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v i va n tAvec l’application mobile neon vous
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téractif supplémentaire / Vidéos, inter-
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En plus de ce contenu nous vous pro-
posons d’interagir avec l’équipe et les
lecteurs de NEON, discutez et parta-
gez votre avis sur les nombreux sujets
que traite le magazine.
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Maria desleta
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S o m -m a i r e
C o n n a î t r e JusQu’ou AllEr pour ton Job
Coucher, mentir, trahir, et même...bosser. Vous êtes vraiment pret à tout.
Vos strAtégiEs pour miEux ViVrE lEs toi-lEttEs
petit précis de psychologie de chiottes. parce qu’on ne devrait
s’emm..avec nos besoins naturels
EnfAnts dE lA bAllEpetit précis de psychologie de chiottes. parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
pipi pour touspetit précis de psychologie de
chiottes. parce qu’on ne devrait.
ACtiVistE dE ChoCCoucher, mentir, trahir, et même...bosser. Vous êtes vraiment pret à
tout.
av o i r intErViEw sommArE d’AuréliEn bEllAngEr
on lui a mis notre sommaire devant les yeux.
moChE powErpetit précis de psychologie de chiottes. parce qu’on ne devrait
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dur rEtour pour l’immigré
Coucher, mentir, trahir, et même...bosser. Vous êtes vraiment pret à tout.
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s’emm..avec nos besoins naturels
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r e S S e n t i rEVJf à blACkpool
on lui a mis notre sommaire devant les yeux.
r e S p i r e r mEs VACAnCEs sur unE AirE d’AutoroutE
Coucher, mentir, trahir, et même...bosser. Vous êtes vraiment pret à
tout.
mArsEillE mA VillEpetit précis de psychologie de chiottes. parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
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JuSqu’ou aller pour ton Job
Coucher, mentir, trahir, et même...bosser. Vous êtes
vraiment pret à tout.
voS StratégieS pour mieux vivre leS toiletteS
Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne
devrait s’emm..avec nos besoins naturels
enfantS de la balle
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ou AllEr
pour ton
Job?
affronter un tyranPendant huit ans, Emmanuelle, consultante dans un cabinet de conseil, a supporté un boss colérique, agressif, autoritaire et volontiers grossier envers ses employés. Beaucoup ont quitté le navire, lassés de ses sautes d’humeur. «Même les clients ont parfois peur de lui» glisse Emmanuelle. Elle veut que ça cesse, mais elle est pétrifiée à l’idée de lui dire ses quatres vérités. Avec un analyste, elle participe Pendant huit ans, Emmanuelle, consultante dans un cabinet de conseil, a supporté un boss colé-rique, agressif, autoritaire et volontiers grossier envers ses employés. Beaucoup ont quitté le navire, lassés de ses sautes d’humeur. «Même les clients ont parfois peur de lui» glisse Emmanuelle. Elle veut que ça cesse, mais elle est pétrifiée à l’idée de lui dire ses quatres vérités. Avec un analyste, elle participe alors à des s»ances de coaching. Pendant huit ans, Emmanuelle, consultante dans un cabinet de conseil, a supporté un boss colérique, ade coaching. alors à des séances de coaching pour répéter l’entretien qui décidera de sn avenir: soit elle arrange les choses avec ce pa-tron irascible mais malgré tout compétent, soit elle met les voiles. Trois mois à défi-nir une stratégie pour maîtriser ses émotions et être au top le jour J. Le tout avec un accompagnement tendance ad hoc: massage, ostéopathie et autres manipulations de fluides corporels. Enfin zen, Emmanuelle convoque son boss: «il faut qu’on parle». Rien de bien croustillant dans la confrontation, un simple dialogue sur ce qui va et ne va pas, chose pourtant impossible durant ces huit ans. Depuis ces quelques minutes d’explication le patron est presque sympa.
notre expert: marie pezé, psychanalyste et docteur en psychologie, 63 ans, spécialiste de la souffrance du travail.Emmanuelle à bien fait de demander une aide psycholo-gique, mais le travailleur doit surtout s’informer sur ses droits et graver dans son esprit l’article L4121-1 du Code du travail, qui stipule ceci: «L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécu-rité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs».
riSquer ma vie«L’Afrique me faisait rêver depuis tout petit: l’aventure, les grands espaces... Quand ma boite m’a parlé d’un poste en Angola, j’ai signé les yeux fermés. J’ai vite déchanté. Comme tous les expats, je vivais dans un compound ultrasécurisé dont je ne sortais que pour aller au travail, sous escorte. Une fois, je me suis fait dépouiller sur un marché, une autre fois braquer en voiture. J’avais peur du racket et des enlèvements, j’étais sans cesse sur le qui-vive. J’ai tenu deux ans parce que mon boulot était inté-ressant et que, entre mon salaire et les primes de risques et de mobilité, je gagnais 75000 euros par an. De retour à Marseille, j’ai pu m’acheter un appartement et j’ai trouvé un travail tranquille. Nicolas, 29 ans, Marseille).
notre expert: roméo langlois, 34 ans, grand reporter, ex-otage des farc en Colombie.«La vie d’un expat est à l’opposé de celle d’un cor-respondant à l’étranger: L’expat est envoyé par son entreprise, qui assure sa sécurité dans un pays à risque, le correspondant lui va à la rencontre du pays. Il faut être vigilant mais ne pas tomber dans la paranoïa.
sE trAVEstir, sE dépAssEr ou rEstEr soi-mêmE... 16 ExpériEnCEs VéCuEs dAns lE mondE du trAVAil,, CommEntéEs pAr dEs spéCiA-
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_Un article de MaUde Paterson / crédits Photos saMUel son, caMille JP.

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CouCherA 21 ans, Sybille décide de se lancer dans des études de médecine. Problème: la prépa coûte cher. Pour s’en sortir, elle s’engage sur le chemin périlleux des petits boulots. «Je finis par trouver un plan qui me convient parfaitement: faire le service dans les mariages. 200 euros par weekend pour une seule nuit de travail. Le premier soir, je suis en binôme avec un jeune homme de 28 ans,. Il me confie que le responsable me fait tra-vailler en même temps qu’une autre fille et qu’il choisira la meilleur pour bosser régulièrement. Coup de mas-sure. Mais je n’ai pas le choix: il me faut ce boulot. Je lui demande: «comment tu sais?» Réponse: «C’est mon frère». L’idée me traverse alors l’esprit de le séduire pour qu’il fasse pencher la balance en ma faveur. Je lui fais de grands sourires pendant la soirée, tout en es-saunt de m’appliquer au boulot. Trois heures du matin, le service se calme, il m’invite à faire une pause clope en tête à tête. Bingo. Il me trouve sympa. Je suis ravie. Il fait froid, on grimpe dans sa voiture et il me dit «tu sais si tu as vraiment envie de bosser on peut toujours s’arran-ger». Tout va très vite, au moment de me rahbiller je me sens aussi sale que forte, au final, j’ai décroché le job. Est-ce que je regrette, oui et non. Ce job j’en avais be-soin mais ça a révélé mon manque de confiance en moi.
Changer de nomEn 2004, Akim décroche un job de courtier en place-ments financiers. Les premiers mois, il doit se consti-tuer une clientèle en prenant des rendez-vous par téléphone. Il se rend vite compte que quelque chose cloche: «Mon nom, Mon nom arane gêne les clients. J’ai beau avoir un très bon contact avec eux, je sens que ça les empêche d’aller plus loin. Je mets un peu de temps à accepter cette réalité, mais ça devient flagrant: je ne décroche des rendez-vous qu’avez des clients maghré-bins! Je finis par en parler à un collège tunisien qui me demande d’emblée: «Tu n’as pas changé de nom?». Lui travaille depuis longtemps avec un nom d’emprunt. J’en parle à mon responsable, très au fait de cette problè-matique, qui m’apporte son soutien. Ensemble, on réfléchit à un nouveau nom, quelque chose qui sonne français, sans en faire trop. C’est comme ça que je deviens Philippe Monier. L’effet est immédiat; J’obtiens quatre fois plus de rendez-vous. Les réactions sont par-fois délicates dans mon entourage, notamment du côté de mes parents, qui peinent à comprendre. Mais pour moi, c’est très simple, je contourne un obstacle. Ce nom d’emprunt, il n’a pas plus d’importance que le cos-tume que je porte. Il m’aide lors du premier contact, après il s’éfface. Mes clients réguliers connaissent mon vrai nom. C’est triste de constater que la société fran-çaise en est encore à ce genre de préjugé.
me trahirCharlotte est une socialiste convaincue, encartée PS depuis plus de dix ans. Mais en 2008, cette brillante économiste reçoit une proposition étonnante: une place dans un cabinet ministériel du gouvernement Fillon! C’est le début d’une aventure schizophrénique: «Au départ, ça me semble impensable, mais je décide tout de même de rencontre les membres du cabnet. C’est très impressionnant, une ruche foisonnante ou s’affairent des trentenaires dynamiques. On me parle du poste: passionnant! L’attrait du job et la possibilité de booster ma carrière sont trop forts: j’accepte. Je deviens donc conseillère technique, ce qui à son im-portance puisque à cet instant je me considère comme une technicienne qui met son travail au service de l’in-
térêt général et non pas d’un gouvernement. Au début, ça se passe bien: mon travail est apprécié, c’est exaltant.
Seul souci: la machine à café. Tout le monde parle po-litique, j’ai du mal à tisser des liens. j’évite aussi les dé-jeuners: impossible d’argumenter face à une table de dix personnes. Et puis le boulot change de nature, on me demande de préparer des «éléments de langage» pour le ministre. Je dois défence des mesures qui vont à l’encontre de mes convictions! Je finis par quitter le ca-binet, l’expérience a été riche. Mais si on me faisait au-jourd’hui la même proposition je refuserais. Charlotte, 30 ans, Paris.
virer un ami«Nous sommes une dizaine autour de la table. Le bureau de l’association au grand compet. Les re-gards se tournent vers moi, le trésorier. J’ai la gorge un peu sèche mais je me lance... Depuis quelques semaines, l’ambiance s’est tendue dans notre bande de potes, enseignants et journalistes. Tous béné-voles, à part deux salariés permanents. Nous suons sang et eau le soir, après nos boulots respectifs, pour terminer un livre collectif, fruit de nos re-cherches. L’éditeur s’impatiente. Albert, un de des deux permanents devait coordonner l’ouvrage et s’était attribué l’essentiel de la rédaction. Mais il n’a rien foutu et, quand on s’en est rendu compte, tous les bénévoles ont dû enchainent les nuits blanches pour combler ses manques. Naturellement beau parleur, Albert a cette fois compromis un dossier vital pour l’association. Alors le bureau à décidé de le licencier Problème: c’est un pote. Aussi on m’a demandé à moi, le benjamin, de lui annoncer. Je le regarde dans les yeux, lui débite sans ciller l’acte d’accusion et prononce la sentence. Philippe, 49 ans, Montmorency.
travaillerP« Sur mon contrat, je suis à 37,5 heures par se-maine. En réalité, je travaille six jours sur sept, de 10h à 21h30 minimum. J’enchaîne régulièrement plusieurs nuits blanches pour boucler un projet dans mon cabi-net d’architectes. Moi qui suis une grosse dormeuse, je repousse sans cesse mes limites. Le café aidant, j’ai découvert que j’étais plus efficace en pleine nuit. En juin, j’ai bossé tous les jours non-stop, weekend inclus, car j’avais 3 projets à rendre, en plus du suivi quo-tidien de deux chantiers. A la fin, j’étais une loque. Mon patron ne m’a donné que cinq jours de ré-cup’. Impossible d’en demander plus dans une petite agence. L’argent n’est pas ce qui me motive. Je gagne 2 200 euros net par mois, quoi qu’il arrive. Je m’ac-croche car mon patron m’accorde une liberté totale: je gère tout de A à Z. J’emmagasine de l’expérience pour plus tard. J’ai un objectif: monter ma propre agence avec mes 30 ans. » (Cécile, 28 ans, Montreuil)
notre expert: aurélie boullet, 33 ans, alias zoé Shépard, auteure de ta carrière est fi-nie! et du best seller absolument dé-bor-dée! (éd. albin michel) « Cécile a l’air passionnée: c’est génial, mais je m’inquiète pour sa santé. Elle devrait s’économiser, sinon elle va s’épuiser à vivre à une telle cadence. Elle n’est pas loin du burn-out. Il faut trouver un juste milieu. Ne rien faire peut être aussi mauvais. Moi, j’ai
vécu le « bore-out » quand j’ai été placardisée. On pointe, dans la fonction publique. Je venais au bureau de 8h30 à 17h, mais on ne me donnait rien à faire. J’étais évincée de réunions, il y avait un cordon sanitaire autour de moi. Pour que mon cerveau ne s’atro-phie pas complètement, j’ai lu des quantités de rapports de droit et d’économie, en attendant de trou-ver un autre poste. »
me Soumettre« Prévoyez-vous d’avoir des enfants d’ici à cinq ans? » « Que pensez-vous des 35 heures? » « Etes vous fumeuse? » Pendant l’entretien, les questions étaient tellement bizarres qu’Elisa a senti que ça ne tournait pas rond dans cette boîte de traduction. « La cigarette, j’ai compris plus tard que c’était pour savoir si on ferait des pauses. Mais voilà, je sortais de mon école de traduction et il me fallait une ex-périence sur mon CV. Alors j’ai pris sur moi. » Le règlement intérieur est « ubuesque »: interdiction de parler avec ses collègues (ils communiquaient par Post-it!), tous les mails relus par son supérieur, interdiction d’avoir son téléphone portable allumé... « Régulièrement, le patron s’asseyait derrière moi et me disait: « Vous avez l’impression d’être efficace, là? » Un jour, une collègue ramasse ses affaires alors qu’il n’est que 11 heures. Elisa lui chuchote: « Tu vas où? » Elle lui répond (en chuchotant aussi): « Je suis virée mais je n’ai pas le droit de le dire. » Délirant. « J’ai découvert toute la puissance du harcèlement. On suivait tous comme des moutons, moi la pre-mière alors que je suis plutôt grande gueule. Avec ce job, j’ai appris à me taire et qu’il fallait s’attendre à tout dans le travail. » (Elisa, 31 ans, Barcelone) notre expert: Claude de Scoraille, 49 ans, psycho-thérapeute à la Clinique du travailler« Les premières questions en disent long: le recruteur cherche des profils soumis. Il est dans le tout-contrôle. Face à un patron harce-leur, se taire n’est pas la bonne tactique. Se rebeller non plus! Il faut être plus stratégique: tuer le serpent avec son propre venin. Il faut recréer le ralation. Elisa aurait pu répondre: « Je vous re-mercie de votre attention. Je sais que tout ce que vous faites, c’est pour que les choses aillent bien. Surtout, dites-moi si quelque chose ne vous convient pas dans mon tra-vail. » Il faut sur-solliciter son retour, jusqu’à faire volontaire-ment des petites erreurs. Le har-celeurs sera déstabilisé et n’aura plus de plaisir à harceler. »
blufferP« A l’époque, j’avais faim et je prenais tous les pe-tits boulots. » C’était il y a dix ans, Justine écumait les agences d’hôtesses et de street marketing. « Vous sa-vez faire du roller? » « Oui, bien sûr » Franchement, elle m’aurait dit « Vous savez faire du parapente? » j’aurais dit oui avec la même assurance. C’est sorti
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tout seul. Il me fallait ce job, je verrais plus tard pour les détails techniques. » Evidemment, Justine NE SAIT PAS faire du roller. L’agence la rappelle pour une mission de tractage sur rou-lettes devant Monoprix d’Issy-les-Moulineaux, en banlieue parisienne. « Le jour J à 7 heures du mat dans ma grosse doudoune blanche Monoprix, je faisais pas la maligne. » Les fesses en arrière, les jambes écartées et fléchies au maximum pour être le plus près du sol, Justine s’accroche aux lampadaires, aux poteaux, aux passants... « Mes collègues hallucinaient, j’étais dans un état de polio attitude. Finalement, c’est devenu un jeu avec les passants qui avaient pitier de moi et prenaient mes flyers. Comme quoi ça valait le coup, on trouve toujours une solution pour rebondir. » (Justine, 31 ans, Paris) notre expert: elky, 31 ans, champion de poker, n°1 français « Pour bluffer, il faut avoir confiance en soi et le jouer à fond. Sinon, c’est vrai-ment ridicule. Au poker, c’est une des qualités essentielles pour gagner. Tout l’art réside dans le regard. Des yeux qui roulent, qui regardent vers le bas ou qui brillent un peu trop et vous êtes cuit. L’idéal, c’est de porter des lunettes de soleil, et surtout il ne faut pas trop réfléchir. Au poker, pour progresser, on filme les parties puis on regarde si notre visage reste impassible, si on ne casse pas la routine des gestes quand on a une bonne main. »
me battreChristine, c’est le cauchemar des patrons. Une salariés modèle d’une agence de com-munication à Nice qui vire au bouledogue à la moindre injustice. « Je fais bien mon bou-lot, mais faut pas m’chercher. » A 25 ans, elle remet à sa place un patron autoritaire qui l’accuse injustement d’avoir manqué une com-mande: « Si j’étais un mec, je vous casserais la gueule. » « Il m’a répondu par un petit sourire, j’avais gagné son respect. J’ai compris qu’avec ce genre de patron, il fallait rendre coup pour coup. » Depuis, Christine enchaîne. « La hié-rarchie ne m’a jamais pétrifiée. Je considère que l’autre est un adulte avec qui on doit pou-voir discuter. Je ne suis pas du genre à baisser la tête, c’est une question d’estime de soi. » Dernier combat en date: il y a un an, elle frôle le licenciement. « Je sui arrivée au bureau en fin de matinée pour rattraper ma nuit passée chez un imprimeur. » Christine est convoquée par le patron, sermonnée, elle s’énerve, se dé-fend... l’affaire tourne au vinaigre: mise à pied pour « insubordination »! « C’était tellement injuste! Il fallait réagir, l’étape suivante, c’était son licenciement. » Avocat, échanges de lettres recommandées, Christine se tient à carreau pendant trois mois. Résultat: la mise à pied est levée et Christine a été augmentée à la fin de
nos experts: marc blanc, 58 ans, ancien secre-taire fédéral de la Cfdt chez total « Christine a le sens des responsabilités. Quand on est irréprochable, on a toute la légitimité pour se faire respecter. C’est plus une question de personnalité que d’âge. Et heureusement! Avec la pression du chômage, nombre de salariés préfèrent cour-ber l’échine plutôt que de se faire remarquer pour obtenir gain de cause. C’est dommage. Les hiérarchies sont aussi en attente de ça. » Sophie M., 32 ans, responsable RH depuis huit ans dans le secteur de l’assurance « Effectivement, si un salarié est performant, il est plus légitime et peut poser ses conditions. Mais dans le cadre du travail, se lâcher à ce point-là est à double tran-chant. Il faut défendre ses valeurs, certes, mais ça reste le milieu professionnel, on ne joue pas sa vie. Dans le cas de Christine, j’analyse son augmentation comme un message déguisé de ses patrons pour qu’elle se calme. »
me faire inSulter« En cuisine, on n’est pas des tendres. La ma-nière dont on se parle peut choquer. C’est très sec, pas de s’il vous plaît », c’est l’efficacité qui prime. » David, 26 ans, a fait ses classes dans un restaurant haut gamme à Lyon, avant de monter en grade pour devenir chef des en-trées. Les « putains mais tu te branles?!!! » (sic) sont légion. Pour une botte d’asperges man-quante, David a déjà vu son chef piquer une colère noire, taper de toutes ses forces sur son plan de travail et lui hurler de rage: « T’es vrai-ment trop con! » « Evidemment, ce sont des rapports infantilisants, et c’est humiliant de se faire reprendre devant ses collègues. Au début, je me justifiait pour tout je bouillonnais. Puis j’ai compris qu’il valait mieux acquiescer, car ce qui compte c’est que le problème soit réglé. Avec le temps, je trouve que c’est justifié. C’est un métier où il faut savoir résister à la pression, et les gens sur qui on gueule moins... ils bossent moins bien. Ce sont les codes de ce milieu, je n’accepterais pas qu’on me parle comme ça dans la vie. » (David, 26 ans, Lyon)
notre expert: michel C., 53 ans, général dans l’armée française, en activité « Ca ne me choque pas que l’on puisse avoir un langage plus vif au moment du coup de feu. Comme dans l’armée, on va pous-ser les jeunes recrues dans leur retranchements pour les aguerrir. L’humiliation n’est pas une méthode en soi. Mais en
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cuisine, comme dans l’armée, chacun doit jouer sa partition au moment de passer à l’action. Celui qui se trompe se fait engueuler et passe pour un peintre après des autres. C’est la règle. »
tout remettre en Jeu« J’ai quitté mon job et mon petit confort pour créer ma boîte il y a quelques mois. » Tamia, 31 ans, tient sur ses genoux le fruit de tous ses efforts: la Thé Box, des coffrets de thés vendus depuis cet été par abonnement. Avant, elle était urbaniste dans le secteur public. « J’ai eu envie de nouveauté, de travailler sur un projet concret, rapide. » Avec Julia, son associée, elles décident de se lancer: « En une semaine, on avait posé les bases du concept et choisi d’engager une bonne partie de nos éco-nomies » Mais l’indépendance a un prix: se jeter dans l’inconnu de la création d’entreprise, ne pas se payer la première année et prendre le risque de la faillite. « Avec ce projet, on s’expose personnel-lement. En cas d’échec, notre déception serait im-mense. » (Tamia, 31 ans, Paris)
notre expert: baptiste, 30 ans, trader dans une grande banque française « Si on ne prend aucun risque, on ne peut pas gagner d’argent. Mais Tamia prend bien plus de risques qu’un trader. Pour la majori-té d’entre nous, le job consiste justement à les maîtriser. Moi, si je fais des erreurs, je ne perds pas mon job. Tamia, elle, a engagé son capital personnel, n’a pas de salaire et n’a plus le cadre sécu-risant de l’entreprise. Après, il existe un infime minorité e traders seniors qui jouent avec les fonds propres de la banque (comme Jérôme Kerviel). Ceux-là prennent vraiment des risques »
mariner deux anSPSi aux JO il y avait une épreuve du recrutement le plus long. Alessandro pourrait prétendre au po-dium: deux ans d’entretiens, de tests, de mises en situation, de contre-entretiens, de stages de sélec-tion et d’entretiens de confirmation pour intégrer un cabinet d’avocats à Londres. Une machine de guerre, à tel point qu’on se demande si ce n’est pas le plus endurant qui décrochera la médaille. « Je me suis battu jusqu’au bout parce que ce job, c’est mon assurance-vie. J’aurai toujours cette expé-rience pour retomber sur mes pattes. » Alessandra a 27 ans et cela fait près de dix ans qu’il se pré-pare. La bonne université, le meilleur classement, une dizaine de stages, le réseautage dans les confé-rences internationales... « Pendant les entretiens, les recruteurs m’ont demandé de leur vendre des baguettes chinoises équipées d’un ventilateur ou encore ce que je pensais de la crise des subprimes. En deux ans, il faut rester motivé et entraîné à ce genre de questions pour répondre du tac au tac. Et en dehors des phases de sélection, on est censé « s’occuper » comme on peut. » L’ultime test de motivation? (Alessandro, 27 ans, Londres)
notre expert: yoann huget, 25 anS, rug-byman au Stade toulouSain et ailier du xv de franCe « Dans se tels processus de selec-tion, il faut beaucoup d’humilité et de l’acharnement. C’est ce qu’at-tendent entraîneurs et recruteurs. A chaque étape pour Alessandro, comme à chaque match pour moi, il faut se remettre en question, tenter de s’améliorer pour tendre vers l’excellence. On tient sur la longueur en se dopant à l’esprit de compétition. A chaque fois, il faut repartir sur le terrain en essayant d’être le meilleur. »
me faire arnaquer
Ophélie avait pourtant senti l’entourloupe. La pre-mière année de son contrat dans une atelier de bijoux fantaisie se passe bien. Puis la situation se détériore, les payes arrivent de plus en plus tard et les derniers salaires ne sont pas versés. Ophélie ré-clame, sa boss la balade. Pour ses proches, elle oit partir. Problème: elle aime travailler. Créer des bi-joux, c’est son truc. « J’étais très investie. Et ça me faisait de l’expérience. » Alors elle joue le jeu. Mais toujours pas de chèque. Elle quitte la boîte sans avoir touché ses deux derniers mois, ses heures sup’ et son solde de tout compte. Dans cette affaire, elle a aussi perdu de la confiance en soi. « C’est comme si je n’avais pas été reconnue dans mon travail, du coup je doutais de mes compétences. » Ophélie a fini par attaquer aux prud’hommes et a récupéré les salaires manquants. « Cela m’a rendu la reconnaissance que je n’avais pas eue, mon travail retrouvait sa valeur. » (Ophélie, 27 ans, Paris) •
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dur retour pour l’immigréQuand Maldonado clandestin mexicain, rentre chez lui,
il n’est plus le bienvenu.
aprèS l’inCendieLeur immeuble à brûlé. Dix-huit mois après, les rescapés
racontent.
maiS danS quel monde vivonS nouS
Au Brésil, lire ouvre les portes du pénitenciermaiS danS quel payS vivonS nouS
Ayrault fait son jardin à Matignon
vendeur de Sperme
Jonas, étudiant, éjacule pour payer la fac.
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mAldonAdo à VéCu En ClAndEstin Aux EtAts-unis. sur un mAlEntEndu, il Est
rEntré Au mExiQuE. ou il sE sEnt un étrAngEr.
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empê-cher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur af-fiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait mar-ché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la pro-vince d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous en-voyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
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_Un article de MaUde Paterson / crédits Photos saMUel son, caMille JP.
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«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le réseau routier américain. Soudain, des phares allumés. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des pas qui se rapprochent – Lorsque Maldonado raconte sa fuite, ça ressemble à un thriller au cinéma. Un museau humide se colle contre son oreille. «Monte dans le camoin», lui ordonne le garde frontière. Destination : le centre de rétention.
L’histoire de Maldonado commence des années aupara-vant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique. On y vit souvent avec moins de deux dollars par jour. Il quitte l’école après le primaire, devient plombier puis père de deux enfants. Il boit trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec ses deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à sa mère pour suivre une cure de désin-toxication. A son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a de quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les familles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des pho-tos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans effu-sion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui de-mande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor remplit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans effu-sion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui de-mande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent
sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor remplit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».
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irVoilà trente-huit heures que Maldonado est allon-gé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les don-nées sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’of-ficier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en ap-pelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le télé-phone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il ra-pelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retour-ner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le ré-seau routier américain. Soudain, des phares allumés. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des pas qui se rapprochent – Lorsque Maldonado raconte sa fuite, ça ressemble à un thriller au ciné-ma. Un museau humide se colle contre son oreille. «Monte dans le camoin», lui ordonne le garde fron-tière. Destination : le centre de rétention.
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique. On y vit souvent avec moins de deux dollars par jour. Il quitte l’école après le primaire, devient plombier puis père de deux enfants. Il boit trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec ses deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à sa mère pour suivre une cure de désintoxication. A son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a de quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les fa-milles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des photos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans ef-fusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor rem-plit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».
l’histoirE dE mAldonAdo Com-mEnCE dEs AnnéEs AupArAVAnt, à sAn-to domingo, un VillAgE du sud du mExiQuE.
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Voilà trente-huit heures que Maldonado est allon-gé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les don-nées sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’of-ficier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en ap-pelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le télé-phone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il ra-pelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retour-ner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le ré-seau routier américain. Soudain, des phares allumés. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des pas qui se rapprochent – Lorsque Maldonado raconte sa fuite, ça ressemble à un thriller au ciné-ma. Un museau humide se colle contre son oreille. «Monte dans le camoin», lui ordonne le garde fron-tière. Destination : le centre de rétention.
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique. On y vit souvent avec moins de deux dollars par jour. Il quitte l’école après le primaire, devient plombier puis père de deux enfants. Il boit trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec ses deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à sa mère pour suivre une cure de désintoxication. A son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a de quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les fa-milles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des photos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans ef-fusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor rem-plit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique. On y vit souvent avec moins de deux dollars par jour. Il quitte l’école après le pri-maire, devient plombier puis père de deux enfants. Il boit trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec ses deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à sa mère pour suivre une cure de désintoxication. A son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a de quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les fa-
milles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des photos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans ef-fusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor rem-plit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».
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Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’of-ficier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes,
il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en ap-pelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le télé-phone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il ra-pelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter
les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retour-ner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le ré-seau routier américain. Soudain, des phares allumés. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des pas qui se rapprochent – raconte sa fuite, semble •
milles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des photos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans ef-fusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor rem-plit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».
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mAldonAdo à VéCu En ClAndEstin Aux EtAts-unis. sur un mAlEntEndu, il Est
rEntré Au mExiQuE. ou il sE sEnt un étrAngEr.
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les poli-ciers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, che-veux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-
pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occu-pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses pa-piers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, si-non?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des me-sures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’au-toroute, il trouvera sûrement un
l’histoirE dE mAldo-nAdo CommEnCE dEs AnnéEs AupArAVAnt, à sAnto domingo, un VillAgE du sud du mExiQuE.
_Un article de MaUde Paterson / crédits Photos saMUel son, caMille JP.
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Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la
une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide,
la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre
de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale
des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325
– Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger
sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle
un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses
chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les poli-
ciers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher
de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on
scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, che-
veux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche.
Les données sont comparées ave celles de la base du FBI.
L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu
rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et
personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà
sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui
de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième
fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le
territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça
avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan
et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de
dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à
Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir
payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-
manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez
les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour
Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu
plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la
mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone.
«Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle
est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-
pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occu-
pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».
Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il
prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus
Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses pa-
piers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà
au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle
était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle
en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent.
Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, si-
non?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis»
admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend
des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas
d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as
d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais
huit ans après sa première traversée de la frontière, il est
devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-
temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout,
18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage.
Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des me-
sures sévères contre ce que beaucoup regardent comme
une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont
été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième
fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin.
L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis,
n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’au-
toroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures
que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze
détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il
est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur
de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est
un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by
alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain.
«Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève,
le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir,
son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré
ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre.
On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son
iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés
très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données
sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur
affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu
rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et
personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà
sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui
de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième
fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le
territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça
avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan
et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de
dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à
Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir
payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-
manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez
les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour
Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu
plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la
mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone.
«Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle
est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-
pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occu-
pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».
Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il
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au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle
était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle
en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent.
Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, si-
non?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis»
admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend
des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas
d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as
d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais
huit ans après sa première traversée de la frontière, il est
devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-
temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout,
18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage.
Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des me-
sures sévères contre ce que beaucoup regardent comme
une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont
été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième
fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin.
L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis,
n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’au-
toroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures
que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze
détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il
est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur
de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est
un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by
alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain.
«Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève,
le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir,
son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré
ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre.
On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son
iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés
très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données
sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur
affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu
rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et
personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà
sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui
de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième
fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le
territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça
avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan
et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de
dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à
Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir
payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-
manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez
les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour
Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu
plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la
mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone.
«Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle
est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-
pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occu-
pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».
Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il
prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus
Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses pa-
piers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà
au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle
était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle
en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent.
Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, si-
non?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis»
admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend
des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas
d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as
d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais
huit ans après sa première traversée de la frontière, il est
devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-
temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout,
18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage.
Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des me-
sures sévères contre ce que beaucoup regardent comme
une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont
été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième
fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin.
L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis,
n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’au-
toroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures
que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze
détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il
est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur
de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est
un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by
alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain.
«Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève,
le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir,
son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré
ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre.
On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son
iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés
très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données
sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur
affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu
rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et
personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà
sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui
de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième
fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le
territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça
avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan
et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de
dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à
Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir
payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-
manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez
les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour
Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu
plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la
mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone.
«Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle
est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-
pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occu-
pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».
Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il
prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus
Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses pa-
piers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà
au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle
était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle
en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre
pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent.
Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, si-
non?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis»
admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend
des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas
d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as
d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais
huit ans après sa première traversée de la frontière, il est
devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-
temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout,
18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage.
Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des me-
sures sévères contre ce que beaucoup regardent comme
une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont
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Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occu-pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre
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Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des me-sures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’au-toroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-pée, mais elle va bien» lui dit son fils •
l’histoirE dE mAldonA-do CommEnCE dEs An-néEs AupArAVAnt, à sAn-to domingo, un VillAgE du sud du mExiQuE.
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spErmEmAldonAdo à VéCu En ClAndEstin Aux EtAts-unis.
sur un mAlEntEndu, il Est rEntré Au mExiQuE. ou il sE sEnt un étrAngEr.
_Un article de MaUde Paterson / crédits Photos saMUel son, caMille JP.
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», en-trée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’his-toire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»-Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en es-pagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agri-
cole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu
es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réflé-chir avant de quitter les Etats-Unis» admeendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»-Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire amé-ricain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’au-toroute, il trouvera sûrement un
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Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», en-trée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’his-toire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»-Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en es-pagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agri-
cole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu
es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réflé-chir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-fron-tières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étran-gère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un

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Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», en-trée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’his-toire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»-Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en es-pagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agri-cole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réflé-chir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-fron-tières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étran-gère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fé-dérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En che-min, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’his-toire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»-Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en es-pagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agri-cole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réflé-chir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-fron-tières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des
Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étran-gère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
l’histoirE dE mAldo-nAdo CommEnCE dEs AnnéEs AupArAVAnt, à sAnto domingo, un VillAgE du sud du mExiQuE.

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Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’his-toire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»-Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en es-pagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agri-cole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les di-manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent».Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réflé-chir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gar •
naM JUli_JOURNALISTE NEON

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