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Les espèces invasives

Par Patrick Darcheville (FB1)

Caulerpa taxifolia

Algue à feuilles d'if.Originaire des mers tropicales.

Invasive en Méditerranéemais qui régresse.

Il ne faut pas se réjouir trop vite car la relève arrive ...

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"Espèces invasives" : définition

Une espèce invasive est une espèce introduite (volontairement ou involontairement) dans un milieu et qui y prolifère.

On parle aussi d'invasionsinvasions biologiquesbiologiques.

Amas de Crépidules.Mollusque Gastéropode originaire d'Amérique.

Invasif en Manche occidentale.Les amas se fixent sur les coquilles St Jacques jusqu'à

empêcher l'ouverture ...Essais de valorisation en cours …

"berlingots de mer"

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Analysons cette définitionEspèce introduite : espèce nouvelle (étrangère, exotique) pour l'aire considérée. Origine de l'introduction toujours anthropique.

Anthropique : du fait de l'homme

Espèce qui prolifère : non seulement l'espèce exotique s'adapte parfaitement à son nouveau milieu mais de plus elle devient envahissante c'est à dire provoque la disparition d'espèces locales (natives, indigènes), a un impact économique négatif, pose des problèmes de santé publique.

Corbicule ou Clam asiatique.Mollusque bivalve.

Invasif en Manche occidentale.Individu est hermaphrodite synchrone ;

peut s'autoféconder.Consommé en Asie.

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Introductions d'espèces et conséquencesBeaucoup d'espèces introduites le sont volontairement et sont gardées en milieux artificiels clos.

Mais bien souvent elles arrivent à s'échapper. Une espèce échappée peut alors devenir dans son nouveau milieu une espèce acclimatée voire naturalisée voire invasive.

Espèce acclimatée : se retrouve à l'état sauvage mais n'arrive pas à s'y reproduire. Donc la population va diminuer sauf introductions répétées. Exemple : Tortue de Floride ou Truite arc en ciel dans notre région.

Espèce naturalisée : arrive à se reproduire naturellement dans son nouveau milieu.

Espèce invasive : espèce exotique dont les capacités de multiplication provoquent de graves désordres.

Poisson chat.Se serait échappé du Muséum d'histoire

naturelle à la fin du XIXième siècle.Considéré comme nuisible mais désormais

plus discret.

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Relativisons : toute espèce introduite dans un territoire ne devient pas forcément invasive

Il ne faut pas sombrer dans des raisonnements simplistes du genre : "toute espèce exotique serait nuisible alors que toute espèce indigène serait utile".

De nombreuses introductions ont été très bénéfiques pour l'humanité. Ainsi suite à la découverte du "nouveau monde" il a été importé en Europe la Pomme de terre, le Maïs, etc.

Mais trois introductions originaires d'Amérique ont provoqué des catastrophes en Europe au XIXième et XXième siècles :

● le mildiou de la pomme de terre (un champignon)

● invasion du doryphore (un coléoptère)

● le phylloxéra de la vigne (un puceron)

Doryphore

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Des invasions biologique dans tous les sens

Il ne faut pas croire que les introductions ont eu lieu uniquement dans le sens Amérique vers Europe.

Le crabe vert européen ou crabe enragé (Carcinus maenas) est une espèce invasive en Amérique et en Asie.

Un coupe de crabes enragés.

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La théorie de Williamson

Le biologiste Williamson a élaboré une théorie dite des 3*10.

Selon lui 10 % seulement des espèces introduites arrivent à s'acclimater.

Parmi elles seules 10 % sont capables de se reproduire naturellement dans leur nouveau milieu (sont naturalisées).

Et parmi ces dernières, seules 10 % deviendraient envahissantes dans leur nouveau milieu.

Donc pour résumer et selon cette théorie seule 1 espèce introduite sur 1000 deviendrait invasive.

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Des espèces natives peuvent aussi proliférer de façon préoccupante. Exemples : "marées vertes" dues à la prolifération de l'Ulve (ou Laitue de mer) ; la baie du Mont St Michel est envahie par le Chiendent maritime (espèce aussi autochtone).

Une espèce envahissante peut être un hybride (croisement d'une espèce introduite avec une espèce native). Exemple : la Spartine anglaise.

Les invasions biologiques ne sont qu'une des causes de la perte de la biodiversité parmi bien d'autres. Citons d'autres causes :

● la pollution

● la disparation des habitats naturels

● la surexploitation de certaines espèces

● le réchauffement climatique

Relativisons  (suite)

Spartine anglaise

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Raison garder !

Ce sont surtout dans les îles que certaines introductions ont eu des effets catastrophiques. Exemple : serpents dans l'île de Guam.

Il est souvent "urgent d'attendre" ! En effet des mesures d'éradication précipitées peuvent aggraver la situation.

Exemple célèbre : tentative d'éradication du lapin de garenne en Australie.

Il ne faut pas sous estimer les capacités d'adaptation de la nature. Ainsi certaines espèces introduites après avoir vu leur population exploser semblent désormais se stabiliser voire régresser. Exemples : Sargasse, Caulerpe.

Sargasse japonaise.

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Les différents vecteurs d'introduction

La navigation 

C'est la principale cause d'introductions involontaires. Ce sont les salissures marines (fouling) et eaux de ballast.

Ainsi la crépidule a été introduite sur les côtes françaises à l'occasion du débarquement du 6 juin 44.

L'aquariologie

La fameuse algue Caulerpa taxifolia a été relâchée accidentellement par l'aquarium de Monaco dans la Méditerranée.

L'aquacultureIntroduction volontaire par échange entre bassins conchylicoles.Huître japonaise introduite volontairement en France suite à la maladie de l'Huître portugaise mais qui s'est accompagnée de celle de la Sargasse Japonaise ...

Attention à partir de maintenant je traiterai surtout des invasions biologiques aquatiques !

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Les percements de canaux

Le percement du canal de Suez a mis en communication directe la Mer Rouge avec la Méditerranée.

La mer Rouge est plus haute que la mer Méditerranée donc un courant en direction de la mer Méditerranée s'est créé. Le Lac Amer aux eaux saumâtres a fait office de "barrière migratoire" durant quelques décennies puis comme la salinité du lac s'est ensuite alignée sur celle de la mer Rouge ...

Plus de 300 espèces originaires de Mer Rouge ont été introduites en Méditerranée !

On parle de Migration lessepsienne.

Trois espèces lessepsiennes invasives

Caulerpe raisinCaulerpa racemosa

Invasion semble plus rapide celle de Caulerpa taxifolia

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HalophileHalophila stipulacea

Plante à fleursOccupe pour l'instant que le bassin oriental

Cérithe de mer RougeCerithium scabridum

L'envahisseur le plus agressif en Méditerranée

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Le cas du canal de PanamaLe même phénomène ne s'est pas reproduit entre les océans atlantique et pacifique avec le percement du canal de Panama !

Pourquoi ?

Canal à écluses ; écluses remplies par de l'eau douce en provenance du lac de Gatun.

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Les aires les plus favorables aux invasions biologiques

Ce sont les milieux déjà fragilisés par les activités humaines :

● faible nombre d'espèces indigènes

● niches écologiques disponibles

● absence de prédateurs

Ce sont aussi les zones soumises au trafic maritime et fluvial: estuaires, ports, canaux.

"Méduse" américaine.Mnemiopsis leidyi

(Cténaire).Introduction accidentelle en

mer Noire a provoqué une catastropheéconomique.

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Caractéristiques des espèces invasivesOn peut remarquer que les espèces invasives sont en général :

● très tolérantes vis à vis de la température, de la salinité et du taux d'oxygène de l'eau. Exemple : le crabe japonais et le crabe chinois.

● grande capacité de reproduction. En particulier la multiplication végétative pour les algues et l'hermaphrodisme pour les animaux.

Exemple : caulerpa taxifolia s'est reproduite uniquement par clonage à partir d'une souche mâle ; pas de reproduction sexuée.

Exemple : "Méduse" américaine est hermaphrodite et peut s'autoféconder.

● l'absence de prédateurs dans sa nouvelle aire.

Exemple : la Jacinthe d'eau n'a pas de prédateur en dehors de son aire d'origine (Lamantin).

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Conséquences des invasions biologiques

Diminution de la biodiversité ; les espèces invasives peuvent provoquer la disparition d'espèces locales.Exemple : la Spartine anglaise peut provoquer la disparition de la Salicorne.

Une espèce introduite peut se révéler l'hôte d'un parasite. Exemple : l’écrevisse américaine est le porteur sain de la "peste de l'écrevisse" qui provoque des ravages dans l'espèce locale.

L'invasion biologique a un coût économique non négligeable.Exemple : la Moule zébrée a provoqué un désastre majeur dans la région des grands lacs ; disparition de la moule indigène. Les amas de coquilles bouchent les canalisations et font couler les bouées.

Une espèce introduite peut menacer notre santé. Exemple : La prolifération d'une micro-algue toxique (Alexandrium) contamine les coquilles que nous consommons ; intoxications peuvent être mortelles.

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Galerie photos

Spartine anglaise. Amas de moules zébrées sur une bouée.Jacinthe d'eau.

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Lutte contre les invasions biologiquesPas de solution miracle. Les moyens d'éradication peuvent être inefficaces et provoquent souvent des dégâts collatéraux.

Lutte mécanique  peut être contre-productive. Exemple le ramassage mécanique de la Sargasse a favorisé sa multiplication végétative.

La lutte chimique peut tuer d'autres espèces que celles visées.Exemple: les poisons contre le Rat musqué tuent aussi les lièvres ...

La lutte biologique par l'introduction d'espèces "prédatrices" a souvent été un échec cuisant.Exemple : introductions successives en Jamaïque de la fourmi de feu puis du Furet puis du Crapaud buffle puis de la Mangouste pour éradiquer les rats qui ravageaient les plantations.

Crapaud buffle.Considéré comme

nuisible.

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L'éradication d'une espèce exotique déjà bien répandue est irréaliste. Il faut admettre qu'elle fait désormais partie du biotope et tenter de contrôler son expansion.

il faut rester humble. La nature est capable de réguler elle-même.

Ainsi la fameuse "algue tueuse" après avoir connu une expansion catastrophique semble régresser. Pourquoi ?Il en est de même de la Sargasse Japonaise dont la croissance semble se stabiliser ...

Toute tentative d'éradication suppose une vision globale de la chaîne trophique (alimentaire).

Nouvelle piste : renforcer certaines espèces indigènes pour endiguer le développement d'espèces étrangères. Exemple : certains coléoptères locaux peuvent devenir consommateurs de Jussie (plante aquatique).

Il faut être pragmatique !

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Renforcer une espèce indigènepour contrer une espèce invasive.

Exemple de la baie de Somme

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Prévenir des invasions biologiquesEn France la loi prévoit que des espèces exotiques peuvent être interdites de commercialisation et d'introduction dans le milieu naturel. Mais avec la disparition des frontières au sein de l'UE seule une réglementation européenne peut être efficace.

La directive européenne sur les espèces exotiques préoccupantes date de 2014 ...

Un droit international s'érige également mais lentement. Citons par exemple la convention internationale pour le contrôle des eaux de ballast de 2004. Mais qui a été ratifiée que par 18 états …

Plus une invasion biologique est décelée tôt et plus le succès d'une éradication est grand. D'où l'importance des réseaux d'alerte.

Tortue de Floride.Importation interdite depuis

1997.

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Les invasions biologiques dans notre région(bassin Artois-Picardie)

J'ai exploité des documents édités par l'agence de l'eau du bassin Artois-Picardie (avec concours de la station marine de Wimereux).

Ce bassin correspond en gros à la nouvelle région "Hauts de France".

Nous allons distinguer le milieu marin et les eaux douces et à chaque fois les végétaux et les animaux.

Certaines espèces réputées invasives dans d'autres bassins voisins du notre ne le sont pas (ou pas encore) dans notre région.

Ecrevisse Américaine.Transport de spécimens vivants

est interdit.Pêche en tout temps et toute taille

autorisée.

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Végétaux invasifs dans le milieu marin

La Sargasse japonaise est en compétition avec des plantes et algues indigènes.Est une gêne pour la pêche (recouvre les filets) et pour la navigation (s'enroule dans l'hélice). La lutte contre sa propagation a été vaine voire contre-productive. Il semblerait cependant que sa croissance se soit désormais stabilisée.

La Spartine anglaise (ou Spartine de townsend) est une plante hybride née d'un croisement entre l'espèce européenne indigène (Spartine maritime) et l'espèce américaine.La Spartine de townsend supplante la Salicorne dans de nombreux secteurs. Son réseau dense de rhizomes contribue au comblement progressif des baies et estuaires en piégeant les sédiments.

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Animaux marins invasifs chez nous

Crabe chinois.Creuse des terriers qui

sapent les berges

Crabe Japonais.Menace pour les fermes

aquacoles.

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Animaux marins invasifs chez nous

Crabe chinois.Creuse des terriers qui

sapent les berges

Crabe Japonais.Menace pour les fermes

aquacoles.

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Couteauaméricain.

A supplanté l'espèce locale.

Balane croix de Malte.

Recouvre les coques de navire mais les coquilles des bivalves.

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Animaux dulcicoles invasifsDans le bassin Artois-Picardie deux espèces exotiques provoquent de graves nuisances : ● Rat surmulot (ou rat brun) : espèce introduite par Vikings ; vecteur de

nombreuses maladies dont la leptospirose● Rat musqué (ou rat d'Amérique) : vecteur de parasites, dommages

hydrauliques (berges et digues), dégâts aux cultures

D'autres espèces constituent des dangers potentiels compte tenu de leur caractère invasif dans des zones proches : ● Ragondin● Perche soleil● Siluriens (Poisson-chat et Silure glane)● Écrevisse américaine (transport de spécimens vivants est interdit)● Tortue de Floride● la Moule zébrée● Corbicula fluminea (Clam asiatique ou Palourde asiatique)

Rat musqué

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Taxons invasifs dulcicolesLes végétaux

Les herbiers denses de Jussies provoquent l'asphyxie du milieu (réduction oxygène) et empêchent l'écoulement de l'eau.

Elodée du Canada forme des peuplements denses monospécifiques qui peuvent éliminer la végétation indigène.

La prolifération de la lentille d'eau minuscule aboutit à des tapis épais à la surface qui empêchent la pénétration de la lumière et les échanges gazeux entre l'air et l'eau.

Elodée du Canada.Utilisée par les aquariophiles.

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Jussie à grandes fleurs.Largement diffusée à des fins ornementales

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Plantes exotiques à surveiller ! 

Azolle

Myriophylle du Brésil

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Conclusion

Merci de votre attention !

Je vous propose deux pistes de réflexion :

● les invasions biologiques ne sont-elles pas une des facettes de la mondialisation ?

●

● d'après vous quelle est l'espèce la plus invasive ???