RIO + 20 en direct !

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SOMMET RIO + 20 : DES DIRIGEANTS EN PANNE D'INSPIRATION ? Le Sommet Rio + 20 s'est conclu sur l'accord des 194 chefs d'État autour d'un texte que beaucoup d'observateurs ont qualifié de « régressif », allant même jusqu'à rebaptiser ces rencontres « Rio - 20 ». L’avancée la plus positive est la mise en place d'une commission de 30 personnes qui vont travailler pendant 3 ans pour définir les nouveaux critères et indicateurs de développement durable (prévus pour 2015). Quid d'une agence mondiale de l'environnement ou encore d'objectifs chiffrés concernant l'eau et les énergies renouvelables ? Retour sur un échec annoncé. CRISE DE LEADERSHIP En l'absence de nombreux diplomates, tels que Barack Obama ou encore Angela Merkel, on aurait pu penser qu'on assisterait à une sorte de passation de pouvoir entre l'Occident vieillissant et les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) autour des questions de développement soutenable. Il n'en fut point. Au final, seul le Brésil tire son épingle du jeu, en démontrant qu'il est capable de porter à bras le corps des événements d'envergure mondiale. Face à ce manque criant de leadership, la véritable interrogation qui émanait des différents échanges entre acteurs portait sur les capacités d'actions de nos dirigeants et de nos grandes institutions internationales, tout autant que sur leurs inspirations pour contourner les obstacles au changement. Les conclusions étaient unanimes. Ils ne semblent tout simplement pas prêts pour de tels bouleversements, car peut-être ils ont trop d'intérêts investis dans l'ordre existant, trop de territoires de pouvoirs à défendre et trop d'engagements courts termistes !

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Suivez notre représentant sur place Nicolas Maurice-Demourioux

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SOMMET RIO + 20 : DES DIRIGEANTS EN PANNE

D'INSPIRATION ?

Le Sommet Rio + 20 s'est conclu sur l'accord des 194 chefs d'État

autour d'un texte que beaucoup d'observateurs ont qualifié de «

régressif », allant même jusqu'à rebaptiser ces rencontres «

Rio - 20 ». L’avancée la plus positive est la mise en place

d'une commission de 30 personnes qui vont travailler

pendant 3 ans pour définir les nouveaux critères et

indicateurs de développement durable (prévus pour 2015).

Quid d'une agence mondiale de l'environnement ou encore

d'objectifs chiffrés concernant l'eau et les énergies

renouvelables ? Retour sur un échec annoncé.

CRISE DE LEADERSHIP

En l'absence de nombreux diplomates, tels que Barack Obama ou encore Angela Merkel, on

aurait pu penser qu'on assisterait à une sorte de passation de pouvoir entre l'Occident

vieillissant et les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) autour des questions de

développement soutenable. Il n'en fut point. Au final, seul le Brésil tire son épingle du jeu, en

démontrant qu'il est capable de porter à bras le corps des événements d'envergure mondiale.

Face à ce manque criant de leadership, la véritable interrogation qui émanait des différents

échanges entre acteurs portait sur les capacités d'actions de nos dirigeants et de nos grandes

institutions internationales, tout autant que sur leurs inspirations pour contourner les

obstacles au changement. Les conclusions étaient unanimes. Ils ne semblent tout simplement

pas prêts pour de tels bouleversements, car peut-être ils ont trop d'intérêts investis dans

l'ordre existant, trop de territoires de pouvoirs à défendre et trop d'engagements courts

termistes !

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UN PROBLÈME DE FINANCEMENT ?

Cette inertie, fortement perceptible depuis l'intérieur des différentes rencontres, pourrait

trouver sa source dans la question des financements des institutions internationales. Les

agences des Nations Unies sont très dépendantes du sponsoring des entreprises depuis que les

états ne les financent plus suffisamment, elles vont donc chercher l’argent dans le privé ! Ce

phénomène est assez récent. C’est à Johannesburg en 2002 qu’ont été lancés ces nouveaux

partenariats intitulés « Global compact ». Ils se sont poursuivis par la suite. Les connexions

entre les entreprises partenaires et les agences de l’ONU se sont même renforcées de façon

outrancière. Car ces liens influencent le travail même des agences de l’ONU. On peut citer en

exemple le programme « Business Action for Sustainable Development » des Nations-Unies.

Si leur réelle indépendance financière n'est pas assurée et lorsqu'on observe le poids croissant

des lobbys sur les prises de décisions finales, dès lors comment peut-on assurer qu’elles

défendent les intérêts des citoyens dans le monde ?

ILLUSION OU (R)ÉVOLUTION : LE RÔLE CLÉ DE

L'ENTREPRENEURIAT

Les enjeux gravitant autour de l'entrepreneuriat, nous venons de le voir, sont cruciaux pour

l'avenir tant ses connexions sont tentaculaires avec tous les autres secteurs. Les grandes

entreprises étaient donc (omni)présentes à Rio pour promouvoir l’idée qu’elles s’activent déjà

à trouver des solutions pour le développement durable du monde. Depuis 1970 et la

déclaration tonitruante de Milton Friedman sur la RSE ("La responsabilité sociale des

entreprises est d’augmenter leurs profits !"), le point de vue des dirigeants d’entreprises a

heureusement bien évolué. À ce titre, divers forums sur la Responsabilité Sociétale des

Entreprises se sont tenus en amont des rencontres officielles. Cependant cette dernière reste

basée sur le volontariat des entreprises. Ainsi, en signant ce partenariat, elles savent qu’elles

ne devront pas changer grand-chose à leurs pratiques et qu'en contrepartie leur image s’en

trouvera améliorée, tout comme leur influence.

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L'entrepreneuriat social avait également sa place à Rio. Si ce secteur est en plein boom, il faut

rappeler qu'il est encore en construction dans la plupart des pays, notamment via les travaux

des institutions européennes pour tenter de promouvoir un écosystème favorable au

développement de ce type d'entreprises innovantes au sein de l'UE. Un rapport publié

récemment et établi en partenariat entre J.P. Morgan et la Fondation Rockefeller, stipule que

ce secteur pourrait représenter à court terme un marché de plus de 10 milliards d'euros.

Enfin si l'économie sociale est bien plus qu'une vision entrepreneuriale des changements

futurs, elle n'en reste pas moins un des acteurs clés. Le Sommet des Peuples qui s'est déroulé

en amont des rencontres officielles devait ainsi permettre aux acteurs de l'économie sociale

(et solidaire) de se regrouper pour porter des revendications communes. Ce fut chose faite

avec la déclaration du Réseau Intercontinental de Promotion de l'Économie Sociale et Solidaire

(RIPESS) intitulé « L'économie dont nous avons besoin ».

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PLACE À LA JEUNESSE !

Pour promouvoir cette nouvelle économie, la jeunesse a plus que jamais son mot à dire et

tenter ainsi de prouver qu'elle peut être autre chose qu'une simple variable d'ajustement

sociétal en temps de crise. On entend souvent parler de « village mondial ou planétaire ». Or

si un village se caractérise entre autres par la solidarité entre ses membres, alors en ce sens le

village planétaire demeure à construire. Il en va de même pour cette nouvelle économie,

verte, bleue ou rose, qui apparaît un peu plus chaque jour comme vitale à construire pour que

les générations futures puissent avoir, elles aussi, leurs mots à dire.

À nous de montrer que nous ne sommes pas une « génération sacrifiée » pour reprendre les

propos de plusieurs diplomates. À notre génération de montrer qu'une autre manière

d'entreprendre est possible, soucieuse de son entourage (social, environnemental, culturel,

mais aussi économique), et qu'elle peut conduire à une société moins inégalitaire, basée sur

les valeurs chères au mouvement de l'économie sociale et solidaire. Le principal atout de Rio +

20 est d’avoir fait en sorte que le développement durable se transforme en un paradigme sous

tous ses aspects. Voilà une belle occasion pour bâtir les modèles de demain en conséquence,

car le temps des déclarations est passé: place à l'action !

Nicolas Maurice-Demourioux