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www.trends.be « Faire croire qu’un magazine vaut moins qu’une bière est un mauvais signal. » XAVIER BOUCKAERT NOUVEAU CEO DE ROULARTA ÉCONOMIE ET FINANCES • 41 E ANNÉE • N°1 • 5,90 • 7 JANVIER 2016 DOMINIOUE Manager de l’Année 2015 LEROY 24 HEURES AVEC LA CEO DE PROXIMUS ISSN 0776-3395 - P509559

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e«Faire croire

qu’un magazinevaut moins

qu’une bière est un mauvais

signal.»

XAVIER BOUCKAERTNOUVEAU CEO DE ROULARTA

ÉCONOMIE ET FINANCES • 41E ANNÉE • N°1 • € 5,90 • 7 JANVIER 2016

DOMINIOUEManager de l’Année 2015

LEROY24 HEURES AVEC LA CEO DE PROXIMUS

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Elle court, elle court, Dominique Leroy.

«Trends-Tendances» a tenté de suivre la CEO de Proximus au cours d’une journée-marathon.

Une plongée exceptionnelle dans le quotidien de la Manager de l’Année 2015.

24 HEURES AVEC

DOMINIQUE LEROY

MANAGER DE L’ANNÉE..

À LA UNE

GILLES QUOISTIAUX - PHOTOS : ROGER JOB..

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à la une manager de l’année

C’

est sous une finepluie que nous nousélançons ce jour-làà la poursuite deDominique Leroy.La CEO de Proximuset Manager de l’An-née 2015 nousembarque dans une

de ses deux séances d’entraînementheb domadaires. Direction l’anciennepromenade du chemin de fer, au sudde Bruxelles, entre le parc de Woluweet Stockel. D’habitude, quand le tempsest maussade, elle préfère courirquelques kilomètres sur son tapis decourse, en gardant un œil sur les infosou sur un épisode d’Orange is the newblack. Mais pour Trends-Tendances,elle fait une exception: DominiqueLeroy chausse ses baskets et enfile sonsurvêt pour une séance de 45 minutesà vive allure.

Cela fait 10 ans que le virus de lacourse l’a mordue. Au départ, l’objec-tif était une simple remise en forme.Mais la CEO s’est prise au jeu, enchaî-nant les courses. Elle participe aux 20

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kilomètres de Bruxelles chaque année(1h48 en 2015) et a déjà deux marathonsà son palmarès: celui de New York et celuide Berlin. «Je devais participer à celui deChicago. Mais j’ai renoncé quand j’aichangé de job pour rejoindre Belgacom»,souffle-t-elle sans ralentir sa foulée.

Depuis qu’elle est CEO, elle a plus demal à intercaler ses séances d’entraîne-ment entre deux rendez-vous. Mais ellecourt toujours entre 10 et 20 kilomètrespar semaine. «J’en ai besoin, lâche-t-elle.Cela me vide la tête.» La course, un mo -ment rare de décompression dans unagenda bien compact.

8h30Premier rendez-vousde la journée. Domi-nique Leroy ren contre

Bruno van Pottelsberghe, doyen de la Sol-vay Brussels School of Economics & Mana-gement. L’homme a eu du flair. Fin 2013,il l’approche pour lui confier la présidencede l’International Advisory Board, uncomité consultatif composé d’anciens deSolvay, destiné à conseiller l’école de com-merce pour son positionnement straté-

gique sur le marché international. «Lematin, je proposais à Dominique de rejoin-dre la présidence du board, l’après-midiles politiques annonçaient sa nominationcomme CEO de Proximus», se souvientBruno van Pottelsberghe. La première

femme CEO d’une entreprise du BEL 20:une excellente carte de visite pour Sol-vay, qui amorce avec le doyen une poli-tique de rajeunissement et de féminisa-tion de ses cadres.

«Je suis ici plus à titre personnel qu’aunom de l’entreprise», souligne DominiqueLeroy. La patronne figurera dans une pro-chaine vidéo promotionnelle pour sonancienne faculté, et suggère des nomspour l’accompagner : Arnaud Feist(Brussels Airport), José Zurstrassen(fondateur de Keytrade Bank), SébastienDelletaille (Real Impact Analytics)...«On veut des gens sympas dans la vidéo»,explique Bruno van Pottelsberghe. Le tan-dem profite de la présence de notre pho-tographe pour improviser une séancephoto dans le bureau du doyen, afind’illustrer la prochaine livraison de lagazette de l’école.

Pas le temps de faire un détour par lecercle Solvay, où Dominique Leroy gardequelques souvenirs de guindaille. Bapti-sée, la CEO de Proximus a même été vice-reine des bleuettes. «Et encore, si je n’aipas gagné, c’est parce qu’il y a eu de la tri -

che!», plaisante cette compétitrice née.Dominique Leroy a failli faire polytech,comme son père. Mais elle a changé d’avisen dernière minute: «Il y avait trop denerds!, lance-t-elle, sourire en coin. Je mesuis dit: ‘Non je ne peux pas étudier pen-

dant cinq ans dans cette faculté.’ J’ai pré-féré faire Solvay, ils avaient l’air plus nor-maux, rit-elle, et le cursus me paraissaitplus complet».

Entre deux cours — et pendant ceuxqui l’intéressaient moins, la student tapela carte au cercle. «J’y ai appris à bienjouer au whist et à avoir une bonne des-cente!» De ses années à l’ULB, DominiqueLeroy garde le souvenir d’une promotion«atypique» et «solidaire», où elle a croiséJean-Marie Laurent Josi (Cobepa), ValérieUrbain (Euroclear), Yvan Moreau (PairiDaiza) ou encore Christian de Haaij(Goldman Sachs). La promotion 1987 estdécidemment un grand cru chez Solvay.

9h30«Roulez cool, Didier.»La CEO donne ses ins-tructions à son chauf-

feur, le placide Didier, qui nous emmènetranquillement à travers la ville jusqu’aupied des deux tours de Proximus, au cœurdu quartier nord. Comme pour beaucoupde patrons d’entreprise, les trajets en voi-ture permettent à Dominique Leroy de seconcentrer sur ses dossiers et de rattra-per le temps perdu entre deux réunions.

C’est aussi l’occasion de nous dévoilerson nouveau gadget: une montre connec-tée Samsung, qui la prévient de l’arrivéede nouveaux messages. «Elle m’encou-rage même à faire de l’exercice. Elle medit: ‘Bravo, vous avez bougé’», s’amuse-t-elle. Dominique Leroy s’astreint à unediscipline stricte en matière de gestiondes e-mails. En réunion, elle refuse dejeter le moindre coup d’œil à son smart-phone. La montre intelligente est un boncompromis: elle permet un regard furtif,le temps de voir si un message importantvient d’arriver. Mais la CEO s’en occu-pera plus tard, les règles de sécurité del’entreprise lui empêchant de lire ses e-mails sur sa montre.

Dominique Leroy n’est de toute façonpas une adepte du management pare-mail. Elle en reçoit environ 150 par jour,une quantité plutôt raisonnable pour unpatron d’une grande entreprise. «Je nem’engage jamais dans des discussions pare-mail. Si j’ai quelque chose à dire à uncollaborateur, je décroche mon téléphoneou je vais le voir. J’ai besoin de discuterpour avancer.»

Son smartphone vibre. «Un SMS de monfils. C’est important, c’est toujours impor-tant, murmure-t-elle.» Nous n’en sau- ≤

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rons pas plus. La famille, les enfants,c’est la ligne rouge de Dominique Leroy.Les moments, trop rares, avec ses fils de17 et 19 ans, restent son jardin secret. Tousles matins, elle déjeune avec le plus jeune.Elle croise généralement le plus âgé dansla soirée. «C’est essentiel de privilégier cesmo ments», glisse-t-elle. Quinze minutesavec chacun. C’est peu. Et c’est la consé-quence inévitable d’un agenda surchargé.Lors qu’on lui a proposé de prendre la têtede Proximus, ses enfants ont tenté de l’endissuader, craignant qu’elle soit encoremoins disponible pour eux. «Nos enfantstrouvent que mon mari (il est banquierd’affaires, Ndlr) et moi, nous travaillonstrop, explique la CEO. C’est vrai, j’ai beau-coup de travail. Mais je ne me plains pas.

On ne dirige pas une entreprise de 14.000employéset 6 milliards d’euros de chiffred’affaires en travaillant deux heures parjour.»

La patronne replonge dans ses dossiers.Ses yeux se plissent. «Je devrais mettremes lunettes», avoue-t-elle. Elle hésite,puis plonge la main dans son sac, pour enressortir ses lunettes de lecture. «Ça faitdeux ans que j’en porte.» Depuis qu’elleest devenue CEO. «Mais ça n’a rien à voir!C’est l’âge, c’est tout.»

10h00L’ascenseur filevers le 27e éta ge.Celui des big boss

de Proximus. Dominique Leroy y occupeun bureau d’angle — «beaucoup tropgrand» selon la patronne, disposant d’unevue panoramique sur Bruxelles.Ce jour-là, le ciel est aussi gris que la

moquette délavée, qui assourdit chacunde nos pas. Le bureau n’a pas beaucoupchangé depuis l’époque du flamboyantJohn Goossens.

Les murs lambrissés habillent la pièced’une touche très old school que la patron -ne a tenté de masquer à coup de mobilierdesign. Exit les canapés en cuir, rempla-cés par de gros fauteuils moelleux auxcouleurs vives, surmontés d’une toile PopArt, une lithographie de Roy Lichtensteinbaptisée Red Lamps. Des chaises trans-parentes Kartell, deux tables en verre, unbureau géant d’un noir profond, un bancd’extérieur aux couleurs de Proximus, nonponcé (mieux vaut éviter de s’asseoir des-sus sous peine de voir ses vêtements y res-ter, prévient la CEO, qui en a déjà fait

l’amère expérience) et un tapis d’Orientramené de la collection personnelle dela patronne complètent cet étonnantpatchwork.

Installée devant son PC pour une séancede «mail time», comme prévu dans sonplanning de la journée, Dominique Leroycommente les nouvelles du jour. On parled’un rapprochement Vodafone-LibertyGlobal dans le Financial Times. «Cela pour- rait être le début de la phase de consolida-tion dans les télécoms dont on parle depuislongtemps, avance-t-elle. C’est aussi unsujet qui concerne Proximus au premierchef, puisque nous avons un accord de par-tenariat avecVodafone.» Des updates luiparviennent au sujet du conseil d’admi-nistration du lendemain. L’occasion pourla CEO de mettre les points sur les «i»:«Nous avons un CA très professionnel, quis’intéresse à la valeur de l’entreprise. Ce

n’est pas un conseil d’administration poli-tique comme on peut le penser».

10h30Direction la salledu conseil, au 28e

et dernier étage.Le président du CA Stefaan De Clerck nousaccueille au 28e et dernier étage de manièrejoviale pour la dernière commission pari-taire de l’année. Face à face, les repré-sentants syndicaux et les représentantsde l’entreprise.

Malgré les discussions en cours concer-nant l’évolution du coût salarial dans l’en-treprise, l’affrontement se fait à fleuretsmouchetés. Après des revendicationsconcernant l’avenir des jointeurs de l’en-treprise, un syndicaliste prend même laparole pour... remercier la direction ausujet de la manière avec laquelle elle agéré l’épisode de la menace terroriste deniveau quatre à Bruxelles. «Ce qui a étéfait à ce moment-là pour le personnel étaitparfait. Quand les choses sont positives,il faut aussi pouvoir le dire», souligne lereprésentant syndical.

«C’est bientôt fini», nous glisse la secré-taire générale après quelques minutes àpeine de réunion. L’heure est aux réjouis-sances. Le président du CA a amené sestraditionnels cadeaux de fin d’année pourl’assemblée, qui remise ses armes à l’oc-casion de la trêve de Noël. Les partenairessociaux trinqueront ensuite à la paixsociale qui a jusqu’à présent plutôt régnésur l’entreprise. Cela dit, 11h, ce n’est pasun peu tôt pour le mousseux? «Je suisrestée à l’eau», nous rassurera DominiqueLeroy, de retour dans son bureau.

11h30Passage obligé chezPernelle Falck.Dominique Leroy se

rend chez sa fi dèle assistante pour undébriefing sur l’évolution du planning dela journée, qui peut évoluer à tout moment.Il reste un peu de temps à la patronneavant la prochaine réunion, un tête-à-têteavec Vincent Licoppe, directeur straté-gie de l’entreprise. Elle en profitepour plaisanter sur la dernière récom-pense qu’elle vient de se voir attribuer:le Leadership Prize 2015 décerné par leHarvard Club of Belgium. Une récom-pense façon globe de cristal attend sage-ment d’être déballée sur le coin de sonbureau. «Vous pouvez ouvrir la boîte, maisattention c’est lourd», avertit-elle. Une ≤

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ligne dans son CV nous avait-elle échappé?«Non, je n’ai jamais mis les pieds à Har-vard, sourit-elle. Mais je suis très honorée,surtout quand je vois le palmarès de ceprix.» Frans Van Daele, Jef Colruyt ouencore Herman Van Rompuy ont remportécette récompense décernée par les alumnibelges de la célèbre université américaine.

Trois semaines plus tard, c’est le titrede Manager de l’Année 2015, décerné parTrends-Tendances, qui est attribué à laCEO de Proximus. «Ce n’est pas un prixpersonnel. Je vois ce prix comme unerécompense collective pour le travaileffectué par tout le personnel de l’entre-prise», insiste Dominique Leroy.La patronne a pris sa nomination à cœur,n’hésitant pas à faire campagne sur lesréseaux sociaux (Twitter, LinkedIn)à coups de #WeAreProximus, afin demobiliser son personnel et de l’inviterà voter pour sa candidature. Insuffler uncertain esprit de corps et une certainefierté de travailler pour l’opérateur,c’est une des missions que s’est fixéeDominique Leroy. «Le CEO doit donnerune vision à l’entreprise. Mais une de sestâches principales est aussi d’enlever unmaximum de barrières au sein de la sociétéafin que les collaborateurs travaillentmieux ensemble», commente-t-elle.

Si elle a la réputation d’être une patron -ne à poigne, elle semble également jouird’un bon capital de confiance au sein del’entreprise. Contrairement à son prédé-cesseur qui cultivait le mythe du patronvolontairement distant, elle cherche à soi-gner ses relations avec son personnel.Au moins une fois par mois, DominiqueLeroy organise des visites surprise «surle terrain», afin de prendre le pouls d’uneboutique Proximus, d’une équipe tech-nique, d’un call center, etc. «Je ne veuxpas être isolée de la réalité, ni me sentirdistanciée de ce qui se passe dans l’en-treprise», ex plique-t-elle.

Depuis son arrivée à la tête de l’opé-rateur, elle a choisi de se mettre en avant,d’incarner la marque Proximus. «On mereconnaît quand je fais mes courses chezDelhaize. On m’appelle Madame Proxi-mus. Ça fait bizarre et ça gêne un peumes enfants.» Au point que ceux-ci luidemandent désormais de les déposer àcinquante mètres de leur club de hockeyou de leur local scout. «Aucun enfant n’aenvie d’être reconnu à travers ses parents.Ils ne veulent sans doute pas être vus

trice d’Unilever Belgique a été débauchéepar Didier Bellens. Liées par une confiancemutuelle, elles ont gravi les échelons ensem-ble, depuis le poste de directrice sales jusqu’àcelui de CEO en passant par le grade device-présidente chargée de la divisionconsommateurs. «Elle m’a demandé de luidire immédiatement si jamais, en chemin,elle changeait de caractère. Ce n’est jamaisarrivé», assure Pernelle Falck.

«Il ne faut pas se prendre la tête. Celafait partie des valeurs que je veux trans-mettre à mes enfants, avec un certainbagage intellectuel et sportif», souligneDominique Leroy. Née d’un père franco-phone originaire de Nimy (près de Mons)et d’une mère flamande originaire deZemst (près de Malines), Dominique Leroya été éduquée dans les deux langues, mêmesi elle a fait toute sa scolarité à Bruxellesdans l’enseignement francophone.«Mon père, seul enfant d’une familleouvrière à avoir fait l’université, m’a tou-jours poussé à oser des choses. Ma mère,frustrée de ne pas avoir pu faire d’étudessupérieures, a reporté ses ambitions surmoi. Le message de mes parents était: étu-die et sois indépendante», analyse la CEO.

Dans le bureau d’à côté, la réunion setermine. Le directeur de la stratégie Vin-cent Licoppe reprend ses dossiers. Petitcommentaire à la sauvette sur la méthodeLeroy: «Dominique est attentive à tout.Elle emmagasine, elle écoute. Et ellereprend nos suggestions, enfin disons unepartie de celles-ci. Elle est très exigeante.

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comme des ‘fils de’. J’essaye de respec-ter cela, même si ce n’est pas facile. Celacrée une distance.»

12h30Pas le temps defaire un tourà la cafétéria de

Proximus, au rez-de-chaussée. La réu-nion suivante, avec le directeur de la stra-tégie de l’entreprise, sera l’occasion d’ava-ler en vitesse une salade de quinoa.Pernelle Falck, l’assistante personnellede la CEO, qui occupe un bureau contigu,est en charge de l’approvisionnement.Dans son tiroir, elle stocke la carte de fidé-lité du Foodmaker installé dans l’im-meuble et un petit bocal où sont enfer-més quelques euros pour régler les repasde la boss.

Pernelle Falck et Dominique Leroy,c’est une affaire qui roule. «Elle est trèsefficace et elle me connaît bien. C’est ellequi gère mon agenda. Une tâche difficile,qui définit beaucoup de choses», observela CEO. Sur un tableau blanc, PernelleFalck a malicieusement épinglé un arti-cle de Trends-Tendances intitulé «Leretour aux journées courtes», qui faitl’éloge des horaires de travail «raisonna-bles», synonymes d’un bon équilibre vieprivée/vie professionnelle. «Ça n’a paschangé grand-choseà son agenda», recon-naît Pernelle Falck en haussant les épaules.

La dynamique assistante s’occupede sa patronne depuis son arrivée chezBelgacom il y a quatre ans, lorsque la direc-

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Et cette exigence, elle se l’applique d’abordà elle-même», précise-t-il. «Je ne suis pasune boss facile», confirme la patronne.

14h00 La perle rare.La réunion avec lecabinet de chas-

seurs de têtes Eric Salmon & Partners viseà planifier un recrutement stratégique,qui fait suite à l’annonce du départà la retraite du directeur RH. MichelGeorgis, 15 ans de maison, quitteraProximus dans le courant de l’année 2016.«C’est un beau job», glisse dans un sou-rire celui qui ne s’en fait pas trop pour sasuccession: des candidats pour le rem-placer, il y en aura.

William Mosseray (Eric Salmon)se tourne vers Dominique Leroy: «Nousallons réunir cinq à sept noms dans unepremière liste, histoire de te faire réagir»,annonce le chasseur de têtes, qui connaîtbien l’opérateur pour y avoir exercédifférents jobs, dont celui de vice-prési-dent chargé de la stratégie. «Quand la listesera-t-elle prête?», demande la CEO.«On va essayer fin janvier», répond le chas-seur de têtes. «Mi-janvier, ce serait mieux.»La poire sera finalement coupée en deux:ce sera pour la troisième semaine de jan-vier.

Passé ce détail d’agenda, WilliamMosseray soulève un obstacle potentiel:la rémunération. Depuis l’introductiondes nouvelles règles de limitationdes salaires pour les top managers dans

les entreprises publiques, les rémunéra-tions du CEO et des membres du comitéde direction sont plafonnées. Le chasseurde têtes n’exclut pas que cela pose des dif-ficultés à certains candidats. Ce qui n’ef-fraye pas Dominique Leroy: «A nous deles convaincre qu’ils travailleront dansune super société».

15h00Les réunions s’en - chaînent. Au tourde la gigantesque

table ronde, plantée dans le bureau atte-nant à celui de la patronne, les poids lourdsde l’entreprise sont là. La CFO SandrineDufour, le patron de la division entre-prises Bart Van Den Meersche et le DRHMichel Georgis font notamment partiede l’assemblée. Quel ques rires gênés,une fausse conversation qui s’engage...Les vraies discussions commencerontquand nous serons de l’autre côté de laporte.

16h00«Vous allez mechanger ça.» Leton n’appelle pas

à la discussion. Lors de la présentationd’un nouvel outil statistique par trois deses collaborateurs, la CEO de Proximusa repéré une référence obsolète à Belga-com, l’ancienne dénomination de l’en-treprise. «Je suis un peu sensible à cela»,reconnaît Dominique Leroy.

Le changement de nom et d’identitévisuelle, c’est l’un des chantiers majeursmenés par la patronne depuis son arrivéeà la tête de l’opérateur. Faire oublierBelgacom, sa référence trop appuyée à laBelgique et son côté institutionnel lié à sonactionnariat public, c’est une tâche im -mense qui a mobilisé toute l’entreprise.Et ce n’est pas terminé. Le matin même,le doyen de Solvay a rappelé que Belgacomavait participé au financement de certainslocaux de la faculté. L’ancien nom de l’opé-rateur figure encore sur le fronton du bâti-ment, avenue Franklin Roosevelt. Peut-ony faire quelque chose, demande DominiqueLeroy? «A moins que j’y aille avec mon mar-teau et mon burin, je pense que ça resteracomme ça», plaisante Catherine Deltenre,responsable du rebranding de l’entreprise.

17h00Leroy chez le Roi.Après un rapidedétour dans le cen-

tre-ville pour embarquer le mari de sa

patronne, le chauffeur prend la directiondu palais royal. Les grilles s’ouvrent pourlaisser entrer le couple, qui figure sur laliste des quelque 600 invités triés sur levolet à l’occasion du traditionnel concertde Noël. La partition de Dominique Leroycommencera réellement au cours de laréception organisée juste après dans laSalle des Glaces, ornée des célèbres sca-rabées verts de l’artiste Jan Fabre. C’estlà que se noueront des contacts informelsavec les invités royaux. Quatre soirs parsemaine, Dominique Leroy est en repré-sentation officielle. «Je devrais peut-êtrefreiner. Il faudrait que j’arrive à dire non»,avance la CEO, sans réelle conviction.

A ce niveau de responsabilité, le net-working fait partie intégrante du job.La patronne connaissait le monde desaffaires; elle a découvert celui de la poli-tique. Au-delà du statut d’entreprise déte-nue majoritairement par l’Etat belge, lesactivités de Proximus obligent la CEO ànouer des contacts à tous les niveaux depouvoir. «La Belgique est un pays com-pliqué. Si on veut par exemple faire avan-cer un dossier qui concerne des profilsissus de l’enseignement technique, il fautvoir Joëlle Milquet, Jean-Claude Mar-court, Hilde Crevits... Il faut arriver à com-prendre les enjeux qui les concernent.»Si elle a des réserves sur la tuyauterie ins-titutionnelle belge, elle semble néanmoinsnourrir une certaine admiration pour ceshommes et ces femmes politiques. Unereconversion pourrait-elle l’intéresser?«Il ne faut jamais dire jamais. Mais je pré-fère mon rôle de CEO. Cela me convientmieux. La prise de décision est plus sim-ple, plus directe. On peut avancer.»

Dominique Leroy prend place au pre-mier rang, à quelques sièges du Roi et desa famille, soumis aux flashs incessantsdes photographes. «D’habitude, quand ily a les ministres et tout le protocole,je suis beaucoup plus loin», remarque-t-elle, presque gênée.

Le concert commence. Dans un styleradicalement différent des festivals que laCEO a l’habitude d’écumer: Rock Werchter,Les Ardentes, Les Francofolies de Spa, etc.«L’année dernière, on a fait TomorrowLand avec des amis. J’ai adoré David Guetta.Je vais y retourner cette année.» z

* Pour en savoir davantage sur Dominique Leroy

et le concours organisé par «Trends-Ten-

dances», rendez-vous sur www.trends.be.

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