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l'int e rview "Il ne faut pas que la recherche agisse pour son propre compte, seule dans son coin" Président du pôle herbivores des chambres d'agriculture de Bretagne, Alain Hindré précise ici les raisons de cette première biennale des stations expérimentales de l'Ouest. Un rendez-vous voulu pour amplifier le travail à destination des agriculteurs mené par la recherche appliquée. Propos recueillis par Paul Jégat Alain Hindré Président du pôle herbivores des chambres d'agriculture de Bretagne 14 / 31 janvier 2014 Première biennale des stations expérimentales laitières Les stations expérimentales laitières de l'ouest, gérées par les chambres d’agri- culture, l’Institut de l’élevage et Arvalis-Institut du végétal, travaillent en réseau afin de partager leurs réflexions, projets et résultats. Les biennales des stations lai- tières ont pour vocation de présenter tous les deux ans les derniers résultats expéri- mentaux. Le 6 février à Rennes, il sera présenté quatre thèmes particulièrement por- teurs pour l’avenir de la production laitière. La biennale des stations expérimentales laitières est un nouvel évènement à destination des éleveurs, conseillers, enseignant, ou chercheurs désireux de connaître les recherches en cours conduites dans le cadre de ce réseau innovant. Les cinq stations expérimentales professionnelles Les stations expérimentales laitières de Trévarez (29), Derval (44), Les Trinottières (49), Blanche-Maison (50) des chambres d’agriculture de Bretagne, Normandie et Pays de la Loire, conduites en partenariat avec l’Institut de l’élevage et la station expérimentale de la Jaillière (44) d’Arvalis-Institut du Végétal permettent de tester des techniques et systèmes innovants, de prendre des risques à la place des éleveurs et de mesurer tout cela avec précision afin d’apporter des réponses fiables aux éleveurs et à leurs techniciens. Elles sont complémentaires des réseaux de fermes d’éleveurs, qui ont pour but de couvrir la diversité des situations et des savoir-faire. Les thèmes de la biennale 2014 Pour cette première biennale, le comité d’organisation a retenu de développer quatre thèmes issus de la recherche actuelle menée dans les stations professionnelles de l’Ouest : - Le premier thème s’articule autour de la gestion de la carrière des animaux et le pilotage des lactations. Il abordera l’intérêt de faire vêler ses génisses à 24 mois que cela soit en race Prim’Hostein ou Normande, la possibilité d’allonger les lactations et les intervalles entre vêlages jusqu’à 18 mois et l’effet d’un apport de concentré selon la période d’apport au cours de la lactation. - Le second porte sur la gestion des fourrages et apportera des réponses innovantes aux questions suivantes : comment réussir ses récoltes de luzerne ? Quelles techniques agronomiques innovantes dans la conduite du maïs ? Le colza fourrager peut-il être une interculture intéressante pour renouveler les prairies pâturées ? - La troisième thématique concerne l’automatisation et l’utilisation des nouvelles tech- nologies. Quatre techniques novatrices ont été expérimentées : les nouveaux outils pour la détection des chaleurs et des vêlages, l’automatisation de l’alimentation des vaches laitières, l’association d’un récupérateur de chaleur et d’un pré-refroidisseur et la récu- pération de chaleur sous l’aire paillée des vaches laitières. - Le dernier thème abordera l’évaluation des impacts environnementaux des différents systèmes laitiers conduits dans trois sites expérimentaux. Roger Hérisset -Chambres d’agriculture de Bretagne PRATIQUE La biennale se déroulera le 6 février 2014, à l’Agrocampus Ouest, de Rennes, de 10 h à 16 h 45 Inscription : 50 € comprenant le dossier et le repas Contact : Anne Estebanez : 02 96 79 21 63 anne.estebanez@ cotes-d-armor. chambagri.fr - Conduite des productions fourragères - Agronomie et agro-machinisme des systèmes fourragers - Récolte et conservation des fourrages - Valorisation des fourrages - Environnement - Alimentation - Santé/reproduction - Cultures fourragères adaptées aux déficits hydriques et aux évolutions climatiques - Traite - Robot de traite et pâturage - Production de fourrages - Énergie et environnement - 3 systèmes de production durables - Conduite des lactations - Robot de traite mobile et pâturage - Production et valorisation des fourrages - Agrobiologie - Nouvelles technologies Trévarez (29) Derval (44) Les Trinottières (49) Blanche Maison (50) - Conduite des productions fourragères - Agronomie et agro-machinisme des systèmes fourragers - Récolte et conservation des fourrages - Valorisation des fourrages - Environnement La Jaillière (44)

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l'interview

"Il ne faut pas que la recherche

agisse pour son propre compte,

seule dans son coin"

Président du pôle herbivores des chambres d'agriculture

de Bretagne, Alain Hindré précise ici les raisons de cette première biennale des stations

expérimentales de l'Ouest. Un rendez-vous voulu pour amplifier

le travail à destination des agriculteurs mené par la

recherche appliquée.

Propos recueillis par Paul Jégat

Alain Hindré Président du pôle herbivores

des chambres d'agriculture de Bretagne

14

/ 31 janvier 2014

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/ 31 janvier 2014 l'interviewl'l'iintnt rviewrviewPremière biennale des stations expérimentales laitières

Les stations expérimentales laitières de l'ouest, gérées par les chambres d’agri-culture, l’Institut de l’élevage et Arvalis-Institut du végétal, travaillent en réseau

afi n de partager leurs réfl exions, projets et résultats. Les biennales des stations lai-tières ont pour vocation de présenter tous les deux ans les derniers résultats expéri-mentaux. Le 6 février à Rennes, il sera présenté quatre thèmes particulièrement por-teurs pour l’avenir de la production laitière.

La biennale des stations expérimentales laitières est un nouvel évènement à destination des éleveurs, conseillers, enseignant, ou chercheurs désireux de connaître les recherches en cours conduites dans le cadre de ce réseau innovant.

Les cinq stations expérimentales professionnellesLes stations expérimentales laitières de Trévarez (29), Derval (44), Les Trinottières (49), Blanche-Maison (50) des chambres d’agriculture de Bretagne, Normandie et Pays de la Loire, conduites en partenariat avec l’Institut de l’élevage et la station expérimentale de la Jaillière (44) d’Arvalis-Institut du Végétal permettent de tester des techniques et systèmes innovants, de prendre des risques à la place des éleveurs et de mesurer tout cela avec précision afi n d’apporter des réponses fi ables aux éleveurs et à leurs techniciens. Elles sont complémentaires des réseaux de fermes d’éleveurs, qui ont pour but de couvrir la diversité des situations et des savoir-faire.

Les thèmes de la biennale 2014Pour cette première biennale, le comité d’organisation a retenu de développer quatre thèmes issus de la recherche actuelle menée dans les stations professionnelles de l’Ouest : - Le premier thème s’articule autour de la gestion de la carrière des animaux et le pilotage des lactations. Il abordera l’intérêt de faire vêler ses génisses à 24 mois que cela soit en race Prim’Hostein ou Normande, la possibilité d’allonger les lactations et les intervalles entre vêlages jusqu’à 18 mois et l’effet d’un apport de concentré selon la période d’apport au cours de la lactation.- Le second porte sur la gestion des fourrages et apportera des réponses innovantes aux questions suivantes : comment réussir ses récoltes de luzerne ? Quelles techniques agronomiques innovantes dans la conduite du maïs ? Le colza fourrager peut-il être une interculture intéressante pour renouveler les prairies pâturées ?- La troisième thématique concerne l’automatisation et l’utilisation des nouvelles tech-nologies. Quatre techniques novatrices ont été expérimentées : les nouveaux outils pour la détection des chaleurs et des vêlages, l’automatisation de l’alimentation des vaches laitières, l’association d’un récupérateur de chaleur et d’un pré-refroidisseur et la récu-pération de chaleur sous l’aire paillée des vaches laitières.- Le dernier thème abordera l’évaluation des impacts environnementaux des différents systèmes laitiers conduits dans trois sites expérimentaux.

Roger Hérisset -Chambres d’agriculture de Bretagne

PRATIQUE

La biennale se déroulera le 6 février 2014, à l’Agrocampus Ouest, de Rennes, de 10 h à 16 h 45Inscription : 50 € comprenant le dossier et le repasContact : Anne Estebanez : 02 96 79 21 63 [email protected]

- Conduite des productions fourragères- Agronomie et agro-machinisme des systèmes fourragers- Récolte et conservation des fourrages- Valorisation des fourrages- Environnement

- Alimentation - Santé/reproduction- Cultures fourragères adaptées aux déficits hydriques et aux évolutions climatiques

- Traite- Robot de traite et pâturage- Production de fourrages- Énergie et environnement

- 3 systèmes de production durables- Conduite des lactations - Robot de traite mobile et pâturage- Production et valorisation des fourrages- Agrobiologie- Nouvelles technologies

Trévarez (29)

Derval (44) Les Trinottières (49)

Blanche Maison (50)

- Conduite des productions fourragères- Agronomie et agro-machinisme des systèmes fourragers- Récolte et conservation des fourrages- Valorisation des fourrages- Environnement

La Jaillière (44)

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Mention Légale
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Quel est votre rôle en tant que responsable professionnel vis-à-vis des travaux menés en station et, plus généralement, quelle est la place des éleveurs dans les processus de décision ?Alain Hindré. Les processus de décision sont simples. Ce qui est en place dans les stations l'est à la demande des éleveurs. Dans les quatre départements, des commissions d'éleveurs nous font part de leurs demandes. Ensuite, on travaille ces demandes avec nos collaborateurs puis elles sont étudiées au niveau du pôle herbivores. C'est à ce niveau que sont prises les décisions. Et quand ces déci-sions nécessitent des engagements budgétaires importants, elles sont alors discutées au niveau de la chambre régionale d'agricul-ture, en lien avec les différents financeurs , en particulier le conseil régional et l'institut de l'élevage qui est très présent dans nos processus de décision et de travail, ce à quoi je tiens beaucoup. Ce qui est mis en place vient des éleveurs, on doit prendre les risques à leur place sur des sujets qui en apparence peuvent pour certains sembler loufoques et qui seront peut-être déterminants dans l'ave-nir. Ce qui est sûr, c'est que les décisions ne viennent pas d'en haut, elles sont réellement issues des propositions des producteurs. Et on essaye de répondre à l'ensemble des demandes, qu'elles viennent d'éleveurs en systèmes très intensifs ou en agriculture biologique.Il ne faut pas que la recherche agisse pour son propre compte, seule dans son coin. Dans le pôle herbivores, nous sommes très attachés à ce qu'il y ait un lien entre la recherche et le développement, que cette recherche soit concrète et apporte des choses aux éleveurs. Des questions comme la fin des quotas, la future PAC ou encore comme l'agrandissement, les exploitations en multi-sites, la modernisation des bâtiments, etc... On a listé toutes ces préoccu-pations pour en faire des thèmes de recherche avec le souhait que ces travaux inspirent chaque éleveur dans ses choix, pour éviter par exemple des sur-investissements qui le fragiliseraient.

En quoi les différentes stations de l’Ouest sont-elles complémentaires ?A.H. On est très sensible à la complémentarité des stations, qu'elles soient pilotées par les chambres ou par les instituts, institut de l'élevage ou Arvalis institut du végétal. Le principe, c'est de faire que l'on puisse répondre à toutes les questions qui se posent sans être redondants les uns par rapport aux autres et donc qu'on ne travaille pas sur les mêmes sujets. On a d'ailleurs des conditions pédo-climatiques spécifiques à chacune des stations qui rendent nos travaux très complémentaires. En fourrages par exemple, les travaux menés à la station des chambres à Trévarez dans le Finistère ou à Derval en Loire Atlantique répondent différemment à ces enjeux pédoclimatiques. En génétique cette fois, la station de Blanche Maison travaille avec un troupeau de Normandes quand les autres stations travaillent avec des troupeaux Holstein, ce qui implique des orientations différentes.

Quels niveaux de diffusion connaissent les travaux de ces stations ?A.H. La valorisation des travaux est un problème récurrent de la recherche appliquée, pour que ce qui est fait ne reste pas dormir dans les armoires. Mais avec tous les outils à notre disposition aujourd'hui, du papier à internet sans oublier les opérations portes ouvertes, les rencontres en bout de champ, la restitution des études est de plus en plus efficace. Cette diffusion est extrêmement impor-tante et sans doute insuffisante encore, c'est pour cela que nous y sommes très attentifs. Mais la diffusion de nos travaux se concrétise aussi dans le lien entre les ingénieurs de la recherche appliquée et les conseillers de terrain, plus ce lien sera bon et plus la valorisation et la diffusion de la recherche appliquée se fera dans les exploi-tations. Dans ce lien, j'inclus aussi les organismes d'élevage que sont les contrôles laitiers ou les GDS qui sont aussi des partenaires

de développement. Cette biennale des stations expérimentales du Grand Ouest que nous organisons la semaine prochaine repose également sur cette idée que, travaillant en réseau, nous pourrions aussi valoriser ensemble ces études que nous réalisons ensemble.

Qu’est-ce qui distingue une station professionnelle d’une station Inra ?A.H. La grande différence tient au fait que l'Inra est orientée vers la recherche fondamentale, en amont des questions techniques et assez éloignées de la réalité concrète de l'élevage. Nous qui faisons de la recherche appliquée sommes beaucoup plus dans le concret technique et économique de l'élevage, en lien avec les préoccupations des professionnels. Je remarque par ailleurs que l'Inra travaille aujourd'hui beaucoup plus sur des questions d'ordre sociétal que sur des questions techniques, on a vu cette évolution se renforcer au cours des vingt dernières années.

Pouvez-vous citer des exemples de travaux de recherche en station qui ont eu un impact dans les élevages bretons ? A.H. Je pense d'emblée à tout le travail réalisé autour de la réduc-tion des coûts de production. Depuis que les stations existent, je pense que c'est le thème sur lequel on a le plus travaillé. C'est pour cela que ce critère des coûts opérationnels est très bon en Bretagne. Deuxième exemple, le travail mené autour des déjections et donc du traitement. Et les éléments que nous avons pu fournir ont fait avancer les choses. Mais on pourrait aussi citer des sujets comme une seule traite par jour ou le lait yoghourt, le traitement par les roseaux, l'allongement des lactations, autant d'études et de travaux qui ont marqué les esprits.

Pouvez-vous nous dire un mot sur de futurs projets de recherches ? A.H. Au moment de faire le point sur les futurs travaux de la station de Trévarez, on a sollicité les avis des éleveurs, qu'ils soient plutôt intensifs animal ou intensifs fourrage, mais aussi d'autres per-sonnes ayant développé des systèmes beaucoup plus herbagers. Devant les attentes très différentes de ces éleveurs, on a décidé de conduire trois troupeaux à la station de Trévarez, l'un très intensif, l'autre intensif fourrage et un troisième en système agriculture biologique. Cela nous permet de répondre à toutes les questions des éleveurs qui sont dans ces systèmes-là ou d'éleveurs qui souhaitent passer d'un système à un autre. Aujourd'hui, à Trévarez, ces trois systèmes sont totalement indépendants les uns des autres et gérés de manière autonome.

Les éleveurs ne sont-ils pas eux-mêmes des contributeurs aux travaux de la recherche appliquée ?A.H. Cette contribution est même très importante. Le travail de la recherche appliquée est très complémentaire des réseaux de fermes d'éleveurs, qu'on les appelle "agri-innovateurs" ou "agri-culteurs chercheurs". Ils sont de formidables atouts pour rebondir au niveau de la recherche appliquée et pour couvrir la diversité des situations et des savoir faire.

Donnez-nous une bonne raison pour un éleveur de participer à la biennale ?A.H. D'abord, il faut rappeler que cette journée est ouverte à tous les éleveurs qui le souhaitent. Mais on comprendra aussi que ce n'est pas simple de venir à Rennes quand comme moi on habite près de Brest. Au-delà de ce genre de difficulté, l'idée est de faire que chaque éleveur puisse avoir un écho du travail réalisé par les stations de recherche appliquée, à charge pour les techniciens et partenaires qui seront présents d'amplifier encore la diffusion des informations présentées ce jour-là.

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Très petites entreprises et exploitations agricoles :des entreprises efficaces, une organisation de moins en moins familialeAgricoles, artisanales ou industrielles, les petites entreprises sont souvent très efficaces car la communication y est rapide. Le chef d’entreprise gère son équipe dans une logique plus ou moins familiale. Le colloque "le travail dans les très petites entreprises", qui se tenait à Lyon, montre des similitudes entre l’agriculture et l’artisanat.

Défi nie par un effectif de moins de 20 salariés, la très petite entreprise (TPE) est "naturellement réactive". Lors du colloque du 17 décembre dernier consacré à ces entreprises, de nombreux intervenants ont insisté sur cette caractéristique. Comment l’expliquer ? Pour Jean-François Bergamini, de l’Organisme professionnel de prévention du BTP, "la proximité entre les fonc-tions commerciale, décisionnelle et de gestion est une des forces des TPE". En effet, le dirigeant a souvent une formation technique. Il connaît bien le métier pratiqué par ses salariés, et peut rapidement proposer des adaptations en cas de problème. De plus, le chef d’entre-prise est souvent le couteau suisse de l’entreprise : il gère le carnet de commandes, contacte les fournis-seurs, intervient chez les clients… Tout cela lui assure une très bonne vision de son entreprise, qui lui permet de prendre rapidement des décisions. Celles-ci s’appliquent rapidement, car il suffit souvent d’une pause café pour expliquer les nouveautés à l’ensemble de l’équipe. Pas besoin de rédiger une circulaire qui sera diffusée dans l’ensemble des sites par des chefs de service, après validation de la commission adéquate !Si la petite taille de l’entreprise est gage de réactivité, le revers de la médaille est la solitude du dirigeant. Happé par le quotidien, celui-ci néglige parfois d’établir une stratégie à moyen-long terme. Lorsque l’entreprise est en diffi-

culté, son dirigeant n’a souvent pas d’autre interlocuteur que le ban-quier. Marie-Christine Lenain, de l’Aract Nord-Pas-de-Calais, évoque ainsi une omerta sur les diffi cultés fi nancières de l’entreprise. Lors de ses interventions dans les petites industries en diffi culté, la conseil-lère prône une certaine transpa-rence envers les salariés. "Cela permet à tous de comprendre le problème, de voir les solutions pos-sibles, et de mobiliser des compé-tences inutilisées : un ouvrier qui maîtrise bien les tableurs peut ainsi aider à la gestion des stocks. Le dirigeant et les salariés ont géné-ralement des idées pour améliorer le mode de production, ou diversi-fier leurs produits. Un fabriquant de nappes jetables a ainsi décou-vert que son équipe savait enrouler les nappes sans rouleau en carton comme support, ce qui lui a permis de réduire son coût de fabrication. Une entreprise de silos s’est quant à elle diversifi ée pour fournir des plates-formes off-shore".

Du management familial à entrepreneurialLe travail en TPE est aussi, sou-vent, une histoire de famille. Ce peut être en permanence, lorsque l’épouse d’un artisan assure le secrétariat et la comptabilité, ou lors des pointes de travail. Lorsque les salariés restent très longtemps dans l’entreprise, ils fi nissent par-fois par faire partie de la famille.

Eric Verdier, directeur de recherche au CNRS, rapporte par exemple les paroles d’un chef d’entreprise : "mes employées, j’en ai une qui a 25 ans de maison, l’autre elle a 24 ans de maison, sur 30 ans que je suis dans mon établissement. Aujourd’hui ils savent que je pars, ils pleurent". Lors des pointes de travail, certains hôteliers préfèrent recruter au sein de leur famille ou de celle de leurs employés, consi-dérant que "quand c’est la famille, on est sûr qu’il n’y a pas de pro-blème". Ce mode de management très familial peut avoir des incon-vénients. Il est parfois plus diffi cile de faire des reproches, ou gérer des désaccords sans que cela res-semble à une querelle familiale. En outre, les employeurs qui ont un fonctionnement très familial sont souvent moins sensibles à la pré-vention des risques. Ainsi, certains considèrent la tenue des chambres ou la plonge d’un hôtel comme des tâches domestiques, sans considé-rer la différence avec, par exemple, une vaisselle familiale.Cependant, toutes les petites entre-prises n’ont pas un fonctionnement de type familial. Eric Verdier évoque ainsi trois types de petits garages automobiles. "Dans certaines entreprises, patron, salariés et clients forment une sorte de grande famille. La main-d’œuvre est peu qualifi ée mais polyvalente : ce sont des TPE "familiales". Dans les TPE "managériales", les prestations et

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Un colloque était consacré aux très petites entreprises en décembre dernier à Lyon, auquel ont participé des conseillers du secteur agricole.

Certains entrepreneurs cherchent à se démarquer par la qualité, pour fidéliser les clients et les salariés

Eric Verdier, du CNRS

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les prix sont davantage standar-disées. C’est par exemple le cas des garages affi liés au réseau d’un constructeur. Les salariés sont plus spécialisés. D’autres entrepreneurs cherchent à se démarquer par la qualité, pour fidéliser les clients et les salariés. Ils proposent des prestations plus chères, mais avec davantage de services. Le person-nel est là pour longtemps. Certains salariés ont été formés dans l’en-treprise, par apprentissage. Ce sont les TPE "entrepreneuriales". Le parcours du chef d’entreprise avant son installation joue beau-coup sur l’organisation qu’il met en place.

Caroline Depoudent Pôle porc des chambres

d’agriculture de Bretagne

Très petites entreprises et exploitations agricoles :des entreprises efficaces, une organisation de moins en moins familiale

Qu’en ont retenu les conseillers et chercheurs spécialistes de l’agriculture ?

Nathalie Darras, Chambre d’agriculture 35. "On passe d'artisan à chef d'entreprise, et d'agriculteur à chef d'entreprise agricole. Les deux secteurs ont des préoccupations très convergentes, des besoins de compétences du même ordre". "Prises dans la gestion du court terme, les entreprises artisanales ne sont pas assez dans une logique stratégique. La prise de recul est primordiale aussi pour l'agricul-ture". Florence Kling-Eveillard, Institut de l’Elevage. "Les métiers d’artisans et éleveur évoluent selon les mêmes tendances. Leur environnement se com-plexifi e avec l’arrivée des nouvelles technologies et la multiplication des normes techniques. Eleveurs et artisans ont besoin de développer des compé-tences, comme le management, qui ne relevaient pas traditionnellement de leur métier". Nathalie Hostiou, Inra. "J'ai été frappée par la simi-larité des enjeux quant à l'attractivité du métier et le renouvellement des générations pour les TPE/TPI agricoles et non agricolese. Sophie Madelrieu, Irstea. "Cette journée confi rme que les problématiques du travail et de ses trans-formations, des liens entre petites entreprises et familles, se retrouvent dans d’autres secteurs d’activités. Le vocabulaire et les façons de poser les problèmes n’étaient pas si éloignés, nous pouvons donc nous comprendre et espérer nous enrichir les uns les autres".

L’avenir de la Ferme de 1000 vaches compromisL’Etat va demander aux promoteurs de la ferme de 1000 vaches dans la Somme de procéder à la démolition des bâtiments illégaux, a indiqué le ministère chargé de l’Aménagement du territoire. Les services de l’Etat auraient constaté qu’une partie des bâtiments n’a pas été construit selon les préconisations du permis de conduire ou en tout cas excéderait la taille autorisée. Si l’Etat n’a pas le pouvoir de contraindre le propriétaire à s’exécuter, le préfet a saisi le pro-cureur pour demander le démontage des bâtiments illégaux. Cette décision a été prise à l’issue d’une rencontre entre la Confédération paysanne et la ministre du Logement et de l’Aménagement du terri-toire, Cécile Dufl ot, hostile à ce projet. Le syndicat et une association locale de riverains Novissen avaient occupé le chantier de la future ferme, le 16 janvier dernier.

Energies renouvelables : Bruxelles fi xe un objectif de 27 % en 2030 Le 22 janvier, la Commission européenne a proposé de porter à 27 % la part d’énergies renouvelables dans l’Union européenne en 2030 et à 40 % la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) par rapport à 1990, mais sans fi xer de contraintes aux Etats membres. C’est à eux qu’il appartiendra de fi xer des objectifs plus précis pour chaque secteur. Actuellement, la directive climat-éner-gie prévoit d’atteindre 20 % d’énergie renouvelable et une réduction de 30 % des GES d’ici 2020. Dans ce nouveau dispositif l’agriculture ne serait pas intégrée au système européen d’échange de quotas d’émissions et devrait donc atteindre les objectifs fi xés comme les autres secteurs.

La coopérative d’élevage Évolution acquiert l’analyse génétique du GIE Labogena de l’InraLa coopérative d’élevage Évolution, basée à Rennes, acquiert les activités d’analyse génétique du GIE Labogena de l’Inra, a indiqué le 24 janvier l’institut de recherche publique. Les compétences de ce groupement d’intérêt économique (GIE) dans le domaine du géno-typage, de l’extraction et du stockage d’ADN, de l’étude de gènes d’intérêt zootechnique et des maladies, sont recherchées par le groupe coopératif du Grand Ouest, numéro un français de la géné-tique bovine, pour ses perspectives de développement à l’interna-tional. Cette reprise renforce la capacité d’Évolution à se développer à l’international sur un marché mondial de la génétique animale « en croissance de 10 % par an », selon l’Inra. Labogena a été créé en 1994 par l’Inra et ses partenaires, notamment l’Institut de l’élevage, l’Union nationale des coopératives agricoles d’élevage et d’insémi-nation animale le Syndicat des sélectionneurs avicoles aquacoles français, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture. Son activité principale, le génotypage au service de la génétique animale, répond aux besoins de gestion des populations animales (contrôle ou assignation de parenté, typage de mutations, sélection génomique) et aux besoins de la recherche.

Les agriculteurs sont les actifs les plus exposés à l’épuisement professionnelLes agriculteurs sont, en France, les actifs les plus exposés à l’épui-sement professionnel, couramment appelé "burn-out". C’est ce que révèle une étude du cabinet Technologia selon laquelle 23,5 % des agriculteurs exploitants sont soumis au "travail excessif et compul-sif", contre 19,7 % des artisans, commerçants et chefs d’entreprise, 19 % des cadres et professions intellectuelles, 13,2 % des ouvriers et 6,8 % des employés. À la question "vous sentez-vous épuisé à la fi n d’une journée de travail ?" ; 53 % des agriculteurs répondent oui contre 35 % des ouvriers et 23 % des artisans, commerçants et chefs d’entreprise. Cette étude a été conduite par le cabinet Technologia du 30 juillet au 30 août auprès d’un échantillon de 1 000 personnes représentatives de la population française. Le travail excessif cor-respond aux réponses : "je travaille trop" et le travail compulsif à : "je ne peux pas ne pas travailler".

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