Réconcilier VPCet e-commerce - Supply Chain Magazine · Moreau, PDG d’Orium, prestataire...

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ENQUÊTE V ente à distance N°51 SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JANVIER-FÉVRIER 2011 56 Longtemps sur une rente de situation, la vente par correspondance (VPC) s’est d’abord fait bousculer par les magasins qui ont accéléré le rythme des collections et plus récemment, par l’e-commerce, qui la pousse à plus de réactivité et de dynamisme en matière de promotions. Contrainte à de profondes remises en cause, la VPC intègre progressivement les nouvelles règles du e-commerce et pourrait bien revenir en force dans ce secteur compte tenu de son savoir-faire singulier acquis en BtoC. Vente à distance Réconcilier VPC et e-commerce Calalogues Manufrance de 1894 à 2003 ©ANGELIKA BENTIN-FOTOLIA ©MANUFRANCE

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N°51 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JANVIER-FÉVRIER 201156

Longtemps sur une rente de situation, la vente parcorrespondance (VPC) s’est d’abord fait bousculerpar les magasins qui ont accéléré le rythme

des collections et plus récemment, par l’e-commerce, qui la pousse à plus de réactivité et de dynamisme en matière de promotions. Contrainte à de profondes remises en cause, la VPC intègre progressivement les nouvellesrègles du e-commerce et pourrait bien revenir en force dans ce secteur comptetenu de son savoir-faire singulier acquis en BtoC.

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Historiquement, la VAD[vente à distance] s’adres-sait à une populationessentiellement rurale quiavait difficilement accès

aux grandes surfaces. Le modèleconsistait à leur envoyer un cataloguepour les faire rêver au coin du feu,dépeint François Rochet, PDG ducabinet Agenoria, spécialisé notam-ment en distribution BtoB et BtoC. Etde poursuivre : Ce modèle s’est déve-loppé en parallèle de la Grande distri-bution avec la même volonté deproposer de plus en plus de produits.Par ailleurs, les campagnes étant dif-ficiles d’accès, des délais de livraisonde 15 jours/trois semaines étaientacceptés. » Toute une époque ! Cellequi a fait les beaux jours de Manu-france puis Camif, Quelle, La Redoute,3 Suisses, Yves Rocher… Si certainesenseignes prospèrent, d’autres ontsubi des liquidations judiciaires avantde renaître de leurs cendres et lamajorité connaissent de profondesmutations : 900 salariés à reclasserpour le vépéciste de Niort après samise en liquidation fin octobre 2008,suppression annoncée fin 2008 de 672emplois en quatre ans par La Redoute,réduction de 674 postes sur 3.000 aux3 Suisses déclarée en février 2009…Ces changements majeurs se faisantsouvent dans la douleur face à despopulations sédentaires très attachéesà leur entreprise depuis des décennies.

Un modèle classiqueA leurs débuts, les vépécistes généra-listes travaillaient sur la base de deuxcatalogues annuels : un été et unhiver. « Les modèles de VAD classiquesreposent essentiellement sur du textile.Les 3 Suisses, La Redoute… faisaientdeux catalogues de 1.200 pages par

an. Ils travaillaient pendant des moissur le même catalogue et une foisédité, ils vivaient dessus pendant desmois. Le service achat commandait lesproduits puis avait une politique deréassort en Europe, et au Maghrebjusqu’en 1995, ou en Europe de l’Est.Le réappro-visionnement s’effectuaiten trois semaines/un mois. Le tissuétait acheté pour l’ensemble de la sai-son, la confection étant réalisée à lademande. C’était un modèle basé surles stocks et la pérennité », se souvientFrançois Rochet. Et de poursuivre parune anecdote : « Lorsque je suis inter-venu la première fois à la Camif, ilsavaient un énorme transstockeur àpalettes installé depuis 30 ans qui étaitle nec plus ultra à l’époque car il mani-pulait des palettes de 500 kg à plus de10 m de haut, en allant lentement pourne pas abîmer les produits. Et l’onn’hésitait pas à attendre d’avoir 200 sèche-cheveux en commande poursortir les produits et les mettre en pré-paration ! ». Des pratiques difficilementcompatibles aujourd’hui avec desconsommateurs pressés d’obtenir lesproduits convoités !

Une accélération des collections

Puis est arrivé le modèle Zara dans ladistribution textile en magasin. Trèsintégré (de la production à la chaînede boutiques), ce modèle a remplacéles deux collections par an au profitde cycles plus courts. « Le but est dechanger les vitrines toutes les troissemaines pour faire venir plus souventles clientes, avides de nouveautés, etde déclencher leur acte d’achat immé-diatement par un effet de rareté »,explique François Rochet. Ainsi, d’unschéma qui faisait durer un modèle leplus longtemps possible, on passealors à un autre où la rupture est quasipositive puisqu’elle déclenche un acted’achat immédiat de la cliente, de peurde ne pas retrouver le produit. « Desgroupes comme Beaumanoir ou H&Mont adopté ce modèle », illustre le PDGd’Agenoria. Ce changement a eu unimpact notable sur les vépécistes quiont multiplié les catalogues. « Le groscatalogue a réduit de taille et a étécomplété par de plus petits, de 40/50pages pour 2.500 références », observe

F. Rochet. Ceci aurait dû de fait amé-liorer la productivité car il est plusfacile de préparer quelques articlesparmi quelques milliers de référencesque parmi une centaine de milliers. « Mais les outils logistiques mis enplace par les grands véadistes ont étéconstruits sur la base des gros cata-logues et il est d’autant plus difficilede tout casser que ces derniers subsis-tent. Sans oublier que les capacitésd’investissement de ces véadistes sontlimitées. Du coup, d’un point de vuelogistique, les véadistes n’ont pasopéré la révolution qui a eu lieu commercialement (multiplication descatalogues, sites Internet…) », constatele fondateur d’Agenoria.

Une difficulté face au e-commerce

Face aux débuts tumultueux du e-commerce dans les années 2000, lesvépécistes sont dans un premier tempsdubitatifs. D’où un certain « retard àl’allumage ». « La VPC a mis cinq ans« de trop » pour comprendre le phéno-mène e-commerce car au départ, elle a

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François Rochet,PDG du cabinet Agenoria :

« Historiquement, la VAD s’adressait à

une population essentiellement rurale qui avait difficilement

accès aux grandes surfaces. Le modèle

consistait à leur envoyerun catalogue pour

les faire rêver au coin du feu ».

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cru qu’il était une simple traductionde son modèle », estime OlivierMoreau, PDG d’Orium, prestatairespécialisé dans les solutions logis-tiques cross-canal et la relation clientpour les entreprises du e-commerce.Selon lui, ce retard s’explique « par lacrise du e-commerce dans les années2000 couplée à celle du modèle éco-nomique de la VAD masquée par d’ex-cellents résultats financiers dans lesannées 90 ». De plus, certaines diffé-rences fondamentales entre les deuxmodes de ventes ont été mal appré-hendées au départ. Ainsi, si l’e-com-

merce cible l’individu, le catalogues’adresse à la famille, au foyer, d’oùune « difficulté pour les vépécistes àappréhender l’individu et le marketingone to one », remarque Olivier Moreau.De même, le rythme est plus soutenuen e-commerce : « Alors que la VPCchangeait ses prix, ses produits, sonmix marketing chaque trimestre, cer-tains sites Internet font évoluer leursite, et notamment les prix, toutes lesheures en fonction de la concurrenceou des événements de la veille »,indique le fondateur d’Orium. Sansoublier selon lui « la difficulté clas-sique des grands groupes à trouverleur efficacité sur le marché des PMEqui fait qu’ils se sont fait dépasser parde petits acteurs. »

Une érosion du fichier clientConcurrencée à la fois par la démulti-plication des magasins qui proposentune offre sans cesse renouvelée acces-

sible immédiatement et des pure-players BtoC, qui poussent par defortes promotions des produits cibléscouvrant une large gamme, la VADtraditionnelle tendait à voir sesfichiers clients s’éroder. « Le gros pro-blème de la VAD est que la moitié deson chiffre d’affaires est mangé par lesfrais de communication : catalogues,frais d’envoi et cadeaux. Ce modèle estdonc difficilement compatible avec du -50 % en terme de coûts. De plus, avecle développement de la Grande distri-bution et des voies de communicationsqui donnent un accès plus facile aux

magasins, la population de la VPCclassique tend à se restreindre », con-firme François Rochet. Mais bien plus,les ressources qui disposent du savoir-faire propre à la VPC tendent à seraréfier, ce qui a aussi un impact sur lerenouvellement du fichier clients : « Le problème de la VAD est qu’ilssont comme une Formule 1. Ils leurfaut des experts qui ont une grosseexpérience et règlent les paramètres demanière très fine. Or, très bousculéspar Internet, certains ont vu disparaî-tre leurs compétences VAD pures »,déplore-t-il. Ainsi, pour lui, deuxparamètres sont essentiels en VAD : letaux de transformation et le taux deprésence. Le premier mesure l’effica-cité de la communication en comptantle nombre de commandes reçues parmessages envoyés (ex : cinq com-mandes reçues pour 100 cataloguesenvoyés). Le second mesure l’impactdu catalogue par produit en compta-

Olivier Dubouis,Associé du cabinet

de conseil en SCM Diagma : « Globalement

dans le Retail, on trouveencore beaucoup

de systèmes d’information

propriétaires, ce qui est aussi le cas dans la VPC ».

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Francis Ciuch,PDG de Ciuch :

« La réflexion Internet a été entamée il y a

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nombres de visites : ils ontsu prendre ce virage ».

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bilisant le nombre de fois où un arti-cle est présent par commande. Cesparamètres indiquent donc si le cata-logue est dans la cible par rapport auxgroupes de clients répertoriés, y com-pris en terme de prospection, et si lesmises en avant dans le cataloguefonctionnent ou non. « La tentationest forte de ne plus recruter de nou-veaux clients parce que c’est coûteux.Mais c’est une vision à court terme.Chez de nombreux véadistes, beaucoupde gens ont été remerciés ou sont par-tis à la retraite avec leur savoir-faire.Du coup, les messages de leurs rem-plaçants moins expérimentés sontmoins efficaces. Tous cela concourt àappauvrir le fichier client, le cœur dudispositif », prévient François Rochet.

Des évolutions notablesConscients de la nécessité d’agir, lesvéadistes ont lancé de nombreux pro-jets pour revoir leurs organisations,leurs process, leurs outils afin d’inté-

grer l’e-commerce, sans pour autantabandonner le catalogue, qui reste unsupport prisé pour le passage de com-mande sur Internet et dont la magieopère toujours. « La réflexion Interneta été entamée il y a neuf/dix ans.Redoute.fr est ainsi le 1er site en nom-bres de visites : ils ont su prendre cevirage », observe Francis Ciuch, PDGde Ciuch, fournisseur de solutions glo-bales de systèmes de manutentionévoluée, qui a de nombreux clientsdans la VAD. Redcats, société duGroupe PPR, fédère en effet 17 mar-ques implantées dans 30 pays dont LaRedoute, Daxon, Vertbaudet… En 2009,Redcats qui employait 16.000 collabo-rateurs, a réalisé un CA de 3,4 Md€

dont 47 % sur Internet. Il distribue sescollections à travers plus de 60 sitese-commerce, plus de 600 magasins etune trentaine de catalogues en Franceet à l'international, attestant ainsi sacapacité à concilier la VPC, la venteen magasins et l’e-commerce. Olivier Dubouis, Associé du cabinet deconseil en SCM Diagma, note égale-ment cette évolution : « Depuis qua-tre/cinq ans, la majorité des vépécistesont sauté le pas du e-commerce.D’abord, ils ont élargi leur offre,essentiellement par un développementde la politique d’animation promo-tionnelle. Ainsi, d’un catalogue papiercher complété par des flyers, ils sontpassés à une offre beaucoup plus

large, plus rapidement évolutive avecdes promotions plus réactives, à l’ins-tar de La Redoute. Ensuite, ils ontinvesti dans la connaissance du délairéel de mise à disposition des pro-duits, plutôt que de donner des délaisestimés considérés comme acceptablesd’un point de vue psychologique ». Dessociétés comme La Redoute, 3 Suisses(voir encadré 1 page 62) ou encore lequincailler Legallais Bouchard, parexemple, se sont en effet penchés surla nécessité de communiquer desdélais plus réalistes aux clientslorsque le produit est en rupture ponc-tuelle afin de lui permettre de prendreune décision éclairée (abandon de lacommande, substitution de produit ouattente). Cela suppose aussi de revoirses systèmes d’information : « Globa-lement dans le Retail, on trouve encorebeaucoup de systèmes d’informationpropriétaires, ce qui est aussi le casdans la VPC. Tous ont entamé desréflexions sur l’évolution de leurs S.I.et de gros chantiers d’urbanisation deces derniers, ne serait-ce que pourcommuniquer avec l’existant. Une pre-mière solution est d’avoir un frontalweb qui vit en stand alone et se syn-chronise périodiquement avec le Back-Office. Une seconde est d’instaurer letemps réel entre le Front et le Back-Office, mais cette solution est pluscomplexe », admet Olivier Dubouis.Autre évolution observée par Francis

Olivier Moreau,PDG d’Orium :

« Ce n’est pas un hasard si Orium réussit :

nous avons eu une visiontrès claire du marché

e-Commerce car nous avons été formés dans la VPC.

Je prévois donc un retour en force des compétences

de la VPC ».

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Ciuch, la tendance à instaurer, commedans l’automobile, des stocks de réas-sort de proximité : « Des entrepôtssitués à 20 mn de ceux des véadistesgèrent du stockage de masse. Ce quipermet à ces derniers de ne garderchez eux que la moitié des centainesde milliers de références nécessairesau réapprovisionnement dans lasemaine et de faire réapprovisionnerle reste sous des délais courts depuisces entrepôts de proximité. »

Un réel savoir-fairePour Francis Ciuch, l’organisationlogistique des vépécistes est bienrodée et performante car améliorée enpermanence : « Dès que les produitsarrivent, y compris des retours, ilssont capables de les intégrer aux com-mandes à préparer via un ateliercross-dock. Ils ont toujours fait pro-gresser leurs outils. Plus les volumessont importants, plus ils ouvrent desateliers en fonction du type de produit.Ils ont une énorme expérience en pré-

paration de commande ». De même,pour Olivier Moreau, compte tenu deson expertise très spécifique en BtoC,la VPC a une véritable carte à jouer :« Ce sont les seuls à avoir un vraisavoir-faire complet en BtoC et l’e-commerce en est avant tout, que cesoit en marketing, analyse comporte-mentale, logistique, mécanisation dela Supply Chain, transport et systèmed’information. Ce n’est pas un hasardsi Orium réussit : nous avons eu unevision très claire du marché e-com-merce car nous avons été formés dansla VPC, déclare cet ancien de LaRedoute. Je prévois donc un retour enforce des compétences de la VPC. Eneffet, l’e-commerce n’est pas encoretrop concurrentiel mais il va bientôtfalloir trouver des facteurs différen-ciateurs et l’environnement de la VPCen a notamment dans le domaine del’analyse comportementale (BusinessIntelligence) ». En espérant que cesavoir-faire ne s’est pas trop diluédepuis… ■ Cathy Polge©

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Quatre chantiers majeurs pourun investissement de 70 M€ :c’est ce qu’entreprend le

Groupe 3 Suisses International pourmoderniser ses activités en privilégiantle web. Ce projet présenté aux salariéset aux partenaires sociaux le 17 décem-bre 2010 concernera le commercial, lesprocessus métiers, le système d’infor-mation, la logistique ainsi que la rela-tion clients. Mais les enseignes grandpublic du domaine BtoC telles que 3 Suisses, Blanche Porte, Becquet,Quelle… ont déjà engagé des projetsd’amélioration. Ainsi, plutôt que dedonner un délai d’attente estimatif d’unproduit momentanément indisponible,3 Suisses et ses autres enseignes ontmis en place, avec l’aide de l’éditeur delogiciel Manhattan Associates, un sys-tème de calcul des délais de mise à dis-position des produits en fonction deleur état d’avancement dans la chaîneamont, depuis les fournisseurs jusqu’auxentrepôts. En plus du logiciel de ges-tion d’entreposage (WMS) de l’éditeuraméricain, le vépéciste a acquis lemodule DOM (Distributed Order Mana-gement) qui rapproche en temps réelchaque commande du stock pouvant laservir dans les meilleurs délais, où qu’ilsoit. DOM, qui communique avec lesite Internet et le Call Center, est ali-menté en temps réel par tous les mou-vements de stocks des entrepôts, desorte qu’il connaît les références enrupture, en réception, en attente deréassort… « Les vépécistes ont long-temps cru que seul un système maisonsaurait traiter la complexité (variété del’offre et mode de préparation). Il

s’avère aujourd’hui qu’une solutionstandard comme Manhattan le réalisesans difficulté et peut répondre auxévolutions très fortes du métier entermes de communication avec lesautres systèmes, de variété des modesde préparation, des sites, d’agilité, etc.)», se félicite Henri Seroux, Directeur deManhattan Associates France.

Une réduction des stocks de sécurité

De plus, DOM suit en temps réel lesinformations de mise à disposition desproduits communiquées par 2.500fournisseurs gérant des dizaines demilliers d’ordres d’achats en cours. Cesfournisseurs sont connectés à un logi-ciel de Manhattan Associates baptiséEEM (pour Extended EnterpriseManagement). Ils y reçoivent électro-niquement les commandes qui lesconcernent et mettent à jour leursdates d’expédition prévisionnelles,remontées ensuite dans DOM. Une foisles commandes prêtes, les fournisseursrenseignent leurs dates d’expéditionréelles et le système calcule les datesde mise à disposition prévisionnelles,compte tenu des délais théoriques dechaque étape de la chaîne de trans-port. « En pratique, ce système conduitles distributeurs à réduire leurs stocksde sécurité. Le fait de disposer d’unevisibilité en temps réel leur permet eneffet de piloter leurs approvisionne-ments avec plus de précision et de

retarder la date de la commanded’achat ou de réassort, augmentantainsi sa précision avec celle de lademande, mieux connue », indiqueHenri Seroux.

Le stock de transit verrouilléEnfin, si la proposition de délaiconvient au client et qu’il confirme sacommande, DOM affecte cette dernièreau stock de transit le plus proche et leverrouille. « Le stock qui apparaît dis-ponible est bien celui affectable à descommandes futures, une fois déduitestoutes les commandes déjà réservées »,précise le Directeur de ManhattanAssociates France. Et l’ensemble dustock en approche est consommablepar les commandes à servir. « Dans lecas particulier de 3 Suisses, DOMdevient un système fédérateur pourplus de 10 enseignes différentes, tousles pays européens, qui géraientjusqu’ici leur Supply Chain sur ungrand nombre de systèmes différents, etpour certains marchés, très loin dustock disponible en temps réel », seréjouit Henri Seroux. ■ CP

3 SUISSESsuit ses délais

de prèsAu lieu de proposer des délaisestimés à ses clients lorsque le produit est indisponiblemais en attente, 3 Suisses a mis en place un système de suivi en temps réel des

commandes d’achats renseignépar 2.500 fournisseurs pour

calculer au plus juste les datesde mise à disposition

de ces produits.

Henri Seroux,Directeur de

Manhattan Associates France : « Les vépécistes

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saurait traiter la complexité ».

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Le papier reste une valeur forte.C’est une conviction que nousavons chevillée au corps et qui

nous permet d’assurer une croissanceà deux chiffres depuis plusieurs années »,commence Stéphane Poumailloux,Directeur général de MK Direct, lasociété qui chapeaute les marques Fan-çoise Saget et Linvosges. De fait, lescommandes issues d’Internet, en pro-gression, ne représentent encore que 20 % contre 80 % pour celles venantdes catalogues. Ce qui n’empêche nul-lement le vépéciste d’enregistrer un CAde 150 M€ en 2010 contre 88 M€ envi-ron en 2006, au moment du rachat desdeux marques au Groupe Yves Rocherpar le fonds Activa Capital. « Ces entre-prises ne faisaient plus de croissance.A présent, elles sont de nouveau dansune dynamique de développement.Nous avons mené beaucoup de projetset ce n’est pas fini !, s’exclame le DGde MK Direct avant de poursuivre :Notre avantage est d’être une entrepriseà taille humaine, de sorte que gérer lechangement est plus facile que dans degrands groupes. » S’il a en effet fallu audébut lever les craintes des quelque400 salariés employés par le vépéciste,très attachés à leurs entreprises et ins-tallés pour la plupart en province (enBretagne ou à Gérardmer), les bonsrésultats assortis du versement de par-ticipation et d’intéressement les ontconvaincus que les changementsallaient dans la bonne direction.

L’importance de l’amontPour Stéphane Poumailloux, qui a travaillé durant 18 ans dans le GroupeYves Rocher, une des évolutions

majeures vécue par la VPC est le raccourcissement des délais. « YvesRocher a été le premier à faire duColissimo à grande échelle. La Redoutea lancé le 48 h Chrono il y a 20 ans…,se souvient-il, en soulignant que cetteévolution n’est pas récente. Vous com-mandiez à distance mais le produitétait mis à votre disposition presque

comme en boutique », résume-t-il.Deux façons pour le vépéciste derépondre à cette accélération selon lui : la première est de fabriquer lesproduits selon les besoins, comme lefournisseur de cosmétiques de laGacilly ou Linvosges, qui dispose deses ateliers de confection (mais àcondition d’avoir anticipé les approvi-sionnements en matière première oud’être très réactif). La seconde est des’appuyer sur des prévisions fines pouravoir les bons stocks au bon moment.« La Clef de la VAD est de faire debonnes prévisions, insiste le DG. Nousne démarrons jamais une campagnesans avoir les stocks suffisants. Nouscalculons des stocks de départ en fonc-tion des résultats obtenus lors des testsdes nouvelles collections ou de l’histo-rique, puis nous ajustons nos besoinsselon le succès réel des modèles », pré-cise-t-il. Après avoir cherché un logiciel de pré-visions du marché capable de répondreà la fois aux besoins de FrançoiseSaget et de Linvosges, MK Direct ad’ailleurs développé un système de pré-visions intégrant les particularités de laVAD avec Cegid. « La plupart des édi-teurs postulant maîtrisaient l’approvi-sionnement mais pas les prévisions ;pour les autres, c’était l’inverse. SeulCegid a pris l’engagement d’apporterson expertise en approvisionnement etprévisions, et surtout, de collaboreravec nous pour acquérir le savoir-faireen prévisions de ventes dans ledomaine de la vente à distance », justi-fie Sébastien Hertz, Directeur desachats et des approvisionnements deLinvosges. Cegid s’est lancé dansl’adaptation de son logiciel dès novem-bre 2009 pour une mise en œuvre chezLinvosges à partir de juin 2010 et chezFrançoise Saget, cette année.

Accepter d’avoir du stockA défaut d’anticiper les quantités dis-ponibles, encore faut-il savoir gérerles ruptures. « L’essentiel est d’abord

MK Directtient ses

promesses

Issue du rachat en 2006 des spécialistes de la VPC delinge de maison, Françoise

Saget et Linvosges, la sociétéMK Direct a quasi doublé son

CA en quatre ans. Les clefs de ce succès dans un secteur

a priori plutôt stable ? Un réel savoir-faire en

marketing direct couplé à une maîtrise des flux

physiques et d’informationamont et aval pour coller à la demande et assurer aux clientes une grande

fiabilité de service.

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Stéphane Poumailloux,

Directeur général de MK Direct : « Le papier reste

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d’en informer la cliente et de pouvoirlui annoncer au plus vite (dès la prisede commande au téléphone ou surInternet, ou une semaine après, parcourrier) un délai d’attente raisonna-ble, – de une à trois semaines d’unpoint de vue psychologique en général –.Ainsi peut-elle décider d’attendre, desubstituer le produit ou d’annuler sacommande. Prolonger le délai annoncéinitialement ou abandonner le chiffred’affaires parce que l’on s’avère inca-pable de livrer l’article promis au finala un effet désastreux sur la relationclient. Il faut donc accepter d’avoir dustock et limiter les références à com-mercialiser plutôt que de céder à lafacilité d’ajouter des produits que l’onn’a pas », estime Stéphane Pou-mailloux.

Un système intégréAutre caractéristique de la « méthodeMK Direct » : l’intégration des fonc-tions vitales pour maîtriser la qualité.Ainsi, la première action menée par la

société a été d’adopter pour les deuxentités la même solution logicielle deGenerix Group, déjà en place chez Lin-vosges. « Nous sommes passés à unsystème plus moderne et évolutif enrestant à des coûts raisonnables »,commente S. Poumailloux. En effetFrançoise Saget travaillait auparavantsur un système propriétaire développépar le Groupe Yves Rocher. Ceci a faci-lité la création d’une Direction infor-matique commune aux deux marques,la gestion de leurs deux clientèles etl’intégration de nouvelles technologiescomme Internet. D’autre part, MKDirect, qui compte un Directeur de sitepar marque, gère en propre sa logis-tique de distribution. « Dès qu’unecommande arrive sur son site, le Direc-teur doit tout faire pour la satisfaire,ponctue le DG de MK Direct. En dehorsde quelques stocks de débord chez desprestataires en Bretagne ou dans lesVosges, nous ne sous-traitons rien »,insiste-t-il. De même, le Call Center aété rapatrié en interne pour garder la

maîtrise de la qualité de l’informationdiffusée et remontée.

De faibles retours« Notre pourcentage de retours est fai-ble puisqu’il est de moins de 3 %, ycompris la lingerie », énonce StéphanePoumailloux. C’est que le vépéciste neménage pas ses efforts pour ne pasdécevoir ses clientes. « La PAO et lafabrication sont en relation avec l’im-primeur pour que les couleurs soientbien en adéquation avec le réel », illus-tre-t-il. De plus, compte tenu des expli-cations claires sur les tailles de linge delit ou le textile dont la lingerie, leserreurs sont limitées. « En ce quiconcerne la lingerie, les femmes achè-tent en général pour elles-mêmes, doncse trompent peu », explique –t-il. Et deconclure : « Nos marques font ce métierdepuis de nombreuses années. Nousnous considérons comme des profes-sionnels qui donnent de la qualité deservice. C’est une des clefs de notresuccès… » ■ CP