article 1384 226 pour éviter le recours

intempestif à la présomption de responsabilité 227 et l’argumentation procédurale de

circonstance 228 ouvrant droit à un délai de prescription favorable aux victimes.

Ensuite, elle tient à une raison plus identitaire de la relation médicale.

Plus précisément, en veillant à l’intégrité du patient, la relation médecin-malade revêt

une fonction sociale 229 induite du consentement mutuel des parties 230. Sans discuter

des intérêts pratiques de ces démarches qui fondent la contractualisation de la

relation médicale, il est important de noter qu’une option transfigurant le fondement

d’une responsabilité civile 231 ne peut se limiter à des justifications loin d’être

irréfragables.

29. L’analyse successive des trois raisons sous-exposées amène aux constats suivants :

Concernant le motif de soustraire la responsabilité médicale à l’emprise de

l’article 1384 du Code civil (article 206 de la LTGO malgache) ; on sait qu’il peut être

224 Il s’agit de l’héritage de l’arrêt Mercier de 1936

225 Les griefs des demandeurs relatifs à l’usage d’un instrument inanimé (appareils de radiothérapie) sur le fondement de l’article 1384 du Code civil ; soit le principe de la responsabilité délictuelle du fait des choses dont on a la garde, sont censurés au motif que « L’article 1384, ne saurait être appliqué lorsque c’est la victime qui a sollicité qu’il soit fait à son égard un emploi déterminé de la chose » ; Trib. civ. Bouches-du-Rhône, 5 mai 1930, D.H. 1930, p. 389, CA Aix-en-Provence, 16 juillet 1931, D.P. 1932. En contractualisant la relation médicale, les juges de la Haute juridiction ont entériné la vision des juridictions inférieures : soustraire la relation médicale du domaine de l’article 1384 présumant la responsabilité. Mais fondamentalement, la contractualisation opérée par la Cour de cassation s’inscrivait dans une recherche d’opportunité procédurale : faire bénéficier la victime d’une prescription plus longue. Tant que la qualification était délictuelle, la solidarité de prescription du civil au pénal est de principe ; il en résultait une prescription triennale ; la prescription trentenaire s’acquiert avec la qualification contractuelle.

226 Article 206 de la LTGO malgache : « Toute personne qui, […] par les choses dont elle a la garde cause la mort ou porte atteinte à l’intégrité physique d’une autre personne, occasionne un dommage aux animaux et aux choses appartenant à autrui, doit réparer le préjudice causé».

227 Les termes de l’article 1384, ali. 1e r selon lesquels, « On est responsable […] du dommage […] causé par le fait […] des choses dont on a sous sa garde » ; présentent pour la jurisprudence, une occasion de fonder un principe général de responsabilité incombant au gardien d’une chose inanimée. Pour aller plus loin, voir : Ph. MALAURIE, L. AYNÈS ET Ph. STOFFEL-MUNCK, op. cit., n° 187 et s.

228 Voir, supra n° 15.

229 M. FAURE-ABBAD, op. cit, p. 24.

230 Voir : référence n 205, J. BELLISSENT et M. FAURE-ABBAD, Ibid.

231 Le transfert de la qualification délictuelle en contractuelle de la relation médicale.

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facilement battu en brèche. En effet, du moment où l’on invoque le fait que le

patient ait pu participer à l’usage de la chose, ou qu’il ait pu accepter tous les risques

auxquels l’usage de la chose pouvait l’exposer, la présomption de responsabilité de

l’article 1384 est anéantie 232.

Concernant l’intérêt procédural ayant motivé la Cour de cassation 233 à modifier la

nature de la responsabilité médicale, certes la qualification contractuelle a pour

conséquence le prolongement de la prescription et donc favorable aux victimes,

néanmoins, le fait que cet intérêt soit purement conjoncturel 234 pose question sur la

nécessité doctrinale de la contractualisation 235. D’ailleurs, il faut noter que l’intérêt

pratique dont il est question, n’est plus d’actualité en raison de l’abandon du principe

de « solidarité des prescriptions civile et pénale » 236.

Enfin, concernant la fonction sociale de la relation médecin-malade, estimée

comme raison potentielle de sa qualification contractuelle 237 ; il convient de rappeler

qu’elle n’est pas la fonction première du contrat. Celui-ci est avant tout un instrument

232 « L’article 1384, ne saurait être appliqué lorsque c’est la victime qui a sollicité qu’il soit fait à son égard un

emploi déterminé de la chose » ; Trib. civ. Marseille, arrêt Mercier, 5 mai 1930, D. H. 1930. Ce qui reviendrait à dire qu’il n’est pas forcément nécessaire de contractualiser la relation médicale pour éviter le recours intempestif à l’article 1384 ; pour faire tomber la présomption de responsabilité, il suffit d’établir la participation libre du patient en ce qui concerne l’usage des appareils à but thérapeutique, objet origine du préjudice.

233 À l’époque, les membres de la Haute juridiction, empruntaient un argument de procédure pour entériner une idée affirmée par la doctrine : la sanction des fautes commises dans l’exercice de la médecine ne pouvait donner lieu qu’à une recherche de responsabilité sur le terrain contractuel, voir : J. BELLISSENT, Contribution à l’analyse de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf. R. CABRILLAC, Bibliothèque de droit privé, L.G.D.J., 2001, p. 351, 402, 403 et 404.

234 Arrêt « Mercier » Cass. Civ., 20 mai 1936.

235 L’analyse porte à dire qu’il s’agit plus de considérations d’ordre pratique que doctrinal au risque de dérive que certains auteurs tels que JOSSERAND et BELLISSENT, nomment « forçage du contenu contractuel », J. BELLISSENT, op. cit., p. 336. « La justification de la contractualisation sur la base d’intérêt procédural omet non seulement, le réexamen des conditions générales d’apparition des conventions mais aussi les questionnements sur les intérêts doctrinaux qu’il peut y avoir dans le transfert d’un rapport consensuel préexistant (le lien médecin-malade), dans l’ordre contractuel », J. BELLISSENT, op. cit., p. 404. Il semblerait que c’est dans l’aspect consensuel de la relation médicale que se trouve l’explication de la contractualisation. Le soupçon de consentement dans le devoir synallagmatique entre le médecin et le patient, mérite en effet d’être extrait de la situation de fait et traduit en un contrat car « […] partout où les individus se regroupent pour la recherche d’un but commun, le contrat se trouve prompt à saisir la plus infime parcelle de consentement pour asseoir sa réalité et régir ainsi leur relation », Ibid., p. 337.

236 D’abord parce que la loi du 23 décembre 1980 a mis fin à la solidarité de prescription de l’action publique et de l’action civile. Ensuite, la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile instaurant l’article 2224 du Code civil, a modifié la prescription contractuelle de cinq ans indépendamment du lieu de juridiction saisie. La loi de 2008 offre en outre, la possibilité de prescription de dix ans en matière de dommages corporels (il appartient au juge de trancher sur le choix de prescription applicable.

237 M. FAURE ABBAD, op.cit, p. 24.

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de réalisation économique 238. Le devoir de veiller à l’intégrité corporelle d’autrui n’en

est pas l’essence 239. Dès l’instant où l’objet du contrat est purement patrimonial 240,

la fonction sociale que revêt la relation médicale ne justifie pas l’attribution de la

qualification contractuelle.

Ainsi, au-delà des intérêts pratiques liés à l’histoire du droit médical, le transfert du

lien médecin-patient dans la sphère conventionnelle trouve sa source dans des

éléments d’ordre conceptuels

30. Les motifs conceptuels justifiant la contractualisation de la relation médicale, sont

au nombre de deux :

— La diffusion de la notion de sécurité à toutes les situations de la vie renforçant

le principe de responsabilité 241 ;

— La recherche d’une définition objective de la notion de « faute ».

Dans un premier temps, en ce qui concerne les accidents médicaux, seul était

envisagé un principe de réparation des préjudices subis par la victime. À cet effet, on

s’est contenté de la responsabilité délictuelle sans chercher à approfondir la portée de

l’obligation professionnelle de l’auteur 242 (question qui s’il faut l’aborder, relève du

domaine déontologique). Et très rapidement, le concept d’« obligation de sécurité » s’est

238 « Que le contrat ait une fonction économique, personne n’en doute », M. FAURE ABBAD, op.cit, p. 24 à 29 ;

« Le contrat peut-être avant tout l’instrument d’une opération économique », voir : Fr. COLLART DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 6e éd., Précis Dalloz, 2002, n° 22 ; « L’échange des consentements […] évoque […] l’autre échange, éminemment intéressé : l’échange économique dont le contrat est la forme juridique », M-A. FRISON-ROCHE, in Remarques sur la distinction de la volonté et du consentement en droit des contrats, RTD civ. 1995, p. 573, spéc. n° 8.

239 CH. LAPOYADE-DESCHAMPS, Le mythe de la responsabilité contractuelle en droit français, in Failure of Contracts, sous la direction de F. D. ROSE, Hart Publishing, Oxford, 1997, p. 175 et s., spéc., p. 185-186.

240 Ibid.

241 Le souci général étant de toujours assurer plus de protection aux victimes d’accidents de toute nature, voire J. BELLISSENT, op. cit., p. 342. Le Professeur L. JOSSERAND dans son fameux article paru aux Mèlanges dédiés à F. Gény, explique bien les tenants et les aboutissants du phénomène de contractualisation, il dit : « Ainsi le mouvement est incontestable qui porte la jurisprudence à transposer la situation obligatoire des intéressés, à faire passer les obligations du délictuel dans le contractuel, à leur donner un caractère préconstitué et à améliorer ainsi la situation du créancier, qui en plaçant sa demande sous l’égide du contrat, en réclamant son dû, bénéficie d’une facilité de preuve très appréciable », in L’essor moderne du concept contractuel, p. 343.

242 À l’occasion d’un arrêt rendu le 18 juin 1835, arrêt Thouret-Noroy, la Chambre des requêtes de la Cour de cassation, il fut soutenu pour la défense d’un praticien que « le médecin dans l’exercice de sa profession n’est soumis pour les prescriptions, ordonnances et opérations de son art à aucune responsabilité. Celle ci ne peut-être invoquée contre lui que si, oubliant qu’il est médecin, et se livrant aux passions, aux vices, aux imprudences de l’homme, il occasionne par un fait répréhensible, un préjudice réel au malade qui se confie à ses soins ». Bref, la responsabilité s’exercera contre l’homme, jamais contre le médecin.

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développé jusqu’à justifier sa légitimité dans le respect des clauses contractuelles de

nature professionnelle. Partant, non seulement le professionnel fautif commet à

l’égard d’autrui (le patient) un tort, auquel cas on se serait contenté de l’article 1382

du Code civil 243 mais encore, il porte atteinte à des dispositions normatives de type

professionnel et conventionnel. Ces dispositions normatives trouvent sens en

établissant la formule selon laquelle, les praticiens ont promis des soins consciencieux à défaut

d’une promesse formelle d’assurer la guérison 244. Autrement dit, pour renforcer l’intensité

du devoir de réparation qui jusque-là se limitait à la dimension délictuelle (tort vis-à-

vis d’autrui), on est arrivé à légitimer la prétention selon laquelle, le praticien est tenu

non seulement au devoir de ne pas porter tort à autrui mais encore à une obligation

de nature professionnelle à laquelle, il s’est engagé contractuellement. Bref, un

élargissement s’est peu à peu réalisé au niveau de l’organisation de la responsabilité

civile : de l’étape de la conscience du « dommage » (responsabilité délictuelle), on

arrive successivement à la prise en compte d’une « violation d’obligation

professionnelle de type conventionnelle ».

En somme, l’organisation du devoir de réparation au sein même de l’ordre

contractuel conduit à une doctrine moderne de la responsabilité civile qui s’apparente

en une fusion des deux ordres de responsabilité civile 245.

31. Le deuxième motif d’ordre conceptuel qui justifie la contractualisation, est la

volonté d’abandonner la définition subjective de la faute, source de difficulté pour

définir le régime de la responsabilité extracontractuelle 246. En effet, par la voie

contractuelle, on part du principe de préexistence de l’obligation conventionnelle

permettant de circonscrire l’écart de conduite du débiteur. Dès lors, il devient plus

aisé de déclarer fautif tout comportement qui s’égare des termes de la convention et

quand bien même une telle attitude serait en cohérence avec le comportement

qu’aurait adopté le bon père de famille 247 !

243 En matière de délit, c’est la réalisation du dommage qui constitue le point de départ obligé de

toute recherche de responsabilité.

244 « […] le droit de la responsabilité civile proprement dite…peut-être substitué à la notion de droit de la réparation », J. BELLISSENT, op. cit., p. 427.

245 « Dans le droit fil de cette évolution doctrinale, le système de la « garantie contractuelle » se trouve subitement apte à assurer une réparation dans les mêmes termes que la responsabilité délictuelle. On a assisté semble-t-il, à un phénomène de fusion des préjudices contractuel délictuel ». J. BELLISSENT, op. cit., p. 342.

246 Ibid., p 344.

247 Ibid.

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En somme, la technique de contractualisation permet de se doter d’un outil simple

et efficace pour percevoir nettement les contours de chaque obligation. Ces derniers

se limitent à ce qui a été promis : un résultat déterminé ou uniquement la mise en

œuvre des moyens 248. Concernant les contours de l’obligation médicale, il est de

principe que l’homme de l’art s’engage à agir en cohérence avec ce qu’impose la loi

au travers des « devoirs préexistants » 249 ; cela signifie, agir en toute circonstance avec

toute la prudence et la diligence qu’exige la situation. L’art médical suppose de tout

mettre en œuvre en vue d’exercer une influence positive sur le cours de la santé d’une

personne. En tant que tel, il est parfaitement naturel que l’obligation née de la

pratique médicale soit rangée dans le domaine de l’obligation de moyens 250.

B. L’obligation médicale : une obligation de moyens

Quelle pourrait bien être, l’intensité d’une obligation contractuelle dont l’objet

tend à assurer la préservation de la vie humaine et dont l’exécution implique souvent

une atteinte directe à l’intégrité corporelle ? À travers le déploiement de l’exercice

médical à Madagascar, quelques éléments de réponses seront apportés (2), mais il

convient d’abord de revisiter les fondamentaux de l’obligation de moyens (1).

248 Le principe de la distinction entre obligation de prudence impliquant la mise en œuvre de tous

moyens pour parvenir à un but souhaité et l’obligation de résultat imposant la réalisation du but, possède un fondement divin. La Bible par l’intermédiaire du Code de l’Alliance dit : « Lorsqu’un taureau encornera un homme ou une femme et causera sa mort, ce taureau devra être lapidé. On n’en consommera pas la viande et le propriétaire du taureau ne sera pas inquiété. Mais si le taureau donnait déjà la corne auparavant et que son propriétaire dûment averti, ne l’ait pas surveillé, ce taureau s’il cause la mort d’un homme ou d’une femme, sera lapidé. Son propriétaire également sera mis à mort », Exode 21, 28-29. Cela signifie que dans la mesure où l’on a averti le débiteur d’une obligation précise et qu’il en a pris conscience, l’obligation doit être exécutée sans quoi il engage sa responsabilité (obligation de résultat). À défaut d’information du débiteur, ce dernier ne peut être tenu responsable au seul motif de l’existence d’un préjudice (obligation de moyens), voir, J. BELLISSENT. Du côté du droit commun, la summa divisio obligation de moyens-obligation de résultat .est attribué à R. DEMOGUE, Traité des obligations en général, T. 5, éd., Rousseau, Paris, 1925, n° 1237, p. 536 à 544, et T. 6, éd., Rousseau, Paris, 1927, n° 599, p. 644.

249 En toutes circonstances de la vie, chacun d’entre nous est tenu par le bons sens, la morale, les règlements et bien d’autres normes encore, . à agir ou à ne pas agir -, Ibid., p. 339.

250 La Cour de cassation renonce à mettre à la charge du médecin une véritable obligation de résultat, du moins, concernant l’obligation générale de soins. Il est tenu d’une obligation de science et de conscience, ce que conforte la prise en compte de ses obligations déontologiques, Cass.civ.1ère, 27 novembre 2008, Bull. 2008, I, no 273.

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1. Contour de l’obligation de moyens

32. La formule d’Ambroise Paré 251 et les conclusions de l’arrêt de principe

de 1936 252, relatent fort bien l’intensité ou plus précisément les limites de l’obligation

médicale. Monsieur Paré, en sa qualité de chirurgien, dit : « Je le pansai et Dieu le

guérit » 253 L’arrêt Mercier pose le principe selon lequel : « Le médecin ne promet au malade

la guérison mais il prend l’engagement de lui donner des soins non pas les quelconques […] » 254.

Ces deux affirmations laissent entendre que le médecin n’est pas tenu de guérir le

malade pour la seule et simple raison qu’il n’en a pas les moyens 255. À lire les

affirmations, le rétablissement du malade relève du sacré et ne pouvant être

cautionné par le soignant. Néanmoins, le devoir médical oblige le professionnel à

prendre toutes les mesures de nature à conduire à un résultat : la guérison 256. Ainsi,

le médecin ne promet rien d’autre que de se conformer à la diligence du bon père de

famille en mettant au service du patient, des soins consciencieux 257. Mais en quoi

251 Ambroise Paré (1510 – 1590) fut chirurgien et anatomiste. Il était chirurgien des champs de

bataille. Cette expérience professionnelle lui a permis d’acquérir une compétence dans le traitement des plaies par armes à feu. Il est le précurseur de la ligature des artères après amputation qui remplace la cautérisation qui était de pratique à l’époque. Il a également inventé et perfectionné les prothèses. En tout cela, Ambroise Paré est identifié comme le père de la chirurgie moderne. Selon J. P. POIRIER, sa principale originalité est la conception exigeante qu’il eut de sa profession, tant sur le plan technique que sur le plan humain, http://fr.wikipedia.org.

252 Arrêt Mercier.

253 J-M. DELACOMPTÉE, Ambroise Paré, La main savante, éd., Gallimard 2007, p. 1966 à 1967.

254 Cass civ., 20 mai 1936, D.P. 1936.1.88, concl. P. Matter, rapp. L. Josserand, R.T.D. civ. 1936. 691, obs., Demogue.

255 La médecine n’étant pas une science exacte, il ne pourra être reproché au médecin de ne pas être parvenu au résultat qui est la « guérison » du patient, www. Jureka.fr.

256 R. DEMOGUE, Traité des obligations en général, t. 5, n° 1237, p. 539.

257 « Le médecin ne promet pas la guérison, il promet simplement de soins assidus, éclairés et prudents » ; « Il se forme entre lui et son patient un véritable contrat comportant pour le praticien, l’engagement, sinon, bien évidemment, de guérir le malade, du moins lui donner des soins, non pas quelconques, mais consciencieux, attentifs et, réserves faites de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science », arrêt Mercier, Cass. civ., 20 mai 1936. Les mentions relatives aux missions de l’expert indiquées dans un arrêt de la cour d’appel en date du 15 juin 2006, résument bien la portée du devoir de soins consciencieux : « L’expert doit dire si les soins prodigués à Mme Y. durant la grossesse par le docteur C., ont été consciencieux, attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science à l’époque des faits, dire si cette conformité a été respectée tant lors de l’accouchement qu’après la naissance de l’enfant ; s’il y a erreurs médicales, dire si elles font suite à des négligences ou à un défaut dans l’organisation des soins. Enfin, dire si le docteur C. a fourni les informations suffisantes à la sage-femme et au docteur M. pour la bonne conduite de l’accouchement ». Par ailleurs, la conformité aux données acquises suppose pour le professionnel, le fait de se tenir continuellement informé afin de perfectionner les connaissances. La Cour de cassation, dans un arrêt de la 1ère Chambre civile en date du 28 juin 1960, affirme l’obligation des médecins d’entretenir et de perfectionner leurs connaissances, voir : C. MANOUIL, La responsabilité du médecin du travail, Mémoire de D.E.A. 2000, Université de droit et de la santé, Lille, p. 5. En effet, l’échange interprofessionnel d’informations faisant partie des devoirs de probité entre confrères (article 3 du Code de déontologie et article R. 4127-3 du Code de la santé

…/…

Page 66: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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consiste concrètement la conscience médicale ? Monsieur le procureur général Matter

en livre sagement la réponse : « La conscience médicale consiste à prodiguer des soins conformes

à la conscience et à la science médicale ». Le Code de la santé publique confirme cette thèse

en précisant qu’il s’agit des soins qui offrent « la meilleure sécurité sanitaire au regard des

connaissances médicales avérées » 258. La Cour de cassation dans ses motifs en date du

25 février 1997 résume la conscience médicale en ces termes : « La technique utilisée

était non seulement justifiée, mais la meilleure en l’état des connaissances médicales… Le matériel

employé était exempt de vice et que le praticien l’avait vérifié avant son utilisation » 259. Enfin, le

principe de conformité aux données acquises de la science 260 a trouvé son

prolongement naturel dans le Code de déontologie médicale qui dispose que :

« Dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le médecin s’engage à assurer personnellement

au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant

appel s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents » 261. Ainsi, la loi, la jurisprudence, la doctrine

et la déontologie s’accordent sur l’idée fondatrice de la « conscience médicale » : la

conformité aux données acquises ou avérées de la science. Considérant, l’évolution

des progrès de la science, les données éprouvées et admises par la communauté

scientifique sont des éléments mouvants 262. En matière de responsabilité médicale,

cela implique de déterminer l’état des connaissances médicales dont on est en droit

d’exiger du médecin au moment où sa responsabilité est mise en jeu. Pour ce, la Cour

de cassation se base sur les usages médicaux valides à l’époque des faits 263.

Une pratique médicale devient un usage du moment où elle a dépassé le stade

publique), contribue au perfectionnement des acquis. La loi quant à elle, pose le principe selon lequel « Lorsque plusieurs médecins collaborent à l’examen ou au traitement d’un malade, ils doivent se tenir mutuellement informés », article R. 4127-64 du Code de la santé publique.

258 Article L.1110-5 alinéa 1 Code de la santé publique.

259 Cass. civ 1ère, 25 février 1997, Bull. 1997, n° 72, p. 47, la Cour de cassation ne manque pas de préciser qu’en agissant de la sorte, le médecin a pris les précautions d’usage, recommandées en pareil cas et que la méthode choisie eu été judicieuse.

260 L’expression d’origine jurisprudentielle (arrêt Mercier 20 mai 1936), « données acquises de la science », a été substitué par la loi du 4 mars 2002, à la référence « connaissances médicales avérées » (article L.1110-5, al. 1. du Code de la santé publique).

261 Article 32 du Code de déontologie correspond à l’article R.4127-32 du Code de la santé publique.

262 Voir : M. BACACHE, La faute technique, n° 472266, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18-2, p. 6-7 ; certains auteurs soulignent le caractère non-statique du concept « connaissances médicales avérées », A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd., Thémis droit, Puf, 2009, p. 420.

263 Dans un arrêt de 1974, la Cour de cassation a considéré qu’une erreur de diagnostic était excusable si elle était « normalement possible et justifiable en l’état de la science et de la pratique médicale à l’époque des faits », Cass. civ 1ère 4 janvier 1974.

Page 67: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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l’expérimentation pour devenir une pratique courante à l’époque des faits 264.

Autrement dit, les données acquises de la science sont celles qui sont valides au

moment des soins 265. Pour les apprécier, le juge a souvent recours aux experts 266.

33. En somme l’obligation de moyens caractérisant le contrat médical, invite le

praticien à agir avec diligence professionnelle et humaine. Le manquement à ce

devoir engage la responsabilité médicale. Il incombe à la victime de le prouver.

À présent, il sied d’observer la déclinaison de l’obligation médicale de moyens en

droit malgache.

2. Émanation de l’obligation de moyens dans le droit médical malgache

34. Bien que n’ayant approfondi l’étendue du rapport médecin-malade, la doctrine

malgache affirme que l’obligation médicale est de moyens. Elle exige du

professionnel une attitude diligente durant l’exercice de sa fonction 267. En vertu de

l’article 179 de la LTGO, le praticien malgache doit déployer tous ses efforts pour

guérir le malade sans qu’il soit obligé d’obtenir guérison 268. Ainsi, en droit malgache,

la doctrine et la loi sont en accord avec le droit français quant à la qualification

dévolue à la relation médecin-patient : un contrat mettant à la charge du médecin une

obligation de moyens. La force obligatoire de ce contrat est prévue à l’article 123

alinéa 2 de la LTGO : « Le contrat légalement formé s’impose aux parties au même titre que la

loi. Elles doivent l’exécuter de bonne foi, dans le sens qu’elles ont entendu lui donner ». Seulement,

il faut reconnaître que la recherche de ce que les parties ont voulu communément

entendre dans un contrat aussi spécifique que la relation médicale, n’est pas évidente.

Ce dont il est certain, c’est que le malade se rapproche du médecin dans l’espoir

d’une guérison ; le médecin, par sa compétence professionnelle, tend à travers son

agir à la réalisation de cette attente. Dès lors, faut-il conclure que les parties

264 Si bien que n’a pas été tenu fautif, le médecin qui a omis de réaliser une ponction dès lors que

cette opération n’était pas encore pratique courante à l’époque des faits (combien même étant mentionnée dans la littérature médicale), Cass.civ., 14 février 1950, J.C.P. 1950, II, 5423.

265 Un dentiste ne peut au motif d’éviter au patient de lourds frais, proposer au patient de lui réaliser une prothèse mobile après extraction de dents, alors que les règles de l’art, imposait une prothèse fixe, Cass. civ.1ère 19 décembre 2000, D. 2001, somm. 3082, obs. J. PENNEAU.

266 Savoir si l’agir d’un médecin a été conforme ou non aux données acquises de la science revient à dire si la faute technique est réalisée ou pas. En raison de la complexité de la science médicale, sans être lié aux conclusions expertales, le juge est souvent amené à ordonner une expertise.

267 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre CMPL, 1984, p. 14, 15. Pour le principe de la distinction obligation de moyens-obligation de résultat : Article 179 de la LTGO.

268 Ibid.

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s’entendent à parvenir à cet objectif ? Autrement dit, l’objet du contrat médical

consiste-il à la réalisation de la guérison ? Comme nous l’avons exposé, le caractère

aléatoire d’un tel objectif, conduit à une réponse négative. La question ainsi résolue, il

importe de rédiger des dispositions propres au droit médical malgache. Et l’on

dispose des propositions normatives suivantes :

— Le médecin n’est pas responsable du seul fait de la non-guérison. Il l’est du

moment où ce fait résulte d’un défaut de prudence ou de diligence dans l’exécution

du contrat médical.

— Le contrat médical comporte l’obligation de prodiguer des soins consciencieux

et conformes aux données avérées de la science.

— Il appartient à celui qui invoque le défaut de ses obligations contractuelles d’en

rapporter les preuves de ce qu’il soutient.

35. L’effectivité de ces dispositions repose sur la bonne foi qui concrétise par la

loyauté et la coopération 269. Le devoir de loyauté implique pour le médecin

d’exécuter fidèlement ses obligations malgré les difficultés qui peuvent surgir en

cours d’exécution du contrat 270. À ce propos, l’article 128 de la LTGO dispose que

le contrat conserve sa force obligatoire même si des circonstances exceptionnelles

ont rompu l’équivalence des prestations 271. Par ailleurs, l’obligation de loyauté

suppose du débiteur de s’abstenir de toutes manœuvres dolosives, c’est-à-dire de tout

agissement frauduleux en cours d’exécution contractuelle 272. Autrement formulé, il

ne doit pas agir de façon à priver l’autre partie du bénéfice normal du contrat.

Transposée en droit médical, l’obligation de loyauté signifie que le médecin doit

s’abstenir de toute attitude qui réduirait la chance du patient d’être soigné

consciencieusement. Vis-à-vis du patient, l’obligation de loyauté signifie le devoir de

269 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre

CMPL, 1984, p. 81.

270 Ibid. Nous avons retenu, une solution jurisprudentielle relative à l’application stricte des données acquises de la science malgré les contraintes financières en cours d’exécution de contrat médical. « Un dentiste ne peut proposer au patient de lui réaliser une prothèse mobile après extraction de dents, alors que les règles de l’art, imposait une prothèse fixe, dans le seul but de lui éviter personnellement des frais qui dépassaient ses moyens financiers, les coûts d’une prothèse fixe n’étant pris en charge par la sécurité sociale que de façon symbolique », Cass. civ. 1re, 19 décembre 2000, D. 2001, somm. 3082, obs. J. PENNEAU, in La faute technique, M. BACACHE, n° 472266, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18-2, p. 6-7. Pour la Cour de cassation, les considérations financières même au profit du patient, n’autorisent pas le médecin à donner des soins non conformes aux données acquises de la science.

271 S. RANDRIANAHINORO, Ibid.

272 S. RANDRIANAHINORO, Ibid.

Page 69: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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s’abstenir de toutes manœuvres qui rendent impossible l’exécution du contrat

médical. Pour ce, il lui est requis de produire des renseignements justes sur son état et

de respecter les prescriptions médicales afférentes.

Le devoir de loyauté engendre naturellement l’obligation de coopération.

La coopération entre les contractants résulte de la nature même du contrat médical

où le « rapport de confiance » 273 fonde le lien d’obligation entre les parties. En se

remettant entre les mains de l’homme de l’art, le patient mérite de son partenaire une

attitude exempte de toute imprudence 274. En contrepartie, il lui revient de faciliter la

réalisation du contrat 275. En somme, à Madagascar, bien qu’un travail de forme reste

à faire, le principe doctrinal et légal est affirmé : la relation médicale est qualifiée de

contrat imposant une obligation de moyens.

Le principe coutumier quant à lui, s’adapte aisément au postulat du droit moderne

de la responsabilité médicale. La thèse de l’obligation de moyens fondée sur

l’incapacité du médecin à maîtriser le résultat thérapeutique 276 rejoint sans difficulté

l’étiologie 277 malgache de la maladie. Pour elle, l’issu d’un acte de soin relève du

Divin 278 alors le résultat thérapeutique échappe à la compétence du guérisseur.

273 Dit aussi « colloque singulier ».

274 La faute médicale relève d’une imprudence évidente et intense avec la conscience chez l’agent du risque encouru, voir : B. APPOLIS, L. LAMBERT-GARREL, A. METTETAL, E. TERRIER et F. VIALLA, in, L’insoutenable imprécision de la faute caractérisée dans la réparation du handicap de naissance, in Le handicap (droit, histoire, médecine), PUAM, Coll. Droit de la santé, 2004, p. 139-157.

275 Le devoir de coopération implique l’obligation du cocontractant à faciliter à l’autre, l’exécution des clauses. Ainsi en est-il du client du tailleur devant accepter les essais, voir : S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre CMPL, 1984, p. 81. « La coopération gouverne incontestablement le contrat. Elle est la nervure du contrat. Elle est sa substance. Et à ce titre, elle imprègne l’ensemble des rapports contractuels : des effets et des éléments constitutifs en faisant du contrat un acte de solidarité entre les parties et un instrument d’harmonisation de leurs attentes et promesses réciproques », F. DIESSE, Le devoir de coopération comme principe directeur du contrat, A.P.D., 1999, t. 43, p. 259. Enfin, le devoir de coopération suppose que le praticien et le patient se situent sur un pied d’égalité de sorte que toute personne puisse prendre avec le prend avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé, article L. 1111-4 Code de la santé publique français.

276 « L’aléa affecte toute activité médicale et justifie la qualification de l’obligation principale de soins en obligation de moyens », M. BACACHE, La faute technique, op. cit. n° 472266, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18-2, p. 4. « L’acte de soin est empreint d’un certain aléa fonction de la réceptivité du patient au traitement, de sa prédisposition à développer ou non certains effets secondaires au traitement, ce qui signifie qu’il ne pourrait donc être question d’imposer au médecin de guérir son patient », A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd., Thémis droit, Puf, 2009, p. 435.

277 L’étiologie est la partie de la médecine qui recherche les causes des maladies, http://fr.wikipedia.org.

278 Le traitement des affections est alors pratiqué dans une ambiance socioculturelle propre, dominée par des convictions éthiques et métaphysiques.

Page 70: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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Traditionnellement, la maladie provient de maléfices soit disant provoqués par

quelqu’un de la maison (mosavy an-trano), soit par des faiseurs de sortilèges. Elles

peuvent également résulter des sanctions des Ancêtres suite aux mépris des devoirs

coutumiers, à l’oppression des faibles, etc. Cet aspect métaphysique de tout ce qui

touche la santé humaine fait que le guérisseur ne peut être tenu responsable pour le

défaut de guérison. Au contraire, son œuvre considérée comme expression de la

volonté divine 279 le mettait à l’abri de tout reproche pour faute 280. Néanmoins, la

notoriété de son statut social l’invitait fortement à agir de bonne foi ; c’est-à-dire, à

prendre toutes les mesures de nature à atteindre le résultat escompté : la guérison 281,

d’où le principe de l’« obligation de moyens ».

En somme, tant en droit français qu’en droit malgache, l’aléa thérapeutique est

réellement admis 282, il en résulte que l’obligation de soins constitue un modèle

achevé des obligations dites « de moyens ». L’homme de l’art ne s’engage pas à guérir

mais à dispenser des soins consciencieux, attentifs et conformes aux donnés acquises

de la science. Néanmoins, la jurisprudence a parfois démontré que la profession

médicale, ne saurait être exclusive d’une obligation de sécurité vis-à-vis du patient 283.

Les tribunaux ont parfois signifié que le fait de tout mettre en œuvre pour parvenir

au résultat escompté, ne suffit pas; encore faut-il garantir la sécurité sanitaire du

279 Malgré la variété immense des us et coutumes du peuple malgache, le pays est convaincu de la

puissance du monde de l’Au-delà. Dans son ensemble, les malgaches croient en un seul Dieu qu’ils nomment Andriamanitra (littéralement le Roi parfumé) ou Zanahary (étymologiquement Dieu créateur). Pour les malgaches, le cours des évènements appartient au Créateur et échappe au vouloir du guérisseur. Les malgaches accordent également, une place importante aux Ancêtres ou les prédécesseurs défunts qu’ils nomment Razana. Ils leur témoignent des révérences à travers les cultes qui sont sources de bénédictions, http://r.doziere.pagesperso-orange.fr/html/madagascar/religion.htm.

280 L’ancien droit médical français marque également la dimension sacrée de l’issu d’un acte de soin. « Dans l’antiquité, les hommes pour guérir leurs maux, imploraient l’assistance de la divinité et celle des médiateurs sur la terre : les prêtres. Il ne leur serait point venu à l’esprit de demander à ces prêtres la réparation d’une faute commise contre une science qui était un privilège sacré »., voir : P. NÈGRE, La responsabilité civile dans la pratique de la médecine, p. 1 et s., Th. Aix-Marseille, 1935.

281 R. DÉMOGUE, Traité des obligations en général, t. 5, n° 1237, p. 539.

282 Objet d’une prochaine rubrique.

283 L’obligation accessoire de sécurité attachée à l’obligation principale de moyens du contrat médical, s’appuie sur l’article 1135 du Code civil énonçant : « Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature ». L’obligation accessoire de sécurité est en cause lorsque le patient subit des dommages corporels distincts de l’échec de soins.

Page 71: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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patient 284. En ce sens, le principe de l’obligation accessoire de sécurité constitue une

limite inhérente à l’obligation principale de moyens.

§ 2. L’OBLIGATION DE SÉCURITÉ DE RÉSULTAT : LIMITE INHÉRENTE À L’OBLIGATION DE MOYENS DU MÉDECIN

36. Traduite à sa simple expression, l’obligation de moyens consiste pour le médecin à

ne pas abandonner son malade. Tant que ce devoir est rempli, le professionnel n’a

pas à se soucier 285. La médecine étant cependant une noble carrière, « venir, regarder,

partir » 286 ne peuvent être suffisants pour son exercice. D’autant plus qu’il y a

certains aspects de l’activité médicale où le praticien reste tout de même maître de la

bonne conduite de sa profession ; il en va ainsi lorsque l’acte est dénué d’aléa (A).

L’obligation de sécurité de résultat est également requise pour faire face à des

éléments fâcheux qui environnent l’acte médical : infections nosocomiales et

prédisposition de l’état du patient (B).

A. L’obligation de sécurité de résultat invocable en cas d’inexistence d’aléa

37. L’obligation de sécurité de résultat n’a pas été instituée dans l’objectif de remettre

en cause l’obligation de moyens ; encore moins dans l’objectif d’une indemnisation

284 Dans la ligne de la jurisprudence administrative (arrêt Bianchi), un certain nombre de

juridictions de fond consacre l’obligation de sécurité de résultat en matière médicale. Les motifs de la cour d’appel de Paris dit sans ambigüité à propos de l’option pour l’obligation de sécurité de résultat : « L’obligation de moyens applicable en cas d’échec de l’acte de soins compte tenu de l’état du malade et de l’aléa inhérent à toute thérapie, n’est pas exclusive d’une obligation accessoire qui en est la suite nécessaire, destinée à assurer la sécurité du patient […] ; le chirurgien a ainsi, une obligation de sécurité qui l’oblige à réparer le dommage causé à son patient par un acte chirurgical nécessaire au traitement, même en l’absence de faute lorsque le dommage est sans rapport avec l’état antérieur du patient ni avec l’évolution prévisible de cet état », CA Paris 15 janvier 1999, J.C.P. G. 1999, II, 10068, note L. BOY.

285 Tout au plus, le médecin, est parfois reconnu contractuellement responsable du dommage subi par la malade qu’il avait négligé de visiter en temps voulu. Aucun texte de loi n’est, en principe, applicable à l’homme de l’art qui ne répond pas à l’appel d’un simple particulier. Cependant, le médecin qui, après avoir promis de se rendre auprès d’un malade, manque à sa promesse, peut, après la mort de celui-ci, encourir une responsabilité civile sous réserve à la demanderesse d’établir : 1. La volonté manifeste du médecin de ne pas se rendre auprès du malade ; 2. L’indispensabilité de son intervention pour la sauvegarde de la vie du malade ; 3. Le manquement d’avoir recours à un autre médecin, C.A., Pau, 1 mai 1900, D.P. 1902.2.33. I. Un médecin peut être également tenu responsable dans l’hypothèse où il avait abandonné en cours de traitement, le patient sans réel motif, C.A., Pau, 30 juin, 1913, D. P. 1915.2.49. Enfin, manque à ses obligations professionnelles le médecin qui, même s’il n’avait pas été clairement averti du péril, ne s’est pas assuré personnellement de l’état de santé de son malade à la suite de plusieurs appels successifs de sa famille, C.A., Agen 21 octobre 2002.

286 P MATTER, concl. Sous civ., 20 mai 1936, in La construction de la responsabilité civile de S. CARVAL 1ère éd., Doctrine juridique, Puf, 2001.

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plus favorable à la victime. Partant, elle ne signifie pas « exigence de guérison » 287.

L’obligation de sécurité de résultat émane plutôt de deux idéologies que l’on attribue

instinctivement à l’activité médicale :

— La conviction que par essence, l’acte médical ne devrait pas être générateur de

dommage corporel (1).

— La volonté de considérer les dommages dus à l’usage d’appareils médicaux (2)

1. L’acte médical : fait non-générateur de dommage corporel

38. En vue de réaliser son objectif, soit la guérison, l’activité médicale atteint

l’intégrité corporelle du patient 288. Cette atteinte au corps rattachée à la profession

médicale, fait qu’elle ne saurait être exclusive d’une obligation de sécurité de résultat.

C’est dans ce sens que la cour d’appel de Paris affirme que l’obligation de moyens

attachée au contrat médical n’est pas exclusive d’une obligation accessoire de

sécurité ; c’est la suite nécessaire en vue d’assurer la sécurité du patient 289. La cour

dispose que : « Le chirurgien a ainsi une obligation de sécurité qui l’oblige à réparer le dommage

causé à son patient par un acte chirurgical nécessaire au traitement, même en l’absence de faute,

lorsque le dommage est sans rapport avec l’état antérieur du patient ni avec l’évolution prévisible de

cet état ». Autrement dit, un acte thérapeutique ne peut être générateur de préjudice

corporel hors le cadre de l’évolution prévisible de la maladie.

39. Enfin, l’obligation de sécurité de résultat s’inscrit dans l’exigence de précision des

gestes techniques durant chaque processus thérapeutique. Le médecin est tenu de

réaliser avec précision des diagnostics, des thérapies, des surveillances, etc. Il doit

avoir à l’esprit que chaque phase est essentielle pour le rétablissement du patient. À

ce sujet, le Conseiller Sargos précisait 290 que le chirurgien — donc d’une façon

générale tous praticiens pratiquant un acte invasif sur le corps humain —, est tenu à

l’exactitude de son geste chirurgical. Théoriquement, cela signifie que la sécurité du

287 Au nom de l’équité régissant le rapport médecin-malade, l’obligation déterminée de sécurité ne

signifie pas obligation de guérison. Elle ne sanctionne pas dans le sens d’une responsabilité de plein droit dite également responsabilité objective. L’obligation déterminée de sécurité se limite à sanctionner le dommage causé par les moyens mis en œuvre par le professionnel, Ph. STOFFEL-MUNCK, L’abus dans le contrat, Th. Préc., spéc. n° 174, p. 161.

288 « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne […] », article 16-3 du Code civil français. Mais conformément à l’article 16-3 du Code civil français, il s’agit d’une atteinte à vue thérapeutique.

289 C.A. de Paris, 15 janvier. 1999, J.C.P. G.1999, II, 10068, note L. BOY.

290 P. SARGOS, L’aléa thérapeutique devant le juge judiciaire, J.C.P. G. 2000, n° 5, p. 189.

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patient impose une obligation de résultat en ce qui concerne la précision des gestes

techniques.

Dans les faits, il arrive cependant que malgré toute la précision qu’un

professionnel puisse accorder dans ces faits et gestes, l’instrument médical en lui-

même cause des dommages corporels au patient (blessures plus ou moins graves).

Dans ce cas de figure, la question se pose sur la voie à opter afin de considérer les

dommages sans remettre en cause le principe de l’obligation médicale de moyens.

Encore une fois, l’obligation de sécurité pourra bien être la réponse.

2. La volonté de considérer les dommages dus à l’usage d’appareils médicaux

40. Bien que le patient ne puisse exiger une guérison certaine, il est en droit d’attendre

que les appareils et instruments qu’on emploie pour le soigner ne lui causent pas

préjudice. Cependant, s’il se trouve blessé ou décédé par suite d’un acte

thérapeutique, il ne pourra prétendre (ni ses ayants-droit en cas de décès) à une

réparation tant que l’utilisation des appareils a été conforme aux données acquises de

la science. Dans cette hypothèse, la voie pour considérer le dommage serait le

recours au mécanisme de la présomption de responsabilité sur le fondement de

l’article 1384 du Code civil 291. Par cette voie, la victime sera dispensée de prouver la

faute puisqu’il incombe au professionnel mis en cause d’établir une cause

étrangère 292. Seulement, en vertu de la règle de non-cumul de responsabilité 293

(délictuelle de l’article 1384 et contractuelle applicable au contrat médical), la solution

291 Article 1184 ali. 1e r du Code civil : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son

propre fait, mais encore […], des choses que l’on a sous sa garde ». Ainsi, la transposition de l’article 1384 ali. 1er du Code civil paraît opportun. Le praticien en sa qualité de gardien des instruments (choses) qu’il utilise dans l’exercice de son art, est tenu de réparer toutes les conséquences dommageables causées pars ces objets.

292 Elle est définie comme tous évènements susceptibles d’exonérer le défendeur poursuivi en réparation : la force majeure (évènement naturel), le fait du tiers et la faute de la victime.

293 Règle posée à la fin du XIX ème siècle, Cass. Req. 21 janvier 1890, le « non cumul de responsabilité » signifie qu’en présence d’obligation contractuelle, la faute est définie en fonction de l’organisation des relations voulues par les parties et non en fonction des règles de la responsabilité délictuelle, Cass. civ. 2e, 9 juin 1993, Bull. civ. 1993 II, n° 204. Ainsi, l’article 1382 du Code civil, ne saurait être invoqué dans les rapports contractuels. Dans le même sens, l’article 1384 al. 1 du même Code, ne saurait être appliqué dans le cas d’un manquement à une obligation conventionnelle, Cass. civ. 2e 26 mai 1992, Bull. civ. II, n° 154.

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jurisprudentielle de l’arrêt Jandheur 294 posant le principe général de la responsabilité

délictuelle du fait des choses, ne saurait être appliquée au rapport médecin-malade 295.

41. Pour pallier cette impasse, la jurisprudence a donné naissance à l’obligation de

sécurité. La doctrine ne manque pas d’en faire l’éloge. Pour elle, l’obligation de

sécurité de résultat est perçue comme une construction jurisprudentielle remarquable

ayant permis de considérer les dommages non fautifs 296 sans ébranler les acquis

doctrinaux de la responsabilité civile. Le « souffle d’équité » 297 qu’apporte l’obligation de

sécurité dans le contrat médical est en soi indéniable ; elle a permis de mettre en

place, un moyen de réparer les préjudices. Motivée alors par ce dynamique de

compassion, la jurisprudence offre plusieurs décisions dans le sens de l’obligation

médicale de sécurité de résultat. Il en est ainsi quand la Cour de cassation met à la

charge de tout médecin une obligation de sécurité de résultat non uniquement pour

la défectuosité des produits de santé 298 mais pour tous les dommages causés par les

matériels que le médecin utilise pour l’exécution d’un acte médical d’investigation ou

de soins 299. Dans le même sens, certaines décisions énoncent que le praticien aurait

dû prendre les précautions nécessaires pour éviter que les risques dus à l’utilisation de

l’appareil ou du produit, ne se réalisent au détriment du patient. Un chirurgien a, par

exemple, été déclaré responsable pour avoir ordonné à ses aides d’élever

mécaniquement certaines parties de la table sans avoir examiné préalablement le

cadre opératoire provoquant ainsi la fracture de la jambe du patient 300. De même, la

responsabilité du praticien, est engagée pour avoir laissé un client s’installer seul sur

294 « Attendu que la présomption de responsabilité établie par l’article 1384 du Code civile à l’encontre de celui qui a

sous sa garde la chose inanimée qui a causé un dommage à autrui ne peut être détruite que par la preuve d’un cas fortuit ou de force majeure ou d’une cause étrangère qui ne lui soit pas imputable, qu’il ne suffit pas de prouver qu’il n’a commis aucune faute vu que la cause du fait dommageable est demeurée inconnue. […] La loi pour la présomption qu’elle édicte ne distingue pas suivant que la chose qui a causé le dommage était ou non actionnée par la main de l’homme ; qu’il n’est pas nécessaire qu’elle ait un vice inhérent à sa nature et susceptible de causer le dommage, l’article 1384 rattachant la responsabilité à la garde de la chose, non à la chose elle-même », Cass. civ., 13 février, 1930.

295 De nature contractuelle.

296 H. MAZEAUD, La responsabilité contractuelle, Cours de droit civil approfondi, 1946-1947, p. 127.

297 Ph. STOFFEL-MUNCK, L’abus dans le contrat : essai d’une théorie, Th. 1998, éd., L.G. D.J., 2000, p. 161.

298 L. 5211-1 du Code de la santé public.

299 La Cour fonde la responsabilité issue de ce type de dommage par la faute de maladresse. Ainsi en est-il du chirurgien qui perfore une artère lors de l’ablation d’une hernie, Cass. civ 1ère 27 octobre 1970, JurisData n° 1993-000724 ; du chirurgien qui perfore l’œsophage lors d’une dilation endoscopique, Cass. civ. 1ère 3 avril 2007, JurisData n° 2007-038376.

300 CA Paris, 5 janvier 1945, D.1945. p. 242, et, sur pourvoi, Cass. Req. 21 juill. 1947, D. 1947. p. 486.

Page 75: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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une table d’examen dont le volant était mal serré 301. Enfin, dans un arrêt du

9 novembre 1999, la responsabilité d’un radiologue a été retenue concernant une

patiente qui s’est blessée en descendant de la table d’opération, il a été jugé que

« le contrat formé entre le patient et son médecin met à la charge de ce dernier, sans préjudice de son

recours en garantie, une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne les matériels qu’il utilise

pour l’exécution d’un acte médical ou d’investigation ou de soins » 302.

42. Il est de constat que de par sa fréquence, l’obligation de sécurité de résultat

alourdit la responsabilité médicale au risque de léser le corps médical 303. Il faut donc

repréciser que malgré le phénomène d’extension du principe, il se limite en

l’occurrence à l’utilisation du matériel médical 304. Autrement dit, l’obligation de

sécurité de résultat ne saurait remettre en cause la nature de l’obligation médicale qui

est de moyens. Toutes interventions médicales, même les plus bénignes, doivent être

exclues du domaine de l’obligation de résultat puisque par essence, elles sont liées à

l’aléa 305. En effet, « dans tous les cas, l’aléa propre à l’exercice de l’art, interdit de mettre à la

charge du médecin une obligation de résultat qui conférerait au patient un véritable et inadmissible

droit à la guérison et alourdirait de façon excessive les charges des médecins » 306. Théoriquement

ceci renvoie à l’importance de distinguer l’origine du dommage 307. Si le dommage

301 CA Paris, 4 novembre 1963, D. 1964. p. 13, R.T.D. civ. 1964, p. 308, obs. A. TUNC.

302 Cass. Civ. 1ère 9 novembre 1999, D. 2000, p. 117, note P. JOURDAIN. Il nous semble que la Cour soit allée trop loin en fondant la responsabilité sur l’appareil médical, en l’occurrence la table d’opération, sachant qu’on peut tomber sur n’importe quelle table. Elle a tout de même modéré l’obligation de sécurité de résultat en considérant que la responsabilité du professionnel de santé ne saurait être engagée lorsque le dommage est dû à une complication très rare provoquée par la mise en place d’un appareil qui ne pouvait être évitée, Cass. Civ. 1ère 4 février 2003, Bull. civ. I, n° 40.

303 Notamment sur les questions financières liées à l’assurance responsabilité professionnelle mais aussi sur le ressenti que peut éprouver le corps médical.

304 L’appréciation de l’obligation de sécurité en matière de responsabilité, se limite à l’utilisation d’un accessoire, S. HOCQUET-BERG, Obligation de moyens ou obligation de résultat, À propos de la responsabilité civile du médecin, Th. de doctorat Paris XII, 1995, n° 603 à 626.

305 En l’occurrence il s’agit de l’aléa thérapeutique défini comme l’accident médical survenant en l’absence de faute médicale. La Cour de cassation le décrit comme le risque inhérent à l’acte médical, Cass.civ. 1ère, 30 septembre 1997, D., 1997, I.R., 235. Un autre arrêt de la même juridiction rajoute une précision : « un risque accidentel inhérent à l’acte médical et qui ne pouvait être maîtrisé », Cass.civ. 1ère, 8 novembre 2000, Bull.civ. I, n° 287.

306 G. VINEY et P. JOURDAIN, L’indemnisation des accidents médicaux : que peut faire la Cour de cassation ? J.C.P. G. 1997, 4016, I. J.C.P. G. 1997, I, 4016, p. 181. Voir également P. SARGOS, L’aléa thérapeutique devant le juge judiciaire, J.C.P. 2000, I, n° 202 ; G. MÉMETEAU, Utilisation du matériel médical et dentaire : vers une obligation de résultat ? Gaz. Pal. 1997, Doctr. 154 ; C. LARROUMET, L’indemnisation de l’aléa thérapeutique, D. 1999, Chron. p. 33.

307 Sur la distinction entre accident médical et échec des soins, voir : P. SARGOS, Réflexion sur les accidents médicaux et la doctrine jurisprudentielle de la Cour de cassation en matière de responsabilité médicale, D. 1996, Chr. 365, G. VINEY et P. JOURDAIN, L’indemnisation des accidents médicaux : que peut faire la

…/…

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se rattache à l’acte de soin, l’obligation de sécurité de résultat est inopérante en

l’absence de faute médicale 308 ; s’il se rattache à l’utilisation des appareils médicaux,

l’obligation de sécurité de résultat est d’application 309.

En somme, l’obligation de sécurité consiste en la promesse plus ou moins forte du

médecin à ce que l’exécution du contrat ne soit pour le patient source de dommages

corporels 310. Ensuite, elle permet de considérer le dommage lors de circonstances

fâcheuses environnant l’acte médical ; dites les aléas thérapeutiques.

B. L’obligation de sécurité de résultat invocable en présence d’aléa

43. Même avec un diagnostic juste suivi d’une thérapie appropriée, la survenance de

dommages est possible. Ainsi en est-il en cas de préjudices issus de péripéties liées à

l’acte médical. On parle alors de la réalisation d’un aléa dans le domaine

thérapeutique. L’aléa thérapeutique est défini comme l’avènement d’un dommageable

sans qu’une maladresse dans les actes de soins eu été commise ou qu’un lien soit

établi entre le dommage et l’évolution prévisible de la maladie eu égard à l’état du

patient 311. Autrement dit, la « cause » des préjudices est non identifiable de manière à

paralyser la théorie de la responsabilité fondée sur la trilogie : « dommage-cause-lien de

causalité ». Pour pallier le vide juridique, la jurisprudence a trouvé alors, un élément

concret rattachable au dommage : l’espace géographique de l’activité médicale 312.

Cour de cassation ? J.C.P., 1997, I, 4016. CH. RADE affirme que la différence entre les prestations de soins et les prestations matérielles, fonde la distinction entre les obligations de moyens et les obligations de résultat, in Réflexion sur le fondement de la responsabilité civile, D. 1999, Chr., 313 à 319, n° 13.

308 Du fait de la considération de l’aléa thérapeutique en tant qu’évènement non maîtrisable.

309 La qualité de l’usage des appareils médicaux étant supposée maîtrisable par les praticiens. Par ailleurs, « Attendu que, si le médecin est en principe tenu d’une obligation de moyens quant aux soins qu’il prodigue à son patient, il a l’obligation de réparer, indépendamment de faute prouvée, les dommages résultant accidentellement de son intervention, lorsque ces dommages sont sans relation avec les conséquences normales de l’échec de soins », C. EVIN, Les concepts fondateurs des droits des usagers du système de santé, Th. pour le doctorat en droit public, Université de Paris 8, 2001 ; voir : J. F. KRIEGK, L’obligation de sécurité : de sa maturation à l’admission du risque de développement (à propos de la responsabilité médicale), Gaz. Pal. 1994, 24 avril 1993, Doctr., 523.

310 S. HOCQUET-BERG, Obligation de moyens ou obligation de résultat, À propos de la responsabilité civile du médecin,Th. de doctorat Paris XII, 1995, n° 471.

311 voir : n° 42. La notion d’ « absence de lien par rapport à l’état initial du patient comme de l’évolution prévisible de cet état », est héritée des jurisprudences administratives, CE du 9 avril 1993 et CE du 3 novembre 1997.

312 La preuve de la faute d’un établissement ou d’un professionnel de santé pour une infection contractée en établissement de santé est particulièrement difficile. De fait, pour engager la responsabilité du médecin ou de l’établissement, la jurisprudence tant administrative que judiciaire s’est dégagée progressivement de l’exigence d’une faute au profit de la présomption de

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Page 77: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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Dès lors si le patient contracte une infection en milieu sanitaire sans qu’il y ait faute

ou prédisposition du corps, le doute se pose sur l’état ou plus précisément, la qualité

dudit espace. Et on peut parler de responsabilité pour infection contractée en milieu

sanitaire ou infection nosocomiale. La qualité de l’espace géographique n’étant pas

tributaire de l’aléa 313, la responsabilité pour infection nosocomiale suppose une

obligation de sécurité de résultat (1). La difficulté d’identifier la « cause » du

dommage se présente également lorsque l’état du patient ne prédisposait pas à son

avènement. Afin de considérer le préjudice, le raisonnement juridique a recours à

l’obligation de sécurité de résultat (2).

1. L’obligation de sécurité de résultat en cas d’infection nosocomiale

44. Pendant plusieurs années, l’obligation de moyens renforcés ou plus précisément

l’obligation de sécurité de résultat a été réservée aux établissements publics de santé.

En effet, dans un premier temps, la responsabilité pour infection nosocomiale

concernait l’établissement hospitalier. En 1988, dans l’arrêt Cohen 314, le juge

administratif a reconnu la présomption de faute en cas d’infection nosocomiale. Un

an après, il dit dans l’arrêt Bailly 315 que le régime de la responsabilité doit être en

faveur du patient dès lors « qu’apparaît dans l’exécution du service public hospitalier une

situation à caractère anormal s’étant traduite par un dommage physique sérieux subi par le malade

et alors que la preuve de la faute est impossible à établir ». De son côté, le 13 février 2012 316

le Conseil d’État rappelle qu’aux termes des articles L. 1142-1 du Code de la santé

publique, les professionnels de santé sont responsables des conséquences

dommageables des infections nosocomiales, à moins qu’ils ne rapportent la preuve

d’une cause étrangère. La Haute Juridiction administrative dispose alors que

« l’infection dont a été victime M. B… 317 présente les caractéristiques d’une infection nosocomiale

dont la responsabilité incombe au centre hospitalier, […] que la preuve de l’absence de défaut

faute, CE 9 décembre 1988, Rec., p. 431 ; Cass. civ., 21 mai 1996, Bull.civ. I, n° 219, Cass. civ. 7 juillet 1998, Resp. civ. et assur. 1998, n° 1, comm. n° 392.

313 Auquel cas, il s’agit d’obligation de moyens. En effet, concernant l’état de l’environnement médical, il s’agit pour le corps médical d’assumer une responsabilité d’asepsie qui est en principe maîtrisable.

314 CE, 9 décembre. 1988, Cohen, n° 65087, Rec., p. 431 ; Gaz. Pal 1989, II, somm. p. 442 ; D. 1990, Jur. p. 487, note Thouroude et Touchard.

315 CE, 1e r mars 1989, Resp. civ. et assur. 1989, n° 199.

316 CE, 5e Sous-section 13 février 2012.

317 Par suite d’une opération réalisée en novembre 2002 dans un centre hospitalier universitaire, le patient présente une nécrose cutanée […] qui a rendu nécessaires de nouvelles interventions ainsi qu’un traitement antibiotique, le laissant atteint de nombreuses séquelles.

Page 78: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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d’asepsie, ne sont de nature à établir l’existence d’une cause étrangère de nature à exonérer le centre

hospitalier de sa responsabilité […] » 318.

45. Par la suite, considérant la difficulté d’établissement de preuve à laquelle se

heurtaient les victimes 319, la jurisprudence judiciaire a fini par adopter la présomption

de faute. Dans l’arrêt Bonnici du 21 mai 1996 320 et dans l’arrêt Belledonne (Clinique) du

16 juin 1998 321, la Cour de cassation affirme que la responsabilité de la clinique ne

peut être écartée qu’en prouvant l’absence de faute. Mais les arrêts décisifs ont été

ceux nommés « des staphylocoques dorés », du 29 juin 1999 322, où la responsabilité

sans faute de l’établissement de santé est fondée sur une obligation déterminée de

sécurité de résultat ; c’est-à-dire que le présumé responsable ne peut s’exonérer que

par la preuve d’une cause étrangère (cas fortuit, fait d’un tiers, faute de la victime)

constitutive de force majeure (imprévisible et irrésistible).

En résumé, l’application concrète de la théorie de sécurité de résultat est traduite

en ces termes : il ne suffit plus aux établissements de santé de prouver qu’ils n’ont

pas commis de faute 323 pour s’exonérer de leur responsabilité ; encore faut-il

prouver une cause étrangère. Et cette théorie s’est au fur et à mesure, étendue aux

médecins 324 (alors qu’auparavant seuls les établissements de santé étaient tenus pour

318 CAA, 3e, 3 décembre 2009. La décision du Conseil d’État selon laquelle : « La preuve de l’absence de

défaut d’asepsie n[’est] pas de nature à établir l’existence d’une cause étrangère […] », nous semble théoriquement incohérente. En effet, si la responsabilité pour infections nosocomiales est retenue, c’est parce qu’il est présumé que le praticien maîtrise la qualité du cadre opératoire ; dès lors, l’avènement du dommage présume la défaillance à cette maîtrise. De fait, il est à juste titre que pour prouver son innocence (terme emprunté par le droit pénal), le médecin apporte des éléments attestant qu’il a accompli son devoir d’asepsie.

319 A. DORSNER-DOLIVET, La responsabilité du médecin, préf. F. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, Pratique du droit, éd. Économia, 2006, p. 194.

320 Bonnici, Cass. civ. 1ère, 21 mai 1996, D. 1997, Somm. p. 287, obs. MAZEAUD, et Somm. p. 320, obs. PENNEAU ; RTD civ. 1996, p. 913, obs. Jourdain.

321 Clinique Belledonne, Cass. civ.1ère, 16 juin 1998, J.C.P. 1999, II, n° 10122, note Denis-Chaubet ; D. 1999, Jur. p. 653, note V. Thomas.

322 Arrêts des staphylocoques dorés : P. SARGOS rapp., JCP G, 1999, II, 10138 ; D. THOUVENIN note, D. 1999, p. 559 ; J. PENNEAU obs., D. 1999, somm. p. 395 ; P. JOURDAIN obs., RTD civ. 1999, p. 841 ; S. HOCQUET-BERG note, Gaz. Pal. 6 avril 2000, p. 624, et G.VINEY, obs. J.C.P. 2000, I, 199, n° 16 ; D. 1999, Jur. p. 559, Cass. 1ère civ., 29 juin 1999, n° 97-14254, n° 97-15818, n° 97-21903. Affaires des staphylocoques dorés.

323 Première étape de l’obligation de sécurité de résultat : cas Bonnici et Belledonne.

324 Cass. civ 1ère, 29 juin 1999, J.C.P. G. 1999, II, 10138, rapp. ; P. SARGOS ; D.1999, p. 559, note D. THOUVENIN, Voir également la position de la cour d’appel de Caen, dans un cas d’infection nosocomiale contractée par un patient suite à une pose totale de prothèse de hanche. La cour dispose que l’infection est associée aux soins administrés par le chirurgien dans l’établissement de santé, C.A. Caen, 15 janvier 2008, Sem. Jur. 2009. Autrement dit, l’appréciation de la

…/…

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responsables en matière d’infection nosocomiale) et à tous les lieux d’établissement

de santé (que ce soit en salle d’opération ou d’accouchement, arrêt Belledone du 16 juin

1998).

Malgré l’option de la Cour de cassation pour la présomption de responsabilité en

cas d’infection nosocomiale, elle ne fléchit pas sur le principe de l’obligation de

moyens en matière médicale. Ainsi a-t-elle censuré l’arrêt qui engageait la

responsabilité du professionnel 325 ; arrêt qui disposait que l’absence d’aléa en la

circonstance, permettait au praticien de maîtriser l’intervention de façon à poser le

principe d’obligation de sécurité de résultat. En effet, la cour d’appel a estimé que la

seule présence de staphylocoque doré 326 démontrait l’inexécution de l’obligation de

sécurité de résultat consistant à l’obligation d’asepsie. Le pourvoi a été admis sur le

fondement de l’article 1147 du Code civil au motif que le praticien ne peut être tenu

d’une obligation de résultat 327. Ce que l’on pourrait notifier de cette décision de la

Cour de cassation, est qu’elle entraîne une confusion entre la stérilisation 328 et l’acte

thérapeutique lui-même 329. En effet, la présence de staphylocoque doré suppose un

manquement de stérilisation de l’environnement allant de pair avec l’obligation de

sécurité de résultat ; partant, il est illogique de la part de la Haute Juridiction de

s’abriter sous le couvert de l’obligation de moyens (rattachée quant à elle à l’acte

thérapeutique). En même temps, il faut reconnaître que la position de la cour d’appel

selon laquelle une intervention est « ordinaire » donc dénuée d’aléa, est difficilement

admissible car une intervention médicale aussi courante soit-elle, n’est jamais à l’abri

de péripéties. Ainsi, indépendamment de la portée verdict, l’arrêt a le mérite de

rappeler la vigilance requise dans la distinction entre ce qui relève de l’acte de

stérilisation et ce qui relève de l’acte thérapeutique. Désormais en matière de

stérilisation, il peut être retenu que le constat d’une infection nosocomiale présume le

manquement à l’obligation d’asepsie. Autrement formulé, en matière de stérilisation,

l’obligation médicale relève d’une sécurité de résultat. Le fait de rendre stérile un

environnement ou des instruments est un acte indépendant de l’acte thérapeutique

responsabilité en cas d’infection nosocomiale, prend à la fois en compte, le chirurgien et l’établissement.

325 D’après la Cour d’appel, une arthrographie constituant une intervention relativement banale ne présente en elle-même aucun aléa qui puisse justifier une exonération de responsabilité.

326 La deuxième espèce des arrêts dits des staphylocoques dorés du 29 juin 1999.

327 Cass. civ. 1ère, 28 juin 1989, Bull. civ. I, n° 266, D., 1990, p. 413, note Y. DAGORNE-LABBE.

328 Auquel cas, c’est le principe de l’obligation de sécurité de résultat qui est d’application.

329 Qui suppose, une obligation contractuelle de moyens.

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lui-même ; de fait ne présente aucun caractère aléatoire qui puisse justifier une simple

obligation de moyens.

Avec l’avènement de la loi du 4 mars 2002, les dispositions relatives aux infections

nosocomiales se sont limitées aux établissements de santé 330. Les professionnels

exerçant dans leur cabinet libéral ne sont plus tenus que d’une obligation de moyens

bien qu’il s’agisse d’infections nosocomiales. Les solutions jurisprudentielles des

années 1988 et suivantes sont ainsi rendues désuètes. Mais la doctrine, semble

modérer cette position. Le Conseiller Sargos estime que, « même si les obligations légales

de lutte contre les infections nosocomiales pèsent à titre principal sur les entités que sont les

établissements de santé, il n’en demeure pas moins que le devoir d’asepsie est une obligation

fondamentale des médecins[…] » 331. Et le Code de déontologie médicale confirme :

« Le médecin doit veiller à la stérilisation et à la décontamination des dispositifs médicaux qu’il

utilise » 332. Après tout, il va sans dire que l’exigence de perfection dans les conditions

d’asepsie de l’environnement sanitaire incombe au corps médical, et donc aux

praticiens 333 indépendamment de leur statut.

En somme, concernant les infections nosocomiales, le principe d’une

présomption de responsabilité est maintenu malgré les fluctuations jurisprudentielles,

doctrinales et légales. Le législateur a toutefois prévu, l’intervention d’une

indemnisation au titre de solidarité nationale 334 lorsque la victime ne bénéficie pas

d’aucune voie de recours sur le plan judiciaire. L’indemnisation au titre de solidarité

nationale confirme que l’obligation de sécurité de résultat n’enlève en rien la nature

première de l’obligation médicale qui est de moyens. Le principe intangible de

l’obligation de moyens se fonde sur le fait que la pathologie ou la susceptibilité

individuelle du patient à l’intervention constituent une cause potentielle des

dommages. Si donc le rapport entre la prédisposition du patient et les dommages,

330 Article L 1142-1 du Code de la santé publique : « Les établissements, services de santé et organismes […]

sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la cause étrangère ».

331 P. SARGOS, note Cass. civ. 1ère 29 juin 1999, Médecine et Droit 1999, n° 37 p. 3 ; voir : F. VIALLA, L’obligation de sécurité du médecin en matière d’infection nosocomiale et le retour du staphylocoque doré, Médecine et Droit 1999, n° 37, p. 4 . 7.

332 Article 71 du Code de déontologie médicale français

333 P. SARGOS, F. VIALLA, Ibid.

334 Intervention des organismes d’indemnisation.

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n’est pas établi, un régime favorable à la victime se dessine 335 : l’obligation de

sécurité de résultat.

2. L’obligation de sécurité de résultat et l’état de prédisposition du patient au dommage

46. Avant de décliner le lien entre obligation de sécurité et prédisposition du patient, il

convient de resituer la notion de « prédisposition ». En matière médicale, la guérison

ne dépend pas seulement des connaissances théoriques et de la compétence

professionnelle du soignant ; elle est déterminée en outre par des paramètres qui

échappent à l’agir du praticien. Ce dernier intervient en effet, sur le corps dont les

réactions sont imprévisibles car propre à chacun ; il intervient sur une personne dont

le mental peut faire réussir ou échouer le traitement 336. Ainsi, le corps malade est

prédisposé, il comporte des fonctionnements avec ses propres évolutions et qui

influencent sur l’issu des interventions, notamment en présence d’une pathologie

endogène plus ou moins grave. Bref, la prédisposition désigne tout état pathologique,

toute particularité physique ou mentale anormale, propre à aggraver le préjudice

résultant d’un accident 337.

47. La pathologie ou la susceptibilité individuelle du patient à l’intervention, si elle

joue un rôle dans la survenance du dommage constitue une cause étrangère par

rapport au fait du médecin. Théoriquement, la cause étrangère rompt le lien de

causalité entre l’acte de soin et le dommage. Par conséquent, le médecin est exonéré

de sa responsabilité 338. À contrario, lorsque le dommage est sans rapport avec l’état

pathologique du patient, le lien de causalité est supposé établie avec l’acte de soin 339.

335 P. SARGOS, Réflexion sur les accidents médicaux et la doctrine jurisprudentielle de la Cour de cassation en

matière de responsabilité médicale, D. 1996, Chr. 365. L. Boy, « Il y a quelques années déjà, un auteur appelait de ses vœux une jurisprudence créant un « courant provocateur » qui entraînerait l’intervention du législateur en matière de responsabilité médicale (J. Penneau, obs. D. 1997, somm. p. 321). Le Tribunal de grande instance de Paris semble l’avoir entendu. Il affirme, en effet, dans deux jugements du 5 mai et du 20 octobre. 1997 que le chirurgien supporte une obligation de sécurité-résultat envers son client, […] ».

336 S. HOCQUET-BERG, Obligation de moyens ou obligation de résultat, À propos de la responsabilité civile du médecin, Th. de doctorat Paris XII, 1995, n° 147 à 152.

337 J. NGUYEN THANH NHA, L’influence de la prédisposition de la victime sur l’obligation à réparation du défendeur à l’action en réparation, R. T. D. civ. 1976, p. 1-29.

338 D’où le principe de l’obligation de moyens invitant la victime à rapporter la preuve d’une faute médicale

339 Dès lors l’accident médical est défini par une double critère tenant à sa nature : dommage distinct de l’échec des soins mais aussi à son origine : dommage ne résultant pas d’une faute du praticien, voir : G. VINEY et P. JOURDAIN, L’indemnisation des accidents médicaux, J.C.P. G. 1997, I, 4016 ; dans le même sens, l’hypothèse d’une réalisation en dehors de toute faute d’un risque

…/…

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Dans ce cas de figure, tout comme en matière d’infection nosocomiale, un régime

favorable à la victime se prononce 340. En effet, la théorie a conduit la jurisprudence

tant administrative 341 que judiciaire 342 (après quelques années de différence de

positionnement) 343 à adopter le principe selon lequel, le contrat médical comporte à

côté de l’obligation principale de soins, des obligations accessoires notamment de

sécurité. Celle-ci est d’application lorsque le patient subit des dommages corporels

distincts de l’échec des soins 344.

En somme, bien que la faute du praticien ne soit établie, le seul fait que l’aggravation

de l’état du patient n’est pas lié à la prédisposition du patient, présume un lien de

causalité entre le dommage et l’acte d’intervention. Autrement dit, l’obligation de

sécurité de résultat impose au médecin à ce que l’aggravation de l’état du patient

n’émane pas de son agir. Et si l’aggravation a lieu, afin de s’exonérer de la

responsabilité il importe d’établir le lien avec l’évolution prévisible de l’état de santé

du patient.

48. Une autre question se pose dans le domaine de la prédisposition corporelle du

patient : Dans l’hypothèse où la prédisposition participe juste pour une partie à

l’avènement du dommage, le médecin peut-il s’en servir en vue d’une exonération

partielle de la dette de réparation ? Le principe de causalité partielle n’étant pas admis

en droit 345, l’argument de participation partielle de la prédisposition du patient au

accidentel inhérent à l’acte médical et qui ne pouvait être maîtrisé, P. SARGOS, L’aléa thérapeutique devant le juge judiciaire, J.C.P. G. 2000, I, 202

340 P. SARGOS, Ibid.

341 Dans l’arrêt Bianchi en date du 9 avril 1993, le CE pose le principe d’une responsabilité sans faute de la puissance publique en cas d’accident médical entendu comme « le dommage sans rapport avec l’état initial du patient ou avec l’évolution prévisible de cet état ». La même solution est adoptée pour un acte médical à finalité non thérapeutique, arrêt Hôpital Joseph Imbert d’Arles en date du 3 novembre 1997.

342 « L’obligation de moyens applicable en cas d’échec de l’acte de soins compte tenu de l’état du malade et l’aléa inhérent à toute thérapie, n’est pas exclusive d’une obligation accessoire qui en est la suite nécessaire, destinée à assurer la sécurité du patient […], le chirurgien a ainsi une obligation de sécurité qui l’oblige à réparer le dommage causé à son patient par un acte chirurgical nécessaire au traitement même en l’absence de faute lorsque le dommage est sans rapport avec l’état antérieur du patient ni avec l’évolution prévisible de cet état », CA Paris, 15 juin 1999, J.C.P. G., 1999, II, 10068, note L. Boy. Dans le même sens, voir : TGI de Paris, 5 mai et 20 octobre 1997, D., 1998, p. 558, note L. Boy et TGI de Metz, 12 août 1998, Gaz. Pal. 7 mai 1999, note S. Hoquet-Berg.

343 Voir : M. BACACHE, La faute technique, n° 472266, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18-2, p. 3.

344 Voir : M. BACACHE, op. cit. p. 2.

345 Ph. MARTINI, La responsabilité du chirurgien, Th. de Droit soutenu à l’Université Aix-Marseille III, le 9 janvier 1998, Préf. G. LOISEAU, La responsabilité du chirurgien, Coll. Thèses, L.E.H., 2000, p. 146. L’auteur suppose que la causalité juridique diffère de la causalité matérielle. Par voie de

…/…

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dommage, est inopérant 346. La responsabilité doit avoir une seule origine : l’acte de

soin ou la prédisposition de l’état du patient.

49. Cependant même si l’influence causale de la prédisposition sur l’aggravation du

dommage n’exonère pas le médecin de sa responsabilité ; ce dernier n’est tenu que de

la part du dommage qu’il a causé. Ce qui reviendrait à dire que la prédisposition est

un élément qui influence l’évaluation des dommages et intérêts accordés aux

victimes 347. Ce qui est tout à fait juste car il serait inéquitable de ne pas partager la

dette de responsabilité et faire peser au praticien toutes les conséquences

d’événements non maîtrisables. En vertu du principe de l’obligation de moyens

rattaché au contrat médical, le médecin est tenu de réparer intégralement les

conséquences de sa faute et non l’évolution inéluctable de l’état de santé du patient.

En somme, le contrat médical comporte aux côtés de l’obligation principale de

moyens liée aux soins, des obligations accessoires notamment de sécurité.

L’obligation de sécurité est d’application lorsque le patient contracte à l’occasion

d’une intervention, une maladie infectieuse au sein d’établissement de santé ou

encore lorsque le dommage est sans rapport avec l’état antérieur du patient ni avec

l’évolution prévisible de cet état.

Dans la mesure où le médecin assume une responsabilité de moyens, le critère de

la faute doit pouvoir s’apprécier.

conséquence, l’influence causale de la prédisposition du « corps » du patient, devient de facto moins évidente quant à l’appréciation de la responsabilité juridique du praticien. « Pour le juriste, la causalité obéit à la loi du tout ou rien, de sorte que la cause existe ou pas et il n’y a pas de causalité partielle […] », M. BERNARD, in, Imputabilité et état antérieur, infodoc.inserm.fr/éthique.

346 « La prédisposition par laquelle l’état de ses organes a contribué à une issue fatale d l’intervention n’est pas une cause d’irresponsabilité pour le praticien (chirurgien) et ne diminue pas les indemnités susceptibles de résulter de sa faute », CA Paris 5 mars 1957, J.C.P. G. II, 1957, 10020, obs. Savatier.

347 Sur l’influence des prédispositions de la victime sur le montant de la réparation, un auteur dit : « La jurisprudence civile, en matière contractuelle, limite le montant des dommages et intérêts dus par les chirurgiens fautifs aux seules conséquences de sa faute, notamment en cas d’invalidité et ce sur le fondement de l’appréciation in concreto du dommage (H. et L. Mazeaud et A. Tunc, Traité théorique et pratique de la responsabilité délictuelle et contractuelle, t. 1, préc. note 10, n° 2393 et s.) », Ph. MARTINI, op. cit., p. 149.

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SECTION II. LA FAUTE : CONDITION ET FONDEMENT DE LA RESPONSABILITÉ EN DROIT MÉDICAL MALGACHE

50. À Madagascar, quand les médecins sont attraits devant un tribunal en raison de

litige relatif à l’exercice de leur profession, les remarques du professeur Thouvenin

viennent à point nommé : « Les médecins sont attraits devant un tribunal non en raison

de l’effraction d’une telle ou telle règlementation propre à l’exercice médical; ils le sont parce que

supposés avoir causé un accident ayant engendré un dommage » 348. Si ce phénomène est

compréhensible en raison de l’inexistence de règlementation propre à la

responsabilité médicale, il convient de le mener jusqu’au bout de la logique de la

responsabilité civile. Pour asseoir la responsabilité civile, le dommage appelle d’autres

éléments car si on condamnait quelqu’un qui, sans faute, a causé un dommage à le

réparer, on risque de condamner un innocent 349. Seule la personne qui, par sa faute,

cause un dommage est tenue de le réparer. Deux autres conditions doivent être

réunies pour engager la responsabilité : la faute et son lien de causalité avec le

dommage. Qu’entendre par « faute » ? Bien qu’il soit difficile de projeter une

définition figée sur une notion aussi vague qu’est la faute 350 ; personne n’a démenti

qu’elle consiste en une défaillance de conduite se traduisant par un manquement à

une « obligation préexistante » 351. Sachant que la présente étude porte sur le droit

médical malgache, nous allons observer dans un premier temps les contenus des

obligations ou des comportements à ne pas enfreindre dans le contexte

malgache (§ 1). La faute avons-nous dit est une notion vaste ; pour en avoir meilleure

compréhension, il sied de se pencher sur les manifestations jurisprudentielles (§ 2).

348 D. THOUVENIN, La responsabilité médicale, analyse des données statistiques disponibles et des arrêts rendus

par la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat de 1984 à 1992, Médecine-Sciences, éd., Flammarion, p. 1

349 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre CMPL, 1984, p. 128.

350 Elle peut à la fois s’apprécier en fonction des obligations régissant l’ordre public ; des obligations professionnelles d’un corps de métier, des obligations conventionnelles entre parties, des obligations morales.

351 Expression prêtée par M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, p. 306, Voir également : J. BELLISSENT, op. cit., p. 339.

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§ 1. LES COMPORTEMENTS À NE PAS ENFREINDRE EN DROIT MALGACHE

51. Les comportements à ne pas enfreindre ne sont pas un élément figé. En fonction

des coutumes et des us, ils varient d’un lieu à un autre. Aussi est-il nécessaire, pour

les connaître de passer par un examen préalable des coutumes où ils sont exposés.

Il s’agit certes ici d’un examen de nature sociologique plus que juridique, reste que

cette approche est fondamentale pour appréhender la notion de faute (A) et la notion

de contrat social (B) dans le contexte local.

A. L’étude de la coutume : moyens pour discerner la notion de faute ou le fady.

B. L’étude du contrat social malgache : le dinam-pokonolona.

A. L’étude de la coutume : moyen de discernement de la notion de faute ou le fady

52. À Madagascar, les coutumes ou fomba 352 constituent la socle de la vie sociale,

familiale et religieuse du peuple malgaches 353. Elles sont intimement liées à leur vie

quotidienne. Les coutumes déterminent les règles régissant la vie de la collectivité.

leur rôle est d’établir avec rigueur la conduite à tenir ; elles précisent ce qui se fait et

ce qui ne se fait pas. Et ce qui ne se fait pas est connu sous le vocable, fady ou tabou.

En tout cela, la coutume indique « ce qui doit être dans toutes les circonstances de la vie sociale

et partant de la vie juridique de chaque individu » 354.

À propos du fady, il se trouve que sa traduction littérale intéresse l’analyse

juridique de la faute. Littéralement, fady signifie « ce qui ne se fait pas » ; en ce sens, le

fady est l’expression par excellence de la faute en droit coutumier malgache. Pour

celui qui le transgresse, il s’en suit une sanction automatique à caractère mystique 355.

Ceci parce que la transgression du fady est perçue comme une atteinte portée au

monde de l’au-delà et, de fait, déclenche la répréhension des divinités ou diminue

352 Les coutumes à Madagascar portent le nom de Fombandrazana qui littéralement se traduit par la

coutume des Ancêtres. Afin de bien marquer leur caractère oral on les appelle aussi Lovantsofina, c’est-à-dire l’héritage des oreilles.

353 Dans la Grande Ile […], la coutume « faite de précédents, d’imitations, de comportements héréditaires, exprime avec le maximum d’authenticité les aspirations, les goûts, les tendances des hommes qui l’ont patiemment forgée », P. CHEVALIER, Introduction à l’étude du droit coutumier malgache, http://madarevues.recherhces.gov.mg, p. 82.

354 A. RAMANGASOAVINA, Rapport de synthèse sur l’état des personnes, Tananarive, l962, p. 5.

355 Le caractère mystique se fonde sur les supposés origines des interdits. Le fady émane des règles héritées des Ancêtres et constitue ce que l’on nomme, « fadindrazana » ou « les interdits ancestraux », voir : B. RAZAFIMPAHANANA, Le fady ou tabou à Madagascar, étude sociologique et psycho-sociologique, p. 116, http://madarevues.recherches.gov.mg.

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leurs protections. Progressivement le caractère mystique des sanctions s’atténue 356.

Avec le système d’amende perçue au profit de la collectivité ou du Roi, les sanctions

dues à l’effraction des règles coutumières ont acquis une nature pénale.

Principalement, c’est le refus du groupe social de subir les conséquences de la faute

d’un individu qui a changé le caractère religieux des sanctions en un caractère

répressif 357. Ceci dit, l’acquisition d’une nature juridique des violations des fady n’est

pas achevée dans l’ensemble de l’île ; partout subsiste un certain nombre d’interdits,

qui ne sont pas sanctionnés pénalement et qui le restent plus ou moins mystiquement

ou socialement. En cela, il est presque toujours un exercice délicat d’identifier au

milieu de ces innombrables interdits ceux qui sont de portée juridique, et ceux qui

n’ont qu’une valeur sociale ou religieuse. Ce qui est certain, c’est que, le tabou joue

un rôle important dans la vie religieuse, politique, économique des malgaches ;

partout il intervient comme un régulateur permettant d’appliquer le fameux principe

en droit pénal : « Nulla poena sine lege » 358 et dans lequel, le rôle de la lex lui serait

dévolu.

À côté des règles émanant du monde de l’au-delà pour fixer les obligations

préexistantes, figurent celles qui sont établies par les vivants : le dinam-pokonolona.

Au regard du droit français, le dinam-pokonolona correspondrait au contrat social.

B. L’étude du contrat social malgache : le dinam-pokonolona

53. Le dinam-pokonolona est composé de deux mots : dina et fokonolona 359.

Littéralement, le dina signifie convention et fokonolona, groupement de personnes 360.

Ce qui conduit à la traduction du dinam-pokonolona comme la convention établie par le

groupe ; autrement dit, une loi issue de l’expression de la volonté du groupe. En ce

sens, il est une expression de démocratie législative pour la société malgache. L’aval

356 « Il arrive un moment dans l’évolution de toute civilisation où l’intervention de l’homme empiète peu à peu sur le

domaine du mystique, battant en brèche l’action automatique des puissances divines et transformant les sanctions supranaturelles en sanctions séculières ; lesquelles à leur tour, se différencient en sanctions sociales et juridiques », T. OLAWALE ELIAS, La nature du droit coutumier africain, éd., Paris 1961, p. 89.

357 Sachant qu’en matière pénale, la règle est la personnalité de la peine.

358 « Nulla poena sine lege » ou le principe de légalité des délits et des peines qui fait qu’ on ne peut être condamné pénalement qu’en vertu d’un texte pénal. PORTALIS énonce : « Le législateur ne doit point frapper sans avertir : s’il en était autrement, la loi, contre son objet essentiel, ne se proposerait donc pas de rendre les hommes meilleurs, mais seulement de les rendre plus malheureux ».

359 La syntaxe malgache fait que le « f » du fokonolona se transforme en « p » lorsque les deux mots (dina et fokonolona) sont attachés par un trait d’union.

360 Fokon’olona dérive de deux mots : foko : clan et olona : personnes d’où fokon’olona signifie, groupement de personnes.

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de la conscience sociale donne au dinam-pokonolona une force obligatoire. À travers

cette convention, les sujets de droit s’accordent sur la façon dont ils souhaitent régler

les affaires sociales. Il s’agit donc d’une œuvre délibérative de nature orale ou écrite

fixant des droits et des devoirs. La doctrine apporte les précisions suivantes à propos

du dinam-pokonolona : « Ledit accord est assorti d’un prononcé d’imprécations et de sanctions qui

frapperont quiconque dérogera à ses prédispositions » 361. La sanction peut-être le paiement

d’une réparation pécuniaire, c’est le vonodina mais peut aller jusqu’à l’exclusion du

groupe 362. Certains juristes considèrent le dinam-pokonolona comme une première

expression d’une juridiction traditionnelle 363, d’autres comme une pratique sociale du

droit 364. En tout cas, il est assez classique que dinam-pokonolona fixe des dispositions

de nature préventive et des dispositions de nature répressive.

En somme, le dinampokonolona, est un contrat social ancré dans la coutume et la

tradition. Sa nature contractuelle lui confère une portée juridique. Ces dispositions

régissant la vie sociale, ont une force exécutoire dont la légitimée émane de l’accord

de la population. Considérant la force exécutoire du dinampokonolona, on peut déduire

que la faute au sens du droit malgache est constituée par la transgression du

dinampokonolona. Mais l’analyse n’est pas aussi simple qu’il ne le paraît car les

dispositions du dina (du contrat social) sont fluctuantes et de fait, la faute est une

notion évolutive. Pour en avoir meilleure lecture, il sied de se pencher sur ses

manifestations jurisprudentielles.

§ 2. LES MANIFESTATIONS JURISPRUDENTIELLES DE LA FAUTE

54. La théorie de la faute médicale fondée sur la non-conformité aux données

scientifiques reste intangible quel que soit le lieu d’exercice. Par contre le

déploiement des données acquises de la science varie d’un endroit à l’autre eu égard

361 N. RAJAONA, Le dina malgache, entre pluralisme juridique et appropriation du droit, in, Une anthropologie

juridique des droits de l’homme : Les chemins de l’océan Indien, L. SERMET, Préf. ABDOU DIOUF, Droit et modernité, Le dina malgache, entre pluralisme juridique et appropriation populaire du droit, in Une anthropologie juridique de Droits de l’homme : Les chemins de l’océan Indien, E.A.C., Agence française de la francophonie, 2009, p. 115 et s.

362 H. RAHARIJAONA, Les conventions du fokonolona. Le Droit malgache et le développement rural, Bull. de Madagascar, 1963, p. 717 à 740.

363 E. NJARA, Le dinan’ny fandriampahalemena ou chartes de la société publique, Bull. de l’Académie malgache, 2000, p. 25 à 38. L’auteur perçoit à travers le « dina » en tant que règle de droit opposable aux habitants de la collectivité qui l’a établi, une éviction de la fonction législative qui doit relever du privilège des parlementaires et à moindre degré, du législatif.

364 MARIONA ROSÉS TUBAU, La dualidad juridiccional en Madagascar. El caso de los dina, gazeta de antropologia, n° 22, 2006, http://hdl.handle.net/10481/7094.

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aux paramètres sociologiques que nous avons observés (étiologie de la médecine,

différence d’expertise médicale, les différences d’accès aux informations

médicales…). Dès lors, l’appréciation in concreto de la faute, présente une individualité

en fonction de chaque pays. Par conséquent, c’est en partant des données

scientifiques valides ou plus précisément disponibles à Madagascar que se fera

l’appréciation de la faute médicale. Les manifestations jurisprudentielles locales

conduiront à cette analyse (A). Les jurisprudences d’autres pays d’Afrique

contribueront à la définition de la faute en droit positif africain (B).

A. Manifestation jurisprudentielle de la faute en droit médical malgache

B. Manifestation jurisprudentielle de la faute dans les autres pays africains

A. Manifestation jurisprudentielle de la faute en droit médical malgache

55. En droit malgache, la manifestation de la faute en matière contentieuse se

regroupe en deux temps correspondant à la chronologie des arrêts : les anciens arrêts

révélateurs de la notion de défaillance comportementale (1) et les arrêts relativement

récents (2).

1. Le visage de la faute à travers les anciens arrêts malgaches

56. Dans un arrêt de 1960, une personne exerçant l’activité de guérisseur a été écrouée

pour avoir prétendu soigner une crise épileptique par un traitement périlleux. Elle

soutenait que la patiente est « possédée » et pour le délivrer de cet état, il lui

« prescrivait » un plongeon dans l’eau d’une rivière ; malheureusement ne sachant pas

nager, elle est décédée 365. En l’espèce, la faute se caractérise par : « L’omission aux

diligences qu’exige la nature de l’obligation compte tenu des circonstances dans lesquelles se trouve la

personne (la patiente) » 366. En l’espèce, il est de diligence normale sinon évidente

365 V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de

Madagascar-Droit, volume 8, 1973, p. 22.

366 La doctrine française souligne que le critère objectif d’appréciation de la faute médicale tenant à la conformité de l’acte aux données acquises de la science, doit être aujourd’hui complété par une partie des dispositions de l’article 121-3 du Code pénal posant le principe de l’existence des délits involontaires (article modifié par la loi du 13 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits d’imprudence ou de négligence). Les dispositions concernées stipulent : « […]. Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas d’imprudence de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou les règlements sauf si l’auteur des faits a accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait […] ». Ces dispositions accordent au juge d’avoir une méthode d’appréciation de la faute totalement subjective, Mme I. FERRARI, Conseiller

…/…

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compte tenu des circonstances ; du pouvoir et des moyens dont disposait le

guérisseur que de demander au patient à qui l’on demande un plongeon dans l’eau

d’une rivière s’il sait nager 367 ! Bien sûr, le fait de demander si quelqu’un sait nager ne

constitue pas une obligation légale prescrite de manière généralisée qui s’impose au

professionnel ; il concerne une obligation particulière imposant un modèle de

conduite circonstancié 368.

Malgré l’aspect caricatural du cas de figure, il a le mérite d’extraire une définition

claire de la faute médicale : la proposition d’une thérapie incompatible à l’état du

patient. Partant, en droit médical malgache, la position doctrinale selon laquelle, la

faute est constituée de toute impéritie 369 du médecin provoquant une atteinte à

l’intégrité du patient 370, est bien adoptée.

La même année, on retrouve un arrêt qui sanctionne des personnes prétendant

guérir une femme sujette à des convulsions provoquées soit disant par un esprit.

Pour le traitement, elles brandissaient sur la patiente des tisons ; manœuvre qui a

provoqué brûlure et asphyxie entraînant décès de la patiente 371. En l’espèce, il est

flagrant que la faute soit caractérisée par l’usage de moyens dangereux.

Encore une fois, le cas de figure est assez caricatural et le traitement thérapeutique

qu’il mentionne n’a pas une assise scientifique ; n’empêche, il introduit dans le sillage

du droit médical malgache, la notion d’« accident médical ». Il va même jusqu’à

affiner la notion en dégageant un concept plus spécifique : « l’événement indésirable »

référendaire à la Cour de cassation, Le médecin devant le juge pénal, étude menée en 1999, http://www.courdecassation.fr. Les dispositions de l’article 121-3 du Code pénal français (rejoint par l’article 221-6 du même Code) en ces termes : « Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre. Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui. Il y a également délit, lorsque (…voir : supra)», correspond à l’article 319 du Code pénal malgache qui dit : « Quiconque, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation des règlements aura commis involontairement un homicide, ou en aura été involontairement la cause, sera puni d’un emprisonnement de trois mois à deux ans, et d’une amende de 50 000 à 1 000 000 de francs ».

367 En l’espèce, la faute médicale est caractérisée par le fait pour le guérisseur de manquer à la diligence de s’informer sur l’aptitude de la patiente à supporter ou non la prescription préconisée. Il relevait de sa compétence professionnelle au sens juridique du terme, de prévoir la réaction d’un patient face à une intervention.

368 La conduite circonstanciée consiste en la conduite à avoir dans telle ou telle situation, voir : M. PUECH, De la mise en danger d’autrui, D., 1994, Chr. p. 153.

369 Impéritie est en l’occurrence entendue comme le défaut d’expertise dans le domaine exercé. Elle suppose à la fois un défaut de rigueur professionnel.

370 P. VAYER, D. PLANQUETTE et H. FABRE, Le lien de causalité en matière de responsabilité médicale, Médecine et Droit, mai . juin 2005, n° 72, p. 81.

371 V. RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de Madagascar-Droit, volume 8, p. 22.

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à l’issu d’un acte de soin. Enfin, il aborde le thème de l’infraction d’imprudence

quand il fait mention du traitement accompli : brandir sur quelqu’un des tisons. Agir

de la sorte correspond exactement à la définition de l’infraction d’imprudence :

infraction matérielle caractérisée par la production d’un résultat de nature grave 372 .

Pour autant, l’attribution du qualificatif « faute » à tout comportement mettant en

danger la vie d’autrui n’est pas automatique. En effet, bien que la gravité du résultat

soit un composant de la qualification, à elle seule, elle ne suffit pas pour désigner un

comportement de fautif. La nature fautive d’un comportement résulte en outre, du

caractère délibéré de l’acte 373. Autrement dit, l’acte qui expose autrui à un risque de

blessure ou de mort, doit avoir été accompli en pleine connaissance du danger

potentiel qu’il comporte. Bref, ce n’est pas la simple indifférence qui est sanctionnée

mais la transgression flagrante à une valeur sociale qui se traduit par la conscience

réelle de la nuisance à laquelle on expose autrui 374.

Sur le plan juridique, la notion de « volonté délibérée » de l’auteur, donne une

appréciation objective des infractions relative à l’exposition aux risques. La « volonté

délibérée » se traduit par la conscience de l’auteur de la dangerosité de son acte et de

là concrétise la réalité des risques 375. Quant à l’état de conscience de l’auteur, il

s’apprécie in abstracto, c’est-à-dire en comparaison avec ce qu’un individu

raisonnable aurait tenu comme danger potentiel par rapport à une intervention

médicale donnée. Cela correspond par exemple, à la volonté du chirurgien de

procéder à une intervention en état d’ébriété. Cet acte peut entraîner un résultat

dramatique qui n’échappe pas à un individu raisonnable et donc est qualifiable

d’illicite jusqu’à preuve du contraire. La faculté d’apporter la preuve du contraire

372 Article 121-3, ali. 4 du Code pénal : « Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède (imprudence, négligence ou

manquement à une obligation de prudence ou de sécurité), les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage […], sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, […] commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ».

373 « L’élément intentionnel de l’infraction résulte du caractère manifestement délibéré de la violation d’une obligation particulière de prudence et de sécurité », Cass. crim. 9 mars 1999, D., 1999, I.R. 123.

374 C’est « l’état d’esprit d’une personne, qui sachant que son comportement pourrait porter atteinte à un intérêt protégé ou réaliser une situation infractionnelle sans en avoir la certitude, persiste néanmoins à l’adopter », J. H. ROBERT, Droit pénal général, Puf, 4e éd., 1999, p. 350.

375 L’appréciation des risques nécessite des conditions, des hypothèses qui ne sont pas évidents à trouver. Cela suppose de revenir au moment de la réalisation de l’acte infractionnel ; savoir si réellement l’auteur était conscient d’avoir porté atteinte à telle ou telle valeur sociale. La notion de « volonté délibérée » permet d’objectiver l’analyse ; les risques sont réels quand la conscience de l’auteur sur la dangerosité de son acte, est établit, voir : D. MAYER, La misse en danger des personnes, in Problèmes actuels de science criminelle VIII, Puf Aix-Marseille, 1995, p. 10, 11.

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signifie que la coïncidence entre l’état de conscience de l’auteur de la dangerosité de

son acte avec ce qui est raisonnablement perçu comme comportement « anormal »,

ne crée qu’une présomption simple de responsabilité.

Bref, l’attribution du qualificatif « faute » à un comportement maladroit durant

l’exercice de l’art médical, considère deux éléments : la persistance de réaliser un acte

dont on a la conscience manifeste de la dangerosité et l’aspect particulièrement grave

des résultats.

Une autre question suscite l’intérêt : dans l’hypothèse où les résultats dramatiques

autrement dit : « l’événement indésirable », ne se produisent pas, la sanction a-t-elle

lieu d’être ? 376 La réponse en droit médical est claire : la répression d’un

comportement mettant en danger la vie d’autrui est fondée sur la conscience de

l’auteur quant à la dangerosité de son agir, la répression s’appuie sur la volonté

manifeste de continuer un acte dont on sait le risque que cela représente 377. Il en

résulte que, la réalisation du risque en elle-même n’est pas une condition exclusive de

la sanction 378. Dès qu’on expose autrui à un risque, l’infraction est constituée même

si la probabilité de voir le péril se réaliser est très faible 379. La doctrine estime quant à

elle que l’intérêt d’incriminer les risques causés à autrui n’est pas avant tout de

sanctionner le préjudice mais de sanctionner un comportement avant que celui-ci

n’ait tourné au drame 380.

376 Dans le domaine du droit pénal, on parle d’infraction dite impossible. En l’occurrence, la notion

d’infraction impossible désigne la situation dans laquelle objectivement, l’agir du médecin s’inscrit dans la mise en danger de la vie d’autrui. Mais pour une raison que l’on ignore, le risque ne s’est pas concrétisé. Si, en droit pénal, l’élément intentionnel suffit pour constater l’infraction, en matière civile, tel n’est pas le cas. En matière civile, il faut établir le dommage, c’est-à-dire, l’évènement indésirable. L’appréciation de l’évènement indésirable en raison d’accident médical, se situe ainsi aux confins des deux régimes juridiques ayant leurs règles propres. Seulement dans le domaine de la relation médicale bien qu’il s’agisse d’un contrat civil, la notion de « volonté délibérée » de l’auteur est de lourde conséquence parce que concerne l’intégrité de la personne humaine – Elle engage la responsabilité de l’auteur bien que l’évènement indésirable ne se réalise.

377 La doctrine définit le risque, comme le péril physique d’une particulaire gravité que l’on fait courir à un individu ou une collectivité, voir : M. PUECH, De la mise en danger d’autrui, D., 1994, Chr., 153, p. 155 et 156.

378 Le manquement aux obligations réglementaires de prudence et de sécurité est constitué par la mise en danger de la vie d’autrui, indépendamment du résultat, voir : D. MAYER, op. cit., P. 13.

379 « Le caractère prévisible du résultat et son absence de prévision par le prévenu ne constitue pas les critères de détermination de la faute d’imprudence puisque celle-ci reste constituée même si le dommage est imprévisible », J.Y. MARÉCHAL, Essai sur le résultat dans la théorie de l’infraction pénale, éd. L’Harmattan, 2003, p. 443.

380 L’encadrement de la responsabilité juridique retrouve alors une coloration morale. Et la loi assume en l’occurrence sa vocation préventive.

Page 92: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 91 —

Les apports des anciens arrêts quant à la définition de la faute médicale, sont

considérables. Ils ont établi que la faute médicale consiste en la prescription d’une

thérapie incompatible à l’état du patient ainsi que de toutes impérities 381 portant

préjudice au patient. Ces définitions sont enrichies par les arrêts relativement récents.

2. Le visage de la faute à travers les jurisprudences récentes

57. Les arrêts relativement récents dont il a été possible de faire l’inventaire,

expriment malgré leur rareté, l’expression d’un droit du patient malgache. En outre,

ils témoignent de la volonté d’encadrer juridiquement la profession médicale. Les

contentieux émergeants sont restreints dans un domaine précis : la gynécologie mais

ouvrent une perspective de compréhension de la faute médicale.

L’ensemble des faits se présentent ainsi : trois femmes enceintes se rendent en

clinique privée pour accoucher. Lors des interventions, des complications se

présentent. Pour le premier cas, l’équipe médicale constate un retard de délivrance

par rapport à la date prévue pour l’accouchement (DPA) ; pour le deuxième cas,

l’équipe annonce un risque de rupture de la poche des eaux et une anomalie du

cordon ombilical. Et pour le troisième cas, l’équipe estimait que les sensations de la

parturiente s’apprêtant à pousser étaient prématurées par rapport à la date prévue

pour l’accouchement (DPA).

Dans les deux premiers cas, les gynécologues respectifs décident de procéder à un

accouchement provoqué en administrant un médicament ayant pour effet, à titre

principal, l’expulsion immédiate de l’enfant. Pour le premier cas, la décision médicale

s’appuie sur le risque d’asphyxie du bébé du fait du retard de délivrance. Pour le

deuxième cas, la décision médicale se base sur un risque de rupture de la poche des

eaux ; l’accouchement provoqué permettra d’éviter à l’enfant d’ingurgiter le liquide

amniotique et de le sauver de l’anomalie ombilicale. Enfin, pour le troisième cas, la

décision médicale consistait à stopper le processus de déclenchement du travail

demandé par la parturiente, parce que ne coïncidant pas à la date prévue pour

l’accouchement (DPA).

Après les interventions, les enfants décèdent ainsi que deux mères. Les ayants-

droit portent plainte contre les gynécologues pour avoir par défaut d’adresse et de

381 Voir : note 367.

Page 93: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 92 —

précaution, commis un homicide involontaire 382. Face à l’absence de textes propres à

la responsabilité médicale, les tribunaux correctionnels, ont dû se livrer à un travail

d’interprétation et d’adaptation du droit commun. Il faut reconnaître la dextérité des

juges pour conjuguer ensemble, les dispositions civiles ( articles 177 à 196 383, de la

LTGO), les dispositions pénales (articles 319 et 320 du Code pénal 384) et les

dispositions déontologiques (articles 6, 8, 21 et 67 du Code de déontologie). Ainsi, les

juges ont reconnu l’opportunité du recours au médicament administré bien qu’il ait

un effet abortif. Cette décision est motivée au visa des articles 177 et 179 de la

LTGO qui définissent le contour de la responsabilité extracontractuelle. Appuyés par

la doctrine 385, ces articles ont été empruntés par les juges pour dire que

l’administration d’un comprimé activant la délivrance du bébé est conforme à

l’obligation de moyens dont est tenu le médecin 386. Ainsi, « Eu égard aux circonstances

(risque de rupture de la poche des eaux, anomalie ombilicale), la décision de provoquer

l’accouchement n’est pas condamnable. Elle est appropriée car c’est son effet de délivrance forcée qui

était en l’occurrence l escompté en vue de sauvegarder les vies ».

À part les articles de la LTGO, Les Tribunaux ont validé le recours à un

médicament contre indiqué pour les femmes enceintes, au visa de dispositions

déontologiques : l’indépendance médicale : articles 6, 8 et 21 du Code de déontologie

médicale et la liberté de prescription : articles 21 et 67 387.

Des décisions énoncées, découle la problématique suivante : - la nécessité de

recourir à des interventions à haut risque pour accomplir le devoir déontologique de

sauvegarder la vie du patient -. Surgit en effet des verdicts, la question suivante : « Un

médecin, en vue de sauvegarde la vie du patient, peut-il se livrer à une intervention médicalement

contre indiquée ? » 388. Autrement formulé : « En vue de sauvegarder la vie d’un patient, le

principe de l’autonomie médicale autorise-t-il le praticien à procéder à des interventions à risque ? »

382 Article 319 du Code pénal malgache : « Quiconque, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou

inobservation des règlements aura commis involontairement un homicide, ou en aura été involontairement la cause, sera puni d’un emprisonnement de trois mois à deux ans, et d’une amende de 50 000 à 1 000 000 de francs ».

383 Relatifs à la « responsabilité extracontractuelle ».

384 Relatifs à l’homicide, blessures et coups involontaires.

385 En droit malgache, la relation médicale est contractuelle avec obligation de moyens, S. RANDRIANAHINORO, op. cit., p. 14, 15.

386 Arrêt Mercier, Cass civ., 20 mai 1936, D.P. 1936.1.88, concl. P. MATTER, rapp. L. Josserand, R.T.D. civ. 1936. 691, obs. Demogue.

387 Le décret n° 2012-0632 portant Code de Déontologie Médicale à Madagascar.

388 Jean de la Fontaine : juriste ? Journée d’étude Thesa Nostra, 2008, éd. L.G.D.J., p. 283.

Page 94: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 93 —

La question n’est pas encore tranchée en droit malgache. Nous aurons l’occasion

d’avancer quelques pistes ultérieurement de lois à cet effet (Partie II, Chapitre II,

Section II). Mais pour le moment, il sied d’analyser d’autres jurisprudences africaines

qui peuvent enrichir la théorie de la responsabilité médicale.

B. Manifestation jurisprudentielle de la faute dans les autres pays africains

58. D’emblée, il faut préciser que les jurisprudences étudiées présentent quelques

anomalies sur le plan procédural (la compétence juridictionnelle). Il est par exemple

possible d’entrevoir une action en responsabilité contre une personne du droit public

devant une juridiction judiciaire. Mais étant donné que l’étude se fixe à apprécier la

notion de faute, les jurisprudences disponibles restent des outils précieux.

Rappelons les faits de l’espèce : M. Dje N’guessen souffrant d’une maladie

mentale, a été conduit par son père à l’hôpital psychiatrique de Bingerville, Côte

d’Ivoire où il a été admis le 17 novembre 1981. Le 30 novembre 1981, un

automobiliste découvre son corps au PK 7, route Bingerville, Abidjan. En réalité,

M. Dje N’guessen s’était évadé le 20 novembre 1981. Les parents introduisent une

action contre l’hôpital psychiatrique de Bingerville, sur le fondement des articles 1382

et 1384 du Code civil aux fins d’obtenir réparation. Le tribunal de première instance

d’Abidjan déboute les requérants au motif que les conditions d’application des

articles invoqués ne sont pas réunies ; les requérants ne prouvent pas l’existence

d’une faute de l’hôpital dans la réalisation du dommage qu’est le décès. Du côté de la

victime et des ayants-droits, ces motifs sont certes déconcertants mais en matière de

responsabilité civile qui fonde en l’occurrence l’action en justice, ils ont une assise

juridique irréfragable : le défaut de la preuve d’une faute incombant à celui qui fait

valoir le dommage en vue d’une réparation 389. En effet, il est de principe qu’il y ait

faute à l’origine du préjudice, d’où la théorie du lien de causalité. Elle pose la règle

selon laquelle, le dommage tant matière délictuelle que contractuelle, doit être la suite

directe de l’accident 390. Dans une perspective voisine, le Code de procédure

389 Telle est l’application du principe de la charge de la preuve en matière de responsabilité civile

délictuelle ou contractuelle, avec obligation de moyens. C’est dans ce sens qu’une personne déclenchant une action successivement contre X devant le tribunal de première instance, la cour d’appel et la Cour Suprême, en se croyant légitimement créancier, ne réussit pas faute de preuves suffisantes, S. RANDRIANAHINORO, op. cit, p. 133. Sur le principe de la charge de la preuve, voir : J. L AUBERT, É. SAVAUX, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, éd., Sirey Université, 13e éd., 2010, n° 244.

390 Voir, A. JOLY, Essai sur la distinction du préjudice indirect, Th. Caen, 1939.

Page 95: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 94 —

pénale 391 dispose expressément que l’action civile en réparation du dommage causé

par une infraction est accordée à tous ceux qui en ont souffert directement.

Transposé dans le cas d’espèce, dire que le décès du patient hors du cadre

hospitalier, présente un caractère direct, implique avant tout, d’établir une cause

matérielle tenant aux agissements des agents hospitaliers à l’origine du dommage. À

priori, aucun agissement de l’institution hospitalière n’est établi 392 pour expliquer le

décès hors du cadre hospitalier. En ce sens, les décisions des juges sont

juridiquement fondées. Par contre, elles peuvent être rediscutées dans la mesure où

l’arrêt présente une spécificité. En effet, avec l’affaire Dje N’guessen, on est en

présence d’un cas de responsabilité en milieu psychiatrique. Cette donne ne peut que

remettre en cause la décision d’irresponsabilité juridique de l’hôpital. Le droit français

constitue ici, une référence juridique fiable. Il pose la règle selon laquelle, « En milieu

psychiatrique, l’obligation surveillance doit être renforcée » 393. La reconnaissance d’une

obligation de sécurité est liée au risque particulier que les patients atteints de maladie

psychiatrique, peuvent faire courir à eux-mêmes ou à autrui. Dès lors, on attend de

l’institution qu’elle réduise ce risque au maximum.

Vu sous cet angle, l’arrêt M. Dje N’guessen a permis d’extraire la notion de faute

entendue comme « défaut de surveillance » du patient. En l’occurrence, les consorts,

auraient pu soulever le défaut de surveillance lié à une faute d’organisation ou de

fonctionnement du service public hospitalier 394. L’obligation de surveillance

s’impose tout au long de l’hospitalisation 395 et parfois même au-delà 396. Dès le

391 Article 2, al.1du Code de procédure pénale français et article 6 du Code de procédure pénale

malgache.

392 Par exemple établir, une preuve matérielle de maltraitance, d’empoisonnement…

393 Pour aller plus loin, voir : Y.H. LELEU, Droit médical. Aspects juridiques de la relation médecin-patient, Larcier, 2005.

394 Dans un cas de patient atteint de maladie psychiatrique, le Conseil d’État a précisé que par rapport à l’obligation d’un centre hospitalier au devoir de surveillance rigoureuse, la diligence requise et les recherches entreprises après constat de disparition, n’ont pas été fermes. Compte tenu du caractère spécialisé de l’établissement et de l’ensemble des faits (hospitalisation en placement libre d’un patient fragile), le défaut de surveillance est constitutif d’une faute dans l’organisation du service. Partant, de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier, CE, 20 mars 1981, n° 16. 976, inédit.

395 L’obligation de surveillance pèse sur le médecin psychiatre. Il a l’obligation de recommander à l’établissement de santé, les mesures propres à éviter le suicide du patient, Cass. civ. 11 juin 1963.

396 Défaut de surveillance dans un service psychiatrique, C.A.A. de Paris, 11 juillet 1997.

Page 96: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 95 —

moment où les patients présentent des signes d’agitation ou de déséquilibre 397,

l’obligation de surveillance est de principe.

Après le cas Dje N’guessen, un autre arrêt vient relever un autre aspect de la faute

médicale : l’arrêt Julien Zunon Gnobo. En l’espèce, le Tribunal de première instance

d’Abidjan a condamné l’hôpital public à verser à la victime la somme de 54 600 000

francs CFA au titre de dommages et intérêts, suite à une piqûre intra-fessière ayant

entraînée la paralysie de celui-ci, causant de violentes douleurs lombaires. Confirmant

le jugement du tribunal de première instance, la cour d’appel d’Abidjan, condamne

l’institution à verser à la victime la somme de 63 000 000 de francs CFA.

Si humainement parlant, la décision est remarquable, juridiquement parlant, elle

l’est moins car le contrat médical par essence n’impose qu’une obligation de moyens ;

il incombe d’établir une faute à l’origine du dommage. L’absence de mentions

relatives à la faute signifie qu’il y a en l’espèce présomption de faute. Autrement dit,

le simple constat du dommage présume la responsabilité de l’établissement 398. Cette

présomption de responsabilité est permise par la jurisprudence sous réserve de

critères stricts tenant à l’« extrême gravité » du dommage et du « caractère

exceptionnel » de sa réalisation 399. Le critère de gravité justifie certainement en

l’espèce, la décision de la cour d’appel.

L’affaire Julien Zunon Gnobo relative à une paralysie suite à une vaccination, a le

mérite d’introduire la présomption de faute en cas de réalisation exceptionnelle d’un

préjudice particulièrement grave.

La responsabilité médicale pour faute caractérisée, est rendue effective par le

mécanisme de réparation.

397 Si l’obligation de sécurité a été invoquée même au sein d’institution non psychiatrique, C.A.A.,

de Bordeaux 8 mars 1999 ; C.A.A. de Lyon 22 juin 1999, elle ne peut qu’être renforcée au sein d’une institution spécialisée.

398 Mme Dorsner-Dolivet parle de « faute déduite du dommage », in La responsabilité du médecin, préf. F. DEKEUWER-DÉFOSSEZ, Pratique du droit, éd. Économia, 2006, p. 133. En commettant un arrêt de la Cour de cassation en date du 4 avril 1973 (Cass.civ 1ère 3 février 1969, Bull.civ. I, n° 56) concernant une patiente paralysée suite à une anesthésie, l’auteur précise que la logique de la faute déduite du dommage, entérine l’appréciation de la faute à partir d’éléments abstraits et étrangers aux données concrètes. L’appréciation in abstracto conduit à une conclusion selon laquelle, « de façon générale, les accidents identiques à celui précisément survenu peuvent évités en prenant certaines précautions […], que si l’accident s’était produit, c’était en raison de ce que les précautions n’avaient pas été prises ». La preuve de la faute dans ces cas ne résulte plus que d’une extrapolation, détachée des réalités concrètes. De là à dire qu’elle résulte de la production du dommage qui normalement ne devait pas survenir, c’est se rapprocher de l’obligation de résultat.

399 M. BACACHE, op. cit, p. 7

Page 97: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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CHAPITRE II.

LES MODALITÉS ET L’ÉTENDUE DU DROIT DE LA RÉPARATION

Page 98: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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59. Pour parvenir à la réalisation d’une opération définie, en l’occurrence, la guérison,

les parties au contrat (le médecin et le patient) sont tenues d’aliéner une part

de leur liberté pour se conformer aux clauses de la convention auxquelles elles se

sont mises d’accord 400. En effet, « il est dans la nature des choses que ceux qui se sont promis,

exécutent leur promesse parce que telle est la volonté qu’ils se sont entendue réciproquement pour

réaliser une œuvre commune » 401. C’est dans ce sens que le contrat légalement formé

s’impose aux parties au même titre que la loi. Cependant, malgré la légitimité du

caractère obligatoire du contrat, il arrive que les clauses ne soient pas exécutées par

l’une ou l’autre partie. Dans ce cas ; le créancier peut contraindre le débiteur par

toutes les voies de droit à s’exécuter (article 53 de la LTGO malgache). L’opportunité

de contrainte, ne peut toutefois se réaliser que dans le respect de la personne du

débiteur qui pour une raison ou pour une autre peut se trouver dans l’impossibilité

d’exécuter son obligation. Sa dignité s’oppose à ce qu’on le contraigne par la

force 402. Afin de garantir au mieux cette dignité, le législateur a prévu que les

« remèdes à la défaillance contractuelle » 403 puissent se déployer en plusieurs alternatives. À

travers l’analyse de la forme de réparation, nous pourrons les apprécier (Section I).

Par la suite, il nous faut observer, leur opportunité respective dans le domaine de la

réparation des préjudices médicaux (Section II).

SECTION I. LA FORME DE LA RÉPARATION

60. S’il a été soutenu qu’en principe, la forme la plus habituelle de la réparation serait

l’octroi de dommages-intérêts 404 doit-on comprendre qu’il n’y aurait pas d’autres

400 Le caractère volontaire de l’engagement réciproque (ou synallagmatique) entre les parties s’inscrit

dans le but de réaliser une opération définie.

401 « L’accord des volontés constitue donc le fondement de la force obligatoire du contrat, laquelle est garantie par les remèdes à la défaillance contractuelle, organisés par le droit positif ou la convention des parties », M. FAURE-ABBAD, op. cit., p. 31.

402 S. RANDRIANAHINORO, op. cit., p. 109.

403 L’expression « remède à la défaillance contractuelle» est de Mme M. FAURE ABBAD, op. cit, p. 31. D’après elle, le terme « remède » est la traduction littérale du terme anglo-saxon « remedy », le terme est utilisé parfois par la doctrine pour décrire les différents moyens offerts au créancier déçu. La « remède à la défaillance contractuelle » compense ainsi, l’inexécution des obligations contractuelles qui devaient lui permettre d’obtenir l’avantage attendu au contrat. Voir : P. GROSSER, Les remèdes à l’inexécution du contrat : Essai de classification, Th. Paris I, 2000.

404 J.-L. AUBERT et É. SAVAUX, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, 13e éd., 2010, éd. Sirey Université, p. 18 et 268 ; L. RIPERT, La réparation du préjudice dans la responsabilité délictuelle, Th. Paris, 1933, n° 12 et s.

Page 99: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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procédés de réparation que le versement d’une somme d’argent pour toutes les

obligations inexécutées ? Ou y aurait-il possibilité de réclamer au débiteur une

réparation en nature comme par exemple, demander au dépositaire qui a perdu la

chose 405 de fournir à titre de réparation, au déposant, une chose semblable ? Une

position jurisprudentielle ancienne a ouvert une brèche pour une possible réparation

en nature. Le 24 juin 1925 406, un réquisitoire dit que « le débiteur peut toujours se libérer

en livrant des choses autres que celles sur lesquelles il comptait pour se libérer ». Autrement dit, la

réparation peut être constituée autrement que par une somme d’argent. Elle peut se

matérialiser sans pour autant être qualifiée de réparation en « nature » entendue

comme restitution pure et simple de l’objet à l’origine de la créance. Si telle est la

position jurisprudentielle, la doctrine n’est pas aussi tranchée. Concrètement, les avis

divergent en la matière. Certains auteurs refusent le principe de la réparation en

nature 407 ; d’autres l’admettent mais uniquement en matière contractuelle 408 ou à

titre exceptionnel 409 et d’autres y sont totalement favorables 410. Les dispositions

405 Ce qui entraîne l’inexécution de son obligation de restitution.

406 Req. 24 juin 1925, D. H. 1925. 486.

407 L’intérêt de la réparation par équivalent entendu comme somme d’argent relève plus d’ordre pratique. La monnaie représente une liquidité matérielle et mesurable permettant de substituer la perte. Même si elle n’efface pas le préjudice, elle le compense, Ph. MALINVAUD et D. FENOUILLET, Droit des obligations, 12 e éd., LexisNexis, 2012, p. 563. Il va sans dire que « le créancier d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée est toujours en droit de préférer le paiement du prix au versement de dommages-intérêts […] », Cass. civ. 1ère, 9 juillet 2003, RTD civ., 2003, p. 709, obs. Mestre et Fages ; J.C.P. G., 2004, obs. Viney.

408 Malgré la portée générale des dispositions de l’article 1142 du Code civil selon lesquelles, « Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts, en cas d’inexécution de la part du débiteur », il est admis depuis longtemps que le créancier puisse obtenir du juge qu’il ordonne l’exécution forcée en nature des obligations de faire (et donc de ne pas faire), c’est-à-dire, l’exécution en nature d’un engagement contractuel non honoré : Ce principe de l’exécution en nature en matière contractuelle, est conforme à l’article 1184, ali. 2 du même Code civil stipulant que « La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec des dommages et intérêts ». A. LEBOIS, Les obligations contractuelles de faire à caractère personnel, J.C.P. G. n° 47, 19 novembre 2008, I 210. L’article 1154 de l’Avant-projet Catala confirme l’ouverture de la réparation en nature en matière contractuelle lorsqu’il annonce en son article 1154 que : « L’obligation de faire s’exécute si possible en nature […] ».

409 Bien que la réparation en nature ne soit prévue que pour des cas exceptionnels, des auteurs comme LEVENEUR et LECUYER relèvent que ces exceptions faites à l’article 1142 du Code civil, représentent une certaine consistance qualitative pouvant renverser la donne. Dans l’ensemble, la réparation en nature se déploie dans deux hypothèses : premièrement, le cas d’inexécution contractuelle (article 1184 du Code civil et article 1154 de l’Avant-projet Catala) où le créancier demande la réalisation des clauses telles qu’elles sont prévues dans le contrat (il s’agit au fait de la mise en demeure d’exécuter avant l’option final de dommages et intérêts de genre pécuniaire) et deuxièmement, le respect de l’option du créancier qui préfère une réparation en nature. Bien entendu, la nature du préjudice influence l’option, notamment s’agissant d’accidents corporels. Par ailleurs, dire que la réparation en nature n’est ouverte qu’en matière contractuelle (article 1142 du Code civil), revient au final à l’ouvrir à toutes manifestations des rapports

…/…

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— 99 —

législatives quant à elles évoquent la possibilité des deux formes de réparation 411.

Pour mieux appréhender cette divergence il convient de revisiter le déploiement du

régime de réparation en droit français (§ 1). Le droit malgache possède sa propre

approche de la réparation ; elle sera abordée en suivant (§ 2)

§ 1. LA FORME DE LA RÉPARATION EN DROIT FRANÇAIS

61. Le terme « réparation » provient du latin, reparatio qui signifie l’opération ou le

travail de réparer quelque chose. Et le verbe latin reparare, préparer de nouveau

signifie remettre en état (ce qui a été endommagé, ce qui s’est détérioré). Le Petit

Robert accorde au terme les synonymes que sont : « remédier à », « effacer »,

« racheter », « expier ». Ainsi dans le langage courant, la réparation est entendue de

manière très large. Le Vocabulaire juridique de l’Association Capitant lui donne trois

significations.

Premièrement, c’est le dédommagement d’une victime de préjudice en la replaçant

dans la situation où elle se serait trouvée si le dommage ne s’était pas produit 412.

Deuxièmement, c’est la satisfaction morale accordée à la victime d’une offense. Et

troisièmement, il s’agit des travaux effectués sur une chose en vue de sa conservation

ou de son entretien ; autrement dit, une réfection, une rénovation ou une

réhabilitation. En droit français, c’est évidemment le premier sens qui prévaut

(l’indemnisation). Conçue de la sorte; la réparation serait « la traduction concrète de la

responsabilité civile » comme le soulève le Doyen Carbonnier. Elle se déploie sous

humains dans la mesure où un mouvement massif à la contractualisation s’opère. À ce sujet, la doctrine parle d’ « hypertrophie de l’obligation contractuelle », J. BELLISSENT, op. cit., p. 339 et s. De ce qui précède, la lecture de l’article 1142 du Code civil, devient de plus en plus difficile. L’étude menée par F. CALLÈDE en 2011 sous la direction de D. MAZEAUD, intitulée Exécution forcée en nature ou par équivalent. Étude droit comparé droit français, droit anglais, p. 17, le confirme.

410 « Le souci d’assurer à la victime une réparation intégrale doit normalement conduire à préférer une réparation en nature parce que remettant les choses dans leur état antérieur, elle efface le préjudice », Ph. MALINVAUD et D. FENOUILLET, op. cit., p. 562, 563.

411 Article 1142 du Code civil : « Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur » ; article 1143 du Code civil : « Néanmoins, le créancier a le droit de demander que ce qui aurait été fait par contravention à l’engagement soit détruit ; et il peut se faire autoriser à le détruire aux dépens du débiteur, sans préjudice des dommages et intérêts s’il y a lieu » et article 1144 du Code civil : « Le créancier peut aussi, en cas d’inexécution, être autorisé à faire exécuter lui-même l’obligation aux dépens du débiteur. Celui-ci peut être condamné à faire l’avance des sommes nécessaires à cette exécution ».

412 Ce qui suppose le principe de l’intégralité de la réparation. « L’exigence de réparation intégrale présente avant tout une signification d’exhaustivité : chacun des chefs de préjudice qui ont été prouvés doit faire l’objet d’une réparation, et d’une réparation entière », J. CARBONNIER, Droit civil, t. IV, Thémis, 21e éd., 1998, p. 476.

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diverses modalités que le droit français a pu classer à travers « la distinction

bipartite » 413 : la réparation en nature (A) et la réparation par équivalent (B).

A. La réparation en nature

62. Dans la réparation en nature, nous verrons les déploiements (1) et les effets (2).

1. Les déploiements de la réparation en nature

La réparation en nature peut consister en la remise en état (a) ou si les

circonstances le sollicitent, en mesures de publicité (b).

a. La remise en état

63. La réparation en nature consiste en une remise en état quand elle tend à

l’effacement du préjudice par le rétablissement du statu quo ante d’une situation. La

remise en état permet d’atteindre l’objectif assigné à la réparation tel qu’il est défini

par la Cour de cassation : « replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte

dommageable ne s’était pas produit » 414. Certains auteurs n’hésitent pas à dire que la

réparation en nature est « le mode de réparation le plus parfait » 415. En effet, lorsque

l’obligation contractuelle peut encore être exécutée en nature, il est normal que le

débiteur puisse opter pour cette forme d’exécution et que le créancier soit en mesure

de réclamer et de l’obtenir 416. Concrètement, la restauration de la situation de la

victime ou la remise en état peut s’agir d’une condamnation à restituer, à restaurer ou

à mettre en conformité un bien endommagé. Le responsable peut aussi, être

413 L’Avant-projet de réforme des obligations et de la prescription en son article 1368 dispose que «

La réparation peut, au choix du juge, prendre la forme d’une réparation en nature ou d’une condamnation à des dommages-intérêts, ces deux types de mesures pouvant se cumuler afin d’assurer la réparation intégrale du préjudice » ; voir : I. MARIA, La forme de la réparation en droit français positif et prospectif, Université Pierre Mendès France, in Travaux des séminaires « Droits nationaux et Droits européens en matière de responsabilité civile », organisés par le GRECA, Groupe de recherche européen responsabilité civile et assurance, http://grerca.univ-rennes1.fr.

414 Cass. civ. 2e, 7 décembre.1978, Bull. civ. 1978, II, n° 269 ; Cass. civ. 2e, Cass. civ. 2e, 9 juillet 1981, Bull. civ. 1981, II, n° 156.

415 Voir : F. TERRÉ, Introduction générale au droit, éd., Paris, Précis Dalloz, 6e éd., 2003, p. 539 ; H., L., J. MAZEAUD et F. CHABAS, Leçons de droit civil, T. 2, 1e r vol. : Obligations-théorie générale, éd., Paris Montchrestien, 9e éd., par F. CHABAS, p. 732 ; C. ROYE D’ELLOY, La réparation en matière de responsabilité civile, Th. Grenoble 1994, p. 188.

416 Parfois, la loi elle-même prévoit que la réparation interviendra en nature. Ainsi en est-il, en cas de démolition d’ouvrage irrégulièrement édifié : article 1143 du Code civil ou encore, en cas de désordres affectant une construction lorsqu’ils ont fait l’objet de réserves dans le procès-verbal de réception ou lorsque, survenant par la suite, ils ont été dénoncés dans l’année de réception : article 1792-6 du Code civil

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condamné à remettre à la victime une chose équivalente à celle qui a été détruite 417 ;

à remettre en état un immeuble 418, à refaire un mur altéré 419, […] à reprendre

du stock de marchandises présentant des avaries 420 etc. L’idée de remise en état peut

même se concrétiser en cas d’atteintes à la personne. Toujours est-il que dans ce

domaine, une nuance avec la compensation persiste. Ainsi pourrait être considérée

comme réparation en nature de type remise en état, la condamnation du responsable

à assurer une meilleure condition de vie à une personne victime de dommage

corporel. Dans ce sens peut être prévue, une entrée en maison spécialisée ou une

assistance de tierce personne 421. Consécutivement à la remise en l’état ; figure

comme forme de réparation en nature la mesure de publicité.

b. La mesure de publicité

64. Lorsque le préjudice s’y prête, la réparation en nature peut prendre la forme de

mesure de publicité. Ainsi dans les cas d’écrits injurieux ou diffamatoires, d’atteintes à

l’image ou à la vie privée, de contrefaçons, etc…, le juge peut ordonner la publicité

du jugement de condamnation en tout ou partie dans tout lieu indiqué par la

juridiction, et par voie médiatique. Le but de la démarche s’inscrit dans le

« rétablissement moral » 422 de la victime atteinte dans son honneur et partant

constitutif d’une mesure effective de réparation 423. Toujours est-il, la mesure de

publicité revêt un aspect punitif donc pénal 424, ce qui invite à notre avis à modérer

son usage 425.

Que la réparation en nature consiste en une restauration de la situation de la

victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas

produit, c’est-à-dire la « remise en état » ou en un objectif de rétablir l’honneur d’une

417 Cass. civ. 1ère, 20 janvier 1953, J.C.P., 1953, II, 7677.

418 Cass. civ. 2e, 8 avril 1970, Bull. civ. II, n° 111, D., 1971, somm. 30.

419 Cass.civ. 3e octobre 1976, Bull. civ. III, n° 367 ; J.C.P., 1976, IV, 375, I.R., p. 95.

420 Com., 20 octobre 1982, Bull. civ. IV, n° 324 ; Gaz. Pal. 1983, 1, p. 124.

421 Ph. LE TOURNEAU, Droit de la responsabilité et des contrats, Dalloz Action, 2010-2011, n° 2450.

422 Expression utilisée par A. EL. KHOLY, La réparation en nature en droit français et en droit égyptien, Th. Paris, 1954, n° 229 et s.

423 En ce sens, Crim. 4 février 1986, Bull. crim. n° 46.

424 Ph. BRUN, Responsabilité civile extracontractuelle, éd., Litec, 2e éd., 2009, n° 598.

425 La vocation de la réparation doit être distincte de la peine qui relève du domaine répressif. « Dans une première approche, la réparation peut-être définie comme la remède à un dommage certain. L’existence d’un dommage est une condition nécessaire de la réparation. En cela, la réparation se distingue de la peine », F. LEDUC, Les principes fondamentaux, J.C.P., Responsabilité civile et assurances, fasc. 201, 2006, n° 1.

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victime à travers les « mesures de publicité », il est certain qu’elle produit un

effet précis : la cessation de l’illicite.

2. L’effet de la réparation en nature : la cessation de l’illicite

65. Cesser l’illicite c’est mettre un terme au fait dommageable ; concrètement, il s’agit

de supprimer la cause du dommage. Entre par exemple dans cette catégorie :

l’injonction faite à l’auteur d’un trouble de voisinage d’arrêter le trouble ou celle

adressée à l’auteur d’une atteinte à la vie privée d’y mettre un terme 426. À partir du

moment où la mesure de cessation de l’illicite s’inscrit dans une action en

responsabilité, on ne peut s’empêcher d’envisager son lien avec le principe de

réparation. La question se pose : faire cesser l’illicite n’est-il pas à proprement parler

une réparation en nature 427.

Bien que la cessation de l’illicite et la réparation en nature n’obéissent pas au

même régime juridique 428, il convient de reconnaître la difficulté de distinguer les

deux mesures 429. Certains arrêts considèrent que pour certains domaines, la cessation

426 Ph. BRUN, op. cit., n° 599. Pour d’autres illustrations, voir : C. BLOCH, La cessation de l’illicite.

Recherche sur une fonction méconnue de la responsabilité civile contractuelle, Dalloz, 2008, notamment n° 186 et s., et I. MARIA, Ibid.

427 F. LEDUC, op. cit., n° 26.

428 La différence de régime entre la réparation en nature et la cessation de l’illicite se situe au niveau de leur mise en œuvre ; de leurs effets juridiques et de leurs objectifs. Pour la mise en œuvre, on sait que pour déclencher la cessation de l’illicite, il n’est pas nécessaire qu’il y ait préjudice ; il suffit d’établir l’activité illicite ou l’activité anormale. L’indépendance de la cessation de l’illicite par rapport au préjudice fait qu’elle peut être prononcée alors même que les conséquences dommageables sont incertaines ou trop diffuses pour ouvrir droit à réparation, C. BLOCH, op. cit., n° 248, 388 et s. Pour les effets, la différence des deux démarches, se trouve dans leur force exécutoire. Considérant le principe selon lequel, « nul ne peut être contraint de demeurer dans l’illicite », la cessation de l’illicite ou le rétablissement de la légalité serait de droit alors que la réparation en nature a toujours un caractère optionnel (ainsi en matière de référé, le juge peut faire cesser un trouble manifestement illicite, article 809 du Code de procédure civil). Enfin, concernant les objectifs, la cessation de l’illicite ne s’inscrit pas dans une vision réparatrice mais plutôt préventive (tout au plus, arrête la poursuite d’un dommage). À ce propos, C. BLOCH, parle une fonction « méconnue » de la responsabilité civile délictuelle assumée par la cessation de l’illicite et il en relève le particularisme, La cessation de l’illicite, avant-propos Ph. LE TOURNEAU, préf. R. BOUTH, Th. Marseille, D., 2008. Une partie de la doctrine considère toutefois cette fonction particulière de la cessation de l’illicite comme participant à la fonction réparatrice de la responsabilité civile, voir : G. VINEY, Cessation de l’illicite et responsabilité civile, Mélanges Goubeaux, D., L.G.D.J., 2009, p. 560. D’autres analyses maintiennent la distinction entre la cessation de l’illicite et la fonction réparatrice relevant de la responsabilité civile, voir : Th. R. BOUBÉE, Essai sur la notion de réparation, L.G.D.J., 1974, p. 209 . 253.

429 Même les plus ardents défenseurs de l’autonomie de la cessation de l’illicite en conviennent : « En pratique, les plaideurs et la jurisprudence ne distinguent pas nettement la cessation de l’illicite et la réparation en nature », Ph. LE TOURNEAU, op. cit., n° 2444-2. En ce sens Voir également : Ph. BRUN, op. cit., n° 600 et F. LEDUC, op. cit., n° 31 et s.

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de l’illicite est une forme de réparation en nature 430. Les dispositions législatives

renforcent cette difficulté de distinction lorsque par exemple, l’article 1369-1 de

l’avant-projet de réforme du droit des obligations et du droit de la prescription 431

insère dans le paragraphe relatif à la réparation en nature « la cessation de l’activité

dommageable » 432.

En somme, dans la cessation de l’illicite, l’aspect « rétablissement de la légalité »

consiste en une mesure de réparation en nature parmi d’autres que le juge est en

mesure d’ordonner.

Il est des circonstances où la réparation en nature est impossible en raison

d’éléments matériels 433 ou de dispositions législatives 434. La partie lésée garde alors,

la faculté de demander une exécution par équivalent ; sa créance née du contrat se

substitue par décision du juge en une somme d’argent appelée dommages-intérêts.

B. La réparation par équivalent : les dommages et intérêts

66. La distinction bipartite de la réparation laisse à penser qu’à côté de la réparation

en nature consistant au rétablissement du statu quo ante 435 il y aurait la réparation

par équivalent sous forme de dommages et intérêts, donc pécuniaire. Une partie de la

doctrine n’hésite pas à assimiler la réparation par équivalent à la réparation

pécuniaire 436. Or, au-delà du composant, la réparation par équivalence signifie avant

tout, la réparation qui tend vers la compensation du dommage à travers l’octroi d’un

avantage équivalent, lequel peut être au passage, pécuniaire ou non 437. La remise à la

430 Dans un arrêt en date du 18 mai 1989, la Cour de cassation dit que pour réparer le préjudice subi

par la victime en raison de la création de nouvelles vues droites sur son fonds, les juges du fond fixent la réparation du dommage selon les modalités qui leur apparaissent les mieux appropriées et ne sont pas tenus d’ordonner la démolition de l’immeuble litigieux, Cass. civ. 3e, 18 mai 1989, J.C.P. G., IV, 267.

431 Projet Catala.

432 L’article 1369-1 du projet Catala confère ainsi au juge outre la mesure de réparation en nature et de réparation par équivalent, le pouvoir d’ordonner des mesures tendant à prévenir l’aggravation du dommage.

433 Tel est notamment le cas pour un préjudice corporel ou un préjudice matériel relatif à la perte d’un bien unique irremplaçable, voir : Ph. MALAURIE, L. AYNÈS ET Ph.STOFFEL-MUNCK, op. cit., n° 249.

434 Article 1142 du Code civil.

435 Voir : supra, n° 63.

436 J. FLOUR, J.-L. AUBERT et É. SAVAUX, op. cit., n° 385 ; Ph. BRUN définit la réparation par équivalent comme la possibilité pour le juge d’octroyer des dommages et intérêts. Il rajoute tout de même qu’il existe des équivalents non pécuniaires.

437 F. LEDUC, op. cit., n° 10.

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victime d’une chose équivalente à celle détruite est bien une mesure de réparation par

équivalent bien que non constituée d’une somme d’argent. Toutefois, il faut bien

préciser que la possibilité de la réparation par équivalence d’être constituée autrement

que par une somme d’argent, ne doit pas aboutir à la conclusion selon laquelle, la

réparation par équivalent « matérialisée » et la réparation en nature se rejoignent

puisque toutes deux s’expriment par l’apport d’une « chose ». La réparation par

équivalence « chosifiée » ne peut se confondre à la réparation en nature dans la

mesure où chacune a sa propre essence : la réparation en nature vise à « replacer la

victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit » 438

tandis que la réparation par équivalent tend à la compensation du dommage par

octroi d’un avantage équivalent. Bien évidemment, la distinction n’est pas toujours

aisée. Peuvent rester en suspens les questions suivantes : la remise à la victime d’une chose

équivalente à celle détruite se range-t-elle dans la réparation en nature entendue comme replacement

de la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit ou

dans la réparation par équivalent dans la mesure où elle compense la perte d’un bien ? Et si les

dommages et intérêts (donc à caractère pécuniaire) constituent encore une réparation par équivalent

lorsqu’ils sont affectés à la reconstruction à l’identique d’un bâtiment détruit (replacer la victime dans

la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit) ?. La distinction

bipartite « nature-équivalent » n’étant pas aussi évidente, il serait judicieux d’opter

pour un autre critère de différenciation fondée cette fois-ci dans la consistance de ce

qui est dû à la victime. La consistance de ce qui est dû peut être matérielle : la chose,

le « res » ou pécuniaire : l’argent. Si telle est la proposition en droit français, qu’en est-

il en droit malgache de la réparation ?

§ 2. LA FORME DE LA RÉPARATION EN DROIT MALGACHE

67. Le droit de réparation malgache est complexe dans la mesure où son expression

varie en fonction de chaque groupe social : familles, tribus et ethnies 439. La diversité

et le morcellement constituent une difficulté majeure pour découvrir un lien

438 Cass. civ. 2e, 7 décembre.1978, Bull. civ. 1978, II, n° 269 ; Cass. civ. 2e, 9 juillet. 1981, Bull. civ.

1981, II, n° 156.

439 On compte traditionnellement à l’intérieur de Madagascar 18 ethnies dont l’extrême variété des caractéristiques peut s’expliquer par l’histoire du peuplement de l’île (immigration successive). Les ethnies se présentent sous des aspects différents. Certaines constituent des groupes qui ont une organisation à prédominance clanique, tous les membres se rattachant à un ancêtre commun, d’autres apparaissent plutôt comme des royautés ou principautés, d’autres enfin forment une organisation sociale consistant dans un système féodal fondé sur le régime des castes. Pour aller plus loin, voir : A. RAMANGASOAVINA, Rapport de synthèse, op. cit., p. 30-31 ; voir : aussi, H DESCHAMPS, Histoire de Madagascar, Paris, 1960, p. 143-144.

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unificateur du droit de la réparation. Bien évidemment, les particularités de chaque

entité ne peuvent être ici traitées ; seules les tendances communes seront retenues.

Elles résident dans les us et coutumes du peuple (A) ainsi que dans le droit écrit

ancien (B).

A. Les us et coutumes malgaches

68. Au sein des diverses expressions des us et coutumes des malgaches, trois grandes

règles constituent les piliers de leur unité : l’adhésion unanime à la place dévolue à la

religion dans la vie sociale ; la primauté accordée aux anciens considérés comme

garants de la cohésion sociale 440 et l’estime d’une institution sociale spécifique à la

culture locale : le Fokon’olona.

L’unité profonde du droit coutumier prend sa source dans la conception unanime

des malgaches à l’existence de l’au-delà. À Madagascar, l’interférence de la dimension

religieuse dans la vie sociale est bien acquise. Peuple infiniment religieux, les

malgaches croient en un seul Être Suprême qu’ils nomment

Zanahary - « Dieu-Créateur » 441. Considérant la toute-puissance de Dieu nommé

également Andriamanitra - « Roi parfumé », les vivants ne peuvent bénéficier d’un

contact direct avec la divinité. Il faut passer par les Ancêtres, ny Razana qui assument

le rôle d’intermédiaire entre Andriananahary - « Roi Créateur » et les vivants. Le culte

rendu par les Malgaches à leurs morts 442, le respect témoigné pour la construction

des tombeaux et les règles qui accompagnent l’ensevelissement témoignent de tout la

révérence due aux prédécesseurs intermédiaires entre Dieu et les hommes. Ces rites

constituent une référence autour de laquelle s’ordonne l’ensemble des

440 Et familiale.

441 Le Nom Zanahary, pourrait avoir des origines hébraïques. En hébreu « Yah » signifie « Dieu » et « Nahary », « Celui qui a créé », ainsi le nom « Yah-Nahary » veut dire « Dieu-Créateur ».

442 Le « Famadihana » ou le « Retournement des morts » est une coutume funéraire que l’on rencontre dans la plupart des tribus de Madagascar. Le « Famadihana » se situe dans la continuation de la coutume des « doubles funérailles » très pratiquée avant l’époque moderne pour une partie de l’Asie, de l’Égypte, du Proche-Orient ancien et de la Grèce. Selon la philosophie malgache, les âmes des défunts ne rejoignent définitivement le monde des Ancêtres qu’après la corruption complète du corps, au bout d’une longue période, et après l’accomplissement de cérémonies appropriées d’où le rituel du famadihana. Le rituel consiste à envelopper cérémonieusement dans des tissus blancs et de qualité, la dépouille des Ancêtres avant de les réenterrer. À Madagascar, le rituel du famadihana est devenu presque périodique. En général tous les sept ans, une grande festivité réunit tous les membres de la parenté pour l’évènement. De nos jours, la pratique du famadihana tend à se raréfier, en raison d’une part du coût souvent élevé de la cérémonie, et de l’autre de l’impact de l’influence occidentale, notamment de l’influence de la chrétienté.

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comportements sociaux à adopter. Ils traduisent non seulement l’attachement très

profond des Malgaches pour leurs défunts, mais attestent que les Ancêtres sont

pleinement présents dans la vie sociale. Si donc, les vivants se dérobent au respect

qui leur est dû, ils ne bénéficieront pas de leur bénédiction ; au contraire ils vont

s’attirer des malheurs. Pour apaiser les âmes des Ancêtres ou pour obtenir leurs aides

et conseils, il faut respecter scrupuleusement les règles cultuelles et apporter des

sacrifices appropriés. En effet, les sacrifices accompagnent tous les événements forts

de la vie sociale comme la naissance, la circoncision, le mariage et la réparation d’un

acte préjudiciable vis-à-vis d’autrui. À propos du lien entre sacrifices et réparation,

H. DUBOIS a laissé un écrit fort intéressant :

Si l’on a lieu de craindre quelque oubli commis dans l’accomplissement des

rites funéraires 443 ; si quelque incident fâcheux survient dans la famille ; si l’on a motif de penser que l’on prête le flanc à quelque ressentiment ou réclamation

(Tahina 444) d’un défunt, on consulte le devin et, sur son avis, on multipliera les sacrifices de réparation dont l’importance sera proportionnée à la gravité de la faute. Dans les cas les plus habituels, les volailles et les invocations suffisent; dans les grandes réunions, il s’agira de sacrifices de bœufs. Pour les rites de

« Famadihana » ou retournement des morts, souvent on offre des bœufs. 445

Dans l’ensemble, les modalités de réparation en droit malgache consistent à

présenter des sacrifices qui correspondent à l’étendue réelle de l’offense subie par la

victime, en l’occurrence les prédécesseurs. La réparation s’inscrit non seulement dans

un esprit de repenti mais aussi dans la crainte d’une sanction divine. La réparation

acquiert dès lors une dimension préventive.

Vers la fin du XVIIIe, un mouvement de codification qui tient compte de la

coutume, du droit merina et l’influence du droit colonial, surgit. Le résultat de ce

travail de codification constitue le droit ancien écrit malgache.

B. Le droit ancien écrit malgache

69. Dans les années 1800, on constate une floraison de Codes émanant de la

rencontre (ou plutôt faudrait-il dire de la confrontation) du droit merina et du droit

443 Comprenant bien entendu les autres rites.

444 Le Tahina c’est la protection des aïeuls.

445 H. DUBOIS, La Religion malgache, Essai de synthèse, extrait de l’ouvrage consacré à Madagascar par les Cahiers Charles de Foucauld, Paris 1950, p. 285. Le mécanisme de la réparation à Madagascar repose sur des croyances. Il se concrétise par les sacrifices d’expiation quand l’attitude fautive est établie. Comme en droit français, l’estimation des sacrifices obéit au principe de la réparation intégrale du préjudice ; les sacrifices doivent réparer toutes les offenses mais rien que les offenses. « L’indemnisation doit être à la hauteur du préjudice, elle ne peut « excéder le montant du dommage » Cass. civ. 1ère, 25 mars 2003.

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colonial. La législation écrite merina est essentiellement représentée par toute une

série de Codes 446 promulgués entre 1828 et 1890 447. En 1894, les deux tiers du pays

se voient appliqués ces règles. Par la suite, dès le début de la colonisation, pour des

raisons de commodité 448, le Code des 305 articles a été répandu dans l’ensemble des

tribunaux de la Grande Ile. Bref, durant la conquête française, le droit merina

assumait une référence commune 449 en termes de dispositions normatives.

Parallèlement au droit mérina, le droit colonial a joué un rôle prépondérant dans le

paysage jurisprudentiel du pays. En 1896, selon une jurisprudence constante de la

cour d’appel de Tananarive, les juges pouvaient recourir au droit français à défaut ou

d’insuffisance du droit autochtone450. Ainsi « La loi française sera suivie en tout ce qui n’est

pas prévu par la loi ou la coutume indigène » 451. Partant, une rencontre entre le droit

français dans le droit autochtone s’opère. De nombreuses institutions juridiques

malgaches, ont été transformées et perfectionnées en conséquence ; tel est

notamment le cas pour la responsabilité civile 452. Bien que structurant en profondeur

le droit autochtone, la transformation apportée par le droit colonial a été toujours

menée dans une intention respectueuse de l’esprit du droit local. L’exposé des motifs

de la loi dite « d’annexion » du 6 août 1896 contient à cet égard une promesse

446 Le Code des 42 articles de 1828, promulgué par RANAVALONA I, le Code des 50 articles de 1862

de RADAMA II, les deux Codes des 16 et 68 articles de RASOHERINA paru en 1863, le Code des 101 articles de 1868, le Code des 305 articles de 1881, auquel il faut ajouter deux textes essentiels : Les instructions des Sakaizambohitra de 1878 (les instructions des délégués de l’autorité royale près des communautés de village ; Décrets n° 57-463 et 57-464 du 4 avril 1957) et les règlements des gouverneurs de l’Imerina de 1889.

447 Le plus célèbre d’entre est le Code des 305 articles promulgué par la Reine RANAVALONA II le 29 mars 1881.

448 L’arrêté de février 1897 disposait en son article premier : « Les lois indigènes de l’Imerina sont maintenues dans celles de leurs dispositions qui n’ont pas été abrogées ». Pour l’autorité française, si les institutions politiques et législatives propres au pays, sont à garder, elles ne doivent pas en soi, être une fin. Elles servent plutôt de système permettant à la vie municipale et régionale de s’exprimer sans heurt (brutal) avec les us et coutumes locaux. Le fait de garder les institutions politiques et législatives évite en quelque sorte une rupture violente aux normes locales. Ainsi comme le confirme, le Professeur E. NJARA, le législateur français n’a pas cru devoir supprimer les normes locales dans la gestion de la colonie, in, Regard sur le droit malgache dans Mélanges en l’honneur du Professeur A. RAHARINARIVONIRINA, éd. Jurid’ika, 2010 et éd., L’ Harmattan, 2010, p. 81, 82.

449 P. CHEVALLIER, Introduction à l’étude du droit coutumier malgache, http://madarevues.recherhces.gov.mg, p. 86, 87.

450 A. RAMANGASOAVINA, op. cit., p. 19, P. CHEVALLIER, op. cit., p. 91.

451 Ibid.

452 Figurent notamment parmi ces institutions, le régime juridique de l’absence, de la tutelle des enfants mineurs, des obligations conventionnelles, voir : P. CHEVALLIER, op. cit., p. 91 ; A. RAMANGASOAVINA, op. cit., p. 19.

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formelle : « Le Gouvernement n’entend nullement porter atteinte au Statut individuel des

habitants de l’île, aux lois, aux usages, aux institutions locales… ». Dans le même sens,

l’article 16 du décret du 9 juin 1896, portant organisation de la justice à Madagascar,

disposait quant à lui : « Les tribunaux indigènes institués par la législation locale sont

maintenus. Ils connaissent conformément aux dispositions de la législation locale de toutes les affaires

civiles ». Enfin en matière répressive, l’article116 du décret du 9 mai 1909 portant

réorganisation de la justice indigène à Madagascar, maintenait les lois et coutumes

indigènes.

En définitive, on constate que le mariage entre le droit écrit autochtone 453 et le

droit français 454 réussissait au final au droit coutumier car il lui a permis de se

formaliser sans perdre de son authenticité

Le travail de compilation des références normatives atteint son apogée vers les

années 1960. Le droit positif malgache a pris forme. Il a comme fondement, la loi sur

la théorie générale des obligations ou la LTGO. Ce corpus juridique moderne

fiable 455 tant sur la forme que sur le fond 456, peut régir le lien d’obligation entre

médecin et patient.

SECTION II. LA LTGO : BASE JURIDIQUE RÉGISSANT LA RESPONSABILITÉ

MÉDICALE

70. À Madagascar, la loi sur la théorie générale des obligations en date du 2 juillet

1966 est d’actualité pour la gestion juridique des rapports sociaux dont fait partie la

relation médecin malade. Par ailleurs qualifiée de contractuelle 457, la relation

médicale rejoint les domaines traités par la LTGO 458. Avant d’examiner le

déploiement de ce corpus juridique sur le terrain de la responsabilité médicale (§ 1), il

est important de se réapproprier des dispositions générales du texte (§ 2).

453 Constitué en grande partie du droit merina sans négliger l’ensemble des us et coutumes de l’île.

454 Droit colonial.

455 « C’est une œuvre qui a su allier classicisme et modernité et qui reste donc très actuelle », voir : Ph. DELEBECQUE, L’actualité de la théorie générale des obligations malgache (TGO), in, Mélanges en l’honneur du Professeur A. Raharinarivonirina, éd. Jurid’ika, 2010 et éd., L’Harmattan, 2010, p. 189.

456 Voir : Ph. DELEBECQUE, op. cit., p. 187.

457 Voir : supra, n° 22.

458 « La LTGO couvre tout le droit des contrats et l’ensemble du régime des obligations, questions qui sont au cœur de la vie des affaires, comme de la vie quotidienne », Ph. DELEBECQUE, op. cit., p. 189.

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§ 1. LES DISPOSITIONS DU TEXTE DE LA LTGO

71. L’apparition d’un Droit des obligations à Madagascar n’a pas manqué de susciter

quelques méfiances et en particulier, celle de l’éclatement du droit. En effet, à

l’acquisition de l’indépendance, le droit civil malgache a pu, grâce à une large

participation du Code civil français, adopter une uniformité avec l’ensemble des États

africains qui étaient sous protectorat français. La crainte était alors que l’adoption

d’une législation nationale conduise à l’éclatement de l’unité législative territoriale 459.

Mais au final, grâce aux thèmes fondamentaux qu’elle comporte (B), la nouvelle loi

sur les obligations a permis d’exprimer une souveraineté nationale sans négliger les

acquis du droit écrit français 460 (A).

A. La LTGO : expression d’une souveraineté législative nationale

72. À l’origine de la LTGO, il y a eu l’ordonnance n° 62.037 du 19 septembre 1962.

Cette ordonnance avait comme objectif d’instituer un nouveau droit malgache des

obligations. Jusque-là, ces obligations se résumaient à la somme des jurisprudences

coutumières (claniques, royales) ; de décisions de la cour d’appel de Tananarive ainsi

que des articles d’anciens Codes malgaches 461 et du Code civil français 462.

L’ordonnance de 1962 traitait alors de la portée de l’obligation ; de ses modalités ; de

son exécution et de son extinction. Elle avait également établi le principe du droit de

gage général des créanciers sur le patrimoine du débiteur. En 1967, elle se retrouve

fondue avec deux nouveaux textes 463 pour donner naissance à une seule loi,

la loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 dite Loi sur la théorie générale des obligations

(LTGO). Entreprise dans la même ambition que l’ordonnance source : édifier un

nouveau droit malgache des obligations, la LTGO n’avait pas l’intention d’éliminer

les apports du droit civil français mais plutôt d’en retirer une synthèse législative

fiable 464. Dans ce sens, elle a essayé de mettre fin aux difficultés que pouvait

459 J. LACOMBE, La théorie générale des obligations dans le nouveau droit Malgache, Annales de l’Université de

Madagascar : Droit, 1965, p. 87, http://www.recherches.gov.mg.

460 Entre autres la référence législative commune avec les autres États africains

461 Voir : n° 69.

462 Il va sans dire de l’époque.

463 L’ordonnance n° 62 007 du 31 juillet 1962 sur les preuves des obligations civiles et la loi n° 65 003 du 9 juin 1965 sur les sources des obligations civiles.

464 « L’œuvre entreprise ne consiste pas à éliminer l’un des droits au profit de l’autre, mais à en réaliser une synthèse harmonieuse ; cette synthèse est d’ailleurs considérablement facilitée par la similitude fondamentale entre les règles gouvernant la matière des obligations dans toutes les nations policées », J. LACOMBE, op.cit, p. 88.

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— 110 —

représenter les séquelles de la dualité du système judiciaire lors de la conquête

française 465.

Une fois que la LTGO soit instituée, il importe de savoir si elle a pu relever ses

défis : unifier et moderniser le droit des obligations. À travers les thèmes récurrents

qu’elle aborde il nous sera possible de le savoir.

B. Les thèmes récurrents de la LTGO

73. Sur la forme, la TGO s’articule autour de cinq titres : dispositions générales, actes

juridiques, faits juridiques, mode de preuve relatifs aux obligations civiles ; extinction

des obligations 466. Sur le fond, elle traite des principes et des valeurs morales

régissant les liens entre les personnes tels que le respect de la parole donnée dans le

contrat 467 et la réparation du dommage causé 468. Elle commence par définir le terme

« obligation » : « Un lien de droit en vertu duquel le débiteur est juridiquement tenu envers le

créancier de lui fournir une prestation ou de s’abstenir d’une faculté, prestation ou abstention dont il

est responsable sur la valeur des éléments actifs qui composent son patrimoine » 469. Après avoir

délimité le périmètre des obligations, la LTGO sanctionne au visa de l’article 177,

tout comportement allant à l’encontre du dispositif « obligation ». Le comportement

sanctionné revient au fait de ne pas exécuter une « obligation légale préexistante » 470 ;

autrement dit, un manquement contractuel. Ainsi, la LTGO a le mérite de couvrir

tout le droit des contrats. La lecture du deuxième titre relatif aux « actes juridiques »

(contrat) le confirme. Force est de constater que la LTGO constitue un vrai

instrument juridique permettant aux particuliers de donner une force obligatoire à

465 La riche matière des obligations était, en effet, régie par des règles de Droit coutumier local et

par des règles de Droit moderne empruntées en Droit français. Il y avait donc une dualité de sources qui ne manquait pas de causer des difficultés pratiques et doctrinales sérieuses, J. LACOMBE, Ibid. Les arrêts de la Cour rendus en matière de droit traditionnel, mettent par exemple en présence d’une juridiction française composée en majorité de magistrats français habitués au droit écrit et de coutumes profondément différentes et qui de surcroît en majorité orale. Ainsi dans l’enceinte d’une Cour, se rencontraient - ou faudrait-il dire se heurtaient –, deux droits, l’un écrit, l’autre oral, l’un européen, l’autre malgache. Par-delà la diversité des vocabulaires, des techniques et des institutions, la rencontre de deux droits implique celle de deux sociétés, de deux cultures, bref de deux conceptions du monde.

466 Ph. DELEBECQUE, op. cit., p. 187 et s.

467 Article 1134 du Code civil français et article 123 de la LTGO malgache.

468 Article 1132 du Code civil français pour la responsabilité délictuelle correspondant à l’article 204 de la LTGO malgache ; article 1147 du Code civil français pour la responsabilité contractuelle et article 177 de la LTGO malgache.

469 Article 1 de la LTGO.

470 Expression de Planiol et reprise par Bellissent, voir : n° 50.

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leur accord de volonté 471. En somme, la LTGO a permis au consensualisme 472

d’acquérir une valeur juridique. Bien entendu; le consensualisme est appelé à être en

cohérence à l’ordre public. À cet effet, le législateur a prévu à l’article 90 que « La

prestation ou l’abstention (objet du contrat), de ce qui a été consenti 473, ne doit en rien être contraire

aux bonnes mœurs et à l’ordre public. Elle doit être également être conforme aux règles impératives

édictées en vue d’assurer l’organisation des forces productives du pays dans l’intérêt de la Nation ».

Dans le prolongement de la validité du contrat, elle aborde le régime de la

défaillance contractuelle. Cependant, les articles concernés : 164 et suivants,

n’envisagent que deux sanctions à l’inexécution contractuelle : la résolution et la

résiliation 474 (et son diminutif, l’exception d’inexécution prévu à l’article 171).

L’article 53 de la TGO prévoit tout de même la théorie de l’exécution forcée en

matière contractuelle. Il dispose que « lorsque le débiteur n’exécute pas l’obligation, le

créancier peut l’y contraindre par toutes les voies de droit ». Le principe est donc clair : la

sanction de l’inexécution contractuelle est l’exécution forcée, si du moins celle-ci

s’avère encore possible 475. La mise en œuvre de l’exécution forcée, ne peut toutefois

se réaliser que dans le respect de la personne du débiteur qui pour une raison ou pour

une autre peut se trouver dans l’incapacité de s’exécuter. Sa dignité s’oppose à ce

qu’on le contraigne par la force 476. La TGO pose justement les conditions

restrictives à l’opportunité d’exécution forcée en disposant en son article 91 alinéa 2

471 Articles 67 et 123 (ce dernier article s’appuyant sur l’article 64 de la LTGO).

472 Le consensualisme occupe ainsi une place majeure au sein de LTGO. C’est un élément fondamental pour la formation du contrat. La réserve émise à l’égard de la théorie des contrats réels (confirmée par l’article 68 de la LTGO) atteste la place incontournable du consensualisme pour la validation du contrat.

473 « Les obligations résultant d’un contrat ont pour objet, soit de fournir une prestation, soit de s’abstenir d’une faculté », Article 88 de la LTGO.

474 La résolution anéantit rétroactivement le contrat, ce qui n’est pas le cas de la résiliation. La résolution se distingue également de la nullité dans le sens où elle sanctionne l’inexécution ou la mauvaise exécution de l’obligation alors que la nullité sanctionne les conditions de formation d’un contrat, article 1184 du Code civil français. Pour rappel, la résolution résulte soit de l’accord des parties, soit d’une décision judiciaire : article 166 de la LTGO ; soit de la décision unilatérale de l’une des parties (sous réserves de conditions) : article 167 ; soit du décès d’une ou des parties : article 168.

475 D’autant plus que la LTGO mentionne, l’éventualité d’impossibilité d’exécution ou de la perte de la chose due. En l’occurrence, elle prévoit l’extinction de l’obligation : article 173. Mais les articles qui suivent, apportent une modération à l’effet extinctif de l’impossibilité d’exécution. En définitif, le droit à réparation du créancier lésé est relativement constant. Comme nous l’avons précédemment évoqué, il arrive des circonstances où la réparation en nature est impossible en raison d’éléments matériels ou de dispositions législatives. La partie lésée garde dans ce cas la faculté de demander une exécution par équivalent ; sa créance née du contrat se transforme en une somme d’argent appelée dommages-intérêts, voir : n° 65.

476 S. RANDRIANAHINORO, op. cit., p. 109.

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que : « Le créancier peut invoquer comme élément de son préjudice la perte qu’il a subi et le gain

dont il a été privé. Il doit cependant faire tout ce qui est en son pouvoir pour diminuer la perte

résultant de l’inexécution de l’obligation, sous peine d’une réduction des dommages-intérêts

correspondant à cette négligence ».

En somme, la LTGO constitue un vrai corpus juridique pouvant régir d’une

manière juste et efficace les relations entre particuliers, entre les professionnels et

entre les deux réciproquement. Etant précise sur les canons du droit commun des

contrats : capacité (articles 64 et suivants), consentement (article 68 et suivants) ;

objet (article 88 et suivants), cause (article 91 et suivants) et effets, la LTGO permet

un contrôle raisonnable de la validité des conventions 477. C’est une œuvre, comme

le relève le Professeur Delebecque, qui a su accorder classicisme et modernité. À ce

titre peut se déployer sur le terrain de la responsabilité médicale.

§ 2. LE DÉPLOIEMENT DE LA LTGO DANS LE DOMAINE DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE

74. La LTGO couvre tout le droit des contrats. Par conséquent, elle peut à juste titre

encadrer juridiquement la relation médecin-malade relevant de la sphère

conventionnelle 478 (A). Par ailleurs, la LTGO aborde le domaine de la preuve avec

aisance, c’est un plus pour régir la responsabilité médicale fondée sur la faute (B).

A. Les dispositions contractuelles de la LTGO invocables en matière de responsabilité médicale

75. En application au premier article de la LTGO, il s’établit entre le médecin et le

patient « Un lien de droit qui tient le médecin à fournir une prestation ou à s’abstenir d’une faculté,

prestation ou abstention dont il est responsable sur la valeur des éléments actifs qui composent son

patrimoine » 479. En matière médicale, la prestation à fournir consiste pour le praticien

en l’engagement de prodiguer des soins consciencieux, attentifs et, réserve faite des

circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science 480 ; que

la violation même involontaire de cette obligation contractuelle est sanctionnée par

477 Ph. DELEBECQUE, op. cit., p. 191.

478 Voir : supra, Chapitre I : Exposé de la nature contractuelle du rapport médecin-patient en droit positif malgache.

479 Article 1e r TGO

480 La loi du 4 mars 2002 a substitué cette expression d’origine jurisprudentielle par référence « connaissances médicales avérées », article L 1111-5, al.1e r Code de la santé publique.

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une responsabilité de même nature. Concernant la portée du lien de droit entre le

médecin et le patient, certes la LTGO et la doctrine ne l’ont pas approfondie.

Toutefois en abordant la classification des obligations 481, la doctrine a pu définir la

nature de l’obligation médicale. Elle dispose que « La distinction obligations de résultat-

obligations de moyens est consacrée par l’article 179 de la LTGO. Elle repose sur la constatation

suivante : l’obligation de résultat impose au débiteur un résultat bien précis […] 482 ; l’obligation de

moyens contraint seulement le débiteur à agir avec le maximum de prudence et de diligence, en vue

d’obtenir un résultat, mais sans pouvoir le garantir, ainsi un médecin ne s’engage pas à guérir un

malade, mais seulement à le soigner selon les règles de l’art » 483 Bref en droit médical

malgache, l’obligation médicale est une obligation contractuelle de moyens.

Dans le prolongement de la doctrine, les jurisprudences attestent l’opportunité

d’appliquer la LTGO en matière de responsabilité médicale. Dans les cas

jurisprudentiels évoqués ultérieurement, afin de définir le contour de la responsabilité

des gynécologues 484, les juges du fonds ont fait appel aux articles 177 à 179 de la

LTGO relatifs à la responsabilité contractuelle. Ils ont donné gain de cause aux

praticiens en validant le recours à un médicament à effet abortif. D’après les motifs,

la décision médicale n’est pas condamnable eu égard aux circonstances. L’estimation

de retard de délivrance par rapport au DPA 485 ainsi que le risque de rupture de la

poche des eaux, constituent des circonstances justifiant l’administration d’un

médicament à effet abortif ; plus précisément, un accouchement provoqué éviterait à

l’enfant une asphyxie (le premier cas) et une ingurgitation du liquide amniotique (le

deuxième cas). Ainsi il a été tranché que la décision médicale d’administrer un

médicament à effet délétère, s’inscrit dans le principe même de l’obligation de

moyens prévue à l’article 179 de la LTGO et à laquelle est tenu le médecin 486.

En somme, la TGO traite des principes et des valeurs morales régissant les liens

entre les personnes, tels le respect de la parole donnée dans le contrat 487 et la

481 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd : centre malgache de promotion du livre, p. 14,

15. Aricle 179 de la TGO

482 Voir : Ibid.

483 Ibid.

484 Voir : supra n° 57.

485 DPA ou Date prévue pour l’accouchement.

486 Arrêt Mercier, Cass civ., 20 mai 1936, D.P. 1936.1.88, concl. P. MATTER, rapp. L. JOSSERAND, R.T.D. civ. 1936. 691, obs. R. DEMOGUE.

487 Article 123 de la LTGO malgache correspondant à l’article 1134 du Code civil français : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ».

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réparation du dommage causé ou le principe de la responsabilité civile impliquant le

devoir de réparer les conséquences dommageables de ses actes 488.

Fondamentalement ces règles universelles ont vocation à s’affirmer en droit de la

responsabilité médicale malgache. La TGO demeure pour les justiciables malgaches,

la source de protection de leur droit et de leur intégrité physique. Grâce à sa

souplesse et sa généralité, elle continue d’être le gisement fécond sur lequel, la

jurisprudence médicale malgache pourra s’appuyer. L’application au domaine médical

de la loi sur la TGO, se matérialise par le principe selon lequel aucune personne ne

peut échapper à sa responsabilité si son activité a entraîné un dommage pour

autrui 489.

En abordant les fondamentaux des règles régissant les rapports entre les

personnes, la LTGO est en mesure d’encadrer la relation médicale. Cette faculté est

confirmée par la dextérité dont elle témoigne en traitant le domaine de la preuve.

B. La dextérité de la LTGO en matière de preuve : confirmation d’adaptabilité au droit médical

76. Le mécanisme de la preuve, est d’une importance capitale en droit de la

responsabilité médicale. Il se doit d’être lisible et fonctionnel pour que la victime

puisse établir en bon et due forme ce qu’elle prétend être « fautif ». Concrètement, il

faut un support juridique établissant des indications sur les modalités de preuve. En

vertu de son Titre quatrième, intitulé « Des modes de preuve relatifs aux obligation civiles »,

la LTGO répond à cette attente. Elle met à la disposition de ceux à qui incombe la

charge de la preuve 490, plusieurs alternatives : l’écrit, la preuve par témoins, l’autorité

de chose jugée ainsi que l’aveu et le serment 491. Au-delà de l’exhaustivité des modes

de preuve profitant à la défense, la LTGO a fait un grand pas dans le souci des

victimes tenues à des preuves particulièrement difficiles à établir. En effet,

488 Article 204 de la LTGO malgache correspondant à l’article 1132 du Code civil français, soit le

principe de la responsabilité délictuelle.

489 D. THOUVENIN, La responsabilité médicale, Médecine-Sciences, Analyse des données statistiques disponibles et des arrêts rendus par la Cour de cassation et le Conseil d’État de 1984 à 1992, éd., Flammarion, p. 2. Les articles 204 (responsabilité délictuelle) ; 51 (exécution forcée) et 53 (contraintes par voie de droit) de la LTGO, garantissent l’effectivité de la prise de conscience de chacun de sa responsabilité par rapport à autrui.

490 En droit de la responsabilité médicale, il y a des hypothèses où s’applique le renversement de la charge de la preuve : cas d’obligation de sécurité de résultat (n° 36 et s.) ; cas concernant le devoir d’information médicale (qui sera ultérieurement étudié).

491 Voir : Ph. DELEBECQUE, L’actualité de la théorie générale des obligations malgache (TGO), in, Mélanges en l’honneur du Professeur A. Raharinarivonirina, éd. Jurid’ika, 2010 et éd. L’Harmattan, p. 198.

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l’article 297 492, mentionne, le mécanisme de la « présomption » impliquant une

responsabilité sans faute. Dès lors, pour des cas spécifiques, les victimes n’ont plus le

souci d’établir la preuve. En tout cela, la LTGO est en mesure de régir la

responsabilité médicale ; domaine où la preuve exige une expertise pointue 493. Sur le

fondement de l’article 297, le droit de la responsabilité médicale malgache peut

invoquer les dispositions selon lesquelles, « L’obligation principale de moyens issu du contrat

médical compte tenu de l’état du malade et de l’état inhérent à toute thérapie, n’est exclusive d’une

obligation accessoire de sécurité du patient ». Ainsi, « Pour des circonstances spécifiques, le

professionnel de santé a une obligation de sécurité qui l’oblige à réparer le dommage causé à son

patient même en l’absence de faute. Il ne peut s’exonérer de cette responsabilité qu’en établissant la

cause étrangère ».

En somme, en vertu de la LTGO, le « vide textuel » 494 ne saurait-être invoqué pour

justifier les lacunes en droit de la responsabilité médicale à Madagascar 495. Mais, le

voudrait-elle, la loi ne peut se porter garante de l’effectivité des dispositions qu’elle

stipule. Elle ne peut du moins à elle seule rendre concrète la réparation du dommage

corporel à la suite d’une intervention médicale. Celle-ci reste tributaire des

mécanismes de garantie tel que :

— Le système d’assurance ;

— Et l’expertise médicale qui fonde le principe de causalité.

Concernant ces mécanismes de garantie, la réalité révèle une inexistence pratique

de la responsabilité médicale.

492 Article 297 de la LTGO : « Les présomptions sont des conséquences que la loi ou le juge tire d’un fait connu

dans le dessein d’établir ou de faciliter la preuve d’un fait inconnu ».

493 Voir : infra, Titre II, Chapitre II, Section 1, §° 2, A. La difficulté de la preuve médicale pour la victime.

494 F. VIALLA, Les décisions du droit médical, éd. L.G.D.J., lextensoéditions, 2009, p. 1.

495 À ce propos, PORTALIS avertit : « Il ne faut point de lois inutiles ; elles affaibliraient les lois nécessaires (en l’occurrence la LTGO) ». Et le Doyen Carbonnier implore de ne pas légiférer qu’en tremblant.

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TITRE II.

INEXISTENCE PRATIQUE DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À MADAGASCAR

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77. L’effectivité de la réparation médicale émane de la fluidité des transactions en

matière indemnitaire. À cet effet, doit être mise en place un système de solidarité

nationale capable de répondre aux risques d’accidents médicaux. L’expression la plus

élaborée du système de la solidarité est l’assurance 496. Autrement dit, l’effectivité de

la responsabilité médicale dépend de la réalité de l’assurance professionnelle

(Chapitre premier). L’intervention de l’assurance en vue de couvrir les préjudices est

quant à elle, conditionnée par l’existence du lien de causalité entre l’acte fautif et le

dommage. Or la causalité est une notion difficile à appréhender 497. La doctrine met

en avance la difficulté de fixer entre la théorie de la causalité adéquate et la théorie de

l’équivalence des conditions 498. Les contentieux de la responsabilité médicale à

Madagascar, n’ont pas échappé à ces incertitudes qui ont tendance à fragiliser le

principe de la responsabilité médicale (Chapitre deuxième).

496 H. R. ANDRIAMANANTENA, L’Assurance à Madagascar, in Mélanges en l’honneur du Professeur

A. RAHARINARIVONIRINA, éd., Jurid’ika et l’Harmattan, 2010, p. 201.

497 Tel est le cas face à un médecin anesthésiste informé de la dégradation de santé de son patient et qui procède à une prescription à distance ; […] au final, le patient décède. En matière de causalité, les questions qui se posent sont : Est-ce que le défaut d’intervention constitue une cause certaine, directe et exclusive du décès ? Dans l’hypothèse où le déplacement ait eu lieu, est-ce certain que le dommage aurait pu être évité ? C.A. de Pau, 2 mai 2001. En somme, la question de causalité pose la problématique de la participation non exclusive de la faute du fait de l’état de santé déficient du patient. Dans cette hypothèse, il faut retenir qu’en droit contrairement au fait, le principe de causalité partielle n’est pas admis. Par conséquent; la participation partielle de la prédisposition du patient au dommage n’est pas une cause exonératoire de responsabilité. Cependant, le médecin n’est tenu que de la part du dommage qu’il a causé. Autrement dit la participation de la prédisposition du patient, est un élément qui influence l’évaluation des dommages et intérêts, voir : n° 48, 49.

498 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre CMPL, 1984, p. 177.

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CHAPITRE I.

LE SYSTÈME ASSURANTIEL DES MÉDECINS FACE AUX ACCIDENTS THÉRAPEUTIQUES

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78. Certes on peut voir à travers le mécanisme assurantiel, une occasion pour

le praticien de se retrancher derrière l’assureur. Ce sentiment d’être libéré des

exigences de la réparation ainsi que l’assurance de voir son patrimoine protégé,

risquent de générer un laxisme professionnel. Toujours est-il, un dispositif

d’indemnisation ne peut valablement fonctionner en dehors d’un mécanisme

assurantiel. Le mécanisme de l’assurance permet de diluer la charge du dommage 499.

Concrètement, l’assurance fonctionne de la sorte : des primes ou des cotisations sont

versées à une institution dénommée « Assurance » qui est aussi l’« Assureur ». Les

personnes qui versent les primes sont dénommées « Assurés ». S’il leur arrive un

sinistre, les primes et les cotisations versées par l’ensemble, auront pour vocation de

compenser la perte au prorata du préjudice. L’assurance assure de cette manière une

vertu sociale de prévoyance et de solidarité. Elle rejoint les interpellations de

Monsieur Tunc sur la moralité sociale : « La moralité, dans une société requiert une solidarité

effective devant les malheurs qui frappent un homme » 500. En effet, il résulte du mécanisme

assurantiel que le poids des accidents médicaux se répartisse dans la collectivité.

79. En droit français, la mise en œuvre du principe de responsabilité passe par

l’obligation du médecin exerçant à titre libéral, de souscrire une assurance visant à

garantir la responsabilité en raison d’atteintes à la personne des patients en cours

d’acte de soin 501. Pour garantir l’effectivité de l’obligation d’assurance, le législateur

l’a assortie de sanctions pénales 502. Par ailleurs, les assureurs sont légalement tenus

d’intervenir lorsque la responsabilité médicale d’un assuré est engagée 503.

Cette obligation est sanctionnée par la présence d’un bureau central de tarification

qui a pour mission, en cas de deux refus consécutifs de la part d’un assureur de fixer

499 H. R. ANDRIAMANANTENA, L’Assurance à Madagascar, in Mélanges en l’honneur du Professeur

A. RAHARINARIVONIRINA, éd., Jurid’ika et l’Harmattan, 2010, p. 201 et 211.

500 A. TUNC, La responsabilité civile, éd, Paris, Économica, Coll. Études juridiques comparatives, 2e éd., 1989, p. 112.

501 L’obligation de souscription s’impose en outre à tout établissement de santé ou service de santé exerçant à titre libéral, à tout établissement de santé ou service de santé exerçant des activités de prévention, de diagnostic ou de soins, ainsi qu’à tout producteur, exploitant ou fournisseur de produits de santé, Article L.1142-2 du Code de la santé publique.

502 Article L.1142-25 du Code de la santé publique : « Le manquement à l’obligation d’assurance prévue à l’article L. 1142-2 est puni de 45 000 Euros d’amende. Les personnes physiques coupables de l’infraction mentionnée au présent article encourent également la peine complémentaire d’interdiction, selon les modalités prévues par l’article 131-27 du Code pénal, d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice de laquelle ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise […] ».

503 A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd., Thémis droit, Puf, 2009, p. 453.

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le montant de la prime et de la franchise restant à la charge de l’assuré 504. Si tel est le

principe de l’assurance en droit français, qu’en est-il en droit malgache ? Pour

répondre à la question, il importe d’abord de se réapproprier du Droit malgache des

assurances (Section I) et d’étudier en suivant, l’opportunité d’un système d’assurance

obligatoire pour l’exercice de l’activité médicale à Madagascar (Section II).

504 Article L. 252-1 du Code des assurances.

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SECTION I. LE DROIT MALGACHE DES ASSURANCES

80. L’assurance repose sur un contrat conclu entre « assuré » et « assureur ».

L’assureur va définir les conditions précises dans lesquelles va s’exercer son

obligation de garantie. Un tel contrat va donc comporter une fiche d’information sur

les prix et les garanties, les limites des garanties et parallèlement si possible une liste

des risques non couverts, le rappel des législations et des instances compétentes en

cas de litige, les conditions de déclenchement de la garantie notamment pour les

contrats de responsabilité. Bref, considérant les clauses contractuelles, force est de

dire qu’un contrat d’assurance est une convention relativement complexe 505. Ce qui

peut se comprendre dans la mesure où l’obligation de l’assureur — garantir la

solvabilité des adhérents responsables —, repose sur la maîtrise des flux des risques

qui reste une opération complexe. Autrement dit, la rigueur contractuelle en matière

d’assurance, s’explique par la dimension économique en jeu du fait du risque inhérent

du contrat d’assurance.

En somme, l’assurance est une garantie de solvabilité pour l’assuré et par

conséquent un instrument privilégié d’indemnisation des victimes. Pour encadrer

juridiquement cette mission, Madagascar dispose d’un Code des assurances établi par

la loi n° 99-013 du 2 août 1999. Pour bien comprendre la manière dont l’assurance

assume l’indemnisation, nous allons dans un premier temps, aborder la théorie des

assurances (§ 1). Par la suite, nous allons apprécier si elles sont vraiment requises

pour l’exercice de l’activité médicale à Madagascar (§ 2).

§ 1. LA THÉORIE DES ASSURANCES

81. Le droit français, donne une lecture claire de la théorie des assurances. À lire

l’article L. 121-6 du Code des assurances, il est établi que celui qui a intérêt à ce que le

505 Fondé sur le risque, c’est-à-dire, la survenance d’un évènement aléatoire, le contrat d’assurance

prévoit deux paramètres : les conditions générales relatives aux conditions communes applicables à tous les assurés : garanties, limites des garanties, échéances…, voir : n° 80 et les conditions particulières, celles qui adaptent le contrat aux besoins et aux déclarations de l’assuré. En général, le contrat d’assurance est précédé d’un document d’informations engageant plus ou moins l’assuré et l’assureur. Il contient, la notice d’information et la proposition. La proposition constitue un véritable pré-contrat rassemblant les éléments fournis par l’assuré et les conditions de l’assureur. Bien que signée par les deux parties, la proposition ne constitue pas un engagement entre ces dernières. Après souscription de contrat, elle peut constituer un élément de preuve en cas de litige, www.index-assurance.fr.

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risque ne survienne pas, aura avantage à souscrire un contrat d’assurance. L’assurance

devient ainsi un dispositif permettant d’entreprendre des activités en toute quiétude,

notamment dans une société économiquement et socialement mouvementée. Et la

doctrine en droit malgache le confirme. D’après elle, « L’objet de l’assurance est, d’une

manière générale, de partager le fardeau de la perte ou de la destruction d’un bien à la suite d’un

évènement précis et d’apporter ainsi la sérénité aux assurés dans leur vie quotidienne, dans l’exercice

d’une activité ou la réalisation d’un projet. […] de la continuité d’une activité dépend la survie d’une

famille ou d’une entreprise » 506. Mais du côté de l’assuré, le fait que cette mesure suppose

d’engager des frais l’invite « autant que faire se peut » à souscrire une assurance

portant sur des risques potentiels (A). La capacité d’assurer les risques varient en

fonction des pays pour des raisons contextuelles. Ainsi, il nous faut voir l’assurabilité

de ces risques potentiels à Madagascar (B).

A. Les risques potentiels assurables

82. L’article L. 121-6 du Code des assurances français dispose que : « Toute personne

ayant intérêt à la conservation d’une chose peut la faire assurer, tout intérêt direct ou indirect à la

non-réalisation d’un risque peut faire l’objet d’une assurance ». L’intérêt d’assurance est ici

défini de manière négative : seul celui qui a intérêt à ce que le risque ne survienne pas,

est sollicité à souscrire une assurance. Tel est par exemple l’intérêt à la non-réalisation

d’un incendie, d’un vol, d’une catastrophe naturelle, d’un accident professionnel

(médical en l’occurrence)… ; bref l’intérêt à la non-réalisation de tout événement

incertain dont on souhaite se prémunir. Pour l’assuré, cela implique la capacité

d’affronter le hasard, l’aléa 507. Cette quiétude suppose l’engagement de frais

(les versements de primes) en fonction des risques potentiels. L’histoire de

l’assurance a permis de les répertorier.

83. Historiquement, on a d’abord recensé, la Caisse d’entraide des tailleurs de pierres

de la Basse-Egypte. Elle est à l’origine de l’assurance maladie professionnelle 508. Ensuite,

506 H. R. ANDRIAMANANTENA, L’Assurance à Madagascar, in Mélanges en l’honneur du Professeur

A. RAHARINARIVONIRINA, éd., Jurid’ika et l’Harmattan, 2010, p. 201.

507 L’assuré ne se situe plus dans l’attitude de résignation devant le fatum, voir : J. CARBONNIER, Droit civil, t. IV, 7e éd., n° 87, Politique législative, cité par J. PENNEAU, La responsabilité médicale, éd., Sirey, 1977, p. 3.

508 L’assurance contre le risque professionnel comprend les accidents de travail et les maladies professionnelles. Les accidents de travail sont ceux survenus par le fait ou à l’occasion du travail. Ils comprennent aussi, l’accident de trajet, c’est-à-dire l’accident dont est victime le travailleur alors qu’il se rend à son travail ou en revient pour rentrer à sa résidence principale, voir : article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale. Concernant les maladies professionnelles (maladie chronique, incapacité permanente ou décès), elles sont assimilées aux accidents du travail parce

…/…

Page 124: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 123 —

le Code d’Hamourabi datant de 2000 ans avant Jésus Christ, dispose de mentions

relatives à l’assurance de transports par caravane, ancêtres de l’actuelle assurance de

transport ; aux environs de 640 avant Jésus Christ, une loi athénienne arrive à obtenir

du groupement des artisans 509, des cotisations en faveur de leurs membres frappés

par l’adversité ; bref une vraie initiative de groupe à l’origine de la mutuelle 510.

Dans le prolongement des risques, il y a ceux liés à l’activité maritime. Pour se protéger

des risques liés à l’aventure maritime, les navigateurs originaires de la Phénicie 511

mirent en place le mécanisme de la mutualisation en mettant en gage une certaine

quantité de marchandises et de biens 512. Ces biens servaient pour indemniser les

armateurs et les marchands des pertes probables en cas d’accidents maritimes. À ce

propos, de lois anciennes relatives aux risques maritimes 513, prévoient des principes

d’indemnisation des pertes de marchandises. Ces principes constituent de vrais

pionniers de l’assurance moderne.

Ensuite, il y a le risque incendie. Au XVIIe siècle, en Angleterre, un incendie ayant

ravagé 13 000 maisons à Londres a conduit Edward LIoyd, à créer un office

d’assurance qui deviendra les LIyods de Londres, la plus importante compagnie

que causées par le travail, voir : Les tableaux des maladies professionnelles prévus à l’article R.461-3 du Code de la sécurité sociale.

509 Ce groupement de personnes relevant du même corps de métiers est désigné par le terme « hétairie ». Dans la société grecque, le terme spécifiquement, un club aristocratique d’une cité de la Grèce classique, ou une société politique ou littéraire de la Grèce moderne, http://fr.wikipedia.org.

510 La mutuelle est une société de personnes physiques ou morales à but non lucratif organisant une solidarité entre ses membres, et dont les fonds proviennent de leurs cotisations, article L.111-1, alinéa 1 du Code de la mutualité. À la différence de l’assurance, la mutuelle n’a pas un objectif lucratif : tout excédent est réparti au sein de la mutuelle entre les membres ; les cotisations sont indépendantes du risque individuel de l’adhérent : il n’existe pas de sélection selon l’état de santé de l’adhérent (le questionnaire médical est interdite); son organisation est démocratique (le fonctionnement interne est égalitaire ; c’est-à-dire ; non lié à l’apport de capital et que chaque adhérent possède une voix dans les délibérations). En France, la mutuelle intervient en complément de la sécurité sociale laquelle est obligatoire. Il s’agit de la complémentaire santé et de retraite.

511 Actuel Liban, et certaines parties de la Syrie et de la Palestine.

512 Ente autres, le bois utiles pour construire un navire.

513 La loi rhodienne du jet à la mer, traduite ultérieurement par la « la théorie des avaries communes ». Matériellement, la théorie des avaries communes, signifie que si en cours de navigation on devait jeter par-dessus bord une partie de la cargaison pour alléger le navire, les pertes sont réparties sur l’ensemble des négociants (marchands, armateur, capitaine de bord…) ; les propriétaires de marchandises aliénées disposent d’une action contre le capitaine qui peut à son tour, se retourner contre les marchands dont la cargaison n’a pas été perdue. Pour éviter cette responsabilité « échelonnée » devant le fait accompli, le système d’assurance moderne opte pour la configuration où tous les négociants cotisent en amont afin de répondre aux éventuelles pertes.

Page 125: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 124 —

d’assurances au niveau international. En France, il faudra attendre les années 1700

pour voir le Bureau des incendiés 514, organisme municipal qui est plus proche d’une

caisse de secours que d’un organisme d’assurance.

À côté des risques liés aux événements accidentels, figurent ceux attachés au

comportement fautif d’un assuré par rapport à ses « obligations préexistantes » 515. Il

s’agit donc de risques de dette de responsabilité. Cette catégorie de risque a diffusé le

mécanisme de l’assurance responsabilité civile 516 qui est la pierre angulaire des

systèmes d’indemnisation des sociétés modernes 517. En France, l’assurance de

responsabilité civile a donné lieu à des assurances obligatoires dans les domaines de

risques importants 518 incluant notamment, l’aléa thérapeutique et les accidents

médicaux.

Ayant eu un aperçu des risques assurables, à savoir, les risques liés à l’événement

accidentel (naufrage, incendie…) et les risques liés au comportement fautif d’un

assuré ou risques de dettes de la responsabilité ; il convient de les apprécier au sein

du contexte malgache.

B. L’assurabilité des risques potentiels à Madagascar

84. Au sein du Livre I du Code des assurances malgache, figurent trois titres

correspondant à la classification des risques :

— Le Titre II relatif aux dommages non maritimes comprend : l’incendie 519, la dette de

responsabilité 520, les accidents agricoles 521 et les accidents de véhicules terrestres à moteur 522 ;

514 En 1717, a été créé à Paris, le Bureau des Incendiés.

515 Le devoir se conduire de façon à ne pas causer tort à autrui, voir : n° 1, 50 et 72.

516 Vu que personne n’est jamais à l’abri d’un comportement fautif volontaire ou involontaire, le contrat d’assurance responsabilité civile présente toujours un intérêt juridique et économique. L’extension de l’assurance de responsabilité est la pierre angulaire des systèmes d’indemnisation des sociétés modernes, voir : J. GHESTIN, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, par G. VINEY, 3e éd ., L.G.D.J., 2008, n° 26 et s.

517 L’indemnisation de la victime apparaît légitime puisque cette compensation n’est au bout du compte assumée par la défense mais par son assureur, voir : A. DUMEREY, préf., R. BOUT, La faute de la victime en droit de la responsabilité civile, éd., l’Harmattan, 2011, p. 24.

518 En France, on peut citer : La Loi Spinetta de 1978 organisant l’indemnisation automatique par les assureurs dans le cadre de l’assurance dommages-ouvrage, des désordres de construction relevant de la garantie décennale ; la loi Badinter du 5 juillet 1985 organisant l’indemnisation automatique par les assureurs des victimes d’accidents de la circulation ; la loi de 1982 organisant l’indemnisation des catastrophes naturelles et la loi du 4 mars 2002 organisant l’indemnisation de l’aléa thérapeutique et les accidents médicaux.

519 Articles 47 à 52, l’article 53 mentionne des risques liés aux catastrophes naturelles

520 Articles 54 à 57.

Page 126: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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— Le Titre III relatif aux risques liés aux opérations maritimes, les dommages matériels causés

aux objets par toute fortune de mer 523 ; l’avarie des objets 524 ;

— Et le Titre IV relatif aux accidents atteignant les personnes 525, c’est-à-dire les risques

tenant à la vie de la personne : accidents corporels, invalidité, maladie, décès.

Au vue de ces énumérations, l’appréciation de l’assurabilité à Madagascar des

risques potentiels que sont : l’accident de transports, l’accident maritime, le cas

d’incendie, la responsabilité civile et l’assurance maladie, conduit au présent constat:

— Pour l’assurance des risques liés au transport terrestre, elle est la seule assurance

obligatoire édictée par le Code des assurances malgaches. L’article 60 alinéa premier

du Code dispose : « Toute personne physique ou toute personne morale autre que l’État au sens

du droit interne, dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des

tiers résultant d’atteintes aux personnes ou dommages ou aux biens et causés par un véhicule

terrestre à moteur, ainsi que remorques ou semi-remorques, doit, pour faire circuler lesdits véhicules,

être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité […] ». Pour prouver

l’accomplissement de cette obligation, tout conducteur d’un véhicule doit être en

possession d’une attestation d’assurance (article 74). Les dommages couverts par le

contrat d’assurance des véhicules terrestres à moteur sont les dommages corporels ou

matériels résultant des accidents 526, incendies ou explosions causés par le véhicule

(article 67) ainsi que les préjudices dont font grief les proches de la victime ou les

préjudices par ricochet 527 (article 83). La force majeure ; le fait d’un tiers ; ne peuvent

être opposés à la victime (article 81) voire sa faute 528 (article 82).

521 Article 58.

522 Articles 59 à 102.

523 Article 116.

524 Ibid.

525 Dans l’assurance de personnes, on distingue fréquemment : la Prévoyance (risque décès, indemnité journalières, …). Et l’assurance Santé appelée aussi assurance maladie. Article 162, 163 et 164.

526 Article 96 du Code des assurances : Les préjudices susceptibles d’être indemnisés en réparation des dommages corporels subis lors d’un accident impliquant un véhicule terrestre à moteur sont : en cas de blessures, les frais de traitement matériel exposés à la suite de l’accident ; l’incapacité temporaire ; l’incapacité permanente ( préjudice physiologique, préjudice économique ; assistance d’une tierce personne ; souffrance physique et préjudice esthétique ; préjudice de carrière ; en cas de décès, les frais funéraires ; le préjudice économique des ayants droit ; le préjudice moral des ayants droit ; le cas échéant, les frais de traitement avant le décès de la victime.

527 Souvent, le préjudice est fréquemment moral mais un préjudice matériel peut s’en suivre.

528 Toutefois, l’article 77 prévoit une limitation, soit une exclusion d’indemnisation en cas de faute de la victime.

Page 127: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 126 —

— Pour l’assurance des risques liés à l’activité maritime et aux opérations de navigation fluviale

ou lacustre est prévue au Titre III du Code des assurances (article 103) 529. La garantie

couvre les dommages matériels causés aux objets assurés par toute fortune de mer ou

par un événement de force majeure. Elle couvre aussi l’avarie 530 commune des

objets assurés sauf si celle-ci provient d’un risque exclu par l’assurance. À l’exception

de la faute intentionnelle du capitaine (article 118), l’assureur répond des dommages

survenus par le fait ou la faute du capitaine ou de l’équipage (article 119). L’assureur

ne répond pas des dommages et pertes matériels provenant du vice propre de l’objet

assuré (article 142).

— Pour le risque incendie, il peut être couvert en droit malgache ; sa garantie est

assortie de conditions restrictives. Ainsi d’après l’article 47 du Code des assurances,

l’assureur répond de tous dommages matériels causés par conflagration,

embrasement ou combustion vive mais ne répond pas, sauf convention contraire, des

dommages occasionnés par la seule action de la chaleur ou par le contact direct et

immédiat du feu ou d’une substance incandescente s’il n’y a eu ni incendie, ni

commencement d’incendie susceptible de dégénérer en incendie véritable.

— Pour les risques liés à la dette de responsabilité, ils sont bien pris en compte par le

système assurantiel malgache. L’article 38 du Code des assurances énonce que :

« l’assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l’assuré est civilement

responsable quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes, ou par des choses

qu’il a sous sa garde ». Quelques conditions préalables sont à respecter pour l’effectivité

de la garantie : une réclamation amiable ou judiciaire destinée à l’assuré par le tiers

lésé (article 54) ; la reconnaissance contradictoire de responsabilité 531 (article 56).

Sauf convention contraire, les frais et dépenses résultant de toute poursuite en

responsabilité dirigée contre l’assuré sont à la charge de l’assureur lorsque la garantie

de ce dernier est acquise. Les contrats d’assurance garantissant des risques de

responsabilité civile ne peuvent contenir de clauses interdisant à l’assuré de faire

appel à l’assureur à l’occasion d’un règlement de sinistre. Le manquement de l’assuré

à ses obligations commis postérieurement au sinistre ne peut être invoqué par

529 Les risques maritimes sont à distinguer des risques liés à la navigation de plaisance, lesquels sont

régis par le Titre II (article 43 et 54 s’il relève de la responsabilité civile).

530 Aujourd’hui, le terme « avarie » est utilisé par les marins pour désigner un problème d’origine technique : casse d’une pièce, déchirure d’une voile, etc. Autrefois, le mot désignait à la fois un dommage au navire et le processus de dégradation d’une marchandise contenue par ce navire.

531 La reconnaissance en présence de l’assuré, de l’assureur et du tiers lésé, du sinistre issu du fait de l’assuré.

Page 128: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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l’assureur pour ne pas indemniser les victimes et les ayants droit. Toutefois, il

conserve son droit de recours contre l’assuré défaillant.

— Pour les risques atteignant les personnes dans leur existence, une assurance vie est

prévue par le Code des assurances : article 163. Concrètement, l’assurance vie est la

somme de cotisation versée par l’assuré à un organisme de crédit qui s’engage par la

suite à verser à la fin du contrat en plus du versement d’origine, les intérêts. Deux cas

peuvent se présenter : quand l’assuré est vivant à la fin du contrat, il récupère le

capital ainsi que les intérêts ; s’il décède le capital et les intérêts reviennent aux ayants-

droits.

85. En somme, l’assurabilité des risques potentiels dans le contexte malgache trouve des

réponses assez fournies dans la législation locale. Le Code des assurances a prévu la

possibilité d’assurer les risques maritimes, le risque incendie, les risques atteignant les

personnes dans leur vie. Il a rendu obligatoire l’assurance de responsabilité civile des

propriétaires de véhicules terrestres 532.

Ceci dit à propos des risques liés à la dette de responsabilité, bien que le droit

malgache des assurances les a pris en compte 533 ; force est de constater que par

rapport au droit français 534, le dispositif actuel n’est pas favorable à l’indemnisation

de certains dommages à caractère spécifique 535 tels que l’aléa thérapeutique et les

accidents médicaux en général. L’affirmation mesurée 536 de l’assurance de la dette de

responsabilité en vue de couvrir les dommages spécifiques contribuerait pleinement à

l’amélioration des conditions des victimes sans pour autant léser la commodité

professionnelle. Pour ne pas se limiter aux dispositions de l’article 55 du Code des

assurances relatives à la responsabilité civile et à celles de l’article 38 sur la

responsabilité pour fait d’autrui 537, il est intéressant d’établir la souscription

d’assurance propre à la profession médicale.

532 H. R. ANDRIAMANANTENA, op. cit., p. 206.

533 Article 38 du Code des assurances malgache.

534 En France, avec la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, le droit français s’est doté d’une législation médicale autonome en matière de responsabilité, voir : M. BACACHE, La responsabilité médicale : Principes généraux, n° 472263, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18, p. 5. Cette législation médicale impose la souscription d’assurance responsabilité civile médicale : l’article L. 1142-2 du Code de la santé publique.

535 Pour les autres dommages à caractère spécifique, voire : n° 83.

536 Prenant en compte les contextes socio-économiques du terrain.

537 Particulièrement invocable pour l’exercice médical en groupe.

Page 129: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 128 —

§ 2. L’ASSURANCE RESPONSABILITÉ CIVILE PROFESSIONNELLE

86. Le Code des assurances malgache, offre deux alternatives de contrat

d’assurance professionnelle pour le médecin exerçant à titre libéral : le contrat

souscrit par une personne physique, soit le contrat d’assurance individuelle (A) et le

contrat souscrit par une personne morale, soit le contrat d’assurance de groupe (B).

A. Le contrat d’assurance individuelle dans un cadre d’exercice libéral

87. Le médecin exerçant son activité à titre personnel de façon indépendante est un

professionnel libéral. Il peut être confronté à des risques d’échecs thérapeutiques

dans le cadre de son activité. Dès lors, il convient de souscrire une assurance

profession libérale dénommée en raison de l’activité exercée, assurance

professionnelle médicale 538 ou encore, assurance de responsabilité civile médicale.

En vertu du contrat d’assurance professionnelle médicale, l’assureur s’engage à

prendre en charge l’ensemble des dettes de responsabilité professionnelle du

médecin. L’article 5 du Code des assurances malgache définit cette théorie en

disposant : « Le contrat d’assurance est une convention par laquelle une partie, l’assuré, se fait

promettre moyennant une rémunération (la cotisation ou prime), pour lui ou pour un tiers, en cas de

réalisation d’un risque, une prestation par une autre partie, l’assureur, qui, prenant en charge un

ensemble de risques, les compense conformément aux lois de la statistique ». Et, à l’article 24 de

préciser : « Les pertes occasionnées par des cas fortuits ou causés par la faute de l’assuré sont à la

charge de l’assureur […] ».

Le bénéfice de la garantie offerte par l’assurance responsabilité civile médicale, est

assorti de quelques conditions prévues aux articles 17 et 54 du Code des assurrances :

— Le versement d’une rémunération périodique (cotisation ou prime) par

l’assuré à l’assureur 539. Pour les cas de renouvellement, à l’exception des contrats renouvelés par tacite reconduction, la garantie de l’assureur, sauf clause contraire, ne prend effet qu’après le paiement de la première cotisation ou la fraction de cotisation due par l’assuré. Si une cotisation ou une fraction de cotisation, n’est pas payée dans les échéances légales, la

538 Sont concernés par l’assurance professionnelle médicale, les médecins quelle que soit leurs

spécialités : chirurgiens ; dentistes ; sages-femmes ; pharmaciens et biologistes ; infirmiers ; anesthésistes-réanimateurs ; cardiologues ; gynécologues-obstétriciens ; radiologues, etc.

539 Article 17 du Code malgache des assurances.

Page 130: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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garantie peut être suspendue 540 par l’assureur trente jours après la mise en demeure de l’assuré.

— L’émission d’une réclamation amiable ou judiciaire par un tiers lésé à

l’adresse de l’assuré 541. Ainsi, le patient doit avoir préalablement émis une réclamation à l’adresse du médecin dont il engage la responsabilité. À réception de la correspondance, l’assuré a l’obligation en vertu de l’article 18 du Code des assurances, de déclarer le sinistre.

Parallèlement à l’assurance professionnelle médicale, une clause de protection

juridique professionnelle peut être envisagée afin de couvrir les frais de procédures

contentieuses que devrait assumer l’assuré 542. La protection juridique permet de

prévenir et de faciliter le règlement des conflits ; que ce soit amiable ou judiciaire.

Afin de se prémunir des risques d’accidents médicaux durant son activité, le

médecin exerçant à titre personnel a ainsi la possibilité de souscrire une assurance

professionnelle médicale individuelle. L’exercice de la médecine libérale peut aussi se

faire par groupe. À ce moment, l’assurance à souscrire pour répondre aux risques

éventuels est une assurance de groupe.

B. Le contrat d’assurance de groupe dans un cadre d’exercice libéral

88. Pour les médecins, l’exercice en groupe permet la mise en commun des moyens,

la diminution du coût de fonctionnement individuel et accorde une souplesse en

matière de condition de travail et de disponibilité 543. Alors, afin de couvrir les risques

d’échecs thérapeutiques, d’atteinte à l’intégrité physique sur la personne du malade

qu’un médecin membre du groupe pourrait rencontrer, un contrat d’assurance de

groupe tel qu’il est défini à l’article 186 du Code des assurances malgache et à l’article

L. 141-1 du Code des assurances français, est à souscrire. Le contrat d’assurance de

groupe varie en fonction du statut juridique que peuvent revêtir les groupements. Il

convient d’observer les structures de groupement dans le cadre de l’exercice de

540 Le sinistre est constitué par réalisation de l’évènement prévu par la police d’assurance et

entraînant la mise en jeu de la garantie.

541 Article 54 du Code des assurances.

542 De sorte que les honoraires des avocats, experts, huissiers et autres frais impliqués pour la défense, seront pris en charge. Outre la prise en charge de la défense, l’assurance en tant que personne morale, peut représenter son assuré lors d’une procédure amiable ou judiciaire.

543 S. AUDRIC, L’exercice en groupe des médecins libéraux, DREES Études et Résultats, n° 314 juin 2004, p. 1.

Page 131: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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l’activité médicale (1) afin d’établir le contrat d’assurance professionnel

correspondant (2).

1. Les structures juridiques de l’exercice de la médecine libérale en groupe

89. Théoriquement, il y a pour les médecins la possibilité de former une indivision.

Dans cette situation, aucune société n’est créée, seul un accord lie les médecins. Les

honoraires ne sont pas partagés. Les parties prenantes sont appelées indivisaires et

leurs relations sont régies par les dispositions du Code civil relatives à l’indivision 544.

Ensuite, les médecins peuvent créer une société civile de moyens (SCM). La SCM

permet la mise en commun des moyens d’exploitation ainsi que le partage des

dépenses de fonctionnement. Par opposition aux sociétés dites d’exercice, la société

civile de moyens ne peut à titre personnelle exercer une activité médicale. Le fait

pour les associés de mettre en commun certains moyens d’exploitation de leur

activité n’enlève en rien de leur indépendance professionnelle et donc leur

responsabilité respective. Autrement dit, la création d’une société civile de moyens ne

remet pas en cause la situation juridique de ses membres : personnes physiques

exerçant l’activité médicale et devant assumer les responsabilités afférentes. Les

associés restent indéfiniment et conjointement responsables 545. Si théoriquement, la

SCM ne peut exercer à titre personnelle une activité médicale, en qualité de personne

morale distincte des associés, elle peut réaliser des investissements.

Les médecins ont aussi l’option de la Société civile professionnelle (SCP). La SCP est

une société civile créée par deux médecins au minimum. La SCP est dotée de la

personnalité morale autonome et distincte des associés. Elle exerce la profession par

l’intermédiaire des médecins membres. Elle est propriétaire de la clientèle 546 ; elle

544 L’indivision est un mécanisme juridique mettant en jeu le démembrement de la propriété. Un

bien est dit indivis lorsqu’il appartient à un ensemble de personnes, sans que l’on puisse le répartir en lots entre elles, ni qu’elles puissent en vendre leurs parts sans l’accord des autres. En somme, l’indivision est le concours de plusieurs droits de même nature sur un même bien sans qu’il y ait division matérielle des parts.

545 Le principe de la responsabilité indéfinie et conjointe se déploie de la sorte : les associés ne sont responsables qu’en dernier recours. Ils peuvent invoquer le bénéfice de discussion et de division. Le bénéfice de discussion oblige le créancier à s’adresser d’abord à la société ; autrement dit réclamer la créance sur le patrimoine de la société. Si au final, il n’obtient pas satisfaction (saisie infructueuse, procédure de liquidation clôturée pour insuffisance d’actif…), il peut s’adresser aux associés séparément au prorata de leur part social. Le bénéfice de division se traduit par cette faculté de l’associé à limiter sa responsabilité à la valeur de sa part sociale.

546 Les associés ne sont pas propriétaires de la clientèle mais des parts de la SCP.

Page 132: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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facture les actes et encaisse les honoraires qui seront partagés aux associés sous

forme de rémunération. Quant à la responsabilité financière des associés de SCP,

depuis la loi du 28 mars 2011, ils derniers sont indéfiniment et conjointement

responsables des dettes sociales ; c’est-à-dire que les créanciers de la société ne

peuvent agir en paiement à leur encontre qu’après avoir mis en demeure la société.

Les médecins ont aussi la possibilité de créer une société d’exercice libéral (SEL).

Introduite par la loi du 31 décembre 1990, la SEL permet aux membres des

professions libérales d’exercer leur activité sous forme de sociétés de capitaux. En

tant que société d’exercice, la SEL exerce la profession médicale par l’intermédiaire

des médecins associés. Elle est propriétaire de la clientèle et de tous les actifs

nécessaires à l’activité. Les actes sont facturés par la société qui perçoit les

recettes 547. Les associés sont responsables des dettes de la société au prorata du

capital détenu.

Enfin, un contrat de collaboration peut être prévu entre deux médecins. Dans le

contrat de collaboration, un des médecins s’engage à fournir à son confrère les

locaux et le matériel nécessaires à l’exercice de la médecine. En contrepartie, ce

dernier verse au premier une redevance représentant un pourcentage de ses

honoraires. Les deux médecins conservent respectivement leur part de responsabilité

professionnelle pour laquelle chacun doit s’assurer personnellement auprès d’une

compagnie d’assurance notoirement solvable.

2. Le régime assurantiel compatible à chaque structure

90. Concernant la première structure juridique qu’est l’ indivision, en vertu de l’article

815-10 du Code civil français, tous les indivisaires sont tenus aux charges communes

de l’indivision proportionnellement à leur part. Et la doctrine 548 de soutenir que

l’assurance d’un bien indivis est souscrite au nom des indivisaires ; c’est uniquement

en cas d’insuffisance d’assurance que le patrimoine personnel de tous les indivisaires

reste exposé. Si donc, l’on admet qu’une dette de responsabilité civile médicale dans

un cadre d’exercice de groupe, constitue une charge d’indivision, les primes

d’assurance de groupe, c’est–à–dire les versements proportionnels aux parts,

viendront à honorer la dette.

547 Les honoraires sont partagés aux associés sous forme de rémunération.

548 Http://www.patrimoine.com.

Page 133: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 132 —

Concernant la deuxième structure, la Société civile de moyens ou la SCM, étant une

personne morale distincte des associés, la SCM dispose de droits et d’obligations,

notamment celui de conclure en son nom, tout contrat relatif aux moyens humains et

matériels nécessaires à l’activité de ses membres : bail, opérateur téléphonique, eau et

électricité, […] et police d’assurance. La souscription d’assurance présente pour SCM

un intérêt dans la mesure où, c’est à la société que doivent s’adresser en priorité les

créanciers ; les associés restant indéfiniment et conjointement responsables 549.

La troisième structure juridique qu’est la Société civile professionnelle ou la SCP est

également dotée de la personnalité morale, autonome et distincte des associés.

Depuis la loi du 28 mars 2011, les associés sont indéfiniment et conjointement

responsables des dettes sociales ; les créanciers de la société ne peuvent agir en

paiement à leur encontre qu’après avoir mis en demeure la société. Par conséquent en

terme d’assurance, le régime de la souscription est du même ordre que pour la SCM

depuis 2011 : intérêt de souscrire une assurance de groupe dans la mesure où la

société est prioritairement responsable et intérêt pour les sociétaires de souscrire des

assurances personnelles.

Ensuite, pour la quatrième structure juridique qu’est la Société d’exercice libéral ou

la SEL, les associés sont personnellement et civilement responsables de la dette

sociale, d’une manière indéfinie et solidaire. Le SEL est le premier responsable ; en

cas d’insuffisance d’assurance, la dette de responsabilité est à la charge des associés

lesquels sont solidairement responsables. Il en résulte, une nécessité de souscrire une

assurance de groupe. Les associés ont fortement intérêt à souscrire individuellement

une assurance responsabilité civile dans la mesure où chacun d’entre eux est

susceptible d’honorer la dette en sa globalité avec le bénéfice ultérieur de l’action

récursoire.

Enfin, pour le contrat de collaboration entre deux médecins, il est établit que le

modèle 550 rejoint le « contrat de collaboration salarié » 551. Dès lors, le principe

549 Le principe de la responsabilité indéfinie et conjointe se déploie de la sorte : les associés ne sont

responsables qu’en dernier recours. Ils peuvent invoquer le bénéfice de discussion et de division. Voire : n° 89.

550 Un des médecins s’engage à fournir à son confrère les locaux et le matériel nécessaires à l’exercice de la médecine. En contrepartie, ce dernier verse au premier une redevance représentant un pourcentage de ses honoraires.

551 À quelques différences près, dans le contrat de collaboration salarié, il y a un lien de subordination entre le médecin qui met à disposition les lieux (l’employeur) et le médecin qui « soigne » la clientèle (le salarié) ; par ailleurs, le médecin qui met à disposition les lieux (employeur) verse un salaire au médecin salarié ; ce qui n’est pas le cas dans le contrat de

…/…

Page 134: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 133 —

assurantiel relatif au contrat de collaboration salarié est opportun. Concrètement, le

médecin qui met à disposition les locaux ( le bailleur ) est tenu de souscrire une

assurance destinée à garantir la responsabilité civile en raison des dommages subis

par des tiers dans le cadre de l’activité du médecin « exploitant » 552. Ce dernier

devant lui-même prévoir une responsabilité civile personnelle pour couvrir les

dommages issus de ses fautes détachables du service 553. La souscription faite par le

médecin « bailleur », découle du principe de la responsabilité pour fait d’autrui 554.

C’est le cas où l’entité « collaboration » répond de la faute du médecin exploitant.

Pour une meilleure vision du régime assurantiel compatible à chaque structure

juridique un tableau récapitulatif est établi.

— Propositions d’assurance de groupe en fonction des structures juridiques —

Principes généraux de la responsabilité civile professionnelle dans l’exercice en groupe

— Responsabilité indéfinie des associés quel que soit la structure juridique : Droit des créanciers n’ayant pas obtenu de réponse positive de la part du débiteur principal : la Société, à s’adresser aux associés pour réclamer leurs dus.

— Variation de la portée de la responsabilité des associés : Elle est solidaire quand les créanciers ont le droit de choisir quelconque débiteur parmi l’ensemble, afin d’honorer sa créance. Le débiteur peut ensuite exercer l’action récursoire. Elle est conjointe quand la responsabilité des débiteurs est limité aux parts sociales détenues dans la Société.

collaboration (tout court) où le médecin qui met à disposition les lieux (en quelque sorte le bailleur) perçoit une redevance de la part de celui qui « soigne » la clientèle (en quelque sorte l’exploitant).Pour rappel ; le salariat d’un médecin par un autre médecin est cité à l’article 95 du Code de déontologie médicale.

552 Exploitant les lieux.

553 Principe hérité du droit administratif où la responsabilité administrative d’un établissement public de santé correspond à la responsabilité liée à l’activité des services publics. Dans le cadre de ses missions de service public, l’hôpital répond des fautes de ses agents et voit sa responsabilité directement engagée en cas de « faute de service ». Ainsi, en cas de faute personnelle détachable du service, c’est la responsabilité civile de l’agent qui va directement être engagée devant le juge civil.

554 Article 1384 du Code civil français correspondant à l’article 206 de la LTGO malgache.

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— 134 —

Structures juridiques

Société civile de moyens SCM

Personne morale autonome et distincte des associés, la SCM dispose de droits et d’obligations, notamment celui de conclure en son nom, tout contrat relatif aux moyens humains et matériels nécessaires à l’activité de ses membres : bail, contrat de travail, contrat avec les fournisseurs et police d’assurance.

Société civile professionnelle

SCP

Personne morale autonome et distincte des associés.

Société d’exercice libérale

SEL

Société de capitaux détenus par des professionnels libéraux.

L’indivision

Un accord entre deux ou plusieurs médecins constituant l’indivision.

Le contrat de collaboration

Un contrat dans lequel, un médecin

s’engage à fournir à son confrère le matériel

nécessaire pour l’exercice de la médecine et en contrepartie ce dernier lui

verse une redevance.

Responsabilité des associés

Indéfinie et conjointe

Indéfinie et conjointe

Indéfinie et solidaire

Indéfinie et conjointe

Concomitante

Page 136: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 135 —

Régime assurantiel

Intérêt de souscrire une assurance de groupe au nom de la Société prioritairement responsable.

Intérêt pour les associés indéfiniment et conjointement, responsables de souscrire des assurances personnalisées.

Depuis la loi du 28 mars 2011, le principe de la responsabilité solidaire des associés d’une SCP est abandonné. Par conséquent, il y a intérêt de souscrire une assurance de groupe.

Le principe de la responsabilité indéfinie justifie la souscription d’assurance responsabilité civile personnelle pour chaque associé.

Intérêt de souscrire une assurance de groupe au nom de la SEL prioritairement responsable.

Intérêt pour les associés indéfiniment et solidairement responsable de souscrire des assurances personnalisées (le bénéfice ultérieur de l’action récursoire étant maintenu).

Le bien indivis est assuré par les indivisaires par une assurance de groupe.

Intérêt d’une assurance pour chaque indivisaire en cas de défaillance de l’assurance de groupe.

Souscription d’une d’assurance par le médecin

bailleur pour la couverture des risques du fait

du médecin exploitant. Et souscription d’une assurance responsabilité civile personnelle par le médecin exploitant afin de couvrir les dommages issus d’une faute détachable de la profession.

Actuellement, le Code malgache des assurances offre des références juridiques

permettant de régir la responsabilité civile professionnelle des médecins :

— L’article 5 à 24 définissant le mécanisme de l’assurance

— Les articles 54 à 57 relatifs aux assurances de responsabilité ;

— L’article 55 relatif à la responsabilité civile,

— L’article 38 relatif à la responsabilité d’un assuré pour fait d’autrui ;

— L’article 186 relatif à l’assurance de groupe.

Considérant cependant l’importance de l’assurance dans le cadre professionnel, et

en particulier, dans le cadre de l’exercice de l’activité médicale, soit la prise en compte

des conditions des victimes et la quiétude des praticiens, la question se pose de savoir

si ces références nécessitent, en outre, le principe d’une souscription obligatoire

d’assurance responsabilité civile professionnelle.

Page 137: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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SECTION II. L’OPPORTUNITÉ DE L’OBLIGATION D’ASSURANCE RESPONSABILITÉ

MÉDICALE À MADAGASCAR

91. Historiquement, le mécanisme assurantiel était absent à Madagascar 555. Pendant la

période coloniale, on appliquait le droit français et après l’indépendance, la loi

française du 13 juillet 1913 restait en vigueur. D’autres textes ont été ensuite

rapidement adoptés:

— La loi n° 66-007 juillet 1966 sur l’assurance maritime ;

— L’Ordonnance n° 60-162 du 3 octobre 1960 et de son Décret d’application

n° 63-031 du 16 janvier 1963 instituant une obligation d’assurance en matière de

circulation des véhicules terrestres à moteur ;

— L’Ordonnance n° 62-034 du 19 septembre 1962 et les Décrets n° 62-668 et 63-

526 du 27 décembre 1962 et du 5 septembre 1963 concernant l’octroi de l’agrément,

les provisions techniques, le contrôle de l’État et les intermédiaires d’Assurance.

Aujourd’hui, Madagascar dispose d’un Code des Assurances établi par la loi n° 99-

013 du 2 août 1999. Le Code de 1999 comporte cinq livres traitant les opérations

d’assurance ; les entreprises d’assurance ; le contrôle de l’État et le cadre

institutionnel ; les règles communes aux intermédiaires d’assurance et les sanctions

jointes des dispositions diverses et finales.

Il est inutile de souligner l’importance du Code des assurances malgaches. Les

règles qu’il stipule reflètent une volonté d’affronter sereinement les aléas affectant la

vie quotidienne. En traitant des risques liés à la dette de responsabilité civile 556 et des

accidents atteignant les personnes 557, le Code des assurances malgaches est en

mesure de répondre à la nécessité d’indemnisation des accidents médicaux. C’est un

555 H. R. ANDRIAMANANTENA, L’Assurance à Madagascar, in Mélanges en l’honneur du Professeur

A. RAHARINARIVONIRINA, éd., Jurid’ika et l’Harmattan, 2010, p. 203. Ainsi, historiquement, la logique d’assurance et de prévoyance était absente dans la culture malgache. Ce point est à prendre en compte dans la perspective législative de responsabilité médicale impliquant une proposition de loi relative à la souscription d’assurance. Il serait inadmissible en effet, d’imposer un système à priori, incohérent à la culture sociale sans que l’on puisse débattre des intérêts et des modalités

556 Article 55 du Code des assurances, inclus dans le Livre I, Titre II.

557 Dans l’assurance de personnes, on distingue fréquemment : la Prévoyance (risque décès, indemnité journalières, …Et l’assurance Santé appelée aussi assurance maladie, (voir : A. Les risques assurables, notes de bas de page 513 et 532).

Page 138: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 137 —

outil efficace pour alléger le poids des préjudices, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faille

sur certains points, actualiser. Considérant, en effet, l’importance de ce qui est en jeu

suite aux accidents médicaux : la vie humaine, l’effectivité du principe de la

responsabilité civile du praticien doit s’accompagner de l’obligation de souscrire une

assurance 558. L’existence d’une assurance responsabilité civile professionnelle est

avantageuse tant pour l’assuré qu’est le professionnel de santé 559 que pour la victime.

Par conséquent, la proposition d’une obligation d’assurance responsabilité civile

médicale présente est opportun (§ 1). Pour autant, il ne faut pas endosser la charge de

tous les risques médicaux aux praticiens. S’il est légitime d’établir une politique

d’assurance obligatoire afin de garantir la solvabilité des praticiens lors des accidents

médicaux, leur imposer la charge des préjudices non liés à une faute médicale, n’est

pas juste 560. L’assurance du risque médical doit être organisée équitablement entre

les parties en cause : le médecin et le patient. Autrement dit, « L’assurance du risque doit

comprendre une assurance du patient pour la part du risque auquel il s’expose 561 et une assurance

de responsabilité du médecin, correspondant à sa propre part de risque » 562. Ainsi, parle-t-on de

la double imputation du risque d’accident médical 563 impliquant à son tour, la double

assurance responsabilité civile médicale 564 (§ 2)

§ 1. LE PRINCIPE DE L’ASSURANCE RESPONSABILITÉ CIVILE MÉDICALE

OBLIGATOIRE

92. À Madagascar, les compagnies d’assurances proposent des offres couvrant les

activités professionnelles. Par exemple, la compagnie d’assurance ARO 565, propose

un panel d’offres aux professionnels par rapport à leur activité. Parmi ces offres, il y a

558 En droit français, ce dispositif est acquis, « La mise en œuvre du principe de responsabilité s’accompagne

de l’obligation faite à tout professionnel de santé exerçant à titre libéral, […] de souscrire une assurance visant à garantir sa responsabilité susceptible d’être engagée en raison de dommages subis par des tiers et résultant d’atteintes à la personnes, survenant dans le cadre de cette activité », article L. 1142-2 du Code de la santé publique et cité par A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, op. cit., p. 453.

559 Quiétude dans l’exercice professionnelle.

560 Et non cohérente au principe de l’obligation de moyens attachée au contrat médical.

561 La version originale étant : « […], pour la part du risque qu’il représente […] ».

562 F. EWALD et H. MARGEAT, Le risque thérapeutique, Risques, n° 6, 1991, p. 9-34.

563 Voir dans ce sens D. KESSLER, L’économie de la responsabilité, Risques, supplément au n° 10, Actes du colloque Responsabilité et indemnisation du 16 avril 1992, p. 40.

564 Ph. MARTINI, préf. G. LOISEAU, La responsabilité du chirurgien, Th. de Droit soutenu à l’Université Aix-Marseille III, le 9 janvier. 1998, p. 302 et s.

565 ARO, Compagnie d’Assurances et de Réassurances Omnibranches, BP : 42 Antsahavola, 101, Tananarive.

Page 139: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 138 —

l’assurance de responsabilité civile des entreprises au sein duquel figure la

responsabilité civile professionnelle. La rubrique concernée mentionne que : « Pour les

personnes exerçant une profession libérale, souscrivez l’assurance de responsabilité civile

professionnelle pour préserver votre tranquillité vis-à-vis des tiers quels que soient votre métier et votre

activité : entreprise de construction, usine de transformation, commerçant détaillant ou grossiste,

hôtelier, pharmacien ou médecin,… » 566. Ces dispositions aussi pertinentes qu’elles soient,

n’ont aucune valeur exécutoire. Elles relèvent d’une offre commerciale proposée par

l’entreprise. En tant que tel, pour les potentiels clients, elles représentent une dépense

dont on ne s’engage qu’avec mesure. Tant que l’obligation d’assurance responsabilité

civile médicale, n’est pas inscrite clairement dans le Code des assurances à l’instar de

l’assurance des véhicules terrestres à moteur 567, l’indemnisation des victimes reste

fragilisée. La rédaction de l’obligation d’assurance responsabilité civile, qui s’opère au

sein même du Code des assurances ; implique une refonte structurelle de ce corpus

juridique (A). Et que ladite refonte s’inscrive dans la même démarche que l’actuel

Code d’assurance : inspiration au droit comparé 568 avec considération des

spécificités locales (B).

A. La refonte structurelle du Code des assurances malgache

93. Actuellement, le Livre I du Code intitulé « Les opérations d’assurance » comporte

cinq titres : Titre I : Le contrat d’assurance : règles communes à toutes les

assurances ; Titre II : Règles relatives aux assurances de dommages non maritimes ;

Titre III : Les assurances maritimes ; Titre IV : Règles relatives aux assurances de

personnes et aux contrats de capitalisation ; Titre V : Les assurances de groupe.

La proposition serait de modifier les intitulés des Titres II et III. Le Titre II

portera comme libellé : « Les assurances non obligatoires » et Titre III « Les

assurances obligatoires ». Le plan qui suit sera donc retenu :

566 www.aro.mg/ass_accident.html.

567 L’article 60 ali. 1 du Code des assurance dispose que : « Toute personne physique ou toute personne morale autre que l’État au sens du droit interne, dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers résultant d’atteintes aux personnes ou dommages ou aux biens et causés par un véhicule terrestre à moteur, ainsi que remorques ou semi-remorques, doit, pour faire circuler lesdits véhicules, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité […] ».

568 « On peut dire que le Code de 1999 a été calqué sur la loi française du 13 juillet 1930 et sur d’autres lois qui composent le Code des assurances français actuel car on y trouve les mêmes principes », H. R. ANDRIAMANANTENA, L’Assurance à Madagascar, in Mélanges en l’honneur du Professeur A. RAHARINARIVONIRINA, éd., Jurid’ika et l’Harmattan, 2010, p. 204.

Page 140: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 139 —

Titre I : Le contrat d’assurance : règles communes à toutes les assurances ;

Titre II : Les assurances non obligatoires ;

Titre III : Les assurances obligatoires,

Titre IV : Règles relatives aux assurances de personnes et aux contrats de capitalisation ;

Titre V : Les assurances de groupe.

Le Titre II relatif aux assurances non obligatoires traitera des assurances incendie,

des assurances de risques agricoles. Et le Titre III relatif aux assurances obligatoires,

sera consacré à l’assurance responsabilité civile en général ; l’assurance des véhicules

terrestres à moteur 569 ; les assurances maritimes, notamment, l’assurance de

responsabilité civile des propriétaires des navires, puisqu’elle est déjà mentionnée

comme obligatoire dans le Code maritime de 1999 établi par la loi n° 99-028 du

3 février 2000 570. Et enfin, il conviendrait d’introduire dans ce Titre III les mentions

relatives à la souscription d’assurance responsabilité civile médicale dans la mesure

rappelons-le, elle constitue une garantie de solvabilité du débiteur.

B. Les clauses définissant l’obligation d’assurance responsabilité civile médicale

94. Le plan récapitulatif du Titre III intitulé : Les assurances obligatoires 571 serait572 le

suivant :

Titre III : Les assurances obligatoires

Chapitre I : L’assurance responsabilité civile pour répondre à tout fait

préjudiciable d’un assuré.

Chapitre II : L’assurance responsabilité civile des propriétaires de véhicules terrestres à moteur dont les dispositions sont celles inscrites au présent Code actuel.

Chapitre III : Les assurances maritimes dont les dispositions sont outre celles qui sont établies dans le Code des assurances, celles relatives à la responsabilité civile des propriétés de navire et celles relatives au corps des navires.

569 L’unique assurance obligatoire prévue par le Code des assurances jusque-là (article 60 du Code).

570 Trois articles du Code maritime édictent des assurances obligatoires qui sont en réalité des assurances responsabilité civile : article 4.1.03, article 4.1.04 et article 4.1.05 ; pour aller plus loin, voir : H. R. ANDRIAMANANTENA, op. cit., p. 206, 207. Éventuellement, inscrire comme obligatoire, l’assurance corps des navires. Actuellement, un circulaire en date du 26 juillet 2001 le prévoit comme obligatoire ; seulement force est de constater que ledit circulaire ne fait référence à aucune arrêté prévoyant l’assurance corps des navires obligatoires, Ibid., p. 208.

571 Voir : supra, n° 93.

572 On opte pour le conditionnel dans la mesure où il s’agit d’une proposition.

Page 141: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 140 —

Chapitre IV : L’assurance de la responsabilité civile médicale :

Les professionnels de santé exerçant à titre libéral dans le cadre d’exercice individuel ou en groupe, sont tenus de souscrire une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civile professionnelle susceptible d’être engagée en raison de dommages subis par des tiers et résultant d’atteintes à la personne, survenant dans le cadre de l’activité médicale.

Les contrats d’assurance souscrits en application du premier alinéa peuvent prévoir des plafonds de garantie.

Lorsque l’exercice de la médecine à titre libéral, se réalise dans une configuration de groupe, la garantie apportée par les personnes morales exerçant l’activité médicale en faveur des associés, couvre uniquement les responsabilités liées à une faute médicale. Les associés répondent personnellement des fautes détachées de l’activité médicale. Les associés sont indéfiniment responsables. Ils peuvent à cet effet souscrire une assurance responsabilité civile médicale personnelle.

En cas de manquement à l’obligation d’assurance prévue au présent article, l’instance disciplinaire et judiciaire compétente peuvent prononcer des sanctions disciplinaires ou judiciaires.

Ainsi, l’obligation d’assurance responsabilité civile médicale se concrétise par son

inscription au sein même du Code des assurances. À cet effet, le Code est amenée à

un remaniement structurel fondamental. Bien qu’une telle réforme soit largement

faisable, une question demeure : Est-il juste de faire peser le risque médical uniquement sur les

épaules des médecins ? Objectivement, s’il est légitime d’établir une politique d’assurance

obligatoire pour la solvabilité des praticiens en cas d’accidents médicaux et par là

veiller à l’amélioration des conditions des victimes, leur imposer la charge des

préjudices ne trouvant pas sa source dans la faute médicale, n’est pas juste.

L’assurance du risque médical doit être organisée équitablement entre les parties en

cause : le médecin et le patient . Autrement dit, il est légitime que « L’assurance

du risque puisse comprendre une assurance du patient pour la part du risque auquel il s’expose et

une assurance de responsabilité du médecin, correspondant à sa propre part de risque » 573. De-là

émerge le principe de la double assurance responsabilité civile médicale 574 (§ 2).

573 Voir : n° 91.

574 Ph. MARTINI, préf. G. LOISEAU, La responsabilité du chirurgien, Th. de Droit soutenu à l’Université Aix-Marseille III, le 9 janvier. 1998, p. 302 et s.

Page 142: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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§ 2. LE PRINCIPE DE LA DOUBLE ASSURANCE RESPONSABILITÉ CIVILE

MÉDICALE

95. En abordant dans la rubrique relative aux assurances de groupe 575, nous avons vu

le lien entre la théorie de la responsabilité indéfinie des associés et l’hypothèse du

« trou d’assurance » du débiteur principal. La défaillance assurantielle du débiteur

principal appelle à la responsabilité d’un autre débiteur lié au contrat. Ce mécanisme

de prévoyance justifie la thèse de la double assurance responsabilité civile. Et la

doctrine met en garde quand elle dit : « Pour une entreprise comme un particulier se découvrir

responsable et non assuré est toujours une catastrophe » 576. À côté de la prévoyance, la notion

d’équité, justifie la double assurance. Dans un premier temps, il nous faut

approfondir la portée des justifications de la double assurance (A). Considérant leurs

intérêts, il serait opportun de rendre le principe obligatoire (B).

A. La justification du principe de la double assurance

96. La responsabilité médicale étant une responsabilité pour faute, le patient a intérêt

à souscrire une assurance lui permettant de couvrir les dommages corporels non

imputables à une faute médicale. Il s’agit alors d’une assurance personnelle contre les

accidents médicaux. Bien que ce type d’assurance ne soit pas mentionné dans le Code

des assurances malgache, le principe même de prévoyance face aux risques atteignant

les personnes dans leur existence, y est mentionné. L’article 164 relatif à l’assurance

vie dispose que : « La vie d’une personne peut être assurée par elle-même ou par un tiers […] ».

Ceci dit, il faut être vigilant quant à la nuance de ces deux types d’assurance :

l’assurance responsabilité civile médicale souscrite par le patient n’a pas un caractère

de rente comme c’est le cas en matière d’assurance vie 577. Ainsi, les primes versés par

les potentiels patients (tout le monde) ne s’inscrit pas dans le sens de capitalisation

donnant droit aux bénéfices techniques et financiers de l’entreprise d’assurance mais

purement indemnitaire 578.

575 Note 88 et s.

576 Y. LAMBERT-FAIVRE, Risques et assurances des entreprises, 3e éd., Précis Dalloz, 1991, n° 755, p. 476.

577 « Les entreprises d’assurance vie ou de capitalisation doivent faire participer les assurés aux bénéfices techniques et financiers qu’elles réalisent, dans les conditions fixées par décret », article 185 du Code des assurances malgaches et que « Le capital ou rente stipulé payable lors du décès de l’assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l’assuré […] », articles 176 du même Code.

578 La prestation de l’assureur peut dès lors être calculée selon le principe indemnitaire applicable à l’évaluation des préjudices nés d’un dommage corporel, voir : Y. LAMBERT-FAIVRE, Dommage corporel : De l’hétérogénéité ses systèmes de réparation à l’unicité d’une méthodologie d’indemnisation, Mélanges R. O. Dalcq, Responsabilité et assurances, Bruxelles, éd., Larcier, 1994, p. 349-363 et 360-361.

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— 142 —

En permettant la compensation des accidents médicaux non imputables au

médecin, la double assurance établit la répartition équitable de la réparation du

préjudice. Certains auteurs n’hésitent pas à aller plus loin pour justifier le principe de

la double assurance. Pour eux, « l’aléa médical relève finalement de la responsabilité du malade,

qui a couru un risque et qui a finalement perdu […]. De ce point de vue, la couverture de l’aléa

thérapeutique relève d’une prise en charge par le malade lui-même, d’une garantie personnelle, d’un

acte de prévoyance lié à la conscience du risque couru à se faire soigner » 579.

Sans valider certaines positions doctrinales 580, il faut convenir de la nécessité

d’une double imputation du risque d’accident médical 581. Adopter la double

imputation permet de mutualiser 582 entre victimes potentiels, le risque d’accident

auquel, elles font face à chaque intervention thérapeutique. Considérant les intérêts

de la double assurance responsabilité médicale, le principe pourra être rendu

obligatoire.

B. Le caractère obligatoire de la double assurance

97. De manière corrélative à l’obligation faite aux professionnels de souscrire une

assurance responsabilité civile professionnelle, il est suggéré aux patients le devoir de

souscrire une assurance. À cet effet, la formulation suivante est avancée :

Tous les patients ayant émis un consentement exprès pour suivre un traitement thérapeutique, doivent prévoir une assurance couvrant les accidents corporels.

À lire la formule, il s’agit de l’« avance sur recours » 583 à caractère indemnitaire. Plus

précisément, çà consiste pour le patient à verser une cotisation d’assurance à vocation

indemnitaire avant de subir une intervention médicale.

Défini comme tel, le devoir d’assurance dommages corporels est une réponse

adéquate à un système de réparation sereine. Il doit cependant prendre en compte les

579 F. EWALD, Philosophie de l’indemnisation de l’aléa thérapeutique, in L’indemnisation de l’aléa thérapeutique,

sous la coordination de D. TRUCHET, Paris, Sirey, Coll. D.S.S., 1995, p. 38 . 39.

580 Il est inadmissible d’avancer que le malade a consciemment pris le risque de l’aléa thérapeutique.

581 Voir : D. KESSLER, L’économie de la responsabilité, Risques, supplément au n° 10, Actes du colloque Responsabilité et indemnisation du 16 avril 1992, p. 40.

582 Et corrélativement diminution des cotisations individuelles, voir : Ph. MARTINI, préf. G. LOISEAU, La responsabilité du chirurgien, Th. de Droit soutenu à l’Université Aix-Marseille III, le 9 janvier. 1998, p. 302.

583 Le principe d’avance sur recours signifie que préalablement à un acte médical, le patient verse une cotisation d’assurance qui a vocation indemnitaire en cas de dommages corporels suite à l’acte médical.

Page 144: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 143 —

paramètres sociaux, culturels et économiques de l’espace géographique où il s’insère.

Nous étudierons ce point ultérieurement 584. Pour le moment, il convient de

comprendre, les conditions d’intervention de l’assureur. La règle est que cette

intervention reste sous réserve de la réalité du lien de causalité. Or la causalité est une

notion difficile à appréhender. Les contentieux en droit médical malgache en a

éprouvé la réalité.

584 Partie II.

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— 144 —

CHAPITRE II.

LA DIFFICULTÉ DE LA RÉALITÉ DU LIEN DE CAUSALITÉ

Page 146: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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98. Bien que le système assurantiel garantit l’automatisme de l’indemnisation, le

principe selon lequel, « pas de condamnation possible sans démonstration de lien de causalité

certain entre le comportement dommageable et le préjudice constaté » 585, fait que l’assureur

conditionne ses interventions à la réalité du lien de causalité entre les préjudices

déclarés et le fait de l’assuré, le médecin. Or il est de constat qu’avant même d’établir

ce lien, la causalité est en soi, une notion difficile à appréhender 586. Ceci parce que la

survenance d’un dommage émane souvent de plusieurs éléments. Et la doctrine ne

manque pas de rappeler la difficulté à choisir entre la théorie de l’équivalence des

conditions et la théorie de la causalité adéquate 587 ; d’où tout l’enjeu de la causalité

fiable 588, en l’occurrence dans les domaines des accidents médicaux (Section I). En

droit médical, conformément à l’article 179 de la LTGO, il appartient au patient

585 La définition négative de la théorie du lien de causalité est ainsi formulée : « Sans le fait incriminé, le

dommage ne se serait pas produit. Le lien de causalité doit être alors certain et direct ». Différentes théories ont été développées afin de montrer que le dommage est bien la conséquence du fait dommageable. Par exemple, il n’est pas possible de reconnaître, comme dommageable, un événement trop éloigné du dommage. Et lorsque le dommage émane de plusieurs causes, le juge doit rechercher si toutes les causes ont concouru au dommage ou qu’une seule l’ait produit. Le lien de causalité concerne les responsabilités délictuelle et contractuelle. En matière délictuelle, les articles du Code civil concernés sont : 1382, 1383, 1384, 1385 et 1386. Et en matière contractuelle, l’article 1151 du Code civil précise que le dommage doit être la « suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention ». En droit malgache, il faut se référer à l’article 229 de la LTGO disposant qu’: « Il ne peut y avoir responsabilité sans faute ou avec faute qu’autant qu’il y a un lien de causalité entre le fait ou la faute d’une part, et le dommage de l’autre ».

586 « L’analyse de la causalité n’a guère tenté les auteurs français, pénétrés qu’ils étaient de la vanité de leurs recherches face au pragmatisme de la jurisprudence », B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, Obligations, t. 1, Responsabilité délictuelle, 5e éd., 1996, n° 1077 ; « La causalité serait le problème le plus complexe de la responsabilité civile », A. NADEAU, Notes sur le lien de causalité et sa preuve dans les actions en responsabilité civile, in Études juridiques à hommage à Mr. Le juge Bissonnette, 1963, p. 435.

587 Il existe deux théories de lien de causalité : 1. L’équivalence des conditions : lorsque toutes les causes sont considérées comme équivalentes dans la production du dommage ; autrement dit, prises individuellement, toutes les prétendues causes sont susceptible d’occasionner le dommage et 2. La causalité adéquate : lorsqu’ il faut distinguer parmi les causes plausibles, celle qui si elle n’aurait pas existé, le dommage ne se serait pas produit. En droit français, c’est plus la théorie du la causalité adéquate qui est retenue. En effet, à lire l’article 1151 du Code civil français en ces termes : « Dans le cas même où l’inexécution de la convention résulte du dol du débiteur, les dommages et intérêts ne doivent comprendre à l’égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été privé, que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention. », la loi semble adopter la conception du lien de causalité adéquate. La jurisprudence est également favorable à la doctrine de la causalité adéquate, notamment en présence de causes concurrentes dont l’une est nettement prépondérante ou, surtout, en présence de causes successives dont une est de nature à rompre la chaîne des causes en raison de son pouvoir causal supérieur.

588 Bien que la causalité soit une notion difficile à appréhender, quelques auteurs ont tenté de définir le caractère fiable d’une cause. Ainsi, le principe de causalité (fiable) veut que « tout ait une cause et que, dans les mêmes conditions, les mêmes causes produisent les mêmes effets. », R. BARROT et N. NICOURT, Le Lien de causalité, Actualités médico-légale de réparation du dommage corporel, Vol. IV, Coll. médecine légale et Toxicologie médicale, éd., Masson, n° 132, p. 11, 1986.

Page 147: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 146 —

demandeur à l’action en réparation de prouver l’existence du lien de causalité entre

l’agir du professionnel et le préjudice. Souvent en cas de difficulté dans

l’établissement de la preuve, la victime a recours à la théorie de présomption de

responsabilité. Quel que soit le mode de preuve choisi, la réalité du lien causal relève

au final du domaine de l’expertise. Bien avant d’établir le lien de causalité, l’expertise

a pour objet de constater et d’évaluer le dommage en vue de définir les chefs de

préjudice correspondant. En cela, elle représente pour le juge, un outil de référence

pour l’évaluation juridique et monétaire du dommage (Section II).

Page 148: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 147 —

SECTION I. LA CAUSALITÉ FIABLE DANS LE DOMAINE DES ACCIDENTS MÉDICAUX

99. La fiabilité du lien de causalité au sens de l’article 179 de la LTGO, suppose

d’établir la preuve selon laquelle l’origine du préjudice est lié au fait du médecin.

Traditionnellement, la preuve est à la charge du demandeur à l’action 589, soit,

le patient. En matière médicale du fait de la technicité de la discipline, si le patient

n’arrive pas à développer sa propre démonstration du lien de causalité 590, souvent, il

se range du côté des présomptions de fait. Lorsque les présomptions de fait sont

graves, précises et concordantes, le lien de causalité est généralement, établi. Dans le

cas contraire, le juge doit se montrer prudent 591 pour ce qui est de l’appréciation de

la faute et du lien de causalité. Pour plus de fiabilité technique, il sera amené à

nommer un expert qui va établir un rapport démontrant si le praticien a méconnu les

données acquises de la science, ou qu’il ait commis un geste qui s’est écarté des

normes de comportement admises par la communauté scientifique 592. En somme, en

matière médicale la compétence des experts apporte un éclairage incontournable

pour fonder la responsabilité 593. Pour arriver à ses fins — établir une causalité fiable

pour asseoir la responsabilité médicale —, cette compétence exige de l’expert le

respect des normes techniques et déontologiques de sa profession ; autrement dit

l’objectivité (§ 1). En contrepartie, du devoir de conscience scientifique adopté par

l’expert, il incombe au plaignant de fournir les éléments de preuve sincères

permettant d’acquérir la certitude de la réalité du traumatisme, fait non évident en

raison de la technicité du domaine (§ 2).

589 En vertu de la maxime latine necessitas probandi incumbit ei qui agit, la règle générale est que « la

nécessité de la preuve incombe à celui qui se plaint ».

590 Conscient de la possibilité de produire la preuve par tout moyen, le patient étant « demandeur » ayant sa cause à défendre, cherche souvent à accommoder plus ou moins habilement ses plaintes en vue du résultat escompté.

591 La faute du médecin doit être établie, et que, sur ce point, le juge doit se montrer prudent, ne pas se transformer, comme le déclarait le procureur général Dupin « en Sorbonne médicale » et « s’épargner le ridicule de départager Hippocrate et Galien », A. BACHELIER, L’évolution du contentieux médical et ses conséquences sur la relation médecin-assureur .I . 2004, L’ Harmattan. Paris. p. 18.

592 A. LAUDE, B. MATHIEU, D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd, Thémis droit, PUF, 2009, p. 485.

593 Incluant fait dommageable, dommage et lien de causalité.

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— 148 —

§ 1. LE TRAIT FONDAMENTAL D’UNE EXPERTISE MÉDICALE : L’OBJECTIVITÉ

100. L’objectivité d’une expertise médicale dépend de la rigueur investie au cours de sa

réalisation (A). Il convient d’apprécier cette rigueur dans la conduite des expertises à

Madagascar (B).

A. La rigueur : gage d’une expertise objective

101. Pour pouvoir éclairer le juge sur l’existence réelle de la faute et partant, de

l’évaluation du préjudice, l’expertise doit être objective 594. Elle ne peut se limiter à

des déductions dépourvues de fondements scientifiques, encore moins, se limiter à

une évaluation approximative du préjudice. Ainsi, le rapport issu des opérations

d’expertise doit être précis. Autrement dit, clair dans l’exposé et précis dans les choix

des termes. Ce qui conduit à une rigueur dans l’enchaînement des idées, au lieu des

approximations. Bref, le rapport technique du médecin expert doit être établi avec

indépendance 595 et impartialité 596.

En principe, en termes de causalité, une expertise bien menée aboutit à quatre

types de réponse possibles :

— Une causalité ne soulevant aucun doute : quand l’expert a acquis la certitude

que l’accident, a bien causé de manière directe, certaine et déterminante (voire

exclusive) le préjudice corporel ;

— Une causalité non établie scientifiquement : quand l’expert établit que les

déficits fonctionnels et le préjudice allégués ne peuvent être scientifiquement

rattachés à une origine traumatique découlant de l’accident invoqué ;

594 Voir : J.-H. SOUTOUL, Formation et contrôle des experts judiciaires, in, La responsabilité du médecin, Actes

du colloque organisés à Aix-en-Provence, par le laboratoire d’épistémologie juridique de la Faculté de droit d’Aix-en-Provence, La Faculté de médecine de Marseille et le Conseil départemental de l’Ordre des médecins des Bouches-du-Rhône, 19 et 20 juin 1992, P.U.A.M., 1993, p. 135. 148.

595 Article 7 du Code de déontologie de la Fédération nationale des compagnies d’experts judiciaires (FNCEJ) : « L’expert doit conserver une indépendance absolue, ne cédant à aucune pression ou influence, de quelque nature que ce soit. Il doit s’interdire d’accepter toute mission privée de conseil ou d’arbitre, à la demande de l’une ou de toutes les parties, qui fasse directement ou indirectement suite à la mission judiciaire qui lui a été confiée, tant que l’affaire n’a pas été définitivement jugée. ». Et l’article 15 : « L’expert conserve toujours son entière indépendance et donne son opinion en toute conscience, sans se préoccuper des appréciations qui pourraient s’en suivre ».

596 Article 6 du Code de déontologie de la Fédération nationale des compagnies d’experts judiciaires (FNCEJ).

Page 150: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 149 —

— Une causalité non formellement certaine mais très plausible 597 : quand l’expert

devant les circonstances, confronte les suppositions favorables à la causalité à celles

qui ne le sont pas et qu’au final, il déduit que le lien peut être admis sur la base de

présomptions graves, précises et concordantes ; autrement dit, la causalité est

probable mais qu’il est n’est pas possible de le démontrer ;

— Une causalité partielle ou indirecte : quand on se trouve dans l’hypothèse où

l’accident constitue une des causes parmi d’autres ayant contribué au préjudice final.

En matière de responsabilité médicale, le mécanisme plurifactoriel est souvent

rencontré en présence d’un état antérieur pathologique du patient (prédisposition).

En somme, l’objectivité d’une expertise repose sur la passion de la vérité. La vérité

s’appuie sur la fréquentation de la littérature scientifique. Et la littérature scientifique

aiguise le raisonnement et les manipulations techniques de l’expert. À présent, il

convient d’apprécier le déploiement de toute cette rigueur scientifique dans la

conduite des expertises à Madagascar.

B. L’appréciation de l’objectivité de l’expertise à Madagascar

102. Des dispositions relevant du champ de l’expertise, ont pu être recueillies d’un

arrêt relativement ancien 598 ayant eu lieu à Madagascar. Indépendamment de

l’ancienneté de l’arrêt, les dispositions stipulées, ne demeurent pas moins révélatrices

de l’état actuel de l’expertise sur place. Alors, dans le prolongement de l’exposé du

procès (1), quelques observations seront émises (2) 599.

1. L’exposé du procès

103. Seront ici établis, les faits, les arguments des parties et les décisions du tribunal.

Rappel des faits et de la procédure

Le 6 janvier 2006, Mme X fut admise à la Clinique Y de Fianarantsoa, Madagascar

pour accoucher après y avoir été suivie durant la grossesse. L’enfant n’a pu

malheureusement survivre en raison de la circulaire du cordon ombilical qui l’a

597 Certains auteurs parlent de causalité douteuse ou hypothétique. E. CALS, Les litiges, définitions et

origines, in, L’expertise médicale, en responsabilité médicale et en réparation d’un préjudice corporel, J. HUREAU, D. POITOUT, 2e éd., Masson, 2005, p. 9.

598 Dossier n° 3256-RP/FI/06/IS/SC, Tribunal Correctionnel de Fianarantsoa, Madagascar, 2007.

599 Les critiques nées de l’analyse de l’arrêt ont pour objectif non de remettre en cause la portée des décisions judiciaires mais de chercher les divers éléments requis en matière de preuve.

Page 151: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 150 —

asphyxié ; cette anomalie n’a pas été détectée à l’échographie. N’entendant pas le cri

du bébé, la mère en a déduit son décès. Fortement choquée par ce malheur, elle

perdit conscience, fit une crise convulsive suivie d’une hémorragie importante d’où

évacuation peu de temps après aux Services des Urgences du CHU de Fianarantsoa

où elle décéda quelques minutes après.

Allégation de la partie demanderesse

En l’espèce, il y a eu faute médicale pour délivrance tardive de l’enfant. En effet, si

dans la matinée (entre 9 et 10 heures) du jour prévu pour l’accouchement, l’équipe de

la clinique a administré un suppositoire pour déclencher l’accouchement, il va de soi

que la délivrance ne tardera pas. Pourtant vers 17 heures quand la parturiente

manifestait clairement qu’elle était prête pour accoucher, l’équipe médicale lui interdit

d’entamer le début du travail. D’après l’équipe, agir de la sorte risque de « gonfler » le

col. La sensation d’être prête à la délivrance est biologiquement naturelle, vouloir

l’interdire constitue la faute médicale ayant provoqué la mort de la parturiente ;

Par ailleurs, l’équipe médicale de la Clinique a pris tardivement la décision

d’évacuer la patiente en Service du CHU. Et cette décision a été prise parce le

conjoint de la victime fortement inquiet de la situation, l’a demandé. Dès lors,

l’équipe médicale a commis une erreur manifeste dans l’appréciation de la gravité de

la situation.

Enfin, l’abandon volontaire d’une patiente en péril est soulevé lorsque le médecin

décide de partir après avoir occulté la parturiente.

Allégation défenderesse :

Déclaration de l’Avocat :

Que les prévenus comprennent parfaitement la douleur de la famille face à la perte de deux êtres chers mais la faute de négligence ou d’imprudence ne peut se déduire du seul fait du décès de la parturiente.

Attendu que face à la réaction émotionnelle imprévisible de la mère (qui lorsqu’elle n’a pas entendu des pleurs a déduit le décès de son bébé) entraînant une crise convulsive et une hémorragie, aucune des équipes soignantes de la clinique et de l’hôpital n’a pu éviter l’issue fatal.

Attendu que le conjoint de la victime et père de l’enfant a été constamment présent durant l’intervention médicale. Qu’il a été témoin de tous les actes de l’équipe soignante pour sauver la mère et l’enfant. Que si la moindre défaillance avait eu lieu, il n’aurait pas manqué de le clamer.

Décision du Tribunal correctionnel :

Attendu que suivant la procédure d’information sommaire en date du 15 décembre 2006, les prévenus sont traduits devant le Tribunal

Page 152: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 151 —

correctionnel de Fianarantsoa, pour répondre d’avoir à la Clinique Y, le 11 janvier 2006, en qualité de docteur responsable de la Clinique, et Sages-femmes, par imprudence et négligence, commis involontairement un homicide sur la personne de Mme X, lors de l’accouchement.

Sur l’action publique :

Attendu que des pièces du dossier et des débats, il ne résulte pas de preuves suffisantes contre les prévenus d’avoir commis les faits à elles reprochés. Que l’équipe médicale a déployé tous les moyens nécessaires pour prévenir la mort de la victime, à savoir, l’expulsion du bébé assez rapidement face au constat du circulaire ombilical non décelable à l’échographie […] ; la réanimation du nouveau-né ; l’appel du médecin de garde devant le constat de l’état critique de la parturiente et l’évacuation rapide au CHU ;

Qu’en outre, tous les témoins entendus, tant à la barre que durant l’enquête préliminaire n’ont pas établi l’existence de la négligence et de l’imprudence de la part des personnes en cause ;

Qu’aucune expertise médico-légale post-mortem n’a été effectuée permettant de déterminer la cause exacte du décès maternel ;

Qu’en l’espèce, il existe un doute dans l’inculpation.

Sur l’action civile :

Attendu que Sieur X, le père de la victime qui se constitue partie civile et réclame 8.000.000 Ariary (Francs malgache) de dommages et intérêts ;

Que les prévenus ayant été relaxées, il y a lieu de se déclarer incompétent pour statuer sur cette demande ; que dès lors, il convient de mettre hors de cause le civilement responsable représentant la Clinique.

Par ces motifs,

Sur l’action publique

— Relaxe au bénéfice du doute M. Z docteur responsable de la Clinique Y et Mesdames X Sages-femmes ;

— Laisse les frais et dépens à la charge du Trésor Public.

Sur l’action civile

— Se déclare incompétent pour statuer sur les intérêts civils,

— Met hors de cause les civilement responsables

L’exposé du procès conduit à quelques observations. Nous allons les examiner

dans l’intention de contribuer à l’amélioration la procédure d’expertise dans les

contentieux médicaux à Madagascar.

2. Les observations

104. L’analyse du procès évoque deux failles dans la conduite de l’expertise :

L’obstination aux acquis du droit commun (a) et à une regrettable inertie (b)

Page 153: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 152 —

a. L’obstination aux acquis de droit commun

105. Le constat du dommage et de son lien de causalité avec la faute relève de

l’expertise médicale. Sous certaines conditions déontologiques 600, l’avis de l’expert

s’impose de facto aux juges 601. Or dans notre cas d’espèce, l’expertise en question

fait défaut. S’appuyant sur cette absence, le juge argue que la cause du décès n’étant

pas établie, le lien de causalité fondement de l’inculpation n’est pas établi. Et il appuie

le verdict d’irresponsabilité médicale sur un principe du droit commun : l’obligation

médicale de moyens. D’après le Tribunal, considérant que l’équipe médicale a

déployé tous les moyens nécessaires pour prévenir la mort des victimes, la

conformité à la diligence médicale est établie.

En termes de lien de causalité et de responsabilité médicale fondé sur l’obligation

de moyens, le juge est en l’occurrence, en phase avec le droit commun. La réserve

émise à l’encontre de sa décision est le constat selon lequel, l’absence de cause

provient d’un un défaut d’expertise. Partant, il nous semble que la théorie de la

causalité ne peut à elle seule se suffire pour apprécier la faute. Les dispositions

suivantes sont à adopter en vue d’une appréciation objective du lien de causalité et de

fait et avant tout de la faute médicale :

À l’issu d’une expertise médicale, si aucune cause du préjudice corporel 602 n’a pu être établie, le lien de causalité n’est pas retenu du fait même que la faute n’eut été pas caractérisée.

La décision du Tribunal dans l’espèce en cause nous paraît un peu expéditive et de

fait, fragilise les exigences requises pour l’établissement d’une causalité fiable. En

effet, la causalité fiable603 exige un long et difficile travail. Elle suppose des

renseignements techniques fondés sur une bibliographie spécialisées en vue d’une

rédaction soignée, précise et argumentées. Il s’agit dès lors d’un travail très technique

mais qui se doit d’être accessible au lecteur non spécialisé 604. Établi ainsi, le rapport

d’expertise acquiert une objectivité attestée.

600 Des conditions fondées sur la précision, voir : Le trait fondamental d’une expertise médicale :

l’objectivité, n° 100.

601 En vertu du pouvoir discrétionnaire du juge, bien que le rapport d’expertise soit objectif, il ne lie pas le juge.

602 En l’occurrence, il s’agit du décès de la parturiente et de l’enfant.

603 Voir : n° 100.

604 R. BARROT et N. NICOURT, Le Lien de causalité, Actualités médico-légale de réparation du dommage corporel, Vol. IV, Coll. médecine légale et Toxicologie médicale, éd., Masson, n° 132, 1986, p. 17.

Page 154: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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Considérant le lien étroit entre l’appréciation de la responsabilité et l’expertise, il

est temps d’établir une meilleure collaboration entre l’expert et le juge et tenir compte

de leurs rôles respectifs.

Consécutivement aux observations émises à propos de l’expertise dans l’arrêt en

cause, on peut relever une certaine inertie juridictionnelle

b. La regrettable inertie juridictionnelle

106. Les réactions du juge par rapport aux allégations de la défense sont assez

révélatrices de l’inertie juridictionnelle.

Dans un premier temps, L’Avocat de la défense mentionne : « Que les prévenus

comprennent parfaitement la douleur de la famille face à la perte de deux êtres chers mais la faute de

négligence ou d’imprudence ne peut se déduire du seul fait du décès de la parturiente ». Vu sous

l’angle de l’expertise médicale, cette affirmation est irréprochable. En effet, l’Avocat

de la défense exprime à juste titre que c’est très sommaire voire péremptoire de

conclure qu’un constat de décès provient ipso facto, d’un agissement négligeant. La

recherche du lien entre les faits accidentels et le décès oblige d’établir en quoi l’acte

professionnel était-il négligeant et par quel processus, il a causé le décès, sans quoi,

ces faits accidentels ne constituent pas une cause de préjudice.

Ensuite, l’Avocat continue : « Attendu que face à la réaction émotionnelle imprévisible de la

mère 605 entraînant une crise convulsive et une hémorragie, aucune des équipes soignantes de la

clinique et de l’hôpital n’a pu éviter l’issue fatale ». À lire cet argument de la défense, une

question s’impose : Sur le plan purement médical, une réaction émotionnelle peut-

elle être à l’origine d’une crise convulsive et hémorragique ? Si cela est possible, la

démonstration médicale du lien causal s’impose 606.

Enfin, l’Avocat termine : « Attendu que le conjoint de la victime et père de l’enfant a été

constamment présent durant l’intervention médicale. Qu’il a été témoin de tous les actes de l’équipe

soignante pour sauver la mère et l’enfant. Que si la moindre défaillance avait eu lieu, il n’aurait pas

manqué de le clamer ».

La question qui se pose est : Sur le plan médical, est-ce soutenable d’affirmer que

la non-réactivité d’un profane (le conjoint de la victime) présume une conformité de

605 Qui lorsqu’elle n’a pas entendu des pleurs a déduit le décès de son enfant.

606 Une personne profane a besoin de savoir le rapport entre l’émotion et une contraction involontaire et soudaine de l’ensemble des muscles du corps. Est-ce parce que l’émotion affecte le cœur et en suivant les muscles du corps ? Ce besoin d’explication s’affirme aussi concernant le rapport entre l’affectivité et l’hémorragie.

Page 155: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 154 —

l’acte médical aux règles de l’art ? Sur le plan juridique, ce raisonnement ne peut être

soutenu car il reviendrait à dire qu’un acte médical est susceptible d’être sanctionné

par une appréciation profane. Or, la conformité de l’acte médical aux données

acquises de la science relève uniquement de l’expertise médicale.

En somme, l’inertie juridictionnelle en matière d’expertise, se manifeste dans le

défaut d’une démonstration scientifique en réaction aux arguments partisans (sur le

plan procédural). Ensuite, elle concerne l’analyse objective de la cause du préjudice,

en l’occurrence il s’agit de l’anomalie ombilicale. Et le Tribunal l’atteste en énonçant :

« L’équipe médicale a déployé tous les moyens nécessaires pour prévenir la mort de la victime

(l’enfant), à savoir l’expulsion du bébé assez rapidement malgré l’anomalie ombilicale laquelle n’a

été décelable à l’échographie et l’a pourtant asphyxié ». L’attendu soulève une question

intéressante : la potentialité de la non-détection de l’anomalie ombilicale par

l’échographie à constituer une faute médicale. Dans l’arrêt en cause, ce sujet n’a pas

été abordé par la juridiction. Il aurait pu être intéressant de savoir si la défaillance

échographique constitue un manquement à l’obligation de moyens dont est tenu le

médecin.

Sur la question de défaillance de la technique d’imagerie, une approche de la

jurisprudence française, s’impose. Dans l’affaire Perruche 607, la Cour de cassation 608

s’était prononcée sur l’existence d’un préjudice subi par un enfant atteint de rubéole

congénitale dont le diagnostic prénatal n’avait pas été décelé du fait d’une négligence

du laboratoire d’analyses biologiques. L’affaire Perruche et l’affaire de la parturiente

malgache sont très proches dans la mesure où toutes les deux concernent une

défaillance de diagnostic prénatal. Mais un point les diffère : la notification sur

l’origine de ladite défaillance. Dans l’affaire Perruche, il est explicité que la

non-détection de l’anomalie émane du fait du laboratoire, d’où la qualification fautive

entérinée 609. Tel n’est pas le cas pour l’affaire de parturiente malgache où la décision

607 Dans cette affaire, un enfant est né handicapé du fait de la rubéole contractée par sa mère

pendant sa grossesse. Cette maladie n’ayant pas été détectée ni par le médecin, ni par le laboratoire, la mère n’a pas pu faire interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant handicapé. C. cass., ass. Plén., 17 novembre 2000. L’intérêt de l’arrêt Perruche est double : juridique et sociétal. Juridiquement, la décision de la Cour de cassation réaffirme le principe de la responsabilité contractuelle du médecin. En l’espèce, il a été convenu entre la mère et le médecin un arrêt de la grossesse en cas d’anomalie. Et socialement, il y a le dilemme majeur sur la qualification de préjudiciable du fait de naître.

608 Arrêt Perruche, Cass. ass. plén., 17 novembre 2000.

609 En droit médical français, il est de principe que si le handicap et par extension son origine (dépistage erroné) proviennent de la faute du médecin tel que c’est le cas dans l’affaire Perruche, le préjudice est établi. À cet effet, l’article 1er de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des

…/…

Page 156: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 155 —

se limite à la déclaration selon laquelle, la cause du décès émane de l’anomalie

ombilicale non décelable. L’appréciation timide de la défaillance de l’échographie,

conduit à une conclusion péremptoire du différend. En s’arrêtant sur le constat que

le décès a pour origine l’anomalie ombilicale non décelée à l’échographie, sans

chercher la portée de défaillance échographique en termes de responsabilité, le

Tribunal a mis en marge l’appréciation objective du lien de causalité 610.

En somme, la rigueur d’une expertise est nécessaire en vue de tenir à distance

toutes incertitudes dans le prononcé de l’indemnisation. Une expertise objective

éclaire considérablement le raisonnement juridique. Cette efficacité serait d’autant

plus assurée avec la coopération de la partie à qui incombe la charge de la preuve.

Seulement en raison de la technicité de la discipline médicale, l’apport de preuve se

déroule souvent dans un contexte pas toujours aisé.

§ 2. LE CONTEXTE DE LA CHARGE DE LA PREUVE POUR L’ÉTABLISSEMENT

DU LIEN DE CAUSALITÉ

107. La charge de la preuve incombe à celui qui se plaint. Il peut le faire par tous les

moyens ; l’objectif étant que la preuve puisse établir une causalité certaine entre le fait

du praticien et le préjudice sans quoi il n’y a pas de réparation. Or dans le domaine de

la responsabilité médicale, on n’aura de cesse de confirmer qu’en raison de la

technicité de la discipline, la victime rencontrera des difficultés conséquentes (A).

Pour plus d’équité procédurale, la jurisprudence en droit comparé montre une option

pour l’allègement de la preuve (B).

A. La difficulté de la preuve médicale pour la victime

108. La preuve médicale est fondée sur la perception des symptômes et le

déchiffrement d’indices. La preuve médicale ne peut provenir que de raisonnements

logiques et sanctionnés par les protocoles en vigueur dans la communauté

malades dispose que : « La personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l’acte fautif a provoqué directement le handicap ou l’a aggravé, ou n’a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l’atténuer. Lorsque la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d’un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d’une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice ». Quant au droit d’une personne née avec handicap, l’article 114-5 du Code de l’action sociale et des familles énonce que : « Nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance ». Cette disposition est confirmée par la loi 11 février 2005 relative à l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

610 L’objectif du lien de causalité étant de savoir si le corps soignant a tout mis en œuvre pour éviter le préjudice.

Page 157: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 156 —

scientifique. Du côté de la victime non informée d’un tel environnement médical, la

charge de la preuve ne peut provenir que de tâtonnement ; des coïncidences

d’évènements par rapport à ses préjudices ; et de ces coïncidences, une déduction

subjective de la réalité du lien de causalité. Les experts en matière de preuve ont pour

référence la loi de la nature. Leur méthode est basée sur les fréquences de la théorie

probabiliste, d’un processus logique pour arriver à prendre une décision la plus

plausible 611. Une personne ordinaire n’est pas en mesure de raisonner de la sorte 612.

Pour en illustrer la portée, il sied de revenir à l’arrêt sus étudié.

La partie demanderesse allègue « qu’il y a eu faute médicale pour expulsion tardive de

l’enfant car si dans la matinée du jour prévu pour l’accouchement, l’équipe de la clinique a

administré un suppositoire pour déclencher l’accouchement, il va de soi que la délivrance ne tardera

pas. Or vers 17 heures quand la parturiente manifestait clairement qu’elle était prête à accoucher,

l’équipe médicale lui interdisait de commencer le travail. D’après l’équipe, agir de la sorte risque de

« gonfler » le col ». Sur le plan juridique, la preuve se situe dans l’appréciation de la

réalité de la prétendue faute médicale : la délivrance tardive de l’enfant et en suivant,

l’établissement de son lien de causalité avec le décès. D’après la défense, la délivrance

au moment requis par la parturiente menace d’endommager le col. Le juge n’a pas

tranché entre ces deux allégations antagonistes, ce qui aurait été un apport innovateur

sur le plan de la responsabilité médicale. En effet, entre les suppositions, les

coïncidences et les déductions optées par la victime pour défendre sa cause et la

théorie scientifique démontrée par le corps médical pour expliquer la décision

médicale, il est appartient au juge de trancher sur l’élément présumé fautif. À cet

effet, l’expertise est incontournable.

Enfin la dernière allégation de la partie demanderesse est « que la sensation d’être prête

à la délivrance est biologiquement naturelle, vouloir l’interdire est une faute médicale ayant provoqué

la mort de la parturiente ». Certes, l’argument du plaignant relève d’un raisonnement

purement profane, par conséquent est subjectif, n’empêche qu’il mérite un examen

médical pour en mesurer la teneur.

611 G. BUSINO, La preuve dans les sciences sociales, Rev. européenne des sciences sociales, 2003, La preuve

en sciences sociales, IXe séminaire interdisciplinaire du Groupe d’études « Raison et Rationalités », http://ress.revues.org.

612 « Le symptôme est perçu par le malade et s’oppose en principe aux signes ou manifestations objectives découvertes par le médecin », Dr. S. KERNBAUM, Dictionnaire de médecine Flammarion, 4e éd., 1992, voir : « Symptôme », cité par B. PY, Recherche sur les justifications pénales de l’activité médicale, Th. de doctorat en droit, Université de Nancy, 1993.

Page 158: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 157 —

Ainsi, à Madagascar sur le plan de la responsabilité médicale, force est de

constater que la victime n’a pas beaucoup de marges de manœuvre pour faire valoir

ses allégations ; souvent, elle se résout à des démonstrations sur la base de

supposition, de coïncidence, bref de présomption. Considérant la non-maîtrise de la

science médicale par la victime, la jurisprudence en droit français propose un système

d’allègement de la charge de la preuve.

B. L’allègement de la charge de la preuve

109. L’allègement de la charge de la preuve se concrétise par la théorie de la faute

virtuelle. La faute virtuelle est celle qui se déduit de la constatation du dommage ;

autrement formulé, la faute induite du dommage 613. La théorie de la faute virtuelle

ainsi définie peut-elle se déployer dans les jurisprudences malgaches ? Pour répondre

à la question, il importe de fixer l’étendue de la « faute virtuelle ».

La faute virtuelle est celle qui se déduit ipso facto de la constatation du dommage, lequel se traduit par l’atteinte d’un organe étranger aux finalités de l’opération, dès lors que cet organe ne présentait pas d’anomalie rendant son

atteinte inévitable. 614

À lire la référence, la transposition de la faute virtuelle aux récentes jurisprudences

malgaches, semble inappropriée. Ceci en raison de la nature des préjudices en cause :

le décès des patients (mères et nouveau-nés). En effet, on ne voit pas le rapport entre

le préjudice de la perte des êtres humains et le préjudice d’une atteinte à un organe

étranger aux finalités de l’opération (faute virtuelle). Par contre si on va au-delà de la

613 Voir : M. BACACHE, La faute technique, n° 472266, LexisNexis SA 2011, Droit médical et

hospitalier, fasc. 18-2, p. 9.

614 Deux arrêts rendus par la première chambre civile le 23 mai 2000 se prononcent clairement en faveur de la faute virtuelle Dans la première espèce, un chirurgien avait sectionné une artère à l’occasion d’une intervention sur le ligament du genou. L’arrêt qui avait écarté la responsabilité du médecin pour absence de faute est cassé au motif que la réalisation de la ligamentoplastie ne pouvait pas provoquer le sectionnement de l’artère de sorte que la cour d’appel ne pouvait exclure la faute du chirurgien sans établir l’artère présentait chez la patiente une anomalie rendant son atteinte inévitable. Dans la deuxième espèce, un médecin avait provoqué un traumatisme du nerf sublingual en procédant à l’extraction d’une dent de sagesse. La Cour de cassation approuve la décision de la cour d’appel qui a retenu la responsabilité du médecin pour faute au motif que la réalisation de l’extraction n’impliquait pas l’atteinte du nerf et qu’il n’était pas démontré que le trajet de ce nerf présentait chez la patiente une anomalie rendant son atteinte inévitable. Le même raisonnement est entrepris dans un arrêt du 18 juillet 2000. En l’espèce, la patiente souffrait de troubles d’élocution et de déglutition suite à l’exérèse de la glande sous-maxillaire droite, la Cour de cassation approuve la décision de la cour d’appel d’avoir retenu la responsabilité pour faute des médecins au motif que la réalisation d’une exérèse n’impliquait pas l’atteinte du nerf grand hypoglosse et du nerf lingual (des nerfs au niveau de la tête permettant l’apport de sang au niveau de la langue) et qu’il n’était pas établi que le trajet de ces nerfs présentait une anomalie de façon à rendre leur atteinte inévitable.

Page 159: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 158 —

nature du préjudice pour aller jusqu’au fond de la théorie de la faute virtuelle, la

donne change. La faute virtuelle étant déduit ipso facto de la constatation du

dommage, implique l’existence d’une obligation de moyens renforcée dont la preuve

de la violation est expressément facilitée en raison de l’ampleur du dommage.

Autrement dit, la notion de gravité du préjudice invoqué est désormais prise en

compte dans l’appréciation de la faute. Le mécanisme de l’obligation de moyens

renforcée est tout à fait transposable dans nos cas de figure (contetieux dans le

domaine obstétrical). Il est important de rappeler que le recours à la théorie de la

faute virtuelle ne peut se faire qu’en appréciation stricte de la gravité du dommage

corporel ; sans quoi l’approche de la faute médicale tend vers une véritable obligation

de résultat 615.

Ainsi si l’on considère la gravité du préjudice dans nos cas jurisprudentiels : le

décès des patients, la théorie de la faute virtuelle est au final transposable.

Une fois la réalité du dommage et le lien de causalité établi, l’expertise procède à

l’évaluation du dommage en vue de fixer les chefs de préjudice. En cela, l’expertise

conduit à l’évaluation juridique et monétaire du dommage.

SECTION II. L’ÉVALUATION JURIDIQUE ET MONÉTAIRE DU DOMMAGE

110. Le juge est appelé à définir les modalités de la réparation. Pour ce, il apprécie

l’influence que peut exercer l’invalidité au sens médical 616 sur la faculté de la victime

d’avoir une activité rémunératrice 617. La valeur de l’invalidité au sens médical est lue

en pourcentage tenant compte des aptitudes physiques de l’intéressé avant l’accident

et de son état après consolidation. Naturellement à ce stade d’évaluation purement

médicale, l’équation incombe à l’expert (§ 1), par la suite, le juge a le privilège de

615 CH. LARROUMET traduit le recours inconditionnel de la théorie de la faute virtuelle par le concept de :

« perversion du raisonnement juridique », CH. LARROUMET, Rapport français, in La responsabilité, aspects nouveaux, Travaux de l’association Capitant L.G.D.J., 2003, p. 288.

616 Concernant l’évaluation du dommage, il faut distinguer l’évaluation médicale du dommage corporel et l’évaluation juridique du préjudice, voir : A. BENABENT, Droit civil des obligations, éd., Paris, Montchrestien, 2005, 10 e éd., n° 264.

617 Le dommage entraîne des frais médicaux (frais d’hospitalisation, traitement, cures…) mais aussi un amoindrissement de la victime qui ne peut se livrer à des activités rémunératrices habituelles. Cette diminution des capacités économiques est qualifiée juridiquement d’ « incapacité ».

Page 160: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 159 —

décider de la capacité productrice de la victime 618, et partant de l’évaluation

monétaire du dommage corporel définitif 619 (§ 2).

§ 1. L’EXAMEN MÉDICAL DES SÉQUELLES DE L’ACCIDENT

THÉRAPEUTIQUE

Dans l’examen des séquelles d’un accident médical, l’expert est placé devant la

dissociation entre séquelles anatomiques réelles (A) et les conséquences

fonctionnelles apparentes qui ont une répercussion économique dans la vie

quotidienne de la victime (B).

A. L’examen objectif de la réalité anatomique

111. Par quel procédé l’expert peut-il évaluer le dommage corporel ou la lésion

anatomique de la victime ? Sur quelle base fonde-t-il son évaluation ? Plusieurs

éléments entrent en jeu pour évaluer la gravité de la lésion anatomique : l’intensité et

la durée de la douleur dont le degré peut varier entre très léger, léger, modéré, moyen,

assez important, important. Ce dont il est certain, est que l’appréciation des éléments

est très subjective 620. Elle varie en fonction de plusieurs paramètres : âge, sexe,

618 Ou la faculté d’avoir une activité rémunératrice. Deux phases se succèdent pour déterminer le

pourcentage de la diminution des capacités économiques. Tout d’abord, la phase de soins, durant laquelle est déterminée l’incapacité temporaire pouvant être totale ou partielle. Ensuite, après consolidation (état stationnaire de la santé après traitements), l’étape de l’évaluation de l’incapacité permanente. Le juge du fond fixera librement le taux à retenir, en tenant compte notamment du métier de l’intéressé. « Les juges du fond sont souverains dans l’évaluation des dommages corporels et dans ses modalités de réparation : l’intime conviction avec comme corollaire la motivation de la décision sont les deux sources où se désaltère le juge, pour former le droit de la réparation. Ainsi, le mode et l’évaluation du dommage, c’est-à-dire son étendue, échappe-t-il au contrôle de la Cour de Cassation », M. PÉRIER, J.C.R.A., Régime de la réparation, Évaluation du préjudice corporel : Atteintes à l’intégrité physique, Principes généraux de la réparation, 2003.

619 Ainsi, il est possible de parler d’une évaluation bipartite du dommage : l’évaluation médicale et l’évaluation juridique, voir : A. BENABENT, Droit civil des obligations, éd., Paris, Montchrestien, 2005, 10e éd., n° 264. Deux disciplines s’entrecroisent alors : la médecine et le droit. Dans un premier temps, les médecins apprécient et qualifient l’importance des atteintes à l’intégrité physique lors de l’expertise médicale. Le médecin expert ne procède à aucun moment à une évaluation monétaire. Dans un second temps, le juge traduit dans le domaine du droit les préjudices subis et en font une évaluation monétaire.

620 La doctrine confirme que l’embarras de l’évaluation du préjudice ne peut être dissipé par la simple présence de « recettes standardisées » (barèmes d’indemnisation). Et pour les experts, on ne peut employer des règles simples ou des « recettes standardisées » afin de résoudre les difficultés que présente l’évaluation du préjudice. Il s’en suit, la nécessité d’une plus grande rigueur, aidée par beaucoup de bon sens dans la prise en considération de chaque situation, voir : F. BÉLOT, L’évaluation du préjudice économique, Recl. Dalloz, 2007, p. 1681 ; Voir également : J. ORTSCHEIDT, La réparation du dommage dans l’arbitrage commercial international, Th., Dalloz, 2000, n° 436 s.

Page 161: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 160 —

nature de la profession, caractères particuliers de certaines lésions, etc…L’influence

de ces nombreux paramètres sur l’évaluation des préjudices fait que le taux retenu

varie d’un expert à l’autre, d’un blessé à l’autre 621. Mais si les critères d’évaluation

sont très éclectiques, le procédé d’évaluation en lui-même est simple ; il s’appuie sur

un mode d’examen très pragmatique : établir le passage entre le fait initial et les

séquelles. Ce qui nécessite de constater le ou les faits initiaux 622 ; l’analyse de l’état de

séquelle, et l’établissement de l’écart entre les deux. Toute démarche d’évaluation de

préjudice consistera à mesurer cet écart ; il traduit la réduction du potentiel physique,

psycho-sensorielle ou intellectuelle, résultant de l’atteinte portée à l’intégrité

corporelle de la victime 623. La réduction du potentiel est dénommée « incapacité » en

référence avec la possibilité d’une reprise d’activité rémunératrice. L’incapacité peut

être totale (IPT) ou partielle (IPP). Elle se lit en pourcentage 624 sur lequel se base le

juge pour calculer l’indemnité à allouer. L’expert est ainsi le garant d’une lecture

fiable de l’état séquellaire 625 de la victime et de la précision de la date de

consolidation 626. À l’issu de l’examen anatomique de la victime, il donne un avis 627

sur les dommages physiologique, esthétique et d’agrément, lesquels aboutissement

souvent à un préjudice moral.

Après la reconnaissance de l’atteinte à l’intégrité corporelle de la victime, il faut

considérer les retombées économiques sur le quotidien de la victime.

621 « La variété des cas individuels engendre nécessairement une variété des indemnisations judiciaires dans leur forme

et leur montant », J. MAZARS, Conseiller à la Cour de cassation, La Cour de cassation et l’indemnisation des préjudices, colloques et activités de formation 2005.

622 Dans l’évaluation du dommage corporel suite à un accident médical, les faits initiaux examinés comprennent l’état de santé avant l’accident et la probable prédisposition pathologique du patient. L’intérêt pour le juge de considérer à la fois la santé intacte avant l’avènement du dommage et l’état pathologique du patient, est de pouvoir indiquer la part du dommage qui revient au fait du praticien de celle qui revient à la prédisposition. Pour autant, la participation partielle de la prédisposition à l’aggravation du dommage n’exclut pas la responsabilité juridique du médecin car en droit, la causalité partielle n’est pas admise (voir : 48). Par contre cette participation implique que le médecin ne soit tenu que de la part du dommage qu’il a causé, voir : n 48 et 49.

623 L’écart est alors, l’état d’ « amputation » de la capacité physiologique de la victime.

624 Une notation chiffrée par pourcentage de la gravité de l’infirmité restante, autrement dit, une appréciation chiffrée du déficit physiologique.

625 Voir : n° 100 et s.

626 La date de consolidation marque le point de départ pour solliciter l’indemnisation définitive du préjudice de la victime. La consolidation est acquise au jour où l’état du blessé est devenu anatomiquement et fonctionnellement définitif, c’est-à-dire au jour où aucune ressource thérapeutique n’est plus susceptible d’entraîner d’amélioration appréciable et que les séquelles ne sont vraiment plus susceptibles d’évolution ultérieure.

627 L’avis de l’expert est un avis à titre informatif ; autrement dit, ne lie pas le juge.

Page 162: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 161 —

B. Examen économique

112. L’appréciation du dommage économique ou pécuniaire résultant d’une incapacité

physique est une notion juridique et non médicale. Par conséquent, elle incombe aux

parties ; et à défaut d’entente, relève du privilège du juge. Ceci dit, pour éclairer ces

derniers, l’expert est appelé à détailler l’état fonctionnel du blessé, les séquelles

médicales de l’accident et leurs répercussions sur les manipulations, les travaux ou les

occupations diverses (physiques ou intellectuelles) que la victime est amenée à réaliser

dans l’exercice de sa profession. Ces répercussions sont aussi évaluées par rapport

aux activités rémunératrices futures en cas de changement de profession. Bref,

compte tenu des atteintes anatomiques, l’expert apprécie les séquelles dans les actes

de la vie courante, c’est-à-dire le retentissement fonctionnel de la réduction

physiologique.

L’examen anatomique et économique de la victime d’un accident médical a donné

une interprétation technique du « dommage » : la réduction de la capacité productive

et intellectuelle consécutive à l’incapacité physique. L’évaluation de la capacité

productive incombe au juge qui a le privilège de l’évaluation monétaire du dommage

corporel définitif.

§ 2. L’ÉVALUATION MONÉTAIRE DU DOMMAGE

113. Il va sans dire qu’avant de l’évaluer monétairement, le dommage « soit » ;

autrement dit : certain, inhérent et lié directement au fait dommageable (A). Sachant

que le dommage se manifeste de plusieurs manières, un classement par catégorie

donne une meilleure lisibilité (B).

A. L’actualité, la réalité et l’inhérence du dommage : caractères du dommage évaluable

114. Le caractère actuel et réel du dommage étant très lié, il convient de les aborder

ensemble (1). Ensuite sera étudiée l’inhérence du dommage au fait du praticien (2).

1. L’actualité et la réalité du dommage

115. En matière de responsabilité médicale, il faut que le dommage corporel existe ou

du moins est sensé exister au moment de l’action en responsabilité 628. En outre, il

628 Voir : S. RANDRIANAHINORO, op. cit, p. 181, 182 ; Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et

Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, éd. Défrénois-Lextenso, 4e éd., 2011 n° 241.

Page 163: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 162 —

doit consister en un fait précis et non hypothétique 629 Par exemple, existe et repose

sur un fait non hypothétique, le cas d’un patient victime d’une infection articulaire

due à la présence d’un staphylocoque doré suite à une radiographie de genou

précédée d’une arthrographie 630. Mais le caractère actuel et certain du préjudice est

plus nuancé qu’il ne le paraît, notamment en cas d’incertitude causale, c’est-à-dire

lorsque le lien de causalité entre le fait du praticien et le préjudice est faible ou

incertain. Ainsi en est-il pour le manquement à l’obligation médicale d’information

due au patient ; autrement dit, l’omission au devoir de notifier au patient des

éventuelles conséquences d’une intervention thérapeutique. Dans cette hypothèse,

malgré le constat que le dommage soit actuel et certain, il est difficile de soutenir que

l’échec médical ait un lien direct avec le défaut d’information. Par contre, il y a, en

l’espèce, un dommage distinct du préjudice corporel, préjudice qui présente un lien

direct avec le défaut d’information : le fait pour le patient d’être privé de consentir

« en connaissance de cause » au traitement préconisé. Le lien direct de ce préjudice à

l’absence d’information est certain et ceci indépendamment de la réponse du patient

quant à l’effectivité de l’intervention. En effet, le préjudice de n’avoir pas été informé

subsiste même si l’information n’aurait donc rien changé à l’issu thérapeutique.

Autrement dit, le fait d’être privé de consentement éclairé constitue un dommage,

actuel, certain, et inhérent au défaut d’information médicale, indépendamment de la

réponse du patient. Enfin, reste à noter que le préjudice d’être privé de consentement

éclairé a pour corollaire un autre dommage : la perte de chance d’échapper au risque

qui s’est finalement réalisé 631.

Après avoir établi que le dommage doit être actuel et certain, il faut démontrer

son lien direct avec le fait du professionnel.

629 Le préjudice peut-être certain tout en étant futur quand revêt un caractère inéluctable, Ibid., « S’il

n’est pas possible d’allouer des dommages-intérêts en réparation d’un préjudice purement éventuel, il en est autrement lorsque le préjudice bien que futur, apparaît aux juges comme la prolongation certaine et directe d’un état de chose actuelle et comme étant susceptible d’estimation immédiate », note H. MAZEAUD, arrêt de principe Cass. Req., 1e r juin 1932, Sté énergie électrique du littoral méditerranéen, D. P. 1932.1.102.

630 Cass.civ. 29 juin 1999, concernant les arrêts dits des staphylocoques dorés.

631 Un arrêt de principe du 7 février 1990, a condamné un médecin pour manquement à l’obligation d’éclairer le patient des conséquences éventuelles de son choix d’accepter l’opération ; manquement qui a privé l’intéressé de la chance d’échapper au risque qui si s’est finalement réalisé.

Page 164: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 163 —

2. L’inhérence du dommage au fait du praticien

116. Le préjudice inhérent ou direct est celui qui a sa seule source ou sa cause juridique

dans la faute du praticien et qui sans elle, n’aurait pas existé. À contrario, est indirect,

le préjudice corporel qui, bien que faisant suite à un acte thérapeutique, n’est

attribuable au fait du praticien car résulte aux aléas liés à toute intervention médicale.

En matière d’indemnisation, la question est de définir le régime applicable au

dommage inhérent à l’intervention médicale non à la faute médicale 632.

Concrètement, il s’agit de la réparation de l’aléa thérapeutique. La réparation de l’aléa

thérapeutique a suscité de nombreuses controverses. Le Conseil d’État et la Cour de

cassation ont eu à se prononcer sur la question. La juridiction administrative s’est

prononcée assez tôt en faveur de la réparation de l’aléa avec toutefois des conditions

strictes 633 et la Cour de cassation après avoir beaucoup résisté a admis le principe de

l’obligation de sécurité de résultat 634. Afin de garantir l’effectivité de la réparation des

dommages non imputables au fait du praticien mais inhérents à l’intervention

médicale, la loi du 4 mars 2002 instaura un fond de garanti qui indemnise au titre de

solidarité nationale ; il s’agit de l’ONIAM ou l’Office National d’Indemnisation des

Accidents Médicaux.

Après avoir identifié les caractères du préjudice réparable : actuel, certain et

inhérent à l’acte médical, il importe de ventiler les préjudices par poste, autrement dit,

procéder à un classement par catégorie.

B. La catégorisation des préjudices

117. En matière de responsabilité médicale, les dommages réparables peuvent être

classés en trois groupes : corporel, moral et patrimonial, soit un classement

tripartite (1). Ce classement permet d’établir les modalités respectives

d’indemnisation (2).

632 Auquel cas, les bases juridiques invocables sont : article 1147 du Code civil (responsabilité

contractuelle), article L. 1142-1, I du Code de la santé publique relative au principe de la responsabilité médicale pour faute et le cas échéant, l’ : article 1382 du Code civile relative à la responsabilité civile : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer »

633 Voir : n° 44, l’arrêt Cohen de 1988 et l’arrêt Bailly de 1989.

634 Voir : n° 45, l’arrêt Bonnici de 1996 et de l’arrêt Belledonne de 1998.

Page 165: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 164 —

1. Le classement tripartie des dommages corporels issus d’un accident médical

118. Lorsqu’une personne est atteinte dans sa vie ou dans son intégrité physique,

qu’elle reçoit une blessure ou contracte une maladie par le fait d’autrui, il est établi

qu’elle a subi des dommages d’ordre corporel. En matière médicale, le préjudice est à

l’évidence, corporel. En suivant, il peut engendrer un préjudice moral ou patrimonial

ou les deux à la fois. Le préjudice corporel peut matériellement s’apparenter à un

préjudice esthétique 635 ou se manifester par le handicap : préjudice d’agrément 636.

Le dommage moral découlant du préjudice corporel correspond principalement à

l’atteinte aux sentiments d’affection d’où l’appellation « pretium doloris » ou le prix de la

douleur (morale). Le droit positif malgache admet sans ambiguïté, la réparation du

pretium doloris. La TGO mentionne en son article 233 que : « Dans l’appréciation et

l’évaluation du dommage subi, les juges doivent tenir compte du préjudice direct, actuel et certain,

aussi bien matériel que moral ». Pour autant, il faut rappeler que la réparation du

préjudice moral n’a pas manqué de soulever quelques réticences doctrinales 637.

L’objection principale était que, ce dommage étant à la base extrapatrimonial, on ne

comprend pas qu’il puisse faire objet d’une réparation de nature pécuniaire. Pour

répondre à l’objection, ceux qui sont pour la réparation de préjudice moral

soutiennent que la réparation pécuniaire est une solution respectant la victime faute

de mieux. À vrai dire, si le droit a pour mission de sanctionner toute conduite

répréhensible, il lui est délicat de le faire face à un comportement exclusivement

moral. Pour résoudre le dilemme et pouvoir appliquer le principe de la réparation,

l’atteinte aux sentiments affectifs est traduite juridiquement. Tel est le sens réel de la

réparation du préjudice moral ou le pretium doloris.

Enfin, figurent les préjudices patrimoniaux résultant des dommages corporels. Les

préjudices patrimoniaux correspondent aux dépenses que la victime a dû faire face et

aux gains professionnels manqués. Les préjudices patrimoniaux sont qualifiés en

référence à la date de consolidation. Ainsi, quand ils surviennent avant la

635 Il s’agit ici de l’altération temporaire de l’apparence physique de la victime qui peut avoir des

conséquences préjudiciables liées en particulier au regard des tiers et de l’estime de soi.

636 Ce poste de préjudice cherche à réparer les conséquences du dommage qui concernent exclusivement la sphère personnelle de la victime : douleur permanente ressentie, atteinte à des organismes fonctionnels du corps ayant pour conséquence la perte de la qualité de vie, c’est-à-dire des troubles dans les conditions d’existence.

637 Voir : S. RANDRIANAHINORO, op. cit., p. 180, 181.

Page 166: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 165 —

consolidation, ils sont dits temporaires et quand surviennent après cette date, ils sont

nommés permanents.

Les préjudices patrimoniaux se lisent aisément à travers un référentiel ; la présente

étude en fera ultérieurement une proposition (n° 158). Pour le moment, il faut

souligner que le classement par catégorie : corporel, moral et patrimonial, conduit à la

mise en œuvre de l’indemnisation

2. La mise en œuvre de l’indemnisation

119. La conséquence d’un préjudice corporel à l’issue d’une intervention thérapeutique

est constitué par le déficit fonctionnel (DFP) 638 de la victime. Le DFP est établi en

pourcentage progressif en fonction de la gravité du dommage et prenant en compte

les genres des victimes (sexe). À chaque pourcentage correspondant un montant à

allouer à la victime.

Les référentiels de l’ONIAM qui suivent, explicitent le mécanisme de

l’indemnisation des préjudices corporels.

Le tableau de DFP, modèle de l’ONIAM — Homme

DFP %

Age

5 15 25 35 45 55 65 75 85 95

10 4986 20876 44656 76326 115886 163336 218676 281906 353026 432036

20 4840 19561 41004 69167 104052 145658 193985 249034 310803 379294

30 4699 18287 37464 62229 93583 128525 170055 217174 269881 328177

40 4558 17025 33958 55357 81222 111554 146353 185618 229349 277546

50 4427 15845 30680 48933 70603 95691 124197 156120 191461 230219

60 4306 14757 27658 43009 60810 81062 103765 128918 156521 186574

70 4200 13797 24991 37783 52172 68158 85741 104921 125699 148074

80 4113 13019 22831 33549 45173 57703 71139 85481 100729 116883

90 4057 12512 21421 30786 40605 50879 61608 72791 84430 96523

100 4033 12294 20818 29602 38649 47857 57626 67358 77450 87805

638 Par rapport aux actes courant de la vie quotidienne, au travail, à l’exercice d’une activité

sportive…

Page 167: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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Le tableau de DFP, modèle de l’ONIAM — Femme

DFP %

Age

5 15 25 35 45 55 65 75 85 95

10 5098 21878 47439 81780 124902 176804 237486 306949 385192 472216

20 4950 20547 43741 74553 112922 158908 212491 273671 342449 418824

30 4803 19225 40070 67337 101027 141139 187673 240630 300009 365811

40 4658 17922 36451 60244 89302 123624 163210 208061 258176 313556

50 4518 16663 32953 53387 77966 106690 139559 176573 217731 263034

60 4383 15448 29578 46772 67031 90355 116744 146198 178716 214299

70 4255 14295 26375 40495 56655 74855 95095 117375 141695 168055

80 4144 13292 23589 35034 47628 61370 76260 92299 109486 127822

90 4068 12612 21699 31330 41504 52222 63484 75289 87638 100530

100 4033 12301 20836 29639 38709 48047 57653 67526 77667 88075

Les montants sont exprimés en euros.

En droit malgache, il nous a été difficile de trouver ce type de référentiel.

Par contre, la cour d’appel de Tananarive dispose d’un barème d’indemnisation en

matière de préjudice corporel. Cet outil précieux pour le juge donne aux parties un

aperçu clair de l’estimation des doléances.

Barème indicatif d’indemnisation — Cour d’appel d’Antananarivo

ITT 10 000 AR 639 à 30 000 AR par jour

IPP 100 000 AR à 200 000 AR par jour

Pretium doloris 100 000 AR à 200 000 AR

Préjudice d’agrément 100 000 AR à 200 000 AR

Préjudice esthétique Jusqu’à 200 000 AR avec possibilité d’étudier chaque cas particulier

Veuve 2 000 000 AR à 3 000 000 AR

Enfants mineurs 1 000 000 AR à 4 000 000 AR

Enfants majeurs 1 000 000 AR à 2 000 000 AR

Majeurs indépendants 400 000 AR à 1 000 000 AR

Parents à charge 1 000 000 AR à 1 600 000 AR chacun

Grands-parents 400 000 AR à 1 000 000 AR

Collatéraux 100 000 AR à 200 000 AR

Oncles, tantes, neveux, nièces, beaux-pères, gendre, …

Appréciation souveraine du juge en fonction du préjudice

Le référentiel de la cour d’appel de Tananarive a le mérite de la clarté, ce qui est

important en matière d’indemnisation. Quant au référentiel de l’ONIAM, il est très

639 L’Ariary désigne l’unité monétaire de Madagascar. 1 Ariary est égal à 5 Francs malgaches, soit

2 500 Fmg (franc malgache) correspond à 500 Ariary ou dimy anjato Ariary, www.http://fr.wikipedia. org/wiki/Ariary.

Page 168: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 167 —

pragmatique et la formule qu’il propose est intéressante : à un âge donné correspond

un pourcentage de DFP renvoyant ensuite à un montant d’indemnisation. Pour le cas

de Madagascar, ce pragmatisme sert d’outil d’inspiration notamment dans une phase

de recherche d’une voie d’élaboration de la responsabilité médicale.

Page 169: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 168 —

PARTIE II.

LES VOIES D’ÉLABORATION DU DROIT DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE

À MADAGASCAR

Page 170: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 169 —

120. Il est inutile de souligner l’importance des bases juridiques auxquelles peuvent se

référer le régime de la responsabilité médicale malgache. Les règles qu’elles posent

répondent favorablement aux impératifs juridiques encadrant la relation médecin-

patient. Lorsque la LTGO 640 stipule en son article 204 qu’« aucune personne ne peut

échapper à sa responsabilité si son activité a entraîné un dommage pour autrui. », ne

constitue-t-elle pas un outil juridique fiable pour garantir la qualité de l’obligation

professionnelle de soigner ? Le principe de droit de gage général des créanciers sur le

patrimoine du débiteur, prévu à l’article 177 641, n’assure-t-il pas une sécurité juridique

des patients victimes de fautes professionnelles dans le cadre d’une activité médicale

et en même temps une motivation au système de prévoyance 642 pour les praticiens ?

Enfin, l’accès des créanciers à la Justice énoncé au Chapitre IV 643 de ladite loi,

ne reflète-t-il pas une référence pour organiser les opérations d’indemnisation ?

Parallèlement à la LTGO, les législations relatives au domaine médical, tels que le

Code de la santé publique 644 et le Code de déontologie médicale 645, sont tout aussi

importantes. En effet, les stipulations relatives à l’exercice de la profession médicale,

paramédicale et médecine traditionnelle, prévues au Livre II du Code de la Santé,

incarnent la volonté d’encadrer l’exercice de l’activité médicale. Quant à la théorie des

devoirs professionnels du médecin, édictée par le Code de déontologie, elle guide les

médecins dans leur pratique quotidienne et elle sert de référence normative pour les

instances disciplinaires voire juridictionnelle.

En somme, les bases juridiques pouvant régir la relation médicale sont solides.

La LTGO, le Code de la santé publique et le Code de déontologie sont en mesure

640 La loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 dite « Loi sur la théorie générale des obligations » avait pour ambition

d’édifier un droit malgache des obligations, lequel avant 1960 se résumait à la somme de jurisprudences claniques, royales et coloniales. La LTGO traite des principes et des valeurs morales régissant les liens entre les personnes tel que le respect de la parole donnée dans le contrat (correspondant à l’article 1134 du Code civil français), ou encore le devoir de réparer les dommages causés à autrui. La LTGO, était précédée de l’ordonnance n° 62. 037 régissant l’« Obligation », ses modalités, son exécution et son extinction. L’ordonnance de 1962 avait posé également, le principe du droit de gage général des créanciers sur le patrimoine du débiteur et traitait des obligations civiles indépendamment de leurs sources. Bref, il s’agit d’une ordonnance applicable à tous les contentieux en matière civile y compris médical.

641 Article 177 de la LTGO : « En cas d’inexécution totale ou partielle d’une obligation contractuelle, ou d’exécution tardive, le débiteur doit réparer le préjudice causé de ce fait au créancier ».

642 Autrement dit, une incitation à la souscription de contrat d’assurance responsabilité civile professionnelle.

643 Chapitre IV, « De l’exécution en nature ou par équivalent », articles 51 à 56 de la TGO.

644 Le Code de la santé publique établie par la loi n° 2011-002 du 15 juillet 2011.

645 Le décret n° 2012-0632 portant Code de déontologie médicale.

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— 170 —

d’encadrer la relation médicale et ses composants. Néanmoins dans une période de

changement des mentalités dû pour une grande partie aux progrès scientifiques

considérables, il est intéressant de savoir si les principes érigés par ces corpus

juridiques, sont toujours d’acuité. Actuellement, on peut dire que leurs dispositions

constituent une véritable compilation juridique où le principe du consensualisme,

la liberté contractuelle et de la force obligatoire des conventions trouvent à

s’affirmer. Oui, toutes ces dispositions garantissent l’effectivité de l’échange mutuel

de devoirs et droits des parties : médecin-patient.

La LTGO, le Code de la santé publique et le Code de déontologie constituent

ainsi un corpus juridique très actuels par rapport au droit de la responsabilité

médicale malgache. Pour autant, la perspective d’une spécialisation en droit de la

responsabilité n’est pas dépourvue d’intérêt. Dans la perspective d’élaborer un droit

de la responsabilité civile médicale, l’objectif est de proposer un système normatif qui

réussit au mieux la réparation du préjudice dans un espace géographique donné, en

l’occurrence, Madagascar. Atteindre cet objectif, c’est permettre aux victimes de

poursuivre leur vie d’une manière digne malgré la survenance du dommage 646. Bien

qu’en France, le mécanisme indemnitaire a connu un développement

considérable 647, le mécanisme d’indemnisation à Madagascar ne saurait être entendu

comme tel. Ceci parce que le droit médical français a fait l’objet de critiques

doctrinales qu’il faut considérer. Par conséquent, bien que son usage en tant que

source d’inspiration reste conseillé 648, il doit se faire avec précaution (Titre II). Avant

toute tentative de transposition, il importe de décortiquer les régulateurs sociaux

pouvant répondre aux attentes du droit à la réparation : les voies amiables et (ou) les

voies contentieuses (Titre I) ?

646 M. A. CECCALDI, Voie amiable ou contentieuse : quelle orientation entre droit commun et droit spéciaux ?,

Gazette du Palais 17, 18 avril 2009, p. 39.

647 Voir : n° 14, 15 et n° 44 et 45.

648 La loi du 4 mars 2002 a réformé positivement le droit de la responsabilité médicale malgré les quelques réserves émis, voire : n° 20.

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— 171 —

TITRE I.

VOIE AMIABLE, VOIE CONTENTIEUSE : QUELLE OPTION POUR LE DROIT MÉDICAL MALGACHE ?

Page 173: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 172 —

121. « Voie amiable, voie contentieuse, quelle option pour le droit médical malgache ? » 649,

l’interrogation suppose de connaître, laquelle des deux se rapproche plus d’une

compensation équitable en matière indemnitaire. Le principe fondateur étant

« la réparation intégrale du préjudice », l’option doit être celle qui permet de rétablir

pleinement la victime de ses préjudices. Toutefois, reste à préciser que « plénitude de

dédommagement » ne signifie pas « plénitude financière ». Dès lors, on ne saurait accorder

l’exclusivité aux compensations pécuniaires. Mais indépendamment de la nature de la

compensation, il importe de retenir qu’existe une modalité d’apaisement des

différends : le règlement amiable des conflits 650 . En évitant le caractère public du

procès 651 ; le règlement amiable épargne des atteintes pouvant nuire à la réputation

du soignant et de la violation de l’intimité du patient. En tout cela, le règlement

amiable permet de maintenir la qualité relationnelle des parties pour l’avenir.

Considérant les avantages du règlement amiable, son application au sein de la

discipline indemnitaire est recommandée (Chapitre I). Dans le cas où cette catégorie

de règlement échoue, on est contraint de recourir à la résolution pécuniaire. Bien

évidemment, il est difficile d’imaginer qu’un préjudice moral résultant d’un dommage

corporel ou patrimonial puisse être effacé par une somme d’argent. La perte d’un être

cher ou l’atteinte à l’intégrité corporelle suite à un accident médical, ne sauraient être

compensées par un apport financier. Mais si la compensation d’ordre pécuniaire

n’efface pas le préjudice moral ; il faut rappeler que « réparer n’est pas effacer ».

Le versement d’une somme d’argent peut signifier autre chose pour la victime qu’un

simple effacement du vécu. Par ailleurs, le juge ne peut se dérober de se prononcer

en matière de réparation en responsabilité 652. En somme, sur le plan juridique,

la réparation pécuniaire issue de la voie contentieuse reste légitime. Seulement, pour

un pays où la limite financière des justiciables et l’impératif de ne pas bousculer

649 Expression inspirée par M. A. CECCALDI, Voie amiable ou contentieuse : quelle orientation entre droit

commun et droit spéciaux ?, Gazette du Palais 17, 18 avril 2009, p. 39.

650 Par opposition au règlement contentieux.

651 M. G HOFNUNG, Les modes alternatifs des règlements de conflit, in, L’expertise médicale, en responsabilité médicale et en réparation d’un préjudice corporel, J. HUREAU, D. POITOUT, préf. P. Sargos, éd., Masson, 2e éd. 2005, p. 16.

652 L’article 5 du nouveau Code de procédure civile pose d’abord le principe d’interdiction faite au juge de modifier l’objet du litige. Il énonce que « le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement ce qui est demandé ». C’est le principe d’interdiction faite au juge de statuer infra ou ultra petita. Si le juge ne se prononce pas sur la totalité de la prétention d’une partie, on pourra lui enjoindre, une requête sur une omission de statuer. Ensuite, l’article 5 du nouveau Code de procédure civile pose la règle selon laquelle, le juge ne peut refuser de répondre aux conclusions des parties. En somme, sous peine de déni de justice, le juge est tenu de trancher le litige qui lui est soumis.

Page 174: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 173 —

les ressources humaines qualifiées 653, sont une réalité, il convient d’ajuster

l’estimation financière de l’indemnité (Chapitre II).

653 Les besoins en médecins se font sentir de plus en plus pour Madagascar. La crise de 2009 a sclérosé le pays, in,

Médecins du monde, Des besoins accrus pour Madagascar, L’Express de Madagascar, 1 septembre 2011, n° 5009. Ce qui implique une attention particulière dans l’évaluation des indemnités à la charge des professionnels au risque de les démotiver.

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CHAPITRE I.

LE DÉPLOIEMENT DES RÉSOLUTIONS AMIABLES EN CAS D’ACCIDENTS MÉDICAUX

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— 175 —

122. Les résolutions amiables conduisent à un règlement de conflit par la recherche

d’une entente entre les parties. Elles se matérialisent à travers différents dispositifs

dont il faut relever d’emblée, les nuances. D’abord, il y a la médiation définie comme

« tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties

tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un

tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige » 654.

Ensuite, il y a la négociation. À la différence de la médiation, le tiers intervenant

dans ce processus n’est pas neutre. Le négociateur agit en faveur d’une d’une partie.

Il essaiera dans ses arguments d’aboutir à une solution donnant satisfaction à la partie

qu’il représente. Dans la médiation, l’accord est communément à chercher, dans la

négociation, une proposition est avancée par le négociateur. Malgré ce point de

divergence, il faut dire que l’accord recherché dans la médiation peut s’inspirer des

approches de la négociation issues soit par le principe du « gagnant-gagnant » 655 soit

par le principe de « négociation contributive » 656. L’objectif étant d’établir la transaction la

plus satisfaisante pour les parties.

Ensuite, il y a la conciliation. La différence avec la médiation, réside également dans

le rôle assumé par le tiers. Contrairement au médiateur qui cherche avec les parties

un accord, le conciliateur est lui-même en mesure de proposer des solutions aux

parties. Mais à la différence du négociateur, le conciliateur reste neutre. Enfin, à la

différence de la médiation qui est à titre onéreux, la conciliation est supposée être un

recours gratuit.

654 Ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive

2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale.

655 Un accord gagnant-gagnant (win-win en anglais) est un accord par lequel chaque partenaire veille sur l’intérêt de l’autre, d’une façon bien entendu favorable à son propre intérêt. Il ne s’agit pas de rechercher le meilleur compromis de partage des gains, mais de trouver un accord qui favorise la situation respective des partenaires.

656 La négociation contributive est une pratique utilisée dans le cadre de la médiation professionnelle. L’objectif est d’établir un accord réussi et équitable. La négociation envisage également (par rapport à la médiation) la réussite de l’autre partie. Pour la négociation contributive, la qualité des relations entre les parties dépend de la règle selon laquelle, la réussite d’une partie ne doit pas se faire aux dépens de l’autre. Force est de constater que la subtilité avec l’accord gagnant-gagnant est très fine. La différence notable entre les deux est que pour l’accord gagnant-gagnant, l’objectif est d’optimiser le gain pour que chaque partie retrouve plus d’avantages ; alors que pour la négociation contributive, c’est la qualité du compromis qui prime ; l’objectif étant d’accorder un traitement égalitaire des parties, http://fr. wikipedia. org.

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— 176 —

Le dernier dispositif est l’arbitrage. L’arbitrage est une procédure au sein de laquelle le

litige est soumis par convention 657 établie par les parties, à un ou plusieurs arbitres

qui rendent une décision contraignante. Ainsi, à la différence du médiateur qui

cherche avec les parties un accord, l’arbitre rend une décision qui s’impose aux

parties.

En droit processuel, le Code de procédure civile malgache et français préconise

la conciliation 658 et l’arbitrage 659 comme modes de résolutions amiables. Ces deux

modes seront étudiées en comparaison avec la médiation ; mode de résolution de

conflit existant uniquement en droit processuel français (Section I). Sur la base de

cette étude comparative, nous étudierons la possibilité d’intervention du législateur

pour une loi relative à la résolution amiable des conflits médicaux à

Madagascar (Section II).

657 La convention arbitrale ou la convention compromissoire est prévue à l’article 439. ali. 1e r du

Code de procédure civile malgache et à l’article 1442 du Code de procédure civile français. Et l’article 1450 du nouveau Code de procédure civile prévoit que : « Les parties ont la faculté de compromettre même au cours d’une instance déjà engagée devant une autre juridiction ».

658 Art 154 du Code de procédure civile malgache et article 1528 du Code de procédure civile française. Pour aller plus loin, voir : Livre V, intitulé : « La résolution amiable des différends ».

659 Art. 439 du Code de procédure civile malgache et articles 1442 et suivants du Code de procédure civile français.

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— 177 —

SECTION I. L’ÉTUDE COMPARÉ DES MODES DE RÉSOLUTION AMIABLE DES CONFLITS

123. Les modes de résolution amiable des conflits existant à Madagascar sont :

La conciliation 660 et l’arbitrage 661. Pour mieux les appréhender, nous allons étudier

chacune successivement en comparaison à la médiation dans la mesure où ce mode

de résolution des conflits manque encore au droit malgache.

§ 1. La conciliation et la médiation

§ 2. L’arbitrage et la médiation

§ 1. LA CONCILIATION, LA MÉDIATION

124. La procédure de « médiation » n’existe pas dans le Code de procédure civile

malgache. Pour autant, lorsqu’on se penche sur les dispositions du droit français qui

la mentionnent, on remarquera qu’aucune différence notable n’existe entre

« médiation » et « conciliation ». Dès lors, la question se pose si au final la

« conciliation » inscrite dans le Code de procédure civile malgache vaut « médiation »

(A). Quoi qu’il en soit, la procédure de conciliation est très importante ; elle permet

de gérer les hypothèses où toutes les voies de recours sont épuisées (B).

A. Conciliation-Médiation : modes équivalentes de règlement de conflit ?

125. Le Code de procédure civile français bien que prévoyant la médiation et la

conciliation, n’opère pas réellement une différence notable entre eux. Il décrit les

deux notions dans une seule définition : « La médiation et la conciliation conventionnelles

régies par le présent titre s’entendent, […], de tout processus structuré, par lequel deux ou plusieurs

parties tentent de parvenir à un accord, en dehors de toute procédure judiciaire en vue de la résolution

amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers choisi par elles qui accomplit sa mission avec

impartialité, compétence et diligence » 662. De cette définition globale, il peut être conclu

que l’absence du terme « médiation » au sein du Code de procédure civile malgache ne

660 Art 21.du Code de procédure civile malgache.

661 Art 439 du Code de procédure civile malgache.

662 Article 1530 du Code de procédure civile français.

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— 178 —

constitue pas forcément un vide juridique puisqu’au final, elle s’y retrouve dans le

sens accordé à la conciliation 663. Cependant bien que l’on puisse admettre la « non

nécessité » de rajouter des dispositions relatives à la médiation au sein du Code de

procédure civile malgache, on ne peut négliger la portée limitée des dispositions

relatives à la conciliation qui y sont inscrites. L’article 21 du Code de procédure civile

malgache dit : « Il entre dans la mission du juge de concilier les parties ». Cette disposition

signifie-t-elle que seul le juge peut assumer la mission de conciliation ou que d’autres

personnes peuvent l’assumer ? En droit français, le décret n° 78-381 du 20 mars

1978, modifié par celui du 20 janvier 2012, a institué expressément des conciliateurs

de justice ayant pour mission de rechercher le règlement amiable d’un différend dans

les conditions et selon les modalités prévues au Code de procédure civile 664.

La démarche d’instituer explicitement des conciliateurs de justice, mérite d’être

adopté par le Code de procédure civile malgache ; notamment au Chapitre premier,

Section VIII, intitulé : « De la conciliation ». Et que les dispositions concernées, soient

complétées de la description de la mission du conciliateur, des différentes modalités

de conciliation avec les conditions de sa mise en œuvre.

Concernant ces dispositions relatives au statut juridique du conciliateur de justice,

le droit français donne des indications bien fournies. Il dit que le statut juridique du

conciliateur varie en fonction du mode d’intervention, laquelle peut se réaliser par

intégration dans un processus judiciaire ou par saisine directe dite conventionnelle.

L’intégration du conciliateur dans un processus judiciaire 665 conduit à deux statuts

probables : soit il est juge donc magistrat, soit il est délégué auquel cas, c’est un

auxiliaire de justice. Quant à la saisine directe dite aussi conciliation conventionnelle,

il est caractérisé par la grande diversité des tiers intervenants au titre de conciliateur.

D’abord les parties peuvent trouver elles-mêmes, une transaction pour résoudre leurs

différends. Le droit français nomme ce type de conciliation « procédure participative

663 Du moins tel qu’elle est définie par le droit français : article 1530 du Code de procédure civile

français.

664 La conciliation s’intègre dans une large panoplie de modes alternatifs de résolution des conflits : la conciliation par le juge : articles 21, 127 à 137 du Code de procédure civile, la conciliation assumée par un conciliateur de justice : article 830 à 836 ; la transaction à l’initiative des parties : articles 2244 et suivants du Code civil ; article 1441-4 du Code de procédure civile et la procédure participative conventionnelle, éventuellement suivie d’une procédure participative aux fins de jugement : articles 1542 à 1559 du Code de procédure civile.

665 Ce dernier mode d’intervention est mentionné dans le Code de procédure civile malgache : article 21, ali. 1e r mais nécessite quelques déploiements.

Page 180: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 179 —

conventionnelle » 666. Ensuite, il y a le cas où le conciliateur est une tierce présentant un

lien avec les parties en litige 667. Correspondent par exemple à ce profil, les services

juridiques internes d’entreprises tels que le service juridique de Centre hospitalier

universitaire (CHU) ou de clinique en cas de contentieux médical au sein de

l’établissement, les services des consommateurs pour les litiges d’ordre commercial...

Il est aussi envisageable de compter sur l’aide d’un « médiateur conventionnel » 668. Enfin,

la conciliation peut se faire avec l’aide d’un conciliateur de justice.

Maintenant pour revenir à la question initiale : « Conciliation-Médiation : modes

équivalentes de règlement de conflit ? », il nous semble que la réponse est affirmative.

Dès lors le Code de procédure civile malgache mentionnant la « conciliation », est en

mesure sous réserve de quelques rajouts, de servir de dispositif de résolution amiable

des différends.

Conscient certainement de l’efficacité de la conciliation, le droit médical français a

pris l’initiative de le transposer dans le système de réparation des accidents médicaux.

Cette transposition est particulièrement opportune lorsque faute d’atteindre le

minimum de seuil de gravité, la victime ne peut avoir accès à la réparation au titre de

solidarité nationale proposée par le fonds de garantie, l’ONIAM.

666 « La convention de procédure participative est une convention par laquelle les parties à un différend qui n ’a pas

encore donné lieu à la saisine d’un juge ou d’un arbitre, s’engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend » : article 2062 du Code civil français. La procédure participative est établie aux fins de jugement, voir : article 1556 du Code de procédure civile français : « À l’issue de la procédure conventionnelle […], le juge peut être saisi de l’affaire, selon le cas, pour homologuer l’accord des parties mettant fin en totalité au différend, pour homologuer un accord partiel des parties et statuer sur la partie du litige persistant ou pour statuer sur l’entier litige » ; voir : aussi, article 1441-4 du Code de procédure civile : « Le président du tribunal de grande instance, saisi sur requête par une partie à la transaction, confère force exécutoire à l’acte qui lui est présenté ». La procédure d’homologation est prévue à l’article 1557 du Code de procédure civile. Pour l’homologation de l’accord partiel, voir : l’article 1560 du Code de procédure civile. La requête conjointe pour saisine du juge contient, à peine d’irrecevabilité les points faisant l’objet d’accord entre les parties et dont elles demandent au juge l’homologation ; les points des divergences accompagnés des moyens de fait et de droit sur lesquels s’appuient les prétentions respectives.

667 Un tiers non indépendant des parties.

668 La fonction a beaucoup évolué en raison de la transposition de la Directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale.

Page 181: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 180 —

B. La conciliation : mode alternatif à la réparation au titre de solidarité nationale de l’ONIAM

126. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de

santé, a mis en place une procédure de règlement amiable 669 permettant aux victimes

d’accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales, de résoudre

par voie transactionnelle leurs différends vis-à-vis du corps médical. Réalisée en

dehors d’un cadre juridictionnel, la procédure de règlement amiable adoucit les

tensions nées à l’avènement d’accidents médicaux. Grâce à ce type de procédure, les

victimes peuvent s’adresser aux organismes d’indemnisation 670. La recevabilité des

saisines reste sous la responsabilité Commission régionale de conciliation et

d’indemnisation ou la CRCI671 qui est devenue depuis le décret du 2 mars 2012, la

CCI et le versement d’indemnités aux victimes d’accidents médicaux incombe à

l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux ou l’ONIAM. L’étude de la

recevabilité des saisines faite par la CCI, se réalise avec l’aide de l’expert à qui il

revient d’apprécier médicalement 672 l’existence d’une faute médicale, d’en établir le

lien de causalité avec le dommage et d’évaluer le seuil de gravité dudit dommage. En

fonction des éléments fournis par l’expert, l’avis de la CCI aboutit à deux

éventualités : La première éventualité est celle où la CCI estime que le dommage

constaté engage la responsabilité du praticien dans les conditions de l’article L. 1142-

1 I du Code de la santé publique (faute médicale et lien de causalité). L’avis est alors

adressé à l’assureur du responsable. Ce dernier est tenu de faire une offre

d’indemnisation 673. Si le payement est fait alors qu’au final, la responsabilité de

l’assuré n’est pas engagée, l’assureur dispose d’une action subrogatoire soit contre le

669 Article L.1142-4 à L. 1142-8 du Code de la santé publique

670 La procédure de règlement amiable repose sur trois institutions créées par la loi du 4 mars 2002 : l’Office national d’indemnisation des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), la Commission nationale des accidents médicaux (CNAM) et les Commissions régionales de conciliation et d’indemnisation (CRCI). Pour aller plus loin, voir : A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd., Thémis droit, Puf, 2009, p. 535.

671 La CRCI peut être saisie par toute personne s’estimant victime d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, ou, le cas échéant, par son représentant légal. Elle peut également être saisie par les ayants droit d’une personne décédée à la suite d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soins.

672 Autrement dit objectivement, voir : n° 100 et s.

673 Art. L. 1142-14 Code de la santé publique. L’assureur du responsable dispose de quatre mois pour présenter son offre d’indemnisation. L’offre doit être naturellement dans la limite des plafonds de garantie des contrats d’assurance. Si la victime estime l’offre insuffisante, elle peut saisir le juge lequel s’il constate l’insuffisance, obligera l’assureur à verser à l’Office une somme au plus égale à 15 % de l’indemnité qu’il alloue à la victime. L’acceptation de l’offre de l’assureur vaut transaction au sens de l’article 2044 du Code civil.

Page 182: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 181 —

tiers responsable, soit contre l’Office national d’indemnisation au cas où, les

dispositions du II de l’article L. 1142-1 du Code de la santé publique trouvaient à

s’appliquer (seuil de gravité rempli bien qu’il n’y ait pas de faute médicale).

En somme, le bénéfice de la réparation au titre de la solidarité nationale de

l’ONIAM reste soumis aux conditions suivantes :

— que les dommages résultant d’accidents médicaux ne soient pas fautifs,

— qu’ils puissent découler d’une manière certaine de l’acte thérapeutique (lien de

causalité entre acte médical et dommages) 674

— et qu’ils puissent représenter un seuil de gravité et d’anormalité 675 légalement

prévue.

Il arrive que certaines victimes ne soient pas en mesure de remplir les critères de

gravité. Pour pallier l’impasse, la loi a mis en place, un alternatif à la procédure du

règlement amiable de l’ONIAM : la procédure de conciliation conduite par la

674 « Lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme […] ou d’un producteur

de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins […] », article L.1142-1-II du Code de la santé publique.

675 Les critères de gravité et d’anormalité sont prévus à l’article L.1142-1-II du Code de la santé publique. Le critère d’anormalité aborde une notion qualitative : l’état de santé du patient par rapport à son état d’avant l’accident et par rapport à l’évolution prévisible de cet état initial. On parle alors de conséquences anormales au regard de l’état antérieur et de l’évolution prévisible. Par cette logique, la notion d’anormalité opère une distinction entre ce qui est imputable à l’accident médical et ce qui résulte de l’évolution de la pathologie du patient. Par ailleurs, la notion d’anormalité prend en compte la notion de « risque imprévisible » de cause inconnue ou connue mais dont la réalisation est exceptionnelle. En réalité, la notion d’anormalité ne peut s’apprécier que in concreto (maladie soignée, traitement pratiqué, état antérieur du malade…), voir : M. GERMOND, L’indemnisation de l’aléa thérapeutique par les compagnies d’assurances, in l’indemnisation de l’aléa thérapeutique, sous la coordination de D. TRUCHET, éd., Sirey, D.S.S, 1995, p. 60. Le critère de gravité aborde quant à lui, une notion quantitative : le « seuil » de gravité. Ainsi, il est établi que « Seuls les dommages présentant un seuil de gravité fixé par décret sont pris en compte par la solidarité nationale ». Afin de ne pas écarter du dispositif d’indemnisation à un nombre trop important de victimes, le législateur a prévu que le seuil de gravité, ne pourrait être supérieur à 25 %. Il a été fixé à 24 %. Autrement dit, les victimes d’accidents non fautifs dont le préjudice est supérieur ou égal à 24 % pourront être indemnisées par la solidarité nationale. Le critère de gravité est également rempli lorsque la durée de l’incapacité temporaire de travail résultant de l’accident médical, de l’infection iatrogène ou de l’infection nosocomiale est au moins égale à six mois consécutifs ou six mois non consécutifs d’une période de douze mois. Enfin, le critère de gravité est exceptionnellement retenu lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l’activité professionnelle qu’elle exerçait avant la survenance de l’accident médical, […] le tout occasionnant des troubles particulièrement graves dans les conditions d’existence : article D. 1142-1 du Code de la santé publique. Plus généralement, l’appréciation du caractère de gravité s’opère en tenant compte notamment du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire, article L. 1142-1 II du Code de la santé publique.

Page 183: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 182 —

Commission. La formation de conciliation constitue ainsi la deuxième éventualité que

propose la Commission. La Commission la propose quand le dommage n’engage pas

la responsabilité du praticien mais faute de remplir les critères la victime n’a aucune

voie de recours. Bien que les cas où la fermeture des voies de recours est rare,

il importe de savoir que la formation de conciliation reste accessible par toute

personne s’estimant victime d’un dommage imputable à une activité de prévention,

de diagnostic ou de soins 676.

En somme, ce que l’on pourrait retenir de la conciliation faisant partie des

procédures mentionnées dans le Code de procédure civile malgache 677, est qu’elle

joue un rôle fondamental en matière de résolution des conflits : veiller à l’avenir des

victimes ne bénéficiant d’aucune voie de recours. En tant que telle, elle présente bien

souvent l’intérêt de clore à l’amiable et rapidement une situation difficile 678.

Parallèlement à la procédure de conciliation, le droit malgache préconise

l’arbitrage. Nous allons étudier cette procédure dans le même esprit avec lequel nous

avons abordé la conciliation, c’est-à-dire en comparaison avec la médiation.

§ 2. L’ARBITRAGE, LA MÉDIATION

127. L’arbitrage est une procédure dans le cadre de laquelle les parties à un contrat

conviennent de soumettre à un ou plusieurs arbitres 679 un litige relatif au contrat 680.

La décision des arbitres a une force contraignante. En cela, l’arbitrage diffère de la

médiation où la solution transactionnelle est communément recherchée par les

parties et le tiers intervenant au titre de conciliateur. Les subtilités entre la médiation

et l’arbitrage ne se limitent pas au processus d’aboutissement de la décision

transactionnelle. Il convient de les étudier (A). L’intérêt d’étudier en parallèle les deux

676 « Toutefois, la voie du règlement amiable n’étant ouverte qu’aux victimes dont le dommage présente un seuil de

gravité suffisant, le législateur a introduit une procédure de conciliation pour les victimes qui ne présentent pas le seuil de gravité suffisant n’optent pas pour la voie judiciaire, et se voient donc refuser la voie du règlement amiable… », voir : A. LAUDE, B. MATHIEU et, D. TABUTEAU, op. cit., p. 534. Le cas échéant, la saisine de la CRCI en formation de conciliation peut être accomplie par le représentant légal ou les ayants droit.

677 Art 21 du Code de procédure civile malgache.

678 L’intérêt majeur de la conciliation est sa compétence large ; en tant que règlement transactionnelle, la conciliation ne conditionne pas son intervention à un seuil de gravité, L. DUBOUIS, La réparation des risques sanitaires, R.D.S.S. 2002, p. 803 et s., spéc. p. 812.

679 Sur la désignation de l’arbitre, voir : articles 441, 442 et 443 du Code de procédure civile malgache.

680 Article 439, 439.1 et 453. 1 du Code de la procédure civile malgache.

Page 184: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 183 —

modes de résolution, est de pouvoir apprécier leur opportunité respective en cas de

différend lié à un accident médical (B).

A. Les subtilités entre la médiation et de l’arbitrage

128. Tout comme la médiation, l’arbitrage est un mode alternatif de résolution des

conflits sauf qu’au lieu et place du médiateur, il s’agit de l’arbitre 681. La procédure

d’arbitrage débute par la manifestation des parties de leur volonté de soumettre leur

litige à cette forme de règlement. La manifestation de volonté se matérialise par le

biais d’un contrat doté de la force obligatoire de l’article 1134 du Code civil 682

appelée : clause compromissoire 683. La clause compromissoire régit à l’avance un litige

encore inexistant 684 en convenant que si une contestation survient, elle devra être

tranchée par arbitrage 685 et non par voie judiciaire 686. La clause compromissoire

présente une autonomie juridique par rapport au contrat dans lequel elle s’intègre en

l’occurrence, le contrat médical supposant l’obligation médicale de soigner

consciencieusement. Analysée dans le cadre du contrat médical, la clause

compromissoire constitue alors, la convention par laquelle, les parties en cas de

différends d’ordre médical acceptent de soumettre leur désaccord à un ou plusieurs

arbitres. Afin de permettre à l’arbitre de rechercher les résolutions, les parties doivent

dans le délai fixé par le tribunal arbitral, énoncer les questions litigieuses et les

681 La désignation des arbitres est soumise au principe d’égalité des parties, qui est d’ordre public,

Cass. civ. 1ère, 7 janvier 1992.

682 Ce contrat constitue la convention d’arbitrage qui revêt la forme d’une clause compromissoire, article 439 du Code de procédure civile malgache.

683 Une clause compromissoire doit être écrite à peine de nullité, article 453.2 du Code de procédure civile malgache correspondant à l’article 1443 du Code de procédure civile français. La clause compromissoire désigne le ou les arbitres ainsi que les modalités de leur désignation, article 440. 2 du Code de procédure civile malgache.

684 Article 439.1 et 453. 1 du Code de la procédure civile malgache correspondant à l’article 1442 du Code de procédure civile français. La clause compromissoire est aussi opérante pour les litiges en cours d’instance. « Les parties ont la faculté de compromettre même au cours d’une instance déjà engagée devant une autre juridiction », article. 439. 2 et 453 du Code de procédure civile malgache.

685 Article 439, 439.1 et 453. 1 du Code de la procédure civile malgache.

686 Au départ, la clause compromissoire a été réservée à la discipline commerciale, d’ailleurs elle est toujours mentionnée à l’article 1721-3 du Code de commerce français : « Les tribunaux de commerce connaissent : 1. Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, […], 2. De celles relatives aux actes de commerce entre toute personne. Toutefois, les parties peuvent, au moment où elle contractent, convenir de soumettre à l’arbitrage les contestations ci-dessus énumérés ». Avec la modification de l’article 2061 du Code civil, l’arbitrage s’est étendu aux litiges entre professionnels de nature civile (n° 128 sur la définition de la clause compromissoire).

Page 185: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 184 —

éléments 687 de la conclusion dont elles se sont mises d’accord. Le tribunal arbitral

décide si la procédure doit comporter des phases orales pour l’apport des preuves ou

pour l’exposé des arguments 688. À l’issue de la confrontation des arguments, des

écrits et des pièces à l’appui des allégations, l’arbitre intervient, pour prendre des

décisions qui engagent les deux parties 689.

Considérant le déroulement de l’arbitrage, il peut être déduit que l’esprit qui l’anime

ne rejoint pas tout à fait celui de la médiation 690. Le médiateur ne tranche pas du

litige car sa mission consiste à inviter les personnes à renouer le dialogue, à

confronter leurs points de vue, et à rechercher avec elles les bases d’un accord

durable et acceptable en fonction des intérêts de chacun. Si le médiateur ne dispose

pas de pouvoir d’instruction, il peut néanmoins avec l’accord des parties et pour les

besoins de la procédure, entendre les personnes qui y consentent 691.

Si le processus pour arriver à la résolution diffère entre médiation et arbitrage ; la

portée de leur force exécutoire est la même. En effet, de même que la sentence

arbitrale lie les parties 692, la transaction issue d’une médiation a l’autorité de la chose

jugée par rapport à la contestation qu’elle tranche 693. Autrement formulé, la décision

arbitrale tout comme la transaction, empêche les parties de recommencer un nouveau

procès qui porterait sur un différend qui aurait été déjà tranché 694. Pour précision, la

force exécutoire de la sentence arbitrale est validée par l’exéquatur 695 prononcé par le

687 Tous les moyens que les parties jugent pertinents et pouvant servir de preuves à leurs arguments,

article 460.1, ali 3 du Code de procédure civile malgache.

688 Article 460. 1 du Code de procédure civile malgache.

689 « La sentence est rendue par écrit signée de l’arbitre ou des arbitres (s’ils refusent de signer, mention doit en être faite)…) La sentence est motivée (contenir un exposé succinct des prétentions respectives des parties et de leurs moyens de droit) ;, datée du jour à laquelle elle est rendue et marquée du lieu de l’arbitrage déterminé conformément au paragraphe 1 de l’article 458. 1. […] », article 449, ali. 2, 3 et 4 du Code de procédure civile malgache. Elle mentionne le nom des arbitres, la date et le lieu où la sentence a été rendue, l’identité des parties et de leurs conseils, article 449 3. Après le prononcé de la sentence signifiant la clôture de la procédure arbitrale, une copie signée par l’arbitre ou les arbitres est remise à chacune des parties », article 461.3 et suivants du Code de procédure civile malgache.

690 La médiation, voir : articles 131-1 à 131-15 du Code de procédure civile français : « Le juge saisi d’un litige peut, après avoir recueilli l’accord des parties, désigner une tierce personne afin d’entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour leur permettre de trouver une solution au conflit qui les oppose ».

691 Article 131-8 du Code de procédure civile français.

692 En tant que solution contractuelle

693 Art. 2052 du Code civil français et article 449. 8 du Code de procédure civile malgache.

694 Enfin, reste à noter que la sentence arbitrale suivie de l’exéquatur et la médiation homologuée sont toutes deux, opposables aux tiers, Com., 7 janvier 2004, Bull. civ. IV n° 4.

695 L’« exequatur » est une procédure permettant de rendre exécutoire une sentence arbitrale. Ainsi, « La sentence arbitrale n’est susceptible d’exécution forcée qu’en vertu d’une décision d’exequatur. L’exequatur est

…/…

Page 186: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 185 —

Tribunal de grande instance. L’exéquatur a comme équivalence dans le cadre d’une

médiation, l’homologation 696.

Face aux nuances entre arbitrage et médiation, il importe de mesurer leur

opportunité respective en matière de responsabilité médicale. Étant donné que la

médiation se rapproche de la procédure de conciliation 697, son efficacité en tant que

résolution alternative des conflits médicaux, n’appelle pas de remise en cause. Qu’en-

est-il de l’arbitrage ?

B. L’opportunité de l’arbitrage dans la résolution des différents d’ordre médical

129. L’article 439 du Code de procédure civil malgache précise que l’arbitrage est

destiné à certaines catégories de litiges ; autrement dit, certains conflits ne se prêtent

pas aisément à ce genre de dispositif 698. La question qui nous intéresse est : « Qu’en-

est-il des litiges relatifs aux accidents médicaux ? ».

Depuis la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001, le dispositif « arbitrage » s’est répandu à

d’autres domaines que la discipline commerciale. Le législateur en réécrivant

l’article 2061 du Code civil 699, en a étendu l’accès aux litiges de nature civile entre

professionnels. L’article concerné dispose que : « Sous réserve des dispositions législatives

particulières, la clause compromissoire est surtout valable dans les contrats conclus à raison d’une

activité professionnelle ». Il résulte de ces dispositions qu’en matière de conflits médicaux,

le dispositif d’arbitrage est opérant. Cependant bien que l’arbitrage soit légalement

applicable aux conflits liés à l’exercice de l’activité médicale, son opportunité pratique

accordé par une ordonnance du président du tribunal de première instance dans le ressort duquel elle a été rendue […]. À cet effet, la minute de la sentence accompagnée d’un exemplaire de la convention d’arbitrage est déposée par l’un des arbitres ou par la partie la plus diligente au secrétariat de la juridiction », article 451 du Code de procédure civile malgache correspondant à l’article 1477 du Code de procédure civile français.

696 L’article 131-11 du Code de procédure civile mentionne : « À l’expiration de sa mission, le médiateur informe par écrit le juge de ce que les parties sont ou non parvenues à trouver une solution au conflit qui les oppose. Le jour fixé, l’affaire revient devant le juge ». Et l’article 131-12 continue : « Le juge homologue à la demande des parties l’accord qu’elles lui soumettent ».

697 Voir : n° 125, « Conciliation-Médiation : modes équivalentes de règlement de conflit ? ».

698 Et que certaines disciplines en sont totalement exclues. On ne peut compromettre sur : les questions concernant l’ordre public (au sens du droit international privé) ; les questions relatives à la nationalité ; les questions relatives au statut personnel, à l’exception des litiges d’ordre pécuniaire qui en découlent ; les litiges concernant l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics (à l’exception des litiges découlant de rapports internationaux d’ordre économique, commercial ou financier …), voir : article 440.1 et article 453.1 du Code de procédure civile malgache.

699 Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 . art. 126 JORF du 16 mai 2001.

Page 187: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 186 —

appelle à analyser d’autres appréciations telles que la durée de la procédure ; les voies

de recours et le caractère onéreux ou pas du dispositif.

Concernant la durée de la procédure, c’est un élément capital dans l’appréciation du

dispositif à entreprendre ; « autant que faire se peut », il convient d’opter pour un

dispositif permettant de clore rapidement une situation difficile. En vertu de

l’article 448 du Code de procédure civile malgache, la durée de la procédure arbitrale

est de six mois à compter du jour où le dernier arbitre a accepté sa mission 700.

Concernant la durée des autres procédures alternatives de résolution des conflits, on

sait que l’indemnisation au titre de solidarité nationale, soit la médiation (entendue

aussi comme conciliation dans le droit processuel malgache) s’étale sur une période

d’un an réparti de la sorte : 1- L’organisme chargé de l’examen 701 des saisines des

patients victimes d’accidents médicaux dispose de six mois pour émettre un avis ;

2- A réception de l’avis, les organismes payeurs 702 disposent de quatre mois pour

proposer une offre d’indemnisation ; et 3- la victime dispose de un mois pour

exprimer son accord. Quant à la formation de conciliation 703, il est difficile de

préciser la durée qui reste très aléatoire 704.

En somme, si on se réfère à la durée procédurale, l’arbitrage est plus opportun que

les résolutions amiables entendues au sens large. Le premier dure six mois, et

les résolutions amiable, en moyenne un an.

Après la notion de « durée procédurale », intervient comme élément

d’appréciation, les voies de recours. Pour la résolution amiable entendue comme

indemnisation au titre de la solidarité nationale, la doctrine est très explicite. Elle

affirme que dans une demande d’indemnisation, la déclaration par laquelle une

Commission s’estime incompétente pour connaître la demande ou estime ladite

700 Article 448 du Code de procédure civile. Et le délai légal ou conventionnel peut être prorogé soit

d’accords partis, soit à la demande de l’une d’elles, par le tribunal arbitral statuant à l’unanimité et pour une durée maximum de 6 mois, article 448 ali. 2.

701 La CCI ou Commission de conciliation et d’indemnisation.

702 L’Assureur (si la faute est retenue) et l’ONIAM dans la formation amiable (sans faute mais conditions au droit à la réparation au titre de solidarité nationale remplie : article L. 1142-1. II du Code de la santé publique).

703 Voir : n° 125, « Conciliation-Médiation : modes équivalentes de règlement de conflit ? ». La procédure de conciliation ; lorsqu’il n’y a pas faute et qu’en même temps, les conditions pour bénéficier de la procédure amiable ne sont pas remplies (seuil de causalité, anormalité et gravité).

704 Les mentions légales relatives à la procédure de conciliation prévues aux articles R. 1142-19 à l’article R. 1142-23 du Code de la santé publique français ne mentionnent pas la durée de la procédure de conciliation.

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demande irrecevable, n’est susceptible d’être contestée devant le juge de l’excès de pouvoir dès lors

que la victime conserve la faculté de saisir le juge compétent en vue d’une action en indemnisation 705.

Bref, en matière de résolution amiable, aucun recours n’est prévu contre une décision

d’incompétence de la Commission. Qu’en est-il de l’arbitrage ? Pour le droit

malgache, seul le recours en annulation peut être invoquée à l’encontre d’une

sentence arbitrale 706. Le recours en annulation d’une sentence arbitrale est soumis à

des conditions strictes 707. Compte tenu des voies de recours, il peut être déduit

qu’entre la résolution amiable et l’arbitrage, aucune différence notable ne ressort des

deux procédures en termes de « bénéfice-perte ». Chacune n’accorde qu’un accès

limité 708 aux voies de recours. Dans la résolution amiable, seul la possibilité de

saisine de la juridiction compétente pour une action en indemnisation est rappelée et

dans l’arbitrage, la possibilité de recours en annulation. L’équivalence de condition

entre la résolution amiable et l’arbitrage par rapport aux voies de recours, implique

que leur opportunité respective en matière de conflit médical, est égalitaire.

Consécutivement à la « durée procédurale » et les « voies de recours », figure

parmi les éléments d’appréciation des procédures opportunes, le caractère onéreux ou pas

du dispositif.

Pour la procédure d’arbitrage, le plus souvent, il faut payer les arbitres dont les

honoraires sont conventionnellement prévus (autrement dit, variables). Les auteurs

s’accordent à dire ces honoraires sont élevés 709. Pour la procédure des règlements

amiables (la résolution amiable en application des conditions de l’article L. 1142-1 II

du Code de la santé publique et la conciliation), elle engage aussi des frais mais le

705 À l’article L. 1142-8 du Code de la santé publique, la loi a expressément prévu que l’avis de la

commission ne peut être contesté qu’à l’occasion de l’action introduite devant la juridiction compétente par la victime. Si elle opte finalement pour la voie judiciaire, elle doit faire valoir devant le juge tous les éléments de nature à établir, selon elle, la consistance, l’étendue, les causes et les modalité de son préjudice, quelles qu’aient été les appréciations portées sur ces questions par la commission régionale de conciliation et d’indemnisation lorsqu’elle a été saisie, CE 10 octobre. 2007. Voir : S. PONTHIER, Les décisions des CRCI ne sont pas susceptibles de recours, http://www.avodroits-sante.com.

706 « La sentence arbitrale n’est pas susceptible d’appel, ni d’opposition, ni de pourvoi en cassation », article 450 du Code de procédure civile malgache. « La sentence arbitrale peut, malgré toute stipulation contraire, faire l’objet d’un recours en annulation », article 450. 3, « La sentence arbitrale n’est susceptible que de recours en annulation et ce devant la Cour d’appel d’Antananrivo[…] », article 462.

707 Article 450.3 et 462 du Code de procédure civile malgache.

708 Voire inexistant.

709 Toujours est-il que la question de prix est relative eu égard aux enjeux des litiges, http://fr.wikipedia.org/wiki/arbitrage-(droit).

Page 189: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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coût est supporté par l’organisme d’indemnisation 710, lequel garde en cas de

responsabilité avérée, un droit au remboursement à l’assureur du responsable. Ainsi

au vu du coût procédural, entre les deux dispositifs, la procédure de résolution

amiable est plus favorable à la victime d’accident médical.

En somme, au vu de la durée, des possibilités des voies de recours et du coût

procédural, aucun dispositif n’est plus favorable qu’un autre pour la victime.

Sur certains critères, l’arbitrage présente plus d’intérêts à la victime que les

résolutions amiables au sens de l’article L. 1142-1 II du Code de la santé publique.

Tel est notamment le cas en matière de durée procédurale. L’arbitrage s’étale sur six

mois et les résolutions amiables, en moyenne un an. Par contre, en abordant d’autre

critère, tel la force exécutoire des résolutions, on sait que la sentence arbitrale tout

comme la médiation, nécessitent l’aval juridictionnel 711 pour s’imposer légalement,

alors que la procédure des résolutions amiables telle qu’elle est conçue par la loi du

4 mars 2002 712 ne nécessite pas cet aval. En effet, la force exécutoire d’une décision

émise par l’organisme d’indemnisation faisant suite à un avis favorable de la

Commission 713, ne nécessite pas une homologation judiciaire. Cette indépendance

évite théoriquement la lourdeur procédurale. Par conséquent, la réparation amiable

au titre de solidarité nationale et le cas échéant, la conciliation est plus opportune

pour régir les conflits médicaux que la procédure arbitrale. Enfin, sur la question de

voie de recours, le principe est clair : tant en matière de résolutions amiables qu’en

matière d’arbitrage, les possibilités de voie de recours sont extrêmement

restreintes 714. Bref, si l’on s’appuie sur l’élément « voie de recours », aucune

différence notable ne permet de privilégier telle ou telle autre procédure.

Il résulte de l’analyse que seule la victime de dommage corporel, est en mesure

d’apprécier le type de résolution de conflit qu’elle estime pouvoir lui accorder une

710 L’article. L.1142-12, al. 8 du Code de la santé publique énonce que l’ONIAM dispose d’un

budget propre. Ces recettes proviennent de différentes sources : de dotations versées par les organismes d’assurance maladie, de l’État, de fonds, du produit des remboursements des frais d’expertise, des pénalités versées par les assureurs et des sommes allouées dans le cadre des recours subrogatoires. Les charges de l’Office sont constituées essentiellement par les frais d’expertise et par le versement d’indemnité entrant dans le cadre de sa mission. Pour aller plus loin, voir : article L.1142-23 du Code de la santé publique sur l’ensemble du budget de l’ONIAM.

711 Pour rappel, il s’agit de l’exéquatur pour l’arbitrage et de l’homologation pour la médiation, voir : n° 128.

712 Indemnité au titre de la solidarité nationale et la conciliation.

713 Voir : n° 126.

714 Voir : n° 712, 713, 714.

Page 190: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 189 —

condition de vie normale. Ceci étant, pour permettre une lecture aisée, nous avons

établi un tableau récapitulatif des éléments d’appréciation des procédures de

résolution non contentieuse des différends :

Procédures Éléments d’appréciation de l’opportunité des procédures

Aval juridictionnel

Possibilité de voies de recours

Durée procédurale

Coût procédurale

Arbitrage Nécessité de l’exéquatur (au même titre que la médiation qui nécessite l’homologation du tribunal).

Recours en annulation : soumis à de conditions légales précises : article 462 du Code de procédure civile malgache correspondant à l’article 1484 du nouveau Code de procédure civile français.

Six mois : article 448 du Code de procédure civile

malgache 715.

Honoraires prévus par convention.

En général, assez élevés. mais reste à relativiser eu égard aux intérêts en jeu.

Résolutions amiables au sens de l’article L. 1142-1, II du Code de la santé publique :

— La réparation au titre de solidarité nationale

— La conciliation

La décision indemnitaire de l’Office validée par la victime, ne nécessite aucune homologation judiciaire.

L’avis de la Commission responsable de l’examen préalable des dommages, soit la CCI, n’est susceptible d’aucune voie de recours dans la mesure où

la victime conserve la faculté de saisir le juge compétent pour une action en indemnisation.

En moyenne

un an 716

Les frais sont à la charge des organismes d’indemnisation ; Néanmoins, restent à la charge des parties les éventuels frais de déplacements, y compris pour se rendre devant les organismes d’indemnisation ;

et les frais de

correspondance 717.

715 En droit français, la durée de la mission du tribunal arbitral est limitée à six mois à compter de

sa saisine, article 1463 du Code de procédure civile.

716 Http://oniam.fr/IMG/docsinfos/crci-docinfo.pdf.

717 En outre, la représentation par un avocat est parfaitement possible et laissée à la libre appréciation du demandeur, comme du professionnel ou de l’établissement mis en cause. Il faut savoir que le coût de représentation par un Conseil n’est pas pris en charge par le dispositif de réparation amiable : l’ONIAM.

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— 190 —

130. « Par essence, les modes alternatifs de règlements des litiges évitent le caractère public de la scène

juridictionnelle »718. Partant, ils préservent la réputation du praticien et l’intimité des

victimes. Cette faculté de clore d’une manière séreine et avec célérité, une situation

difficile ne peut laisser le législateur malgache indifférent.

La loi n° 2011-002 portant Code de la santé publique malgache a été mise en

œuvre dans l’affirmation d’une crédibilité de l’exercice de la profession médicale 719.

Seulement, indépendamment des innovations importantes apportées par cette loi,

force est de constater qu’elle ne dispose pas de précision en matière de responsabilité

médicale. Le livre II qui traite de l’exercice de la profession médicale réserve la tâche

de définir le cadre normatif au Code de déontologie médicale 720. Le projet de décret

de déontologie malgache en date du 13 juin 2012 paraît un petit peu timide sur le

sujet en disposant en son article 8 que « Tout médecin est responsable de ses décisions et de ses

actes ». Certes on a vu que la responsabilité médicale à Madagascar est soumise au

régime contractuelle avec obligations de moyens, donc responsabilité pour faute dont

la charge de la preuve incombe à la victime, mais a-t-on envisagé les cas des victimes

qui n’entrent pas dans ces conditions en raison de leur incapacité d’établir des

preuves ou tout simplement qui ne souhaitent pas opter la voie judiciaire ? Pour

toutes ces interrogations, l’intervention du législateur est requise notamment pour les

modes alternatifs de résolutions.

SECTION II. L’INTERVENTION DU LÉGISLATEUR POUR UNE LOI RELATIVE À LA RÉSOLUTION AMIABLE DES CONFLITS MÉDICAUX À MADAGASCAR

131. La limite financière des justiciables et la nécessité de ressources humaines

qualifiées 721 sont une réalité à Madagascar. Il faut les prendre en compte avant toute

tentative législative afférente à la responsabilité médicale. En effet, il ne faut pas

718 M. G HOFNUNG, Les modes alternatifs des règlements de conflit, in, L’expertise médicale, en responsabilité

médicale et en réparation d’un préjudice corporel, J. HUREAU, D. POITOUT, préf. P. Sargos, éd., Masson, 2e éd. 2005, p. 16.

719 Loi n° 2011-002 portant Code la Santé, in Exposé des motifs.

720 « Les devoirs moraux et professionnels des membres des professions médicales et paramédicales sont tous définis dans les Codes de déontologie établis par les ordres concernés », article 73 de la loi n° 2011-002 portant Code de la Santé.

721 Les besoins en médecins se font sentir de plus en plus pour Madagascar. La crise de 2009 a sclérosé le pays, in, Médecins du monde, Des besoins accrus pour Madagascar, L’Express de Madagascar, 1 septembre 2011, n° 5009.

Page 192: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 191 —

perdre de vue que l’action en justice mettant en jeu la responsabilité d’un

professionnel engage toujours des frais pour le demandeur 722 et bien entendu pour la

défense 723 si la responsabilité est retenue. Actuellement, le ministère de la santé

malgache travaille pour que le nombre de médecin, atteigne l’objectif fixé par

l’OMS 724, soit un médecin pour 5 000 habitants 725 ; aujourd’hui, le résultat obtenu

est un médecin pour 5 200 habitants. L’effort réalisé risque d’être interrompu si on

établit un régime de responsabilité stricte. Il nous semble que pour le cas de

Madagascar, la question en matière indemnitaire, doit être formulée de la sorte :

« Un dommage étant survenu, quel est le type de procédure à engager ? » et non : « Un dommage

étant survenu, qui est responsable ? » (§ 1). La procédure en réponse à l’interrogation

s’inscrira dans le sens d’une loi relative aux modes alternatifs de résolution des

conflits (§ 2).

§ 1. L’INDEMNISATION NON FONDÉE SUR L’IDENTIFICATION D’UN « RESPONSABLE »

132. La théorie de la réparation non fondée sur l’identification de « responsable » ne

heurte pas le paysage juridique malgache d’autant plus que le droit coutumier l’avait

toujours considéré (A). Le devoir de réparer non lié à l’identification d’un

responsable puise sa source dans une vision altruiste que la Société malgache accorde

à chaque individu. Cette vision idéale que les malgaches projettent sur la société est

connue sous le vocable : fihavanana. Bien que n’atteignant pas encore sa réalisation

entière, le fihavanana est un stimulant aux engagements, un soulagement au

découragement, bref un pilier sur lequel on peut compter lors des grands moments

de la vie 726 tel que l’avènement d’un accident médical. Garant de la paix sociale, le

fihavanana constitue en soi une mode de résolution consensuelle des conflits (B).

722 Le patient.

723 Le médecin.

724 L’OMS ou l’Organisation mondiale de la santé est l’autorité directrice et coordonnatrice, dans le domaine de la santé, des travaux ayant un caractère international au sein du système des Nations Unies. Elle est chargée de diriger les opérations sanitaires au niveau mondial, http://www.who.int.

725 R. HERIMANDA, Un médecin pour 5 200 habitants, Vendredi 9 janvier 2012, Tribune.com Madagascar, 9 janvier 2009.

726 S. URFER, Le fihavanana en question, No comment magazine n° 27, avril 2012.

Page 193: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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A. La réparation non fondée sur l’indentification d’un « responsable » : concept admis par le droit coutumier

133. Le droit coutumier n’avait pas l’intention de concevoir des théories sur la

responsabilité en général et encore moins en responsabilité médicale. Face à une

donnée non maîtrisable par l’homme telle que la santé, l’institution judiciaire

traditionnelle ne se hasardait pas à incriminer publiquement le guérisseur. Sur le plan

social et juridique, il en résultait un dilemme de taille auquel le juge était tenu de faire

face : le devoir déontologique de ne pas trancher sur des faits relevant de la

métaphysique 727 et le sentiment de culpabilité de laisser impunis des comportements

portant atteinte à l’intégrité physique des malades. Autrement dit, d’une part, il y a le

refus de sanctionner les sujets de droits sur des apparences et d’autre part, la

nécessité de protéger les patients contre un comportement nuisible à leur intégrité728.

Face à cette prudence du juge, la société malgache de l’époque ne restait pas

heureusement indifférente aux douleurs physiques et morales d’un de ses membres

malgré la présomption d’irresponsabilité accordée au guérisseur due à l’idée que son

œuvre émane du divin 729,. La société cherchait toujours à rétablir l’équilibre rompu

du fait d’un préjudice. Pour ce, la réparation en nature participait au respect des

victimes qui souvent n’osaient pas introduire une action en justice à l’encontre du

praticien. Alors, si quelques évènements inattendus surviennent ; on multiplie les

sacrifices de réparation dont l’importance mesurée en fonction de la gravité de la

faute. Dans les cas les plus simples, quelques volailles ou quelques invocations sobres

vont suffire 730. L’apport des offrandes contrairement à la logique qui anime la

727 Dans la conception ancestrale malgache, les maladies sont produites des sortilèges. Elles ne sont

pas naturelles, tout comme la mort. La maladie et l’échec d’un acte de soin trouvent leur explication dans la sanction émanant des Ancêtres en raison d’une transgression des tabous (non-respect des interdits). Dans l’hypothèse où aucun reproche ne peut être attribué à la victime concernant le respect des interdits, l’échec des soins s’expliquera dans l’oubli des rituels qui auraient dû être observés lors des soins : cérémonie préparatoire, offrande,…Dès lors la faute incombe à la victime.

728 Voir : RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de Madagascar-Droit, volume 8, p. 19.

729 Malgré les coutumes diverses et particulières du peuple malgache, le pays véhicule une même croyance, l’existence d’un seul Dieu que le peuple nomme Andriamanitra (littéralement signifie le Roi parfumé), Zanahary ou Dieu créateur, et à l’intercession des Ancêtres ou Razana.

730 Il peut s’agir aussi de bœufs eu égard à l’importance des circonstances, voir : H. DUBOIS, La Religion malgache, op. cit., p. 289. Le mécanisme de la réparation à Madagascar repose sur des croyances. La réparation se manifeste par des sacrifices d’expiation. Conformément au droit français, l’estimation des sacrifices obéit au principe de la réparation intégrale ; ainsi, « Tout le préjudice doit être réparé, mais rien que le préjudice », R. CABRILLAC, Droit des obligations, coll. « Cours », 9e éd., Dalloz, 2010. Et l’apport des sacrifices incombe à la personne dont l’acte est à

…/…

Page 194: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 193 —

responsabilité civile en droit moderne (professionnelle), ne s’appuie pas sur la faute

de l’acteur mais dans la préservation de la réputation de l’acteur (la faute étant une

notion contextuellement inexistante). Ainsi, le guérisseur supposé être dépositaire

d’un pouvoir divin de guérison va expliquer le geste d’offrande à l’égard de la victime,

en un acte de bienveillance. De là, il peut être déduit que l’originalité de la théorie

indemnitaire en droit coutumier malgache est que sans évoquer les notions de

« faute » et de « responsable », il est possible d’accéder à l’indemnisation du préjudice

matériel et moral.

Le dispositif de réparation non tributaire d’un responsable, est rendu possible en

raison de la valeur qu’accordent les malgaches à la relation sociale. En effets, ils

trouvent leur raison d’être dans l’appartenance à une communauté et dans

l’interdépendance de chacun au sein du groupe. Cette conception sociale est traduite

par le concept : fihavanana. En tant que garant du lien social, le fihavanana peut

comporter des modes alternatifs de résolution des conflits.

B. Le fihavanana et les modes de résolution alternatifs des conflits à Madagascar

134. D’abord qu’est-ce qu’évoque le concept de fihavanana ? Le fihavanana 731 suppose

une notion de parenté entre les personnes. En tant que parents, les personnes sont

naturellement conviées à adopter une bienveillance mutuelle se manifestant par des

applications concrètes dans la vie quotidienne. Le fihavanana désigne alors, ceux qui

resteront solidaires dans tous les évènements de la vie ; ceux qui feront preuve d’une

assistance mutuelle. Ainsi décrit, le concept est fortement imprégné de réciprocité,

d’échanges entre les personnes. Les malgaches le traduisent par l’expression « atero ka

alao » qui signifie « qu’on donne aujourd’hui à des proches dans le besoin, ils revaudront le même

service quand on en aura besoin plus tard » 732. Entendu dans ce sens, la solidarité qui

fonde le fihavanana a une vision plus large que le bien-être immédiat d’une société.

l’origine de l’incident ; « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver », article 1315, ali. 1e r du Code de procédure civile français.

731 Le fihavanana exprime avant tout une vision idéale de ce que devraient être la nation et son tissu social : image d’une famille. Bien entendue, cette vision n’est pas encore accomplie. Mais bien que ne soit au stade de réalisation, le fihavanana, assume un rôle de stimulant à l’action, d’antidote au découragement, et d’une promesse vécue lors de moments forts, entre autres, le famadihana ou le retournement des morts, S. URFER, Le fihavanana en question, No comment magazine n° 27, avril 2012. Pour la notion famadihana, voir note de bas de page 443.

732 Http://tromada.wifeo.com/interculturalité. php.

Page 195: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 194 —

La bienveillance à l’égard du prochain s’inscrit dans la prévoyance de l’isolement 733.

Alors quand la solidarité élément fondateur du fihavanana s’affirme dans un contexte

conflictuel, elle s’inscrit non seulement dans la reconnaissance des douleurs des

victimes et la préservation du renommé de l’auteur du fait générateur 734 mais

également, dans une volonté d’établir « autant que faire se peut » une sérénité des

relations futures du soignant et du patient. En cas d’échecs de soin, cela revient à dire

que le soignant dont l’acte est lié au dommage (sans qu’il y ait faute) va faire preuve

de courtoisie à l’égard de la victime de peur qu’une indifférence de sa part lui soit

fatale un jour. Quant à la victime, autant ne pas culpabiliser le soignant car le recours

à ses services est toujours probable.

La résolution des conflits par le principe du fihavanana, préserve la relation

ultérieure des parties. Prenant appui sur la recherche de compromis, le fihavanana

s’opère dans la non-violence. En son nom, les parties doivent faire preuve de

concession afin de rétablir le dialogue 735. En débloquant des situations difficiles, le

fihavanana reflète l’expression par excellence d’un mode alternatif de résolution des

conflits : une « MARC ». En droit médical français, les MARC ont été

institutionnalisées par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la

qualité du système de santé. Il serait peut-être temps pour le droit médical malgache

moderne de procéder dans ce sens.

§ 2. LA PROPOSITION D’UNE LOI RELATIVE AUX MARC AU SEIN DU DROIT MÉDICAL MALGACHE

135. Quel que soit l’objet d’une loi à voter, il importe de bien saisir l’esprit qui anime le

processus législatif. À travers l’adoption de la loi française relative aux droits des

malades 736, notamment le volet relatif aux MARC (modes alternatifs de résolution

des conflits), il sera possible de mieux cerner cet esprit qui motive une proposition de

loi (A). En suivant, une démarche de proposition de loi malgache relative aux

MARC, sera traitée (B).

733 Si chacun cherche à se contrôler, à peser ses mots devant les autres, à ne rien dire ou faire qui

puisse fâcher les parents, l’entourage, c’est parce que l’on est convaincu qu’on obtiendra toujours le résultat de son acte, que ce soit bon ou mauvais. Ce phénomène de retournement irrémédiable de ce que l’on fait à autrui est traduit en malgache par la notion de « tody ».

734 Auxquels cas la réparation se limite à la préservation du bien-être immédiat de la société.

735 Http://tromada.wifeo.com/interculturalite.php.

736 Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

Page 196: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 195 —

A. L’ esprit du processus législatif élaborant les MARC

136. Un projet de loi 737 quel que soit le sujet abordé, doit passer au crible de l’esprit

critique (1) lequel, amène souvent au phénomène d’amendements (2).

1. Le passage du projet de loi au crible de l’esprit critique

137. Un projet de loi a pour mission de traduire la politique d’une nation sur un

domaine précis. Pour ce, le gouvernement doit proposer à l’Assemblée nationale, les

textes législatifs nécessaires aux réformes que la majorité politique souhaite

entamer 738. Les textes sont soumis à plusieurs étapes prouvant leur teneur.

La première étape consiste à l’élaboration d’un avant-projet de loi rédigé par le cabinet

ministériel concerné ; l’avant-projet sera analysé au sein de plusieurs réunions

ministérielles. Ensuite, ce document est soumis au Conseil d’État pour avis 739. Après

les éventuelles reprises à l’issu de l’avis du Conseil d’État 740, il est transmis au

Conseil des Ministres pour être approuvé. Une fois validé, il est déposé à une des

deux Chambres 741. Pour précision, le dépôt d’un projet de loi à une des assemblées

est toujours joint d’une étude d’impact qui met en exergue trois volets :

— les motivations sur l’orientation du projet de loi 742 ;

— l’inventaire des moyens pour le réaliser considérant les réalités nationales 743

737 Par souci de clarté, il est rappelé que le projet de loi est à l’initiative du gouvernement et la

proposition de loi, du Parlement. Le projet de loi est constitué de trois éléments distincts : 1-un exposé des motifs qui indique les raisons pour lesquelles il est soumis au Parlement, l ’esprit dont il procède et les objectifs qu’il se fixe. L’exposé des motifs explique les principales dispositions du projet de loi. 2-un dispositif, composé d’articles. C’est la partie du projet qui est à vocation normative. C’est ce dispositif qui va être discuté et, éventuellement, amendé par les assemblées ; des annexes peuvent, notamment dans le cas des lois de programmation, compléter et préciser les mesures envisagées dans les articles. Et 3- l’étude d’impact qui mesure les retombées du projet de loi, D. MAUS, Constitutionaliste, http://www.senat.fr/role/fiche/pjloi.html.

738 Ibid.

739 Le Conseil d’État assume par-là, son rôle de Conseiller de l’Exécutif. Il apprécie la portée juridique et politique du texte qui lui est soumis, A. LEVADE, Professeur de droit constitutionnel, interview recueilli par le site du Sénat. L’avis est de nature consultatif.

740 À l’issu de l’avis du Conseil d’État, le Gouvernement peut soit garder le texte intact, soit décide d’intégrer certaines mentions, A. LEVADE, Ibid.

741 Le Parlement est composé de deux Chambres : la Chambre haute ou le Sénat et la Chambre basse ou l’Assemblée nationale.

742 Les raisons pour lesquelles on prévoit telle loi et pourquoi on l’oriente vers telle ou telle conviction.

743 Ce point est fondamental et donc à prendre en compte dans la perspective du projet de loi relatif à la responsabilité médicale à Madagascar.

Page 197: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 196 —

— et la description de la mise en œuvre de la loi proposée.

En somme, en application des dispositions constitutionnelles, une loi passe dès sa

conception au crible de l’esprit critique. L’examen de fond et de forme que doit

« subir » un texte de loi continue au niveau des deux assemblées jusqu’à ce qu’elles

adoptent un texte dans les termes identiques. Concrètement, le projet de loi passe par

un mouvement de « va-et-vient » entre les deux Chambres ; on parle aussi de

« navette ». La persistance de ce mouvement en raison de désaccord des deux

Chambres est un moment capital qui permet d’affiner le contenu d’une loi. En effet,

c’est durant les « navettes » que se déploient toutes les modifications du texte par

voie d’amendement.

En ce qui relève de la loi relative aux droits des malades et à la qualité du système

de santé en France, les amendements issus des travaux des Commissions illustrent

parfaitement cette exigence d’examen attentif du projet de loi avant d’entériner un

texte. Ainsi avant de proposer une loi malgache « rigoureuse » portant sur les modes

alternatives de règlement des conflits médicaux, revenons à l’analyse des

amendements apportés au volet « réparation des conséquences des risques sanitaires » de la

loi relative aux droits des malades de 2002 744.

2. Les amendements relatifs au volet « réparation des conséquences des risques sanitaires » de la loi du 4 mars 2002

138. Avant d’analyser les amendements apportés au projet de loi relative aux droits des

malades, notamment le volet « réparation des conséquences des risques sanitaires » (b), il sied

de revoir le cheminement politico-législatif conduisant au projet de loi (a).

a. Le trajectoire politico-législatif du projet de loi relatif aux droits des malades

139. Les propos de M. Douste Blazy 745 dans le journal Le Monde de 1993 en ces

termes : « Le seul moyen de sauvegarder la relation médecin-malade est d’adopter une loi sur l’aléa

thérapeutique », traduit clairement, un des objectifs 746 visés par l’adoption d’une loi

744 Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé

745 DOUSTE-BLAZY, cardiologue ; un homme politique français ; ministre (Culture, Santé, Affaires étrangères) et conseiller spécial du Secrétaire général des Nations unies, chargé des sources novatrices de financement du développement.

746 Les autres objectifs étant l’instauration de la démocratie sanitaire, d’une politique de santé, de la qualité du système de santé, de formation médicale des professionnels, rappel des principes déontologiques, […].

Page 198: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 197 —

relative aux droits des malades : l’indemnisation automatique des accidents médicaux.

Vers la fin des années soixante, cette ambition était déjà affirmée par le Professeur

Tunc 747. En 1980, on voit apparaître la notion de « conciliateurs médicaux » 748.

En 1991, un rapport émanant de la chancellerie aborde le thème de la responsabilité

médicale et de l’indemnisation du risque thérapeutique 749. L’année suivante,

un rapport complémentaire sur « le problème français des accidents thérapeutiques : enjeux et

solutions » 750 va inspirer la rédaction d’un avant-projet de loi. Et la loi n° 98-389

relative à la responsabilité du fait des produits défectueux prévoyait la remise au

Parlement d’un « rapport sur le droit de la responsabilité et de l’indemnisation applicable à l’aléa

thérapeutique » avant décembre 1998 ; rapport déposé en novembre 1999. Ledit

document préconise de garder la faute comme fondement de la responsabilité

médicale et d’instituer un fonds national d’indemnisation des accidents

thérapeutiques graves n’ayant pas son origine dans la faute médicale. Ce rapport a en

outre, initié les commissions régionales d’indemnisation qui favoriseraient les

règlements amiables. En 2001, la réflexion aboutit au dépôt d’une proposition de loi

relative à l’indemnisation de l’aléa médical et à la responsabilité médicale 751 mais

laquelle, en application de l’article 28-2 du règlement du Sénat, est devenue

caduque 752. La même année, le Gouvernement décide de présenter au Parlement un

747 Des voix se sont exprimées depuis de nombreuses années en vue d’un système général

d’indemnisation des accidents médicaux. Ce système était déjà perçu comme garant d’une protection efficace des victimes d’accidents médicaux non fautifs. Pour parvenir à ce résultat, la proposition d’une objectivisation de la responsabilité des médecins, s’est affirmée. Cette thèse a été avancée vers les années soixante par le Professeur André Tunc au 2 e Congrès International de la morale médicale.

748 Le concept « conciliateurs médicaux » est apparu dans les années 80, notamment via le décret du 15 mai 1981 issu du rapport MAC ALEESE. Le décret de 1981 a été cependant annulé par le Conseil d’État du fait que le sujet en impliquant des atteintes au secret médical, relève de l’exclusivité du législateur. Toujours-est-il, le concept « conciliateur » s’affirme.

749 La Chancellerie a engagé une réflexion globale en vue d’améliorer les conditions d’indemnisation du préjudice corporel. Dans ce cadre, Monsieur Jean-Pierre Dintilhac, président de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, a remis au Garde des Sceaux le 28 octobre 2005, un rapport proposant une nomenclature des préjudices corporels. Ladite nomenclature a pour objectif de guider les praticiens de l’indemnisation (expert, avocat, organismes d’indemnisation, juges) en répertoriant les postes d’indemnisation selon des définitions qui peuvent être globalement partagées.

750 Rapport établi par un Mr. EWALD en 1992, commandé par Mr. BERNARD KOUCHNER, ministre de la santé.

751 Propositions de loi déposées par le Parlementaire Claude Huriet.

752 En application de l’article 28-2 du règlement du Sénat, « Les propositions de loi ou de résolution sur lesquelles le Sénat n’a pas statué deviennent caduques de plein droit à l’ouverture de la troisième session ordinaire suivant celle au cours de laquelle, elles ont été déposées […] ».

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— 198 —

projet de loi 753 relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé dont

le Titre III est consacré à la réparation des conséquences des risques sanitaires.

L’intitulé manifeste clairement la décision d’unifier et de stabiliser les règles en

matière de responsabilité en cas d’accident médical ainsi que la volonté de mettre en

place un droit relatif à l’indemnisation de l’aléa thérapeutique.

En somme, le projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système

de santé se distingue ainsi, par la création d’un dispositif de règlement amiable et

d’indemnisation des victimes d’accidents médicaux, d’affections iatrogènes et

d’infections nosocomiales. Ce dispositif non contentieux proposé aux parties, est

géré par les commissions de conciliation et d’indemnisation : les CCI et l’Office

d’indemnisation (ONIAM) 754. Dans le cas de l’aléa médical, la victime est

indemnisée sous certaines réserves 755 par l’Office nationale d’indemnisation des

accidents médicaux et des affections iatrogènes : l’ONIAM 756.

La fiabilité du dispositif de règlement amiable et d’indemnisation des victimes

d’accidents médicaux émane pour partie de l’adoption de certains amendements des

commissions parlementaires 757.

b. Les amendements relatifs au volet « réparation des conséquences des risques sanitaires » de la loi du 4 mars 2002

140. La Première partie du Code de la santé publique comporte dans son Livre I, un

Titre IV énonçant les dispositions relatives à la réparation des conséquences des

risques sanitaires. Dans le projet initial, l’intitulé du Titre concerné était :

« La réparation des risques sanitaires » mais l’Assemblée nationale a apporté un

amendement pour viser : « La réparation des conséquences des risques sanitaires ».

Cet amendement apparemment sobre n’est pas insignifiant. Il réitère l’acquis du droit

753 Projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé, n° 3258, déposé le

5 septembre 2001.

754 Voir : supra n° 126.

755 Tenant à la gravité du dommage.

756 Voir : supra n° 126. L’ONIAM, est un établissement public à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministre de la santé et dont le financement est assuré pour l’essentiel par l’assurance maladie.

757 Conformément au nombre maximal prévu par la Constitution, l’Assemblée nationale compte huit commissions permanentes ayant double rôle : 1- l’examen de tout projet ou proposition de loi en vue d’être débattue, et que depuis la réforme constitutionnelle de juillet 2008, c’est le texte adopté par la commission saisie qui est discuté en séance publique et 2–. l’information de l’Assemblée pour lui permettre d’exercer son rôle de contrôle de l’action du Gouvernement, http://www.assemblée-nationale.fr.

Page 200: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 199 —

de la responsabilité médicale selon lequel, l’acte médical n’échappe à

l’imprévisible 758 ; il est constitué par les risques sanitaires. Dès lors, le devoir de

réparation ne peut être motivé par l’avènement d’un risque sanitaire ; il s’agirait sinon

d’une obligation de résultat 759. Mais devant la considération des évènements non

maîtrisables, l’intitulé retenu : « La réparation des conséquences des risques sanitaires »,

traduit en même temps, la volonté législative de considérer les conséquences des

risques sanitaires. Une telle considération est rendue effective par l’indemnisation à

titre de solidarité nationale 760.

Ensuite, un autre amendement précise la nécessité d’introduire au Chapitre II du

Titre IV, des mentions décrivant les risques sanitaires résultant du fonctionnement

du système de santé ; autrement dit, la nécessité d’inscrire les définitions d’accidents

médicaux, d’affections iatrogènes et d’infections nosocomiales 761. Bien que les

définitions avancées par les commissions (des affaires culturelles, familiales et

sociales) n’ont pas été reprises comme telles 762, il s’en est suivi l’affirmation d’un

droit à l’indemnisation des accidents médicaux graves non fautifs : article L. 1142-1,

II du Code de la santé publique 763. L’établissement d’un droit à l’indemnisation des

758 Que sont les risques sanitaires et ses conséquences.

759 Principe inopérant en droit de la responsabilité médicale.

760 Le principe général de l’indemnisation au titre de solidarité nationale des accidents graves non fautifs est prévu à l’article L.1142-1 II du Code de la santé publique. Ledit article a été modifié par la loi n° 2009. 523 du 12 mai 2009 qui a étendu les conditions d’appréciation de la perte des capacités fonctionnelles, voir : A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, op. cit., P. 527.

761 D’après les commissions (des affaires culturelles, familiales et sociales), le Chapitre II fait référence, de manière permanente, aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes et aux infections nosocomiales, qu’il paraît nécessaire de définir les concepts. Cela apportera à la loi une meilleure intelligibilité.

762 .L’article additionnel intitulé « Définitions » au préambule du Chapitre II (avant l’article L.1142-1 du Code de la santé publique), aurait précisé ce que l’on entend par accident médical : tout événement imprévu causant un dommage accidentel ayant un lien de causalité certain avec un acte médical et par affection iatrogène : tout dommage subi par un patient, directement lié aux soins délivrés ; et par infection nosocomiale, toute infection qui apparaît au cours ou à la suite d’une hospitalisation alors qu’elle était absente à l’admission dans l’établissement de santé.

763 « Lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme […] ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire », article L. 1142-1, II du Code de la santé publique.

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— 200 —

accidents médicaux, n’enlève cependant en rien au principe de la responsabilité pour

faute 764.

Le troisième amendement significatif du volet « réparation des conséquences des risques

sanitaires » est un amendement de coordination entre l’article L. 1142-1 et l’article

L. 1142-8 du Code de la santé publique. La coordination entre les deux articles se

manifeste par le fait que l’article L. 1142-8 assure l’effectivité du bénéfice du

règlement amiable mentionné au second alinéa de L. 1142-1. Pour ce, il précise

l’intervention de la CRCI 765, une fois les critères de gravité atteints 766.

Enfin, figure l’amendement qui a pour vision de faire profiter le maximum de

victimes au dispositif de la réparation amiable. Dans cette perspective, la loi propose

de fixer un plafond de taux d’incapacité permanente. L’amendement du taux

d’incapacité permanente à 25 % a été retenu par le texte final. Ainsi, la victime qui

arrive à établir un taux d’incapacité permanente à partir de 25 % a droit à la

réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale, article L. 1142-1, II, ali. 2.

En somme, le règlement amiable est caractérisé par l’aspect consensuel en vue de

considérer les accidents médicaux non issus d’une faute médicale. Il faut cependant

souligner que l’aspect consensuel n’est pas exclusif à la résolution des accidents sans

faute. En effet même dans l’hypothèse où la faute professionnelle est établie, la

transaction peut s’opérer entre le responsable et la victime représentée souvent par

l’assureur. Il convient dès lors de regarder les amendements relatifs à l’assurance. Les

articles concernés sont ceux qui énoncent l’avis de la commission régionale énonçant

la responsabilité du médecin impliquant l’intervention de l’assureur du responsable :

L. 1142-14 et L. 1142-15 du Code de la santé publique.

764 Le principe de la faute énoncé à l’article L.1142-1, I du Code de la santé publique porte sur les

dommages causés par les activités des professionnels ou des établissements de santé, à l’exclusion des cas où la responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé. Les dispositions de l’article L.1142-1 du Code de la santé publique confirment ainsi, la position jurisprudentielle selon laquelle : « La réparation des conséquences de l’aléa thérapeutique n’entre pas dans le champ des obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l’égard de son patient », Cass. Civ. 1ère, formation plénière, 8 novembre 2000.

765 Voir : n° 126.

766 « Lorsque les dommages subis présentent le caractère de gravité prévu au II de l’article L. 1142-1, la commission émet un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue des dommages, ainsi que sur le régime d’indemnisation applicable. », article L1142-8, ali. 1e r du Code de la santé publique.

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— 201 —

Deux principaux amendements ont été adoptés concernant cette intervention :

d’abord, a été retenue, la revalorisation annuelle de la rente accordée à la victime 767

et ensuite, la limitation de l’amende civile adressée à l’assureur en cas d’offre

insuffisante. Désormais, l’amende est égale à 15 % de l’indemnité allouée au juge et

non à 30 % tel qu’il a été prévu dans le projet initial 768.

En somme, les amendements adoptées à l’unanimité par les deux Assemblés sont

ceux estimés renforcer le caractère essentiel des MARC, c’est-à-dire, les

amendements qui essaie de donner une réponse aux éventuels accidents médicaux

indépendamment du caractère aléatoire de l’issu thérapeutique.

Une fois l’esprit d’une proposition de loi compris, à savoir, le respect de la rigueur

constitutionnelle dans l’adoption d’une loi 769, la démarche législative relative aux

MARC en droit médical malgache peut être entamée.

B. La proposition de loi relative aux MARC à Madagascar

141. La Loi n° 2011- 002 du 15 juillet 2011 portant Code de la santé malgache

comporte un Livre II consacré à l’exercice de la profession médicale.

Indépendamment des innovations remarquables qu’il contient 770, il n’apporte pas

beaucoup d’éclairage sur la gestion des contentieux en matière médicale. À vrai dire,

la loi renvoie au Code de déontologie pour définir les devoirs moraux

et professionnels du médecin 771. Seulement le décret n° 2012-0632 portant Code de

déontologie médicale malgache, ne développe pas la question de la responsabilité

médicale 772. Du moment où les règles déontologiques n’apportent pas de réponse à

la gestion des contentieux médicaux, le renvoi opéré par la loi est dépourvu de sens.

Dans ces circonstances, il importe de reformuler directement les dispositions de la loi

portant Code de la santé publique (1). Ensuite, afin de répondre au mieux aux

767 La revalorisation annuelle de la rente accordée à la victime dans les conditions prévues à

l’article L. 351-11 du Code de la sécurité sociale.

768 Article 1142-14 ali. 9 du Code de la santé publique.

769 Voir : n° 137.

770 Voir : n° 130.

771 « Les devoirs moraux et professionnels des membres des professions médicales et paramédicales sont tous définis dans les Codes de déontologie établies par les Ordres concernés », article 73 de la loi n° 2011. 002 du 15 juillet 2011portant Code de la Santé.

772 Le projet de décret de déontologie malgache en date du 13 juin 2012 est un petit peu timide en termes de responsabilité médicale. Il mentionne en son article 8 que « Tout médecin est responsable de ses décisions et de ses actes » sans indiquer l’étendue de cette responsabilité médicale.

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doléances des victimes d’accidents sans faillir au principe de responsabilité pour

faute, il faut préconiser des dispositions relatives aux modes alternatifs de résolution

des conflits : MARC, lesquels sont rendus effectifs par la présence des organismes

d’indemnisation (2).

1. La reformulation des dispositions du Code de la santé publique relatives à la responsabilité médicale

142. L’article 73 de la loi n° 2011- 002 portant Code de la Santé 773 dispose que :

« Les devoirs moraux et professionnels des membres des professions médicales et paramédicales sont

tous définis dans des Codes de déontologie 774 établis par les Ordres concernés. […] ». Prenant en

compte le constat précédemment évoqué (le défaut d’intérêt du renvoi opéré par

l’article 73 de la loi n° 2011- 002 au Code de déontologie pour ce qui relève de la

responsabilité médicale), la présente étude propose de joindre à l’article 73 de la loi

n° 2011- 002, les mentions suivantes :

Mais il reste à préciser que l’acte médical, qu’il soit à finalité diagnostique ou

thérapeutique n’échappe pas à l’imprévisible 775. Même parfaitement réalisée, une intervention médicale peut échouer, blesser, voire même entraîner la mort.

Ces dispositions additionnelles accorderont, une assise juridique solide au principe

qualifiant la relation médecin-malade de contrat mettant à la charge du médecin une

obligation de moyens ; principe qui jusque-là a été affirmé d’une manière implicite.

On n’aura de cesse de rappeler que le maintien du principe de la responsabilité

médicale pour faute, n’empêche pas de donner une réponse législative aux victimes

d’accidents médicaux non fautifs. Concrètement, cela suppose l’adoption de règles

qui garantissent l’indemnisation automatique extra-judiciaire des accidents médicaux.

Autrement dit, l’adoption de règles relatives aux MARC (modes alternatifs de

résolution des conflits). À Madagascar, cette perspective peut se réaliser sans

difficulté dans la mesure où elle rejoint l’esprit du droit coutumier face aux accidents

médicaux : non insistance de nommer un agent fautif tout en considérant l’équilibre

relationnel rompu du fait du préjudice. Le rétablissement de l’équilibre se concrétise

par un mécanisme de bienveillance mutuelle entre la victime et celui dont l’acte a un

773 Loi qui a remplacé l’ordonnance n° 62.072 du 29 septembre 1962 portant codification des textes

législatifs relatifs à l’exercice de la profession médicale à Madagascar.

774 Décret n° 2012. 0632, portant Code de déontologie médicale ; Décret n° 2004-780 portant Code de Déontologie des infirmiers (es) ; Arrêté interministériel n° 18.174/2004 portant Code déontologie des sages-femmes.

775 Autrement dit l’« aléa thérapeutique ».

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— 203 —

rapport avec le préjudice ; en l’occurrence le médecin. Ensuite, il faut savoir que

l’indemnisation extra-judiciaire des accidents médicaux repose sur l’intervention

d’organismes d’indemnisation 776. Ce qui implique une priorité législative désignant

leur réalité. La loi n° 2011- 002 du 15 juillet 2011, portant Code de la santé, est

appelée à insérer des dispositions correspondantes. Pour rappel, les organismes

d’indemnisation peuvent être substitués par une section chargée de l’indemnisation

extra-judiciaire des accidents médicaux au sein même du ministère de la Santé 777.

Mais au-delà des structures des institutions indemnitaires, il importe que la loi

établisse des mentions relatives à leurs missions, leur composition,

leur fonctionnement, leur mode de saisine et leur statut vis-à-vis des recours en droit

commun. Bref, définir le contour de l’intervention des organismes d’indemnisation

pour la mise en œuvre des MARC.

2. Les dispositions relatives à l’intervention des organismes d’indemnisation pour la mise en œuvre des MARC

143. Le contour de l’intervention des organismes d’indemnisation suppose de

mentionner leurs missions, leur composition, leur mode de saisine et le statut.

Concernant les missions, on propose la formule suivante pour être insérée dans le

Code de la santé malgache :

« Tels » organismes sont chargés de faciliter le règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux ainsi que tout autre litige entre usagers du système de santé et le corps médical.

En s’inspirant du droit français 778, on peut éventuellement affiner la disposition

en y rajoutant les termes qui suivent :

[…]. Afin de garantir leurs missions, les organismes « tels », auront un double rôle : le règlement amiable et la conciliation .

776 Les CCI (Commissions de conciliation et d’indemnisation) ; la CNAM (Commission nationale

des accidents médicaux) : organisme chargé du contrôle de l’objectivité des experts spécialisés en accidents médicaux et l’ONIAM

777 Actuellement, une section contentieuse existe déjà, au sein du ministère de la santé. La mission de gérer les accidents médicaux non fautifs impliquant la résolution amiable des différends pourra lui être confiée. La dévolution mérite d’être rédigée au sein de la loi.

778 Les CCI ont une double mission : soit régler à l’amiable les différends, article L.1142-1, II du Code de la santé publique ; soit concilier, « La commission régionale de conciliation et d’indemnisation, réunie en formation de conciliation, peut être saisie par toute personne de contestations relatives au respect des droits des malades et des usagers du système de santé », article L.1114-4 du Code de la santé publique. Dans ce cadre, elle examine les demandes relatives aux litiges ou aux difficultés nées à l’occasion d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soins effectués dans son ressort, article R. 1142-19 du Code de la santé publique.

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— 204 —

Concernant la composition, la formule proposée irait dans ce sens :

Les organismes « tels » sont composés d’un représentant du pouvoir judiciaire (un magistrat), des représentants des usagers (associations de malade par exemple), des représentants du corps médical (des professionnels, des établissements et services de santé) et des représentants des entreprises d’assurance.

Concernant le mode de saisine, les mentions proposées sont :

Les organismes « tels » peuvent être saisis directement par toute victime d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou le cas échéant par son représentant légal et dans l’hypothèse de décès, ses ayants-droit.

Cette disposition garantit le bénéfice d’un contact direct entre le malade et le

corps médical. Ce qui permet un éclairage en cas d’incertitude sur les causes et les

circonstances de l’accident. Et partant, envisager les procédures à entreprendre afin

de prendre en considération les doléances 779. À ce stade, les dispositions relatives

aux preuves s’imposent d’où les dispositions législatives suivantes comme

proposition :

La saisine des organismes « tels » doit être accompagnée de pièces justificatives, incluant notamment, un certificat médical attestant la consistance précise des dommages dont le malade s’estime être victime, ainsi que tout autre document de nature à l’appuyer et notamment à établir que les dommages subis ont le gravité suffisante pour justifier de la recevabilité de la demande.

Enfin, concernant le statut des organismes d’indemnisation ; il s’apprécie en

fonction de la possibilité de recourir aux procédures de droit commun. Face aux

juridictions du droit commun, la conduite de la procédure de règlement amiable est

indépendante. La procédure de règlement amiable ne remplace pas aux procédures

du droit commun. La victime garde donc la possibilité d’exercer simultanément la

procédure judiciaire et la procédure de règlement amiable ou de les exercer

successivement sans ordre de priorité. Cette hypothèse de coexistence est à insérer au

sein du Code de la santé malgache. Dans cette perspective, il convient d’énoncer

l’obligation incombant à la partie demanderesse, d’informer les instances saisies. La

formule proposée est la suivante :

Au cas où des procédures contentieuses sont conduites parallèlement, la victime a une obligation d’information vis-à-vis des organismes et de la juridiction saisies afin d’éviter des doubles réparations.

779 Voir : A. LAUDE, B. MATHIEU et D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd., Thémis droit, Puf, 2009,

p. 541.

Page 206: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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La saisine des organismes d’indemnisation suspend les délais de prescription et de recours contentieux jusqu’au terme de la procédure de règlement amiable.

Dans le cas où la procédure de règlement amiable échoue, on est contraint de

recourir à la résolution contentieuse. En principe, la résolution contentieuse aboutit à

une compensation pécuniaire. Bien évidemment, il est difficile d’imaginer qu’un

préjudice moral résultant d’un dommage corporel ou patrimonial, puisse être effacé

par une somme d’argent. La perte d’un être cher ou l’atteinte à l’intégrité corporelle

suite à un accident médical, ne sauraient être compensées par un apport financier.

Mais si la compensation d’ordre pécuniaire n’efface pas le préjudice moral ; il faut se

rappeler que « réparer n’est pas effacer ». Le versement d’une somme d’argent peut

signifier autre chose pour la victime qu’un simple effacement du vécu. Il peut

signifier la reconnaissance de ce qui est (ou a été) enduré, et par là, signifie la non-

impunité d’un fait préjudiciable.

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CHAPITRE II.

LA COMPENSATION PÉCUNIAIRE : SIGNE DE NON IMPUNITÉ POUR FAIT MÉDICAL PRÉJUDICIABLE

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144. Bien que certains préjudices, notamment ceux d’ordre moral, sont difficilement

réparables par la compensation financière, il est de principe que les juridictions du

droit commun soient tenues d’accorder réparation à tout préjudice 780. Le juge doit se

prononcer sur toutes les allégations de la partie demanderesse sous peine de se voir

adressé une requête pour omission à statuer. Dans le même sens, il ne peut pas

refuser de trancher aux conclusions des parties sous peine de déni de justice 781.

Dans l’hypothèse où il estime la responsabilité établie et qu’aucune transaction

amiable n’ait pu être conclue entre l’auteur du fait dommageable et la victime, le juge

va informer les parties du jugement portant obligation d’indemniser. À réception de

la décision de justice, le responsable en l’occurrence, le médecin traitant doit en

informer son assureur en application de l’article 18 782 du Code des assurances

malgaches. Bien qu’on ait souligné la nécessité d’instituer le principe d’obligation

d’assurance à Madagascar 783, face au faible pouvoir d’achat de l’ensemble de la

population, les médecins se voient limités dans leur capacité de souscrire un contrat

d’assurance. En effet, sur place, les prises en charge sanitaires ne sont remboursées

qu’aux patients détenteurs d’une assurance ou d’une mutuelle privée 784, si bien que la

« clientèle » se tourne plus vers les ONG 785 et les institutions sanitaires

confessionnelles 786 dispensant des soins et médicaments à prix abordables.

780 Article 5 du nouveau Code de procédure civile français.

781 Ibid.

782 Déclaration des sinistres.

783 L’assurance est une garantie de solvabilité pour l’assuré et par conséquent un instrument privilégié d’indemnisation des victimes, voir : n° 80.

784 En réalité, plus de 80 % de la population malgache, ne dispose d’aucune couverture sociale. Il n’y a pas véritablement de sécurité sociale à Madagascar. Ceci étant, le gouvernement malgache a entamé une étape certes timide, mais qui a le mérite d’exister. Ainsi, dans le secteur public, les ménages sont sollicités à participer au financement direct de leur santé à travers un mécanisme de fond de garanti dénommé : FANOME ou Financement pour l’Approvisionnement Non stop en Médicament. Ce système permet essentiellement d’assurer le réapprovisionnement des médicaments dans les structures sanitaires et d’utiliser une part égale à 35 % pour la prise en charge gratuite des plus démunis, voir : Mission économique de Tananarive, Le secteur de la santé à Madagascar, 2007. Quant aux assurances privées contractées à l’initiative du patient, leur coût est largement rédhibitoire pour l’immense majorité de la population. Par ailleurs en matière d’assurance, culturellement, il y a l’idée que se soucier de l’avènement d’une situation indésirable, notamment la maladie ou l’échec de soin ne fait que l’attiser. Partant, souscrire une assurance pour prévoir les aléas est perçue comme moralement interdit. Bien entendu, actuellement ce dernier point n’explique pas la raison majeure de la difficulté de souscrire une assurance.

785 Le fait pour les malades de s’adresser plus aux ONG : Organisation non gouvernementales et aux institutions sanitaires confessionnelles, implique pour les professionnels libéraux un obstacle financier ne permettant de souscrire une assurance responsabilité civile.

786 Religieux.

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Devant l’impossibilité de souscrire une assurance due à la perte de la clientèle, la

solution se trouverait peut-être dans le système de mutualisation adapté à

l’environnement 787. Pour en avoir confirmation (Section II), nous approfondirons

d’abord, le concept même de mutualisation (Section I).

787 « […] que cette échappée du solidarisme traditionnel se réaliser à travers des formes nouvelles de vie collective qui, par le jeu des tours de rôle, peuvent constituer les pratiques mutualistes indispensables à la survie dans un cadre urbain », M. LELART, La Tontine, Ed. AUPELF-UREF. John Libbey Eurotext. Paris 1990, p. 277.

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SECTION I. LA CONCEPTION D’UNE FORMULE DE MUTUALISATION

145. Dans beaucoup de pays, certaines catégories de la population ont des difficultés

pour bénéficier des services des institutions de crédit telles que les banques 788 et les

assurances. Par conséquent, elles ont recours à un mode informel de crédit et

d’épargne reposant sur la confiance entre les participants ; le système est connu sous

l’appellation tontines informelles 789. Dans un premier temps, on observera le

déploiement de ce type de structure (§ 1). Et dans un deuxième temps, on appréciera

dans quelles mesures, il participe à la dynamique contemporaine de l’indemnisation

des préjudices médicaux (§ 2).

§ 1. LES TONTINES INFORMELLES

146. Le qualificatif « informelles » laisse entendre que les activités concernées : les

tontines sont des initiatives privées établies hors contexte légale. Partant, elles sont

perçues comme inorganisées par rapport aux institutions de crédit officielles telles

que les banques et les compagnies d’assurance. En effet, supposées incontrôlables

par les autorités publiques, les pratiques de mutualisation informelle peuvent être

sanctionnées d’emblée. Pourtant, dans une société où l’accès aux institutions de

crédit n’est pas à la portée de tout le monde 790, ces activités informelles constituent

de véritables moteur d’activités d’entraide 791. C’est ainsi que l’on rencontre à des

filières de solidarité très efficaces en Afrique 792. Ces initiatives de créer un système

de mutualisation témoignent d’une résolution à ne pas être sujet passif des aléas de la

788 La Croix du 24 janvier 2011, p. 16.

789 Par opposition à la tontine légale qui est une forme particulière d’indivision mise en place par la loi française. La tontine légale est également sous l’appellation « pacte tontinier » ou « clause d’accroissement ». La tontine légale permet d’éviter les complications d’héritages entre personnes qui souhaitent profiter ensemble d’un même bien, Ibid.

790 La difficulté d’accès d’une couche de population aux institutions financières telles que les banques et les assurances s’explique par : la complexité de constitution des dossiers d’adhésion ; leurs coûts élevés; la rigueur des règles d’adhésion et de bénéfice des services, conditionnée par l’obligation de versement de prime d’assurance et enfin, l’impossibilité des institutions financières officielles à débourser dans l’immédiat une somme déterminée à un adhérent en raison des polices contractuelles restrictives, M. LELART, Ibid.

791 M. LELART, op. cit., p. 269.

792 « L’existence des pratiques informelles n’est pas une exclusivité africaine, ni des pays en voie de développement. Au Nord comme au Sud, à l’Ouest comme à l’Est, l’institutionnel engendre, masque, réprime ou tolère le non-institutionnel. La spécificité de l’informel dans le Tiers monde tient au degré d’informalité qui pénètre les activités formelles et à leur importance quantitative globale », Ibid.

Page 211: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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vie. Avant d’exposer un exemple réel de tontine informelle (B), il convient de définir

le mode de fonctionnement de la structure (A).

A. Les modes de fonctionnement des tontines informelles

147. Structurellement, il y a deux modèles de tontines informelles : la tontine rotative et

la tontine accumulative.

Dans la tontine rotative, des personnes s’associent en vue de déposer à une

fréquence donnée dans une caisse commune, une somme prédéterminée. À chaque

périodicité, l’un des « associés », emprunte la totalité des versements ou que chaque

associé à tour de rôle en bénéficie directement. Lorsque tous les participants ont été

bénéficiaires des fonds, le cycle de la tontine est clos. Suivant chaque clôture, un

nouveau cycle se déclenche automatiquement.

Dans la tontine accumulative, il s’agit plus d’un placement que d’un système de

distribution. Autrement dit, les cotisations versées sont accumulées dans la caisse de

la tontine en vue de produire des intérêts. Parallèlement, elle peut aussi être prêtée

aux participants de la tontine ou à d’autres personnes en vue de produire d’intérêt.

Quel que soit le modèle opté, la tontine est une personne morale détentrice de

fonds collectés. Les « actionnaires » décident de la mise à disposition de l’épargne par

voie de redistribution à tour de rôle aux membres (tontine rotative) ou par voie de

prêt avec intérêts (tontine accumulative). Dans la deuxième configuration, le

mécanisme de la tontine repose sur un système de placement 793 ; les fonds prétés

aux membres sous forme de crédit doivent être remboursés souvent à court terme et

à taux élevés. Ce fonctionnement permet que les fonds disponibles s’accroissent très

vite de façon à permettre aux membres d’emprunter régulièrement. Au final, cette

forme de solidarité économique conduit à une autonomie financière des

« actionnaires » face aux dépenses importantes : fête religieuse, familiale, charges de

scolarité, et éventuellement la dette de responsabilité, etc. Enfin, les tontines

accumulatives peuvent répondre à des dépenses non prévisibles telles que l’accident,

la maladie, le décès d’un proche.

En somme, bien que non officiellement déclarées comme mutuelles, les tontines

informelles reposent sur une logique économique mutualiste accordant aux membres

793 L’argent accumulée dans la caisse de la tontine, est investi dans des opérations décidées

collectivement par les membres dont fait partie le système de crédit avec intérêt au bénéfice des membres.

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une solvabilité économique. Cette solvabilité économique est importante pour

répondre aux charges prévues ou non de la vie quotidienne. En Afrique, des

nombreuses tontines, illustrent l’intérêt pour un corps de métier d’adopter la

dynamique de mutualisation. L’étude d’une tontine reconnue par le ministère de

l’économie et des finances du Burkina Faso, nous ouvre à une possibilité de structure

que les médecins malgaches pourront adopter en vue de répondre aux éventuelles

dettes de responsabilité professionnelle. Il s’agit de l’association : ASIENA ou

Association Inter Instituts Ensemble et Avec.

B. ASIENA : structure mutualiste illustrant l’essor de l’autonomie financière des médecins

148. ASIENA, regroupe en septembre 2007, une trentaine de Congrégation religieuses,

soit près de deux tiers de l’ensemble des Congrégations du Burkina Faso et du Niger.

Dans l’ensemble, elle développe deux branches d’activités : une mutuelle santé et une

activité d’épargne-crédit.

Concernant la mutuelle santé : elle a pour objectif de mener une action de

prévoyance santé au profit des adhérents. Cette action est menée au moyen de

cotisations versées par les membres. Autrement dit, moyennant cotisation, la

mutuelle santé offre à ses adhérents un complément de remboursement de certains

frais médicaux sur la base d’un barème de remboursement 794. À propos de barème

de remboursement, on a constaté que le taux de remboursement fixé est faible

comparé aux dépenses de santé des adhérents. Ceci s’explique par le fait que les taux

ont été établis sur la base des tarifs des hôpitaux publics ; or beaucoup d’adhérents

s’adressent plus aux institutions sanitaires privées où les prix sont beaucoup plus

élevés. De ce constat, on retient que la viabilité d’une mutuelle dépend d’une rigueur

de proportionnalité entre les cotisations et les remboursements couverts par la

convention sans quoi, le dispositif est paralysé. Pour le cas d’ASIENA, la nécessité de

travailler avec les centres hospitaliers qui fixent les tarifs des soins (donc les tarifs de

remboursements) a été soulevée 795. Dans le cadre d’une structure mutualiste à

vocation indemnitaire au profit d’un groupement de médecins, la stratégie consiste

794 Rapport d’évaluation du projet « appui à l’autonomisation et au renforcement de l’association inter instituts

ensemble et avec (ASIENA) au Burkina Faso et Niger», V. LECOURT, S. OUEDRAGO et Dr. S. A. SOMÉ, 2007, p. 9.

795 Établir des conventions avec les prestataires de soins (hôpitaux tant publics que privés). Ces accords doivent, entre autres, fixer les prix des services. Il s’agit d’un élément essentiel pour déterminer le montant des cotisations des adhérents de la mutuelle[…], Ibid. p. 13.

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— 212 —

donc à ajuster les barèmes de couverture aux cotisations versées par les médecins

adhérents.

Concernant l’activité épargne-crédit de l’association ASIENA : elle a comme

mécanisme, l’octroi de crédits d’investissement aux adhérents ou tout simplement de

crédits pour répondre à une période financière délicate 796 moyennant

remboursement avec intérêts. Parallèlement, elle propose aux adhérents de constituer

un capital personnel à vocation épargne-retraite 797. Tant pour l’opération de crédits

que pour l’épargne-retraite, il s’agit bel et bien d’une « mutuelle solidarité » et c’est

d’ailleurs ainsi que l’association nomme cette activité : MUSO ou mutuelle solidarité.

Historiquement, ces services étaient prévus pour les Congrégations religieuses

autochtones 798. Ultérieurement, constatant le risque d’un taux de remboursement

faible, il a été décidé d’ouvrir les prestations aux femmes entrepreneurs locales. Dans

cet objectif d’optimiser les remboursements, le développement des opérations de

crédit plus ciblées a été également tranchée. C’est dans ce sens qu’ASIENA a ouvert

une section spécialisée dans l’octroi de crédits d’investissement pour les activités

communautaires génératrices de revenus : ACGR.

Le trait qui nous semble plus marquant dans la structure mutualiste est

l’implication des adhérents dans le dispositif. Ils sont personnellement investis dans

la structure. Ce principe d’autogestion distingue la mutuelle de l’assurance. En effet

796 Parmi les prestations offertes par ASIENA, figure la possibilité d’obtenir des prêts adaptés aux

situations de chaque adhérent. Ce qui en période de soudure permet de s’approvisionner en nourriture. En somme, en donnant aux adhérents la possibilité de s’investir, ASIENA aide la population à ne pas subir les variations climatiques, Ibid. p. 19.

797 Pour garantir la viabilité du dispositif, il faut développer en parallèle des opérations de crédit, une opération d’épargne-précaution. Autrement dit, à côté des opérations d’investissement de capitaux sous forme de prêt (opération assez risquée), la mutuelle doit mettre en place, une épargne précaution atteignant un seuil de viabilité rassurant. Pour ce, inciter les adhérents et les personnes extérieures à placer une certaine somme d’argent destinée à assurer leur retraite. Certains économistes emploient l’expression de « matelas financier » qui est essentiel pour la mutuelle pour pouvoir faire face à l’imprévu, http://www.bforbank.com.

798 Par exemple, pour la Congrégation Cistérienne de Bafor, Burkina Faso, le crédit contracté a permis de financer la préparation du terrain de culture, la main d’œuvre pour la plantation […]. Cette congrégation continue d’avoir le projet de souscrire un autre crédit pour effectuer d’autres activités. « Sans ASIENA, elles (les sœurs de la Congrégation n’auraient jamais osé prendre du crédit ailleurs compte tenu de leur statut religieux », V. LECOURT, S. OUEDRAGO et Dr. S. A. SOMÉ, 2007, op. cit., p. 24. Pour la Congrégation de l’Annonciation, le crédit contracté a permis de financer un projet d’élevage ; pour la Congrégation Franciscaines Missionnaires de Marie, au départ, le crédit était prévu pour financer un projet de commercialisation d’un produit alimentaire de base, le néré mais suite à une forte baisse des prix, le crédit a finalement servi à financer l’ouverture d’un espace public numérique. Ces exemples attestent l’efficacité du modèle mutualiste en vue d’un projet.

Page 214: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 213 —

si la mutuelle applique un système participatif 799, l’assurance fonctionne par rapport

à un risque 800. Le mécanisme assurantiel implique de la part des assurés de confier à

une personne morale — la compagnie d’assurance — une somme d’argent en vue de

couvrir les éventuels risques. Pour la structure mutualiste, les adhérents s’accordent à

participer ensemble à l’alimentation d’une caisse commune en vue de couvrir les aléas

menaçant leur patrimoine. Cette implication personnelle des adhérents nous semble

incitative pour les médecins exerçant à Madagascar. Par ailleurs, sachant que les

adhérents relèvent d’une même catégorie de population partageant le même intérêt :

l’exercice serein de leur profession médicale, on peut croire que les médecins locaux

adopteront aisément le modèle mutualiste à vocation indemnitaire qui va garantir une

solvabilité en cas de dette de responsabilité.

§ 2. LE MODÈLE MUTUALISTE TRANSPOSÉ DANS LA PROFESSION

MÉDICALE À MADAGASCAR

149. Par souci de précision, nous avons pris l’expression « modèle mutualiste » au lieu

de « mutuelle » laquelle reste strictement encadrée et soumise à une certaine exigence

tarifaire concernant le fond propre 801. Le « modèle mutualiste » permet aux médecins

d’établir une structure à vocation indemnitaire. Les dispositions législatives sur la

possibilité de se constituer en groupe mutualise doivent prévoir le statut de la

structure concernée (A) ainsi que les éléments garantissant la viabilité à long terme de

la structure (B).

A. Le statut de la structure mutualiste proposé aux médecins malgaches

150. Les dispositions de l’article L. 111-1, alinéa 1 du Code français de la mutualité et

celles de l’article L. 322-26-1 du Code des assurances français, donnent de concevoir

un modèle de structure ayant la capacité de répondre à une mission de prévoyance

799 L’assurance est une Société de capitaux et la mutuelle agit en système participatif.

800 Sa prestation consiste à couvrir ce risque en cas de survenance sous réserve de versement de primes.

801 Pour ce qui relève de la mutualité, le droit malgache s’appuie largement sur le droit français. Depuis le 22 avril 2001, suite aux directives européennes pour l’instauration d’un « marché unique » dans le domaine de l’assurance, toutes les mutuelles devaient impérativement demander leur agrément avant le 31 décembre 2002 pour continuer d’exister. Pour ce, elles devaient avoir constitué des fonds propres assez importants ; au minimum 600 000 euros. Afin de répondre à cette exigence financière, on opère par voie de fusion. Tel est par exemple le cas de la fusion de la Mutuelle de Madagascar avec la SMAPRI (Mutuelle d’accueil et de prévoyance Interprofessionnelle).

Page 215: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 214 —

responsabilité civile médicale. D’après elles, « les mutuelles sont des personnes morales de

droit privé à but non lucratif, […] elles mènent notamment au moyen de cotisations versées par leurs

membres, et dans l’intérêt de ces derniers et de leurs ayants-droit, une action de prévoyance, de

solidarité et d’entraide, dans les conditions prévues par leurs statuts afin de contribuer au

développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs membres et à l’amélioration de leurs

conditions de vie » et que « les sociétés d’assurance mutuelle ont un objet non commercial. Elles sont

constituées pour assurer les risques apportés par leurs sociétaires. Moyennant le paiement d’une

cotisation fixe ou variable, elles garantissent à ces derniers le règlement intégral des engagements

qu’elles contractent […] ». Ainsi, la structure mutualiste que l’on propose aux médecins

exerçant à Madagascar va être une personne morale du droit privé. Elle se composera

de groupes de personnes physiques, en l’occurrence de médecins. À l’instar de

l’association ASIENA que nous avons ultérieurement étudiée, la structure doit être

déclarée au ministère de l’économie et des finances publiques 802 ; ce qui lui accordera

une personnalité juridique avec ses composants 803. La structure doit ensuite fixer des

règles de fonctionnement à travers les clauses statutaires 804. À part les dispositions

classiques 805, les statuts de la structure mutualiste pour les médecins doivent

mentionner la « désignation précise » de l’objet social de la mutuelle. Dans cette

perspective, la formule suivante est proposée :

Chapitre « N » des statuts de la structure mutualiste de groupement de médecins :

Buts et moyens (autrement dit, l’objet social) :

L’action du groupement « tel », porte sur la couverture des dommages 806 susceptibles d’être causés par les propres faits d’un adhérent dans le cadre de son activité professionnelle médicale. La couverture est aussi valable pour les dommages du fait des préposés de l’adhérent ainsi que pour ceux issus des produits défectueux dont l’adhérent aurait eu usage au cours de son activité.

Pour le fonctionnement de la structure mutualise, les « barèmes d’intervention »

doivent prendre en compte la faculté d’intervenir en cas de dettes de responsabilité

802 Voir : n° 147. Lors de la déclaration au ministère, les statuts sont naturellement joints au dossier.

803 La personnalité juridique est l’aptitude à être titulaire de droits et de devoirs.

804 Les clauses statutaires constituent les dispositions conventionnelles qui règlent d’une part, le rapport entre les associés et d’autre part les rapports des associés à l’égard des tiers par la constitution de la personne morale qu’ils ont créé. Les clauses statutaires ont valeur contractuelle entre les adhérents.

805 La forme sociale, l’objet social, la dénomination sociale, le siège social, la durée de l’activité sociale, le fonctionnement et la structure des organes exécutifs ; en somme toutes les mentions permettant d’identifier clairement la personne morale.

806 Corporel, matériel et moral.

Page 216: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 215 —

des adhérents. Bien que considérant le dommage, l’intervention d’une mutuelle

contrairement à la logique indemnitaire fondée sur la réparation intégrale, repose sur

reconnaissance de préjudice. Elle est plus orientée vers une démarche de

« courtoisie » que compensatoire.

En somme, la structure mutualiste permet aux médecins de répondre à

l’obligation de réparer en cas de faute médicale et par là d’exercer sereinement leur

profession. En effet, ayant cotisé au sein de la mutuelle, ils sont en droit de demander

l’intervention de cette dernière en qualité d’organisme d’indemnisation. Pour autant,

le mécanisme mutualiste ne va pas de soi ; encore faut-il, que la caisse de la mutuelle

puisse garantir le règlement intégral des engagements auxquels la mutuelle s’est

engagée 807. Pour ce, une politique d’adéquation entre les recettes 808 de la structure et

les barèmes d’indemnisation, s’impose.

B. La politique d’adéquation entre les cotisations et les barèmes d’indemnisation

151. La mutuelle ayant pour « objet social », la couverture de la dette de responsabilité

professionnelle des adhérents ne peut en aucun cas être perçu comme un porte-monnaie

géant, ouvert à tous les vents, dans lequel il suffirait d’engouffrer la main pour y retirer tous les

subsides nécessaires à ce que tout un chacun pourrait prétendre comme « dû » 809. En effet, la

structure mutualiste répondant à la dette de responsabilité professionnelle des

médecins ne peut être considérée comme un fonds indemnitaire inépuisable mis à la

libre disposition des adhérents. À travers le cas de ASIENA, structure mutualiste

ultérieurement exposée, il a été démontré combien est difficile pour une mutuelle de

répondre aux demandes 810 des adhérents. Bref, l’établissement d’une politique

indemnitaire présente un enjeu de taille : la volonté de résoudre les conflits entre le

807 Pour précision, le règlement intégral des engagements auxquels la mutuelle s’est engagée, diffère

du règlement intégral du préjudice. Le premier est relatif au contrat mutualiste liant l’adhérent et la structure ; le deuxième est un principe fondamental du droit de la responsabilité civile. Pour la structure mutualiste avons-nous précisé, la réparation du préjudice est d’ordre amiable ; de fait, la mutuelle peut fixer ses propres barèmes.

808 Les cotisations et les épargnes des adhérents.

809 N. VIDEAU, L’indemnisation des victimes d’accident avec dommage corporel grave : stop ou encore ? Th. professionnelle, MBA, Manager d’entreprise spécialisation assurance, 2008, p. 4.

810 « […] Les mutuelles mènent notamment au moyen de cotisations versées par leurs membres, et dans l’intérêt de ces derniers et de leurs ayants-droit, une action de prévoyance, de solidarité et d’entraide, dans les conditions prévues par leurs statuts afin de contribuer au développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs membres et à l’amélioration de leurs conditions de vie », article L. 111-1, alinéa 1 du Code français de la mutualité ; « Les sociétés d’assurance mutuelle ont un objet non commercial. Elles sont constituées pour assurer les risques apportés par leurs sociétaires[…] », article L. 322-26-1 du Code des assurances français.

Page 217: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 216 —

corps professionnel et les usagers du système de santé par une intervention financière

automatique sans perdre de vue la stabilité des recettes. Pour relever le défi, il nous

semble que la réponse se trouve dans l’aptitude à conjuguer ensemble la théorie de

l’intégralité de la réparation 811 et la théorie coutumière de la réparation. À propos de

la théorie coutumière de la réparation, il convient de rappeler que les us et coutumes

ont toujours été sensibles à la rupture des rapports sociaux 812 due pour telle ou telle

raison. Ainsi, lorsque par exemple un membre de la société a subi un préjudice

corporel, la collectivité cherchait constamment à rétablir le lien social rompu.

Le droit coutumier a posé la règle selon laquelle, l’auteur d’un fait lié au dommage

doit procéder à un geste de reconnaissance du préjudice sans que la faute soit

recherchée 813. Vu sous cet angle, le devoir de réparer acquiert une autre dimension :

la bienveillance 814. Concrètement, en cas d’échecs de soins, le soignant dont l’acte est

lié à l’échec (sans forcément qu’il y ait faute) va faire preuve de courtoisie à l’égard de

la victime. Ainsi, concernant le cas de Madagascar, on propose que l’orientation

indemnitaire s’inscrive non pas dans une logique compensatrice mais de

« courtoisie ». La démarche de courtoisie présente l’intérêt de conduire à la notion de

« satisfaction de la victime » ; notion explicitée par les dispositions de l’article 16-1 du

Code civil français signifiant la reconnaissance de l’inviolabilité du corps humain 815.

Pour la victime, il n’y a rien de plus structurante que la reconnaissance de la violation

faite à son intégrité corporelle 816. Bien entendu considérant le confort de vie,

l’ajustement tarifaire de l’apport indemnitaire au préjudice est légitime, mais il ne peut

constituer l’élément fondateur de l’indemnisation. La priorité de l’indemnisation n’est

pas de refléter l’équivalence quantitative du préjudice ; elle doit signifier avant tout la

reconnaissance de la violation faite à l’intégrité corporelle du patient.

La vision indemnitaire sous l’angle de la courtoisie pose la question des critères de

fixation des barèmes indemnitaires 817. Conçu à titre indicatif pour évaluer le

811 Le principe de l’intégralité de la réparation se traduit également par l’expression : « Tout le préjudice

doit être réparé, mais rien que le préjudice ».

812 Voir : n° 4 et n° 134.

813 Voir : n° 132, 133

814 Partant, préserve la notoriété professionnelle du médecin.

815 « Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial », article 16-1 du Code civil.

816 « Un préjudice, si maigre soit-il, donne lieu à réparation en droit commun », N. VIDEAU, op. cit., p. 8.

817 Tant en droit français (Référentiel de déficit fonctionnel permanent établi par l’ONIAM) qu’en droit malgache (Barème indicatif d’indemnisation de la Cour d’Appel d’Antanarivo.

Page 218: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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préjudice, le barème ou le référentiel indemnitaire doit avoir une approche malléable

et personnalisée du préjudice 818. L’approche du préjudice ainsi contextualisée

influence considérablement les montants des indemnités inscrits au barème et

consécutivement, les montants retenus par le juge du fonds. Le juge du fonds est

lui-même tenu d’analyser et évaluer les faits en fonction de l’environnement de la

victime avant et après l’accident 819. Parallèlement, pour éviter que les indemnités

prononcées ne soient pas vaines, le juge du fonds doit être attentif au contexte

socio-économique des parties ; notamment à la possibilité financière du

responsable 820.

En somme, la contextualisation du préjudice ajuste les tarifs indemnitaires inscrits

au barème et corrélativement les montants des dommages et intérêts prononcés par

le juge. Il va sans dire que les montants des cotisations à titre de prévoyance

responsabilité professionnelle se verront ainsi modérés. Si l’appréciation in concreto du

préjudice garantit le caractère équitable des dommages, est-il toujours indispensable

de se munir d’un barème indemnitaire ?

818 G. MOR, États Généraux du dommage corporel, Réparation intégrale : mythe ou réalité ? Colloque par le

Conseil National des Barreaux, Paris, Gaz. Pal. 9 et 10 avril 2010, p. 2.

819 Il appartient aux juridictions du fond de réparer, dans les limites des conclusions des parties, le préjudice dont elles reconnaissent le principe, et d’en rechercher l’étendue, dans l’exercice de leur pouvoir souverain d’appréciation ; Cass. Crim. 8 mars 2005. « Les juges du fond sont souverains dans l’évaluation des dommages corporels et dans ses modalités de réparation : l’intime conviction avec comme corollaire la motivation de la décision sont les deux sources ou se désaltère le juge, pour former le droit de la réparation. […]», M. PÉRIER, Régime de la réparation, Évaluation du préjudice corporel : Atteintes à l’intégrité physique, Principes généraux de la réparation, Juris Classeur Responsabilité civile et Assurances, 2003. Ainsi, le juge prend en compte les dommages, les besoins, le coût de la vie, en vue d’obtenir l’évaluation la plus juste de l’indemnisation des victimes. Il garantit la spécificité du handicap et le principe du contradictoire de l’évaluation du préjudice.

820 En l’occurrence les médecins. « Face au faible pouvoir d’achat de l’ensemble de la population, les médecins se voient limités dans leur capacité de souscrire un contrat de prévoyance. En effet, les soins dispensés par les médecins libéraux, les médicaments acquis en pharmacie et les examens complémentaires ne sont remboursés qu’aux patients détenteurs d’une assurance ou d’une mutuelle, si bien que la « clientèle » se tourne plus vers les ONG et les dispensaires confessionnels, lesquels dispensent des soins et médicaments à prix abordables », voir : n° 144. En outre, l’application d’un régime de responsabilité stricte risque de stopper l’effort entrepris par le ministère de la santé malgache : l’augmentation la disponibilité des médecins conformément aux directives de l’OMS, voir : http://www.who.int.

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SECTION II. L’OPPORTUNITÉ D’UN BARÈME D’INDEMNISATION

152. D’emblée il faut reconnaître que l’établissement d’un barème d’indemnisation ne

fait pas l’unanimité des acteurs de la réparation 821. Lors du colloque de

l’indemnisation du dommage corporel en mars 2005, Mme Nicole Guedj, qui était

alors secrétaire d’État aux Droits des victimes, avait bien exprimé cette divergence :

« La barémisation financière des indemnités allouées ? Sur ce point, ma réponse ne peut être qu’un

refus, net et sans concession. Je comprends que les fonds d’indemnisation, les établissements publics,

aient recours à un barème financier. Il leur est nécessaire, autant pour respecter une égalité

d’indemnisation que pour informer les victimes avant une éventuelle demande. En revanche, il ne

saurait être admis à mon sens que les juges se plient à une grille d’indemnisation ». Autrement dit,

sous réserve de l’exclusivité du juge à évaluer les dommages (§ 1), le barème

d’indemnisation reste d’opportunité pour des raisons de traçabilité ; de facilité de

lecture et de maîtrise des paramètres économiques 822 (§ 2).

§ 1. LA LIBERTÉ D’APPRÉCIATION DU JUGE : ARGUMENT LIMITANT

L’INTÉRÊT D’UN BARÈME INDEMNITAIRE

153. Le privilège du juge dans l’évaluation du dommage garantit l’effectivité de deux

éléments fondamentaux du droit processuel : la réparation intégrale du préjudice et le

principe du contradictoire. L’établissement de barème indemnitaire remet en cause

ces fondamentaux du droit (A). Une partie de la doctrine pense en outre que le

système de barème risque de placer la victime au sein d’une intervention indemnitaire

mécanique (B).

A. La « barémisation » indemnitaire : remise en cause des fondamentaux du droit

154. Pour les opposants au principe de barème indemnitaire, se référer à cet outil

signifie céder le privilège de l’évaluation du dommage appartenant au juge au profit

de l’expert médical. À vrai dire, le barème indemnitaire est avant tout 823 la projection

821 La victime, l’Avocat, l’assuré, l’assureur, les organismes d’indemnisation autres que l’assurance et

le juge.

822 Tous les paramètres qui permettent le système indemnitaire de tourner : cotisations, fréquence des sinistres, situation individualisée des victimes…

823 Ensuite, le barème établit la correspondance monétaire des préjudices.

Page 220: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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synthétique des séquelles de l’accident thérapeutique 824, c’est un document établi par

l’expert. Ce document est présumé élaboré avec minutie et méthode ; ses données

reposent non sur des évaluations approximatives du préjudice mais sur des éléments

scientifiques fiables 825. Seulement au nom même de cette fiabilité 826, on risque de

certifier sans réserve la valeur d’un référentiel, le caractère contradictoire de

l’évaluation du préjudice est alors menacé. Autrement dit, puisque le barème est

certifié fiable, il suffit au juge de classer une doléance dans une des cases

correspondantes. Du point de vue des Avocats, adopter cette logique, réduit

considérablement la sécurité juridique des victimes. Bref, à travers les restrictions au

domaine d’intervention des professionnels du droit (juge, avocat), le mécanisme de

barème indemnitaire supprime le principe du contradictoire dans l’évaluation du

préjudice. Tel peut être le cas en matière de préjudice esthétique et de pretium

doloris. Dans ces types de préjudice, le barème indemnitaire se traduit par l’échelle

d’évaluation allant de 1 à 7 827 ; chaque niveau correspond automatiquement à un

montant donné. Bien très pratique, l’échelle d’évaluation paraît handicapant par son

aspect catégorique. En se fiant uniquement à une échelle d’évaluation, on appliquerait

sans concession, le montant correspondant à un niveau de préjudice ; ce qui pour les

avocats, représente une véritable injustice.

En définitif, ce que dénoncent les opposants au système de barème, c’est l’aspect

catégorique de l’évaluation du préjudice qu’il génère. Certifié fiable, le barème risque

d’amener le juge à classer une doléance dans une des cases correspondantes ; de caser

un préjudice moral au sein d’une échelle d’évaluation préétablie. Un professionnel en

conseil juridique 828 a donné une définition très révélatrice de ce phénomène :

la « robotisation » de l’évaluation indemnitaire au détriment de l’institution judiciaire.

824 La dissociation entre séquelles anatomiques réelles et les conséquences fonctionnelles apparentes

ayant répercussion économique dans la vie quotidienne de la victime, voir : n° 110 et s.

825 Voir : Partie I, Titre II, Chapitre II, Section 1, § 1 : Les traits fondamentaux d’une expertise médicale : l’objectivité.

826 L’expertise est conduite de façon méthodique et scientifique. En plus de la rigueur scientifique, l’expertise doit être menée avec bon sens et impartialité. L’expertise est un outil scientifique servant à une recherche logique de la vérité en cas de différends. Elle prend en considération le contexte et le moment des faits, voir : Ibid.

827 L’échelle d’évaluation de 1 à 7 est établie en fonction de la gravité du préjudice.

828 C. EIMON NISENBAUM, avocat au Barreau de Paris, spécialisée en Droit de la réparation du dommage corporel et ne défend que les victimes, http://www.yanous.com.

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B. Le système de barème : un risque de mécanisation de l’évaluation indemnitaire

155. Il est de constat que les organismes d’indemnisation sont plus favorables au

système de barème 829. D’après eux, le barème indemnitaire en tant que document

objectif 830 donne une lecture aisée aux acteurs de l’indemnisation 831. Concrètement,

le barème indemnitaire, se présente à travers un tableau dont la formule se résume

ainsi : « À un âge donné correspond un pourcentage de DFP ( déficit fonctionnel permanent ),

lequel renvoie à un montant d’indemnisation, c’est-à-dire, une valeur monétaire » 832. Cette lecture

aisée est supposée permettre aux parties en cause, d’avoir une vision rapide de ce qui

est financièrement (et socialement 833) en jeu. Si les organismes d’indemnisation

perçoivent dans la célérité, une possibilité d’apaiser les désaccords car se déroulant

hors contexte juridictionnel, les opposants au barème dénoncent cette transaction

hors contexte juridictionnel. Pour eux cette procédure biaise l’appréciation du

préjudice. Le système de barème favorise les organismes d’indemnisation qui veulent

éviter l’engagement financier prononcé par le juge ; engagement qui peut être

monétairement élevé. En effet, si les frais sont à priori à la charge du responsable, ce

sont les organismes d’indemnisation qui sont en définitif les payeurs. Partant, les

opposants au barème d’indemnisation comprennent que pour les organismes

d’indemnisation, il faille arrêter « l’hémorragie des dépenses » 834 et par voie de

conséquence, abandonner la nécessité d’une individualisation des préjudices des

victimes garantie par la voie juridictionnelle.

Il est tout à fait compréhensible que le refus du système de barème repose sur le

principe de la singularité du dommage ; singularité garantie par la voie judiciaire.

829 « Si l’on regarde la situation aujourd’hui personne ne veut de barèmes, hormis les assureurs (organismes

d’indemnisation). », C. LIENHARD, Les barèmes d’indemnisation, Échanges avec H. GROUTEL et G. MOR, Colloque par le Conseil National des Barreaux, Paris, Gaz. Pal. 9 et 10 avril 2010, p. 27. La Fédération Française des Sociétés d’Assurances ou la FFSA justifie la nécessité d’un barème d’indemnisation par le principe de sécurité juridique et d’égalité des justiciables ainsi que pour une meilleure lisibilité des préjudices indemnisables tant pour les victimes que pour l’ensemble des acteurs du dommage corporel, voir : Livre Blanc sur l’indemnisation du dommage corporel, Fédération Française des Sociétés d’Assurances ou la FFSA, avril 2008, p. 5.

830 Voir : supra.

831 La victime et son Conseil, le responsable et (ou) son assureur, les organismes d’indemnisation et le juge.

832 Voir : n° 119.

833 Conséquences sur les relations familiales, travail, le rapport à soi, […].

834 C. EIMON NISENBAUM, avocat au Barreau de Paris, spécialisée en Droit de la réparation du dommage corporel et ne défend que les victimes, http://www.yanous.com.

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Pour autant, l’ouverture au système de barème est tout aussi concevable dans la

mesure où il participe à « l’impérieuse stabilité des provisions » 835.

§ 2. LES ARGUMENTS FAVORABLE AU BARÈME INDEMNITAIRE

156. Les contraintes financières et la technicité de la profession d’organisme

d’indemnisation (A) conduit de facto à établir un barème d’indemnisation (B).

A. La profession d’organisme d’indemnisation

157. La faculté d’une structure à indemniser repose sur le principe mutualiste :

des personnes se regroupent et s’accordent à cotiser en vue d’une caisse commune.

Cette caisse a pour vocation de couvrir les éventuels sinistres des adhérents.

Le montant des cotisations est fixée en multipliant la fréquence des sinistres par le

coût moyen de couverture indemnitaire. Même si cette fréquence est aléatoire, il y a

une méthode qui permet de la prévoir : l’« actuariat ». L’optimisation de cet outil

permettant d’établir les probabilités d’un évènement futur 836au sein d’une entité

économique (la structure mutualise), ne résulte pas du hasard ; elle a besoin d’une

lisibilité des données à traiter ; d’où la nécessité d’un barème énumérant des indices

touchant le préjudice 837.

Après avoir pesé les positions divergentes quant à l’adoption du barème, il nous

semble que dans une société qui se veut solidaire des victimes d’accidents corporels,

les organismes d’indemnisation sont indispensables. Leur viabilité passe par la

maîtrise des risques qui ne saurait être acquise sans un référentiel indemnitaire.

Par ailleurs, malgré la singularité de la situation préjudiciable justifiant une évaluation

personnalisée, il est toujours utile d’avoir des références indiquant la valeur

approximative des dommages liée à la gravité des préjudices. En tant que tel, le

barème reste un outil au service du magistrat, de la victime, de l’avocat et des

organismes d’indemnisation. Convaincue de la nécessité du barème indemnitaire, la

835 C’est-à-dire les recettes des structures indemnitaires, lesquelles garantissent la couverture de la

dette de responsabilité, N. VIDEAU, L’indemnisation des victimes d’accident avec dommage corporel grave : stop ou encore ? Th. professionnelle, MBA, Manager d’entreprise spécialisation assurance, 2008, p. 4.

836 Ainsi, l’actuariat permet d’établir la fréquence moyenne des sinistres tels que : la durée de la vie humaine ; le taux de la possibilité d’insertion professionnelle ; l’ampleur des pertes pécuniaires associées […].

837 Tels sont par exemple, l’âge de la victime, ses engagements professionnels, sa qualité de vie, la stabilisation des séquelles et bien entendu, la nécessité de disposer de la nomenclature des préjudices corporels eu égard au train de vie de la victime avant et après l’accident.

Page 223: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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présente étude propose pour Madagascar un barème propre aux dommages corporels

issus d’accidents médicaux 838.

B. La proposition d’un barème indemnitaire pour la responsabilité médicale à Madagascar

158. Le document proposé par la présente étude est fortement emprunt du droit

français, notamment du résultat du groupe de travail dirigé par Jean-Pierre

Dintilhac 839

— Proposition de barème indicatif d’indemnisation en cas d’accidents médicaux —

Préjudices patrimoniaux avant consolidation :

préjudices patrimoniaux temporaires

Évaluation monétaire des préjudices patrimoniaux temporaires

Préjudices patrimoniaux après consolidation :

préjudices patrimoniaux permanents

Évaluation monétaire des préjudices patrimoniaux permanents

— Les dépenses de santé actuelles :

L’ensemble des frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, générés par l’accident thérapeutique avant la stabilisation de l’état de la victime.

Si une partie de ces dépenses sont prises en charge par les organismes

sociaux 840, ou par les assurances privées, un

L’appréciation du montant de ses dépenses, repose sur les factures

justifiant les dépenses liées à la perte d’autonomie due au préjudice.

— Les dépenses de santé futures :

Les frais médicalement prévisibles et rendus nécessaires par l’état pathologique de la victime après consolidation : les frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques et assimilés (soins infirmiers, soins de kinésithérapie, analyses médicaux, installation de prothèses (dents, yeux…), la pose d’appareillages spécifiques et qui sont

L’appréciation du montant des dépenses repose sur les devis.

Lorsque le coût de certains frais (hospitalisation, appareillages ou autres) est périodique, il est possible de les annualiser puis de les capitaliser.

838 Sachant que Madagascar dispose d’un barème d’indemnisation en matière de préjudice corporel

pris dans sa globalité : le barème indicatif d’indemnisation de la Cour d’Appel d’Antananrivo, voir : n° 119.

839 La Chancellerie a engagé une réflexion globale en vue d’améliorer les conditions d’indemnisation du préjudice corporel. Dans ce cadre, Monsieur Jean-Pierre Dintilhac, président de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, a remis au Garde des Sceaux le 28 octobre 2005, un rapport proposant une nomenclature des préjudices corporels. Ladite nomenclature a pour objectif de guider les praticiens de l’indemnisation en répertoriant les postes d’indemnisation selon des définitions qui peuvent être globalement partagées. Le rapport Dintilhac s’inscrit dans la lignée d’un travail approfondi en matière d’indemnisation corporel : le rapport Lambert-Faivre de 2003. Et il se perpétue par la publication de référentiel récent portant sur l’indemnisation des préjudices en cas de blessures ou de décès, Benoît Mornet 2012.

840 À Madagascar, à défaut de sécurité sociale, les frais liés aux maladies non professionnelles incombent à l’assurance privée. Par contre en présence d’un accident médical rattaché à une maladie professionnelle, la Caisse Nationale de la Prévoyance Sociale de Madagascar ou la CNaPS intervient en qualité d’organisme de prévoyance sociale.

Page 224: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 223 —

reliquat reste à la charge de la victime.

— Les frais divers :

Les honoraires que la victime a été contrainte de débourser auprès de médecins experts pour se faire conseiller et assister, les frais de transport, les dépenses destinées à compenser des activités non professionnelles telles que des travaux ménagers, les frais de garde d’enfant.

— Les pertes de gains professionnels actuels :

Les pertes actuelles de revenus subis par la victime du fait du dommage corporel (handicap physique et psychologique). Les pertes de gains professionnels peuvent être totales ou partielles.

Évaluation sur la base de factures

L’indemnisation est limitée au montant des salaires brut pendant la durée d’inactivité jusqu’au jour de consolidation. Elle s’apprécie au vu des bulletins de salaires antérieurs à l’accident.

nécessaires pour suppléer le handicap physiologiques permanent.

— L’assistance d’une tierce personne :

La dépense de la victime du fait de la présence permanente d’une tierce personne afin d’assurer une assistance dans les actes courant de la vie.

La présence de tierce contribue au respect de la dignité de la victime.

— Les pertes de gains professionnels futurs et les incidences professionnelles :

La perte ou la diminution des revenus professionnels de la victime suite à l’incapacité permanente due à la survenance du dommage : perte, changement ou pénibilité de l’emploi. En somme, les frais liés à la difficulté d’insertion professionnelle.

Pour les victimes qui ne sont pas encore dans le milieu professionnel, il faut tenir compte de la privation de ressources professionnelles futures et les troubles dans les conditions d’existence.

Il y a lieu également de tenir compte de la perte de retraite que la victime va subir.

La rémunération de la tierce personne est calculée sur la base du taux horaire du SMIC. L’indemnisation varie en fonction du nombre d’heures d’assistance et

le type d’aide nécessaire.

Le montant d’une indemnité allouée au titre de l’assistance d’une tierce personne ne saurait être réduit en cas d’assistance bénévole par

un membre de la famille.

Ce poste de préjudice est évalué à partir des revenus antérieurs. Les pertes sont ensuite annualisées.

Il est difficile de fixer montants des préjudices futures. Mais il est possible de prendre en compte les chances d’insertion professionnelle.

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— 224 —

De tout ce qui précède, il peut être soutenu que, le droit ancien malgache, le droit

positif en vigueur avec l’apport du droit français, ont permis de dégager des solutions

amiables et contentieuses pour la résolution des différends entre le corps médical et

le patient à Madagascar ; puissent-elle enrichir toutes les démarches normatives

jusque-là entreprises. Ces solutions amiables ont été conçues dans un esprit attentif

au contexte socio-économique du pays et dans une ouverture à l’évolution du droit

médical français fortement marqué par loi du 4 mars 2002 relative aux droits des

malades et à la qualité du système de santé. L’intérêt accordé au droit médical français

n’a pas conduit à reproduire tels que les principes de droit français de la réparation, il

a révélé l’importance de ce droit en tant qu’outil d’inspiration juridique à manier avec

mesure.

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— 225 —

TITRE II.

LE DROIT MÉDICAL FRANÇAIS : SOURCE LÉGISLATIVE À MANIPULER AVEC MESURE

Page 227: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 226 —

159. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de

santé, publiée au JORF n° 54 le 5 mars 2002, confirme que la relation thérapeutique

est par essence « une relation d’incertitude » 841 et que par conséquent, elle ne peut

engager qu’une responsabilité de moyens. Toutefois, pour des raisons

compassionnelles, la loi maintient, sous réserve de conditions strictes 842, le principe

de l’indemnisation automatique des victimes d’accidents médicaux. Dès lors, l’on

pourrait penser que la loi relative aux droits des malades accorde une entière sécurité

juridique aux parties. Pourtant, quelques études ont démontré que le principe de la

démocratie sanitaire opérée par la loi de 2002 a produit un phénomène de recherche

intempestive de la faute médicale. Et qu’un tel phénomène tend le corps médical à

prendre des mesures défensives fragilisant la relation de confiance avec le patient.

Dans un premier temps, il convient de comprendre pourquoi la loi du 4 mars 2002

n’apporte pas une entière sécurité juridique aux parties (Chapitre I). Une fois

l’explication acquise, il serait temps d’honorer l’objectif de l’étude : un travail de

codification mesurée de la responsabilité médicale à Madagascar (Chapitre II).

841 P. SARGOS, Réflexion sur les accidents médicaux et la doctrine jurisprudentielle de la Cour de cassation en

matière de responsabilité médicale, in La construction de la responsabilité civile de S. CARVAL, Doctrine juridique Puf, 2001, p. 385.

842 Conditions relatives au seuil de gravité, voir : n° 36 et s.

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CHAPITRE I.

L’INCAPACITÉ DE LA LOI DU 4 MARS 2002 À APPORTER UNE SÉCURITÉ JURIDIQUE INTÉGRALE AUX PARTIES

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160. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de

santé a consacré des principes inestimables pour l’encadrement juridique du lien

médecin-malade. Parmi ces principes figurent principalement : le respect de la liberté

du patient à travers l’idée de démocratie sanitaire ; la réparation équitable qui

conjugue responsabilité pour faute et solidarité en cas d’aléas 843 et l’égalité de

traitement des patients qu’ils soient rattachés aux institutions d’ordre public ou

d’ordre privé 844. En outre, la loi du 4 mars 2002 est un signe législatif fort pour dire

la volonté de surpasser les incidents graves 845 qui ont marqué l’histoire de la santé en

France. Parallèlement à ces éloges rendus à la loi du 4 mars 2002, quelques réserves

ont été aussi émises à son égard. Il sied de les analyser (Section I). Face à ces

réserves, il importe de voir les interventions législatives qui puissent rétablir la

justesse d’analyse (Section II).

843 « Responsabilité » médicale pour faute et « Solidarité » pour les préjudices graves non issus de

faute médicale. Seul l’accident médical qui trouve sa cause dans la faute peut être réparé au titre de la responsabilité. Toutefois, l’accident médical qui ne trouve pas sa cause dans la faute peut être réparé au titre de la solidarité nationale (ONIAM) sous réserve de répondre à un certain nombre de conditions et notamment le caractère anormalement grave du dommage, voir : M. BACACHE, La faute technique, n° 472266, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18-2, p. 6.

844 La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a unifié les règles de responsabilité applicables quel que soit la structure, publique ou privée dans laquelle est pris en charge le patient. Désormais, la responsabilité qu’elle soit civile ou administrative, délictuelle ou contractuelle obéit pour l’essentiel au même régime : le principe de la responsabilité pour faute prévue à l’article L. 1142-1, ali 1e r du Code de la santé publique : « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent Code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins, ne sont pas responsables des conséquences d’acte de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute ». En d’autres termes, la victime ne peut en principe engager la responsabilité du médecin ou de l’établissement de santé qu’en rapportant la preuve d’une faute commise par ces derniers.

845 Parmi ces incidents, figurent : l’affaire « amiante » dont la première prise de conscience remonte en 1970 et la médiatisation du problème sanitaire en 1990 ; l’affaire du « sang contaminé VIH » en 1984 et l’affaire de « l’hormone de croissance » de 1988 provoquant la maladie de Creutzfeldt-Jakob des victimes.

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— 229 —

SECTION I. LES RÉSERVES ÉMISES À L’ÉGARD DE LA LOI DU 4 MARS 2002

161. Les réserves les plus significatifs se situent au niveau des comportements

professionnels 846. Depuis la loi du 4 mars 2002, les soignants adoptent une attitude

défensive par crainte d’un phénomène de judiciarisation accrue 847 (§ 1). Par ailleurs,

les soignants ne manquent pas de signifier l’extension exagérée du contenu du devoir

d’information médicale (§ 1).

§ 1. L’ADOPTION D’UNE ATTITUDE D’AUTOPROTECTION PAR LE CORPS MÉDICAL FACE À LA JUDICIARISATION CROISSANTE

162. Si le soin apparaît comme la raison d’être et l’origine de la médecine 848, face à la

tension ressentie par les praticiens en raison de la judiciarisation croissante 849, on

assiste à une métamorphose de l’objet de l’activité médicale. Elle s’oriente plus vers

une démarche pédagogique sur fond de devoir d’information au détriment du devoir

de soigner (A). Partant, la pratique de la médecine devient défensive au lieu

d’assumer une mission protectrice (B).

846 Les autres sont les fruits des analyses doctrinales, autrement dit viennent des juristes.

847 La « judiciarisation » renvoie à deux mouvements : d’une part, elle fait référence à une pression juridictionnelle exprimant l’idée d’une « tension juridictionnelle » ressentie par le corps médical vis-à-vis de l’institution judiciaire et d’autre part, elle fait référence à l’idée d’une « pression conflictuelle », projetant à la tension globale qui pèse sur le corps médical tant en matière de résolution amiable que judiciaire, voir : A. LAUDE, J. PARIENTE et D. TABUTEAU, La judiciarisation de la santé, Document de synthèse d’un rapport scientifique commandé par le G.I.P. Mission de recherche Droit et Justice, décembre 2011, p. 2.

848 C. LEFÈVE, La philosophie du soin, La matière et l’esprit, Université de Mons-Hainaut, n° 4, Médecine et Philosophie, avril 2006, p. 25-34.

849 Pour illustrer le phénomène de judiciarisation, nous avons recueilli les données d’une étude menée par une équipe de l’IDS : Institut de droit sanitaire, Université Descartes ; étude recommandée par le G.I.P. Mission de recherche Droit et Justice. L’étude porte sur la période 1999-2009. Elle relate l’importance quantitative du nombre de décisions relative à la mise en cause des professionnels médicaux. Les décisions sont pour une partie amiable (ONIAM°) et pour une partie contentieuse (juridiction de l’ordre administratif et judiciaire ; sans oublier l’intervention des assureurs). Après dépouillement des affaires par le groupe de recherche, pour ne retenir que celles estimées vraiment appropriées au domaine de la responsabilité médicale, les nombres de décisions prononcées sont : CAA : 7000, CA : 1000, C. Cass : 300 ; ONIAM : les dossiers indemnisés à plus de 15 000 euros : 100, AP-PH (étant leur propre assureur, article L.1142-2, ali.3 du Code de la santé publique) : les dossiers indemnisés à plus de 15 000 euros : 200, voir : A. LAUDE, J. PARIENTE et D. TABUTEAU, opit. cit., p. 3 et 4.

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— 230 —

A. Métamorphose de l’objet de l’activité médicale : orientation vers un devoir pédagogique d’information au détriment du devoir de soin

163. Quand le médecin accomplit son devoir d’information, il répond à une mission

d’enseignement. Il « éduque » le patient sur la portée de la thérapie à administrer afin

qu’il puisse y consentir librement 850. En d’autres termes, le patient à travers

l’information transmise par le praticien devient acteur dans le processus

thérapeutique. Si l’information est justifiée par la nécessité d’obtenir un

consentement éclairé de l’intéressé ; elle peut aussi déstabiliser le processus de la prise

en charge et notamment, la portée d’une décision médicale. L’information ne devrait

pas constituer le centre de l’objet central de l’activité médicale, laquelle est avant tout

un acte de soin. Or à ce propos, les médecins ne manquent pas de dénoncer

l’évolution radicale de la profession. Ils disent : « Depuis toujours, l’acte médical, quel que

soit son degré de technicité, n’a qu’une vocation, celle de soigner, guérir et maintenir en vie. Or, avec

l’évolution des mœurs combinée aux progrès scientifiques considérables, la finalité thérapeutique

s’estompe » 851.

Le prétendu revirement de l’objet de l’activité médical ne peut qu’être ressenti que

comme une atteinte à la liberté professionnelle ; il entrave tant l’indépendance

professionnelle 852 que la liberté de prescription. En principe l’indépendance

professionnelle garantit la liberté du médecin à l’égard du patient et de la famille de

celui-ci de façon à ce que ces derniers n’influencent pas la décision thérapeutique.

Un patient ayant reçu beaucoup d’informations, risque de s’immiscer dans la

décision médicale. Dans le même sens, le principe de la liberté de prescription 853

autorisant le médecin à appliquer les soins les appropriées va se trouver limitée. En

effet, à travers l’article L. 1111-4 de la loi du 4 mars 2002 en ces termes : « Toute

personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations

qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé […] », on perçoit une passation (sinon un

partage) de la décision thérapeutique aux patients. La doctrine parle du concept

850 « Il ne peut être atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité thérapeutique pour la personne. Le

consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir », article 16-3 du Code civil.

851 M-H. RENAUT, L’évolution de l’acte médicale, R.D.S.S, vol. 35, n° 1, 1999, p. 45.

852 Le principe de l’indépendance professionnelle signifie que « le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit », article 5 du Code de déontologie français, repris à l’article. R. 4127-5 du Code de la santé publique.

853 Article 8 et 70 du Code déontologie correspondant respectivement aux articles article R 4127-8 et R. 4127-70 du Code de la santé publique.

Page 232: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

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d’autodétermination 854, lequel peut constituer une entrave à la qualité des soins

prodigués 855.

En somme la métamorphose de l’objet de la profession médicale se résume dans

le fait que le devoir déontologique premier de soigner cède le pas au devoir de

respect de la liberté du patient. Désormais, le médecin applique les soins qu’il estime

appropriée mais sous réserve d’un consentement non-équivoque du patient. Un tel

consentement est acquis via la mission d’information médicale. L’expression d’un

philosophe contemporain résume à juste titre l’agir que doit adopter le

professionnel : « Fais à autrui son bien tel que tu t’es engagé, en accord avec lui-même, à le lui

faire » 856. Dans ces circonstances, le prétexte de respect de la liberté d’autrui peut très

vite consister en un désengagement à son égard. En effet, la crainte de voir sa

responsabilité mise en cause, conduit le corps médical à pratiquer la médecine dite

défensive.

B. L’émergence de la médecine défensive

164. La médecine défensive est définie comme : « L’altération de la modalité de la pratique

médicale induite par la menace de la responsabilité, dont la principale finalité est d’écarter

l’éventualité des poursuites par le patient comme de fournir une défense juridique solide dans

l’hypothèse où de telles poursuites seraient engagées » 857. La médecine défensive se manifeste

par la prescription de services médicaux supplémentaires non forcément

indispensables 858. Ces attitudes génèrent au final des faits inattendus. Les résultats

d’enquêtes menées en Auvergne, Rouen et Midi-Pyrénées 859, le témoignent :

854 Pour aller plus loin sur l’analyse du modèle de l’autodétermination, voir : S. RAMEIX, La décision

médicale. Du paternalisme des médecins à l’autonomie des patients, Cahiers philosophiques, juin 2004, p. 48 et s.

855 « […]. Cependant, il ne faut guère se faire d’illusion. Le partage de décisions a des limites de fait : même éclairé, le patient en saura fatalement moins que son thérapeute pour juger du bien-fondé de tel ou tel traitement. », P.Y. POINDRON, 2002 : l’année de tous les chantiers, in Le Concours médical, 30 novembre 2002, n° 37.

856 E. H. TRISTAM, The Foundations of Biothics, New York, Oxford University Press, 1979 ; 4 ème éd., 1994.

857 Définition donnée par l’American Médical Association. Ainsi la médecine défensive concerne l’ensemble des pratiques adoptées par le corps médical pour se mettre à couvert des poursuites juridiques : établissement de documents d’informations attestant la qualité libre et éclairée du consentement du patient ; les pratiques d’analyses médicaux complémentaires non indispensables afin de se prémunir d’une responsabilité suite à un manquement à l’obligation médicale de moyens […].

858 La prescription d’analyses médicales complémentaires non indispensables afin de se prémunir d’une responsabilité pour défaut d’obligation médicale de moyens.

859 Pour mesurer l’influence réelle du contexte de judiciarisation de la médecine sur les pratiques médicales, une étude a été menée auprès de médecins généralistes d’Auvergne, de Rouen et du

…/…

Page 233: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 232 —

En Auvergne, 62 % des médecins interviewés disent avoir prescrit plusieurs examens complémentaires, médicaments et consultations spécialisées pour se protéger en cas d’éventuelles poursuites en justice. Si la prescription de médicaments à effets secondaires est relativement modérée, tel n’est pas le cas pour les renvois vers des confrères spécialisés : 49 % avouent l’avoir fait contre 26,2 % qui se sont abstenus. Pour la prescription d’examens complémentaires, 50 % déclarent avoir prescrit des examens biologiques ou d’imageries contre 26,5 % qui se sont abstenus. Au CHU de Rouen, les enquêtes ont montré une explosion de prescription de radiographies du crâne pour traumatismes crâniens. Enfin, chez des médecins généralistes du Midi-Pyrénées, 87,5 % des

médecins questionnés disent recourir à des prescriptions défensives 860.

Enquêtes conduites par P. É. DESPLATS, N. FAVROLT, L. GERBAUD et

T. FAICT, R.G.D.M., Ibid.

Dans tous ces cas de figure, la motivation principale des praticiens se situe dans la

crainte des poursuites judiciaires. En effet, toutes ces pratiques sont souvent initiées

pour se prémunir des actions en justice et non pour bénéficier les patients des

progrès de la technique médicale. D’ailleurs à propos des techniques de pointes, il

faut noter que leur usage intempestif n’est pas sans risque sanitaire pour le patient.

L’enquête menée en Auvergne établit par exemple que nombreux sont les praticiens

qui continuent d’exposer les patients au rayonnement ionisant à visée diagnostique

malgré les risques que cela comporte 861. Si l’usage non raisonné des progrès de la

technique médicale présente des risques sanitaires pour le patient, il n’est pas non

plus dénué d’inconvénients pour les praticiens et en particulier sur le plan de la

responsabilité juridique. Pratiqué pour se prémunir des actions en justice, l’usage

intempestif des progrès médicaux peut exposer les médecins aux poursuites.

Ils peuvent être condamnés pour la prescription ou la réalisation d’examens

Midi-Pyrénées. Le résultat de l’enquête a été rapporté par P. E. DESPLATS, N. FAVROLT, L. GERBAUD et T. FAICT, L’influence de la judiciarisation sur les pratiques médicales. Quand Esculape craint Thémis, R.G.D.M. n° 28, 2008/09, p. 125-144.

860 Voir aussi, J. E. BOURCIER, La judiciarisation et l’exercice de la médecine générale en 2005, Th. pour le doctorat en médecine juillet 2006, Université Paul Sabatier Toulouse, 2006.

861 J. DONADIEU, P. SCANF, P. PIRARD et B. AUBERT, Exposition médicale aux rayonnements ionisants à visée diagnostique de la population française : état des lieux fin 2002, en vue de la mise en place d’un système de surveillance, Bull. apidémiol. Hebd., 2005, p. 102-106. L’étude montre une quasi-stagnation du nombre de radiologies diagnostiques réalisées en France entre 1982 et 2003, mais une augmentation de 90 % du nombre de scanners plus irradiants que les radiographies sur la même période. Par ailleurs, une étude du Centre international de recherche sur le cancer de l’OMS, révèle que l’exposition aux rayons X des radiographies pulmonaires peut augmenter le risque de cancer du sein chez certaines femmes, Communiqué de presse n° 170, 27 juin 2006, Centre international de recherche sur le cancer, OMS.

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injustifiés au sens de l’article R. 4127-8, de l’article R. 4127-40 et de l’article L. 1110-

5 du Code de la santé publique 862.

En somme, en cohérence avec le principe du respect de l’intégrité corporelle telle

qu’elle est prescrite à l’article 16-1 du Code civil 863, l’intervention médicale doit se

déployer en ces termes : « primum, non nocere », c’est-à-dire, ne pas faire courir un

risque injustifié au patient.

Certes l’obligation principale du médecin est la protection de la personne

humaine, seulement face à la tension ressentie par le phénomène de judiciarisation,

un autre impératif occupe l’esprit des praticiens : l’autoprotection contre toute mise

en cause de leur responsabilité professionnelle. Ainsi, le corps médical a tendance à

s’assurer qu’il dispose des preuves attestant le respect de l’obligation médicale de

moyens 864 : les écrits attestant de l’obligation d’information. Mais les mentions

légales relatives au contenu des informations, sont assez étendues 865. Et les

professionnels de santé y dénoncent un élargissement du devoir d’informations.

§ 2. L’ÉLARGISSEMENT DU CONTENU DE L’OBLIGATION D’INFORMATION

MÉDICALE

165. L’article L. 1111-2, alinéa 1er du Code de la santé publique dispose que :

Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de

862 « Dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses

prescriptions qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance. Il doit, sans négliger son devoir d’assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins. Il doit tenir compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et thérapeutiques possibles », article R. 4127-8 du Code de la santé publique (l’article 8 du Code de déontologie) ; « Le médecin doit s’interdire, dans les investigations et interventions qu’il pratique comme dans les thérapeutiques qu’il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié », article R. 4127-40 du Code de la santé publique (article 40 du Code de déontologie) ; «Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances médicales, lui faire courir des risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté», article L. 1110-5 du Code de la santé publique.

863 « Chacun a droit au respect de son corps », article 16-1, ali. 1e r du Code civil.

864 « Celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation » Cass. civ. 1ère, 25 février 1997, Gaz. Pal. 1997. 1, panor. p. 105.

865 M. BACACHE, La faute d’humanisme : Le défaut d’information, n° 472264, LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18-1, p. 2, 3.

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prévention qui sont proposés 866, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l’exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d’impossibilité de la retrouver. Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser. Cette information est délivrée au cours d’un entretien individuel.

À lire ces dispositions, l’obligation d’information est excessivement étendue 867. À

travers cette étendue considérable du devoir d’information, l’objectif du législateur

dépasse surement le « simple » devoir de notifier le patient sur sa maladie, c’est-à-dire,

le diagnostic. Le législateur vise à ce que le contenu des informations éclaire la

décision du malade sur la suite à donner à sa santé 868. L’obligation d’information se

prolonge par là en une obligation de conseil (A). Cette obligation de conseil est

d’autant plus confirmée dans la mesure où l’information s’étend sur les risques liés à

la thérapie (B).

A. Le corollaire de l’information : le devoir de conseil

166. « Compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit », énonce l’article

L. 1111-4 du Code de la santé publique, « toute personne prend, avec le professionnel de santé

les décisions concernant sa santé ». Ce qui signifie qu’au-delà de l’objectif du consentement

éclairé, le devoir d’information a pour but d’atteindre « autant que faire se peut », la plus

démocratique avant même la décision médicale la plus appropriée. En accomplissant

son devoir d’information, le médecin doit pouvoir aider le patient à prendre la bonne

décision. Il arrive que le devoir de conseil consiste en un refus de procéder à un acte

médical qui expose un patient au danger et ceci, malgré une demande manifeste de sa

866 Confirmé par l’article 35 du Code de déontologie : (article R.4127-35 du Code de la santé

publique) : « Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension ».

867 M. BACACHE, Ibid.

868 À cet effet, l’intitulé du chapitre 1e r du Code de la santé publique : « Information des usagers du système de santé et expression de leur volonté », est très signifiant, D. ROMAN, Le respect de la volonté du malade : Une obligation limitée ?, R.D.S.S., 2005, p. 423. Il réitère un acquis jurisprudentiel selon lequel, « Le médecin doit fournir au patient les renseignements qu’il était en droit d’attendre pour choisir entre l’acceptation ou le refus de l’opération avec une connaissance suffisante de son mal, de sa nature et des conséquences possibles de l’intervention envisagée », C. Cass., 1ère, 29 février 1961, D. 1961, p. 534 ; J.C.P. 1961, II, 12129.

Page 236: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 235 —

part à subir l’intervention médicale. Engage ainsi sa responsabilité le médecin qui

accepte, à la demande d’une patiente de procéder à une induction ovarienne et à un

déclenchement prématuré de l’accouchement 869 alors que ces actes étaient

médicalement contre-indiqués. Par contre, du moment où le médecin a accompli son

devoir de conseil, il ne peut être tenu responsable de la décision d’un patient à

procéder à un acte médical qui l’expose au danger. Autrement formulé, si le médecin

doit remplir une devoir de conseil vis-à-vis du patient, il n’est pas tenu de le

convaincre du danger de l’acte médical qu’il demande au point de l’en dissuader 870.

C’est dans ce sens que la Cour de cassation a sanctionné un arrêt de la cour d’appel

qui avait condamné un médecin pour « n’avoir pas été en mesure de convaincre sa patiente des

dangers présentés par une anesthésie simplement locale » à l’occasion d’une opération de la

cataracte, l’injection anesthésique ayant provoqué un chémosis hémorragique 871 suivi

de la rupture du globe oculaire.

En somme, si le devoir de conseil via les informations médicales doit amener le

patient à prendre la décision médicale la plus appropriée, il n’engage pas le médecin à

une obligation médicale de résultat quant à l’issu de l’intervention. Par ailleurs, malgré

l’étendue très vaste de l’obligation d’information, un seul de ses éléments reste le plus

déterminant dans l’orientation du choix du patient : le renseignement sur les risques

de l’intervention. À ce sujet, force est de constater un élargissement considérable du

contenu de l’obligation.

B. L’élargissement des informations sur les risques

167. Constater l’élargissement des informations portant sur les risques thérapeutiques

consiste à comparer les dispositions législatives antérieures de celles qui sont

actuellement en vigueur. Il s’agit alors d’observer l’évolution de la portée du devoir

d’information en matière de risque (1). Malgré l’étendue de l’obligation

d’information, des dispositions législatives garantissent toutefois, une marge de

869 La parturiente a demandé au professionnel de procéder à un déclenchement provoqué. Ce

dernier a accédé à la demande mais une rupture utérine a entraîné une hémorragie immédiate abondante provoquant le décès, Cass. civ. 1e r, 27 mai 1998 : D. 1998, p. 530, note Laroche-Gisserot.

870 Cass. civ. 1ère, 18 janvier 2000, J.C.P. G 2000, I, 243, note. G. Viney.

871 Le chémosis est un œdème généralement d’origine inflammatoire ou infectieuse de la conjonctive (membrane tapissant la face avant de l’œil et l’intérieur des paupières) http://www.vulgaris-medical.com.

Page 237: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 236 —

manœuvre aux professionnels; en soi, elles constituent des limites à l’obligation

médicale d’information (2).

1. Évolution de la portée du risque au sein du devoir d’information

168. Traditionnellement, le devoir d’information porte sur les risques graves que peut

représenter une intervention thérapeutique. Mais comme en matière de santé, tout ce

qui touche le bien-être du patient ne peut être minimisé, la question se pose sur ce

qu’on entend par « risques graves ». L’obligation d’information avons-nous dit, s’inscrit

dans l’orientation de la décision thérapeutique ; on pourrait alors déduire que toutes

les informations qui influencent cette décision, sont graves. En réalité, l’interprétation

ne peut qu’être large puisqu’exercent une influence sur le choix du patient, toutes les

informations sur les éventuels préjudices corporels 872. En définitif, la qualification

des risques graves relèvent des solutions prétoriennes 873.

Pour précision, l’information sur tous les risques graves est valable même pour les

actes ne s’inscrivant pas dans la thérapie stricte comme les interventions esthétiques.

La jurisprudence impose en effet que les risques de dégradations esthétiques

signifiantes soient communiqués au patient 874. Le médecin doit signifier les

renseignements sur toutes les conséquences cicatricielles d’une opération (durée,

difficultés de cicatrisation …). Un arrêt de la première chambre civile du 17 février

1998 illustre ces principes en disposant qu’: « en matière d’actes médicaux et chirurgicaux à

visée esthétique, l’obligation d’information doit porter non seulement sur les risques graves de

l’intervention mais aussi sur tous les inconvénients pouvant en résulter » 875.

Si la délimitation du concept « gravité » par rapport au risque, éclaire le

professionnel sur la responsabilité pouvant être encourue, depuis la loi du 4 mars

2002, la notion de « gravité » n’est plus limitative de l’obligation d’information. La loi

du 4 mars 2002 a étendu la portée de l’information. D’après l’article L. 1111-2 du

Code de la santé publique 876, l’information doit désormais porter non seulement sur

872 Voire les informations à propos du coût de l’intervention ; autrement dit l’information englobe

le préjudice patrimonial.

873 Les solutions jurisprudentielles.

874 P. SARGOS, rapport sous Cass. civ. 1re, 14 octobre 1997 : J.C.P. G 1997, II, 22942.

875 En l’espèce, l’information dont est tenu le chirurgien portait sur le risque de devoir procéder à deux incisions abdominales à l’occasion d’une lipo-aspiration, Cass. civ. 1e r, 17 février 1998, J.C.P.G. 1998, I, 144, n° 20, obs. G. Viney ; R.T.D civ. 1998, I, p. 681, obs. P. Jourdain.

876 Article institué par la loi du 4 mars 2002 ;

Page 238: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 237 —

les risques graves 877 mais également sur les risques fréquents. Bref, même en

l’absence de risques graves, l’obligation d’information est maintenue et il porte sur les

risques fréquents. Et même la notion de « fréquence » du risque va très vite être

dépassée. En effet, sur le plan temporel, la loi dit que l’obligation d’information est

maintenue au-delà même de l’intervention thérapeutique. En ce sens, l’article

L. 1111-2 alinéa 1er du Code de la santé publique dispose : « Lorsque postérieurement à

l’exécution des investigations, traitements et actions de prévention, des risques nouveaux sont

identifiés, la personne concernée doit en être informée sauf en cas d’impossibilité de la retrouver ».

De ces évolutions jurisprudentielles et légales, on peut retenir que la portée de

l’obligation d’information relève des risques graves ; connus, et fréquents si ce n’est

plus. À propos de la fréquence des risques, la Cour de cassation a apporté une

remarque judicieuse : « Si les risques […] se réalisent rarement ils n’en sont pas moins

graves » 878. Par voie de conséquence, l’obligation d’informer porte également sur les

risques exceptionnels 879. En 1998, la Haute Juridiction affirme clairement

que :« Hormis le cas d’urgence, d’impossibilité ou de refus du patient d’être informé, un médecin est

tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférant aux

investigations et soins proposés, et qu’il n’est pas dispensé de cette obligation par le seul fait que ces

risques ne se réalisent qu’exceptionnellement ». En l’espèce en raison d’une fracture

lombaire, le chirurgien a procédé à une intervention chirurgicale 880 sur Mme X.

L’intervention contenait un risque de complication de thrombophlébite du sinus avec

pour conséquence la perte de la vue; risque qui en l’occurrence s’est réalisé malgré sa

rareté. La Haute Juridiction a sanctionné la décision de la juridiction du second degré

n’ayant pas retenu la responsabilité du chirurgien au motif que le risque soit rarissime.

Au final on comprend que le risque devant être communiqué ne dépend pas

uniquement de la fréquence de sa survenance car même exceptionnel, un risque doit

être notifié. La Haute Juridiction va même aller plus loin quand dans l’affaire sus

citée, le risque concerné était encore sujet à débattre au sein de la communauté

877 Si le médecin est tenu d’informer son patient sur les risques graves, encore faut-il qu’il s’agisse de

risques connus, Pour aller plus loin, voir : M. BACACHE, n° 9, op. cit, p. 4, 5.

878 Concernant un préjudice esthétique, Cass.1re civ. 17 novembre, 1769.

879 Pour précision, l’obligation d’information sur les risques exceptionnels était déjà acquise dans le domaine des préjudices esthétiques. Un arrêt en date du 17 novembre 1769 souligne que : « L’obligation d’information dans le domaine des préjudices esthétiques est d’autant plus impérieuse dans la mesure où il ne s’agit pas de donner des soins à un malade mais de remédier à une imperfection physique », Cass.1re civ. 17 novembre 1769.

880 Mise en place d’un cadre de Hartchild.

Page 239: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 238 —

scientifique. Dès lors, on peut conclure qu’un risque soupçonné est une donnée de la

science bien que non encore validée par la communauté scientifique ; et à ce titre,

doit être communiqué au patient 881.

Considérant toute cette évolution majeure de l’appréciation du risque dans le

domaine de l’information médicale, on peut très bien comprendre la frustration que

peuvent ressentir les professionnels médicaux. À notre avis, les limites émises à

l’obligation d’information, leur accordent accorde un peu de marge d’intervention.

2. Les justifications de dispense d’information

169. La dispense d’information consiste pour le professionnel au fait de ne pas

communiquer au patient, les éléments portant les investigations, traitements ou

actions de prévention proposés. Cette abstention est autorisée sous réserve des

critères qui suivent :

— la non-connaissance du risque au moment de l’intervention ;

— l’intérêt psychologique de malade ;

— la trilogie issue du cas de la force majeure : urgence, impossibilité et refus du

patient.

À propos de la non-connaissance du risque, il faut savoir que si le praticien est tenu

d’informer son patient des risques graves même exceptionnels, encore faut-il qu’il

s’agisse de risques connus. La connaissance du risque au niveau scientifique,

s’apprécie de façon objective. Autrement dit, il s’agit des risques faisant partie des

données acquises de la science médicale. Pour le professionnel, cela suppose de

s’informer sur les risques scientifiquement répertoriés et de les identifier par rapport

à une intervention. Agir de la sorte est une protection juridique supplémentaire.

Si théoriquement, le critère de la « non-connaissance du risque » favorise le

médecin en matière de responsabilité, sa mise en pratique n’est pas souvent évidente.

Outre la difficulté de recenser tous les risques scientifiquement répertoriés et

potentiels en fonction des interventions, d’autres questions se posent : A partir de quel

moment un risque devient-il connu ? Faut-il exiger qu’il fasse l’objet d’un consensus scientifique ou

suffit-il que la réalité d’un risque soit en cours de discussion au sein de la communauté scientifique

881 « On peut sans doute déduire qu’un risque simplement suspecté doit être considéré comme une donnée de la science

et faire l’objet d’une information », M. BACACHE, op. cit., p. 5.

Page 240: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 239 —

pour faire l’objet d’une information 882 ? Sur ce point, l’arrêt de 1998 susmentionné

confirme la difficulté pour les médecins de se retrancher sur le critère de

« non-connaissance » du risque pour invoquer leur irresponsabilité.

Dispense ensuite le médecin du devoir d’informer, la préservation de l’état

psychologique du patient. Dans un arrêt en date du 23 mai 2000, la Cour de cassation

avait estimé que dans l’intérêt même du patient, le médecin pouvait être dispensé de

son obligation d’information 883. En l’espèce, le médecin s’est abstenu d’informer son

patient atteint d’une dépression. La Haute Juridiction a approuvé la décision de la

cour d’appel qui a écarté la responsabilité du médecin psychiatre au motif que

l’intérêt du patient justifiait l’abstention d’informer. D’après la Cour, « L’article 42 du

Code de déontologie médicale issu du décret du 28 juin 1979 applicable en la cause autorise le

médecin à limiter l’information de son patient sur un diagnostic ou un pronostic grave ; […] une

telle limitation doit être fondée sur des raisons légitimes et dans l’intérêt du patient, cet intérêt devrait

être apprécié en fonction de la nature de la pathologie, de son évolution prévisible et de la personnalité

du malade […] ». En somme, la jurisprudence autorise le médecin de s’abstenir du

devoir d’information portant sur le diagnostic ou sur les risques graves liés à

l’intervention lorsqu’il estime le patient trop fragile pour accueillir l’information

concernée. En effet, l’absention d’information devient ici précaution afin de mener à

à terme et dans de bonnes conditions les soins.

Enfin, dispense le médecin du devoir d’information, la « trilogie de la force majeure »

que sont : « l’urgence, l’impossibilité et le refus du patient ». L’arrêt du 7 octobre

1998 884est très explicite sur ce point : le médecin est tenu de donner au patient une

information loyale, claire et appropriée « hormis le cas d’urgence, d’impossibilité ou de refus

du patient d’être informé ». Les mêmes limites à l’obligation d’information découlent de

l’arrêt du Conseil d’État en date du 5 janvier 2000 selon lequel, « l’information n’est pas

acquise en cas d’urgence, d’impossibilité, de refus du patient d’être informé ». La loi du 4 mars

2004 a également repris cette « trilogie de la force majeure » 885.

Concernant l’« l’urgence », la théorie est développé à l’article 16-3 du Code civil qui

dispose que l’urgence constitue une situation d’exception, en fait et en droit, en ce

qu’elle permet de déroger aux règles 886. Ainsi face à un patient en péril, le médecin

882 M. BACACHE, Ibid.

883 Cass. civ. 1ère, 23 mai 2000, J.C.P. 2000, II, 10343, rapp. P. SARGOS.

884 Cass. 1e r civ., 7 octobre 1998, préc.

885 Article L.1111-2 du Code de la santé publique.

886 E. ALFANDARI, Urgence sanitaires, urgences sociale, R.D.S.S. 2007, p. 1130.

Page 241: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 240 —

peut déroger à certaines règles ; en l’occurrence à l’obligation d’informer; d’autant

plus que l’obligation de porter secours est une obligation pénale 887, à laquelle il

n’échappe pas. Enfin, pour le cas du mineur, l’urgence et le péril obligent le médecin

à intervenir sans même chercher le consentement du représentant légal 888.

Après « l’urgence », il y a « l’impossibilité d’informer le patient ». Le concept est ici

beaucoup plus technique que le précédent. Concrètement, l’impossibilité pour le

médecin d’informer son patient émane de l’avènement d’un imprévu au cours d’une

intervention médicale ; l’imprévu oblige le médecin à intervenir afin de sauver la vie

du patient. Tel est le cas lorsqu’en cours d’intervention chirurgicale, le chirurgien

procède à un acte chirurgical complémentaire non prévue ( donc non préalablement

communiquée ) afin d’éviter une nouvelle intervention sous anesthésie générale. En

l’occurrence, il relève de l’évidence qu’en cours d’intervention, le praticien n’est pas

en mesure d’informer son patient des risques inhérents à l’acte chirurgical

complémentaire 889. L’impossibilité d’informer peut également résulter d’une erreur

initiale de diagnostic non fautive. Tel est le cas dans un arrêt en date du 26 octobre

2004 890 où il a été jugé impossible d’informer le patient d’une biopsie-exérèse891

rendue nécessaire suite à une détection en cours d’intervention chirurgicale 892 d’une

tumeur nerveuse.

Enfin la troisième dispense d’information résulte « du refus du patient d’être informé ».

La loi du 4 mars 2002 sous réserve de la protection des tiers, a repris cette limite

jurisprudentielle à l’obligation d’informer. Selon l’article L. 1111-2, alinéa 4 du Code

de la santé publique « la volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou

d’un pronostic doit être respectée sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission ».

Bref, La loi ne fait que respecter la liberté d’une personne à ne pas être informée.

En somme, la principale réserve émise par le corps médical à l’encontre de la loi

relative aux droits des malades est qu’elle ait retiré la décision médicale fondement de

887 C. pén., Art. 223-6 du Code penal. L’urgence impose de porter secours dans la mesure où il y a

péril vital 887.

888 J-M. DE FORGES et J-F. SEUVIC, L’hospitalisé, éd. Berger-Levraut, 2e éd., 1983, p. 263.

889 En l’espèce, la thèse de « l’impossibilité d’informer » a dispensé le chirurgien d’informer le patient en pleine intervention pour une urétrotomie, des risques attachés à la réalisation d’une résection endoscopique non prévue initialement, Cass. civ. 1ère, 22 mai 2002 : J.C.P. 2003, I, 152.

890 Cass. civ. 1ère, 26 octobre 2004 : D. 2005, pan. 405, note J. PENNEAU.

891 Ablation chirurgicale d’un organe ou d’une partie d’organe en vue d’un examen anatomo-pathologique.

892 Autrement dit, tardive en termes de diagnostic.

Page 242: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 241 —

l’issue thérapeutique, au contrôle de l’entité professionnelle que représentent le corps

médical. Pour atténuer cette frustration, il importe que la « limitation thérapeutique de

l’information 893 ; la « justification thérapeutique » 894 et la « trilogie de la force majeure » soient

rédigées explicitement au sein d’un projet de loi relatif à la responsabilité médicale 895.

Ces dispenses d’information visent à la fois l’intérêt du corps médical dans la mesure

où elles veillent à leur indépendance professionnelle. Elles veillent aussi à l’intérêt des

patients dont la fragilité mérite une attention particulière.

Par ailleurs, il faut reconnaître qu’au-delà du sentiment d’arrachement que peut

ressentir le « médecin » en raison de l’implication renforcée du patient dans les

décisions thérapeutique : article L. 1111-4 du Code de la santé publique 896, il lui est

inadmissible de penser que l’exercice d’un droit de véto par un sujet profane (par

rapport à la médecine) en ce qui concerne l’issue thérapeutique puisse ultérieurement

induire sa responsabilité médicale. Autrement dit, le choix d’un patient par rapport à

un acte médical, peut aboutir à une issue fatale. En tant que tel, il remettrait en cause

la responsabilité du professionnel. L’expression du docteur Pierre-Yves Poindron

résume bien le ressenti du corps médical vis-à-vis du principe de démocratisation

sanitaire instaurée par la loi du 4 mars 2002, il dit : « On a parlé de codécision 897.

Cependant, il ne faut guère se faire d’illusion. Le partage de décisions a des limites de fait : même

éclairé, le patient en saura fatalement moins que son thérapeute pour juger du bien-fondé de tel ou tel

traitement. La codécision a des limites de droit : le praticien a l’obligation d’obtenir le consentement

éclairé de son patient, mais il continuera à assumer seul la décision. C’est toute la difficulté de

893 Expression utilisée par M. BACACHE, La faute d’humanisme : Le défaut d’information, n° 472264,

LexisNexis SA 2011, Droit médical et hospitalier, fasc. 18-1, p. 6.

894 Ibid.

895 La loi ne prévoit pas expressément le principe de la dispense d’information ; elle en donne une interprétation stricte en la limitant aux seuls cas prévus par la loi. Ainsi, selon l’article L.1111-2 du Code de la santé publique établie par la loi du 4 mars 2002, « seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer » peuvent dispenser le médecin de son obligation d’informer. Quant à la jurisprudence, il lui arrive d’adopter une certaine prudence en matière de dispense d’information. Elle dit par exemple que le simple souci de ne pas inquiéter le patient ne suffit pas pour dispenser le médecin de son obligation d’information relative à un risque grave d’ototoxicité médicamenteuse (ce qui est relatif au risque de surdité), Cass. civ.1e r, 15 juillet, 1999.

896 Article L.1111-4 du Code de la santé publique : « Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé […] Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix […]. Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l’article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté ».

897 Article L.1111-4 du Code de la santé publique.

Page 243: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 242 —

l’exercice : l’assentiment du patient ne déchargera pas le médecin de ses responsabilités » 898.

Certes, la reconnaissance par la loi du pouvoir décisionnel du patient a le mérite du

respect de l’individualité de la personne ; pour autant, la loi a aussi le devoir de

garantir la réalité du devoir médical de sauvegarder la vie. L’effectivité de ce devoir

requiert l’indépendance médicale. Pour concilier respect de l’individualité de la personne du

malade et indépendance professionnelle, la question se pose si le législateur n’est pas au final

amené à adopter une loi relative au « droit des soins » 899 ?

SECTION II. LA PROPOSITION D’UNE LOI RELATIVE AU « DROIT DES SOINS »

170. Dans son ensemble, malgré quelques réserves légitimes, l’analyse de la loi relative

au droit des malades et à la qualité du système de santé, est positive. À travers elle, un

cap a été franchi, celui du paternalisme médical. Le paternalisme médical fondé sur le

principe de bienfaisance à l’égard de celui que la maladie affaiblit, présentait en effet,

le risque pour celui qui détient l’expertise de l’art médical d’exercer une

domination 900. L’idée d’une médecine toute puissante 901 fait planer l’idée d’une

guérison acquise à chaque intervention 902. En tant que tel, le paternalisme médical

contient le risque « d’intense et dramatique déception chez les patients et les familles mis alors

dans l’incapacité d’assumer la maladie, le handicap, la finitude, la mort » 903. Pour autant,

l’enjeu ne consiste pas uniquement de dépasser un modèle (paternalisme médical)

pour adopter un autre (libéralisme du patient) 904 ; le défi consiste à construire un

898 P-Y. Poindron, 2002 : l’année de tous les chantiers, in Le Concours médical, 30 novembre 2002,

n° 37.

899 G. DEVERS, Une approche des droits des patients, le point de vue de l’Avocat, ScienceDirect, Déontologie et Soin, éd. Elsevier Masson, p. 500.

900 « Le modèle paternalisme bienfaisant comporte des limites morales évidentes […]. La première est le risque de perversion de la responsabilité médicale en pourvoir médical indu », voir : J-P LEBRUN, De la maladie médicale, Bruxelles, De Boeck, 1993 ; V. aussi, CH. CLERC, Cent jours à l’hôpital. Chronique d’un séjour forcé, J’ai lu, éd. Plon, 1997.

901 L. SFEZ, La santé parfaite. Critique d’une nouvelle utopie, Paris, éd. Seuil, 1995 ; J. F. MALHERBE, Autonomie et Prévention. Alcool, tabac, Sida dans une société médicalisée, Louvain, éd., Artel-Fides, 1994.

902 L. SFEZ, La santé parfaite. Critique d’une nouvelle utopie, Le Monde diplomatique octobre 1995, p. 24 ; J. F. MALHERBE, Autonomie et Prévention. Alcool, tabac, Sida dans une société médicalisée, Louvain, éd., Artel-Fides, 1994, p. 53.

903 S. RAMEIX, La décision médicale. Du paternalisme des médecins à l’autonomie des patients, in Revue Laennec, Paris octobre 1997, p. 48.

904 Deux idéologies sont concevables sur la question de la décision médicale : d’un côté l’option pour la décision du patient, de l’autre celle du médecin. Depuis quelques années, le droit médical français a clairement opté pour la décision du patient, ce dont rend compte l’article L. 1111-4 du Code de la santé publique quand il dispose: « Toute personne prend, avec le professionnel de santé et

…/…

Page 244: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 243 —

cadre juridique assurant la meilleure sécurité juridique des acteurs de la santé. Aussi,

serait-il plus judicieux que le législateur raisonne à partir du « droit des soins »

permettant de concilier le respect du droit fondamental du patient et l’indépendance

professionnelle du médecin ? (§ 1) Conçue dans ce cadre juridique, la relation de

soins devient un bien collectif qui déborde naturellement la sphère médecin-patient :

la décision thérapeutique s’ouvre à la dimension de tierce personne (§ 2).

§ 1. LA PROPOSITION D’UNE LÉGISLATION RELATIVE AU DROIT DES SOINS

171. Une loi relative au droit des soins est amenée à traiter deux dimensions centrales

de l’activité médicale : la dimension purement technique englobant traitement et

prévention 905(A) et la dimension relationnelle qui suppose l’encadrement du rapport

interpersonnel des acteurs de la santé (B).

A. La dimension technique de l’activité médicale au sein de la loi relative au droit des soins

172. En cohérence avec l’obligation de moyens régissant l’activité médicale, une loi

relative au droit des soins est amenée à préciser la rigueur du geste technique en

cours d’exercice de la profession (1). Consécutivement à cette précision, la loi doit

opérer à la distinction claire entre ce qui relève de la faute technique et ce qui relève

de l’aléa thérapeutique 906 (2).

1. La précision du geste technique

173. Avant tout, la loi relative au droit des soins doit énoncer le principe de la

responsabilité médicale pour faute. À cet effet, les dispositions prévues par la loi

4 mars 2002 relative aux droits des malades peuvent être reprises sans modifications

majeures :

compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé ». Le transfert du pouvoir décisionnel en matière de soins de la main du médecin à celle du patient est l’aboutissement d’une profonde évolution de la pensée sociale (d’où la notion de démocratie sanitaire) et en tenant compte du progrès médical.

905 La thérapie et la prophylaxie.

906 Souvent on attribue à l’aléa thérapeutique d’une manière péremptoire la définition selon laquelle, elle consiste en l’incertitude sur les conséquences de l’issue thérapeutique. Une définition plus approfondie du concept mérite d’être mentionnée : « L’aléa consiste en la survenance de facteurs impondérables liés aux insuffisances de la science médicale […] d’une intensité suffisante pour affecter le résultat d’une incertitude statistiquement significative », S. HOCQUET-BERG, Obligation de moyens ou obligation de résultat, À propos de la responsabilité civile du médecin, Th. de doctorat Paris XII, 1995, note 3, n° 133 et s.

Page 245: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 244 —

Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut de produit de santé, les professionnels de santé, les établissements, les services ou organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins, ne sont pas responsables des conséquences d’acte de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute.

Mais dans l’optique de mettre en exergue le caractère technique de l’art médical, il

est proposé de rajouter à ces dispositions les mentions suivantes :

Tenu à la précision du geste technique, le médecin agit conformément aux données acquises de la science dans l’exercice de sa fonction. Le fait de déroger à cette règle constitue une faute qui engage la responsabilité professionnelle.

L’intérêt de ce rajout est qu’il apporte une visibilité en termes de rigueur

professionnelle. En cela, il accorde au praticien, un cadre de conduite professionnelle

stable et une référence objective pour la charge de la preuve incombant aux victimes.

Autrement dit, en phase d’expertise judiciaire ou amiable, l’appréciation de la faute

repose désormais sur des données objectives non hypothétiques.

La qualification fautive de la maladresse technique peut poser difficulté dans la

mesure où la maladresse peut se confondre à l’aléa thérapeutique défini comme le

risque accidentel inhérent à l’acte médical. La loi relative au droit des soins est

appelée à maîtriser leur subtilité.

2. La distinction maladresse fautive et aléa thérapeutique au sein de la loi relative au droit des soins

174. Dans un premier temps, il faut identifier le critère qui permettrait de distinguer les

accidents dus à une faute de maladresse des accidents issus de l’aléa thérapeutique.

Une fois identifié, ce critère peut être inséré dans la proposition de loi relative au

droit des soins. La position de la Cour de cassation dans deux arrêts donne un apport

fiable pour la distinction.

Dans le premier arrêt en date du 23 mai 2000 907, la Cour a énoncé que constitue une

faute « la maladresse d’un stomatologiste qui avait lésé un nerf alors que l’acte n’impliquait pas

l’atteinte à ce nerf et qu’il n’était pas établi que celui-ci avait présenté une anomalie 908 rendant son

atteinte inévitable ». Et dans le deuxième arrêt en date du 28 mai 2009 909, elle approuve

la décision de la cour d’appel d’avoir qui a estimé que le dommage était la

907 Civ. 1re, 23 mai 2000, R.T.D. civ. 2000. 840 ; Dr. et patrimoine, oct. 2000, p. 99, obs. F. Chabas.

908 Auquel cas, il s’agirait d’une prédisposition du patient au dommage et donc constitutif d’un aléa thérapeutique

909 Cass. civ. 1ère, 28 mai 2009, n° 08-13.406.

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conséquence d’une faute et ne relevait pas de l’aléa thérapeutique, au motif que

« l’intervention n’impliquait pas une atteinte à cet organe » ; en l’espèce il s’agissait de

perforation d’un organe réalisée lors d’une opération réalisée sous célioscopie.

À la lecture des arrêts, il est établi que le critère de distinction entre la faute de

maladresse 910 et l’aléa thérapeutique réside dans l’existence ou non d’un risque

inhérent à l’acte médical, d’où l’expression de la Haute Juridiction : « l’acte n’impliquait

pas l’atteinte ». Autrement dit, si le risque n’est pas inhérent aux actes médicaux

entrepris, le dommage constaté ne peut provenir que du fait du praticien constitutif

de faute de maladresse (par opposition à l’aléa thérapeutique).

Outre la règlementation juridique de l’aspect technique de l’activité médicale, le

droit des soins se doit d’encadrer la dimension relationnelle intrinsèque à l’activité

médicale.

B. La dimension relationnelle de la thérapie au sein de la loi relative au droit des soins

175. Les normes relatives à la dimension relationnelle doivent faire transparaître le fait

qu’un patient désirant soulager ses souffrances a besoin d’un professionnel

bienveillant et un professionnel fidèle à sa vocation, agit dans le respect de la dignité

de son patient. Considérant ces données, le transfert du modèle paternaliste au

modèle autonomique 911 bien que s’appuyant sur des raisons légitimes 912, n’est pas

toujours ajusté. Le fait de dissocier sans réserve paternalisme et démocratie

sanitaire 913, place systématiquement en opposition protection des patients et respect

de sa liberté 914. Or, en soi, le paternalisme centré sur la bienfaisance est un gage de

professionnalisme ; en tant que tel, il ne s’inscrit pas automatiquement à l’encontre

du modèle autonomique favorable à la liberté de la personne. Considérant la

complémentarité des deux principes, il convient d’établir des normes qui visent la

qualité du service tant sur le plan technique que sur le plan relationnel ; bref une loi

910 Ou la faute technique.

911 Expression utilisé par S. RAMEIX pour par parler de l’autodétermination du patient

912 Voir : n° 170.

913 Dans le sens autodétermination du patient.

914 « Pourquoi faudrait-il opposer systématiquement liberté et protection des personnes ? Le droit doit tenir bon pour soutenir la volonté des personnes et précisément pour les rendre plus libres », Recueil Dalloz 2008 p. 31. Le domaine de l’autonomie personnelle/Indisponibilité du corps humain et justice sociale. Muriel Fabre-Magnan, Professeur à l’Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne)

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conciliant technicité et humanité. Pour y parvenir, les dispositions d’ordre

déontologique, nous semblent fiables. Ces dispositions portent les valeurs suivantes :

Le respect de la vie et de la personne humaine ; la contribution à l’information et à l’éducation sanitaire du public ; la préservation de l’indépendance professionnelle ; le respect du secret professionnel et la disposition au dévouement envers toutes les personnes qui ont recours à l’art

médical. 915

La loi relative aux droits des malades, a adopté ces références déontologiques916

sauf celles relatives à l’indépendance professionnelle dont les dispositions au sein de

la loi, sont encore timides. On retrouve la notion d’indépendance professionnelle à

l’article L. 1142-2 relatif à la souscription d’assurance : « L’assurance des professionnels de

santé, des établissements, services et organismes […], couvre leurs salariés agissant dans la limite de

la mission qui leur a été impartie, même si ceux-ci disposent d’une indépendance dans l’exercice de

l’art médical » 917. La sobriété des mentions relatives à l’indépendance médicale

confirme l’option faite par la loi de 2002 de prioriser le libéralisme du patient à

propos de la décision médicale. Dans la perspective d’instituer une loi relative au

droit des soins, on propose qu’une disposition mettant en valeur 918 l’indépendance

médicale soit adoptée. À cet effet, les mentions qui vont suivre sont avancées ; elles

se rajouteront avec celles prévues dans la loi de 2002 919,

Le respecter de la vie et de la personne humaine ; la contribution à l’information et à l’éducation sanitaire du public ; le secret professionnel et de la disposition au dévouement envers toutes les personnes qui ont recours à l’art médical, droits prévus par le Code de déontologie médicale et réaffirmés par la présente loi relative aux droits des soins, sont mis en œuvre en cohérence avec

915 Voir : Introduction aux commentaires du Code de déontologie médicale, document de l’Ordre

national des médecins CNM et dans le Cahier de l’Ordre national des pharmaciens, La déontologie médicale commenté. Vos devoirs, un atout, mars 2013.

916 Le respecter de la vie et de la personne humaine, voir : Chapitre I du Titre II de la loi, intitulé : Droits de la personne ; la contribution à l’information et à l’éducation sanitaire du public, voir : Chapitre II du Titre II de loi, intitulé : Droits et responsabilités des usagers ; le secret professionnel, voir : Chapitre I du Titre II de la loi, intitulé : Droits de la personne et la disposition au dévouement envers toutes les personnes qui ont recours à l’art médical, voir : Chapitre I du Titre II de la loi, intitulé : Droits de la personne.

917 Article 1142-2, ali. 3 du Code de la santé publique.

918 Non pas en contrariété avec l’esprit libérale du patient mais en cohérence, sinon en concertation.

919 Le respecter de la vie et de la personne humaine (en particulier le Chapitre I du Titre II de la loi, intitulé : Droits de la personne) ; de la contribution à l’information et à l’éducation sanitaire du public (en particulier le Chapitre II du Titre II de loi intitulé : Droits et responsabilités des usagers ; du secret professionnel (en particulier le Chapitre I du Titre II de la loi, intitulé : Droits de la personne. et de la disposition au dévouement envers toutes les personnes qui ont recours à l’art médical (en particulier le Chapitre I du Titre II de la loi, intitulé : Droits de la personne et plus précisément, l’article 3 et 4 de la loi.

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le principe de l’indépendance médicale prévue elle-même dans le Code de déontologie médicale et dans le Code de la santé publique.

Concilier technicité médicale et respect de la liberté du patient donne à l’art

médical de retrouver sa vocation première : promouvoir la santé 920. Si la santé

préoccupe le médecin et le malade, elle dépasse largement leur propre intérêt.

La santé est un bien collectif 921. Dès lors, toute décision qui s’y rattache ne se discute

plus au niveau médecin-patient, elle s’ouvre à la dimension de tierce personne.

§ 2. LA DIMENSION DE TIERCE PERSONNE DANS LA DÉCISION MÉDICALE

176. Penser que le rapport médical est circonscrit dans la sphère médecin-malade

renferme la réflexion dans le choix entre paternaliste médical ou du libéralisme du

patient. Or fondamentalement, la prise de décision en matière médicale ne se résume

pas dans un simple consensualisme du médecin et de son patient (A). En effet, sous

réserve de certaines circonstances, la décision thérapeutique passe par la consultation

de la « la personne de confiance » (B).

A. La décision médicale : non exclusive au médecin et au patient

177. En application du droit fondamental de disposer de son corps 922, la question qui

nous intéresse est la suivante : « Peut-on porter sur soi-même et sur son corps, une atteinte

comme par exemple refuser un traitement médical approprié ? ». À cette question, le droit

répond qu’il lui incombe d’intervenir, du moment où la portée d’un acte 923 concerne

« autrui » 924. Si donc, le droit s’immisce dans la volonté d’un individu qui risque de

commettre un acte d’autodestruction tel le refus d’un soin approprié ou d’un soin

requis par l’urgence 925 ; il agit non dans l’intention de protéger la personne contre

920 La médecine du latin medicus ou « qui guérit » est la science (ou l’art) qui étudie le

fonctionnement du corps en vue de restaurer la santé, http://fr.wikipedia.org.

921 Article recueilli lors d’un colloque organisé par le Centre hospitalier intercommunal du pays de Cognac, le 23 janvier 2009, à l’initiative de J. EGGERS, dont le thème portait sur les droits des patients. Voir : I. MOINE-DUPUIS, Santé et Biens communs : un regard de juriste, Développement durable et territoires, Dossier n° 10, 2008.

922 Le droit de disposer de son corps renvoie au principe de la libre disposition de soi. Il implique de reconnaître à la personne humaine la maîtrise exclusive de soi. Ainsi « Toute personne a droit de disposer de son corps. Cela doit permettre de protéger les intérêts matériels et moraux de son corps. L’individu a donc un pouvoir sur son corps […] », http://www.lemondepolitique.fr.

923 Lequel peut être par action ou par omission.

924 « Autrui » est le sujet de droit qui est menacé par le comportement d’un autre sujet ; l’État a l’obligation de le protéger par l’intervention du droit.

925 Voir : n° 169.

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elle-même, mais au nom d’une justice sociale fondée sur la sauvegarde de la vie d’une

personne membre de la société.

En réalité, dans une vie en société, souvent les décisions que l’on prend

impliquent toujours autrui. Tant au niveau du discernement qu’au niveau des

impacts, les tiers sont très souvent concernés. La décision médicale, à notre sens ne

déroge pas à ce constat. Autant dire, un acte thérapeutique n’est jamais banal. Certes

le premier concerné est le patient. Pour autant, il ne faut pas minimiser 926 les

ressentis de l’entourage et en particulier la famille. Considérant ces affects, la question

se pose s’il ne faut pas prévoir une loi relative à l’obtention de l’avis de l’entourage du

patient pour la décision thérapeutique. Et qu’une telle mesure soit effective

indépendamment de la faculté du patient à exprimer ou pas sa volonté. Bien entendu,

en cohérence avec le principe de la liberté du patient et de l’indépendance médicale,

l’avis de l’entourage sera à titre consultatif.

Au-delà de leur ressenti, l’entourage est impliqué dans la décision médicale du fait

même de la politique de la prise en charge sanitaire en France. Pour rappel, une des

branches de la Sécurité sociale 927 prend en charge les prestations de soins (maladies,

maternité, décès) 928. Pour assumer cette mission, la Sécurité sociale est financée à la

fois par les cotisations des employeurs et des salariés et gérée par les partenaires

sociaux, qu’il s’agisse des syndicats ou du patronat. Partant, on peut comprendre que

les cotisants puissent avoir un droit de regard sur tout ce qui touche les frais de santé,

en l’occurrence la décision médicale. En fait, la décision médicale influence la

thérapie avec les frais qu’elle engage. Certes la loi du 4 mars 2002 a prévu la

représentation de personnes qualifiées dans le domaine de la réparation des

926 Dans l’hypothèse d’une issue fatale de l’intervention, on peut très bien considérer le pretium

doloris qui touche les membres de la famille. Le fait d’émettre un avis avant toute intervention peut participer à intégrer tout le processus psychologique d’acceptation des épreuves liées à la thérapie. À côté des dommages moraux figurent ceux d’ordre matériel qui ne sont pas sans conséquence dans la vie familiale. Un membre de la famille victime d’un déficit fonctionnel risque d’aliéner ses revenus financiers et par là toute la famille subira un trouble dans l’existence quotidienne.

927 Les autres branches étant, la prise en charge des « accidents liés au travail » ; de la « vieillesse » et de tout ce qui s’articule autour de la retraite et de la « famille » dont font parties, les prestations de logement.

928 La politique de remboursement des frais de santé se résume ainsi depuis le 1er janvier 2006 : pour chaque acte réalisé par un professionnel de santé, la Sécurité Sociale a déterminé deux éléments de calcul qui représentent la base de remboursement : un tarif de convention sur lequel s’applique un pourcentage de taux de remboursement par la sécurité sociale, le reste restant à la charge du patient. Pour précision, les éléments de base de remboursement varient selon le statut du praticien.

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préjudices corporels 929 et en particulier dans le cadre de la résolution amiable

(composition de la CCI et de l’ONIAM) mais ne serait-il pas envisageable que cette

représentation ait lieu en amont de la matérialisation de l’acte médical ? Ce dont il est

certain est que malgré le principe fondamental de la liberté individuelle due au

malade, sa présence au sein d’une institution sociale, famille, ouvre la décision

médicale aux tierces personnes qualifiées de « personnes de confiance ».

B. Le concept de personne de confiance

178. Au cours de la maladie, il arrive que l’état émotionnel et psychologique altère

les capacités de discernement du malade. Il se trouve alors dans une situation de

fragilité pour assumer la portée d’une décision thérapeutique. Pour pallier cette

fragilité, la loi relative aux droits des malades a institué la « personne de confiance » via

l’article L. 1111-6 du Code de la santé publique. Lors de l’admission dans un

établissement de santé, la personne de confiance va accompagner le malade dans ses

démarches et l’assister aux entretiens médicaux. Dans ces circonstances, il va sans

dire que la personne de confiance doit être une personne assez proche du malade, qui

connaît plus ou moins son vécu par rapport à la pathologie 930. Peut par exemple être

nommé « personne de confiance », un des parents du patient, son conjoint(e),

son compagnon (ou compagne), ou tout simplement un de ses connaissances

proches, voire son médecin traitant… 931. Quoiqu’il en soit, la désignation de la

personne de confiance appartient exclusivement au patient qui le fait par écrit signé.

Ceci dit, la présence d’une personne de confiance, ne bouscule pas la règle du

recueillement du consentement du patient avant toute intervention 932. En effet,

929 L’article R.1142-5 du Code de la santé publique dispose que : « Chaque commission comprend outre

son président, […] Quatre personnalités qualifiées dans le domaine de la réparation des préjudices corporel » ; qui peut alors comprendre des agents de la Sécurité sociale. Quant à l’Observatoire des risques médicaux ou l’ORM placé auprès de l’ONIAM, il est établi que fait partie de ses membres, le directeur général de l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie ou son représentant.

930 Sur le plan éthique, il nous semble que le principe d’intervention d’un proche en qualité de personne de confiance traduit une volonté législative de faire bénéficier le corps médical d’un consentement actualisé du patient. En effet, le consentement est actualisé car il est vérifié par un avis (consultatif) d’une personne plus à même de connaître ce qu’aurait décidé le malade, s’il était dans un état de discernement.

931 La nomination d’un conjoint(e), d’un compagnon (ou compagne), ou tout simplement d’une connaissance proche, voire son médecin traitant, exprime l’ouverture de la relation médecin-malade à l’universel. C’est une manière de faire participer l’humanité dans la décision médicale d’un de ses membres.

932 « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui. Le consentement de l’intéressé doit être recueilli […] », article 16-3 du Code civil selon lequel ; « Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être

…/…

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l’intervention de la personne de confiance est établie dans un dynamique de

consultation. La personne de confiance ne consent ni refuse pour le patient 933, elle

exprime ce qu’aurait été la volonté de ce dernier si... Au final, la décision revient au

médecin.

De tout ce qui précède, il est établi que le fondement des critiques émises à l’égard

du droit de la responsabilité médicale française porte principalement sur la destinée

de la décision médicale. Depuis la loi du 4 mars 2002, le patient prend désormais,

avec le professionnel, la décision médicale en fonction des informations qui lui

sont fournies. Disposition remarquable si l’on s’en tient au principe de la liberté

individuelle mais dangereuse si on considère les conséquences thérapeutique.

Le Dr P.-Y. Poindron expose le dilemme d’une manière réaliste : « On parle de

codécision. Il ne faut guère se faire d’illusion cependant car ce partage de décisions a des limites de

fait : même éclairé, le patient en saura fatalement moins que son thérapeute pur juger du bien-fondé

de tel ou tel traitement. Elle a des limites de droit : le praticien a l’obligation d’obtenir le

consentement éclairé de son patient, mais il continuera à assumer seul la décision. C’est toute la

difficulté de l’exercice : l’assentiment du patient ne déchargera pas le médecin de ses responsabilités ».

Considérant la portée de ces critiques, le mieux serait alors de trouver une cadre

juridique qui sache éviter les dérives du modèle protectionniste (décision privilégiant

le monopole professionnel) et du modèle individualiste (décision privilégiant

l’autodétermination du patient). Pour retrouver ce cadre, il faut se réapproprier de la

notion de « santé », objet de l’art médical.

La santé est le bien-être d’une personne membre à part entière d’une société.

En cas de maladie, la destinée de cette entité concerne la société. Or cette destinée

est lié à la décision thérapeutique. Par voie de conséquence, la décision thérapeutique

implique outre le patient et le médecin, la collectivité soit, les tierces personnes.

recherché dans tous les cas. Lorsque le malade, en état d’exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposé, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences. Si le malade est hors d’état d’exprimer sa volonté, le médecin ne peut intervenir sans que ses proches aient été prévenus et informés, sauf urgence ou impossibilité. Les obligations du médecin à l’égard du patient lorsque celui-ci est un mineur ou un majeur protégé sont définies à l’article 42 », article 36 du Code de déontologie correspondant à l’article R.4127-36 du Code de la santé publique ; « Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. », article L.1111-4 du Code de la santé publique.

933 « La personne de confiance ne peut consentir ou refuser pour le patient. En effet, nul ne peut consentir pour autrui, sauf dans des cas définis strictement par la loi […] ; et encore, la loi du 4 mars 2002 autorise le médecin à soigner un mineur sans le consentement de ses parents si celui-ci s’oppose à leur consultation », voir : S. RAMEIX, La décision médicale. Du paternalisme des médecins à l’autonomie des patients, Cahiers philosophiques, juin 2004, p. 65.

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Au sein d’une loi relative au droit des soins cette combinaison pourrait garantie par

les dispositions suivantes :

— La décision médicale est le monopole du professionnel ayant validé ses compétences par les diplômes d’État de médecin.

— La déontologie médicale invite le professionnel, à informer le patient sur les investigations, traitements ou actions de préventions proposées. Il doit s’assurer que le patient ait bien compris et assimilé les informations.

— La déontologie médicale invite par ailleurs, le professionnel, à informer les proches du patient sur le cadre général de la prise en charge.

— Dans l’intérêt du patient, le professionnel peut tenir le malade dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic graves. Pour permettre au patient de bénéficier d’un soutien direct, le professionnel peut informer la famille, les proches et/ou la personne de confiance des circonstances.

— Dans les cas où la faculté de discernement du patient est altérée, une personne de confiance sera sollicitée par le corps médical afin d’exprimer la position qu’aurait émise le patient quant à la suite de la thérapie.

À présent, il convient d’honorer l’objectif de l’étude : un travail de codification

mesurée de la responsabilité médicale à Madagascar.

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CHAPITRE II.

LA CODIFICATION MESURÉE DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À MADAGASCAR

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179. Quel espoir peut solliciter la science médicale ? La formule d’Ambroise Paré selon

laquelle : « Je le pansai et Dieu le guérit » 934 relate fort bien l’espoir que sollicite la

science médicale. Il ressort de cette réflexion, qu’exiger de l’acte de soin et de son

auteur, la guérison, relève de l’irraisonnable. Quant à Proust, il énonce que : « […]

croire à la médecine serait la suprême folie, si n’y pas croire n’en était pas une plus grande, car de cet

amoncellement d’erreurs se sont dégagées, à la longue quelques vérités ». Si donc, le refus d’une

médecine toute-puissante est acquise par la doctrine ; il ne faut pas oublier que la

discipline a réalisé des guérisons inestimables grâce aux activités des praticiens.

Partant, l’idée selon laquelle, les accidents médicaux est une évidence ne saurait être

tolérée. Il en va du ressenti des victimes ainsi que la notoriété de la médecine. Il s’agit

dès lors pour la proposition de loi relative à la responsabilité médicale à Madagascar

de veiller à l’équilibre du refus d’exiger du médecin la guérison et le refus de

l’évidence de l’avènement d’un accident médical. À notre avis, la loi qui conduit à cet

équilibre est celle qui a son fondement dans le principe de la responsabilité civile.

Pour cela, la rédaction suivante pourra être insérée dans la proposition de loi :

Les dispositions relatives à la responsabilité médicale sont conformes au principe de la responsabilité civile qui pose la règle selon laquelle, toutes pertes, et tous dommages du fait d’une personne, que ce soit par imprudence, légèreté, ignorance de ce qu’on doit savoir, ou autres fautes semblables, si légères soient-elles doivent être réparées par celui dont l’imprudence ou autre faute y a donné

lieu 935.

L’intérêt de s’appuyer aux fondamentaux (règles de la responsabilité civile) est de

pouvoir affirmer le principe de la responsabilité médicale pour faute (Section I).

L’admission du caractère aléatoire de l’issue thérapeutique, peut quant à elle se fier au

droit coutumier malgache de la réparation. La sanction de l’issue thérapeutique n’était

pas présente dans la logique du droit coutumier car il exprimait un refus catégorique

de trancher sur des faits relevant de la métaphysique. Pour autant, le droit coutumier

ne restait pas indifférente aux douleurs physiques et morales dont est victime un de

ses membres, en l’occurrence la victime d’un échec à l’issu d’un acte de soin. La mise

en œuvre du respect de l’intégrité physique du patient mérite d’être développée au

sein de la proposition de loi (Section II).

934 J-M. DELACOMPTÉE, Ambroise Paré, La main savante, éd., Gallimard 2007, p. 1966 à1967.

935 Cette proposition s’est inspirée des socles de la responsabilité civile en droit français, voir : J. DOMAT, Les lois civiles, livre II, titre VIII, section IV.

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SECTION I. LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA FAUTE MÉDICALE AU SEIN DE LA PROPOSITION DE LOI

180. La proposition de loi relative aux droits de la responsabilité médicale va préciser la

règle de la nécessité de la faute pour engager la responsabilité médicale. Dans cette

perspective, elle est amenée à définir le contour de la notion de faute (§ 1). Lorsque la

faute est constatée, la procédure d’indemnisation se déploie ; la proposition de loi

doit en fixer les principes (§ 2).

§ 1. LE CONTOUR DE LA FAUTE MÉDICALE

181. La faute est constituée par le non-respect des engagements légaux pouvant être de

délictuels ou contractuels. En matière de relation médicale, la doctrine s’accordent à

dire qu’ils relèvent du domaine contractuel. La faute médicale consiste alors en la

violation des clauses contractuelles lesquelles, méritent d’être circonscrites dans la

proposition de loi (A). Parallèlement à la définition de la faute en droit moderne, il

existe une conception traditionnelle du concept. La proposition de loi relative à la

responsabilité médicale à Madagascar est appelée à l’introduire dans ses

dispositions (B).

A. Les clauses contractuelles à ne pas enfreindre en droit médical

182. Le principe de la responsabilité médicale contractuelle 936 de moyens 937 implique

que le médecin soit uniquement tenu de donner à son patient des soins prudents et

diligents 938. De fait, les premières clauses contractuelles concernant l’exercice

médical vont se référer à la prudence et la diligence. Ces deux impératifs supposent

d’une part, une attention minutieuse à l’égard de l’état de santé du patient de façon à

ce que la maladresse commise en cours d’intervention soit constitutif d’une faute 939

936 Voir : n° 24.

937 Voir : n° 25 à 35.

938 Cass civ., 20 mai 1936, D.P. 1936.1.88, concl. P. MATTER, rapp. L. JOSSERAND, RTD civ. 1936, 691, obs. R. DEMOGUE. Selon la Cour, « Il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat comportant pour le praticien l’engagement sinon bien évidemment de guérir le malade […] du moins de lui donner des soins consciencieux, attentifs et réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ; que la violation même involontaire de cette obligation est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle ».

939 La qualification de maladresse fautive est retenue en l’absence de risque ou du caractère exceptionnel du risque par rapport à l’intervention, voir : 174.

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et d’autre part, une lucidité professionnelle afin de prescrire les soins les plus

adéquats, autrement dit, l’aptitude à gérer l’urgence 940. Bref, durant l’exercice de son

art, le médecin doit être vigilant pour ne pas exposer le patient à des risques

injustifiés 941. Pour assurer l’effectivité de ce principe, nous suggérons pour le droit

malgache, d’adopter sans hésitation les dispositions du droit médical français inscrites

dans la loi du 4 mars 2002, en ces termes :

Toute personne a compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances médicales, lui faire courir des risques

disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. 942

Ensuite, les clauses contractuelles relatives à l’exercice médical, doivent

sanctionner les comportements des personnes se prévalant être investies de

compétences médicales pour intervenir sur l’état de santé de ses semblables. Déjà en

1960, le corpus juridique malgache sanctionnait toutes pratiques de ce genre.

L’ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 qualifiait comme l’exploitation de la

crédulité des patients. Et en 1972, l’ordonnance n° 62-072 portant codification des

textes législatifs concernant la santé publique sanctionne « toute personne qui prend part

habituellement ou par direction suivie, même en présence d’un médecin, à l’établissement d’un

diagnostic ou autre traitement de maladies ou d’affections chirurgicales […], par actes personnelles,

consultations verbales ou écrites sans être titulaire du diplôme d’État ou d’Université de docteur en

médecine, ou du diplôme de l’école de médecine de Tananarive, ou de diplôme dont la valeur serait

ultérieurement admise 943. Cette mesure de répression de l’exercice illégal de la médecine

940 Voir : n° 169.

941 « Le médecin doit s’interdire, dans les investigations et interventions qu’il pratique comme dans les thérapeutiques qu’il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié », article R. 4127-40 du Code de la santé publique ; « Dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance. Il doit, sans négliger son devoir d’assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins. Il doit tenir compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et thérapeutiques possibles, article 8 du Code de déontologie médicale français correspondant à l’article R. 4127-8 du Code de la santé publique.

942 Article L. 1110-5 du Code de la santé publique.

943 Article 39 de l’ordonnance n° 62-072 portant codification des textes législatifs concernant la santé publique. En somme, toute personne n’ayant pas requis les conditions d’inscription au tableau de l’ordre des médecins, sont concernées par la sanction de l’exercice illégal de la médecine.

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prévue par le Code de la santé publique malgache944 et repris par le Code de

déontologie 945, doit être insérée dans la proposition de loi relative à la responsabilité

médicale à Madagascar.

Si le droit positif malgache définit la faute médicale comme le fait d’exposer le

patient au danger dont la sanction relève de la même nature : également

contractuelle ; les us et coutumes peuvent proposer d’autres modèles de sanction

dans la mesure où ils ont leur propre perception de la faute.

B. Le modèle de sanction proposé par les us et coutumes malgaches

183. Dans la sociologie malgache, la faute s’apprécie à travers deux notions : le fady ou

les interdits sociaux et le dinam-pokonolona ou le contrat social. Concernant le fady,

ce sont les règles d’usage ou fomba 946 qui les déterminent. D’après les us et coutumes,

le fady correspond au tabou c’est-à-dire, ce qui ne se fait pas au sein d’une société. En ce

sens, le fady est l’expression par excellence de la faute en droit coutumier malgache.

Et ce qui ne se fait pas, c’est d’offenser le monde de l’au-delà. Autrement dit la faute est

constituée par la commission d’une offense contre Dieu et le défaut de révérence à

l’égard des prédécesseurs que sont les Ancêtres. Il résulte de cette conception de la

faute, une sanction plus d’ordre moral que normatif.

En droit coutumier, il est donc de constat que pour l’auteur d’une offense, même

si la sanction n’est pas matérialisée immédiatement 947 ; il y a la certitude que le

résultat de l’acte va se retourner à coup sûr contre soi. Cette certitude est traduite par

le terme tody 948. À notre avis, la dimension morale de la sanction peut provoquer une

attitude bienveillance professionnelle. Cette remarque conduit à inscrire au sein de la

proposition de loi ; une formule relevant l’importance de l’activité médicale et sa

vocation à garantir le bien-être du patient. À cet effet, nous proposons un texte

944 Article 79 du Code de la santé publique.

945 Article 15 et 16 du Code de déontologie médicale.

946 Les coutumes à Madagascar portent le nom de « Fombandrazana » qui se traduit littéralement « les us et coutumes des Ancêtres ». Afin de bien marquer leur caractère oral on les appelle aussi « Lovantsofina » ou héritage des oreilles ; plus précisément c’est héritage issu de la transmission orale et reçue par l’écoute.

947 C’est-à-dire pas consécutivement à l’acte sanctionné car lui est attachée.

948 Le « tody » est une notion spécifique qui traduit le phénomène de retournent irrémédiable de ce que l’on fait à autrui. Il s’agit d’une force impersonnelle qui sanctionne l’agir d’une personne. Voir : supra Partie II, Titre I, Chapitre I, Section 2, §° 1, B Le fihavanana et les modes alternatifs des conflits à Madagascar.

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inspiré d’un document précieux datant du XIIe siècle : la Prière de Maimonide 949. Ce

texte pourra clore par exemple les dispositions normatives contenues dans la

proposition de loi relative à la responsabilité médicale à Madagascar :

L’exercice de l’activité médicale a pour vocation de servir les personnes dont la santé se trouve à un moment de leur existence, fragilisée. Pour remplir d’une manière ajustée cette mission, le médecin doit faire preuve d’une attention inconditionnelle à l’égard des personnes qui le sollicitent.

L’exercice de l’activité médicale doit être accompli dans le respect la rigueur scientifique. La médecine exige du médecin qu’il déploie au service du patient, ce que la formation et l’expérience lui ont enseigné. L’acquisition d’une formation solide doit être continue tout le long du parcours professionnel.

L’exercice de l’activité médicale nécessite une relation de confiance entre le médecin et le patient. Le médecin est appelé à faire preuve de patience à l’égard des personnes qui le sollicitent afin qu’elles comprennent dans la mesure de leur entendement les soins qui leur sont proposées. Le médecin est tenu, sous réserve de la protection des tiers, de garder informations recueillies dans une stricte confidentialité. Le médecin est tenu de respecter le refus d’un patient d’être informé des traitements entrepris.

La médecine doit s’accomplir dans un esprit modéré dans la mesure où le médecin et le noble devoir de soigner ont leurs limites.

Après l’offense commise vis-à-vis du monde de l’au-delà, la coutume malgache

considère comme faute, la transgression du dinam-pokonolona définie comme la

convention établie par le groupe social. Le dinam-pokonolona est l’expression codifiée

de la volonté sociale, d’où sa nature législative. Le dinam-pokonolona ou le contrat

social, est assorti de sanctions frappant quiconque y déroge. Bien qu’assumant ces

rôles importants, il n’est pas nécessaire nous semble-t-il de reprendre les mentions

relatives au dinam-pokonolona dans l’encadrement juridique de la responsabilité

médicale. Ce choix s’explique par le risque de multiplier les références normatives.

Par ailleurs, confier la charge de sanctionner une infraction à une autre institution

autre que le pouvoir judiciaire peut conduire à la privatisation de la justice. La

mission d’encadrer juridiquement la responsabilité médicale, doit relever de la

compétence gouvernementale, législative et judiciaire 950.

949 Juif espagnol de culture arabe, Maïmonide était né en 1135 et mort en 1204. Il était Rabbin et

médecin, exerçant au Caire, Égypte.

950 La compétence gouvernementale et législative se situe dans le processus de l’adoption d’une loi. Lorsque la loi émane de l’initiative de l’exécutif (gouvernement), on parle de « projet de loi » ; lorsqu’elle émane du Parlement, on parle de « proposition de loi ». Pour le processus législatif, voir : n° 136 et 137. Quant au pouvoir judiciaire, il a pour mission de contrôler l’application d’une loi en vigueur, de l’interpréter en procédant à un examen du rapport « situation concrète/loi », et d’en sanctionner le non-respect. En cas de litige, le pouvoir judiciaire assume une mission d’arbitrage.

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Pour trancher, le pouvoir judiciaire se fie à la loi des contrats posée en ces termes :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » 951. Autrement

dit, lorsque les clauses contractuelles ne sont pas exécutées, le débiteur de l’obligation

est tenu de réparer le tort du fait de l’inexécution. Transposé en matière médicale,

cela reviendrait à dire que lorsque le médecin n’a pas rempli son obligation

contractuelle de soigner conformément à la règle de l’art, le créancier, soit le patient

victime d’accident médical peut demander réparation du préjudice lié à la défaillance

contractuelle 952. Tel est le déploiement du mécanisme indemnitaire lequel, en matière

de responsabilité est plus d’ordre corporel

§ 2. LE PRINCIPE D’INDEMNISATION DES PRÉJUDICES CORPORELS

184. Deux articles de la TGO fondent la théorie indemnitaire à Madagascar :

l’article 53 qui dit que : « Lorsque le débiteur n’exécute pas l’obligation, le créancier peut l’y

contraindre par toutes voies de droit » et l’article 177 : « En cas d’inexécution totale ou partielle

d’une obligation contractuelle, ou d’exécution tardive, le débiteur doit réparer le préjudice causé de ce

fait au créancier […] ». Transposés en matière de responsabilité médicale, ces deux

articles permettent d’établir la disposition suivante : « En cas d’inexécution totale ou

partielle ; d’exécution tardive par le médecin de son obligation médicale de nature contractuelle,

laquelle suppose de prodiguer des soins consciencieux et conformes aux données acquises de la science,

le malade peut l’y contraindre par toutes voies de droit » (A). Si malgré la contrainte stipulée

par la loi, le médecin ne s’exécute pas, le mécanisme d’indemnisation est déclenché.

Pour valablement fonctionner, ce mécanisme nécessite un système d’assurance 953.

En effet, en cas de sinistre en cours d’activité professionnelle, autrement dit, quand la

responsabilité professionnelle est engagée, l’indemnisation s’effectue par le

mécanisme de subrogation 954 de l’assureur à l’assuré (médecin). Socle de

l’indemnisation, le mécanisme assurantiel est à prévoir au sein de la proposition de loi

relative à la responsabilité médicale (B).

951 Article 1134, al. 1 du Code civil.

952 En application de l’article 188 de la TGO, le droit de poursuivre en réparation, doit être précédé d’une mise en demeure du débiteur (du médecin) à exécuter les clauses contractuelles.

953 Sur le mécanisme assurantiel, voir : n° 78 et s.

954 L’assureur va honorer la dette de responsabilité professionnelle au lieu et place de l’assuré en vertu du contrat d’assurance.

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A. Les voies de droit pour faire face à l’inexécution contractuelle médicale

185. Les voies de droit pour répondre à l’inexécution contractuelle sont de deux

ordres : celles relevant du droit positif (1) et celles relevant de la culture malgache (2).

1. Les modalités de réparation du droit positif

186. Les voies de droit pour la réparation ou les « remèdes à la défaillance contractuelle » 955

ne peuvent se déployer que dans le respect de la personne du débiteur qui pour telle

ou telle raison ne pouvait pas réaliser son obligation. Sa dignité s’oppose à ce

l’obligation de s’exécuter se fasse par la force 956. Le respect dû au débiteur fait que la

démarche indemnitaire se fasse par étape : d’abord on procède à une mise en

demeure d’exécuter et le cas échéant entamer la réparation du préjudice. Pendant la

phase de réparation, le dédommagement d’une victime de préjudice est guidé par le

principe du rétablissement du statu quo ante de sa situation ; c’est-à-dire, la remise en

état de la situation où elle se serait trouvée si le dommage ne s’était pas produit 957.

Le rétablissement du statu quo ante ou « la remise en état », suppose a priori, une

réparation en nature. Concrètement, cette forme de réparation peut se constituer en

la restitution d’un objet équivalent à celui qui n’a pas pu être remis 958 ou en la

restauration ; la mise en conformité d’un bien endommagé. Par contre, dans

l’hypothèse où, il y a une impossibilité matérielle d’exécuter en nature la créance,

la partie lésée a la faculté de demander une exécution par équivalent ; sa créance se

substitue alors en une somme d’argent appelée dommages-intérêts.

Il importe que toute cette mise en œuvre par étape de la réparation soit explicitée

au sein de la proposition de loi relative à la responsabilité médicale. Si la LTGO à

955 L’expression « remède à la défaillance contractuelle » est empruntée de la thèse de Mme M. FAURE

ABBAD, intitulé : Le fait générateur de la responsabilité contractuelle, Th. de doctorat en droit, 5 janvier 2002, Université de Poitiers, p. 31, Collection de la Faculté de droit et des sciences sociales. D’après elle, le terme « remède » qui est la traduction littérale du terme anglo-saxon « remedy », est parfois utilisé par la doctrine pour décrire les différents moyens offerts au créancier déçu. Ces moyens vont alors pallier à l’inexécution des obligations contractuelles et permettre d’obtenir l’avantage attendu au contrat non rempli. Dans le même sens, P. GROSSIER, Les remèdes à l’inexécution du contrat : essai de classification, Th. Paris I (dacty.), 2000.

956 S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, éd. du centre malgache de promotion du livre CMPL, 1984, p. 109.

957 « Le propre de la responsabilité civile, est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit », Cass. civ. 2e, 1er avril 1963, J.C.P. 1963. II. 13408, note ESMEIN.

958 voir : n° 63.

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travers l’article 53 959 en ces termes : « Lorsque le débiteur n’exécute pas l’obligation, le

créancier peut l’y contraindre par toutes les voies de droits », la prévoit implicitement ces

modalités, le fait de signifier les précisions sur les étapes de la réparation dans la

proposition de loi relative au droit de la responsabilité médicale, accorde aux

contractants de savoir en quoi s’en tenir.

L’expression « les voies de droits » citée par l’article 53 quant à elle, sous-entend la

possibilité d’un autre mode de réparation que celui prévu par le droit positif :

celle propre à la culture malgache.

2. Les modalités de réparation propres à la culture malgache

187. La coutume malgache tire son unité profonde de trois grandes règles : la croyance

en Dieu ; le culte rendu aux prédécesseurs défunts, et la déférence à l’égard

des personnes âgées 960. Les malgaches sont convaincus que le fait de ne pas

respecter ces trois principes entraîne irrémédiablement une punition de nature

transcendante 961. Pour remédier à cette sanction d’ordre métaphysique, le droit

coutumier propose des modalités de réparation. Ainsi, si l’on a motif de penser qu’on

ait commis un tort à l’égard de ses semblables, on multipliera les sacrifices de

réparation, dont l’importance va prendre en compte la gravité de la faute. Concernant

la responsabilité médicale, la question est de savoir si le comportement préjudiciable

d’un médecin lors de l’exercice de son art, porte atteinte aux trois principes

fondateurs de la vie sociale malgache, auquel cas, il sera soumis aux sanctions

coutumières.

Dans la mesure où les malgaches 962 conçoivent que la vie de la victime émane des

trois piliers — Dieu, Ancêtres, Aînés —, toute atteinte portée à cette vie les touche.

Dès lors, afin de remédier aux sanctions automatiques d’ordre supranaturel, l’auteur

de l’acte préjudiciable doit réparer conformément aux us et coutumes du pays. Pour

traduire juridiquement cet aspect moral de la réparation médicale au sein d’une

proposition de loi, on peut suggérer qu’en cas d’atteinte à l’intégrité corporelle d’un

959 960 P. CHEVALLIER, op. cit. p. 96.

961 Le mécanisme de la sanction malgache repose sur des croyances en l’action automatique des sanctions supranaturelles atteignant immanquablement, l’auteur. P. CHEVALLIER, stipule en ce sens que : « La notion de « fady » (ou ce qui ne se fait pas), implique pour celui qui ne le respecte pas, une sanction automatique », P. CHEVALLIER, op. cit. p. 93.

962 En majorité.

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patient, le médecin puisse témoigner d’un « geste » 963 à son égard. Cependant, pour

ne pas entraver les démarches de politiques sanitaires entreprises 964, le « geste »

réparateur ne doit pas s’inscrire dans une logique de culpabilisation, mais plutôt dans

le respect de la dignité du patient qui reçoit sa vie d’un « Au-delà ».

En matière de responsabilité médicale, il est indéniable que la réparation du

préjudice en nature à travers « la remise en état », est difficilement réalisable 965.

L’indemnisation du préjudice corporel se fait par équivalence, c’est-à-dire d’ordre

pécuniaire ; on parle aussi de dommages et intérêts. Si en principe la valeur de

l’indemnisation doit représenter l’intégralité du dommage, à Madagascar, le contexte

socio-économique fait que la valeur monétaire de l’indemnisation est appelée à

baisser. Par contre la valeur culturelle de l’indemnisation est maintenue : la volonté de

reconnaître le préjudice dans son intégralité. Mais quel que soient les modalités de

l’indemnisation : en nature ou en argent, il faut matériellement, les prévoir. En effet,

un principe d’indemnisation automatique ne peut valablement fonctionner hors du

cadre de prévoyance obligatoire ; en particulier le mécanisme assurantiel.

B. L’effectivité du mécanisme indemnitaire : le principe de l’assurance obligatoire

188. Au Titre II de la Première partie de la présente étude, nous avons soulevé

l’inexistence pratique de la responsabilité médicale à Madagascar pour défaut de

politique d’assurance. Dans la mesure où l’assurance permet de répartir le montant

des dettes de responsabilité dans la masse des assurés (les médecins), son absence, ne

peut en effet, que faire obstacle à l’indemnisation automatique. Sans vouloir insister

sur ce qui a été déjà développé au Titre concerné, nous tenons juste à préciser la

nécessité de mentionner le caractère obligatoire d’une souscription d’assurance

responsabilité civile pour les professionnels médicaux à Madagascar. Cette exigence

ne doit cependant pas se réaliser en faisant fi du contexte socio-économique

963 Entendu comme apport matériel.

964 La politique sanitaire malgache sur la disponibilité des médecins, vise à atteindre les normes imposées par l’OMS, soit un médecin pour 5 000 habitants. Actuellement, un médecin y travaille pour 5 200 habitants, R. HERIMANDA, Un médecin pour 5 200 habitants, Vendredi 9 janvier 2012, Tribune.com Madagascar, Mercredi 24 octobre 2012. Un tel élan risque d’être arrêté, si on inscrit le devoir de réparer dans une logique de culpabilisation.

965 Aucun apport de quelque nature que ce soit ne saurait compenser un préjudice touchant une personne dans son existence ; voir : n° 121.

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du pays 966. Il faut ainsi trouver l’équilibre entre l’impératif d’indemniser et la

difficulté d’honorer les primes d’assurance. À notre avis, cet équilibre repose sur

l’évaluation des primes et le sens accordé à l’indemnisation. Les primes doivent être

calculées en considération avec le pouvoir d’achat des professionnels et

consécutivement, l’indemnisation en cas d’accident médical pour faute doit se faire

en adéquation avec les provisions. Ce qui suppose une transparence et une étroite

collaboration entre le juge et l’assureur. Quant à la victime, bien que devant se situer

au centre du dispositif indemnitaire, elle doit comprendre que l’indemnisation ne

repose pas spécialement sur le chiffrage mais plus sur une reconnaissance du

préjudice, donc une réparation d’ordre symbolique que compensatrice.

En somme, à Madagascar, le principe de l’intégralité de l’indemnisation ne peut

se limiter sur des données chiffrées.

À côté du modèle assurantiel, une autre structure nous semble adéquate pour

assumer une mission de prévoyance responsabilité professionnelle : la structure

mutualiste. Dans beaucoup de pays africains, ce modèle d’épargne provisionnel

dénommé : « tontine », a fait ses preuves en termes de solidarité 967. Ne serait-il pas

transposable au sein de l’activité médicale à fin de garantir les éventuelles dettes de

responsabilité civile professionnelle ?

À ’issue de l’étude des modalités d’indemnisation en cas d’accidents médicaux,

il est confirmé que pour garantir une réparation juste, la loi doit défendre l’équité de

la convention afin qu’aucune partie ne soit lésée. Ainsi, la loi est appelée à veiller à ce

que l’inexécution contractuelle garantisse au créancier des remèdes permettant

d’obtenir l’avantage qu’il escomptait du contrat 968 sans que la dignité du débiteur en

soi offensée. Pour ce, elle doit poser outre l’obligation légale de mise en demeure

966 Rappelons qu’à Madagascar, il est difficile pour les professionnels de la santé de souscrire une

assurance responsabilité civile. Au fait, les soins dispensés par les médecins généralistes libéraux, les médicaments achetés en pharmacie et les examens complémentaires ne sont remboursés qu’aux patients détenteurs d’une assurance ou d’une mutuelle privée ; autrement dit, il n’y a pas de système de sécurité sociale. De cette situation, il résulte que la « patientèle » se tourne plus vers les Organisations non gouvernementales (ONG) et les dispensaires confessionnels dispensant des soins et des médicaments à un prix beaucoup plus abordable. En outre, prenant en compte l’effort de politique de santé, imposer une assurance obligatoire non modérée peut avoir de lourdes conséquences, voir : supra.

967 Partie I, Tire I, Chapitre I, Section I. La conception d’une formule de mutualisation, n° 145 à 151.

968 M. FAURE-ABBAD, Le fait générateur de la responsabilité contractuelle, Th. pour le doctorat en droit, 5 janvier 2002, Université de Poitiers, p. 118, Collection de la Faculté de droit et des sciences sociales.

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avant action en réparation 969, la règle selon laquelle, « Le créancier doit faire tout ce qui est

en son pouvoir pour diminuer la perte résultant de l’inexécution de l’obligation, sous peine d’une

réduction des dommages-intérêts correspondant à cette négligence » 970. À propos du contrat

médical, les mesures garantissant les remèdes à l’inexécution contractuelle sont

rendus effectives par l’obligation de souscrire une assurance responsabilité civile

professionnelle 971. Mais là encore, l’équité impose qu’une telle exigence soit ajustée

au contexte socio-économique du pays afin de ne pas trop léser le débiteur qu’est le

médecin. À Madagascar, ce point est d’une importance capitale, il en va de la faculté

des personnels soignants à se rendre disponibles 972 et donc de l’avenir de

l’encadrement sanitaire des patients 973. Enfin, l’équité du contrat se manifeste par la

gestion de deux droits apparemment concurrents : le droit du patient à un

consentement libre par rapport au traitement proposé et le droit du médecin à

l’indépendance professionnelle. Or fondamentalement, ils sont complémentaires. La

disposition intellectuelle à vouloir toujours les dissocier, n’est pas toujours ajustée car

l’indépendance professionnelle est gage de professionnalisme ; en tant que tel, elle

assure la qualité des prestations médicales et ne peut être à l’opposé de la liberté du

patient. Ainsi prenant en compte la complémentarité entre le modèle paternaliste 974

et le modèle autonomique 975, la proposition de loi relative à la responsabilité

969 L’article 1146 du Code civil français prévoit une mise en demeure obligatoire à propose la

demande de dommages et intérêts.

970 Article 91 alinéa 2 de la LTGO.

971 « Les professionnels de santé exerçant à titre libéral, les établissements de santé, services de santé et organismes mentionnés à l’article L. 1142-1, et toute autre personne morale, autre que l’État, exerçant des activités de prévention, de diagnostic ou de soins ainsi que les producteurs, exploitants et fournisseurs de produits de santé, […] sont tenus de souscrire une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civile ou administrative susceptible d’être engagée en raison de dommages subis par des tiers et résultant d’atteintes à la personne, survenant dans le cadre de l’ensemble de cette activité », article L. 1142-2 du Code de la santé publique. L’obligation d’assurance responsabilité professionnelle du médecin est assortie d’une sanction pénale : « Le manquement à l’obligation d’assurance prévue à l’article L. 1142-2 est puni de 45 000 Euros d’amende. Les personnes physiques coupables de l’infraction mentionnée au présent article encourent également la peine complémentaire d’interdiction, selon les modalités prévues par l’article 131-27 Code pénal, d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice de laquelle ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise […] », article L.1142-25 du Code de la santé publique, voir : A. LAUDE, B. MATHIEU

et D. TABUTEAU, Droit de la santé, 2e éd., Thémis droit, Puf, 2009, p. 453.

972 Pour rappel, le fait de taxer strictement les médecins de primes d’assurances responsabilités professionnels, risque de provoquer un abandon de l’exercice du métier.

973 Voir : supra, p. 275.

974 Privilège du médecin.

975 Privilège du patient.

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médicale à Madagascar est appelée à prévoir des dispositions conciliant technicité et

humanité 976. Il en va de l’intégrité corporelle du patient.

SECTIONII. LE RESPECT DE L’INTÉGRITÉ CORPORELLE AU SEIN DE LA PROPOSITION DE LOI

189. La protection de l’intégrité corporelle est un acquis juridique déjà inscrite dans le

droit ancien malgache. En 1881, le Code des 305 articles 977 a réduit l’étendue du

pouvoir juridictionnel clanique au profit de la justice royale. L’extension du pouvoir

royal lui a permis de connaître les affaires les plus graves touchant l’ordre public.

Désormais, le roi est le juge d’attribution des « douze crimes capitaux » qu’on peut

regrouper en trois types d’infractions : la rébellion contre le pouvoir en place, le vol

important et l’atteinte à l’intégrité corporelle. Dans une discipline où le corps humain

ou plus précisément l’« être » humain 978 est central, le principe de protection de

l’intégrité corporelle inscrite dans l’Ancien droit malgache, a vocation à s’insérer dans

le projet de loi.

Dans l’exercice de la médecine, le respect de l’intégrité corporelle passe ainsi par le

respect du malade à disposer de son corps. La reconnaissance de ce droit conduit à

préciser la place assumée par le patient en matière de décision thérapeutique (§ 1).

Par ailleurs, le respect de l’intégrité corporelle, implique à ce que la prise en charge

considère le patient dans son individualité (§ 2).

§ 1. LES DISPOSITIONS SUR LE RÔLE ASSUMÉ PAR LE PATIENT EN MATIÈRE DE DÉCISION THÉRAPEUTIQUE

190. Souvent dans la culture malgache, le médecin en sa qualité d’homme de l’art est

supposé détenir l’expertise de sa profession. Partant, le modèle moral paternaliste

bienfaisant est accentué. À notre avis, ce modèle dominant n’est pas forcément voué

976 Voir : n° 175.

977 Le Code des 305 articles fût promulgué par la Reine Ranavalona II le 29 mars 1881. Les dispositions du Code ont été implantées petit à petit dans les deux-tiers de l’île soumis aux rois merina. Pour le tiers restant, l’influence du droit écrit ne se fait sentir que d’une manière parcellaire et épisodique. En 1960 débute la colonisation mais le gouvernement français pour des raisons de commodité, a décidé de garder le Code des 305 articles ; de l’appliquer sur l’ensemble des tribunaux de la Grande-Île, voir : P. CHEVALLIER, Introduction à l’étude du droit coutumier malgache, http://madarevues.recherhces.gov.mg.

978 La notion « être » humain prend en compte toute la dimension relationnelle du soin. Elle est rattachée à l’exigence du geste technique appliqué sur le « corps » du patient.

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à être modifié. Il suffit juste de préciser que le fait pour un patient de se déplacer en

vue d’une consultation ne présume pas son assentiments aux traitements et de fait,

permettant au professionnel d’agir comme il l’entend. La réalité du consentement

doit être expresse (A). L’essentiel étant qu’en matière de décision médicale, chacune

des parties : médecin-patient, trouve sa juste place (B).

A. L’explicité de la réalité du consentement

191. « La médecine est née de l’appel du malade, de l’attention portée à sa souffrance » cite

Monsieur G. Canguilhem dans sa thèse de doctorat en médecine. Et que de ce fait

dit-il, « le souci de l’individualité souffrante qui en constitue la raison d’être et la source, doit en

rester le cœur ». Partant de ces remarques judicieuses, nous disons que pour le cas de

Madagascar, il n’y a pas nécessité de modifier le modèle paternaliste médical

caractérisé par la bienveillance du praticien à l’égard du malade. Ceci étant, la

conception du paternalisme médical à insérer dans la proposition de loi, ne signifie

pas exclusivité de la conduite de l’acte thérapeutique au médecin en sa qualité

d’homme de l’art. Raisonner ainsi risque de réduire considérablement, le contour du

« consentement ». En effet, on risque de déduire hâtivement que le fait pour un

patient de consulter un médecin présume son assentiment aux interventions

proposées. Le paternalisme médical à intégrer dans la proposition de loi est celui qui

voit dans le médecin, une personne qui à travers les acquis scientifiques, cherche et

propose les traitements médicaux les plus appropriés. Dès lors, il importe que les

dispositions légales prévoient le sens même de « médecin bienveillant ». À cet effet,

nous proposons la description suivante :

Le médecin bienveillant est celui qui est en mesure de comprendre que le patient a besoin de connaître ce qui lui arrive, son état de santé au-delà de l’espoir de guérir.

Cette obligation d’information est déjà prévue dans les dispositions du Code de

déontologie malgache 979. Leur reprise au sein de la proposition de loi relative à la

responsabilité médicale est recommandée. Seulement, pour plus de précision, nous

proposons quelques ajustements inspirés du droit médical français 980. Les

dispositions relatives à l’obligation d’information à insérer dans le projet de loi, sont

les suivantes :

979 Article 19 et 20 du Code de déontologie médicale malgache, Décret n° 2012. 0632.

980 Article L. 1111-2 du Code de la santé publique français.

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Article « x »

« Sauf urgence ou impossibilité, le médecin doit informer le patient du diagnostic et des éventuelles conséquences secondaires des thérapies avancées avec les risques sérieux qui y sont liés. Le médecin expliquera l’utilité, l’urgence et les conséquences des actes proposés.

Le médecin recherchera le consentement éclairé du patient avant toute intervention. Il ne peut substituer sa propre conception de la qualité de la vie à celle de son patient. Le fait pour une personne de consulter un médecin ne signifie pas de sa part, consentement aux traitements thérapeutiques. Le médecin est tenu de s’abstenir de toute intervention en cas de refus du patient. Toutefois, dans ces circonstances, il est tenu d’informer l’intéressé sur les conséquences tant bénignes que graves du refus.

La volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic, notamment grave, doit être respectée, sous réserve de

l’exposition des tiers 981.

L’information médicale est délivrée au cours d’un entretien individuel ».

Article « y »

Un médecin appelé à donner des soins à un mineur ou à un majeur protégé doit s’efforcer de prévenir ses parents ou son représentant légal et d’obtenir leur consentement. Ceux-ci reçoivent les informations attachées à la santé du mineur.

L’avis du mineur doit être pris en compte par le médecin. Le mineur a le droit de recevoir lui-même une information et de participer à la prise de décision le concernant. L’information doit être délivrée d’une manière adaptée soit à son degré de maturité, soit au degré discernement pour les majeurs sous tutelle.

Le médecin peut exceptionnellement, se dispenser d’obtenir le consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale sur les décisions médicales à prendre lorsque le traitement ou l’intervention s’impose pour sauvegarder la santé d’une personne mineure ; ou que l’intéressé s’oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale. Toutefois, le médecin doit dans un premier temps s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à la consultation des représentants. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, le médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l’intervention. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix.

En cas d’urgence, le médecin doit donner les soins strictement nécessaires.

L’intérêt du devoir déontologique d’information est qu’il développe le modèle de

concertation pour la prise de décision médicale.

981 Il faut souligner les deux sortes de refus : le refus d’être informé et le refus de procéder à une

intervention médicale.

Page 268: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 267 —

B. Le modèle de concertation pour la prise de décision médicale

192. À l’issue de l’analyse, le modèle de concertation pour la prise de décision médicale

n’est plus à débattre ; il doit être adopté au sein de la proposition de loi.

Les dispositions du droit français en la matière, nous semble transposables. Les

mentions suivantes, sont donc maintenues :

Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa

santé […]. 982

193. Pour garantir la qualité de la concertation, c’est-à-dire l’obtention d’une décision

« démocratique » 983, le droit médical français pose la règle selon laquelle,

le professionnel médical est tenu de produire des informations et des préconisations

compréhensibles permettant au patient, d’émettre un avis en connaissance de cause.

Ainsi comme le stipule la déontologie 984, « L’information doit être loyale et claire ».

Les médecins sont toutefois dispensés de l’obligation d’information en cas d’urgence,

de refus du patient d’être informé et de fragilité psychologique du patient 985.

Il faut reconnaître qu’en raison de son objet — la santé ou le bien-être de la

personne humaine 986 —, la responsabilité du médecin est immense 987. Pour aider le

corps médical à mieux appréhender cette responsabilité, il nous semble nécessaire de

réaffirmer, la politique de suivi personnalisé des patients. À cet effet, préconiser le

principe d’individualisation des soins 988.

§ 2. LA POLITIQUE D’INDIVIDUALISATION DES SOINS

194. L’individualisation des soins renvoie aux dispositions purement pratiques de l’art

médical, c’est-à-dire, la manière dont se déroule au quotidien de l’activité médicale.

982 Article L.1111-4 du Code de la santé publique.

983 Une décision médicale résultant de deux avis vrais parce que se basant chacun sur des informations vraies.

984 Article 35 du Code de déontologie français.

985 Sur les justifications de dispense d’information, voir : n° 169.

986 Le concept « personne humaine » a retrouvé son un sens juridique plus affirmé en 1945, voir : X. BIOY, Le concept de la personne humaine en Droit public. Recherche sur le sujet des droits fondamentaux, Th. de doctorat, Toulouse, 2003. Ce sens juridique s’exprime notamment par la valeur supérieure inhérente la nature humaine. L’expression de cette valeur est traduite aussi le terme : « dignité humaine ».

987 J. PENNEAU, La responsabilité médicale, Sirey, 1977, p. 3.

988 C. LEFÈVE, La philosophie du soin, in La matière et l’esprit, n° 4, Médecine et philosophie, Université de Mons-Hainaut, avril 2006, p. 25-34.

Page 269: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 268 —

Bien entendu, il ne s’agit pas ici de définir les actes médicaux à entreprendre ;

domaine qui ne relève pas de notre compétence. Il s’agit plutôt de concevoir des

dispositions légales qui accordent aux professionnels de se doter d’un outil

opérationnel durant le parcours thérapeutique (A). Certes, il s’agira d’outil

professionnel, mais, de par la nature de ses contenus — des informations

personnalisées —, il est appelé à être accessible aux personnes concernée (B).

A. L’outil opérationnel du parcours thérapeutique

195. Un outil est opérationnel quand il assure l’efficacité des soins. Pour ce, il doit

contenir toutes les informations concernant la thérapie. Décrit comme tel, l’outil en

question dans la pratique médicale, n’est autre que le dossier médical. Et par dossier

médical, on entend tout document écrit 989 qui relate les points de vue du médecin et

du patient par rapport à la maladie. Le dossier médical renferme ainsi, les doléances

émises par le patient en ce qui concerne l’altération de sa santé. Il peut contenir les

réactions de ce dernier après avoir été informé de son état et des suites à donner à la

prise en charge. Concrètement les réactions du patient relèvent de deux ordres : celui

de l’affect et du décisionnel. Pour l’affect, il s’agit notamment de notifier les

manifestations émotionnelles de l’intéressé 990 ; pour le décisionnel, il s’agit de

recueillir le consentement ou le refus de l’intéressé pour l’exécution de la thérapie.

En ce sens, le dossier médical devient le support attestant l’effectivité de l’obligation

médicale d’information (article L. 1111-2 du Code de la santé publique).

Après les points de vue du patient ; figurent dans le dossier, ceux du médecin. Le

médecin y inscrit le diagnostic, les risques liés à l’intervention ou au traitement et les

motivations sur les choix définitifs. Ensuite, le dossier médical retrace toute

intervention dont le patient a connu. Bref, de par son contenu, un dossier médical

actualisé 991 garantie une traçabilité du processus de prise en charge. En cela,

le dossier médical contribue à la continuité des soins et consécutivement, à la

sécurité du patient 992. En d’autres termes, le dossier médical, participe à la qualité de

la décision thérapeutique.

989 Pouvant être de différents formats et supports.

990 La prise en compte de l’affect du patient est cruciale dans l’appréciation de l’obligation d’information médicale. En effet, en cas de manifestation de fragilité du patient, le médecin est convié à la modération dans l’accomplissement du devoir d’information, voir : n° 169, 193.

991 Autrement dit mis à jour.

992 Sur la base des informations, le professionnel sera à même d’apprécier le rapport bénéfices-risques de telles ou telles interventions envisagées.

Page 270: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 269 —

Le dossier médical assume, outre l’intérêt purement pratique (le bon déroulement

de l’activité médicale), un rôle crucial dans le domaine du contentieux. En effet, pour

toute procédure de règlement de conflit (amiable ou judiciaire), le dossier médical est

l’élément de preuve par excellence permettant au juge d’apprécier les allégations des

parties en litige.

Enfin, le dossier médical doit permettre des actions d’évaluation et d’amélioration

de la qualité des soins au niveau de politique de santé. L’arrêté du 5 mars 2004

portant homologation des recommandations de bonnes pratiques médicales, dispose

en ce sens que le dossier médical est « un outil de formation et d’évaluation, et un support

d’informations indispensables pour améliorer les connaissances en santé et les pratiques ». Ainsi, il

constitue un document permettant des démarches de certification des établissements

sanitaires au niveau national.

En somme, le dossier médical est un outil au service de l’intérêt individuel et de

l’intérêt collectif de santé publique 993. Il permet à l’État de suivre la réalité des

prestations sanitaires. Il va sans dire qu’il s’agit d’un outil d’approfondissement pour

le monde de la recherche scientifique.

De tout ce qui précède, on lit à travers le dossier médical « la mémoire » 994 de

l’itinéraire du patient dans le système de soins. L’importance du rôle qu’assume ce

document, invite à l’insérer au sein de la proposition de loi relative à la responsabilité

médicale.

Le principe du libre consentement du patient à toute intervention thérapeutique

implique son droit de disposer de l’information relative à sa santé. Autrement

formulé, pour pouvoir consentir en connaissance de cause, il est nécessaire que le

patient puisse avoir accès à son dossier médical 995.

993 Le dossier médical singularise le patient dans le cadre d’une prise en charge collective. La Haute

autorité de la santé ou la HAS, donne une formule pragmatique de l’identité du dossier médical : « Le dossier médical est un outil commun de la pratique individuelle de chacun des acteurs de soins et témoigne de la démarche collective structurée et coordonnée dont le patient a bénéficié pour sa prise en charge », ANAES, Dossier du patient, Amélioration de la qualité de la tenue et du contenu du dossier du patient, Avant-propos, juillet 2003.

994 M. DUPONT, Adjoint au Directeur des affaires juridiques et des droits du patient de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, Dossier médical, Généralités, Communication, n° 445067, LexisNexis SA 2009, Droit médical et hospitalier, fasc. 9-2, p. 1.

995 A. LAUDE, L’accès au dossier médical, in C. KOUCHNER, A. LAUDE et A. TABUTEAU, Rapport sur les droits des malades 2007. 2008, coll., éd. de l’EHESP 2009, p. 13 et s.

Page 271: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 270 —

B. L’accès au dossier médical

196. En revenant sur les arrêts de complication gynécologique ayant eu lieu à

Madagascar 996, on peut dire que le droit d’accès au dossier médical tant pour le

patient que pour la défense est effectif. En effet, force est de constater que les

allégations des Avocats des parties se fondent sur les informations contenues aux

dossiers médicaux des parturientes. A été soulevé par exemple que « malgré

l’échographie, l’anomalie ombilicale n’a pas pu être détectée […] que cette anomalie constitue la

cause du décès de l’enfant » 997 Concrètement cela reviendrait à dire que dans le parcours

de prise en charge de la parturiente, une échographie a été effectuée et que ce sont les

mentions au dossier médical qui en fait foi. Et, lorsque la défense dispose qu’ :

« aucun antécédent médical laissant présager des difficultés particulières n’a été signalé durant le suivi

de la grossesse », il est établi que le suivi du parcours de soin est réel et dont la lecture a

été rendue possible par le biais d’un document écrit : le dossier médical. Pour autant,

il faut bien comprendre le cadre où se déploie ce droit d’accès au dossier médical.

En l’occurrence, il s’agit d’un cadre processuel. En effet, ce sont les exigences de la

procédure — production de preuve — qui justifient l’accès au dossier médical. Si, en

raison du bon déroulement du procès, l’accès au dossier médical devient une

obligation légale, il nous semble que cette faveur doit être inhérente à la qualité de

« patient ». À cet effet, le droit d’accès au dossier médical du patient, doit être

introduit dans la proposition de loi malgache relative à la responsabilité médicale. La

proposition suivante est à ce propos, avancée :

Les établissements de santé, qu’ils soient publics ou privés, sont tenus de communiquer aux personnes recevant ou ayant reçu des soins, sur leur

demande, les informations médicales, personnelles les concernant. 998

Le droit intangible du patient à l’information a pour corollaire le droit à l’accès au

dossier médical. En raison du colloque singulier qui lie le patient à son médecin ainsi

996 Dossier n° 3256-RP/FI/06/IS/SC, Tribunal Correctionnel de Fianarantsoa, Madagascar, 2007.

997 Tribunal de première instance de Fianarantsoa, chambre correctionnelle, note en délibéré 2007. Il s’agit en l’espèce d’un cas d’un accouchement provoqué, voir : n° 57.

998 La disposition est inspirée du droit médical français, voir : La loi hospitalière n° 91-748 du 31 juillet 1991 et article L. 1111-2 du Code de la santé publique.

Page 272: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 271 —

que du droit fondamental de disposer de son corps 999, le droit d’accès au dossier

médical, ne peut être aliéné par le secret professionnel 1000.

999 Le droit de disposer de son corps implique la reconnaissance du droit de la personne à la

maîtrise exclusive de soi. Ainsi « Toute personne a droit de disposer de son corps. Cela doit permettre de protéger les intérêts matériels et moraux de son corps. L’individu a donc un pouvoir sur son corps […] », http://www.lemondepolitique.fr.

1000 Voir : G. MÉMETEAU, Cours de droit médical, Les études hospitalières, 2003, p. 259 à 262.

Page 273: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 272 —

CONCLUSION GÉNÉRALE

Page 274: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 273 —

Une loi relative à la responsabilité médicale à Madagascar ne peut se concevoir en

faisant fi des éléments suivants :

— La maîtrise des fondamentaux du droit civil que sont le principe de la

responsabilité civile et la loi sur la théorie générale des obligations ;

— L’approfondissement du contexte socio-culturel et socio-économique de

l’espace géographique ;

— L’attention à l’individualité souffrante du patient au sein même de

l’honorabilité et de la probité de la profession médicale.

LA MAÎTRISE DES FONDAMENTAUX DU DROIT CIVIL : LA RESPONSABILITÉ CIVILE ET LA LOI SUR LA THÉORIE GÉNÉRALE DES OBLIGATIONS

« Le droit médical ne peut s’apprécier à titre autonome » 1001. Il se laisse étudier dans la

logique de responsabilité civile : « Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un

dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » 1002. Transposé en droit

médical, le principe de la responsabilité civile implique le devoir de réparer les

dommages causés 1003 par le fait du médecin, soit par imprudence, soit par ignorance

de ce qu’il aurait dû savoir. Autrement dit, le devoir de réparation est retenu si

l’imprudence ou l’ignorance sont établies par la victime. La doctrine et la loi 1004

consacrent cet aboutissement jurisprudentiel 1005 en ces termes : « La responsabilité

médicale est une responsabilité pour faute ». Pour des raisons d’ordre historique 1006,

1001 G. MÉMETEAU, La réforme de la responsabilité médicale et la remontée aux sources du droit civil, Gaz. Pal.

1994, Doctr., 1151, p. 1153.

1002 Article 1382 du Code civil.

1003 En matière de responsabilité médicale, les dommages réparables peuvent être classés en trois groupes : corporel, moral et patrimonial, La catégorisation des préjudices, voir : n° 117.

1004 Article L.1142-1 du Code de la santé publique.

1005 « Il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat comportant pour le praticien l’engagement sinon bien évidemment de guérir le malade […] du moins de lui donner des soins consciencieux, attentifs et réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ; que la violation même involontaire de cette obligation est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle », Cass civ., 20 mai 1936, D.P. 1936.1.88, concl. P. MATTER, rapp. L. JOSSERAND, RTD civ. 1936. 691, obs. R. DEMOGUE. Depuis l’arrêt Mercier, l’obligation médicale liant le médecin au patient est une obligation de moyens. Le médecin ne s’engage pas à guérir le malade mais à dispenser des soins consciencieux. Et la Cour de cassation de rappeler que « La responsabilité du médecin est subordonnée à la preuve d’une faute commise dans l’accomplissement de l’acte médical », Cass. civ. 4 janvier 2005. .

1006 La contractualisation émane de deux raisons d’ordre historique : la mise en retrait de l’article 1384 du Code civil pour éviter le recours intempestif à la présomption de responsabilité,

…/…

Page 275: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 274 —

ce principe est de plus en plus affiné ; « La responsabilité médicale est une responsabilité

pour faute contractuelle ». Si la disposition paraît juste sur le plan de l’équité et le plan du

droit, son application concrète pose un problématique de taille : la difficulté de la

victime d’établir les preuves d’imprudence et d’ignorance professionnelle dans une

matière qui exige l’expertise ; la technicité médicale. Afin de résoudre la

confrontation entre la difficulté de fait (matérialisation de la preuve dans un domaine

scientifique) et la règle de droit (principe de la responsabilité pour faute), la loi

préconise le principe d’allègement de preuve. L’allègement de la preuve se traduit

communément par « présomption de responsabilité » dont l’application en droit de la

responsabilité médicale, reste soumise aux critères de gravité du dommage. Ainsi,

avons-nous compris qu’à Madagascar bien que le droit médical en tant que tel, n’est

pas encore spécifié, les dispositions de la responsabilité civile sont à même d’encadrer

juridiquement la responsabilité médicale. Et ce, d’une manière équitable car la loi a

pour principe de veiller à l’équilibre des droits et devoirs des contractants.

Le principe de la responsabilité civile est prévu à l’article 204 de la LTGO :

« Chacun est responsable du dommage causé par sa faute, même de négligence ou d’imprudence ».

Pour la faute de nature contractuelle, c’est l’article 177 de la LTGO qui est en

application : « En cas d’inexécution totale ou partielle d’une obligation contractuelle ou d’exécution

tardive, le débiteur doit réparer le préjudice causé de ce fait au créancier ». Bref, la LTGO ou la

loi sur la théorie générale des obligations peut régir la responsabilité médicale. Son

application au contentieux médical se concrétise par le principe : « Aucune personne ne

peut échapper à sa responsabilité si son activité a entraîné un dommage pour autrui » 1007.

L’APPROFONDISSEMENT DU CONTEXTE SOCIO-CULTUREL ET SOCIO-ÉCONOMIQUE DE L’ESPACE GÉOGRAPHIQUE

À Madagascar, l’inhérence de l’aléa thérapeutique à l’activité médicale est inscrite

dans la conscience collective. Les malgaches sont convaincus que l’issu d’un acte

thérapeutique relève du Divin 1008. Partant, le résultat thérapeutique ne peut être

attribué au fait du soignant. Juridiquement, cela reviendrait à dire que : « Le praticien

et l’argumentation procédurale de circonstance ouvrant droit à un délai de prescription favorable aux victimes.

1007 D. THOUVENIN, La responsabilité médicale, Médecine-Sciences, Analyse des données statistiques disponibles et des arrêts rendus par la Cour de cassation et le Conseil d’État de 1984 à 1992, Flammarion, p. 2.

1008 Le traitement des maladies est pratiqué dans une ambiance socioculturelle propre, dominée par des convictions éthiques et métaphysiques.

Page 276: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 275 —

s’engage sinon bien évidemment à guérir le malade du moins à lui donner des soins consciencieux,

attentifs et conformes aux données acquises de la science ». Si en soi la règle est juste, dans la

mise en pratique, elle peut générer deux frustrations : la résignation des victimes

d’accidents médicaux à assumer seul leurs préjudices et le tiraillement des juges entre

le refus de condamner des médecins sur un fait non-maîtrisable (l’issu thérapeutique)

et la nécessité de protéger les patients contre un comportement menaçant l’intégrité

corporelle 1009. Fort heureusement, sensibles à tout fait portant atteinte à l’intégrité

corporelle, les us et coutumes ont su combiner l’immunité juridique du soignant

supposé détenir un pouvoir surnaturel, avec le mode de réparation non rattachée à

l’identification d’un « responsable » au sens juridique du terme. Le dispositif

traditionnel est arrivé à veiller au respect de la victime tout en préservant

l’honorabilité professionnelle du soignant. Concrètement le dispositif consiste en

l’apport d’offrande ou de sacrifice dont l’importance sera proportionnée à la gravité

de la faute 1010 ; c’est-à-dire application du principe de la « réparation intégrale » 1011.

Eu égard à la situation économique du pays, le principe de la réparation intégrale

nécessite, d’être ajusté. Actuellement, sur le plan socio-économique, il est difficile

pour les médecins d’adopter un mécanisme de prévoyance indemnitaire, notamment

si on applique strictement le principe de réparation intégrale du préjudice. Il est tout

à fait logique que, quelle que soit la forme de l’entreprise de prévoyance, assurance

ou mutuelle, l’application stricte de l’intégralité du préjudice impose une exigence de

prime conséquente. Il est vital de trouver l’équilibre entre l’impératif d’indemniser et

la difficulté d’honorer les cotisations des adhérents de ces organismes

d’indemnisation. Cet équilibre repose sur l’évaluation des primes et le sens accordé à

l’indemnisation. Les primes doivent être calculées en fonction du pouvoir d’achat des

professionnels et consécutivement, l’indemnisation en cas d’accident médical, doit se

faire en adéquation avec les provisions. Un tel équilibre de politique indemnitaire

suppose une transparence et une étroite collaboration entre le juge et les organismes

d’indemnisation. Quant à la victime, bien que devant se situer au centre du dispositif

indemnitaire, elle doit comprendre que l’indemnisation ne repose pas spécialement

sur le chiffrage mais plus sur une reconnaissance du préjudice, donc une réparation

1009 Voir : RAMANITRA, De la répression de la sorcellerie à Madagascar, Annales de l’Université de

Madagascar-Droit, volume 8, p. 19.

1010 H. DUBOIS, La Religion malgache, Essai de synthèse, extrait de l’ouvrage consacré à Madagascar par les Cahiers Charles de Foucauld, Paris 1950, p. 289.

1011 G. VINEY, Traité de droit civil, sous la direction de J. GHESTIN, Introduction à la responsabilité, 3ème éd., LGDJ, 2008, p. 32, 77. Sur les aménagements faits au principe de réparation intégrale, voir : idem p. 146.

Page 277: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 276 —

plus d’ordre symbolique que compensatrice. En somme, il est impératif de proposer

un barème d’indemnisation actualisé ; c’est-à-dire, fidèle au contexte local où il est

établi.

L’ATTENTION À L’INDIVIDUALITÉ SOUFFRANTE DU PATIENT AU SEIN

DE L’HONORABILITÉ ET DE LA PROBITÉ DE LA PROFESSION

MÉDICALE

« La maladie consiste dans l’expérience répulsive que ressent le patient de la restriction de sa

capacité propre d’action dans le milieu » 1012. Au-delà des prescriptions médicales, le patient

suscite l’attention du soignant pour être à l’écoute de ce ressenti 1013. Autrement dit,

le médecin est appelé à prêter attention à la parole, à l’émotion, à la réaction du

patient ; bref, considérer l’expérience subjective ressentie par le malade à travers sa

maladie 1014. Procédant de la sorte l’activité médicale va conjuguer l’aspect purement

technique de l’activité médicale avec le vécu subjectif du corps. Pour le corps

médical, cette manière d’agir renvoie à une démarche soignante au sens noble du

terme : aider le malade à retrouver sa place dans l’environnement social par une

conscientisation de son état, lequel est certes déficient mais convié à assumer un rôle

social déterminé. Souvent avec une prise en charge de qualité, le malade arrive par

lui-même à découvrir ce rôle social qu’il aura à assumer 1015. Une prise en charge de

qualité suppose de la part du professionnel, la reconnaissance dans la personne du

patient, un sujet de droit apte à participer pleinement à la décision médicale

la concernant. En droit français, cette reconnaissance est confirmée par la loi du

4 mars 2002 1016qui pose le principe de l’obligation médicale d’information 1017.

1012 C. LEFÈVE, La philosophie du soin, in La matière et l’esprit, n° 4, Médecine et Philosophie, Université

de Mons-Hainaut, avril 2006, p. 25-34.

1013 « La médecine est née de l’appel du malade, de l’attention portée à sa souffrance et que, de ce fait, le souci de l’individualité souffrante, qui en constitue la raison d’être et la source, doit en rester le cœur », G. CANGUILHEM, Le Normal et le pathologique. Essai sur quelques problèmes concernant le normal et le pathologique, op. cit. 1943, p. 138-139.

1014 C. LEFÈVE, Ibid.

1015 « La thérapeutique vise la restauration ou l’instauration d’une normativité individuelle qui si, elle ne peut être identique au normal, à la santé perdue, doit néanmoins être conforme aux attentes du patient : lui seul peut juger s’il fait sienne cette nouvelle normalité », G. CANGUILHEM, Ibid.

1016 Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

1017 Article L. 1111-2 alinéas 1 et 2 du Code de la santé publique. « Toute personne a le droit d’être informée, préalablement aux investigations, traitements ou actions de prévention proposés, des risques inhérents à ceux-ci, que son consentement doit être recueilli par le praticien, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle elle n’est pas à même de consentir, de sorte que le non-respect du devoir

…/…

Page 278: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 277 —

Désormais, le médecin renseigne le patient sur la portée de la thérapie proposée afin

qu’il puisse y consentir librement 1018. À travers l’information transmise par le

praticien, le patient devient acteur dans le processus thérapeutique. Cette affirmation

du patient dans le processus thérapeutique marque pour le droit médical français le

passage du modèle paternaliste au modèle autonomique. Certes en prenant de la

distance sur le modèle paternaliste, le droit français a pu mettre en exergue le respect

de la liberté du patient. Néanmoins, en droit malgache, il ne nous semble pas désuet

de maintenir le modèle de paternalisme médical dans l’acception de bienveillance. Le

modèle paternaliste suppose la compétence technique et l’aptitude à d’écoute ; en

cela, il garantit une prise en charge empreinte de professionnalisme. Sachant toutefois

que l’acte médical consiste à intervenir sur le corps humain 1019, il est difficile

d’admettre qu’une atteinte, même en cas de nécessité thérapeutique puisse avoir lieu

sans le consentement clair du concerné 1020. Vu l’importance du professionnalisme

médical et du respect de la dignité du patient, il nous semble que les deux aspects

sont indissociables. Par voie de conséquence, le modèle que l’on propose pour le

régime de la décision médicale est celui de la « concertation ». Le modèle de

« concertation », unifie technicité et humanité. Le droit français s’inscrit dans le

modèle de « concertation » lorsque l’article L. 1111-4 du Code de la santé publique

dit que : « Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et

des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé ». Défini ainsi, le modèle de

concertation préserve la confiance mutuelle entre le médecin et le patient. Pour

autant, il nécessite tout de même un autre élément qui dépasse la sphère médecin-

patient : la dimension de tierce personne. En effet, si le soin concerne avant tout le

patient et le médecin, il ne faut pas minimiser les ressentis de l’entourage du patient.

La famille 1021 et les proches sont incontestablement concernés de ce que peut

d’information qui en découle, cause à celui auquel l’information était légalement due, un préjudice, que le juge ne peut laisser sans réparation », C. Cass. 12 janvier 2012.

1018 « Il ne peut être atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité thérapeutique pour la personne. Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir », article 16-3 du Code civil. Voir : aussi article L. 1111-4 du Code de la santé publique. En effet, « La relation médicale touche au corps et la vie, au mystère de l’être », Ph. MALAURIE et L. AYNES, Les obligations, 3e éd., Défrénois, 2007, p. 172.

1019 « La relation médicale touche au corps et la vie, aux mystère de l’être », Ph. MALAURIE et L. AYNES, Les obligations, 3e éd., Défrénois, 2007, p. 172. Voir : G. DEVERS, Retour sur la responsabilité, Doit et déontologie soin, Revue trimestrielle, décembre 2009, Vol. 9, n° 4, p. 393.

1020 Article 16-3 du Code civil. Voir : aussi article L. 1111-4 du Code de la santé publique.

1021 Dans l’hypothèse d’une issue fatale de l’intervention, on peut très bien considérer le pretium doloris qui touche les membres de la famille. Le fait d’émettre un avis avant toute intervention

…/…

Page 279: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 278 —

représenter l’acte thérapeutique. Ils veulent comprendre comment il sera mise en

œuvre, quels en sont les risques, comment le patient va réagir par rapport aux traitements…

Considérant que les proches du patient portent le souci du résultat thérapeutique,

la question se pose s’il ne faut pas prévoir une loi relative à l’obtention de leur avis

en termes de décision médicale ? Et ceci indépendamment de l’état de discernement

du patient ; autrement dit bien que le patient ne soit dans un état où il n’est pas à

même d’exprimer sa volonté 1022, l’avis des proches pourrait être toujours sollicité.

En cohérence avec le principe de la liberté du patient et de l’indépendance médicale,

l’avis de l’entourage reste à titre consultatif 1023. Ainsi, au-delà du principe

fondamental de la liberté individuelle due au malade, sa présence au sein d’une

institution sociale qu’est la famille tant au sens strict qu’au sens large, ouvre la

décision médicale à la dimension tierce personne, d’où le rôle assumé par la « personne

de confiance » 1024. Afin d’obtenir la décision médicale la plus actualisée au moment où

la capacité de discernement du patient se trouve altérée, la personne de confiance

intervient dans le processus décisionnel de l’acte thérapeutique.

À l’issue de cette étude, l’analyse montre qu’une politique d’indemnisation

automatique des accidents médicaux à Madagascar est tout à fait envisageable. Ceci

malgré les contraintes économiques pouvant faire obstacle au mécanisme de

prévoyance de dette de responsabilité professionnelle. Cette possibilité

d’indemnisation des victimes d’accidents médicaux s’appuie sur le fait de bien

repréciser le sens que l’on accorde au devoir médical de réparation.

d’un proche, peut aider à participer à intégrer tout le processus psychologique d’acceptation des épreuves liées à la thérapie. Par ailleurs, à côté des dommages moraux, figurent les dommages d’ordre matériel qui ne sont pas sans conséquence dans la vie familiale (les frais de santé, la perte de revenu…). En ce sens, la perte de revenu pour déficit fonctionnel peut avoir des conséquences sur les conditions au quotidien de la famille.

1022 Tel que c’est prévu actuellement en droit médical français : « […] Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l’article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté », article L.1111-4 du Code de la santé publique.

1023 L’avis de l’entourage éclaire en quelque sorte le corps médical sur le ressenti du patient et les impacts de ces affects vis-à-vis de son milieu. En aucune manière l’avis de l’entourage n’influence la décision thérapeutique sur le plan technique, laquelle reste quoi qu’on en dise l’exclusivité du professionnel. Cet avis n’a aucune force obligatoire par rapport à la décision thérapeutique tant que le patient est en état d’exprimer consciencieusement sa volonté. Ainsi, la personne de confiance ne consent ni refuse pour le patient, elle dit juste ce qu’aurait été la volonté de ce dernier. « La personne de confiance ne peut consentir ou refuser pour le patient. En effet, nul ne peut consentir pour autrui, sauf dans des cas définis strictement par la loi […] », voir : S. RAMEIX, La décision médicale. Du paternalisme des médecins à l’autonomie des patients, Cahiers philosophiques, juin 2004, p. 65.

1024 Prévue à l’article L.1111-6 du Code de la santé publique.

Page 280: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 279 —

« Réparer le dommage corporel, n’est pas effacer le traumatisme par une tentative de remise en état de

la situation initiale de la victime avant que l’accident n’arrive » ; « Réparer, c’est avant tout

manifester à la victime, la reconnaissance de son heurt ». Cette approche du devoir de

réparation rejoint la conception malgache de la relation sociale : une entité animée

par une vision altruiste des personnes la composant. Les malgaches nomment cette

approche par le vocable : fihavanana. Le fihavanana 1025 suppose une bienveillance

mutuelle en toutes circonstances. Garant du lien social, le fihavanana propose alors,

une forme d’indemnisation non axée sur la valeur monétaire de la réparation mais

plutôt sur la reconnaissance des douleurs des victimes et la volonté d’établir « autant

que faire se peut » une sérénité des relations futures des parties. Conçue comme telle, la

démarche indemnitaire est tout à fait réalisable quel que soit la situation économique

du pays. En effet, reposant sur la concession mutuelle 1026 des parties en désaccord, le

fihavanana constitue un dispositif de résolution amiable des conflits dit aussi : mode

alternative de résolution des conflits ou « MARC ». Le droit médical français a

institutionnalisé les « MARC » par loi du 4 mars 2002. Il est temps pour le droit

médical malgache d’institutionnaliser ce mode de résolution de conflit issu d’une

identité nationale que représente le fihavanana; de la sorte une modalité de résolution

fondée sur la solidarité nationale sera inscrite dans la proposition de loi relative au

droit des soins à Madagascar.

Bien entendu l’effectivité de cette disposition légale dépend de la présence

d’organisme d’indemnisation. Pour ce, l’étude présente, propose la formule de

structure mutualiste où les professionnels vont se regrouper et se cotiser afin de

répondre aux éventuelles dettes de responsabilité. La différence avec l’assurance étant

que la structure mutualiste 1027, appartient aux médecins qui eux-mêmes vont assurer

1025 Le fihavanana exprime avant tout une vision idéale de ce que devraient être la nation et son tissu

social : image d’une famille -. Bien que cette vision du fihavanana ne soit pas encore accomplie, la notion assume un rôle social important. Le fihavanana est un stimulant à l’action, un antidote au découragement, et une promesse vécue lors de moments forts, entre autres, le mariage, la naissance, le décès et le famadihana ou le retournement des morts, S. URFER, Le fihavanana en question, No comment magazine n° 27, avril 2012.

1026 La résolution des conflits se déroule sur la base de négociation. Le système du fihavanana est propice pour trouver un point d’entente.

1027 Par souci de précision, nous avons pris l’expression « modèle mutualiste » au lieu de « mutuelle », laquelle reste strictement encadrée et soumise à une certaine exigence tarifaire concernant le fond propre . Pour ce qui relève de la mutualité, le droit malgache s’appuie largement sur le droit français. Depuis le 22 avril 2001, suite aux directives européennes pour l’instauration d’un « marché unique » dans le domaine de l’assurance, toutes les mutuelles devaient impérativement demander leur agrément avant le 31 décembre 2002 pour continuer d’exister. Pour ce, elles devaient avoir constitué des fonds propres assez importants ; au minimum 600 000 euros. Afin de répondre à cette exigence financière, on opère par voie de fusion. Tel est par exemple le cas

…/…

Page 281: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 280 —

la pérennisation de leur entreprise ; il s’agit d’autogestion. Quant à la victime, bien

que devant se situer au centre du dispositif indemnitaire, elle doit coopérer à

l’effectivité de la démarche indemnitaire en adhérant au principe selon laquelle, la

réparation ne repose pas spécialement sur le chiffrage mais plus sur une

reconnaissance du préjudice ; partant la réparation revêt un aspect symbolique que

compensatrice.

de la fusion de la Mutuelle de Madagascar avec la SMAPRI (Mutuelle d’accueil et de prévoyance Interprofessionnelle).

Page 282: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 281 —

PROJET DE LOI

PRÉAMBULE

TITRE I. LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE : PRINCIPES GÉNÉRAUX

Article 1

Le médecin n’est pas responsable du seul fait de la non-guérison. Il l’est du

moment où ce fait résulte d’un défaut de prudence ou de diligence dans l’exécution

du contrat médical. Le contrat médical porte l’obligation de prodiguer des soins

consciencieux et conformes aux données avérées de la science.

Toutes pertes, et tous dommages du fait d’un médecin, que ce soit par

imprudence, légèreté ou ignorance de ce qu’on doit savoir, ou autres fautes

semblables, si légères soient-elles doivent être réparées par le médecin dont

l’imprudence ou autre faute y a donné lieu.

Il appartient à celui qui invoque le défaut des obligations contractuelles de

rapporter les preuves de ce qu’il soutient.

Article 2

Toute personne a compte tenu de son état de santé et de l’urgence des

interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et

de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la

meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes

de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances

médicales, lui faire courir des risques disproportionnés par rapport au bénéfice

escompté.

Le médecin engage sa responsabilité en cas de mise en danger délibérée de la

personne d’autrui. Tel est notamment le cas pour l’omission aux diligences qu’exige

la nature de l’obligation compte tenu des circonstances du pouvoir et des moyens

dont le professionnel doit faire face.

L’absence de contact physique entre le soignant et le patient, n’est pas une cause

exonératoire de responsabilité.

Page 283: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 282 —

Article 3

En vertu du principe de loyauté prévu à l’article 123 de la Loi sur les théories

générales des obligations, le médecin est tenu d’exécuter fidèlement l’obligation

mentionnée à l’article précédent malgré les difficultés plus ou moins sérieuses qu’il

peut rencontrer durant l’exercice de sa profession.

En vertu du principe de coopération prévu à l’article 123 de la Loi sur les théories

générales des obligations, le patient est tenu d’agir de manière à faciliter l’exécution

du contrat médical.

Ainsi en application de l’obligation de loyauté et de coopération, le patient

s’engage avec le professionnel de santé, à assurer la qualité de la prise en charge

thérapeutique.

TITRE II. LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE : DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES

Article 1

Sans préjudices des dispositions de l’article 1er, Titre I de la présente, l’obligation,

n’est pas exclusive d’une obligation accessoire de sécurité du patient.

Pour des circonstances spécifiques, le professionnel de santé a une obligation de

sécurité qui l’oblige à réparer le dommage causé à son patient même en l’absence de

faute. Il ne peut s’exonérer de cette responsabilité qu’établissant la cause étrangère.

La cause étrangère recouvre trois types d’événements : la force majeure incluant le

fait irrésistible, l’imprévisible ; le fait d’un tiers et la faute de la victime.

TITRE III. L’ OBLIGATION MÉDICALE D’INFORMATION

Article 1

Sauf urgence ou impossibilité, le médecin doit informer le patient du diagnostic,

des éventuelles conséquences secondaires et des risques sérieux liés aux thérapies

proposées. Le médecin informe le patient sur l’utilité des actes proposés et le cas

échéant la nécessité d’intervenir en urgence.

Le médecin doit s’assurer que le patient ait bien compris et assimilé les

informations communiquées.

Page 284: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 283 —

Article 2

Conformément à l’article « x » relatif au consentement médical, le médecin

recherchera le consentement éclairé du patient avant toute intervention. Il ne peut

substituer sa propre conception du bien-être personnel, à celle de son patient. Le fait

pour une personne de consulter un médecin ne signifie pas de sa part, consentement

aux traitements thérapeutiques. Le médecin est tenu de s’abstenir de toute

intervention en cas de refus du patient. Toutefois, dans ces circonstances, le médecin

est tenu d’informer l’intéressé sur les conséquences tant bénignes que graves du

refus 1028

La volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un

pronostic, notamment grave, doit être respectée, sous réserve de l’exposition des tiers

aux dangers.

Dans l’intérêt du patient, le médecin peut tenir le patient dans l’ignorance d’un

diagnostic ou d’un pronostic graves. Pour permettre au patient de bénéficier d’un

soutien direct, le professionnel peut informer la famille, les proches et/ou la

personne de confiance des circonstances.

L’information médicale est délivrée au cours d’un entretien individuel ».

Article 3

Un médecin appelé à donner des soins à un mineur ou à un majeur protégé doit

s’efforcer de prévenir ses parents ou son représentant légal afin d’obtenir leur

consentement. Le médecin doit informer ces derniers des éléments mentionnés au

premier article du présent Titre.

En fonction du degré de maturité ou du degré de discernement s’agissant des

majeurs sous tutelle, le médecin apprécie l’opportunité de prendre en compte l’avis

de l’intéressé quant à la poursuite ou non de la continuité de la thérapie. Dans le cas

où le médecin estime la capacité de discernement du mineur suffisamment mature, il

l’informe des éléments mentionnés au premier article du présent Titre.

Le médecin peut exceptionnellement, se dispenser du devoir de consulter

les représentants légaux lorsque le traitement ou l’intervention s’impose pour

1028 Pour précision, il y a deux sortes de refus : le refus de procéder à une intervention médicale et le

refus d’être informé sur le contour du processus thérapeutique (diagnostic, risques, conséquences secondaires, urgence…).

Page 285: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 284 —

sauvegarder la santé du mineur. La même disposition s’applique si le mineur s’oppose

expressément à la consultation des représentants légaux. Toutefois, dans ce cas de

figure, le médecin doit dans un premier temps s’efforcer d’obtenir le consentement

du mineur à la consultation concernée. Si le mineur maintient son opposition, le

médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l’intervention. Dans ce cas, le mineur

se fait accompagner d’une personne majeure de son choix.

En cas d’urgence, le médecin doit donner les soins strictement nécessaires.

TITRE IV. LA DÉCISION MÉDICALE

Article 1

Conformément à l’article 72 du Code de la santé publique, la décision

thérapeutique, est du monopole du médecin titulaire des diplômes ou de certificats

requis, reconnus par l’État malagasy et inscrit au Tableau de l’Ordre des médecins.

Par la suite, en vertu du principe de loyauté et de coopération prévu à l’article 123

de la Loi sur la théorie générale des obligations, l’exécution de la décision

thérapeutique, relève de la concertation des patries au contrat médical. Le patient

prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des

préconisations qu’il lui fournit, la décision médicale concernant sa santé.

Article 2

Dans les cas où la faculté de discernement du patient est altérée, le médecin

sollicitera une personne de confiance afin d’exprimer la position qu’aurait émise le

patient sur la poursuite des investigations et traitements.

TITRE V. LES MODALITÉS DE RÉPARATION

Article 1

Le devoir de réparation qui s’impose à celui dont la responsabilité est engagée,

tend à la reconnaissance des préjudices de la victime et à l’établissement d’une

sérénité relationnelle des parties.

La reconnaissance des préjudices suppose une compensation matérialisée par une

chose ou matérialisée à titre de dommages et intérêts.

La compensation matérialisée par une chose si réalisable, reste prioritaire à la

demande de la victime.

Page 286: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 285 —

TITRE VI. LA RÉSOLUTION ALTERNATIVE DES CONFLITS MÉDICAUX

Article 1

Les médecins peuvent décider d’un commun accord d’instituer une structure

mutualiste regroupant des membres de la profession en vue de répondre aux

éventuelles dettes de responsabilité civile professionnelle.

Pour répondre à sa mission, les membres sont tenus de verser une cotisation

préalablement fixée par l’ensemble des adhérents.

Article 2

La structure mutualiste érigée par le groupement de médecins est chargée outre

l’intervention strictement indemnitaire, de faciliter le règlement amiable des litiges

relatifs aux accidents médicaux ainsi que tout autre litiges entre usagers du système de

santé et le corps médical.

Article 3

La structure mutualiste érigée par le groupement de médecins, peut être saisie

directement par toute victime de dommage imputable à une activité de prévention,

de diagnostic ou le cas échéant son représentant légal et ses ayants-droit dans

l’hypothèse de décès.

La saisine de la structure mutualiste suppose de réunir toutes les pièces

justificatives attestant la consistance des dommages dont le malade s’estime être

victime, et notamment le certificat médical. Le cas échéant, tout document justifiant

de la gravité du préjudice peut être jointe à la saisine.

Article 4

Au cas où une procédure contentieuse est conduite parallèlement, à la procédure

amiable, la victime a une obligation d’informer respectivement la structure mutualiste

et la juridiction saisie des démarches entreprises, afin d’éviter des doubles

réparations.

La saisine d’une structure mutualiste en qualité d’organisme d’indemnisation,

suspend les délais de prescription et de recours contentieux jusqu’au terme de la

procédure de règlement amiable.

Page 287: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 286 —

TITRE VII. L’EFFECTIVITÉ DE LA RÉPARATION : LE DEVOIR D’ASSURANCE

Article 1

Conformément aux dispositions du Code des assurances 1029

Les professionnels de santé exerçant à titre libéral dans le cadre d’exercice

individuel ou en groupe, peuvent 1030 souscrire une assurance destinée à les garantir

pour leur responsabilité civile professionnelle susceptible d’être engagée en raison de

dommages subis par les patients résultant d’atteinte à la personne, survenant dans le

cadre de l’activité médicale.

Les contrats d’assurance souscrits en application du premier alinéa peuvent

prévoir des plafonds de garantie.

Article 2

Lorsque l’exercice de la médecine libérale, se réalise dans une structure de groupe,

la souscription d’assurance est au nom du groupe, couvre la responsabilité

individuelle de chaque médecin rattaché, sous réserve qu’il s’agisse d’une

responsabilité relevant d’une faute professionnelle.

Article 3

Dans le cadre de l’exercice médical en groupe, les médecins rattachés sont

indéfiniment responsables 1031.

Article 4

Le médecin peut prévoir dans le contrat d’assurance professionnelle médicale, une

clause de protection juridique professionnelle. La protection juridique professionnelle

est destinée à couvrir les frais de procédures contentieuses que devrait assumer

l’assuré

1029 Dans sa version refondue proposée par la présente étude, voir : n° 93.

1030 En tenant en compte des données économiques, l’étude opte pour le facultatif en matière d’obligation de souscription d’assurance.

1031 Ils peuvent à cet effet prévoir de souscrire une assurance responsabilité civile médicale personnelle et gardent ensuite le privilège de l’action récursoire.

Page 288: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 287 —

TITRE VIII. DISPOSITION FINALE

L’exercice de l’activité médicale a pour vocation de servir les personnes dont la

santé se trouve à un moment de leur existence fragilisée. Pour remplir d’une manière

ajustée cette mission, le médecin doit faire preuve d’attention inconditionnelle à

l’égard des personnes qui le sollicitent.

L’exercice de l’activité médicale doit être accompli dans le respect de la rigueur

scientifique. La médecine exige du médecin qu’il ait durant l’exercice de sa

profession, ce que la formation et l’expérience lui ont enseigné. L’acquisition d’une

formation solide doit être continue tout le long du parcours professionnel.

L’exercice de l’activité médicale nécessite une relation de confiance entre le

médecin et le patient. Le médecin est appelé à faire preuve de patience à l’égard des

patients afin que s’ils le souhaitent, ils puissent comprendre dans la mesure de leur

entendement les soins qui leur sont proposés.

La médecine doit s’accomplir dans un esprit modéré dans la mesure où le médecin

et le noble devoir de soigner ont leurs limites.

Page 289: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 288 —

ANNEXES

Page 290: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 289 —

CODE DE LA SANTÉ (MADAGASCAR)

Page 291: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 290 —

LOI N° 2011-002 PORTANT CODE DE LA SANTÉ

EXPOSÉ DES MOTIFS

La Loi portant Code de la Santé qui fait l’objet du présent Exposé des Motifs est appelé à

remplacer l’Ordonnance n° 62.072 du 29 Septembre 1962 portant codification des textes

législatifs concernant la Santé Publique.

Plus de cinquante ans se sont écoulés entre les deux Codes durant lesquels d’importantes

données ayant des impacts sur l’évolution de la santé de la population sont intervenus. De

nouvelles structures institutionnelles et administratives ont été mises en place. Les

attributions du Ministère chargé de la Santé se sont considérablement accrues, tandis que des

progrès notables ont été accomplis dans les domaines qui relèvent du Ministère chargé de la

Santé.

La conception de la Politique Nationale de la Santé a été elle-même fortement marquée

par des textes fondamentaux d’ordre international et national dont les principaux méritent

d’être mentionnés.

Dans le domaine du Droit international et durant les cinquante ans qui séparent les deux

Codes, d’importantes Conventions Internationales ont été ratifiées par Madagascar, qui

invitent tous les États parties à faire accomplir à leur politique de santé des progrès tangibles.

On peut citer en particulier, dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme,

l’article 25 :

1) « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-

être et ceux de sa famille, notamment…les soins médicaux ainsi que les services sociaux

nécessaires… » ;

2) « la maternité et l’enfance ont droit à une aide et à une assistance spéciales ».

Dans le Pacte International relatif aux droits économiques sociaux et culturels, on peut

noter l’article 12 qui dispose :

1. « Les États parties au Présent Pacte reconnaissent le droit qu’a toute personne de jouir

du meilleur état de santé physique et mentale qu’elle soit capable d’atteindre ».

2. « Les mesures que les États parties au Présent Pacte prendront en vue d’assurer le plein

exercice de ce droit devront comprendre les mesures nécessaires pour assurer : a. la

diminution de la mortinatalité et de la mortalité infantile, ainsi que le développement sain de

l’enfant ; b. l’amélioration de tous les aspects de l’hygiène du milieu et de l’hygiène

industrielle ; c. la prophylaxie et le traitement des maladies épidémiques, professionnelles et

autres, ainsi que la lutte contre ces maladies ; d. la création de conditions propres à assurer à

tous les services médicaux et une aide médicale en cas de maladie ».

Sur le Plan National

La Constitution comporte quelques dispositions concernant la protection de l’individu et

de sa santé.

Page 292: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 291 —

On peut notamment mentionner les dispositions qui stipulent que l’« État reconnaît et

organise à tout individu le droit à la protection de sa santé dès la conception », et aussi que

« l’État assure la protection de la famille pour son libre épanouissement ainsi que celle de la

mère et de l’enfant par une législation et par des institutions sociales appropriées ».

Le Gouvernement s’est engagé à réaliser un développement réel et tangible en donnant la

priorité aux Initiatives de Réforme Transformationnelle.

Procédant à l’analyse de la pauvreté, le Gouvernement a tracé les stratégies et les

différentes actions qui conduiront à une croissance économique rapide, contribueront à la

réduction de la pauvreté et permettront au pays de tirer avantage des défis de la

mondialisation, conformément aux Objectifs du Millénaire pour le Développement.

Les stratégies et projets de la Politique Nationale de la Santé comportent 8 engagements,

visent essentiellement une diminution effective de la pauvreté et une amélioration palpable

de la qualité de vie des Malgaches.

Concernant plus particulièrement le volet Santé/Population, le Gouvernement s’est

constamment préoccupé de maintenir la population en bonne santé, c’est-à-dire dans un état

complet de bien-être physique, mental et social. En effet, une telle population pourra

contribuer au développement de la Nation et mener de longues et fructueuses vies. Elle

constitue ainsi le levier fondamental du développement.

On comprend dès lors que le Gouvernement, prenant en compte les dernières données

disponibles sur l’état de santé de la population et en particulier des groupes sociaux les plus

vulnérables, a défini les grandes lignes d’une politique de santé qui comprend notamment la

Santé, le Planning Familial et la Lutte contre le VIH/SIDA.

Le programme d’actions du Secteur Santé s’est focalisé sur huit (08) volets qui consistent

à :

— assurer la fourniture de services de santé de qualité à tous ;

— éliminer les principales maladies transmissibles ;

— gagner la lutte contre le VIH/SIDA ;

— mettre en œuvre une stratégie efficace de planning familial ;

— réduire la mortalité infanto-juvénile ;

— réduire la mortalité maternelle et néonatale ;

— améliorer la nutrition et la sécurité alimentaire ;

— approvisionner la population en eau potable et généraliser les pratiques hygiéniques et

sanitaires. Ainsi, les problèmes de malnutrition et du paludisme seront résolus ; la tendance

de la propagation du VIH/SIDA sera inversée ; l’eau potable deviendra accessible et la taille

moyenne de la famille malgache sera réduite, grâce à l’éducation et à la fourniture de services

de santé.

Tenant compte de ces différentes déclarations, mais surtout du contexte socio-

économique nouveau auquel le Gouvernement doit faire face, le Ministère chargé de la Santé

a pris la décision de mettre en œuvre un nouveau Code de la Santé, inspiré de travaux

préparatoires remontant à différents ateliers organisés en 1997 mais enrichis

considérablement grâce à une réflexion collective impliquant la participation active des

Page 293: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 292 —

Directions, des Services et des Partenaires. L’objectif vise à mettre entre les mains des

professionnels de la Santé et au Service de la Population, un instrument juridique actualisé,

crédible et accessible pour tous.

Le contenu de la loi

La Loi portant Code de la Santé comporte 360 articles, contre 117 articles pour l’ancien

Code de la Santé Publique.

Par ailleurs, il faut préciser que, dans le respect des dispositions de la Constitution portant

sur le domaine de la loi et du règlement, le nouveau projet définit surtout les principes

généraux de l’organisation et du fonctionnement du Secteur Santé. Il devra être complété par

des décrets ou des arrêtés concernant les modalités d’application et les règles qui ne sont pas

nécessairement des principes généraux.

Les 360 articles du nouveau Code sont répartis en 10 Livres qui ont été, dans la mesure

du possible, logiquement classés et dans lesquels ont été insérés les nouveaux éléments ayant

vocation à enrichir la Politique Nationale de la Santé.

Le Livre Préliminaire est une nouveauté dans la présentation du Code car il rassemble

diverses règles fondamentales de l’organisation générale des établissements hospitaliers et des

Services de Santé conformément à la Politique Nationale de la Réforme Hospitalière. Il

introduit de nouvelles prescriptions concernant les Commissions d’Hygiène et de Santé,

consacre la création et les prérogatives de l’Agence du Médicament de Madagascar, confirme

les modalités de création ou de suppression des établissements de soins et intègre dans le

Code des prescriptions nouvelles concernant la Télémédecine.

Le Livre Premier récapitule la réglementation fondamentale de la protection générale de

la Santé. Les mesures sanitaires et d’hygiène générales, auparavant éparses dans divers textes,

sont regroupées, tandis que des indications sur l’orientation générale et sur un classement

logique des mesures d’hygiène et de salubrité sont clairement mises en valeur.

Des nouveautés importantes ont été introduites dans ce Livre premier, notamment celle

relative à la protection de l’environnement et celle concernant le contrôle sanitaire aux

frontières dont les dispositions ont été renforcées.

Le Livre II est consacré aux professions médicales, paramédicales et à la médecine

traditionnelle. Aux côtés des dispositions déjà connues mais précisées, des innovations ont

été introduites concernant la profession des auxiliaires médicaux et la reconnaissance de la

légalité de la pratique de la médecine traditionnelle, sans omettre de limiter juridiquement

cette reconnaissance, afin d’éviter la prolifération du charlatanisme dans la profession.

Le Livre III a trait aux médicaments, à la pharmacie et aux conditions d’exercice de la

profession de pharmacie. Des règles innovatrices concernent la politique pharmaceutique

nationale, la définition des médicaments, les essais cliniques, la publicité, les établissements

d’importation de ventes en gros, les pharmacies à gestion particulière, la pharmacopée

traditionnelle et la libéralisation des opérations concernant la vente des médicaments et

autres biens de santé.

Le Livre IV reprend selon un ordre normal- celui des services compétents-les modalités

de lutte contre les maladies contagieuses. En outre, le cas des autres maladies émergentes et

réémergentes est évoqué, et une mention particulière concerne les maladies infectieuses

diarrhéiques, dont le choléra ainsi que les maladies sexuellement transmissibles.

Page 294: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 293 —

Le Livre V concerne les maladies non transmissibles mais renforce les dispositions

relatives aux maladies chroniques et invalidantes, aux maladies oculaires, à la lutte contre la

toxicomanie et les maladies mentales, sans oublier la santé bucco-dentaire.

Le Livre VI requiert une attention particulière car il contient des dispositions

fondamentales tirées des Conventions internationales relatives à la protection de la famille et

de l’enfant. En outre, il introduit des innovations sur la santé de la reproduction et sur la

santé scolaire et universitaire. Il intègre dans le Code de la Politique Nationale de Nutrition et

le Programme élargi de vaccination.

Le Livre VII renforce des dispositions déjà connues mais nécessitant des précisions sur

les laboratoires d’analyses médicales, sur le sang et ses dérivés et sur le contrôle de la

manipulation des produits à base microbienne. Une attention particulière a été apportée aux

dispositions destinées à régir la transfusion sanguine.

Le Livre VIII fixe la classification des responsabilités des personnels relevant du

Ministère chargé de la Santé ainsi que celles de ses prestataires et des sanctions qui en

découlent en cas de défaillance.

Le Livre IX regroupe les peines et mesures disciplinaires applicables en cas d’infraction.

Des peines et mesures disposées en accord avec tous les intervenants du secteur santé, étant

donné la gravité des infractions commises dès qu’il s’agit d’activités relatives à la santé

publique.

Le Livre X est relatif aux dispositions diverses et transitoires. Il prévoit les dispositions

transitoires qui doivent être conçues ou maintenues en attendant la mise en place effective

des futures structures de la Quatrième République.

Tel est l’objet de la présente Loi.

Présidence de la Haute Autorité de la Transition

---------------------

Loi n° 2011-002 portant Code de la Santé

Le Congrès de la Transition et le Conseil Supérieur de la Transition ont adopté en leurs

séances respectives en date du 24 mai 2011 et du 27 mai 2011,

Le Président de la Haute Autorité de la Transition, Chef d’État,

Vu la Constitution, Vu la décision n° 02-HCC/D3 du 11 juillet 2011 de la Haute Cour

Constitutionnelle ; Promulgue la loi dont la teneur suit :

LIVRE PRÉLIMINAIRE. DE L’ORGANISATION INSTITUTIONNELLE ET ADMINISTRATIVE DES

SERVICES MÉDICAUX DE MADAGASCAR

Article premier.— Le présent livre est consacré à la présentation générale des institutions

et structures administratives constituant le cadre d’ensemble au sein duquel les services

sanitaires et médicaux exercent leurs activités, en partenariat avec les organismes privés et la

Société Civile et en cohérence avec les Collectivités Territoriales Décentralisées.

Page 295: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 294 —

TITRE PREMIER. DES INSTITUTIONS

Article 2.— L’organisation de l’ensemble des services médicaux et administratifs est fixée

par décrets pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé

et éventuellement, par les Arrêtés et Circulaires pris pour l’application de ces décrets.

L’organisation et les attributions des différents Conseils et Commissions sont fixées par

décrets pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 3.— Le Comité National d’Hygiène et de Santé, organisme unique qui a remplacé

le Comité Supérieur d’Hygiène et la Commission Nationale d’Organisation Hospitalière, fera

l’objet d’un décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la

Santé, renforçant son organisation et précisant sa composition, son rôle et son

fonctionnement.

Les Comités d’Hygiène et de Santé qui ont remplacé les Comités Provinciaux d’Hygiène à

l’échelle régionale ou communale sont renforcés dans leur composition, leur rôle et leur

fonctionnement par Arrêté du Ministère chargé de la Santé.

TITRE II. DE L’AGENCE DU MÉDICAMENT DE MADAGASCAR, DES

AGENCES ET DES UNITÉS DE CONTRÔLE ET DE PRODUCTION

Article 4.— Dans le cadre de la mise en place de la Politique Pharmaceutique Nationale,

le Ministre chargé de la Santé confère à « l’Agence du Médicament de Madagascar »,

Établissement Public à caractère Administratif doté de la personnalité morale et de

l’autonomie financière, une mission de mise en œuvre et de contrôle de la qualité des

médicaments à Madagascar.

La mise en place de l’Agence du Médicament de Madagascar est fixée par décret pris en

Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 5.— Les attributions de l’agence du Médicament de Madagascar dont

l’énumération figure au Titre IV du Livre III du présent Code ont pour objet :

— de garantir l’indépendance, la compétence scientifique et l’efficacité administrative des

études et des contrôles relatifs à la fabrication, aux essais, aux propriétés thérapeutiques et à

l’usage des médicaments ;

— d’assurer au meilleur coût la santé et la sécurité de la population ;

— de contribuer au développement des activités industrielles et de la recherche

pharmaceutique ;

— de charger les pharmaciens inspecteurs placés sous son autorité du contrôle de

l’application de la législation et de la règlementation relatives au médicament et à l’exercice de

la profession de pharmacien.

Article 6.— Il est créé au sein du Ministère chargé de la Santé une Agence de Contrôle de

la Sécurité Sanitaire et de la Qualité des Denrées Alimentaires (ACSQDA).

C’est un Établissement Public à caractère Administratif (EPA) doté de la personnalité

morale et de l’autonomie juridique et financière.

Article 7.— L’Agence de Contrôle de la Sécurité Sanitaire et de la Qualité des Denrées

Alimentaires a pour mission de protéger la santé des consommateurs en veillant à ce que des

Page 296: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 295 —

denrées alimentaires consommées, distribuées, commercialisées ou produites à Madagascar

soient conformes aux normes nationales et internationales en vigueur, en matière de sécurité

sanitaire et d’hygiène alimentaire.

Article 8.— Tout inspecteur de l’Agence de Contrôle de la Sécurité Sanitaire et de la

Qualité des Denrées Alimentaires a qualité pour agir suivant les dispositions de l’article 199

du présent Code dans le domaine du contrôle des denrées alimentaires et en cas de fraudes

alimentaires.

Les modalités d’organisation et de fonctionnement de l’Agence de Contrôle de la Sécurité

Sanitaire et de la Qualité des Denrées Alimentaires ainsi que celles de ses organes sont fixées

par décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 9.— Il est créé au sein du Ministère chargé de la Santé une Unité de Production et

d’Approvisionnement en Solutés Massifs.

C’est un Établissement Public à caractère Industriel et Commercial (EPIC) doté de la

personnalité morale et de l’autonomie juridique et financière.

Article 10.— L’Unité de Production et d’Approvisionnement en Solutés Massifs est

chargée de produire les solutés massifs et les produits para-pharmaceutiques tels que les

désinfectants, les antiseptiques et d’en d’assurer l’approvisionnement auprès des Formations

Sanitaires. Cet approvisionnement est destiné, en priorité, à satisfaire aux besoins des

établissements sanitaires publics, et en second lieu, à ceux des établissements sanitaires

privés.

Les modalités de création, d’organisation et de fonctionnement de cette Unité de

Production et d’Approvisionnement de Solutés Massifs ainsi que ceux de ses organes sont

fixées par décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la

Santé.

TITRE III. DES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS

Article 11.— Dans le cadre de la mise en œuvre de la Réforme Hospitalière, il est créé

auprès du Ministre chargé de la Santé une Agence Nationale Hospitalière, ayant notamment

les missions suivantes :

— piloter la Réforme Hospitalière et le suivi de sa mise en œuvre ;

— être un Observatoire pour la mise en place des nouveaux statuts des Établissements

Hospitaliers Publics et des organes afférents ;

— être un Observatoire du système hospitalier pour l’analyse, le suivi et l’évaluation des

établissements hospitaliers en appui à la Direction centrale ;

— conduire les études de conception des stratégies à développer ;

— donner des avis à la demande du Ministre chargé de la Santé notamment sur les

grandes questions de la politique nationale hospitalière.

Le statut de cette Agence Nationale Hospitalière, la composition et les modalités de

désignation des membres, les attributions et les modalités de fonctionnement sont fixés par

voie réglementaire.

Article 12.— L’organisation des soins dans le secteur public s’articule sur quatre niveaux :

Page 297: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 296 —

— les formations sanitaires de base pour les premiers contacts : les Centres de Santé de

Base niveau 1 et niveau 2 (CSB1 et CSB2) ;

— les Centres Hospitaliers de Référence de District (CHRD) ;

— les Centres Hospitaliers de Référence Régionale (CHRR) ;

— les Centres Hospitaliers Universitaires (CHU).

Le premier niveau de la pyramide sanitaire comprend les CSB1, les CSB2. Ils assurent

l’offre des soins curatifs, préventifs et promotionnels de bases.

Article 13.— La Réforme Hospitalière prévoit dans la carte nationale hospitalière que les

Établissements Hospitaliers Publics soient organisés en Centre hospitalier Universitaire

(CHU), en Centre Hospitalier de Référence Régional (CHRR) et en Centre Hospitalier de

Référence de District (CHRD) suivant leur localisation, leurs caractéristiques juridiques,

administratives et techniques.

Les Établissements Hospitaliers Publics de premier niveau (District) dispensent en

priorité des prestations de médecine générale, de chirurgie générale, d’obstétrique et des

soins d’urgence. Ils sont dénommés « Centres Hospitaliers de Référence de District »

(CHRD).

Les Établissements Hospitaliers Publics de deuxième niveau (Région) dispensent des

prestations de médecine et de chirurgie générale, d’obstétrique, de spécialités, d’urgence et

des soins spécialisés à caractère médical et chirurgical. Ils sont dénommés « Centres

Hospitaliers de Référence Régionale » (CHRR).

Les Établissements Hospitaliers Publics de troisième niveau ont une vocation de soins

qui s’étend sur l’ensemble du territoire national, liée à leur haute spécialisation en médecine,

chirurgie, obstétrique, et spécialités. Ils ont vocation à assurer les formations pratiques de

niveau universitaire et post-universitaire et la recherche. Ce sont les « Centres Hospitaliers

Universitaires » (CHU).

Article 14.— Les Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) et les Centres Hospitaliers de

Référence Régionale (CHRR) sont érigés en Établissements Publics nationaux à caractère

Administratif (EPA) avec les prérogatives et obligations qui s’y rattachent, suivant les

dispositions de la Loi n° 98-031 du 20 janvier 1999 portant définition des Établissements

Publics et des règles concernant la création de catégorie d’Établissements Publics et ses

textes réglementaires d’application. Les Centres Hospitaliers de Référence de District

conservent, leur statut de services rattachés et placés sous l’autorité administrative, technique

et financière du Ministère chargé de la Santé.

Article 15.— L’offre de soins dans le secteur privé s’organise en :

— formations sanitaires privées de base qui englobent les postes d’infirmerie, les postes

d’accouchement, les cabinets médicaux, les dispensaires privés, les centres de santé privé ;

— Établissements Hospitaliers Privés de soins qui sont les cliniques, les polycliniques, les

hôpitaux privés. La clinique est un établissement où est pratiquée une seule spécialité

médicale. La polyclinique et l’hôpital privé sont des établissements où sont pratiquées

plusieurs spécialités médicales. Ils sont classés en Établissements Hospitaliers Privés à but

lucratif ou Établissements Hospitaliers Privés à but non lucratif, dont la tutelle technique est

exercée par le Ministère chargé de la Santé.

Page 298: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 297 —

Article 16.— La proposition de création ou suspension d’un hôpital, d’un hospice, d’une

maternité, d’un poste d’accouchement, d’un dispensaire ou de tout autre établissement de

soins, ne peut être décidée par l’autorité administrative dont dépend l’établissement qu’après

approbation du Ministre chargé de la Santé, sur avis de la Commission chargée de l’ouverture

et de la fermeture des Établissements de soins publics et privés.

En tant que de besoin, un texte réglementaire fixe l’organisation et le fonctionnement de

la Commission suscitée.

L’ouverture à titre privé d’un dispensaire, d’une clinique, d’un établissement

d’accouchement, d’un hôpital psychiatrique ou d’un hospice est soumise à une autorisation

préalable du Ministre chargé de la Santé, après avis de la Commission suscitée.

Sont soumis à l’autorisation du Ministère chargé de la Santé :

— la création ;

— l’extension ;

— la reconversion ;

— la suppression totale ou partielle ;

— le regroupement de toutes Formations Sanitaires privées.

Article 17.— En conformité avec la législation en préparation sur les Technologies de

l’Information et de la Communication (NTIC), des dispositions nouvelles, législatives et

réglementaires doivent être prises à la diligence du Ministre chargé de la Santé concernant la

Télémédecine.

Ces dispositions doivent comporter toutes les instructions utiles pour le bon

fonctionnement de la transmission par les Technologies de l’Information et de la

Communication des informations médicales en vue d’obtenir à distance un diagnostic, un

avis spécialisé, le suivi d’un malade ou d’une décision thérapeutique. Elles doivent en outre,

prévoir l’instauration d’un organe de contrôle de la Technologie de l’Information et de la

Communication dans le domaine de la santé et faire assurer le respect du secret médical.

LIVRE PREMIER. DE LA PROTECTION GÉNÉRALE DE LA SANTÉ

Article 18.— Le présent Code définit, en les actualisant, les principes fondamentaux qui

régissent, dans le cadre de la Politique Nationale de la Santé, les mesures sanitaires et

d’hygiène générales aménageant et améliorant l’accès de la population aux services de santé,

la protégeant contre les maladies et renforçant la mise en place et l’organisation des

structures ayant vocation à mettre en œuvre les programmes d’actions dans tous les

domaines sanitaires.

Il rassemble en un instrument cohérent et unique les règles essentielles concernant les

professions médicales, paramédicales et de pharmaciens.

Page 299: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 298 —

TITRE PREMIER. DES MESURES SANITAIRES ET D’HYGIÈNE GÉNÉRALES

APPLICABLES SUR LE TERRITOIRE NATIONAL

Article 19.— Les mesures sanitaires et d’hygiènes s’imposant sur le Territoire National

ainsi que les procédures et les sanctions qui en assurent l’application résultent :

— des Conventions Internationales, des Déclarations ou des Traités dont les dispositions

en matière sanitaire lient la République de Madagascar conformément aux règles de Droit

International Public ;

— de la mise en œuvre du présent Code et de ses textes législatifs ou réglementaires

d’application ;

— des lois et règlements applicables sur le Territoire National et qui comportent des

mesures sanitaires et d’hygiène.

Chapitre premier. Des règlements sanitaires

Article 20.— Conformément aux dispositions de la Loi n° 2004-001 du 17 juin 2004

relative aux Régions et à celles de l’article 358 du présent Code, ce sont les autorités des

Collectivités Territoriales Décentralisées qui sont habilitées à contrôler la mise en application

des dispositions du règlement sanitaire au niveau de leur compétence territoriale ou locale

respective.

Section 1. De l’orientation générale du contenu du règlement sanitaire

Article 21.— Le règlement sanitaire détermine en particulier :

1- les mesures à prendre, dans le cadre des lois et règlements en vigueur pour prévenir ou

faire cesser les maladies contagieuses en général ;

2- les mesures efficaces à mettre en œuvre en cas de menace de maladies épidémiques ou

diarrhéiques, dont le choléra ;

3- la protection des denrées alimentaires ainsi que les précautions à prendre pour leur

mise en vente dans les conditions qui s’imposent afin de préserver la santé des

consommateurs ;

4- la désinfection ou la destruction des objets ayant servi aux malades ou qui ont été

souillés par eux et généralement, des objets pouvant véhiculer la contagion.

Article 22.— Le règlement sanitaire doit également comporter :

1- les prescriptions destinées à la salubrité de tous bâtiments d’habitation ou non, des

fermes et de leurs dépendances, des voies privées, closes ou non à leurs extrémités, des

canaux d’irrigation et d’écoulement des eaux, des logements loués en garni, des hôtels et

restaurants ;

2- les prescriptions relatives à la salubrité des agglomérations ;

3- les prescriptions relatives à l’alimentation en eau potable et à la surveillance des puits et

des lavoirs ;

4- les prescriptions concernant les matières usées ainsi que les conditions auxquelles

doivent satisfaire les fosses d’aisance ;

Page 300: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 299 —

5-les prescriptions relatives à la salubrité des milieux scolaires et universitaires ;

6- les prescriptions relatives à la protection de la population face aux risques sanitaires liés

à l’environnement dont ceux liés aux déchets de soins.

Article 23.— Au niveau des Communes, le Maire prend, sur proposition participative des

Fokontany, après avis du Conseil Communal ou Municipal, des Arrêtés ayant pour objet

telles dispositions particulières qu’il juge utiles sans préjudices du règlement sanitaire

international ni des

dispositions du présent Code en vue d’assurer la protection de la santé à l’intérieur de la

circonscription de sa municipalité.

Section 2. De la lutte contre les épidémies par des mesures de prévention

Article 24.— En cas de menace déterminée d’épidémie, en général dans une région ou

localité reconnue à haut risque de propagation de la maladie, le Ministre chargé de la Santé

peut ordonner, par Arrêté, la réquisition de stocks de vaccins contre l’épidémie dans les

Régions disposant de centres d’approvisionnement, qu’ils soient publics ou privés.

Les conditions dans lesquelles la réquisition doit être exécutée sont précisées dans le texte

réglementaire susvisé.

Afin de prévenir la propagation des maladies contagieuses, les mesures suivantes doivent

être prises :

— une liste des maladies contagieuses auxquelles sont applicables les dispositions de la

présente section est dressée par le Ministère chargé de la Santé, par voie réglementaire ;

— les maladies contagieuses font l’objet d’une déclaration obligatoire dressée par des

textes réglementaires. Cette liste peut être modifiée ou complétée dans les mêmes formes ;

— font l’objet d’une déclaration obligatoire de données à l’autorité sanitaire par les

professionnels de santé, publics ou privés et les responsables des laboratoires d’analyse de

biologie médicale publics ou privés :

— les maladies qui nécessitent une intervention urgente localisée ;

— les maladies qui nécessitent une intervention urgente à l’échelle nationale ou

internationale.

Article 25.— La déclaration à l’autorité sanitaire de tout cas de l’une des maladies figurant

sur la liste mentionnée à l’article 24 a un caractère obligatoire pour tout médecin ou pour

tout paramédical, chef de Formation Sanitaire, qui en a constaté l’existence.

La déclaration doit mentionner les causes ayant entraîné le décès et la source de

l’infection.

En vue d’empêcher toute propagation d’une maladie contagieuse en évolution, le Ministre

chargé de la Santé peut prendre un Arrêté instituant l’état d’alerte sanitaire dans une localité

ou une région menacée en vue d’organiser la veille sanitaire.

L’état d’alerte sanitaire est institué pour une période déterminée mais qui peut être

prorogée ; des mesures d’hygiène et de prophylaxie peuvent être rendues obligatoires.

Page 301: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 300 —

Chapitre II. Des mesures d’hygiène

Article 26.— Les mesures d’hygiène prévues par le présent Code et complétant les

règlements sanitaires concernent principalement la gestion et le contrôle des eaux,

l’élimination des déchets de toutes sortes, la protection des denrées alimentaires, la salubrité

des lieux d’habitation et la sauvegarde de l’environnement.

Section 1. De la gestion et du contrôle des eaux

Article 27.— L’eau est un bien public relevant du domaine public.

La déclaration d’utilité publique des sources ainsi que les servitudes et les droits qui en

découlent sont régis par les textes en vigueur en la matière, et en particulier par les

dispositions de la Loi n° 98-029 du 20 janvier 1999 portant Code de l’Eau.

Les eaux souterraines sont constituées par les eaux contenues dans les nappes aquifères et

les sources. Elles font partie du domaine public au même titre que les eaux de surface.

Article 28.— Conformément aux dispositions spécifiques de la Loi n° 90-033 du

21 décembre 1990 portant Charte de l’Environnement, de la Loi n° 98-029 du 20 janvier

1999 portant Code de l’Eau ainsi que de la Loi n° 99-021 du 19 août 1999 sur la politique de

gestion et de contrôle des pollutions industrielles, les mesures d’hygiène destinées à la

protection des eaux potables et à l’élimination de toute source de pollution des eaux font

partie intégrante des actions de protection générale de la santé dans toute la mesure où elles

mettent à l’abri de la pollution les ressources en eau et où elles préservent l’eau potable en

quantité et en qualité.

Les normes de potabilité de l’eau sont définies par décret pris en Conseil de

Gouvernement sur proposition du Ministre concerné. Toute eau destinée à la consommation

humaine doit faire l’objet d’analyse physico-chimique et bactériologique par des Laboratoires

agréés par les Ministères en charge de la Santé et de l’Eau.

Article 29.— La pollution s’entend de tous déversements, écoulements, rejets, dépôts

directs et indirects de matières de toute nature et plus généralement, de tous faits susceptibles

de provoquer ou d’accroître la dégradation de l’environnement, en particulier la dégradation

des eaux, en modifiant leurs caractéristiques physiques, chimiques, biologiques ou

bactériologiques et radioactives, qu’il s’agisse d’eaux de surface ou d’eaux souterraines.

Toute personne physique ou morale, publique ou privée, exerçant une activité, source de

pollution ou pouvant présenter des dangers pour les ressources en eau et l’hygiène du milieu,

a l’obligation de tenir compte dans son activité personnelle ou dans la gestion globale de son

entreprise, de l’impact environnemental de ses activités sur les milieux avoisinants et de

prendre toute mesure propre à prévenir, à atténuer ou à enrayer le danger présumé,

menaçant ou effectif.

Article 30.— Concernant particulièrement les eaux usées autres que domestiques, et sans

préjudice des dispositions des textes en vigueur fixant le Code de l’Urbanisme et de l’Habitat

relatives au déversement d’eaux et de matières usées, celles-ci ne doivent en aucun cas

s’écouler dans les caniveaux ou égouts publics, sauf autorisation des autorités compétentes.

Article 31.— Quiconque par négligence ou incurie dégrade des ouvrages publics ou

communaux destinés à recevoir ou à conduire des eaux usées laisse introduire des déchets ou

des déjections de quelque provenance que ce soit ou toutes autres matières susceptibles de

Page 302: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 301 —

nuire à la salubrité du milieu ambiant, notamment de l’eau de sources, des fontaines, des

puits, des citernes, des conduites, des aqueducs, des réservoirs d’eaux servant à l’alimentation

publique, est passible d’application des dispositions de l’ article 329 du présent Code.

Si la responsabilité incombe à une société ou à toute autre personne morale, la

responsabilité civile édictée aux termes de l’article 329 susvisé l’emporte sur la responsabilité

pénale.

Article 32.— Sont interdits, sous peine d’encourir les mêmes sanctions prévues à

l’article précédent, l’abandon de cadavres d’animaux, des débris de boucheries, fumier,

matières fécales et en général des résidus organiques, putrescibles dans les failles ou

excavations susceptibles de contaminer les eaux livrées à la boisson et à la consommation.

Toute inhumation en dehors des surfaces autorisées à cet usage est également interdite.

Article 33.— Conformément aux dispositions de la Loi n° 94-027 du 17 novembre 1994

portant Code d’hygiène, de sécurité et de l’environnement du travail, les travailleurs doivent

avoir à leur disposition de l’eau potable. L’eau qui ne provient pas d’un service officiellement

agréé de distribution d’eau potable ne doit pas être distribuée comme eau de consommation.

Une eau potable est définie comme une eau destinée à la consommation humaine et qui,

par traitement ou naturellement, répond à des normes organoleptiques, physico-chimiques,

bactériologiques et biologiques fixées par décret.

L’approvisionnement du public en eau potable et l’accès à l’assainissement collectif des

eaux usées domestiques sont assurés par le Service Public Communal. Il appartient à la

Commune concernée, aussi bien en milieu urbain que rural, de doter les localités non encore

desservies en installation d’approvisionnement en eau potable pour étendre le taux de

desserte et pour rehausser le taux actuel de couverture en assainissement.

L’eau de consommation, embouteillée ou non embouteillée, doit être contrôlée

régulièrement par des laboratoires agréés par l’État. L’organisation et la désignation des

organismes concernés sont fixées par décret pris en Conseil de Gouvernement sur

proposition des Ministères concernés (Santé, Énergie, Eau) précisant leurs rôles et leur

fonctionnement.

Section 2. De la gestion des déchets

Article 34.— Les déchets qui sont de nature à polluer les eaux et, d’une manière générale,

à menacer ou à porter atteinte à la santé de l’homme, doivent être éliminés afin de réduire la

pollution de l’air, de l’eau ainsi que la dégradation de l’environnement.

Les déchets sont constitués par les résidus d’un processus de transformation industrielle

d’utilisation de toutes substances ou matériaux issus d’une activité de production, par les

déchets des hôpitaux et structures sanitaires et par les résidus chimiques et pharmaceutiques.

Les biens meubles laissés à l’abandon, les déchets industriels solides, qu’ils soient banals

ou spéciaux, doivent être détruits et éliminés, soit par toutes les personnes physiques ou

morales qui les ont générés, soit par les Collectivités Territoriales Décentralisées dans le

cadre des opérations de voirie, d’assainissement, d’hygiène et d’enlèvement de tout déchet

qui leur incombent, et dans les limites de leurs attributions.

Page 303: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 302 —

Article 35.— Les déchets provenant des hôpitaux et des structures sanitaires sont parfois

contaminés (pouvant être infectieux) et parfois non contaminés. Les déchets contaminés, si

on ne les élimine pas avec les bonnes mesures de précaution qui s’imposent, peuvent

transporter des microorganismes pouvant infecter les personnes qui entrent en contact avec

ces déchets ainsi que la communauté entière.

Sont considérés comme éléments contaminés : le sang, le pus, l’urine et autres liquides

organiques ainsi que tout autre corps qui entre en contact avec ses éléments. Les déchets

provenant des salles de soins, des salles d’accouchement et des salles d’opération doivent être

considérés comme étant contaminés.

Il doit être procédé à la neutralisation, à l’évacuation ou à l’isolement d’une manière aussi

rapide que possible, de tous déchets et débris susceptibles de dégager des substances

incommodantes, toxiques ou dangereuses, ou d’être une source d’infection.

Conformément à la Politique Nationale de Gestion des Déchets des établissements de

Soins et de Sécurité des Injections, chaque établissement de soins est tenu de gérer ses

déchets de soins. Les dispositions techniques relatives au tri, à la collecte, au stockage, au

transport et à l’élimination des déchets doivent être mises en place afin d’en assurer la

protection des usagers, du personnel et de la communauté et celle de l’environnement face

aux risques sanitaires et environnementaux. Un tri préalable doit être institué dans les

établissements afin d’assurer une gestion distincte des déchets en fonction de leur nature et

des risques encourus. Un plan de gestion des déchets doit être dressé et mis en œuvre dans

chaque établissement.

Article 36.— Il appartient aux personnes physiques ou morales dont les activités sont à

l’origine des déchets solides banals ou spéciaux de les remettre dans le circuit garantissant la

protection de l’environnement par tous les moyens que les techniques modernes et

accessibles mettent à leur portée : stockage central, récupération, recyclage, incinération,

enfouissement, compostage.

Article 37.— Les déchets industriels solides dits « spéciaux » doivent être distingués en

raison de leur toxicité et des dangers qu’ils représentent pour l’environnement, et notamment

pour l’eau qu’ils peuvent polluer par des agents pathogènes de maladies contagieuses qu’ils

peuvent faire naître et véhiculer.

Ils doivent faire l’objet de mesures particulières prévues par la Loi n° 99-021 du 19 août

1999 sur la politique de gestion et de contrôle des pollutions industrielles : stockage sécurisé,

élimination dans des installations réglementées à cet effet et à la charge des pouvoirs publics.

Article 38.— Les Communes ont la charge des dispositions à prendre pour assurer

l’évacuation et l’élimination des déchets et débris. À cet effet, elles coordonnent l’action des

Fokontany qui constituent les subdivisions administratives de base au niveau des Communes

et qui participent et contribuent de manière permanente et effective aux activités de

mobilisation sociale ou communautaire de développement en matière sanitaire et aux

activités de préservation de l’environnement et de ses composantes.

Article 39.— Les industriels ou responsables d’entreprises dont les activités sont à la

source des déchets et débris, doivent prendre à leur charge les dépenses afférentes à la mise

en œuvre des mesures d’élimination de ces déchets et débris, sous peine d’encourir les

sanctions prévues par les dispositions de l’article 329 du présent Code.

Page 304: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 303 —

Les déchets dangereux solides ou liquides doivent faire l’objet d’un listing et de

traitements spéciaux régis par des textes réglementaires d’application des conventions

internationales.

Section 3. De la protection des denrées alimentaires livrées à la consommation

Article 40.— Aux termes du présent Code, on entend par « denrée alimentaire » toute

substance traitée, partiellement traitée ou brute, destinée à l’alimentation humaine, ce qui

englobe les boissons, le « chewing gum » et toutes les substances utilisées dans la fabrication,

la préparation et le traitement des aliments à l’exclusion des substances employées

uniquement sous forme de médicaments, de cosmétiques ou de tabac.

Article 41.— Sans préjudice des dispositions légales spécifiques relatives à la protection

des consommateurs et conformément aux normes du Codex Alimentarius qui exigent pour

les consommateurs une nourriture saine et des aliments salubres et nutritifs, les

emplacements où sont fabriquées, manipulées, entreposées ou mises en vente des denrées

alimentaires doivent être tenus dans un parfait état de propreté à l’abri des rongeurs, des

insectes et de tous animaux vecteurs de germes pathogènes.

Particulièrement, la fabrication, la transformation et la commercialisation des groupes de

boissons définis au titre 1 de l’Ordonnance n° 60-098 du 21 septembre 1960 modifiée

relative à la réglementation des boissons, restent soumises au régime d’autorisation de ladite

Ordonnance.

Article 42.— En règle générale, la délivrance de Certificat de Consommabilité doit être

conforme à la législation et à la réglementation en vigueur. Notamment, tout établissement

agroalimentaire et importateur de denrées alimentaires doit soumettre pour analyse leurs

produits et les résultats d’analyse doivent parvenir auprès de l’Agence de Contrôle de la

Sécurité Sanitaire et de la Qualité des Denrées Alimentaires aux fins de délivrance d’un

certificat de consommabilité pour chaque lot de production de denrées alimentaires avant sa

mise sur le marché.

Article 43.— L’Agence de Contrôle de la Sécurité Sanitaire et de la Qualité des Denrées

Alimentaires est dotée d’un Laboratoire qui effectue le contrôle de la qualité des denrées

alimentaires de fabrication locale, importées et la conformité des produits d’hygiène non

alimentaires tels que les détergents, mis sur le marché à Madagascar.

L’Agence de Contrôle de la Sécurité Sanitaire et de la Qualité des Denrées Alimentaires

peut recourir, le cas échéant, à la prestation d’autres laboratoires agréés.

La mission et les attributions du Service des Normes Alimentaires et du Service de

l’Inspection de l’Agence sont définies par texte réglementaire pris par le Ministre chargé de la

Santé.

Article 44.— Toute entreprise de fabrication, de manutention et tout lieu de vente de

denrées alimentaires doivent satisfaire, respectivement en ce qui les concerne, aux conditions

et mesures nécessaires pour assurer l’innocuité, le bon état et la salubrité de ces denrées

alimentaires depuis leur production, leur élaboration, leur traitement, leur stockage, leur

transport ainsi que leur commercialisation.

Page 305: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 304 —

Les modalités d’organisation des transports des denrées alimentaires, des

conditionnements des produits et des mesures à prendre pour la mise en vente des denrées

alimentaires seront fixées par Décret pris en Conseil du Gouvernement sur proposition des

Ministres concernés.

La fabrication, la transformation et la commercialisation des produits du tabac, celles des

boissons alcooliques ainsi que celles des boissons hygiéniques doivent être conformes aux

lois et règlements en vigueur en la matière, sous peine d’être confisqués, sans préjudice des

sanctions prévues à cet effet par les textes législatifs et réglementaires.

Article 45.— Toute personne travaillant dans une entreprise de fabrication, de

manutention de denrées alimentaires est tenue de se conformer aux mesures de contrôle

sanitaire et aux vaccination obligatoires susceptibles d’être édictées par le Ministre chargé de

la Santé.

Article 46.— Conformément aux dispositions légales spécifiques relatives à la protection

des consommateurs, notamment en ce qui concerne la prévention, les produits et les services

doivent présenter la sécurité nécessaire en termes de garantie pour la préservation de la santé

du consommateur, et ce, dès la première mise sur le marché : les produits doivent être

conformes aux conditions édictées par la loi et les règlements en vigueur relatives à la

sécurité et à la santé des personnes.

L’immatriculation de tout établissement alimentaire est obligatoire. En conséquence, tout

établissement agro-alimentaire, de restauration collective et importateur de denrées

alimentaires, doivent être immatriculés et déclarer leurs produits mis sur le marché auprès de

l’Agence de Contrôle de la Sécurité sanitaire et de la Qualité des Denrées Alimentaires.

Ces mesures visent à assurer le contrôle et la qualité des denrées alimentaires proposées à

la consommation humaine sur le territoire de la République de Madagascar, et afin d’éviter

d’éventuels risques d’intoxication susceptibles d’impacts négatifs sur la santé publique.

Le dédouanement ou la mise en vente des denrées alimentaires ne peut s’effectuer que

lorsque l’importateur ou le vendeur se trouve en possession de documents certifiant que ces

dernières sont propres à la consommation humaine et peuvent être mises en

commercialisation. Ces documents sont délivrés respectivement par le Ministère chargé de la

Santé et par le Ministère chargé du Commerce.

Article 47.— Les produits alimentaires d’origine animale, issus de groupes d’animaux

nourris sous concentrés protéiques essentiels, que le cas de la maladie de Stephen Jacob

appelé communément « maladie de la vache folle » ait été dépisté ou non chez le bovidé, sont

déclarés impropres à la consommation humaine et interdits à la mise en vente dans le

commerce à Madagascar.

Les produits alimentaires d’origine animale, issus d’animaux frappés de maladie

épidémique mortelle chez l’animal, pouvant contaminer à risque grave ou moindre, l’homme,

quel que soit le germe en cause et particulièrement pour la fièvre aphteuse et la grippe aviaire,

sont déclarés impropres à la consommation humaine et donc contre indiqués pour

l’alimentation et interdits de vente et d’entrée sur le Territoire National.

Article 48.— Les produits alimentaires d’origine végétale, ayant été mis en culture sous le

mode spécifique des Organismes Génétiquement Modifiés appelés OGM, font l’objet d’une

déclaration les classant dangereux pour la consommation humaine en raison des risques de

Page 306: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 305 —

modification du génome qu’ils font courir au consommateur. Leur mise en vente au titre de

denrée alimentaire est interdite à travers le Territoire National.

Article 49.— Les modalités d’application des dispositions des articles 41 à 48 seront

fixées par voie réglementaire. Plus particulièrement, en ce qui concerne les dispositions de

l’article 47 sur les maladies des animaux réputées contagieuses qui sont fixées par les textes

en vigueur établissant la nomenclature des maladies des animaux réputées contagieuses à

Madagascar et/ou les éventuels textes modificatifs.

Dans l’intérêt des consommateurs et pour une protection plus effective de la population

contre les atteintes à la santé, la violation des dispositions prévues aux articles 41 à 48

constitue des infractions sanctionnées par la législation pénale et fait l’objet à cet effet d’une

loi particulière.

Section 4. Des mesures d’hygiène concernant les préparations chimiques et les substances destinées à l’usage en santé publique et la gestion de la salubrité de l’air ambiant

Article 50.— La normalisation de l’étiquetage des emballages des substances et des

préparations destinées à l’hygiène domestique et publique est régie par les dispositions des

textes réglementaires en vigueur, pris par le Ministre de l’Industrie, du Commerce et du

Développement du Secteur Privé et éventuellement par les textes réglementaires modificatifs.

Article 51.— Les substances chimiques destinées à l’usage en santé publique, notamment

celles ayant pour objet les traitements intra-domiciliaires doivent avoir l’agrément du Ministre

chargé de la Santé avant d’être importées, fabriquées ou reformulées pour mise sur le marché

national.

Font partie de ces préparations, les savons et les détergents, tous produits destinés à la

lutte contre les insectes et parasites, vecteurs de maladies, indépendamment de la formulation

sous laquelle elles sont présentées, de la substance active utilisée et de la concentration. Cet

agrément se traduit par la délivrance d’une autorisation de vente.

Les modalités d’application des dispositions figurant aux articles 50 et 51 sont prises par

voie réglementaire.

L’air ambiant doit être sain. Toute activité de nature à polluer l’air et, d’une manière

générale, à menacer ou à porter atteinte à la santé de l’homme, doit être contrôlée afin de

réduire la pollution ainsi que la dégradation de l’environnement. Les normes de

concentration des composantes de l’air doivent être fixées par décret sur proposition des

Ministères en charge de la Santé et de l’Environnement.

Chapitre III. De la salubrité des lieux d’habitation

Article 52.— Tous les lieux, constructions, immeubles, agglomérations, villages et

quartiers en milieu rural ayant pour objet de servir d’habitation et à cet effet, devant être

pourvus des équipements collectifs et des infrastructures sanitaires et d’assainissements

respectant les prescriptions relatives à l’hygiène de l’habitat, doivent faire l’objet des

préoccupations constantes des pouvoirs publics afin que soient observées :

— les dispositions des textes en vigueur fixant le Code de l’Urbanisme et de l’Habitat ;

Page 307: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 306 —

— les dispositions de la Loi n° 98-029 du 20 janvier 1999 portant Code de l’Eau ;

— les dispositions des textes d’application de la loi susvisée ;

— les dispositions du règlement sanitaire au niveau international, au niveau national et à

celui des Collectivités Territoriales Décentralisées.

Section 1. De la salubrité des immeubles

Article 53.— Sans préjudice des dispositions du Code de l’Urbanisme et de l’Habitat sur

les règles sanitaires et de sécurité relative aux constructions, lorsqu’un immeuble bâti ou non,

attenant ou non sur la voie publique, constitue, soit par lui-même, soit par les conditions

dans lesquelles, il est occupé, une menace ou un danger pour la santé des occupants et des

voisins, le Maire, ou à défaut, l’autorité de tutelle, saisi par un rapport motivé de l’autorité

sanitaire ou Bureau Municipal d’Hygiène concluant au danger présenté ou à l’insalubrité de

tout ou partie de l’immeuble, est tenu d’inviter le Comité Municipal d’Hygiène et de Santé

intéressé à donner son avis dans un délai de deux (02) mois :

1- sur la réalité et les causes de l’insalubrité ;

2- sur les mesures propres pour y remédier.

Dans le cas où la réalité du danger ou de l’insalubrité et l’impossibilité d’y remédier ont

été constatées, le Maire ou, à défaut, l’autorité de tutelle, est tenu, dans un délai de un (1)

mois de prononcer par Arrêté l’interdiction définitive d’habiter. L’Arrêté doit préciser si

l’interdiction définitive est immédiate ou applicable au départ des occupants dans un délai

déterminé.

Article 54.— Dans le cas où la possibilité de remédier au danger ou à l’insalubrité a été

constatée, le Maire ou, à défaut, l’autorité de tutelle est tenu, dans un délai d’un (1) mois de

prescrire par Arrêté les mesures appropriées qui s’imposent, ainsi que le délai d’exécution.

L’interdiction temporaire d’habiter peut être prononcée par l’autorité compétente. Elle

prendra cependant fin dès qu’il sera constaté que les mesures prescrites par le Maire ou

l’autorité sanitaire ont été exécutées.

Article 55.— Tout occupant d’un immeuble insalubre qui a fait l’objet d’un Arrêté

d’interdiction définitive ou temporaire d’habiter et qui ne s’est pas conformé audit Arrêté

peut faire l’objet d’une expulsion prononcée à la requête de l’autorité visée à l’article 53 par

Ordonnance du juge des référés.

En cas d’urgence ou de péril grave et après rapport de l’homme de l’art sur l’état de

l’immeuble, l’autorité visée à l’article 53 peut faire exécuter d’office, aux frais du propriétaire

et éventuellement, du locataire qui ne les ont pas exécutées dans le délai qui lui a été imparti,

les mesures indispensables à la sauvegarde de la salubrité publique.

Lorsque, par suite de l’application des articles 53 et 54 du présent Chapitre il y a lieu à

résiliation des baux, cette résiliation n’emporte, en faveur des locataires, aucun dommage

intérêt.

Article 56.— Les dépenses résultant de l’exécution des travaux sont garanties par un

privilège sur les revenus de l’immeuble, qui prend rang après les privilèges énoncées à

l’article 2101 du Code Civil tel qu’il est encore applicable sur le Territoire de la République.

Page 308: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 307 —

Section 2. De la salubrité des agglomérations

Article 57.— Sans préjudice de l’application des dispositions des textes en vigueur fixant

le Code de l’Urbanisme et de l’Habitat et en conformité avec les dispositions de la Loi n° 98-

029 du 20 janvier 1999 portant Code de l’Eau, l’assainissement des agglomérations et toute

mesure appropriée, destinée à éliminer les causes d’insalubrité portant atteinte à la protection

de la ressource en eau, à la santé et à la sécurité des populations, doivent avoir pour objet

d’assurer l’évacuation des eaux pluviales et des eaux usées ainsi que leurs rejets dans les

exutoires naturels selon les modes compatibles avec les exigences de la protection sanitaire.

À cet effet, aucune construction ne peut être édifiée sur les aires prévues initialement

pour servir de voies publiques et bordées de systèmes d’évacuations d’eaux usées.

Article 58.— Dans les villes où est adapté le système séparatif, deux canalisations

différentes pourront être imposées.

Les eaux et matières seront évacuées dans un état tel qu’elles ne puissent occasionner

aucune nuisance.

La même disposition sera prise :

— pour toute construction ancienne, à l’occasion de réparations lourdes ;

— pour tous les immeubles dépourvus de fosse d’aisance ou pourvus de fosse non

étanche ou installée dans des conditions contraires aux prescriptions du règlement sanitaire ;

— pour tous les immeubles déjà rattachés aux canalisations pluviales pour les eaux usées.

Article 59.— A défaut par le propriétaire de s’être conformé aux obligations imposées par

le précédent article, les taxes que les villes sont autorisées à percevoir sur réclamation des

propriétaires des voies pourvues d’égouts, sont majorées de 50 % à partir du moment où le

raccordement a été effectué, et ce, aux dépens du propriétaire récalcitrant.

En outre, le raccordement normal pourra être effectué d’office par les soins du Maire

dans les formes et aux conditions édictées par la Section I du Chapitre III du présent Livre

Premier.

Article 60.— Les Communes peuvent, en vue de faciliter leur assainissement ou leur

aménagement, provoquer la déclaration d’insalubrité d’un immeuble ou d’un groupe

d’immeubles, surtout en cas de menace présentée par l’immeuble ou le groupe d’immeubles

pour la vie des occupants et des riverains.

L’insalubrité ou la menace signalée par un avis du Bureau d’Hygiène ou du Comité

d’Hygiène et de Santé est dénoncée par une délibération du Conseil Municipal intéressé,

appuyée par un plan parcellaire des immeubles avec l’indication des noms des propriétaires,

tels qu’ils figurent à la matrice des rôles ainsi que, le cas échéant, sur un projet

d’aménagement.

Un décret pris en Conseil du Gouvernement fixe les modalités d’application du présent

article.

Article 61.— Lorsque pendant une période déterminée suivant les causes enregistrées ou

à l’occasion d’une brusque variation de la courbe démographique, le nombre de décès dans

une Commune a dépassé le chiffre de la mortalité moyenne, les autorités communales sont

Page 309: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 308 —

tenues de confier au Comité d’Hygiène et de Santé la charge de procéder ou de faire

procéder à une enquête sur les conditions sanitaires de la Commune.

Si cette enquête établit que l’état sanitaire de la Commune nécessite des travaux

d’assainissement, notamment qu’elle n’est pas pourvue d’eau potable de bonne qualité et en

quantité suffisante, ou que les eaux y restent stagnantes, créant ainsi des dangers ou des

inconvénients pour la santé, la sécurité et la salubrité, l’autorité administrative concernée,

après une mise en demeure à la Commune non suivie d’effet, invite le Comité d’Hygiène et

de Santé à délibérer sur l’utilité et la nature des travaux jugés nécessaires. Le Maire est mis en

demeure de présenter ses observations devant le Comité d’Hygiène et de Santé.

Si le Comité d’Hygiène et de santé émet un avis défavorable à l’exécution des travaux ou

aux réclamations émises par la Commune, l’autorité administrative transmet par voie

hiérarchique, la délibération du Comité d’Hygiène et de Santé au Ministre chargé de la Santé

qui, s’il le juge à propos, soumet la question à la Commission Nationale d’Hygiène et de

Santé. Celle-ci peut procéder ou faire procéder à une enquête dont les résultats sont portés à

la connaissance de la population par voie d’affichage ou de tout autre moyen.

Article 62.— Sur avis de la Commission Nationale d’Hygiène et de Santé, l’autorité

administrative concernée met la Commune en demeure de mettre en œuvre le projet et de

procéder aux travaux.

Si dans le mois qui suit cette mise en demeure, le Conseil Municipal ne s’est pas engagé à

y déférer, ou si dans les trois (3) mois, il n’a pris aucune mesure en vue de l’exécution des

travaux, l’autorité compétente, en vertu des prérogatives dont elle dispose, ordonne de droit

ces travaux et en détermine les conditions d’exécution.

Article 63.— La règlementation générale de la police et de l’hygiène des constructions

ainsi que celles relatives aux établissements dangereux, insalubres et incommodants sont

déterminées par décret pris en Conseil de Gouvernement.

Toutefois, les textes législatifs ou réglementaires en vigueur régissant ces matières sont

applicables, en tant que de besoin, dans toutes leurs dispositions non contraires au Code de

la Santé.

Section 3. De la salubrité du milieu rural

Article 64.— Dans les communes rurales, il appartient aux autorités administratives et

sanitaires de veiller à l’assainissement du milieu et de celui des infrastructures de base

concernant l’approvisionnement en eau potable, l’évacuation des excrétas et des ordures

ménagères. Afin de protéger la sécurité et la santé de la population, ces autorités doivent

veiller à la stricte observation des prescriptions relatives à l’hygiène du milieu et de l’habitat et

à la salubrité des denrées alimentaires à tous les stades : fabrication, transformation, mise en

vente.

Plus particulièrement et dans le cadre de la promotion de la lutte contre les maladies

épidémiques mortelles et contagieuses, dont la peste et le choléra, la mise en place des

latrines ainsi que des équipements de transport, de collecte et d’élimination des déchets,

répondant aux normes d’hygiène exigées dans les villages et les quartiers qui en sont

dépourvus, relève des obligations des Communes et des Collectivités concernées.

Page 310: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 309 —

Article 65.— En coopération étroite avec les Fokontany situés dans les limites

géographiques de son territoire, la Commune doit s’efforcer d’identifier tous les faits

générateurs de pollutions qui constituent un danger pour la sécurité et la santé de la

population et d’en informer l’autorité administrative et sanitaire concernée. Il en est

notamment ainsi de l’existence de nuisance générée par des installations industrielles,

d’émissions de substances provenant de rejets d’installations industrielles ou artisanales

susceptibles de nuire à la salubrité publique, d’altérer les sources d’eau potable ou de

provoquer la dégradation des eaux souterraines ou celle de l’air ambiant.

Chapitre IV. De la protection de l’environnement

Article 66.— Conformément aux dispositions de l’article 10 de la Loi n° 90-033 du

21 décembre 1990 portant Charte de l’Environnement, ainsi qu’aux dispositions de la Loi

n° 99-021 du 19 août 1999 relative à la politique de gestion et de contrôle des pollutions

industrielles, les projets d’investissements publics ou privés susceptibles de porter atteinte à

l’environnement doivent faire l’objet d’une Étude d’Impact Environnemental.

Article 67.— Afin d’assurer la protection de la salubrité dans les zones environnant les

installations, les aménagements, ouvrages ou travaux relevant directement ou indirectement

de l’organisation administrative des services médicaux et pharmaceutiques, les annexes des

textes en vigueur relatifs à la Mise En Comptabilité des Investissements avec

l’Environnement (MECIE) comportent une liste non exhaustive d’ouvrages ou travaux

soumis selon le cas à une Étude d’Impact Environnemental (EIE) ou un Programme

d’engagement Environnemental (PREE).

1. Sont soumis à une Étude d’Impact Environnemental :

— les aménagements, ouvrages et travaux susceptibles, de par leur nature technique, leur

ampleur et la sensibilité du milieu d’implantation d’avoir des conséquences dommageables

sur l’environnement ;

— toute introduction de nouvelles espèces, animales ou végétales ou d’Organismes

Génétiquement Modifiés (OGM) sur le Territoire National ;

— toute unité de traitement ou d’élimination de déchets hospitaliers ;

— tout type de stockage de produits et/ou de déchets radioactifs.

2. Sont soumis à un Programme d’Engagement Environnemental :

— toute unité de transformation et de stockage de produits pharmaceutiques de plus de

3 tonnes.

Article 68.— Le personnel des établissements hospitaliers : Centres Hospitaliers

Universitaires, Centres Hospitaliers de Référence Régionaux, Service de District de la Santé

Publique, Centres Hospitaliers de District, Centres de Santé de Base, ainsi que des

Établissements Hospitaliers relevant du Secteur Privé, doivent être sensibilisés sur la

nécessité de veiller, dans l’intérêt de la salubrité sanitaire, à la propreté de l’environnement

des installations et des infrastructures et, en particulier, à la désinfection ou à la destruction

des objets ayant servi aux malades, à la surveillance et à la maintenance des canaux

d’irrigation ou d’écoulement des eaux, à l’évacuation des matières usées.

Page 311: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 310 —

TITRE II. DU CONTRÔLE SANITAIRE AUX FRONTIÈRES

Article 69.— Il appartient au Service de la Santé aux Frontières au niveau des points

d’entrée de prévenir la propagation internationale des maladies en évitant de créer des

entraves inutiles au trafic et aux commerces internationaux.

Les voyageurs en provenance, par voie aérienne ou maritime de pays habituellement ou

accidentellement infectés ou ayant été antérieurement infectés en l’absence de dispositions

déclarant ledit pays à nouveau indemne, sont relativement à leur état sanitaire, rangés sous

l’un des trois régimes déterminés ci-après :

— sous le régime de la patente brute, s’ils sont ou ont été depuis leur départ, infectés

d’une maladie réputée pestilentielle, s’ils viennent de pays qui en sont affectés ou s’ils ont

communiqué avec des lieux, des personnes ou des objets qui auraient pu leur transmettre la

contagion ;

— sous le régime de la patente suspecte, s’ils viennent de pays où sévit une maladie que

l’on soupçonne d’être pestilentielle, ou de pays qui, bien qu’exempts de maladie, objet d’un

tel soupçon, sont susceptibles d’être atteints ou enfin, si en raison de communication en

provenance des pays susvisés ou de quelque autre circonstance, leur état sanitaire est

suspect ;

— sous le régime de la patente nette, si aucun soupçon de maladie pestilentielle n’existe

dans le pays d’où ils viennent, si ce pays, n’a pas été ou ne vient pas d’être en libre relation

avec des lieux susceptibles d’être infectés, et enfin si aucune communication, aucune

circonstance ne fait suspecter leur état sanitaire.

En tant que de besoin et en fonction des renseignements obtenus, la liste de ces

provenances doit faire l’objet d’un affichage dans les aéroports internationaux du Territoire

National.

Article 70.— Sans préjudice des dispositions du règlement sanitaire international, les

recherches effectuées par les agents chargés du contrôle sanitaire aux frontières de

Madagascar sur les voyageurs qui débarquent aux fins de déceler si un individu est porteur

d’une maladie sexuellement transmissible, sont interdite conformément au droit des

personnes à la confidentialité de leur état de santé.

Des mesures sanitaires à l’arrivée et au départ peuvent être entreprises :

— interrogatoire sur la destination, l’itinéraire et le séjour des voyageurs ;

— interrogatoire sur les contacts éventuels ;

— vérification des documents sanitaires à l’instar de certificat de vaccination, de

déclaration maritime de santé, de déclaration générale d’aéronef, de certificat de contrôle

sanitaire de navire.

Article 71.— Sans préjudice des dispositions du règlement sanitaire international, sauf le

cas d’évacuation sanitaire sur Madagascar, l’observation d’un état de maladie manifeste chez

un voyageur entrant à Madagascar autorise des mesures sanitaires supplémentaires comme

un examen médical de contrôle par les services de santé aux frontières.

Selon les cas, le Service de la Santé aux Frontières peut :

— exiger une vaccination ou une mesure prophylactique ;

Page 312: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 311 —

— orienter les personnes suspectes en leur dispensant des conseils ;

— placer les personnes suspectes en observation ;

— placer en quarantaine les personnes suspectes ;

— isoler ou traiter si nécessaire les personnes affectées ;

— refuser l’entrée des personnes suspectes et affectées ;

— refuser l’entrée de personnes non affectées dans des zones affectées ;

— soumettre à un dépistage les personnes en provenance des zones affectées et/ou leur

appliquer des restrictions de sortie. Concernant les bagages, cargaisons, conteneurs, moyens

de transport, marchandises et colis postaux, le Service de la Santé aux Frontières peut :

— s’abstenir de préconiser une mesure sanitaire spécifique ;

— examiner le manifeste et l’itinéraire ;

— effectuer des inspections ;

— examiner la preuve des mesures au départ ou pendant le transit pour éliminer

l’infection ou la contamination ;

— effectuer le traitement des bagages, cargaisons, conteneurs, moyens de transport,

marchandises, colis postaux, dépouilles mortelles ou restes humains pour éliminer l’infection

ou la contamination, y compris les vecteurs et les réservoirs ;

— appliquer des mesures sanitaires spécifiques pour garantir la sécurité de la

manipulation et du transport de dépouilles mortelles ou de restes humains ;

— isoler ou placer en quarantaine ;

— exiger, en l’absence de traitement ou de processus efficace, la saisie et la destruction

sous contrôle des bagages, cargaisons, conteneurs, moyens de transport, marchandises et

colis postaux infectés, contaminés ou suspects ;

— refuser le départ ou l’entrée de tout voyageur et/ou de toute marchandise suspecte.

LIVRE II. DES PROFESSIONS MÉDICALES, PARAMÉDICALES ET DE LA MÉDECINE

TRADITIONNELLE

TITRE PREMIER. DE LA PROFESSION DE MÉDECIN, D’ACUPUNCTEUR

(TRICE), D’ODONTO-STOMATOLOGISTE, DE SAGE-FEMME

Article 72.— Nul ne peut exercer la profession de médecin, d’acupuncteur(trice),

d’odontostomatologiste et de sage-femme s’il n’est de nationalité malagasy, titulaire des

diplômes ou certificats requis, reconnus par l’État malagasy, et inscrit au Tableau de l’Ordre

concerné. Les diplômes nécessaires à l’exercice de chacune de ces professions sont définis et

fixés par Décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la

Santé.

Ce tableau est déposé au Ministère de la Santé et au Parquet général près la Cour d’Appel.

Page 313: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 312 —

Dans le courant du mois de janvier de chaque année, il est publié au journal Officiel de la

République de Madagascar.

Article 72 bis.— Toutefois, peuvent exercer la profession de médecin

d’acupuncteur(trice), d’odonto-stomatologiste et de sage-femme, sans préjudice de

dispositions précédentes :

— les médecins militaires, odonto-stomatologistes militaires appartenant aux Forces

Armées malagasy ;

— les médecins, les praticiens ayant reçu une formation en acupuncture, les

odontostomatologistes ou les sages-femmes des missions étrangères agréées, sous réserve du

respect des conditions imposées par les règlements en vigueur en la matière et après avis du

Conseil de l’Ordre National correspondant ;

— les médecins, les praticiens ayant reçu une formation en acupuncture, les

odontostomatologistes ou les sages-femmes ressortissant d’un pays lié par un accord de

réciprocité avec Madagascar, sous réserve d’obtention d’une autorisation individuelle

d’exercer délivrée par l’Ordre concerné et, si nécessaire, renouvelable tous les deux ans.

Article 73.— Les devoirs moraux et professionnels des membres des professions

médicales et paramédicales sont tous définis dans des codes de déontologie établis par les

Ordres concernés. Les dispositions desdits codes sont établies par chaque Ordre intéressé

sous forme de Décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé

de la Santé.

Article 74.— Les professions paramédicales sont celles qui, ayant trait à la santé, sont

exercées en dehors des soins courants à la demande, sous contrôle d’un médecin.

Article 75.— Tout membre issu des Corps médical, paramédical et tout autre agent de

santé sans exception, habilité à exercer son art, est tenu de déférer aux réquisitions

légalement délivrées par l’autorité publique pour exécuter des actes en rapport avec sa

spécialité. Dans ce cas, les interventions ouvrent le droit à une rémunération suivant les

dispositions du Droit Syndical et payée par l’autorité requérante.

Article 76.— Les patients employés dans une entreprise ont la liberté de consulter les

praticiens de leur choix, à moins que ladite entreprise ne soit liée par un contrat d’exclusivité

avec des organismes sanitaires agréés par l’État.

Article 77.— Les sages-femmes sont autorisées :

— à agir en qualité de praticien paramédical et mettre en œuvre leur compétence

professionnelle telle qu’elle a été acquise à l’issue de la formation instituée et reconnue par

l’État Malagasy ;

— à exécuter des prestations de soins prescrits ou conseillés par un médecin ;

— à prescrire les médicaments et les examens complémentaires autorisés conjointement

par l’Ordre National des Sages-femmes et l’Ordre National des Médecins et sur approbation

préalable du Ministre chargé de la Santé.

Article 78.— Les conditions et les règles d’exercice de la profession de médecin,

d’acupuncteur, d’odonto-stomatologiste, de sage-femme et le cas échéant, celles de l’exercice

des autres professions médicales et paramédicales sont fixées par Décret pris en Conseil de

Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Page 314: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 313 —

Chapitre I. De l’exercice illégal de la médecine et de l’acupuncture

Article 79.— Exerce illégalement la médecine et l’art de l’acupuncture :

1. toute personne :

— qui prend habituellement ou par direction suivie, même en présence d’un médecin, à

l’établissement d’un diagnostic, à la prescription de produits pharmaceutiques ou autres

traitements de maladies ou d’affections chirurgicales, congénitales ou acquises, réelles ou

supposées, par acte personnel, consultation verbale ou écrite ou par tous autres procédés

quels qu’ils soient ;

— qui pratique l’un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par

Arrêté du Ministre chargé de la Santé, sans être titulaire de diplôme d’État, ou d’Université

de docteur en médecine, ou de tout diplôme dont l’équivalence de niveau et de valeur est

reconnues par l’État Malagasy ;

— non médecin ou tout médecin non muni d’un certificat ou d’un diplôme en

acupuncture délivré par un Institut ou une Université internationalement reconnu et reconnu

par l’État Malgache ;

— nantie d’une autorisation de pratiquer l’acupuncture mais qui ne respecte pas les

conditions et règles d’exercice de cette discipline, notamment les dispositions de l’article 91

du présent Code ;

2. toute personne qui, munie d’un titre régulier, agit en dehors des attributions que la loi

lui confère, notamment en prêtant son concours aux personnes visées au paragraphe

précédent, à l’effet de les soustraire aux prescriptions du présent chapitre ;

3. tout docteur ou médecin qui exerce la médecine sans être inscrit au Tableau de l’Ordre

des Médecins institué conformément au présent Code, ou exerçant en fraude pendant la

période de suspension temporaire ou définitive prévue à l’article 91 du présent Code. Il n’y a

pas exercice illégal de la médecine s’il y a assistance portée à une personne en péril, sous

réserve des conditions précisées à l’article 63 du Code Pénal.

Article 80.— Les dispositions de l’article précédent ne s’appliquent pas aux étudiants en

médecine, en acupuncture ni aux sages-femmes, ni aux infirmiers ou gardes malades qui

agissent comme aide d’un docteur en médecine que ce dernier place auprès de ses malades,

dans la mesure où ces étudiants, ces sages-femmes, ces infirmiers ou ces gardes-malades

agissent dans le strict respect des prescriptions du médecin concerné.

Elles ne s’appliquent pas non plus aux auxiliaires médicaux et autres praticiens munis

d’une autorisation spéciale de l’autorité sanitaire. Un arrêté pris par le Ministre chargé de la

Santé fixe l’étendue de leur compétence.

Chapitre II. De l’exercice illégal de l’odonto-stomatologie

Article 81.— Exerce illégalement l’art d’odonto-stomatologie :

1- toute personne qui, sans être titulaire du diplôme d’État ou d’Université de docteur en

odonto-stomatologie reconnu par l’État malagasy, prend part habituellement ou par direction

suivie au diagnostic et au traitement des maladies bucco-dentaires congénitales acquises,

réelles ou supposées, par consultation, acte personnel ou tout autre procédé, quel qu’il soit,

notamment prophétique ;

Page 315: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 314 —

2- tout odonto-stomatologiste qui, muni d’un titre régulier, agit en dehors des attributions

que la loi lui confère, notamment en prêtant son concours aux personnes visées aux

paragraphes précédents du présent article à l’effet de les soustraire aux prescriptions du

présent chapitre ;

3- tout odonto-stomatologiste privé, d’entreprise, confessionnel, fonctionnaire qui exerce

l’art d’odonto-stomatologie sans être inscrit au Tableau de l’Ordre des odonto-

stomatologistes, sans être en situation régulière vis-à-vis du Conseil de l’Ordre ou exerçant

en fraude pendant la période de suspension temporaire ou définitive prévue à l’article 91 du

présent Code.

Chapitre III. De l’exercice illégal de la profession de sage-femme

Article 82.— Exerce illégalement le métier de sage-femme :

1- toute personne qui, non munie du diplôme délivré par une École reconnue par l’État

malagasy, pratique habituellement les fonctions dévolues aux sages-femmes par usurpation

de titres, acte prévu et puni par l’article 258 du Code Pénal ;

2- toute sage-femme qui pratique habituellement cette profession sur le Territoire

National, sans être de nationalité malagasy ou sans être membre des missions étrangères

agréées ni ressortissante d’un pays lié par un accord de réciprocité avec Madagascar, et ce,

sans préjudice des dispositions contenues dans les accords internationaux ou prises en

exécution de ces accords ;

3- toute sage-femme qui pratique habituellement cette profession sans être au Tableau de

l’Ordre des sages-femmes institué par le présent Code ou exerçant en fraude pendant la

période de suspension temporaire ou définitive d’exercer prévue à l’article 91 du présent

Code. Toutefois, les dispositions du présent alinéa ne s’appliquent pas aux personnels

féminins sages-femmes militaires des forces Armées malagasy ;

4- toute sage-femme convaincue d’avoir fait une fausse déclaration lors de

l’enregistrement de son diplôme et/ou lors de son inscription au Tableau de l’Ordre, et ce,

sans préjudice des dispositions pénales qui sanctionnent l’infraction découlant de la fausse

déclaration ;

5- toute sage-femme exerçant à titre privé et qui a omis de se conformer, dans le mois qui

suit son établissement aux obligations de faire enregistrer son diplôme au Ministère chargé de

la Santé et à l’Ordre National des sages-femmes.

Ne sont pas concernées par les dispositions du présent article les accoucheuses

traditionnels qui exercent leur fonction dans la limite de leur compétence édictée par le

présent Code.

Article 83.— Les peines et sanctions disciplinaires encourues en application des

articles 79 à 82 sont prévues au Livre IX du présent Code.

Chapitre IV. Des ordres nationaux

Article 84.— Le droit d’instituer un Ordre National est reconnu à chaque corps médical

et paramédical dont les membres, du fait de leur inscription au Tableau de l’Ordre, sont

habilités à exercer leur art. L’Ordre National ainsi institué peut, en tant que de besoin, être

Page 316: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 315 —

étendu dans les Régions sous l’appellation de Conseil Régional par décision de l’Ordre

concerné prise en Assemblée Générale du Conseil de l’Ordre National.

Nul ne peut être inscrit à ces Ordres s’il n’est de nationalité malagasy ou ressortissant d’un

pays lié par un accord de réciprocité avec Madagascar.

L’élaboration du règlement intérieur de chaque Ordre, la mission dévolue à l’Ordre, le

rôle et la composition des différents Conseils, les modalités des élections et toute disposition

spécifique à chaque Ordre sont déterminés par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Article 85.— L’inscription au Tableau de l’Ordre correspondant rend licite l’exercice de la

profession de médecin, d’odonto-stomatologiste, de sage-femme ou de pharmacien sur tout

le Territoire National. Il en est de même pour les infirmiers et les autres professionnels de

santé en cas d’institution d’un Ordre National pour ces Corps.

À la date de la mise en application du présent Code, les dispositions du paragraphe

précédent s’appliquent également à tout fonctionnaire membre du corps médical et des corps

paramédicaux sans qu’il soit tenu compte du fait qu’il ait ou non une clientèle payante.

Article 86.— Tout membre des Corps médical et paramédical salarié au service de

l’autorité publique, aussi bien le personnel soignant fonctionnaire que le personnel

enseignant fonctionnaire exerçant à titre permanent ou pour une durée déterminée soit dans

le cadre d’une mission ainsi que tout membre des Corps médical et paramédical d’une

entreprise, d’une organisation confessionnelle, d’une collectivité, d’une organisation non

gouvernementale ou d’une institution de Droit Privé, employé à temps complet, doit avoir

une autorisation de pratiquer la clientèle privée ou payante, délivrée par le Ministère chargé

de la Santé, avant d’ouvrir un Cabinet privé en son nom.

Toutefois, il lui interdit de recevoir dans son Cabinet privé l’employé de son

administration d’appartenance ou les ayants droit dudit employé, à moins que cette clause ne

soit expressément stipulée dans son contrat de travail.

Article 87.— Les fonctionnaires civils, membres du Corps médical et des Corps

paramédicaux, qui veulent faire de la clientèle payante à titre privé doivent s’abstenir d’utiliser

les biens et matériels de l’État mis à leur disposition pour le fonctionnement des services

publics. La violation des stipulations du présent alinéa est constitutive des délits de

concurrence déloyale et de détournement des biens publics entraînant l’application des

sanctions en vigueur en la matière.

TITRE II. DES QUELQUES RÈGLES PARTICULIÈRES

Article 88.— Les dispositions du présent titre sont applicables :

— aux membres du Corps médical ;

— aux membres des Corps paramédicaux ;

— aux auxiliaires médicaux ;

— aux tradipraticiens.

Article 89.— Tout membre du Corps médical, des Corps paramédicaux, des auxiliaires

médicaux et des tradipraticiens doit se conforme aux impératifs suivants :

Page 317: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 316 —

1- il lui est interdit de procéder à une Interruption Volontaire de Grossesse ou de

favoriser un avortement sous peine d’encourir les sanctions prévues par l’article 317 du Code

Pénal, sauf dans les conditions prescrites par les lois et les règlements en vigueur ;

2- plus particulièrement, est puni des peines prévues par les dispositions de l’article 160

du Code Pénal tout membre du Corps paramédical qui délivre un certificat médical, des

conclusions médicales de complaisance portant sur un état de santé en vue :

a. de dispenser une personne d’une obligation de service public légalement due ou la

soustraire à une contrainte prévue par la loi telle notamment une mesure de garde à vue ou

une enquête judicaire ;

b. d’éviter à une personne condamnée à une peine d’emprisonnement ou en détention

préventive les contraintes d’un séjour dans un établissement pénitentiaire en la faisant

admettre, sans motifs dûment justifiés, dans un établissement hospitalier ou une formation

sanitaire, hors du milieu carcéral ;

c. de porter préjudice à l’une ou l’autre partie dans un procès sans qu’il y ait lieu d’établir

l’existence d’un fait de corruption.

3- Outre les interdictions susmentionnées concernant l’exercice de la profession de

médecin, des paramédicaux, des auxiliaires médicaux et des tradipraticiens, sont interdites :

— toute forme directe ou indirecte de campagne de promotion faisant connaître les

spécialités médicales ou les instruments et matériels que l’on possède et qui sont susceptibles,

par leur caractère récent et hors du commun d’attirer de la clientèle ;

— toute forme directe ou indirecte de publicité visant à encourager l’assiduité de la

clientèle.

La transgression des interdictions sus énumérées est punie des peines prévues en la

matière aux termes des dispositions du Livre IX du présent Code.

Article 90.— Tout membre des Corps médical et paramédical, dans l’exercice de la

profession, peut être poursuivi d’homicide, de coups et blessures volontaires prévus par les

articles 319 et 320 du Code Pénal.

Article 91.— Dans le cas d’infirmité ou d’état pathologique d’un membre du Corps

médical ou des Corps paramédicaux, rendant dangereux l’exercice de la profession, le Conseil

de l’Ordre auquel il appartient peut prononcer à son égard, la suspension temporaire pour

une durée déterminée mais renouvelable du droit d’exercer.

La suspension définitive ou le refus du droit d’exercer peut être prononcée en cas de

confirmation d’un état d’aliénation du professionnel de la santé. Néanmoins, la suspension

temporaire ou définitive du droit d’exercer ne peut prononcer que sur rapport motivé établi

par deux (2) experts dont l’un est choisi par l’intéressé ou sa famille et l’autre désigné par le

Conseil de l’Ordre concerné. Le rapport établi par ces experts est à adresser dans un délai

maximum de deux (02) mois au Conseil de l’Ordre concerné qui transmet au Ministre chargé

de la Santé sa décision. En cas de défaillance de l’intéressé ou de sa famille dans le choix de

l’expert, le Service employeur, à la demande du Conseil de l’Ordre concerné, doit en choisir

un.

Page 318: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 317 —

TITRE III. DE LA PROFESSION D’INFIRMIER(E), DES AUTRES AUXILIAIRES

MÉDICAUX ET TRADIPRATICIENS

Article 92.— Est considérée comme exerçant la profession de masseur kinésithérapeute

toute personne ayant reçu une formation professionnelle adéquate et titulaire d’un diplôme

reconnu par l’État et réglementé par Décret pris en Conseil de Gouvernement sur

proposition du Ministre chargé de la Santé.

Le masseur kinésithérapeute a pour but de réaliser des actes de façon manuelle ou

instrumentale à des fins de rééducation, ayant pour objet de prévenir l’altération des capacités

fonctionnelles, de concourir à leur maintien et lorsqu’elles sont altérées, de les rétablir ou d’y

suppléer.

Dans l’exercice de son activité, le masseur kinésithérapeute doit tenir compte des

caractéristiques psychologiques et culturelles de chaque patient, de respecter sa personnalité

et de s’abstenir de tout acte susceptible de porter atteinte à l’intégrité corporelle du patient.

Exerce illégalement la profession de masseur kinésithérapeute toute personne qui, non

munie du diplôme requis à cet effet, pratique habituellement les actes dévolus au masseur

kinésithérapeute et en usurpe le titre.

Article 93.— Est considérée comme exerçant la profession d’infirmier(e) toute personne

titulaire d’un diplôme d’infirmier(e) délivré par une École d’infirmier(e) reconnue par l’État

Malagasy. L’exercice de la profession d’infirmier(e) en l’absence du diplôme susmentionné

est illégal et puni des peines prévues à l’article 335 du présent Code. Ces mêmes peines sont

encourues en cas d’exercice illégal de la profession d’infirmier(e) pendant la période

d’interdiction temporaire ou définitive d’exercer telle qu’elle est prévue à l’article 91 du

présent Code.

Les infirmiers(es) titulaires d’un diplôme de l’Assistance Médicale exercent la profession

d’infirmier(e) jusqu’à l’extinction du cadre auquel ils appartiennent.

Les conditions et les règles d’exercice de la profession d’infirmier(e) sont fixées par décret

pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 94.— Les conditions et les règles d’exercice de la profession de techniciens en

appareillage orthopédique, de pédicure, d’opticien-lunetier, sont réglementées par décret pris

en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 95.— L’exercice de la Médecine Traditionnelle est juridiquement autorisé et

reconnu à toute personne physique ou morale, à titre individuel ou en association, dans les

conditions déterminées par les dispositions du présent Code.

Les tradipraticiens se livrant au traitement des malades dans le cadre de la médecine

traditionnelle peuvent exercer leur art conformément aux lois et règlements en vigueur.

Mais en aucun cas, ils ne peuvent établir un diagnostic par usage de terminologie ou argot

de la médecine allopathique, de l’homéopathie et de l’ostéopathie, ni manipuler des produits

chimiques préparés ou classés «pharmaceutiques » et, hors la pharmacopée traditionnelle,

prescrire tout produit médicamenteux ou des spécialités pharmaceutiques relevant de la

compétence des pharmaciens.

Article 96.— Aux termes du présent Code, il faut entendre par :

Page 319: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 318 —

Médecine Traditionnelle : la somme totale de toutes les connaissances et pratiques,

utilisées en diagnostic, prévention et élimination des déséquilibres physique, mental et social

et reposant exclusivement sur les expériences pratiques et les observations transmises de

génération en génération, oralement ou par écrit, permettant de prévenir, de guérir les

maladies et de l’alléger les souffrances.

Tradipraticien de santé : toute personne qui pratique la Médecine Traditionnelle selon la

définition et les principes énoncés précédemment. Le Tradipraticien peut être :

— une Accoucheuse traditionnelle : un terme désignant toute personne reconnue comme

compétente pour prodiguer à une femme et à son nouveauné, avant, pendant et après

l’accouchement, des soins de santé de basés sur les concepts prévalant dans la collectivité où

elle vit ;

— un ou une Tradithérapeute : un terme désignant toute personne reconnue par la

collectivité dans laquelle elle vit, comme compétente pour dispenser des soins de santé basés

sur les concepts de la maladie et des invalidités prévalant dans ladite collectivité. Ces

Tradithérapeutes sont désignés par différentes appellations selon la région. Une liste

exhaustive et des précisions seront apportées par un Décret d’application de la présente Loi ;

— un ou une Herboriste : un terme désignant toute personne qui vend des plantes

médicinales ;

— un ou une Médico-droguiste : un terme désignant toute personne qui commercialise

des substances médicinales autres que les plantes (d’origine animale ou minérale).

Article 97.— La pratique de l’homéopathie et de l’ostéopathie, à titre individuel ou en

association, est juridiquement autorisée et reconnue à Madagascar par les dispositions du

présent Code.

Article 98.— Aux termes du présent Code, il faut entendre par :

— Homéopathe : tout médecin ayant reçu des formations en homéopathie, méthode de

traitement original mise au point par Hahnemann en 1970 et fondée sur le principe

pharmacologique de l’inversion de l’effet à dose infinitésimale ou loi de similitude. Dans leur

essence, les techniques homéopathiques permettent une approche thérapeutique holistique et

individualisé.

— Ostéopathe : toute personne ayant reçu des formations en ostéopathie, méthode de

thérapie manuelle développée en 1874 par Andrew T. Still en s’inspirant de ses propres

observations et de ses connaissances en anatomie. De nouveaux éléments au développement

de l’ostéopathie ont été apportés plus tard par Sutherland (1873-1954) et John Uppledger

(1983). L’ostéopathie utilise deux mains pour traiter.

Article 99.— Les conditions et les règles d’exercice de la profession d’homéopathe et

d’ostéopathe sont régis par le Statut interne de l’Association des Homéopathes sans

Frontières à Madagascar après approbation du Ministre chargé de la Santé.

Article 100.— La reconnaissance comme Tradipraticien de santé est acquise par décision

émanant du Ministère chargé de la Santé sur proposition du Conseil National de la Médecine

Traditionnelle.

Page 320: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 319 —

La création, l’organisation et les modalités de fonctionnement du Conseil National de la

Médecine Traditionnelle sont fixées par Décret pris en Conseil du Gouvernement sur

proposition du Ministre chargé de la Santé.

Le Conseil National est chargé, entre autres, du contrôle et du suivi de l’exercice de la

Médecine Traditionnelle, dans le cadre de sa promotion et de son développement. En tant

que de besoin, une antenne communale du Conseil National peut être mise en place, dans

chaque Commune, sous l’appellation de : « Comité Consultatif Communal », chargé du

contrôle et du suivi de l’exercice de la Médecine traditionnelle dans la Commune concernée.

Les tradipraticiens sont autorisés à se constituer en Association chargée d’assurer la

promotion et le développement de la Médecine Traditionnelle, à condition que celle-ci soit

reconnue officiellement comme d’utilité publique.

Les documents, objets et remèdes utilisés en Médecine Traditionnelle doivent être

présentés :

— à toute réquisition des autorités sanitaires ou administratives des localités d’exercice ;

— à tout contrôle ordonné par le Ministre chargé de la Santé ou par le Conseil National

de la Médecine Traditionnelle.

Article 101.— Nul ne peut exercer le métier de tradipraticien, sur le Territoire National,

s’il n’est :

— de nationalité malagasy ;

— résident à Madagascar ;

— autorisé par le Ministre chargé de la Santé et inscrit dans les registres local et national

de l’Association ;

— reconnu de bonne moralité et jouir de ses droits civils et civiques pendant une période

de 5 ans précédant la date de son inscription dans le registre ; la perte desdits droits entraîne

automatiquement la radiation du registre ;

— âgé de vingt-et-un (21) ans révolus.

Article 102.— Dans l’exercice de leurs fonctions, les tradipraticiens ne sont pas autorisés,

ni à porter des jugements sur l’efficacité ou non des méthodes de la médecine moderne et de

celles autorisées officiellement sur le Territoire National, ni à inciter à déserter les formations

sanitaires publiques ou privées.

Les dispositions des articles 75, 90, et 91 du présent Code sont applicables aux auxiliaires

médicaux et aux tradipraticiens.

Un décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la

Santé fixe les conditions d’exercice, d’organisation et du fonctionnement de la pharmacopée

traditionnelle.

Page 321: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 320 —

LIVRE III. DES MÉDICAMENTS, DE LA PHARMACIE ET DES CONDITIONS

GÉNÉRALES D’EXERCICE DE LA PROFESSION DE PHARMACIEN

Article 103.— Le présent Code s’applique à toute personne exerçant la profession de

pharmacien, à toute activité relevant du domaine du médicament et autres biens de santé

ainsi qu’à la vente des plantes médicinales sur le territoire de la République de Madagascar.

TITRE PREMIER. DES MÉDICAMENTS ET DE LA PHARMACIE

Chapitre premier. De la politique pharmaceutique nationale

Article 104.— La Politique Pharmaceutique Nationale fait partie de la Politique Nationale

de Santé définie par le Gouvernement.

Elle vise à assurer un approvisionnement suffisant en médicaments essentiels de bonne

qualité, sûrs et efficaces, et un usage rationnel de ces médicaments.

Dans le but d’assurer un approvisionnement suffisant et durable en médicaments

essentiels de bonne qualité, sûrs et efficaces, la Politique Pharmaceutique Nationale doit

s’attacher à promouvoir la recherche et la production nationales des produits

pharmaceutiques.

La pharmacopée malagasy doit adopter les normes qui favorisent cet objectif de

production nationale.

L’Agence du Médicament de Madagascar, qui relève directement du Ministère chargé de

la Santé, est l’organe responsable du contrôle de la démographie et des activités des

établissements pharmaceutiques, de leur inspection, de l’enregistrement des médicaments à

usage humain et autres produits assimilés, du contrôle de qualité des médicaments, de la

pharmacovigilance sur le Territoire National.

Chapitre II. Des médicaments

Section 1. Des définitions

Article 105.— On entend par médicament toute substance, composition ou préparation

présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies

humaines ou animales ainsi que tout produit pouvant être administré à l’homme ou à

l’animal, en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs

fonctions organiques.

Sont notamment considérés comme des médicaments :

— les produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, contenant une substance ayant une

action thérapeutique au sens de l’alinéa 1er ou contenant des substances vénéneuses à des

doses ou concentrations supérieures à celles figurant dans la liste prévue par arrêté du

Ministre chargé de la Santé ou ne figurant pas sur cette même liste ;

— les produits diététiques qui renferment dans leur composition des substances

chimiques ou biologiques ne constituant pas elles-mêmes des aliments, mais dont la présence

Page 322: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 321 —

peut conférer à ces produits, soit des propriétés spéciales recherchées en thérapeutique

diététique, soit des propriétés de repas d’épreuve ;

— les produits immunobiologiques utilisés pour prévenir, diagnostiquer ou traiter des

maladies de l’homme, qui agissent sur le système immunitaire ou qui peuvent être impliqués

dans des réactions immunobiologiques tels que les vaccins, les allergènes, les toxines et

antitoxines, les sérums, les immunoglobulines ;

— les produits présentés comme supprimant l’envie de fumer ou réduisant

l’accoutumance au tabac ;

— les contraceptifs oraux, injectables, implants, spermicides dont la dispensation est

autorisée par l’Agence du Médicament de Madagascar.

Article 106.— Hors le cas où un nouveau médicament a déjà été présenté et reconnu à ce

titre par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), un nouveau produit est classé

médicament découvert ou inventé à Madagascar sur validation par une Institution

Biomédicale reconnue par l’État Malagasy.

Cette institution certifie la nature du produit, le protocole de recherche, le principe actif

identifié et son mode de sélection, la vertu thérapeutique, les effets secondaires, les contre-

indications, et le degré de risque de toxicité.

L’introduction de nouveaux produits contraceptifs feront l’objet d’un Arrêté du Ministre

chargé de la Santé sur avis d’une commission formée par les professionnels de la santé du

secteur public et du secteur privé.

Avant la mise aux dispositions du public, le produit doit être enregistré au niveau de

l’Agence du Médicament de Madagascar auprès du Ministère chargé de la Santé.

Article 107.— Le sang humain et les dérivés sanguins ne sont pas considérés comme des

médicaments mais relèvent des dispositions particulières en ce qui concerne leur prélèvement

ou leur préparation, leur utilisation, leur contrôle, leur condition de conservation et leur

dispensation. Les activités relatives à ces produits sont soumises à une inspection effectuée

par des pharmaciens inspecteurs relevant de l’Agence du Médicament de Madagascar ou par

d’autres agents qualifiés et mandatés par le Ministère chargé de la Santé.

Article 108.— La pharmacopée est un recueil de normes destiné à assurer l’uniformité de

la nature, de la qualité, de la composition et de la concentration des médicaments et autres

produits pharmaceutiques. Elle est le manuel de référence des pharmaciens pour la

fabrication et le contrôle des médicaments ainsi que pour les préparations officinales et

magistrales.

L’élaboration d’une pharmacopée proprement malagasy relève des travaux conjoints du

Ministère chargé de la Recherche Scientifique ainsi que du Ministère chargé de la Santé qui

établissent en commun des normes de fabrication locale des médicaments tout en utilisant à

cet effet les potentialités et les ressources tant humaines, naturelles que techniques et

financières qui existent à Madagascar.

À titre transitoire, les pharmacopées européenne, britannique, l’US Pharmacopeia ou

toute autre pharmacopée reconnue utile sont admises par voie de décret.

Article 109.— La pharmacopée traditionnelle malagasy réunit les informations sur les

plantes et autres produits naturels susceptibles d’être utilisés en thérapeutique humaine et

Page 323: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 322 —

codifie la préparation et l’emploi des médicaments galéniques qui en sont issus. La

Commission de la pharmacopée traditionnelle malagasy, dont l’organisation et le

fonctionnement sont fixés par décret pris en Conseil de Gouvernement, est placée sous

l’autorité du Ministère chargé de la Santé.

Article 110.— On entend par :

— médicament générique, tout médicament préparé à l’avance, commercialisé sous une

dénomination commune internationale, dont le ou les principes actifs ne sont plus ou ne

sont protégés par un brevet. Sa composition et sa forme galénique sont identiques à celles de

la spécialité innovante, sa concentration en principes actifs est identique à celles de la

spécialité innovante, sa concentration en principes actifs est identique et sa marge

thérapeutique aussi large ; sa bioéquivalence avec un produit de référence a été démontrée.

Tout générique caractérisé par une dénomination spéciale est appelé « générique de

marque » ;

— médicament essentiel, tout médicament qui satisfait aux besoins de la majorité de la

population en matière de soins de santé ;

— préparation magistrale, tout médicament préparé extemporanément dans une officine

ou un établissement de santé en exécution d’une prescription destinée à un patient

déterminé ;

— préparation hospitalière, tout médicament préparé sur prescription médicale et selon

les indications de la pharmacopée en raison de l’absence de spécialité pharmaceutique

disponible ou adaptée dans la pharmacie à usage interne d’un établissement de santé et

destiné à être dispensé à un ou plusieurs patients dans ledit établissement ;

— préparation officinale, tout médicament préparé en pharmacie selon les indications de

la pharmacopée ou d’un formulaire reconnu par l’État malagasy et destiné à être dispensé

directement aux patients approvisionnés par cette pharmacie ;

— produit officinal divisé, toute substance ou toute préparation stable décrite par la

pharmacopée, préparée à l’avance par un établissement pharmaceutique et divisée soit par lui,

soit par la pharmacie d’officine qui la met en vente, soit par une pharmacie à usage interne ;

— spécialité pharmaceutique, tout médicament préparé à l’avance, présenté sous un

conditionnement particulier, caractérisé par une dénomination spéciale et mis sur le marché

sous cette dénomination ;

— médicament homéopathique, tout médicament obtenu à partir de produits, substances

ou composition appelés souches homéopathiques, selon un procédé de fabrication

homéopathique décrit par toute pharmacopée reconnue à Madagascar. Un médicament

homéopathique peut aussi contenir plusieurs principes actifs ;

— remède secret, toute préparation dont la formule ne figure pas sur le médicament lui-

même, ni dans une pharmacopée, ni dans un formulaire, ni sur l’ordonnancier de la

pharmacie. La vente de remède secret est interdite ;

— consommables médicaux, tout produit, matériel et autres utilisés pour accomplir des

actes médicaux.

Page 324: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 323 —

Section 2. Des listes officielles de médicaments

Article 111.— Dans l’intérêt de la santé publique et en application de la Politique

Pharmaceutique Nationale, les diverses listes de médicaments autorisés à être dispensés au

public seront établies et modifiées par le Ministre chargé de la Santé, sur avis d’une

commission formée par les professionnels de la santé du secteur public et du secteur privé.

La composition de cette commission sera définie par décret pris en Conseil de

Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Le Ministre chargé de la Santé arrête :

— la liste nationale des médicaments essentiels ;

— la liste des génériques de substitution ;

— la liste des stupéfiants, psychotropes et précurseurs soumis à contrôle international ;

— la liste des substances interdites, vénéneuses, toxiques et autres ;

— la liste des médicaments dont le déconditionnement et le reconditionnement sont

autorisés ;

— la liste des médicaments autorisées à être prescrits par chaque catégorie de

prescripteur ;

— la liste des médicaments autorisés à être dispensés au public par les diverses structures

de dispensation ;

— la liste des colorants, adjuvants et agents conservateurs nécessaires à la fabrication des

médicaments ;

— la liste des plantes médicinales autorisés à être utilisées en médecine humaine ;

— la liste des plantes médicinales interdites à la médecine humaine ;

— la liste des consommables médicales interdites à la médecine humaine ;

— la liste des consommables médicales soumis à Autorisation de Mise sur le Marché

(AMM) ;

— la liste des médicaments autorisés à la publicité.

Article 112.— Le formulaire national des médicaments ou compendium est le recueil

synthétique des informations scientifiques et techniques relatives aux spécialités

pharmaceutiques et médicaments génériques figurant sur la liste des médicaments essentiels

enregistrés à Madagascar et classés par dénomination commune internationale.

Section 3. Des médicaments à base de plantes et autres médicaments traditionnels

Article 113.— On entend par :

— médicament à base de plantes, tout médicament contenant comme principe actif

exclusivement des produits végétaux ou des substances issues de plantes ou des préparations

de plantes ;

Page 325: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 324 —

— préparation à base de plantes, les plantes réduites en poudre, les jus, les extraits, les

teintures, les huiles grasses, et toute préparation qui implique l’utilisation de procédés de

concentration, de fractionnement ou de purification et utilisés comme médicament ;

— remède « traditionnel », toute substance végétale, animale ou minérale présentée

comme favorisant la prévention ou le traitement des maladies humaines et utilisée

traditionnellement sur des fondements socioculturels et/ou religieux. Il n’est pas destiné à

être injecté par voie parentérale. Il est d’usage réservé et contrôlé.

Article 114.— Est considéré comme « remède traditionnel amélioré» tout remède

traditionnel ayant subi les modifications afin d’en accroître l’acceptabilité. Toutes les

substances non originelles ajoutées, telles les excipients, ou toute pratique contribuant à

l’amélioration du médicament traditionnel doivent être indiquées.

Les médicaments à base de plantes, les préparations à base de plantes et les remèdes

traditionnels améliorés sont soumis aux dispositions du présent Code régissant la fabrication,

le commerce, la distribution, la vente au public, la publicité et la promotion des médicaments.

Les remèdes traditionnels améliores doivent satisfaire aux normes d’éthiques nationale,

aux normes techniques de la pharmacopée malagasy ou autres pharmacopée reconnues par

l’État malagasy.

Les dispositions régissant la préparation, l’enregistrement, la distribution et la vente au

public des remèdes traditionnels, ainsi que d’autres produits utilisés en médecine

traditionnelle, seront précisée par voie réglementaire.

Chapitre III. De la réglementation générale concernant les médicaments

Section 1. De l’enregistrement

Article 115.— Tout médicament à usage humain ou tout produit assimilé, fabriqué

localement ou importé, est soumis, avant sa commercialisation ou sa dispensation, même à

titre gratuit, à une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) délivrée par l’agence du

Médicament de Madagascar, après instruction d’un dossier et décision d’une Commission

Nationale de l’Enregistrement des Médicaments.

Néanmoins, une Autorisation Temporaire de Vente ou ATV peut être délivrée par le

Ministre chargé de la Santé pour des médicaments indispensables à la Santé Publique mais

dont la fréquence de prescriptions ne justifie pas une demande d’AMM. Les critères

d’obtention de cette mesure dérogatoire sont fixés par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

L’Autorisation de Mise sur le Marché est délivrée pour un médicament, dont la

dénomination, la composition, la forme galénique, le mode d’administration, le dosage, les

indications thérapeutiques, le conditionnement, la durée de conservation, l’étiquetage, le

mode de délivrance et le prix grossiste hors taxe sont définis, et pour lequel un numéro

d’enregistrement est attribué.

Toute modification de l’une de ces caractéristiques, à l’exception du prix, doit être

soumise à une nouvelle autorisation.

Page 326: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 325 —

L’Autorisation de Mise sur le Marché n’est délivrée qu’à un médicament dont l’efficacité,

l’intérêt thérapeutique, l’innocuité dans les conditions normales d’emploi et la qualité

intrinsèque sont documentés et prouvés ou connus.

Toute modification des excipients, du procédé de fabrication ou du lieu de fabrication

doit être signalée à l’agence du médicament de Madagascar.

La vente des consommables médicaux, dont la liste est fixée par arrêté du Ministre chargé

de la Santé, est soumise à l’octroi d’une Autorisation de Mise sur le Marché délivrée par

l’Agence du Médicament de Madagascar. Les procédures d’enregistrement seront précisées

par arrêté du Ministre chargé de la Santé. La demande d’Autorisation de Mise sur le Marché

doit être adressée au Directeur de l’Agence du Médicament de Madagascar, accompagnée du

versement d’un droit fixe dont le montant est déterminé par arrêté conjoint du Ministre

chargé de la Santé et du Ministre des Finances et du Budget.

Les modalités et les éléments constitutifs du dossier à soumettre sont précisés dans des

textes réglementaires.

Article 116.— La décision accordant ou refusant l’octroi d’Autorisation de Mise sur le

Marché est prise dans le délai maximum de quatre (04) mois à compter du dépôt de la

demande, par le Directeur de l’Agence du Médicament de Madagascar, après avis de la

Commission Nationale d’Enregistrement des Médicaments dont la composition et le

fonctionnement sont fixés par décision du Ministre chargé de la Santé.

Le Directeur de l’Agence du Médicament de Madagascar a la possibilité de faire appel à

des experts indépendants choisis en fonction des produits présentés à la Commission

Nationale de l’Enregistrement des Médicaments.

Le refus d’Autorisation de Mise sur le Marché doit faire l’objet d’une décision motivée.

En tant que de besoin, les conditions d’octroi ou de retrait d’Autorisation de Mise sur le

Marché de médicaments ou autres produits assimilés feront l’objet de textes règlementaires.

L’Autorisation de Mise sur le Marché est délivrée pour une durée de cinq ans

renouvelable par période quinquennale à la demande du titulaire de l’autorisation, trois (3)

mois avant la date d’expiration de la précédente autorisation, s’il y a lieu.

Article 117.— Le détenteur de l’Autorisation de Mise sur le Marché est tenu de respecter

les règles d’étiquetage, de conditionnement et de libellé de la notice d’information édictées

par l’Agence du Médicament de Madagascar.

Aucune Autorisation de Mise sur le Marché ne sera donnée à un médicament dont la

consommation ou la vente a été interdite et qui a été retiré du marché à l’étranger.

L’Agence du Médicament de Madagascar publie la liste des médicaments autorisés à être

mis sur le marché sur le territoire de Madagascar, ainsi que la liste des médicaments retirés du

marché. Elle tient également à jour et publie la liste des établissements pharmaceutiques et

autres établissements de dispensation de médicaments autorisés à exercer.

Article 118.— Ne sont pas soumises à l’Autorisation de Mise sur le Marché les

préparations officinales, les préparations magistrales et les préparations destinées à la

conduite d’essais thérapeutiques.

Article 119.— Le Directeur de l’Agence du Médicament de Madagascar peut, par décision

motivée, après avis de la Commission Nationale d’Enregistrement des Médicaments,

Page 327: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 326 —

suspendre ou retirer l’Autorisation de Mise sur le Marché d’un médicament qui s’est avéré

nocif dans les conditions normales d’emploi ou dont l’effet thérapeutique fait défaut ou

encore dont la composition qualitative ou quantitative ne correspond pas à celle qui a été

déclarée.

Il en est de même lorsque les renseignements fournis à l’occasion de la demande

d’autorisation sont erronés, que les conditions prévues par la réglementation ne sont pas

remplies, ou que des modifications affectant la qualité d’un médicament ou la conformité

avec les spécifications exigées ont été constatées lors d’une inspection.

Dans le cas prévus ci-dessus, le détenteur de l’Autorisation de Mise sur le Marché est tenu

d’en faire radier l’enregistrement, et les pharmaciens d’officine, les grossistes répartiteurs, les

fabricants doivent prendre toutes les dispositions utiles à la cessation immédiate de la

délivrance au public desdits médicaments. Si ces dispositions n’interviennent pas dans les

délais compatibles avec la protection de la santé de la population, l’Agence du Médicament

de Madagascar prend toutes les mesures appropriées.

Article 120.— Tout médicament dispensé à Madagascar et retiré du marché d’un pays

pour des raisons de santé publique peut faire l’objet d’un retrait motivé et notifié par décision

de l’Agence du Médicament de Madagascar.

Article 121.— L’importation des médicaments, dans le cadre de l’aide internationale

d’urgence est autorisée à titre exceptionnel sur le territoire de Madagascar, à condition que

ces médicaments soient accompagnés d’une Autorisation de Mise sur le Marché en cours de

validité du pays de provenance ou à Madagascar, soit d’un certificat établi dans le cadre du

système de certification de la qualité de l’Organisation Mondiale de la Santé, soit encore

d’autorisation d’importation délivrée par l’Agence du Médicament de Madagascar.

Un décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la

Santé dont les dispositions doivent être conformes aux Conventions Internationales, fixe la

règlementation des dons de médicaments.

Section 2. Des essais cliniques

Article 122.— On entend par essai clinique d’un médicament, toute recherche ou toute

expérimentation effectuée dans le but :

1. d’obtenir une Autorisation de Mise sur le Marché ;

2. d’élargir les indications thérapeutiques d’un médicament déjà autorisé ;

3. de démontrer sa bio-disponibilité. Tout essai clinique doit être conduit en respectant

rigoureusement un protocole d’étude dont les objectifs et la méthodologie sont clairement

définis et qui a été examiné et approuvé par un Comité créé à cet effet par arrêté du Ministre

chargé de la Santé : le Comité d’Éthique auprès du Ministère chargé de la Santé sur les

recherches biomédicales impliquant l’être humain.

La composition, la nomination des membres, les attributions et le fonctionnement de ce

Comité d’Éthique auprès du Ministre chargé de la Santé seront fixés par arrêté du Ministre

chargé de la Santé.

Tout essai clinique doit faire l’objet d’une autorisation préalable du Ministre chargé de la

santé après avis du Comité d’Éthique.

Page 328: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 327 —

Les essais cliniques sur le Territoire National doivent être réalisés selon les principes et les

lignes directrices des bonnes pratiques cliniques de l’Organisation Mondiale de la Santé,

conformément aux principes contenus dans la déclaration d’Helsinki et du Guide à l’usage

des membres du Comité d’Éthique auprès du Ministère chargé de la Santé.

Tout essai clinique non autorisé, ou n’ayant pas respecté rigoureusement le protocole

d’étude approuvé par le Comité d’Éthique auprès du Ministère chargé de la Santé,

conformément aux principes contenus dans la déclaration d’Helsinki et du Guide à l’usage

des membres du Comité d’Éthique auprès du Ministère chargé de la Santé, est classé comme

expérience dangereuse à risque évident et engage la responsabilité civile et pénale de son

auteur.

Section 3. De la pharmacovigilance

Article 123.— On entend par « pharmacovigilance » la science et les activités relatives à la

détection, l’évaluation, la compréhension et la prévention des effets indésirables ou de tout

autre problème liés aux médicaments ou produits de santé mis sur le marché, à titre onéreux

ou gratuit, que ce risque soit potentiel ou avéré. Elle comprend aussi l’ensemble des

opérations de centralisation, de contrôle et de diffusion des informations sur les effets

indésirables des médicaments.

Article 124.— L’octroi d’une Autorisation de Mise sur le Marché pour un médicament

soumet le détenteur à l’obligation d’informer l’Agence du Médicament de Madagascar de

tout « effet indésirable inattendu » porté à sa connaissance. Cette obligation s’applique aux

prescripteurs, aux dispensateurs et aux bénéficiaires.

Le fabricant d’un produit sous licence ou l’importateur doit informer l’Agence du

Médicament de Madagascar de tout retrait ou suspension du produit dans le pays d’origine,

dès qu’il en a connaissance.

Section 4. De la prescription

Article 125.— Sont autorisés à prescrire :

— les médecins ;

— les internes et les externes des hôpitaux ;

— les stagiaires internes en médecine sous l’autorité du médecin responsable du service ;

— les chirurgiens-dentistes dans les limites d’une liste déterminée par arrêté du Ministre

chargé de la Santé ;

— en l’absence de médecin, les paramédicaux dans la limite des listes de médicaments

autorisés pour chaque niveau de formation sanitaire.

Sur toute ordonnance, doivent figurer le nom, le titre universitaire, la spécialité ainsi que

l’adresse du prescripteur, le numéro d’inscription à l’Ordre dans le cas où l’Ordre est institué,

le nom, l’âge, le poids et l’adresse du patient à qui le médicament est prescrit, le nom ou la

dénomination commune internationale du médicament prescrit ou la formule de la

préparation magistrale, la posologie et la durée du traitement, la date, le cachet et la signature

du prescripteur.

Page 329: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 328 —

Sauf cas prévu par la réglementation en vigueur, il est interdit à tout prescripteur de

médicaments et autres produits pharmaceutiques de recevoir sous quelque forme que ce soit,

directement ou indirectement, des intérêts ou ristournes proportionnels ou non au nombre

d’unités vendues.

Section 5. De la préparation

Article 126.— Sont seuls autorisés à préparer les médicaments et autres produits

pharmaceutiques :

— les pharmaciens d’officine ;

— les préparateurs en pharmacie sous contrôle d’un pharmacien ;

— les pharmaciens des différents établissements hospitaliers publics ou privés ;

— dans les formations sanitaires publiques, les paramédicaux dans la limite des listes de

produits pharmaceutiques autorisés.

Section 6. De la dispensation

Article 127.— On entend par dispensation la délivrance au public ou aux patients de

médicaments et autres biens de santé, complétée par des informations et conseils nécessaires

à leur bon usage.

Toute délivrance à titre onéreux ou gratuit de produits pharmaceutiques en dehors des

établissements pharmaceutiques et sanitaires est interdite. Les médicaments et produits

périmés doivent être retirés de la consommation. Tout pharmacien, à qui il est reproché

d’avoir vendu des produits périmés, eu égard à cette infraction sera traduit devant le Conseil

de l’Ordre pour violation des dispositions légales et réglementaires en matière

pharmaceutique. Les sanctions prévues dans les dispositions des textes législatifs et

réglementaires en vigueur, en matière de fraudes alimentaires et d’abus de confiance vis-à-vis

des consommateurs lui sont également applicables.

Article 128.— Les conditions de stockage et de conservation des médicaments indiquées

par le fabricant doivent être respectées.

Les médicaments autorisés à être mis sur le marché, à l’exception de ceux dont le

déconditionnement est autorisé et qui sont inscrits sur la liste mentionnée à l’article 111

doivent être, délivrés dans leur conditionnement d’origine, pour lequel ils ont obtenu

l’autorisation de Mise sur le Marché.

Les pharmaciens ne peuvent modifier une prescription qu’avec l’accord exprès de son

auteur. Toutefois, le pharmacien est autorisé à conseiller la substitution d’un médicament par

son équivalent générique de moindre coût, figurant sur la liste établie par le Ministre chargé

de la Santé.

Section 7. De la tarification

Article 129.— Les Pharmaciens Inspecteurs relevant de l’Agence du Médicament de

Madagascar sont chargés de contrôler et de faire respecter la réglementation tarifaire en

vigueur dans tous les établissements pharmaceutiques publics et privés ainsi que dans les

dépôts de médicaments.

Page 330: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 329 —

Section 8. De la promotion et de la publicité

A. De la promotion

Article 130.— On entend par promotion toute action entreprise par les laboratoires et les

distributeurs auprès des prescripteurs et autre personnel de santé dûment autorisés à exercer,

en vue de faire connaître leurs produits.

Aucune promotion ne peut être faite pour un médicament avant que l’Autorisation de

Mise sur le Marché n’ait été octroyée par l’Agence du Médicament de Madagascar pour ledit

médicament.

Ne sont pas concernées par cette disposition les informations données dans le cadre de

conférences et publications à caractère scientifique.

Article 131.— Les établissements pharmaceutiques peuvent employer des délégués ou

visiteurs médicaux pour la promotion de leurs produits. Ils sont tenus de les faire enregistrer

auprès de l’Agence du Médicament de Madagascar.

Des dispositions réglementaires précisent, en ce qui concerne les délégués ou visiteurs

médicaux :

— le niveau de qualification minimale exigible ;

— les conditions administratives à respecter ;

— les responsabilités de l’employeur.

Article 132.— La présentation du produit pharmaceutique auprès des prescripteurs et

autres professionnels de la santé doit être faite avec objectivité, dans l’intérêt de la santé

publique et être conforme aux indications d’utilisation et de délivrance agréés dans le cadre

de l’Autorisation de Mise sur le Marché.

Toutes les informations contenues dans la documentation remise aux professionnels de la

santé doivent être exactes, actuelles, vérifiables et suffisamment complètes pour permettre au

destinataire de se faire une idée personnelle de la valeur thérapeutique du médicament et de

son utilisation. Elles sont soumises à la délivrance d’un visa de publicité par l’Agence du

Médicament de Madagascar.

Article 133.— Les échantillons médicaux doivent être identiques au plus petit

conditionnement commercialisé et comporter la mention « Échantillon médical gratuit ». Il

est interdit de vendre des échantillons médicaux.

Les échantillons médicaux des médicaments inscrits sur les listes I et II des substances

vénéneuses ne peuvent être remis qu’au personnel de santé habilité à les prescrire et ce, sur

demande écrite, datée et signée par le requérant. En aucun cas, les stupéfiants ne peuvent

être délivrés à titre d’échantillons médicaux.

La distribution directe au public d’échantillons médicaux à des fins promotionnelles est

interdite.

Article 134.— Dans le cadre de la promotion auprès des personnes habilitées à prescrire

ou à délivrer des médicaments, il est interdit d’octroyer, d’offrir ou de promettre des

avantages matériels directs ou indirects, en nature ou en espèce.

Page 331: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 330 —

B. De la publicité

Article 135.— On entend par publicité pour les médicaments à usage humain toute forme

d’information, de prospection ou d’incitation autre que celle concernant la promotion, qui

vise à encourager la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation des

médicaments par le public.

Article 136.— L’application de la réglementation et la surveillance de la publicité sont

assurées par la Commission Nationale de Contrôle de la Publicité Pharmaceutique.

Article 137.— La publicité ne doit pas être trompeuse ni porter atteinte à la protection de

la santé publique. Elle doit présenter le médicament ou le produit de façon objective et

favoriser son bon usage.

La publicité auprès du public pour un médicament n’est admise qu’à la condition que ce

médicament ait obtenu l’Autorisation de Mise sur le Marché et qu’il ne soit pas soumis à

prescription médicale.

La publicité auprès du public pour un médicament est nécessaire accompagnée d’un

message de prudence et de renvoi à la consultation d’un médecin en cas de persistance des

symptômes.

La publicité auprès du public pour un médicament déterminé ainsi que les campagnes

publicitaires auprès du public pour les vaccinations sont soumises à une autorisation

préalable de durée limitée, dénommée visa de publicité délivrée par l’Agence du Médicament

de Madagascar. Elle est accompagnée d’un droit fixe dont le montant est déterminé par

arrêté conjoint du Ministre chargé de la Santé et du Ministre chargé des Finances et du

Budget.

Ce visa est délivré pour une durée qui ne peut excéder la durée de l’Autorisation de Mise

sur le Marché.

Les conditions d’octroi, de suspension ou de retrait du visa de publicité sont définies par

arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Chapitre IV. Des stupéfiants, psychotropes et précurseurs

Article 138.— Le Ministère chargé de la Santé et le personnel médical et paramédical

placé sous son autorité, les professions de la Santé relevant du Secteur Privé, les pharmaciens

participent à la mise en œuvre de la Loi n° 97-039 du 4 novembre 1997 sur le contrôle des

stupéfiants, des substances psychotropes et des précurseurs à Madagascar ainsi qu’à la mise

en l’application du Plan Directeur National de Lutte contre la Drogue et les activités

criminelles connexes.

Article 139.— On entend par stupéfiant, toute plante ou substance d’origine naturelle ou

synthétique, à action sédative, analgésique, narcotique ou euphorisante pouvant provoquer

accoutumance, toxicomanie ou dépendance.

Les stupéfiants soumis au contrôle figurent aux tableaux I et II de la Convention Unique

de Genève sur les Stupéfiants de 1961, amendée par le Protocole de Mars 1972.

Article 140.— On considère comme substances psychotropes « l’ensemble des substances

chimiques d’origine naturelle ou artificielle qui ont un tropisme psychologique, c’est-à-dire

susceptibles de modifier l’activité mentale sans préjuger du type de cette modification ». Sont

Page 332: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 331 —

soumises au contrôle les substances psychotropes classées en fonction de leur potentiel de

dépendance et de leur degré d’utilité thérapeutique figurant aux tableaux I, II, III et IV de la

Convention de Vienne sur les Substances Psychotropes du 21 février 1971.

Article 141.— On entend par précurseurs les substances utilisées pour la fabrication des

stupéfiants ou des substances psychotropes.

Les précurseurs soumis au contrôle figurent aux tableaux I et II de la Convention des

Nations Unies contre le trafic illicite des stupéfiants et substances psychotropes de 1988.

Article 142.— Les définitions sont étendues à toute modification des tableaux qui

pourrait être prise ultérieurement par décision de la Commission des stupéfiants des Nations

Unies.

Article 143.— Le Ministre chargé de la Santé est responsable de l’application au niveau

national des Conventions internationales signées et ratifiées par la République de

Madagascar, dans le secteur de la pharmacie, du médicament et de l’inspection des

établissements.

Article 144.— En application des Conventions internationales sur le contrôle des

stupéfiants et des substances psychotropes ratifiées par la République de Madagascar, la

production, la fabrication, le transport, l’importation, l’exportation, la détention, l’offre, la

cession, l’acquisition, la distribution et l’emploi des substances ou plantes vénéneuses classées

comme psychotropes ou comme stupéfiants sont soumis à autorisation spéciale,

renouvelable et limitée exclusivement aux fins médicales et scientifiques.

Les conditions d’octroi de toute autorisation sont fixées par voie réglementaire.

Article 145.— Les stupéfiants autorisés ne peuvent être délivrés que sur ordonnance

médicale spéciale extraite d’un carnet à souches.

Les psychotropes autorisés ne peuvent être délivrés que sur ordonnance médicale.

Les conditions de prescription et de délivrance de telles préparations sont fixées par voie

réglementaire après avis des Conseils Nationaux de l’Ordre des Médecins et de l’Ordre des

Pharmaciens.

Chapitre V. De la parapharmacie et des autres biens de santé

Section 1. Des produits cosmétiques et d’hygiène corporelle

Article 146.— On entend par produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, toutes les

substances ou préparations, autres que les médicaments, destinées à être mises en contact

avec les diverses parties superficielles du corps humain, les dents ou les muqueuses, en vue

de les nettoyer, de les protéger, de les maintenir en bon état, d’en modifier l’aspect, de les

parfumer ou d’en corriger l’odeur.

Tout produit cosmétique et d’hygiène corporelle sans visée thérapeutique bien définie ne

doit pas comporter dans sa dénomination des termes tels que : SANTE ; MEDI ;

MEDICAL ou PHARMA… qui pourraient induire en erreur le public.

Article 147.— La vente des produits cosmétiques et d’hygiènes corporelles n’est pas

exclusivement réservée aux établissements pharmaceutiques.

Page 333: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 332 —

Les conditions d’ouverture et d’exploitation de tout établissement fabricant,

conditionnant ou important même à titre accessoire, des produits cosmétiques ou des

produits d’hygiène corporelle, de même que l’extension de l’activité d’un établissement à de

tels produits sont fixées par voie réglementaire.

Article 148.— Tout produit cosmétique ou tout produit d’hygiène corporelle doit, avant

sa mise sur le marché, à titre onéreux ou à titre gratuit, faire l’objet d’une demande

d’enregistrement dont la composition du dossier et fixée par arrêté du Ministre chargé de la

Santé.

Les substances vénéneuses ne peuvent entrer dans la composition des produits

cosmétiques et d’hygiène corporelle qu’à la condition de figurer sur une liste établie par arrêté

qui fixe, pour chaque substance vénéneuse et pour chaque type de produit, les doses et

concentrations à ne pas dépasser.

L’Agence du Médicament de Madagascar peut interdire par décision motivée la mise ou le

maintien sur le marché à titre onéreux ou gratuit des produits cosmétiques ou des produits

d’hygiène corporelle présentant un danger pour l’utilisateur.

Article 149.— Les insecticides et les acaricides destinés à être appliqués sur l’homme et

les produits destinés à l’entretien ou l’application des lentilles de contact doivent, avant leur

mise sur le marché à titre onéreux ou à titre gratuit, faire l’objet d’un visa délivré par l’Agence

du Médicament de Madagascar.

Section 2. Des produits diététiques

Article 150.— Un produit diététique est un produit destiné à une alimentation spécifique

qui, du fait de sa composition particulière et de son procédé de fabrication, se distingue des

denrées alimentaires de consommation courante et convient à l’objectif nutritionnel

recherché ; il est commercialisé de manière à indiquer qu’il répond à cet objectif.

La vente des produits diététiques n’est pas exclusivement réservée aux établissements

pharmaceutiques.

La fabrication, l’importation, l’exportation ou la distribution des produits diététiques sont

soumises à autorisation. Toutefois pour des raisons de santé publique, le Ministre chargé de

la Santé peut fixer par arrêté des conditions particulières pour ce type de produit, notamment

celles relatives à la composition, au conditionnement, aux dénominations de vente, à

l’étiquetage, à la présentation, à la publicité et aux modalités de contrôle de la fabrication.

Les dispositions du 2e alinéa de l’article 146 s’appliquent aussi aux produits diététiques.

Section 3. Des dispositifs médicaux

Article 151.— On entend par dispositif médical tout instrument, appareil, équipement,

matière, produit d’origine ni humaine, ni animale, ou autre article destiné par le fabricant à

être utilisé chez l’homme à des fins médicales et dont l’action principale voulue n’est pas

obtenue par des moyens pharmacologiques ni par métabolisme mais dont la fonction peut

être assistée par de tels moyens.

Article 152.— Les dispositifs médicaux sont exclusivement vendus en pharmacie à

l’exception du dispositif intra utérin mis à la disposition du public au niveau des formations

Page 334: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 333 —

et établissements sanitaires comme contraceptifs. Cependant, le Ministre chargé de la Santé

peut autoriser la vente des dispositifs médicaux dans des magasins spécialisés.

Les modalités de fabrication, d’information et de vente des dispositifs médicaux feront

l’objet d’un arrêté du Ministre chargé de la Santé.

L’introduction de nouveaux dispositifs médicaux contraceptifs fera l’objet d’un arrêté du

Ministre chargé de la Santé sur avis d’une commission formée par les professionnels de la

santé, du secteur public et du secteur privé.

TITRE II. DE L’EXERCICE DE LA PHARMACIE

Chapitre premier. Des conditions générales

Article 153.— Sont réservés exclusivement aux pharmaciens, la préparation, la

fabrication, la division, le conditionnement, l’importation, l’exportation et la vente en gros

des médicaments et autres produits pharmaceutiques soumis aux mêmes dispositions.

Sauf dispositions prévues aux articles 202 et suivants du présent Code, sont réservées

exclusivement aux pharmaciens, la vente au détail et la délivrance à titre onéreux ou à titre

gratuit des médicaments et autres produits soumis aux mêmes dispositions, ainsi que des

substituts du lait maternel.

Article 154.— Sont réservées aux pharmaciens et aux vétérinaires la préparation et la

vente en gros et au détail des médicaments à usage vétérinaire.

Est réservée aux pharmaciens et aux opticiens la vente des solutions stériles pour lentilles

oculaires de contact.

Chapitre II. De la profession de pharmacien

Article 155.— Nul ne peut exercer la profession de pharmacien s’il ne remplit les

conditions suivantes :

— être titulaire d’un diplôme de pharmacien ;

— être de nationalité malagasy ou ressortissant d’un pays avec lequel une convention de

réciprocité a été signée et ce, dans la limite d’un quota défini chaque année par arrêté du

Ministre chargé de la Santé ;

— parler couramment le Malagasy ;

— être résidant à Madagascar ;

— ne pas avoir d’activité pharmaceutique en dehors du territoire malagasy ;

— être inscrit au Tableau de l’Ordre National des Pharmaciens de Madagascar ;

— offrir toutes les garanties de moralité professionnelle ;

— faire enregistrer son diplôme au greffe du tribunal du lieu où il exerce son activité, et

ce, dans un délai d’un mois à compter de la date de la prise d’activité.

Article 156.— Nul ne peut exercer la pharmacie en dehors d’un établissement

pharmaceutique bénéficiant d’une autorisation administrative d’ouverture.

Page 335: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 334 —

Nul ne peut exercer à titre privé la profession de pharmacien d’officine, de laboratoire

d’analyse de biologie médicale, d’établissement d’importation, d’exportation, de vente en gros

ou de production, s’il n’y est autorisé par l’autorité administrative compétente. Cette

autorisation ne dispense pas le pharmacien des autres formalités liées à l’exercice d’une

activité commerciale ou libérale.

Pour le cas particulier des pharmaciens fonctionnaires, ces derniers peuvent, s’ils

remplissent les conditions requises à l’article 155 susvisé, ouvrir une officine en son nom, sur

autorisation du Ministère de tutelle après avis du Conseil National de l’Ordre des

Pharmaciens et sous réserve qu’ils désignent un pharmacien responsable pour diriger ladite

officine.

Ils sont, dès lors, soumis aux obligations des pharmaciens responsables dont les modalités

sont fixées par voie réglementaire.

Les pharmaciens fonctionnaires peuvent, sur dérogation accordée par arrêté pris par le

Ministre chargé de la Santé, exercer en qualité de Pharmacien responsable, à temps partiel

suivant un cahier de charges bien défini, dans un établissement pharmaceutique à caractère

public ou dans un organisme inter-entreprise à but non lucratif. Néanmoins, l’autorisation

ainsi accordée doit être strictement personnelle et sa validité cesse de plein droit en cas de

remplacement du Pharmacien Responsable initialement concerné, au nom du Pharmacien

responsable successeur.

Article 157.— Le pharmacien responsable exerçant dans un établissement de fabrication

ou de préparation de médicaments et produits assimilés doit répondre aux conditions

énumérées à l’article 155 concernant l’exercice de la profession de pharmacien. Le

pharmacien responsable d’une industrie pharmaceutique doit être en possession d’un

diplôme de pharmacien industriel ou d’un diplôme de pharmacien et d’un minimum de trois

ans d’expérience récente dans un établissement de fabrication de produits pharmaceutiques.

Le pharmacien responsable supervise les activités de toutes les autres personnes qualifiées

de l’établissement et détermine leurs fonctions et attributions.

Le pharmacien responsable applique les principes ainsi que les lignes directrices liés aux

bonnes pratiques de fabrication, de distribution, de promotion et de publicité reconnues par

l’État Malagasy.

Article 158.— Tout pharmacien inscrit au Tableau de l’Ordre est soumis aux

prescriptions de la Déontologie du pharmacien, et notamment aux dispositions des textes en

vigueur en matière de Déontologie des Pharmaciens.

Tout pharmacien doit exercer personnellement sa profession. L’utilisation d’un

pseudonyme pour l’exercice de la profession de pharmacien est interdite. Son diplôme ne

peut être enregistré que pour un établissement.

Un établissement pharmaceutique ne peut rester ouvert en l’absence du Pharmacien que

si celui-ci se fait régulièrement remplacer. Les modalités de remplacement ainsi que les

procédures à suivre qui nécessitent l’avis du Conseil de l’Ordre, sont fixées par Arrêté du

Ministre chargé de la Santé.

Article 159.— Tout pharmacien désirant cesser son activité doit en informer le Ministre

chargé de la Santé et le Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens.

Page 336: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 335 —

Tout pharmacien ayant interrompu son activité et qui désire la reprendre est soumis aux

conditions exigées à l’article 155 du présent Code.

Article 160.— Le pharmacien assistant exerce des fonctions sous la responsabilité du

pharmacien titulaire ou du pharmacien responsable de l’établissement pharmaceutique.

Le pharmacien assistant, pour exercer la profession de pharmacien est soumis aux

conditions exigées à l’article 155 du présent Code.

Article 161.— Tout pharmacien est autorisé à se faire aider son officine par une ou

plusieurs personnes qualifiées dont la formation incombe entièrement à la responsabilité du

pharmacien titulaire.

Elles assument leurs tâches sous la responsabilité et le contrôle effectif d’un pharmacien,

leur responsabilité pénale demeurant engagée.

Article 162.— Aucun pharmacien ne peut se faire assister d’un médecin au sein de son

officine, à quelque titre que ce soit.

Article 163.— Est interdite toute convention d’après laquelle un pharmacien assure à un

médecin praticien, à un chirurgien-dentiste ou à une sage-femme, un bénéfice d’une nature

quelconque sur la vente des produits pharmaceutiques, médicamenteux ou hygiéniques que

ceux-ci peuvent prescrire.

Est interdite la création de sociétés ou d’associations, dont le but ou l’activité consiste à

rechercher, encourager, faciliter, distribuer ou encaisser, pour elles-mêmes ou pour le compte

de tiers, des intérêts ou ristournes en rapport avec la prescription ou la délivrance des

médicaments et objets de pharmacie.

Il est interdit aux pharmaciens ou à leurs préposés de solliciter des commandes auprès du

public. Toute commande livrée en dehors de l’officine ne peut être remise qu’en paquet

scellé portant le nom et l’adresse du client. Il est, en outre, interdit aux pharmaciens de passer

des commandes en dehors des grossistes agréés.

Chapitre III. De l’exercice illégal des fonctions de pharmacien

Article 164.— Exerce illégalement les fonctions de pharmacien :

— toute personne qui vend et dispense au public un médicament, ou qui prépare un

médicament sans être titulaire du diplôme de pharmacien reconnu par l’État Malagasy et par

l’Ordre de Pharmaciens, sauf dérogations expressément spécifiées par le présent Code ;

— toute personne non pharmacien ou toute société n’appartenant pas à des pharmaciens

et qui s’adonne à l’importation ou à la distribution en gros de médicaments, sauf dérogations

prévues aux dispositions du présent Code ;

— toute personne ou toute société qui exploite une pharmacie sans être titulaire d’un

arrêté délivré par le Ministère chargé de la Santé conformément aux dispositions du présent

Code ;

— toute personne ou toute société qui, non munie d’une autorisation délivrée par le

Ministre chargé de la Santé, fabrique des médicaments.

Page 337: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 336 —

TITRE III. DES ÉTABLISSEMENTS PHARMACEUTIQUES

Chapitre premier. Des dispositions communes

Article 165.— L’ouverture et l’exploitation de tout établissement de fabrication,

d’importation destinée à la vente en gros, de dispensation de médicaments et produits

assimilés, sont subordonnées à une autorisation délivrée par le Ministre chargé de la Santé

après avis de l’Ordre des Pharmaciens.

L’autorisation est délivrée au nom du propriétaire de l’établissement pharmaceutique s’il

s’agit d’une personne physique ou au nom de la société propriétaire. Elle est incessible.

Le cumul des activités pharmaceutiques : fabrication, importation-vente en gros,

exportation, dispensation de médicaments et de produits assimilés est interdit, sauf

dérogations accordées par arrêté du Ministre chargé de la Santé, après consultation du

Conseil de l’Ordre National des Pharmaciens.

En cas de litige, les dispositions du code de la Santé et du Code de Déontologie priment

sur celles du Code Commercial.

Article 166.— Un arrêté du Ministre chargé de la Santé détermine les conditions requises,

la composition du dossier ainsi que les critères spécifiques à chaque type d’établissement

pharmaceutique et leur lieu d’implantation sur le Territoire National.

La demande d’autorisation est adressée au Ministre chargé de la Santé par le pharmacien

responsable déjà désigné. Elle donne lieu à la perception d’un droit fixe dont le montant est

déterminé par arrêté conjoint du Ministre chargé de la Santé et du Ministre chargé des

Finances et du Budget.

Article 167.— L’autorisation est accordée par le Ministre chargé de la Santé après avis du

Conseil de l’Ordre National des Pharmaciens. Elle est accordée ou refusée dans un délai de

trois (3) mois à compter du dépôt de la demande d’autorisation. Le refus d’autorisation doit

être motivé.

L’autorisation d’ouverture et d’exploitation d’un établissement pharmaceutique est

octroyée pour une durée indéterminée.

Article 168.— L’ouverture et l’exploitation de tout établissement pharmaceutique de

fabrication, de distribution en gros et d’importation sont soumises à l’exercice effectif d’un

Pharmacien Responsable.

Article 169.— Tout établissement pharmaceutique de fabrication, de distribution, de

dispensation et de vente est soumis à inspection par les pharmaciens-inspecteurs relevant de

l’Agence du Médicament de Madagascar.

Toutefois, les médecins inspecteurs, chefs de santé de districts peuvent inspecter les

dépôts de médicaments relevant de leur circonscription.

Article 170.— Dans l’intérêt de la santé publique, le Ministre chargé de la Santé peut, sur

rapport et avis d’un pharmacien-inspecteur et après avis du Conseil de l’Ordre National des

Pharmaciens, ordonner à tout moment la fermeture temporaire pour une période de trois

(03) mois au maximum d’un établissement pharmaceutique si les conditions liées à l’octroi ne

sont plus réunies.

Page 338: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 337 —

Après une mise en demeure écrite restée sans effet à l’échéance du délai accordé, le

Ministre chargé de la Santé peut, sur proposition de l’Agence du Médicament de Madagascar

ou de la Direction de la Gestion des Intrants de Santé, de Laboratoire et de la Médecine

Traditionnelle (DGILMT), révoquer l’autorisation.

La décision de retrait temporaire ou définitif de l’autorisation d’ouverture et

d’exploitation d’un établissement pharmaceutique doit être motivée.

Article 171.— Toute modification substantielle des conditions initiales des installations,

des équipements ou de l’organisation de l’établissement doit, par ailleurs, être autorisée par le

Ministre chargé de la Santé, selon la même procédure que celle prévue à l’article 163 du

présent Code.

Article 172.— La cessation des activités d’un établissement pharmaceutique ayant fait

l’objet d’une autorisation doit être notifiée au Ministre chargé de la Santé au moins trois (3)

mois avant la date prévue pour ladite cessation et doit être portée à la connaissance du public

par voie d’insertion au Journal Officiel de la République.

Article 173.— Tout établissement de fabrication, de vente en gros et de dispensation de

médicaments a l’obligation de posséder un exemplaire de la législation pharmaceutique en

vigueur et un exemplaire du Code de déontologie des pharmaciens.

Chapitre II. Des pharmacies d’officine

Article 174.— On entend par pharmacie d’officine, l’établissement affecté exclusivement

à la dispensation au public des médicaments et autres biens de santé, ainsi qu’à l’exécution

des préparations magistrales et officinales sous la responsabilité d’un pharmacien.

Article 175.— L’exploitation d’une pharmacie d’officine est incompatible avec l’exercice

d’une autre profession, notamment avec celle de médecin, dentiste, vétérinaire, sage-femme

et infirmier (e).

Les pharmaciens dispensent dans leur officine des drogues simples, des produits

pharmaceutiques et des préparations décrites par les Pharmacopées.

Les pharmaciens ne peuvent faire dans leur officine que le commerce de produits

pharmaceutiques et parapharmaceutiques définis par le présent Code.

Article 176.— Le pharmacien doit être propriétaire de l’officine dont il est titulaire.

Les pharmaciens sont autorisés à constituer entre eux une société en vue de l’exploitation

d’une officine. Chaque pharmacien membre de la Société est tenu à l’exercice personnel et

est entièrement responsable des règles déontologiques applicables à la profession.

Afin d’encourager la libéralisation des opérations concernant la vente des médicaments et

autres biens de santé, les principes suivants régissent les différentes formes que peuvent

revêtir les établissements exerçant une activité pharmaceutique :

Les pharmaciens peuvent s’associer selon les dispositions réglementant les sociétés

commerciales, tout en respectant les spécificités de la profession de pharmacien.

Ces principes doivent faire l’objet de texte d’application pris par le Ministre chargé de la

Santé.

Page 339: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 338 —

Les gérants et les associés sont responsables à l’égard des tiers. Aucune limite n’est

apportée à la responsabilité délictueuse et quasi-délictueuse des gérants, qui sont

obligatoirement garantis contre les risques professionnels.

Tout pharmacien dont le diplôme est déjà enregistré pour l’exploitation d’un

établissement pharmaceutique ou d’une officine ou à quelque titre que ce soit peut s’associer

à un ou plusieurs pharmaciens dont le ou les diplômes ne sont pas encore enregistrées en vue

d’une création d’une officine. L’officine nouvellement créée doit être gérée par le pharmacien

associé dont le diplôme n’est pas encore enregistré. Un pharmacien ne peut pas être associé à

plus de deux officines.

Le capital social doit appartenir dans sa totalité à un ou plusieurs pharmaciens qui ont

rempli les conditions d’exercice de la pharmacie sur le territoire national.

Article 177.— Les pharmaciens sont également autorisés à constituer individuellement ou

entre eux une société à responsabilité limitée en vue de l’exploitation de deux officines au

plus, à la condition de se conformer aux alinéas 6, 7 et 8 de l’article 176, quel que soit le

nombre de pharmaciens associés et que la gérance de l’officine soit assurée par un ou

plusieurs des pharmaciens associés.

Article 178.— Tout pharmacien associé dont les diplômes sont enregistrés pour

l’exploitation d’une officine ne peut exercer aucune activité pharmaceutique sauf dérogations

accordées par le Ministre chargé de la Santé.

Est nulle et de nul effet, toute stipulation destinée à établir que la propriété ou la

copropriété d’une officine appartient à une personne non diplômée.

Les officines sont soumises aux conditions fixées par le Chapitre premier, Titre III du

Livre III du présent Code.

Article 179.— L’autorisation d’exploitation est subordonnée, sans préjudice des

conditions fixées pour l’exercice de la pharmacie, aux critères définis par le Ministre chargé

de la Santé en application de la Politique Pharmaceutique Nationale.

Article 180.— Toute ouverture d’une nouvelle officine, tout transfert d’une officine d’un

lieu à un autre, et toute cession ou changement de propriété sont subordonnés à l’octroi

d’une nouvelle autorisation délivrée par arrêté du Ministre chargé de la santé, après avis du

Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens.

Article 181.-Le Pharmacien titulaire d’une officine doit exercer personnellement sa

profession. En toutes circonstances, les médicaments doivent être préparés et délivrés par un

pharmacien ou sous la surveillance directe d’un pharmacien.

Toutefois, le titulaire peut engager un pharmacien assistant. Ce dernier doit être enregistré

à l’Agence du Médicament de Madagascar, après avoir reçu l’aval du Conseil de l’Ordre et est

nommé par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Les pharmaciens ont l’obligation d’actualiser leurs connaissances par des formations

postuniversitaires.

En application des dispositions de l’article 75 du présent Code, le Pharmacien d’officine a

le devoir de satisfaire aux obligations imposées par le service de garde et d’urgence. Tout

pharmacien qui refuse de s’y soumettre est puni des peines prévues à l’article 331 du présent

Code.

Page 340: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 339 —

Article 182.— En tant que de besoin, un arrêté du Ministre chargé de la Santé détermine

le nombre d’officines autorisées à s’installer dans une localité donnée au prorata du nombre

d’habitants ainsi que d’une distance minima à respecter entre les officines.

Chapitre III. Des pharmacies à usage interne

Article 183.— On entend par pharmacies à usage interne, les pharmacies des hôpitaux et

autres établissements de santé, publics ou privés, dont l’activité est limitée à la délivrance de

médicaments et consommables médicaux :

— aux malades hospitalisés dans les hôpitaux ;

— aux malades en consultation dans les dispensaires et autres établissements de santé.

Elles sont soumises aux conditions fixées par le Chapitre premier, Titre III du Livre III

du présent Code. Des textes réglementaires définissent, en tant que de besoin, les règles

régissant les pharmacies à usage interne.

Chapitre IV. Des établissements d’importation, de vente en gros et de répartition

Article 184.— On entend par établissement pharmaceutique de gros tout établissement

agréé, public ou privé se livrant à l’achat extérieur ou local en vue de la vente en l’état aux

personnes ou structures habilitées à dispenser des médicaments, produits pharmaceutiques et

dispositifs médicaux. Cet établissement pharmaceutique de gros doit importer les produits

non disponibles auprès des fabricants locaux.

Les établissements pharmaceutiques de gros sont soumis à l’obligation de garantir en

permanence un assortiment de médicaments essentiels capables de répondre aux exigences

des établissements de dispensation, d’avoir en permanence un stock minimum et d’assurer la

distribution des produits dans les plus brefs délais. Un établissement pharmaceutique de gros

doit être en mesure d’assurer directement des importations et/ou de détenir un assortiment

minimal de 2 000 références, couvrant toutes les classes thérapeutiques. Les critères exigibles

lors de la demande d’ouverture sont précisés par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Les locaux réservés aux activités d’un établissement de gros en produits pharmaceutiques

doivent être d’accès facile et réservés exclusivement à cet effet.

Le bâtiment doit comporter l’enseigne mentionnant le nom de l’établissement et son

adresse complète.

Le bâtiment destiné aux activités citées in supra doit avoir une superficie totale de trois

cent mètres carrés au minimum.

Il doit comprendre obligatoirement :

— une partie destinée à l’administration de l’établissement ;

— une salle de réception de médicament ;

— une salle de distribution ;

— des magasins de stockage suffisamment ventilés et munis de thermomètre mural ;

— un cabinet de toilettes ;

Page 341: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 340 —

— des équipements de manutention, de stockage et de conservation : palettes, étagères,

réfrigérateurs… ;

— les locaux abritant la salle de distribution et les magasins de stockage doivent être

aménagés, agencés et entretenus en fonction des opérations qui y sont effectuées.

Toute forme de publicité ou de concurrence déloyale est interdite à tout établissement de

gros de produits pharmaceutiques. Plus particulièrement, un établissement de gros de

produits pharmaceutiques ne peut pratiquer aucune forme de vente assimilable à la pratique

des vendeurs ambulants.

Les établissements pharmaceutiques de gros ne sont pas autorisés à vendre directement,

ni au public, ni aux médecins, ni à d’autres professionnels de la Santé, autres que les

établissements de distributions agréées, des produits pharmaceutiques qu’ils vendent en gros.

Toutefois, ils sont autorisés à soumissionner aux appels d’offre émanent des institutions à

caractère public de l’État Malagasy, ainsi qu’aux Formations Sanitaires privées à but non

lucratif relevant réglementairement d’un Service de District de la Santé, conformément aux

dispositions de l’article 189 ci-dessous.

Tout établissement pharmaceutique de gros est soumis aux conditions fixées par le

Chapitre premier, Titre III du Livre III du présent Code.

L’activité d’importation et de distribution en gros est réservée exclusivement aux

grossistes importateurs-répartiteurs.

Article 185.— Tout établissement pharmaceutique de gros doit être placé sous la

responsabilité d’un Pharmacien Responsable.

Article 186.— Tout Pharmacien Responsable est responsable personnellement au regard

des lois et règlements en vigueur en matière d’exercice de la profession de pharmacien, sans

préjudice, le cas échéant, de la responsabilité solidaire de la société. Il est assujetti à toutes les

obligations imposées au pharmacien d’officine, notamment en ce qui concerne les

inspections effectuées par les inspecteurs en pharmacie.

Article 187.— Tout établissement de préparation ou de vente en gros, soit de drogues

simples ou de produits chimiques destinés à la pharmacie et conditionnés en vue de la vente

au poids

médical, soit de compositions ou préparation pharmaceutiques, doit être la propriété d’un

Pharmacien diplômé d’État ou celle d’une société à la Gérance ou à la Direction Générale de

laquelle participe un pharmacien Responsable et dans ce cas, le capital de la société doit

appartenir en majorité à un ou plusieurs pharmaciens dans la proportion de 51 % pour les

pharmaciens et de 49 % pour toute personne non membre de la profession. Il peut être, en

tout ou partie, concédé en location gérance à une société dans les mêmes conditions que ci-

dessus. Les modalités d’exercice de la location gérance sont déterminées par voie

réglementaire. Les Gérants et les associés sont responsables à l’égard des tiers. Aucune limite

n’est apportée à la responsabilité délictueuse ou quasi-délictueuse des Gérants.

Article 188.— Si, une décision collective prise au niveau de la direction générale ou de la

gérance porte atteinte aux règles d’éthique de la profession de pharmacien et/ou à la

Politique Pharmaceutique Nationale, le Pharmacien Responsable conserve la pleine et entière

prérogative qu’il tient de sa qualité et des règles de déontologie auxquelles il doit se

Page 342: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 341 —

soumettre, de s’opposer à ladite décision, d’en suspendre la mise en œuvre et de saisir le

Ministère chargé de la Santé quant au sort à réserver à la décision visée.

Article 189.— Les établissements grossistes importateurs peuvent vendre directement aux

Formations Sanitaires publiques, ou privées à but non lucratif relevant réglementairement du

Service de District de la Santé du lieu d’implantation, des médicaments génériques sous

réserve qu’ils obtiennent une autorisation du Ministre chargé de la Santé et qu’ils soient gérés

par un Pharmacien Responsable ou que plusieurs pharmaciens en soient copropriétaires.

Article 190.— Les principes énumérés aux articles 185 à 189 sont fixés par Décrets pris

en Conseil du Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 191.— L’importation de médicaments ou produits assimilés ne répondant pas aux

spécifications dégradés, frauduleux, périmés, faussement étiquetés, sans Autorisation de Mise

sur le Marché ou dont l’Autorisation de Mise sur le Marché a été retirée ou n’a pas été

renouvelée dans les autres pays ou à Madagascar est interdite.

Article 192.— Un Arrêté du Ministre chargé de la Santé déterminera le nombre des

établissements d’importation, de vente en gros et de répartition au prorata de la totalité des

importations annuelles de médicaments réalisées dans le Secteur Privé. La délivrance de

l’autorisation d’exploitation de tels établissements ne peut être effectuée qu’en conformité

avec ledit Arrêté.

Chapitre V. Des établissements de fabrication et d’exploitation de produits pharmaceutiques

Article 193.— On entend par établissement de fabrication ou de production

pharmaceutique tout établissement se livrant en vue de la vente ou de l’exportation, à la

préparation totale ou partielle des médicaments et produits assimilés.

Est considérée comme préparation totale, la fabrication du produit depuis l’achat des

matières premières jusqu’au produit fini.

Sont considérées comme préparations partielles, avec les obligations de contrôle y

afférentes, la division, le chargement de conditionnement ou de présentation de ces

médicaments, produits et objets.

Tout établissement de fabrication ou de production pharmaceutique peut être la

propriété :

1°- soit d’une personne physique ayant la qualité de pharmacien ;

2°- soit d’une société regroupant des personnes physiques non pharmaciens et des

pharmaciens, régie par les dispositions réglementant les sociétés civiles ;

3°- soit d’une société anonyme, à condition :

— que les actions revêtent la forme nominative ;

— que la moitié des membres du Conseil d’Administration soit des pharmaciens.

Tout établissement de fabrication ou de production pharmaceutique est placé sous la

responsabilité d’un pharmacien responsable.

Le pharmacien responsable doit faire partie du Conseil d’Administration de la Société

concernée.

Page 343: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 342 —

Article 194.— Le pharmacien responsable exerçant dans un établissement de fabrication

ou de production pharmaceutique doit répondre aux conditions énumérées aux articles 155

et 156 du présent Code concernant l’exercice de la profession de pharmacien.

Le pharmacien responsable doit être assisté par des pharmaciens assistants dont le

nombre est proportionnel à l’effectif du personnel de l’établissement.

Les établissements de fabrication ou de production doivent fabriquer et vendre leurs

produits exclusivement au profit des établissements de distribution et de vente en gros.

Toutefois, ils peuvent exporter leurs produits.

Les établissements de fabrication ou de production sont soumis aux dispositions

générales figurant aux articles 165 et suivants régissant les établissements pharmaceutiques.

Article 195.— Toute demande d’ouverture d’un établissement de fabrication ou de

production ou d’une succursale doit comporter un dossier prouvant que le fabricant

respectera les bonnes pratiques de fabrication reconnues par l’État Malagasy.

L’autorisation d’exploitation d’un établissement de fabrication est délivrée par le Ministre

chargé de la Santé après avis conjoints du Ministère chargé du Commerce, du Ministre

chargé de l’Environnement et du Ministère chargé de l’Eau.

L’autorisation d’ouverture indique les formes pharmaceutiques pour lesquelles elle est

valable et le lieu de fabrication.

Article 196.— Le détenteur de l’autorisation d’ouvrir un établissement de fabrication ou

de production pharmaceutique doit prendre toutes les dispositions utiles pour que le

pharmacien responsable puisse assumer pleinement sa mission et le faire assister au besoin,

sous sa responsabilité, par d’autres personnes qualifiées, dans les conditions fixées dans la

réglementation.

Par personne qualifiée, on entend un pharmacien, un chimiste ou toute autre personne

dont les diplômes scientifiques et l’expérience sont reconnus par l’État malagasy.

Le pharmacien responsable est tenu d’informer le Ministre chargé de la Santé de tout

désaccord qui l’opposerait à l’un des différents organes de l’établissement quant à

l’application des règles édictées dans l’intérêt de la santé publique.

TITRE IV. DES ORGANES DE CONTRÔLE

Chapitre premier. De l’Agence du Médicament de Madagascar

Section 1. Des dispositions générales

Article 197.— En application des articles 4 et 5 du présent Code dans le cadre de la mise

en place de la Politique Pharmaceutique Nationale, le Ministre chargé de la Santé confère à

un Établissement Public à caractère Administratif doté de la personnalité morale et de

l’autonomie financière sous la dénomination « Agence du Médicament de Madagascar », une

mission de mise en œuvre et de contrôle de la qualité des médicaments à Madagascar, afin de

garantir l’indépendance, la compétence scientifique et l’efficacité administrative de études et

des contrôles relatifs à la fabrication, aux essais, aux propriétés thérapeutiques et à l’usage des

Page 344: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 343 —

médicaments, en vue d’assurer au meilleur coût, la santé et la sécurité de la population et de

contribuer au développement des activités industrielles et de la recherche pharmaceutique.

Article 198.— L’Agence du Médicament de Madagascar est notamment chargée :

1°- de l’enregistrement des médicaments à usage humain et autres produits

pharmaceutiques en vue de leur octroyer une Autorisation de Mise sur le Marché à

Madagascar ;

2°- de l’inspection des établissements pharmaceutiques sur tout le Territoire National ;

3°- de participer à l’application des lois et règlements relatifs :

— aux essais cliniques, à la fabrication, à l’importation, à la mise sur le marché des

médicaments et autres produits pharmaceutiques ;

— aux substances stupéfiantes, psychotropes et autres substances vénéneuses utilisées en

médecine, ainsi qu’aux réactifs de laboratoire ;

4°- de recueillir et d’évaluer les informations sur les effets inattendus ou toxiques des

médicaments ainsi que sur les usages abusifs des substances psycho-actives et de prendre en

la matière toute mesure utile pour préserver la santé publique ;

5°- de proposer toute mesure contribuant au développement de la recherche et des

activités industrielles dans le domaine du médicament, et de promouvoir ainsi les rapports de

complémentarité entre les secteurs publics et privés ;

6°- de coordonner et d’effectuer le contrôle de la qualité des médicaments par

l’intermédiaire du laboratoire national de contrôle de qualité ;

7°- de participer à la demande du Ministre chargé de la Santé, à l’élaboration ou à la

modification des textes législatifs ou réglementaires régissant ses activités ;

8°- de proposer au Ministre chargé de la Santé toute mesure intéressant les domaines

relevant de sa compétence. L’organisation administrative et financière de l’agence du

Médicament de Madagascar est fixée par décret pris en conseil de Gouvernement sur

proposition, du Ministre chargé de la Santé.

Section 2. De l’inspection

Article 199.— Les fonctions de contrôle et d’inspection des établissements

pharmaceutiques au niveau national, dévolues par le présent Code à l’Agence du Médicament

de Madagascar sont exercées par des pharmaciens-inspecteurs ayant obligatoirement le

diplôme d’État de pharmacien et ayant suivi une formation sur les techniques d’inspection.

Les pharmaciens-inspecteurs sont chargés :

1°- de contrôler dans les établissements pharmaceutiques et en quelques mains qu’ils

soient l’exécution de toutes les prescriptions de lois et règlements qui se rapportent à

l’exercice de la pharmacie. À ce titre, ils sont investis de la fonction de police judiciaire,

conformément à l’article 128 du Code de Procédure Pénale et sont habilités à relever les

infractions sur tout le Territoire National, à rassembler les preuves, à identifier les auteurs et

à procéder à des saisies. Ils sont tenus au secret professionnel. Ils doivent être assermentées

avant d’être admis à exercer leurs fonctions ;

Page 345: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 344 —

2°- de répondre à toute demande d’expertise technique ou d’enquête formulée par le

Ministre chargé de la Santé ou par le Président du Conseil National de l’Ordre des

Pharmaciens ou sur requête d’une instance judiciaire.

L’Agence du Médicament de Madagascar peut recourir aux interventions des agents

habilités par une loi spéciale à constater et à poursuivre des infractions se rapportant à

l’application de la législation et de la réglementation relative à la commercialisation des

médicaments. Ces agents relèvent du Ministère chargé du Commerce et participent à la

police judiciaire conformément à l’article 128 du Code de Procédure Pénale.

Article 200.— Les dépenses de toute nature résultant du fonctionnement de l’inspection

des établissements pharmaceutiques sont à la charge de l’Agence du Médicament de

Madagascar.

La qualité des pharmaciens-inspecteurs, leur mission, le fonctionnement et l’organisation

de leur service sont définis par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Chapitre II. Du Laboratoire national du contrôle de qualité des médicaments

Article 201.— Le Laboratoire national du Contrôle de Qualité des Médicaments, rattaché

à l’Agence du Médicament de Madagascar est chargé du contrôle de la qualité des

médicaments à usage humain et de tous produits pharmaceutiques agréés et munis sur le

marché ou dispensés à Madagascar et de la conformité de ceux-ci avec les spécifications

présentées lors de la demande de mise sur le marché ou de l’autorisation d’importation.

L’Agence du Médicament de Madagascar peut recourir, le cas échéant, à la prestation

d’autres laboratoires agréés avec lesquels elle conclut des conventions.

Les modalités de fonctionnement du Laboratoire National de Contrôle de Qualité des

Médicaments sont déterminées par Arrêté du Ministre chargé de la Santé.

TITRE V. DES DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES AUX DÉPÔTS DE

MÉDICAMENTS, AUX PHARMACIES À GESTION PARTICULIÈRE ET AUX

PLANTES MÉDICINALES

Chapitre premier. Des dépôts de médicaments

Des règles générales

Article 202.— Le dépôt de médicaments est un centre de vente et de distribution au

public de produits pharmaceutiques essentiels, de première nécessité, dont l’autorisation

d’exploitation est délivrée à titre palliatif par le Ministre chargé de la Santé, à des non

pharmaciens, dans les localités où il n’y a pas de pharmacien ayant une officine ouverte au

public.

Les médicaments autorisés à être dispensés par ces dépôts sont inscrits sur une liste

établie par le Ministère chargé de la Santé et les dépositaires doivent remplir les conditions

requises fixées par arrêté du Ministère chargé de la Santé. Plus particulièrement, ils doivent

Page 346: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 345 —

être de nationalité malagasy, sans préjudice des dispositions contenues dans les accords

internationaux ou prises en exécution de ces accords.

Le dépôt de médicaments est soumis aux règles de bonne dispensation.

L’ouverture régulière d’une officine de pharmacie interdit toute autorisation ultérieure

d’ouverture de dépôt de médicaments sis dans un rayon de dix kilomètres (10 km) et rend

caduque toute autorisation antérieure délivrée au profit d’un dépôt de médicaments déjà

fonctionnel après un délai de trois mois de l’ouverture effective de l’officine pharmaceutique.

Conformément aux dispositions ci-dessus et par effet rétroactif de la loi et dès la date de

la signature de la présente loi, tout dépôt de médicaments légalement ou non ouvert dans un

rayon de moins de dix kilomètres (10 km) d’une officine existante doit cesser toute activité et

fermer le dépôt concerné.

Dans ce cas, un arrêté du Ministre chargé de la Santé fixe l’abrogation de l’autorisation

d’ouverture du dépôt de médicaments concernés sur saisine du Pharmacien en connaissance

de cause. Cet arrêté doit s’appliquer, dès sa publication, et n’est susceptible d’aucun recours

devant les Tribunaux et le Conseil d’État de la Cour Suprême.

Sans préjudice des sanctions prévues par le Code Pénal en matière d’exercice illégal d’une

profession, toute transgression expose le contrevenant aux peines prévues aux termes des

dispositions de l’article 332 du présent Code.

Article 203.— En cas de violation des règles d’exercice de dépositaire de médicaments

nécessitant la fermeture du dépôt litigieux, le Médecin Inspecteur du District, après l’avoir

constatée, dresse un procès-verbal dont l’original est transmis aux autorités administratives

compétentes aux fins d’ordonner la fermeture des dépôts de médicaments à autorisation

caduque. Une copie dudit procès-verbal doit être notifiée par voie administrative aux

dépositaires concernés qui en accusent réception.

L’autorité administrative ne fait qu’ordonner la fermeture de l’Établissement, l’exécution

matérielle de l’acte revient à une autre autorité, soit à l’Huissier de justice, soit à l’Agent

Verbalisateur. Toutefois, la fermeture d’un dépôt de médicaments ne peut en aucune façon

donner ouverture à action en dédommagement contre l’État.

Article 204.— Il est formellement interdit au dépositaire de médicaments d’utiliser les

enseignes exclusivement réservés aux pharmacies d’officine, en particulier la mention «

pharmacie », la croix verte emblématique d’une pharmacie et le caducée.

Chapitre II. Des pharmacies à gestion particulière

Article 205.— On entend par Pharmacie de Gros de District (PHAGDIS), le magasin de

stockage des produits pharmaceutiques sis au Chef-lieu de chaque district sanitaire. Il est

destiné à approvisionner en médicaments, consommables médicaux, moyens contraceptifs et

en réactifs de laboratoire les Centres Hospitaliers de Référence de District et les Centres de

Santé de Base publics et privés à but non lucratif relevant du district.

Article 206.— On entend par Pharmacie à Gestion Communautaire (PHAGECOM), le

local de stockage et de délivrance sur ordonnance, des produits pharmaceutiques aux

patients. Elle est sise dans la Formation Sanitaire d’attache et est gérée en co-gestion par des

représentants désignés des communautés et les responsables du Centre de Santé.

Page 347: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 346 —

Des textes réglementaires définissent les règles régissant la PHAGDIS et la

PHAGECOM.

Chapitre III. Des plantes médicinales et autres produits d’origine naturelle

Article 207.— On entend par phytothérapie, le traitement des maladies par les plantes

médicinales.

Article 208.— On entend par plante médicinale, toute plante dont le tout ou partie

délivrée en l’état, présente une vertu curative ou préventive scientifiquement prouvée ou

reconnue traditionnellement.

Article 209.— On entend par tisane les plantes et mélanges de plantes desséchées,

préparés à l’avance pour l’utilisation sous forme d’infusion ou de décoction.

Les tisanes sont soumises aux dispositions sur les médicaments à base de plantes.

On entend par produit d’origine naturelle, tout produit naturel autre que les plantes

médicinales, tels que les minéraux ou produits animaux, utilisés soit en l’état, soit sous forme

de préparation, pour un usage thérapeutique.

Article 210.— La Commission de la pharmacopée traditionnelle malagasy, placée sous

l’autorité du Ministre chargé de la Santé, a pour tâche de réunir les informations concernant

les plantes et autres produits naturels susceptibles d’être utilisés en thérapeutique et de

codifier leur emploi et la préparation des médicaments galéniques qui en sont faits. Un décret

fixera sa composition, la nomination de ses membres et son mode de fonctionnement.

La vente des plantes médicinales, la fabrication et la vente des médicaments à base de

plantes sont fixées par décret pris en Conseil du Gouvernement sur proposition du Ministre

chargé de la Santé.

LIVRE IV. DE LA LUTTE CONTRE LES MALADIES CONTAGIEUSES ET LES AUTRES

FLÉAUX SOCIAUX

TITRE PREMIER. DE LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE

Article 211.-Dans le cadre du Programme National de Lutte contre la Tuberculose et

celui du Programme Élargi de Vaccination, la vaccination par le vaccin antituberculeux BCG

est obligatoire à la naissance.

Article 212.— Un décret pris sur le rapport du Ministre chargé de la Santé, après avis

conforme de la Commission Nationale d’Hygiène et de Santé, détermine les modalités

d’application concernant la technique de vaccination par le vaccin antituberculeux BCG, les

contre-indications éventuelles, la pratique de revaccination, le contrôle des réactions

tuberculiniques avant ou après la vaccination.

Article 213.— Les comités antituberculeux d’entraide et d’éducation sanitaire assurent,

sous le contrôle des médecins phtisiologues pour les Régions et les Communes :

a. l’aide aux tuberculeux ou à leurs familles ;

Page 348: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 347 —

b. l’organisation de la propagande sanitaire antituberculeuse. Le renforcement et la mise

en œuvre effective du fonctionnement de ces comités feront l’objet d’un Arrêté du Ministre

chargé de la Santé.

Article 214.— Dans le cadre de la poursuite du Programme National de lutte contre le

Tuberculose, cette dernière continue à figurer dans la liste des maladies à déclaration

obligatoire sur tout le territoire de la République de Madagascar.

Article 215.— La vente des médicaments antituberculeux peut être déclarée interdite à

l’officine et aux dépôts de médicaments, sur proposition du Ministre chargé de la Santé afin

d’éviter l’émergence de souches résistantes aux antituberculeux par utilisation abusive et non

contrôlée de ces produits.

Pour éviter toute rupture de stock des médicaments anti-tuberculeux,

l’approvisionnement du niveau central doit être régulier.

Tout malade reconnut tuberculeux doit suivre le traitement selon les schémas et règles

recommandés par le Programme National de Lutte contre la Tuberculose. En cas de

changement de sa résidence, le malade doit prévenir son Médecin traitant qui fait suivre le

dossier du patient concerné au nouveau médecin traitant par l’intermédiaire du Médecin-

Inspecteur du District.

Tout malade reconnu tuberculeux qui refuse de se soumettre aux mesures d’hygiène ou

aux examens bactériologiques, de contrôle que nécessite son état, ou qui n’a pas terminé le

traitement prescrit, doit faire l’objet d’une mesure déterminée par le médecin traitant et/ou

par l’autorité administrative locale.

TITRE II. DE LA LUTTE CONTRE LA LÈPRE

Article 216.— Tout malade reconnu lépreux doit faire l’objet d’un enregistrement officiel

au niveau de la Formation Sanitaire publique compétente de sa résidence, sur un registre

établi à ces fins.

Article 217.— Tout malade faisant l’objet d’un traitement doit en cas de transfert de

résidence, prévenir son médecin traitant qui fait vivre le dossier du malade au nouveau

médecin traitant par l’intermédiaire du Médecin-Inspecteur du District ou au Service Lèpre

du Ministère chargé de la Santé à Antananarivo.

Tout malade reconnu lépreux doit suivre un traitement selon le schéma et les règles

recommandés par le Programme National Lèpre. En cas de refus, les autorités sanitaires et

administratives locales peuvent être saisies pour un traitement obligatoire.

L’hospitalisation n’est pas obligatoire, sauf pour les cas compliqués mentionnés dans les

directives techniques du Ministère chargé de la Santé. Les malades en traitement gardent

leurs droits au travail et leurs privilèges professionnels.

Article 218.— Des Associations ou Comités de Lutte contre la Lèpre et d’éducation

sanitaire, dont la création peut être provoquée par le Ministre chargé de la Santé, assurent

l’aide aux lépreux et à leurs familles, ainsi que l’organisation des propagandes sanitaires

favorables à la lutte anti lépreuse. L’organisation et le fonctionnement de ces Associations ou

Comités sont fixés par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Page 349: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 348 —

Article 219.— Après avis de la Commission Nationale d’Hygiène et de Santé, et sur

proposition du Ministre chargé de la Santé, la lèpre peut être qualifiée, par arrêté, maladie à

déclaration obligatoire sur tout ou partie du territoire de la République Malagasy.

TITRE III. DE LA LUTTE CONTRE LE PALUDISME

Article 220.— La prise en charge des cas de paludisme à domicile est soutenue par un

système de dispensateurs avec le Fonds pour l’Approvisionnement Non Stop des

Médicaments ou FANOME et un système de distribution à base communautaire.

On entend par un système de dispensateurs avec le Fonds pour l’Approvisionnement

Non Stop des Médicaments, celui qui prévoit une participation du malade aux coûts des

médicaments dans les formations sanitaires où le malade est traité.

La prise en charge à base communautaire prévoit aussi une participation des populations

aux coûts des médicaments mais, ces derniers sont vendus directement jusqu’au niveau le

plus bas des localités même en l’absence des Formations Sanitaires.

Un décret pris en Conseil du Gouvernement fixe les modalités d’organisation de la prise

en charge des cas de paludisme à base communautaire ainsi que la création d’un Comité

Technique Consultatif de Suivi et d’Orientation du circuit de distribution.

Article 221.— La promotion d’une large utilisation de moustiquaires imprégnées

d’insecticides fait partie des obligations de l’État.

L’approvisionnement en moustiquaires et en insecticides peut être laissé en partie sous la

responsabilité du secteur privé. Mais le contrôle de qualité des insecticides revient à l’État.

La réimprégnation des moustiquaires peut être conduite par les associations

communautaires et les ONG. Mais le contrôle technique, la supervision des opérations de

réimprégnation font partie des obligations de l’État.

Le service de la lutte contre le paludisme détermine la stratégie de lutte anti-vectorielle

dans une zone écoépidémiologique donnée. La décision de mettre en œuvre des opérations

intradomiciliaires d’insecticide à effet rémanent revient à l’État. La conduite des opérations

de pulvérisation d’insecticides revient aux responsables sanitaires des Districts dans le cadre

du système d’alerte de la lutte contre les épidémies.

Des mesures particulières de protection de l’environnement et de la santé humaine face

aux risques sanitaires et environnementaux liés aux produits chimiques utilisés doivent être

fixées par textes réglementaires des Ministères en charge de la Santé et de l’Environnement.

TITRE IV. DE LA LUTTE CONTRE LA PESTE

Article 222.— La détection des cas de peste humaine est réalisée sur une personne

vivante suspecte et par le contrôle des décès et éventuellement par les prélèvements post-

mortem.

Article 223.— La peste est une maladie à déclaration obligatoire. Tout cas de peste ou

tout cas suspect doit être immédiatement signalé par tout personnel qui en a connaissance à

l’autorité ou, à défaut, à l’autorité administrative la plus proche.

Page 350: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 349 —

Article 224.— La vérification des décès et les prélèvements post-mortem interviennent

chaque fois que le contrôle fait apparaître une mortalité groupée, anormale et chaque fois

qu’existe une suspicion, clinique ou épidémiologique de peste.

Les médecins légistes ou les médecins vérificateurs des décès et leurs délégués ont le droit

de pénétrer dans les habitations où se trouvent les personnes décédées et, en cas de décès

suspect, de pratiquer tous les prélèvements nécessaires. Ils opèrent en présence d’un ou de

deux membres du fokonolona.

Les prélèvements post-mortem peuvent être rendus systématiques dans les

circonscriptions menacées, pour un temps déterminé, par arrêté du Ministre chargé de la

Santé sur proposition de l’autorité compétente au niveau Régional.

Des prélèvements post-mortem seront obligatoirement effectués sur les cadavres de toute

personne décédée sur le territoire des Districts ainsi déterminés.

Article 225.— La vérification des décès et les prélèvements opérés sur les personnes

décédées peuvent être exigés par l’autorité sanitaire, ou ordonnés sur réquisition même

verbale, et être ainsi effectués par des médecins libres, dans les localités où n’existe pas de

médecin ou paramédical habilité à cette fin, et ce, sans rémunération.

Lorsqu’il s’agit d’un cas de mort suspecte ou d’un décès survenant dans une zone de

vérification obligatoire, l’inhumation peut être faite après la vérification de décès et les

prélèvements nécessaires, sans attendre le résultat des examens de laboratoire.

Les malades atteints de peste ou suspects d’être atteints de peste sont isolés selon les

instructions données par les autorités sanitaires. L’isolement peut avoir lieu à l’hôpital ou à

domicile

Toute personne atteinte de peste ou suspecte d’être atteinte de peste doit obligatoirement

se soumettre aux prescriptions médicales jusqu’à disparition du danger de contagiosité.

Article 226.— Les personnes ayant été en contact direct ou indirect, dans des conditions

rendant possibles la transmission de la peste, avec des pesteux ou avec des malades suspects

de peste, sont soumis à la chimio-prophylaxie sulfamidée conformément aux directives

techniques. La durée de l’isolement est fixée à dix (10) jours pleins.

Les personnes ayant été en contact, avec des pesteux ou des malades suspects de peste,

les membres du personnel sanitaire des différentes équipes de prophylaxie doivent

obligatoirement se soumettre aux prescriptions médicales, en particulier en ce qui concerne

les mesures de désinfection, de désinsectisation et de chimio-prophylaxie.

Article 227.— La réouverture d’un tombeau ou d’une fosse dans lequel a été inhumé un

pesteux peut avoir lieu après un délai fixé par l’Autorité sanitaire concernée. L’exhumation

est soumise à l’autorisation de l’autorité administrative et est effectuée sous contrôle du

Médecin-Inspecteur ou un agent de santé compétent pouvant le représenter.

Article 228.— La circulation et le transport de toutes les marchandises ou de tous les

biens susceptibles, soit d’être contaminés, soit d’être vecteurs de puces ou de rats, sont

interdits à l’intérieur des circonscriptions contaminées de peste, sauf autorisation de

l’Autorité sanitaire.

Page 351: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 350 —

La sortie de toutes marchandises ou de tous biens susceptibles soit d’être contaminés, soit

d’être vecteurs de puces ou de rats à l’extérieur d’une circonscription contaminée de peste,

est interdite, sauf autorisation de l’autorité sanitaire.

Tout moyen de transport sortant d’une circonscription reconnue contaminée doit être

obligatoirement soumis à une désinsectisation par insecticides de contact, suivant les

prescriptions de l’autorité sanitaire. Un certificat de désinsectisation sera délivré au chef de

bord.

Article 229.— Les mesures à adopter contre le germe de la peste, contre le vecteur et

contre le réservoir de virus marin, sont ordonnées par l’autorité sanitaire locale et exécutées

sous son contrôle.

Article 230.— La lutte contre la peste exige le traitement des malades, la surveillance

médicale et la chimio-prophylaxie des sujets contactés ainsi que la désinsectisation de la

région contaminée et la surveillance épidémiologique. Nul ne peut s’opposer à l’application

de ces mesures.

TITRE V. DE LA LUTTE CONTRE LES AUTRES MALADIES CONTAGIEUSES

ET LES CAS DES AUTRES MALADIES ÉMERGENTES ET RÉÉMERGENTES

Article 231.— L’organisation de la lutte contre les autres maladies contagieuses en

général, et la lutte contre le cancer, les maladies mentales, les maladies handicapantes et les

autres cas de fléaux sociaux est régie par les lois et règlements en vigueur, sous la conduite du

Ministre chargé de la Santé et toutes autres autorités sanitaires et administratives

compétentes.

TITRE VI. DE LA LUTTE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES

DIARRHÉIQUES DONT LE CHOLÉRA

Article 232.— Les maladies diarrhéiques transmissibles, en général, et le cas de choléra,

en particulier, doivent faire l’objet d’une déclaration obligatoirement par les professionnels

de santé publics et privés à l’autorité sanitaire compétente. Tout cas de choléra doit faire,

dans les plus brefs délais, l’objet d’une notification à l’Organisation Mondiale de la Santé par

l’autorité sanitaire compétente susvisée. Les premiers cas suspects de choléra survenant dans

une zone considérée jusque-là indemne doivent être confirmés au laboratoire et les résultats

communiqués à l’Organisation Mondiale de la Santé dans les meilleurs délais, par la même

autorité sanitaire compétente.

Article 233.— Il y a suspicion de choléra quand :

— dans une région apparemment épargnée par le choléra, un épisode aigu de diarrhée

aqueuse généralement accompagnée de vomissements provoque une déshydratation sévère

ou le décès chez un malade âgé de plus de cinq (5) ans ;

— dans une région où éclate une flambée de choléra, un malade âgé de deux (2) ans

souffre de diarrhée aqueuse aiguë avec ou sans vomissement.

Il faut évoquer une flambée de choléra dans les cas suivants :

— un malade de plus de cinq (5) ans présente une déshydratation sévère ou succombe à

un épisode aigu de diarrhée aqueuse ;

Page 352: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 351 —

— on observe une brusque augmentation du nombre quotidien de cas aigus de diarrhée

aqueuse, spécialement s’il s’agit de selles aqueuses « riziformes », contenant des grumeaux

typiques de choléra.

Article 234.— En vue d’enrayer tout danger de propagation du choléra, il peut être pris

par le Ministre chargé de la Santé un arrêté instituant l’état d’alerte dans une localité ou une

région géographique localisée et où doivent être appliquées, durant une période

indéterminée, des mesures d’hygiène et de prophylaxie.

À cet effet, toute personne entrant ou sortant d’une zone infectée doit faire l’objet de

mesures prophylactiques.

Article 235.— Pour une meilleure prévention contre les épidémies de choléra, les

autorités concernées en collaboration avec le Ministère chargé de la Santé doivent assurer aux

populations l’accès à une eau saine et convenablement traitée, un bon assainissement effectif

de l’environnement et la sécurité des produits alimentaires.

Pour promouvoir l’utilisation des latrines, la notion d’hygiène et d’assainissement doit

faire partie des programmes scolaires à inculquer aux élèves et des actions de sensibilisation

menée notamment à l’endroit des femmes.

Article 236.— Un Comité National de Coordination Interministériel regroupant les hauts

responsables de tous les Ministères et Services est créé aux fins d’assurer la collaboration des

secteurs en cause, de garantir l’exécution rapide des actions de prévention susvisées et de

rendre efficace la lutte contre la propagation de l’épidémie.

Un décret pris en Conseil de Gouvernement, sur proposition du Ministre chargé de la

Santé, fixe l’organisation et le fonctionnement de ce Comité.

Article 237.— En vue de la lutte et de la prévention contre la propagation du choléra et

jusqu’à la mise en place d’une formation efficace à la prise en charge clinique des cas de

diarrhée aiguë, tous les professionnels de la santé doivent se servir du document édité par

l’Organisation Mondiale de la Santé et intitulé : « Guide pour la lutte contre le choléra » ou de

tout autre document ayant obtenu une validation de la part du Ministère chargé de la Santé.

Article 238.— Les malades atteints de diarrhée suspecte de choléra doivent se conformer

aux mesures de prise en charge dans les centres sanitaires désignés et aux mesures de

chimioprophylaxie édictées à cet effet. Les populations issues des régions infectées et se

déplaçant vers une autre région ou localité doivent se conformer aux mesures de

chimioprophylaxie exigées.

Article 239.— Le non-respect des dispositions visées à l’article ci-dessus expose le

contrevenant au refoulement immédiat vers le lieu de provenance ou à la mise en quarantaine

forcée et immédiate.

TITRE VII. DE LA LUTTE CONTRE LES INFECTIONS SEXUELLEMENT

TRANSMISSIBLES

Article 240.— Toute personne atteinte d’infection sexuellement transmissible doit

obligatoirement se faire examiner et se faire traiter jusqu’à la guérison.

Article 241.— Sans préjudice des dispositions du Droit du Travail, la demande de

contrôle de l’état de santé du travailleur par l’employeur dans un but de dépister si oui ou

Page 353: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 352 —

non le travailleur est porteur d’infection sexuellement transmissible, quel qu’en soit le motif,

porte atteinte au droit à la confidentialité sur l’état de santé individuelle des personnes et est

interdite. Le contrôle de l’état de santé d’un travailleur demandé par l’employeur se limite au

droit à une certification par les médecins agréés à cet effet, de préciser dans quelle mesure

l’état de santé d’un travailleur est indemne, ou est affecté de maladies infirmantes ou liées aux

modes de vie ayant un impact sur la capacité professionnelle.

Article 242.— Sans préjudice des dispositions du Règlement Sanitaire International, les

actions sur les voyageurs débarquant, effectuées par les Charges de contrôle aux Frontières

de Madagascar, pour savoir si un individu est oui ou non porteur d’infection sexuellement

transmissible, sont interdites pour atteinte au droit des personnes à la confidentialité de leur

état de santé.

Article 243.— Sans préjudice des dispositions du Règlement Sanitaire International, sauf

le cas de rapatriement ou le cas d’évacuation sanitaire sur Madagascar, l’observation d’un état

de maladie manifeste chez un voyageur entrant à Madagascar, autorise un examen médical de

contrôle par les Services de Santé aux Frontières.

Article 244.— En cas d’indication de transfusion de sang à un patient, quelle que soit son

affectation, la transfusion de sang assortie d’un examen spécifique pour confirmer son

caractère sécurisant, est obligatoire.

Article 245.— La déclaration des maladies sexuellement transmises peut être rendue

obligatoire par un décret pris sur proposition du Ministre chargé de la Santé, après avis de la

Commission Nationale d’Hygiène et de Santé.

Article 246.— Nonobstant les dispositions de la Loi n° 2005-040 du 20 Février 2006 sur

la lutte contre le VIH/SIDA et la protection des droits des personnes vivant avec le

VIH/SIDA ainsi que celles de ses textes d’application, toute personne se livrant à la

prostitution doit être identifiée et fichée. Des mesures de surveillance spéciale doivent être

prises à leur égard, sans pour autant déroger aux obligations de confidentialité.

TITRE VIII. DE LA LUTTE CONTRE LES MALADIES LIÉES À

L’ENVIRONNEMENT

Article 247.— Les maladies liées à l’environnement doivent faire l’objet de recherches et

études approfondies. Des mesures spécifiques de protection de la santé humaine, à travers

l’élaboration du Plan Opérationnel en Santé et Environnement devront être vulgarisées et

suivies. Les indicateurs environnementaux susceptibles de générer des effets sur la santé

humaine doivent faire l’objet de surveillance et de contrôle. Les dispositions d’organisation

des systèmes de surveillance, d’information, d’alerte, d’investigation et de réponses sont

fixées par décret pris en Conseil de Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la

Santé, suivant la recommandation de la Déclaration de Libreville. Tout programme, tout

plan, tout projet dont les activités risquent de nuire la santé humaine doit faire l’objet des

Études d’Impacts Sanitaires, conformément au texte en vigueur concernant la MECIE (Mise

En Comptabilité des Investissements avec l’Environnement).

Page 354: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 353 —

LIVRE V. DE LA LUTTE CONTRE LES MALADIES NON TRANSMISSIBLES

TITRE PREMIER. DES MESURES DE LUTTE CONTRE LES MALADIES LIÉES

AUX MODES DE VIE

Article 248.— L’État doit subvenir aux besoins de tout citoyen qui, en raison de son âge

ou de son inaptitude motrice, sensorielle ou mentale, se trouve dans l’incapacité de travailler,

notamment par l’institution d’organismes à caractères sociaux.

Article 248 bis.— La Loi prévoit des mesures en vue d’éliminer les inégalités qui frappent

les personnes handicapées. La durée et les conditions de travail ne doivent porter atteinte ni à

la santé, ni à la dignité du travailleur.

Article 249.— La liste des maladies auxquelles sont applicables les présentes dispositions

ainsi que les mesures de lutte contre les maladies chroniques et invalidantes sont déterminées

par des textes réglementaires pris par le Ministre chargé de la Santé. Cette liste peut être

modifiée dans les mêmes conditions que ci-dessus en fonction d’éventuelles apparitions de

nouvelles formes de maladies.

Article 250.— La mise en œuvre, dans tous les domaines, de la promotion de la

prévention des maladies chroniques non transmissibles est fixée par textes réglementaires du

Ministère chargé de la Santé.

Article 251.— En application de la Loi n° 97-044 du 2 Février 1998 sur les personnes

handicapées et des textes subséquents, les modalités d’organisation et de prise en charge des

personnes handicapées dans le cadre de la réadaptation à base communautaire sont fixées par

voie réglementaire.

Article 252.— Les associations de lutte contre les maladies chroniques et invalidantes

assurent l’aide aux malades et à leurs familles et participent à l’organisation des campagnes de

sensibilisation en la matière. L’organisation et le fonctionnement de ces associations sont

fixés par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Plus particulièrement, des mesures de prévention des traumatismes et de la violence

doivent être instaurées notamment pour la sécurité routière, la prévention des différents

types de violence, la prévention des noyades, des brûlures, des chutes, des

empoisonnements/intoxications.

Toute personne victime de traumatisme et/ou de violence a droit à une prise en charge

correcte depuis le lieu de l’incident jusqu’au niveau des formations sanitaires.

TITRE II. DES MESURES DE LUTTE CONTRE LES MALADIES OCULAIRES

Article 253.— Toute personne présentant une maladie oculaire a droit à une prise en

charge correcte au niveau des centres spécialisés, dotés en équipements consommables et

médicaments et placés sous la responsabilité et sous la direction de spécialiste en

ophtalmologie.

Dans le cadre de la réglementation en vigueur concernant aussi bien les services relevant

de l’État que les centres ou spécialistes privés, l’acquisition ou le recouvrement d’une bonne

santé oculaire se manifestant par une vision binoculaire intègre et indemne de toute

Page 355: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 354 —

pathologie résulte de l’action combinée de diverses stratégies telles que la prévention, le

diagnostic précoce et la prise en charge de toutes les affections susceptibles de porter atteinte

à l’intégrité de la vision.

TITRE III. DES MESURES DE LUTTE CONTRE LE TABAC ET LES AUTRE

TOXICOMANIES

Article 254.— La liste des produits dont la consommation peut entraîner des caractères

dépendogènes néfastes à la santé et auxquels sont applicables les dispositions du présent

titre, ainsi que les mesures de lutte antitabac et autres toxicomanies, est fixée par texte

réglementaire pris par le Ministre chargé de la Santé, après avis de l’Office National de Lutte

anti-Tabac (OFNALAT).

Cette liste peut être modifiée ou augmentée, dans les mêmes conditions que ci-dessus, en

fonction de nouvelles formes de produits réputés toxiques déversés sur le marché de la

consommation.

Article 255.— Les principaux objectifs de l’Office National de Lutte Anti-Tabac

(OFNALAT) sont les suivants :

1- Mettre en œuvre les dispositions stipulées dans la Convention Cadre pour la Lutte

Antitabac dans le but de protéger les générations présentes et futures des effets sanitaires,

sociaux, environnementaux et économiques dévastateurs de la consommation du tabac et de

l’exposition à la fumée du tabac comprenant ainsi :

— des mesures relatives à la réduction de la demande du tabac ;

— des mesures relatives à la réduction de l’offre de tabac ;

— des mesures sur la protection de l’environnement ;

— la coopération scientifique et technique et sur la communication d’information.

2- préciser les axes d’orientation de la lutte contre la toxicomanie qui doivent comporter

des actions de prévention, de dépistage et de diagnostic, de soins, de réadaptation et de

réinsertion sociale ;

3- établir et compléter à mesure de leur émergence la liste des produits dont la

consommation peut entraîner des caractères dépendogènes néfastes à la santé et auxquels

sont applicables les présentes dispositions ainsi que les mesures de lutte contre la

toxicomanie ;

Dans cette liste, figurent notamment le cannabis (rongony), le khat, toutes drogues à

risque, l’alcool sous toutes ses formes y compris l’alcool vendu clandestinement comme

boisson fermentée et fabriquée (toaka gasy), le tabac à fumer, à chiquer, à priser ou à sucer ;

4- renforcer les mesures de luttes existantes et la mise en œuvre de nouvelles mesures

sanitaires, sociales et de sécurité à prendre pour réduire la toxicomanie et éradiquer ses effets

les plus nocifs ;

5- récapituler et compléter la liste des textes législatifs et réglementaires constituant le

cadre juridique de la lutte contre la toxicomanie. Proposer des améliorations et la

promulgation de textes nouveaux ;

6- renforcer les campagnes de sensibilisation contre les causes de toxicomanie.

Page 356: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 355 —

Article 256.— Le cadre juridique de la lutte antitabac et autres toxicomanies doit

notamment comporter les textes suivants :

— la Loi n° 61-053 du 13 décembre 1961 sur la lutte contre l’alcoolisme et ses textes

subséquents ;

— la Loi n° 97-039 du 4 novembre 1997 sur le contrôle des stupéfiants, des substances

psychotropes et des précurseurs à Madagascar et ses textes subséquents ;

— la Loi n° 2004-029 du 9 septembre 2004 autorisant la ratification de la Convention

cadre de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la Lutte Antitabac ;

— la Décision de la Haute Cour Constitutionnelle n° 23-HCC/D1 du 8 septembre 2004

relative à la Loi n° 2004-029 du 9 septembre 2004 autorisant la ratification de la Convention

cadre de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la Lutte Antitabac ;

— l’Ordonnance n° 60-098 du 21 septembre 1960 relative à la réglementation des

boissons et ses décrets d’application ainsi que ses éventuels textes subséquents ;

— La législation et la réglementation en vigueur en matière de lutte contre la drogue et les

activités criminelles connexes ainsi que celles régissant l’industrialisation, l’importation, la

commercialisation et la consommation des produits du tabac à Madagascar ;

— Les textes réglementaires régissant la création, l’organisation et le fonctionnement de

l’Office National de Lutte Anti-Tabac du Ministère chargé de la Santé.

TITRE IV. DES MESURES DE LUTTE CONTRE LES MALADIES MENTALES

Article 257.— La liste des maladies auxquelles sont applicables les présentes dispositions

ainsi que les mesures de lutte contre les maladies mentales sont déterminées par texte

réglementaire du Ministre chargé de la Santé.

Article 258.— Cette liste peut être modifiée dans les mêmes conditions que ci-dessus en

fonction d’éventuelles apparitions de nouvelles formes de maladies.

Article 259.— Les principaux objectifs de lutte contre les maladies mentales sont les

suivants :

1- prendre en compte les progrès accomplis en matière de prévention et de diagnostic des

maladies mentales, de la qualité des soins et de la nature des médicaments administrés aux

patients atteints de troubles mentaux, du suivi des malades laissés en milieu familial, social ou

au sein d’une structure extra-hospitalière ou encore hospitalisés, de la réadaptation et de la

réinsertion sociale ;

2- concevoir sur cette base une politique de promotion de la santé mentale grâce à la

définition des missions confiées aux établissements assurant les services hospitaliers

dépendant de l’État ou à toute personne morale de droit public ou privé participant à la mise

en oeuvre de la politique de promotion de la santé mentale ;

3- redéfinir le statut du malade mental, de sa protection en tant que personne incapable,

majeure ou mineure infanto-juvénile ;

4- mettre en place un système d’individualisation des mesures de protection des patients

souffrant de troubles mentaux.

Page 357: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 356 —

En tant que de besoin, ces objectifs peuvent faire l’objet d’une réévaluation par texte

réglementaire d’application pris par le Ministre chargé de la Santé.

TITRE V. DES DEVOIRS ET DES MESURES

Article 260.— Les Départements Ministériels, les Institutions, les ONG et la Société

Civile ont le devoir de mettre en œuvre les programmes visant à promouvoir les mesures

édictées en vue :

— de prévenir toutes formes de maladies non transmissibles, notamment dans les lieux

de travail, de pratiquer des sports et des loisirs, dans les établissements scolaires et

universitaires et dans tous lieux publics couverts ou réputés couverts ;

— d’inclure dans les plans, programmes et stratégies nationaux de développement, la

prévention, le diagnostic précoce et la prise en charge adéquate des maladies visées ci-

dessus ;

— de collaborer avec les partenaires financiers afin de faciliter l’accès aux traitements de

ces maladies.

Article 261.— Outre les éventuelles mesures administratives ou de police applicable, la

transgression des dispositions des textes réglementaires visant à prévenir la propagation des

maladies non transmissibles est punie conformément aux dispositions des articles 329 à 330

du présent Code, suivant la nature des infractions commises en la matière.

Article 262.— Les affections bucco-dentaires auxquelles sont applicables les présentes

dispositions ainsi que les mesures de lutte contre les maladies bucco-dentaires sont

déterminées par voie réglementaire à la diligence du Ministre chargé de la Santé.

LIVRE VI. DE LA PROTECTION SANITAIRE DE LA FAMILLE

TITRE PRÉLIMINAIRE. DES GÉNÉRALITÉS SUR LA PROTECTION DE LA MÈRE ET DE L’ENFANT

Article 262 bis.— La santé est le droit de toute personne et le devoir de l’État et est

garantie par le biais de politiques sociales et économiques visant à réduire le risque de

maladie et d’autres dangers et à faciliter l’accès universel et équitable à toutes les actions et

services pour la promotion, la protection et le rétablissement de la santé.

Article 263.— Les dispositions réglementant la protection sanitaire de la famille, et plus

particulièrement de la femme et de l’enfant, sont inséparables des dispositions contenues

dans les Conventions Internationales et dans le Droit National constituant le cadre juridique

de la protection de la personne de la femme et de l’enfant.

Article 264.— Les règles fondamentales suivantes contenues dans les Conventions

Internationales, dans la Constitution et dans le Droit National contribuent à protéger la

famille et la personne de la femme :

Page 358: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 357 —

— la famille, élément naturel et fondamental de la société, est protégée par l’État qui

assure son libre épanouissement ainsi que celle de la mère et de l’enfant par une législation et

par des institutions sociales appropriées ;

— sur la base de l’égalité de l’homme et de la femme, pendant la grossesse, pendant

l’accouchement et après l’accouchement des services appropriés et au besoin, gratuits, ainsi

qu’une nutrition adéquate pendant la grossesse et l’allaitement ;

— l’État reconnaît le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même

et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisant ainsi qu’à une

amélioration constante de ses conditions d’existence et également le droit de jouir du

meilleur état de santé physique et mental qu’elle soit capable d’atteindre ;

— le Code Pénal malagasy sanctionne sévèrement quiconque aura favorisé ou tenté de

favoriser l’avortement. Des peines aggravées sont prévues à l’encontre des membres du

personnel médical ou paramédical ayant commis les mêmes faits ;

— le Code Pénal malagasy comporte en son article 63 une disposition qui permet de

sanctionner une personne qui s’abstient volontairement de porter à une autre personne en

danger l’assistance qu’elle pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en

provoquant un secours. Cet article s’applique à tout membre du corps médical ou du corps

des sages-femmes qui s’abstiendrait d’administrer les soins qui s’imposent à une femme en

péril lors d’un accouchement.

Article 265.— Les règles suivantes, consacrant l’intérêt supérieur de l’enfant eu sein de la

société, contenues dans les Conventions Internationales et dans le Droit National assurent la

protection et la sauvegarde de l’intégrité physique et morale de l’enfant :

— l’État reconnait que tout enfant a un droit inhérent à la vie et assure dans toute la

mesure du possible la survie et le développement de l’enfant ;

— l’État s’engage à respecter le droit de l’enfant de préserver son identité, son nom et ses

relations familiales ;

— l’État veille à ce que l’enfant ait accès à une infirmation visant à promouvoir son bien-

être social, spirituel et moral ainsi que sa santé physique et mentale ;

— l’État protège l’enfant et les adolescents contre toute forme de violences, d’atteintes

ou de brutalités physiques ou mentales, d’abandon ou de négligence, y compris l’abus, la

violence et l’exploitation sexuelle que la loi punit sévèrement. Dans cette perspective, le Code

Pénal malagasy protège l’enfant contre l’infanticide, les atteintes physiques aux enfants

mineurs, les violences ou privations affectant gravement la santé ou l’intégrité physique d’un

enfant ;

— l’enfant a le droit de jouir du meilleur état de santé possible et de bénéficier de services

médicaux et de rééducation. L’État s’efforce de garantir à chaque enfant l’accès aux services

de santé ;

— l’État doit prendre toutes les mesures appropriées pour lutter contre la maladie et la

malnutrition, fournir le cadre des soins de santé primaires, assurer la fourniture d’aliments

nutritifs et d’eau potable ;

— l’enfant occupe au sein de la famille une place privilégiée : il a droit à une sécurité

matérielle et morale aussi complète que possible ;

Page 359: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 358 —

— la responsabilité de son éducation appartient en premier lieu à la famille qui,

cependant en cas de défaillance, doit être aidée et assistée par les pouvoirs publics.

TITRE PREMIER. DE LA SANTÉ DE LA REPRODUCTION

Chapitre premier. Des dispositions pour une maternité à moindre risque

Article 266.— La protection sanitaire et sociale des femmes enceintes et des mères ainsi

que celle des enfants n’ayant pas dépassé deux (2) ans révolus est organisée dans les

conditions fixées par décret pris en Conseil du Gouvernement sur proposition du Ministre

chargé de la Santé.

Article 267.— Toutes pratiques ayant des répercussions négatives sur l’évolution de la

grossesse, l’accouchement, le post partum et la période post natale sont punies des peines

prévues par les dispositions de l’article 346 du présent Code.

Le médecin a le devoir de donner des conseils aux patients sur la prévention des

grossesses non désirées.

Il appartient à l’État de mettre en place des services sanitaires spéciaux, de qualité et

accessibles aux femmes qui présentent des complications liées à la grossesse, à

l’accouchement, au post partum, à la période post natale ainsi qu’à l’avortement.

Plus particulièrement, concernant la prévention des cancers gynécologiques, les

formations sanitaires ont le devoir de rendre disponibles auprès des femmes âgées de vingt-

cinq à cinquante ans les informations appropriées pour la prévention du cancer du col de

l’utérus et du cancer du sein. Le médecin a le devoir de donner des conseils aux femmes sur

la prévention des cancers gynécologiques.

Article 268.— Toute femme a le droit de bénéficier d’un dépistage du cancer du col de

l’utérus par Inspection Visuelle à l’Acide Acétique (IVA) soit par frottis cervical au moins

une fois dans sa vie.

Il appartient à l’État de mettre en place des services sanitaires spéciaux et accessibles aux

femmes atteintes du cancer du col de l’utérus et du cancer du sein aux fins d’être disponibles

pour :

— le diagnostic ; et

— la prise en charge de ces cancers.

Chapitre II. De la planification familiale

Article 269.— Le Ministre chargé de la Santé, le Ministre des Télécommunications, des

Postes et de la Communication et le Ministre des Transports et du Tourisme sont

responsables de la sensibilisation de la population sur la Santé de la Reproduction. Le

Ministère chargé de la Santé assure le suivi de la qualité des prestations dispensées.

Un nouvel examen des dispositions législatives et règlementaires relatives à la vente, à

l’utilisation des contraceptifs et à la publicité dont ils font l’objet doit être effectué

Page 360: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 359 —

conjointement par les Ministères ci-dessus mentionnés auquel s’ajoute le Ministère de la

Justice.

Chapitre III. De la santé de la reproduction des adolescents et des jeunes

Article 270.— Les organisations offrant des services de santé ciblant les personnes âgés

de dix à dix-neuf ans, dites adolescentes, ainsi que celles âgées de quinze à vingt-quatre ans,

dites jeunes, ont le devoir de rendre disponibles auprès d’elles des informations appropriées

pour la promotion des comportements sexuels sans risques et responsables.

Chapitre IV. De la procréation médicalement assistée et du génie génétique

Article 271.— Des établissements sanitaires spéciaux et accessibles aux adolescents et aux

jeunes sont autorisés à offrir des services de :

— prévention et traitement des infections des tractus génital et urinaire y compris les

Infections Sexuellement Transmissibles ; ainsi que les complications médicochirurgicales

liées aux avortements provoqués, aux grossesses précoces, et aux grossesses inopportunes ou

non désirées issues d’actes de violence ou autres ;

— prévention et traitement de la stérilité ;

— consultation prénuptiale ;

— éducation à la vie familiale.

Article 271 bis.— L’être humain et son environnement doivent être protégés contre les

abus en matière de procréation médicalement assistée et de génie génétique. L’État, par le

biais du Ministère chargé de la Santé, légifère sur l’utilisation du patrimoine germinal et

génétique humain. Ce faisant, il veille à assurer la protection de la dignité humaine, de la

personne et de la famille et respecte notamment les principes suivants :

— toute forme de clonage et toute intervention dans le patrimoine génétique de gamètes

et d’embryons humains sont interdites ;

— le patrimoine génétique et germinal non humain ne peut être ni transféré dans le

patrimoine germinal humain ni fusionné avec celui-ci ;

— le recours aux méthodes de procréation médicalement assistée n’est autorisé que

lorsque la stérilité ou le danger de transmission d’une grave maladie ne peuvent être écartés

d’une autre manière, et non pour développer chez l’enfant certaines qualités ou à toute fin

d’eugénisme ainsi que pour satisfaire la recherche ;

— la fécondation d’ovules humains hors du corps de la femme n’est autorisée qu’aux

conditions prévues par la loi ; ne peuvent être développés hors du corps de la femme

jusqu’au stade d’embryon que le nombre d’ovules humains pouvant être immédiatement

implantés ;

— le don d’embryons et toutes les formes de maternité de substitution sont interdits ;

— il ne peut être fait commerce du matériel germinal humain ni des produits résultant

d’embryons ;

Page 361: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 360 —

— le patrimoine génétique d’une personne ne peut être analysé, enregistré et

communiqué qu’avec le consentement de celle-ci ou en vertu d’une loi ;

— toute personne a accès aux données relatives à son ascendance.

TITRE II. DE LA PROTECTION SANITAIRE DE L’ENFANCE

Article 272.— Sous la coordination du Ministère chargé de la Santé, des actions

multisectorielles ayant pour vocation de lutter contre :

— la malnutrition de la mère et de l’enfant ;

— l’absence de sécurité alimentaire et économique au niveau des ménages ;

— les carences en micronutriments (troubles dus à la carence en iode, Avitaminose et

anémie ferriprive), contribuent à la mise en œuvre de la Politique Nationale de Nutrition ou

PNN adoptée par voie réglementaire. Cette politique comporte des interventions ou

stratégies telles que la promotion de l’allaitement maternel et de l’alimentation

complémentaire, l’intervention sur la nutrition au niveau communautaire, l’intégration des

interventions nutritionnelles aux soins de santé primaires, la prise en charge des enfants

sévèrement malnutris, l’intervention sur la nutrition scolaire, un système national de

surveillance alimentaire et nutritionnelle.

Article 273.— Le Ministre chargé de la Santé collabore étroitement avec les autres

départements ministériels concernés.

En partenariat avec divers organismes nationaux ou internationaux, il met en œuvre la

PCIME (Prise en Charge Intégrée des Maladies de l’Enfant).

Article 274.— La Politique Nationale de Santé comporte notamment deux axes

stratégiques qui concernent le Programme Élargi de Vaccination à Madagascar : la promotion

et la protection de la santé et la lutte contre les maladies. Les objectifs du Programme Élargi

de Vaccination sont notamment de contrôler les maladies devant faire l’objet de la

prévention par la vaccination, d’élargir l’accès aux services de vaccination aux populations

des zones rurales et périurbaines afin de réduire les écarts et d’éviter la constitution de zones

à haut risque pour les malades cibles, de promouvoir la collaboration intersectorielle et

d’assurer la pérennisation du Programme.

La mise en œuvre du Programme Élargi de Vaccination est assurée par les services

compétents du Ministère chargé de la Santé.

Article 274 bis.— L’État, par le biais du Ministère chargé de la Santé, doit assurer une

assistance complète sur les programmes de santé pour les enfants et les adolescents,

permettant la participation des entités non gouvernementales et respectant notamment les

préceptes suivants :

— attribution d’un pourcentage des fonds publics pour la mère et l’assistance sanitaire

des enfants ;

— création de programmes de soins préventifs et spécialisés pour handicapés moteurs,

sensoriels ou mentaux ;

— création de programmes pour l’intégration sociale des personnes handicapées et des

adolescents défavorisés par le biais de la formation spécialisée et orientée vers leur

intégration à la vie professionnelle et communautaire ;

Page 362: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 361 —

— création de programmes de prévention et de traitement spécialisés pour les enfants et

les jeunes qui consomment des stupéfiants et des drogues liés.

TITRE III. DE LA SANTÉ SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE

Article 275.— Les services médicaux se préoccupant de la santé des étudiants des

Universités, des grandes écoles et autres institutions, privées ou publiques, de niveau

supérieur, ainsi que des élèves et du personnel enseignant des établissements d’enseignement

secondaire, technique et d’éducation de base sont organisés par voie de décret pris en

Conseil du Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

La réglementation ainsi prévue doit notamment régir :

— les attributions des services ;

— la place qu’ils occupent au sein de l’organisation générale du Ministère et des

collectivités territoriales ;

— l’instauration des visites médicales périodiques obligatoires, soumise à un contrôle et à

un suivi sous l’autorité du Ministère chargé de la Santé ;

— la mise en œuvre d’une politique de promotion de conditions d’hygiène,

d’assainissement des infrastructures universitaires et scolaires et d’une bonne, nutrition et de

salubrité alimentaire ;

— l’énumération de mesures relevant de la politique nationale de santé devant renforcer

les programmes de mesures, notamment à l’intention des enfants, et afin de susciter, au sein

des communautés comme des familles, des changements de comportements vis-à-vis du

respect des règles collectives d’hygiène ;

— l’obligation vaccinale pout tout enfant, avant son admission dans un établissement

scolaire ;

— l’obligation pour tout élève de satisfaire aux vaccinations déclarées obligatoires en

cours de scolarité.

Article 276.— Le Ministre chargé de la Santé se préoccupe du respect des normes et

standards de « l’école santé ».

La réglementation ainsi prévue doit notamment régir :

— l’installation des normes et standard en matière de santé scolaire que ce soit au niveau

des services médicaux qu’au niveau des établissements scolaires et universitaires ;

— le suivi de leur application effective à tous les niveaux ;

— la participation du Comité d’Hygiène et de Santé dans la mise en place des

composantes de « l’école santé » en vue de la pérennisation ;

— le suivi de leur application effective en milieu scolaire.

Les modalités de mise en œuvre et d’application des deux précédents articles doivent être

précisées par voie règlementaire.

Page 363: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 362 —

TITRE IV. DE LA PROTECTION DES DROITS FAMILIAL ET SOCIAL DE L’ENFANT

Article 277.— Outre les dispositions de la Loi n° 2007-023 du 20 août 2007 sur les droits

et la protection des enfants, dès la naissance, tout enfant a droit à l’inscription à l’État Civil.

Sans préjudice des dispositions de la Loi n° 61-025 du 9 octobre 1961 modifiée par la Loi

n° 90-015 du juillet 1990 relative aux actes de l’État Civil, les accouchements auxquels ont

assisté les médecins et sages-femmes font obligation à ces derniers, dès la naissance de

l’enfant ou à défaut, dans un délai n’excédant pas douze jours à compter de la naissance, de

faire parvenir à l’Officier de l’État Civil du lieu d’accouchement, une attestation indiquant

que la naissance de l’enfant est survenue tel jour, telle heure à tel endroit déterminé.

Le patronyme de l’enfant, choisi par la mère ou l’autorité parentale reconnue compétente,

doit figurer dans l’attestation.

Article 278.— Sans préjudice des dispositions de la Loi relative aux actes de l’État Civil et

de celles des lois civiles, l’Officier de l’État Civil est tenu, dès la réception de l’attestation, de

rédiger immédiatement l’acte de naissance et de procéder à la signature avec le déclarant.

Néanmoins, en cas de doute sur l’authenticité des déclarations contenues dans l’attestation,

l’Officier de l’État Civil peut faire contrôler la sincérité desdites déclarations par un médecin

ou une sage-femme autre que le déclarant. Le médecin ou la sage-femme chargé du contrôle

doit être issu d’une des Formations Sanitaires Publiques du lieu de l’accouchement ou à

défaut, d’une Formation Sanitaire Publique la plus proche du lieu de l’accouchement.

Plus particulièrement et en vue de promouvoir la protection des droits de l’enfant, en cas

de maltraitance subie par l’enfant, le secret médical doit être levé.

LIVRE VII. DES LABORATOIRES

TITRE PREMIER. DES LABORATOIRES D’ANALYSES MÉDICALES

Chapitre premier. Des dispositions générales

Article 279.— On entend par Laboratoire d’analyses médicales, tout établissement, dont

l’activité essentielle consiste à réaliser sur prescription médicale, ou d’agents de santé, des

analyses, tests et prélèvements biologiques, qui permettent de mettre en évidence une

modification biologique ou physiologique, un agent pathogène ou un agent allergène et

contribuent au diagnostic, au traitement, à la prévention des maladies, à la réalisation d’un

bilan de santé ou au constat de grossesse.

Article 280.— L’ouverture et l’exploitation d’un laboratoire d’analyses médicales sont

soumises à une autorisation délivrée par le Ministre chargé de la Santé après avis de la

Commission Nationale pour l’ouverture et la fermeture des établissements privés.

L’autorisation est délivrée au nom du propriétaire du laboratoire s’il s’agit d’une personne

physique ou au nom de la société propriétaire et du directeur du laboratoire, ou au nom de

l’établissement hospitalier ou de dispensation de soins, qu’il soit public ou privé, s’il s’agit

d’une personne morale avec mention du nom du directeur du laboratoire.

Page 364: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 363 —

Article 281.— Nul ne peut être propriétaire, ouvrir, exploiter ou diriger un laboratoire

d’analyses médicales s’il ne possède pas les diplômes requis et ne satisfaisait pas aux

conditions définies dans le Livre VII du présent Code.

La réglementation fixe les éléments constitutifs du dossier de demande d’ouverture ou

d’exploitation, précise les caractéristiques techniques du laboratoire, les équipements et le

personnel.

Toute modification d’un des éléments constitutifs de la demande survenue en cours

d’exploitation, en particulier tout changement de directeur doit faire l’objet d’une déclaration

auprès du Ministre chargé de la Santé.

Article 282.— L’autorisation est retirée par le Ministre chargé de la Santé lorsque les

conditions légales ou règlementaires cessent d’être remplies ou si le contrôle de la qualité des

analyses effectuées dans le laboratoire fait apparaître des anomalies répétées au regard de leur

utilisation médicale.

Article 283.— Tout laboratoire d’analyses est tenu d’appliquer les principes et lignes

directrices des bonnes pratiques de laboratoire reconnus par le Ministre chargé de la Santé.

Article 284.— Tout laboratoire d’analyses médicales est soumis à des mesures

d’inspection effectuées par les pharmaciens inspecteurs de l’Agence du Médicament de

Madagascar. Les inspections font l’objet d’un rapport qui est transmis à la Direction de la

Pharmacie, du Laboratoire et de la Médecine Traditionnelle du Ministère chargé de la Santé.

La Direction chargée du Laboratoire et de la Médecine Traditionnelle rend compte au

Ministère chargé de la Santé et propose les mesures à prendre.

Article 285.— Toute publicité pour un laboratoire d’analyses médicales est interdite.

Seules sont autorisées les annonces d’ouverture d’un laboratoire d’analyses médicales par

voie de presse et ce, pendant un (1) mois à compter de la date de la première annonce.

Un laboratoire d’analyses médicales est signalé au public par une plaque professionnelle

apposée à la porte des locaux et de l’immeuble dans lequel il est installé.

Les mentions qui doivent figurer sur la plaque professionnelle sont le nom du laboratoire,

le nom du Directeur, ses titres ou diplômes, les spécialités et les jours et heures d’ouverture.

Article 286.— Tout document émanant du laboratoire d’analyses médicales doit

comporter le nom du laboratoire, l’adresse complète, le nom du directeur, ses titres ou

diplômes.

Chapitre II. De l’exploitation

Section 1. Des conditions de fonctionnement Des laboratoires d’analyses médicales

Article 287.— Un laboratoire d’analyses médicales ne peut être ouvert, exploité ou dirigé

que par l’une des entités suivantes :

1- une personne physique ;

2- une société regroupant des civils et des professionnels ;

3- une société anonyme ou une société à responsabilité limitée ;

Page 365: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 364 —

4- un organisme ou service relevant de l’État ;

5- un organisme à but non lucratif reconnu d’utilité publique ou bénéficiant d’une

autorisation accordée par le Ministre chargé de la Santé.

Article 288.— Lorsque le laboratoire est exploité par une personne physique, celle-ci est

directeur du laboratoire.

Lorsque le laboratoire est exploité par une personne morale ayant la forme de société

professionnelle, tous les associés sont Directeurs du laboratoire.

Les trois quarts au moins du capital doivent être détenus par les Directeurs et Directeurs

Adjoints du laboratoire.

Les associés ne peuvent être que des personnes physiques, à l’exclusion de celles exerçant

une activité médicale autre que celle de Directeur ou de Directeur Adjoint du laboratoire.

L’adhésion d’un nouvel associé est subordonnée à l’agrément préalable de l’Assemblée

Générale statuant à la majorité des deux tiers.

Une même société ne peut exploiter qu’un seul laboratoire. Une même personne ne peut

détenir des parts ou des actions que dans une société exploitant un laboratoire.

Article 289.— Le Ministre chargé de la Santé, sur avis d’une Commission Paritaire est

habilité à procéder à la fixation et à la révision périodique de la tarification des analyses

médicales.

Les laboratoires d’analyses médicales sont tenus de respecter les prix minima prévus par

la tarification. Les tarifs doivent être affichés dans le laboratoire en vue d’une information du

public.

Article 290.— Lorsque le laboratoire est exploité par un organisme relevant de l’État, le

Directeur est nommé par décret pris en Conseil des Ministres sur proposition du Ministre

chargé de la Santé.

Section 2. Des dispositions applicables aux cadres des directions des laboratoires d’analyses médicales

Article 291.— Nul ne peut exercer les fonctions de Directeur ou de Directeur Adjoint

d’un laboratoire d’analyses médicales s’il ne réunit les conditions suivantes :

1- être de nationalité malagasy ou ressortissant d’un pays avec lequel une convention de

réciprocité a été signée, et ce, dans la limite d’un quota défini chaque année par arrêté du

Ministre chargé de la Santé ;

2- être titulaire d’un diplôme de médecin, de pharmacien, de médecin-vétérinaire, de

biologiste ou titulaire d’un diplôme scientifique reconnu par l’État Malagasy pour cette

activité ;

3- justifier d’une formation spécialisée dont la nature et les modalités sont fixées par

arrêté ;

4- être inscrit au Tableau de l’Ordre professionnel dont il relève ;

5- être résident dans la localité d’implantation du laboratoire.

Page 366: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 365 —

Article 292.— Les Directeurs et Directeurs Adjoints des laboratoires d’analyses médicales

doivent exercer personnellement et effectivement leurs fonctions.

Ils ne peuvent être responsables de plus d’un laboratoire d’analyses médicales.

Ils ne peuvent exercer aucune autre activité médicale, pharmaceutique ou vétérinaire.

Un laboratoire d’analyses médicales doit comporter, outre le Directeur et le Directeur

Adjoint, au moins deux (2) techniciens de laboratoire, pouvant justifier d’une formation

spécialisée et d’une expérience correspondant aux analyses effectuées.

Un Directeur ou un Directeur Adjoint empêché peut se faire remplacer à titre temporaire

dans les conditions fixées par voie réglementaire.

En cas de décès du Directeur d’un laboratoire d’analyses médicales exploité sous forme

individuelle, ses héritiers peuvent mettre le laboratoire en gérance pour une période qui ne

peut excéder deux (2) ans.

Le titulaire de la gérance doit remplir les conditions définies à l’article 291 ci-dessus.

Chapitre III. Des analyses

Article 293.— Les analyses médicales et les prélèvements pour analyse ne peuvent être

effectués que dans des établissements agréés à cet effet et sous la direction d’un personnel

qualifié, sous réserve des dispositions concernant les cabinets médicaux et sauf dérogation

transitoire accordée par le Ministre chargé de la Santé pour des raisons de santé publique.

Toute analyse et tout prélèvement réalisés dans le laboratoire doivent être consignés dans

un registre.

Toutes analyses et tous comptes-rendus d’analyses doivent être datés et munis de la

signature du Directeur ou du Directeur Adjoint ou autre personne qualifiée habilitée du

laboratoire dans lequel les analyses ont été réalisées.

Les résultats des analyses ne peuvent être transmis qu’à un médecin et en aucun cas au

patient, sauf sous pli fermé destiné au médecin traitant.

Certaines analyses, dont la liste est fixée par arrêté du Ministre chargé de la Santé, ne

peuvent être effectuées que dans des laboratoires agréés à cet effet, qu’ils soient privés ou

publics.

L’exécution de certaines analyses médicales peut être autorisée dans les cabinets médicaux

privés, dans la limite d’une liste établie par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Ces analyses doivent être effectuées par le médecin ou sous sa responsabilité par un

technicien qualifié sur des prélèvements réalisés dans le cadre d’une consultation.

Les normes d’équipement du local et du matériel nécessaires à l’exécution des analyses

médicales dans les cabinets médicaux privés sont déterminées par arrêté du Ministre chargé

de la Santé.

Les médecins pratiquant des analyses médicales dans leur cabinet ne peuvent en aucun

cas utiliser la mention de laboratoire d’analyses médicales.

La tarification des analyses médicales exécutées dans un cabinet médical doit être

conforme à la réglementation en vigueur.

Page 367: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 366 —

Article 294.— Les laboratoires d’analyses médicales du secteur public peuvent être

amenés à pratiquer des analyses sur demande de praticiens ou établissements sanitaires du

secteur privé, lorsque ces analyses sont réservées à certains laboratoires du secteur public ou

pour des raisons de proximité dans des régions non pourvues de laboratoire d’analyses

médicales.

TITRE II. DES ORGANES ET SUBSTANCES D’ORIGINE HUMAINE POUR

INTERVENTION THÉRAPEUTIQUE, DIAGNOSTIC OU POUR DES

RECHERCHES

Chapitre premier. Des dispositions générales

Article 295.— On entend par substance thérapeutique ou diagnostique d’origine

humaine, toute substance prélevée sur un être humain et destinée à des fins thérapeutiques

ou diagnostiques.

La cession et l’utilisation des substances thérapeutiques d’origine humaine sont régies par

les dispositions de la législation et de la réglementation en vigueur ainsi que par celles du

présent titre et de ses textes réglementaires d’application.

Le prélèvement de substances thérapeutiques d’origine humaine ne peut être pratiqué

sans le consentement préalable du donneur, ce consentement est révocable à tout moment.

Aucune pression physique, morale ou pécuniaire ne doit être à l’origine du don.

Le donneur doit être informé de manière précise et compréhensible pour lui, par un

médecin, des risques liés à certains prélèvements.

Aucun paiement quelle qu’en soit la forme, ne peut être alloué à celui qui se prête au

prélèvement d’éléments de son corps ou à la collecte de ses produits.

Article 296.— Le donneur ne peut connaître l’identité du receveur, ni le receveur celle du

donneur. Aucune information permettant d’identifier à la fois celui qui a fait don d’un

élément ou d’un produit de son corps, et celui qui l’a reçu ne peut être divulguée. Il ne peut

être dérogé à ce principe d’anonymat qu’en cas de nécessité thérapeutique, et avec l’accord

des parties.

Article 297.— Toute publicité en faveur d’un don de substance thérapeutique d’origine

humaine au profit d’une personne déterminée ou au profit d’un organisme déterminé est

interdite. Cette interdiction ne fait pas obstacle à l’information du public en faveur du don

d’organes et de produits du corps humain.

Article 298.— Le prélèvement et la collecte de substances thérapeutiques d’origine

humaine à des fins thérapeutiques sont soumis à des règles de sécurité sanitaire définies par

arrêté du Ministre chargé de la Santé. Ces règles comprennent notamment des tests de

dépistage des maladies contagieuses ou sexuellement transmissibles.

Le prélèvement et l’utilisation des substances thérapeutiques d’origine humaine ne

peuvent être faits que par un médecin ou sous sa direction. Ils ne peuvent être effectués que

sur ordonnance médicale.

Page 368: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 367 —

Chapitre II. Du sang et de ses dérivés

Article 299.— La transfusion sanguine est un acte par lequel on administre le sang

humain à un malade à des fins thérapeutiques après traitement dudit sang et consentement

du receveur ou de son représentant légal.

Cet acte médical engage la responsabilité du médecin qui le prescrit, de celui qui l’effectue

et des personnes agissants sous sa direction.

L’acte consiste à soumettre le sang à une opération ou suite d’opérations appropriées en

vue de lui conférer des caractéristiques optimales d’emploi.

La transfusion sanguine s’effectue dans l’intérêt du receveur, après que le médecin se soit

assuré de sa réelle nécessité, et relève des principes éthiques du bénévolat et de l’anonymat

du don, et de l’absence de profit et doit être assortie d’un examen spécifique pour confirmer

son caractère sécurisant dans les conditions définies dans le présent titre.

Au sens du présent Code, on entend par transfusion sanguine, toute administration du

sang humain et/ou de ses dérivés à un malade à des fins thérapeutiques.

Article 300.— Le prélèvement de sang ou de certains de ses composants seulement, ne

peut être fait qu’avec le consentement du donneur, par un médecin ou sous la direction et la

responsabilité d’un médecin qui se sera assuré de l’aptitude du donneur.

Le don de sang relève des principes éthiques de l’anonymat du don, du bénévolat et de

l’absence de profit dans les conditions définies dans le présent titre.

Aucune rémunération, autre forme d’avantage à part des journées de congé, ne peut être

allouée au donneur, sans préjudice du remboursement des frais de déplacement,

conformément à un tarif proposé par l’établissement et approuvé par le Ministre chargé de la

Santé.

Aucun prélèvement de sang en vue d’une utilisation thérapeutique pour autrui ne peut

avoir lieu sur une personne faisant l’objet d’une mesure de protection légale.

Toutefois s’agissant des mineurs, un prélèvement peut être effectué à titre exceptionnel,

lorsque des motifs tirés de l’urgence thérapeutique l’exigent sous condition du consentement

écrit des autorités parentales reconnues compétentes.

Article 301.— Le sang, ses composants et leurs dérivés ne peuvent être distribués ni

utilisés sans qu’il ait été fait des analyses biologiques et des tests de dépistage de maladies

contagieuses, dans des conditions définies par décret pris en Conseil de gouvernement sur

proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 302.— La collecte du sang humain ou de ses composants en vue d’une utilisation

thérapeutique ne peut se faire que par un organisme ou un établissement de transfusion

sanguine agréé par le Ministre chargé de la Santé à ces fins.

L’agrément technique ne peut être accordé qu’à un organisme remplissant toutes les

conditions définies par la réglementation. Il est accordé pour une durée déterminée et est

renouvelable. L’établissement de transfusion sanguine concerné est subordonné à des

conditions techniques, sanitaires et médicales définies dans la réglementation. Il doit être

organisé en tenant compte des critères de répartition géographique, démographique et de

planification sanitaire.

Page 369: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 368 —

Article 303.— En cas d’identification de transfusion de sang à un patient, quelle que soit

son affection, la transfusion de sang assortie d’un examen spécifique pour confirmer son

caractère sécurisant est obligatoire.

Article 304.— il est créé au sein du Ministère chargé de la Santé un Centre National de

Transfusion Sanguine, en abrégé « CNTS », chargé d’organiser sur l’ensemble du Territoire

National le prélèvement, la préparation, le stockage et la distribution du sang et de ses

dérivés.

En fonction des besoins, tels que visés à l’article précédent, le Centre National de

Transfusion sanguine peut être appuyé dans ses missions :

— par des Centres Régionaux de Transfusion sanguine, en abrégé « CRTS », au niveau

des Centres Hospitaliers Universitaires et des Centres hospitaliers de Référence Régionaux ;

— et par des Postes de Transfusion Sanguine en abrégé « PTS », au niveau des Centres

Hospitaliers de District niveau 2. Les Centres Régionaux de Transfusion Sanguine et les

Postes de Transfusion sanguine sont placés sous l’autorité administrative du Centre National

de Transfusion Sanguine. Les PTS fonctionnent en tant qu’antennes des CRTS.

Les modalités d’organisation et de fonctionnement du Centre National de Transfusion

Sanguine, des Centres Régionaux de Transfusion Sanguine et des Postes de Transfusion

Sanguine sont fixées par décret pris en Conseil de gouvernement sur proposition du Ministre

chargé de la Santé.

Les établissements de transfusion sanguine, CRTS et PTS, exercent une mission de santé

publique dans le cadre du service public de transfusion sanguine. Ils sont les seuls

établissements habilités à collecter du sang ou ses composants, à préparer les produits

sanguins issus du sang, et à les distribuer sous la direction et la responsabilité d’un médecin

ou d’un pharmacien.

Seuls peuvent être nommés Directeurs du Centre National de Transfusion Sanguine et

des établissements de transfusion sanguine des médecins spécialistes en transfusion sanguine,

ou en santé publique, ou en biologie, ou des pharmaciens inscrits au Tableau de l’Ordre

professionnel dont ils relèvent en figurant sur une liste d’aptitude.

Un décret pris en Conseil du Gouvernement sur proposition du Ministre chargé de la

Santé détermine les conditions dans lesquelles la liste d’aptitude est établie, et notamment la

formation spécialisée et l’expérience pratique dont les directeurs doivent justifier.

Les Directeurs sont nommés par décret pris en conseil des Ministres sur proposition du

Ministre chargé de la Santé.

Le niveau d’activité au niveau des CRTS et PTS peut justifier une fonction de Directeur à

temps partiel.

Article 305.— Chaque établissement agréé organise, suivant les directives du Centre

National de Transfusion Sanguine, le prélèvement et la distribution du sang et de ses dérivés

dans son secteur d’application. La distribution se fait par l’intermédiaire des postes ou dépôts

hospitaliers placés sous sa responsabilité. Aucun dépôt ne peut être organisé en dehors d’un

établissement hospitalier. Chaque poste ou dépôt est placé sous l’autorité d’un médecin

responsable.

Page 370: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 369 —

Le niveau d’activité au niveau des dépôts peut justifier une fonction de responsable à

temps partiel.

Article 306.— L’importation et l’exportation de sang humain et de ses dérivés sont

réservées au Centre National de Transfusion Sanguine. S’il s’agit de produits préparés

industriellement, leur liste est établie par arrêté du Ministre chargé de la Santé.

Seuls les établissements détenteurs de l’agrément peuvent en assurer la distribution sur

l’ensemble du territoire national.

Article 307.— Le Ministre chargé de la Santé adopte par arrêté, sur proposition du

directeur du Centre National de Transfusion Sanguine, les règlements concernant :

— les conditions techniques de la détermination des groupes sanguins ;

— les épreuves servant à contrôler la compatibilité du sang du donneur avec celui du

receveur ainsi que les précautions qui doivent entourer l’utilisation du sang et de ses dérivés ;

— les critères des élections des donneurs et leur surveillance médicale périodique ;

— les conditions et les modalités de prélèvement, de préparation, de conservation, de

délivrance du sang humain et de ses dérivés ;

— les normes de fabrication et les contrôles de qualité auxquels devront répondre les

produits sanguins fabriqués et importés ;

— les installations et les équipements nécessaires à la transfusion sanguine ;

— la zone de collecte de chaque établissement ;

— les tarifs de cession des produits sanguins.

Article 308.— Le Ministre chargé de la Santé approuve sur proposition du Directeur du

Centre National de Transfusion Sanguine le règlement qui précise l’organisation et le

fonctionnement du Centre de Transfusion Sanguine sur l’ensemble du territoire national. Ce

règlement fixe les modalités de fonctionnement du service d’urgence, de transfusion et de

délivrance du sang.

Article 309.— Les établissements de transfusion sanguine assument, même en l’absence

de faute qu’ils auraient pu commettre, la responsabilité des risques que courent les donneurs

à l’occasion des opérations de prélèvement et prennent aussi des mesures pour

responsabiliser les donneurs de ne pas transmettre des maladies aux receveurs.

Ces établissements doivent contacter une assurance couvrant leur responsabilité du fait de

ces risques.

Article 310.— Le Ministre chargé de la Santé désigne des inspecteurs parmi les médecins

ou pharmaciens fonctionnaires qualifiés de son département, qui sont chargés de veiller au

respect des lois et règlements applicables aux établissements de transfusion sanguine et qui

contrôlent notamment à ce titre :

1- les conditions de préparation, de conservation et de délivrance des produits sanguins ;

2- l’application des bonnes pratiques dont les principes sont définis par un règlement

interne établi par la direction du CNTS dans le cadre de la mission qui lui est confiée par le

Ministre chargé de la Santé ;

3- la gestion administrative et financière des établissements.

Page 371: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 370 —

Article 311.— Tout inspecteur du CNTS a qualité pour agir suivant les dispositions de

l’article 199 du présent Code dans le domaine de l’exercice de leurs fonctions énumérées aux

termes des dispositions de l’article 310 in supra. Ils sont habilités à rechercher et à constater

par procès-verbal les infractions aux dispositions législatives et réglementaires dont ils

contrôlent l’application. Dans l’exercice de leur mission, ils ont accès aux locaux et aux

documents des établissements de transfusion sanguine.

Ils peuvent à tout moment, procéder aux contrôles nécessaires qui doivent avoir lieu au

moins une fois par an.

Article 312.— Toute violation par un établissement de transfusion sanguine, des

prescriptions législatives et réglementaires qui lui sont applicables peut entraîner le retrait

temporaire ou définitif de l’agrément technique.

Le retrait ne peut intervenir qu’après mise en demeure adressée à l’établissement de

prendre toutes les mesures propres à remédier à la violation ou au manquement, ou de

fournir toutes les explications nécessaires. La mise en demeure fixe un délai d’exécution qui

ne peut excéder trois mois. Passé ce délai, et à défaut, par le détenteur, de s’être conformé

aux prescriptions découlant de la mise en demeure, le Ministre chargé de la Santé peut

prononcer le retrait de l’agrément technique.

En cas d’urgence et pour des motifs tenant à la protection de la santé publique, le

Ministre chargé de la Santé, après avoir entendu les responsables de l’établissement de

transfusion sanguine agréé, peut ordonner par décision motivée et à titre provisoire, la

fermeture immédiate de l’établissement pour une période qui ne peut excéder trois (3) mois.

À l’expiration de ce délai, le Ministre chargé de la Santé prend une décision définitive qui est

notifiée, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception à l’établissement de

transfusion sanguine agréé.

Si la fermeture de l’établissement de transfusion sanguine agréé compromet la fourniture

de sang et de ses dérivés sanguins en quantité correspondante aux besoins du pays, le

Ministre chargé de la Santé pourra prendre toutes mesures urgentes et nécessaires et

désigner, à titre provisoire, un organisme de suppléance national ou étranger.

Chapitre III. Des greffes et des transplantations des organes et substances

Article 312 bis.— L’État, par le biais du Ministère de la Santé, doit édicter des

dispositions dans le domaine de la transplantation d’organes, de tissus et de cellules. Ce

faisant, il veille à assurer la protection de la dignité humaine, de la personne et de la santé.

Il veille à une répartition équitable des organes.

Le don d’organes, de tissus et de cellules humaines est gratuit. Le commerce d’organes

humains est interdit.

L’État légifère sur l’utilisation du patrimoine germinal et génétique des animaux, des

végétaux et des autres organismes. Ce faisant, il respecte l’intégrité des organismes vivants et

la sécurité de l’être humain, de l’animal et de l’environnement et protège la diversité

génétique des espèces animales et végétales.

Il est interdit de soumettre une personne sans son libre consentement à une expérience

médicale ou scientifique.

Page 372: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 371 —

Article 313.— Les prélèvements d’organes ou de tissus en vue de transplantation ou de

greffes sur un être humain vivant, sont interdits jusqu’à ce que les conditions de prélèvement,

de préparation, de conservation et d’emploi thérapeutique ne soient réunies et définies par

une loi particulière.

Des prélèvements peuvent être effectués à des fins thérapeutiques ou scientifiques sur le

cadavre d’une personne qui, de son vivant, avait fait connaître légalement par écrit son

accord pour une telle opération.

TITRE III. DU CONTRÔLE DE LA MANIPULATION DES PRODUITS À BASE

MICROBIENNE

Article 314.— Toute personne patentée ou non, préparant ou expérimentant même dans

un but désintéressé, des virus atténués ou non, sérums thérapeutiques, toxines modifiées ou

non et divers produits d’origine microbienne non chimiquement définis, pouvant servir, sous

une forme quelconque, au diagnostic, à la prophylaxie ou à la thérapeutique, est tenue de

souscrire, pour elle-même et pour le personnel à son service, à quelque titre que ce soit, une

déclaration indiquant l’état civil, la nationalité, le domicile de chaque intéressé, ainsi que la

nature exacte des travaux à lui confiés.

Article 315.— Toute modification dans la composition du personnel doit faire l’objet

d’une déclaration de même nature dans les huit jours de l’entrée en fonction dudit personnel

après modification.

Article 316.— Un texte réglementaire détermine ultérieurement, s’il y a lieu, les autres

renseignements qui pourraient être exigés, sous peine des sanctions prévues ci-après, en ce

qui concerne les opérations relatives aux produits mentionnés à l’article ci-dessus.

LIVRE VIII. DES RESPONSABILITÉS DU PERSONNEL ET DES PRESTATAIRES DE

SERVICE AU SEIN DE L’ADMINISTRATION SANITAIRE

TITRE PREMIER. DE LA CLASSIFICATION DES RESPONSABILITÉS

Article 317.— Sans préjudice des dispositions des textes législatifs et réglementaires en

matière de responsabilité ainsi que des sanctions qui en découlent, il est institué au sein du

Ministère chargé de la Santé un système de responsabilités engageant son personnel et ses

prestataires de service.

Les différentes catégories de responsabilité assumée par le personnel relevant du

Ministère chargé de la Santé ainsi que par ses prestataires de service peuvent être classées en :

— responsabilité d’ordre général ;

— responsabilité d’ordre particulier ;

— responsabilité d’ordre personnel.

Page 373: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 372 —

TITRE II. DES RESPONSABILITÉS D’ORDRE GÉNÉRAL

Article 318.— Ce sont des obligations engageant la responsabilité des supérieurs

hiérarchiques donneurs d’ordre. Ces responsabilités ne peuvent être que d’ordre moral ou

d’ordre disciplinaire. Elles ne concernent que le Ministre, les Membres du Cabinet, le

Secrétaire Général ainsi que les Directeurs Généraux. Ce, nonobstant les dispositions des

articles 13, 14 et 15 de la Loi n° 2003-011 du 3 septembre 2003 portant Statut Général des

Fonctionnaires ainsi que celles des textes législatifs et réglementaires concernant les finances

et la Comptabilité Publiques, en particulier, celles de la Loi n° 2004-006 du 26 juillet 2004

portant réorganisation et fonctionnement du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière.

Elles sont d’ordre moral, dans la mesure où elles se traduisent par un jugement de valeur

sur le personnel qui les encoure.

Elles sont d’ordre disciplinaire, lorsque la gravité des faits donne lieu à une sanction

disciplinaire.

TITRE III DES RESPONSABILITES D’ORDRE PARTICULIER

Article 319.— Ce sont les responsabilités qui sont délimitées par les textes législatifs et la

réglementation en vigueur. Elles s’attachent à certaines fonctions bien définies, à savoir :

— celles des ordonnateurs ;

— celles des gestionnaires et comptables.

Article 320.— Néanmoins, les Directeurs ainsi que les Chefs de Service, en tant que

premiers responsables de leur circonscription respective, ne sont dégagés d’aucune des

responsabilités qui leur incombent, par la responsabilité propre de leurs subordonnés. Ils

sont responsables de l’exécution des ordres qu’ils ont donnés à leurs subordonnés. À charge

pour eux de rendre compte à leur Supérieur hiérarchique de l’exécution des missions en

espèce et le cas échéant, des raisons qui n’ont pas permis l’exécution de ces missions. Ce,

jusqu’à preuve d’existence de cas de force majeure ou d’existence avérée ou prouvée d’abus

de fonction commis par les subordonnés.

Article 321.— Pour les ordonnateurs, ces responsabilités sont d’ordre disciplinaire et

d’ordre pénal ; elles peuvent entraîner des amendes infligées par un Conseil Supérieur

Financier de Santé dont la création, l’organisation et le fonctionnement sont fixés par Décret

pris en Conseil du Gouvernement, sur proposition du Ministre chargé de la Santé.

Article 322.— Pour les gestionnaires et comptables, en sus des sanctions visées in supra,

ces responsabilités sont d’ordre pécuniaire et le remboursement peut se traduire, soit par un

débet comptable pris par arrêté du Ministre chargé des Finances et du Budget sur

proposition du Conseil Supérieur Financier de Santé ; soit par une imputation au niveau des

soldes et accessoires de l’intéressé sur décision du Conseil Supérieur Financier de Santé,

après visas préalables du Ministre des Finances et du Budget ainsi que du Contrôle Financier.

Article 323.— Les sanctions sont prononcées par le Conseil Supérieur Financier de Santé,

après études des dossiers litigieux, communications des faits à l’(aux)intéressé(s) et réception

de ses (leurs) arguments de défense. La décision prise, après visas du Ministre chargé des

Finances et du Budget et du Contrôle Financier est applicable, indépendamment des

décisions pénales. Le recours devant les Tribunaux n’est pas suspensif de l’application de la

décision du Conseil Supérieur Financier de Santé.

Page 374: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 373 —

Cette responsabilité d’ordre pécuniaire est indépendante des sanctions disciplinaires et

pénales qui peuvent également être prononcées. Toutefois, priorité est donnée à la

responsabilité d’ordre pécuniaire, dans la mesure où il s’agit avant tout de viser la réparation

financière entière et complète des dommages subis par le Ministère chargé de la Santé.

Article 324.— Ces responsabilités imputables aux gestionnaires et comptables concernent

aussi les Directeurs et les Chefs de Service du Ministère chargé de la santé assumant des

fonctions de gestion administrative et financière. Dans tous les cas, ces responsabilités ont

un caractère co-solidaire dans la mesure où le premier responsable est l’auteur principal

tandis que ses subordonnés sont des co-auteurs.

Article 325.— Les dispositions des articles 321 à 324 in supra sont applicables aux

intervenants du Secteur Santé ci-après :

— les Directeurs Ordonnateurs Délégués ou gestionnaires d’activités ;

— les Chefs de Service gestionnaire d’activités ;

— les Agents gestionnaires d’activités ;

— les comptables ;

— les dépositaires comptables du matériel en service ;

— les dépositaires comptables des chèques carburants et lubrifiants ;

— les détenteurs effectifs ;

— les utilisateurs de crédits et des valeurs fiduciaires ;

— les dispensateurs des médicaments ;

— les prestataires de service, partenaires en matière de gestion des médicaments, sans

préjudice des dispositions des contrats de concession ou d’éventuelles lettres prévoyant un

engagement ou un désengagement de responsabilité. Les dispositions du présent Code

priment sur celles de tout contrat, convention ou concession de service établi entre le

Ministère chargé de la Santé et ses partenaires prestataires de service.

TITRE IV DES RESPONSABILITES D’ORDRE PERSONNEL

Article 326.— Ces responsabilités concernent tout le personnel sans distinction du

Ministère chargé de la Santé, exception faite des supérieurs hiérarchiques énumérés à

l’article 318 ci-dessus, en cas de faute personnelle grave commise dans l’exercice ou à

l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, entre autres pour détournement de fonds ou de

deniers publics convaincu. Ou quand il y a faute intentionnelle caractérisée ou faute de

service d’ordre technique à l’instar de la détérioration ou de la perte de matériels en service,

de consommables ou produits médicaux. Et surtout lorsqu’il est prouvé que la faute

commise est une faute détachable du service.

Article 327.— Plus particulièrement, outre le personnel relevant du Ministère chargé de la

Santé, les responsabilités susvisées engagent aussi les partenaires assurant des prestations de

service ci-après :

— les dispensateurs ;

— les prestataires ;

— les entrepreneurs ;

Page 375: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 374 —

— les fournisseurs.

LIVRE IX. DES PEINES ET MESURES DISCIPLINAIRES APPLICABLES EN CAS

D’INFRACTION

TITRE PREMIER. DES SANCTIONS PÉNALES

Article 328.— Toutes infractions aux mesures sanitaires édictées dans les Chapitres I, II

et III du Titre premier du Livre Premier du présent Code, sont punies des peines prévues à

l’article 329 et 330 ci-dessous du même Code, sans préjudice des poursuites pénales prévues

par le Code Pénal, et des poursuites disciplinaire pouvant en résulter.

Article 329.— Toutes les infractions aux mesures édictées par le présent Code et

destinées à la protection contre la pollution des eaux potables et à la protection de

l’environnement ainsi que celle destinée à la surveillance des eaux et de toutes des denrées

alimentaires livrées à la consommation, sont punies d’une peine d’emprisonnement d’un

mois à trois ans et demi et d’une amende de 150.000 Ariary à 1.500.000 Ariary ou de l’une de

ces deux peines seulement.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Sont aussi interdites, sous peine d’encourir les mêmes peines :

— la livraison à la consommation humaine d’eau réputée non potable ;

— les fraudes, les falsifications, la commercialisation des denrées alimentaires falsifiées,

corrompues ou toxiques, des produits destinés à falsifier les denrées alimentaires et

l’incitation à falsification ainsi que toute tentative des actes répréhensibles ci-dessus

énumérés.

Les dispositions qui précèdent se réfèrent aux principes du « pollueur-payeur », à la Loi

n° 98-029 du 20 janvier 1999 portant Code de l’Eau et à la Loi n° 99-021 du 9 août 1999 sur

la politique de gestion et de contrôle des pollutions industrielles.

Article 330.— Tout concessionnaire d’une distribution d’eau potable qui, par inattention,

négligence, manque de précaution, inobservation des règlements sanitaires ou des

prescriptions d’un cahier de charges a occasionné la livraison d’une eau de boisson

susceptible de nuire à la santé du public ou tout pollueur, est puni d’une amende de 18.000

Ariary à 600.000 ariary et d’un emprisonnement d’un mois à six mois ou de l’une de ces deux

peines seulement, sans préjudice des dispositions de la loi n° 98-029 du 20 janvier 1999

portant Code de l’Eau, en la matière. En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Article 331.— Tout individu qui refuse de déférer aux réquisitions d’urgence, à lui

adressées, par un agent qualifié en sa qualité d’autorité publique ; telles que stipulées par

l’article 75 du présent Code, est puni d’une amende de 4.000.000 Ariary à 9.000.000 Ariary et

d’un emprisonnement de six mois à un an ou de l’une de ces deux peines seulement.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Article 332.— L’exercice illégal de la profession de médecin, d’acupuncteur, de

pharmacien ou d’odonto-stomatologiste est puni d’une amende de 2.000.000 Ariary à

Page 376: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 375 —

50.000.000 Ariary et d’un emprisonnement d’un mois à un an ou de l’une de ces deux peines

seulement.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Il peut, en outre, être prononcé la confiscation du matériel médical ayant permis l’exercice

illégal.

Article 333.— L’exercice illégal de la profession de sage-femme est puni d’une amende de

2.000.000 Ariary à 50.000.000 Ariary et d’un emprisonnement d’un mois à un an ou de

l’une de ces deux peines seulement. En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Il peut, en outre, être prononcée la confiscation du matériel ayant permis l’exercice illégal.

En cas de décès survenu à l’occasion de l’exercice illégal de la profession de sage-femme,

l’auteur et ses coauteurs sont punis d’une peine criminelle de travaux forcés pouvant aller aux

travaux forcés à perpétuité, conformément aux dispositions de l’article 304 dernier alinéa du

Code Pénal.

Article 334.— Tout membre des corps médical et paramédical convaincu d’avoir fait ou

ayant tenté de faire une fausse déclaration en vue de son inscription au Tableau de l’Ordre,

est puni d’une amende de 120.000 Ariary à 1.200.000 Ariary et d’un emprisonnement d’un

mois à un an, ou de l’une de ces deux peines seulement, sans préjudice de poursuites pénales

conformément aux dispositions du Code Pénal ou du présent Code.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Article 335.— L’exercice illégal de la profession d’infirmière est puni d’une amende de

2.000.000 Ariary à 50.000.000 Ariary et d’un emprisonnement d’un mois à trois mois ou

de l’une de ces deux peines seulement. En cas de récidive, les peines seront portées au

double.

Il peut, en outre, être prononcée à la confiscation de tout matériel et accessoire ayant

permis l’exercice illégal.

Article 336.— L’exercice illégal de la profession d’Aide Sanitaire est puni des peines

applicables à l’exercice illégal de la profession de sage-femme ou de la profession

d’infirmière.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Peut en outre être prononcée la confiscation du matériel médical ayant permis l’exercice

illégal.

Les dispositions ci-dessus sont applicables à toute personne prise en flagrant délit ou

convaincue d’exercice illégal de la profession de tradipraticien.

Article 337.— Tout pharmacien ou médecin, à qui il est reproché d’avoir vendu des

échantillons médicaux, ou dénoncé à l’occasion par un consommateur, eu égard à cette

infraction est traduit devant le Conseil de l’Ordre pour violation des dispositions légales et

réglementaires en matières pharmaceutiques.

Article 338.— Quiconque vend des échantillons médicaux est puni d’une amende de

20.000 Ariary à 2.000.000 Ariary et en cas de récidive d’une amende fixée au double, sans

préjudice des poursuites pénales.

Page 377: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 376 —

Tout établissement pharmaceutique se livrant à la détention et à la vente de médicaments

sans Autorisation de Mise sur le Marché est passible d’une amende de 2.000.000 Ariary à

20.000.000 Ariary, sans préjudice des poursuites pénales et autres sanctions

administratives.

Article 339.— Sont punis d’un emprisonnement de cinq à dix ans et d’une amende de

200.000 Ariary à 2.000.000 Ariary ou de l’une de ces deux peines seulement :

— ceux qui transgressent les dispositions des textes concernant la production, le

transport, l’importation, l’exportation, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition et l’emploi

des substances ou plantes vénéneuses classées comme stupéfiant ou comme psychotrope,

ainsi que tout acte se rapportant à ces opérations ;

— ceux qui établissent sciemment des prescriptions de complaisance de drogue à haut

risque ;

— ceux qui, connaissant le caractère fictif ou de complaisance d’une ordonnance donnée,

ont sur la présentation qui leur en a été faite délivrée des drogues à haut risque ;

— ceux qui, au moyen d’ordonnance fictive ou de complaisance, se sont faits délivrer ou

ont tenté de se faire délivrer des drogues à haut risque ;

— ceux qui ont cédé ou offert des drogues à haut risque à une personne en vue de la

consommation personnelle de cette dernière ;

— ceux qui transgressent les dispositions légales concernant la production, la fabrication,

l’extraction, la préparation, la transformation, l’importation, l’exportation, l’offre, la mise en

vente, la distribution, la vente, la livraison à quelque titre que ce soit, l’achat, la détention ou

l’emploi de drogues inscrites aux tableaux II et III des conventions internationales ;

— ceux qui facilitent la délivrance des médicaments à usage médical, stupéfiants et

dangereux ou toxiques sans ordonnance médicale.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Les dispositions du présent article s’appliquent sans préjudice des autres peines prévues

aux dispositions non contraires au Code de la Santé, notamment celles se rapportant aux

stupéfiants, psychotropes et précurseurs.

Article 340.— Quiconque se livre sciemment à la vente illicite de médicaments, sans

réunir les conditions exigées pour l’exercice légal de la pharmacie par transgression de

l’article 155 est passible d’une amende de 2.000.000 Ariary à 50.000.000 Ariary et d’un

emprisonnement de trois mois à trois ans ou de l’une de ces deux peines seulement.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Est prononcée de droit, la confiscation de tout matériel et médicament ayant permis

l’exercice illégal de la fonction de pharmacien.

Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas au dépositaire de médicaments

autorisé à exploiter un dépôt sur arrêté pris par le Ministère chargé de la Santé, sauf cas de

transgression des dispositions des articles 202 à 204 du présent Code.

Article 341.— Quiconque fait une fausse déclaration en vue de son inscription au Tableau

de l’Ordre des Pharmaciens est puni d’une amende de 120.000 Ariary à 1.200.000 Ariary et

Page 378: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 377 —

d’un emprisonnement de six mois à un an ou de l’une de ces deux peines seulement, sans

préjudice des sanctions prévues en la matière.

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Article 342.— Quiconque a contrevenu aux dispositions sur les pharmacies d’officine est

puni d’une amende de 200.000 Ariary à 2.000.000 Ariary et, en cas de récidive, d’une amende

fixée au double, sans préjudice des poursuites pénales.

Article 343.— Toute résistance, toute opposition ou toute entrave à l’exercice de la

fonction des pharmaciens-inspecteurs sont punies d’un emprisonnement de six mois à trois

ans et d’une amende de 20.000 Ariary à 500.000 Ariary ou de l’une de ces deux peines

seulement, sans préjudice des sanctions disciplinaires pouvant être prononcées par le Conseil

de l’Ordre ou de mesures administratives de suspension ou de retrait des autorisations

susceptibles d’être prises par le Ministre chargé de la Santé à l’encontre de l’auteur de

l’infraction.

Article 344.— Toutes infractions relatives à la publicité des médicaments à usage humain,

sans préjudice des sanctions administratives sont punies des peines prévues par

l’Ordonnance n° 73-055 du 11 septembre 1973 relatif à la répression des infractions au

régime des prix et aux interventions en matière économique.

Article 345.— Les infractions aux dispositions sur l’interdiction de publicité concernant

les Établissements des Soins sont passibles d’une amende de 500.000 Ariary à 1.000.000

Ariary et d’un emprisonnement de un mois à un an ou de l’une de ces deux peines

seulement.

En cas de récidive, les peines seront portées au double. Il peut, en outre, être prononcée

la fermeture temporaire ou définitive de l’établissement contrevenant.

Les mêmes peines sont applicables en cas de transgression des interdictions énumérées

dans les dispositions de l’article 89 du présent Code.

Article 346.— Tout médecin, toute sage-femme, tout autre professionnel de Santé, tout

comparant, tout déclarant ou tout témoin qui, lors de la rédaction d’une attestation de

naissance, en aura frauduleusement dénaturé la substance ou les circonstances, soit en

écrivant d’autres déclarations autres que celles qui aurait été tracées ou dictées par les parties,

soit en constatant comme vrais des faits faux, ou comme avouer des faits qui ne l’étaient pas,

sont punis des peines prévues aux articles 145, 146, 147 et 148 du Code Pénal du 30 juin

1998 suivant la nature des infractions commises, sans préjudice des dispositions de la Loi

n° 61-025 du 9 octobre 1961 relative aux actes de l’État Civil, modifiée par la Loi n° 90-015

du 20 juillet 1990 et le autres éventuels textes modificatifs subséquents.

Les mêmes peines sont applicables à tout individu se faisant passer ou ayant tenté de se

faire passer pour un médecin, sage-femme ou autre professionnel de Santé en vue d’établir

une attestation de naissance.

Elles sont aussi applicables en cas de commission des dispositions prévues par

l’article 267 du présent Code.

Article 347.— L’emploi illicite de l’appellation de laboratoires d’analyses médicales ou

toute expression prêtant à confusion avec celle-ci, est puni d’un emprisonnement de trois

mois à trois ans et d’une amende de 50.000 Ariary à 500.000 Ariary ou de l’une de ces deux

peines seulement.

Page 379: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 378 —

En cas de récidive, les peines seront portées au double.

Article 348.— En matière de transfusion sanguine, seront passibles de poursuites pénales

les faits énumérées ci-dessous :

— le trafic de son propre sang ;

— le prélèvement de sang sans le consentement éclairé du donneur ;

— le don de sang contre paiement ;

— l’utilisation du sang et de ses dérivés n’ayant pas fait l’objet d’analyses préalables ;

— la modification ou tentative de modification des résultats à l’issue des analyses du

sang ;

— la divulgation d’information permettant d’identifier le donneur ou le receveur ;

— le prélèvement, le traitement et la délivrance du sang et de ses dérivés en dehors d’un

organisme agréé ;

— le fait de céder du sang ou des produits dérivés du sang à un tarif différent de celui qui

est déterminé par des textes réglementaires régissant la matière.

Article 349.— Les infractions prévues à l’article précédent sont punies :

— d’un emprisonnement d’un (1) à six (6) mois et d’une amende de 40.000 Ariary à

200.000 Ariary ou de l’une de ces deux peines seulement :

— le trafic de son propre sang ;

— le prélèvement de sang sans le concrètement éclairé du donneur ;

— le don de sang contre paiement ;

— d’un emprisonnement de trois (3) mois à deux (2) ans et d’une amende de 100.000

Ariary à 400.000 Ariary ou de l’une de ces deux peines seulement :

— l’utilisation du sang et de ses dérivés n’ayant pas fait l’objet d’analyses préalables ;

— la modification ou la tentative de modification des résultats à l’issue des analyses du

sang ;

— le prélèvement, le traitement et la délivrance du sang et de ses dérivés en dehors d’un

organisme agréé ;

— le fait de céder du sang ou des produits dérivés du sang à un tarif différent de celui qui

est fixé par des textes réglementaires régissant la matière.

TITRE II. DES SANCTIONS DISCIPLINAIRES

Article 350.— Les sanctions disciplinaires édictées par le présent titre s’appliquent, en cas

de traduction devant le Conseil de l’Ordre d’appartenance, indépendamment d’une

éventuelle décision du Conseil de Discipline de la Fonction Publique.

Les peines disciplinaires que les Conseils de l’Ordre des membres des professions

médicales et paramédicales peuvent appliquer sont les suivantes :

— l’avertissement ;

Page 380: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 379 —

— le blâme ;

— l’interdiction temporaire d’exercer pendant une durée maximum de trois (03) ans ;

— la radiation du Tableau de l’Ordre.

Article 351.— Toutes réclamations relatives à l’inscription à l’Ordre, toutes contestations

électorales au sein du Conseil de l’Ordre d’appartenance, toutes sanctions disciplinaires

prononcées à l’encontre d’un praticien par l’Ordre d’appartenance peuvent faire l’objet d’une

requête préalable auprès du Ministère chargé de la Santé qui procède à une séance de

délibération par le biais de la Commission de Discipline stipulée à l’article 352 ci-dessous. En

cas de silence du Ministère chargé de la Santé dans les quarante (40) jours qui suivent la

requête ou de fin de non-recevoir expressément exprimé, le praticien concerné peut intenter

un recours devant la Chambre Administrative.

Néanmoins, le recours devant la Chambre Administrative n’est pas suspensif.

Article 352.— Le Ministère charge de la Santé, saisi par l’Autorité Sanitaire ou Judiciaire

ou par un Praticien ou un Syndicat intéressé peut instituer par arrêté la création d’une

Commission de Discipline de la Santé pour les Ordres (CDSO) chargée de se prononcer sur

la nécessité ou non de dissoudre du Code de déontologie de l’Ordre concerné.

Au lieu et à la place d’un Conseil dissous, le Ministre chargé de la Santé désigne, par

décision ministérielle, une délégation provisoire chargée d’expédier les affaires courantes

jusqu’à l’élection d’un nouveau Conseil.

Les membres d’un conseil dissous d’office ne sont pas éligibles pendant trois (3) ans.

Les dispositions du présent article sont applicables en cas de constatation d’abus

d’autorité commis par l’Ordre intéressé dans l’application des dispositions de l’article 350 ci-

dessus.

La Commission de Discipline de la santé pour les Ordres doit être composée comme

suit :

— le Secrétaire Général du Ministère chargé de la Santé ou son Représentant, Président ;

— deux membres du Cabinet du Ministère chargé de la Santé, un Magistrat désigné par le

Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, deux membres désignés par chaque Ordre

légalement constitué, mais choisis hors des membres du bureau permanent du Conseil de

l’Ordre qui les désigne. Une fois sa mission terminée, la Commission de Discipline de la

Santé pour les Ordres, ainsi constituée, est dissoute d’office. En cas d’une nouvelle saisine

pour régler un autre différend, une nouvelle Commission, composée des membres ci-dessus,

est instituée dans les mêmes formes et les mêmes conditions pour une nouvelle mission

temporaire.

Article 353.— Sans préjudice des sanctions prévues par le présent Code, l’usurpation de

titre de membre des professions médicale et paramédicale ou de tout autre titre permettant

d’exercer l’art des professionnels de santé est punie des peines prévues aux dispositions du

Code Pénal en la matière.

Page 381: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 380 —

LIVRE X. DES DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES

Article 354.— Les procès-verbaux des infractions aux dispositions du présent Code sont

adressés :

— par les médecins ou pharmaciens investis par le présent Code de pouvoirs d’inspection

et participant à ce titre à la police judiciaire dans la limite de leurs attributions ;

— par les autorités administratives compétentes au niveau des régions ;

— par les fonctionnaires tels que les contrôleurs des marchés ou inspecteurs d’hygiène,

les architectes communaux et tous les autres agents habilités par le Ministère chargé de la

Santé, eu égard aux fonctions qu’ils exercent ou à leur compétence technique.

Les membres du personnel de la Police et de la Gendarmerie qui ont qualité d’officiers ou

d’agents de la police judiciaire sont habilités à dresser lesdits procès-verbaux dans le cadre de

leurs attributions normales qu’ils tiennent du Code de Procédure Pénale.

Article 355.— Compte tenu de l’existence effective d’unités distinctes de formation

spécialisée de médecins, d’odonto-stomatologistes et de pharmaciens, et sauf autorisation

exceptionnelle octroyée par le Ministre chargé de la Santé, chaque membre d’un des corps

médical, de pharmacien ou d’odonto-stomatologiste doit exercer son art dans les limites de la

formation qu’il a reçue et des capacités que lui confèrent les diplômes dont il est titulaire.

L’autorisation exceptionnelle qu’il reçoit du Ministère de tutelle ne peut être justifiée que

par l’inexistence ou l’incapacité temporaire d’un membre d’un corps dont l’art peut être

exercé par un membre d’un autre corps, et ce, dans le respect du droit de chacun à avoir

accès aux soins médicaux ou aux médicaments.

Les modalités d’application du présent article sont précisées par voie réglementaire.

Article 356.— Sous peine de nullité des actes de constatation, les autorités ou agents

habilités à les effectuer doivent être assermentés.

Article 357.— Les médecins inspecteurs, les médecins chefs de formations sanitaires,

fixes ou mobiles, les médecins chefs des bureaux d’hygiène peuvent être requis par les

autorités administratives pour la constatation des infractions en qualité d’expert.

Article 358.— À titre transitoire, les changements concernant la répartition ainsi que la

dénomination, le domaine d’activités, les limites territoriales des Établissements Hospitaliers

et des Centres de Soins, des centres de Référence de premiers recours et de deuxième

recours sont fixés :

— soit par décret d’application de la présente loi portant Code de la Santé ;

— soit par tout texte réglementaire fixant les attributions du Ministre chargé de la Santé

ainsi que l’organisation générale de son Ministère.

À titre transitoire, dans le présent Code, la répartition et la dénomination, le domaine

d’activités et les limites territoriales sus énumérées demeurent sans changement. Il en est de

même pour la dénomination actuelle des institutions existantes au sein du Ministère chargé

de la Santé.

Article 359.— Toutes dispositions antérieures à celles de la présente loi, notamment celles

de l’Ordonnance n° 62-072 du 29 septembre 1962 ainsi que celles de ses textes modificatifs,

sont et demeurent abrogées.

Page 382: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 381 —

Article 360.— Conformément aux dispositions de l’article 4 de l’ordonnance n° 62-041

du 19 septembre 1962 relative aux dispositions générales de droit interne et de droit

international privé, la présente loi entre en vigueur sur toute l’étendue du territoire de la

République dès la date de sa signature une fois diffusée sur les ondes radiotélévisées

nationales, indépendamment de son insertion au Journal Officiel de la République ainsi que

de la publication de ses textes réglementaires d’application.

Elle sera exécutée comme Loi de l’État.

Promulguée à Antananarivo, le 15 juillet 2011

Andry Nirina RAJOELINA

Page 383: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 382 —

CODE DE DÉONTOLOGIE MÉDICALE (MADAGASCAR)

Page 384: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 383 —

NOTE DE PRÉSENTATION RELATIVE AU PROJET DE DÉCRET PORTANT CODE DE DÉONTOLOGIE MÉDICALE

Ministère de la Santé publique

Note de présentation relative au projet de décret portant Code de Déontologie Médicale.

Dans le cadre de la mise en place de la stratégie de lutte contre la corruption qui sévit

dans les milieux médicaux ainsi que dans le cadre de la mise en application des nouvelles

dispositions de la loi n° 2011-002 du 15 juillet 2011 portant Code de la Santé, il convient de

réactualiser les textes réglementaires régissant les professionnels de santé. Il en est ainsi du

décret n° 98-945 du 4 novembre 1998 portant Code de Déontologie Médicale. Le projet de

décret qui fait l’objet de la présente Note est appelé à remplacer ledit décret. Le décret n° 98-

945 du 4 novembre 1998 sus cité reste jusqu’à maintenant le texte qui régit dans son

ensemble, les droits et obligations propres aux médecins.

Certaines des dispositions de ce décret ont été reprises, tandis que d’autres ont été

renforcées dans le but de pallier aux laisser aller. Des liens étroits existent encore entre les

deux Codes de Déontologie Médicale. Mais il est évident qu’entre 1998 et 2012,

d’importantes données nouvelles ayant des impacts sur l’évolution de la santé sont

intervenues. Des progrès considérables ont été accomplis dans les divers domaines de la

santé. Plus de dix ans se sont écoulés durant lesquels de nombreux problèmes ont été

soulevés, remettant ainsi en cause l’actuelle déontologie médicale.

Ces derniers temps, il apparaît que certains médecins dévient de leurs rôles et missions.

Ces agissements peuvent s’expliquer par le fait que le Code de Déontologie Médicale n’est

plus conforme aux réalités actuelles.

Ainsi, le moment est jugé opportun par le Ministère de la Santé de réviser l’actuel Code

afin d’éradiquer certaines pratiques répréhensibles, permettant ainsi de garantir les droits des

médecins d’une part, et d’instituer un garde fou contre les dérivatifs de certains Médecins,

d’autre part.

Le nouveau Code de Déontologie comporte 74 articles répartis en 18 chapitres et fut déjà

validé lors des IVème Assises Nationales de l’Ordre des médecins de Madagascar, qui se sont

tenues les 13-14 octobre 2005 au Hilton Madagascar, et auxquelles ont participé tous les

Médecins de Madagascar, représentés par le Conseil National et les Conseils Régionaux

respectifs de l’Ordre des Médecins. Il fut récemment finalisé et mis en harmonie avec les

dispositions de la loi n° 2011-002 du 15 juillet 2011 sus mentionnée.

Tel est, Son Excellence Monsieur Le Premier Ministre, Messieurs Les Vice-Premiers

Ministres, Mesdames et Messieurs Les Ministres, Monsieur Le Secrétaire d’Etat, l’objet de la

présente Note de Présentation concernant le projet de décret portant Code de Déontologie

Médicale que j’ai l’honneur de soumettre à votre haute approbation.

Dr Ndahimananjara Johanita

DÉCRET N° 2012-0632 PORTANT CODE DE DÉONTOLOGIE MÉDICALE

Ministère de la Santé publique

Page 385: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 384 —

Décret n° 2012-0632 portant Code de déontologie médicale.

le Premier ministre, chef du gouvernement de transition nationale,

Vu la Constitution,

Vu la loi n° 2011-014 du 28 décembre 2011 portant insertion dans l’ordonnancement

juridique interne de la Feuille de Route signée par les acteurs politiques Malagasy le

17 septembre 2011 ;

Vu la loi n° 2003-011 du 3 septembre 2003 portant Statut Général des Fonctionnaires et

ses textes subséquents ;

Vu la loi n° 2011-002 du 15 juillet 2012 portant Code de la Santé ;

Vu la loi n° 2011-003 du 1 août 2011 portant Réforme Hospitalière ;

Vu le décret n° 2003-1158 du 17 décembre 2003 portant Code de Déontologie de

l’Administration et de Bonne Conduite des Agents de l’Etat ;

Vu le décret n° 2011-653 du 28 octobre 2011 portant nomination du Premier Ministre,

Chef du Gouvernement de Transition d’Union Nationale ;

Vu le décret n° 2011-0687 du 21 novembre 2011 modifié par les décrets n° 2012-0495 du

13 avril 2012 et n° 2012-0496 du 13 avril 2012 portant nomination des Membres du

Gouvernement de Transition d’Union Nationale ;

Vu le décret n° 2012-0132 du 31 janvier 2012 modifiant et complétant certaines

dispositions du décret n° 2011-0737 du 13 décembre 2011 fixant les attributions du Ministre

de la Santé Publique ainsi que l’organisation générale de son Ministère ;

Vu les propositions du Conseil de l’Ordre National des Médecins formulées à l’issue des

Assises Nationales des 13 et 14 octobre 2005 ;

Sur proposition du Ministre de la Santé Publique ;

En Conseil de Gouvernement,

Décrète :

Chapitre premier. Des dispositions générales

Article 1.— Conformément aux dispositions de la loi n° 2011-002 du 15 juillet 2012,

celles du présent décret fixent le Code de Déontologie Médicale. Les dispositions du présent

Code s’imposent à tout médecin, à l’exception des médecins militaires lorsqu’ils ne

pratiquent pas à titre privé, exerçant sur l’ensemble du territoire de Madagascar.

Les violations de ces dispositions relèvent de la juridiction disciplinaire de l’Ordre, sans

préjudice des poursuites pénales qu’elles seraient susceptibles d’entraîner. L’Ordre des

médecins est chargé de veiller au respect de ces dispositions.

Article 2.— La vocation du médecin consiste à défendre la santé physique et mentale de

l’homme et à soulager sa souffrance dans le respect de !a vie et de la dignité de la personne

humaine sans discrimination d’âge, de sexe, de race, de religion, de nationalité, de condition

sociale et d’idéologie politique, en temps de paix comme en temps de guerre.

Article 3.— Tout médecin qui s’installe à Madagascar doit pratiquer la langue Malagasy.

Page 386: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 385 —

Chapitre II. Des engagements du médecin

Article 4.— Le médecin doit, en toutes circonstances respecter les principes de moralité,

de probité et de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine.

Article 5.— Le secret professionnel et médical, institués dans l’intérêt des patients et du

médecin, s’imposent à tout médecin sauf dérogations établies par la loi et les règlements.

Article 6.— Le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque

forme que ce soit.

Article 7.— Dans l’exercice de sa profession, le médecin s’engage à donner la priorité aux

intérêts de santé du patient. Le médecin ne peut utiliser ses connaissances professionnelles

que pour améliorer ou maintenir la santé de ceux qui se confient à lui ; en aucun cas il ne

peut agir à leur détriment. Le médecin doit assister moralement le malade et éviter tout

acharnement déraisonnable dans les investigations ou la thérapeutique, il ne doit pas lui faire

courir un risque injustifié. Lorsqu’un médecin discerne qu’une personne auprès de laquelle il

est appelé est victime de sévices ou de privations, il doit mettre en œuvre les moyens les plus

adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection.

S’il s’agit d’un mineur ou d’une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison

de son âge ou de son état physique ou psychique, il doit, sauf circonstances particulières qu’il

apprécie en conscience, informer les autorités judiciaires, médicales ou administratives.

Article 8.— Tout médecin est responsable de ses décisions et de ses actes.

Article 9.— Le médecin dans l’exercice de sa profession, s’interdit d’informer le patient

ou de lui imposer ses opinions personnelles, philosophiques, religieuses, morales ou

politiques.

Article 10.— Tout médecin doit s’abstenir, même en dehors de l’exercice de sa profession

de tout acte de nature à déconsidérer celle-ci.

Article 11.— Sont interdits :

1) Tout acte de nature à procurer au patient un avantage matériel injustifié ou illicite ;

2) Toute ristourne en argent ou en nature faite à un patient ;

3) Tout versement, acceptation ou partage clandestin d’argent entre praticiens ;

4) L’acceptation d’une commission pour tout acte médical notamment pour examens,

prescriptions de médicaments, d’appareils médicaux, envoi dans une station de cure ou

maison de santé.

Article 12.— Le médecin doit, sans céder à aucune demande abusive, faciliter l’obtention

par le patient des avantages sociaux auxquels son état lui donne droit.

Article 13.— Est puni d’une peine prévue par les dispositions de l’article 160 du Code

Pénal, tout membre du Corps médical qui délivre un rapport tendancieux ou un certificat

médical de complaisance.

Sont assimilés à un rapport tendancieux ou à un certificat médical de complaisance, le fait

pour ces actes de viser :

Page 387: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 386 —

a. de dispenser une personne d’une obligation de service public légalement due ou la

soustraire à une contrainte prévue par la loi telle notamment une mesure de garde à vue ou

une enquête judicaire ;

b. d’éviter à une personne condamnée à une peine d’emprisonnement ou en détention

préventive les contraintes d’un séjour dans un établissement pénitentiaire en la faisant

admettre, sans motifs dûment justifiés, dans un établissement hospitalier ou une formation

sanitaire, hors du milieu carcéral ;

de porter préjudice à l’une ou l’autre partie dans un procès sans qu’il y ait lieu d’établir

l’existence d’un fait de corruption.

Article 14.— L’authenticité du contenu d’un certificat médical ne peut être remise en

cause sur demande du patient ou de l’administration intéressée ;

Dans ce cas, il sera procédé à une contre-expertise par ordonnance du Président du

Tribunal du ressort du territoire de l’autorité qui a délivré le certificat.

Trois Médecins sont désignés pour cette contre-expertise dont :

deux, ayant des connaissances sur la maladie du patient désignés par le Ministre chargé de

la Santé ou son représentant,

un généraliste désigné par le Conseil de l’Ordre National des Médecins.

Le Président du Tribunal fixe le délai d’exécution de la contre-expertise compte tenu de

l’état du patient.

Le Procès-verbal de constatation est dressé en quatre (04) exemplaires destinés au

Ministère chargé de la Santé, au Conseil de l’Ordre National des Médecins, au Service

employeur du médecin et aux autorités judiciaires chargées de l’enquête.

Article 15.— Est interdit de pratiquer et ou de favoriser l’exercice illégal de la médecine.

Le médecin s’interdit d’associer à sa consultation une personne non autorisée à exercer la

médecine.

Article 16.— Les médecins ne peuvent proposer aux patients ou à leur entourage comme

salutaire ou sans danger un remède ou un procédé insuffisamment éprouvé scientifiquement.

Toute pratique de charlatanisme est interdite.

Article 17.— Le forfait en échange ou non d’une promesse d’efficacité d’un traitement est

interdit en toutes circonstances.

Article 18.— Toute ordonnance, certificat, attestation ou document délivré par un

médecin doit comporter :

— son identité ;

— sa spécialité ou ses compétences ;

— ses coordonnées ;

— son numéro d’inscription au tableau de l’Ordre ;

— sa signature manuscrite ;

Il doit être daté et rédigé lisiblement.

Page 388: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 387 —

Chapitre III. Du consentement éclairé

Article 19.— Sauf urgence, le médecin doit informer le patient sur les effets et les

conséquences secondaires aux moyens diagnostics et thérapeutiques et recherchera le

consentement du patient, surtout lorsque les actes proposés présentent un risque sérieux.

Le médecin ne peut substituer sa propre conception de la qualité de la vie à celle de son

patient.

Article 20.— Un médecin appelé à donner des soins à un mineur ou à un majeur protégé

doit s’efforcer de prévenir ses parents ou son représentant légal et d’obtenir leur

consentement.

En cas d’urgence, le médecin doit donner les soins strictement nécessaires.

Si l’avis de l’intéressé peut être recueilli, le médecin doit en tenir compte.

Chapitre IV. De l’indépendance morale et technique

Article 21.— Tant pour conseiller que pour agir, le médecin doit disposer de son entière

liberté professionnelle et des conditions techniques et morales lui permettant d’agir en toute

indépendance.

Le patient doit être informé si ces conditions n’étaient pas réunies.

Dans les limites fixées par les textes législatifs et réglementaires, le médecin est libre de

ses prescriptions qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance, en

veillant à la bonne qualité, la sécurité et l’efficacité des soins. Il doit tenir compte des

avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et

thérapeutiques possibles.

Article 22.— Lorsque le médecin agit pour le compte d’une autorité privée ou publique,

pour une tierce personne ou une institution, il doit en informer le patient.

Chapitre V. Du secret professionnel

Article 23.— Le médecin est le confident nécessaire du patient. Il doit lui garantir le

secret total de toutes les informations qu’il aura recueillies et des constatations qu’il aura

effectuées lors de ses contacts avec lui.

Le secret médical n’est pas aboli par la mort des patients.

Le médecin doit respecter la vie privée des patients et prendre toute mesure nécessaire

pour rendre impossible la révélation de ce qu’il aura appris a l’occasion de l’exercice de sa

profession.

Lorsque le droit prévoit des exceptions à l’obligation du secret médical, le médecin pourra

recueillir l’avis préalable de l’Ordre des médecins.

Article 24.— Toute banque de données médicales informatisée devrait être placée, pour

le respect de l’éthique professionnelle, sous la responsabilité d’un médecin nommément

désigné. Lors de la constitution de banques électroniques de données, le médecin doit veiller

à ne pas mettre en danger ou amoindrir le droit du patient à l’intimité, à la sécurité et à la

protection de sa vie privée.

Page 389: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 388 —

Les banques de données médicales ne peuvent avoir aucun lien avec d’autres banques de

données.

Article 25.— Lorsque la loi et les règlements prévoient qu’un patient peut avoir accès à

son dossier par l’intermédiaire d’un médecin, celui-ci doit remplir cette mission en tenant

compte des seuls intérêts du patient et de récuser le cas échéant.

Chapitre VI. De la compétence du médecin

Article 26.— Le médecin doit faire appel aux ressources médicales nécessaires dans

l’intérêt de son patient.

Article 27.— Le médecin ne peut faire état d’une compétence qu’il ne possède pas.

Il doit faire appel à un confrère dès qu’un examen ou un traitement dépasse ses

compétences.

Article 28.— L’exercice de la médecine implique en toutes circonstances le respect

constant de la vie, de l’autonomie morale et du libre choix du patient. Cependant le médecin

peut, en cas d’affection incurable et terminale, se limiter à soulager les souffrances physiques

et morales du patient en lui donnant les traitements appropriés et en maintenant autant que

possible la qualité d’une vie qui s’achève. Le médecin n’a pas le droit de provoquer

délibérément la mort.

Chapitre VII. De la greffe d’organes

Article 29.— Les prélèvements d’organes peuvent être effectués chez un malade ou un

accidenté pour lequel il est impossible d’inverser le processus terminal de cessation des

fonctions vitales entretenues artificiellement. Les médecins s’assureront du décès du patient

en tenant compte des données les plus récentes disponibles de la science. Au moins deux

médecins veilleront à établir séparément un document de cette situation.

Ils seront indépendants de l’équipe chargée de la greffe.

Article 30.— Les médecins chargés de prélever un organe destiné à la greffe peuvent

appliquer des traitements particuliers visant à garder en activité les organes destinés à cette

greffe.

Article 31.— Les médecins préleveurs s’assureront par tous les moyens possibles de ce

que le donneur n’a pas exprimé d’avis de son vivant, ni par écrit, ni auprès de ses proches.

Chapitre VIII. De la reproduction

Article 32.— Le médecin donnera au patient et à sa demande tout renseignement utile en

matière de reproduction et de contraception. Il est conforme à l’éthique pour un médecin, en

raison de ses propres convictions, de refuser d’intervenir dans le processus de reproduction

en invitant les intéressés à solliciter l’avis d’autres confrères.

Page 390: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 389 —

Chapitre IX. Des recherches biomédicales et de l’expérimentation sur l’homme

Article 33.— Le médecin ne peut participer à des recherches biomédicales sur les

personnes que dans les conditions prévues par la loi. Il doit s’assurer de la régularité et de la

pertinence de ses recherches ainsi que de l’objectivité de leurs conclusions.

Le médecin traitant qui participe à une recherche biomédicale en tant qu’investigateur

doit veiller à ce que la réalisation de l’étude n’altère ni la relation de confiance qui le lie au

patient ni la continuité des soins.

Article 34.— Le progrès en médecine est fondé sur la recherche qui ne peut se passer

d’une expérimentation portant sur l’homme. Le protocole de toute expérience projetée sur

l’homme doit être soumis au préalable à une commission d’éthique indépendante de

l’expérimentateur pour avis et pour conseil.

Article 35.— Le consentement libre et éclairé du sujet de l’expérience sera recueilli après

l’avoir informé de manière adéquate des objectifs, méthodes et bénéfices escomptés ainsi que

des risques et désagréments potentiels, de son droit de ne pas participer à l’expérimentation

et de s’en retirer à tout moment.

Article 36.— Le médecin ne peut associer la recherche biomédicale avec des soins

médicaux, en vue de l’acquisition de connaissances médicales nouvelles, que dans la mesure

ou cette recherche biomédicale est justifiée par une utilité diagnostique ou thérapeutique

potentielle à l’égard de son malade.

Chapitre X. Des tortures et des traitements inhumains

Article 37.— Le médecin ne doit jamais participer ou contribuer à des actes de torture ou

autre forme de traitements cruels, inhumains ou dégradants quels que soient les arguments

invoqués (faute commise, accusation, croyances…) et ce dans toutes circonstances.

Article 38.— Le médecin ne doit jamais utiliser ses connaissances, sa compétence ou son

habileté en vue de faciliter l’emploi de la torture ou de tout autre procédé cruel inhumain ou

dégradant utilisé à quelque fin que ce soit.

Article 39.— Un médecin amené à examiner une personne privée de liberté ou à lui

donner des soins, ne peut directement ou indirectement, ne serait-ce par sa seule présence,

favoriser ou cautionner une atteinte à l’intégrité physique ou mentale de cette personne ou à

sa dignité.

S’il constate que cette personne a subi des sévices ou des mauvais traitements, il doit en

informer les autorités administratives sanitaires et les autorités judiciaires.

Chapitre XI. Du médecin et de la société

Article 40.— Pour accomplir sa mission, le médecin a le droit à la protection légale de son

indépendance professionnelle en temps de paix comme en temps de guerre. L’arrestation

d’un médecin pour des motifs professionnels doit avoir l’avis du Conseil de l’Ordre des

Médecins.

Page 391: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 390 —

Article 41.— Le médecin a pour devoir d’attirer l’attention de la collectivité sur les

insuffisances dans les domaines de la prévention et de l’indépendance professionnelle des

praticiens.

Article 42.— Le médecin est tenu de participer à l’élaboration et à l’exécution de toutes

les mesures collectives visant à améliorer la prévention, le diagnostic et le traitement des

maladies. En particulier, il est tenu de collaborer du point de vue médical à l’organisation de

secours, notamment en cas de situation de catastrophe.

Article 43.— Le médecin doit participer, dans la mesure de ses compétences et de ses

possibilités à l’amélioration constante de la qualité des soins et au perfectionnement continu

de ses connaissances de manière à offrir au patient des soins conformes aux données de la

science. Il doit prendre toutes dispositions nécessaires pour participer à des sessions de

formation médicale continue.

Chapitre XII. De la confraternité

Article 44.— Les règles de la confraternité sont instaurées pour préserver l’honneur de la

profession médicale et dans l’intérêt des patients. Elles visent à éviter à ceux-ci d’être

victimes de manœuvres de concurrence déloyale entre médecins.

Article 45.— Le médecin appelé à donner des soins à un patient déjà en traitement chez

un de ses confrères, devrait s’efforcer d’entrer en relation avec ce dernier dans l’intérêt du

malade et cela dans le respect du secret médical.

Article 46.— Tout propos ayant pour objet de dénigrer ou de déconsidérer un confrère

constitue pour un médecin, une faute professionnelle grave.

Article 47.— Le devoir de confraternité n’interdit pas au médecin de communiquer à

l’Ordre des médecins les manquements aux règles d’éthique médicale dont il a eu

connaissance.

Article 48.— C’est un acte de solidarité généreuse de prendre la défense d’un confrère

injustement attaqué, même après la mort de ce dernier.

Article 49.— Tout comportement d’un médecin tendant à soustraire la clientèle à un

praticien est un manquement grave aux devoirs de confraternité.

Chapitre XIII. De la publicité

Article 50.— Le médecin a pour devoir de faire connaître en priorité dans la presse

professionnelle les découvertes qu’il aura faites ou les conclusions de ses études scientifiques

en matière de diagnostic ou de thérapeutique. Il les soumettra à la critique de ses confrères

selon les réglementations en vigueur avant d’en donner connaissance au public non médical.

Article 51.— Toute exploitation publicitaire d’un succès médical ou d’utilisation de

matériel d’investigation médicale au profit d’une personne, d’un groupe ou d’une école est

contraire à l’éthique médicale.

Article 52.— L’exercice de la profession médicale n’est ni une activité artisanale ni une

activité commerciale. Quel que soit son mode d’exercice, salarié, libéral ou public, le médecin

peut faire connaître ses titres et qualifications ainsi que toutes les autres indications

Page 392: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 391 —

nécessaires à l’information du patient, ceci conformément aux dispositions prises par l’Ordre

des Médecins et dans le cadre de la loi.

Une telle information doit être clairement distinguée de toute publicité ou de toute

information susceptible de tromper les patients.

Article 53.— Le médecin ne doit ni tolérer, ni contribuer à la publication de reportages à

caractère publicitaire.il ne doit pas non plus tolérer que les organismes publics ou privés dans

lesquels il exerce ou auxquels il prête son concours utilisent son nom ou son activité

professionnelle à des fins publicitaires.

Article 54.— Le médecin peut participer à des reportages publics dans la presse, à la radio

ou à la télévision dans la mesure ou ils servent à informer la population en matière de santé.

Article 55.— Lorsque le médecin participe à une action d’information du public à

caractère éducatif et sanitaire, quel que soit le moyen de diffusion, il doit alors ne faire état

que de données confirmées, faire preuve de prudence et avoir le souci des répercussions de

ses propos auprès du public.

Article 56.— Le médecin doit s’abstenir de faire de la publicité pour sa propre activité. Il

doit également se garder de toute attitude publicitaire personnelle ou en faveur d’une

institution ou d’un produit pharmaceutique.

Article 57.— Le médecin ne peut faire ni réclame, ni publicité. Il n’a pas le droit de faire

distribuer dans le public des tracts pour s’attirer de la clientèle.

Article 58.— Les indications que le Médecin est autorisé à faire figurer à la porte de son

cabinet, sur sa carte de visite, sur ses feuilles d’ordonnance ou dans un annuaire

professionnel, sont :son nom et ses prénoms, son adresse professionnelle, son numéro

d’inscription au Tableau de l’Ordre, les titres qu’il peut justifier par des diplômes ou des

certificats dont copies certifiées sont déposées à l’Ordre des Médecins, les qualifications

reconnues par l’Ordre des Médecins, les distinctions honorifiques reconnues par l’Etat et les

jours et heures de consultation.

Article 59.— Les médecins ne doivent pas divulguer dans les milieux médicaux un

procédé nouveau de diagnostic ou de traitement insuffisamment éprouvé sans accompagner

leur communication des réserves qui s’imposent.

Article 60.— Il est interdit aux médecins, de distribuer à des fins lucratives des

médicaments, sauf dérogation accordée dans les conditions prévues par les dispositions

réglementaires

Article 61.— Tout compérage entre médecins, chirurgiens-dentistes, pharmaciens,

auxiliaires médicaux ou toutes autres personnes physiques ou morales est interdit. Il est

interdit à un médecin de donner des consultations dans les locaux commerciaux où sont mis

en vente des médicaments ou des appareils médicaux, ainsi que dans les dépendances des dits

locaux.

Article 62.— Les médecins doivent entretenir entre eux des relations de bonne

confraternité. Ils se doivent une assistance professionnelle et morale. Un médecin malade a le

droit d’être traité gratuitement par le praticien de son choix et recevoir les soins appropriés.

Sa femme et ses enfants à charge ont les mêmes droits d’assistance, même après la mort du

médecin.

Page 393: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 392 —

Article 63.— L’exercice de la médecine foraine est formellement interdit. Il est aussi

interdit d’exercer la médecine sous un pseudonyme.

Chapitre XIV. De la continuité des soins

Article 64.— Le médecin, quelle que soit sa spécialité, doit considérer comme un devoir

de donner les soins d’urgence à un malade en danger immédiat dans la mesure de ses

possibilités.

Article 65.— Le médecin qui accepte de donner des soins à un patient s’engage à en

assurer la continuité au besoin avec l’aide d’un confrère. Il a le devoir de référer le patient en

cas de nécessité.

Chapitre XV. Du libre choix

Article 66.— Le libre choix du médecin par le malade constitue un principe fondamental

de la relation entre le Médecin et son patient. Le médecin doit respecter et faire respecter

cette liberté de choix.

Le médecin, quant à lui, peut refuser de donner des soins, sauf lorsqu’il s’agit d’un patient

en danger.

Article 67.— Dans toutes les formes d’exercice en commun de la profession médicale, il

convient de veiller à ce que soient préservés le libre choix du médecin par le patient et la

liberté de prescription et de soins du médecin.

Chapitre XVI. De la grève médicale

Article 68.— Lorsqu’un médecin décide de participer à un refus collectif organisé de

soins, il n’est pas dispensé de ses obligations éthiques vis-à-vis des patients à qui il doit

garantir les soins urgents et ceux nécessaires aux malades en traitement.

Chapitre XVII. Des honoraires

Article 69.— Le médecin tiendra compte, dans l’établissement de ses honoraires, des

références fixées par la réglementation en vigueur, de l’importance des prestations rendues,

des circonstances particulières éventuelles et de sa propre compétence.

Chapitre XVIII. Des dispositions diverses

Article 70.— Tout médecin, lors de son inscription au Tableau, doit affirmer devant le

Conseil de l’Ordre qu’il a eu connaissance du présent Code et s’engager sous serment et par

écrit à le respecter. Le non respect des dispositions du présent code l’expose à des poursuites

disciplinaires.

Article 71.— Toute déclaration volontairement inexacte, liée à sa profession, faite au

Conseil de l’Ordre par un médecin entraîne des poursuites disciplinaires.

Article 72.— Un Règlement Intérieur de fonctionnement sera établi par le Conseil

National de l’Ordre des Médecins en application du présent Code. Tout amendement à ce

Règlement Intérieur doit être soumis à l’approbation du Conseil National.

Page 394: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 393 —

Article 73.— Sont abrogées toutes dispositions antérieures contraires au présent décret

notamment celles du décret n° 98-0945 du 04 novembre 1998 portant Code de Déontologie

Médicale.

Article 74.— Le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, le Ministre de la Santé Publique,

le Ministre de la Fonction Publique, du Travail et des Lois Sociales, le Ministre de

l’Enseignement Supérieur, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’application du

présent décret, qui sera publié au Journal Officiel de la République.

Fait à Antananarivo, le 13 juin 2012

Page 395: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 394 —

EXEMPLE DE CONDITIONS PARTICULIÈRES D’UN CONTRAT D’ASSURANCE RESPONSABILITÉ

D’UN PROFESSIONNEL DE SANTÉ (MADAGASCAR)

Page 396: Tahiry Anja Razafiarison La responsabilité médicale à ...

— 395 —

CONVENTIONS SPÉCIALES. RESPONSABILITÉ CIVILE DES PHARMACIENS

A. DÉFINITIONS

Pour l’application des présentes Conventions, il faut entendre par :

— Assuré : Le Pharmacien titulaire d’officine muni des diplômes et autorisations

professionnelles nécessaires à l’exercice de son art.

— Tiers : Toute personne autre que : l’assuré ; ses conjoint, ascendants et descendants ;

ses préposés en service.

B. OBJET DE LA GARANTIE

1°) R.C. Professionnelle

Dans les termes et limites des Conditions Générales, la présente assurance a pour objet de

garantir l’Assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qu’il peut

encourir en raison des dommages corporels et matériels causés aux tiers dans le cadre de

l’exercice de sa profession par suite d’erreurs pharmaceutiques commises par lui-même ou

ses préposés.

— dans l’exécution des ordonnances et analyses ;

— dans les préparations officinales effectuées sur demandes individuelles ;

— dans la délivrance de médicaments ;

— dans la vente d’accessoires de pharmacie ou objets d’hygiène ;

— à l’occasion de prélèvement, de communication de résultats d’analyse et de soins

d’urgence autorisés.

2°) R.C. Exploitation

La présente assurance couvre également les conséquences pécuniaires de la responsabilité

civile que l’Assuré peut encourir en raison des dommages corporels et matériels causés à ses

clients ou à des tiers dans le cadre de l’exploitation de sa pharmacie et provenant du fait :

— de lui-même ;

— de ses préposés en service ;

— des instruments et matériels professionnels ;

— du mobilier, des agencements intérieurs et extérieurs ;

— des locaux, bâtiments ou partie de bâtiment affectés à l’exploitation de la profession.

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— 396 —

C. EXCLUSIONS

Outre les exclusions prévues à l’article 3 des Conditions Générales, sont exclus de la

garantie :

— les dommages causés par tous médicaments délivrés avant la date de souscription du

present contrat ;

— les dommages matériels résultant d’un incendie, d’une explosion ou de l’action

de l’eau ayant prix naissance dans les lieux occupés pour l’exploitation de la

profession.

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INDEX

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Aléa thérapeutique : 43, 174

Appareils médicaux : 40, 41

Asepsie : vigilance de stérilisation : 45

Assurance

Finalité : 21, 188

(civile) professionnelle : 86

Individuelle : 87

De groupe : 88 et s.

Arbitrage : 122, 127, 128, 129

Conciliation : 122, 124 et s.

Cessation de l’illicite : 65

Contrat

Fonction (sociale, économique) : 29

Médical : 15, 22 et s., nature 25, 26

Nature : 25, 26

Perte du fondement contractuel : 15

Contractualisation

Justification : 27 et s., 30

Trajectoire : 14, 15, 23, 28 et s.

Crise : 16

Connaissances avérées de la science : 32

Coutume

Droit pénal coutumier : 3, 6

Fady : 51, 52

Fihavanana : 132 et s.,

Pratique médicale: 3, 4

Responsabilité du corps soignant (guérisseur) : 3

Responsabilité médicale : principe : 4

Réparation : modalités : 5, 67, 187

Réparation pénale : 6, 183

Tangaina : 6

Dualité de juridiction : 7, 9

Démocratie sanitaire : 16, 175

Déontologie : 12

Décision médicale : 189 et s.

Dossier médical : 194 et s.

Dommage : 114 et s.

Dommages et intérêts : 2

Bénéfice-risque, risque injustifié : 16

Exécution, inexécution : 2, 185, 186

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Contractuelle : 2

En nature/par équivalence : 2, 60 et s.

Exercice illégal de la médecine :

En droit coutumier : 6

Sanction pénale : 10

Expert : 32

Faute

Contractuelle/délictuelle : 2, 15, 22

D’imprudence, de négligence, de maladresse : 1, 2, 15

De la victime : 3

Technique : 15, 174

Relationelle : 175

Médicale : 54 et s.

Fokonolona : 5

Imprudence : 1, 174

Infections nosocomiales : 44

Indemnisation : 184 et s.

Barème : 151 et s.

Information

Contenu : 165

Limite : 169

Obligation d’information : 16, 163

Personne de confiance : 176

Infraction

Pénale : 3

Virtuelle : 3, 109

Intégrité corporelle : 189 et s.

Présomption de responsabilité : 44

Principe : 2

Soin : 170 et s.

Juridiction

Dualité entre justice coloniale et droit coutumier : 7, 9

Indigène : 8

Royale : 7

Loi

Code des 305 articles : 7, 69

Décret du 9 juin 1986 sur les Tribunaux compétents à l’époque colonial : 9

Décret n° 2012-0632 portant Code de déontologie malgache : 12

Loi du 4 mars 2002 relative au droit des malades et à la qualité du système de santé : 15, 20, 138, 159 et s.

Loi du 2 juillet 1966 ou la loi sur la théorie générale des obligations à Madagascar - LTGO : 2, 11,

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Ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 portant répression de toutes pratiques de charlatanisme : 3

Ordonnance n° 60-074 du 28 juillet 1960 portant répression de toutes pratiques de charlatanisme : 9

Ordonnance n° 62.037 du 19 septembre 1962 relative aux obligations civiles indépendamment de leurs sources (modalités, exécution et extinction) : 11

Ordonnance n° 62.072 du 29 septembre 1962, modifiée par la loi n° 2011-002 portant Code de la Santé publique : 12

Lien de causalité : 98 et s.

LTGO : 2, 11, 20, 70 et s.

Médecine

Défensive : 16, 164

Traditionnelle : 7

Mesure de publicité : 64

Médiation : 122, 124 et s.

Mutuelle : 145

Principe : 7

Exemple : 148

Négociation : 122

Organismes d’indemnisation

Office national d’indemnisation des accidents médicaux ou l’ONIAM : 15, 126

Connaissance médicale avérée : 32

Commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux ou la CRCI : 15, 126

Fonctionnement : 157

Obligation

(de) coopération : 35

(de) loyauté : 35

(de) moyens : 15, 16, 32 et s.

(de) résultat : 25

(de) sécurité de résultat : 26, 30, 36, 39, 41 et s., 58

Théorie générale des obligations : 2

Preuve

Charge : 15, 108, 109

Prédisposition : 46

Prescription : 15

Préjudice

Évaluation : 110 et s.

Procédure amiable

Principe : 121, 123

Mode de résolution amiable des conflits MARC : 121, 135 et s., 141

Procédure contentieuse : 121

Principe : 61 et s.

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En nature : 62

Par équivalent : 66

Réparation : 61 et s.

Remise en état : 62, 63

Responsabilité

Administrative : 18

Civile : 1, 2, 18

Civile médicale en droit malgache : 2,

Civile pour fait d’autrui (personne, choses) : 2

Contractuelle, délictuelle : 15, 20, 25 et s.

Évolution : 13

Médicale pour faute : 19

Morale : 18

Pénale : 3, 18,

Professionnelle : 22, 30, 31

Responsabilité pour fait des choses : 40

Trajectoire : 15

Tierce personne : 178

Tontines : 146

Réparation

Au titre de la solidarité nationale : 14

En nature/par équivalence : 2, 62 et s., 66

Principe de l’intégralité : 5

Risque : 167

Potentiel : 82, 83

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TABLE DES MATIÈRES

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Sommaire ......................................................................................................................................... 5 INTRODUCTION ................................................................................................... 6

PARTIE I. L’APPRÉCIATION DE L’ENCADREMENT JURIDIQUE DE LA PROFESSION

MÉDICALE À MADAGASCAR À LA LUMIÈRE DU DROIT MÉDICAL FRANÇAIS .......... 44

TITRE I. EXISTENCE D’UN PRINCIPE DE RESPONSABILITÉ APPLICABLE À

LA PROFESSION MÉDICALE À MADAGASCAR ........................................................ 50

Chapitre I. Exposé de la nature contractuelle du rapport médecin-patient en droit positif malgache ................................................................................... 53

Section I. L’étendue du contrat médical à Madagascar ...........................................................56

§ 1. Responsabilité médicale : de nature contractuelle imposant une obligation de moyens .............................................................................................................................58

A. La trajectoire de la qualification délictuelle à la qualification contractuelle ...............59 B. L’obligation médicale : une obligation de moyens .........................................................63

1. Contour de l’obligation de moyens ................................................................................64 2. Émanation de l’obligation de moyens dans le droit médical malgache ....................66

§ 2. L’obligation de sécurité de résultat : limite inhérente à l’obligation de moyens du médecin ............................................................................................................70

A. L’obligation de sécurité de résultat invocable en cas d’inexistence d’aléa .................70 1. L’acte médical : fait non-générateur de dommage corporel .......................................71 2. La volonté de considérer les dommages dus à l’usage d’appareils

médicaux ..........................................................................................................................72 B. L’obligation de sécurité de résultat invocable en présence d’aléa ...............................75

1. L’obligation de sécurité de résultat en cas d’infection nosocomiale .........................76 2. L’obligation de sécurité de résultat et l’état de prédisposition du patient

au dommage ....................................................................................................................80

Section II. La faute : condition et fondement de la responsabilité en droit médical malgache ...................................................................................................................83

§ 1. Les comportements à ne pas enfreindre en droit malgache .........................................84 A. L’étude de la coutume : moyen de discernement de la notion de faute ou

le fady ...................................................................................................................................84 B. L’étude du contrat social malgache : le dinam-pokonolona ..............................................85

§ 2. Les manifestations jurisprudentielles de la faute ............................................................86 A. Manifestation jurisprudentielle de la faute en droit médical malgache ......................87

1. Le visage de la faute à travers les anciens arrêts malgaches ........................................87 2. Le visage de la faute à travers les jurisprudences récentes ..........................................91

B. Manifestation jurisprudentielle de la faute dans les autres pays africains ...................93

Chapitre II. Les modalités et l’étendue du droit de la réparation .......................... 96

Section I. La forme de la réparation ..........................................................................................97

§ 1. La forme de la réparation en droit français.....................................................................99 A. La réparation en nature ................................................................................................... 100

1. Les déploiements de la réparation en nature.............................................................. 100 a. La remise en état ........................................................................................................... 100 b. La mesure de publicité ................................................................................................ 101

2. L’effet de la réparation en nature : la cessation de l’illicite ...................................... 102 B. La réparation par équivalent : les dommages et intérêts ............................................ 103

§ 2. La forme de la réparation en droit malgache ............................................................... 104 A. Les us et coutumes malgaches ....................................................................................... 105 B. Le droit ancien écrit malgache ....................................................................................... 106

Section II. La LTGO : base juridique régissant la responsabilité médicale ...................... 108

§ 1. Les dispositions du texte de la LTGO.......................................................................... 109

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A. La LTGO : expression d’une souveraineté législative nationale .............................. 109 B. Les thèmes récurrents de la LTGO .............................................................................. 110

§ 2. Le déploiement de la ltgo dans le domaine de la responsabilité médicale .............. 112 A. Les dispositions contractuelles de la LTGO invocables en matière de

responsabilité médicale ................................................................................................. 112 B. La dextérité de la LTGO en matière de preuve : confirmation

d’adaptabilité au droit médical ..................................................................................... 114

TITRE II. INEXISTENCE PRATIQUE DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE À

MADAGASCAR ...................................................................................................... 116

Chapitre I. Le système assurantiel des médecins face aux accidents thérapeutiques .................................................................................................. 118

Section I. Le Droit malgache des assurances ....................................................................... 121

§ 1. La théorie des assurances ................................................................................................ 121 A. Les risques potentiels assurables ................................................................................... 122 B. L’assurabilité des risques potentiels à Madagascar ...................................................... 124

§ 2. L’assurance responsabilité civile professionnelle ........................................................ 128 A. Le contrat d’assurance individuelle dans un cadre d’exercice libéral ....................... 128 B. Le contrat d’assurance de groupe dans un cadre d’exercice libéral .......................... 129

1. Les structures juridiques de l’exercice de la médecine libérale en groupe ............. 130 2. Le régime assurantiel compatible à chaque structure ............................................... 131

Section II. L’opportunité de l’obligation d’assurance responsabilité médicale à Madagascar........................................................................................................................... 136

§ 1. Le principe de l’assurance responsabilité civile médicale obligatoire ...................... 137 A. La refonte structurelle du Code des assurances malgache ........................................ 138 B. Les clauses définissant l’obligation d’assurance responsabilité civile

médicale ........................................................................................................................... 139

§ 2. Le principe de la double assurance responsabilité civile médicale ........................... 141 A. La justification du principe de la double assurance .................................................... 141 B. Le caractère obligatoire de la double assurance .......................................................... 142

Chapitre II. La difficulté de la réalité du lien de causalité ................................... 144

Section I. La causalité fiable dans le domaine des accidents médicaux ............................. 147

§ 1. Le trait fondamental d’une expertise médicale : l’objectivité .................................... 148 A. La rigueur : gage d’une expertise objective .................................................................. 148 B. L’appréciation de l’objectivité de l’expertise à Madagascar ....................................... 149

1. L’exposé du procès......................................................................................................... 149 Rappel des faits et de la procédure ................................................................................ 149 Allégation de la partie demanderesse ............................................................................ 150 Allégation défenderesse : ................................................................................................. 150 Décision du Tribunal correctionnel : ............................................................................ 150

2. Les observations ............................................................................................................. 151 a. L’obstination aux acquis de droit commun .............................................................. 152 b. La regrettable inertie juridictionnelle ........................................................................ 153

§ 2. Le contexte de la charge de la preuve pour l’établissement du lien de causalité .............................................................................................................................. 155

A. La difficulté de la preuve médicale pour la victime .................................................... 155 B. L’allègement de la charge de la preuve ......................................................................... 157

Section II. L’évaluation juridique et monétaire du dommage ............................................ 158

§ 1. L’examen médical des séquelles de l’accident thérapeutique .................................... 159 A. L’examen objectif de la réalité anatomique ................................................................. 159 B. Examen économique ....................................................................................................... 161

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§ 2. L’évaluation monétaire du dommage ........................................................................... 161 A. L’actualité, la réalité et l’inhérence du dommage : caractères du dommage

évaluable .......................................................................................................................... 161 1. L’actualité et la réalité du dommage ............................................................................ 161 2. L’inhérence du dommage au fait du praticien ........................................................... 163

B. La catégorisation des préjudices .................................................................................... 163 1. Le classement tripartie des dommages corporels issus d’un accident

médical........................................................................................................................... 164 2. La mise en œuvre de l’indemnisation .......................................................................... 165

PARTIE II. LES VOIES D’ÉLABORATION DU DROIT DE LA RESPONSABILITÉ

MÉDICALE À MADAGASCAR ............................................................................... 168

TITRE I. VOIE AMIABLE, VOIE CONTENTIEUSE : QUELLE OPTION POUR LE

DROIT MÉDICAL MALGACHE ? ............................................................................. 171

Chapitre I. Le déploiement des résolutions amiables en cas d’accidents médicaux .......................................................................................................... 174

Section I. L’étude comparé des modes de résolution amiable des conflits ...................... 177

§ 1. La conciliation, la médiation .......................................................................................... 177 A. Conciliation-Médiation : modes équivalentes de règlement de conflit ? ................. 177 B. La conciliation : mode alternatif à la réparation au titre de solidarité

nationale de l’ONIAM .................................................................................................. 180

§ 2. L’arbitrage, la médiation.................................................................................................. 182 A. Les subtilités entre la médiation et de l’arbitrage ........................................................ 183 B. L’opportunité de l’arbitrage dans la résolution des différents d’ordre

médical ............................................................................................................................. 185

Section II. L’intervention du législateur pour une loi relative à la résolution amiable des conflits médicaux à Madagascar ................................................................. 190

§ 1. L’indemnisation non fondée sur l’identification d’un « responsable » .................... 191 A. La réparation non fondée sur l’indentification d’un « responsable » :

concept admis par le droit coutumier ......................................................................... 192 B. Le fihavanana et les modes de résolution alternatifs des conflits à

Madagascar ...................................................................................................................... 193

§ 2. La proposition d’une loi relative aux MARC au sein du droit médical malgache ............................................................................................................................ 194

A. L’ esprit du processus législatif élaborant les MARC ................................................. 195 1. Le passage du projet de loi au crible de l’esprit critique ........................................... 195 2. Les amendements relatifs au volet « réparation des conséquences des

risques sanitaires » de la loi du 4 mars 2002 ............................................................ 196 a. Le trajectoire politico-législatif du projet de loi relatif aux droits des

malades ........................................................................................................................ 196 b. Les amendements relatifs au volet « réparation des conséquences des

risques sanitaires » de la loi du 4 mars 2002 .......................................................... 198 B. La proposition de loi relative aux MARC à Madagascar ........................................... 201

1. La reformulation des dispositions du Code de la santé publique relatives à la responsabilité médicale ........................................................................................ 202

2. Les dispositions relatives à l’intervention des organismes d’indemnisation pour la mise en œuvre des MARC .............................................. 203

Chapitre II. La compensation pécuniaire : signe de non impunité pour fait médical préjudiciable ................................................................................ 206

Section I. La conception d’une formule de mutualisation .................................................. 209

§ 1. Les tontines informelles .................................................................................................. 209 A. Les modes de fonctionnement des tontines informelles ........................................... 210

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B. ASIENA : structure mutualiste illustrant l’essor de l’autonomie financière des médecins ................................................................................................................... 211

§ 2. Le modèle mutualiste transposé dans la profession médicale à Madagascar ........................................................................................................................ 213

A. Le statut de la structure mutualiste proposé aux médecins malgaches ................... 213 B. La politique d’adéquation entre les cotisations et les barèmes

d’indemnisation .............................................................................................................. 215

Section II. L’opportunité d’un barème d’indemnisation ..................................................... 218

§ 1. La liberté d’appréciation du juge : argument limitant l’intérêt d’un barème indemnitaire ....................................................................................................................... 218

A. La « barémisation » indemnitaire : remise en cause des fondamentaux du droit .................................................................................................................................. 218

B. Le système de barème : un risque de mécanisation de l’évaluation indemnitaire .................................................................................................................... 220

§ 2. Les arguments favorable au barème indemnitaire ...................................................... 221 A. La profession d’organisme d’indemnisation ................................................................ 221 B. La proposition d’un barème indemnitaire pour la responsabilité médicale

à Madagascar ................................................................................................................... 222

TITRE II. LE DROIT MÉDICAL FRANÇAIS : SOURCE LÉGISLATIVE À

MANIPULER AVEC MESURE ................................................................................ 225

Chapitre I. L’incapacité de la loi du 4 mars 2002 à apporter une sécurité juridique intégrale aux parties ......................................................................... 227

Section I. Les réserves émises à l’égard de la loi du 4 mars 2002 ...................................... 229

§ 1. L’adoption d’une attitude d’autoprotection par le corps médical face à la judiciarisation croissante ................................................................................................. 229

A. Métamorphose de l’objet de l’activité médicale : orientation vers un devoir pédagogique d’information au détriment du devoir de soin....................... 230

B. L’émergence de la médecine défensive ......................................................................... 231

§ 2. L’élargissement du contenu de l’obligation d’information médicale ....................... 233 A. Le corollaire de l’information : le devoir de conseil ................................................... 234 B. L’élargissement des informations sur les risques ........................................................ 235

1. Évolution de la portée du risque au sein du devoir d’information ......................... 236 2. Les justifications de dispense d’information .............................................................. 238

Section II. La proposition d’une loi relative au « droit des soins » .................................... 242

§ 1. La proposition d’une législation relative au droit des soins ...................................... 243 A. La dimension technique de l’activité médicale au sein de la loi relative au

droit des soins ................................................................................................................. 243 1. La précision du geste technique ................................................................................... 243 2. La distinction maladresse fautive et aléa thérapeutique au sein de la loi

relative au droit des soins ........................................................................................... 244 B. La dimension relationnelle de la thérapie au sein de la loi relative au droit

des soins .......................................................................................................................... 245

§ 2. La dimension de tierce personne dans la décision médicale ..................................... 247 A. La décision médicale : non exclusive au médecin et au patient ................................ 247 B. Le concept de personne de confiance .......................................................................... 249

Chapitre II. La codification mesurée de la responsabilité médicale à Madagascar ...................................................................................................... 252

Section I. Les dispositions relatives à la faute médicale au sein de la proposition de loi ..................................................................................................................................... 254

§ 1. Le contour de la faute médicale ..................................................................................... 254

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A. Les clauses contractuelles à ne pas enfreindre en droit médical .............................. 254 B. Le modèle de sanction proposé par les us et coutumes malgaches ......................... 256

§ 2. Le principe d’indemnisation des préjudices corporels ............................................... 258 A. Les voies de droit pour faire face à l’inexécution contractuelle médicale ............... 259

1. Les modalités de réparation du droit positif .............................................................. 259 2. Les modalités de réparation propres à la culture malgache ..................................... 260

B. L’effectivité du mécanisme indemnitaire : le principe de l’assurance obligatoire ........................................................................................................................ 261

SectionII. Le respect de l’intégrité corporelle au sein de la proposition de loi ................ 264

§ 1. Les dispositions sur le rôle assumé par le patient en matière de décision thérapeutique ..................................................................................................................... 264

A. L’explicité de la réalité du consentement ..................................................................... 265 B. Le modèle de concertation pour la prise de décision médicale ................................ 267

§ 2. La politique d’individualisation des soins ..................................................................... 267 A. L’outil opérationnel du parcours thérapeutique.......................................................... 268 B. L’accès au dossier médical .............................................................................................. 270

CONCLUSION GÉNÉRALE ................................................................................. 272

La maîtrise des fondamentaux du droit civil : la responsabilité civile et la loi sur la théorie générale des obligations ................................................................................... 273

L’approfondissement du contexte socio-culturel et socio-économique de l’espace géographique ......................................................................................................... 274

L’attention à l’individualité souffrante du patient au sein de l’honorabilité et de la probité de la profession médicale ................................................................................ 276

projet de loi ................................................................................................................................. 281

Préambule ................................................................................................................................. 281

Titre I. La responsabilité médicale : principes généraux ................................................... 281 Article 1 .................................................................................................................................. 281 Article 2 .................................................................................................................................. 281 Article 3 .................................................................................................................................. 282

Titre II. La responsabilité médicale : dispositions spécifiques ......................................... 282 Article 1 .................................................................................................................................. 282

Titre III. L’ obligation médicale d’information .................................................................. 282 Article 1 .................................................................................................................................. 282 Article 2 .................................................................................................................................. 283 Article 3 .................................................................................................................................. 283

Titre IV. La décision médicale .............................................................................................. 284 Article 1 .................................................................................................................................. 284 Article 2 .................................................................................................................................. 284

Titre V. Les modalités de réparation .................................................................................... 284 Article 1 .................................................................................................................................. 284

Titre VI. La résolution alternative des conflits médicaux ................................................. 285 Article 1 .................................................................................................................................. 285 Article 2 .................................................................................................................................. 285 Article 3 .................................................................................................................................. 285 Article 4 .................................................................................................................................. 285

Titre VII. L’effectivité de la réparation : le devoir d’assurance ........................................ 286 Article 1 .................................................................................................................................. 286 Article 2 .................................................................................................................................. 286 Article 3 .................................................................................................................................. 286 Article 4 .................................................................................................................................. 286

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Titre VIII. Disposition finale ................................................................................................ 287 ANNEXES ......................................................................................................... 288

Code de la santé (Madagascar) ............................................................................. 289

LOI n° 2011-002 portant Code de la Santé .......................................................................... 290

Exposé des motifs ..................................................................................................................... 290

Livre préliminaire. De l’organisation institutionnelle et administrative des services médicaux de Madagascar .................................................................................... 293

Titre premier. Des institutions .............................................................................................. 294

Titre II. De l’agence du médicament de Madagascar, des agences et des unités de contrôle et de production .......................................................................................... 294

Titre III. Des établissements de soins .................................................................................. 295

Livre premier. De la protection générale de la santé ........................................................... 297

Titre premier. Des mesures sanitaires et d’hygiène générales applicables sur le territoire national .............................................................................................................. 298

Chapitre premier. Des règlements sanitaires .................................................................... 298 Section 1. De l’orientation générale du contenu du règlement sanitaire.................... 298 Section 2. De la lutte contre les épidémies par des mesures de prévention .............. 299

Chapitre II. Des mesures d’hygiène ................................................................................... 300 Section 1. De la gestion et du contrôle des eaux ........................................................... 300 Section 2. De la gestion des déchets ................................................................................ 301 Section 3. De la protection des denrées alimentaires livrées à la

consommation.............................................................................................................. 303 Section 4. Des mesures d’hygiène concernant les préparations chimiques et

les substances destinées à l’usage en santé publique et la gestion de la salubrité de l’air ambiant ............................................................................................. 305

Chapitre III. De la salubrité des lieux d’habitation .......................................................... 305 Section 1. De la salubrité des immeubles ........................................................................ 306 Section 2. De la salubrité des agglomérations ................................................................ 307 Section 3. De la salubrité du milieu rural ........................................................................ 308

Chapitre IV. De la protection de l’environnement .......................................................... 309

Titre II. Du contrôle sanitaire aux frontières ...................................................................... 310

Livre II. Des professions médicales, paramédicales et de la médecine traditionnelle ........................................................................................................................ 311

Titre premier. De la profession de médecin, d’acupuncteur (trice), d’odonto-stomatologiste, de sage-femme ...................................................................................... 311

Chapitre I. De l’exercice illégal de la médecine et de l’acupuncture ............................. 313 Chapitre II. De l’exercice illégal de l’odonto-stomatologie ............................................ 313 Chapitre III. De l’exercice illégal de la profession de sage-femme ............................... 314 Chapitre IV. Des ordres nationaux .................................................................................... 314

Titre II. Des quelques règles particulières ........................................................................... 315

Titre III. De la profession d’infirmier(e), des autres auxiliaires médicaux et tradipraticiens .................................................................................................................... 317

Livre III. Des médicaments, de la pharmacie et des conditions générales d’exercice de la profession de pharmacien ..................................................................... 320

Titre premier. Des médicaments et de la pharmacie ......................................................... 320 Chapitre premier. De la politique pharmaceutique nationale ........................................ 320 Chapitre II. Des médicaments ............................................................................................ 320

Section 1. Des définitions .................................................................................................. 320 Section 2. Des listes officielles de médicaments ............................................................ 323

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Section 3. Des médicaments à base de plantes et autres médicaments traditionnels .................................................................................................................. 323

Chapitre III. De la réglementation générale concernant les médicaments .................. 324 Section 1. De l’enregistrement .......................................................................................... 324 Section 2. Des essais cliniques .......................................................................................... 326 Section 3. De la pharmacovigilance ................................................................................. 327 Section 4. De la prescription ............................................................................................. 327 Section 5. De la préparation .............................................................................................. 328 Section 6. De la dispensation ............................................................................................ 328 Section 7. De la tarification ............................................................................................... 328 Section 8. De la promotion et de la publicité ................................................................. 329

A. De la promotion .......................................................................................................... 329 B. De la publicité .............................................................................................................. 330

Chapitre IV. Des stupéfiants, psychotropes et précurseurs ........................................... 330 Chapitre V. De la parapharmacie et des autres biens de santé ...................................... 331

Section 1. Des produits cosmétiques et d’hygiène corporelle ..................................... 331 Section 2. Des produits diététiques .................................................................................. 332 Section 3. Des dispositifs médicaux ................................................................................ 332

Titre II. De l’exercice de la pharmacie ................................................................................. 333 Chapitre premier. Des conditions générales ..................................................................... 333 Chapitre II. De la profession de pharmacien ................................................................... 333 Chapitre III. De l’exercice illégal des fonctions de pharmacien .................................... 335

Titre III. Des établissements pharmaceutiques .................................................................. 336 Chapitre premier. Des dispositions communes ............................................................... 336 Chapitre II. Des pharmacies d’officine ............................................................................. 337 Chapitre III. Des pharmacies à usage interne .................................................................. 339 Chapitre IV. Des établissements d’importation, de vente en gros et de

répartition ........................................................................................................................ 339 Chapitre V. Des établissements de fabrication et d’exploitation de produits

pharmaceutiques ............................................................................................................ 341

Titre IV. Des organes de contrôle ........................................................................................ 342 Chapitre premier. De l’Agence du Médicament de Madagascar ................................... 342

Section 1. Des dispositions générales .............................................................................. 342 Section 2. De l’inspection .................................................................................................. 343

Chapitre II. Du Laboratoire national du contrôle de qualité des médicaments ................................................................................................................... 344

Titre V. Des dispositions diverses relatives aux dépôts de médicaments, aux pharmacies à gestion particulière et aux plantes médicinales .................................... 344

Chapitre premier. Des dépôts de médicaments ............................................................... 344 Des règles générales ........................................................................................................... 344

Chapitre II. Des pharmacies à gestion particulière .......................................................... 345 Chapitre III. Des plantes médicinales et autres produits d’origine naturelle............... 346

Livre IV. De la lutte contre les maladies contagieuses et les autres fléaux sociaux .................................................................................................................................. 346

Titre premier. De la lutte contre la tuberculose ................................................................. 346

Titre II. De la lutte contre la lèpre ........................................................................................ 347

Titre III. De la lutte contre le paludisme ............................................................................. 348

Titre IV. De la lutte contre la peste ...................................................................................... 348

Titre V. De la lutte contre les autres maladies contagieuses et les cas des autres maladies émergentes et réémergentes ................................................................ 350

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Titre VI. De la lutte contre les maladies infectieuses diarrhéiques dont le choléra ................................................................................................................................ 350

Titre VII. De la lutte contre les infections sexuellement transmissibles ........................ 351

Titre VIII. De la lutte contre les maladies liées à l’environnement ................................. 352

Livre V. De la lutte contre les maladies non transmissibles ............................................... 353

Titre premier. Des mesures de lutte contre les maladies liées aux modes de vie .......... 353

Titre II. Des mesures de lutte contre les maladies oculaires ............................................ 353

Titre III. Des mesures de lutte contre le tabac et les autre toxicomanies ...................... 354

Titre IV. Des mesures de lutte contre les maladies mentales ........................................... 355

Titre V. Des devoirs et des mesures ..................................................................................... 356

Livre VI. De la protection sanitaire de la famille .................................................................. 356

Titre préliminaire. Des généralités sur la protection de la mère et de l’enfant .............. 356

Titre premier. De la santé de la reproduction ..................................................................... 358 Chapitre premier. Des dispositions pour une maternité à moindre risque .................. 358 Chapitre II. De la planification familiale ........................................................................... 358 Chapitre III. De la santé de la reproduction des adolescents et des jeunes................. 359 Chapitre IV. De la procréation médicalement assistée et du génie génétique............. 359

Titre II. De la protection sanitaire de l’enfance .................................................................. 360

Titre III. De la santé scolaire et universitaire ...................................................................... 361

Titre IV. De la protection des droits familial et social de l’enfant .................................. 362

Livre VII. Des laboratoires ...................................................................................................... 362

Titre premier. Des laboratoires d’analyses médicales ........................................................ 362 Chapitre premier. Des dispositions générales .................................................................. 362 Chapitre II. De l’exploitation .............................................................................................. 363

Section 1. Des conditions de fonctionnement Des laboratoires d’analyses médicales ....................................................................................................................... 363

Section 2. Des dispositions applicables aux cadres des directions des laboratoires d’analyses médicales .............................................................................. 364

Chapitre III. Des analyses .................................................................................................... 365

Titre II. Des organes et substances d’origine humaine pour intervention thérapeutique, diagnostic ou pour des recherches ...................................................... 366

Chapitre premier. Des dispositions générales .................................................................. 366 Chapitre II. Du sang et de ses dérivés ............................................................................... 367 Chapitre III. Des greffes et des transplantations des organes et substances ............... 370

Titre III. Du contrôle de la manipulation des produits à base microbienne ................. 371

Livre VIII. Des responsabilités du personnel et des prestataires de service au sein de l’administration sanitaire ...................................................................................... 371

Titre premier. De la classification des responsabilités ....................................................... 371

Titre II. Des responsabilités d’ordre général ....................................................................... 372

Livre IX. Des peines et mesures disciplinaires applicables en cas d’infraction ............... 374

Titre premier. Des sanctions pénales ................................................................................... 374

Titre II. Des sanctions disciplinaires .................................................................................... 378

Livre X. Des dispositions diverses et transitoires ................................................................. 380

Code de déontologie médicale (Madagascar) ....................................................... 382

Note de présentation relative au projet de décret portant Code de Déontologie Médicale ............................................................................................................................... 383

Décret n° 2012-0632 portant Code de déontologie médicale ............................................ 383

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Chapitre premier. Des dispositions générales .................................................................. 384 Chapitre II. Des engagements du médecin ....................................................................... 385 Chapitre III. Du consentement éclairé .............................................................................. 387 Chapitre IV. De l’indépendance morale et technique ..................................................... 387 Chapitre V. Du secret professionnel .................................................................................. 387 Chapitre VI. De la compétence du médecin .................................................................... 388 Chapitre VII. De la greffe d’organes.................................................................................. 388 Chapitre VIII. De la reproduction ..................................................................................... 388 Chapitre IX. Des recherches biomédicales et de l’expérimentation sur

l’homme ........................................................................................................................... 389 Chapitre X. Des tortures et des traitements inhumains .................................................. 389 Chapitre XI. Du médecin et de la société ......................................................................... 389 Chapitre XII. De la confraternité ....................................................................................... 390 Chapitre XIII. De la publicité ............................................................................................. 390 Chapitre XIV. De la continuité des soins ......................................................................... 392 Chapitre XV. Du libre choix ............................................................................................... 392 Chapitre XVI. De la grève médicale .................................................................................. 392 Chapitre XVII. Des honoraires .......................................................................................... 392 Chapitre XVIII. Des dispositions diverses ....................................................................... 392

Exemple de conditions particulières d’un contrat d’assurance responsabilité d’un professionnel de santé (Madagascar) .............................. 394

Conventions spéciales. Responsabilité Civile des Pharmaciens ......................................... 395

A. Définitions ........................................................................................................................... 395

B. Objet de la garantie ............................................................................................................ 395 1°) R.C. Professionnelle ....................................................................................................... 395 2°) R.C. Exploitation ............................................................................................................ 395

C. Exclusions ........................................................................................................................... 396 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................... 397

Dictionnaires .............................................................................................................................. 398

Ouvrages anthropologiques et sociologiques relatifs à la culture malgache ..................... 398

Ouvrages généraux, traités et manuels ................................................................................... 398

Ouvrages spécialisés et monographies ................................................................................... 400

Thèses .......................................................................................................................................... 402

Chroniques, Articles, Rapports et Répertoires ...................................................................... 403

Ressources électroniques .......................................................................................................... 406 INDEX .............................................................................................................. 408

TABLE DES MATIÈRES ...................................................................................... 413