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Ministère chargé de la Santé Région Auvergne Rhône-Alpes Prise en charge d’un patient hémiplégique gauche : Quelles modalités sensorielles prendre en compte dans la rééducation de l’héminégligence ? Supporting hemiplegic people : Which sensorial modalities to consider in the re-education of hemineglect ? Travail écrit présenté par : MARAS Emilie En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur Kinésithérapeute Année 2015-2016 Institut de Formation en Masso-Kinésithérapie Saint-Michel, SAINT ETIENNE

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Ministère chargé de la Santé

Région Auvergne Rhône-Alpes

Prise en charge d’un patient hémiplégique gauche :

Quelles modalités sensorielles prendre en compte dans la

rééducation de l’héminégligence ?

Supporting hemiplegic people :

Which sensorial modalities to consider in the re-education

of hemineglect ?

Travail écrit présenté par :

MARAS Emilie

En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de

Masseur Kinésithérapeute

Année 2015-2016

Institut de Formation en Masso-Kinésithérapie

Saint-Michel, SAINT ETIENNE

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Remerciements

Je remercie Monsieur C et sa famille pour leur participation active à ce travail écrit.

Merci aux kinésithérapeutes libéraux ayant pris de leur temps pour relire ce travail ; chacun

à sa façon a contribué à ma formation en tant que future thérapeute et professionnelle de

santé, chacun a élargi mon champ de compétences et d’intérêts.

Merci à ma tutrice de stage, et à ma directrice de mémoire pour leur disponibilité et leurs

conseils.

Je remercie tous les patients que j’ai pris en charge au cours de ma formation, qui m’ont

permis d’ajuster mes connaissances théoriques à la pratique quotidienne du métier.

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Résumé

La prise en charge des patients hémiplégiques nécessite la prise en compte des

troubles moteurs et fonctionnels mais également de tous les déficits cognitifs et sensoriels

éventuels. L’hémiplégie gauche est fréquemment associée à un trouble appelé

héminégligence ou négligence spatiale unilatérale entrainant une difficulté voire une

incapacité à répondre à des stimuli présentés du côté hémiplégique. La négligence spatiale

unilatérale constitue un facteur de mauvais pronostic en terme de récupération

fonctionnelle. Sa prise en charge nécessite une approche multisensorielle et plurimodale

afin de tenir compte de tous les aspects de ce trouble. Elle doit être intégrée dans la

rééducation kinésithérapique de l’hémiplégie en étroite collaboration avec les différents

professionnels qui accompagnent le patient. Ce travail présente le cas de Monsieur C.

atteint d’héminégligence.

Mots clés

Accident vasculaire cérébral

Hémiplégie

Héminégligence

Syndrome « pusher »

Pluridisciplinarité

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Sommaire

I) Introduction : page 1

II) Rappels physiopathologiques : page 3

A) L’accident vasculaire cérébral : page 3

B) L’hémiplégie : page 4

C) La négligence spatiale unilatérale : page 5

D) Le syndrome « pusher » : page 6

III) Cas clinique : page 7

A) Présentation du patient et dossier médical : page 7

B) Bilans initiaux à J+83 de l’AVC : page 9

C) Diagnostic kinésithérapique : page 14

D) Objectifs et principes de rééducation : page 16

E) Moyens de la rééducation : page 17

F) Bilans finaux : page 21

IV) Discussion : page 24

V) Conclusion : page 30

Bibliographie

Annexes

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I) Introduction

J’ai réalisé ce mémoire au cours d’un stage effectué du 20 avril au 22 mai 2015 au sein

du service de médecine physique et réadaptation (MPR) du site de Saint Vallier, dépendant

des hôpitaux Drôme Nord [photo 1]. Le MPR accueille principalement des patients dans

les suites d’affections neurologiques, notamment d’accidents vasculaires cérébraux

(AVC), ou suite à des traumatismes ou des chirurgies de l’appareil locomoteur (fractures

des membres ou vertébrales, prothèses totales de hanche ou de genou). Les patients sont en

hospitalisation complète ou en hôpital de jour. Les chambres sont réparties sur deux étages,

et les patients suivis par un des quatre médecins.

L’équipe de rééducation comprend neuf masseurs kinésithérapeutes, quatre

ergothérapeutes, une enseignante en activités physiques adaptées (EAPA), une

neuropsychologue, une orthophoniste, une psychomotricienne et une psychologue. Le

plateau technique de rééducation est situé au rez de chaussée du bâtiment et comprend une

salle dédiée aux soins kinésithérapiques [photo 2], une pièce réservée à la pratique des

exercices avec l’EAPA, une salle de psychomotricité, des bureaux pour les différents

autres professionnels (animateur, orthophoniste…) ainsi qu’une balnéothérapie. Il existe

également des salles d’ergonomie dédiées à la mise en situation fonctionnelle des patients

(une cuisine, une salle de bricolage et une chambre). Les patients descendent

quotidiennement en salle de rééducation, seuls ou accompagnés d’un brancardier. Ils sont

pris en charge à raison d’une à deux séances par jour pour une durée totale d’une demi

heure à une heure quotidienne. De plus, selon leur pathologie et la prescription médicale,

ils bénéficient du suivi des autres professionnels ou de séances en piscine.

Monsieur C, âgé de 78 ans, né en 1937, présente le 22 janvier 2015 un tableau

d’AVC ischémique sylvien droit entrainant une hémiparésie gauche avec une légère

héminégligence et des troubles praxiques. Le 3 février 2015, les symptômes s’aggravent

brutalement avec apparition d’une hémiplégie gauche, d’un important syndrome

d’héminégligence et d’un syndrome « pusher » net. Les troubles cognitifs deviennent, à ce

moment là, très importants. Monsieur C est ensuite transféré au MPR de Saint Vallier le 23

février 2015. Sa rééducation m’est confiée dès mon arrivée au sein de l’équipe, le 20 avril

2015. Monsieur C bénéficie d’une seule séance de masso-kinésithérapie d’une demi-heure

par jour le matin, en raison de sa grande fatigabilité. En raison de l’amélioration de son état

général, je le garderai une heure lors de ma dernière semaine de stage. La séance s’effectue

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à deux masseurs kinésithérapeutes, moi-même et ma tutrice de stage, particulièrement lors

des transferts rendus difficiles par le comportement « pusher » de Monsieur C. Le patient

bénéficie également d’une demi heure d’ergothérapie l’après midi, et d’une prise en charge

orthophonique.

J’ai choisi de suivre Monsieur C d’abord en raison d’un intérêt personnel envers la

rééducation des hémiplégiques. Les accidents vasculaires cérébraux constituent un

véritable enjeu de santé publique, étant la première cause de handicap acquis chez l‘adulte

et la troisième cause de mortalité en France [1]. De plus, il m’a semblé particulièrement

intéressant de suivre Monsieur C et notamment l’évolution de son héminégligence, qui est

un syndrome peu connu et pourtant très fréquent. En effet, le syndrome d’héminégligence

ou négligence spatiale unilatérale (NSU) constitue un facteur de mauvais pronostic

aggravant le handicap moteur [2]. Présent principalement en cas d’atteinte de l’hémisphère

cérébral droit, et notamment en cas de lésion du territoire supérieur de l’artère sylvienne

droite [1], la NSU est définie comme la difficulté pour le patient de « rendre compte, de

réagir à et de s’orienter vers des stimulations signifiantes ou nouvelles présentées dans

l’hémiespace controlatéral à une lésion cérébrale » [3]. Ainsi, Monsieur C néglige son

espace gauche, aussi bien corporel qu’extracorporel et présente une déviation droite

spontanée de la tête et des yeux. La prise en compte de ce syndrome et de son

retentissement fonctionnel est donc un enjeu majeur de la rééducation des patients atteints

d’hémiplégie gauche. Elle est de plus souvent associée à une anosognosie, qui est une

absence de conscience ou un déni de l’hémiplégie [4], ce qui va impacter sur la prise en

charge masso kinésithérapique.

La problématique de ce travail va donc s’orienter vers la place qu’occupe

l’héminégligence dans la prise en charge masso kinésithérapique d’une hémiplégie gauche,

et plus précisément comment, à l’aide des différentes entrées sensorielles disponibles, je

peux influer favorablement sur la récupération d’un patient héminégligent. L’utilisation de

la vue, de l’ouïe et du toucher comme modalités sensorielles de rééducation est de plus

justifiée par les nombreuses études récentes d’approche rééducative de l’héminégligence.

La NSU est une perception corporelle erronée, avec une négligence de l’hémicorps et/ou

de l’hémiespace gauche. L’objectif principal de la rééducation est donc de réduire cette

héminégligence de façon significative et durable [5]. En tant que thérapeutes manuels et

que rééducateurs, les masseurs kinésithérapeutes ont une place privilégiée dans une équipe

pluridisciplinaire pour la rééducation d’un tel syndrome. Par le feedback manuel et auditif,

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le thérapeute aide le patient à prendre conscience de son corps, structure son image

corporelle et l’aide à apprivoiser cette nouvelle image de lui-même, inévitablement altérée

par ses incapacités. Pour cela, le masseur kinésithérapeute doit améliorer la perception et

l’exploration de l’hémichamp spatial négligé, obtenir un gain supérieur à la récupération

naturelle et un transfert des acquis dans la vie quotidienne, enfin conserver un bénéfice

après l’arrêt de la rééducation.

En quoi l’utilisation de plusieurs modalités sensorielles présente-t-elle un intérêt dans

la prise en charge de l’héminégligence ?

II) Rappels physiopathologiques

A) L’accident vasculaire cérébral (AVC)

Il est défini comme un « déficit brutal d’une fonction cérébrale focale sans autre cause

apparente qu’une cause vasculaire ». Il constitue la première cause de handicap acquis de

l’adulte [6], la deuxième de démence et la troisième cause de mortalité en France, après les

cancers et les pathologies cardiaques. L’incidence augmente à cause du vieillissement de la

population, à raison de 130 000 nouveaux cas par an [7]. La prévalence est de 400 000

avec un risque de récidive estimé entre 30 et 43% à cinq ans. La mortalité, de 30% à un

mois à 50% à un an, est essentiellement due à des pathologies coronaires associés ou à un

état de dépendance trop important.

Les AVC ischémiques constituent les cas les plus fréquents avec 80% des étiologies

[8]. Ils sont caractérisés par un déficit d’apport circulatoire dans un territoire artériel dans

99% des cas ou dans un territoire veineux dans 1% des cas. Il existe également des

épisodes brefs de dysfonction neurologique dus à une ischémie focale cérébrale ou

rétinienne avec disparition des signes cliniques en moins d’une heure et sans preuve

d’infarctus aigu à l’imagerie ; ils sont appelés accidents ischémiques transitoires (AIT) et

constituent une urgence thérapeutique, avec risque, en cas d’arrêt circulatoire durable, d’un

accident ischémique durable (AID) ou chronique (AIC) avec nécrose cellulaire. Les

étiologies sont diverses : présence d’athérosclérose ou embolie pulmonaire dans 20 à 25%

des cas, maladie des petites artères, dissection vertébrale (50% des moins de 50 ans),

traumatique ou suite à une fragilité existante, avec une zone de fragilité qui entraine une

poche de sang puis une occlusion progressive de la lumière artérielle constituant un

hématome de paroi. Les facteurs de risques sont principalement des maladies vasculaires

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préexistantes, l’hypertension artérielle (HTA), la dyslipidémie, le diabète, le tabac et la

sédentarité.

Les AVC hémorragiques sont le résultat d’une rupture intracérébrale artérielle.

Plusieurs causes sont fréquemment retrouvées : l’HTA, une malformation vasculaire

(anévrisme constitutionnel, angiome), une tumeur maligne ou bénigne.

B) L’hémiplégie

Elle constitue le cas le plus typique d’un trouble de la commande volontaire

consécutive d’un AVC. L’hémiplégie est définie comme un déficit hémi corporel plus ou

moins global, touchant la motricité distale et/ou proximale, plus ou moins complet ; on

parle d’un déficit proportionnel s’il touche tout un hémicorps ou à prédominance brachio-

faciale ou crurale. L’atteinte des muscles axiaux entrainant un déficit du tonus postural est

fréquente. Le déficit est initialement global, la récupération s’effectuant en général de

manière proximodistale. L’évaluation est rendue difficile par l’absence de déficit

musculaire intrinsèque mais est assurée par la présence d’une motricité stéréotypée avec

une perte du contrôle volontaire du mouvement ; de plus le déficit est rarement absolu avec

une répartition inégale. Toute discordance entre motricité analytique et possibilités

fonctionnelles doit faire rechercher des troubles associés (troubles de la sensibilité, visuels,

cognitifs).

La spasticité est un trouble du tonus caractérisé par une augmentation vitesse-

dépendante du réflexe tonique d’étirement, liée à l’hyperexcitabilité de l’arc réflexe

myotatique [9]. Elle est fréquemment associée à une hémiplégie. Elle prédomine sur les

muscles posturaux : extenseurs des membres inférieurs et fléchisseurs des membres

supérieurs. La spasticité est cependant également définie par sa fatigabilité : en effet

l’activité réflexe diminue lorsqu’on répète l’étirement musculaire. C’est un phénomène

éminemment variable chez un même sujet au cours du temps, sensible à de nombreux

paramètres tels que la température, l’état psychique et le degré de vigilance, la position, la

stimulation cutanée, l’état infectieux...

Les complications orthopédiques liées à la spasticité sont nombreuses et

compromettent la récupération fonctionnelle : pied varus équin, récurvatum de genou,

triple flexion du membre supérieur, griffe des orteils, luxations de hanche ou d’épaule. Les

douleurs sont fréquentes, spontanées ou à la mobilisation, et sont liées aux contractures

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musculaires, aux déformations ou aux rétractions. Les complications orthopédiques et

cutanées ainsi que les douleurs perturbent souvent les soins d’hygiène, l’habillage et

l’installation au lit ou au fauteuil.

Les syncinésies sont des troubles spécifiques d’une atteinte de la commande centrale,

constituant parfois une gêne motrice majeure. Ce sont des mouvements involontaires

survenant lors d’un mouvement volontaire. La récupération en est gênée, car les schémas

moteurs sont stéréotypés. Ces syncinésies peuvent être globales, avec une exagération de

l’hypertonie lors d’un mouvement volontaire ; d’imitation, avec la présence d’un

mouvement involontaire en miroir du côté qui n’est pas sollicité ; ou de coordination, avec

des mouvements stéréotypés se produisant du côté paralysé lors de mouvements exécutés

dans un autre territoire.

C) La négligence spatiale unilatérale (NSU)

La NSU est définie par Heilman en 1979 comme “la difficulté ou l’incapacité à

signaler, à répondre ou à s’orienter vers des stimuli présentés dans l’hémi-espace

controlatéral à la lésion, sans que ce trouble ne soit explicable par un déficit sensoriel ou

moteur” [10]. La NSU touche environ entre 50 et 85 % des patients après lésions

cérébrales droites, donc atteints d’une hémiplégie gauche. L’espace corporel ou extra-

corporel intéressé est le plus souvent l’hémi-espace gauche, alors que rares sont les cas de

négligence droite. Les lésions responsables de ce syndrome sont généralement des lésions

corticales ou souscorticales au niveau du lobe pariétal postérieur, mais on peut la retrouver

aussi après des lésions dans différents territoires perfusés par l’artère cérébrale moyenne

[tableau 1].

Les théories explicatives de la NSU situent les déficits à des niveaux différents dans

les processus cognitifs. Lorsqu’un patient ne copie que la moitié droite d’une scène

visuelle, la négligence de la moitié gauche peut s’expliquer par un ou plusieurs troubles :

sensoriel (il ne voit pas la moitié gauche), représentationnel (il a perdu la moitié gauche de

la représentation cognitive de l’espace), référentiel (le cadre de référence utilisé pour

localiser les objets par rapport à lui même est dévié vers la droite), attentionnel (il a des

difficultés à orienter son attention spatiale vers la gauche ou à se désengager depuis la

droite ; cette théorie est la plus souvent retenue) ou pré-moteur (il n’arrive pas à

programmer correctement les mouvements vers l’hémi-espace gauche).

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Ce syndrome peut revêtir différents aspects selon l’espace impliqué. On reconnaît

ainsi la négligence corporelle ou extracorporelle selon que le trouble se manifeste

respectivement soit sur l’espace corporel du patient (corps et/ou espace proche à portée de

main), soit sur l’espace lointain (qui n’est pas à portée de main). La négligence corporelle

peut se manifester par l’oubli du membre supérieur gauche derrière soi (lors du passage de

décubitus à couché sur le côté, ou dans la déambulation en fauteuil roulant, par l’oubli

d’habiller le côté gauche ou encore de se raser le côté gauche du visage...). Dans les cas où

le membre supérieur gauche ne présente pas de trouble de la commande, on observe aussi

une sous-utilisation motrice (par l’utilisation systématique de la main droite alors que

certaines activités bi manuelles requièrent la main gauche). La NSU peut s’accompagner

d’extinction sensorielle (visuelle, auditive, sensitive), c’est-à-dire qu’en l’absence de

déficit sensoriel du côté gauche, la présence d’une stimulation à droite entraîne l’« oubli »

de ce qui se passe à gauche. Le thérapeute devra en tenir compte lors de la séance de

kinésithérapie, en évitant toute stimulation à droite qu’elle soit sensitive, visuelle ou

auditive, lorsqu’il souhaite attirer l’attention du patient à gauche.

L’hétérogénéité des troubles, leur variabilité chez un même patient dans le temps

et/ou en fonction du contexte ainsi que sa non conscience rendent le comportement du

patient imprévisible et dangereux pour lui même. Cela retentit défavorablement dans

l’acquisition de l’autonomie de marche et sur la qualité de vie quotidienne (conduite,

préparation des repas, habillage, prise de médicaments).

D) Le syndrome « pusher »

Ce syndrome, peu fréquent après accident vasculaire cérébral droit car ne touchant

que 5% des patients, est souvent associée à une négligence spatiale. Il est décrit pour la

première fois en 1985 par Davies [11]. Il est probablement la manifestation la plus

caractéristique d’un biais extrême dans la construction de la verticale posturale chez ces

patients. Ils présentent une latéropulsion controlésionelle active, c'est-à-dire qu’ils poussent

avec leur côté sain vers leur côté hémiplégique, ainsi qu’une résistance à la correction

passive ; ils poussent d’autant plus qu’on essaye de les corriger manuellement.

En l’absence d’outil diagnostic validé, le syndrôme « pusher » n’est pas toujours

facile à diagnostiquer [12]. Il est souvent associé à une altération sévère des capacités

posturales, impliquant un séjour prolongé en rééducation. Il peut cependant s’estomper

rapidement en cas de reprise précoce de la marche. Les études manquent quant à l’analyse

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et l’interprétation de ce syndrome. Il a cependant été montré que l’inclinaison de la

verticale posturale est majorée dans l’obscurité [12], ce qui indique que les patients

utilisent leur vision pour compenser et améliorer leur orientation posturale active. Ce point

est intéressant à connaitre pour la rééducation ; cependant aucune technique de rééducation

spécifique du comportement « pusher » n’a encore été validée.

III) Cas clinique

A) Présentation du patient et dossier médical

1) Présentation du patient

Monsieur C est un homme de 78 ans, né en 1937, et est gaucher. Il vit avec sa

femme à Romans sur Isère, dans une maison de plain pied. Monsieur C est retraité de

l’Education Nationale ; il exerçait le métier de professeur des écoles avant de devenir

directeur d’école déchargé, ayant la responsabilité de onze classes. Le couple a deux

enfants, un fils masseur kinésithérapeute qui vit près de ses parents à Romans sur Isère et

une fille habitant en Australie. Monsieur C avait pour principaux loisirs, avant son

accident, la lecture et l’informatique ; il a toujours été passionné de littérature, notamment

de poésie, et manifestait avant son AVC un intérêt particulier pour les nouvelles

technologies. Il pratiquait également la randonnée et faisait du jardinage. Monsieur C est

très entouré par sa femme et son fils, qui, soucieux de son état de santé, sont en perpétuelle

demande de soins.

L’humeur de Monsieur C est assez fluctuante, d’un jour sur l’autre ou même au

cours de la journée. Il présente en effet d’importants troubles cognitifs, entrainant des

difficultés de compréhension et d’attention. Cependant, Monsieur C est motivé par les

séances de rééducation car il a selon ses dires « l’impression de faire quelque chose ».

2) Antécédents

Monsieur C présente une hypertension artérielle mal équilibrée et traitée par de

l’hydrochlorothiazide (Esidrex®), diurétique couramment utilisé pour traiter cette

affection. En effet, sa tension n’est pas stabilisée malgré le traitement : au cours des

dernières années, Monsieur C a présenté, à plusieurs reprises, de nombreuses crises

hypertensives.

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3) Histoire de la maladie

Le 22 janvier 2015, Monsieur C décrit une sensation d’engourdissement au niveau

du membre supérieur gauche. Depuis trois semaines, il présente une perte d’appétit et une

asthénie dans un contexte anxieux. Dans l’après midi, il apparait chez Monsieur C un

déficit du membre supérieur gauche ainsi qu’une céphalée frontale intense avec des

troubles d’élocution et une paralysie faciale gauche. Il est alors emmené aux urgences par

le SAMU, où il présente une tension artérielle à 233/116 mmHg ainsi qu’une tachycardie

et des céphalées. Cependant les symptômes régressent. Le scanner cérébral effectué ne

décèle aucune anomalie. Les bilans biologiques effectués sont normaux, mais révèlent une

hyperthyroïdie. L’endocrinologue consulté oriente son diagnostic vers une maladie de

Basedow, justifiant un traitement adapté et la mise en place d’anticoagulants en

prophylaxie. Monsieur C est alors transféré en service de neurologie pour un suivi.

Le 26 janvier, il constitue une hémiplégie gauche mais ne peut être thrombolysé en

raison de la prise déjà effective d’anticoagulant. Un angio-IRM cérébral est réalisé [annexe

II], montrant une thrombose de l’artère carotide interne droite au niveau du polygone de

Willis et révélant la présence d’un méningiome à la face profonde du lobe temporal

gauche. Le 28 janvier, le traitement anticoagulant est arrêté en raison de l’absence

d’amélioration clinique, au profit d’un traitement antiagrégant plaquettaire. Monsieur C est

ensuite orienté vers une unité d’hospitalisation de courte durée à Romans sur Isère. Il

présente à ce moment une hémiplégie gauche massive avec d’importants troubles

posturaux, une héminégligence ainsi qu’un syndrome « pusher » marqué avec un fort

déport postérieur. Les troubles cognitifs sont importants, notamment avec un syndrome

frontal. Cependant, Monsieur C ne présente pas de troubles visuels, tels qu’une

hémianopsie latérale homonyme. La prise en charge kinésithérapique consiste au départ en

une verticalisation quotidienne, rendue malheureusement difficile par les troubles

posturaux en lien avec le comportement « pusher ». Dans la mesure du possible, le

thérapeute recherche également une amélioration de l’autonomie notamment en travaillant

les retournements et l’équilibre assis.

Le 23 février, compte tenu de son état et du manque d’évolution, Monsieur C est

orienté vers le service de MPR de Saint Vallier. Un premier diagnostic médical est posé

[annexe III] : Monsieur C est atteint d’hémiplégie gauche ainsi que de troubles langagiers

et cognitifs, à titre notamment d’hallucinations. Il est suivi d’un bilan complet masso

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kinésithérapique du patient permettant le diagnostic [annexe IV]. La récupération ne

semble pas avoir débutée, la verticalisation est impossible et la station assise précaire. La

rééducation est compliquée car fluctuante en fonction de la grande fatigabilité de Monsieur

C ainsi que sa variabilité d’humeur ; cependant certains jours le patient semble très motivé

par sa rééducation. Le travail est alors axé sur l’équilibre du tronc et sur le transfert d’appui

afin de lutter contre le comportement « pusher ».

En mars, l’état général de Monsieur C se dégrade. Malgré une prise en charge par

une diététicienne, ses apports nutritionnels sont aléatoires, avec des besoins non couverts.

Le patient est très opposant et fatigable, il déprime et exprime de plus en plus fréquemment

des idées suicidaires. Au cours de la semaine de bilans, cet état est constant, mais le moral

de Monsieur C s’améliorera ensuite, en corrélation avec ses progrès en kinésithérapie.

B) Bilans initiaux à J+83 de l’AVC

Ils ont été réalisés au cours de la première semaine de ma prise en charge,

s’échelonnant sur les cinq jours de la semaine en raison de l’importante fatigabilité de

Monsieur C, et étant suivis d’exercices de rééducation afin de conserver l’attention et la

motivation du patient.

Monsieur C arrive en salle de rééducation assis sur un fauteuil roulant dit fauteuil

confort [photo 3]. Il est accompagné d’une brancardière car en raison de son trouble

moteur au membre supérieur gauche ainsi que son héminégligence et ses troubles

sensoriels associés, il ne pouvait pas utiliser seul un fauteuil roulant manuel.

1) Bilan des troubles associés

Monsieur C présente une héminégligence marquée. Le patient semble

complètement ignorer son côté gauche, comme s’il ne faisait plus partie de lui-même, et

cela en dehors d’une atteinte visuelle, syndrome appelé anosognosie. Il présente également

beaucoup de difficultés à porter son attention sur sa gauche, quel que soit le stimulus

utilisé, visuel, auditif ou tactile. De même, il décrit des mouvements effectués du côté droit

lors de mes mobilisations de son coté hémiplégique, et a énormément de difficulté à

regarder son membre supérieur ou inférieur paralysés. Ainsi, il ignore son côté gauche, ce

qui signe une hémiasomatognosie.

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Monsieur C présente d’importants troubles de compréhension et d’expression. Il peine

à comprendre les consignes données et l’intérêt des exercices. La communication est

possible avec Monsieur C mais il a tendance à présenter des persévérations, et tient parfois

des propos incohérents sans lien avec le contexte. Le bilan orthophonique met en évidence

chez le patient un manque du mot et un manque de cohérence en langage spontané.

Au bilan initial, Monsieur C présente un comportement « pusher » notable à l’examen

morphostatique assis et lors des transferts. Il s’appuie peu sur son coté gauche et semble

pousser continuellement avec son coté droit. Un score d’évaluation de ce comportement,

appelé « Score for Contraversive Pushing » (SCP) a été proposé par Karnath et al. [12, 13]

mais reste à ce jour peu précis ; je ne l’ai donc pas utilisé [annexe V].

2) Bilan comportemental

Monsieur C est un patient très fatigable, facilement distrait par l’environnement. Lors

des séances de rééducation, il est donc placé dans un endroit isolé et calme de la salle,

éloigné de tout stimulus risquant de le perturber. Lors de mes bilans, Monsieur C se révèle

être assez impatient, et ses troubles cognitifs l’empêchent parfois de comprendre la finalité

des mobilisations ou des exercices. Il arrive souvent énervé ou agacé aux séances ; il faut

donc en premier lieu lui parler pour le calmer et essayer de savoir quelle est la cause de son

énervement, pour ainsi gagner sa confiance.

De plus, Monsieur C présente un syndrome dépressif important, et exprime clairement

des idées suicidaires notamment aux infirmières et à son médecin.

3) Bilan de la douleur

Les troubles cognitifs de Monsieur C ont rendu très difficile le bilan de sa douleur. En

effet, il me signale des cervicalgies, voire des douleurs claviculaires, mais est dans

l’incapacité de comprendre le fonctionnement de l’Echelle Visuelle Analogique ou de

l’Echelle Verbale Simple. A l’observation et à la palpation, avec un patient présentant

notamment un visage crispé, j’ai noté des tensions musculaires au niveau de la face

postérieure de la région cervicale, mais dont Monsieur C ne se plaint pas lors des

mobilisations ou des transferts. De plus, Monsieur C bénéficie d’un traitement antalgique

de palier 1 qui le soulage [annexe VI].

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J’ai également noté des douleurs au cours de mes mobilisations. Tenant compte de ces

douleurs, j’ai pris la précaution de réaliser mon bilan articulaire avec des prises courtes et

de manière lente et douce. Au niveau de l’épaule, je mets en lien les douleurs avec la

présence d’une main oedématiée du même côté, pouvant évoquer un début

d’algoneurodystrophie. Cependant, la main ne présente pas de rougeur ni de chaleur,

l’aspect des phanères est physiologique.

4) Bilan de l’appareillage

Monsieur C. porte une écharpe au niveau du membre supérieur gauche. Durant la

journée, il est installé sur un fauteuil confort prêté par le service.

5) Bilan morpho statique

Monsieur C est un homme mesurant 1,73m pour 69 kg ; son indice de masse corporelle

(IMC), chiffré à 23,05, est donc normal. Cependant Monsieur C a perdu 6 kg depuis son

hospitalisation et son état nutritionnel devient inquiétant.

Pour le bilan morpho statique, j’examine Monsieur C tout d’abord en position de

décubitus, allongé sur un plan Bobath, isolé au fond de la salle – en effet les difficultés

cognitives de Monsieur C rendent difficiles son attention en cas d’éléments distractifs

autour de lui, tels que les autres patients. Je note tout d’abord un hémicorps gauche flasque,

sans motricité volontaire, entrainant le port d’une écharpe qui a pour but de maintenir la

coaptation glénohumérale [1]. Le membre inférieur gauche est en rotation latérale du fait

de l’hypotonie musculaire. A l’examen, on note surtout une tête et un regard déviés à

droite caractéristiques de l’héminégligence. Monsieur C est davantage en appui sur son

coté droit et semble ignorer son coté gauche [photo 4].

Je poursuis l’examen assis au bord du plan Bobath [photo 5]. Dans le plan frontal, la

première chose que l’on note est la nette latéropulsion active de Monsieur C du coté

gauche, il « pousse » avec son coté sain. Ainsi, pour faciliter mon examen ainsi que pour la

sécurité du patient, un autre thérapeute est présent à coté de Monsieur C pour sa sécurité.

Le membre inférieur droit est plus en avant que le membre inférieur gauche car il cherche

en permanence à se rééquilibrer et a l’impression de ne pas être vertical. Dans le plan

sagittal, on note une légère cyphose dorsale. La station debout est impossible sans aide en

raison du comportement « pusher » de Monsieur C.

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6) Bilan cutané trophique

Le bilan cutané trophique de Monsieur C est normal. On ne note pas de signe de

phlébite au niveau des membres inférieurs ; Monsieur C ne présente pas de douleur à la

dorsiflexion de l’articulation talocrurale et pas de perte de la mobilité des masses

musculaires au niveau des mollets.

Je note la présence d’un œdème, peu marqué, de la main gauche [tableau 2]. L’aspect

des phanères est physiologique.

7) Bilan des sensibilités

En ce qui concerne la sensibilité superficielle, Monsieur C présente des troubles aussi

bien au membre supérieur qu’au membre inférieur. En effet, lors du test dit du « pique-

touche », je note une anesthésie massive au niveau de l’hémicorps gauche. Ce test évalue

la sensibilité algique du patient.

Les troubles cognitifs de Monsieur C ne m’ont pas permis de conclure quant à une

atteinte de la sensibilité profonde et des autres modalités de la sensibilité superficielle,

notamment thermoalgique. En effet, ses troubles de compréhension ont rendu cette

évaluation impossible.

8) Bilan articulaire

Je réalise un bilan articulaire au niveau des quatre membres en position de décubitus.

Du coté sain, les amplitudes articulaires sont physiologiques. Au niveau des membres

hémiplégiques, les amplitudes sont normales, voire diminuées [tableau 3] : on note

principalement une diminution d’amplitude de flexion et de rotation médiale de hanche et

une diminution de la flexion dorsale de cheville au niveau de membre inférieur. Au niveau

du membre supérieur, on note une diminution de l’abduction et des rotations médiale et

latérale d’épaule, ainsi qu’une diminution des amplitudes au niveau de la pronosupination.

L’arrêt lors de la mobilisation est dur, signant une limitation d’origine articulaire. J’évalue

également le diastasis au niveau de l’épaule hémiplégique qui est d’un demi-travers de

doigt entre la tête humérale et la glène. Cette diminution d’amplitude et la présence d’un

diastasis semblent confirmer un possible syndrome douloureux régional complexe.

Par ailleurs, au cours de mon bilan articulaire, j’ai pu observer de fréquentes douleurs

en fin de mobilisation, principalement au niveau du membre supérieur gauche, notamment

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au niveau des articulations glénohumérale et radio carpienne ; elles se manifestent par des

sursauts du patient lors de mes mobilisations. Ces douleurs cessent au repos, signant donc

une composante mécanique.

9) Bilan moteur

Au niveau des membres supérieur et inférieur gauche, la motricité volontaire est

absente, les contractions musculaires ne sont ni visibles ni palpables. De plus, Monsieur C

effectue les mouvements demandés du côté non intéressé en raison de ses troubles de la

représentation spatiale. La motricité du coté sain est quant à elle normale.

J’évalue également la spasticité du côté hémiplégique, tant au niveau du membre

supérieur que du membre inférieur [tableau 4]. J’utilise pour cela l’échelle d’Ashworth

modifiée [annexe VII] [1]. Chez Monsieur C, la spasticité prédomine au niveau des

fléchisseurs du poignet au membre supérieur (principalement le muscle long palmaire), et

au niveau de la loge postérieure du membre inférieur (au niveau des muscles

ischiojambiers et du triceps sural).

10) Bilan de l’équilibre

Je réalise un bilan de l’équilibre uniquement assis en raison de l’incapacité de

Monsieur C à tenir debout sans aide humaine ou technique grâce à l’échelle de Brun

[annexe VIII] qui évalue l’équilibre postural assis chez l’hémiplégique. Il est coté à 3 sur

une échelle allant de 0 à 4 ; Monsieur C maintient l’équilibre assis sans appui postérieur et

lors d’une poussée déséquilibrante qu’elle qu’en soit la direction.

Malgré le comportement « pusher » de Monsieur C, l’équilibre assis est bon, il résiste

bien aux poussées déséquilibrantes, mais la qualité de la station assise est fortement

corrélée au degré de fatigue de Monsieur C, avec une forte tendance à la rétropulsion en fin

de séance. De plus, les réactions parachutes et d’équilibration sont absentes du côté

hémiplégique

11) Bilan des transferts

Monsieur C est dépendant pour tous les transferts, ce qui est bien sûr en lien avec ses

problèmes d’équilibre. Dans le service, le personnel utilise un lève malade. Cependant, le

patient arrive à passer seul du décubitus au latérocubitus gauche, mais il ne peut se coucher

sur son côté sain. Lors des séances de rééducation la planche de transfert est utilisée

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préférentiellement et placée du coté hémiplégique ; en effet, en raison de son syndrome

« pusher », Monsieur C se pousse avec son coté sain du côté hémiplégique, ce qui facilite

les transferts du fauteuil jusqu’au plan Bobath. Ainsi, on privilégie la sécurité. Cependant,

l’aide apportée par Monsieur C est fortement corrélée à son degré de fatigue, avec souvent

une aide minimale de sa part ; les transferts sont donc réalisés à l’aide de deux thérapeutes.

La mesure d’indépendance fonctionelle (MIF) souligne le manque d’autonomie du patient

[annexe IX].

12) Bilan fonctionnel

Dans la vie quotidienne, Monsieur C est dépendant notamment au niveau de la toilette

qui nécessite une aide totale. La contention au niveau de son membre hémiplégique est

placée par les infirmières. Ces dernières s’occupent également de son installation au lit,

après que la toute première installation au moment de l’arrivée dans le service ait été

réalisée par les ergothérapeutes. Les infirmières se chargent également de tous les soins de

confort de Monsieur C. Tous les actes simples de vie quotidienne nécessitent une aide.

Dans la journée, le patient reste assis sur son fauteuil confort. Les infirmières assurent

les transferts du lit au fauteuil avec un lève malade. Elles couchent parfois Monsieur C

dans l’après-midi, s’il présente une grande fatigue. Monsieur C bénéficie d’une prise en

charge en orthophonie et en ergothérapie. Cependant la tâche des professionnels est ardue

en raison du manque de motivation de Monsieur C.

13) Bilan de la déglutition

Monsieur C présente des troubles de la déglutition ; de ce fait, il est alimenté avec un

régime particulier, dit « haché tendre » : il mange les légumes coupés en morceaux tandis

que la viande est moulinée. De plus, Monsieur C boit uniquement de l’eau gazeuse, qui

stimule le réflexe de déglutition, et non de l’eau plate. De plus, il manque d’appétit donc

refuse de se nourrir, entrainant une sous alimentation.

14) Bilan vésicosphinctérien

Monsieur C présente une incontinence urinaire et fécale et porte en permanence des

protections, et cela depuis son accident. En effet, en cas d’atteinte centrale, l’hyperactivité

vésicale combinée à une perte de contrôle des sphincters va entrainer une incontinence.

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C) Diagnostic kinésithérapique [figure 1]

A partir des éléments recueillis au cours de mon bilan initial, je réalise un

diagnostic le 24 avril 2015, selon les critères de la Classification Internationale du

Handicap (CIH). Monsieur C, âgé de 78 ans, présente depuis le 22 janvier 2015 un tableau

d’AVC ischémique sylvien droit entrainant une hémiparésie gauche avec une légère

héminégligence et des troubles praxiques. Le 3 février 2015 apparait une brutale

aggravation des symptômes entrainant une hémiplégie gauche, un important syndrome

d’héminégligence et un syndrome « pusher » net, ainsi que de graves troubles cognitifs.

Il est transféré au service de MPR de Saint Vallier le 23 février pour une prise en charge

rééducative.

Monsieur C exprime surtout le désir de remarcher à moyen terme. Sa femme et son

fils ont pour projet un retour à domicile. A la fin de ma première semaine de stage, une

réunion pluridisciplinaire permettra d’envisager avec eux, en concertation avec le médecin,

une orientation vers un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

(EHPAD).

A ce jour, Monsieur C présente les déficiences suivantes :

-au niveau des troubles associés, le patient souffre d’une héminégligence marquée

ainsi que d’une hémiasomatognosie ;

-au niveau morphostatique, il présente principalement un fort comportement

« pusher » entrainant un déport d’appui sur le côté hémiplégique avec une tendance à la

rétropulsion ;

-au niveau cutané et trophique, on note la présence d’un œdème au niveau de la

main gauche, évoquant une algoneurodystrophie ;

-au niveau sensitif, Monsieur C présente une anesthésie de l’hémicorps gauche,

avec une difficulté d’appréciation dans l’évaluation des autres composantes sensitives du

fait des troubles cognitifs ;

-au niveau articulaire, on note la présence d’un diastasis au niveau de l’articulation

glénohumérale gauche, nécessitant le port d’une écharpe, et une légère diminution des

amplitudes du même côté tant au membre supérieur qu’inférieur ;

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-au niveau de la douleur, Monsieur C signale des douleurs à la mobilisation,

principalement du membre supérieur hémiplégique, ainsi qu’au niveau de la nuque et du

cou ;

-au niveau moteur, Monsieur C n’a pas de motricité volontaire du côté

hémiplégique, et présente une spasticité prédominante au niveau des fléchisseurs du

poignet, et au niveau de la loge postérieure du membre inférieur.

Ces déficiences entrainent en terme d’incapacités :

-un équilibre assis précaire, avec un comportement « pusher » marqué et une

tendance à la rétropulsion, corrélée à la fatigue, et un équilibre debout impossible sans

aide ;

-des transferts impossibles sans aide en raison du comportement « pusher » avec

une tendance au transfert d’appui systématique du côté gauche ;

- la verticalisation et la station debout sont impossibles, rendant indispensable

l’usage d’un fauteuil roulant qui de plus ne peut être manipulé seul par le patient.

Enfin, on retrouve des désavantages :

-sociaux, en effet Monsieur C ne peut retourner chez lui en raison de sa dépendance

; de plus, ses relations avec son entourage sont rendues difficiles en raison de ses graves

troubles cognitifs ;

-familiaux, avec un patient qui se retrouve isolé de sa famille ;

-personnels enfin, car Monsieur C est dépendant pour toutes les activités de la vie

quotidienne ; il ne peut plus se livrer à ses loisirs, présente un important syndrome

dépressif qui perturbe sa vie quotidienne et des troubles cognitifs qui rendent la

communication avec lui difficile.

D) Objectifs et principes de rééducation

Le diagnostic masso kinésithérapique nous permet de déterminer nos objectifs de

rééducation qui sont :

-la prise en compte des troubles associés que sont l’héminégligence et le syndrome

« pusher » ;

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-la lutte contre l’œdème au niveau de la main gauche et la surveillance des points

d’appui au niveau de l’écharpe, ce qui implique donc une mise en place correcte de cette

dernière ;

-le réveil de la sensibilité du côté hémiplégique, et la lutte contre la douleur de ce

côté ;

-la récupération des amplitudes articulaires identiques au côté sain ;

-le travail de sollicitation motrice du côté hémiplégique associé à une lutte contre

la spasticité diffuse ;

-un travail de l’équilibre assis et des transferts ;

-enfin une verticalisation à l’aide d’un harnais suspendu.

En terme de rééducation de l’hémiplégique, les principes sont de trois ordres :

-généraux : il faut respecter la fatigabilité du patient, prendre en compte les

manifestations douloureuses et au cours des mobilisations articulaires respecter les axes,

les amplitudes et les plans des mouvements ;

-spécifiques au patient : Monsieur C est une personne âgée donc plus rapidement

fatigable, point qui sera à prendre en compte dans la rééducation ; il faudra également

réévaluer les objectifs de la rééducation au quotidien en fonction de l’état psychologique

du patient ;

-spécifiques à la pathologie [1]: l’hémiplégie de Monsieur C est étroitement

intriquée avec une héminégligence et un syndrome « pusher » associés, ce qui implique de

se placer préférentiellement à gauche du patient afin de stimuler son attention de ce côté,

afin de permettre un biofeedback à la fois visuel et auditif ; d’utiliser un maximum de

stimuli du côté gauche ; de ne pas saturer le patient d’informations au cours des exercices ;

et d’insister sur le transfert de poids vers la gauche, par exemple devant un miroir. Les

principes spécifiques à respecter en cas de comportement « pusher » sont de limiter au

maximum l’espace autour du patient, de verticaliser le patient le plus rapidement possible,

de stimuler les réactions automatiques d’équilibration et de préférer des guidances

manuelles aux guidances verbales. Enfin, l’absence de motricité du membre supérieur

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gauche implique de porter une attention accrue au risque de subluxation de l’articulation

gléno humérale.

E) Moyens de la rééducation

Les séances de rééducation ont lieu préférentiellement le matin, en raison de la

fatigue de Monsieur C l’après midi. Elles durent d’une demi-heure à une heure, selon la

motivation et l’humeur de Monsieur C. Bien qu’elles suivent une certaine progression, je

m’adapte constamment à l’état de mon patient, aussi bien d’un jour à l’autre qu’au cours de

la séance. Pour remplir les objectifs fixés à la suite de mon bilan initial, j’utilise divers

moyens.

Lutte contre l’œdème

L’absence de motricité au niveau du membre supérieur favorise la stagnation du

liquide lymphatique ce qui à entrainer chez Monsieur C l’apparition d’un œdème au niveau

de la main gauche. Je réalise donc un drainage lymphatique manuel selon la méthode dite

Leduc. Je privilégie un endroit calme pour effectuer le drainage afin de rassurer Monsieur

C et de centrer son attention sur la rééducation. De plus, le contact assuré par le drainage

me permet également une stimulation des récepteurs sensitifs cutanés.

Récupération des amplitudes articulaires

Les membres supérieur et inférieur de Monsieur C ne présentent, au moment de ma

prise en charge, aucune motricité. La motricité volontaire est inexistante, ce qui entraine

d’importants risques cutanés, trophiques et articulaires. Les muscles n’assurent plus leur

fonction de protection de l’articulation, notamment leur rôle de maintien au niveau de la

tête humérale, entrainant un risque non négligeable de subluxation. Notre but sera donc de

conserver les amplitudes articulaires tout en respectant la physiologie de l’articulation afin

d’éviter de léser les éléments articulaires par des mobilisations intempestives.

Je mobilise donc toutes les articulations au niveau de l’hémicorps gauche. Je

privilégie une position en décubitus, confortable et isolée afin de ne pas distraire le patient.

Les prises sont courtes, notamment au niveau du complexe scapulo huméral afin d’éviter

tout appendement de la tête humérale [photo 6]. Le membre supérieur de l’hémiplégique

est sujet à de nombreuses complications, telles que le syndrome épaule main ou le diastasis

de l’épaule, ce qui demande une surveillance attentive. Ainsi je veille à une installation

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correcte du patient au fauteuil, et à ce que l’écharpe soit propre et bien ajustée afin de

placer la main gauche en déclive. Je surveille également les points d’appui de l’écharpe

afin d’éliminer tout risque d’escarre. Enfin, la mise en place correcte de l’écharpe doit

permettre de lutter contre le diastasis de la tête humérale ; je veille donc à son efficacité à

ce niveau là. Au cours de mes mobilisations, j’insiste sur la flexion dorsale de cheville,

fréquemment limitée chez les sujets âgés, et d’autant plus aggravée chez l’hémiplégique

par la spasticité du muscle triceps sural. Afin de lutter contre le syndrome

d’héminégligence, au cours de mes mobilisations, je décris à Monsieur C les mouvements

effectués, lui demande de me localiser le sens du mouvement ou de regarder l’endroit où

sont placées mes mains. Cependant cela est difficile pour Monsieur C, qui parfois me

décrit correctement le mouvement mais me le situe toujours du côté droit.

Réveil de la sensibilité

La sensibilité est particulièrement altérée chez Monsieur C. Seule la sensibilité

thermoalgique semble encore présente. La plante du pied gauche notamment est

complètement anesthésiée. Je choisis donc d’utiliser plusieurs objets de textures

différentes. L’un des exercices que je privilégie particulièrement est la mobilisation à

l’aide d’un ballon doté de rainures. Il permet à la fois une mobilisation en flexion plantaire

et en flexion dorsale de l’articulation talocrurale, un réveil de la sensibilité grâce

aux reliefs que le pied rencontre au cours du mouvement ainsi qu’une prise en charge de

l’héminégligence car je demande à Monsieur C de regarder le mouvement. En outre, cela

entraine aussi une stimulation de l’équilibre assis car Monsieur C, pour voir son pied, doit

se pencher en avant tout en conservant son équilibre [photo 7]. Un simple travail de

massage de la plante du pied à titre de stimulation tactile des récepteurs aurait également

pu être réalisé. Je réalise fréquemment le test du « pique touche » afin de noter l’évolution

de Monsieur C ainsi qu’à titre de rééducation.

Stimulation motrice du côté hémiplégique

Au niveau des membres, Monsieur C n’a aucune motricité volontaire. De plus, ses

troubles cognitifs entravent la rééducation avec notamment la présence de syncinésies, car

quand je demande au patient de me serrer la main du côté gauche, Monsieur C

spontanément fléchit les doigts du côté droit ; de même au niveau du membre inférieur, il

fléchit le genou droit quand je lui demande de réaliser ce mouvement avec le genou

gauche. Le travail musculaire consiste donc uniquement à réaliser le pont fessier [photo 8],

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afin de travailler l’initiation de la commande motrice en décubitus, ainsi qu’obtenir un

travail bilatéral symétrique. Je demande à Monsieur C de fléchir les membres inférieurs

puis de décoller les fesses du plan de la table, de tenir en l’air six secondes puis de reposer.

Je me place face au patient, afin d’immobiliser le genou gauche contre mon thorax.

J’utilise mes mains à titre de stimulation au niveau des hanches afin de renforcer la

consigne verbale.

Au bout de deux semaines, le patient comprend bien l’exercice, je peux donc le

compliquer : quand il a décollé les fesses, je lui demande de réaliser une abduction

unilatérale puis bilatérale. En raison de son syndrome « pusher », Monsieur C a tendance à

pousser avec son côté sain ; se déplacer vers le côté gauche est donc pour lui plus facile. Le

travail des transferts permet également une stimulation motrice de par l’utilisation de

schémas moteurs.

Amélioration de l’équilibre assis

Je sollicite l’équilibre assis au bord d’un plan Bobath, les deux pieds du patient

étant positionnés au sol, le poids réparti sur les deux ischions, ce qui me permet un contrôle

de la spasticité au niveau du triceps sural. J’utilise des exercices ludiques qui motivent le

patient. Je place des plots de couleurs vives au sol, face à Monsieur C, en arc de cercle

autour de ses pieds. Je me place à sa gauche, et lui demande de ramasser un à un les plots

et de me les donner. J’initie ainsi le transfert d’appui vers l’avant qui prépare au passage

debout à l’aide d’un exercice de préhension par imitation ; je veille particulièrement à ce

que Monsieur C se penche en avant sans décoller ou avancer ses pieds. Je me place

préférentiellement du côté gauche afin de stimuler la rotation de la tête et du tronc de ce

côté négligé par le patient. Je complique l’exercice en décalant de plus en plus ma main du

côté gauche, ce qui oblige Monsieur C à se déporter de plus en plus sur ce côté.

Je rééduque le redressement du tronc à l’aide d’un bâton que je tiens dans la main,

étant placée debout face à Monsieur C ; je place les plots de couleur d’abord du côté droit

du patient et lui demande de venir placer les plots sur le bâton, placé verticalement devant

lui. Cela oblige Monsieur C à se redresser et à se pencher en avant, préparant ainsi le

passage debout. En progression, je place les plots du côté gauche du patient pour lutter

contre le syndrome d’héminégligence, en obligeant le patient à transférer son poids du

corps vers la gauche. J’améliore également l’équilibre assis à l’aide d’un exercice avec un

ballon ; je me place face au patient et lui envoie le ballon avec le pied. Il doit l’arrêter avec

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son pied droit puis me le renvoyer. L’exercice cherche un transfert du poids du côté gauche

et une stabilisation de l’équilibre sur un seul ischion. L’exercice est difficile pour Monsieur

C qui a tendance, en se déportant, à tomber du côté gauche, et nécessite la présence d’un

deuxième thérapeute placé à sa gauche qui par des stimulations tactiles empêchent ce

déport trop important. J’aurais pu également placer le patient contre un mur du côté

gauche, ce qui favorise une meilleure verticalité.

Verticalisation et apprentissage des transferts

La reprise précoce de la marche est un facteur favorable à une récupération rapide

chez le sujet victime d’un accident vasculaire cérébral. Cependant, chez Monsieur C, la

non récupération motrice du côté hémiplégique et les troubles cognitifs empêchent le

travail de la marche et la verticalisation sans aide technique. Par sécurité, je réalise donc

les transferts assis debout à l’aide d’un harnais suspendu à un rail. Monsieur C est de plus

soutenu par au moins un kinésithérapeute [photo 9]. Dans le plan frontal, la latéropulsion

est encore plus marquée qu’en position assise, Monsieur C « tombe » sur le thérapeute

placé à sa gauche.

Je place devant le patient une barre de transfert, sur lequel il viendra s’appuyer une

fois debout ; je décompose toutes les étapes du transfert, que je fais répéter plusieurs fois.

L’exercice de verticalisation est très apprécié par Monsieur C, lui qui parfois se montre

agacé par des mobilisations trop prolongées ou des exercices ludiques qu’il considère

comme des « jeux ». Debout, Monsieur C présente une très importante rétropulsion [photo

10] et une tendance à s’appuyer sur le standing sans appuyer sur ses pieds. Je corrige ces

défauts à l’aide d’exercices similaires à ceux utilisés pour travailler l’équilibre assis, à

savoir placer des plots d’un côté du patient pour qu’il me les donne de l’autre côté, ou qu’il

les empile sur un bâton placé verticalement devant lui. Dans cette position, je travaille

également la négligence spatiale unilatérale ; je demande à Monsieur C de me décrire la

salle de rééducation, en l’incitant à tourner la tête et les yeux du côté gauche négligé. Cet

exercice permet également un redressement axial actif du patient qui corrige la

rétropulsion. Ensuite, je réalise le passage debout assis, en décomposant toutes les étapes

du transfert. Monsieur C manquant de motivation pour les exercices passifs, il accepte de

les faire uniquement si un travail actif est réalisé par la suite. C’est pourquoi je réalise ces

exercices de verticalisation et de transfert en fin de séance, ces exercices lui demandant

beaucoup d’effort et de concentration. Peut être aurait il été préférable d’alterner travail

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actif et passif d’un jour sur l’autre et non au cours d’une même séance, ce qui engendrait

de la fatigue chez Monsieur C.

F) Bilans finaux

Ils ont été réalisés au cours de la dernière semaine de mon stage, à J+110 [annexe

X].

1) Bilan des troubles associés

Monsieur C présente toujours un syndrome d’héminégligence marqué. Il ne porte

pas spontanément le regard vers la gauche, et a toujours la tête tournée vers la droite.

Cependant, le comportement « pusher » a bien régressé, ce qui facilite les transferts et les

activités de nursing.

2) Bilan comportemental

Le syndrome dépressif de Monsieur C semble avoir diminué. Il ne fait plus

part d’idées suicidaires et semble davantage motivé par sa rééducation. Cependant, ses

troubles cognitifs rendent ses propos parfois incohérents ou inadaptés au contexte.

Monsieur C se montre parfois agressif ou piquant dans ses remarques. Ainsi, il arrive que

Monsieur C s’oppose aux soins prodigués par les infirmières. La prise en charge en

ergothérapie a notamment été diminuée en raison des troubles cognitifs de Monsieur C.

Monsieur C reste assez indifférent à l’égard des autres patients. De plus,

il se montre parfois agité, ce qui ne le fait pas apprécier des autres résidents.

3) Bilan de la douleur

Ce bilan est toujours rendu difficile par les troubles cognitifs de Monsieur C. Je

note principalement des douleurs en fin de mobilisation ou au cours des tests évaluant la

spasticité du membre supérieur gauche.

4) Bilan morphostatique

Il est identique au bilan initial. Cependant, la régression du syndrome « pusher »

permet un meilleur équilibre assis, que le patient tient seul et dans une durée prolongée. La

station debout est toujours impossible sans aide technique mais l’équilibre est meilleur.

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5) Bilan cutané trophique

L’œdème présent au début de la prise en charge a largement régressé [tableau 5]. Je ne

note pas de signes de phlébite. L’aspect de la peau est comparable au côté sain.

6) Bilan des sensibilités

Le bilan est identique au bilan initial. Les troubles cognitifs perturbent l’évaluation

de la sensibilité superficielle, et la négligence spatiale unilatérale complique celle de la

sensibilité profonde. Je ne note pas de récupération.

7) Bilan articulaire

Les valeurs des amplitudes articulaires de Monsieur C sont meilleures qu’au bilan

initial au niveau des quatre membres. Je ne note pas de restrictions au niveau du tronc.

Cependant, le diastasis au niveau de l’articulation glénohumérale gauche a augmenté ; je

note un travers de doigt entre la glène et la tête humérale [tableau 6]. Le port de l’écharpe

se révèle donc toujours indispensable, ainsi que des mobilisations en coaptation de

l’articulation glénohumérale.

8) Bilan moteur

Il est identique au bilan initial. Cependant, la spasticité a globalement diminué,

aussi bien au niveau du membre supérieur qu’inférieur [tableau 7].

9) Bilan de l’équilibre

L’équilibre assis de Monsieur C est meilleur, surtout en termes de durée de tenue de

la position. La station debout est toujours impossible.

10) Bilan des transferts

L’amélioration de l’équilibre assis rend les transferts plus sûrs. Monsieur C apporte

volontiers son aide même si les consignes ne sont pas toujours comprises en raison des

troubles associés.

11) Bilans vésicosphinctérien et digestif

Ils sont identiques aux bilans initiaux.

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IV) Discussion

La prise en charge d’un patient hémiplégique doit prendre en compte tous les

facteurs de risque liés à ses déficits. Elle est complexe et pluridisciplinaire, de préférence

orientée vers la tâche et constamment réajustée en fonction de l’évolution.

Monsieur C présente une héminégligence, appelée également négligence spatiale

unilatérale. En 1979, Heilman et Valenstein la définisse comme « la difficulté ou

l’incapacité à signaler, à répondre ou à s’orienter vers des stimuli présentés dans l’hémi-

espace controlatéral à la lésion, sans que ce trouble ne soit explicable par un déficit

sensoriel ou moteur ». De très nombreuses recherches ont été menées depuis, mais cette

définition n’a jamais été fondamentalement modifiée [14]. Pourtant, au fil des recherches

et malgré une définition claire et établie, il a été prouvé que l’héminégligence relève de

différentes dimensions qu’elles soient perceptives, représentationnelles ou sensorielles

[15]. Entre ces différentes composantes, les cas de dissociation sont nombreux mais

également les cas d’association, ce qui entraine une prise en charge complexe de ces

patients. Cependant cette définition précise que l’héminégligence n’est pas la conséquence

d’un déficit sensoriel. En effet, la NSU peut être observée même en l’absence de contrôle

visuel [14]. De plus, les troubles liés à la NSU peuvent être observés dans l’ensemble des

modalités sensorielles. Il m’a donc paru intéressant de travailler avec une approche

multisensorielle la plus fonctionnelle possible. L’utilisation de la vue et du toucher

notamment, permettant un feedback, m’a paru fondamentale au cours de ma rééducation.

En effet, mes recherches bibliographiques m’ont permis de découvrir qu’il existe

actuellement deux approches dans la rééducation de l’héminégligence [16]. L’approche

dite « top-down » a pour but de faire prendre conscience au patient de ses déficits afin

qu’il compense consciemment. L’approche dite « bottom-up » utilise quant à elle des

stimulations sensorielles passives dans le but de jouer directement sur les représentations

spatiales mentales du patient. Il existe également une troisième approche combinant les

deux méthodes de rééducation précédentes.

Au cours de ma rééducation, j’ai toujours privilégié le travail actif et la

participation du patient, afin de l’impliquer le plus possible dans sa prise en charge. Bien

sûr, je devais tenir compte de son déficit moteur important au niveau de l’hémicorps

gauche. Mais il me semblait plus intéressant de demander, par exemple, une rotation

volontaire de la tête et du tronc vers le côté gauche négligé, plutôt que d’obtenir ce

24

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mouvement de manière passive. En effet, cela demande une participation active du patient,

donc une prise de conscience du fait qu’il néglige une partie de l’espace. J’ai donc

privilégié une approche « top-down » de rééducation de l’héminégligence.

La vue est peut être le sens de Monsieur C que j’ai le plus sollicité au cours de ma

rééducation. C’est une méthode de rééducation déjà ancienne, et qui consiste en un

réentrainement à l’exploration visuelle de l’espace. Je lui demande de me décrire la salle

de rééducation, en l’incitant à ne pas omettre le côté gauche de la pièce. Je travaille

beaucoup avec des plots de couleurs vives, qui constituent d’intéressants stimuli visuels ; je

lui demande de les déplacer, de droite à gauche puis de gauche à droite. Je veille, au cours

de la séance, à me décaler moi-même de plus en plus vers la gauche du patient, afin de

l’inciter à me suivre du regard. Je l’incite, même au cours de mobilisations passives sur

l’hémicorps paralysé, à se tourner volontairement de mon côté et à regarder cette moitié de

son corps qu’il ignore complètement. La littérature est assez riche quant aux travaux qui

ont été effectués autour de cette modalité sensorielle, utilisant des patches oculaires ou des

orthèses prismatiques [17, 18, 19]. Dans le cas où il n’y a pas de troubles visuels associés à

l’héminégligence, ces méthodes de rééducation sont intéressantes car elles stimulent la

plasticité cérébrale en phase subaigüe de l’AVC. La plupart des auteurs recommandent

d’utiliser ces techniques de prise en charge en plus d’une approche plus classique et active

dite « top-down » [18]. Le principe de l’occultation oculaire aurait, je pense, apporté un

bénéfice certain à Monsieur C, en complément d’un réentrainement à l’exploration

visuelle. En effet, le port de caches oculaires est corrélé à une amélioration de

l’indépendance fonctionnelle, mesurée au moyen de la Mesure d’Indépendance

Fonctionnelle (MIF) [18].

J’ai également beaucoup utilisé l’ouïe de Monsieur C au cours de ma prise en

charge. Les sons constituent en effet, et particulièrement chez Monsieur C, un très bon

stimulus l’incitant à se tourner du côté gauche. Dans sa chambre, le moindre bruit dans le

couloir le faisait réagir. Malheureusement la disposition de la pièce faisait que la porte était

située à droite de Monsieur C. Pour des raisons logistiques, et en accord avec les

ergothérapeutes, on n’avait pas remédié à cette situation. Mais il est certain que la porte

placée du côté gauche aurait offert une bonne manière de prolonger les séances de

rééducation en chambre. L’aménagement de la chambre constitue en effet un moyen de

rééducation à part entière comme l’a montré Boillat et al. [20]. Dans ma prise en charge, je

veillais à parler souvent au patient, et à travailler dans une atmosphère calme et non

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bruyante pour ne pas créer de distractions. Cela s’inscrivait en lien avec le réentrainement

de l’exploration visuelle de l’espace, et j’associais très souvent vue et ouïe afin de mieux

guider Monsieur C. En effet, récemment, des études ont montré l’impact positif de l’écoute

de musique sur l’attention spatiale de patients héminégligents [21]. Or, Monsieur C. est un

homme cultivé, et le stimuler par l’écoute de musique aurait sans doute permis une

rééducation de son trouble plus attractive qu’une prise en charge plus classique. De plus,

même si le niveau de preuve est limité, cette approche ne présente pas de risques et

l’écoute d’une musique appréciée peut être plus stimulante qu’un fond sonore télévisuel.

Le toucher est une entrée sensorielle qu’il m’a paru également intéressant d’utiliser

lors de la rééducation de Monsieur C. En effet, au vu de ses troubles de sensibilité, il est

nécessaire de prendre également en compte cette modalité. Je demande notamment au

patient, au cours de mes mobilisations, de me décrire le geste que j’effectue, ou la position

de mes prises sur ses membres. Le toucher est très utilisé dans les approches rééducatives

anciennes type Bobath, notamment par le biais de postures facilitatrices et inhibitrices [22].

L’utilisation du toucher est notamment intéressante car elle pallie au déficit d’attention

partagée très souvent déficitaire dans la NSU, ce qui peut entraver une rééducation utilisant

principalement la vue [23]. Cependant, ces méthodes ne prennent pas en compte l’aspect

cognitif de l’héminégligence et restent plus appropriées dans le cadre de la rééducation

d’un hémiplégique ne souffrant pas de ce trouble. De plus, il existe comme nous l’avons vu

dans l’utilisation de la vue comme modalité sensorielle de rééducation de nombreux

travaux récents et qui font état de méthodes plus spécifiques quant à la prise en charge de

l’héminégligence.

Cependant, un point est susceptible d’entraver la rééducation de patients

hémiplégiques souffrant d’héminégligence. Il s’agit de l’anosognosie de Monsieur C.

L’anosognosie est définie comme la difficulté voire la négation du handicap induit par

l’hémiplégie, avec des patients qui ne comprennent pas le motif de leur hospitalisation ou

cherchent à se lever par méconnaissance de leur parésie. Souvent associé à

l’héminégligence, ce trouble de la perception corporelle peut générer des prises de risque

inconsidérées de la part du patient, avec des tentatives de verticalisation seul par exemple,

telles que décrites par Boisson et Rode [24]. Dans le cas de Monsieur C, elle se manifestait

essentiellement par une apparente indifférence à son état, avec des difficultés à comprendre

où il se trouvait et pourquoi. Au cours de ma prise en charge, j’ai cependant noté que

l’anosognosie est souvent associée à d’autres troubles cognitifs, tels qu’une démence ou

26

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des hallucinations [25]. Chez Monsieur C, cela entrainait une incompréhension de la

rééducation voire un refus de la prise en charge, ce qui évidemment pose la question du

transfert des acquis dans la vie quotidienne ; puisque le patient ne comprend pas pourquoi

il est rééduqué, pourquoi appliquerait-il ce qu’il a appris en rééducation dans sa vie de tous

les jours ? C’est donc le rôle notamment de l’équipe soignante de favoriser ce transfert, en

stimulant le patient dans les actes de la vie quotidienne, ce qui demande un travail

coordonné et construit entre les différents acteurs de la prise en charge.

Il m’a paru intéressant de noter également qu’il peut exister une possible

dissociation entre anosognosie et héminégligence, comme l’a montré une étude datée de

2002 [26]. C’est un phénomène relativement rare mais néanmoins possible. Cette étude

présente l’intérêt d’associer héminégligence et anosognosie, car la plupart des recherches

menées jusqu’ici portaient davantage sur la présence d’une anosognosie en cas de déficit

hémicorporel. De plus, elle tend à prouver que les mécanismes cognitifs et cérébraux

entrainant une anosognosie ou une héminégligence seraient différents, contrairement à ce

que l’on supposait jusque là. Cela souligne le fait que les processus en jeu dans ces deux

types de déficits sont complexes et pas forcément en lien l’un avec l’autre, ce qui rend la

prise en charge difficile avec nécessité d’une évaluation constante par les différents

professionnels de rééducation.

J’ai utilisé cette approche rééducative avec un certain succès, mais consciente

qu’elle présente de nombreuses limites [27]. Tout d’abord, certaines études ont rapporté

des résultats négatifs au cours de cette prise en charge. De plus, cette approche est basée

essentiellement sur des théories empiriques stipulant qu’on est avant tout face à un déficit

de l’exploration visuelle [28], et qu’il faut donc travailler préférentiellement cette fonction

déficitaire. Mais elle ne s’appuie pas sur un modèle bien défini et reste donc dépendante de

son efficacité. Le principal point qui selon moi remet en cause une telle démarche est la

difficulté à obtenir un transfert des acquis dans la vie quotidienne. Selon les études, elle

pourrait être liée au fait que la rééducation ne s’intéresse qu’à l’orientation volontaire du

regard alors qu’il existe aussi un déficit dans l’orientation automatique [28].

Au vu de ces réflexions, je pense qu’il aurait été intéressant avec Monsieur C de

travailler un peu plus en passif, à l’aide de manipulations sensorielles, comme cela se fait

dans l’approche dite « bottom-up » de la rééducation de l’héminégligence. Cette approche

présente de plus l’intérêt de proposer différentes techniques de rééducation, selon le

27

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patient, son déficit et le matériel disponible. Citons, notamment, la stimulation vestibulaire,

la stimulation optocinétique, la stimulation des muscles du cou, la stimulation de

l’hémicorps gauche ou la rotation du tronc du côté négligé. De très nombreuses études ont

comparé ces différentes techniques, soit entre elles soit associées à une rééducation,

comme le réentrainement à l’exploration spatiale. Si la plupart de ces études concluent à un

effet positif de ces manipulations sensorielles, il ressort malgré tout que les résultats à long

terme ne sont pas probants, à moins que les stimulations soient répétées ou associées à une

autre forme de rééducation. Comme évoqué précédemment, la prise en charge d’un patient

héminégligent, en raison des nombreux troubles associés, est complexe et nécessite selon

moi deux choses ; la présence autour du patient d’une équipe formée à ce type de prise en

charge, équipe qui sera pluridisciplinaire et où les professionnels seront constamment en

lien les uns avec les autres afin d’assurer une prise en charge globale et complète. En effet,

la rééducation de la négligence spatiale s’inscrit dans celle plus globale de l’hémiplégie.

Cela a amené certains thérapeutes à proposer des rééducations en groupe, encadrées par

différents professionnels, et permettant une prise en charge globale et fonctionnelle du

trouble que constitue la NSU [29]. L’intérêt de ces groupes réside dans le fait que la

transposition des acquis de la rééducation dans la vie quotidienne du patient semble plus

facile. De plus, la présence d’autres patients permet de trouver une dynamique de travail

commune afin de rendre la rééducation attractive. La mise en place de tels groupes

nécessite cependant d’avoir une structure dédiée et des professionnels spécialisés dans ce

domaine. Le problème de l’héminégligence est qu’en structure classique de MPR, les

soignants ne sont pas nécessairement formés à sa prise en charge, car il reste une

conséquence peu connue de l’AVC droit, bien que la littérature se soit considérablement

développée à ce sujet ces dernières années. De plus, ce syndrome spécifique n’est pas

présent systématiquement, ce qui pose le problème d’un nombre suffisant de patients

éligibles. Cette situation rend alors indispensable les réunions de synthèse fréquentes entre

professionnels, voire en présence de la famille, afin d’avoir une vision globale des

déficiences du patient, de connaitre ses attentes et celles de son entourage ainsi que de

permettre une bonne coordination entre tous les acteurs de la prise en charge. Enfin, la

nécessité d’une formation continue des professionnels me parait être un enjeu essentiel de

la prise en charge de ces patients.

La spécificité de la prise en charge que j’ai effectuée réside également dans le fait

qu’il s’agit d’un patient âgé. En matière d’AVC, l’âge représente le plus important facteur

28

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de risque [30]. Il constitue également un facteur de mauvais pronostic sur le plan vital. Or,

avec l’allongement de l’espérance de vie, on peut s’attendre à une augmentation du nombre

de patients âgés victimes d’un AVC. L’influence de l’âge sur le devenir fonctionnel fait

débat, bien qu’il semble qu’il soit un facteur négatif à court et moyen terme. Les auteurs

qui se sont intéressés à cette problématique évoquent des capacités de compensation

moindres chez les personnes âgées, ce qui nous encourage à axer notre rééducation sur des

objectifs fonctionnels. Plus que l’âge, l’institutionnalisation avant l’AVC, une période de

coma post AVC, des troubles de la déglutition et une incontinence urinaire sont des

facteurs de mauvais pronostic ; or j’ai retrouvé chez Monsieur C ces problèmes de

déglutition et de continence.

La question se pose également chez ces patients de l’intérêt d’une hospitalisation

dans une unité de soins spécialisée. D’après certaines études [30], les patients les plus

jeunes tireraient un meilleur bénéfice de l’unité de rééducation que les sujets âgés, et ce

malgré une prise en charge rééducative identique. Ces résultats vont dans le sens d’une

influence positive de la récupération spontanée dans le cadre de l’AVC, qui de fait serait

meilleure chez les patients plus jeunes dont le cerveau ne présente pas de lésions

dégénératives liées à l’âge. Cependant, la plasticité cérébrale joue un rôle non négligeable

dans la récupération de l’AVC, et est aidée par la rééducation basée sur des stimulations

auditives, visuelles ou tactiles.

Il est donc nécessaire de prendre en compte quelques éléments particuliers de prise

en charge avec Monsieur C. Il s’agit d’un patient rapidement fatigable de par son âge. De

manière plus générale, les patients âgés présentent fréquemment des troubles sensoriels

visuels ou auditifs nécessitant la présence d’appareillages. Ces patients sont exposés à des

facteurs de risque cardio vasculaires et il faudra connaitre d’éventuels antécédents qui

pourraient contrarier la rééducation. Il faudra rechercher des antécédents de troubles de

l’équilibre voire de chutes avant l’AVC, et vérifier la possible présence de lésions au

niveau de l’appareil locomoteur, pouvant entrainer un contexte de polytraumatisme ; les

détériorations de la coiffe des rotateurs notamment sera à rechercher car pouvant

compliquer l’utilisation d’aides techniques. Enfin la présence de troubles cognitifs et

attentionnels, pré ou post AVC, va rendre la prise en charge plus difficile et peut nécessiter

le recours à des échelles d’hétéro évaluation spécifiques de la personne âgée, notamment

en termes de douleur [31] ou de pronostic fonctionnel.

29

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L’hémiplégie consécutive à un AVC nécessite une prise en charge globale des

troubles moteurs et cognitifs du patient, qu’il s’agisse d’un syndrome « pusher »,

perturbation plurimodale de la perception de la verticale [32], ou d’une NSU. Cette

dernière peut complexifier la rééducation et nécessite une approche spécifique, à combiner

avec la rééducation classique et en lien avec le travail des autres professionnels. Largement

étudié, ce trouble reste pourtant encore méconnu notamment au niveau de ses mécanismes

physiopathologiques et de la localisation des lésions intracérébrales pouvant entrainer une

héminégligence.

V) Conclusion

Au moment de mon départ, les troubles cognitifs de Monsieur C s’aggravent

brutalement, il est victime d’hallucinations et présente des troubles confusionnels. Le

médecin suspecte alors une démence mixte [33]. Un rendez vous est pris avec la famille,

qui décide avec l’équipe pluridisciplinaire d’un placement en maison de retraite

médicalisée. En effet, le retour à domicile est impossible en raison des troubles aussi bien

moteurs que cognitifs de Monsieur C. Le patient poursuit son séjour au MPR de Saint

Vallier en attendant son placement. A ce jour, Monsieur C est placé en maison de retraite

médicalisée à Romans sur Isère. Cette prise en charge complexe m’a fait murir aussi bien

professionnellement qu’humainement. Un suivi, certes court mais complet, de Monsieur C

m’a permis d’affiner ma pratique et mes gestes techniques. L’importance de la

pluridisciplinarité m’a fait prendre conscience de la place primordiale du travail en équipe

et de la collaboration indispensable entre les différents acteurs de la rééducation. Mes

recherches bibliographiques m’ont permis d’appréhender la pathologie du point de vue de

la recherche, qui est un complément indispensable à la pratique clinique et permet une

évaluation de l’efficacité de la prise en charge. La prise en charge d’un patient

hémiplégique à la suite d’un accident vasculaire cérébral est complexe et nécessite une

prise en compte de tous les déficits du patient. Il est impératif de tenir compte au cours de

notre bilan et de notre prise en charge des troubles associés, qui sont principalement pour

l’hémiplégie gauche le syndrome de négligence spatiale unilatérale. La rééducation devra

être spécifique à la pathologie et au patient, fonctionnelle, orientée vers la tâche, en accord

avec les attentes du patient et de son entourage. La prise en charge au sein d’un service de

médecine physique et réadaptation est pluridisciplinaire, permettant une rééducation

globale de toutes les déficiences du patient. Cette pluridisciplinarité est sans doute le

maitre mot de la prise en charge d’un hémiplégique.

30

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Bibliographie

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[21] Luauté J., Rééducation de l’héminégligence : principes et méthodes ; In : Pérennou D.,

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Annexes

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Annexe I : Synthèse bibliographique

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[1] De Morand A., Le patient hémiplégique ; In : De Morand A., Pratique de la

rééducation neurologique, Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson SAS, 2014 : p.1-100

Masseur kinésithérapeute spécialisée en neurologie, expert kinésithérapeute et

enseignante, Anne de Morand rassemble les principales méthodes de rééducation de

l’hémiplégique, à l’aide de textes clairs accompagnés de figures et de tableaux explicatifs.

Après quelques rappels physiopathologiques et une présentation de la prise en charge

hospitalière en urgence des patients victimes d’un accident vasculaire cérébral, l’auteure

détaille le bilan kinésithérapique du patient hémiplégique selon le territoire cérébral

touché, entrainant divers troubles associés. Les principales échelles d’évaluation utilisées

en pratique courante sont présentées. Après une conclusion des bilans menés sont exposés

les différents concepts et méthodes relatifs à la prise en charge du patient hémiplégique.

Quelques cas particuliers de prise en charge de patients souffrant de troubles associés sont

exposés. Les différents moyens utilisés sont illustrés et classés en fonction des objectifs

définis.

La prise en charge d’un patient hémiplégique est principalement axée sur la reprise

précoce de la marche, la prévention des complications spécifiques à la pathologie et la

prise en compte des troubles associés pouvant interférer dans la rééducation. L’intérêt

principal du livre d’Anne de Morand réside dans la présentation d’exercices clairs et

pratiques et dans la mise en relation entre les anciens concepts et les dernières recherches

menées grâce aux nouvelles technologies.

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[4] Peskine A., Urbanski M., Pradat-Diehl P., Bartolomeo P., Azouvi P., Négligence

spatiale unilatérale. EMC, Neurologie, 17-035-B-30, 2010

La négligence spatiale unilatérale représente la difficulté ou l’incapacité à signaler,

à répondre ou à s’orienter vers des stimuli présentés de l’émiespace controlatérale à une

lésion cérébrale sans que ce trouble ne soit explicable par un déficit sensoriel ou moteur.

Elle présente différentes modalités d’expression clinique : négligence spatiale, négligence

corporelle, négligence représentationelle. Elle peut être couplée à d’autres troubles associés

telles qu’une extinction sensitive, une allochirie ou une anosognosie. Les mécanismes

entrainant la négligence spatiale unilatérale sont complexes, encore mal connus et mal

compris. Différents modèles relatifs à l’attention spatiale existent mais ne sont encore que

des hypothèses quant à la représentation de l’espace au niveau cérébral. De nombreuses

études ont été menées sur la localisation de la lésion dans le cas d’un syndrome

d’héminégligence, d’où il ressort notamment le rôle important de lésions au niveau des

fibres de la substance blanche.

Les tests de mise en évidence de la négligence spatiale sont de deux types : tests

« papier crayon » ou évaluations écologiques permettant une prise en compte de

l’environnement du patient.

En matière de traitement, deux approches dominent : celles dites « top down »,

actives, où l’on cherche à ce que le patient prenne conscience de son trouble ; les

approches dites « bottom up » qui consistent en des manipulations sensorielles qui

modifient la perception de l’espace et ainsi réduisent le trouble. D’autres approches

existent, mais il n’est à ce jour pas possible de dégager une technique de rééducation

préférable à une autre.

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[8] Daviet JC., Morizio P., Salle JY., Parpeix F., Talon I., Sombardier T., Lamant S.,

Rebeyrotte I., Munoz M. et Dudognon P. Techniques de rééducation neuromusculaire

appliquées à l’accidenté vasculaire cérébral adulte, Encycl Méd Chir, Kinésithérapie-

Médecine-physique-Réadaptation, 26-455-B-10, 2002, 7 p.

Les auteurs, après une présentation succinte de la physiopathologie de l’accident

vasculaire cérébral, décrivent les différentes techniques utilisées dans la prise en charge de

l’hémiplégie : techniques passives, fonctionnelles, neuromotrices ou cognitives. Ils

soulignent la difficulté de validation d’une technique par rapport à l’autre en raison des

difficultés à réaliser des études non biaisées. Cependant, il apparait clairement que la

répétition des exercices est un facteur favorable à une meilleure récupération. Les principes

et les applications de ces différentes techniques peuvent différer sur la forme mais non le

fond : l’acquisition de la meilleure autonomie possible pour le patient en fonction des

déficits retrouvés au cours du bilan. Pour cela, quatre objectifs prioritaires sont retenus

dans la prise en charge : le travail de l’équilibre, en progression, le travail des transferts qui

permet ensuite, par acquisition du transfert de poids et de l’adaptation posturale, une

reprise de la marche ; enfin un travail de la préhension avec une prise en charge globale du

membre supérieur.

Le but principal des techniques neuromusculaires est de dépasser les schémas

stéréotypés associés à la spasticité et aux syncinésies, qui représentent les entraves les plus

significatives à une évolution rapide lors de la récupération spontanée de l’hémiplégique.

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[10] Vincent S., Pradat-Diehl P., Bilan et rééducation en kinésithérapie de patients

hémiplégiques gauches avec une négligence spatiale unilatérale associée,

Kinésithérapie Scientifique 2009, 501, 5-18

Cet article présente le bilan et la rééducation spécifiques aux patients

hémiplégiques présentant un syndrôme d’héminégligence. Les auteurs insistent sur le fait

que la prise ne charge de l’hémiplégique doit tenir compte des troubles associés qui sont

différents selon que l’hémicorps lésé est le droit ou le gauche. L’hémiplégie gauche est

fréquemment associée à une altération de la perception de la représentation du corps dans

l’espace. Les échelles d’évaluation de la négligence spatiale unilatérale sont multiples et

permettent un ciblage du trouble selon qu’il touche l’espace corporel ou lointain. Les

bilans sont orientés en fonction de l’héminégligence, avec une attention particulière portée

à la façon dont se transfère le patient et à sa déambulation, car il existe un risque accru de

chute.

De ce fait lors des séances de rééducation, l’accent est mis sur le travail des

transferts et sur une rééducation orientée vers la tâche, ludique et fonctionnelle. Le

thérapeute insiste sur le transfert de poids du coté hémiplégique en utilisant notamment les

niveaux d’évolution motrice, et sur l’orientation de la tête et des yeux vers le coté gauche,

s’y plaçant préférentiellement et utilisant un guidage manuel du coté gauche.

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[12] Pérennou D., Evaluation, interprétation et rééducation du comportement

« pusher » ; In : Azouvi P., Bussel B., Rééducation de l’hémiplégie vasculaire ; Paris,

Frison Roche, 2003 : 95-106

Les troubles de la perception de la verticalité sont fréquents après accident

vasculaire cérébral et peuvent conduire au syndrome appelé « pusher » qui est un biais très

important dans la construction de la verticale.

La station assise est très souvent altérée après lésion cérébrale et la capacité du

patient à retrouver rapidement un bon équilibre postural assis conditionne la suite de

l’évolution. L’auteur précise que cela est bien du à un trouble cognitif et non à un trouble

de la stabilité posturale ou une déficience motrice.

Il existe trois modalités de verticale subjective : la verticale visuelle, la verticale

haptique et la verticale posturale, ne mettant pas en jeu les mêmes organes sensoriels ni

récepteurs. C’est bien ici la pathologie qui nous renseigne sur la physiologie : selon la

localisation de la lésion, ce sont une ou plusieurs de ces modalités qui peuvent être

touchées.

L’auteur s’intéresse à l’étude de Karnath et al. qui a tenté de préciser la localisation

des lésions intracérébrales chez des patients présentant un comportement « pusher ».

Karnath et al. ont également proposé une échelle d’évaluation de ce syndrome. Cependant,

les conclusions de ces auteurs entrent en contradiction avec d’autres résultats ; des études

plus approfondies ont nécessaires, qui pourraient de plus permettre la validation d’une

technique de rééducation spécifique du comportement « pusher ».