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MÉMOIRE Présenté par Emmanuelle GOUSSOT Dans le cadre de la dominante d’approfondissement IDEA (Ingénierie de l’Environnement, Eau, Déchets et Aménagements durables) Pour l’obtention du : DIPLÔME D’INGENIEUR d’AGROPARISTECH Cursus ingénieur agronome et du DIPLÔME D’AGRONOMIE APPROFONDIE Stage effectué du 03/03/2011 au 31/08/2011 Enseignante-responsable Agnès LELIEVRE Soutenu le 22 septembre 2011 Dynamique de l’occupation du sol, en relation avec les activités agricoles, sur le bassin versant du Bouregreg (Maroc) de 1985 à 2011 A l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD) Représentation au MAROC 15, rue Abou Derr 10000 Agdal Rabat Maroc Maîtres de stage : Gil MAHE (Laboratoire HydroSciences Montpellier) Yao Télésphore BROU (Université d’Artois - Arras)

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MÉMOIRE

Présenté par Emmanuelle GOUSSOT

Dans le cadre de la dominante d’approfondissement IDEA (Ingénierie de l’Environnement, Eau, Déchets et Aménagements durables)

Pour l’obtention du :

DIPLÔME D’INGENIEUR d’AGROPARISTECH

Cursus ingénieur agronome

et du DIPLÔME D’AGRONOMIE APPROFONDIE

Stage effectué du 03/03/2011 au 31/08/2011

Enseignante-responsable

Agnès LELIEVRE

Soutenu le 22 septembre 2011

Dynamique de l’occupation du sol, en relation avec les

activités agricoles, sur le bassin versant du Bouregreg

(Maroc) de 1985 à 2011

A l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD)

Représentation au MAROC 15, rue Abou Derr 10000 Agdal Rabat Maroc

Maîtres de stage :

Gil MAHE (Laboratoire HydroSciences Montpellier)

Yao Télésphore BROU (Université d’Artois - Arras)

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RESUME

Le bassin versant du Bouregreg, l'un des principaux du Maroc, a vu son paysage évoluer sous l'effet direct et indirect de facteurs climatiques au travers des épisodes de sécheresses qui touchent le pays depuis le début des années 1980. Les facteurs socio-économiques, accentués par la forte croissance démographique de la région, et historiques, avec les diverses mutations introduites par la colonisation, jouent aussi un rôle majeur dans ces changements.

En tenant compte de ces éléments, la présente étude évalue la dynamique de l'occupation du sol sur l'ensemble du bassin versant entre 1985 et 2011 à partir de données satellitaires (images Landsat). La méthodologie s'appuie sur l'utilisation de la télédétection qui est ici mise à profit pour caractériser et étudier l'état de surface et les phénomènes naturels de la zone d'étude. Les cartes d'occupation du sol ont été produites à partir d'une classification par maximum de vraisemblance. Elles ont mis en évidence une forte progression du bâti et des sols nus face aux forêts et aux parcelles agricoles.

Par la suite, l'objectif a été de développer une méthodologie combinant la télédétection avec les outils SIG pour cartographier les zones à risque d'érosion hydrique. A cette fin, quatre facteurs agissant sur l'érosion ont été confrontés : l'occupation du sol, la pente, la vulnérabilité des matériaux et la densité de population. La carte du risque d'érosion qui résulte de cette étude, met en évidence trois grandes zones dans le bassin : les secteurs à très fort risque d'érosion, en zone de montagnes, les secteurs à fort risque, dans certaines régions agricoles, et les secteurs à faible risque. Mots-clés : bassin versant Bouregreg, télédétection, occupation du sol, maximum de vraisemblance, érosion hydrique

The Bouregreg catchment, one of principal of Morocco, saw it landscape evolving under direct and indirect effect of climatic factors through the episodes of drynesses which touch the country since the beginning of the years 1980. Socio-economic factors, accentuated by the strong demographic growth of the area, and historical, with the various changes introduced by colonization, play also a major part in these changes.

Accounting for these elements, the present study evaluates the dynamics of the land cover at the catchment scale between 1985 and 2011 from satellite data (Landsat images). Methodology is based on the use of remote sensing which allowed here to characterize and to study surface quality and natural phenomemon of the study area. Land cover maps were produced from a maximum likelihood classification. They highlighted a strong progression of the urban areas and the bare ground compared to the forests and the agricultural parcels.

Thereafter, the objective was to develop a methodology combining remonte sensing with GIS tools to map areas with high risk of water erosion. For this purpose, four factors acting on erosion were confronted: land use, slope, vulnerability of materials and density of population. The erosion hazard map which results from this study, highlights three main areas in the watershed : zones with very high risk of erosion, in the mountains, zones with high risk, in some agricultural areas, and zones with weak risk. Key words : Bouregreg catchment, land cover, remote sensing, maximum likelihood classification, water erosion

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REMERCIEMENTS

Je suis particulièrement reconnaissante à Gil Mahé et à Télésphore Brou de m'avoir permis de réaliser ce stage au sein de l'Institut de Recherche pour le Développement à Rabat, et de m'avoir encadrée pendant ces six mois. Je remercie Abdellah Laouina et ses collègues du Cergéo, Mohammed Sfa, Nadia Machouri, Miloud Chaker et Mohammed Aderghal, de m'avoir accueillie au sein de leur équipe durant cinq mois. En plus de m'avoir fait découvrir le bassin versant du Bouregreg, ils m'ont chaleureusement aidée et conseillée pendant tout le déroulement de mon travail. Un grand merci également à Anas Emran de m'avoir consacré du temps pour m'accompagner lors de mes sorties sur le terrain et de m'avoir fait partager sa passion pour la géologie. Ses conseils avisés sur mon travail m'ont été d'une grande aide. Je tiens aussi à remercier l'ensemble du personnel de l'IRD de Rabat qui m'a aidée dans les démarches administratives et permis de réaliser toutes mes sorties sur le terrain. Sans oublier les autres stagiaires et thésards qui travaillaient sur le même projet, et notamment Armand Trabi pour son aide.

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LISTE DES FIGURES FIGURE 1 : DECOUPAGE ADMINISTRATIF DU BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ...................................................... 13

FIGURE 2 : LES QUATRE UNITES GEOMORPHOLOGIQUES COMPOSANT LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ......... 13

FIGURE 3 : LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ET SON RESEAU HYDROGRAPHIQUE ............................................ 14

FIGURE 4 : CARTE PEDOLOHGIQUE DU BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ............................................................... 16

FIGURE 5 : PLUVIOMETRIE MOYENNE MENSUELLE A L'ECHELLE DU BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ................. 17

FIGURE 6: LOCALISATION DES STATIONS PLUVIOMETRIQUES DU BASSIN VERSANT DU BOUREGREG EN FONCTION

DES GRANDES UNITES GEOMORPHOLOGIQUES ................................................................................................. 18

FIGURE 7 : QUELQUES EXEMPLES D'ESPECES VEGETALES PRESENTES SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ..... 19

FIGURE 8 : MATORRAL LACHE ................................................................................................................................... 20

FIGURE 9 : PRESENTATION DE QUELQUES CULTURES PRATIQUEES SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ........ 21

FIGURE 10 : REPARTITION DE L'OCCUPATION DU SOL SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ............................ 22

FIGURE 11 : COMPORTEMENT SPECTRAL DES SURFACES EN EAU, MINERALES ET VEGETALES ................................ 27

FIGURE 12 : L'OCCUPATION DU SOL SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG EN 1985, 2000, 2007 ET 2011 ........ 36

FIGURE 13 : DEGRADATION DU COUVERT FORESTIER SUR UN VERSANT EXPOSE AU SUD ET PATURE ..................... 39

FIGURE 14 : DIFFERENCE DE HAUTEUR D'EAU AU NIVEAU DU BARRAGE DE SIDI MOHAMMED BEN ABDELLAH

ENTRE 2007 ET 2011 .......................................................................................................................................... 40

FIGURE 15 : EXTENSION DES ZONES DE CULTURE SUR LES VERSANTS DANS LE HAUT PAYS ENTRE 1985 ET 2011 .. 41

FIGURE 16 : EXTENSION DES ZONES DE CULTURE SUR LA PLAINE D'AÏN EL AOUDA ENTRE 1985 ET 2007.............. 41

FIGURE 17 : EVOLUTION DES RENDEMENTS CEREALIERS ET DE LEGUMINEUSES DE 1980 A 2009 SUR LES PROVINCES

DE RABAT ET DE KHEMISSET ............................................................................................................................. 43

FIGURE 18 : HAUTEUR DES PLUIES MOYENNES ANNUELLES A L'ECHELLE DU BASSIN VERSANT DU BOUREGREG

(1980-2009) ...................................................................................................................................................... 44

FIGURE 19 : TENDANCES GENERALES DE LA PLUVIOMETRIE SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG DE 1980 A

2009 : VARIATION DU « CUSUM » (SOMME CUMULEE DES ECARTS ANNUELS DES PRECIPITATIONS PAR

RAPPORT A LA MOYENNE DE REFERENCE) ........................................................................................................ 44

FIGURE 20 : PLUVIOMETRIE MOYENNE MENSUELLE A L'ECHELLE DU BASSIN VERSANT DU BOUREGREG EN 1985,

2000, 2007 ......................................................................................................................................................... 45

FIGURE 21 : EVOLUTION DE LA DEMOGRAPHIE ENTRE 1982 ET 2004 SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG .... 47

FIGURE 22 : EVOLUTION DE LA POPULATION PAR CERCLES SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ENTRE 1982

ET 2004 .............................................................................................................................................................. 49

FIGURE 23 : EXTENSION DE L'AGGLOMERATION DE SALE ENTRE 1985 ET 2011 ....................................................... 50

FIGURE 24 : CARTE DU RISQUE D'EROSION SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG EN 1985, 2000, 2007, 2011 .. 56

FIGURE 25 : PAYSAGE AGRICOLE CONSTITUE DE GRANDES PARCELLES RELATIVEMENT UNIFORMES ..................... 61

FIGURE 26 : : BAISSE DE LA COUVERTURE VEGETALE ET APPARITION DE TRACES D'EROSION SUR UNE ZONE

PATUREE ............................................................................................................................................................ 62

FIGURE 27 : MATORRAL COMPOSE DE CISTE DE MONTPELLIER ET D'ARBRES A L'ASPECT CHETIF........................... 64

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LISTE DES TABLEAUX

TABLEAU 1 : REPARTITION DE L'OCCUPATION AGRICOLE DU SOL A L'ECHELLE DES CERCLES, SUR LE BASSIN

VERSANT DU BOUREGREG ................................................................................................................................. 22

TABLEAU 2 : EFFECTIFS DU CHEPTEL A L’ECHELLE DES CERCLES, SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ......... 24

TABLEAU 3 : CARACTERISTIQUES DES CAPTEURS TM ET ETM+ DU SATELLITE LANDSAT................................... 26

TABLEAU 4 : CLASSES D'OCCUPATION DU SOL ET INDICE ATTRIBUE ........................................................................ 33

TABLEAU 5 : CLASSES DES PENTES ET INDICES ATTRIBUES ........................................................................................ 33

TABLEAU 6 : CLASSES DES DENSITE ET INDICES ATTRIBUES ...................................................................................... 34

TABLEAU 7 : LES CLASSES D'OCCUPATION DU SOL ................................................................................................... 35

TABLEAU 8 : EVOLUTION SPATIALE DES CLASSES D'OCCUPATION DU SOL DE 1985 A 2011 SUR LE BASSIN VERSANT

DU BOUREGREG ................................................................................................................................................. 37

TABLEAU 9 : EVOLUTION DES TAUX DE CROISSANCE (TC) DES DIFFERENTES CLASSES D'OCCUPATION DU SOL SUR

LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ................................................................................................................ 37

TABLEAU 10 : RENDEMENTS CEREALIERS ET DE LEGUMINEUSES EN 1985, 2000 ET 2007 DANS LES PROVINCES DE

RABAT ET DE KHEMISSET ................................................................................................................................. 43

TABLEAU 11 : REPARTITION ET EVOLUTION DEMOGRAPHIQUE DES CERCLES DU BASSIN VERSANT DU BOUREGREG

ENTRE 1982 ET 2004 TCA : TAUX DE CROISSANCE ANNUEL ........................................................................... 47

TABLEAU 12 : EVOLUTION DE LA POPULATION URBAINE ET DE LA POPULATION RURALE DE 1982 A 2004 (TC :

TAUX DE CROISSANCE) ..................................................................................................................................... 48

TABLEAU 13: REPARTITION DES TYPES D'OCCUPATION DU SOL EN FONCTION DE LA SENSIBILITE DU MILIEU A

L'EROSION EN 1985, 2000, 2007 ET 2011 ........................................................................................................... 57

TABLEAU 14 : SURFACES OCCUPEES POUR CHAQUE TYPE DE PENTE ........................................................................ 58

TABLEAU 15 : REPARTITION DE LA VULNERABILITE DES MATERIAUX ...................................................................... 59

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ABREVIATIONS ET GLOSSAIRE

ABHBC : Agence du Bassin Hydraulique du Bouregreg et de la Chaouia-Ben Slimane

Agriculture en bour : agriculture pluviale. L’eau nécessaire à la croissance des plantes est apportée par la pluie.

Amplitude thermique : Différence entre la moyenne des maxima du mois le plus chaud et la moyenne des minima du mois le plus froid.

ASTER : Advanced Spaceborn Thermal Emission and Reflection Radiometer.

Battance : résulte de l'impact de la pluie sur la surface des sols qui entraîne la destruction de la structure et le croûtage de la surface du sol.

Capteur HRV : capteur à Haute Résolution Visible

Cercle : Les provinces sont divisées en "Cercles". Leur délimitation est établie sur la base de critères sociologiques, ethniques ou économiques et d'autres facteurs. D'habitude, toutes les provinces sont subdivisées en trois, quatre "Cercles" ou plus.

Cover crop : Outil servant principalement à déchaumer et à ameublir la terre et effectuant un travail superficiel, profondeur de 5 à 15 cm, à distinguer du labour

Dayas : Petites dépressions au fond argileux se remplissant d’eau lors d’épisodes pluvieux formant ainsi des étangs plus ou moins importants et qui se retrouvent généralement secs durant l’été.

Détachabilité : aptitude d'un sol à être fractionne en particules susceptibles d'être transportées.

Douar : désigne un groupement d'habitants, un hameau ou une petite commune rurale

D.P.A.E. : Direction de la Planification Agricole et de l'Economie.

Erodibilité : elle traduit la résistance d'un sol au détachement des particules à sa surface sous l'effet des goutes de pluies, et à leur transport par l'eau des précipitations (érosion).

Etiage : période de l'année où le débit d'un cours d'eau atteint son point le plus bas.

Evapotranspiration : perte d'eau résultant de la transpiration des plantes et de l'évaporation directe de l'eau au niveau du sol et des surfaces d'eau libre.

GDEM : Global Digital Elevation Map.

H.C.E.F.L.C.D. : Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification

H.C.P. : Haut Commissariat au Plan

Héliosynchrone : Qualifie une orbite dont le plan conserve une orientation constante vis à vis de la direction Terre-Soleil, ainsi que les satellites qui les parcourent.

Hercynien : qualifie les plissements géologiques qui se sont produits dès la fin de l'ère Primaire

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Hydromorphie : phénomène dû à un excès d'eau dans la couverture pédologique ou un horizon

IFEN : Institut Français de l'Environnement

Imam : personne qui dirige la prière en commun.

INH : indice normalisé d’humidité

Jbel : Montagne ou massif montagneux

Lithologie : branche de la géologie qui étudie la nature des roches d'une formation. Elle est indispensable à la compréhension des modelés et de l'érosion.

Marne : roche sédimentaire meuble et plastique, constituée de calcaires argileux

Matorral : Type de végétation méditerranéenne relativement aérée, reconnaissable notamment par la présence de chênes de petite taille, d'oliviers, d'arbousiers, etc.

Meseta marocaine (ou Plateau central marocain) : massif ancien situé dans le nord-ouest du Maroc, entre la côte atlantique et le Moyen Atlas.

Métamorphisée : se dit d'une roche ayant subi un ensemble de transformations à l'état solide suite à une élévation de pression (dans les profondeurs de la terre) et/ou à des températures supérieures à 200 °C. Ces transformations conduisent à la cristallisation de nouveaux minéraux, et à la formation de textures et de structures de la roche du fait de condition physico-chimiques différentes des conditions de formation de la roche originelle.

Mm3 : millions de mètre cube

NDVI : indice de végétation normalisé

Orogenèse : Processus de formation de chaînes montagneuses sur des zones instables de l'écorce terrestre (p.ex. les orogenèses hercynienne et pyrénéenne).

ORSTOM : Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-mer

Paléozoïque : correspond à l'ère Primaire qui a duré 300 Ma

Panchromatique : Les images sont obtenues à partir de l'enregistrement du rayonnement dans un unique intervalle de longueur d'onde situé dans le domaine du visible, soit entre 400 à 700 nm. Les données n’étant acquises que dans un seul canal, seules des images en noir et blanc peuvent être obtenues. Bien que moins riche du point de vue de la résolution spectrale, l'image panchromatique offre une résolution spatiale plus importante.

Pixel : unité de base permettant de mesurer la définition d'une image numérique matricielle

Qx : quintaux

Réflectance (solaire): Rapport entre l'énergie solaire réfléchie et l'énergie solaire incidente sur une surface.

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Régosol : sol obtenu par érosion d'une roche tendre. Ce sont des sols peu profonds et peu évolués.

Schiste : roche ayant une schistosité (des feuillets), issue de contraintes tectoniques

SIG : Systèmes d'Information Géographique

SMBA : barrage de Sidi Mohammed Ben Abdellah

Souk : marché généralement hebdomadaire où ont lieu les transactions commerciales. On y trouve tout ce dont les populations d'une société traditionnelle ont besoin.

Substratum : couche inférieure ou antérieure existant sous une couche plus récente

UPB : Unité Petit Bétail

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SOMMAIRE

INTRODUCTION ................................................................................................................................................................... 9

PROBLEMATIQUE ET OBJECTIFS .......................................................................................................... 10

CHAPITRE I : CONTEXTE ..................................................................................................................... 12

I. LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ............................................................................................................... 12 1. Le milieu physique ................................................................................................................................................. 12 2. Le milieu humain ................................................................................................................................................... 20

II. LA TELEDETECTION ...................................................................................................................................... 25 1. Principe .................................................................................................................................................................. 25 2. Les satellites .......................................................................................................................................................... 25 3. Les comportements spectraux ............................................................................................................................... 26 4. Les indices .............................................................................................................................................................. 27

CHAPITRE II : MATERIEL ET METHODE .................................................................................................. 29

I. MATERIEL ................................................................................................................................................. 29 1. Les données utilisées ............................................................................................................................................. 29 2. Les logiciels informatiques ..................................................................................................................................... 29

II. METHODE ................................................................................................................................................. 30 1. Traitement des images satellites Landsat : analyse des signatures spectrales présentes sur l’ensemble du bassin versant et identification des objets. ................................................................................................................................ 30 2. Etude de la zone sur plusieurs dates : création des cartes d’occupation du sol en 1985, 2000, 2007 et 2011 à partir d’images Landsat. ................................................................................................................................................. 30 3. Analyse des cartes d’occupation des sols .............................................................................................................. 31 4. Etude des facteurs associés à l’évolution de l’occupation du sol sur le bassin versant du Bouregreg ................... 32 5. Les enquêtes auprès des populations agricoles (Annexe IV) .................................................................................. 32 6. Impact de l’évolution de l’occupation du sol sur la vulnérabilité des sols .............................................................. 33

CHAPITRE III : LA DYNAMIQUE DE L’OCCUPATION DU SOL ....................................................................... 35

I. EVOLUTION DE L’OCCUPATION DU SOL DANS LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ...................................................... 35 1. A l’échelle du bassin versant .................................................................................................................................. 35 2. Mise en relation des cartes d’occupation du sol avec les données agricoles ......................................................... 42

II. LES FACTEURS ASSOCIES A CETTE EVOLUTION ..................................................................................................... 43 1. Les facteurs naturels .............................................................................................................................................. 43 2. Les facteurs socio-économiques ............................................................................................................................ 47 3. Historique : étude de l’histoire du bassin ............................................................................................................... 49

CHAPITRE IV : IMPACT DE L'EVOLUTION DE L'OCCUPATION DU SOL SUR LA VULNERABILITE DES SOLS............ 55

I. MISE EN EVIDENCE D'UNE VULNERABILITE DES SOLS SUR LE BASSIN VERSANT DU BOUREGREG ....................................... 55 1. L'érosion vue par les agriculteurs .......................................................................................................................... 55 2. Etude des cartes du risque érosif sur le bassin versant du Bouregreg ................................................................... 56

II. ETUDE DU ROLE DE L'OCCUPATION DU SOL SUR LEUR COMPORTEMENT HYDROLOGIQUE .............................................. 60 1. L'agriculture et la sensibilité des sols à l'érosion ................................................................................................... 60 2. L'élevage et la sensibilité des sols à l'érosion ........................................................................................................ 62 3. Les forêts et la sensibilité des sols à l'érosion ........................................................................................................ 63 4. Les zones urbaines et la sensibilité des sols à l'érosion .......................................................................................... 64

CONCLUSION.................................................................................................................................. 65

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INTRODUCTION

Les interactions entre l’homme et son milieu sont multiples et complexes. La dynamique de l’occupation du sol est un très bon indicateur de ces interactions et permet ainsi de suivre et de quantifier l’évolution des états de surface en rapport avec les activités humaines et l’influence du climat. Le bassin versant du Bouregreg, qui est l’un des principaux bassins du Maroc, connaît depuis plusieurs décennies une forte croissance démographique qui s’accompagne de modifications du paysage. Ces changements trouvent leurs origines dans les mutations agro-pastorales caractérisées par une transformation de l’utilisation des terres par la population. Espace à vocation agricole, le bassin est soumis à de multiples formes d’agressions résultant de l’action combinée du climat -pluies erratiques, périodes de sécheresse- et des interventions humaines, écologiquement inadéquates et responsables de la déstabilisation du milieu. L’évolution des ces facteurs a progressivement rendu le milieu vulnérable aux processus d’érosion affectant ainsi le milieu hydrique - pénurie de la nappe phréatique- , le milieu agricole - chute des rendements - et environnemental - fragilisation des sols et recrudescence de l’érosion - (Laouina et al., 2004). Analyser les évolutions plus ou moins récentes qu’a connues le bassin versant du Bouregreg sur un laps de temps d’une trentaine d’années (1985-2011), à travers les changements de l’occupation du sol, constitue le principal enjeu de la recherche menée ici. Elle implique l’utilisation de données de télédétection, avec l’imagerie satellitaire à haute résolution, permettant de suivre finement la dynamique de l’occupation du sol et, par la suite, les pressions environnementales. Afin de répondre à l’objectif de ce travail et ainsi permettre une bonne compréhension de l’évolution du paysage dans la région, nous présenterons tout d’abord la zone étudiée et la méthodologie appliquée avant de procéder à l'analyse de la dynamique de l’occupation du sol à travers les changements spatiaux et les facteurs qui y sont associés. Pour finir, nous étudierons les problèmes environnementaux, et notamment de l’érosion, liés à cette évolution.

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PROBLEMATIQUE ET OBJECTIFS

La présente étude de l’évolution de l’occupation du sol sur le bassin versant du Bouregreg s’inscrit dans le cadre du projet SIGMED "Approche Spatialisée de l’Impact des activités aGricoles au Maghreb sur les transports solides et les ressources en Eau De grands bassins versants". Ce projet fait référence à des objectifs tracés par le Plan Bleu en 2005, dont le but est de relever les défis du développement durable en Méditerranée, tels que la conservation des sols et des paysages, mais aussi une meilleure valorisation des ressources en eau et des liens entre les sociétés et l’environnement. L’objectif principal du projet est de comprendre les relations existant entre les activités humaines, et notamment les activités agricoles, les transferts d’eau et le transport de sédiments dans les bassins de deux grands barrages d’Algérie et du Maroc. Ces deux bassins versants, que sont le Bouregreg au Maroc et l’Oued Mina en Algérie, ont déjà fait l’objet d’études localisées (Benmohammadi ,1991 ; Bensalah, 2008 ; Laouina et al.2004, etc...) mais aucune d’entre elles n’a abordé les relations entre les activités humaines et les transports solides à l’échelle des bassins. Le bassin du Bouregreg, sur lequel porte ce travail, est l’un des principaux bassins versants marocain. De par sa situation géographique, à proximité du littoral, la qualité de ses terres, considérées comme à hautes potentialités agricoles, mais aussi d’autres facteurs liés à l’insécurité et à la colonisation, il a été particulièrement marqué par les flux migratoires qui ont touché l’ensemble du Maroc au cours de ces derniers siècles. Il est actuellement classé 13ème sur les 22 bassins versants prioritaires de la stratégie nationale d’aménagement des bassins versants (HCEFLD, 1994). Ses terres sèches et arides subissent en effet une forte dégradation à l’origine de processus d’érosion, essentiellement hydrique, et de transport solide causés par des facteurs climatiques, physiques et géomorphologiques. Ces phénomènes sont très variables dans le temps et dans l’espace. Avec la croissance démographique qui s’est opérée au cours du XXème siècle sur l’ensemble du bassin méditerranéen et les périodes de sécheresse récurrentes depuis les années 1980, les problèmes de dégradation des terres se sont aggravés. Cela s’est accompagné d’une extension des surfaces érodées, suite à l’appauvrissement progressif des sols, affectant ainsi les productions agricoles et les réserves des nappes d’eau. Les conséquences sont multiples mais touchent essentiellement le développement socio-économique de la région, déjà affecté par les problèmes issus de l’exode rural. La connaissance de l’occupation du sol constitue une information très importante pour la caractérisation d’une région et pour l’élaboration de plans destinés à une meilleure gestion des terres. L’occupation du sol est définie comme étant « une couverture physique observable au sol par des techniques de relevés de terrain ou par la télédétection. Elle comprend la végétation (naturelle/cultivée) et l'aménagement du territoire/l'habitat (bâtiments, routes) qui occupent la surface de la terre ainsi que l'hydrographie... » (FAO, 1997). Elle est sous la double influence du milieu physique et de l’activité humaine dans un environnement socio-économique déterminant. L’occupation du sol donne ainsi une illustration de cette « confrontation continue entre la société et son milieu » (Burel et Baudry, 1999), exprimant à un instant donné un état de ces relations qui impliquent des structures changeantes dans le temps et l’espace.

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L’objectif de ce travail est de suivre l’évolution spatio-temporelle de l’occupation du sol sur le bassin versant du Bouregreg, indicateur de la dynamique paysagère, en faisant ressortir les évolutions marquantes. L’étude se concentrera plus particulièrement sur les activités agricoles, actuellement en mutation du fait de réorganisations socio-économiques et du repli des activités agro-pastorales traditionnelles. Le travail se structurera autour de trois sous-objectifs spécifiques :

Mise en évidence des changements du mode d’occupation du sol sur quatre périodes : 1985-2000, 2000-2007, 2007-2011 et 1985-2011. Pour ce faire, nous utiliserons des outils cartographiques tels que la télédétection et les SIG (Système d’Information Géographique).

Compréhension de l’origine de ces changements en étudiant trois facteurs principaux, liés les uns aux autres et en se basant sur des données bibliographiques et des résultats d’enquêtes réalisées auprès de la population locale.

Analyse des conséquences résultant du changement de l’occupation des sols sur leur comportement hydrologique et leur rôle dans les processus érosifs. Une carte du risque d’érosion sera alors produite. Elle permettra de localiser les zones les plus sensibles, c’est-à-dire celles rassemblant le plus d’éléments pouvant entraîner des départs de terre.

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CHAPITRE I : CONTEXTE

I. Le bassin versant du Bouregreg

1. Le milieu physique

a. Le contexte géographique

Le Bouregreg est l’un des principaux cours d’eau du réseau hydrographique du Maroc. Il s’étend sur 240 km de long et son débit est en moyenne de 23 m3/s, mais peut atteindre 1 500 m3/s en période de crue. Orienté de façon Sud-Est/Nord-Ouest, il prend sa source dans le massif du Moyen-Atlas, traverse la Meseta en direction du littoral atlantique et se jette dans l’océan à l’embouchure séparant les villes de Salé au Nord et de Rabat au Sud.

Le bassin versant du Bouregreg couvre une superficie d’environ 9 970 km². Il est bordé au Nord par le bassin de Sebou, au Sud par celui de l’Oum Er Rbia, au Sud-Ouest par les bassins des oueds côtiers (oued Cherrat, oued N’Fifikh, oued Malleh) et s’ouvre vers l’Ouest sur l’océan Atlantique. D’un point de vue administratif, il s’étend sur la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaër, et partiellement sur quatre provinces : Rabat, Khémisset, Khouribga et Khénifra (Figure 1).

b. Cadre géomorphologique

Le bassin versant du Bouregreg est essentiellement constitué de collines, plateaux et montagnes. Son altitude est comprise entre le zéro du niveau de la mer et le point culminant de Jbel Mtourzgane, à 1726 m, avec 50% de la surface comprise entre 500 et 1000 m d’altitude.

Il est divisé en quatre grandes unités géomorphologiques (Figure 2) (Beaudet, 1969) : une zone de Dépression orientale, adossée au Haut pays, constituée de plaines

couvertes de barres rocheuses au pied du Moyen-Atlas et entaillées par les grands oueds qui y naissent tels que l’oued Bouregreg et l’oued Grou.

le Haut pays, caractérisé par une altitude fortement accusée et par l’encaissement de ses vallées. Il est constitué par la juxtaposition de crêtes culminantes (plus de 1000m) et de hauts plateaux situés entre 1000 et 1330m d’altitude.

le Palier intermédiaire composé de plateaux compris entre 600 et 900 m d’altitude, soulignés par des crêtes schisto-quartzitiques séparant les dépressions ou cuvettes (Tiddas et Maâziz).

le Palier inférieur, ou la Basse Meseta, constitué de plaines et de plateaux de faible altitude (inférieure à 500 m) qui descendent en pente douce vers l’océan. Les oueds, dont l’encaissement est moyen, s’élargissent formant ainsi des plaines ondulées.

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Figure 2 : Les quatre unités géomorphologiques composant le bassin versant du

Bouregreg (source : SIGMED, carte modifiée par E. Goussot)

Figure 1 : Découpage administratif du bassin versant du Bouregreg (source : CERGEO,

carte élaborée par E. Goussot)

14

c. Les ressources en eau

Les eaux du bassin, dont le potentiel est de 720 Mm3/an, proviennent pour la plupart des eaux de surface qui fournissent 690 Mm3/an, mais aussi des eaux souterraines, à hauteur de 30 Mm3/an (S.E.C.E.E.) (Figure 3).

Les eaux de surface Le réseau hydrographique est assez développé. Il s’articule autour de deux principales rivières : l’oued Bouregreg, qui draine une surface de 3 830 km² au Nord-Est du bassin, et l’oued Grou et ses affluents (Korifla et Akreuch), qui drainent une surface de 5 760 km², au Sud-Ouest du bassin. Les apports d’eau sont étroitement liés au régime pluviométrique qui présente une très grande variabilité saisonnière entre les périodes de crues (de décembre à avril avec un maximum en février) durant la saison des pluies et les périodes d’étiages à tarissement lors de la saison sèche.

Les eaux souterraines Du fait d’un contexte hydrogéologique défavorable avec la présence de formations géologiques imperméables datant du Primaire, il existe peu de grandes nappes souterraines sur le bassin versant du Bouregreg. On en dénombre cependant deux :

- la nappe de Sehoul, couvrant une superficie de 200 km², est considérée comme une extension naturelle de la nappe de la Mâamora ;

- la nappe de Tanoubart, dont la superficie est de 15 km², est située dans la région de Maâziz (province de Khémisset) et est traversée par l’oued Tanoubert, affluent du Bouregreg et principale source de son alimentation en période d’étiage.

Figure 3 : Le bassin versant du Bouregreg et son réseau

hydrographique (source : El Agbani et al., 1992)

15

Les eaux circulant sur le bassin sont essentiellement utilisées pour l’alimentation en eau potable et pour les activités industrielles, l’irrigation étant peu développée. Afin de mobiliser cette eau, plusieurs barrages ont été construits. Ainsi, depuis 1974, le cours de l’oued Bouregreg a été modifié par la mise en place du barrage de Sidi Mohammed Ben Abdellah (SMBA). Avec une capacité de 1 025 Mm3, il est le seul ouvrage d’une telle importance présent dans le bassin et constitue alors le principal dispositif existant en matière de mobilisation des eaux de surface. Il est situé à environ 30 km de l’embouchure du fleuve, et les eaux sont destinées à l’alimentation en eau potable de la population de la zone côtière de Salé jusqu'à Casablanca. En plus de ce barrage, le bassin versant dispose de six barrages de plus petite taille.

d. La géologie

Le bassin versant du Bouregreg est essentiellement constitué de formations géologiques d’origine sédimentaire et datant du paléozoïque. Il appartient dans son ensemble au Plateau central marocain, grand massif hercynien s’étendant sur 150km d’Est en Ouest, du Moyen-Atlas à la Basse-Chaouïa, et sur 100 km du Nord au Sud, du bas pays Zemmour au plateau des Phosphates. Cette vaste surface a été plissée et métamorphisée lors de l’orogenèse hercynienne, puis arasée du fait de phénomènes d’érosion au Permien et, durant le Trias, puis partiellement recouverte par des dépôts du Secondaire avec notamment des argiles rouges salifères (Beaudet, 1969).

Du fait de cette évolution paléogéographique, le bassin présente une grande diversité lithologique avec une nette prédominance de formations schisteuses, gréseuses et quartzitiques. Les granites, calcaires et basaltes s’étendent quant à eux sur de plus faibles surfaces (Beaudet, 1969) (Annexe I).

e. La pédologie

Le bassin versant du Bouregreg offre une large gamme de sols (Figure 4). En effet, l’hétérogénéité du socle géologique, la diversité du relief, les variations climatiques et la répartition de la végétation sont autant de facteurs influençant l’évolution des sols dans cette région. On observe cependant la dominance de trois types de sols qui se sont développés pour la plupart sur des formations schisteuses :

les sols peu évolués d’érosion, caractérisés par un faible degré d'altération ;

les sols bruns forestiers dont la profondeur varie de quelques centimètres à plusieurs mètres d’épaisseur ;

les sols rouges fersiallitiques, qui sont caractérisés par leur richesse en oxydes de fer libre (au moins 50% du fer total) à l’origine d’une coloration rouge ou brun-rouge. Ils sont très présents dans les régions méditerranéennes sur matériaux calcaires ou non calcaires (sous forêt de chêne liège, vert).

La répartition des sols sur le bassin dépend essentiellement de la nature de la roche mère et de la topographie. Ainsi, les sols peu évolués sont localisés pour la plupart en altitude, sur les zones de fortes pentes ou exposées au Sud ou à l’Est (Bensalah, 2008), et les deux derniers sols se développent quant à eux essentiellement sur les versants à faible ou moyenne pente ou sur des versants à forte pente exposés au Nord ou à l’Ouest. Ils sont caractérisés par une évolution rapide de la matière organique et par leur hydromorphie, liée à l’imperméabilité du substratum schisteux dominant, au climat et à l’évolution pédogénétique.

Sur les argiles rouges et les basaltes, se sont développés deux types de sol :

les sols tirsifiés (tirs) ou vertisols : ce type de sol est inexistant sur les hauts plateaux et les reliefs accidentés, schisteux et quartzitiques. Leur formation dépend de nombreux facteurs

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tels que la situation topographique, les conditions hydriques, le climat et la nature de la roche mère. Ils se développent essentiellement sur les terrains plats et dans les dépressions. Leur couleur, relativement foncée, varie non pas en fonction de leur teneur en matière organique, mais selon leur taux d’humidité, et ils sont caractérisés par la présence d’argiles gonflantes (montmorillonite) (Rajiallah-Bodinier F., 1991). On les retrouve notamment au niveau de la cuvette de Rommani. Bien pourvus en éléments fertilisants, ces sols ont la réputation d’être riches et fertiles et constituent donc de bons sols agricoles.

les sols isohumiques : présents dans les zones à faible pente, ces sols sont caractérisés par une coloration généralement sombre qui varie selon leur teneur en matière organique. On les observe sur les bas plateaux où ils sont associés à des vertisols, comme sur les communes d’Had-Brachoua et de Merchouch, ou sur des versants à faibles pentes comme dans la dépression de Rommani ;

20 km

Figure 4 : Carte pédolohgique du bassin versant du Bouregreg (source : M. Chaker, A. Laouina, M.

Sfa et éditées par la Chaire Unesco GN "Gestion de l'environnement et développement durable")

17

f. Le climat

Le climat sur le bassin versant du Bouregreg est soumis à l’influence de plusieurs facteurs. Ainsi, les précipitations et la température se répartissent différemment selon la latitude mais surtout selon l’altitude et le degré de continentalité. L’étude du régime pluviométrique à l’échelle du bassin montre que les précipitations sont irrégulières dans le temps et dans l’espace. Elles sont caractérisées par l’existence de deux saisons bien distinctes (Figure 5).

Ainsi, on observe :

une saison humide, qui s’étend d’octobre à avril, pendant laquelle a lieu la quasi-totalité des épisodes pluvieux (environ 90% de la pluviométrie annuelle) avec un maximum de précipitations en décembre et un minimum en octobre.

une saison sèche, allant de mai à septembre, durant laquelle les pluies, qui sont rares, ne dépassent guère les 10% de la pluie annuelle, avec un maximum de précipitations en mai et un minimum en juillet.

Cependant, cela peut varier de façon plus ou moins notable en fonction de l’altitude (Figure 6). Il existe en effet un contraste entre les Hauts plateaux où la pluviométrie atteint plus de 470 mm (station de Tsalat) et la Basse méséta qui reçoit moins de 350 mm (station de Ain Loudah) ou la Dépression orientale qui reçoit quant à elle moins de 250 mm (station de Ouljet Haboub) (Annexe II).

Comparativement au facteur précipitation, le facteur température est moins mesuré sur l’ensemble du bassin versant. D’après la bibliographie, les mois les plus froids sont ceux entre décembre et février, avec une moyenne minimale de 7°C en janvier, tandis que les mois les plus chauds sont entre juin et septembre, avec un pic de chaleur en juillet-août où la température moyenne maximale est d’environ 27°C.

Figure 5 : Pluviométrie moyenne mensuelle à l'échelle du bassin versant du Bouregreg

0,0

10,0

20,0

30,0

40,0

50,0

60,0

70,0

Plu

vio

trie

(m

m)

18

Ainsi, en associant la pluviométrie et de la température, paramètres essentiels permettant de caractériser un contexte climatique, on distingue différentes zones climatiques, définies selon le diagramme d’Emberger, qui coïncident avec les principales unités géomorphologiques du bassin versant (Marghich A., 2004) :

Zone 1 : elle correspond à la région de Rabat et englobe le bas Bouregreg. Du fait de sa proximité avec le littoral Atlantique, elle reçoit en moyenne près de 500 mm/an et la température moyenne annuelle est de 18°C avec une amplitude thermique de 20°C environ, associant ainsi cette zone à un climat subhumide.

Zone 2 : elle correspond à la partie centrale du bassin selon la diagonale reliant Rommani à Ezzhiliga, sur le palier inférieur et intermédiaire. Les données climatiques (pluviométrique et thermique) sont variables d’une station à l’autre car les différences d’altitude, de position topographique et d’éloignement de l’océan s’expriment ici. Avec une pluviométrie moyenne inférieure à 600 mm/an (environ 400 mm/an), une température moyenne annuelle de 17°C et une amplitude thermique de 30°C environ, cette zone est sous climat semi-aride.

Zone 3 : elle regroupe toute la partie Sud-Est du bassin au niveau d’Aguelmous, de M'rirt et de Khénifra. Elle correspond ainsi au début de la zone de dépression orientale, située au pied du haut pays. Elle est soumise à un climat de moyenne montagne. Elle reçoit ainsi en moyenne plus de 400 mm/an et la température moyenne annuelle est de 15°C. Cependant, du fait de son éloignement avec l’océan et de sa position abritée renforcée par sa physionomie « en creux » (Beaudet, 1969), durant la saison estivale, on

Figure 6: Localisation des stations pluviométriques du bassin versant du Bouregreg en fonction des grandes unités

géomorphologiques (source : SIGMED, carte modifiée par E. Goussot)

12 km

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observe un réchauffement considérable au fond de ses vallées et sur ses plateaux. Son amplitude thermique est ainsi d’environ 39°C. Cette zone est donc sous climat aride.

Zone 4 : elle correspond au Haut pays d’Oulmès, soit aux terres les plus en altitudes de la zone du Plateau Central (entre 700 et 1627 m d’altitude). Il s’agit d’une zone montagneuse éloignée de l’océan dont elle reçoit cependant les influences. La pluviométrie, relativement soutenue, dépasse en moyenne 600 mm/an, ce qui a pour effet d’abaisser la température moyenne annuelle à 15°C, et ce, malgré son degré de continentalité. Cette zone, avec une amplitude thermique de 30°C, a une tendance subhumide et bénéficie donc d’un climat plus doux que les précédentes.

L’étude des précipitations sur le bassin versant du Bouregreg montre donc que le régime pluviométrique est de type méditerranéen. Il est caractérisé par les incertitudes et les irrégularités des pluies, au cours de la même année et selon la topographie, et par les variations saisonnières des températures. Ces irrégularités des pluies se traduisent par la succession dans le temps et dans l’espace d’années sèches et d’années relativement plus humides, rendant toute agriculture en bour très aléatoire, d’autant plus que les potentialités d’irrigation sont très limitées (Ghanem H., 1981).

g. La végétation

Le bassin versant du Bouregreg recèle une importante diversité paysagère et richesse floristique (Benabdellouahad S., 2006.). Il comprend notamment deux sites d’intérêt biologique et écologique (SIBE) du domaine continental : les écosystèmes de forêt El Harcha et du plateau Ment. La région renferme de grandes ressources forestières aussi bien en plaine (Maâmora) qu’au piémont du Moyen-Atlas (Moulay, Bouâaza et Khémisset). Les espèces dominantes sont le chêne liège et le chêne vert, mais également le thuya et l’oléastre (Figure 7) .

Figure 7 : Quelques exemples d'espèces végétales présentes sur le bassin versant du Bouregreg

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Leur répartition sur les versants est grandement influencée par l’exposition. Ainsi, sur les versants exposés au Nord et à l’Ouest, les peuplements sont assez denses, tandis que ceux exposés au Sud et à l’Est sont couverts de surfaces plus ou moins dénudées. Sur les Hauts plateaux, les étendues de parcours dénudées contrastent avec ces massifs forestiers. De même, la zone de Dépression orientale, qui ne possède pas de couverture forestière, est couverte par un matorral lâche, constitué d’arbustes isolés et chétifs (Figure 8).

Le reste du bassin versant est occupé par des matorrals destinés au parcours, des reboisements de plants d’Eucalyptus et de Pins, et des terrains de cultures.

2. Le milieu humain

a. Démographie

Selon le recensement de la population de 2004, le bassin versant du Bouregreg compte une population de 2,37 millions d’habitants. Plus de 80% d’entre eux, soit environ 1,89 millions, sont urbanisés et vivent dans des centres urbains tels que Rabat, Salé et Khémisset tandis que 20%, soit environ 480 000, vivent en zone rurale dans des petites communes et des douars tels que Aït Belkacem et Moulay Driss Aghbal. La répartition de cette population sur le bassin est largement influencée par les caractéristiques géomorphologiques du bassin, qui vont conditionner leur utilisation. Ainsi, le palier inférieur et le palier intermédiaire sont partagés entre deux tribus berbères, les Zaërs et les Zemmour, qui y exercent toutes deux l’agriculture et l’élevage. Le Haut pays et la Dépression orientale sont quant à eux surtout occupés par une autre tribu berbère, les Zayanes, qui pratique une agriculture et un élevage basé sur un système agro-sylvo-pastoral.

b. Activités socio-économiques

Le secteur agricole est l’un des plus important et parmi les premières sources de revenu de la majorité de la population sur le bassin versant du Bouregreg. Il est partagé entre l’agriculture et l’élevage dont l’importance dans l’économie diffère selon les caractéristiques propres à chaque région et à chaque commune (population, pédologie, climat, besoins).

Figure 8 : Matorral lâche

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Les activités non agricoles sont peu nombreuses (administration, industrie et artisanat) et sont essentiellement concentrées au niveau de l’agglomération de Rabat-Salé, à l'exception des carrières pour l’exploitation des gisements miniers de potasse, situées à proximité de Khémisset, et des gisements de marbre dans la région de Tiflet, d’onyx à Aguelmous et de granite à Oulmès.

L’agriculture

La SAU sur le bassin versant du Bouregreg est de 519 558 ha et les principales cultures sont :

les céréales (en ordre d’importance décroissant) : blé tendre, blé dur, orge, triticale. Elles sont destinées à l’autoconsommation, aux échanges commerciaux via la vente dans les souks et à l’alimentation du cheptel (grain, paille, chaume…) . Les principales régions céréalières sont situées :

- en pays Zemmour : sur les communes de Maâziz et de Tiddas (cercle d’Oulmès), - sur les plateaux du pays Zaër : sur les communes de Merchouch et de Rommani

(cercle de Rommani), - sur les communes de Sehoul (cercle de Salé) et d’Aguelmouss (cercle de

Khénifra).

les légumineuses (fèves, pois, lentilles, haricots) (Figure 9)

les cultures maraîchères (pommes de terre, tomates, oignons, navets, carottes)

les cultures fourragères

les plantations fruitières, localisées principalement dans les bas plateaux à Ain Johra (cercle de Tiflet) et Sehoul qui utilisent des techniques modernes et d’irrigation, ainsi qu’à Oulmès avec ses plantations de rosacées (pommiers, poiriers, cerisiers) exploitées par deux grands domaines arboricoles (ARBOR et ABS).

la viticulture

les oliviers

la lavande (PAMs= Plantes Aromatiques Médicinales).

Figure 9 : Présentation de quelques cultures pratiquées sur le bassin versant du Bouregreg

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La répartition des différentes cultures sur le bassin versant est donnée dans le tableau 1 et la figure 10.

Tableau 1 : Répartition de l'occupation agricole du sol à l'échelle des cercles, sur le bassin versant du

Bouregreg (source : Recensement Générale Agricole, D.P.A.E., 1996)

Figure 10 : Répartition de l'occupation du sol sur le bassin versant du Bouregreg (source : Recensement

Général Agricole, D.P.A.E., 1996)

Céréales

Légumineuses

Cultures Maraich.

Cultures Oléag.Cultures Industri.Cultures Fourrag.

Plantations Fruitières

Jachère

Cercle Céréales Légumineuses Cultures Maraich.

Cultures Oléag.

Cultures Industri.

Cultures Fourrag.

Plantations Fruitières

Jachère

Tiflet 26200 366 2051 102 2 384 3097 10703

Oued Zem 45350 21 132 0 0 143 554 14800

Oulmes 52306 2575 606 9 174 456 2305 15701

Rommani 86904 9496 499 214 0 1086 1716 20123

Khenifra 55905 97 287 2 7 1267 789 28633

Bejaad 24829 16 62 0 0 117 439 5490

Sale 18460 468 3918 430 2 1287 2217 3334

Rabat 868 5 418 0 0 82 514 578

Ain el aouda 15436 64 699 7 2 3582 2144 3091

Temara 695 3 1570 0 0 69 250 125

Khemisset 18864 441 459 45 57 169 1014 4192

TOTAL 345817 13552 10701 809 244 8642 15039 106770

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Sur le bassin versant du Bouregreg, deux types d’agriculture existent :

L’agriculture irriguée : elle occupe 14 000 ha, localisés essentiellement dans les régions de Tiddas, d’Oulmès et de Maâziz (D.P.A.E., 1996). Ce système est relativement limité du fait de la faible mobilisation des eaux superficielles et de caractéristiques géologiques à l’origine de faibles ressources en eaux souterraines, et enfin de coûts très élevés.

L’agriculture en bour (appelée aussi agriculture pluviale ou agriculture en sec) : du fait de son extension, elle présente un important potentiel, mais elle est sous-exploitée en raison de contraintes :

o naturelles : le climat avec l’irrégularité des pluies : un bour est favorable quand la

moyenne des pluies est supérieure à 400 mm, et défavorable dans le cas contraire.

le sol qui peut être pierreux ou marqué par la pente : il y a une forte opposition entre les grandes plaines caractérisées par une certaine continuité et des rendements importants, et les régions de collines ou de montagnes où les cultures sont en mosaïque et menacées par la dégradation des sols.

o socio-économiques : du fait de la multiplicité des statuts fonciers (Annexe III), du morcellement et de la dispersion des parcelles mais aussi du sous-équipement des exploitations agricoles.

En ce qui concerne les facteurs de production (Bensalah N., 2008) :

le travail du sol est réalisé essentiellement via l’utilisation d’un cover crop et, dans les pentes fortes notamment, de la traction animale.

les engrais sont utilisés de façon non rationnelle, c’est-à-dire plus en fonction de la trésorerie des agriculteurs plutôt que des besoins de la plante et du sol.

les produits phytosanitaires ne sont pas utilisés de façon efficace du fait d’une certaine méconnaissance des produits adéquats, des doses et de la période optimale d’application.

les travaux sont généralement peu mécanisés. Pour les récoltes, au niveau des terres accidentées et dans les petites exploitations agricoles, elles sont essentiellement manuelles. L’usage des moissonneuses batteuses est plus courant dans les bas plateaux et dans les paliers inférieurs comme c’est le cas à Sehoul.

L’élevage

L’élevage, généralement extensif, est également très répandu dans le bassin versant, et ceci plus particulièrement dans certaines régions à tradition fortement pastorale (Tableau 2).

L’élevage bovin est une activité vitale sur le bassin, et ce plus particulièrement dans les régions situées à proximité des grands centres urbains. Il est donc plus important dans les Paliers inférieur et intermédiaire, dans la région de Rommani et sur la commune de Sehoul, à proximité de Salé. Le cheptel bovin est à la fois composé de races améliorées et de races locales caractérisées par une grande rusticité et une adaptation aux conditions climatiques de la région. L’élevage ovin est largement pratiqué à travers le bassin. Il est représenté par une race locale caractéristique des régions du Moyen-Atlas, la Timahdit. L’élevage caprin, malgré des effectifs en baisse, est encore très pratiqué, et ce essentiellement dans les régions montagneuses aux conditions plus difficiles. La chèvre est en effet le seul

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animal capable de valoriser les mauvais parcours situés dans des pentes ravinées et des zones accidentées. Le cheptel est essentiellement composé par la race locale Noire de l’Atlas.

Tableau 2 : Effectifs du cheptel à l’échelle des cercles, sur le bassin versant du Bouregreg (source : D.A.P.E., 1996)

L’élevage ovin et bovin est généralement conduit en système agro-pastoral tandis que l’élevage caprin est en système sylvo-pastoral. L’alimentation des différents cheptels est en partie assurée par les cultures fourragères mais provient aussi très largement des parcours, pratiqués le plus souvent en forêt. Ces terres de parcours sont définies comme "de vastes superficies où l'on conduit le bétail assez librement, couvertes par de la végétation naturelle ou peu artificialisées et sur lesquelles ne sont pas faits d'investissements, ou seulement des investissements limités"(Carriere M., Toutain B., 1995). Ces terres sont essentiellement utilisées par les éleveurs habitant à proximité de zones forestières telles que la forêt de la Maâmora et de Sehoul et par les paysans sans terres qui dépendent alors entièrement du parcours. Dans certaines régions du bassin, et notamment dans celles à forte vocation céréalière, les ressources fourragères proviennent également des terres agricoles laissées en chaume.

L’activité d’élevage est fortement liée à l’historique propre à chaque région dont les tribus sont généralement d’origine nomade, au relief, à la présence de parcours, et donc de forêts, ainsi qu’à la nature des sols (concurrence avec l’agriculture) mais aussi à la taille des exploitations. En effet, si l’on prend l’exemple de la région des Zaër (Rajiallah-Bodinier F., 1991), on remarque qu’il y a une forte opposition entre :

la classe majoritaire (65%) des paysans sans terres ou des petits propriétaires fonciers ne possédant que 11% de la SAU, mais rassemblant 62,7% du cheptel (en UPB)

la classe minoritaire (6,5%) de grands propriétaires fonciers (ayant plus de 25 ha) possédant 50% de la SAU mais seulement 14% du cheptel.

Cela s’explique par le fait que pour les paysans sans terres, le troupeau constitue le meilleur moyen de compenser le manque de terre par le profit apporté par les pâturages gratuits offerts par les parcours forestiers. De plus, pour les familles ayant peu de ressources, le bétail constitue une réserve financière importante, fournit de la nourriture mais assure aussi la production de fumier pour la fertilisation des terres ainsi que la traction.

Cercle Cheptel Animaux de Trait

Bovins Ovins Caprins Camelins Chevaux Mulets Anes

Tiflet 14862 65195 1535 4 1037 1317 2868

Oued Zem 9756 147084 24320 196 1484 1501 9106

Oulmès 13636 123938 65927 78 2617 3624 4755

Rommani 25082 202576 51064 36 3116 3320 6783

Khénifra 18354 255843 115797 86 2515 5883 8209

Bejaad 3593 82305 29231 103 446 1400 5783

Salé 22822 71433 7219 1 2285 1715 2861

Rabat 2151 5767 275 0 242 57 179

Ain el Aouda 9549 49085 8383 11 892 259 1367

Temara 1736 1767 14 1 120 66 70

Khémisset 9636 37299 9781 0 932 1051 2763

TOTAL 131177 1042292 313546 516 15686 20193 44744

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II. La télédétection

1. Principe

La télédétection est « l’ensemble des connaissances et techniques utilisées pour déterminer des caractéristiques physiques et biologiques d’objets par des mesures effectuées à distance, sans contact matériel avec ceux-ci ». (Journal Officiel du 11 décembre 1980). Elle utilise les propriétés d’émission ou de rayonnement des ondes électromagnétiques par les objets. En effet, tout corps dont la température est supérieure au zéro absolu (-273°C) est un émetteur de rayonnement électromagnétique (I.F.E.N., 2005), et ceci dépendra de sa température et de son état de surface.

Le rayonnement électromagnétique, phénomène ondulatoire composé d’un champ électrique et d’un champ magnétique, est une forme de propagation de l’énergie dans la nature dont la forme la plus familière est la lumière visible perçue par l’œil humain. C’est cette énergie véhiculée qui est alors ainsi détectée par les capteurs utilisés en télédétection. En effet, si l’œil humain ne peut voir qu’une plage limitée du spectre électromagnétique, les satellites, en revanche, peuvent capter une plus grande plage de longueurs d’ondes. Cependant, compte tenu des perturbations atmosphériques avec les phénomènes d’absorption et de diffusion, seules des portions de ce spectre sont utilisées en télédétection :

- l’ultraviolet qui s’étend de 290 nm à 380 nm, - le visible de 400 à 700 nm avec les trois couleurs fondamentales (Rouge : 600-700 nm,

Vert : 500-600 nm, Bleu : 400-500 nm), - le proche infrarouge (PIR) de 700 à 1500 nm, - l’infrarouge moyen réflectif de 1,6 à 2,2 µm, - le moyen infrarouge (MIR) de 3 à 5 µm, - l’infrarouge thermique de 8 à 14 µm, - les hyperfréquences de 0,75 à 136 cm.

La télédétection résulte de l’interaction de trois éléments fondamentaux : - une source d’énergie : élément qui éclaire la cible en émettant une onde

électromagnétique ; - une cible : une portion de la surface terrestre observée par le satellite ; - un vecteur : élément mesurant l’énergie solaire réfléchie par la cible.

La source d’énergie, le plus souvent d’origine solaire, émet un rayonnement en direction de la cible. Après avoir interagit avec l’atmosphère, ce rayonnement entre en contact avec la surface terrestre, c’est-à-dire la cible, qui va alors absorber une partie de ce rayonnement qui est alors transformé en chaleur. Le reste est soit réfléchi, soit transmis à travers le corps. Les trois composantes de l’interaction sont donc l’absorption, mesurée par l’absortance (part d’énergie incidente absorbée par l’objet), la réflexion, mesurée par la réflectance (quantité d’énergie renvoyée par la surface) et la transmission, mesurée par la transmittance (part d’énergie incidente qui va traverser l’objet sans être altérée).

L’énergie qui nous intéresse ici est celle diffusée ou émise par la cible, qui sera captée à distance par un capteur qui n’est pas en contact avec l’objet, soit le satellite.

2. Les satellites

Selon l’objectif des missions et la capacité des capteurs transportés, les satellites d’observation de la Terre occupent différentes orbites. Ces orbites sont deux types :

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orbite géostationnaire (dans le plan équatorial de la Terre) : le satellite est à une altitude très élevée et observe toujours la même région de la surface du globe en tournant à la même vitesse angulaire que la Terre. Cette orbite est utilisée par des satellites de communication et météorologiques.

orbite héliosynchrone : le satellite passe toujours à la même heure solaire locale au-dessus d’un même point de la Terre. Cette caractéristique orbitale assure des conditions d’illumination similaires lorsque, par exemple, on recueille des données pour une saison particulière sur plusieurs années. Cette orbite est utilisée par les satellites Nimbus et Spot, et par le satellite Landsat duquel sont issues la plupart des images de cette étude.

Le satellite Landsat (ORSTOM, 1997): Le programme Earth Resources Technological Satellite (ERTS) à l’origine des satellites LANDSAT (Land Satellite) est dû à la NASA. Le premier satellite, Landsat 1, fut envoyé en 1972, et depuis, six autres satellites ont été envoyés en orbite. Actuellement, Landsat 7, lancé en 1999, fournit toujours des données. Si tous les satellites de la série LANDSAT sont héliosynchrones, en orbite sub-polaire, avec une répétitivité de 16 jours et une altitude standard ayant variée de 917 (1 à 3) à 705 km (4 à 7), on distingue plusieurs générations avec l’utilisation de différents capteurs :

- Landsat 1 à 3 : capteurs de types RBV (Caméra numérique Return Beam Vidicon) et MSS (Capteur Multispectral : Multi Spectral Scanneur)

- Landsat 4 à 5 : capteurs de types MSS et TM (Capteur Thematic Mapper) - Landsat 6 à 7 : capteurs de types TM et ETM+ (Capteur Enhanced Thematic Mapper Plus)

dont les caractéristiques sont présentées dans le tableau 3 :

Tableau 3 : Caractéristiques des capteurs TM et ETM+ du satellite LANDSAT (Girard M.C. &

GIRARD C.M., 1999)

TM ETM+

CANAUX

1 : 0,45 - 0,515 µm 1 : 0,45 - 0,515 µm 2 : 0,525 - 0,605 µm 2 : 0,525 - 0,605 µm 3 : 0,63 - 0,69 µm 3 : 0,63 - 0,69 µm 4 : 0,73 - 0,90 µm 4 : 0,73 - 0,90 µm 5 : 1,55 - 1,75 µm 5 : 1,55 - 1,75 µm 6 : 10,40 - 12,5 µm 6 : 10,40 - 12,5 µm 7 : 2,09 - 2,35 µm 7 : 2,09 - 2,35 µm P : 0,52 - 0,90 µm

PIXEL 1 à 7 : 30m 6 : 120m 1 à 7 : 30m 6 : 60m P : 15m

Taille scène

170 x 185,2 km 170 x 185,2 km

3. Les comportements spectraux

Chaque objet géographique émet ou réfléchi un rayonnement dans les diverses fréquences du spectre électromagnétique : c’est le comportement spectral. En télédétection, on considère que tout objet ou classe d’objet possède sa propre empreinte dans le spectre électromagnétique.

Pour chaque objet observé dans le spectre électromagnétique à la surface de la terre, la valeur de réflectance correspond au rapport de l'intensité du rayonnement réfléchi au rayonnement incident d’une surface en pourcentage. Cette valeur varie en fonction de la longueur d'onde. Il est ainsi possible d'obtenir une courbe de réflectance en fonction des longueurs d'ondes dont l'allure générale constitue la signature spectrale de l'objet.

27

Les comportements spectraux intéressants dans le cas de cette étude sont ceux des surfaces en eau, des surfaces minérales et des surfaces végétales (Figure 11). - Les surfaces en eau présentent une réflectance assez basse dans le domaine visible en raison

de l’absorption des rayonnements (en particulier dans le rouge et le vert). Cela peut cependant être modifié par la présence de matières en suspension augmentant l’absorption du bleu.

- Les surfaces minérales, qu’elles soient naturelles ou artificielles (bâti), ont un comportement caractéristique selon leur nature, leur teneur en eau, leur teneur en minéraux et leur rugosité.

- Les surfaces végétales se caractérisent par des comportements particuliers dans les grands domaines spectraux, avec notamment une signature spectrale mettant en évidence une nette différence entre le visible et le proche infrarouge. Cela est dû à l’activité chlorophyllienne et à la présence d’eau dans les feuilles. En effet, les propriétés optiques des couverts végétaux dépendent à la fois de la nature des plantes qui les composent, de leur état physiologique, des organes végétaux notamment les feuilles et leur arrangement spatial ainsi que du sol sous-jacent (Guyot, 1995). Ainsi, compte tenu des variations de la signature spectrale au cours des saisons, l’étude de la végétation peut parfois présenter certaines difficultés.

Figure 11 : Comportement spectral des surfaces en eau, minérales et végétales (http://www.udel.edu.html)

4. Les indices

La connaissance du comportement spectral de chaque objet permet ensuite d’envisager des méthodes d’analyse basées sur l’emploi de plusieurs canaux, sous forme de combinaison linéaire ou de rapports. Il s’agit notamment des indices de végétation et des indices de l’eau. L’indice de végétation normalisé (NDVI : Normalized Differential Vegetation Index) : Il traduit la densité du feuillage et la proportion de sol effectivement couverte par la végétation. Il est défini par :

Il se base sur la différence de comportement du rayon électromagnétique face à la chlorophylle dans les bandes du rouge et du proche infrarouge. La réflexion dans le rouge est très faible tandis qu’elle sera plus forte dans le proche infrarouge.

28

Les valeurs varient de -1 à 1 et permettent de distinguer les surfaces végétales, des sols nus et de l’eau. L’indice est en effet d’autant plus élevé qu’il y a de la végétation, tandis qu’il se rapprochera de zéro pour des sols à dominés par les minéraux (sols nus et habitations) et sera inférieur à zéro pour les surfaces en eau.

Les indices de l’eau Deux indices ont ici été utilisés de façon complémentaire. Il s’agit de l’indice normalisé d’humidité et de l’indice de l’eau. Ils permettent de distinguer les zones humides des zones sèches, mais aussi de donner des indications quant à la turbidité de l’eau. L’indice normalisé d’humidité est défini par :

L’indice de l’eau est défini par :

29

CHAPITRE II : MATERIEL ET METHODE

La méthodologie suivie au cours de ce travail repose sur l'utilisation de données satellitaires, topographiques, agronomiques ainsi que sur des mesures et des observations effectuées sur le terrain. Ces données ont ensuite été intégrées et analysées à l’aide d’outils de télédétection et de Systèmes d'Information Géographique (SIG) permettant de cartographier la zone d’étude.

I. Matériel

1. Les données utilisées

Des images satellites Les images satellites apportent une information spatiale et spectrale permettant la caractérisation des objets. Elles représentent, de façon bidimensionnelle, la distribution du rayonnement électromagnétique réfléchi ou émis par des objets qui se traduit sous forme de variations de la teinte de gris. Elles sont composées par un ensemble de pixels dont les valeurs correspondent à l’enregistrement de la réflectance de la surface terrestre à des coordonnées spatiales précises.

Quatre images satellites géoréférencées Landsat couvrant l’ensemble du bassin versant du Bouregreg ont été utilisées : - TM 1985, produite le 15 avril 1985

- ETM+ 2000, produite le 2 mai 2000

- TM 2007, produite le 11 mars 2007

- TM 2011, produite le 9 mai 2011

Des données statistiques avec le recensement général agricole de 1996 et les résultats des

campagnes agricoles des provinces de Khémisset et de Rabat de 1980 à 2009.

Des données climatiques avec les pluies journalières de 1980 à 2009, pour quelques

stations du bassin.

Observations et enquêtes sur le terrain

L’observation directe du milieu est indispensable pour se rendre compte de la réalité du terrain, ce qu'il est difficile de faire à partir de vues aériennes. Elle permet ainsi l’identification précise de certains objets et éléments parfois peu visibles sur les images satellites.

Les enquêtes ont été menées auprès des agriculteurs, dont le rôle dans l’évolution de l’occupation du sol est prépondérant. Deux types de questions ont été posés : - des questions directes pour identifier leurs exploitations et les spécificités de leur région

- des questions ouvertes concernant leur histoire, leur vie actuelle et leur vision de leur

environnement proche.

2. Les logiciels informatiques

Envi 4.8 : logiciel de télédétection et de traitement d’images permettant d’avoir une bonne

résolution des images et dont l’une des principales applications est la classification par

maximum de vraisemblance. Il a aussi été utilisé pour le prétraitement des images.

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ArcGIS 10.0 : logiciel SIG permettant de visualiser, de localiser, d’analyser et de combiner

les données spatiales. Il est utilisé pour le traitement des données vectorielles et pour

l’établissement de cartes.

GoogleEarth : logiciel, propriété de la société Google, permettant une visualisation de la

Terre avec un assemblage de photographies aériennes ou satellitaires. Il est pourvu des

données topographiques rassemblées par la NASA lors de la mission SRTM, ce qui lui

permet d'afficher la surface de la Terre en 3D.

II. Méthode

1. Traitement des images satellites Landsat : analyse des signatures spectrales présentes sur l’ensemble du bassin versant et identification des objets.

Après la visualisation des canaux bruts, l’image Landsat est tout d’abord améliorée par étalement dynamique de l’histogramme. Pour chaque canal d’une image multispectrale, l’histogramme, généré à partir des pixels, est relatif à la distribution statistique des niveaux de gris dans ce canal. Sa visualisation donne des indications quant au nombre d’objets présents dans la scène. Son étalement permet d’étirer les contrastes, ce qui augmente la distinction des tons entre les différents éléments d’une scène. Ainsi, en faisant ressortir des plages de réflectance pour les principaux objets présents dans l’image, cela facilite l’analyse et l’interprétation visuelles.

Des néo-canaux sont ensuite créés afin d’augmenter la lisibilité des données. Ce procédé génère une nouvelle image issue de la combinaison de différentes sources d’information. Cela permet de rehausser certaines caractéristiques ou certaines propriétés des données qui sont moins évidentes dans l’image originale, montrant ainsi plus clairement certains éléments de la scène. Plusieurs indices sont donc créés tels que l’indice de végétation normalisé (NDVI), l’indice normalisé d’humidité (INH) et l’indice de l’eau. De plus, parallèlement à cela, l’analyse des signatures spectrales de l’image permet d’identifier la nature des pixels, et ce notamment en étudiant plus particulièrement la bande du canal 4, soit celle du proche infrarouge (0,73-0,90 µm), et la bande 3, soit la bande rouge du visible (0,63-0,69 µm).

Enfin, la comparaison de l’image Landsat avec une image SPOT5, de plus grande résolution, et l’utilisation de Google Earth ont permis d’identifier certaines zones, et ceci de façon visuelle.

2. Etude de la zone sur plusieurs dates : création des cartes d’occupation du sol

en 1985, 2000, 2007 et 2011 à partir d’images Landsat.

Le principe de la classification consiste à regrouper les objets de l’image par classes d’objets à réflectance spectrale identique. Elle donne à chaque pixel d’une image une certaine classe en fonction des caractéristiques statistiques de la valeur d’intensité du pixel.

Il existe diverses méthodes de classification qui peuvent être divisées en deux groupes : La classification non supervisée : les données sont classées selon leurs

caractéristiques spectrales, sans aucune information sur la nature des objets à classer. Elle permet d’obtenir une première segmentation des images en grands thèmes d’occupation du sol mais elle nécessite par la suite l’identification des différentes classes créées dont la signification thématique est parfois difficile à déterminer.

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La classification supervisée : les données sont classées vis à vis d’objets de référence, choisis par l’interprète. Elle est basée sur l’étude successive des histogrammes des valeurs radiométriques et des signatures spectrales de chaque pixel.

Dans cette étude, la méthode utilisée est celle de la classification supervisée par « maximum de vraisemblance », basée sur une approche statistique. La distribution des pixels, dans chaque classe, suivant une loi Normale, la méthode calcule la probabilité d’appartenance d’un pixel à une classe donnée. Le pixel sera affecté à la classe pour laquelle la probabilité est la plus forte. La classification supervisée suppose que l’on connaît la localisation de certaines zones dans l’image et les classes d’objets correspondants (les étiquettes).

Après avoir choisi les classes d’objets à rechercher dans l’image (Parcelle cultivée, Forêt, Sol nu et Eau), il est nécessaire de déterminer des zones d’apprentissage, spectralement les plus homogènes possibles, afin de caractériser les classes. Ces zones sont établies après l’analyse de plusieurs sites tests définis. Les caractéristiques spectrales de ces sites sont utilisées pour réaliser la classification, qui repose alors sur l’hypothèse que les statistiques des sites d’apprentissage de chaque classe suivent une distribution gaussienne et que les signatures spectrales de ces sites ne se recoupent pas. Avant de réaliser la classification, il est donc nécessaire d’étudier la séparabilité des signatures pour éviter la confusion inter-classes.

Après avoir lancé la classification, l’une des premières étapes est d’évaluer la qualité des résultats. Pour cela, il faut tout d’abord établir une matrice de confusion dont l’objectif est de quantifier le nombre de pixels d’une classe de référence que l’on retrouve dans la même classe d’affectation (pixels bien classés). Les valeurs situées sur la diagonale de la matrice représentent les pixels bien classés (exprimés en valeur absolue ou en %). L’estimation finale de la classification se fait en utilisant le coefficient Kappa qui est un estimateur de qualité variant de 0 à 1 et tenant compte des erreurs en lignes et en colonnes. Il existe d’autres indicateurs de précision tels que la précision globale, la précision pour l’utilisateur et la précision pour le réalisateur. Par la suite, les résultats issus de la classification sont validés, ou réfutés, par une vérification sur le terrain, après avoir définis des sites tests sur lesquels seront réalisés des relevés GPS.

Pour finir, l’image classée présentant souvent un manque de cohérence spatiale (tâches ou trous dans les parcelles), elle est améliorée par filtrage à partir d’un filtre lissant l’image suivant une fenêtre glissante de taille 3x3 pour éliminer les pixels isolés.

En ce qui concerne la classe habitat, sa création suit un procédé différent de celui décrit précédemment. En effet, les habitations dans la région étant construites à partir des roches présentes aux alentours, cette classe a tendance à se confondre avec celle des sols nus. Elle est donc créée à l’aide de la carte IGN, de Google Earth et de l’image SPOT5, images permettant de localiser ces zones habitables qui sont ensuite délimitées en créant des régions d’intérêt. Cette classe est donc construite manuellement. Seules sont prises en compte les habitations groupées, villes et villages. Les fermes isolées se trouvent donc exclues, ceci par manque de temps d’une part, et d’autre part, du fait de confusions à l’œil nu entre les fermes et les sols nus.

3. Analyse des cartes d’occupation des sols

Après avoir validé les cartes d’occupation des sols créées, une étude approfondie de chaque image est réalisée :

- Analyse statistique : surface de chaque classe et comparaison entre elles et par rapport à l’ensemble du bassin versant ;

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- Analyse de l’image : voir où sont situées les principales zones de culture, les zones forestières et les zones urbaines.

Les cartes d’occupation des sols sont ensuite comparées les unes aux autres, ceci dans le but de détecter des différences entre classes homologues de deux classifications réalisées sur la même zone, et donc les changements du mode d’occupation des sols entre 1985 et 2000, entre 2000 et 2007, entre 2007 et 2011 et entre 1985 et 2011.

4. Etude des facteurs associés à l’évolution de l’occupation du sol sur le bassin

versant du Bouregreg

Cette partie est basée essentiellement sur l’étude de données bibliographiques et sur les résultats de l’enquête réalisée auprès des agriculteurs. Différents types de données sont prises en compte :

Les données climatologiques : le climat, facteur essentiel influant le couvert végétal, est étudié sur la période de 1987 à 2010. L’accent est plus particulièrement mis sur les dates auxquelles les images satellites (Landsat et SPOT5) ont été prises, soit en 1985, en 2000, en 2007 et en 2011.

Les données socio-économiques : leur étude commence par l’analyse des recensements de la population de 2004, de 1994 et 1982 et du recensement général agricole de 1996. L’objectif est de mettre en évidence les zones de concentration de la population et d’étudier l’évolution de l’urbanisation. De ce travail découle la réalisation d’une carte SIG mettant en relation la localisation des cercles et l'évolution du taux de croissance annuel dans les cercles composant le bassin.

Les données historiques : un historique agricole de la région, et plus particulièrement des sous-régions la composant, est réalisé. L’agriculture au début du XXème siècle et l’agriculture en 2011 a en effet subi de nombreuses mutations qu’il s’agira d’expliquer. L’objectif est de comprendre comment le secteur agricole a évolué dans l’histoire afin de pouvoir expliquer sa situation et son organisation d’aujourd’hui.

5. Les enquêtes auprès des populations agricoles (Annexe IV)

Les enquêtes sont menées sur différentes communes du bassin versant dans lesquelles l’agriculture occupe une place importante dans les activités économiques (communes de Sehoul et de Moulay Driss Aghbal). Les personnes interrogées ont toutes un lien avec le secteur agricole. La plupart sont paysans, mais un ouvrier agricole dans une grande exploitation et l’imam d’un douar ont aussi été interrogés. Les questions sont toujours ouvertes afin de ne pas les influencer dans leurs réponses.

L’objectif est double. Il est tout d’abord de collecter des données sur les changements d’occupation du sol afin de pouvoir confirmer, ou infirmer, les cartes réalisées à partir d’images satellites. De plus, il s’agit d’étudier les facteurs et les problèmes environnementaux et sociaux liés à cette dynamique. Pour cela, les personnes ciblées sont interrogées sur leur historique afin de connaître d’une part leurs origines géographiques et d’autre part, d’identifier les périodes ou années caractérisées par des évènements ayant une importance particulière. Le questionnaire aborde ensuite plus particulièrement la question de l’érosion dans le but d’étudier la perception et la prise en compte des questions de vulnérabilité des sols par les personnes interrogées.

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6. Impact de l’évolution de l’occupation du sol sur la vulnérabilité des sols

Dans cette dernière partie, l’objectif est d’étudier les relations entre les activités agricoles et l’occupation du sol afin de mettre en évidence la vulnérabilité des sols dans certaines régions du bassin versant. Une carte SIG associant différentes données entre elles est créée à cet effet.

Les éléments pris en considération sont, par ordre d'importance : - l’occupation du sol : la classification de l'occupation du sol à partir des images Landsat a

permis d'identifier quatre classes : les parcelles cultivées, les forêts, les sols nus et les zones urbaines. Chacune d'entre elles est assignée d'une valeur comprise entre 1 et 3, 1 étant affecté à la classe la moins vulnérable et 3 à la plus vulnérable ( Tableau 4).

Tableau 4 : Classes d'occupation du sol et indice attribué

Occupation des terres Indice attribué

Forêts 1

Parcelles cultivées 2

Sols nus 3

- la pente, selon une carte créée à partir de données GDEM (issues de données satellite ASTER). Les différentes classes, et l'indice qui leur est attribué, sont donnés par le tableau 5.

Tableau 5 : Classes des pentes et indices attribués

Taux d'inclinaison (%) Type de pente Indice attribué

0-5 Très faible 1

5-10 Faible 2

10-20 Moyenne 3

20-40 Forte 4

>40 Très forte 5

- les types de sol et leur sensibilité à l'érosion : ces informations sont obtenues en confrontant la carte pédologique, avec la composition physico-chimique des sols constituant le bassin versant du Bouregreg (Annexe V), et la carte lithologique (Annexe I) qui renseigne sur les principales formations géologiques présentes. Ce croisement de données donne des indications quant à la capacité des sols à infiltrer l'eau de pluie (taux de carbonates de calcium), à ruisseler et à former une croûte de battance (taux de limons). On peut ainsi distinguer quatre classes de matériaux : peu vulnérable, moyennement vulnérable, vulnérable et très vulnérable. A chaque classe est assigné un indice variant entre 1 et 4, 1 étant affecté aux matériaux les moins sensibles à l'érosion et 4 aux matériaux les plus sensibles.

- la densité de population qui influence l'érosion. En effet, dans un système agraire donné, si la population dépasse certains seuils, les terres viennent à manquer et les mécanismes de restauration des sols se grippent (Pieri, 1989). Cette information est donc issue des données des recensements de la population de 2004, de 1994 et de 1982. Cinq classes sont ainsi créées (Tableaux 6).

-

34

Tableau 6 : Classes des densité et indices attribués

Densité (nombre d'hab/km²) Indice attribué

0-30 1

30-50 2

50-100 3

100-500 4

>500 5

La méthodologie développée dans cette étude utilise des règles qualitatives et des évaluations pour l'attribution des indices aux différentes classes considérées, ainsi qu'une hiérarchisation des paramètres intervenant dans l’érosion hydrique : occupation des terres, degré de pente, vulnérabilité des sols et densité de population. L’ensemble de ces données est intégré dans un SIG pour une meilleure gestion de l’information. La combinaison de ces cartes a permis de produire une carte du risque d'érosion sur le bassin versant du Bouregreg. Quatre degrés de risque d'érosion ont été définis : faible, moyen, fort et très fort.

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CHAPITRE III : LA DYNAMIQUE DE L’OCCUPATION DU SOL

Durant les trente dernières années, de 1980 à aujourd’hui, le bassin versant du Bouregreg a évolué et subi de nombreuses modifications sous l'effet de divers facteurs que nous détailler ici.

Après avoir exposé les résultats cartographiques et l’état de l’occupation du sol en 1985, en 2000, en 2007 et en 2011, les changements entre chacune de ces dates seront analysés. Au vu de l’importance de la place de l’agriculture sur le bassin, les différences observées seront confrontées aux données issues des campagnes agricoles réalisées dans la région et collectées auprès des institutions locales. L’objectif est ici de confirmer les résultats obtenus pour chaque image et les tendances découlant de l’analyse qui a suivi. Par la suite, les facteurs liés aux changements d’occupation du sol seront identifiés et expliqués.

I. Evolution de l’occupation du sol dans le bassin versant du

Bouregreg

1. A l’échelle du bassin versant

a. Les résultats cartographiques

Les différentes classes d’occupation du sol sont définies dans le tableau 7 et constituent des éléments de légende pour les différentes cartes élaborées à partir des images Landsat (Figure 12). Tableau 7 : Les classes d'occupation du sol

1 Donnée calculée à partir du Recensement Général Agricole de 1996 et des résultats issus de la cartographie du

bassin versant du Bouregreg.

Classe Description

Parcelles agricoles

parcelles en culture aux dates d’acquisition des images satellites avec un minimum de couverture végétale. Ne sont donc pas prises en compte les parcelles agricoles venant d’être labourées et/ou semées (car couverture végétale alors trop faible), soit environ 25% des sols cultivés1.

Forêts formations forestières présentes sur la zone d’étude.

Sols nus espaces à couverture végétale faible voire nulle. Ils peuvent aussi être des parcelles de cultures labourées ou récemment semées.

Zones urbanisées

aménagements qui regroupent les habitations groupées et les industries. Ne sont pas prises en compte les habitations isolées du fait d’un risque de confusion avec les sols nus.

Eau Etendues d’eau plus ou moins pérennes (lac, barrage, oueds, dayas).

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21 km

21 km

21 km

21 km

Figure 12 : L'occupation du sol sur le bassin versant du Bouregreg en 1985, 2000, 2007 et 2011

37

b. Les changements d’occupation du sol sur le bassin versant du Bouregreg

Après avoir étudié les résultats statistiques issus de l’étude des différentes cartes d’occupation du sol, nous analyserons les variations spatiales des classes d'occupation entre 1985 et 2000, entre 2000 et 2007, entre 2007 et 2011 et pour l'ensemble de la période, c'est-à-dire entre 1985 et 2011.

Le tableau 8 présente les résultats statistiques calculés à partir des cartes d'occupation du sol de 1985, 2000, 2007 et 2011. Il représente les superficies des différentes classes et leur valeur relative par rapport à la superficie totale de la zone d'étude. Tableau 8 : Evolution spatiale des classes d'occupation du sol de 1985 à 2011 sur le bassin versant du

Bouregreg

Le tableau 9 met en évidence les taux de croissance des différentes classes d'occupation du sol entre 1985 et 2000, entre 2000 et 2007, entre 2007 et 2011 et le taux de croissance en résultant entre 1985 et 2011.

Tableau 9 : Evolution des taux de croissance (TC) des différentes classes d'occupation du sol sur le bassin

versant du Bouregreg

TC 1985-2000 TC 2000-2007 TC 2007-2011 TC 1985-2011

Parcelles Agricoles

-89,7 668,2 -41,8 -54,0

Forêts -71,8 436,5 -21,4 19,0

Sols nus 283,1 -74,3 109,3 105,9

Eau -66,8 74,5 60,0 -7,2

Zones urbanisées 34,6 14,3 22,4 88,4

De 1985 à 2000 L’analyse des résultats cartographiques et statistiques fait ressortir une nette progression des sols nus, du bâti mais aussi une nette régression des parcelles agricoles, des forêts et de l’eau. Entre 1985 et 2000, on observe que la superficie de la classe "parcelles agricoles", qui représentait plus de 50% du bassin en 1985, a diminué de presque 90%, recouvrant ainsi seulement 5,5% de la zone en 2000. De la même façon, les forêts ont fortement régressé pendant

1985 2000 2007 2011

km² % km² % km² % km² %

Parcelles Agricoles

5326,4 53,4 548,2 5,5 4211 42,2 2449,9 24,6

Forêts 2237,6 22,4 631,2 6,3 3386,1 34,0 2662,4 26,7

Sols nus 2265,2 22,7 8678,1 87,0 2228,6 22,4 4664,7 46,8

Eau 75,5 0,8 25,1 0,3 43,8 0,4 70,1 0,7

Zones urbanisées

65,3 0,7 87,9 0,9 100,5 1,0 123 1,2

TOTAL 9970 100,0 9970 100,0 9970 100,0 9970 100,0

38

cette période passant de 2 237,6 km² (22,4% du bassin) en 1985 à 631 km² (6,3% du bassin) en 2000. Parallèlement, les sols nus, quant à eux, ont connu une extension de plus de 6 700km², soit 283,1%, et couvrent en 2000 87% du bassin. Cette hausse serait le résultat de la sécheresse touchant la région cette année-là qui aurait affecté le cycle de développement des cultures, et donc, à terme, une perte des récoltes, et touché également les surfaces forestières. Ces dernières ont également été touchées par une extension de la SAU, plus particulièrement visible au niveau de la forêt de la Maâmora. En 2000, on observe en effet la présence d’un petit nombre de parcelles agricoles en bordure de forêts, absentes en 1985. Elles sont identifiables à l’œil nu - par leur forme rectiligne - et non pas par des mesures de réflectances qui les classeraient en sol nu du fait des conditions climatiques sèches de l’année 2000.

Le Palier intermédiaire ainsi que la partie située en amont du Palier inférieur, entre les communes de Rommani et de Maâziz, sont plus particulièrement touchés par cette diminution des surfaces agricoles et forestières. Le Haut pays et la partie aval du Palier inférieur, soit celle située à proximité du littoral, sont quant à eux relativement plus épargnés. Cela peut s’expliquer par des conditions climatiques plus favorables dans ces zones du fait de la distance avec l’océan et de l’altitude qui auront tendance à adoucir le climat. Il faut cependant noter que la zone correspondant au Palier inférieur, vers Ezzhiliga, comportait déjà, en 1985, une part importante de sols nus sans doute en raison du climat semi-aride qui caractérise cette région.

La sécheresse pourrait aussi être à l’origine de la baisse de 66,8%, soit environ 50 km², des surfaces en eau à travers le bassin. Les zones les plus touchées sont situées le long des oueds qui, par endroit, sont naturellement peu profonds et sont donc plus sensibles à de fortes températures. Cela se traduit notamment par une baisse du niveau de l’eau au niveau du barrage SMBA. On observe en effet une variation de 2 km² de la surface des eaux du barrage pouvant s’expliquer par une certaine variabilité de la pluviométrie entre 1985 et 2000.

La surface couverte par le bâti s’est aussi étendue et a augmenté de 34,6%, soit 22,6 km². Cela résulte notamment du développement des grands centres urbains tels que Rabat-Salé et Khémisset, et des villes proches de la capitale comme Témara et Aïn el Aouda. L’extension de la zone urbanisée touche aussi bien les parcelles agricoles que les sols nus et les forêts.

De 2000 à 2007 La superficie des zones de culture, des zones forestières et des surfaces bâties s’est considérablement accrue contrairement aux sols nus dont la superficie a régressé. Les zones de culture ont augmenté de 668,2%, passant ainsi d'un taux de recouvrement du bassin de seulement 5,5% en 2000 à 42,2% en 2007. De la même façon, les forêts se sont accrues, gagnant ainsi 2 755 km² en l’espace de 7 ans.

Contrairement à la période précédente, les surfaces recouvertes par des sols nus ont considérablement diminué. En 2007, elles n’occupent plus que 22,4% du bassin tandis qu’en 2000, elles en recouvraient 87%, soit la presque totalité. Elles sont essentiellement localisées sur deux zones de natures différentes : dans la zone reliant les communes de Rommani et de Maâziz correspondant à des sols

agricoles qui seraient, à cette date-là, labourés ou venant d’être semés. Du fait de la date de prise de vue de l’image, on peut penser que ces sols sont destinés à être cultivés en maïs, culture dont le semis se fait entre le 1er mars et le 10 mars (Annexe VI) .

dans la région d’Ezzhiliga, au niveau du Palier intermédiaire, qui correspond à une zone de sols nus non cultivés et/ou destinés au parcours.

Cette nouvelle tendance de l’occupation du sol peut s’expliquer par des conditions pluviométriques plus favorables, avec une meilleure répartition des précipitations en 2007

39

qu’en 2000, et ce notamment durant les mois précédents la date de prise de vue des deux images (le 11/03/2007 et le 2/05/2000). Cela permettrait en effet une amélioration du développement du couvert végétal dans le bassin versant cette année-là.

Les tendances de la première période se maintiennent cependant pour les surfaces bâties, avec une croissance de 14,3%, localisées essentiellement au niveau des grands centres urbains tels que Rabat et Salé et des villes à proximité.

En ce qui concerne les surfaces en eau, on observe qu’elles ont augmenté de près de 75%, ce qui correspond à un gain de surface de près de 20 km². Cela semble confirmer l’hypothèse de conditions climatiques plus favorables en 2007.

De 2007 à 2011 Durant cette période, on observe une réduction des surfaces agricoles et forestières face à la progression des sols nus et du bâti.

La classe "sol nu" a augmenté de près de 110%, soit environ 2 430 km². Après analyse de l’image satellite, on peut supposer qu’une partie de ces sols nus serait en réalité des parcelles agricoles cultivées en légumineuses, dont la période de récolte (1er mai-20 mai) coïncide avec la date de prise de vue de l’image. En effet, les terres de culture présentent une quasi-absence de végétation durant les périodes de préparation des sols, de semis et après la récolte.

Le bâti continue aussi de progresser avec une hausse de 22,5 km², soit 22,4%. Il s’est étendu sur des parcelles agricoles essentiellement. Ainsi, parallèlement à cette progression des sols nus et du bâti, la classe des parcelles cultivées a diminué d’environ 42%, soit 1 761 km², et celle des forêts est passée de 3 386 km², soit 34% du bassin, à 2 662 km², soit 26,7%. Cette réduction de la surface forestière pourrait s’expliquer par des défrichements au profit de l’agriculture mais aussi par la dégradation des forêts qui évoluent en sols nus en certains endroits du bassin, et notamment dans les zones de relief, sur les versants exposés au Sud (Figure 13). En effet, l’ensoleillement sur ces versants est plus important que sur les versants exposés au Nord, ce qui augmente la température du sol et de ce fait, l’évapotranspiration. Le couvert végétal sera donc plus sensible sur ces sols qui, s’ils sont en plus pâturés, se dégraderont d’autant plus vite.

Figure 13 : Dégradation du couvert forestier sur un versant exposé au Sud et pâturé

40

Les surfaces en eau se sont, quant à elles, accrues de 60% en l’espace de 4 ans. Cette progression s’explique notamment par l’augmentation de la hauteur de l’eau au niveau du barrage SMBA, dont la surface est passée de 23 km² en 2007, à 43,7 km² en 2011 (Figure 14).

L’évolution de l’occupation du sol de 1985 à 2011 Durant les vingt-six dernières années, le bassin versant a été marqué par l’extension progressive du bâti, dont la surface s’est accrue de 58 km², soit près de deux fois sa surface en 1985, ce qui représente un taux de croissance de 88,4%. Il s’est essentiellement développé sur les parcelles agricoles qui étaient situées à proximité des centres urbains, mais aussi sur de petites zones de forêts également localisées à proximité et les sols nus.

Les sols nus ont quant à eux largement progressé durant cette période, gagnant environ 2 400 km², au détriment des parcelles agricoles qui se sont dégradées du fait de phénomènes d’érosion notamment, mais aussi des forêts, et plus particulièrement celles situées sur les versants exposés au Sud.

Les surfaces consacrées à l’agriculture ont diminué de 54%, soit environ 1 000 km², entre 1985 et 2011. Cela peut s’expliquer par la progression des sols nus et du bâti mais aussi par les conditions climatiques qui ont marqué cette période. De plus, la date de prise de vue des deux images (15 avril 1985/9 mai 2011) laisse supposer qu’une partie des parcelles agricoles aurait été récoltée et serait donc classée en sols nus. Cependant, malgré cette baisse, on remarque une densification des zones de culture au niveau des plaines (Figure 15) et leur extension sur les versants (Figure 16).

3 km

Figure 14 : Différence de hauteur d'eau au niveau du barrage de Sidi Mohammed Ben Abdellah

entre 2007 et 2011 (Compositions colorées Landsat des canaux 4 (rouge), 3 (vert), 2 (bleu))

41

4 km

4 km

Figure 15 : Extension des zones de culture sur la plaine d'Aïn el Aouda entre 1985 et

2007 (source : cartes d'occupation du sol élaborées par E. Goussot)

Figure 15 : Extension des zones de culture sur les versants dans le Haut pays entre 1985

et 2011 (source : cartes d'occupation du sol élaborées par E. Goussot)

42

Durant cette période, les surfaces en eau ont également subi des fluctuations qui pourraient être le résultat de conditions climatiques particulièrement variables. Elles peuvent aussi découler de la gestion des eaux du barrage SMBA qui dépend entre autre des besoins en eau de la région.

L’étude de l’occupation du sol de 1985 à 2011 fait ressortir une certaine répartition des principaux éléments composant le bassin versant du Bouregreg. Ainsi, les parcelles agricoles, bien qu’elles soient présentes sur l’ensemble du bassin, se concentrent dans trois grandes régions :

en aval du bassin, sur le Palier inférieur, au niveau du long couloir s’étirant du Nord-Est (Maâziz) au Sud-Est (Rommani) où les terres présentent de bonnes potentialités agricoles (argile rouge du Trias) ainsi que sur la commune de Sehoul ;

dans le Haut pays, sur les hauts plateaux et sur les versants, entre Oulmès et Aguelmous.

Les formations forestières sont quant à elles localisées en aval du bassin, à proximité de Rabat, formant les forêts de la Maâmora et de Sehoul, et à l’Ouest du bassin et dans le Haut pays, sur les versants exposés au Nord

Bien que leur importance varie en fonction des conditions climatiques, les sols nus se situent essentiellement au Sud-Ouest du bassin, soit au Sud d’Ezzhiliga, mais aussi dans les zones de reliefs, sur les versants exposés au Sud.

La classe "eau", en couvrant moins de 1% de la zone, est la classe la moins représentée sur le bassin. Elle est essentiellement localisée au Nord du bassin, au niveau du barrage SMBA, mais du fait de la présence de quelques retenues d’eau et de dayas au milieu des surfaces forestières, on la trouve aussi plus en amont.

Pour finir, les zones urbaines sont disséminées à travers tout le bassin mais certaines sont plus étendues que d'autres. Les grandes agglomérations (Rabat et Salé) sont situées sur le littoral et les principaux centres urbains sont quant à eux implantés soit en périphérie de la capitale (Aïn El Aouda) soit dans de grandes régions agricoles (Rommani, Maâziz, Aguelmous).

2. Mise en relation des cartes d’occupation du sol avec les données agricoles

En recouvrant 519 558 ha, soit 52% de sa surface, l’agriculture sur le bassin versant du Bouregreg occupe une place primordiale. Ainsi, l’étude de la situation agricole entre 1980 et 2009 permet de donner des indications quant à la couverture du sol durant cette période et pour une année donnée, confirmant ou infirmant les cartes d’occupation du sol créées. Les résultats des campagnes agricoles de la province de Khémisset, qui compte pour près de 50% de la SAU du bassin, et de Rabat, ont donc été étudiées de 1980 à 2009. Elles fournissent en effet des données sur la production et la surface pour chaque culture pratiquée dans ces deux provinces. L’étude de la figure 17, qui retrace l’évolution du rendement de 1980 à 2009 pour les cultures céréalières et légumineuses, et du tableau 10 semble confirmer les résultats issus des cartes d’occupation du sol de 1985, 2000 et 2007. Les rendements en 1985 et en 2007 sont bien plus élevés qu’en 2000, année durant laquelle le rendement céréalier ne dépasse guère les 1,05 qx/ha, soit dix fois moins qu’en 1985 et cinq fois moins qu’en 2007 pour les mêmes cultures. Cela laisse donc supposer d’importants problèmes au niveau des parcelles agricoles en 2000.

43

Tableau 10 : Rendements céréaliers et de légumineuses en 1985, 2000 et 2007 dans les provinces de Rabat et

de Khémisset (source : Campagnes agricoles, Ministère de l'Agriculture)

Rendements (qx/ha)

1985 2000 2007

Céréales 10,93 1,05 5,65

Légumineuses 4,17 0,46 2,46

II. Les facteurs associés à cette évolution

L’évolution de l’occupation du sol sur le bassin versant du Bouregreg a été conditionnée par un certain nombre de facteurs, liés les uns aux autres. Dans cette étude, nous nous sommes principalement intéressés à trois catégories de facteurs : les facteurs naturels, les facteurs socio-économiques et les facteurs historiques.

1. Les facteurs naturels

a. Le climat

Le climat régit la répartition spatio-temporelle de la ressource hydrique et influence ainsi l’occupation du sol, et ce notamment au niveau des zones agricoles et forestières. A l’échelle du bassin versant, l’évolution de la pluviométrie entre 1980 et 2009 montre une grande variation des précipitations autour d’une moyenne de 370 mm (Figure 18). Les pluies annuelles les plus élevées ont été observées en 1995, avec 625,7 mm, et en 2009, avec 662,5 mm. Les déficits les plus marqués sont quant à eux survenus en 1994, avec 200mm, et en 2006, avec 202 mm. Le reste du temps, les valeurs oscillent autour de la moyenne de la période de référence, mais restent le plus souvent inférieures.

0,00

5,00

10,00

15,00

20,00

25,00

1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010

Re

nd

em

en

ts (

qx/

ha)

Années

Céréales

Légumineuses

Figure 16 : Evolution des rendements céréaliers et de légumineuses de 1980 à 2009 sur les provinces de

Rabat et de Khémisset (source : Campagnes agricoles, Ministère de l’Agriculture)

44

Figure 17 : Hauteur des pluies moyennes annuelles à l'échelle du bassin versant du Bouregreg (1980-2009)

(source : SIGMED)

Afin de compléter l’étude des variations des précipitations sur le bassin, la notion de CUSUM a été introduite. Elle correspond au cumul des écarts à la moyenne de la pluie enregistrée, et permet ainsi de mettre en évidence les tendances générales de la pluviométrie de la série étudiée, soit entre 1980 et 2009 (Figure 19). Elle fait ainsi ressortir l’existence de six grandes périodes :

une période sèche qui s’étend entre 1980 et 1986 ; une période plus humide durant six années, entre 1986 et 1991 ; une période à nouveau sèche, de 1991 à 1994 ; une période humide démarrant en 1994 et se terminant en 1997 ; une période particulièrement sèche qui dura dix ans, entre 1997 et 2007 ; la dernière, de nouveau humide, qui débuta en 2007 jusqu’en 2009.

0,00

100,00

200,00

300,00

400,00

500,00

600,00

700,00

1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010

Plu

vio

trie

(m

m)

Années

Figure 18 : Tendances générales de la pluviométrie sur le bassin versant du Bouregreg de

1980 à 2009 : variation du « CUSUM » (Somme cumulée des écarts annuels des

précipitations par rapport à la moyenne de référence)

45

Ces observations permettent d’éclairer la situation climatique à chacune des dates des images étudiées. Ainsi, les images de 1985, de 2000 et de 2007 correspondent à des périodes de sècheresse plus ou moins longues. En ce qui concerne l’image datant de 2011, bien que n’ayant pas de données chiffrées à ce sujet, les témoignages et les observations sur le terrain indiquent que durant cette année, la pluviométrie fut particulièrement importante, l’incluant ainsi dans la période humide débutée en 2007. Cependant, afin de comprendre au mieux les variations entre les cartes d’occupation du sol, une étude plus approfondie de la pluviométrie durant ces années-là, mise en relation avec les besoins en eau des céréales, cultures majoritaires sur le bassin, est nécessaire.

b. Relation entre la pluviométrie de 1985 à 2009 et les besoins en eau des céréales

Au Maroc, et plus particulièrement sur le bassin versant du Bouregreg, les cultures céréalières, conduites essentiellement en bour, sont sujettes aux fortes fluctuations interannuelles de la pluviométrie. La pluie est en effet un évènement aléatoire qui, si elle n’est pas suffisante pour subvenir aux besoins en eau des cultures au cours de leur cycle, peut entraîner des périodes de sécheresse et ainsi affecter la croissance normale des cultures.

Les céréales croissent et se développent en fonction de la pluviométrie au cours de la saison. Les trois grandes phases de croissance correspondent aux périodes de « levée-tallage » (décembre-janvier), de « montaison-épiaison » (février-mars) et de « floraison-maturité » (avril-mai). Les besoins en eau seront plus élevés durant la seconde phase au cours de laquelle on assiste à une accumulation rapide de la biomasse. Or cette étape coïncide aussi avec une augmentation de la température. C’est donc durant cette période que la sécheresse aura des conséquences néfastes sur les rendements. En effet, d’après une étude réalisée dans la région de Meknès, la sécheresse de milieu de cycle serait responsable de 60% des pertes totales de rendement, contre seulement 25% pour celle de début de cycle et 15% pour celle de fin de cycle (Jlibene M et Balaghi R., 1989).

Figure 19 : Pluviométrie moyenne mensuelle à l'échelle du bassin versant du Bouregreg en

1985, 2000, 2007

46

En 1985

On observe que durant les mois précédents la prise de vue de l’image Landsat (avril), la pluviométrie était relativement élevée (Figure 20). En effet, en février sont tombés presque 100 mm d’eau, soit deux fois plus que la moyenne mensuelle de la pluviométrie sur le bassin versant entre 1980 et 2009, tandis qu’en mars, la pluviométrie était de 35 mm, soit assez proche de la moyenne bien que légèrement inférieure.

Cela peut expliquer ce que l’on observe sur l’image Landsat de 1985 et sur la carte d’occupation du sol qui en résulte. En effet, les surfaces nues n’occupent qu’un quart du territoire tandis qu’une grande partie du reste est couverte, essentiellement par des surfaces cultivées (53%) mais aussi par des forêts (22%). Cette répartition de l’occupation du sol a ainsi très certainement été favorisée par le régime pluviométrique de cette année-là, et plus particulièrement par les pluies tombées en février-mars qui ont permis un bon développement du couvert végétal et notamment des cultures céréalières.

En 2000

Durant cette année-là, si la pluviométrie fut particulièrement élevée en décembre (107 mm) et en janvier (70 mm), dépassant ainsi largement la moyenne mensuelle de 1980-2009, les trois mois précédents l’acquisition de l’image (mai) furent bien plus secs. Cela est d’autant plus notable durant le mois d’avril au cours duquel est tombé en moyenne sur le bassin versant moins de 1 mm sur quatre jours alors que la moyenne est normalement à 39 mm.

Ces conditions climatiques particulièrement difficiles durant cette période peuvent expliquer la carte d’occupation du sol de 2000. On observe en effet que les sols nus, cette fois largement majoritaires, recouvrent la quasi-totalité du bassin tandis que les parcelles cultivées occupent moins de 6% du territoire.

La sécheresse qui est survenue à partir du mois de février a donc eu un impact négatif sur les cultures, qui s’est aggravé au fil du cycle. Cela a été d’autant plus important dans la grande région agricole entre Maâziz et Rommani : en formant un long couloir entouré par des reliefs et complètement défriché par l’homme au profit de l’agriculture, cela eu pour effet d’accentuer l’évapotranspiration.

L’altération des conditions pluviométriques a ainsi entraîné la régression des espèces végétales ayant des exigences particulières en eau. Cela s’explique notamment par la succession d’années sèches (1998-1999) précédant 2000, qui ont au fur et à mesure affaibli certaines espèces, affectant leur capacité de régénération.

Cette dégradation de la couverture végétale a eu pour conséquence de fragiliser les sols en les exposant ainsi à l’effet du vent et de la pluie, lors d’épisodes d’orage. En effet, le couvert végétal joue un rôle essentiel dans la fixation du sol et dans l’infiltration des eaux de pluies grâce au développement du système racinaire. Sa disparition expose le sol à divers agents érosifs favorisant ainsi le ruissellement, lors de forts épisodes pluvieux, et la formation d’une croûte de battance.

En 2007

Excepté décembre qui fut un mois relativement sec avec une pluviométrie de seulement 15 mm, soit 50 mm de moins que la moyenne mensuelle de 1980-2009, durant les mois précédents la prise de vue de l’image, la hauteur d’eau tombée coïncide avec les valeurs de la moyenne mensuelle. Ainsi, en janvier, la pluviométrie était de 67 mm (moyenne mensuelle 1980-2009 = 65 mm) et en février, elle était de 41 mm (moyenne mensuelle 1980-2009 = 51 mm). Les besoins en eau des cultures ont donc été suffisamment pourvus, expliquant la carte d’occupation du sol qui montre en effet la domination de la classe "parcelle agricole" par rapport à celle des sols nus.

47

1982 1994 2004 TC TCA TC TCA TC TCA

Bouznika 10550 14850 11565 40,8 3,4 -22,1 -2,2 9,6 0,4

Ain El Aouda 25372 45834 70407 80,6 6,7 53,6 5,4 177,5 8,1

Bejaad 27321 25899 24187 -5,2 -0,4 -6,6 -0,7 -11,5 -0,5

Tiflet 30954 39557 41323 27,8 2,3 4,5 0,4 33,5 1,5

Oued Zem 50671 48484 45304 -4,3 -0,4 -6,6 -0,7 -10,6 -0,5

Oulmès 59678 67558 66931 13,2 1,1 -0,9 -0,1 12,2 0,6

Témara 70489 143844 249230 104,1 8,7 73,3 7,3 253,6 11,5

Rommani 83653 93167 87127 11,4 0,9 -6,5 -0,6 4,2 0,2

Khémisset 88414 121821 140750 37,8 3,1 15,5 1,6 59,2 2,7

Khénifra 157077 166171 177901 5,8 0,5 7,1 0,7 13,3 0,6

Salé 380144 631803 823485 66,2 5,5 30,3 3,0 116,6 5,3

Rabat 534124 623457 627932 16,7 1,4 0,7 0,1 17,6 0,8

Total 1518447 2022445 2366142 33,2 2,8 17,0 1,7 55,8 2,5

Population 1982-1994 1994-2004 1982-2004CERCLE

2. Les facteurs socio-économiques

a. La croissance de la population sur le bassin versant du Bouregreg

L’accroissement démographique est relativement important sur le bassin versant du Bouregreg (Figure 21). Depuis 1982, la population du bassin s’est renforcée de près de 850 000 habitants, ce qui correspond à une augmentation de 55,8%, soit un taux de croissance annuel de 2,5% (Tableau 11).

Les raisons à l’origine de cette évolution sont nombreuses et sont toutes liées aux changements socio-économiques qu’a connus la population au cours de ces vingt dernières années. Parmi elles, on retrouve les difficultés économiques, le désir d’ascension sociale et l’accès à l’information sous toutes ses formes (H.C.P., 2004). On note cependant un certain ralentissement de l’accroissement durant la période de 1994 – 2004 avec un taux d’accroissement annuel de 1,7%, soit près de 1% de moins par rapport à la période 1982 – 1994 (Tableau 11). Cela peut en partie s’expliquer par la baisse du niveau de fécondité dans la région, ou le nombre moyen d’enfants par femme, qui était de 2,7 dans les années 1990, s’est réduit à 2,1 en 2004. Cette diminution résulte notamment d’un changement de mentalité concernant la planification familiale et de l’amélioration de la santé de la femme et des enfants. La rapide urbanisation que connaît la région depuis ces vingt dernières années contribue également à la baisse de la fécondité : le nombre moyen d'enfants par femme est réduit de 40% en milieu urbain par rapport au milieu rural (H.C.P., 2004). Or, comme nous le verrons par la suite, le bassin versant du Bouregreg connaît une forte augmentation de la population urbaine.

Tableau 11 : Répartition et évolution démographique des cercles du bassin versant du Bouregreg entre 1982 et

2004 (source : Recensements générals de la population de 1982, 1994 et 2004) TCA : Taux de croissance annuel

Figure 20 : Evolution de la démographie entre 1982 et 2004 sur le bassin versant du Bouregreg

48

b. L’urbanisation de la région

Entre 1982 et 2004, plusieurs communes du bassin versant du Bouregreg ont connu une baisse plus ou moins importante de leur nombre d’habitants (Figure 22). Celles constituant le cercle de Bejaad ont ainsi eu un taux de croissance annuel négatif (-0,5%) avec la perte d’un peu plus de 3000 habitants, soit environ 9% de la population de 1982, et ce en l’espace de vingt-deux ans (Tableau 11). Mais si certaines communes voient leurs effectifs se réduire, d’autres connaissent une forte expansion. Les communes comprises dans le cercle de Témara ont ainsi gagné près de 180 000 habitants, soit un taux de croissance annuel de 11,5%. Cela concerne essentiellement les grandes agglomérations telles que Rabat et Salé, et les centres situés en périphérie (Témara, Aïn el Aouda) dans lesquels on observe une forte concentration de la population (Figure 22 ). On assiste alors à une forte urbanisation du bassin versant (Tableau 12). En 2004, plus de 80% de la région est urbanisé contre 66,4% en 1982. En l’espace de vingt-deux ans, les villes ont vu arriver plus de 900 000 habitants. La part de la population urbaine sur le bassin s’est ainsi accrue de plus de 90%, ce qui correspond à un taux de croissance annuel d’environ 4%. Face à ce fort accroissement de la population urbaine, la population rurale a quant à elle fortement diminué de 12,5%. En 1982, elle représentait 33,6% du bassin contre seulement 18,9% en 2004.

Tableau 12 : Evolution de la population urbaine et de la population rurale de 1982 à 2004 (source :

Recensements de la population de 1982, 1994 et 2004, Haut Commissariat au Plan) (TC : Taux de croissance)

1982 1994 2004

1982-1994 1994-2004 1982-2004

TC TCA TC TCA TC TCA

Totale 1518447 2022445 2366142 33,2 2,8 17,0 1,7 55,8 2,5

Urbaine 1008000 1565290 1919322 55,3 4,6 22,6 2,3 90,4 4,1

% 66,4 77,4 81,1 Rurale 510447 457155 446820 -10,4 -0,9 -2,3 -0,2 -12,5 -0,6

% 33,6 22,6 18,9

Cette rapide urbanisation de la population de la région est le résultat de plusieurs facteurs tels que l’accroissement démographique, l’exode rural et l’extension des périmètres urbains.

- L’accroissement démographique En raison d’un excédent des naissances sur les décès, les villes du bassin versant connaissent un accroissement élevé, qui compte pour plus de 35% de la croissance urbaine de la région entre 1982 et 1994 (H.C.P.).

- L’exode rural Avec l’arrivée de la population des campagnes du bassin versant mais aussi du reste du pays, ce phénomène est l’un des principaux mécanismes de l’urbanisation. Il est le plus souvent d’origine économique et s’est accentué durant les vingt dernières années en réponse aux années de sécheresse et de mauvaises récoltes que le pays connaît depuis les années 19802. La ville de Salé, située à proximité directe de Rabat, est fortement concernée par ce phénomène. Entre 1982 et 2004, sa population a augmenté de près de 450 000 de personnes, passant ainsi d’environ 380 150 habitants en 1982 à près de 823 500 habitants en 2004. Plus des deux-tiers de sa croissance est due à l’arrivée de migrants issus des zones rurales et à la recherche d’emplois

2 Enquêtes réalisées auprès des agriculteurs sur le bassin versant du Bouregreg

49

et de meilleures conditions de vie. L’expansion de Salé s’explique aussi par le déplacement des habitants de Rabat, à la recherche de coûts fonciers plus modérés et d’une moindre cherté des loyers. Cette forte augmentation de la population de la ville a entraîné l’extension de la ville (Figure 23) et la construction de nouveaux quartiers comme celui de Salé el Jadida3.

- L’extension des périmètres urbains des villes et le développement des centres périphériques situés à quelques kilomètres de l’agglomération-mère

Ces « nouvelles » villes permettent de désengorger la ville de Rabat notamment et abritent ainsi une population urbaine de plus en plus importante. C’est le cas de la commune d’Aïn el Aouda qui est passée de 3 532 habitants en 1982 à 25 105 habitants en 2004, soit un gain de près de 21 600 habitants. La migration en provenance de Rabat ou de l’arrière-pays du bassin explique à elle seule la venue de près de 90% d’entre eux (H.C.P.).

L’augmentation de la population urbaine entraîne de nouveaux besoins et un important besoin d’espace, notamment dans les grandes agglomérations telles que Rabat et Salé où la densité de population est déjà très élevée. De cela résulte une forte expansion des zones urbanisées et ainsi le développement très rapide et plus en plus incontrôlable des communes situées à proximité des grandes villes, parfois au détriment des surfaces naturelles et des parcelles cultivées.

De plus, l'urbanisation augmente les risques, du fait de l'emprise foncière, des besoins en eau et de la transformation de l'agriculture suburbaine (extension de l'irrigation, choix pour des productions fortement consommatrices en eau) ou de l'implantation de nouvelles activités comme l'industrie.

3 Salé-la-Nouvelle

Figure 21 : Evolution de la population par cercles sur le bassin versant du Bouregreg entre 1982 et 2004 (source :

Recensements de la population de 1982 et de 2004, Haut Commissariat au Plan, carte élaborée par E. Goussot)

50

3. Historique : étude de l’histoire du bassin

L’évolution de l’occupation du sol a été conditionnée par l’histoire du pays et de la région ainsi que par les politiques agricoles qui ont été mises en place.

a. Historique agricole de la région

L’agriculture dans la région a été marquée par trois grandes périodes : la période pré-colonisation, la colonisation, après l’Indépendance.

La pré-colonisation : Les différentes tribus vivant dans la région étaient essentiellement constituées de pasteurs semi-nomades. Leur vie était rythmée entre :

- les terrains de parcours collectifs et la forêt, particulièrement étendue, qui faisait partie des biens communs des communautés semi-nomades,

- les champs de culture. En octobre, après l’épuisement des chaumes et de l’herbe d’été, les troupeaux quittaient le champ pour la forêt jusqu’au moment de la moisson, en mai, où ils étaient ramenés pour se nourrir de chaume et d'herbes desséchées des jachères pendant tout l’été, et ainsi de suite (Rajiallah-Bodinier F., 1991).

L’élevage, pratiqué ainsi de façon extensive, constituait leur principale ressource, et l’agriculture était alors considérée comme une activité complémentaire pratiquée sur les sols les plus fertiles, afin de subvenir aux besoins indispensables. Elle était donc pratiquée, mais dans des proportions plus restreintes avec un matériel primitif. Ils produisaient seulement ce dont ils avaient besoin soit du blé, de l’orge, du maïs, du mil et du sorgho.

Figure 22 : Extension de l'agglomération de Salé entre 1985 et 2011 (source : cartes d'occupation de 1985 et de 2011

élaborées par E. Goussot)

51

La colonisation : La colonisation française au Maroc s’est accompagnée de profondes mutations dans tout le pays. Le paysage agraire a été particulièrement marqué par l'installation de périmètres de colonisation, par la confiscation et par la privatisation des terres. Ainsi, dans l’arrière-pays de Rabat, à la veille de l’indépendance en 1956, les colons s’étaient constitués un secteur couvrant 40 373 ha, soit 23,7% des terres cultivées dans la région, partagé entre 488 propriétés (Rajiallah-Bodinier F., 1991).

La privatisation des terres

Afin de rendre légale l’occupation des terres par les colons et de protéger la propriété coloniale moderne contre l'instabilité des droits sur la terre, l’Etat a mis en place le système de l'immatriculation de la propriété foncière. L’instauration de ce code foncier a permis de développer la privatisation des terres collectives (Annexe III).

Parallèlement à cela, le renforcement de la sécurité des terres a entraîné un certain relâchement des liens tribaux, qui avec la crainte des paysans de se voir rejeter des lots qu’ils possédaient et exploitaient en commun, les a incité à s’installer définitivement sur les terres agricoles qu’ils exploitaient et donc à les immatriculer (Rajiallah-Bodinier F., 1991). Ainsi, en 1925, la majeure partie des paysans, et en particulier ceux exploitant des terrains sur sols tirs, avaient fait immatriculer leur terre auprès du service de la conservation foncière de Rabat.

Mise en place d’une agriculture moderne et diversifiée

La colonisation européenne a installé de grandes fermes modernes à travers toute la région. En pays Zaër, les terres coloniales couvraient 30 232 ha, partagés entre 180 propriétés coloniales dont les plus grandes (>100ha) détenaient près de 80% du patrimoine foncier. Les petites exploitations étaient cependant supérieures en nombre (Rajiallah-Bodinier F., 1991).

Ces grandes exploitations, avec une mécanisation poussée et de nouveaux moyens techniques et scientifiques (assolement, engrais chimiques, semences sélectionnées) pratiquaient une agriculture intensive et diversifiée. La région a alors été marquée par une augmentation des superficies cultivées, la plupart en céréales, avec notamment du blé tendre, nouvellement introduit au Maroc, mais aussi des cultures fourragères et des légumineuses. Les cultures fruitières, inexistantes auparavant sur le territoire, vont s’étendre au travers de la vigne, des orangers et des oliviers.

Le succès de l’agriculture coloniale a bouleversé les pratiques agricoles des paysans et, dans certaines régions, les a incité à délaisser leur mode de vie semi-nomade en se sédentarisant pour se consacrer à l’agriculture.

La législation forestière

Dès le début du Protectorat, les forêts, très fortement dégradées, voire déboisées à certains endroits, furent prises en charge par le service des Eaux et Forêts, créé en 1917, et devinrent domaine privé de l’Etat. L’objectif était de stopper cette dégradation et de favoriser la régénération. Ainsi, un certains nombres de mesures ont été mises en place telles que l’interdiction d’accès de certains cantons aux troupeaux et la limitation du nombre de têtes admises. Ces nouvelles mesures seront responsables de profonds changements dans les modes de vie des pasteurs, et en particulier d’une réduction notable de leurs déplacements (Rajiallah-Bodinier F., 1991).

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La post-colonisation : de la proclamation de l’Indépendance à aujourd’hui

Dès les premières années de l’Indépendance, l'agriculture a été placée au cœur de la politique de développement du Maroc afin d’assurer la légitimité du pouvoir et les bases de l’économie. La situation de l’agriculture actuelle est ainsi le résultat de nombreux programmes de développement et de réformes qui se sont succédés sur près de 50 ans et qui se sont déroulés en trois temps.

Le temps de l’action

Au lendemain de l’Indépendance, l’Etat avait pour ambition de développer une agriculture moderne et performante capable d’assurer l’autosuffisance alimentaire et de satisfaire la demande extérieure (Akesbi N., 2006). Il entreprit tout d’abord la récupération de la totalité du patrimoine foncier détenu par les colons et instaura une réforme agricole. Sa portée fut cependant très limitée du fait de la complexité et de l’archaïsme des statuts fonciers des terres (Annexe III), défavorables à toute politique de modernisation, et de l’opposition affichée par les grands propriétaires. Ainsi, seule une petite partie des terres coloniales furent redistribuées, le reste ayant été vendu par les colons à de grands propriétaires marocains qui sont devenus « les principaux bénéficiaires des transformations agraires du Protectorat » (Bouderbala N., 1999).

Les terres coloniales ont ainsi fait l’objet d’une politique très conservatrice. L’Etat souhaitait conserver dans leur intégralité les superficies de terrains récupérées et les systèmes modernes de production qui y étaient pratiqués. La crainte était en effet de voir diminuer les récoltes, et ainsi les exportations de produits agricoles, avec la redistribution de ces terres hautement productives. Le secteur agricole a ensuite bénéficié d’investissements publics massifs pour la construction des barrages (exemple du barrage SMBA, sur le bassin versant du Bouregreg) et l’équipement de grands périmètres irrigués dans le cadre de la « politique des barrages » (1966-1985). Durant cette période, marquée par une forte intervention de l’Etat, la priorité est donnée à l’agriculture irriguée, au détriment de l’agriculture pluviale, et de nombreuses subventions sont accordées à la consommation et à la production.

Le temps des remises en causes

Au tournant des années 1980, l’économie marocaine connaît une crise majeure causée par de nombreux facteurs tels que le surendettement, la hausse des prix du pétrole, et la grande sécheresse qu'a connue le pays à cette époque. Le pays met alors en œuvre d’importantes réformes au travers de programmes de stabilisation et d’ajustement structurel. Amorcée en 1983 et élargie au secteur agricole en 1985, ce programme a remis en cause la politique précédente jugée trop coûteuse. Les principaux résultats furent la réduction de l’engagement de l’Etat, via la suppression des subventions aux intrants agricoles, et la libéralisation du commerce des produits agricoles et des intrants (Akesbi N., 2006). Par la suite, cette tendance a la libéralisation fut renforcée et étendue à d’autres secteurs de l’économie du pays, et ce notamment après la signature de l’accord du GATT en 1994.

Cependant, ces réformes importantes n’ont pas produit les effets escomptés, entre autres, à cause du manque de mise en application de mesures d’accompagnement nécessaires à la transition. La conséquence directe de cette politique de désengagement hâtif de l’Etat est une stagnation de la croissance dans le secteur agricole dont la production est trop sensible aux conditions climatiques. Cela a ainsi contribué à aggraver les déséquilibres territoriaux, sociaux et économiques qui existaient auparavant, et ce malgré les efforts de l’administration pour soutenir la paysannerie et endiguer l’exode rural.

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Le temps de la réflexion et des stratégies

En réponse à la crise du monde rural, amplifiée par les sécheresses de plus en plus fréquentes et la politique d'ajustement structurel, le développement rural est devenu une priorité depuis 1993. Depuis lors, de nombreux « documents stratégiques » ont été produits mais aucun n’a véritablement abouti. Les politiques agricoles ont accentué, et ce dès la colonisation, le dualisme existant entre un secteur moderne avec les grandes propriétés privées capitalistes installées sur les meilleures terres de la région, et un secteur traditionnel, cultivant des terres marginales, situées sur les rebords de plateaux.

Le secteur moderne : Datant du Protectorat, il englobe les anciennes terres coloniales et les grands périmètres d’irrigation, qui ont ainsi bénéficié des aménagements. L’agriculture est mécanisée, intensive et orientée vers le marché (blé, lait, maraîchage), l’agro-industrie (cultures sucrières et oléagineuses) et l’exportation (agrumes, primeurs).

Le secteur traditionnel Hérité de l’agriculture ancienne, il concerne la grande majorité de la population rurale du pays. Il est caractérisé par une agriculture en bour avec des techniques rudimentaires, l’importance de l’autoconsommation et de l’émigration vers les grandes agglomérations. Il concerne essentiellement les petites exploitations familiales et se base sur une économie pastorale extensive.

De ce contraste entre les deux secteurs, renforcé par l’absence de réelle redistribution des terres coloniales, résulte une inégale répartition des terres entre les agriculteurs. Ainsi, en pays Zaër (Rajiallah-Bodinier F., 1991), il existe une opposition entre :

le groupe des paysans sans terre et des petits propriétaires (<5 ha) qui représente 65% des exploitants agricoles et 11% de la SAU régionale,

le groupe des paysans de la classe moyenne (5 à 25 ha) qui représente 29% des exploitants et 39% de la SAU régionale,

le groupe des grands propriétaires (>25 ha) qui représente 6% des exploitants et 50% de la SAU régionale.

A la veille du Protectorat, du fait de l’organisation traditionnelle de l’agriculture, le secteur agricole n’était pas marqué par de telles différences. En effet, la quasi-totalité de l’espace agro-pastoral marocain était occupé par les territoires des tribus qui étaient des terres collectives. Par opposition, à la fin du protectorat, le régime melk représentait plus des 2/3 des terres cultivées sur l’ensemble du pays. Ainsi, « tout s’est passé comme si le protectorat avait opéré le transfert d’une partie importante des terres de tribu entre les mains de la propriété foncière marocaine et contribué de façon majeure à la formation de la «bourgeoisie foncière». Cette conséquence de la colonisation sera encore accentuée lorsque, après l’Indépendance, les terres de colonisation prélevées sur les terres de tribu seront en partie reprises par des acheteurs marocains privés » (Bouderbala N., 1999).

Cette inégale répartition de l’espace cultivé est à l’origine d’un morcellement des terres au profit d’un petit nombre de grands propriétaires qui les accumulent. Parallèlement, pour les paysans ayant peu ou pas de terres, cela se traduit par le maintien de l’activité pastorale traditionnelle sur les parcours gratuits, ce qui contribue notamment à la dégradation du couvert végétal.

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b. Spécificité des quatre sous-régions du bassin versant du Bouregreg

o La Dépression orientale et le Haut pays :

Elle est occupée par les Zayanes, tribu berbère constituée de pasteurs semi-nomades. Auparavant, ces pasteurs se déplaçaient deux fois par an suivant un axe Nord-Ouest (montagneux) / Sud-Est (bordure). Dès le mois d’octobre, afin de profiter de conditions climatiques plus clémentes, ils descendaient dans la région de l’Azaghar, située dans le Haut pays, et occupaient alors toute la partie située entre Oulmès, Moulay Bouazza et Khénifra. Puis en avril, ils retournaient vers le Jbel pour y pâturer durant l’été.

Les meilleures terres du Haut pays, issues des formations volcaniques, ont peu à peu transformé les Zayanes en paysans sédentaires. Ainsi, à partir des années 1960, avec la fixation de plus en plus importante des tribus, les groupes de pasteurs se sont éclatés et dans cette région qui fut auparavant l’Azaghar des pasteurs transhumants, les cultures se sont développées, dans les bassins, aux dépens des terres de pacage. Actuellement les principaux types d’utilisations des terres y sont la céréaliculture et l’arboriculture. Cependant, avec la crise de la transhumance, les problèmes de déprise agricole, la situation sociale et la dégradation de l’environnement, certains espaces se sont marginalisés contribuant ainsi à l’exode rural. De plus, une forte urbanisation, essentiellement en périphérie, s’en est suivie, et ce surtout à partir de 1971 avec la promotion administrative de petits centres tels que Aguelmous.

o Le Palier intermédiaire :

Il est occupé par les tribus berbères des Zaër et des Zemmour qui exercent toutes deux une activité pastorale. Le système, autrefois semi-nomade, est actuellement transhumant, avec des déplacements de plus faible amplitude et le plus souvent confinés à l’intérieur des limites des communes. Cependant, dans la partie septentrionale de la zone, les Zemmour se sont fixés et vivent maintenant de l’agriculture.

o Le Palier inférieur :

Cette région, située aux portes de Rabat dont elle est sous l’emprise, est à nouveau partagée par les tribus Zaër et Zemmour. Cependant, contrairement au Palier intermédiaire, la Basse Méséta est caractérisée par une activité agricole moderne avec des cultures intensives telles que les céréales et la vigne. En effet, avec la colonisation, la région a été marquée par une augmentation des superficies cultivées, la plupart en céréales, avec notamment du blé tendre et des cultures de printemps. De même, les cultures fruitières vont ainsi s’étendre.

Cette région regroupe de grandes propriétés dont certaines détiennent les meilleurs rendements céréaliers du Maroc, et ce notamment au niveau de la longue dépression creusée dans les sols rouges du Trias, entre Rommani et Maâziz. La production céréalière représente en effet plus de 10% des fournitures nationales, ce qui est la preuve de bons rendements, sur un territoire somme toute limité.

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CHAPITRE IV : IMPACT DE L'EVOLUTION DE L'OCCUPATION

DU SOL SUR LA VULNERABILITE DES SOLS

L’érosion correspond au transport de particules de la surface du sol par le vent, l’eau, l’attraction universelle et divers agents (Bergsma et al., 1996). L’érosion hydrique, qui est étudiée ici, résulte de l’arrachement des particules par l’énergie des gouttes de pluie et du ruissellement, c’est-à-dire de l'écoulement par gravité de l'eau à la surface du sol, du transport par les eaux de ruissellement, et du dépôt localisé des sédiments trop lourds (Roose, 1994). Elle se développe lorsque les eaux de pluie, ne pouvant plus s’infiltrer dans le sol, s'écoulent sur la parcelle en emportant les particules de terre. Elle apparaît donc quand l’intensité des pluies est supérieure à l’infiltrabilité de la surface du sol ou quand la pluie arrive sur une surface partiellement ou totalement saturée par une nappe (ruissellement par saturation).

I. Mise en évidence d'une vulnérabilité des sols sur le bassin

versant du Bouregreg

1. L'érosion vue par les agriculteurs

L'érosion est présente sur l'ensemble du bassin versant du Bouregreg et touche la plupart des exploitations agricoles. Les paysans interrogés ont tous une ou plusieurs parcelles présentant des signes d'érosion plus ou moins importants (fissures, griffes). Cependant, à l'exception de quelques actions isolées, aucun plan de lutte n'est mis en place. Lorsque les formes d'érosion sont légères (griffes et rigoles), les agriculteurs continuent de cultiver la parcelle, effaçant ainsi les traces par le labour et les masquant provisoirement sous le couvert végétal. Par la suite, lorsque l'érosion devient trop importante avec la formation de ravines et d'incisions profondes, elle entrave le travail du sol. La parcelle concernée est alors abandonnée et d'autres terres sont défrichées pour être mises en culture. On observe cependant que certains, les plus pauvres en général, essayent malgré tout de maintenir la terre sur leurs parcelles. Ils mettent en place des actions en fonction de leurs moyens. Quelques uns d'entre eux tentent par exemple de ralentir le processus en comblant les fissures avec des cailloux ou avec des engrais organiques. De même, l'un des paysans rencontré, qui appartenait à la classe des petits exploitants (SAU=2 ha), aménage chaque année de petites terrasses avec les cailloux issus de son champs. Si cela permet de ralentir légèrement les écoulements, l'efficacité est relative, ces terrasses se défaisant systématiquement lors du passage de l'eau. Ainsi, à quelques exceptions près, la plupart des exploitants, toutes catégories confondues, ne mettront en place aucune action corrective. Dans la plupart des cas, cette attitude résulte d'un manque de moyens, de formation, d'intérêt ou de temps. Cela dépend de chaque agriculteurs et des caractéristiques propres à sa ferme.

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21 km

21 km

21 km

21 km

Figure 23 : Carte du risque d'érosion sur le bassin versant du Bouregreg en 1985, 2000, 2007, 2011

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2. Etude des cartes du risque érosif sur le bassin versant du Bouregreg

a. Analyse générale du risque d'érosion sur le bassin versant

La carte du risque d'érosion (Figure 24) et l'analyse statistique (Tableau 13) qui en résulte, montrent que la majeure partie du bassin versant du Bouregreg est plus ou moins vulnérable aux processus d'érosion. Près de 6 000 km², soit environ 63% du bassin, sont dans des zones présentant de forts - voire de très forts - risques de dégradation. Sur ces terres, les superficies occupées par les parcelles agricoles, les forêts et les sols nus sont équivalentes :

- plus de la moitié de la surface agricole est située dans ces zones et 25% de cette surface est sur des pentes de plus de 20% ;

- plus de trois-quarts des forêts sont classées en zones fortement et très fortement vulnérables. Parmi elles, 83%, soit environ 1800 km², sont implantées sur des pentes supérieures à 20% ;

- 62% des sols nus sont localisés sur des terres sensibles à l'érosion dont près de la moitié sont sur de fortes pentes (>20%).

Les zones peu sensibles à l'érosion ne représentent quant à elles pas plus de 8% du bassin. Tableau 13: Répartition des types d'occupation du sol en fonction de la sensibilité du milieu à l'érosion en

1985, 2000, 2007 et 2011

1985 2000 2007 2011

TC 1985-2000

TC 2000-2007

TC 2007-2011

TC 1985-2011

Faible

Forêts 139,1 29,7 220,8 227,9 -78,6 643,4 3,2 63,8

Parcelles agricoles

188,1 18,9 169,6 87,2 -90,0 797,4 -48,6 -53,6

Sols nus 250,4 1244,1 244,6 699,5 396,8 -80,3 186,0 179,4

Total 577,6 1292,7 635,0 1014,6 123,8 -50,9 59,8 75,7

Moyen

Forêts 232,3 43,3 337,5 346,2 -81,4 679,4 2,6 49,0

Parcelles agricoles

2383,4 219,0 2028,0 923,9 -90,8 826,0 -54,4 -61,2

Sols nus 511,1 1818,3 541,5 1140,4 255,8 -70,2 110,6 123,1

Total 3126,9 2080,6 2907,0 2410,5 -33,5 39,7 -17,1 -22,9

Fort

Forêts 518,5 114,2 858,7 639,7 -78,0 651,9 -25,5 23,4

Parcelles agricoles

1917,5 198,1 1412,4 875,5 -89,7 613,0 -38,0 -54,3

Sols nus 1196,8 4747,1 1193,5 2396,2 296,6 -74,9 100,8 100,2

Total 3632,8 5059,4 3464,6 3911,4 39,3 -31,5 12,9 7,7

Très fort

Forêts 1278,5 411,1 1849,7 1368,4 -67,8 349,9 -26,0 7,0

Parcelles agricoles

681,6 88,1 484,7 421,5 -87,1 450,2 -13,0 -38,2

Sols nus 204,9 605,6 174,5 324,2 195,6 -71,2 85,8 58,2

Total 2165,0 1104,8 2508,9 2114,1 -49,0 127,1 -15,7 -2,4

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b. Répartition du risque érosif sur le bassin

La visualisation des cartes du risque érosif à différentes dates met en évidence l'existence de région systématiquement concernées. On distingue trois types de région :

- les régions où l'aléa érosif est très élevé : elles sont localisées sur des pentes fortes voire très fortes (>20%), au niveau des Hauts plateaux et sur les versants bordant les oueds tel que l'oued Korifla. Ce sont des régions où la carte des sols indique une forte proportion de limons, et notamment de limons fins, favorisant ainsi la formation de croûte de battance et le ruissellement.

- les régions où l'aléa érosif est fort : elles sont situées sur les versants qui sont répartis sur l'ensemble du bassin. Elles sont aussi présentes dans le couloir entre Rommani et Maâziz qui est une zone très agricole car les sols y sont particulièrement fertiles (sols tirs). Ces terres sont cependant très sensibles à l'érosion en raison du substrat marneux sur lequel elles reposent. Dans cette zone, les pentes sont moyennes (entre 5 et 20%).

- les régions où l'aléa érosif est faible : elles sont, pour la plupart, situées en amont du bassin ainsi que plus en aval, sur des pentes inférieures à 20% et au niveau d'affleurements rocheux (lithosols), ce qui expliquent qu'elles soient peu couvertes.

La distribution inégale du risque d'érosion résulte de l'impact variable dans l'espace des divers facteurs dans ce processus de dégradation. La vulnérabilité des sols à l'érosion est essentiellement contrôlée par l'occupation du sol, selon la densité et le type de couvert végétal. La pente est aussi un facteur primordial dans le déclenchement de l'érosion. Le bassin versant du Bouregreg compte une grande partie de terres ayant une inclinaison supérieure à 10% (Tableau 14). Près de 4000 km², soit environ 40%, sont sur des pentes fortes à très fortes (Annexe VII). Elles sont pour la plupart localisées dans le Haut pays, région montagneuse, et dans les vallées encaissées, entaillées par les oueds traversant le bassin versant du Bouregreg. Les pentes dont l'inclinaison est inférieure à 10% représentent quant à elles 35% du territoire. Elles sont essentiellement présentes au niveau du Palier inférieur et du Palier intermédiaire.

Tableau 14 : Surfaces occupées pour chaque type de pente

Taux d'inclinaison Type de pente Surface

km² %

0 - 5% Très faible 1327.4 13.3%

5% - 10% Faible 2208.2 22.1%

10% - 20% Moyenne 2596.4 26.1%

20% - 40% Forte 2514.1 25.2%

> 40% Très forte 1324.9 13.3%

La nature des sols intervient aussi dans le déclenchement du processus de dégradation. L'’érodibilité est en effet fonction de plusieurs paramètres dont celui de la stabilité structurale qui dépend de la texture du sol et de sa teneur en matières organiques et en argiles. La perméabilité, la profondeur des profils de sol et leur cohésion influeront également sur la résistance des sols à la dégradation. De plus, les formations géologiques qui constituent la lithologie du bassin versant répondent elles aussi différemment selon leur dureté, leur cohésion et leur porosité (Poncet A., 1981). Certains sols seront ainsi naturellement plus sensibles que d'autres. Sur le bassin versant du Bouregreg, la grande majorité des terres présentent une certaine sensibilité à l'érosion (Annexe VIII). Les deux-tiers sont en effet fortement - voire très fortement - vulnérables (Tableau 15).

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Tableau 15 : Répartition de la vulnérabilité des matériaux

Vulnérabilité des matériaux

Surface

Km² %

Faible 1345.1 13.5

Moyenne 2295.3 23.0

Forte 3795.9 38.0

Très forte 2540.0 25.5

C'est notamment le cas des vertisols, qui reposent sur des argiles rouges du Trias ou des marnes du Miocène, et des sols fersiallitiques sur les schistes. Les deux premières formations sont en effet plutôt meubles et très érodables tandis que les schistes, en se délitant facilement sous forme de fragments, présentent une faible cohésion. Cependant, si ces sols constituent les terrains les plus fragiles du bassin versant, à l'état naturel, ils seront relativement stables. L'élément déclencheur sera le plus souvent l'action humaine suite aux pratiques agricoles sur de fortes pentes (>20%).

c. Evolution de la vunérabilité du bassin versant du Bouregreg à l'érosion

L'étude des cartes du risque d'érosion sur quatre dates met en évidence une variation interanuelle plus ou moins grande selon les classes de sensibilité considérées. On observe globalement que les différences entre chaque dates ne sont pas très importantes à l'exception de l'année 2000. Durant cette année-là, les surfaces fortement vulnérables ont augmenté de près de 40% par rapport à 1985, soit environ 1430 km², tandis que les terres très fortement vulnérables ont perdu environ 1000 km². Cette baisse de la surface s'explique notamment par une diminution des surfaces forestières et agricoles qui touche toutes les classes de risque d'érosion cette année-là. On remarque cependant une forte augmentation des sols nus dans chacune des classes. Cela est à mettre en relation avec les conditions climatiques particulièrement sèches en 2000, et qui sont à l'origine d'une diminution du couvert végétal cette année-là.

La comparaison de la situation en 1985 à celle de 2011 montre une diminution de la surface agricole et une augmentation des sols nus, toutes classes de sensibilité à l'érosion confondues. Deux raisons possibles peuvent expliquer cela. Tout d'abord, l'étude de l'occupation du sol montre qu'en 1985, les surfaces cultivées couvraient plus de 5 300 km² tandis qu'en 2011, elles n'en couvraient plus que 2 450 km². Ces chiffres pourraient être le résultat de conditions climatiqes défavorables en 2011, ce qui aurait entraîné le passage des parcelles agricoles en sols nus. L'autre raison possible est liée au comportement des agriculteurs qui abandonnent les terres cultivées ne pouvant plus être exploitées suite à la formation de figures d'érosion trop importantes qui rendant leur travail difficile. Ces terres qui étaient alors cultivées en 1985 pourraient être devenues des sols nus en 2011.

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II. Etude du rôle de l'occupation du sol sur leur comportement

hydrologique

Les différents changements du paysage qui se sont opérés au cours des dernières décennies dans le bassin versant du Bouregreg, peuvent se traduire actuellement par des modifications du comportement hydrologique des sols qui sont parfois à l’origine du déclenchement d’un phénomène érosif. Les processus érosifs dépendent d’un grand nombre de facteurs naturels (conditions climatiques, topographie, sol) et anthropiques interagissant entre eux. Ces derniers, au travers des usages et des modes d'occupation du sol, ont en effet une influence non négligeable sur la porosité, la stabilité structurale du sol et son état de surface. L'impact immédiat de l'érosion des sols sur le bassin versant du Bouregreg est l'envasement du barrage SMBA qui cause la diminution de sa capacité de stockage et réduit son aptitude à répondre aux besoins en eau. Depuis sa mise en service, en 1974, le barrage a ainsi perdu 7.4% de sa capacité. Elle était de 468 Mm3 en 1974 tandis qu'en 2006, elle était de 433 Mm3 (ABHBC, 2008).

1. L'agriculture et la sensibilité des sols à l'érosion

a. Les pratiques agricoles

Le développement de la production agricole entraîne une augmentation des risques de dégradation des terres.

Dans un système sous culture, le couvert végétal est peu diversifié. Sur le bassin du Bouregreg, les céréales dominent par rapport aux légumineuses et aux autres productions, le blé et l'orge étant les plus cultivés. Dans les champs labourés, une ou deux plantes seulement sont tolérées et la couverture du sol, réduite dans le temps (environ 7 mois pour le blé et 4 mois pour l'orge), protège mal la surface du sol contre les rayons du soleil et l’action érosive des pluies. Parallèlement à cela, le labour et le travail du sol, en augmentant la porosité, ont temporairement un effet favorable sur l’infiltration des eaux de pluie. Mais, ces pratiques, en dénudant la terre, la rendent sensible au phénomène de battance qui a pour effet d'entraîner le ruissellement et de déclencher ensuite l'érosion.

De plus, dans les grandes régions de culture telle que Rommani, au niveau des communes d'Had Brachoua et de Marchouch notamment, l'agriculture s'intensifie progressivement :

les travaux du sol, les semis et les récoltes sont de plus en plus mécanisés. Sur les 7 672 exploitants (D.P.A.E., 1996) que compte le cercle de Rommani, plus de la moitié réalise un travail du sol mécanisé. La principale conséquence de l'utilisation de machines agricoles est d'écraser, sous l'effet de la pression des pneus, la macroporosité nécessaire à une bonne infiltration de l’eau et à un bon enracinement. Cela entraîne la formation en profondeur d’une semelle de labour compacte et peu perméable sur laquelle peut apparaître un ruissellement.

la fertilisation minérale est pratiquée par les trois-quarts des agriculteurs du cercle de Rommani. Si elle augmente le rendement immédiat, elle déstructure aussi peu à peu le sol : la teneur du sol en matière organique diminue sous l’effet du travail du sol intensif, par l’aération et l’oxygénation de l’horizon superficiel. Les agrégats sont alors moins stables et donc plus facilement dispersés par l’action des pluies. De plus, la baisse de la teneur en matière organique et l'utilisation de produits phytosanitaires entraînent un

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ralentissement de l’activité biologique du sol, responsable de la macroporosité, qui n’assure alors plus son rôle initial, à savoir l'aération du sol (Bensalah N., 2008).

Ainsi, au niveau pédologique, la formation d’une croûte de battance, la baisse de la macroporosité au bout de quelques années de culture sans apport de litière et la formation d’une semelle de labour, compacte et perméable, sont à l’origine d’une dégradation de la structure du sol. Les conséquences sont ensuite une réduction de l’infiltration et donc une augmentation du risque de ruissellement en surface, d’érosion et de lessivage (Roose E., 2009).

b. Evolution de l'agriculture

L’évolution du paysage agricole peut aussi avoir un effet sur les problèmes d’érosion. L’agriculture est longtemps restée à la seconde place derrière l’élevage, et ce, jusqu’au début de la colonisation qui l’a intensifiée et diversifiée. Actuellement, la monoculture céréalière domine largement, aussi bien sur les terres riches (tirs) que sur les terres pauvres, sableuses ou caillouteuses. La baisse du couvert végétal pour la mise en culture peut alors être à l’origine d’une modification des écoulements. De plus, la région a connu en parallèle une profonde évolution technique avec le développement de la mécanisation (tracteurs, moissonneuses-batteuses) qui augmente alors le risque d’érosion.

La création de ces grandes parcelles agricoles a entraîné la disparition des éléments structurants le paysage (haies, talus, prairies), ce qui a affecté la circulation de l’eau dans les parcelles, diminuant ainsi leur capacité de stockage des eaux de pluies en excès.

De plus, la spécialisation des cultures a créé des situations où un groupe de parcelles homogènes attenantes porte la même culture, travaillée de la même façon, constituant ainsi une « grande parcelle » (Figure 25). Or, plus la parcelle est grande, plus le ruissellement pourra se concentrer, ce qui se traduira par de l’érosion (Le Bissonnais Y. et al, 2002).

Enfin, en accaparant les meilleures terres agricoles, les colons ont entraîné une migration des populations paysannes vers les terres marginales, sur les rebords des plateaux et sur des terrains en pente plus ou moins forte. Ceci, associé au manque de formation technique des agriculteurs, parfois nuisible au rendement du fait d’un travail du sol trop superficiel ou débutant au moment des premières pluies, ou d’un labour dans le sens de la pente, est donc à l’origine de problèmes érosifs.

Figure 24 : Paysage agricole constitué de grandes parcelles relativement uniformes

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2. L'élevage et la sensibilité des sols à l'érosion

a. L'élevage et le pâturage

L’élevage, au travers du pâturage, peut influer de façon négative mais aussi positive sur le comportement hydrologique des sols. En effet, le surpâturage, via l’amplification de la charge pastorale et la prolongation de la période de séjour en un lieu donné, peut entraîner :

- un tassement de la surface du sol, du fait d’un important piétinement au niveau des zones de parcours fortement empruntées par les animaux (pression de l'ordre de 3 kg/cm², soit l'équivalent des pneus des tracteurs (Sabir M. et Roose, E., 2004)) ;

- une baisse de la couverture végétale (Figure 26) et une perte de la biodiversité via l’avortement du cycle végétatif des espèces appétibles qui n’arriveront pas à maturité et la surexploitation de certaines espèces qui disparaîtront ensuite.

De cela résultera ensuite une réduction de la capacité d’infiltration des eaux de pluie en affectant la perméabilité du sol, et augmentera alors le ruissellement ce qui déclenchera le processus d’érosion. Cependant, le pâturage exercé dans le cadre d’un équilibre entre l’offre et la demande et d’une gestion raisonnable des écosystèmes pastoraux n’aura pas d’effet sur la perméabilité ni sur la détachabilité du sol. Il peut même avoir des effets positifs sur la capacité d’infiltration des sols grâce au piétinement qui va casser la croûte de battance, et sur la teneur en matière organique du sol (Qarro M. et al, 2009).

b. Evolution de l'élevage

Autrefois semi-nomades, et se déplaçant au gré des ressources, les pasteurs composant le bassin versant du Bouregreg sont maintenant devenus transhumants. Ils déplacent de façon saisonnière les troupeaux entre les parcours forestiers hivernaux et les chaumes et jachères des terrains de culture, pendant l’été et l’automne. L’importance des déplacements dépend de la densité du cheptel fréquentant les parcours et sont de plus faible amplitude qu’autrefois. Ils sont en effet le plus souvent confinés à l’intérieur des limites de la commune (Rajiallah-Bodinier F., 1991).

Alors que les déplacements associés au semi-nomadisme étaient vécus par l’ensemble de la collectivité, la transhumance est maintenant le plus souvent individuelle. Chaque éleveur

Figure 25 : : Baisse de la couverture végétale et apparition

de traces d'érosion sur une zone pâturée

63

choisit son jour de départ et son chemin, et ceci, indépendamment des autres membres de la fraction. De plus, aux yeux des éleveurs, les disponibilités en parcours sont quasiment illimitées, ce qui les pousse à augmenter la taille de leur troupeau afin de profiter le plus possible des pâturages qui sont à leur disposition. Le droit au parcours s’exerce généralement sans aucun souci de sauvegarde du domaine forestier. Cela entraîne ainsi un surpâturage des forêts, et donc un tassement du sol et une baisse de sa capacité d’infiltration, durant une grande partie de l’année (entre 8 et 9 mois), ce qui, à terme, est nuisible pour l’équilibre forestier (Rajiallah-Bodinier F., 1991).

3. Les forêts et la sensibilité des sols à l'érosion

a. Les surfaces forestières

C’est dans les forêts que l’on trouve les meilleures conditions physiques de stabilité structurale, d’agrégation, d’infiltration et d’enracinement (Roose, 1977, 1994). Les forêts permettent de protéger le sol contre l’érosion. En effet, de par la production de biomasse (litière, branchage), elles augmentent la couverture du sol et l'enrichissent de matière organique, ce qui augmente sa résistance et réduit les pertes en sol et en nutriments. Les forêts améliorent ainsi la structure des sols, mais aussi la stabilité de ses agrégats, sa porosité, sa perméabilité, son stock d’eau utile et le drainage.

b. Evolution des surfaces forestières

L'installation des grandes fermes coloniales sur les terres les plus productives a entraîné une importante diminution des surfaces forestières du bassin au profit de l'agriculture. Le long couloir s'étirant du Nord-Est au Sud-Est du bassin, entre Maâziz et Rommani, a ainsi été complètement défriché dans le but d'y implanter des cultures. La plupart des forêts sont donc maintenant situées sur des sols pauvres et dans les vallées qui, du fait de leur encaissement, ne permettaient pas la mise en culture. Cependant, avec la colonisation, les tribus ont été chassées des plateaux sur lesquels elles pratiquaient l'élevage. Elles se sont donc installées et concentrées dans ces vallées, transformant ainsi la forêt en matorral suite au surpâturage sur des sols initialement fragiles.

La dégradation du couvert végétal et l'érosion qui s'ensuivent dans ces vallées, et notamment sur les versants exposés au soleil, dépendent de deux facteurs essentiels :

la fragilité naturelle des sols et de la végétation du fait de l'exposition des versants Sud : les températures sont plus élevées, ce qui entraîne l'évapotranspiration du couvert végétal et le desséchement des sols. La perte de biomasse est ainsi provoquée par un stress hydrique important ;

la pression anthropique : sur les versants Nord, la présence de Ciste de Montpellier, plante héliophyte, est révélatrice d'une différence de température avec le versant Sud et aussi bioindicatrice d'une dégradation antérieure.

Ces vallées étaient auparavant occupées par les arbres mais avec l'évolution de l'occupation du sol et les activités humaines (prélèvements de bois de feu), elles se sont dégradées laissant place à un matorral composé de Ciste de Montpellier (Figure 27).

64

Cet arbuste étant présent en grande concentration, il entre en concurrence pour l'eau avec les autres arbres dont on note encore la présence, bien que chétifs ou très fragilisés suite à un stress hydrique (Figure 27). De plus, il constitue un obstacle au déplacement des troupeaux qui iront alors pâturer sur le versant Sud, composé d'herbe de meilleure qualité, ce qui accentue, par le piétinement, le phénomène de dégradation.

Ainsi, sous la pression démographique, les paysages forestiers ont été surpâturés et transformés en parcelles céréalières au milieu d'un matorral dégradé. Les rôles environnementaux de la forêt ne sont plus assurés. La matorral surpâturé couvre beaucoup moins bien le sol qui est tassé par les sabots des animaux. Le stock de carbone dans les sols est réduit de moitié et la stabilité structurale se dégrade, entraînant des phénomènes de ruissellement et d'érosion pouvant être importants.

4. Les zones urbaines et la sensibilité des sols à l'érosion

a. Les zones urbanisées

Les zones urbaines ainsi que les aménagements routiers ont quant à eux pour effet d’augmenter les surfaces imperméables, ce qui favorise les écoulements et réduit les infiltrations et la recharge des nappes. En zone urbaine et sur chaussée goudronnée, le coefficient de ruissellement, qui caractérise la capacité d'un bassin versant à ruisseler et qui est donc fortement influencé par la couverture du sol, dépasse généralement 90%.

b. Evolution des zones urbanisées

Le bassin versant connaît une forte croissance démographique qui s'accompagne d'une urbanisation de la population. Elle touche essentiellement les grandes agglomérations et les villes en périphérie, comme Aïn El Aouda. Les petites communes rurales doivent quant à elles faire face à des problèmes d'exode rural. L'effet de l'évolution des zones urbanisées se ressentira donc d'autant plus dans les communes présentant une importante croissance. Elles sont caractérisées par une forte extension du bâti et ainsi une augmentation des surfaces imperméabilisées.

Figure 26 : Matorral composé de Ciste de Montpellier et d'arbres à l'aspect chétif

65

CONCLUSION

Au cours des trente dernières années, le bassin versant du Bouregreg a vu son paysage évoluer sous l'effet de facteurs naturels et anthropiques, tous liés les uns aux autres.

Les changements les plus visibles touchent les zones urbanisées dont la progression est évidente, notamment au niveau des grandes agglomérations situées sur le littoral et des communes en périphérie. En ce qui concerne les autres classes, et notamment les parcelles agricoles et les sols nus, malgré une précision globale toujours supérieure à 95%, les résultats observés révèlent certaines confusions. Elles sont dues, entre autres, aux dates d'acquisition des images satellites qui peuvent varier d'un ou deux mois, mais aussi aux champs cultivés dont la couverture du sol est réduite dans le temps (5-6 mois), laissant ainsi le sol nu le reste de l'année.

Malgré cela, l'analyse des cartes d'occupation du sol complétée par les observations réalisées sur le terrain mettent en évidence une certaine progression des sols nus face aux forêts et aux parcelles agricoles qui, dans certaines régions, se dégradent progressivement sous l'effet de l'érosion le plus souvent déclenchée par des facteurs anthropiques.

En effet, pour faire face à une importante croissance démographique et donc à une augmentation des besoins vitaux et sociaux, il a fallu étendre les surfaces agricoles, en défrichant et en mettant en culture des terres plus fragiles. L'élevage s'est aussi intensifié, ce qui a exacerbé le ruissellement et accéléré l’érosion des sols, entraînant ainsi une dégradation du milieu. Le ruissellement et l’érosion apparaissent alors comme un signal d’alarme du déséquilibre entre le milieu et son écosystème d’exploitation. Il apparaît alors nécessaire de restaurer la fertilité des sols tout en les protégeant contre l’érosion. Les résultats de ce travail montrent l'intérêt de l'utilisation de la télédétection et des SIG pour le suivi de la dynamique paysagère et l'évaluation de la vulnérabilité à l'érosion, dans un territoire donné. L'efficacité de la télédétection, utilisée en complémentarité avec les SIG, réside en sa capacité à fournir un certain nombre d'informations sur l'occupation du sol et le milieu naturel (pente, humidité des sols, ...). Elle constitue un outil pertinent pour la mise en place d'un système de gestion des sols dans des régions où, comme sur le bassin versant du Bouregreg, les données ne sont pas souvent disponibles pour répondre aux besoins.

Afin de compléter cette étude, il serait intéressant de réaliser la classification au moyen d'autres méthodes telle que la méthode de l'orientée-objet qui permettrait de mieux discriminer certaines classes, et ensuite de confronter les deux cartes.

66

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Secrétariat d’Etat Chargé de l’Eau et de l’Environnement, Royaume du Maroc. Le Bassin Hydraulique du Bouregreg.

69

TABLE DES ANNEXES

Annexe I : Carte lithologique du bassin versant du Bouregreg .......................................... 70

Annexe II : Moyennes des précipitations mensuelles et annuelles de la période 1980-2009 de huit stations situées à l’intérieur du bassin versant du Bouregreg ...................... 71

Annexe III : Présentation du régime juridique des terres sur le bassin versant du Bouregreg et de leur influence sur le développement agricole ........................................... 72

Annexe IV : Questionnaire des enquêtes réalisées auprès de la population rurale du bassin versant du Bouregreg .................................................................................................... 74

Annexe V : Caractéristiques physico-chimiques des types de sols dominants dans le bassin versant du Bouregreg .................................................................................................... 75

Annexe VI : Calendrier cultural des principales espèces cultivées dans le bassin versant du Bouregreg............................................................................................................................... 76

Annexe VII : Carte des pentes du bassin versant du Bouregreg ......................................... 77

Annexe VIII : Carte de la vulnérabilité des matériaux composant le sol du bassin versant du Bouregreg ................................................................................................................ 78

70

Annexe I

Carte lithologique du bassin versant du Bouregreg

source : Beaudet, 1969

71

Annexe II

Moyennes des précipitations mensuelles et annuelles de la période 1980-2009 de huit stations situées à l’intérieur du bassin versant du Bouregreg

Source : SIGMED

Sep. Oct. Nov. Déc. Jan.

Fév. Mars Avril Mai Juin Juill. Août Total annuel

Sidi Jabeur

12,4 29,0 45,2 48,1 45,4

41,9 36,5 30,3 17,5 6,9 0,9 0,8 314,9

Aguibat Ezziar

9,5 34,8 68,7 76,1 67,8

56,6 46,6 42,7 22,4 6,9 0,5 0,9 433,5

Ras El Fathia

10,3 31,1 60,5 69,9 59,1

53,0 45,3 37,4 16,1 5,3 0,8 1,4 390,2

Lalla chafia

12,1 30,4 49,2 52,8 51,0

45,4 40,9 40,1 17,6 5,2 0,3 0,6 345,6

Ouljet Haboub

11,9 22,0 33,3 40,5 30,6

37,6 33,6 28,4 17,6 9,5 3,5 3,9 272,4

Ain Loudah

11,0 28,7 54,3 56,9 54,3

50,1 38,0 33,2 16,6 3,9 0,9 1,2 349,1

Tsalat 16,3 34,8 62,7 77,9 67,5

64,7 55,6 42,6 27,9 11,1 5,6 4,6 471,3

Rabat-Salé

8,60 42,8 67,3 104,8

79,0

61,3 52,0 55,2 20,4 4,0 0,2 1,2 496,8

Maximum 16,3 42,8 68,7 104,8

79,0

64,7 55,6 55,2 27,9 11,1 5,6 4,6 496,8

Minimum 8,60 22,0 33,3 40,5 30,6

37,6 33,6 28,4 16,1 3,9 0,2 0,6 272,4

Moyenne mensuelle

11,5 31,7 55,1 65,9 56,8

51,3 43,6 38,7 19,5 6,6 1,6 1,8 384,2

72

Annexe III

Présentation du régime juridique des terres sur le bassin versant du Bouregreg et de leur influence sur le développement agricole

Les structures foncières sur le bassin versant du Bouregreg, comme dans le reste du pays, sont caractérisées par l’existence de nombreux statuts fonciers (Tableau 1), particulièrement complexes et entravant le développement de l’agriculture marocaine.

Le melk : les terres appartiennent à une personne ou à plusieurs, sous forme de coopératives ou de sociétés. Ces terres relèvent du domaine privé, et ce quelles que soient leurs origines (achat, héritage, don).

Le collectif : les terres appartiennent à la communauté ethnique. Elles sont inaliénables mais peuvent être affectées, c’est-à-dire partagées en parts attribuées à des ayants droits, ou non-affectées, c’est-à-dire exploitées pour le compte de toute la communauté.

Le guich : c’est le statut le plus complexe. Les terres appartiennent à l’Etat et sont distribuées en contrepartie des services militaires rendus. Les exploitants ne bénéficient que d’un droit de jouissance qui ne leur permet pas d’avoir les garanties afin d’engager des investissements durables.

Le habous : les terres sont léguées par une personne à une fondation religieuse. Ce statut concerne essentiellement de petites parcelles éparpillées.

Le domaine privé de l’Etat : ce sont les terres à vocation agricole appartenant à l’Etat. La tutelle des ces terres est assurée directement par les services du Domaine ou confiée à d’autres organismes d’Etat tels que la SODEA ou la SOGETA qui dépendent du Ministère de l’Agriculture. Ces terres ont des origines diverses : terres de colonisation récupérées, terres ayant appartenues à des personnes physiques étrangère et récupérées lors de la mise en place de l’Etat marocain indépendant, dons, expropriations, …

Tableau 1 : Répartition des statuts fonciers sur le bassin versant du Bouregreg (source : Recensement Général Agricole, 1996)

Statut foncier Superficie (ha) % de la SAU du bassin versant

Melk 440 247 93,9%

Collectif 12 197 2,6%

Habous 1 222 0,26%

Guich 339 0,072%

Domaine privé de l’Etat 14 763 3,15%

Le régime foncier des terres agricoles influence les principaux objectifs du développement agricole, tels que l’amélioration de la productivité des exploitations et l’intensification des investissements privés. Ainsi, dans un pays dont l’économie repose en grande partie sur le secteur agricole, le statut des terres joue un rôle primordial dans le développement de l’agriculture.

73

Actuellement, le régime foncier marocain, qui demeure complexe et rigide dans le droit et dans les pratiques, oppose de nombreux obstacles à la liberté des transactions immobilières. Le statut des terres collectives et guich, des habous et du domaine privé de l’Etat immobilise la propriété foncière qui se trouve alors fortement limitée sur le marché du fait des règles restrictives en matière de transactions auxquelles sont soumises ces terres. Le régime melk, qui prédomine, est souvent associé à la propriété privée libre de toute entrave au niveau juridique. Cependant, les transactions se trouvent parfois fortement ralenties par les caractéristiques du régime de succession de droit musulman. Une très grande partie des terres sont ainsi dans l’indivision entre les cohéritiers. De ce fait, un opérateur économique souhaitant investir dans la production agricole rentrera aujourd’hui des grandes difficultés pour accéder à la terre (Bouderbala N. 1997). Cependant, une libération intégrale des opérations immobilières aurait des conséquences négatives telles que l’exode rural. En effet, si les différents régimes juridiques des terres n’incitent pas à la mise en valeur et conduisent souvent à une aggravation du morcellement des terres, ils constituent néanmoins un rempart protecteur de la base foncière des familles paysannes. Ainsi, les terres collectives, bien qu’ayant une place économique limitée, sont considérées comme un lieu de refuge de la paysannerie. Elles ont en effet un rôle central dans le maintien de la petite paysannerie à la campagne et dans sa résistance à la dépossession.

74

Annexe IV

Questionnaire des enquêtes réalisées auprès de la population rurale du bassin versant du Bouregreg

Présentation générale de l’exploitation : - La taille de l’exploitation (Surface Agricole Utile) - Combien de personnes travaillent sur l’exploitation ? - Quel est le statut des terres présentes sur l’exploitation ? (melk, collective, habous,

guich, ..)

Les productions :

- Quelles sont les différentes cultures présentes sur l’exploitation et les niveaux de rendements correspondant (bon, moyen, faible, nul) ?

- Elevez-vous des animaux ? Si oui, lesquels et dans quel but ? Quelle est la taille du cheptel ?

- La production agricole est-elle destinée à être autoconsommée ou vendues dans les souks, à des coopératives, à des particuliers ?

Moyens de production : - Utilisez-vous des engrais (organiques ou chimiques ?) et des pesticides ? Si oui,

travaillez-vous avec les centres de travaux ? - Possédez-vous un tracteur ? Si non, comment travaillez-vous ? avec quels outils ?

- La récolte : Comment se déroule la récolte ? Est-elle faite à la main ou est-elle

mécanisée ? - L’irrigation : Irriguez-vous vos parcelles ? Si oui, d’où provient l’eau ? Recevez-vous

des aides pour faire des investissements sur votre réseau d’irrigation ?

L’érosion : - Avez-vous des problèmes d’érosion sur vos parcelles ? Si oui, comment le gérez-vous ? - Si vous en aviez la possibilité, que voudriez-vous mettre en place sur votre exploitation

pour limiter le plus possible les départs de terre ? - Etes-vous soutenus et/ou conseillés par les centres de travaux ? Recevez-vous des aides

de l’Etat ?

Historique de l’exploitation : - Depuis quand êtes-vous installés ici ? D’où venez-vous ? Pourquoi avoir migré et

pourquoi vous êtes vous installés ici ?

- Avez-vous connu des années difficiles depuis votre installation ? Si oui, quelles années et/ou quelles périodes ? Que s’est-il passé ? Avez-vous reçu des aides de l’Etat pour vous soutenir ?

- Depuis que vous êtes ici, avez-vous observé des modifications de votre milieu ? Selon vous, à quoi cela serait-il du ?

75

Annexe V

Caractéristiques physico-chimiques des types de sols dominants dans le bassin versant du Bouregreg

CaCO3(%) A (%) L (%) S (%) LF (%) LG (%) MO10 (%) MO30 (%) pH (H2O)

BF 1.5 19 33 48 22.4 10.6 6.7 4.6 6.6 Br 1.3 14.5 26.3 59.3 14.7 11.6 7.3 3.7 6.5 F 20.6 17 30.8 52.3 16.8 14 6.6 3.9 1.0 V 28.6 31 26 43 3.5 22.5 1.9 1.8 7.3

Sab 2.2 9 19 72 11.7 7.3 1.8 1.7 6.5 Hyd 58 14 14 72 9.9 4.1 2.7 2.6 7.6

BF : sol brun forestier ; Br : sol brunifié ; F : sol fersiallitique ; V : vertisol ; Sab : sol sableux ; Hyd : sol hydromorphe CaCO3 : taux de carbonates de calcium ; A : taux d'argile ; L : taux de limons ; S : taux de sables ; LF : taux de limons fins ; LG : taux de limons grossiers ; MO10 : taux de matière organique dans la couche 0-10 cm ; MO30 : taux de matière organique dans la couche 20-30 cm.

source : Bensalah N., 2008

76

Annexe VI

Calendrier cultural des principales espèces cultivées dans le bassin versant du Bouregreg

source : FAO (www.fao.org/agriculture/seed/cropcalendar)

77

Annexe VII

Carte des pentes du bassin versant du Bouregreg

source : image GDEM ASTER, carte élaborée par E. Goussot

78

Annexe VIII

Carte de la vulnérabilité des matériaux composant le sol du bassin versant du Bouregreg

source : Chaire Unesco GN "Gestion de l'environnement et

développement durable", carte élaborée par E. Goussot