ROUMANIE V[IE LES FRANQAIS D'AUTREFOIS

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Conception graphique de la couverture: Floarea Jutuianu Rddaction: Claudiu Constantinescu Mise en page: Mircea Titar DTP: Ofelia Co;man Descrierea CIP a Bibliotecii Na$onale a Rominiei DESFEI.IILT-ES, PAUL La Roumanie vue par le frangais dautrefois / Paul Desfeuilles et Jacques Lassaigne ; seleqie de texte si note de Paula Romanescu. - Bucuregti : Editura Institutului Cultural Romin, 2013 Bibliogr. ISBN 978-973 -577 -643-5 I. Lassaigne, Jacques II. Romanescu, Paula (coord.) 913(4e8)(082) 821.133.t-822 @INSTITUTUL CULIURAL ROMAN Aleea Alexandru 38, Sector 1 011824, Bucurqti ROMANTA Tel.:0317 100 637 E-mail: [email protected] Difuzare: comenziPicr.ro Tel.:0317 100 646 LA ROUMANIE V[IE PAR LES FRANQAIS D'AUTREFOIS Choix des textes et notes par PAULA ROMANESCU Tir€s de la s€lection du livre de PAUL DESFEUILLES CTJACQUES IASSAIGNE Les Frangais et la Roumanie (Bucarest - 1937) DeuxiEme €dition X rNsrrruTul cULTURAL RoMAN

Transcript of ROUMANIE V[IE LES FRANQAIS D'AUTREFOIS

Page 1: ROUMANIE V[IE LES FRANQAIS D'AUTREFOIS

Conception graphique de la couverture: Floarea Jutuianu

Rddaction: Claudiu Constantinescu

Mise en page: Mircea TitarDTP: Ofelia Co;man

Descrierea CIP a Bibliotecii Na$onale a RominieiDESFEI.IILT-ES, PAULLa Roumanie vue par le frangais dautrefois / Paul Desfeuilles

et Jacques Lassaigne ; seleqie de texte si note de Paula Romanescu. -

Bucuregti : Editura Institutului Cultural Romin, 2013

Bibliogr.ISBN 978-973 -577 -643-5

I. Lassaigne, Jacques

II. Romanescu, Paula (coord.)

913(4e8)(082)821.133.t-822

@INSTITUTUL CULIURAL ROMANAleea Alexandru 38, Sector 1

011824, BucurqtiROMANTATel.:0317 100 637

E-mail: [email protected]

Difuzare: comenziPicr.roTel.:0317 100 646

LA ROUMANIEV[IE PAR LES FRANQAIS

D'AUTREFOIS

Choix des textes et notes parPAULA ROMANESCU

Tir€s de la s€lection du livre

de PAUL DESFEUILLES CTJACQUES IASSAIGNELes Frangais et la Roumanie

(Bucarest - 1937)

DeuxiEme €dition

X rNsrrruTul cULTURAL RoMAN

Page 2: ROUMANIE V[IE LES FRANQAIS D'AUTREFOIS

Sommaire

La Roumanie aux yeux drs Frangais. . .

Inuitation au uoyage

QUELQUES PAGES D'HISTOIRE

JULES MICHELET, La Rournanie 13

EDGARQUINEI EtirrrrleGrandetMichelleBraue. 18

CHARLES DE PERTUSIER, Les Phanariotes. . . 27

BILLECOCq COCHELET, HUBER, D ocuments dip lomatiques

sur I'origine des rehtions politiques fanco-roumaines pendant

la l-ire moitii du W-e siicle 30

A. UBICINI, La Riuolution dt 1848 33

6,ffnS RECNAUI|, La Grandr Roumanie: solution dz k question

d'Orient. 40

CH. SEIGNOBOS, Linteruentio n /iangaise dans la formation

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dehRoumanie.....ARMAND fEW, ta cAuse roumaine, causefrangaise-

NAPOLEON Ill, Paro lts irnpiriales.

PAUL HENRX L'euare du Prince Cuza.

MARCEL nUErut Victor Place, consul de France tJassy .

MIMBEAU, La question transyluaine

GAMBETTA, La question roumaine

CLEMENCEAU, Luttes des racet. . .

ERNEST LAVISSE, Tbmoignages enfaueur dts condamnis du procis

dumlmorandum ....ALFRED RAMBAUD, Tlmoignages enfaueur d.es cond.amnis du procls

dumimorandum ....LE GENE,ML BERTHELOT, Proclamation aux RoumAiNs

ANDRE BELLESSORI, Carol I'et et son rigne .

PIERRE LOTI, Carmen Syha. .

ROBERT DE FLERS, Le Roi Ferdinand ole Loyab,.

PAUL MORAND, La Reine Marie; Le Palais rolal . .

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AIBERT THO MAS, L'itendard d'Etienne' le- Grand .

Eunf BOUTROUX, L'ffirt roumain pendant la Grand.e

Guerre .

LE GENERAL \fEYGAND, [Ine page d'histoire profondrment

ernouuante

RAYMOND POINCARE, Hommage d la Roumanie.

Eooueno HERRIOT, La Grande Roumanie. .

COMTE DE SAINT:AUI-A.IRE, Les relationsfranco-roumaines . . . .

LOUIS BARTHOU, Discours.

IACQUES BAINVILLE, La Roumanie et la France .

CUIIURE, SCIENCES ET ECONOMIE

LEO CIARETIE, QueQua iciaains rournains

MARIO ROQUES, La poisie rournaine conternporaine

CHARLES DIEHL, L'architecture religieu.se roumaine et linfluence

byzantine.

HENRI FOCILLON, L'art et l'histoire en Roumanie

STANISI-q.S BELIANGE& L'lglise des Tiois Hiirarques daAnt

sa rest*uration; Curtea de ArgisROBERI BRUSSEI, Naissance, jeunesse et maturiti de la musique

roumaine

IEROME CARCOPINO, L'amitii intelleauelle de la France

et de la Roumanie. . . .

EUnf SERGENT, Histoire des rektions midicales

franco-roumaines .. ..DOCTEUR CAILIAI, L'organisation rnidicale des Principautls. . . . .

HENRI CAPITANI Les relations juridiques entre la France

PAUL GAULIIER, Ies lessourcet iconomiques de la Roumanie. . . . . .

A. MUZEI Lephrole en Roumanie.

J.l.N. HUOT, Les ressources miniires d.e kValachie.

QUEI,QUES ASPECTS PITTORESQUES DE LAROUMANIE: CEOCNEPUIE, ETtrINOGRAPHIE

J.L. CARRA, Le sol moldo-ualaque; Caractire des Valaques et des

Moldaaes

A. UBICINI, Portrait des Roumains.

EMMANUEL DE MARTONNE, Za uilkge roumain

subcarpathique

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COMTE DE IAGARDF', Bucarest en 1824 . . 218

VICOMTE DE MARCELLUS, Noce ). la Cour du hospodar

de Vakchie.

STANISIAS BELTANGER, Bucarest en 1845 . .

Eooueno THOWENEL, Au thidffe, I Bucarest, en 1840 . . . . . .

G. LE CLE& Les lautars

PAUL MORAND, Bucarest de nos jours

RAOUL PERRIN, Les Vakques.

STANISLAS BELTANGER, Les Valaques

XAVIER MARMIER, Szr la route dc Crai'oua ou hs Principautis

en 1846.

J-A. VAILLANT, Le rnonastire d.e Curtea de Argls

TANCELOI Les cimetiires en Valachie

LEO CLARETIE, Slanic de Prahoua; descente dans une mine dz sel. . .

JULES MICHELEI Le Danube.

SAINT-MARC GIMRDIN, Le Danube, uoie de communication. . . .

ANDRE BELLESSORT, Sur le Danube

J.B. LECHEVAIIER, Ze littoral en 1800. . .

PAUL IABBE, Constantza, port de la Roumanie

PHILIPPE D'AVRIL, Voyage enMoHauie (1692)

BARTHELEMY BACHEVILLE, A la frontiire de

Moldauie (1817) .

COMTE D'HAUTERIYE, L'archhecture et les habitants.' . . . . . . . .

COMTE DE ROCHECHOUART, Une uisite du Duc dt Richelieu

I lassy en 1807. . .

A. UBICINI, Le monastire de Neamtzu

M-ELLE VESSEREAU, Visite aux iglises moldaues

LUCIEN ROMIER" La Buhoaine

GUILLEBERT DE I-{NNOY, Voleurs bessarabiens en 1421

MARMONI-, La Bessarabie en 1B34 .

LUCIEN ROMIE& En Bessarabie

MARMONI La Ti'ansylaanie et ses habitants. . . . . .

AITIIA DE GERANDO, Les Roumains d.e Tiarusylaanie. . . . . . . . . .

LUCIEN ROMIER / trauers la Tbansyluanie

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Jules Michelet

Jules MICHELET (179S-1874), historien, dcrivain, philosophe del'histoire, professeur i l'Ecole Normale Sup€rieure, .h.f de la sectionhistorique auxArchives nationales (1831). CEuvres: Histoire de France (desorigines ). la mort de Louis XI) - 6 vol. qui parurenr de 1833 i 1844;L'Histoire d.e la Rduolutionfrangaise (7 vol., de 1847 i 1853); L'Histoire deFrance (de Louis XI ir Louis XW; 1855-1867). Dans sa retraite (impos€e)il continue )" 6crire des dtudes de nature et de vie (L'Oiseau, 1856; L) Mer,1861; LAmour, 1859l' La Femme, 1860; La Bible de l'humaniti, 1864;L'Histoire du XIX-r si?cle 11872-1875), en 3 vol., inachev6e).Lauvre historique de Jules Michelet est celle d'un arriste doubld d'unprosateur original, remarquablement audacieux. Son Journal intime leprouve i" sa manidre. Le fragment ci-dessous fait partie de <LdgendesdCmocratique du Nordr, (Euures com?l?tes, Flammarion, pp.24Z-i15.

LA ROUMANIE

Peuples de l'Occident qui, depuis si longtemps, loin de labarbarie, cultivez les arts de la paix, gardez roujours un reconnaissantsouvenir pour les nations orientales qui, plac€es aux frontidres del'Europe, vous ont couverts et pr6serv6s du ddluge Thrtare, desarmdes des Turcs et des Russes; n oubliez pas tout ce que vous devezI la Hongrie, ) la Polbgne, ). l'infortunde Roumanie.

Ces peuples ont souvent arrdtd les Barbares, souvent les ontlassds. M€me vaincus, ils vous servaient encore, usant la rage desennemis de Dieu i force de souffrir.

Comment appellerai-je la Roumanie, les Valaques et Moldaves?Lanation sacrifide. La Hongrie, la Pologne, ont eu du moins la gloirede leurs souffrances, Ieur nom a retenti par toute la terre. Les peuplesdu bas Danube ont ). peine obtenu l'intdrdt de l'Europe.

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Huit millions d'hommes de mdme langue, de mdme race, unedes grandes nations du monde, passaient inapergus! Pourquoi? C'estle fond mdme de leur misdre; battus d'une mer orageuse de centpeuples divers, changeant toujours de maitres, ils lassaient l'attention,ils troublaient le regard de leur apparente mobilitd. Le vertige venait) considdrer leur histoire, comme le voyageur qui, assis au bord duDanube, contemplant son cours orageux, voudrait fixer des yeux,saisir, compter la vague qui toujours va montant sur la vague, puislas, d6courag6, d6tournerait les yeux, plaignant son travail inutile.

Le flot varie sans cesse, le fond ne varie pas. La Roumanie, de

Trajanjusqui nous, se reste fiddle i elle-m6me, fixe en son gdnieprimitif, Peuple n6 pour souffrir, la nature l'a doud de deuxchoses qui font durer: la patience, l'6lasticit6, qui font que, toujourscourb6e, toujours elle se reldve. Ne la comparez pas aux les monuments.romains, aux voies dternelles qui sillonnent son territoire. C'estplut6t la rdsistance, la forte et souple rdsistance des digues de fascines

otr l'Oc6an se brise; il aurait emportd des digues de granit.Le fond de cette rdsistance n'est point la sombre acceptation du

mal, le triste fanatisme de l'autre rive.du Danube, cette mort duceur qui a stdrilisd le monde musulman: non, c'est un principevivant, l'amour obstind du pass6, le tendre attachement i cetteinfortunde patrie, qu'on aime plus, plus elle est malheureuse. LeRoumain ne la quitte jamais que pour y revenir. Il garde, invariable,tout ce qui vient de ses pdres, l'habit, les mcurs, la langue, et son

grand nom surtout: Romainst. Noblesse bien prouv6e. Leur langueest toute latine. Le laborieux g6nie des patientes l6gions qui ontcouvert le monde de leurs travaux revit dans cette grande colonie de

l'Empire. Le colon italien a dpousd la fille et la scur du Danube;mais c'est le premier 6l6ment qui domine dans ce mdlange. Si leValaque n a pas l'6lan, la furia hongroise, il a la fixit6, l'opiniitretddes l€gions antiques. C'est un proverbe roumain (digne de Rome):<Donnez jusqu'i la mort! - Dd, pe moartelrr.

Les souffrances inouies de ce peuple, les durs et brusqueschangements surtout qui ont troubl€ sa destin€e, n'ont gudre permis) sa podsie de prendre l'essor. Pour art, il a eu ses soupirs, des

mdlodies touchantes et d'un charme mdlancolique. Comme tout

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peuple d'origine italienne, il est sensible ). la couleur. Les dglises,surtout chez les Valaques transylvains, sont toutes peintes de la maindes peintres paysans. Leurs lits sont peinrs; leurs selles et le joug deleurs buffles le sont dgalement. Le cof[re que la femme appoft; aumariage, l'dldgante tunique qu'elle brode elle-m€me, offrent dansIeurs ornements peints la plus frappante ressemblance avec les plusanciennes mosaiques romaines.

Leurs danses sont romaines aussi, et leurs jeux ceux de LAntiquit6.C'est un peuple 6l6gant, d'dlocution facile, et qui parle I merveille.Nulle diff6rence d'idiome du paysan au lettrd; i vrai dire, c'estcomme en Italie, il n y a pas de peuple, ou, si l'on veut qu'il y en ait,I'ildgance et la distinction se trouvent surtout dans les campagnes.Un de mes amis, nd Frangais, Hongrois de ccur, nullementsuspect de partialitd pour les Valaques, trouvait chez eux (dans la'llansylvanie) je ne sais quoi des bergers de Virgile.

Les mcurs sont trds faciles et trop peut-€tre. Cela est vrai, dutnoins, des villes, spdcialement des capitales, m6lange d'dtrangerscorrompus. Il n y a pas de meilleur peuple, ) cela pris, ni plus aimable,ne se plaignant jamais, remerciant toujours, quoi qu on fasse pourcux. La douceur, la tendresse du caur valaque, se rdvdlent en leurlangue, pleine de diminutifs gracieux, caressants. Elles sont plusscnsibles encore dans leurs acres et leur vie habituelle. Il se commetinfiniment peu de crimes en Roumanie, er la peine de mort a pu y0tre abolie depuis longtemps. Jamais, tant qu'elle fut appliqude, ontrc pouvait rrouver de bourreau dans le peuple; on appelait desCtrangers.

Leur aimable hospitalitd accueille, cherche, pr6vient l'inconnu.[)ans plusieurs des contrdes valaques, ils ont la touchante coutumede ddposer au bord des roures des vases remplis d'eau pour le voyageurrlui pourrait passer. Entrez dans cette cabane. Une belle femme quifilait vient au-devant de vous, elle vous salue gracieusement dansson charmant langage antique. Elle quitte tout, s'empresse, vousregoit comme aurait fait une fille, une scur au frdre bien-aimd deretour. Elle court i la fontaine, et, selon les anciens usages, vousoffre apa nehceputd,l'eau pure i laquelle nulle main n a touch6. Vosrnains lav6es, elle jette dessous cette toile brillante de paillettes d'or

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qu'elle fit pour son mariage, pour en parer le cou de celui qu elle

aimait. Elle offre tout ce qu'elle a, sa meilleure crCme, ses fruits r6serv6s

pour un fils absent; l'6tranger est bien plus: c'est l'envoy6 de Dieu.

oAhl Si mon mari 6tait li, il vous mettrait dans votre route; ilserait votre guide. Il est bi€n loin dans la montagne - Pourquoi si

loin? - H€lasl je ne l'aurais dit... Le propridtaire est bien dur; nous

ne pouvons payer, si nous ne menons nos bestiaux au paitre au loin,parmi les rochers, dans les terrains sans maitre... Et, par-dessus, le

Cosaque est yenu, il a vol6 nos foins; la pauvre vache, l'hiver vivait

d'6corce d'arbres... Ils ont tud nos baufs; pour labourer, il a fallu

nous atteler nous-m€mesr.TLop douloureuse histoire, tant fois renouvelde! Fatalit6 pesante!'..

Le maitre a pu changer, mais la misdre jamais. Jadis' d'innombrables

troupeaux, des millions de moutons, de baufs, passaient en tributle Danube. Ils restent aujourd'hui dans le pays, mais pour le maitre

seul. Qu y a gagn(.le paysan? Lordre est entrd dans l'administration,le fisc a mieux compt6... mieux pressurd le laboureur. Un affreux

proverbe valaque 6tait celui-ci: pour le cultivateur qui na pu payer'

le fisc mettait au registre: uNous lauons passi au pimena>. Le

malheureux, mis dans la cheminde au-dessus d'un r6chaud allum6 et

couvert de piment, y restait vingt minutes. Devenu violet, h6riss6,

presque mort, on le tirait de li, on le prononEait insolvable, ou,

pour dire comme le pr6cepteur Secoul, tondu ras et tordu d sec.

Telle est I'effroyable barbarie avec laquelle on a si longtemps

traitd le peuple le plus patient et Ie plus doux du monde.

Hommes de toute nation, de toute opinion, lisez Ia belle et la

noble proclamation de la r6volution de Valachie en 1848; voyez

Ia moddration incroyable, la cldmence dont elle fit preuve, les

m6nagements qu elle garda pour tous; vos yeux, nous en sommes

strrs, riiront pas jusqu au bout sans s'obscurcir de larmes.

Et cette rdvolution si douce fut fortement fondde. Elle est au

caur du peuple maintenant et n en sortira plus. Elle a sa racine en

ceci que, non seulement la libert6 lui fut donnde, mais la propridtd:

la terre aa paysan, une pidce de terre suffisante pour sa famille. Dans

une contrde, inculte encore en grande partie, on peut en donner

i tous sans 6ter i personne.

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Ces immenses prairies d6sertes qui surprennent le voyageur de

leur incroyable richesse, de la vari6t6 d'un prodigieux tapis de fleurs,sont le seul pays en Europe qui rappelle la grandeur des sites

am6ricains. Des migrations nombreuses pourraient s'y faire, sans

passer l'Ocdan; des peuples viendraient s'y asseoir, et il y aurait place

cncore. Lhomme seul, la barbarie des guerres, le cruel calcul des

tyrans, ont pu y cr€er le d6sert, y rendre inutile, sans la d6couragerpourtant, la maternelle bontd de la nature.