REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU...

67
PARC URBAIN MINIER : REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES Essai (projet) soumis en vue de l’obtention du grade de M. Arch. Par Marie-Christine Daigle-Croteau Superviseur: M. André Casault _________________ École d’architecture Université Laval 2013 Fig. 1

Transcript of REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU...

Page 1: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

PARC URBAIN MINIER :

REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES

Essai (projet) soumis en vue de l’obtention du grade de M. Arch.

Par Marie-Christine Daigle-Croteau

Superviseur:

M. André Casault _________________

École d’architecture Université Laval 2013

Fig. 1

Page 2: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft
Page 3: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

I

Page 4: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

II

CONTENU DE L’ESSAI

Les mémoires collectives et l’influence des paysages culturels structurent l’élaboration de

cet essai (projet) dans la conception d’un parc urbain minier reflétant le caractère

identitaire de Thetford Mines. L’essai génère des pistes de réflexion sur les mémoires

collectives, les paysages culturels ainsi que sur leurs analyses. Les intentions sont

d’utiliser les lieux existants et l’histoire particulière comme socle pour reconstruire l’identité

culturelle collective qui tend à se perdre. Le projet propose à la fois un parcours et un

centre historique qui définissent des lieux d’échanges entre le passé et le présent pour de

raccorder l’expérience du visiteur avec la culture, l’histoire, l’architecture et les paysages.

Les notions d’identité, de mémoires collectives et de lisibilité sont les principaux concepts

auxquels ce travail de recherche-création répond.

Fig. 2 | Mines BC I et II

Page 5: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

III

ÉQUIPE D’ENCADREMENT ET MEMBRES DU JURY

André Casault _ Architecte et professeur _ École d’architecture de l’Université Laval

Geneviève Vachon _ Architecte et professeure _ École d’architecture de l’Université Laval

Olivier Bourgeois _ Architecte et Chargé de cours _ Bourgeois / Lechasseur Architectes

Bernard-Serge Gagné _ Architecte _ ABCP Architecture

Guil laume Pelletier _ Architecte _ Atelier Pierre Thibault

Page 6: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

IV

AVANT-PROPOS

Je tiens à remercier plusieurs personnes qui ont fortement contribué à l’élaboration

de cet essai (projet) que je termine avec beaucoup de fierté. D’abord, un grand merci à

tous ceux qui se sont intéressés et qui ont contribué à l’élaboration de ce travail. Plus

particulièrement, merci à M. Luc Berthold, maire de Thetford Mines, M. François Cinq-

Mars, directeur du Musée minéralogique et minier de Thetford Mines, pour l’obtention

d’informations importantes et le partage de connaissances qui ont mené le projet. Aussi, je

désire remercier M. Gaby Verreault d’avoir partagé avec moi ses belles histoires et sa

grande passion pour le métier de mineur.

Merci aussi à tous ces professeurs et chargés de cours de l’École d’architecture de

l’Université Laval, qui de près ou de loin ont influencé mon parcours universitaire. Plus

spécialement, merci à M. André Casault et Mme Geneviève Vachon qui m’ont poussée à

développer un concept valorisant une région qui me tient à cœur.

Finalement, un merci spécial à ma famille, mes amis et mes collègues pour leur patience,

leur support et leurs encouragements, ils ont su croire en moi, m’aider et m’épauler au

sein de cette grande aventure.

Page 7: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

V

TABLE DES MATIÈRES

CONTENU DE L’ESSAI II

ÉQUIPE D’ENCADREMENT ET MEMBRES DU JURY III

AVANT-PROPOS IV

TABLE DES MATIÈRES V

TABLE DES FIGURES VIII

INTRODUCTION 2

CADRE THÉORIQUE 4

1 | L’ARCHITECTURE ET LES MÉMOIRES COLLECTIVES 4

1.1 | Le concept de mémoires collectives en architecture 5

1.2 | L’architecture comme moyen de représentation identitaire 8

1.3 | Synthèse : le cas de Thetford Mines 10

CONTEXTE 12

2 | COMPRENDRE LE CONTEXTE POUR UN POTENTIEL D’EXPRESSION

IDENTITAIRE DES MÉMOIRES COLLECTIVES 12

2.1 | Potentiel d’expression identitaire des paysages culturels 12

2.2 | Portait de Thetford Mines 14

2.3 | Analyses objectives et subjectives des paysages culturels 15

2.4 | Synthèse des analyses 32

Page 8: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

VI

PROJET 34

3 | PARC URBAIN MINIER 34

3.1 | Mission, enjeux et objectifs de design 35

3.2 | Parcours urbain 35

3.3 | Site 38

3.4 | Projet d’architecture – centre historique minier 40

3.5 | Synthèse 44

CONCLUSION 46

BIBLIOGRAPHIE 48

ANNEXES 50

Annexe 1 | CARTE DE CONCEPTS 51

Annexe 2 | MORPHOGENÈSE 52

Annexe 3 | THETFORD MINES _ Mines d’amiante 53

Annexe 4 | HALDES PLATES / CONIQUES 54

Annexe 5 | PLANCHES CRITIQUE FINALE (19 AVRIL 2013) 55

Page 9: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

VII

Page 10: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

VIII

TABLE DES FIGURES

Figure Description Source Page

Fig. 1 Bâtiments mine King M. GRÉGOIRE (2012) Titre

Fig. 2 Vue aérienne Mine BC I et II D. LAPOINTE (2004) II

Fig. 3 Schéma analyse des paysages AVOCAT (1994) 13

Fig. 4 Vue de la rue Lafontaine MC CROTEAU (2012) 14

Fig. 5 Treuils à manège (1930)52 SAHRA 17

Fig. 6 Gobbeuses (1930) SAHRA 17

Fig. 7 Ensachage de l’amiante (1936) SAHRA 18

Fig. 8 Vue aérienne mine King et rue Notre-Dame DUBÉ (1994) 19

Fig. 9 Déplacement d’une maison (1972) CINQ-MARS (2005) 19

Fig. 10 Rue Smith (1960) SAHRA 20

Fig. 11 Installations de la mine King (1960) DUBÉ (1994) 21

Fig. 12 Piste cyclable Ville de Thetford Mines 22

Fig. 13 Station des arts et chevalement de la mine King MC CROTEAU (2012) 23

Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25

Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26

Fig. 16 « Shaft » No. 2 de la mine Bell MMMTM (2012) 26

Fig. 17 Halde mine BC II, inscrit « Liberté » MC CROTEAU (2009) 29

Fig. 18 La rue Smith, œuvre de Jacques Fugère Ville de Thetford Mines 30

Fig. 19 Le « Big Ben » de ma ville, œuvre de F. Faucher Ville de Thetford Mines 30

Fig. 20 Parcours urbain proposé MC CROTEAU (2013) 35 Fig. 21 Mine King (1960) SAHRA 38 Fig. 22 Site actuel MC CROTEAU (2012) 39 Fig. 23 Perspective globale, site proposé MC CROTEAU (2013) 40 Fig. 24 Portail de la « gate » MC CROTEAU (2013) 41 Fig. 25 Esplanade historique MC CROTEAU (2013) 41 Fig. 26

Chevalement en soirée MC CROTEAU (2013) 42 Fig. 27 Morphogenèse DUBÉ (1994) 52 Fig. 28 Thetford Mines et les environs Google Maps 53 Fig. 29 Haldes plates MC CROTEAU (2012) 54 Fig. 30 Haldes coniques M. GRÉGOIRE (2012) 54

Page 11: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

IX

Page 12: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

2

INTRODUCTION

Au sein d’un pays, d’une région ou encore d’une ville, les changements engendrés par

l’humanisation progressive du territoire ont transformé leurs paysages au cours des

décennies. Ces modifications graduelles du paysage générées par l’homme dressent un

bilan fiable de l’économie, de la culture, mais aussi du caractère social propre au milieu.

La région de Thetford se caractérise par son patrimoine bâti industriel et ses haldes de

résidus miniers d’amiante, résultat d’une interaction profonde entre les habitants et leur

milieu. La ville de Thetford Mines, le cœur de cette belle région, est née de l’exploitation

minière il y a plus d’un siècle. Malgré l’arrêt complet en 2011 des activités reliées à

l’exploitation minière de l’amiante, ses paysages témoins de l’évolution ont laissé des

cicatrices permanentes dans la ville.

Ces lieux maintenant abandonnés forgent le caractère identitaire propre à Thetford Mines.

En plus d’offrir une architecture particulière et des paysages hors du commun, ils reflètent

les bases de l’histoire de la ville à travers l’exploitation minière et influencent les mémoires

collectives et la perception du lieu. Il importe de miser sur leur conservation, mais

également de les structurer afin d’offrir des espaces attrayants dont la communauté pourra

tirer profit et être fière.

Page 13: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

3

Cet essai (projet) s’intéresse à la mise en valeur des particularités de la région pour

révéler, à travers les mémoires collectives et les paysages culturels, le caractère

identitaire unique à Thetford Mines. En ce sens, ce travail de recherche-création extrait et

définit ces mémoires ainsi que les particularités territoriales des paysages miniers comme

base au projet d’architecture. La réponse architecturale du projet a pour but de démontrer :

En quoi un parc urbain minier peut générer des espaces qui mettront en valeur, voire qui

enrichiront le caractère identitaire de Thetford Mines en s’appuyant sur une analyse

objective et subjective des paysages culturels et des mémoires collectives qui ont marqué

son évolution. L’essai (projet) vise donc à démontrer que la découverte et la mise en

valeur des paysages miniers contribuent à enrichir les mémoires collectives, ainsi qu’à

renforcer l’identité culturelle régionale.

Dans un premier temps, le cadre théorique est présenté dans cet essai (projet) en

définissant et démontrant l’importance des mémoires collectives et d’un cadre identitaire

en lien avec un projet d’architecture. Puis, l’essai s’intéresse à la découverte et la

compréhension du contexte thetfordois par des analyses effectuées à la fois objectivement

et subjectivement sur les paysages culturels de la région. 1Au final, il présente le projet qui

fournit une réponse autant urbaine qu’architecturale à la mise en valeur de l’architecture et

des paysages. Il mise sur l’aménagement d’un parcours et d’un centre historique pour

créer des lieux d’échanges entre le passé et le présent qui enrichissent l’expérience du

visiteur avec la culture, l’histoire, l’architecture et les paysages. En somme, ce travail vise

à définir une approche basée sur les mémoires collectives, comme reflet de l’identité d’une

communauté.

1 Voir Annexe 1 | Carte de concepts

Page 14: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

4

CADRE THÉORIQUE 1 | L’ARCHITECTURE ET LES MÉMOIRES COLLECTIVES L’intention de retourner à ce qui rassemble les collectivités autant à leur histoire qu’entre

elles, est au cœur des convictions du discours qui unit les mémoires collectives et

l’architecture. En effet, les hommes sont sensibles à l’environnement qui les entoure

puisque celui-ci possède une histoire particulière, qui le rend unique. Qu’il soit naturel ou

construit, l’environnement structure les souvenirs et les mémoires collectives d’une société.

Halbwachs (1950) définit les mémoires collectives comme l’ensemble des faits qui ont eu

occurrence dans le passé et qui structurent l’identité d’une collectivité. Ces mémoires

collectives font appel aux souvenirs personnels de chacun des membres d’une

communauté. Elles sont d’ailleurs le reflet des histoires économiques et sociales d’un

groupe qui agit comme un dialogue entre le passé et le présent en établissant un lien de

réciprocité à double sens entre les deux époques. Selon Hayden (1995) pour exposer un

portrait de l’ensemble de la situation historique, on ne peut nier les mémoires collectives

qui nous amènent à mieux comprendre la structure actuelle, dont elles sont indissociables.

Aussi, Mario Botta exprime que « The old needs the new in order to be

recognizable (Mario Botta, in NOPPEN, 1995). En effet, pour permettre aux souvenirs

d’être mémorables, ou identitaires, nous avons besoin du contexte actuel. Bref, un

équilibre entre ce qui unit le passé et le présent permet un lien fort qui s’exprime à travers

les mémoires collectives.

Page 15: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

5

De ce fait, le rapport que l’architecture entretient avec son contexte est de plus en plus

prisé pour ramener la notion d’identité au cœur des convictions sociales. D’ailleurs, Tadao

Ando, architecte japonais reconnu, s’intéresse à l’apport des mémoires collectives et du

génie du lieu pour créer des environnements qui stimulent la sensibilité et l’émotion. Yann

Nussaume (2009 : 168), auteur de la biographie de l’architecte, exprime que ses

bâtiments « ne sont pas des sculptures, mais des catalyseurs permettant de comprendre

la richesse du monde environnant. » La réponse que les mémoires collectives veulent

donner à travers un projet d’architecture se base sur le contexte visuel pour créer une

représentation identitaire.

1.1 | Le concept de mémoires collectives en architecture

Plusieurs facteurs influencent la notion de mémoires collectives, dont le contexte physique,

soit l’environnement visuel, ainsi que les rapports sociaux. Selon Halbwachs (1995), les

mémoires nécessitent un cadre spatial, c’est-à-dire un milieu matériel qui permet de

reconstruire les souvenirs oubliés. Les mémoires collectives prennent largement appui sur

différents cadres spatiaux pour conserver et faire perdurer cette importante réalité

historique. À cet effet, Marc Berdet (2005 : 01) ajoute que dans un cadre

phénoménologique, « le processus de remémoration suppose la rencontre d’un pluralisme

temporel et de représentations collectives dans des images auxquelles cet espace urbain

n’est pas étranger ». Le cadre phénoménologique quant à lui se concentre sur

l’expérience de l’usager et du contenu que cette dernière inflige sur sa conscience. Ce

cadre intangible implique le caractère social, tel que les habitants et les mineurs, mais

également le cadre sociétal, qui regroupe les valeurs de cette collectivité. Ainsi, en lien

avec l’architecture, la notion de mémoires collectives se résume à différents faits et

souvenirs que l’ensemble d’une communauté structure dans l’espace, pour en présenter

son image et son caractère identitaire. L’architecture permet de raviver ce cadre spatial,

par la création d’espace public qui active l’imaginaire des gens, favorisant ainsi la

production de mémoires.

Page 16: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

6

Cadre Spatial

D’abord, Halbwachs (1950) et Noppen (1995) affirment que l’espace est l’élément le plus

important dans la constitution de mémoires collectives. En effet, le cadre spatial permet de

distinguer l’histoire écrite de celle vécue; il marque l’empreinte du groupe qui y prend, ou y

prenait attache. Ce cadre spatial se caractérise souvent par des images, mais aussi par

des bâtiments ou des paysages qui sont recréés, ou encore réinterprétés. Leur matérialité,

mais surtout leur forme, sont des réalités psychiques nées de la conscience collective qui

se grave dans la mémoire et se ravive dans un contexte spatial favorable. Contrairement à

un tableau sur lequel on marque à la craie pour ensuite l’effacer, le lieu s’imprègne de son

vécu et active l’imaginaire de ceux qui l’ont visité pour ainsi cristalliser les différentes

mémoires personnelles en un tout collectif (NOPPEN, 1995). En s’inspirant de l’histoire et

de l’environnement, les souvenirs se transposent dans les lieux publics, qui s’imprègnent

de mémoires, et aident les citoyens à définir leurs propres souvenirs. L’architecture

vernaculaire, ou propre à un lieu, agit symboliquement et permet de traduire et de

supporter la mémoire sociale. Selon Hayden (1995), être dans un espace rendu particulier

par son architecture et son environnement permet de mieux y rattacher l’histoire qu’il a à

offrir. Ces lieux propices à la création de mémoires collectives permettent aux citoyens de

s’identifier, de partager et de représenter leur histoire.

En globalité, l’ouvrage de Dolores Hayden (1995) The Power of Place : Urban landscape

as public history, souligne qu’un contexte particulier aide à la création de lieux publics

collaborant à l’imaginaire collectif. Puisque les mémoires se composent entre autres de

visions personnelles, émotionnelles, visuelles et corporelles (Berque, 1994), les espaces

prévus pour la mise en valeur et l’exposition historique doivent laisser la place à

l’interprétation pour les visiteurs. La réinterprétation en architecture des traces de la

mémoire publique permet de renforcer le caractère identitaire propre à un milieu ou un

tissu social. Chaque endroit détient son histoire, ainsi que sa culture, qui y est unique; il

s’agit d’en tirer profit et surtout de les mettre en valeur.

Page 17: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

7

Cadre social

La diversité ethnique et culturelle est un parti important à considérer afin de faire fructifier

les mémoires. Dolores Hayden (1995) explique qu’autant dans un contexte historique

négatif que positif, la place que prennent les mémoires est importante pour la structure

d’une communauté. Elles doivent avant tout permettre aux citoyens de se reconnaitre et

d’être fiers afin de promouvoir la culture locale. Les mémoires collectives dans un contexte

culturel historique révèlent de bons exemples de liens qui se créent pour une société.

D’ailleurs, elles influencent la postérité et les rapports de cette dernière avec son histoire.

Malgré que le cadre spatial change et évolue, il se conditionne selon les rapports sociaux.

Ceux-ci permettent entre autres d’expliquer de grandes modifications engendrées sur les

territoires.

Les cadres spatial et social peuvent être analysés de manière distincte, mais doivent au

final se compléter afin de créer un projet porteur d’expression identitaire. D’ailleurs, la

notion de paysage culturel englobe ces deux cadres qui définissent les mémoires

collectives.

Paysages culturels

De son côté, la notion de paysage culturel permet de tisser les liens forts qui unissent la

nature ou l’espace à une société. D’abord, la notion de « paysage » est souvent attribuée

à des lieux de toutes sortes, tant ordinaires qu’exceptionnels, mais qui essentiellement

réfèrent à la nature. Sans contredit, le paysage inclut beaucoup plus qu’une portion

d’espace terrestre. Plusieurs auteurs en donnent différentes définitions qui, mises en

commun, soutiennent cette notion complexe qu’est le paysage. Dans le Petit Robert

(2007 :1836), l’idée de point de vue est introduite en définissant le paysage comme une

« partie d’un pays que la nature présente à un observateur ». Ils constituent en quelque

sorte l’agencement des caractéristiques et des formes d’un espace. De son côté, le

paysage culturel représente une région, il exprime la relation d’un peuple avec son

environnement. D’ailleurs, Dewarrat (2003) le décrit comme le support d’une relation

Page 18: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

8

subjective entre l’homme et la société, mais aussi comme une réalité objective à laquelle

se rattachent différentes actions volontaires, telles que les activités humaines. En

complément, Berque (1994) définit le paysage culturel plutôt comme une « entité relative

et dynamique, où nature et société, regard et environnement sont en constante

interactions. » Au final, les paysages culturels représentent des entités riches qui illustrent

l’action de l’homme en lien direct avec son paysage.

Conclusion

Bref, à travers un projet d’architecture, pour forger les mémoires collectives d’une société,

il faut étudier conjointement les dimensions physiques et sociales des paysages culturels.

Les mémoires se nourrissent à la fois de l’histoire et du lieu pour se propager au sein

d’une communauté. Ces lieux significatifs doivent permettre aux citoyens de définir leur

histoire, de la partager, mais aussi de les représenter à grande échelle. (HAYDEN, 1995)

Dans le contexte d’un projet d’architecture, l’articulation de la mémoire de chacun est

affectée par la manière dont ils se concrétisent au sein son espace urbain. L’intention

première du projet d’architecture porteur de mémoires collectives, est de concevoir l’image

d’une société à partir de ses paysages culturels, unissant à la fois le contexte matériel et

immatériel.

1.2 | L’architecture comme moyen de représentation identitaire

Alors que la mise en valeur des mémoires collectives passe essentiellement par l’analyse

spatiale et sociale des paysages culturels, comment, par l’architecture dresser un portrait

du caractère identitaire, et de la perception des gens, de leurs mémoires, au sein du lieu.

D’abord, l’architecture s’avère un des meilleurs moyens de représentation identitaire,

puisqu’elle possède une relation directe avec les besoins et les fonctions que nécessite la

collectivité. Les habitants, avec le temps ont conçu un agencement complexe de

bâtiments qui les représentent et auxquels ils s’identifient. L’étude de l’architecture conçue

dans le passé nous permet donc de connaitre et d’évaluer les besoins d’une société aussi

Page 19: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

9

que leurs évolutions. (NOPPEN, 1995) L’architecture offre donc un cadre spatial fort, qui

au sein des mémoires collectives joue un rôle prépondérant.

Selon Noppen (1995), une architecture identitaire permet de valoriser le passé en

s’appropriant des éléments de l’histoire et en les adaptant aux besoins présents, tout en

conservant un aspect de continuité. Selon lui, il existe deux conditions préalables à

l’élaboration d’une construction vectrice d’identité. D’abord, il est nécessaire d’ancrer celle-

ci dans un lieu identitaire, afin d’exhiber les traces importantes d’une mémoire commune.

Ce lieu identitaire se transige souvent par des données objectives, qui reflètent les réalités

du milieu. Puis, afin de soutenir un geste identitaire, il faut que cette construction s’adapte

au contexte contemporain. Bien qu’il évoque souvent les pages écrites d’une histoire, le

geste doit demeurer une réalité contemporaine qui s'ajuste aux discours et aux besoins de

l’environnement dans lequel il s’ancre. (NOPPEN, 1995) Aussi, Hayden ajoute qu’un

espace public appropriable permet aux gens de se reconnaitre et de montrer avec fierté

aux autres ce qu’ils ont su bâtir avec le temps. Bien que ces mémoires ne soient pas que

positives ils en tireront davantage des conclusions intéressantes. (HAYDEN, 1995)

L’architecture identitaire devient donc un moyen efficace de véhiculer les mémoires

collectives en unifiant le passé et le présent.

Dans le but de promouvoir la culture locale, l’ajout d’espace significatif permet de véhiculer

l’histoire locale. Des espaces riches de sens permettent de resserrer les liens qui unissent

les mémoires, en passant par l’architecture. Dans la conception d’un projet identitaire, les

paysages culturels retouchés par l’homme s’avèrent riches en contenus culturel et social.

(AVOCAT, 1984) L’architecture et les modifications aux territoires que contiennent ces

paysages doivent être considérées comme une élaboration collective qui intègre les lieux

ordinaires fréquentés quotidiennement par un peuple. Les paysages se sont développés

selon les différentes structures économiques, culturelles et sociales. Cela explique leur

genèse, et même leurs permanences et mutations. Leurs analyses autant objectives que

subjectives permettent de découvrir ce qui forge le caractère identitaire.

Page 20: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

10

Dans sa biographie, Tadao Ando (NUSSAUME, 2009) affirme que « par le biais de

l’architecture, je veux faire danser le vent, faire vibrer la terre et le ciel. Il s’agit de cette

façon de redonner vie aux mouvements du génie du lieu. Il s’agit de le ressusciter.

Aujourd’hui, porter secours au génie du lieu ne signifie pas retourner à la terre et à

l’histoire. Cela signifie plutôt inspirer la terre et l’histoire. » À travers de multiples œuvres,

l’architecte propose une architecture signifiante pour l’environnement dans lequel elle

s’implante, ne fournissant pas seulement une réponse architecturale, mais formant un tout

avec le contexte et l’histoire. Pour lui, le rôle de l’architecture est de redonner au site,

soulignant ainsi la lisibilité et la globalité du lieu.

1.3 | Synthèse : le cas de Thetford Mines

La mise en relation des mémoires collectives et du caractère identitaire représente, les

caractéristiques qu’une communauté, comme celle de Thetford Mines peut mettre en

évidence afin de se distinguer et de contribuer au sentiment d’appartenance de ses

habitants. L’objectif du travail de recherche est de fournir les bases d’une architecture

porteuse de mémoire en analysant les bâtiments et les paysages existants dans le but de

favoriser la perception du lieu. L’analyse objective et subjective qui structure le prochain

chapitre permet la compréhension des mémoires collectives d’un projet d’architecture

porteur d’une expression identitaire. Ces deux types d’analyses permettent de guider la

conception afin de développer la sensibilité et le sens propre au lieu, produisant ainsi une

œuvre significative pour les citoyens.

Page 21: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

11

Page 22: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

12

CONTEXTE 2 | COMPRENDRE LE CONTEXTE POUR UN POTENTIEL D’EXPRESSION IDENTITAIRE DES MÉMOIRES COLLECTIVES

Le cadre théorique présenté au chapitre précédent démontre l’importance de soulever et

de mettre en valeur les mémoires collectives dans la création d’un projet s’inspirant du lieu

et misant sur le caractère identitaire. Ce deuxième chapitre cerne les éléments des

paysages culturels de Thetford Mines afin de favoriser la conception d’un projet de parc

urbain minier reflétant l’identité du lieu. Ce chapitre présente d’abord les intentions

théoriques qui mèneront l’analyse paysagère qui permettra de traduire la thèse. Puis,

présente brièvement la ville de Thetford Mines pour ensuite mener à l’analyse autant

objective que subjective des paysages culturels qui définissent le caractère particulier de

cette même ville.

2.1 | Potentiel d’expression identitaire des paysages culturels

Tel que présenté dans le cadre théorique, les paysages culturels se caractérisent comme

l’interaction du cadre spatial et social qui traduit la relation d’un peuple avec son

environnement. Puisque les lieux physiques sont intimement liés à la vie sociale et qu’ils

sont conditionnés par les rapports collectifs, ils reflètent la permanence des sociétés, qui

suscite une importante symbolique collective chez l’observateur. L’analyse de la

perception paysagère au sein de la société permet d’en extraire les éléments des

Page 23: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

13

mémoires collectives les plus pertinents, accessibles et surtout significatifs. Cette

symbolique collective en fait l’emblème identitaire social, en raison de sa matérialité, de sa

valeur et du sens qui se rattache aux paysages culturels, permettant la découverte du lieu

physique, mais surtout de ses caractéristiques culturelles.

Selon le schéma (Fig. 3), l’analyse du paysage perçu allie à fois la réalité physique, soit le

paysage réel, et le paysage image qui est davantage filtrée par l’imaginaire. D’abord, le

paysage réel se caractérise par une réalité objective étrangère aux déformations

sensorielles; il représente la réalité de l’image et est universel d’un individu à l’autre. De

son côté, le paysage image reflète le caractère subjectif et personnel qui varie selon

l’observateur. Le paysage perçu englobe au final ces deux entités et se situe entre

objectivité et subjectivité; il en ressort les repères les plus importants et les plus

significatifs de cette réalité imagée.

Une étude paysagère ne se fait donc pas que de manière impartiale. Elle doit comprendre

l’évolution sociétale et être traitée subjectivement, en plus d’objectivement, afin d’évoquer

la perception du lieu (AVOCAT, 1984). Cette démarche tente de percevoir « à la fois la

réalité d’une image et l’image d’une réalité. » (AVOCAT. 1984 : 14) Berque (1994) et

Avocat (1984) dans leurs ouvrages respectifs, illustrent l’importance d’une analyse autant

objective que subjective des paysages culturels afin de cerner la perception du lieu. Dans

le cas de Thetford Mines, l’histoire qui a mené l’humanisation des territoires est au centre

des préoccupations et de l’élaboration d’un projet de parc urbain minier à caractère

identitaire.

Fig. 3 | Analyse des paysages selon AVOCAT (1984)

Page 24: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

14

2.2 | Portrait de Thetford Mines

Avant d’aborder l’analyse plus en profondeurs de ces paysages culturels, qui à Thetford

Mines illustrent le caractère minier unique et identitaire, il est important de brièvement

présenter cette ville.

Thetford Mines est située à l’intérieur des Appalaches, à moins d’une centaine de

kilomètres de Québec et à équidistance de Sherbrooke. Le paysage unique qu’elle

propose est composé par le contraste entre les haldes minières artificielles et la riche

végétation. Le caractère minier, abondamment présent dans le paysage de la région de

Thetford, a été façonné au rythme de l’exploitation minière qui a couru sur plus d’un siècle,

soit depuis la découverte d’un gisement d’amiante en 1876. L’important essor minier qui a

suivi la période de la Deuxième Guerre mondiale a orienté le développement urbain.

Cependant, avec la perception négative de l’amiante, ainsi que la fermeture de la dernière

mine active en 2011, l’image de cette ville a grandement été affectée.

Aujourd’hui, il en reste d’imposants paysages miniers uniques et omniprésents (Fig. 4) à

travers les différentes mines à ciel ouvert, les montagnes artificielles constituées de

résidus miniers, et les divers bâtiments industriels. Ces éléments du paysage occupent

physiquement le territoire, mais ne sont en aucun cas accessibles à la population et aux

visiteurs. La fermeture des mines étant irrévocable, le temps est venu pour les Thetfordois

de retrouver le caractère identitaire duquel s’imprégnait autrefois la ville, soit les mines.

Fig. 4 | Vue panoramique de la rue Lafontaine

Page 25: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

15

Lors d’une entrevue avec le maire de Thetford Mines, M. Luc Berthold, j’ai pu constater

que ce dernier est grandement préoccupé par la reconversion minière. Il croit qu’un projet

de réhabilitation d’une portion du site minier pourra mettre en valeur l’histoire et le mode

de vie local, marqués par cette industrie autrefois prospère. Les intentions du maire sont

d’ailleurs de réaliser un projet qui permettra d’abord de rendre les mines accessibles aux

résidents, afin de renforcer le caractère identitaire qui autrefois était basé sur ces mines.

Bien que les perceptions soient aujourd’hui négatives, il désire que le projet soit le reflet

positif de cette industrie qui est à l’origine de la fondation de cette ville.

2.3 | Analyses objectives et subjectives des paysages culturels

2.3.1 | Approche méthodologique

La démarche méthodologique traduit la thèse et les différents concepts du projet par

l’analyse et l’interprétation particulière du milieu dans lequel il s’implante. Elle permet entre

autres d’explorer les mémoires et les paysages qui définissent l’esprit particulier de la

région de Thetford. Elle est constituée de deux approches qui sont développées

conjointement.

D’abord, l’approche objective permet de faire une lecture factuelle du lieu, autant des

réalités historiques et actuelles que des phénomènes socioculturels, tout en considérant

les mémoires collectives et les paysages culturels. Elle s’interroge davantage sur les

réalités territoriales, et les relations que l’homme a entretenues avec le milieu dans

l’exploitation des paysages miniers. Elle permet de saisir les caractéristiques du lieu, pour

alimenter adéquatement les pistes d’interprétation et de matérialisation du projet

d’architecture.

La seconde partie consiste à poser un regard complémentaire et davantage subjectif,

permettant une lecture interprétative et sensible des mémoires et des paysages impliqués.

Grâce à divers témoignages, entrevues et lectures, elle permet de cerner la perception de

Page 26: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

16

la population locale pour un projet à caractère identitaire. Cette approche saisit les

éléments symboliques et identitaires du paysage culturel et des mémoires. Au final, elle

s’intéresse à la façon dont la perception de ces paysages génèrera le projet d’architecture,

reflet de la culture du lieu analysé.

2.3.2 | Analyse object ive

Cette section énonce les résultats d’une analyse menée objectivement, entourant la région

à travers le caractère identitaire propre du lieu. Cette approche soulève les particularités

historiques de la ville et de ses mines, les caractéristiques physiques et les dimensions

sensibles. Aussi, elle fournit une analyse détaillée identifiant différents repères importants

de la ville et de son caractère identitaire.

Historique

L’histoire de la ville de Thetford Mines débute avec la découverte de l’amiante en 1876,

par Joseph Fecteau. Ce cultivateur, gratte, du bout des ongles, les fibres d'une pierre

verdâtre, semblable à de la soie. Dès lors, les géologues du gouvernement du Québec

analysent ce minerai, mais n’y accordent aucune valeur. Cependant, quelques mois plus

tard, les Américains s’empressent de débuter l’exploitation du sol, lui accordant des

propriétés ignifuges hors du commun. À partir de ce moment, l’essor de la région se fait

sentir, ne se contentant plus de l’exploitation agricole. La production industrielle de

l’amiante donne naissance à de petites agglomérations minières, soucieuses de profiter

de cette fibre magique. De plus, le tracé du Québec Central Railway qui relie Sherbrooke

et Québec atteint le canton de Thetford en 1879, contribuant ainsi au développement de

l’industrie minière ainsi qu’à son exportation.

En 1892, on assiste à la création du village de Kingsville, près de l’exploitation des mines

King, qui possèdent la majorité des terrains du village. La croissance de la région se fait

rapidement et la population se multiplie à une vitesse folle, profitant de l’essor de la région.

L’urbanisation du village se fait selon des ilots de petites habitations regroupés près des

Page 27: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

17

mines. C’est en 1905 que le caractère urbain de la ville se confirme, alors que le noyau

urbain principal acquiert le statut de ville. La ville, avec ses 5 141 habitants, compte parmi

les dix municipalités urbaines québécoises de plus de cinq mille personnes. L’expansion

des mines se fait rapidement et favorise le développement urbain de l’ensemble de la

région, entrainant le développement de biens et de services pour desservir la population.

Aujourd’hui, la région compte plus de 41 000 habitants, dont plus de 21 600 habitent la

ville d’importance, Thetford Mines. La croissance rapide de ce noyau urbain est

principalement due à l’importance des mines, qui agit comme principale permanence dans

la ville. 2(DUBÉ, 1994) (CINQ-MARS, 2005)

Condit ions de travai l

Au sein des mines, le travail d’extraction s’est d’abord fait à la main dans les années 1800,

avec des outils primitifs tels que le pic et la masse. Les mineurs remplissaient des

brouettes qu’ils poussaient, ou encore employaient

des chevaux qui ramenaient le minerai à la surface.

À mesure que les puits d’excavation du minerai

d’amiante devenaient plus profonds, ils installaient

des treuils à manège, afin de rendre le travail plus

productif. (Fig. 5) Au début du 20e siècle, les outils

se mécanisent et l’apparition du chemin de fer au

sein de la ville, vient faciliter le transport des

marchandises.

Malgré les nouvelles technologies, les conditions

de santé des travailleurs ne s’améliorent pas,

puisque la majorité des environnements de travail

sont envahis par la poussière. Par exemple sur la

figure 6 on aperçoit des femmes, appelées

2 Voir Annexe 2 | Morphogenèse de la ville

Fig. 5 | Treuils à manège _1930

Fig. 6 | « Gobbeuses » 1930

Page 28: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

18

« gobbeuses » qui, vers 1930, procèdent au triage de

la fibre pour la séparer des roches dites stériles, qui ne

contiennent pas d’amiante. Ou encore, sur l’image 7

des mineurs qui procèdent à la mise en sacs pour

l’exportation de la fibre vers 1936. Ces deux figures

montrent les environnements de travail insalubres des ouvriers, qui les ont poussés à la

grève de 1949.

Mouvement ouvrier de 1949

Pour l’une des premières fois au Québec, 5000 travailleurs entrent en grève et se tiennent

debout devant leur patronat et le gouvernement. À Thetford cette grève dure un peu plus

de cinq mois, et a pour but d’uniformiser les conditions de travail, d’éliminer la poussière

dans les lieux de travail et d’augmenter le salaire des ouvriers. Cette dernière sera très

bénéfique, puisque suite à ces évènements, les environnements seront nettement

améliorés et la mécanisation de plusieurs secteurs favorisera le travail des mineurs.

Apogée : 1950 à 1970

C’est entre 1950 et 1970 que l’exploitation minière dans la région atteint son sommet. Les

mines se fusionnent et prennent beaucoup d’ampleur, employant alors plus de 20% de la

communauté. Elles grossissent rapidement et l’expansion urbaine de la ville qui se fait en

parallèle nuit à l’exploitation minière. Les compagnies minières exploitent alors des mines

souterraines sous une portion de la ville, afin de ne pas nuire à l’expansion urbaine. À ce

même moment, les compagnies minières contrôlent le sol et le sous-sol de la ville, leur

permettant légalement de récupérer des terrains qu’ils ont loués aux ouvriers.

Déplacements importants : transformation de la vi l le

À partir de la seconde moitié du 20e siècle, la croissance de l’industrie minière entre en

conflit avec l’expansion urbaine. Les premiers noyaux d’habitations situés à proximité des

mines empêchent l’expansion minière. La majorité des lots et les droits sur le sol sont aux

Fig. 7 | Ensachage de l'amiante _ 1936

Page 29: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

19

mains des compagnies minières qui menacent de déménager les habitations. Les mines

sont alors la seule permanence dans la ville.

De 1953 à 1960, le noyau central de la ville est déménagé, afin de faire profiter

l’expansion minière. On assiste alors au détournement de la route provinciale numéro 1

reliant Québec et Sherbrooke, qui devient, au nord de la ville, l’important boulevard

Frontenac. Le centre-ville se retrouve alors sectionné en deux par l’élimination d’une

portion de la rue Notre-Dame entre le

centre-ville existant et le quartier Mitchell.

(Fig. 8) Par ailleurs, plusieurs maisons et

établissements publics sont touchés par la

suppression de cette voie. Le centre-ville

commercial est alors relocalisé

graduellement vers le boulevard Frontenac.

Puis, jusqu’en 1973 on procède au

déplacement de plusieurs autres maisons. L’ensemble du quartier St-Maurice se voit

obligé à deux grands déménagements importants, sous la direction de la Société

d’habitation du Québec. Le premier déménagement se fait de 1953 à 1963 : un peu plus

de cent maisons sont expropriées du quartier St-Maurice et sont déménagées au nord de

la ville. Un chemin direct entre l’ancien site et le nouveau quartier est aménagé par les

compagnies minières, et deviendra l’actuelle rue Pie XI. En 1969, on assiste à la

démolition de l’église et de certains bâtiments institutionnels de ce quartier, en plus du

déménagement des 407 résidences

restantes qui se fera dans les années

suivantes (Fig. 9) Les résidences sont

regroupées selon leurs

caractéristiques architecturales, soit

leur style, leur nombre d’étages ou

encore leur type de revêtement

extérieur.

Fig. 8 | Rue Notre-Dame avant sectionnement

Fig. 9 | Déplacement d'une maison (1972)

Page 30: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

20

Grève de 1975

En 1975, une autre grève importante sévit dans l’industrie minière. Cette dernière durera

plus de huit mois et impliquera trois mille travailleurs des mines de la région. Cette grève

aura des effets bénéfiques, notamment sur les salaires. Plusieurs mineurs racontent avoir

vu leur salaire horaire augmenter considérablement, passant de 4,50$ à 6,50$. Ceux-ci

racontent également qu’à ce moment les conditions de travail dans les mines étaient très

favorables. À ce moment, la plupart des Thetfordois avaient le désir de travailler dans les

mines, autant pour les salaires que les conditions.

Rue Smith

Aussi, en 1987 la rue Smith, considérée comme l’une des plus vieilles rues de la ville, se

voit à son tour obligée à un déplacement partiel. Située entre deux haldes de résidus

miniers, cette rue a longtemps identifié l’importance du statut minier et ouvrier de la ville.

(Fig. 10) Étant donné la proximité des maisons avec les exploitations minières, quelques

maisons de la rue sont déménagées

afin de permettre l’expansion de la

mine Bell. Au final, ces déplacements

n’auront pas contribué à l’expansion

convoitée, puisque vers 1990 on

assiste au déclin de l’exploitation

minière.

Décl in graduel

C’est finalement de 1975 à 1985 qu’on connaitra les dernières « belles » années de

l’exploitation minière, puisque c’est au cours des années 80 qu’on assiste au déclin de

l’industrie. En effet, suite à l’adoption d’une loi interdisant l’usage de l’amiante dans les

bâtiments commerciaux et institutionnels en 1989 par l’Agence américaine sur la

protection de l’environnement, la perception du minerai considéré jusqu’à lors comme de

Fig. 10 | Rue Smith vers 1960 avant déménagements

Page 31: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

21

l’or blanc change radicalement. Peu à peu, l’économie engendrée par l’industrie minière

diminue, et l’extraction de l’amiante conditionne de moins en moins le développement

urbain de la ville de Thetford Mines. Avec ces grands bouleversements économiques, la

ville se voit confrontée à une diversification économique afin de survivre à cette crise de

l’amiante. Ce boycottage de l’amiante mènera la fermeture de plusieurs mines, et c’est

finalement en 2011 que la dernière mine en action cesse ses activités.

Résumé

Étant l’élément déclencheur de la constitution de la ville, la découverte de l’amiante a

également mené le développement de la ville pendant plus d’un siècle. Ayant agit

longtemps comme principale permanence au sein de la ville, l’industrie minière a modifié

irrémédiablement le paysage en plus de jouer un rôle prépondérant dans l’aménagement

du territoire. (Fig. 11) Le développement urbain dans son ensemble fut orienté afin de ne

pas nuire au développement minier. Les grands déménagements qu’a connus la région

ont engendré une régénération du tissu urbain et une réorganisation spatiale du territoire.

Fig. 11 | Importance des installations minières (1960)

Page 32: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

22

Fig. 12 | Piste cyclable

Ces grands bouleversements ont affecté considérablement les habitants, leur sentiment

d’appartenance et leur identité. Par exemple, le classement des habitations suite au

déménagement complet du quartier St-Maurice a affecté les habitants qui se retrouvaient

alors éloignés de leurs anciens voisins en plus d’être affectés par le déménagement,

perdant ainsi leur repère social.

Espaces actuels de commémorations

Depuis l’arrêt complet des activités minières, les terrains auparavant détenus par les

mines, sont inaccessibles. Ceux-ci représentent d’ailleurs plus du tiers du territoire de la

ville. Avec l’ampleur que ces paysages tiennent, il importe de reconnecter le caractère

minier et les espaces urbains qui sont souvent situés à proximité.

La MRC3 des Appalaches et la Ville de Thetford Mines travaillent, depuis plusieurs années,

à la requalifications de différents lieux disparates dans la ville, affectés par l’exploitation

minière. D’abord à l’échelle urbaine, la ville met à la disposition des résidents un important

réseau cyclable qui sillonne de remarquables paysages naturels et artificiels sans toutefois

les mettre en valeur et

permettre leurs accessibilités.

(Fig. 12) De plus, la MRC et la

Ville ont, au cours de l’année

2000, acquis l’ancienne gare,

l’un des plus vieux bâtiments

miniers de la ville, qu’elles ont

déménagée et rénovée au

centre-ville, près de son

3 MRC : municipalités régionales de comté : entités administratives qui assurent la gestion régionale des collectivités locales

Page 33: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

23

Fig. 13 | Station des arts

emplacement d'origine. Rebaptisé la

« Station des arts », ce bâtiment est

requalifié en un centre d'exposition pour les

artistes de la région. Sa mission est la

promotion, la diffusion et la mise en valeur

des arts et de la culture régionale. Depuis

sa restauration, la Station des arts participe,

dans une large mesure, à la vitalité

culturelle et au dynamisme du centre-ville. (Fig. 13) De plus, en 2005 la MRC a aménagé

un parc commémoratif qui relate l’histoire de la populaire rue Smith, en créant un petit

belvédère. Ce dernier plonge l’observateur sur le vide laissé par le déplacement de cette

rue et laisse place à son interprétation par des panneaux signalétiques qui en expliquent

brièvement l’histoire.

Ces différents repères commémoratifs au sein de la ville sont quelques exemples du désir

de mettre en valeur l’histoire et l’identité thetfordoise. Ces différentes stations se relient

par le réseau cyclable, mais ne possèdent aucune continuité. Il devient alors pertinent de

mettre à la disposition des gens un parcours d’interprétation misant sur la découverte de

ces lieux et de certains autres lieux, tels que les ruines des fondations de l’ancien quartier

St-Maurice. L’objectif est de favoriser l’interprétation de l’histoire et des paysages culturels

qui en découlent dans le but de supporter la création de mémoires collectives.

Sites miniers

L’étude historique et la visite de différents sites et bâtiments miniers de la ville ont permis

de relever les objets particuliers des paysages culturels à mettre en valeur dans le cadre

d’un projet d’architecture. Au sein des paysages miniers, deux éléments se complètent

pour former l’industrie minière. Premièrement le couvert minéral, présent par les puits des

mines et les haldes qui ont modifié la topographie du terrain avec l’extraction de la

ressource naturelle. Ensuite, les sites miniers et les bâtiments qui composent l’aire

Page 34: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

24

d’affinage, permettant l’exportation mondiale de la fibre d’amiante. Ce couvert minéral et

cette architecture minière sont très présents dans la ville. Une visite des sites de la mine

King, Bell et Beaver le 30 octobre dernier, avec le directeur du Musée minéralogique et

minier, M. François Cinq-Mars, m’a permis de faire une lecture culturelle des lieux. Les

propos de M. Cinq-Mars en complément de la visite, ont été grandement utiles dans

l’élaboration des analyses objectives, mais aussi subjectives.

Puits et Haldes

L’omniprésence d’un couvert minéral artificiel prend une grande importance dans l’analyse

objective des paysages de la région. Malgré l’arrêt de l’exploitation minière, ces paysages

humanisés sont témoins de l’histoire. Ils se caractérisent par d’immenses puits miniers à

ciel ouvert, d’une part, et par d’énormes montagnes artificielles qui se dressent sur plus de

48 kilomètres le long de l’axe routier principal, le boulevard Frontenac.

Les mines à ciel ouvert, sont remarquables de par leur ampleur, créant d’énormes ravins

qui atteignent parfois un kilomètre de long et 300 mètres de profondeur. Ils se

caractérisent aussi par une superposition de gradins mesurant en moyenne quinze mètres

de hauteur. La plupart de ces mines à ciel ouvert comportent aussi des lacs, qui se

forment par l’accumulation naturelle des précipitations au fond des puits. Ces lacs se

démarquent par leur couleur turquoise, particulièrement éclatante dans la grisaille des

mines. La couleur de cette eau est due à la présence de manganèse dans le sol des

anciennes mines.

De leur coté, les immenses haldes ou terrils, aussi surnommés « dumps » confèrent des

vues particulières, qualifiant même le paysage de lunaire. Parfois grisâtres, mais aussi

végétalisées, elles contribuent aux mémoires collectives toujours visibles et ainsi à forger

le caractère identitaire et l’image de la région. Elles se caractérisent selon deux grands

types, soit les haldes plates et les haldes coniques qui se différencient par les

technologies employées pour stocker les résidus.

Page 35: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

25

Malgré leur proximité des développements urbains, les sites miniers sont enclavés et ne

sont pas accessibles à la population, depuis leur fermeture. C’est d’ailleurs plus du tiers de

la ville qui est inaccessible. Les mines agissent comme une entité totalement

indépendante de la ville. D’ailleurs, elles possèdent un réseau routier interne propre, ainsi

qu’une alimentation en électricité indépendante du reste de la ville. En affirmant que les

mines sont à la base du développement de la ville, il importe surtout de retravailler leur

accessibilité. Tel que l’avance Charles Avocat (1984) les paysages culturels retouchés par

l’homme sont riches en contenus culturel et social. Leur accessibilité permet de renforcer

leur importance et de les incorporer à la ville, forgeant par le fait même le caractère

identitaire auquel s’associent les mémoires collectives.

L’importance du couvert minéral grisâtre se fait d’ailleurs sentir par les contrastes visuels

qu’il procure entre les grandes collines grises et l’abondante végétation. La dynamique

artificielle influence la perception des observateurs pour le milieu naturel composée d’une

abondante végétation. Le contraste des textures, des couleurs, mais également des

formes tend à mettre en valeur ces éléments particuliers du paysage. Le couvert minéral a

modifié directement les paysages avec le temps. L’accentuation de la topographie

engendrée par ses montagnes de résidus fait partie du paysage courant et sont les

terrains de jeux de plusieurs Thetfordois. Cependant pour un visiteur, ces haldes sont

Fig. 14 | Vue de la mine BC II

Page 36: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

26

impressionnantes et sont du jamais vu. Il importe de les mettre en valeur et de redonner

ce caractère impressionnant, afin d’offrir une expérience du site qui ravivera, pour les

Thetfordois cette étincelle envers leurs paysages culturels.

Architecture minière

Les sites miniers sont parsemés de plusieurs types de bâtiments qui complètent la

séquence minière, de l’extraction de la fibre dans le sol, jusqu’à l’exportation du minerai.

Les aires principales où sont regroupées ces bâtiments sont appelées les aires d’affinage

et cumulent habituellement une dizaine de bâtiments à usages différents reliés entre eux

par des convoyeurs. (Fig. 15)

Une analyse rapide de la forme et de l’apparence des

constructions qui forment les sites miniers en fait

ressortir une architecture pragmatique, au sein de

laquelle la forme des bâtiments dépend d’abord de leurs

fonctions. Les constructions sont avant tout utilitaires et

se caractérisent par une simplicité des formes

géométriques. Aussi, elles s’identifient par leur

traitement simple fait de matériaux durables, tel que le

parement de ciment-amiante. (Fig. 15-16) Leur gabarit,

leur forme et leur matérialité sont le résultat de gestes

Fig. 15 | Exemple d’architecture minière; convoyeurs et entrepôts de la mine Normandie

Fig. 16 | "Shaft" No. 2 Mine Bell

Page 37: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

27

appliqués spontanément pour répondre aux besoins fonctionnels des mines. Les

bâtiments, ne présentent aucun style architectural particulier, et ne se distinguent pas

selon leur époque de construction, mais sont plutôt semblables selon leurs fonctions. Par

exemple, les chevalements de puits (Fig. 16), surnommé « shaft », se distinguent par leur

verticalité, faisant en moyenne plus d’une trentaine de mètres. Ces derniers avaient

comme fonction de hisser des charges sur plusieurs centaines de mètres dans les galeries

souterraines. Plusieurs de ces tours élancées sont encore présentes dans le paysage

minier de la région.

La localisation des bâtiments sur les sites apparait un peu disparate, mais s’explique selon

le parcours d’affinage de l’amiante. Les convoyeurs relient les bâtiments entre eux et

permettent de transporter le minerai d’un bâtiment à l’autre. Aussi, elles sont souvent

déposées sur le sommet des haldes afin de permettre le transport des résidus. Malgré leur

caractère sévère, les bâtiments miniers identifient la région. Il importe de conserver une

harmonie autant dans leur ordonnancement que dans leur représentation, puisqu’il forge

le cadre spatial des mémoires collectives.

Synthèse

L’analyse objective des paysages miniers de Thetford Mines se caractérise par une

verticalité présente autant dans les modifications topographiques que dans les bâtiments

miniers. Les contrastes visuels forts sont à la fois présents dans les textures, les couleurs

et les formes du paysage. Les intentions pour le projet sont de relier les différents pôles

importants qui mettent en valeur l’histoire minière et les données objectives

caractéristiques de cette région, ainsi que de créer un repère au sein de la ville pour le

rassemblement.

2.3.3 | Analyse subject ive

Cette seconde section énonce les données subjectives qui mènent une collectivité à

reconnaitre et apprécier de tels paysages décrits objectivement à la section précédente.

Page 38: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

28

L’analyse des éléments subjectifs du paysage et de la culture thetfordoise permet qu’un

paysage réel devienne un paysage culturel perçu ancré aux mémoires collectives. À cet

égard, Dewarrat (2003 : 47) mentionne que construire le paysage c’est élaborer et

partager une représentation tout en « mettant en évidence les ressorts de l’intervention qui

jette un nouvel éclairage sur les pratiques concrètes. » La perception négative qui affecte

le minerai d’amiante et les mines se reflète sur l’identité de la région de Thetford. Cette

perception diffère aussi grandement , puisqu’au sein de la ville ces paysages sont pour la

plupart synonyme de prospérité et d’évolution de l’industrie. Tandis que de l’extérieur, ils

sont plutot jugés quant aux mauvaises conditions de travail et de santé qui occuraient

jusque dans les années 40. Le défi se veut d’analyser subjectivement les éléments

importants qui ont marqué autant les paysages culturels que les mémoires collectives de

cette économie minière, autrefois prospère. Cette analyse se fait d’abord en assimilant les

différentes données qui mettent les gens au cœur de la démarche, afin de refléter le

respect et la sensibilité du lieu et de ses usagers.

Entrevues et témoignages

Avec la fermeture des mines et les perceptions négatives qui agissent sur les paysages

miniers de la région, le regard des habitants devient beaucoup plus aveugle envers ces

paysages culturels qui font parti de leur quotidien depuis des décennies. Différentes

entrevues m’ont permis de cerner le portrait des mines selon des personnes qui ont connu

leurs réels essors. La ville ne serait sans doute pas ce qu’elle est sans l’industrie minière.

Avec la fermeture des mines, un Thetfordois raconte que « même si le chevalement de la

King est esthétiquement laid, il apporte un certain réconfort pour les mineurs qui y ont

travaillé.» 4 L’état esthétique du chevalement laisse voir la désaffectation des mines, mais

sans doute que sa requalification permettrait de renforcer ce sentiment d’appartenance qui

se perd.

4 Selon M. Lapointe, un résidant rencontré sur le site

Page 39: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

29

M. Luc Berthold, maire de Thetford Mines

Monsieur le maire, Luc Berthold, raconte que

« plusieurs citoyens escaladent illégalement

les dumps des mines, dans l’optique d’avoir

une différente vision sur la ville. Il y a

quelques années, des gens avaient même

inscrits LIBERTÉ sur l’un des monticules de

résidus de la mine BC 1. » (Fig.17) Selon lui,

cette gravure marque la souveraineté, mais

aussi le respect envers ces mines. Selon lui, il

ne faut pas voir cette marque comme un geste de grabuge, mais plutôt comme une

appropriation du paysage culturel. Les mines sont d’ailleurs, depuis les tous débuts, le

terrain des jeunes, leur permettant des sensations fortes. Leur mise en valeur pour la

contemplation ne permetterait que de légaliser et de rendre publique, ce que certain font

illégalement.

M. Gaby Verreault, ancien mineur

Aussi, le 23 février dernier, j’ai rencontré M. Gaby Verreault, ancien mineur des mines Bell

et King. Cette entrevue a permis de comprendre le mode de vie des mineurs, leurs

interactions avec le milieu, avec les patrons et entre eux. M. Verreault se souvient du

temps où son père travaillait aux mines; « dans les années 45, il revenait de la mine Bell

en bicycle, la chaudière à lunch accroché sur le dos, blanchi par la poussière d’amiante.»5

Pour lui, les conditions de travail entre la génération de son père et la sienne n’étaient

nullement comparables. « Moi, j’ai connu le bon temps, aucune poussière et surtout des

environnements de travail très propres » raconte-t-il. M.Verrreault voit, au sein d’un projet

de réinterprétation des mines «un hommage aux travailleurs qui y ont laissé leur vie, leur

santé ou encore des membres de leurs familles »5.

5 Rencontre M. Verreault, ancien mineur de la mine Bell, le 23 février 2013

Fig. 17 | Haldes mine BC II, inscrit « Liberté »

Page 40: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

30

Cette entrevue, d’une durée de deux heures trente m’a permis de comprendre

l’importance des mines dans la vie des Thetfordois. Après la grève de 1975, « tous

voulaient travailler aux mines ».5 L’industrie minière, avant son déclin était synonyme de

prospérité, elle offrait des emplois stables, bien rémunérés et de bons avantages sociaux.

Les habitants, même ceux qui n’y travaillent pas s’identifiaient aux mines, qui alors

offraient une image positive. Dans le cadre d’un projet de mise en valeur du paysage et du

patrimoine minier, mes intentions se veulent dans cette optique respectueuse de

l’environnement, mais également des anciens mineurs et des habitants actuels

Analyse d’œuvres caractéristiques

À travers une analyse subjective, il importe de comprendre la façon dont la population

appréhende son milieu de vie, à travers différents médias. Une analyse de différentes

œuvres permet de révéler certains attributs significatifs, partie intégrante des faits et

mythes, qui rendent d’ailleurs beaucoup plus cohérent le discours d’une société. Celle-ci

permet également d’identifier les éléments dominants du caractère identitaire à mettre en

valeur dans le cadre d’un projet de mise en valeur au caractère identitaire.

La rue Smith , par Jacques Fugère

Natif de Thetford Mines, Jacques Fugère travaille d’abord à titre de photographe, puis de

peintre. Reconnu pour transmettre la beauté des choses simples, il peint en 1977 cette

toile (Fig. 18) représentant la légendaire rue Smith, image ambassadrice de la ville. On y

voit le clocher de l’église Saint-Alphonse, qui rivalise avec les « shafts » des mines King et

Bell. Ces trois éléments d’une hauteur

similaire sont également des repères,

qui caractérisent l’identité de la ville.

Cet oeuvre symbolise, pour la ville et

ses habitants, la proximité qui a

toujours existé entre les exploitations

minières et la trame urbaine.

Fig. 18 | La rue Smith,, œuvre de Jacques Fugère

Page 41: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

31

Fig. 19 | Le « Big Ben » de ma ville, œuvre de François Faucher

Le « Big Ben » de ma vi l le , par François Faucher

Réalisée dans le cadre du « Happening de L’ART BLANC »

qui s’est déroulé au centre-ville de Thetford Mines en juin

2004, cette toile du vibrationisme François Faucher porte bien

son nom. En effet, il fait référence au chevalement de la mine,

comme au Big Ben qui orne le paysage culturel de la ville de

Londres. Par cette œuvre, il exprime, dans sa ville, l’élément

identitaire qui pour lui représente sa ville mondialement.

Aussi, à l’intérieur du Musée minéralogique et minier de Thetford Mines, se retrouvent

plusieurs œuvres qui proposent des éléments importants de la culture locale. L’une d’entre

elles a particulièrement marqué mon passage. Il s’agit d’une sculpture sur bois réalisée

par Jacques Lisée qui représente le rituel de franchissement des mineurs vers la mine

souterraine. En effet, ils y sont représentés avec leurs boites à lunch, accédant au puits

minier. Cette transition entre la ville et la mine a profondément marqué l’histoire minière de

la région. D’ailleurs aux moments des grèves, M. Verreault me racontait que les mineurs

se retrouvaient près de l’entrée, qu’ils surnommaient « la gate » pour confronter leur

patronat. Les limites physiques qui aujourd’hui sont très marquées par l’enclavement des

sites étaient autrefois des espaces de transition importants pour les mineurs.

Synthèse

Cette approche subjective est marquée par diverses rencontres, observations et analyses

des éléments symboliques du paysage minier. En plus de lectures et de recherches

objectives, la rencontre avec certains habitants et anciens mineurs permet une lecture

subjective des paysages culturels. Elle en fait ressortir certains traits significatifs

identitaires dominants qui permettent l’élaboration d’un projet de mémoires collectives au

sein des paysages culturels. Par exemple, « la gate » et le chevalement de la mine King

Page 42: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

32

qui agit comme un repère élancé, à proximité du centre-ville. De plus, la réinterprétation

d’un cadre spatial existant effectue un rappel important pour les anciens mineurs, mais

aussi pour les habitants et les visiteurs.

2.4 | Synthèse des analyses

L’interprétation du territoire pour en ressortir ses dimensions objectives (matérielles) et

subjectives (immatérielles) résulte d’une approche identitaire ancrée à l’esprit du lieu.

L’exploitation industrielle donne une valeur symbolique et culturelle à l’ensemble du

paysage thetfordois. La rencontre avec le maire et le directeur du musée a permis de

cerner les besoins et les intentions de Thetford Mines afin d’aplatir les frontières qui

existent présentement entre les différentes mines et la ville. Il importe de miser sur des

rapports sociaux et spatiaux au quotidien qui forgeront les comportements, pratiques et

représentations identitaires de la société à court, mais aussi à long terme. (DI MEO, 2005)

Le territoire peut d’ailleurs être reconnu comme « une forme spatiale de la société qui

permet de réduire les distances à l'intérieur et d'établir une distance infinie avec l'extérieur,

par-delà les frontières. » (RETAILLÉ, 1997 : 119)

D’abord l’analyse objective fait ressortir le caractère matériel ou tangible et s’illustre par

l’environnement physique. L’analyse de cet environnement s’est davantage faite par des

visites in situ et l’analyse de cartes historiques des sites. Elle implique davantage une

analyse imagée, mais également la morphogénèse de l’évolution de la ville et de ses

paysages. En deuxième lieu, une analyse subjective a permis, par la lecture d’ouvrages

sur l’histoire, des entrevues avec différents intervenants, tels que le maire, et le directeur

du musée et d’anciens mineurs de soulever des faits importants de l’histoire minière.

Page 43: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

33

Page 44: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

34

PROJET 3 | PARC URBAIN MINIER Le projet propose une réponse à la fois urbaine et architecturale quant à l’influence des

paysages culturels sur la perception du lieu, dans la création d’espaces porteurs d’identité

collective. Il fournit, par l’architecture un message porteur de mémoire en analysant les

bâtiments et les paysages existants dans le but de favoriser la perception du lieu et le

caractère identitaire. Le cadre théorique étudié en première partie démontre l’importance

de mettre en relation les mémoires collectives et le caractère identitaire afin de forger le

sentiment d’appartenance d’une communauté. Aussi, le présent essai illustre l’impact

qu’ont les paysages culturels dans un contexte de mémoires collectives. La communauté

construit ses paysages culturels aux fils du temps, mais les paysages culturels

construisent l’histoire de cette communauté. En effet, ceux-ci s’expriment alors que le

peuple et son environnement sont mis en relation.

L’analyse en deux temps du cadre matériel et immatériel permet de faire ressortir les

objets importants à mettre en valeur, guidant ainsi la conception d’un projet sensible

caractérisé par l’esprit du lieu, qui deviendra une œuvre significative pour les citoyens. Le

projet est alors conditionné par les rapports sociaux qui ont eu occurrence et par le fait

même reflète le caractère identitaire. Il importe donc de mettre en valeur et d’inspirer

l’observateur afin d’activer les mémoires collectives et de redonner une symbolique

collective aux paysages culturels uniques de Thetford Mines.

Page 45: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

35

3.1 | Mission, enjeux et objectifs de design

La mission du projet est de concevoir un parcours et un centre historique qui agiront

comme des lieux de rassemblement et de découverte pour la communauté de Thetford

Mines. Ces espaces fournissent, par divers parcours, esplanades, espaces de

recueillement ou de mise en valeur, un lien particulier avec l’histoire collective qui a mené

la ville durant plus d’un siècle. Il est également intéressant de voir l’importance du cadre

spatial, soit des paysages humanisés qui définissent la région ainsi que de l’architecture

minière des sites d’affinage de l’amiante. Les espaces prévus visent la réponse aux

enjeux importants, soit les notions d’identité, de mémoires collectives et de lisibilité. Dans

un premier temps, le projet est, par son cadre spatial et ses ambiances, le reflet identitaire

des Thetfordois. L’objectif est de raviver le caractère identitaire et l’esprit du lieu en offrant

des espaces de socialisation de qualité favorisant les échanges. Aussi, ces espaces

misent sur la diffusion et la multiplication des mémoires collectives. Finalement, le projet 6

permet une meilleure lecture des paysages humanisés. Bref, par une approche

contemporaine, il fournira des lieux d’échanges catalyseur de l’histoire minière et sociale à

Thetford Mines.

3.2 | Parcours urbain

D’abord, à l’échelle urbaine, plusieurs

endroits ont été ciblés afin de nourrir les

mémoires collectives et la lisibilité des

paysages pour favoriser l’identité. Le

projet propose un parcours (Fig. 20)

(représenté en orangé) d’environ cinq

kilomètres, qui complète le réseau

cyclable existant (représenté en vert) tout

6 Voir Annexe 5 | Planches critique finale du projet, présentées le 19 avril 2013

Fig. 20 | Parcours urbain proposé

Page 46: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

36

en réutilisant les routes internes des sites miniers. Ce dernier est accessible en toute

saison via des moyens actifs tels que la marche, le vélo, la raquette ou même le ski de

fond. Il prévoit la compréhension et la mise en valeur des processus d’humanisation du

territoire qui ont laissé des traces permanentes sur les paysages culturels. Différentes

stations d’arrêts sont prévues afin de permettre la découverte et la contemplation des sites

existants marqués par l’histoire.

Cet important parcours prévoit différentes stations qui se structurent selon une articulation

d’éléments faits d’acier corten qui utilisent le pli, faisant référence aux modifications

humaines engendrées au territoire. L’utilisation de l’acier corten conserve le caractère

industriel, métallique et rouillé, tout en ajoutant une touche contemporaine sculpturale

simple qui permet de faire revivre la pesanteur de l’histoire et des mémoires collectives, à

différents points d’arrêts définis

Le parcours démarre le long du boulevard Frontenac, situé au nord. Ce point de départ a

été choisi pour son importante visibilité, à l’entrée de la ville. Plusieurs centres d’intérêts

importants se trouvent à proximité, tels que le Musée minéralogique et minier de Thetford

Mines, le Cégep de Thetford et les Galeries Appalaches, centre commercial et de

divertissements. Du noyau urbain, le parcours migre vers la forêt, pour s’arrêter d’abord à

une station aménagée au cœur de l’ancien quartier St-Maurice. Celle-ci offre un belvédère

ancré aux parois d’une halde, permettant un point de vue sur les fondations existantes, les

rues et les trottoirs encore présents sur une grande partie du site. Aussi, différents

éléments tels que de simples bancs en acier corten permettent d’exposer l’histoire et les

bâtiments démolis ou déménagés. Les maisons déménagées au courant des années 70

ont laissé un vide apparent. La promenade sur le site et en hauteur permet de ressentir le

poids historique, en plus de lier étroitement la ville et la mine.

Ensuite, une descente au puits de la mine Beaver, permet d’explorer une nouvelle échelle

du paysage. La proximité avec l’eau turquoise, explicable par la présence de manganèse

Page 47: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

37

dans le sol donne une dimension particulière à cette station. Aussi, le parcours longe les

installations de la mine Beaver qui sont toujours présentes, afin d’offrir aux visiteurs la

chance de voir les installations existantes d’un site d’affinage. Puis, le parcours contourne

le puits de la mine Beaver pour rejoindre une troisième station qui se trouve en lien direct

avec l’ancienne rue Johnson. De plus, cette station fait le lien avec le quartier Mitchell qui

regroupait autrefois les maisons des hauts dirigeants anglophones des mines à proximité.

Par la suite, le parcours se rétrécit pour passer à l’intérieur d’une station de forme plus

linéaire qui juxtapose symboliquement le tracé de l’ancienne rue Notre-Dame qui reliait

autrefois la ville et le quartier Mitchell.

Juste avant de rejoindre le centre historique minier, point focal du projet proposé, le

parcours rejoint les installations de la mine Bell. À ce stade, je propose de réutiliser les

bâtiments de cette mine désaffectée, en créant un nouveau pôle en lien direct avec le

centre-ville. Ces espaces libres pourraient être utilisés par le Cégep, les centres de

recherche de LAB Chrysotile ou encore des espaces de réunions pour les anciens

syndicats miniers. Ces espaces de bureaux permettraient de réutiliser les locaux

abandonnés et du même coup de raviver le centre-ville. Aussi, l’intégration d’un parc

pourrait, le soir venu, être la mise en scène de projections nocturnes sonorisées qui

animeraient le site, et le feraient revivre au temps des mines.

Finalement, le centre historique minier devient le point focal du parc urbain. Il propose la

requalification de bâtiments industriels miniers existants, dont le chevalement de la mine

King. Les aménagements du site prévoient différentes mises en contextes et expositions

qui présentent l’ambiance et le style de vie des mineurs relatifs aux moments forts de

l’exploitation minière dans la région. Ce parcours offre des espaces diversifiés pour faire

revivre le site et en permettre une meilleure lecture. Il émerge des paysages culturels et,

en symbiose avec la nature et l’histoire de son peuple, crée un filon important à travers la

ville. Les installations diverses l’animent et donnent une signification profonde au parcours.

Page 48: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

38

3.3 | Site

Le centre historique minier fusionnera au parcours des paysages culturels, et en

deviendra son prolongement, plutôt qu’un objet qui le ponctue. Le choix du site va de soi

avec le projet, qui nécessite l’utilisation d’un cadre spatial auquel les gens s’identifient, afin

d’être fidèle au caractère identitaire. Situé à proximité du centre-ville ce site, facile d’accès,

est composé de bâtiments repères existants et est donc parfait pour promouvoir les

mémoires collectives.

La mine King fut l’une des premières mines à débuter ses activités. Elle entre en opération

en 1878, à proximité du centre-ville existant, par la compagnie minière King Brothers. Elle

exploite d’abord une mine à ciel ouvert puis, vers 1928, voit déjà la nécessité d’exploiter

des galeries souterraines sous une partie de la ville. Pour ce faire, elle construit en 1938 le

chevalement, que l’on retrouve aujourd’hui sur le site, afin d’exploiter le sous-sol jusqu’à

450 mètres. En opération jusqu’en 1974, cette mine ferme due à l’incendie du moulin le 8

décembre. Ce dernier ne sera jamais reconstruit et la mine sera forcée de mettre à pied

les 800 mineurs qu’elle employait dû à des

pertes se chiffrant à plus de 40 millions de

dollars. Ce site au caractère imposant (Fig.

21) dans les années 60 comprenait

plusieurs bâtiments, dont plusieurs ont été

démolis au courant des années 80, suite à

sa fermeture.

Bâtiments existants

Aujourd’hui, il ne reste que trois bâtiments (Fig. 22), soit la pièce maitresse, le

chevalement ainsi que deux bâtiments de services recouverts d’un parement de brique

rouge. Aussi, sur le site on retrouve la fondation de l’ancien concasseur, démoli au courant

des années 90.

Fig. 21 | Mine King (1960)

Page 49: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

39

D’abord, le chevalement, construit en 1938, d’une hauteur de plus de quarante mètres agit

comme un repère marquant dans la ville, étant le plus haut des « shafts » construit à

Thetford Mines. Lors de l’exploitation minière, il était utilisé pour descendre les mineurs

dans les galeries souterraines, allant parfois jusqu’à 450 mètres de profondeur. Constitué

d’une imposante structure d’acier, il est recouvert de panneaux en amiante-ciment et

couronne le puits de la mine souterraine. La structure, toujours en excellente condition,

soutient quelques planchers disposés afin de permettre l’entretien de cet édifice de grande

hauteur. Au deux tiers de la hauteur, deux énormes poulies de plus de six pieds de

diamètre servaient à remonter le minerai d’amiante vers la surface afin de le traiter dans

les bâtiments voisins. Finalement, le sommet de cet édifice offre une vue sur l’ensemble

des paysages culturels. Afin d’actionner ces poulies, le bâtiment des treuils, situé derrière,

abrite d’énormes treuils et le poste du commandant. Finalement, le bâtiment des forges

situé d’un côté du chevalement abrite toujours le four du forgeron, qui travaillait les objets

d’acier. Ces bâtiments abandonnés semblent en mauvais état dû au traitement extérieur

qui c’est grandement détérioré avec les années. Les carreaux de fenêtres ont été cassés,

les panneaux de amiante-ciment sont abimés. Cependant, leur structure demeure en très

bon état et peut sans doute servir pour l’élaboration d’un projet de requalification.

Fig. 22 | Site actuel Mine King

Page 50: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

40

Les intentions à l’échelle du site, se veulent d’une part d’activer les mémoires à travers la

requalification des bâtiments, et d’autres parts de redonner des espaces de qualité aux

gens. Le gabarit, la forme, la localisation, ainsi que la matérialité d’un bâtiment affecte

l’influence qu’il a sur le paysage culturel. L’architecture doit en quelque sorte germer, du

site, dialoguant ainsi judicieusement avec la nature, afin de permettre une relation

continue. (BETSKY, 2002) Les intentions pour le centre historique minier sont d’en faire un

espace catalyseur intergénérationnel, qui regroupera différentes activités en lien avec

l’histoire, un espace de vie en soi, où il fait bon se remémorer, découvrir ou tout

simplement s’arrêter. L’objectif est de favoriser les contacts et les discussions, afin de

raviver les bons et les moins bons coups de l’histoire de Thetford Mines.

3.4 | Projet d’architecture – centre historique minier

Le parc urbain minier s’inspire du site pour faire vivre l’histoire de l’exploitation minière et

faire la promotion des produits locaux ce qui favorise la perception du lieu et renforce les

mémoires collectives. Le projet du centre historique minier se veut à la fois le

prolongement du parcours, qui devient une intervention urbaine dynamique, accueillant les

visiteurs. Il offre un tout harmonieux qui favorise les échanges et fait revivre le site, en

proposant des espaces d’interprétation dans un contexte contemporain mettant en valeur

l’histoire.

Fig. 23 | Perspective globale du site proposé

Page 51: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

41

Espaces extérieurs

Plusieurs environnements extérieurs dédiés à l’histoire et aux mémoires collectives sont

prévus afin d’animer l’espace. D’abord, « la gate » (Fig. 24) marque l’ancienne entrée au

site qui était alors délimité par une imposante clôture grillagée. Cette limite imposait une

dualité entre la ville et le site. L’élément de corten prévu s’étend sur une partie du site tout

en ouvrant un portail duquel peut

être réinterprété cette limite. De

plus, cet élément se prolonge vers

la promenade brumeuse, afin de

rappeler les conditions

poussiéreuses des sites miniers et

l’influence que ces dernières

avaient sur la ville. Un peu plus loin, d’imposants murs obliques en acier corten

représentent les haldes en expliquant leurs formations et en distinguant les différents

types. Les modifications aux lieux viennent rappeler, pour plusieurs les haldes qui

devenaient les terrains de multiples découvertes dans leur jeunesse. Aussi s’intègre à ces

éléments inclinés, une promenade historique (Fig. 25) sur les transports qui mènent vers

d’imposants camions réels qui sauront

impressionnés les jeunes et même les moins

jeunes. Au centre du site est prévu un espace

en mémoire des mineurs décédés

accidentellement dans les mines. Cet espace

inclut une étendue d’eau de couleur turquoise

qui s’apparente à celle des puits de mine.

Comme pour le parcours urbain, les éléments

significatifs du site sont marqués par un

traitement en acier corten plié, qui met en

évidence les mémoires collectives.

Fig. 24 | Portail proposé pour commémorer la « gate »

Fig. 25 | Esplanade Historique

Page 52: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

42

Accueil

Le bâtiment d’accueil se situe sur une partie des fondations existantes de l’ancien

concasseur. Située au centre, elle s’ouvre sur le site et permet un fort dialogue avec le

restant de celui-ci. Le bâtiment se compose d’un plan anguleux horizontal en acier corten,

déposé sur les anciennes fondations tout en laissant un vide matériel entre les deux plans

horizontaux. Il abrite d’ailleurs la salle des pendus qui fait référence au vestiaire des

travailleurs souterrains qui pendaient leurs habits détrempés pour le séchage. Aussi, un

escalier mène au sous-sol vers une réinterprétation des galeries souterraines dans le

temps, pour ensuite migrer vers le chevalement.

Chevalement

Au sein de la ville, le chevalement agit comme un symbole important. D’une hauteur de

plus de quarante mètres, il constitue un élément attrayant au caractère particulier, un

monument en soi. Le projet propose d’utiliser la structure existante, qui s’avère en bonne

condition, pour y intégrer différents niveaux reliés entre eux pour former un parcours. Ce

dernier vise la compréhension des éléments disparus qui ont laissé des traces dans le

paysage.

Fig. 26 | Chevalement en soirée

Page 53: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

43

D’abord, les deux premiers niveaux racontent l’histoire de la ville et de son industrie

minière depuis la découverte de l’amiante. Des vues sont percées sur le bâtiment des

forges afin d’en dévoiler les cheminées et le caractère minier représentatif. Puis, le visiteur

est amené à découvrir le caractère minier particulier à la région par de nombreuses

images, mais aussi par des vues qui s’ouvrent vers les installations des mines Bell et

Beaver ainsi que sur les impressionnantes haldes des mines BC I et II. Par ailleurs, le

niveau suivant est consacré aux habitants, afin de rappeler l’influence de la dominance

minière. Au cinquième niveau est présenté le chevalement en soi, en lien avec le bâtiment

des treuils et les énormes poulies. Finalement, au sommet se trouve un observatoire

panoramique qui présente la ville globalement telle qu’elle l’est aujourd’hui.

Le traitement de ce monument contraste entre l’ancien et l’époque actuelle, tout en

conservant le caractère minier industriel. Le revêtement en deux épaisseurs conserve la

simplicité extérieure pour permettre la découverte de la beauté intérieure d’une structure

complexe principalement basée sur la fonction. Le parement extérieur est composé d’une

première peau en panneaux de fibrociment, superposé d’un grillage d’acier déployé

rappelant la clôture « frost » qui borde la majorité des sites miniers. Différents percements

en acier corten cadrent des vues qui permettent d’exprimer l’histoire en lien avec le

paysage actuel au fil du parcours proposé. Aussi, des percements dans le parement

opaque dynamisent la balade et permettent d’entrevoir de l’extérieur l’imposante structure.

Finalement, le sommet devient un signal encore plus fort qui s’illumine le soir venu tel un

phare le long d’un cours d’eau. Le chevalement permet ainsi de faire vivre plusieurs

émotions à travers un parcours vertical entremêlé d’histoire et d’objets miniers. Il constitue

le repère de ce site, du parcours et de la ville. Par son cadre spatial, il met en valeur le

caractère social et ainsi favorise la perception du lieu.

En lien direct avec le chevalement, le bâtiment des treuils offre les explications

mécaniques des énormes treuils encore présents. Situé à proximité, le café des forges

Page 54: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

44

permet l’exposition temporaire d’œuvres d’art régionales et offre des espaces de détentes

sur un étage et demi. Le contexte de ce café veut montrer la structure, tout en minimisant

les finis afin de permettre la contemplation et de mettre en valeur les œuvres.

3.5 | Synthèse

Le parcours ainsi que le centre historique favorisent la découverte et la compréhension

des paysages culturels. Le parcours s’étend sur la ville et le centre historique devient son

repère principal. Au final, ces deux éléments s’unissent et forment le parc urbain miner,

pour en faire le reflet identitaire de Thetford Mines. Par l’interprétation et la mise en valeur,

le parc urbain minier assume le paysage et l’histoire minière pour en révéler le caractère

identitaire unique. Il importe de miser sur des paysages culturels aussi impressionnants

afin qu’ils soient préservés et appréciés au quotidien par tous.

Page 55: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

45

Page 56: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

46

CONCLUSION

La rédaction de cet essai (projet) et le projet qui l’accompagne suscitent une réflexion sur

l’importance d’un projet identitaire à Thetford Mines. Un tel projet apporterait de grands

atouts pour l’identité d’une ville marquée par une histoire aussi importante. Par son

approche, ce travail de recherche-création fait des paysages culturels l’élément central qui

structure l’aménagement du parcours urbain et du centre historique miner. L’analyse des

éléments tangibles et intangibles des paysages culturels éclaircit les interventions pour

porter secours au caractère identitaire de la ville. Il met de l’avant une stratégie qui vise à

renforcer la perception du lieu et par le fait même son caractère identitaire.

Le projet se veut une réponse à la fois urbaine et architecturale qui s’intéresse à

l’expression de l’identité culturelle pour révéler, à travers des mémoires collectives, le

caractère identitaire des paysages culturels de Thetford Mines. La création d’un parc

urbain minier relie différents pôles importants de l’histoire, qui ont été mis de côté afin d’y

créer des lieux d’échanges entre le passé et le présent.

Lors de la critique, le projet a été apprécié pour la multitude de pistes d’intervention

proposées. L’ensemble des membres du jury aurait apprécié un travail tectonique plus

poussé, afin de renforcer les convictions du projet. Le caractère des espaces extérieurs

proposés ainsi que de l’objet principal, soit le chevalement semble avoir plu au jury.

Cependant, le bâtiment d’accueil aurait eu avantage à être plus travaillé et peaufiné.

Page 57: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

47

Finalement le choix de la matérialisation des éléments significatifs en acier corten donne

un caractère sensible et monumental aux objets, qui fut apprécié, mais aurait eu avantage

à être plus justifié.

Bref le résultat de cet essai (projet) suggère plusieurs pistes intéressantes à mettre de

l’avant dans l’élaboration d’un projet fondé sur les mémoires collectives. Personnellement

j’aurais aimé pouvoir travailler davantage l’unification des éléments afin d’offrir un parc

urbain miner exemplaire. Dans l’ensemble, je suis fière d’avoir mené à terme un projet

aussi complexe qui met en valeur cette belle région qui me passionne. J’espère qu’il

pourra démontrer aux Thetfordois et autres, l’importance cruciale d’un projet identitaire

afin de recréer ce lien culturel qui tend à se perdre entre la ville et ses mines.

Page 58: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

48

BIBLIOGRAPHIE

• AVOCAT, Charles (1984) Lire le paysage, lire les paysages : Actes du Colloque des 24 et 25 nov. 1983, Université de Saint-Étienne, CIEREC

• BERDET, Marc (2005) Benjamin sociographe de la mémoire collective ? Temporalités [En ligne], No. 3 _ URL : http://temporalites.revues.org/410 , Consulté le 10 décembre 2012

• BERQUE, Augustin (1994) Cinq propositions pour une théorie du paysage, Seyssel,

Éditions Champ Vallon. • BETSKY, Aaron (2002) Lignes d’horizon, l’architecture et son site, Paris : Éditions

Thames and Hudson • CINQ-MARS, François (2005) Villes Minées : les grandes mouvances des villes

minières. Thetford Mines • DEWARRAT, Jean-Pierre et al. (2003) Paysages ordinaires, de la protection au projet.

Sprimont : Pierre Mardaga

• DI MÉO, Guy (2005) L’espace social : une lecture géographie des sociétés. Paris : Colin

• DUBÉ, Romain (1994) Thetford Mines à ciel ouvert : Histoire d’une ville minière. Ville de Thetford Mines

• HALBWACHS, Maurice (1950) La Mémoire Collective. Paris : Presses Universitaires de France

• HAYDEN, Dolores (1995) The Power of Place : Urban Landscape as public history. Cambridge, Ma. : MIT Press.

• Le nouveau Petit Robert de la langue française (2007). Paris

• NOPPEN, Luc et al. (1995) Architecture, forme urbaine et identité collective. Sillery : Éditions du Septentrion

Page 59: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

49

• NORBERG-SCHULZ, Christian (1997) L’art du lieu : architecture et paysage, permanence et mutation. Paris : Le Moniteur

• NUSSAUME, Yann (2009) Tadao Ando. Paris : Hazan,

• RETAILLÉ, Denis (1997) Le monde du géographe. Paris : Presses de la Fondation nationale des sciences politiques

Ouvrages consultés :

• RIVARD, Erick (2008) Approfondir l’analyse objective du territoire par une lecture subjective du paysage : le cas de la Côte-de-Beaupré, Mémoire de maitrise en architecture. Québec : Université Laval

• BÉLANGER, Anouk (2002) « Urban space and collective memory; analysing the various dimensions of the production of memory », Canadian Journal of Urban Research, 11 (1) : 69-92.

• DONADIEU, Pierre et al. (2005) Clés pour le paysage. Paris : Ophrys

• NOPPEN, Luc et Lucie K. Morisset (1995) « Édifier une mémoire de lieux en recyclant

l'histoire. Usages et fonctions du passé dans l'architecture actuelle », La mémoire dans la culture, Presses de l’Université Laval : 203-233.

• Office du Tourisme de la MRC des Appalaches (2009) Thetford Mines d’hier à

aujourd’hui. Édition : Office du Tourisme de la MRC des Appalaches

• STEWART, William P. et al. (2004) « Community identities as visions for landscape »,

Landscape and Urban Planning, 69 (2-3) : 315-334. Sources Photos

• SAHRA – Société archives historiques région amiante [En ligne] URL : http://www.sahra.qc.ca, Consulté le 10 avril 2013

• Google Maps - [En ligne] URL : http://maps.google.fr , Consulté le 22 mars 2013

• Ville de Thetford Mines – [En ligne] URL : http://www.ville.thetfordmines.qc.ca, Consulté 19 février 2013

Page 60: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

50

ANNEXES

Page 61: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

51

Annexe 1 | CARTE DE CONCEPTS

Page 62: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

52

Annexe 2 | MORPHOGENÈSE . Avant 1876: activités dominantes sont l’agriculture et l’exploitation forestière . 1876: Découverte de l’amiante . 1877: 3 mines en action (Johnson / Bell / King) . 1892: activités dominantes mines; forte expansion . Développement de Kingsville . Équipements publics et infrastructures municipales . 1912: Village minier planifié et chemin de fer

. 1930: plusieurs fusions minières

. Expansion de la ville selon le développement minier

. 1949: Création de la mine LAQ après 4ans de . pompage du lac noir . La ville nuit à l’expansion des mines . Sommet de l’exploitation minière . Thetford Mines = 24 000 habitants . 1 habitant sur 5 = mineur . 1970: Relocalisation du noyau central de la ville: . Quartier St-Maurice déplacé en 1973 . Début étalement urbain: nouveaux quartiers d’habitation . 1977: Nationalisation de l’amiante . 1980: Déclin de l’exploitation minière . 1980 à 2002 : décroissance de la population

. 2011: fermeture de la mine LAQ, dernière mine en action Fig. 27 | Morphogenèse

Page 63: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

  53  

Annexe 3 | THETFORD MINES _ Mines d’amiante

                                       

6

1

2 3

4 5

7

8

9

1.Mine Normandie

2. Mine Lac d’amiante du Québec (LAQ)

3. Mine BC-1

4. Mine BC-2

5. Mine Beaver

6. Mine Bell

7. Mines King & Johnson

8. Mine Flinkote

9. Mine National

Fig. 28 | Thetford Mines et les envions

Page 64: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

54

Annexe 4 | HALDES PLATES / CONIQUES

Haldes plates

Les haldes plates sont les plus anciennes, leur forme est due au moyen de transport des

résidus par locomotives et par camions. Ces résidus étaient déchargés sur les terrains à

proximité des mines et ensuite

aplanis aux moyens mécaniques

par souci d’économie d’espace.

Vers les années 80, ces haldes

ont été végétalisées,

particulièrement dans les zones

urbaines, au moyen de boues

d’épuration et d’ensemencement.

(Fig. 29)

Haldes coniques

De leur côté, les haldes coniques, sont aussi des montagnes humanisées, mais qui

apparaissent sans doute plus artificielles que le premier type. Elles forment des collines à

forte pente (environ 40o) et peuvent atteindre jusqu’à 100 mètres de hauteur. Créant ainsi

d’importantes modifications dans la topographie naturelle du terrain. Elles sont plus

récentes et ont été créées après la

Deuxième Guerre mondiale, alors

que l’équipement des mines se

modernisait grandement. Les

technologies minières ont amené

l’homme à utiliser des convoyeurs

afin de transporter les résidus ce

qui créa des haldes coniques.

(Fig. 30)

Page 65: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

  55  

Annexe 5 | PLANCHES CRITIQUE FINALE (19 AVRIL 2013)  

   

Page 66: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

  56  

   

Page 67: REFLET IDENTITAIRE DE THETFORD MINES · 2013. 11. 6. · Fig. 14 Vue depuis la mine BC II INCONNU 25 Fig. 15 Installations de la mine Normandie M.GRÉGOIRE (2012) 26 Fig. 16 « Shaft

  57