REVISION IAS 19

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// N°452 Mars 2012 // Revue Française de Comptabilité 20 Une série importante de modifications a été apportée à cette Norme, qui avait été élaborée sous l’égide de l’ancien IASC et était restée en vigueur depuis 1998 sans révision fondamentale. Elles visent à fournir aux apporteurs de capitaux et aux autres utilisateurs de l’information financière une image beaucoup plus claire de l’obligation résultant d’un plan à prestations définies ( Defined Benefit Obligation – DBO) et la façon dont cette obligation affectera la situation financière, les résultats et les flux de trésorerie de l’entreprise. Les travaux ont été engagés en 2006 avec la formation d’un groupe consultatif d’experts, suivie de la publi- cation en 2008 d’un Discussion Paper et en Avril 2010 d’un Exposé Sondage qui a fait l’objet de plus de 220 lettres de commentaires. L’importance de la question La question des engagements de retraite contractés dans le cadre de régimes à prestations définies est en effet un sujet d’intérêt partagé par tous les investisseurs. L’internationalisation croissante des entreprises françaises a pour résultat que nombre d’entre elles sont exposées à des passifs sociaux au travers de leurs filiales étrangères, ou en raison de régimes de retraite chapeau ou complémentaire, accordés à leurs cadres ou résultant d’accords de branche. L’accroissement de la durée de la vie, le coût croissant des couver- tures maladie, la baisse des rendements des actifs financiers éventuellement détenus en couverture, se conjuguent pour alourdir le coût de tels régimes. Il devenait indispensable d’assurer une totale transparence sur la réalité économique dans les états financiers publiés. L’impact de ces évolutions de fond est naturellement plus sensible dans les pays où les modèles sociaux accordent plus de place aux couvertures de retraites privées qu’aux régimes publics à cotisations définies. Avec la crise financière, les déficits des régimes (pour simplifier, il s’agit de la différence entre le montant actuariel de l’obligation et la valeur des actifs détenus en couverture) se sont encore creusés, entraînant pour les entreprises des besoins de refinan- cement de leurs fonds de pension. De nombreuses entreprises constatent aujourd’hui l’impact, souvent significatif, de cette crise non seulement sur leur compte de résultats et sur leur bilan, mais aussi sur leur trésorerie. Ainsi, une étude publiée en novembre 2011 par UBS Investment Research 2 montrait que pour 143 sociétés britanniques, le montant cumulé des déficits liés aux obligations de retraite augmenterait de 36 % (soit 56 milliards de £) au troisième trimestre 2011, représentant pour certaines de 10 % à 53 % de leur capitalisation boursière. Le cas le plus significatif est la société IAG, qui résulte de la fusion de British Airways et Iberia : le déficit comptable augmente en 2011 d’un montant équivalent à 25 % de la capitalisation boursière, pour atteindre en cumul 53 %. Autre cas exemplaire, British Telecom (BT Group) pour lequel les chiffres sont respectivement de 11 % et 25 %. La cause principale de cette aggravation dévastatrice est la baisse de valeur des portefeuilles d’actifs déte- nus en couverture et la baisse générale des rendements financiers attendus. La situation des entreprises britanniques n’est pas unique, et de nombreux groupes cotés français se trouvent dans une situation analogue, même si nombre d’entre eux ont profité de la première application des IFRS en 2005 pour imputer les écarts actuariels sur leurs capitaux propres. Mais pour beaucoup, l’entrée en vigueur de la norme révisée au 1 er janvier prochain aura des effets significatifs sur la situation nette comp- table et les résultats ultérieurs. Les ratios d’endettement seront aggravés. Une révision fondamentale de la norme comptable IAS 19 pour les engagements post-emploi L’IASB a publié en Juin 2011 une version largement modifiée de la Norme internationale IAS 19 relative aux avantages accordés au personnel. Elle devra être appliquée 1 dans les comptes consolidés des entreprises qui utilisent les normes IFRS, à compter du 1 er janvier 2013. Rappelons que cette Norme concerne la comptabilisation des avantages accordés aux salariés, notamment les montants qui leur seront versés après la fin de la période d’emploi. La Norme ne traite pas des stock-options (IFRS 2) ni de la présentation des comptes des régimes de retraite eux-mêmes (Norme IAS 26). Par Philippe DANJOU, Membre de l’International Accounting Standards Board 1. Sous réserve toutefois d’une publication en temps voulu de la Norme approuvée par la Commission européenne ; ceci ne devrait pas poser problème, un vote positif du Comité réglementaire comptable ayant eu lieu le 7 décembre 2011. 2. UBS European Equity Strategy – “Pension deficit disorder : UK companies“. 1 er novembre 2011. Résumé de l’article Cet article résume les principaux chan- gements introduits dans la comptabili- sation des engagements de prestations définies par la norme IAS 19 révisée en Juin 2011, qui entrera bientôt en vigueur. L’auteur explique l’importance des dettes liées aux retraites pour les investisseurs et les préparateurs des états financiers. Il commente la question de la volatilité des provisions pour retraites lorsqu’elles sont mesu- rées à un montant actuel et indique comment le Board a décidé d’utiliser l’OCI (état des autres éléments du résultat global) pour atténuer cet effet. Il discute également des avantages de ces changements en termes de comparabilité et d’intelligibilité des états financiers. Synthèse // Réflexion // Une entreprise/un homme // Références NORMALISATION

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  • // N452 Mars 2012 // Revue Franaise de Comptabilit

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    Une srie importante de modifications a t apporte cette Norme, qui avait t labore sous lgide de lancien IASC et tait reste en vigueur depuis 1998 sans rvision fondamentale. Elles visent fournir aux apporteurs de capitaux et aux autres utilisateurs de linformation financire une image beaucoup plus claire de lobligation rsultant dun plan prestations dfinies (Defined Benefit Obligation DBO) et la faon dont cette obligation affectera la situation financire, les rsultats et les flux de trsorerie de lentreprise. Les travaux ont t engags en 2006 avec la formation dun groupe consultatif dexperts, suivie de la publi-cation en 2008 dun Discussion Paper et en Avril 2010 dun Expos Sondage qui a fait lobjet de plus de 220 lettres de commentaires.

    Limportance de la question

    La question des engagements de retraite contracts dans le cadre de rgimes prestations dfinies est en effet un sujet dintrt partag par tous les investisseurs. Linternationalisation croissante des entreprises franaises a pour rsultat que nombre dentre elles sont exposes des passifs sociaux au travers de leurs filiales trangres, ou en raison de rgimes de retraite chapeau ou complmentaire, accords leurs cadres ou rsultant daccords de branche. Laccroissement de la dure de la vie, le cot croissant des couver-tures maladie, la baisse des rendements des actifs financiers ventuellement dtenus en couverture, se conjuguent pour alourdir le cot de tels rgimes. Il devenait indispensable dassurer une totale transparence sur la ralit conomique dans les tats financiers publis.

    Limpact de ces volutions de fond est naturellement plus sensible dans les pays o les modles sociaux accordent plus de place aux couvertures de retraites prives quaux rgimes publics cotisations dfinies. Avec la crise financire, les dficits des rgimes (pour simplifier, il sagit de la diffrence entre

    le montant actuariel de lobligation et la valeur des actifs dtenus en couverture) se sont encore creuss, entranant pour les entreprises des besoins de refinan-cement de leurs fonds de pension. De nombreuses entreprises constatent aujourdhui limpact, souvent significatif, de cette crise non seulement sur leur compte de rsultats et sur leur bilan, mais aussi sur leur trsorerie. Ainsi, une tude publie en novembre 2011 par UBS Investment Research 2 montrait que pour 143 socits britanniques, le montant cumul des dficits lis aux obligations de retraite augmenterait de 36 % (soit 56 milliards de ) au troisime trimestre 2011, reprsentant pour certaines de 10 % 53% de leur capitalisation boursire. Le cas le plus significatif est la socit IAG, qui rsulte de la fusion de British Airways et Iberia : le dficit comptable augmente en 2011 dun montant quivalent 25 % de la capitalisation boursire, pour atteindre en cumul 53 %. Autre cas exemplaire, British Telecom (BT Group) pour lequel les chiffres sont respectivement de 11% et 25 %. La cause principale de cette aggravation dvastatrice est la baisse de valeur des portefeuilles dactifs dte-nus en couverture et la baisse gnrale des rendements financiers attendus.

    La situation des entreprises britanniques nest pas unique, et de nombreux groupes cots franais se trouvent dans une situation analogue, mme si nombre dentre eux ont profit de la premire application des IFRS en 2005 pour imputer les carts actuariels sur leurs capitaux propres. Mais pour beaucoup, lentre en vigueur de la norme rvise au 1er janvier prochain aura des effets significatifs sur la situation nette comp-table et les rsultats ultrieurs. Les ratios dendettement seront aggravs.

    Une rvision fondamentale de la norme comptable IAS 19 pour les engagements post-emploi

    LIASB a publi en Juin 2011 une version largement modifie de la Norme internationale IAS 19 relative aux avantages accords au personnel. Elle devra tre applique 1 dans les comptes consolids des entreprises qui utilisent les normes IFRS, compter du 1er janvier 2013. Rappelons que cette Norme concerne la comptabilisation des avantages accords aux salaris, notamment les montants qui leur seront verss aprs la fin de la priode demploi. La Norme ne traite pas des stock-options (IFRS 2) ni de la prsentation des comptes des rgimes de retraite eux-mmes (Norme IAS 26).

    Par Philippe DANJOU, Membre de lInternational

    Accounting Standards Board

    1. Sous rserve toutefois dune publication en temps voulu de la Norme approuve par la Commission europenne ; ceci ne devrait pas poser problme, un vote positif du Comit rglementaire comptable ayant eu lieu le 7 dcembre 2011.

    2. UBS European Equity Strategy Pension deficit disorder : UK companies. 1er novembre 2011.

    Rsum de larticle

    Cet article rsume les principaux chan-gements introduits dans la comptabili-sation des engagements de prestations dfinies par la norme IAS 19 rvise en Juin 2011, qui entrera bientt en vigueur. Lauteur explique limportance des dettes lies aux retraites pour les investisseurs et les prparateurs des tats financiers. Il commente la question de la volatilit des provisions pour retraites lorsquelles sont mesu-res un montant actuel et indique comment le Board a dcid dutiliser lOCI (tat des autres lments du rsultat global) pour attnuer cet effet. Il discute galement des avantages de ces changements en termes de comparabilit et dintelligibilit des tats financiers.

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    Pour les socits du CAC40 3, le total des passifs bruts comptabiliss au titre des engagements de retraite et indemnits de fin de carrire tait au 31 dcembre 2009 de 147,8 mds (en valeur actualise), en augmentation de 13 % sur lanne prcdente ; dans le mme temps, la valeur des actifs dtenus en couverture, bnficiant dun rebond observ sur les marchs, tait de 93,4 mds (en augmentation de 12,6 % sur un an). Le taux de couverture restait donc peu prs inchang 63% et le passif net slevait fin 2009 54,4mds .

    Selon une tude de Bfinance 4, laug-mentation en 2009 de 13 % de la valeur actualise des obligations est une consquence de la baisse des taux dactualisation retenus. Pour les plans situs dans la zone euro, le niveau moyen des taux retenus aurait baiss denviron 60 points de base (de 5,77 % 5,15%) refltant la baisse des rendements des obligations corporate de premire cat-gorie. Selon Baker Tilly, une variation de 0,5 points (50points de base) du taux dactualisation a un impact gnralement compris entre 5 % et 10 % du montant total de lengagement calcul en valeur actuelle. A fin 2010, selon Baker Tilly, les engage-ments totaux 5 augmentent 183 mds et la juste valeur des actifs dtenus en couverture reste peu prs stable au niveau de 63 %, correspondant une provision totale au bilan de 64 mds.La somme des montants diffrs au titre des carts actuariels et de ltalement de leffet des changements dans les rgimes est denviron 5,7 mds , reprsentant une perte latente. Cette perte nest pas trop significative, rapporte la somme des capitaux propres consolids, et les dispo-sitions transitoires de la norme permettront de limputer sur les capitaux propres.

    Les donnes fin 2011 ne sont pas encore disponibles. On peut sattendre ce que le taux moyen dactualisation continue se rduire un peu 6. La variation de juste valeur des actifs dtenus en couverture dpendra de la composition des portefeuilles, et bien sur du degr dexposition aux dettes souveraines.

    Les objectifs de lIASB

    Lobjectif gnral damlioration se dcline selon trois axes :

    amliorer la comparabilit des comptes des diffrentes entreprises, en liminant plusieurs options comptables offertes par lancienne norme ; accrotre la transparence de linforma-tion prsente par les tats financiers,

    en imposant que la mesure au bilan des engagements envers les salaris soit faite en valeur courante, et que le rendement des actifs dtenus en couverture des plans de retraite soit un rendement rel et non un rendement attendu ; amliorer et clarifier les informations donnes dans lannexe sur les rgimes prestations dfinies, notamment en dcrivant de faon plus prcise les carac-tristiques de ces rgimes et les risques financiers auxquels ils exposent lentit qui les a mis en place.

    Un objectif secondaire du projet tait aussi de rapprocher les modes de comptabilisation selon les IFRS, de ceux en vigueur aux USA selon les US GAAP publis par le FASB, afin daccrotre la comparabilit interna-tionale et dassurer un level-playing field. En effet, selon les US GAAP, depuis 2006 lutilisation du corridor et ltalement des carts actuariels dans le bilan taient interdits.

    1. Suppression de la mthode du corridor et des options de prise en compte des carts actuarielsLancienne norme permettait de ne pas comptabiliser les carts actuariels cumu-ls, dans la limite dune fourchette de 10% appele le corridor 7. Instaure pour rduire la volatilit des mesures comp-tables et leur impact sur les rsultats (notamment limpact des modifications

    du taux dactualisation de la dette), cette option rsultait frquemment en la non-reconnaissance systmatique dune partie du passif social, alors que dautres obligations long terme (engagements de remise en tat des sites, provisions pour dmantlement dinstallations industrielles, provisions pour garanties) doivent tre portes au bilan lors de chaque clture leur valeur actuelle courante. Au-del du corridor, lentreprise doit comptabiliser les carts actuariels, mais plusieurs faons de faire (prise en compte immdiate ou talement sur la dure de vie active rsiduelle) taient offertes et nuisaient la comparabilit. La nouvelle norme conserve uniquement la prise en compte immdiate (et sans effet corridor). Dans son tude dimpact 8 des avantages et cots de la nouvelle norme, lEFRAG 9 notait que les modifications faciliteront lanalyse et la comparaison des infor-mations financires pour les lecteurs des comptes, et que la suppression des nombreuses options devrait simplifier la prparation des comptes et en rduire le cot ; enfin, cela devrait galement amliorer la transparence sur les risques financiers en alignant la comptabilit et les risques conomiques sous-jacents.

    Mais en liminant les options qui per-mettaient de neutraliser ou dtaler les effets des changements actuariels, lIASB allait faire apparatre dans les comptes une volatilit importante, susceptible de perturber la comprhension de la per-formance de lentreprise. Une solution innovante (et mon avis, lgante) a donc t trouve : ne faire figurer en charges au compte de rsultats que les lments

    3. En fait pour les 35 socits non financires et exclusion faite dARCELOR. Source: tude ralise par Baker Tilly France, prsente le 17 mai 2011 en partenariat avec la DFCG.

    4. Source : bfinance.fr, Analyse et Veille stratgique en investissement. Article publi sur leur site web le 2 septembre 2010.

    5. Hors indemnits de fin de carrire, les engagements au titre des rgimes de retraite slveraient 130 et 147 mds au 31 dcembre 2008 et 2009 respectivement (Source : bfinance.fr, Analyse et Veille stratgique en investissement. Article publi sur leur site web le 2 septembre 2010).

    6. Lindice Markit IBOXX Corporate Bonds AA zone europenne montre, pour les obligations dix ans et plus, une rduction denviron 40 points de base.

    7. Le plus lev de 10 % de la valeur actuelle de lobligation ou bien de la juste valeur des actifs de couverture.

    8. http://www.efrag.org/files/ED%20Amendments%20to%20IAS%2019/Endorsement%20Advice/EFRAGs_Final_Endorsement_Advice_on_IAS_19_as_amended_in_2011_-_Effect_Study_report.pdf

    9. European Financial Reporting Advisory Group.

    Abstract

    This article summarizes the main changes introduced in the accoun-ting for defined benefit obligations by the June 2011 revised international accounting standard IAS19, soon to become effective. The author explains the importance of the pension related liabilities for investors and preparers of financial statements. He com-ments on the issue of volatility in the amount of pension liabilities if they are measured at the current amount, and how the use of the statement of Other Compehensive Income has been decided by the IASB to mitigate this effect. He also discusses the benefits of the changes in terms of comparability and understandability of the financial statements.

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    jugs rcurrents et reprsentatifs de la performance oprationnelle de lentre-prise, savoir la somme :

    du cot annuel des services rendus par les salaris (accroissement au cours de la priode de leurs droits prestations de retraite, appel aussi cot des services de la priode) ;

    du cot des services passs, qui peut apparatre lors de linstauration, de la modi-fication ou de la cessation dun rgime ;

    du cot financier de la priode, corres-pondant une charge dintrts notionnelle applique la dette actuarielle nette dter-mine au dbut de la priode comptable. La dette actuarielle nette (qui peut tre un solde positif) est elle-mme dtermine comme la dette brute (engagements calculs de faon actuarielle) diminue de la juste valeur des actifs dtenus dans le plan la date du bilan. Le taux dintrt utiliser pour calculer ce cot financier est identique au taux dactualisation retenu pour ramener la dette de retraite la valeur actuelle. Pour cette premire phase de modernisation dIAS19, le Board na pas souhait apporter de modification sur le choix du taux dactualisation, qui reste cal sur les taux des obligations de premire catgorie mises par les metteurs privs (high quality corporate bonds) ou bien, en labsence dun march liquide pour ce type dobligations, le taux des obligations dEtat. Dans les deux cas, le choix de la devise et de la maturit sur la courbe des taux doit tre cohrent avec la devise et la maturit moyenne estime de lenga-gement de retraite.

    Les implications possibles de ces chan-gements sont les suivantes :

    la seule lecture du compte de rsul-tats ne permet plus de comprendre le passage du bilan douverture au bilan de clture: la comprhension de ce qui est inscrit en Other Comprehensive Income (voir ci-dessous) est indispensable ; ceci rend dautant plus ncessaire que ce document de synthse ne soit plus pass sous silence dans la prsentation des comptes, comme cela est trop sou-vent le cas aujourdhui. Cest dailleurs en partie pour cette raison que lIASB a modifi IAS1 Prsentation des Etats financiers pour imposer que cet tat de lOther Comprehensive Income, sil nest pas fusionn avec le compte de rsultats (Option pour un tat de rsultat unique ou Single statement option), soit dor-navant prsent directement la suite et reoive la mme importance que le pr-cdent 10. Il convient de rappeler cette occasion que depuis le 1er janvier 2009, en application dIAS1 rvis, les tats finan-

    ciers de synthse annuels comportent ce nouveau tableau intitul Statement of other comprehensive income OCI, qui explique le passage entre le rsultat net figurant au compte de pertes et profits (Profit or Loss Statement) et la variation de la situation nette comptable, lexclusion de leffet des transactions financires entre lentreprise et ses actionnaires (divi-dendes, missions et rachats dactions) dont les effets restent comptabiliss directement dans les capitaux propres ;

    la reconnaissance au passif du bilan des gains et pertes actuariels prcdemment diffrs ou neutraliss par lutilisation du corridor pourra se traduire par un enga-gement net plus lev, et les entreprises concernes pourront avoir rengocier les clauses demprunt limitant leurs ratios dendettement ;

    la composition du portefeuille dactifs dtenus en couverture naffectera plus le rendement pris en compte pour calculer la charge nette de retraites au compte de rsultats ; par consquent, eu gard la volatilit des placements en actions, certaines entreprises pourront tre ten-tes darbitrer en faveur de placements rendement rgulier, pour lesquels les gains ou pertes actuariels seront enregis-trs dans lOCI. Selon certaines tudes, la charge nette de retraite au compte de rsultats devrait augmenter ;

    enfin, llimination de lutilisation dun rendement attendu des actifs mettra fin la situation trange selon laquelle certaines entreprises prsentant un dficit net de leurs obligations de retraite pouvaient dans le mme temps prsenter un produit net au compte de rsultats.

    2. Utilisation de ltat du Other Comprehensive Income (Etat du rsultat global de la priode)Quen est-il alors des autres changements dans la mesure des actifs et des passifs qui composent la dette actuarielle nette?

    Il peut sagir :

    de gains ou pertes actuariels rsultant de la modification des hypothses for-

    mules quant au taux de dpart anticip des salaris, au taux de mortalit, aux choix qui seront faits entre les diff-rentes options de versement ouvertes, ou encore au cot des prestations de couverture mdicale ;

    de leffet des modifications dans le taux dactualisation utilis ;

    de la variation de juste valeur des actifs dtenus dans le plan, sous dduction du montant du rendement notionnel inclus dans le calcul du cot financier de la priode.

    Ces montants peuvent tre trs signi-ficatifs et sont souvent volatils dune priode lautre. Le Board a dcid quils ne peuvent tre ignors dun point de vue bilanciel, ds lors quil tait sou-hait de reflter aussi fidlement que possible la ralit conomique courante cette date. Aussi, combinant les deux contraintes (bilan refltant les valeurs actuelles sans talement des carts ni mcanisme de neutralisation du type corridor ; compte de rsultats refltant la performance managriale au cours de la priode sans tre impact par des changements de mesure volatils), le Board a dcid que ces changements qualifis de re-measurements seront comptabiliss dans ltat du Other Comprehensive Income (OCI).

    Pour viter une complexit inutile, et en labsence de critres vidents pour justifier un reclassement, le Board a aussi dcid que les montants inscrits en OCI ne seront pas reclasss au compte de rsultats au cours des priodes ultrieures. Lentreprise a bien sur toute libert pour transfrer dun compte lautre au sein de la situation nette comptable (par exemple un compte de rserves distribuables), ceci relevant du droit des socits plus que de la comptabilit.

    Une consquence attendre de linscrip-tion sans talement au bilan de lobliga-tion nette, sera une certaine volatilit du montant de la dette. La communication financire externe devra tenir compte de cette nouvelle donne.

    3. Amlioration des informations fournies dans lannexeLa longue liste des informations obliga-toires a t revue avec lobjectif de focali-ser linformation sur ce qui est le plus utile aux utilisateurs des tats financiers, en particulier pour leur comprhension des risques financiers induits par les plans de type prestations dfinies (DBO) et des stratgies suivies en matire de gestion actif / passif.

    10. Selon IAS 1, lentit doit prsenter tous les postes de produits et de charges comptabiliss au cours dune priode :(a) dans un tat unique de rsultat global, ou ;(b) dans deux tats : un tat dtaillant les composantes du rsultat net (compte de rsultat spar) ;et un deuxime tat commenant par le rsultat net et dtaillant les composantes dautres lments du rsultat global (tat du rsultat global).

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    La nouvelle norme demande ainsi une information plus pertinente sur les points suivants :

    explication des caractristiques princi-pales des plans en vigueur et des risques financiers qui en rsultent le niveau de dtail fournir par type de plan ou par plan individuel est laiss au jugement de lentreprise, qui sera fond sur lanalyse de la similitude des facteurs de risque et des lments cl des plans (par exemple, localisation gographique, contenu et modalits, types de finance-ment, environnement rglementaire) ;

    explication des montants figurant dans les tats financiers et rsultant de la prise en compte de ces plans ; notamment, il sera prsent un tableau de passage entre le bilan douverture et de clture de lexercice faisant apparatre les cri-tures affectant le montant de lobligation actuarielle nette (en sparant celles qui concernent la valorisation des actifs du plan, et les mouvements relatifs la valeur actuelle de lobligation de retraite au titre du plan). Ainsi, la nouvelle norme mettra en vidence : les effets du calcul du cot de service de la priode ; la charge finan-cire sur la situation actuarielle nette; les effets des taux de conversion des devises ; les effets des modifications du primtre de consolidation ; les contribu-tions financires verses par lentreprise au plan ; les modifications de mesures relatives la valorisation des actifs du plan et aux gains ou pertes actuariels, en distinguant au sein de ceux-ci les effets des hypothses dmographiques et les effets des hypothses financires ;

    description de la faon dont les plans prestations dfinies (DBO) pourraient affecter le montant, le timing et le caractre incertain des flux futurs de trsorerie de lentreprise. En particulier, il est demand de fournir une information de nature quantitative sur la sensibilit des calculs chacune des hypothses actuarielles significatives et une descrip-tion des mthodes retenues pour cette analyse de sensibilit ;

    lentit devra dcrire les stratgies suivies en matire de couverture de son obligation (stratgie dinvestissement, utilisation ou non de couvertures dassu-rance ou de swaps de longvit) ;

    enfin, pour fournir une information sur les effets attendus sur les flux futurs de trsorerie, il faudra indiquer les accords de financement existant entre le plan

    de retraite et lentreprise qui pourraient affecter le montant des contributions futures en espces, les contributions au plan attendues au cours de la prochaine priode comptable, et le profil de maturit (chancier) de lobligation existante (par exemple, dure moyenne pondre de lobligation et distribution statistique des dates dchance des paiements aux salaris).

    Conclusion

    Chacun sait que la comptabilisation des engagements de retraite est un sujet complexe et dimportance significative. Toute modification de norme conduit poser la question de limpact possible sur les comportements des acteurs. Au Royaume-Uni, certains ont affirm que lIASB voulait la fin des rgimes de retraite dentreprise prestations dfinies

    La rponse du Board est que la rgle comptable na pas pour objectif de dfinir comment une entreprise doit tre gre, mais de fournir une information claire et pertinente sur la situation financire et les risques assums. Amliorer la comprhension de ces phnomnes par les apporteurs de capitaux, par les organes de direction et dadministration et par les autres acteurs intresss (au premier rang desquels figurent les salaris de lentreprise et ses autres partenaires conomiques) est une contribution importante au bon fonctionnement des marchs de capitaux, la transparence des relations sociales ; elle peut contri-buer labaissement du cot du capital. Dune faon plus gnrale, une meilleure prise en compte de ces mcanismes est de nature renforcer la stabilit financire en mettant en vidence suffisamment tt les situations risque et en permettant la mise en uvre dactions correctrices. Pensons la situation dans laquelle se trouvaient General Motors et Chrysler la veille de leur placement sous la protection du Chapter 11

    Nombreux sont ceux qui pensent que les anciennes rgles comptables produi-saient des effets nfastes, en masquant la ralit et en induisant en erreur les inves-tisseurs. Les amendements apports par lIASB, en supprimant des options, sont de nature simplifier la comparabilit; ils rendent plus facile linterprtation des comptes et permettent une meilleure allocation du capital. Lutilisation de ltat des autres lments du rsultat global (OCI), pour enregistrer les lments non rcurrents ou volatils, redonne au

    compte de rsultats la capacit de mieux traduire la performance de la priode. Mais, ce faisant, le Board a ouvert un nouveau champ de recherches quil devra bien explorer un jour prochain: dune faon gnrale, quest-ce que la performance de lentreprise ? Que doit-on faire figurer en compte de rsultats ou dans lOCI ? Convient-il, dans certaines circonstances, de recycler les lments de lOCI dans le compte de rsultats ?

    NORMALISATION

    Bibliographie

    Limpact de la rforme des retraites et des lois de financement de la scurit sociale sur les engage-ments de retraite, Revue Franaise de Comptabilit, DIDELOT Laurent et BARBE Odile (Octobre 2011, numro 447 page 28). La Norme IAS 19 sur les avantages au personnel : projet de modifications, Revue Franaise de Comptabilit, Benoit LEBRUN (Juin 2010, numro 443, page 4). Engagement des passifs sociaux : vers davantage de transparence et de justifications, Le Cercle Les Echos (http://lecercle.lesechos.fr), par P.FERRON, Ch. VELUT et J-M SZULEWICZ (compte rendu dune tude ralise par BAKER TILLY France sur limpact financier des engagements de fin de carrire et assimils sur les comptes 2009 et 2010 des socits du CAC 40). La nouvelle version dIAS 19 relative aux avantages du personnel, article dEric TORT publi dans Option Finance, n 1153-1154 du 19 dcembre 2011, page 37. Passifs sociaux : le dficit des corporates du CAC 40 se creuse, article publi sur Internet par Bfinance le 2 septembre 2010 (http://bfinance.fr/conseil-en-inves-tissement) La nouvelle norme comptable pour les retraites couteuses pour le CAC 40, article de Florence GUEDAS publi sur Internet par lAGEFI le 13 mai 2010 (http://www.agefi.fr//Articles/imprimer.aspx?id=1136215) Amlioration de la couverture des engagements de retraite du CAC 40, article de Bruno DE ROULHAC publi sur Internet par lAGEFI le 10 juillet 2007 (http://www.agefi.fr//articles/imprimer.aspx?id=1016719) Plus de clart et moins de souplesse dans la comp-tabilisation des engagements sociaux, article de Maud VANNIER-MOREAU et Norbert GAUTRON, Actuaires, publi dans La Lettre du Trsorier, n 286, dcembre 2011, pages 22-24. Pensions accounting changes from Jan. 2013, tude de Peter ELWIN, publie par J.P. Morgan, Cazenove Europe Equity Research, 11 avril 2011 (www.morgan markets.com) Pension deficit disorder : UK Companies, tude de MM OLNEY, JULLENS, NELSON & GILMAN, publie le 1er novembre 2011 par UBS Investment Research, Global Equity Research Europe, including UK (www.ubs.com/investmentresearch) EFRAGs Evaluation of the costs and benefits of IAS19 (2011) effect study report.(http://www.efrag.org/files/ED%20Amendments%20to%20IAS%2019/Endorsement%20Advice/EFRAGs_Final_Endorsement_Advice_on_IAS_19_as_amended_in_2011_-_Effect_Study_report.pdf