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Le petit ournal No 10 - Novembre 2013 www.lecadratin.ch ORGANE OFFICIEL DE L’ASSOCIATION DES VRAIS AMIS DU CADRATIN La Citronelle - CH-1854 Leysin LE CADRATIN - RUE DE LA MADELEINE 10 - CH-1800 VEVEY j 25 1988 2013 Le Cadratin au quai Perdonnet de 1998 à 2004 Photo : Corinne Cuendet PetitJournalNov13_Petitjournalfinal 01.10.13 20:27 Page1

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Le petit ournalNo 10 - Novembre 2013

www.lecadratin.chORGANE OFFICIEL DE L’ASSOCIATIONDES VRAIS AMIS DU CADRATINLa Citronelle - CH-1854 Leysin

LE CADRATIN - RUE DE LA MADELEINE 10 - CH-1800 VEVEY

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Le Cadratin au quai Perdonnet de 1998 à 2004 Photo : Corinne Cuendet

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Samedi 2 novembre 2013, le Cadratin fête ses 25 ans !

Groupe de catherinettes à Paris, rue de la Paix, en 1932.

Venez fêterSainte-Catherine avec nous

25 ans, 5 lustres : une façon derépondre au «dur désir de durer»,dont parle Eluard. Ce quart de siècleest une manière de défi lancé à uneépoque impatiente de nouveauté, quin'hésite pas à attendre devant uneboutique, des heures durant, la miseen vente du tout dernier modèle desmartphone. Comme s'il n'y avait deréalité que la course à l'événement.N'est-ce pas Sacha Guitry qui, à unquidam lui demandant : «Quoi deneuf ?», répondait : «Molière !»

Quoi de neuf ? Le Cadratin, pardi !A l'instar de ces roues que l'on voitau cinéma, et qui  paraissent tournerde plus en plus vite, puis, ralentissantleur rotation, tendent à s'immobiliser,avant de se mettre à tourner en sensinverse, le Cadratin n'en finit pasd'avancer à reculons... Comme prisede vitesse, la rétine s'obstine à fixerune image et oppose à l'apparition del'image qui suit la persistance del'image qui la précède ; plus le filmavance, puis la sensation du mouve-ment accuse de retard. De même, leCadratin fait fi des dernières trou-vailles de la technologie, auxquelles iloppose la magnifique stabilité descaractères de plomb. Et plus lesmédias changent, plus Jean-RenaudDagon s'obstine à découvrir les milleet une richesses de la typographietraditionnelle.

Chaque médium est à lui-mêmesa tache aveugle. La rétine n'estjamais que le déploiement du nerfoptique ; mais là où il surgit vers l'ex-térieur, il est insensible au rayonne-ment. Il en va de même pour lesmédias. Il aura fallu l'apparition de l'é-criture pour que l'on s'avise des ver-tus de l'oralité, l'invention de l'impri-merie pour valoriser l'écriture manus-crite, jusqu'à faire de la signature unfétiche ; Baudelaire condamnait laphotographie comme le pis-aller desmédiocres, glorifiant d'autant la gran-de peinture ; quant au cinéma ditd'auteur, il a bénéficié de l'avènementde la télévision, reprenant à soncompte le mépris que d'aucuns réser-vaient aux premières bobines desfrères Lumière en les taxant de«divertissement d'ilotes» !

Au moment où Internet s'imposetous azimuts, que l'électronique courtaprès l'événement, que l'immatériali-té des messages se paie du caractèreéphémère de leur existence, lesGaramond, les Elzévir, les Bodoni, lesDidot imprègnent et foulent le papierchiffon de leur marque, fixant leurssignes avec l’autorité que leur confèreune longue pratique. De même lesconservatoires de musique entretien-nent la tradition et sauvegardent les«étalons or» de l’interprétation durépertoire, de même des ateliers

comme celui du Cadratin ont pournoble vocation de constituer lamémoire de l’imprimerie. Et tous lesalphabets que s’ingénient à produireles dessinateurs de caractères surleurs écrans ne sont jamais que desvariations autour des modèles deréférence, qu’il s’agit de garder avec leplus grand respect. Certes, la labilitéde l’écran électronique, la souplessedes derniers logiciels d’assistance audes ign de la let t re donnent auconcepteur l’illusion d’une liberté infi-nie. L’anamorphose règne en maîtresse,qui se prête à mille et une métamor-phoses : plus de garde-fou, plus dediscipline, dès lors que tout paraîtpossible, et ce dans les délais les plusbrefs.

La taille des poinçons au burin, sepliait aux dures contraintes de l’acier,et les dures contraintes de l’acierretenait le graveur de toute impatience :il lui fallait du temps pour inscriredurablement alphabets, chiffres etponctuation qui marqueraient enprofondeur les matrices dans les-quelles couler les caractères. L’art dela médaille était voisin, qui connaissaitles mêmes exigences de précision, derythme et d’élégance…

Ce sont précisément ces qualitésd’humilité, d’abnégation et de persé-vérance qui doivent permettre à latypographie du plomb d’entrer enrésistance contre les us et abus denombre de graphistes, qui jouentimpunément de la plasticité infinie del’image électronique, sous prétexted’innovation et de mode, quand leurignorance de l’histoire de l’écriture lesdispense de retourner à l’exempledes maîtres…

Puisse le Cadratin rester, de nou-veaux lustres, la mémoire inventivedu vrai métier !

CÉLÉBRATION DU CADRATINJacques Monnier-Raball

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Samedi 2 novembre 2013, le Cadratin fête ses 25 ans !

Axel et Olivier Vuillelors de leur passage au Cadratin en 2012.

LecturesJacques Roman viendra lire son dernier textesorti au Cadratin «Les consonnes».

Laurence Verrey nous contera «Feu sur leNoir».

Musique LiveOlivier et Axel Vuille nous emmèneront envoyage avec leurs STICKY SONGS.

Animation typographiqueLes typographes, Joanne Bantick, HuguesEynard, René Quennoz, Nicolas Regamey sousl’impulsion de Jean-Renaud Dagon se feront unplaisir de vous régaler de leur passion.

Fabrication du papierToni Bättig et l’équipe de l’Espace Gutenbergd’Yvonand nous initieront à la fabrication dupapier.

ExpositionsLouise Beetschen nous présentera ses œuvressorties de son livre «Feu sur le noir», livre éditéavec des textes de Laurence Verrey.

Marie Sahys nous fera rêver avec ses dessins,ses gravures et ses sculptures.

Mathias Brügger exposera ses écolines réaliséespour «Le monde autour» de l’AJAR.

25Le Cadratin

19882013

RUE DE LA MADELEINE 10 - VEVEY

2 2013 10EXPOSITIONS MUSIQUESORTIES PRESSESTYPOGRAPHIQUES

DU VENEZ SAINTECATHERINE NOUS

Groupe de catherinettes à Paris, rue de la Paix, en 1932.

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Sorties de presses en 2013

Jacques Roman

Laurence VerreyLouise Beetschen

Michel Vincent

Patrick Grosjean

Michelle Tallandier

Madeline Demaurex

AJAR

Jacques Monnier

Maryse Renard

Sylvoisal

Manon Gay Crosier

Marcel Imsand

Françoise Corboz

Bastien D.

Raoul Ganty

Les consonnes

Feu sur le Noir

Déplacer l’ombre

Silhouettes

Le sultan qui ne voulait pas choisir

Remuages

Le monde autour

Tu sauras nager

L’ami en chemin

Le Festin du Diable

Entre chien et loup

L’important c’est la rose

Le fil rouge

Le lac noir

13 Sagesses

Le recours contre le jugement imposant le maintien du bail du Cadratin arécemment été rejeté. Sous réserve d’un recours devant le Tribunalfédéral, l’échéance de 2020 est confirmée. Un immense merci à Mmes Fardelet Montandon de se démener pour obtenir le respect des engagements prisà leur égard au moment de la vente du patrimoine de leurs parents.Pour assurer la pérennité de l’atelier au-delà de 2020, une fondation vaêtre créée et le Cadratin pourrait intégrer une halle industrielle rénovée dans le cadre du projet des «Nouveaux Bosquets» À voir sur notre site: www.lecadratin.ch/l’avenir.html

DERNIÈRE MINUTE

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Plaque de chocolat embalée pour la circonstance. 5

… UN INDISPENSABLECOMBAT

Le bonhomme est facile à identifier. Ilporte de grosses lunettes rondes qui luidonnent des airs de hibou, à la voix toni-truante et pratique, disons, un français àne pas mettre entre toutes les oreilles.

Il a fait les grandes heures de FranceInter, le samedi sur le coup de midi, missur le gril tout ce que l’Hexagone comptede truands de l’alimentation et a fini parse faire virer. Depuis, il cultive son proprejardin potager et vient de publier un xème

bouquin joliment intitulé «Arrêtons demanger de la merde !». Peu ragoûtant…à priori. Sauf que sous cette couvertureracoleuse se cache un délicieux pam-phlet : en un peu plus de 200 pages, Jean-Pierre Coffe tire le portrait d’une sociétévictime de ces empoisonneurs sans scru-pules que sont les grands distributeurs etautres fournisseurs de produits standar-disés et insipides qui garnissent lesrayons des temples de la malbouffe.

Coffe, pourtant, ne se contente pasde poser un verdict implacable, il propo-se des solutions. Comment achetermieux, moins cher, comment «faire cre-ver de faim ceux qui aujourd’hui se nour-rissent, grassement, de notre ignorance».Quel parallèle, me direz-vous, entre cebrûlot et l’anniversaire, tout de mêmen o c e s d ’ a r g e n t , d u C a d r a t i n ?Jean-Renaud, c’est vrai, n’a rien d’unStrigidae – Ne cherchez pas, c’est le nomde famille des hiboux -, et lorsqu’il s’a-dresse à vous, c’est rarement en élevantla voix. Mais à l’heure où chacun peut seprétendre graphiste, bricoler son proprelivre, multi-copier n’importe quel docu-ment et garnir ses propres étagères detas de bouquins aussi inutiles que malfichus, il est vital qu’il se trouve encoredes imprimeurs et des éditeurs quisavent respecter la belle typographie, lebon goût et l’esprit de création.

L’ami Coffe se bat contre la malbouffeet c’est bien, c’est utile, c’est indispensa-ble. L’ami JR et toute l’équipe duCadratin, eux, se battent contre les«empoisonneurs» de nos bibliothèques,et c’est bien, c’est utile, c’est indispensable.

Roger Jaunin

« VRAIS AMIS »

Une assemblée générale chez «LesVrais Amis du Cadratin» n’a rien d’em-pesé entre la parole du président et lerapport des incontournables vérificateursdes comptes, il y a un pétillement d’hu-mour et de bonne humeur. Cet après-midi là, à l’heure du thé …de l’automne,on était 40 sur les 680 membres del’Association à lever la main en chœurpour accepter tous les rapports et lapérennité de la modeste cotisation à 20francs, qu’il n’est pas interdit d’arrondir !En présence des deux vaillantes ex-pro-priétaires du lieu, Mmes Fardel etMontandon, on salue la confirmation dela Chambre patrimoniale pour le main-tien du Cadratin jusqu’en 2020, commele contrat de vente le précisait.

Mais, voilà, le comité et son prési-dent, le joyeux Silvio Giobellina, arriventau terme de leur mandat et passent lamain à une équipe presque nouvelle.

LES TYPOS AUX MANETTES

Silvio Giobellina, qui avait déjà rempi-lé une fois, se retire mais se déclare prêtà continuer… de servir la soupe denovembre ! C’est un typo-navigateur quiprend sa place, Robert Cuenod, assistéde Marianne Wespi Parisod, fidèle à latradition typographique. Joanne Bantik,tombée avec bonheur dans le ronronne-ment des presses et le bruissement despapiers, poursuit sa tâche d’accueil etd’animation de l’atelier-boutique, entou-rée de Philippe Dubath, journaliste-écri-vain au grand cœur, Hugues Eynard etRené Quennoz, typos enthousiastes.

L’activité de cette année du 25e anni-versaire du Cadratin, sera riche et variée.Le Salon du Livre fut l’occasion de plu-sieurs projets de livres et du calendrier,inspiré cette année des propos de PierreDesproges. Il y aura les « Rencontres deLure » où Hugues Eynard accompagneraJean-Renaud, le Salon du livre de Salins-les Bains et les «Rencontres romandesdu Livre d’Artiste» au Palais de Rumineavec le concours de la BCU sur le thèmeimposé «Le Passant de l’Athos» deBernard Noël. Rendez-vous le 2 novem-bre pour fêter les livres nouveaux et le25e anniversaire du Cadratin.

LE FIL ROUGE DEFRANÇOISE CORBOZ

Il court, précis et fantasque del’Arche de Noé au Château de Chillon,du cyprès aux chats perchés, de la Russieà l’éventail japonais. Rouge trace dans ledessin de plume noire. Les dessins deFrançoise Corboz, admirablementfouillés et fleuris comme une dentelle,sortent dans un livre précieux, fruit dutravail des deux imprimeries de Jean-Renaud Dagon. La couverture de beaupapier charnu a été réalisée au Cadratinpar la fine équipe de typos autour dumaître. On en finit pas de suivre ledéroulement de la pelote rouge se faufi-lant au long d’un voyage féérique qui envaut bien d’autres. Les originaux étaientexposés un mois dans l’atelier, mais lelivre est toujours en boutique à la rue dela Madeleine.

Mireille Callu

Le Cadratin… Assembée générale de l’Associationdes Vrais Amis le jeudi 3 juin 2013

Un grand Merci à :Silvio Giobellina,

Philippe Petitpierre etCédric Rimella,

membres fondateurset sortants du comitéde l’association des

Vrais Amis du Cadratin.

Par leur travail ils ontcontribué à l’essortdu Cadratin.

JRD

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Saisis ton écritoire, vieux tabellion, ettranscris mes cris (de joie) en écrits(d’é-moi). Pas de vociférations, juste la jubi-lation, l’émulation d’une saine agitation,de quelques élucubrations, des allitéra-tions et des vibrations, pour la promo-tion d’une célébration pleine d’émotion,et bien sûr digne de ce nom…

Musique!

«Combien de temps, combien detemps…» chantait Stephan sur un ryth-me quasi mécanique. «Mais vingt cinqans, oui mon grand, vingt-cinq ans !»Répondait depuis la «HeidelbergAvenue» le chœur des presses, sur unrythme métallique !

«Vingt cinq ans, noces d’argent ettoutes mes dents !» ajoutait par ailleursla grand-maman d’Armand…

Vingt cinq ans, oui vingt cinq ans, que,patiemment, méthodiquement, méticu-leusement et, bien évidemment, passion-nément et obstinément mais aussiamoureusement, entre deux pauses le

Cadratin emballe ses presses, amasse sescasses, fond ses caractères, et déballe sestirages. Un quart de siècle qu’il disposeet compose pour les uns, propose auxautres, sort de ses écrins des trésors envers ou en prose, et, sans prendre lapose, s’impose en fin de compte commeune référence dans son art.

Musique (encore)

«Avec le temps, avec le temps va,tout s’en va…» Mais, non Léo, t’as riencompris ! Avec le temps, tout ne s’en vapas, enfin pas tout le temps, pas forcé-ment. En tous cas, pas le Cadratin! Non,gros malin, ni le Bénin, ni le Tonkin, leCadratin !

Regarde, vingt cinq ans après, dupapier et des encres toujours plein lesmains, il continue son petit bonhommede chemin et, chaque année vers laToussaint, réunit ses amis fidèles et sescopains… Véritable festin pour les sensque cette fête.

Mystère dela cour du Cadratin.Photo Jean Pierre Revel

PremièrerencontreNous devions nous voir à trois, chez

un ami papetier à Braine-le-Comte, petiteville entre Bruxelles et la frontière fran-çaise : le papetier, un ancien étudiantm'ayant succédé comme professeur degravure à l'Académie de Bruxelles etmoi. Nous avions à choisir un papier par-ticulier pour faire un livre. L'ancien étu-diant, assez volubile ponctuait son pro-pos par de larges gestes de la main aubout de laquelle il tenait un petit livrerouge. Le temps passant vit augmenterma curiosité et je me demandais d'oùpouvait bien sortir ce livre. N'y tenantplus je lui arrachai le livre des mains etdécouvris un ouvrage à la belle typogra-phie, mise en page et impressions blan-ches de toute beauté. L'interrogeant surl'origine de l'opuscule, il me dit l'avoirreçu d'une ancienne étudiante, Chinoiseou Africaine, qui avait fait un stage chezun typographe en Suisse.

Nous avions ma femme et moi , leprojet de visiter une exposition à Bâle etje proposai à Chantal de pousser unepointe jusqu'à Vevey, là où œuvrait letypographe en question. Ainsi fut fait.

Quelques contacts pris par internet. Letypographe me demande incidemment,le but de ma visite et je lui répond : « Jevoudrais voir votre tête». Nous conve-nons d'un rendez-vous, un après-midi dejuillet vers,15 heures.

Nous quittons Bruxelles, traversonsles Vosges et l'Alsace, arrivons sur lesbords du Léman la veille du jour conve-nu et nous nous installons à Corseaux.Le lendemain matin, nous repérons larue de la Madeleine, le n°10, petiteimpasse sur la gauche, porte à gaucheégalement et à droite une vitrine cons-tellée de livres et autres publications.Parfait, nous savons où aller cet après-midi.

Vers 15h., nous passons devant lavitrine vue le matin et cette fois, la lumièreest allumée. Bon signe. Nous garons lavoiture et j'entre le premier dans la petiteboutique. Un homme assez grand, che-velu et souriant arrive et nous faisonssommairement connaissance. Il me mon-tre ses éditions dans la boutique, nouspassons ensuite dans un petit bureau, un

corridor et nous découvrons une grandesalle où sont entreposées diverses poli-ces, en nombre impressionnant, ensuitenous nous retrouvons dans une autrepièce, à droite, un bar, à gauche desmachines rangées. Commentaires etimpressions, lieu de méditation et decréation… Je suis très impressionné, tantpar le mystère du lieu, que par le typo-graphe que je sais maintenant s'appelerJean-Renaud Dagon. Nous revenons surnos pas et nous nous installons dans lepetit bureau déjà vu précédemment. Là,assis, les yeux dans les yeux, Jean-Renaudme demande : et maintenant que vousavez vu ma tête, qu'est-ce qu'on fait ?

Roger Dewint

Et je puis vous dire ce que nousavons fait, et si vous suivez les aventuresdu Cadratin vous le savez déjà. Un livreest né de cette rencontre . Une col-laborat ion « Belgo-Su isse » entreRoger Dewint pour les gravures, letexte de Laurent Berger et une réalisationdu Cadratin. Une bien belle rencontre.

JRD

Musique (enfin)

«Joyeux anniversaire…»

Vingt cinq ans, oui vingt-cinq ans, eton lui souhaite que ça dure, même siparfois c’est dur, que ça dure encore,encore longtemps… Vingt cinq ans, ouivingt cinq ans, c’est bien, très bien mêmecomparé aux gamins ou à certains, maisau regard des centenaires, c’est rien,enfin presque rien !

Alors, tous nos vœux à cette superbeéquipe, puissiez-vous poursuivre votrechemin encore vingt cinq ans (voire plus,si affinité, bien sûr) et continuer à nousenchanter, bravo et merci pour tout !

Jean Pierre Revel

Céléb

ratio

n II

avecJean-Renaud Dagon

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Les RencontresInternationales de Lure

du 25 au 31 août2013.

Pour la première fois j'ai eu le trèsgrand plaisir d'assister à cesRencontres. Jean-Renaud m'a invité àl'accompagner cette année. Quellemagnifique découverte. D'abord lelieu, charmant petit village des Alpes-de-Haute-Provence perché sur unéperon rocheux dominant la vallée dela Durance; ensuite les participants etles intervenants, tous des passionnésde la lettre, du graphisme, de la typo-graphie et du livre sous toutes ses for-mes. Le thème de cette année «Avisaux amateurs» a été riche en confé-rences, débats et discussions contra-dictoires. A aucun moment, malgrédes sujets des fois très pointus (nou-velles technologies informatiques) jene me suis ennuyé. Le mercredi jour-née recréative à Marseille. Visite etdécouverte du nouveau musée leMUCEM, magnifique arcitecture surle front de mer à côté du Vieux-Port.Une semaine riche en enseignementset découvertes. Un grand merci àJean-Renaud de m'y avoir convier, etune expérience à renouveler... sansmodération.

Et pour tous les amateurs de lec-ture une seule adresse coup decoeur : Banon et sa libraire «LeBleuet».

Hugues Eynard

Je me demandais l'autre jour com-bien de portes j'avais ouvertes dans mavie. Six décennies à entrer et à sortir dequelque part, forcément, chaque jour, çafait des portes. C'est un joli mot, porte.Et c'est joli, une porte. Pas toujours, maissouvent. Certaines portes sont immor-telles, elles restent à l'esprit, au coeur.

On vit avec, on les porte.

Je n'oublie pas la porte de la classederrière laquelle ma maîtresse d'écolem'envoyait réfléchir parce que je parlaistrop. Je n'y réfléchissais pas vraiment,derrière cette porte - d'ailleurs j'étaisderrière la porte vu de la classe, maisdevant la porte vu de mon poste isolé! -je ne faisais rien que me dandiner, mesuspendre aux crochets à habits, mettreles doigts dans le nez ; en fait je craignaissurtout que passe le directeur, un petithomme dodu avec un béret sur la tête.Son bureau n'était pas très éloigné de laclasse, et quand il en sortait, il lorgnait surtout ce qui bougeait ou ne bougeait pasdans les couloirs. Près de ma porte,quand celle de son bureau s'ouvrait, jeme figeais, je faisais semblant de ne pasvoir qu'il venait dans ma direction, maisje savais bien que quelques secondesplus tard je n'allais pas rigoler. Il posaitune question, pour la forme. Je reculais,appuyant mon dos contre la porte, maisj'étais piégé, le duel était inégal.Il savaitoù ça fait mal: il prenait soit la joue pourla pincer, soit les petits cheveux au-des-sus des oreilles pour les tirer jusqu'à mesoulever. Presque. C'est drôle, la porteet lui, aujourd'hui, dans ma mémoire, for-ment un couple qui me touche.

Il est difficile de se rappeler la cou-leur, la forme, le poids, le bruit de toutesles portes d'une vie. On se souvient plu-tôt des gens et des choses, des vies etdes surprises qu'il y avait derrière. Ouvrirune porte, passer ailleurs, découvrirquelqu'un, un monde, un travail, unevoix, des voix, des odeurs, des mouve-ments. Ouvrir une porte sans frapper ouoser trois petits coups et attendre laréponse. Prendre rendez-vous et attendrederrière la porte. Regarder à travers lesvitres des portes, à travers les reflets,essayer d 'y vo i r que lque chose .Espionner. Reluquer. Des gens font duporte à porte mais je ne crois pas que cesoit bien amusant. Des artisans, des artistes

devrait-on dire, savent fabriquer des por-tes, c'est fou, je trouve. On parle desportes de l'enfer, de celles du paradis, dupurgatoire, celles-là il est vraisemblableque je serai appelé à les ouvrir un jour.Qu'y aura-t-il derrière ? D'autres portes,plein de portes, ou un long cheminmenant à une porte immense et dorée,ou végétale, ou minérale, sous laquelleon passera pour mériter d'être emportépar le vent tout doux de l'éternité molleet confortable ? Les portes les moinssympathiques me semblent être cellesdes hôtels moderne: elles s'en sententrien, ne font que des bruits froids, et ellesn'ont plus de clés, mais des cartesmagnétiques. C'est comme ça.

Je m'égare. Ce que je voulais dire,c'est qu'un jour j'ai poussé la porte duCadratin sur le quai Perdonnet à Vevey.Porte vitrée, bruyante, plutôt lourde.Porte respectable, qui en a vu. Et j'ai eubien de la chance de pousser cetteporte-là : derrière il y avait de la vie.Depuis le Cadratin a déménagé, la portea changé, mais pas tellement quand j'ysonge. La porte du Cadratin est encoredu même genre, une vraie porte dont onsait qu'on l'ouvre et qu'on la ferme, uneporte qui porte bien son nom, une portequi a été poussée par bien des mains, unnombre incalculable de fois, avant lamienne. On devrait photographier, dèsl'enfance, toutes les portes qu'on ouvreet qu'on ferme. Elles nous emportent,nous conduisent, nous protègent, nousgardent, nous rassurent, nous intriguent,nous isolent, nous mêlent à de nouveauxunivers, nous enseignent, nous font gran-dir. Les écoliers ont raison, les farceurs,quand en réponse à l'ordre de l'ensei-gnant ils prennent la porte, oui, ils laprennent vraiment. Ils font le geste, aumoins. Ils ne savent pas qu'ainsi ils ren-dent hommage à celle qui sera au boutde leur main toute leur vie, partout,chaque jour la même et chaque jour dif-férente. Je porte les portes dans moncoeur. Il y a de la place pour beaucoupde portes, dans mon coeur. Et celle duCadratin que j'ai poussée il y a une dizained'années y a la sienne.

Philippe Dubath

Hugues et Jean-Renaud sur la terrasse de laChancellerie de Lurs.

Il suffitd'ouvrirla porte

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Le 14 juin 2013 Jim est parti pour un monde que l’ondit meilleur. Cet éternel révolté est enfin tranquille. Saprésence rassurante me manque, bien que je sente surmon épaule son regard bienveillant.

Je pense très fort à sa femme et à ses enfants.

Le superbe livre que nous avons fait ensemble«WHAT-WHAT-WHAT» reste un souvenir émouvantqui me permet d’avancer.

JR (ou Grand, comme il disait).

JimCharmillot

Il savait tout faire, la peinture, le dessin, lasculpture et dernièrement la gravureétaient ses passions.

R.I.P.

Photo Danny Enard Photo Danny Enard

Photo Danny Enard

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