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TABLE DES MATIÈRES Présentation....................................................3 Horaire de la journée...........................................4 Table-ronde du 18 avril.........................................5 Assétou Samaké................................................ 5 Afsar Jafri................................................... 5 Juan Carlos Contreras.........................................5 Colloque : Journée du 19 avril.................................10 Panel 1 « Situation internationale »...........................10 Timothé Feodoroff............................................ 12 Devlin Kuyek................................................. 16 Assétou Samaké............................................... 21 Panel 2 « État de la situation au Canada/Québec »..............25 Jasmine-Bélanger Gulick......................................27 François L’Italien........................................... 29 Panel 3 « Que fait-on? ».......................................31 Pierre Legault............................................... 33 Jocelyn Darou................................................ 35 Initiatives et actions de la société civile..................38 Étude participative sur l’acquisition massive des terres agricoles en Afrique de l’Ouest................................39 Liste de liens.................................................40 Remerciements..................................................41

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TABLE DES MATIÈRES

Présentation...................................................................................................................................3

Horaire de la journée......................................................................................................................4

Table-ronde du 18 avril...................................................................................................................5

Assétou Samaké...........................................................................................................................5

Afsar Jafri.....................................................................................................................................5

Juan Carlos Contreras...................................................................................................................5

Colloque : Journée du 19 avril......................................................................................................10

Panel 1 « Situation internationale ».............................................................................................10

Timothé Feodoroff.......................................................................................................................12

Devlin Kuyek...............................................................................................................................16

Assétou Samaké.........................................................................................................................21

Panel 2 « État de la situation au Canada/Québec »......................................................................25

Jasmine-Bélanger Gulick..............................................................................................................27

François L’Italien.........................................................................................................................29

Panel 3 « Que fait-on? »...............................................................................................................31

Pierre Legault..............................................................................................................................33

Jocelyn Darou.............................................................................................................................35

Initiatives et actions de la société civile...........................................................................................38

Étude participative sur l’acquisition massive des terres agricoles en Afrique de l’Ouest.............39

Liste de liens.................................................................................................................................40

Remerciements.............................................................................................................................41

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Présentation

Depuis une dizaine d’années, et en particulier depuis la crise alimentaire mondiale de 2008, nous

avons assisté à une augmentation importante des acquisitions de terres agricoles à travers le

monde, notamment par des compagnies privées et des fonds souverains. En 2012, le projet Land

Matrix évaluait même à plus de 83 millions d’hectares la surface de terres vendues ou louées

depuis 2000 dans les pays en développement à des fins de production agricole. Plusieurs

organisations et experts se sont donc intéressées récemment à ce phénomène d’acquisition

massive des terres – aussi souvent appelé « accaparement des terres » - et se questionnent sur

les conséquences de ce phénomène pour les communautés locales, la réalisation des droits

humains et l’environnement.

Compte tenu de l’ampleur de ce phénomène, les membres de l’Observatoire sur la souveraineté

alimentaire pensent qu’il est nécessaire d’approfondir la réflexion sur les politiques agricoles

actuelles et sur les pratiques d’acquisition des terres non seulement dans les pays du Sud, mais

aussi dans les pays du Nord comme le Canada. C’est dans ce contexte que l’Observatoire – avec

l’appui de l’ACÉDI et de l’AQOCI - organise un colloque sur les politiques agricoles et

l’accaparement des terres destiné au public canadien francophone.

L’objectif de ce colloque est de réunir des acteurs de la société civile, des producteurs agricoles et

des chercheurs universitaires qui s’intéressent à la question de l’accaparement des terres afin

d’approfondir notre réflexion collective sur cet enjeu et d’identifier des pistes d’action communes

visant l’amélioration des politiques publiques.

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Horaire de la journée« Accaparement des terres, souveraineté alimentaire et politiques publiques :

Comprendre, débattre et agir »Centre Saint Pierre (1212 rue Panet, Montréal) / Salle 304

8h30 – 9h00 Accueil et inscription des participantsDéjeuner servi sur place (croissants, fruits, café et thé)

9h00 – 9h10 Mot de bienvenue et introduction de l’OSA (Hanène Henchiri et Denis Côté)

9h10 – 10h30 Panel 1 « Situation internationale »Avec : Devlin Kuyek (GRAIN), Timothé Féodoroff (Ttransnational Institute), Assétou Samaké (COPAGEN)

Modérateur : Frédéric Paré (Coalition pour la souveraineté alimentaire)

10h30 – 10h40 Pause (café et thé)

10h40 – 12h15 Panel 2 «État de la situation au Canada/Québec»Avec: François L’Italien (Institut de recherche en économie contemporaine), Jamine Bélanger-Gulick (REDTAC)

Modérateur : Paul Cliche

12h15 – 13h15 Dîner servi sur place

13h15 – 14h35 Panel 3 «Que fait-on?»Avec: Me Pierre Legault (Commission de protection du territoire agricole du Québec), Jocelyn Darou (Protec-Terre), Représentants d’initiatives

Modérateur : Diana Bronson (Sécurité alimentaire Canada)

14h35 – 14h40 Pause (café, thé et collation)

14h40 – 15h40 Groupes de discussionGroupe 1 - Les solutions à l'international contre l'accaparementGroupe 2 - Fonds de pension et accaparement des terresGroupe 3 - Protection du territoire agricole québécois - des solutions cibléesGroupe 4 - Un futur agenda de recherchesGroupe 5 - Terres autochtones et ancestrales

15h40 – 16h00 Retour sur les discussions et pistes d’actions

16h00 – 16h30 Conclusion et perspectives

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Table-ronde du 18 avrilTerres à vendre, nouvel eldorado?

Assétou SamakéCOPAGEN, IRPAD

Assétou Founé Samaké est biologiste généticienne de formation. Ses études ont porté sur la biologie des plantes, la génétique des plantes et la biotechnologie dans l’agriculture. Elle enseigne à la Faculté des Sciences et Techniques de l’Université de Bamako, au Mali. Elle est aussi Coordinatrice scientifique de l’Institut de Recherche et de Promotion des Alternatives en Développement (IRPAD). Les semences étant un des piliers de l’agriculture, la question des ressources génétiques et la préservation de la biodiversité reste une de ses préoccupations. Elle est membre du Comité Scientifique de la Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain (COPAGEN), un réseau d’ONG qui mène des activités d’information, de formation et de veille sur le génie génétique, et les implications politiques, économiques, environnementales et sociales liées à l’introduction des OGM dans l’agriculture africaine.

Afsar JafriFocus on the Global South

Afsar Jafri est originaire de l'Inde et a travaillé avec une ONG régionale connue sous le nom de Focus on the Global South depuis 2005. À l'heure actuelle, il coordonne le bureau Focus-India situé à New Delhi. Il détient une maîtrise en philosophie avec spécialisation en droit international de l'Université Jawaharlal Nehru (Delhi) et possède une riche expérience dans le domaine du développement. Au cours des 15 dernières années, Afsar a mené plusieurs recherches et a publié sur divers enjeux politiques liés à l'agriculture et la sécurité alimentaire, à l'agriculture durable, à la biodiversité et aux OGM, au commerce international, aux droits de propriété intellectuelle et à l'eau. Afsar entretient des liens étroits avec les groupes de fermiers situés en Inde et dans la région. Il est également engagé dans plusieurs campagnes contre les OGM et la privatisation à Delhi et Mumbai, sans oublier sa collaboration avec plusieurs groupes travaillant pour la promotion de l'agriculture durable.

Juan Carlos ContrerasCEIBA, Guatemala

Juan Carlos Contreras Leiva est l’un des membres fondateurs de CEIBA, au Guatemala. Juan Carlos a débuté son travail au sein de CEIBA en 1994 en tant que coordonnateur de projets en agriculture et est depuis 2000 l’un des membres de l’équipe de direction. Il détient un diplôme en Technique agricole du “Technical Institute of Agriculture” au Guatemala, un diplôme d’études supérieures en Gestion du développement durable de la « University of the Autonomous Regions » du Nicaragua (2002), ainsi qu’un second diplôme d’études supérieures en Développement international de l’Université d’Alicante en Espagne (2011). Juan Carlos a participé à divers travaux de recherches sur l’agro-écologie et a publié des manuels sur l’agriculture durable pour les communautés du Guatemala, tout en enseignant des cours préunivertaires à l’Université de San Carlos au Guatemala.

Juan Carlos ContrerasCEIBA, Guatemala

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Historique de CEIBA. Depuis sa fondation en 1994, CEIBA (Association pour le développement et promotion communautaire) a soutenu les communautés autochtones au Guatemala, renforçant leur capacité à engendrer des changements sociaux par des initiatives communautaires axées sur l'autonomisation et le développement durable.

Lorsque les accords de paix ont été signés en 1996, mettant officiellement fin à 36 ans de conflit armé interne, CEIBA facilita le retour de la plupart des communautés qui avaient fui au Mexique pour échapper à la violence brutale. Les tactiques de l'armée ont laissé de nombreuses communautés avec des cultures et des maisons entièrement dévastées. CEIBA intervenait pour aider les communautés à se construire une nouvelle vie.

Plusieurs de ces mêmes communautés sont désormais confrontées à des menaces d’extraction des ressources à grande échelle sur leur territoire. Au cours des six dernières années, CEIBA a aidé à organiser plus de 60 consultations communautaires au Guatemala dans lesquelles près d'un million de personnes ont voté contre la présence de l'industrie minière transnationale et les entreprises hydroélectriques. À la suite de ces consultations communautaires, des zones entières du Guatemala ont été protégées contre « l’exploitation minière » et sont désormais vouées à l’agriculture biologique à petite échelle, la souveraineté alimentaire et le développement communautaire.

CEIBA travaille avec 155 communautés au sein de 5 départements à travers le Guatemala, en fournissant l'appui technique, politique et social que de nombreuses collectivités réclament pour survivre et prospérer. CEIBA met l'accent sur: 1) le renforcement de l'organisation communautaire et l’autonomisation de la vie sociale, politique, économique, culturelle; 2) la souveraineté alimentaire; 3) la défense du territoire indigène et la protection de l'environnement et de la terre; et 4) le développement de dirigeants locaux. Les projets de CEIBA sont extrêmement diversifiés allant du soutien des petits agriculteurs de la côte atlantique qui sont en transition vers une production alimentaire plus durable jusqu’à l’accompagnement des processus de consultations communautaires sur les hauts plateaux et l'autonomisation des groupes de femmes dans le centre du Guatemala.

L’accaparement des terres au Guatemala

Sur l’accaparement des terres au Guatemala, il y en a long à dire, comme on dit chez nous. Le problème remonte à l’époque de la conquête et de la colonisation espagnole. Cette période a jeté les bases d’un Guatemala aux prises avec les pires coefficients de Gini, une répartition des ressources déficiente et des structures agraires parmi les plus mal en point d’Amérique latine. Tout cela a commencé avec la formation des latifundios (grands domaines terriens) ; à cette époque, cela s’appelait les encomiendas, soit un système de distribution des terres et des « Indiens », comme on les appelait à l’époque (NB le mot a une connotation très forte, qui peut encore offenser certaines personnes au Guatemala). L’encomienda de l’église servit de prétexte ou de justification à la mise en place de ce système.

La colonisation espagnole a mis en place les bases et établi les lois qui ont conduit à une concentration des terres entre les mains de ceux qui détiennent le pouvoir économique, social et politique. Beaucoup de criollos (enfants des colonisateurs, mais nés au pays) utilisaient même des artifices pour se soustraire aux lois votées par la Couronne d’Espagne et pour s’emparer des terres et des Indiens. Nous pouvons notamment le voir à travers les chroniques de Fuentes et les Souvenirs de la Floride de Guzman, et lors de l’expansion de la « Patrie du Criollo » de S. Martinez Pelaez. Les tactiques utilisées aujourd’hui pour l’accaparement des terres, que ce soit la

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corruption, l’abus de pouvoir et le trafic d’influence, sont donc aussi vieilles que la colonie elle-même, sinon plus vieilles encore.

Par ailleurs, si l’époque de la colonisation a favorisé l’accaparement des terres, ni l’indépendance, ni la réforme libérale n’ont changé la structure agraire du Guatemala ou les rapports de discrimination et d’oppression des groupes autochtones mayas, des Xinca d’origine africaine ou des métis. L’époque de l’indépendance et de la réforme libérale a plutôt prolongé ce mode de répartition des terres, entre autres parce que la législation mise en place par le président Justo Rufino Barrios, à travers un accord avec l’Allemagne, a favorisé l’entrée d’immigrants pour la culture extensive du café. Ces immigrants avaient par ailleurs accès à une main-d’œuvre autochtone gratuite. Cette structure législative est restée jusqu’en 1930 lorsque le président d’origine allemande Jorge Ubico a pris le pouvoir, lui-même ayant en sa possession une bonne quantité de terres dans l’Est du pays (départements de Coban, Baja Verapaz, Jalapa et Izabal). L’idéologie d’Ubico et ses aspirations économiques et sociales ne différaient pas de celles des criollos espagnols, ce qui a mené à une plus grande discrimination raciale envers les autochtones. Ubico a changé les modalités du « travail gratuit » en instaurant une « loi contre le vagabondage ». Le vagabondage s’appliquait davantage à certains : contrairement à ce que l’on pourrait croire, non pas à de quelconques délinquants trainant dans les rues mais plus particulièrement aux Indiens qui n’accomplissaient pas leurs 15 jours mensuels de travail gratuit dans les exploitations agricoles (de sucre ou de café pour la majorité).

Comme on peut le voir, la concentration des terres est un fait socio-économique et politique dont l’origine remonte à la colonisation espagnole, mais qui, de plus, est associée à une discrimination raciale, à de la corruption et à une concentration du pouvoir qui a profondément marqué le pays.

Durant l’époque moderne, un autre fait important concernant l’accaparement des terres au Guatemala est la Réforme agraire implantée par le gouvernement de Jacobo Arbens Guzmán dans les années 1950. Il existait déjà des problèmes profonds de distribution territoriale, d’abord parce que la population paysanne et indigène ne possédait que des petites zones de production agricole, et ce, dans les régions les plus arides des montagnes. D’autre part, parce que les grandes propriétés terriennes étaient en grande partie inutilisées par les latifundistas. Cela a motivé une réforme agraire basée sur l’expropriation et la répartition des terres inutilisées, les parcelles étant divisées par unités standards de 10 manzanas1 et accompagnées d’un soutien au crédit et de conseils techniques. Toutefois, l’initiative a été tuée dans l’œuf en 1954 par « l’Opération Condor », qui était appelée localement le « mouvement de libération nationale », en allusion à la lutte contre le communisme qui progressait en cette ère de Guerre Froide. Les terres ont alors été retournées à leurs anciens propriétaires et s’en est suivie une situation économique qui a perpétué la pauvreté du Guatemala, laissant la place à une autre étape dans l’histoire du pays, « la dictature militaire et la guerre interne ».

Le mouvement de libération nationale a donné lieu à des dictatures militaires de 1954 à 1986, durant lesquelles les gouvernements ont initié une transition à des gouvernements civils et supposément « démocratiques ». Supposément, parce que l’armée guatémaltèque a en réalité continué de co-gouverner aux côtés des premiers gouvernements civils, faisant du projet national à long terme un projet politique et militaire, qui est aujourd’hui mis en œuvre par le président. De plus, l’accaparement et la concentration des terres sont liés au climat de corruption qui régnait dans le gouvernement militaire, aux faibles structures gouvernementales, au réputé Institut pour la Transformation agraire (INTA), aux registres de propriétés et au système juridique en place. Des

1 Manzanas: unité de mesure de superficie. Un manzana équivaut approximativement à 6,961 m2 (varie selon les pays).

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terres vierges existent encore dans des régions comme Ixcan (centre-nord) et Petén (nord), plus connues sous le nom de terres « el generalato », c’est-à-dire appartenant aux dirigeants militaires. Des membres du gouvernement se répartissent ces terres et facilitent la perquisition illégale pour des anciens propriétaires fonciers et des membres de la nouvelle bourgeoisie, dans une forme claire de clientélisme. Les pratiques auxquelles je fais référence ont déjà été mentionnées, et les perdants demeurent les peuples indigènes et les paysans.

La guerre marque aussi une nouvelle problématique concernant la propriété et la légitimité de la possession de terres. Durant les combats, environ 200 000 personnes ont trouvé refuge au Mexique, alors l’armée a offert leurs terres aux paysans alliés du régime, notamment aux chefs de patrouille de défense civile (PAC). Au final, plusieurs familles rapatriées par la suite grâce au soutien de l’ACNHUR ont constaté que leur maison et leur terre étaient occupées par d’autres.

La dernière étape liée à l’accaparement des terres est l’époque néolibérale, qui commence au Guatemala avec la signature du traité de paix en 1996. Cette époque représente de nouvelles formes d’accaparement des terres, mais toujours avec les mêmes méthodes anciennes, combinées à des formes modernes de « changement de mains » ou de « changement de propriétaire ».

Il y a encore aujourd’hui de multiples formes illégales d’acquisition des terres; il y en a des exemples aux quatre coins du pays. Pour n’en citer qu’un, il y a trois semaines, quatre personnes ont été kidnappées. Le lendemain, un de ces hommes a été assassiné et deux se sont échappés. Il ne s’agissait clairement pas de violence « ordinaire », mais de violence politique et économique; les dirigeants politiques et économiques enlevés étant des représentants du parlement « Xinca », un groupe indigène, frère du peuple maya, minoritaire et qui a une population d’environ 150 000 personnes. Le conflit a débuté lorsqu’une compagnie minière, Tahoe Resources, a revendiqué la légitimité juridique d’une superficie de terres appartenant au parlement Xinca depuis 1700, selon un acte de propriété signé par la Couronne d’Espagne elle-même. La requête de Tahoe resources a été soutenue par un système juridique historiquement corrompu, par l’achat des politiciens pour éviter la justice, par la promotion de l’impunité afin de faciliter les termes juridiques pour les grands capitalistes étrangers et pour les grands propriétaires locaux, eux-mêmes descendants des anciens propriétaires coloniaux.

Durant l’ère néolibérale et de post-signature du traité de paix, l’accaparement des terres a été lié à l’augmentation du revenu de l’industrie extractive des métaux, du pétrole, des projets hydroélectriques et à la production de bio-carburants, d'huile de palme, d’alcool et d'huile de pignon pour la production de canne à sucre. Ces projets ont généré des conflits sociaux, de la criminalité, la persécution de peuples autochtones et des paysans, comme ce fut le cas pour le parlement Xinca. De plus, ces industries ont augmenté les épidémies de famine, puisqu’elles se sont substituées aux productions des champs de maïs, l’aliment de base guatémaltèque. Ces industries auraient également accéléré la production de dioxyde de carbone, associé au réchauffement climatique, car la région de Petén est une des grandes forêts vierges restantes dans le monde, donc une importante région productrice d’oxygène.

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Colloque : Journée du 19 avril

Panel 1 « Situation internationale »

Timothé Féodorof (TNI) Devlin Kuyek (GRAIN)

Dr. Assetou Samake (COPAGEN – IRPAD)

Le panel «Situation internationale» vise à donner la parole aux chercheurs et gens de terrain qui s’intéressent à la question de l’acquisition massive de terres dans différentes régions du globe pour nous présenter un portrait de la situation à l’international ainsi qu’un état de l’avancée des recherches et de la littérature française en la matière.

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Timothé FeodoroffChecheur à l’Agrarian Justice Programme, Transnational Institute (TNI)

Timothé travaille sur les questions liées à l'accaparement des terres et de l'eau au sein de l'équipe Justice Agraire du Transnational Institute (TNI). TNI est un organisme de recherche activiste et de conseil à cheval entre milieux académiques et militants. Dans le contexte de la ruée mondiale vers les terres agricoles et de la vague d'enclosure conduite par les projets agro-industriels, le programme Justice Agraire vise à contribuer au renforcement des campagnes par les mouvements sociaux agraires afin de les rendre plus efficace contre l'accaparement des terres.

Devlin KuyekChercheur, GRAIN

Devlin détient une maîtrise en sciences de l'environnement de l'Université du Québec à Montréal. Il a rejoint GRAIN en 2003, après avoir travaillé avec des ONG et des mouvements paysans en Malaisie et aux Philippines. Devlin est le chercheur le plus actif de GRAIN : il suit et analyse l’évolution de l’agrobusiness, en particulier l’accaparement mondial des terres. Il est l’auteur de The Real Board of Directors: The construction of biotechnology policy in Canada , et Good Crop/Bad Crop: Seed Politics and the Future of Food in Canada.

Assétou SamakéCOPAGEN, IRPAD

Assétou Founé Samaké est biologiste généticienne de formation. Ses études ont porté sur la biologie des plantes, la génétique des plantes et la biotechnologie dans l’agriculture. Elle enseigne à la Faculté des Sciences et Techniques de l’Université de Bamako, Mali. Elle est aussi Coordinatrice scientifique de l’Institut de Recherche et de Promotion des Alternatives en Développement (IRPAD). Les semences étant un des piliers de l’agriculture, la question des ressources génétiques et la préservation de la biodiversité reste une de ses préoccupations. Elle est membre du Comité Scientifique de la Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain (COPAGEN), un réseau d’ONG qui mène des activités d’information, de formation et de veille sur le génie génétique, et les implications politiques, économiques, environnementales et sociales liées à l’introduction des OGM dans l’agriculture africaine.

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Timothé FeodoroffChecheur à l’Agrarian Justice Programme, Transnational Institute (TNI)

Qu’est-ce que l’accaparement des terres? Émergeant sur la scène internationale aux alentours de 2007-2008, l’expression « accaparement des terres » est rapidement devenue un fourre-tout pour décrire et analyser l'explosion actuelle des transactions foncières commerciales (trans)nationales liées à la production et à la vente d'aliments et de biocarburants. Initialement lancée et popularisée par les groupes d’activistes opposés à ces transactions, la compréhension et conceptualisation de la notion – entre interprétations trop étroites ou trop larges – s’est vue récupérée et contestée par différents groupes d’acteurs, obscurcissant plus que clarifiant le tableau. En l’absence de consensus, une approche alternative cherchant davantage à analyser les principales caractéristiques de l’accaparement des terres qu’à se concentrer sur une définition statique devient donc d’autant plus pertinente pour éclaircir ce qui se passe véritablement.

Ainsi, de cette perspective, l’accaparement des terres réfère essentiellement à un « accaparement du contrôle », c’est-à-dire ayant pour enjeu la double capture du pouvoir de contrôler physiquement la terre et autres ressources naturelles associées telles que l’eau, le sous-sol, etc. avec les bénéfices liés à leurs utilisations ainsi que celui de contrôler le pouvoir de décider comment et à quelles fins ces ressources peuvent être utilisées dans le présent et le futur. En d’autres termes, le projet « d’établir ou consolider les formes d’accès à la richesse foncière ». Cette analyse articule l’accaparement des terres autour de trois traits.

Cette approche souligne tout d’abord l’importance de l’aspect « capture du contrôle » de la terre et de son utilisation davantage que la spoliation lors des modalités du processus d’échange de la propriété foncière. Ensuite, c’est un phénomène qui s’entend en termes de superficies saisies mais surtout de volume de capitaux concernés, étant donné que le même investissement peut servir à 500 ha de vineries, 50 000 ha de soja ou 500 000 ha de bétail. Enfin, il doit être compris au regard du pouvoir, des dynamiques et des stratégies d’accumulation du capital national et transnational dans le contexte général des multiples crises.

Comment se manifeste cette mainmise et où se produit-elle? L’ampleur de l’accaparement est globale, et ce dernier se manifeste sous une multitude de formes. En premier lieu, à travers différents contextes agro-écologiques (plaines fertiles, zones forestières montagneuses, etc.) Notez bien que, contrairement à ce qui est dépeint par les partisans des acquisitions foncières à grande échelle, ce sont rarement les terres marginales dégradées et sous utilisées qui sont acquises. Ensuite, il se développe sans regard des régimes fonciers (privés, publics, communaux, et autres) ainsi que sous des formes (achat, location à long terme, cultures contractuelles) et conditions politico-juridiques (« parfaitement légaux », illégaux ou entre les deux) variées. Enfin, plusieurs trajectoires autour de l’usage des terres sont observées (alimentation humaine et animale, énergie, urbanisation, etc.).

Malgré « l’africanisation » du débat, bien que l’Afrique est certainement un point névralgique, force est de constater que le phénomène survient virtuellement partout : en Amérique du Sud et Centrale, à travers toute l’Asie du Sud et Sud-Est et dans de nombreuses régions du Nord, en particulier l’ex-Eurasie soviétique.

Comment s’explique le regain d’intérêt dans les acquisitions foncières? Bien que portée sous les feux de la rampe médiatique lors de la flambée mondiale des prix alimentaires, contexte dans lequel certains pays comme l’Arabie Saoudite ou la Corée du Sud réalisaient l’acquisition de terres

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en Éthiopie ou Madagascar pour sécuriser leurs propres réserves alimentaires, une compréhension de l’accaparement des terres seulement en ces termes serait limitée. Le phénomène en soit n’est pas nouveau et la vague actuelle est à percevoir comme la manifestation d’un cycle neuf, aux ramifications diverses.

Ce cycle prend ses racines plus généralement dans le cadre de la convergence des multiples crises alimentaires, énergétiques, financières et climatiques. Face aux difficultés à engendrer les profits, alors même que l’accumulation continuelle demeure la clé de voûte du système, le regain d’intérêt dans le foncier s’explique par la facilité d’une appropriation à faible coût de la terre et des grands bénéfices engendrés lors de la capitalisation de sa reproduction. Les différentes crises fournissent aussi les mécanismes qui permettent l’accaparement des terres : justifications de la mainmise au nom de la sécurité alimentaire (agriculture à large échelle pour nourrir le monde), énergétique (biocarburants comme énergie renouvelable) et la mitigation des changements climatiques (accaparement dit environnemental).

Le contexte décisif à ces mécanismes est la restructuration systémique en cours des relations et règles internationales qui régissent la production, distribution et consommation alimentaire ou produits connexes. Ces relations s’articulent de plus en plus autour d’un régime axé sur l’émergence d’un complexe agro-industriel à forte intensité capitalistique mus par les profits et contrôlé par les corporations, dans lequel les cultures et arbres « flexibles » prennent une importance croissante. Les cultures dites flexibles sont celles dont la récolte peut avoir de multiples usages (alimentation humaine, animale, carburant, matière première industrielle, etc.) facilement interchangeables. En outre, ce nouveau régime, dépeint comme « polycentrique », se caractérise par la réorganisation des principaux centres mondiaux de capitaux ainsi que la redistribution du pouvoir politique au profit d’acteurs qui montent en puissance.

Quels sont les acteurs impliqués? Transcendant la simple logique d’exploitation Nord-Sud, cette vague d’accaparement voit l’implication d’une vaste gamme d’acteurs. Tout d’abord, en termes géopolitiques, les puissants pays du BRICS ou à revenus intermédiaires du Sud qui prennent une place grandissante dans le nouveau régime agroalimentaire polycentrique sont à considérer comme jouant un rôle inter mais surtout intra-régional primordial. Aussi, les actions et politiques des États en terme de gouvernance foncière, du Nord comme du Sud, interagissent directement ou indirectement avec l’accaparement des terres de multiples manières, souvent sous-estimées.

Ensuite, rentrent aussi en jeu divers élites, locales ou nationales/domestiques ou étrangères/gouvernementales ou privées. Les investisseurs sont eux aussi marqués par la diversité, et déjà des institutions de financement du développement, des fonds (souverain, de pension, de placement), des corporations de l’agro-alimentaire et grands propriétaires terriens individuels pour n’en nommer que quelque uns ont été identifié comme participant à l’accaparement.

Quels sont les impacts de l’accaparement? La recherche universitaire et militante suggère que de manière générale les impacts sur les communautés rurales pauvres et les écosystèmes ont été largement négatifs jusqu’à présent. Premièrement, les accaparements se traduisent en termes d’expulsion et de dépossession, principalement dans le cas de monocultures industrialisées à grande échelle, lorsque les terres des communautés locales sont nécessaires mais pas leur présence ou travail. Deuxièmement, quand à la fois terre et main d’œuvre (à bas prix) sont indispensables, tel que dans les plantations de canne à sucres, d’arbres etc., alors les communautés voient leur « incorporation adverse » dans le projet en développement.

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Il convient cependant de souligner la variabilité des conséquences. Lorsqu’un accaparement frappe une communauté, il entraîne un large éventail de réactions politiques au sein de et entre communautés, en raison de la diversité des expériences vécues. Les communautés sont « socialement différenciées », tous les membres ne partagent pas la même réalité et pouvoir – d’où la multiplicité des conséquences.

Peut-on penser des acquisitions gagnantes–gagnantes? Bien que de nombreux partisans insistent sur le fait que les transactions foncières à grande échelle peuvent bénéficier aux populations locales, peu ou prou d’évidences concrètes sont venues étayer ces allégations maintenant remises en question par la majorité de la recherche universitaire; le fardeau de la preuve incombe à ceux prétendant que l’accaparement apporte des changements positifs.

Ces scénarios « mutuellement gagnants » sont un mythe élusif utilisés comme assomption fondamentale par les diverses tendances politiques qui s’en servent pour promouvoir un contexte facilitant ou régulant afin de soi-disant atténuer les impacts négatifs et maximiser les opportunités lors d’acquisition de terres. Ils se présentent comme une diversion lorsque la résistance devrait se concentrer sur arrêter et faire reculer l’accaparement des terres.

Quelles pistes d’actions pour l’avenir? Comme l’analyse du caractère, acteurs impliqués et impacts brièvement esquissés l’illustre, l’accaparement des terres est un tableau complexe pour lequel il n’y a pas de recette magique ou d’approche universelle pour construire des instruments de gouvernance du phénomène. Néanmoins, la direction d’une solution véritable à l’accaparement mondial des terres doit remettre en cause ses origines fondamentales : les structures politico-économiques d’un régime agroalimentaire industriel de production et de consommation contrôlé par les corporations transnationales.

Ensuite, afin de réellement prioriser des objectifs pro-pauvres dans les transactions, il faudrait adopter une approche des politiques foncières pour la responsabilité de la gestion des territoires articulée sérieusement autour des droits de l'homme, des droits à l'alimentation et des droits à la terre. Au lieu de l’appel classique à la gouvernance ou à la sécurité foncière, il est nécessaire de prendre un cadre de référence partant de la complexité des relations sociales liées à la terre, mettant l'accent sur l'accès effectif aux terres et le contrôle sur leurs utilisations par les populations rurales pauvres. Un tel cadre conceptuel s’incarne dans la notion sœur de la souveraineté alimentaire, celle de « souveraineté foncière », c’est-à-dire le droit des travailleurs d’avoir un accès effectif à une utilisation de la terre et un contrôle sur celle-ci ainsi qu’aux bénéfices associés à son emploi et occupation, avec la terre définie comme ressource, territoire et paysage.

Que suggérer pour des investissements dans l’agriculture et le foncier bénéficiant aux agriculteurs? Dans la lignée de cette approche alternative, il faut aussi un autre point de départ autour de la question de l’investissement. Parce que l’insécurité alimentaire prend davantage ses racines dans l’asymétrie du pouvoir au sein du système alimentaire mondial que dans une question technique de production insuffisante, cela nécessite un changement de paradigme; non pas opposant l’investissement dans l’agriculture, mais le refaçonnant, afin qu’il serve un développement rural durable et réellement en faveur des plus pauvres. En vertu de quoi, il y a de nombreuses opportunités pour des modèles alternatifs d’investissements centrés sur la petite agriculture, les exploitations agro-écologiques, la relocalisation des systèmes alimentaire, un rôle accru pour les investissements publics, et autres opportunités.

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Devlin KuyekChercheur, GRAIN

Les nouveaux propriétaires agricoles: l’accaparement des terres et la nouvelle ruée vers l’agriculture industrielle.

par GRAIN2

Les deux grandes crises mondiales qui sont survenu en 2008 – la vaste crise financière et la crise alimentaire mondiale qui en a fait partie - ont engendré une nouvelle tendance inquiétante : l’acquisition de terres pour la production alimentaire externe. On estime actuellement qu’entre 60 et 80 millions d’hectares ont été acquis dans les cinq dernières années par des investisseurs étrangers pour la production alimentaire, ce qui équivaut à environ la moitié des terres agricoles des États-Unis.

Au tout début, on négociait l’acquisition de ces terres pour assurer sa « sécurité alimentaire ». Les fonctionnaires des États du Golfe survolaient le globe à la recherche de grands espaces de terres cultivables qu’ils pourraient acquérir pour faire pousser le riz qui servirait à nourrir leur population grandissante sans dépendre du commerce international. Tout comme l’ont fait les Coréens, les Libyens, les Égyptiens et bien d’autres. Dans la majorité de ces négociations, de hauts-fonctionnaires étatiques étaient directement impliqués, colportant un nouvel ensemble d’accords de coopération politique, économique et financière, accords intégrant toujours des transactions de terres agricoles. Puis, vers juillet 2008, la crise financière s’est aggravée, et au côté des États accapareurs de terres pour assurer leur sécurité alimentaire, un autre groupe d’investisseurs commença à acquérir des terres agricoles dans les pays du Sud: fonds d’investissement, fonds communs de placements, courtiers en valeurs mobilières et autres, plusieurs d’entre eux se trouvant aux États-Unis. La sécurité alimentaire ne faisait pas partie de leur préoccupation. Ils ont plutôt pressenti qu’avec la population mondiale croissante, le prix des denrées alimentaires destiné à rester élevé à long terme, et le prix plus qu’abordable des terres agricoles, il y avait en agriculture de l’argent à faire. Avec l’ajout d’un tant soit peu de technologie et de compétences en gestion à ces exploitations agricoles, ils diversifieraient ainsi leur portefeuille, constituant une couverture contre l’inflation et une garantie de retour – tant des récoltes que de la terre elle-même.

La vitesse et l’étendue de leur appétit est remarquable – mais n’a rien de surprenant, vue la difficulté à se remettre de la crise financière. L’un des spécialistes en la matière, High Quest Partners, estime que les investisseurs privés ont déjà injecté entre 100 et 140 milliards US dans l’acquisition de terres agricoles à travers le monde.

Le portrait global. En février 2012, GRAIN a publié une base de données documentant 416 acquisitions massives de terres par des investisseurs étrangers destinées à la culture vivrière qui ont eu lieu depuis 2006. Les cas répertoriés couvrent près de 35 millions d’hectares de terre dans 66 pays et ne tiennent compte que des transactions qui n’ont pas été annulées, qui impliquent principalement des investisseurs étrangers, qui sont destinées à l’achat de terre pour la culture

2 Chapitre basé en grande partie sur les rapports complets produits par GRAIN dans les dernières années, notamment: “The new farm owners: corporate investors lead the rush for control over overseas farmland”, GRAIN, 20 November 2010. “Time to recall the land grabbers” GRAIN RLA acceptance speech, 5 December 2011, et “Squeezing Africa dry: behind every land grab is a water grab”, GRAIN, 11 June 2012. Aussi disponibles au www.grain.org

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vivrière, et qui impliquent de grandes superficies de terre. Les transactions impliquant la production de canne à sucre et d’huile palme ont été pris en compte; celles impliquant les cultures de Jatropha et de coton ne l’on pas été. C’est la cinquième base de données portant sur les transactions de terres publié par GRAIN, base faisant suite à la publication d’un premier portrait de l’accaparement des terres agricoles en 2008, d’un portrait des investisseurs en terres agricoles du secteur financier en 2009, d’un portrait des fonds de pension investissant dans les terres agricoles en 2011 et d’un tableau présentant l’étendu des acquisitions de terres par des étrangers à travers le monde en 2011.3

Ces données fournissent un portrait instantané de la vitesse à laquelle l’agro-industrie a pris de l’expansion à travers le monde depuis les crises financières et alimentaires de 2008 et de la façon dont cette croissance rapide dépossède les agriculteurs et les communautés locales de la production alimentaire. Les données de 2012 confirment que l’Afrique est la principale cible de l’accaparement des terres, mais soulignent tout de même l’importance de l’Amérique Latine, de l’Asie et de l’Europe de l’Est, démontrant l’aspect mondial du phénomène. Ils mettent aussi en lumière la nature des accapareurs. Bien que l’on ait porté une attention particulière sur les visées de certains gouvernements d’accaparer des terres hors-frontière pour assurer leur sécurité alimentaire, ceux qui accaparent réellement les terres et créent de nouvelles entreprises agricoles sont les entreprises privées, dont plusieurs provenant du secteur financier.

La plupart des 298 accapareurs de terre documentés dans la base de données de GRAIN sont issus du secteur du commerce agricole, mais les corporations financières et les fonds souverains sont responsables d’environ le tiers des ententes. Dans plusieurs cas, il y a chevauchement entre ces différentes parties. Par exemple, la base de données démontre comment Cargil, l’une des plus importantes firmes agro-industrielles au monde, s’accapare des centaines de milliers d’hectares de terres agricoles par le biais de son fonds d’investissement spéculatif Black River Asset Management. Les investisseurs basés en Europe et en Asie constituent environ les deux tiers des accaparements selon la base de données. La Chine et l’Inde sont des accapareurs majeurs, ainsi que le Royaume-Uni et l’Allemagne. Cependant le Royaume-Uni, comme Singapour et Maurice, agit comme paradis fiscal pour les accapareurs, et souvent les lieux réels d’opération des firmes se situent ailleurs. D’autres centres importants d’accapareurs sont les États-Unis, qui se retrouvent en chef de file avec 41 cas, et les Émirats Arabes Unis et l’Arabie Saoudite qui se partage 39 cas.

GRAIN ainsi que d’autres organisations et chercheurs insistent sur le fait que l’accaparement de terres inclut la notion de l’accaparement de l’eau. Une étude récente publiée par l’Académie nationale des Sciences des États-Unis, basée sur la base de données de GRAIN de 2012 et la base de données de Land Matrix, estime que l’accaparement de terres est associé avec l’accaparement de 308 milliards de m3 d’eau verte (eau de pluie) et 146 milliards de m3 d’eau bleu (eau irriguée des lacs et rivières) par année4. Pour conceptualiser ces données, la FAO a calculé que les besoins actuels d’irrigation des 10 pays du bassin du Nil déjà fortement sollicité - soutenant environ 250 millions de gens - sont aux alentours de 124 milliards m35. Donc, en tenant compte

3 La base de données de 2012 est disponible au: http://www.grain.org/e/4479. Les autres bases de données sont disponibles au: http://www.grain.org/e/4429

4 Maria Christina Rulli et. al. “Global land and water grabbing”: http://www.pnas.org/content/early/2013/01/02/1213163110. Voir aussi: Jalees Rehman, “A Parched Future: Global Land and Water Grabbing,” 3Quarksdaily, January 07, 2013: http://www.3quarksdaily.com/3quarksdaily/2013/01/a-parched-future-global-land-and-water-grabbing.html#more5 FAO, “Irrigation potential in Africa: A basin approach”, 1997.

http://www.fao.org/docrep/w4347e/w4347e0k.htm#the%20nile%20basin

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uniquement de la question de l’irrigation, la vague mondiale actuelle d’accaparement de terres équivaut à assécher entièrement le bassin du Nil - et plus encore. Toutes les transactions foncières en Afrique incluent des exploitations agricoles industrielles à grande échelle consommant de grandes quantités d'eau. La quasi-totalité d'entre elles sont situées dans les principaux bassins fluviaux et ont ainsi accès à l’irrigation. Elles occupent des zones humides fertiles et fragiles ou bien se situent dans des zones plus arides mais pouvant puiser l’eau de grandes rivières. Dans certains cas, les fermes accèdent à l’eau souterraine par pompage. Ces ressources en eau sont aussi vitales pour les fermiers locaux, les éleveurs et autres communautés rurales, et la récente vague d'accaparement des terres menace clairement leur accès continu à ces ressources.

Prenant exemple sur le bassin du Nil, la FAO a établi à 8 millions d'hectares comme «valeur maximale» totale disponible pour l'irrigation dans les dix pays du bassin du Nil. Toutefois, quatre de ces dix pays ont déjà des infrastructures d'irrigation pour 5,4 millions d'hectares et ont loué 8,6 millions d'hectares de terres. Cela nécessiterait beaucoup plus d'eau que ce qui est disponible dans l'ensemble du bassin du Nil et équivaudrait à rien de moins qu'un suicide hydrologique.

Alors que les mouvements sociaux tentent d'arrêter les accaparements de terres, les agences internationales et les entreprises privées, de la Banque mondiale aux fonds de pension, proposent à la place de réglementer les accaparements de terres par la création de codes et de normes. L'idée est de distinguer les transactions foncières qui répondent à des critères particuliers et qui devraient être nommées «investissements» de ceux qui ne le font pas et qui peuvent continuer à être stigmatisées comme des terres «volées»6.

L'envie actuelle de réglementer ces transactions se limite à des mots, plus précisément dans le but de différencier « l'accaparement des terres » de « l'investissement » de manière à établir non seulement la légalité de ces transactions foncières à grande échelle, mais une légitimité aussi. Un représentant des principes pour l’investissement responsable des Nations unies informait GRAIN que « Beaucoup de nos signataires ne comprennent pas les discours sur l'accaparement des terres ». Pour les investisseurs, il ne peut y avoir de l’accaparement des terres si les lois sont respectées et les contrats sont signés. Ils ne considèrent peut-être pas que le terme réfère à un problème politique où les intérêts, droits, positions ou opinions des gens sont mis de côté, peu importe si le processus de négociation ou accord final puisse paraître juridique ou consultatif. Par exemple, une corporation peut consulter le chef de village ou de communauté, mais ce dernier ne représente pas nécessairement les intérêts des femmes et des enfants dans la communauté.

Il y a de plus une injustice inhérente d’un point de vue temporel. Plusieurs de ces transactions foncières sont conclues pour une très longue période de temps, changeant ainsi le destin de plusieurs générations à venir de la communauté, parfois même jusqu’à trois. Toutes transactions qui attachent de larges zones de terre en milieu rural aux objectifs d’un étranger pour 30, 50 ou 99 ans dépossèdent ces terres, non seulement de bien des gens, mais de bien des usages possibles. De plus, bien que le secteur privé tente de distinguer les transactions transparentes de celles moins respectables, plusieurs de ces transactions foncières ne sont pas des investissements et ne méritent pas le terme d’« investissement », peu importe leur transparence, leur degré de responsabilité ou de bonne foi. Bien souvent les transactions sont de nature spéculative; les terres ne sont ni développées ni exploitées mais simplement retournées après un certain nombre d’année.

6 Pour une discussion plus en profondeur voir: GRAIN, "Responsible farmland investing? Current efforts to regulate land grabs will make things worse," 22 August 2012: http://www.grain.org/e/4564

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D’autres transactions ont pour objectifs la recherche de profits ou la rentabilité. Le but dans ces cas particuliers est de retirer un revenu de la location, sans toutefois viser le développement des capacités productives de la terre et d’accroitre le bien-être des communautés, ce qui implique souvent des coûts supplémentaires. Si le modèle d’affaires se base sur la maximisation des profits, s’ensuit inévitablement une baisse maximale des coûts – incluant les salaires, les frais reliés à l’utilisation de la terre et de l’eau, etc. On ne peut définitivement pas qualifier ces transactions d’investissements, du moins sous aucune forme socialement positive.

Le problème fondamental avec les tentatives de mettre en œuvre des règles entourant l’investissement responsable dans les terres agricoles est que ces règles sont toujours orientées vers la réussite du projet pour les investisseurs. Les communautés locales, les sols, les bassins versants, les marchés du travail locaux et même la situation de la sécurité alimentaire nationale sont considérés comme des facteurs de risque qui doivent être atténués. L’objectif est de gérer les coûts, incluant les risques liés à la réputation, pour assurer un retour acceptable. Les règles des investissements responsables en terres agricoles sont élaborées en fonction de l’investisseur, pour qui prendre en compte les répercussions pour les communautés locales devient un autre des coûts découlant des affaires – un coût dont les entreprises peuvent même tirer profits. La crédibilité de l’« investissement socialement responsable » dans les terres agricoles à l’international est au mieux très chancelante. Ses détracteurs semblent se référer à un monde bien à eux, sans être réellement au fait des vrais impacts. C’est sans surprise. D’autres secteurs où le concept a été essayé – coton durable, soja durable, pratiques responsables en matière de production d'huile de palme, de bois, d’offre de produits bancaires et bien d’autres – ont un bilan des plus mitigé.

On ne réglemente pas l’esclavage, on le proscrit. De la même manière, toute tentative sérieuse de combattre la faim et la pauvreté requiert de garantir aux populations le contrôle de leurs terres et de leur territoire, et non de fournir des directives et règlements sur la façon dont les grandes sociétés et les investisseurs étrangers peuvent d’une façon ou d’une autre bien le faire à la place des populations. Ce dont nous avons besoin, ce ne sont pas des investissements responsables dans les terres agricoles mais un désinvestissement. En d’autres termes, au lieu de tenter de faire fonctionner cette nouvelle tendance à financiariser les terres agricoles, il faut arrêter et annuler ces transactions, et restituer les terres aux communautés qui en vivent. Et au lieu de promouvoir l’expansion de l’agriculture industrielle, nous devons renforcer les approches communautaires et familiales de souveraineté alimentaire, et ce à travers le monde. Certaines initiatives sont prises actuellement en ce sens, visant à étouffer les flux de capitaux vers les sociétés avec des antécédents d’accaparement de terres ou les fonds spécialement créés pour brader les droits des terres agricoles ; des initiatives soutenue par un travail de plaidoyer et une pression politique pour appuyer l’agriculture familiale à petite échelle et les marchés locaux. Bien que ce soit un combat à la fois d’ampleur et ardue, il est évident que nous devons arrêter de financer l’accaparement de terres, non pas de rendre sa financiarisation plus responsable.

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Assétou SamakéCOPAGEN, IRPAD

« Grandes tendances se dégageant de la recherche - Phase exploratoire sur les acquisitions massives des terres en Afrique de l’Ouest et leurs impacts sur la souveraineté alimentaire et les moyens d’existence des exploitations familiales »7, est le fruit de collaborations entre la COPAGEN, le REDTAC et Inter Pares et subventionnée par le CRDI.

Nous constatons, depuis quelques années, une montée de l’intérêt pour le phénomène de l’acquisition des terres dans les pays du sud. Bien que les régions du sud de l’Asie, de l’Amérique latine, de l’Afrique centrale et de l’est soient relativement bien étudiées, il semble que l’Afrique de l’Ouest soit quelque peu oubliée (du moins, plusieurs pays de cette région). Est-ce parce que ce phénomène est de moindre envergure sur cette partie du continent? Le présent inventaire des acquisitions est la première étape d’une étude participative sur les acquisitions massives de terres agricoles en Afrique de l’Ouest et leurs impacts sur l’agriculture familiale et la sécurité alimentaire des populations locales. Nos questions de recherche sont au nombre de cinq ; 1) Quelle est l’ampleur du phénomène en Afrique de l’Ouest? 2) Quel est le portrait des acteurs impliqués dans l’acquisition des terres en Afrique de l’Ouest ? 3) Quels sont les mécanismes et les modalités d’acquisition en Afrique de l’Ouest ? 4) Quelles sont les motivations derrière l’acquisition, ou la cession, des terres en Afrique de l’Ouest? 5) Quels sont les impacts particuliers de l’acquisition de terres dans neuf pays de l’Afrique de l’Ouest?

Après avoir dressé un portrait général de l’acquisition des terres, l’accent a été mis sur neuf pays : le Burkina Faso, la Guinée Bissau, la Guinée, le Bénin, le Mali, le Togo, le Sénégal, le Niger et la Côte d’Ivoire. La présente note fait ressortir quelques éléments en lien avec la phase exploratoire.

Ampleur des acquisitions. Elle est très importante. Selon notre lecture des inventaires réalisés dans les neuf (9) pays et de la revue de littérature, la situation se présente globalement comme suit :

*Tableau page suivante

7 Synthèse rédigée par Myriam Minville, assistante de recherche (REDTAC)

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Comptabilisation des hectares acquis ou en cours d'acquisition selon le pays touché

Pays Total (Ha) selon revue doc.

Total selon enquêtes

terrainObservations

Bénin 1050900 85764 Données partielles terrain

Burkina Faso 1000 288044

Côte d'Ivoire 147200 42000 Données partielles terrain

Guinée 106415 34900 2 régions naturelles

Guinée Bissau n/d 5560 Quelques cas de villages

Mali 688296 721938 Zone office Niger seulement

Niger 45891 207643,0066

Sénégal 409770 844976

Togo n/d 7706,5 Pour 84 cas seulement

Total 2449472 2238531,5066

(Land matrix, décembre 2012 et GRAIN, janvier 2012 pour le total selon la revue documentaire et inventaires terrain COPAGEN)

Les données collectées dans les différents pays pendant cette phase exploratoire sont sensiblement en cohérence avec les informations se trouvant dans la littérature dédiée à l’acquisition massive des terres en Afrique de l’Ouest et particulièrement dans les neuf pays cités. Cependant, elles indiquent que l’ampleur est plus grande par rapport aux conclusions de la littérature existante. Par exemple, des pays comme le Burkina Faso, le Niger, le Mali ou la Côte d’Ivoire ont des superficies acquises par des nationaux (notamment les élites politiques, économiques et sociales) qui ont fait exploser les chiffres ces dernières années.

Les modalités des cessions. Plusieurs modes d’acquisition existent selon les pays. Il s’agit entre autres :

- Prêts avec durée non déterminée (bail ordinaire)- Prêts avec une durée déterminée (bail ordinaire) - Bail emphytéotique (bail de longue durée et très souvent au minimum 25 ans dans les

pays de la recherche). La plus longue durée est de 99 ans. - Dons- Ventes/Achats- Héritage

Régime foncier. La phase exploratoire indique bien que les terres acquises l’ont été sous les deux régimes qui se côtoient dans tous les pays concernés : le régime coutumier caractérisé par des droits légitimes (et légaux dans certains pays) et le régime du droit moderne ou droits légaux.

Acteurs. La littérature abondante indique bien le rôle des acteurs internationaux dans les acquisitions des terres. Notre recherche à ce stade exploratoire montre bien que dans les

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différents pays, beaucoup d’acteurs nationaux sont aussi impliqués dans les acquisitions des terres avec les mêmes usages et à travers les mêmes modes de cession.

Les différents acteurs qui interviennent dans les transactions sont entre autres :

- Vendeurs/ « Octroyeurs » : le pouvoir coutumier, les collectivités territoriales (conseils), des personnes physique propriétaires terriens….

- Acquéreurs/acheteurs : des personnes physiques notamment les élites politiques, économiques, religieuses, sociales locales et nationales, les entreprises nationales et internationales, les états tiers, les Organisations intergouvernementales….

- Intermédiaires : Etat, les personnes influentes (notamment élites politiques, économiques, religieuses et sociales), les institutions de développement, la diaspora de certains pays…

Les motivations des acteurs. Plusieurs raisons sont évoquées pour justifier les cessions des terres. A ce stade de la recherche les points suivants, entre autres, sont ressortis :

Concernant les populations locales- Précarité des moyens ;- Peur de perdre les terres « si on ne les vend pas » ;- Eloignement des zones de production des zones d’habitat ;- Création d’emplois surtout pour les jeunes ;- Moyens d’accès à des infrastructures sociales de base dans lesquelles l’Etat qui doit

investir ne le fait pas ;- Intérêts publics à travers la dépossession ;- Terres non « fertiles » ;- Alliances familiales ;- Réponses aux pressions des élus locaux ou nationaux ;- Besoins des investissements étrangers.

Concernant les acquéreurs/acheteurs- Accéder à la terre qui a de la valeur marchande ;- Augmenter la production et les revenus des ménages ruraux;- Contribuer au développement du pays par la création de la richesse.

Les impacts. Le constat qui se dégage à cette étape est que les impacts sont sous étudiés dans les différents pays. Il y a une grande littérature concernant l’évaluation des risques. La question donc des impacts, sur les femmes en particulier, se trouve dès lors moins étudiée et ne facilite pas les évolutions dans les débats.

Rôle de l’État. Cette phase exploratoire montre à suffisance que l’État est peu visible sur la scène en termes de régulation en faveur des populations mais il est dans beaucoup de cas très présent dans les acquisitions en termes de facilitateur/intermédiaire.

En conclusion, cette phase exploratoire de la recherche a permis de mieux cerner le phénomène d’acquisition massive de terres à un niveau régional. De nombreux textes ont été recensés sur le phénomène dans le Sud, mais aussi en Afrique Sub-saharienne. Il apparaît que ce sont les aspects juridiques complexes qui sont au cœur des enjeux sociaux et économiques des acquisitions massives des terres agricoles. Cet exercice a permis de confirmer la nécessité d’une

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recherche consacrée à la région de l’Afrique de l’Ouest. Bien que les études soient limitées, et que les informations recueillies proviennent souvent d’articles courts et journalistiques, nous avons pu dresser un profil pour chaque pays sélectionné. Le profil « idéal » comprenait les éléments suivants : les données générales sur le pays; l’historique du cadre foncier; le rôle des acteurs, leurs motivations et leurs perceptions; les mécanismes et modalités d’acquisitions; les comités de veilles et groupes de recherches ou activistes; les recensements et des exemples d’acquisitions majeures; et les impacts sur les populations. Nos profils sont parfois incomplets, et les sections sur les points aveugles permettent d’indiquer les futures pistes de recherche sur les impacts.

Notre perception du phénomène repose sur nos contacts permanents avec les victimes potentielles des acquisitions massives des terres. Elle nous invite à aborder la question de façon spécifique. Pendant que les institutions financières voient ces acquisitions des terres comme des investissements productifs dans l’agriculture, nous ne pouvons nous empêcher d’aborder leurs impacts sur la sécurité alimentaire et les moyens d’existence des populations concernées.

Simultanément, nous avons observé un double phénomène qui nous permet, aujourd’hui, de nuancer une situation de relation de pouvoir Nord/Sud, Sud/Sud, mais aussi à l’intérieur des pays où de plus en plus de nationaux deviennent intermédiaires en achetant/louant et spéculant. Ce deuxième phénomène « d’acquisition pour spéculation » par des nationaux complexifie l’enjeu, et apporte d’autres types de craintes ; notamment la hausse des inégalités et des conflits sociaux.

Au moment où nous entamons cette deuxième phase de la recherche, nous ne pouvons nous empêcher de penser aux déguerpissements, à la fermeture des espaces acquis au détriment de la mobilité des populations, aux populations riveraines qui n’ont plus accès aux ressources naturelles, partie intégrante de leurs moyens d’existence.

C’est pour cette raison que la COPAGEN en tant qu’organisation de la société civile s’engage dans cette recherche en partenariat avec d’autres organisations et institutions dont les résultats doivent constituer des instruments de dialogue entre tous les acteurs et actrices impliqués, particulièrement les pouvoirs publics qui doivent jouer un rôle de régulateur.

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Panel 2 « État de la situation au Canada/Québec »

Jasmine-Bélanger Gulick (REDTAC / Université de Waterloo) François L’Italien (IREC)

Le panel «État de la situation au Canada et au Québec » vise à mettre l’accent sur la situation de l’accaparement des terres au niveau national et provincial ainsi que des actions canadiennes et québécoises à l’étranger.

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Jasmine-Bélanger GulickREDTAC / Université de Waterloo

Jasmine Bélanger-Gulick a obtenu son Baccalauréat en Études internationales à l'Université de Montréal en 2012. Elle complète actuellement une Maîtrise en science politique à l'Université de Waterloo, en Ontario. Son mémoire porte sur la position que le Canada tient dans les négociations sur l'agriculture à l'Organisation Mondiale du Commerce. En 2012 elle a effectué un stage au sein du Food Security Policy Group ou elle a mené une recherche sur l'implication du Canada dans les accaparements de terre dans les pays en développement.

François L’ItalienUniversité Laval / Institut de recherche en économie contemporaine

François L'Italien est professeur associé au Département de sociologie de l'Université Laval et chargé de projet à l'Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC). Ses travaux portent sur les transformations des organisations dans le contexte de la financiarisation de l'économie, ainsi que sur l'économie politique de l'agriculture, de la forêt et des ressources naturelles au Québec. Il est l’auteur de deux importants rapports de recherche publiés en 2012: « L’accaparement des terres et les dispositifs d’intervention sur le foncier agricole » et « La Société d’aménagement et de développement agricole du Québec »

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Jasmine-Bélanger GulickREDTAC / Université de Waterloo

Un phénomène récent, aux acteurs diversifiés et dû aux crises financières et agricoles. Pour Mme Bélanger-Gulick, l’acquisition des terres consiste en des investissements soit locaux ou transnationaux, à grande échelle, pour différents buts mais qui, à long terme, privent l’accès à la terre pour les paysans du Sud. Il s’agit d’un phénomène concentré dans les pays en développement mais qu’on observe également, dans une moindre mesure, dans les pays développés. De façon générale, ce sont des investissements qui sont vraiment massifs, à très grande échelle (centaines de milliers d’hectares). On observe aussi depuis peu beaucoup de cas de production d’agrocarburants, nouveau phénomène qui est couplé à l’accaparement des terres, et certainement une des forces motrices de cet accaparement. L’étendue des acteurs qui peuvent être impliqués est assez large : on peut avoir à la fois des acteurs privés, publics, des compagnies, des banques, des fonds de pensions, mais également des élites locales, des individus etc.

Ce phénomène récent de l’accaparement des terres semble avoir été provoqué essentiellement par deux crises, en 2008 : la crise agricole, qui a augmenté la valeur de la terre et par là le prix des aliments, mais également la crise financière, qui a fait la promotion de véhicules d’investissements alternatifs, comme les terres agricoles, qui constituent des actifs plus tangibles, plus «sécuritaires», moins volatiles, et donc plus attractifs aux yeux des investisseurs cherchent un profit sûr. En plus des deux crises, il y a également des facteurs indirects qui ont influencé l’accaparement dans une moindre mesure, comme la croissance de la classe moyenne (en Chine, en Inde etc.), qui augmente la consommation de biens et donc la production de maïs etc.

Enjeux et impacts : pas de scénario win-win. Les impacts sur la sécurité alimentaire dus à l’accaparement des terres sont importants. En terme de souveraineté alimentaire, un des enjeux à plus long terme se situe au niveau des réformes agraires et d’accès à la terre pour les communautés locales; l’accaparement des terres est très certainement un obstacle à ces deux enjeux-là, qui sont très importants.

L’accaparement des terres peut-il pour autant devenir un scénario win-win? Selon Mme Bélanger-Gulick, ce serait fortement improbable; selon elle, certains arrangements pourraient peut-être être bénéfiques, comme par exemple des types de partenariat où on louerait la terre à court terme, où ce serait du «contract farming» («agriculture sous contrat», où les agriculteurs gardent l’accès à leur terre ou en tout cas en demeurent propriétaires), ou encore s’assurer qu’une majorité de la production agricole n’est pas exportée mais qu’elle est vendue sur un marché local etc. Cependant, pour Mme Bélanger-Gulick, l’accaparement des terres- malgré le fait qu’on mette en place certains cadres bien définis- ne pourra jamais être socialement responsable, ce qui semble se vérifier au niveau comme on l’a mentionné précédemment de la réforme agraire et de l’accès à la terre. L’accaparement sera toujours un obstacle, même si l’on encadre très strictement les types d’investissements qui peuvent être faits à ce niveau.

Quelle gestion et quelles alternatives? Comme on le constate présentement, la législation en vigueur au sujet de l’accaparement des terres est trop laxiste et bien souvent sur une base volontaire; il faudrait donc que l’acteur public encadre strictement l’acteur privé, avec une législation contraignante. Le lien public-privé devrait être renforcé.

Pour ce qui concerne le Canada, des législations ont été mises en place, pas spécialement pour l’accaparement mais qui ont résulté en un obstacle à l’accaparement : législations sur la propriété

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étrangère de terres (restreindre l’investissement fait par des étrangers, ou du moins le restreindre à une certaine limite, qui empêche l’achat massif), sur une limite (échelle) des terres qui peuvent être achetées etc.

Quelles actions mener alors pour assurer un développement durable et favoriser la relève agricole? Selon Mme Bélanger-Gulick, de nombreuses actions peuvent être entreprises (certaines sont d’ailleurs déjà en place) : favoriser des types de prêts (et non pas l’achat d’une propriété agricole), qui se feraient directement entre le vendeur et l’acheteur, et qui permettraient de ne pas avoir de taux d’intérêt qui s’échelonne sur 20 ans, mettre en place des programmes de subventions, encourager et valoriser l’éducation agricole (il existe des programmes intéressants de la part des fédérations des producteurs laitiers et de poulet du Québec pour encourager la relève).

Pour ce qui concerne les pistes à proposer aux investisseurs (tels que les fonds de pensions) pour que leurs investissements soient durables et bénéficient aux agriculteurs et aux consommateurs, les directives volontaires proposées par la Banque Mondiale et la FAO vont dans une bonne direction ou du moins encouragent des investissements qui sont plus responsables et donc plus durables. Cependant, il s’agit là d’une marge de manœuvre très restreinte, et ce ne sont pas des législations contraignantes. Il faudrait donc avoir des législations plus contraignantes au niveau international mais surtout national, et dans le même temps, que les gouvernements nationaux aient la capacité d’appliquer ces lois-là, d’intégrer ces directives volontaires qui sont proposées au niveau international dans la législation nationale.

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François L’ItalienUniversité Laval / Institut de recherche en économie contemporaine

Un phénomène d’accaparement massif, avec une financiarisation de plus en plus présente. Il y a une espèce de consensus qui se dessine, aussi bien dans la littérature que chez les organisations agricoles : l’accaparement étant le phénomène d’acquisition des terres par une palette d’investisseurs qui détiennent de très grandes liquidités, des investisseurs aussi bien privés que publics (on parle là de sociétés d’assurances, de fonds de pensions, mais aussi des fonds souverains). L’autre caractéristique est le fait que ce soit de grands morceaux de terres, on ne parle pas de petites superficies, on parle tout de même de morceaux du territoire agricole mondial, qui recouvrent une superficie importante, une acquisition massive.

Selon Mr L’Italien, la stratégie des investisseurs est double : d’une part, il y a des stratégies qui visent à la mise en culture aux fins de leurs priorités de rendement, de leurs priorités de développement : si la société qui acquiert la terre a d’abord et avant tout un intérêt à produire du biocarburant, évidemment qu’elle va vouloir se positionner sur ce marché-là. Il y a donc d’une part une stratégie de mise en production intensive des terres, qui mène assez souvent à un détournement de la production nationale ou régionale des denrées alimentaires aux fins de production humaine, de consommation humaine, et d’autre part, l’autre stratégie importante qui est menée par ces investisseurs sont des stratégies de gain de capital. On sait en ce moment que les terres représentent une valeur refuge pour beaucoup d’investisseurs, surtout qu’actuellement le marché des titres, aussi bien des obligations que des actions, ne va pas très bien. Les placements alternatifs (comme la terre, les infrastructures, l’immobilier etc.) sont donc une occasion en or pour les investisseurs, d’autant que les signes économiques, macroéconomiques portent à croire que c’est une tendance sur du long terme (les taux d’intérêts sont bas, la demande en denrées alimentaires est en hausse, augmentation de la démographie mondiale, etc.). Bref, il y a une stratégie purement financière aussi qu’on peut retrouver chez les investisseurs. Donc, en gros, l’accaparement des terres est l’action qui est menée par des investisseurs institutionnels sur le foncier agricole, l’action étant une acquisition des terres de façon massive.

L’essentiel des transactions qui regroupe ces deux critères-là (investisseurs institutionnels et grandes superficies) se situe en Afrique (meilleures conditions agroclimatiques donc meilleur rendement agricole, proximité des marchés et surtout absence de politique agricole maîtrisée). L’accaparement des terres est présent aussi dans une moindre mesure dans les pays du Nord (présence de politiques agricoles fortes), mais il est difficile à évaluer car le phénomène est mal répertorié et documenté. Une des formes d’acquisition qui retient le plus l’attention de Mr l’Italien est le phénomène de financiarisation (phénomène par lequel des investisseurs institutionnels, grandes sociétés de gestion de capitaux, gèrent les actifs agricoles comme n’importe quel autre type d’actif, le but étant d’avoir des portefeuilles équilibrés et un rendement optimal, sécuritaire). Ces investisseurs n’évoluent pas forcément dans le domaine de l’agroalimentation, ce qui créé une contradiction selon Mr l’Italien.

Impacts et pistes d’actions pour l’avenir. L’impact premier est le fait qu’il y ait une déstructuration des communautés agricoles. Au sein d’une communauté donnée, il y a un point aveugle qui se créé, un périmètre assez important de terres est soustrait à la gestion de la communauté. C’est selon Mr l’Italien l’enjeu principal de l’accaparement des terres : une dépolitisation de la production agricole, du territoire, ce qui mène directement à la question de la souveraineté alimentaire. L’État n’est plus en mesure de déterminer pour qui, pour quoi on produit des denrées agricoles sur son territoire. La déstructuration du territoire en terme de

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développement représente un second impact : l’investisseur ayant ses propres objectifs de développement pour le territoire concerné, qui ne coïncident souvent pas avec les objectifs de la communauté. Il n’y a donc plus de cohérence, de continuité de développement avec ce qui se fait autour des terres accaparées. Troisième impact : une transformation majeure du modèle agricole, qui passe d’un modèle de propriétaires exploitants à un modèle basé sur une concentration industrielle intensive, où il y a une séparation entre le propriétaire et l’exploitant, le propriétaire devenant salarié.

Pour autant, existe-t-il des exemples d’acquisition de terres ou des modèles de gestion agricole gagnant- gagnant (public- privé)? Le modèle québécois, en terme de gestion du territoire, est intéressant. C’est une formule hybride, avec une politique agricole assez forte, composée d’une loi qui protège la vocation du territoire et qui limite la capacité des investisseurs étrangers à s’accaparer de grandes superficies de terres, ainsi que de la présence de politiques fiscales qui permettent aux fermes familiales de survivre.

Pour ce qui concerne la responsabilité de la gestion du territoire, il faut avoir une approche de takeholder, de partie prenante. Au Québec, il y a les Plans de développement de la zone agricole, où le territoire agricole fait l’objet d’une consultation régionale des usages. On met donc autour d’une même table plusieurs acteurs qui ont intérêt à ce que la vocation du territoire soit maintenue, à ce que le modèle d’occupation agricole soit conservé. C’est un instrument qui permet de montrer comment l’agriculture est un mode de vie, plutôt qu’une activité sectorielle économique. Les stratégies de cogestion (une certaine régionalisation des pouvoirs, une articulation entre les régions et les grandes lignes nationales et l’implication des acteurs locaux et régionaux), couplées à des politiques agricoles fortes, semblent être l’avenir. Car c’est au moment où l’on commence à séparer l’agriculture du territoire que l’on va vers un échec, toutes les variables apparaissant comme des externalités.

Pour avoir une relève durable, l’État doit en faire une priorité nationale. Sur le plan institutionnel, il faut trouver une façon de réduire le problème de l’endettement, qui est le principal obstacle à l’installation des jeunes producteurs. Il est impératif de trouver de nouveaux mécanismes qui permettent la transition en dehors du cadre familial, avec une intervention minime mais structurante (idée de création d’une société d’aménagement et de développement agricole du Québec, SADAQ).

La SADAQ8 pourrait être un trait d’union entre le monde agricole et les investisseurs, en étant un véhicule de financement, en rémunérant leur capital sur la base de l’émission d’obligations, auxquelles est rattaché un certain rendement. Les liquidités dégagées par l’achat de ces obligations seraient utilisées par la SADAQ pour permettre au modèle québécois de se reproduire dans le temps et de remettre les communautés au centre de l’agriculture.

8 Pour en savoir plus sur la SADAQ, consultez le rapport de François L’Italien et Robert Plante au : http://www.irec.net/upload/File/sadaqnovembre2012.pdf

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Panel 3 « Que fait-on? »

Pierre Legault (Commission de protection du territoire agricole du Québec) Jocelyn Darou (Protec-Terre)

Initiatives et actions de la société civile(Oxfam Québec - Groupe fonds de pensions - Justice Alimentaire de

Montréal)

Le panel « Que fait-on? » vise à présenter ce qui est déjà en place en termes de protection des terres agricoles, ainsi que les actions mises en œuvre par différents groupes pour faire face au défi de l’acquisition massive des terres.

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Pierre LegaultAvocat, Commission de protection du territoire agricole du Québec

Me Pierre Legault est avocat, membre du Barreau du Québec. Depuis 1979, il exerce sa profession à la direction des affaires juridiques de la Commission de protection du territoire agricole du Québec ; à ce titre, il représente la Commission devant les tribunaux judiciaires et les tribunaux administratifs. De plus, Me Legault est, depuis 1989, responsable de la formation en « protection du territoire agricole » au diplôme de droit notarial de la Faculté de droit de l’Université de Sherbrooke.

Jocelyn DarouCoordonnateur, Protec-Terre

Jocelyn Darou est coordonnateur de l'organisme Protec-Terre ainsi que chargé de projet au Centre d'innovation sociale en agriculture. Il termine également une maitrise en sociologie à l'UQAM sur les fiducies foncières agricoles et s'intéresse aux questions d'innovation sociale en agriculture, d'économie sociale et d'entrepreneuriat collectif en milieu rural, ainsi qu'aux modes de propriété foncière émergents. Jocelyn réside à Frelighsburg, où il s'implique dans le comité citoyen Vitalité Frelighsburg. Il est également membre du conseil d'administration des Éditions Écosociété

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Pierre LegaultAvocat, Commission de protection du territoire agricole du Québec

« La zone agricole protégée représente un patrimoine collectif qui, de par son envergure et la qualité de sa ressource, constitue un atout majeur pour le développement économique du Québec. D'une superficie de plus de 63 500 kilomètres carrés, la zone agricole s'étend sur le territoire de 955 municipalités et est présente dans les 17 régions administratives du Québec. »9

Il existe actuellement deux lois au Québec qui réglemente l’utilisation et l’acquisition des terres agricoles, soit la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles, en vigueur depuis novembre 1978, et la Loi sur l’acquisition des terres par des non-résidents, entrée en vigueur en décembre 1979. Toutes deux sont sous la responsabilité de la Commission de la protection du territoire agricole du Québec, dont le mandat est « d'assurer la protection du territoire agricole et de surveiller l'application des lois sous sa responsabilité, (…) de décider des demandes d'autorisation qui lui sont soumises en vertu de la loi relativement à l'utilisation d'un lot à des fins autres qu'agricoles, au lotissement et à l'aliénation d'un lot de même qu'à l'inclusion ou à l'exclusion d'un lot de la zone agricole. »10

L'objet de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles est « d'assurer la pérennité d'une base territoriale pour la pratique de l'agriculture et de favoriser, dans une perspective de développement durable, la protection et le développement des activités et des entreprises agricoles dans les zones agricoles établies »11. Elle réglemente ainsi, à l’égard des actuelles propriétaires, le morcellement ou le démembrement des terres. En d’autres termes, en tant que propriétaire d’une terre agricole, il vous est interdit de vous départir de votre droit de propriété « par morceaux » au lieu d’en totalité, à moins d’avoir obtenu au préalable l’autorisation de la Commission. Pour obtenir une telle autorisation, la Commission devra étudier la proposition de démembrement ou de morcellement. Une série de critères seront ainsi pris en compte dont l’un des plus importants en matière de morcellement ou de démembrement consiste à s’assurer que les terres aient des superficies suffisantes pour y faire de l’agriculture.

La LPTAQ s’intéresse à la protection de deux ressources : 1) Le sol arabe, qui est défini comme le sol ayant les propriétés qui permettent la croissance des végétaux. La couche de sol arabe ne peut pas être soustraite du lot où elle a été déposée par la nature à moins d’avoir l’autorisation de la Commission. Par exemple, « les agrandissements de périmètres d’urbanisation des municipalités, pour des fins résidentielles, commerciales, industrielles ou institutionnelles, sont décidés par la Commission »12. 2) La protection des érablières. La LPTAQ réglemente donc l’utilisation du sol en zone agricole : on ne peut pas y faire autre chose que de l’agriculture à moins d’en avoir eu l’autorisation de la Commission.

En somme, la LPTAQ vise à protéger les zones agricoles pour faire en sorte qu’elles soient toujours disponibles pour y faire de l’agriculture.

9 http://www.cptaq.gouv.qc.ca/index.php?id=2810 http://www.cptaq.gouv.qc.ca/index.php?id=28&MP=74-14711 http://www.cptaq.gouv.qc.ca/index.php?id=2812 SANSCARTIER, Renaud. « Protection du territoire agricole et dynamiques territoriales au Québec : Une analyse de la prise en compte des particularités régionales dans le processus décisionnel de la CPTAQ », Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l'Université Laval, 2011

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De son côté, la Loi sur l’acquisition des terres par des non-résidents stipule qu’il faut être résident du Québec pour acquérir une terre agricole. Un non-résident devra obtenir au préalable l’autorisation de la Commission devant les tribunaux. Dans la Loi, l’un des critères lorsque la commission doit décider d’accorder ou non l’autorisation à un non-résident d’acquérir d’une terre consiste à examiner les : « conséquences économiques découlant des possibilités d’utilisation de la superficie à des fins d’agriculture ». En d’autres termes, est-ce que c’est économiquement utilisable en agriculture ou pas. La Loi, en plus de viser les acheteurs étrangers, réglemente aussi l’achat de terres par des Québécois qui voudraient agir comme prête-nom ou façade à une personne qui ne réside pas au Québec. La Loi sur l’acquisition par des non-résidents va également réglementer dans une certaine mesure le transfert d’action à des non-résidents lorsque le principal actif de la compagnie est une terre agricole.

En principe, c’est la Commission de protection du territoire agricole du Québec qui devrait avoir la décision finale, mais la loi prévoit tout de même un appel devant un tribunal administratif. Une possibilité de contestation est donc prévue. Et cette possibilité peut parfois jouer des tours. Même si la Commission croit fermement qu’un territoire doit demeurer assujetti à la Loi, d’autres instances, tel que le Tribunal administratif du Québec, Section du territoire et de l’environnement, peuvent tout de même accorder des autorisations contraires à l’avis de la Commission.

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Jocelyn DarouCoordonnateur, Protec-Terre

« Sans intervention forte de l’État, il y aura intervention forte d’organisations, d’entreprises privées qui définiront le marché et l’agriculture selon leurs propres besoins, besoins qui ne reflètent pas

celui des citoyens. »

Protec-Terre est un organisme à but non lucratif créé en 1999 qui intervient sur l’ensemble du territoire québécois et dont la mission est de promouvoir le modèle des fiducies foncières agricoles, un mode à la fois de collectivisation et de protection des terres agricoles et de certaines de leur vocation à travers une forme juridique assez unique, inspirée du modèle des fiducies foncières de conservation utilisées pour protéger les milieux naturels. Au-delà de la conservation à perpétuité du patrimoine agricole et de la lutte à la spéculation foncière, Protec-Terre intègre à sa mission le support à la formation et l'établissement de la relève agricole, la facilitation de l'accès à une alimentation biologique pour la population et la promotion d’une agriculture de proximité.

Un modèle de protection13. Une panoplie d’option de conservation s’offre à quiconque désire protéger à perpétuité une terre et ses caractéristiques dont la Fiducie foncière agricole (FFA).

Les FFA s’inspirent elles-mêmes des fiducies foncières de conservation (FFC). Les FFC, qui existent depuis plus d’un siècle en Amérique du Nord, ont comme vocation la protection de milieux naturels fragiles ou encore particulièrement riches en biodiversité. Les FFA ayant comme vocation la protection de terres agricoles, elles doivent donc proscrire, sur les terres qu’elles protègent, toute activité humaine sauf l’agriculture. De la même manière que les FFC, les FFA ont deux moyens à leur disposition pour protéger ces terres dont l’une consiste à acquérir le tréfonds de terre.

D'un point de vue légal, le tréfonds (c’est-à-dire le sous-sol) peut être séparé de la superficie d’une terre au moyen d’une « convention superficiaire » selon les termes de la propriété superficiaire. Ainsi, il peut y avoir deux propriétaire différents pour ce qui serait normalement considéré être une même terre : un pour le tréfonds (le tréfoncier), et un pour la superficie (le superficiaire), ce qui inclut les cultures et les bâtiments. La loi permet d’inclure un nombre de critères ou conditions que doit respecter le superficiaire afin de pouvoir avoir accès à la propriété superficiaire.

Au Québec, les FFA sont, au sens de la Loi, des fiducies d’utilité sociale. Les bénéficiaires sont donc, généralement, la population en général. La mission des FFA dépasse ainsi très souvent la simple protection du territoire. En effet, leur mission inclut plus souvent qu'autrement des activités telles que l’appui à la relève agricole, l’éducation populaire sur des enjeux reliés à l’agriculture et à l’alimentation, la création de jardins communautaires et collectifs, la promotion de la transformation alimentaire chez soi, la création d’incubateurs agricoles ou culinaires (où des infrastructures sont partagées par plusieurs entreprises en démarrage), ainsi que la recherche en lien avec tous ces domaines.

Le statut de fiducie foncière au Québec est indépendant de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA). Ainsi, il n'y a pas à craindre que le terrain protégé par une fiducie soit «dézoné». Également, aucun palier gouvernemental ne peut, selon l'actuel Code civile, modifier ou mettre fin à une fiducie.

13 Informations tirées du document: « Le développement des fiducies foncières agricoles au Québec » par Protec-Terre. Pour plus d’information, visitez : http://www.protec-terre.org/index.html

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En décembre 2010, Protec-Terre mettait sur pied la première fiducie foncière agricole d’utilité sociale au Québec dans le projet de la Ferme Cadet Roussel de Mont St-Grégoire.

Une situation à surveiller. Selon M. Darou, l’accaparement des terres est un phénomène mondial important très dangereux. Statistiquement, il semble pour l’instant plus important en Afrique, mais c’est un phénomène qui peut potentiellement prendre plus d’ampleur ailleurs dans le monde. De façon générale, le foncier agricole est un actif financier très stable à moyen et long terme même dans les périodes économiques et financières troubles : d’où l’intérêt de différents types d’acteurs pour ces terres. Quoique le phénomène ne soit pas encore grave au Québec, il pourrait très bien le devenir si l’on n’agit pas aujourd’hui. Dans les régions du Québec, il existe tout de même des phénomènes analogues, complémentaires, à celui d’accaparement des terres dont celui de l’intégrateur où un distributeur ou transformateur achète une terre pour ensuite louer l’exploitation à des agriculteurs qui sont par la suite obligés de répondre au besoin économique de cet intégrateur. Dans les Cantons-de-l’est, on observe aussi le phénomène des villégiateurs qui vont acheter des terres à fort potentiel agricole dont ils ne retiennent que la valeur bucolique, devenant ainsi des compétiteurs directs des agriculteurs dans l’accès aux terres.

Des enjeux à considérer. Ce sont donc divers phénomènes qui rendent compte des deux principaux impacts de l’accaparement des terres : l’augmentation très rapide de la valeur des terres, conséquence du pouvoir économique supérieur de certains investisseurs intéressés par l’acquisition de terres agricoles et le problème d’accès à la terre pour les agriculteurs et la relève qui cela engendre, ainsi que le changement de vocation des terres agricoles.

On s’aperçoit aujourd’hui qu’il y a indéniablement une corrélation entre l’importance du phénomène d’accaparement dans différentes parties du monde et la présence ou l’absence de programmes politiques qui viennent soit empêcher soit rendre plus difficile l’accaparement de terres par des acteurs possédant de grands capitaux tels que les fonds d’investissement qui œuvrent dans une optique de maximisation de profit. On parle ainsi de contrôle direct de terres agricoles par des intérêts financiers où les questions sociales et environnementales sont évacuées.

L’État et les alternatives. Le rôle de l’État est central et se distingue en deux catégories : d’abord sous la forme d’interventions politiques – intervenir sur les règles du marché et empêcher entre autres que des non producteurs achètent des terres agricoles, ou qu’il y ait des changements d’usages sur des terres agricoles. Ensuite, sous la forme d’interventions économiques – un fournissant un appui aux initiatives. Sans intervention forte de l’État, il y aura intervention forte d’organisations, d’entreprises privées qui définiront le marché et l’agriculture selon leurs propres besoins, besoin qui ne reflètent pas celui des citoyens.

C’est d’ailleurs pourquoi Protec-Terre voit d’un très bon œil la proposition de l’Institut de recherche en économie contemporaine de procéder à la création d’une Société d’aménagement et de développement agricole du Québec (SADAQ). Celle-ci permettrait de donner une capacité politique et économique concrète d’intervenir au moment adéquat et au niveau adéquat pour à la fois protéger la souveraineté alimentaire et pouvoir agir sur la question de la vente de la propriété foncière.

La solution à ce phénomène ne réside toutefois pas seulement dans le fait de contrer l’accaparement des terres mais dans la proposition d’alternatives. Des alternatives d’abord d’investissements tel que les investissements solidaires et sociaux comme le fait la caisse d’économie solidaire. Mais aussi des alternatives au modèle agricole à travers des organisations

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telles que les Fiducies foncières agricoles ou les SAFER en France (sociétés ayant le pouvoir d’acquérir ou de louer des terres en favorisant l’établissement de la relève agricole). Le FIRA (Fond d’investissement pour la relève agricole) fait également ce genre d’intervention ici au Québec.

Le modèle du fermage est aussi une alternative intéressante : ce sont des terres détenues par des propriétaires publiques ou privés mais auxquelles sont attachées des droits d’usage agricole qui obligent les propriétaires à rendre ces terres accessibles pour des agriculteurs – un type d’entente qui dépasse le modèle plus conventionnel du propriétaire agriculteur. À cet effet, divers modèles de coopératives sont aussi à considérer.

L’accès à la terre est fondamental. Il faut donc appuyer les innovations sociales et techniques, appuyer des modèles d’organisations et de mise ne marché différents. L’ensemble de la gestion du territoire agricole doit être fait de façon concertée, démocratique, c’est-à-dire en distribuant les pouvoirs à divers acteurs sur différents paliers tout en respectant une certaine homogénéité mais en étant d’abord et avant tout orienté vers les besoins des citoyens et non des grandes entreprises. Les questions de ce type, tel l’accaparement des terres et la souveraineté alimentaire, jouissent actuellement d’une certaine popularité, mais il faut que la question dépasse l’effet de mode et profite de décisions politiques fortes.

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Initiatives et actions de la société civile

Oxfam Québec – Christine Girard

Groupe fonds de pensions - Stéphanie Wang

Justice Alimentaire de Montréal – Hugo Martorell

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Étude participative sur l’acquisition massive des terres agricoles en Afrique de l’Ouest

Myriam Minville et Rose-Anne St-Paul

Myriam Minville. Candidate à la maîtrise en science politique à l'Université de Montréal. Myriam concentre ses recherches sur les questions d'acquisition de terres, de souveraineté alimentaire et des théories de la démocratisation. Elle étudie plus particulièrement les régions de l'Afrique de l'Ouest et du Moyen Orient.

Rose-Anne St-Paul. Détenant une maîtrise en Études Internationales à l’Université de Montréal, Rose-Anne est impliquée au sein du REDTAC depuis octobre 2012. Elle a participé comme stagiaire à une étude participative sur l’acquisition massive de terres agricoles en Afrique de l’Ouest et a pris part à un atelier de restitution d’inventaires qui réunissait des chercheurs de la région à Abidjan, en février dernier. Ses centres d’intérêts sont les impacts sociaux des interventions interétatiques et la défense des droits humains, en particulier l’accès à l’éducation et l’alimentation.

Quel est l'ampleur de l’accaparement de terres à travers le monde? Quelles sont les visions qui sous-tendent ce phénomène de part et d’autre de la chaine? Voici les questions auxquelles Myriam Minville et Rose-Anne St-Paul ont tenté de répondre. Pour montrer la pertinence de la recherche sur le phénomène et l’importance de donner une voix aux populations affectées, Myriam et Rose-Anne ont participé à l’élaboration de six études de cas en Côte d’Ivoire ainsi qu’à l’inventaire des différentes ressources d'information disponibles sur le sujet.

Pour en savoir plus : http://terres.redtac.org/

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Liste de liensen ordre alphabétique

Coalition pour la souveraineté alimentaire http://www.nourrirnotremonde.org

Commission de la protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) http://www.cptaq.gouv.qc.ca/

Focus on the Global South.. http://focusweb.org/

GRAIN http://www.grain.org/fr

Institut de recherche en économie contemporaine (IREC) http://www.irec.net/

IRPAD (Institut de Recherche et de Promotion des Alternatives en Développement) http://www.irpadafrique.org/

Observatoire sur la souveraineté alimentaire (OSA) http://www.cerium.ca/Souverainete-alimentaire

Oxfam – Québec http://oxfam.qc.ca/accueil

Plenty Canada http://www.plentycanada.com/

Protec-terre http://www.protec-terre.org/

Réseau d’études des dynamiques transnationales et de l’action collective (REDTAC) http://www.cerium.ca/REDTAC

Sécurité alimentaire Canada http://foodsecurecanada.org/fr

Transnational Institute (TNI) http://www.tni.org/

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Remerciements

L’équipe de l’Observatoire :

Amélie Lévesque-MartelDenis CôtéDominique CaouetteHanène Henchiri Meryem Benslimane

Remercie les institutions et organismes qui ont appuyé l’événement :

Association canadienne d’études du développement international (CASID/ACÉDI)Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI) Centre d’études et de recherches international es de l’Université de Montréal (CÉRIUM)Groupe de travail Asie-PacifiqueInter ParesUSC Canada

Tous les bénévoles qui se sont impliqués dans le projet :

Amine BoulhianLydia TremblayMaika SondarjéePascal PrioriRafik BayarStéphanie BergeronWilfred CalvinoZahra Abbas

Ainsi que tous les conférenciers, modérateurs et animateurs:

Afsar JafriAssétou SamakéChristine GirardDevlin Kuyek Diana BronsonFrançois L’ItalienFrédéric ParéHugo MartorelJasmine Bélanger-GulickJean-François BissonnetteJocelyn Darou

Juan Carlos ContrerasLarry McDermottLionel LevacMe Pierre LegaultMyriam MinvilleOtilia PuiggrosPaul ClicheRichard SimardRose-Anne St-PaulStéphanie Wang Timothé Feodoroff

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