L’INTERNATIONALE Documents et Souvenirs (1864-1878) TOME PREMIER [James Guillaume, 1905]

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 James GUILLAUME L’INTERNATIONALE Documents et Souvenirs (1864-1878) TOME PREMIER  Avec un portrait de Constant Meuron

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James GUILLAUME

LINTERNATIONALEDocuments et Souvenirs (1864-1878)TOME PREMIERAvec un portrait de Constant Meuron

SOCIT NOUVELLE DE LIBRAIRIE ET DDITION, Paris, 1905

Dernires corrections : lundi 6 septembre 2010.

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PRFACE

Quelques mots seulement pour expliquer l'origine et le contenu de la prsente publication. Au cours de voyages faits en 1903 et 1904 dans le Jura neuchtelois et bernois (Suisse franaise) pour y revoir mes vieux camarades et faire la connaissance des militants de la nouvelle gnration, j'avais d constater que le vritable caractre du grand mouvement socialiste dont l'Internationale a t l'expression tait gnralement inconnu ou mconnu aujourd'hui, dans le pays mme qui fut le thtre d'une partie considrable de ce mouvement. Je crus qu'il pourrait tre utile d'attirer l'attention des jeunes, dans la Suisse franaise, sur les ides de l'Internationale, et de leur en faciliter l'tude et la discussion, en recueillant et en publiant ce que j'avais crit, de 1868 1878, dans des journaux qui sont maintenant presque introuvables : je rsolus donc de rimprimer en un petit volume un choix d'articles parus dans le Progrs du Locle, lgalit de Genve, la Solidarit de Neuchtel, et le Bulletin de la Fdration Juras sienne. On me fit observer que, pour restituer ces articles leur vritable signification, il serait indispensable de les accompagner d'un commentaire historique, faisant connatre les circonstances l'occasion desquelles ils furent crits, le milieu dans lequel se sont produites les ides qu'ils exposent, et permettant surtout de bien comprendre l'volution de ces ides. Je me prparai en consquence rdiger de courtes notes explicatives. Mais alors on me dit qu'au lieu d'un commentaire consistant en simples notes impersonnelles, il serait prfrable, en||3||

largissant le cadre du livre, d'crire une narration suivie, dposition d'un tmoin sur les hommes et les choses de cette poque ; on me conseilla, en outre, d'ajouter aux articles de journaux d'autres pices de diverse nature, lettres indites, statuts, rsolutions des Congrs, circulaires, etc. Le livre deviendrait ainsi la fois une collection de documents et une collection de souvenirs, formant ma contribution bien modeste l'histoire, que sans doute on crira quelque jour, de lAssociation internationale des travailleurs. Un ouvrage rdig sur ce plan s'adresserait, non plus seulement aux habitants de la rgion o se constitua jadis la Fdration jurassienne, mais tous ceux qui voudraient savoir ce que fut lInternationale. En accdant ce dsir amical, je ne me suis pas dissimul l'cueil de l'entreprise, et les critiques auxquelles devait m'exposer l'excution de ma tche. Conter ses souvenirs, ce n'est pas seulement parler de ses amis, c'est aussi parler de soi. Et, pour transmettre l'impression exacte de la ralit, il faut ne pas reculer devant le dtail minutieux, parfois devant la confidence intime. Je me suis dcid affronter le pril, en m'efforant de limiter la partie personnelle ce qui tait strictement ncessaire pour l'intelligence de la partie gnrale. Je remercie les amis qui ont bien voulu m'aider contrler et complter mes souvenirs ; c'est eux qu'est due, pour une bonne part, la sret et la prcision des renseignements qu'il m'a t possible de runir dans ces pages. James GUILLAUME.L'ouvrage devait s'appeler : Documents et Souvenirs, contribution l'histoire de l'Internationale ; c'est l'diteur qu'est d le titre abrg sous lequel il parat : L'Internationale, Documents et Souvenirs (1864-1878). Il aura trois volumes. Le premier va de 1864 la fin de mars 1870. Pour bien marquer le point de vue de l'auteur, spectateur plac dans la Suisse franaise et qui n'a voulu raconter que ce qu'il a vu, les deux parties de ce volume ont reu des titres qui localisent le rcit : Avant la Fdration romande (1864-1868) et La Fdration romande (1869-1870). Le second volume, qui pourra paratre au printemps de 1906, ira de 187o 1878 : la ||4||

scission dans l'Internationale en Suisse, la guerre, la Commune, la Confrence de Londres (septembre 1871), la lutte entre le principe d'autorit et le principe d'autonomie dans l'Internationale, le Congrs de La Haye (septembre 1872), enfin le triomphe du principe d'autonomie, tel en sera le contenu. Le troisime et dernier volume traitera de l'Internationale aprs la suppression du Conseil gnral, et plus particulirement de l'histoire de la Fdration jurassienne, de 1878 1878. La phototypie place en tte de ce volume (portrait de Constant Meuron) est l'agrandissement d'une photographie faite aux environs de 1866. Le tome II contiendra un portrait de Michel Bakounine, reproduction de la photographie de 1868 dont il est parl la p. 133 du prsent volume ; le tome III, un portrait d'Adhmar Schwitzgubel, reproduction d'une photographie faite vers 1875.

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TABLE DES MATIRES DU TOME PREMIERPREMIRE PARTIEAvant la Fdration romande.I. Fondation de lInternationale, 1 ; ses dbuts dans la Suisse franaise, Coullery et J.-Ph. Becker, 2-4 **. II. Le premier Congrs gnral de lInternationale, Genve (3-8 septembre 1866), 4. Lettre adresse par moi au Premier Mars , 5-7. Les dlgus, lordre du jour, 7-9. Les Statuts gnraux et le rglement, 9-25. Lettre de Karl Marx sur le Congrs, 9 octobre, 26-27. III. Progrs de la Section du Locle : sa protestation contre la guerre au moment du conflit diplomatique propos du Luxembourg (avril 1867), 27-29. IV. Le second Congrs gnral de lInternationale, Lausanne (27 septembre 1867) : extraits de mes Souvenirs , parus dans le Diogne en 1867 ; les rsolutions du Congrs, 29-41. V. Le premier Congrs de la Ligue de la paix et de la libert, Genve (9-12 septembre 1867) : extraits de mes Souvenirs , parus dans le Diogne en 1867 ; rsolutions du Congrs, 41-56. Premier rapprochement entre les Sections de la Suisse franaise ; la Voix de lAvenir de Coullery devient leur organe officiel (sept. 1867), 56 57. dition des Statuts gnraux de lInternationale publie par le Conseil gnral, 57-58. VI. Attitude des socialistes, dans la Suisse franaise, lgard du parti radical et du parti conservateur : alliance lectorale de Coullery avec les conservateurs la Chaux-de-Fonds, et des socialistes du Locle avec les radicaux, pour les lections au Grand-Conseil neuchtelois du 3 mai 1868 ; le journal la Montagne, 58-62. VII. La grve du btiment Genve, mars-avril 1868 ; mission de Graglia Paris et Londres; Franois Brosset, 62-64. Le bureau de Paris de lInternationale ; procs et condamnation des deux premires Commissions parisiennes (mars et mai 1868), 64-65.**

La numrotation des pages correspond celle du document original (sur fr.wikisource.org)

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VIII. Le troisime Congrs gnral de lInternationale, Bruxelles (6-13 septembre 1868); ses rsolutions, 65-71. IX. Le second Congrs de la Ligue de la paix et de la libert, Berne (21-55 septembre 1868) ; une minorit socialiste se spare de la Ligue, et, se constituant en Alliance de la dmocratie socialiste, fait adhsion lAssociation internationale des travailleurs, 71-76. Coup-dil rtrospectif sur lactivit rvolutionnaire de Michel Bakounine et de ses amis, de 1864 1868. 76-79. X. La Section du Locle dans lautomne de 1868. Notre tat desprit devant le vote du Congrs de Bruxelles sur la proprit collective ; Coullery attaque le Comit central de Genve et les socialistes belges (27 septembre), 79-82. Manifeste lectoral des socialistes de Genve (7 octobre) ; rponse du Comit central de Genve Coullery et rplique de celui-ci (11 octobre) ; rponse de la Section bruxelloise Coullery (18 octobre) ; la Section du Locle adhre aux rsolutions du Congrs de Bruxelles et vote une Adresse aux dmocrates socialistes de Genve (18 octobre), 82-87. Le Cercle international du Locle ; le Caveau ; le pre Meuron ; le Crdit mutuel, les soires d'instruction mutuelle, le projet de socit de consommation, etc. Mes lectures ; paysage jurassien, sur les Monts , 87-90. XI. Adresse de l'Internationale de Genve aux ouvriers espagnols (21 octobre 1868). 91-92. Runion de Neuchtel (21 octobre), 92. Fondation Genve d'un groupe de l'Alliance de la dmocratie socialiste (28 octobre), 92. Tentative lectorale des socialistes genevois, qui prsentent, lors de l'lection du Grand-Conseil de Genve (15 novembre), une liste de candidats socialistes, 93-94. XII. La Section du Locle en novembre et dcembre 1868. Les achats coopratifs, 94. Essai d'intervention dans les affaires municipales, et fondation du journal le Progrs, organe des dmocrates loclois (13 dcembre) ; le mouvement du protestantisme libral : premire confrence de F. Buisson au Locle (16 dcembre) ; premier numro du Progrs (18 dcembre), 95-100. XIII. Prparatifs en vue de la cration d'une Fdration romande d'un journal destin lui servir d'organe, 100-102. La demande d'admission dans l'Internationale, adresse par le Bureau central de l'Alliance internationale de la dmocratie socialiste, est examine par le Conseil gnral de l'Internationale Londres (dcembre 1868); lettre particulire de Bakounine Karl Marx (22 dcembre) ; refus du Conseil gnral d'admettre l'Alliance de la dmocratie socialiste comme branche de l'Association internationale des travailleurs (mme jour, 22 dcembre) ; lettre de Marx Jung (28 dcembre), 102-104. ||7||

DEUXIME PARTIELa Fdration romande.I. Premier Congrs de la Fdration romande, Genve (2-4 janvier 1869) ; cration de lgalit et adoption des statuts de la Fdration, 105-107. II. Je fais la connaissance personnelle de Michel Bakounine (2 janvier 1869). Je refuse de fonder au Locle un groupe de l'Alliance. 107108. Dbat dans le Bureau central de l'Alliance ; la majorit dcide, contre l'avis de Becker, de dfrer aux observations du Conseil gnral, et de proposer aux groupes de l'Alliance de dissoudre leur organisation internationale ; Perron crit Londres dans ce sens, 108-111. Lettre du Conseil gnral belge (16 janvier), 111-113. III. Au Locle. Le n2 du Progrs (12 janvier 1869) ; confrence du professeur Ch. Kopp (16 janvier), 113-116 ; le n3 du Progrs (22 janvier), 116-118. Je demande Bakounine de venir faire une confrence ; sa rponse (27 janvier). Crise dans la socit secrte de Bakounine et de ses amis (26 janvier), sa dissolution, 118-120. Soire familire au Cercle international du Locle (31 janvier) ; le n4 du Progrs (2 fvrier) ; seconde confrence de F. Buisson (5 fvrier) ; nouvelle lettre de Bakounine (13 fvrier) ; le n5 du Progrs (20 fvrier), 121-128. IV. Bakounine au Locle (20-22 fvrier 1869) ; notre intimit : le programme de l'Alliance, 128-133. V. Le n6 du Progrs : article sur la fte du 1er mars (1er mars 1869), 133-138. L'autorit scolaire du Locle s'meut. Prparation de la transformation du Progrs en organe socialiste, 138-140. VI. Rponse du Conseil gnral de Londres la lettre de Perron (9 mars 1869) ; en consquence, dissolution volontaire de l'organisation internationale de l'Alliance de la dmocratie socialiste ; le groupe genevois se constitue en Section de l'Internationale, 140-141. Grves Genve (mars). Progrs de l'Internationale Paris, 141-143. la Chaux de-Fonds et au Locle, succs de la propagande : groupes d'action ; attaques de la Montagne contre le Progrs ; lettre de la Commission d'ducation du Locle, 143-144. VII. Le n7 du Progrs , devenu organe socialiste et paraissant tous les quinze jours (3 avril), 143-148. Suite du mouvement contre l'orthodoxie protestante. N du Progrs (17 avril), 148-149. Lgalit ses treize premiers numros ; la demande de Bakounine, ||8||

j'cris un article sur le droit d'hritage (galit du 1er mai), 149-133. Agitations en France et en Belgique. Netchaief. N 9 du Progrs (1er mai), 133-155. VIII. Nous dcidons d'en finir avec Coullery et la Montagne ; entente avec les socialistes du Val de Saint-Imier (9 mai 1869), 133-156. N10 du Progrs (13 mai) ; mort de Jeanne Brisme, Bruxelles (17 mai) ; n11 du Progrs (29 mai), 156-161. Meeting du Crt-du-Locle (30 mai), 161-163. Lettre de Bakounine Fritz Robert (7 juin), 163-166. N 12, 13 et 14 du Progrs (12 et 28 juin, 10 juillet), polmique avec la Montagne ; nouveaux articles sur le droit d'hritage (galit du 26 juin et du 10 juillet), 166-172. Massacre de la Ricamarie (17 juin) ; attente de graves vnements, 172-173. IX. Mes derniers jours au Locle (11-13 juillet 1869), 173-174. L'enlvement des enfants de la princesse Obolensky (13 juillet), 174-173. N 13, 16 et 17 du Progr s (24 juillet, 7 et 21 aot) ; grve des ouvriers graveurs et guillocheurs la Chaux de-Fonds et au Locle ; cration de l'atelier coopratif du Locle, 176-178. La Commission d'ducation du Locle m'invite donner ma dmission (3 aot) ; j'entre l'imprimerie G. Guillaume fils Neuchtel, 178-179. Joukovsky au Locle ; n 18 et 19 du Progrs (4 et 18 septembre), 179. X. Les articles de Bakounine dans lgalit : les Endormeurs, la Montagne, le Jugement de M. Coullery, l'Instruction intgrale, la Politique de l'Internationale, la Coopration (26 juin-4 septembre 1869), 179-180. La Section de l'Alliance, Genve, admise comme Section de l'Internationale par le Conseil gnral de Londres (28 juillet) ; Bakounine annonce (13 aot) la Section de l'Alliance qu'il quittera Genve aprs le Congrs de Ble ; le Comit cantonal des Sections de Genve refuse d'admettre la Section de l'Alliance dans la fdration cantonale genevoise (16 aot), 181-182. Fragment indit d'un manuscrit de Bakounine : les raisons de l'hostilit de certains meneurs genevois contre l'Alliance, 183186. Lutte entre la fabrique et le btiment Genve, propos de l'ordre du jour du futur Congrs gnral de l'Internationale (aot) ; les dlgus des Sections de la Suisse franaise au Congrs de Ble, 186-190. XI. Le quatrime Congrs gnral de l'Internationale, Ble (612 septembre 1869) ; mon compte-rendu dans le n 19 du Progrs (18 septembre), 190-195) ; dtails sur les dbats du Congrs : lgislation directe, 193-196 ; proprit foncire, 196-200 ; droit d'hritage, 200-204 ; socits de rsistance, 204-206 ; rsolutions administratives, 206-209. Incident Bakounine Liebknecht, jury d'honneur, 210-213. Blme inflig Coullery, 213-214. Varlin entre dans notre intimit, 214-215. XII. Le lendemain du Congrs de Ble : passage Genve d'une partie des dlgus (16 septembre 1869), 216. Le troisime Congrs de la ||9||

Ligue de la paix Lausanne (13-18 septembre), 216. Ajournement oppos par le Comit fdral romand la demande d'entre dans la Fdration romande faite par la Section de l'Alliance (22 septembre), 217-218. Je fais au Locle un rapport sur ma dlgation au Congrs de Ble (23 septembre), 219. Bakounine m'crit (3 octobre) pour m'annoncer son prochain dpart pour Lugano, 219-220. Attaque de Moritz Hess contre Bakounine dans le Rveil de Paris du 2 octobre ; projets divers de rponse de Bakounine ; ma rponse dans le Progrs (n21, 16 octobre) l'article de Moritz Hess ; Bakounine quitte Genve (30 octobre). 220-224. Aprs le dpart de Bakounine, Perron et Robin, chargs de la rdaction de lgalit, dcident de continuer la Propagande du socialisme rvolutionnaire avec une tactique nouvelle ; apprciation de la campagne dsastreuse faite par eux (fragment indit d'un manuscrit de Bakounine), 224-227. Dbuts de M. Nicolas Outine dans l'Internationale de Genve : portrait de ce personnage (fragment indit d'un manuscrit de Bakounine), 227-229. XIII. Les assembles gnrale du mercredi au Temple-Unique (20 octobre-1er dcembre 1869), 229-230. Progrs de la Fdration romande ; propagande active dans le Jura Suisse ; meeting de Sonceboz (17 octobre), assemble populaire de Saint-Imier (31 octobre) ; article du Progrs (n23, 13 novembre) sur le dveloppement de l'Internationale dans le Jura, 230-232. Les lections au Conseil national suisse (31 octobre) ; article du Progrs (n 22, 30 octobre), 232-234. La question de la sparation de l'glise et de l'tat dans la canton de Neuchtel : article du Progrs (n 23, 13 novembre) ; le christianisme libral la Chaux-deFonds (dcembre), 235-237. lection du Conseil dtat de Genve (14 novembre) ; chec de la candidature du socialiste genevois Grosselin, port sur la liste radicale ; article conciliant de Perron dans lgalit sur cette lection, et change banal au Temple-Unique (27 novembre) ; Robin se prononce nettement. dans lgalit, contre les candidatures ouvrires (4 dcembre), 237-240. En France : massacre dAubin (8 octobre) grves, lections Paris (21 novembre, 5 dcembre), fondation de la Marseillaise (9 dcembre), 241-242. Sention au Locle (23 novembre) ; le Progrs devient hebdomadaire (n 24, 27 novembre) ; mon voyage Lyon avec Sention (4-5 dcembre) ; un des dictionnaires secrets de Bakounine, 242-240. Progrs de lInternationale dans tous les pays, 246-247. Suite de la propagande dans le Jura suisse : runion des Ponts (5 dcembre), meeting de Bienne (12 dcembre) ; cration de la Section de propagande de la Chaux-de-Fonds (dcembre) ; mouvement des esprits Neuchtel, 247-248. Taquineries puriles de Robin dans lgalit ladresse du Conseil gnral de Londres (novembredcembre) ; article du Progrs (n25, 4 dcembre) sur la querelle ||10||

Schweitzer-Liebknecht ; autres taquineries de Robin dans lgalit (affaires Duval et Wahry), 248-252. Inauguration du monument de Serno-Solovivitch Genve (26 dcembre), 252. Fondation de la Tagwacht Zurich : article du Progrs (n 28. 25 dcembre) sur les socialistes zuricois 253. Ma lettre au citoyen Murat, de Paris, sur le mutuellisme et le collectivisme, publie dans le Progrs s (n1 de la 2e anne, 1er janvier 1870) ; lettre que madresse Varlin propos de la Marseillaise et du collectivisme, publie dans le Progrs (mme numro), 254-259. Le numro de lgalit du 1er janvier 1870, 259. XIV. Bakounine Locarno (novembre-mars) ; la traduction de livre de Karl Marx, Das Kapital ; Netchaef revient de Russie, sa lettre lditeur Poliakof, 259-261. Je lis Das Kapital , et projette den analyser le contenu dans un article de revue, 262. La Communication prive du Conseil gnral de Londres du 1er janvier 1870 ; son existence ne nous est rvle quen 1872, 262-268. Projet dune ptition collective au Conseil gnral, lanc par Robin, dsapprouv par Bakounine ; lettre de Sention Varlin ce sujet (1er fvrier), 269. Brusque dmission de sept membres (sur neuf) du Conseil de rdaction de lgalit (3 janvier) : le journal est remis par le Comit fdral aux mains de Whry et dOutine ; attitude conciliante du Progrs , 270-271. Robin Neuchtel : affichage de petits placards de propagande (15 janvier) ; article du Progrs , Les braves de lUnion librale (n 5, 29 janvier), 272-275. Paris : la journe du 12 janvier ; lettre de Varlin Aubry (19 janvier), 275-276. Le cooprativisme de la nouvelle rdaction de lgalit ; les collectivistes traits de sectaires ; ma lettre (29 janvier) sur la chimre de lmancipation par la coopration. 276-277. Les assembles gnrales du mercredi, Genve, manifestent lintention de soustraire lgalit au contrle de la Fdration romande ; les Sections des Montagnes se prparent revendiquer leurs droits, 277-278. Rsultats satisfaisants de la propagande dans le Jura, 278. Robin quitte Genve pour Paris (6 fvrier) ; la Section de lAlliance, Joukovsky, 278-279. Meeting de Lausanne (27 fvrier), 279-280. Poursuites contre Netchaef : articles du Progrs (n 6, 8 et 10, 5 et 19 fvrier, 5 mars) ; article de Bakounine dans la Marseillaise sur la mort de Herzen, reproduit dans le Progrs (n 10, 11 et 12), 280. Second article du Progrs sur la fte du 1er mars (n 9, 26 fvrier), 280-282. Bakounine se rend de Locarno Genve pour les affaires russes (12 mars) ; le fonds Bakhmtief : rsurrection du Kolokol, 282-283. Assemble de Lyon (13 mars) ; Robin Paris ; nouvelle dition franaise des Statuts de lInternationale, 283-286. La question de lattitude de lInternationale vis--vis des gouvernements : le point de vue du Temple-Unique, le point de vue du Jura, 286-287. La Section de lAlliance et Outine : revision du programme faite sous la pression de ||11||

Becker (26 mars) ; intervention de Bakounine, 287-288. Cration par Outine dune Section russe Genve (annonce le 23 mars) ; Outine et Marx ; alliance du Temple-Unique avec Coullery, 288-289. La Section de propagande de la Chaux-de-Fonds refuse par le Comit fdral romand (27 mars) ; lettre de Perron ; lettre de Bakounine (2 avril) ; plan de bataille la veille du Congrs romand, 289-291. Communication confidentielle (Confidentielle Mittheilung) de Marx ses amis dAllemagne (28 mars), 291-298. Dernier article du Progrs (n 14, 2 avril 1870), 299-302.

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L'INTERNATIONALEDocuments et SouvenirsPREMIRE PARTIEAVANT LA FDRATION ROMANDE(1864 Dcembre 1868)

I

Fondation de l'Internationale (1864) ; ses dbuts dans la Suisse franaise (1865-1866).Raconter les origines lointaines de l'Association internationale des travailleurs en remontant d'une part jusqu' la Ligue (allemande) des communistes (Bund der Kommunisten) de 1847, d'autre part jusqu' la Fdration ouvrire organise Paris en 185o par Delbrouck, Jeanne Derouin et Pauline Roland ne rentre pas dans le cadre que je me suis trac. Je ne dirai rien non plus de la dlgation des ouvriers parisiens l'Exposition universelle de Londres en 1862, du meeting de Saint Martin's Hall 1, le 28 septembre 1864, o fut dcide la cration de l'Internationale ; de l'lection, par cette assemble, d'un comit charg d'organiser la nouvelle association, comit qui prit ensuite le nom de Conseil gnral (en anglais Central Council) ; de l'laboration, par un sous-comit, des Statuts provisoires (en anglais Provisional Rules), et de la rdaction en anglais, par le Dr Marx (l'un des lus du 28 septembre),1

On sait que ce meeting fut prsid par le professeur Edward Spencer Beesly, un des principaux reprsentants en Angleterre de l'cole d'Auguste Comte. On sait galement que Karl Marx n'assistait pas cette runion.

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d'un manifeste (Address) qui fut publi Londres, avec les Provisional Rules, en une brochure 2, la fin de 1864. Je ne parlerai, autant que possible, que des choses sur lesquelles je puis apporter un tmoignage direct. Voici en quels termes j'ai retrac, en 1872, dans les premires pages du Mmoire de la Fdration jurassienne 3 les dbuts de l'Internationale dans la Suisse franaise :

La fondation des Sections internationales dans la Suisse romande date de 1865. Un mdecin du Jura bernois, domicili alors la Chaux-deFonds, Pierre Coullery, connu depuis 1848 dans le Jura suisse par sa propagande dmocratique et humanitaire 4, se mit en relations avec le Conseil gnral de Londres, et fonda la Section de la Chaux-de-Fonds, qui parvint tout d'abord au chiffre de quatre cinq cents adhrents. Sous l'influence de Coullery furent bientt cres d'autres Sections dans le Jura : celles de Boncourt (fvrier 1866), de Bienne, de Sonvillier 5 (mars), de Saint-Imier, de Porrentruy (avril), de Neuchtel (aot). La Section du Locle fut fonde en aot 1866 par Constant Meuron 6, vieux proscrit de la2 3

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Address and Provisional Rules of the International Working men's Association , Londres, 1864. Mmoire prsent par la Fdration jurassienne de l'Association internationale des travailleurs toutes les Fdrations de l'Internationale ; Sonvillier, au sige du Comit fdral jurassien, 1873 ; 1 vol. in-8. Ce Mmoire fut rdig, du printemps de 1872 au printemps de 1873, en excution d'une dcision du Congrs de Sonvillier (12 novembre 1871) : c'est moi qui ai tenu la plume. Le Dr Coullery avait dj quarante-six ans en 1865. La Section de Sonvillier compta, ds le dbut, au nombre de ses membres un jeune ouvrier graveur, Adhmar Schwitzgubel. n en 1844, qui devait jouer un rle considrable dans le mouvement socialiste en Suisse. On trouvera dans le second volume de ces Documents et Souvenirs la reproduction d'une notice ncrologique sur Constant Meuron, publie dans le Bulletin de la Fdration jurassienne du 15 mai 1872. En 1866 il avait soixante-deux ans. Quoique appartenant une branche d'une famille de l'aristocratie neuchteloise, les de Meuron (il n'usait pas, pour son compte, de la particule), il avait t, en 1831, l'un des chefs de l'insurrection rpublicaine de Neuchtel. Arrt l'anne suivante Berne, et livr l'autorit prussienne par le gouvernement bernois, il fut condamn mort

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rvolution neuchteloise de 1831, et par James Guillaume 7. Ds 1865 existaient galement des Sections Genve, Lausanne, Vevey et Montreux. La Section de Genve avait t fonde principalement sous l'influence du socialiste allemand Jean-Philippe Becker 8 qui cra en janvier 1866 le journal mensuel le Vorbote , pour servir d'organe aux Sections de langue allemande. Dans toutes ces Sections primitives, la conception de l'Internationale tait encore fort mal dfinie. Le mot d'ordre avait t jet aux chos : Ouvriers, associez-vous ! Et l'on s'tait associ, groupant tous les ouvriers indistinctement dans une seule et mme Section. Aussi les lments les plus htrognes, pour la plupart fort peu srieux, se coudoyaientNeuchtel ; toutefois, le roi de Prusse consentit commuer la peine capitale en celle de la dtention perptuelle. Enferm dans la prison que flanque la vieille Tour de Csar , Neuchtel, il russit, en 1834, s'vader avec l'aide de sa vaillante femme, milie Fasnacht (de Morat), qui lui fit passer, cache dans un pain, une lime, avec laquelle il scia un barreau de fer d'une fentre de la prison. Il dut vivre en exil jusqu'en 1848 ; la rvolution du 1er mars lui permit de rentrer dans le canton de Neuchtel, devenu rpublique. Il se fixa au Locle, et y vcut, d'abord comme ouvrier guillocheur, puis comme comptable dans l'atelier de M. Adolphe Huguenin, monteur de botes. l'automne de 1869, il se retira Saint-Sulpice, sa commune d'origine, o il mourut en 1872. J'avais alors vingt-deux ans et demi. Aprs des tudes commences Neuchtel et continues la Facult de philosophie de l'Universit de Zurich, j'avais accept, en aot 1864, pour un an, la place vacante de professeur d'histoire et de littrature l'cole industrielle du Locle qu'tait venu m'offrir, au nom de la Commission d'ducation de cette ville, le directeur de l'Ecole, M. Barbezat ; mon intention tait, l'anne acheve, d'aller poursuivre mes tudes Paris. La mort, survenue en fvrier 1865, d'un frre plus jeune, qui s'essayait la peinture et que j'avais compt emmener Paris avec moi, changea ma destine : renonant mon projet, je rsolus de rester au Locle ; je passai l'examen d'tat, et, l'expiration de l'anne scolaire, je fus nomm professeur titre dfinitif (aot 1865). Jean-Philippe Becker avait t l'un des chefs de l'insurrection badoise de 1849, et vivait depuis ce moment Genve. Lorsque Lassalle fonda en 1863 l'Association gnrale des ouvriers allemands (Allgemeiner deutscher Arbeiterverein ). J.-Ph Becker avait adhr cette organisation ; mais il en sortit en 1865, quand Scheitwzer, le successeur de Lassalle, parut vouloir se mnager les bonnes grces de Bismarck.

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alors dans les runions de l'Internationale, et l'influence tait ceux qui savaient broder les plus belles phrases sur ce thme d'un vague si complaisant : Dieu, patrie, humanit, fraternit . Dans plus d'une localit, l'Internationale ne faisait qu'un avec le parti politique radical, et certaines personnalits ambitieuses cherchaient dj se faire d'elle un simple moyen d'arriver un emploi dans le gouvernement. la Chaux-de-Fonds, cependant, les radicaux, qui d'abord avaient patronn l'Internationale, s'aperurent bien vite qu'ils ne pourraient pas dominer et exploiter leur profit le mouvement ouvrier, et ils cherchrent l'touffer au berceau. Le National suisse, journal radical de la Chaux-de-Fonds, commena ds lors contre l'Internationale une guerre de calomnies et d'attaques personnelles. Il en fut autrement Genve, o les organes radicaux, la Suisse radicale et le Carillon , se montrrent, dans un but intress, sympathiques l'Internationale : ils comptaient sur elle pour rtablir le gouvernement de James Fazy, qui venait d'tre renvers. Coullery, en qui se personnifiait alors l'Internationale dans les cantons romands de la Suisse, dployait la plus grande activit pour la propagande. Il donnait meetings sur meetings, prchant de village en village l'union des travailleurs et la fraternit. Il voulut avoir un journal lui, et, n'ayant pu trouver d'imprimeur, il cra lui-mme une imprimerie la Chaux-deFonds. Le journal parut sous le titre de la Voix de l'Avenir ; son premier numro porte la date du 31 dcembre 1865. La Voix de l'Avenir , quoique fort mal rdige, et n'ayant d'autre programme qu'une sorte de no-christianisme humanitaire, trouva de nombreux lecteurs, non seulement en Suisse, mais en France. Il faut dire que c'tait ce moment presque le seul organe socialiste qui se publit en langue franaise 9.L'article 3 des Statuts provisoires de l'Internationale disait : En 1865 aura lieu en Belgique la runion d'un Congrs gnral . Mais le Conseil9

Il y en avait deux autres en Belgique, la Tribune du Peuple et la Libert.

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gnral dut reconnatre que la convocation d'un Congrs serait prmature en 1865, et qu'en outre la Belgique ne pourrait pas offrir l'hospitalit aux dlgus, cause de la loi sur les trangers que le gouvernement belge venait de faire voter. Au lieu d'un Congrs, on se contenta d'une simple Confrence, qui se runit Londres du 20 au 29 septembre 1865. Paris y fut reprsent par Tolain, Fribourg, Charles Limousin et Eugne Varlin ; Bruxelles par Csar De Paepe 10 ; Genve par le Franais Dupleix et l'Allemand J.-Ph. Becker ; les autres membres de la Confrence taient des Anglais, Odger, Cremer, Wheeler, Howell, Weston, etc., ou des trangers habitant Londres, Dupont, Vsinier, Lelubez, Hermann Jung, Karl Marx, Eccarius, Wolff, Bobrzinski, etc. La Confrence dcida que le premier Congrs aurait lieu Genve au printemps de 1866, et en arrta l'ordre du jour. Mais l'anne suivante, sur l'avis des Genevois, qui proposaient un ajournement, le Conseil gnral recula la date laquelle les dlgus devaient se runir, et fixa dfinitivement l'ouverture du Congrs au 3 septembre 1866.

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Prononcer De Ppe .

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II

Le premier Congrs gnral de l 'International e, Genve (3-8 septembre 1866).Voici ce que dit, du Congrs de Genve, le Mmoire de la Fdration jurassienne :

En septembre 1866 eut lieu Genve le premier Congrs gnral de l'Internationale. Presque toutes les Sections de la Suisse romande y furent reprsentes. Le compte-rendu que nous avons sous les yeux 11 ne donne pas la liste des dlgus ; nous citerons de mmoire, entre autres, Coullery pour la Chauxde-Fonds, Guillaume pour le Locle, Schwitzgubel pour Sonvillier, J.-Ph. Becker et Dupleix 12 pour Genve. Ce Congrs, dans lequel furent adopts les Statuts gnraux de l'Association, n'exera sur les Sections de la Suisse romande qu'une mdiocre influence. Les discussions furent presque entirement diriges par les mutuellistes parisiens, Tolain, Andr Murat, Fribourg, et, en dehors de l'adoption des statuts, le Congrs ne prit aucune dcision de relle importance. D'ailleurs, nous l'avons dit, ce moment-l, dans cette priode embryonnaire o l'Internationale se cherchait elle-mme, aucune des Sections de notre rgion n'avait encore conscience de la porte relle de l'acte qu'elles avaient accompli en crant l'Association internationale des travailleurs ; on ne concevait d'autre solution aux problmes conomiques que la coopration et les rformes lgislatives, et le programme de la Voix de l'Avenir exprimait assez fidlement les tendances gnrales des ouvriers suisses.J'allai au Congrs de Genve mes frais, muni d'un mandat de dlgu11

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C'tait la brochure Congrs ouvrier de l'Association internationale des travailleurs, tenu Genve du 3 au 8 septembre 1866, imprime Genve. Voir plus loin. Vieux rpublicain franais, relieur de profession.

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sign par Constant Meuron comme prsident de la Section du Locle, tout nouvellement fonde et qui ne comptait encore que cinq membres 13. Je n'avais pu obtenir du directeur de l'cole industrielle qu'un cong de deux jours ; j'arrivai Genve le lundi 3 septembre, avant midi ; je reus un billet de logement qui m'assura l'amicale hospitalit de M. Jules-Csar Ducommun, imprimeur 14 (frre d'lie Ducommun), chez qui je couchai une nuit ; et je dus repartir dj le mardi aprs-midi. Aprs mon retour, je rdigeai pour le Premier Mars , journal radical de Neuchtel, une correspondance que je datai de Genve, et que mon pre 15, directeur politique de ce journal, publia (le Premier Mars tait hebdomadaire et paraissait le dimanche 16) dans le numro du 9 septembre. La voici :

Congrs International des Travailleurs. (Correspondance particulire du Premier Mars .) Genve, mardi 4 septembre 1866. Monsieur le rdacteur, Je n'aime pas juger sur la foi d'autrui. J'ai donc voulu voir de mes propres yeux l'Association internationale des travailleurs l'uvre, et je me suis rendu au Congrs de13

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Ces cinq membres taient : Constant Meuron, deux professeurs de l'cole industrielle, mon collgue Placide Bise et moi, un jeune ouvrier rgleur de montres, Paul Debrot, et un jeune employ, Fritz Huguenin. Nous appartenions tous, naturellement, au parti radical. Bise, P. Debrot et F. Huguenin nous quittrent quand la Section eut pris, la fin de 1868, un caractre franchement socialiste et collectiviste. C'est l'imprimerie J.-C. Ducommun et G. Oettinger que fut imprim le Compte-rendu du Congrs. Mon pre tait membre du Conseil d'Etat (Conseil excutif) du canton de Neuchtel. En juin 1866, mon pre avait cr une petite imprimerie, la tte de laquelle il plaa son second fils, mon frre pun Georges (alors g de vingt ans), qui avait appris le mtier de typographe ; les fonds pour l'achat du premier matriel avaient t avancs mon pre par son ami le gologue Edouard Desor, et part deux hommes politiques appartenant au parti radical. Le Premier Mars, fond en 1865 dj, s'imprimait depuis le mois de juillet 1866 dans l'atelier de mon frre. Ce dtail explique comment j'eus l'ide d'envoyer ce journal une correspondance, que mon pre trouva tout naturel d'insrer : l'Internationale, ce moment, avait toutes les sympathies des radicaux avancs.

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Genve. J'ai assist, hier et aujourd'hui, toutes les runions des dlgus. Je vous raconterai fidlement ce que j'ai vu et entendu. Ce sont les Anglais qui ont conu les premiers l'ide de mettre en rapport entre eux les travailleurs de tous les pays civiliss 17. Un Comit form Londres a adress dans ce but un appel invitant tous les travailleurs, sans distinction d'opinion politique ou religieuse, entrer dans une association ayant pour but de rapprocher les classes laborieuses des diffrentes nations. Cet appel fut entendu jusqu'en Amrique, du vivant du Prsident Lincoln, qui tmoigna au Comit de Londres, par une lettre que je voudrais pouvoir reproduire ici, sa sympathie pour l'uvre entreprise. Des Sections se formrent de toutes parts. Aujourd'hui. les dlgus de ces Sections se runissent Genve, du 3 au 8 septembre, pour discuter les bases sur lesquelles l'Association internationale, qui n'a eu jusqu'ici qu'un caractre provisoire, devra tre dfinitivement constitue. Je ne vous parlerai pas de l'accueil fait par la population ouvrire de Genve aux dlgus, ni du cortge d'hier matin 18 : je ne l'ai pas vu. Je suis arriv hier juste temps pour m'asseoir la table du dner 19, ct d'un dlgu de Londres, qui je demande des nouvelles du mouvement en faveur de la rforme lectorale. Il m'apprend que ses amis et lui sont membres de la Ligue de la Reforme , que l'un deux en est mme le secrtaire gnral, et qu'ils ont t en partie les organisateurs du grand meeting de Hyde Park. Je m'informe auprs de mes voisins s'il y a dans l'assemble quelque notabilit politique ou scientifique : il n'y en a point, me dit-on ; mais les travailleurs sauront bien faire leur besogne tout seuls ; et, en effet, la dignit de leur17

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ce moment, nous ignorions jusqu' l'existence de Karl Marx. Je crois bien que ce n'est que l'anne suivante, au Congrs de Lausanne, que j'entendis parler de lui pour la premire fois, par Eccarius et Lessner. Ce cortge provoqua les railleries de certains journaux suisses. Au Locle, un dput radical au Grand-Conseil neuchtelois, Auguste Guyot-Lupold. dit Constant Meuron, dans l'intention de le vexer, qu'on n'avait vu au cortge et au Congrs que des tailleurs et des cordonniers . Le repas de midi, en Suisse.

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tenue et le srieux de leur langage me font bien augurer de la russite du Congrs. Aprs le dner, on se runit dans la grande salle de la brasserie Treiber (aux Eaux-Vives), qui est pavoise de drapeaux. Les dlgus sont au nombre de soixante environ : il y a l une demi-douzaine d'Anglais, qui sont les reprsentants de plus de vingt-cinq mille travailleurs, membres de l'Association ; une douzaine de dlgus de Paris, de Rouen et de Lyon 20 ; mais les dlgus allemands, et suisses surtout, forment la majorit de l'assemble. Au moment o l'on va entrer en sance, un incident se produit : quelques membres parisiens de l'Association internationale, non dlgus, anciens tudiants et ouvriers, tous jeunes gens, sont venus leurs frais pour assister au Congrs, et demandent tre admis prendre part aux dlibrations. Le droit de prendre la parole leur est accord, non sans observations de la part de quelques formalistes 21 ; puis on lit20 21

Il y en avait davantage, comme on le verra plus loin. J'ai retenu les noms de deux seulement de ces jeunes gens : Protot, tout jeune avocat, qui fut en 1871 membre de la Commune, et Alphonse Humbert, plus tard l'un des rdacteurs du Pre Duchne, et qui tait alors commis pharmacien chez Raspail. Fribourg (L'Association internationale des travailleurs, Paris , 1871, p. 48) dit que les autres taient Calavaz et Jeunesse, tudiants, et Lalourcet, menuisier ; Oscar Testut (L'Internationale , Paris, 1871, p. 125, note 1) ajoute le nom de Rey. Ils taient venus principalement pour protester contre les dlgus parisiens, auxquels ils reprochaient d'avoir des accointances, d'une part, avec le Palais Royal, d'autre part avec certains bourgeois rpublicains : on tait all, me dirent-ils dans mes entretiens avec eux, mendier de l'argent chez des hommes politiques, pour couvrir les frais de la dlgation au Congrs ; ils me citrent Jules Simon comme ayant donn vingt francs. Ce fut Protot qui prit la parole devant le Congrs, au nom de ses camarades ; il parla avec une extrme volubilit, et les dlgus non franais ne se rendirent pas bien compte de la nature des griefs qu'il exposait. Les dlgus parisiens, Murat, Fribourg, Tolain, voyaient en ces jeunes gens de simples politiciens, qui n'avaient pas compris le programme de l'Internationale, et qui cherchaient entraver le mouvement naissant, parce que ce mouvement, selon eux, dtournait les ouvriers de la politique rvolutionnaire. Tolain et ses collgues voulaient qu'on leur refust le droit de prendre part aux travaux du Congrs, et qu'on les traitt en adversaires. Murat me dit que ces tudiants taient des bavards de caf, qui ne savaient que caresser la grisette (textuel), et ne

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un prsident, et on fixe l'ordre du jour du lendemain. Comme je suis curieux de savoir ce que pensent les tudiants parisiens sur les questions politiques et sociales, la sance leve, je m'approche d'eux ; entre jeunes gens, la connaissance est vite faite, et nous causons cur ouvert. Ces messieurs appartiennent au groupe qui a convoqu et dirig le Congrs des tudiants de Lige, et qui a rdig la Rive gauche et Candide , courageux petits journaux promptement supprims par la police bonapartiste. Ils ne connaissaient la Suisse que par ou-dire ; aussi la vue de leur rve ralis, d'un peuple pratiquant leurs thories dmocratiques, les remplit-elle d'admiration et d'enthousiasme ; ils n'en croient pas leurs yeux ; le moindre dtail les frappe d'tonnement et de joie. L'un d'eux me raconte avec ravissement qu'il vient de lire la porte d'un jardin public ces mots : Ce jardin, tant proprit publique, est mis sous la sauvegar de de tous les citoyens . Comme c'est beau ! s'crie-t-il. Toute la Rpublique est dans cette inscription. Ah ! quand serons-nous aussi heureux que vous ? Toute la journe d'aujourd'hui mardi a t consacre l'audition du rapport de gestion du Conseil gnral de Londres, et de mmoires de diffrentes Sections sur les questions de principe qui doivent tre discutes par le Congrs, telles que les relations du capital et du travail, le rle de la femme dans la socit, les armes permanentes, l'avenir des associations, etc. Ces mmoires, qui rsumaient franchement les thoriescomprenaient rien aux questions ouvrires. Je trouvai, en effet, en causant avec ces jeunes gens, qui se rattachaient au groupe blanquiste, que leurs ides taient passablement confuses. Mais, tout en me rangeant du ct de ceux qui voulaient constituer une organisation ouvrire, je pensais qu'ils avaient tort de rejeter la collaboration de la jeunesse rvolutionnaire. Aprs une trs longue discussion, o les dlgus suisses, en particulier, se montrrent moins exclusifs que Tolain et ses amis, la majorit dcida que Protot et ses compagnons, sans tre admis avec voix dlibrative, pourraient nanmoins obtenir la parole dans les dbats du Congrs ; mais ils n'usrent pas de cette tolrance, et se retirrent. Ils revinrent dans la sance du jeudi aprs-midi (je n'tais plus Genve) ; cette fois ils firent du tapage, et le Congrs les expulsa.

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professes par l'Association des travailleurs, je les ai couts d'un bout l'autre avec la plus grande attention, et j'ai t frapp de la modration, de l'esprit pratique, de l'absence complte de vues utopiques, qui les caractrisaient. Une question, entre autres, m'intressait : on avait dit que l'Association internationale prchait la soi-disant mancipation de la femme, l'abolition de la famille ; je dsirais entendre une explication catgorique ce sujet. Or, voici les conclusions du mmoire sur le rle de la femme dans la socit lu par un dlgu de Paris : La famille est le fondement de la socit ; la place de la femme est au foyer domestique ; non seulement nous ne voulons pas qu'elle l'abandonne pour siger dans une assemble politique ou prorer dans un club, mais nous ne voudrions pas mme, s'il tait possible, qu'elle le quittt pour s'occuper d'un travail industriel. L'assemble a t unanime tmoigner par ses applaudissements qu'elle partageait cette manire de voir. Je suis oblig de couper court cette correspondance, en vous renvoyant aux journaux genevois pour d'autres dtails. Pour rsumer mon impression en terminant, je crois que l'Association internationale peut rendre de grands services aux travailleurs, en leur apprenant se connatre entre eux, et en veillant en eux le got de l'tude des questions sociales qui les touchent de prs ; et je souhaite que ce premier Congrs produise le rsultat moral que semble promettre l'ouverture de ses dlibrations. Agrez, etc.Il existe un compte-rendu du Congrs de Genve, publi en franais Genve et rdig par le Polonais Card 22. Ce Compte-rendu 23 est trsCard est le pseudonyme de Czwierzakiewicz, rfugi polonais, qui fut l'un des premiers organisateurs de l'Internationale Genve. 23 Congrs ouvrier de l'Association internationale des travailleurs, tenu Genve du 5 au 8 septembre 1866, Genve, imprimerie J.C. Ducommun et G. Oetlinger, route de Carouge, in-8 de 30 pages. Le Conseil gnral de Londres avait t charg de publier un compte-rendu officiel du Congrs. Le rapport prsent par le Conseil gnral au Congrs de Lausanne, en 1867, dit que ce compte-rendu parut, en mars 1867, dans le Courrier international ,22

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incomplet : il ne donne pas mme la liste des dlgus, et on n'y trouve pas, sauf une ou deux exceptions, le texte des rsolutions votes. Il nous apprend, toutefois, que les dlgus taient au nombre de soixante, dont quarante-cinq appartenant lInternationale, et quinze des associations ouvrires non affilies. Les quarante-cinq dlgus de lInternationale se rpartissaient ainsi : 5 dlgus reprsentant le Conseil gnral ; lun deux reprsentait en outre la Section franaise de Londres ; reprsentant quatre Sections de France ; reprsentant quatre Sections dAllemagne ; reprsentant quinze Sections de la Suisse.

7 3 20 45 dlgus.

Les quinze dlgus reprsentant des socits ouvrires non affilies lInternationale se rpartissaient ainsi : 2 dlgus de deux socits ouvrires de Londres ; 13 de onze socits ouvrires de Genve ou dautres villes suisses. 15 dlgus. On trouve mentionns, au cours du Compte-rendu de Card, les noms dun certain nombre de dlgus, avec lindication des Sections ou socits quils reprsentaient. Il ma t possible de reconstituer en grande partie la liste des Sections et de leurs reprsentants. Les cinq dlgus du Conseil gnral de Londres taient Eccarius, Hermann Jung, Cremer, Odger, et Eugne Dupont ; Dupont reprsentait en outre la branche franaise de Londres. Les Sections de France taient celle de Paris, celle de Rouen, celle de Lyon, et celle dune quatrime ville dont jignore le nom. Nous avons les noms de seize dlgus franais sur dix-sept. Les dlgus de la Section de Paris taient au nombre de onze : Bourdon, Camlinat, Chemal, Cultin, Fribourg, Guiard, Malon, Murat, Perrachon, Tolain, Varlin. Aubry reprsentait la Section de Rouen. La Section de Lyon tait reprsente par Honor Richard, Adrien Schettel, Baudy et Scrtant 24.journal publi Londres par le citoyen Collet ; il ne m'a pas t possible de me le procurer. 24 Les noms de ces seize dlgus se trouvent au bas du Mmoire franais des dlgus au Congrs de Genve , imprim Bruxelles en 1866.

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Nous avons au complet les noms des quatre Sections dAllemagne et de leurs trois dlgus : Moll reprsentait les Sections de Cologne et de Solingen, Mller celle de Stuttgart, Btter celle de Magdebourg 25. Pour la Suisse, nous navons que les noms de douze dlgus (sur vingt) et de dix Sections (sur quinze) ; ce sont : Dupleix et Card, pour la Section franaise de Genve ; J.-Ph. Becker et Heidt, pour la Section allemande de Genve ; Cornaz, pour la Section de Lausanne ; Bocquin, pour la Section de Montreux ; Pierre Coullery et Jules Vuilleumier, pour la Section franaise de la Chaux-de-Fonds ; Peter, pour la Section allemande de la Chaux-de-Fonds ; James Guillaume, pour la Section du Locle ; Adhmar Schwitzgubel, pour la Section de Sonvillier ; Karl Brkly, pour les Sections de Zurich et de Wetzikon. Quant aux quinze reprsentants des treize socits ouvrires non affilies lInternationale (deux socits ouvrires de Londres et onze socits ouvrires de la Suisse), nous nen connaissons que deux : Schlaifer, dlgu de la Socit des ouvriers allemands de Lausanne, et Heppenwrth, dlgu de la Socit des ouvriers allemands de Genve. Le prsident du Congrs fut Hermann Jung, horloger suisse (du Jura bernois) tabli Londres, et membre du Conseil gnral, o il remplissait les fonctions de secrtaire correspondant pour la Suisse ; les viceprsidents, Dupleix et Becker ; les secrtaires, Coullery, Gard, Bourdon et Moll. L'ordre du jour du Congrs comprenait onze questions, dont j'emprunte la liste une brochure publie Bruxelles en 1866, peu de temps avant le Congrs, par la rdaction de la Rive gauche 26. Cette brochure (dont il sera reparl au chap. VII), contenant une traduction de l'Address de Karl Marx et des Provisional Rules, faite par Charles Longuet, est intitule : Manifeste de l'Association internationale des travailleurs, suivi du Rglement provisoire (Prix : 10 centimes ; Bruxelles, Alliance typographique, M. J. Poot et Compagnie, rue aux Choux, 33 1; 1866 ; 20 pages in 32). Voici cette liste : 1 Combinaison des efforts, par le moyen de l'Association, pour la lutte du travail contre le capital ; 2 Rduction des heures de travail ; Cest par erreur que Fribourg affirme (p. 50) quau Congrs de Genve lAllemagne ne fut pas reprsente. Franz Mehring (Geschichte der deutschen Sozialdemokratie , 2e d., t. III, p. 264) dit que sur les soixante dlgus il y avait trois Allemands, sept Anglais, et sept Franais. Pour trouver sept Anglais, il faut comprendre dans ce nombre le Suisse Jung, lAllemand Eccarius et le Franais Dupont. Les dlgus de France taient dix-sept et non pas sept. 26 Il en existe un exemplaire au Muse social, Paris, sous le n 4682 du catalogue.25

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3 Travail des femmes et des enfants ; 4 Socits ouvrires (Trades Unions), leur pass, leur prsent, leur avenir ; 5 Travail coopratif ; 6 Impts directs et indirects ; 7 Institution internationale du crdit ; 8 De la ncessit d'anantir l'influence russe en Europe par l'application du droit des peuples de disposer d'eux-mmes et la reconstitution d'une Pologne sur des bases dmocratiques et sociales ; 9 Des armes permanentes dans leurs rapports avec la production ; 10 Des ides religieuses, leur influence sur le mouvement social, politique et intellectuel ; 11 tablissement des socits de secours mutuels. Appui moral et matriel accord aux orphelins de l'Association. Des diverses rsolutions votes sur les onze questions, une seule, dont le Compte rendu donne le texte (p. 15), vaut d'tre releve ici ; il s'agit de l'attitude prendre par l'Internationale dans les diffrentes luttes entre le capital et le travail (premire question). Voici cette rsolution :

Le Congrs dclare que, dans l'tat actuel de l'industrie, qui est la guerre, on doit se prter une aide mutuelle pour la dfense des salaires. Mais il est de son devoir de dclarer en mme temps qu'il y a un but plus lev atteindre : la suppression du salariat. Il recommande l'tude des moyens conomiques bass sur la justice et la rciprocit. L'acte important du Congrs de Genve, ce fut l'adoption des Statuts dfinitifs de l'Internationale. Les Statuts provisoires, Provisional Rules, rdigs en anglais en 1864, avaient t aussitt traduits en franais Paris par un ami sr 27 ; et le 8 janvier 1865, les deux premiers exemplaires des statuts imprims [en franais] avaient t envoys sous pli, l'un M. le prfet de police, l'autre M. le ministre de l'intrieur 28. Le Congrs de Genve nomma, le mardi 4 septembre 1866, dans la sance du matin, une Commission compose de treize membres, charge d'laborer les nouveaux statuts de l'Association internationale, projet qui ensuite sera soumis la discussion publique 29 . NaturellementJe n'ai pu savoir qui fut ce traducteur. Fribourg, L'Association internationale des travailleurs , p. 12. Ces statuts franais forment une feuille imprime de 3 pages, in-8, intitule : Congrs ouvrier. Association internationale des travailleurs. Rglement provisoire , Paris, imprimerie douard Blot. Je n'ai pas vu cette raret bibliographique qui existe dans la collection de Max Nettlau. 29 Congrs ouvrier de l'Association internationale des travailleurs, tenu Genve du 3 au 8 septembre 1866, p. 11.27 28

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la commission devait prendre pour base de son travail les Statuts provisoires de 1864. Ds le lendemain matin mercredi, cette commission prsenta au Congrs le rsultat de son travail :

La sance de mercredi, troisime jour du Congrs, est sacrifie la discussion des statuts. L'assemble approuve presque l'unanimit les modifications proposes par la commission 30. Une question seulement donne lieu une discussion plus vive, c'est celle de dterminer qui peut faire partie de l'Association ; ce qu'on doit entendre par ce mot travailleur ; si les ouvriers de la pense doivent tre admis. Les dlgus anglais penchent pour cette dernire opinion. Les Franais soutiennent le contraire. Ils font valoir les conditions des deux ordres du travail qui sont diffrentes, le danger qu'il y aurait laisser envahir l'Association par des ambitieux, par des hommes de parti qui voudraient en faire un instrument dans leur propre but tranger l'Association. M. Vuilleumier, dlgu de la Section de la Chaux-de-Fonds, proteste avec chaleur contre cette exclusion. Il fait observer que ce sont justement les hommes de la pense qui donnent l'initiative au mouvement ; il cite M. le docteur Coullery, et profite de l'occasion pour rendre hommage ce qu'il a fait pour la Section de la Chaux-de-Fonds. Les dlgus allemands parlent avec la mme force contre cette exclusion, qui serait en mme temps un genre de condamnation de la science, comme si l'ouvrier n'en tait digne ou ne savait l'apprcier. L'opposition des dlgus franais tombe. Les statuts prsents par la commission sont adopts par l'assemble dans la forme suivante (suit le texte des statuts 31).Un rapport sur le Congrs de Genve a t publi en anglais dans le journal the Commonwealth de Londres, qui servait d'organe au Conseil gnral. Ce rapport contient ce qui suit relativement l'adoption des statuts :30 31

C'est--dire les modifications au texte des Statuts provisoires. Congrs ouvrier , etc., pages 11-12.

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Une commission compose de trois Franais, de trois Anglais, de deux Suisses et de quatre Allemands 32 fut nomme pour rdiger les Statuts gnraux, sur la base de ceux de la Confrence provisoire de Londres (25 septembre 1865 33. Cela fut fait, quoique pas sans de chaudes discussions, en deux heures, et dans la sance de l'aprs-midi ils furent finalement crits en allemand, en franais et en anglais 34, puis, aprs de longs dbats, ils furent adopts 35. Dans la mme sance, une commission de quatre membres (MM. Coullery, Eccarius, Brkly et Fribourg) fut nomme pour rdiger un rglement destin former un appendix des statuts gnraux 36.On vient de voir que le projet de Statuts gnraux fut rdig par la commission en trois langues. En tte des statuts, elle avait plac, sans changement aucun, les considrants qui formaient le prambule des Statuts provisoires. Il s'tait produit, au sujet de ces considrants, une chose assez singulire : lorsque le texte anglais avait t traduit en franais Paris, la fin de 1864, quelques modifications avaient t introduites et quelques suppressions avaient t faites par le traducteur dans les trois premiers alinas. Ces modifications et suppressions donnrent lieu alors, parat-il, une observation prsente par le Conseil gnral au bureau de Paris ; mais les Parisiens fournirent une explication qui fut trouve suffisante, et les choses restrent en ltat 37. Au CongrsCela ne fait que douze membres ; le Compte-rendu de Card dit treize. Il et fallu dire : sur la base des Statuts provisoires qu'avait labors la commission lue par le meeting de Saint Martin's Hall (28 septembre 1864) . 34 Il s'agit d'une sance de la commission, le mardi aprs-midi. 35 Par le Congrs, le mercredi, dans la sance du matin. 36 Commonwealth du 26 janvier 1867. 37 Une Communication prive du Conseil gnral au Comit fdral romand, du 1er janvier 1870, qu'on trouvera dans la Deuxime Partie, dit que les modifications faites Paris furent dues aux misres de la situation politique . Dans une publication faite par ordre de la Confrence de Londres de septembre 1871 (Statuts gnraux et rglements (administratifs de l'Association internationale des travailleurs , dition officielle, rvise par le Conseil gnral, Londres, 1871), on lit (p. 17) au sujet de cette traduction de 1864 : Le Comit de Paris, d'o mana cette traduction, avait introduit des changements importants dans les considrants des statuts. Sur32 33

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de Genve, tandis que les dlgus anglais votaient les considrants sur le texte anglais de 1864, les dlgus de la France et de la Suisse franaise les votrent sur le texte parisien 38. Nul ne semblait avoir attach dimportance, ce moment, aux lgres diffrences que prsentaient ces deux textes ; et je dois dire que, quant mes amis des Sections suisses et moi-mme, nous ignormes, jusquen 1870 ou 1871, que la version anglaise des considrants diffrait sur quelques points de la version franaise. La besogne de la commission consista dans la rdaction dfinitive des articles des statuts ; et son travail apporta des changements assez considrables aux dix articles des Statuts provisoires ; mais ici la rdaction anglaise et la rdaction franaise, faites en commun, ne prsentent pas de diffrence entre elles. Je donne ci-aprs le texte des Statuts gnraux adopts par le Congrs, prcds des considrants. Les considrants, je viens de le dire, sont ceux de 1864 et nont pas subi de modifications ; mais comme le texte anglais 39 et le texte franais offrent des diffrences, je les reproduis tous deux en regard lun de lautre ; entre les lignes du texte anglais, je place la version donne en 1866, antrieurement au Congrs de Genve, par la brochure de la Rive gauche (Bruxelles) ; cette version nest pas une traduction littrale : elle suit le texte parisien, se bornant le rectifier ou le complter dans les endroits o il sloigne le plus du texte anglais 40. Pour les articles des statuts, je donne le texte anglais des Statuts provisoires, avec la version de la Rive gauche entre les lignes, le texte parisien de 1864, et le texte franais dfinitif adopt au Congrs de Genve.

l'interpellation du Conseil gnral, le Comit les reprsenta comme des changements ncessits par l'tat politique de la France. De plus, faute d'une connaissance suffisante de l'anglais, plusieurs paragraphes des statuts avaient t mal traduits. 38 Les dlgus de langue allemande, videmment, les votrent sur la traduction allemande des Statuts provisoires, imprime par les soins du Conseil gnral, et qui avait t rpandu de nombreux exemplaires en Allemagne et en Suisse. 39 Je n'ai pas parler du texte allemand. puisqu'il tait la traduction littrale, faite sans doute par Marx lui-mme, du texte anglais. 40 La version de Longuet tait reste inconnue en France et en Suisse : voir ce sujet le chapitre VII.

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PRAMBULE 41 (1864-1866.)Texte anglais des Provisional Texte parisien de 1864, adopt Rules , 1864, et version de par le Congrs de Genve, 1866. Longuet, 1866. Considering : Considrant : That the mancipation of the working Que Lmancipation des travailleurs classes must be conquerred by the workdoit tre luvre des travailing classes themselves ; that the struggle leurs eux-mmes ; que les efforts des for the emancipation of the working clas41

Considrant : Que lmancipation des travailleurs doit tre luvre des travailleurs euxmmes ; que les efforts des travailleurs pour conqurir leur mancipation ne doivent pas tendre constituer de nouveaux privilges, mais tablir pour tous les mmes droits et les mmes devoirs ;

En ce qui concerne le texte franais, on le trouve comme texte provisoire dans la dfense prsente par Murat, lors du premier procs intent l'Internationale parisienne : Murat (Procs de l'Association internationale des travailleurs. Bureau de Paris , 1868. p. 45) donna lecture, le 22 avril 1868, du texte imprim Paris en 1864-1865 ; et, comme texte dfinitif, dans la brochure Congrs ouvrier , etc., Genve, 1866 (p. 12) ; dans la dfense de Tolain (6 mars 1868) dans le mme procs de Paris, o il donna lecture du Prambule des statuts adopts Genve (p. 14) ; dans le journal l'galit, de Genve, numro du 8 mai 1869 ; dans le carnet, imprim l'Association gnrale typographique, 19, rue du Faubourg Saint-Denis, qui tait dlivr Paris aux adhrents de l'Internationale la fin de 1869 (aprs le Congrs de Ble) et au commencement de 1870 dans le livre de E.-E. Fribourg, L'Association internationale des travailleurs , Paris, 1871, p. 14. J'indiquerai en note les lgres variantes que prsentent parfois ces diffrentes sources. Le texte anglais est extrait de la brochure Address and Provisional Rules of the International Working Men's Association , Londres, 1864 : j'en dois la communication l'obligeance de mon co-dlgu au Congrs de Lausanne en 1867, Friedrich Lessner, qui a bien voulu, a ma demande, m'en envoyer une copie faite de sa main (mai 1905), et auquel j'adresse ici mes remerciements. Il m'avait t impossible de trouver en France un exemplaire de cette brochure. Le texte franais en italiques, plac au-dessous du texte anglais, est, comme je l'ai dj dit, la version de Longuet.

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travailleurs pour conqurir leur mancises means not a struggle for class privipation ne doivent pas tendre constituer lges and monopolies, but for equal de nouveaux privilges, mais tablir rights and duties, and the abolition of all pour tous des droits et des devoirs gaux et class rule ; anantir la domination de toute classe ;That the economical subjection of the Que lassujettissement conomique man of labour to the monopolizer of the du travailleur aux dtenteurs des moyens means of labour, that is the sources of de travail, cest--dire des sources de la life, lies at the bottom of servitude in all vie, est la cause premire de sa servitude its forms, of all social misery, mental politique, morale, matrielle ; dgradation, and political dependence ; That the economical mancipation of Que lmancipation conomique des the working classes is therefore the great travailleurs est consquemment le grand end to which every political movement Que lassujettissement du travailleur au capital est la source de toute servitude politique, morale et matrielle ;

Que, pour cette raison, lmancipation conomique des travailleurs est le grand but auquel doit tre subordonn tout mouvement politique ;

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but auquel tout mouvement politique ought to be subordinate as a means ; doit tre subordonn comme moyen ; That all efforts aiming at that great Que tous les efforts faits end have hitherto failed from the want of jusquici ont chou faute de solidarity between the manifold divisions solidarit entre les ouvriers des diverses of labour in each country, and from the professions dans chaque pays, et dune absence of a fraternal bond of union beunion fraternelle entre tween the working classes of diffrent counles travailleurs des diverses contries ; tres ;That the mancipation of labour is Que lmancipation du travail ntant neither a local, nor a national, but a social un problme ni local ni national, mais problem, embracing all countries in which social, embrasse tous les pays dans lesmodern society exists, and depending for quels la vie moderne existe, et ncessite its solution on the concurrence,42

Que tous les efforts faits jusquici 42 ont chou faute de solidarit entre les ouvriers des diverses professions dans chaque pays, et dune union fraternelle entre les travailleurs des diverses contres ;

Que lmancipation des travailleurs nest pas un problme simplement local ou national 43, quau contraire ce problme intresse toutes les nations civilises, sa solution tant ncessairement subordonne leur concours thorique et pratique ;

Dans le texte lu par Murat, le mot jusquici manque ; cest probablement une faute dimpression. 43 On ne voit pas pourquoi le traducteur parisien a supprim les mots mais un problme social ; il nen a peut-tre pas saisi la porte.

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practical pour sa solution leur concours thorique and theoretical, of the most advanced et pratique ; countries That the prsent revival of the workQue le mouvement qui reparait parmi ing classes in the most industrious counles ouvriers des pays les plus industrieux tries of Europe, while it raises a de lEurope, en faisant natre de nounew hope, gives solemn warning velles esprances, donne un solennel averagainst a relapse into the tissement de ne pas retomber dans les old errors and calls for the immdiate comvieilles erreurs, et les pousse combiner bination of the still disconnected immdiatement leurs efforts encore movements ; isols ; For these reasons Par ces raisons : Que le mouvement qui saccomplit parmi les ouvriers des pays les plus industrieux de lEurope, en faisant natre de nouvelles esprances, donne un solennel avertissement de ne pas retomber dans les vieilles erreurs, et conseille de combiner tous les efforts encore isols :

Par ces raisons :

Texte anglais des Texte des statuts Provisional Rules , provisoires (Paris, 1864, et version de 1864). Longuet, 1866.

Textes des statuts dfinitifs (Genve, 1866).

The undersigned memLes soussigns, mem-

Les soussigns, membres du Conseil lu par lassemble tenue le 28 septembre 1864, Saint Martins Hall, Londres,

Le Congrs de lAssociation internationale 45 des travailleurs, tenu Genve le 3 septembre

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bers of the Committee, holdbres du Conseil lu ing its powers by resolution of the public meeting par lassemble tenue held on September 28 th,1864, le 28 septembre 1864, at Saint Martins Hall, Lon Saint Martins Hall, London, have taken the steps dres, ont pris les mesures necessary for founding the ncessaires pour fonder International Working Mens lAssociation internationale Association. des travailleurs. They dclare that this Ils dclarent que cette International Association Association internationale, and all societies and ainsi que toutes les socits individuals adhering to it ou individus y adhrant, will acknowledge truth, reconnatront comme dejustice, and morality, as vant tre la base de leur

ont pris les mesures ncessaires pour fonder lAssociation internationale des travailleurs. Ils dclarent que cette Association internationale, ainsi que toutes les socits ou individus y adhrant, reconnatront comme devant tre la base de leur conduite envers tous les hommes la Vrit, la Justice, la Morale, sans distinction de couleur, de croyance ou de nationalit.

1866, dclare que cette Association, ainsi que toutes les socits ou individus y adhrant, reconnatront comme devant tre la base de leur conduite envers tous les hommes : la Vrit, la Justice, la Morale 46 sans distinction de couleur, de croyance ou de nationalit.

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the basis of their conduct conduite envers tous les towards each other, and hommes : la Vrit, la Jus towards all men, without tice, la Morale, sans distincregard to colour, creed tion de couleur, de croyance or nationality 44 ; ou de nationalit. They hold it the duty of a Ils considrent comme man to claim the rights of a un devoir de rclamer man and a citizen, not only44

Ils considrent comme un devoir de rclamer non seulement pour eux les droits dhomme et de citoyen, mais encore pour quiconque accomplit ses devoirs.

Le Congrs considre comme un devoir de rclamer non seulement pour les membres de lAssociation les droits dhomme et de citoyen 47 mais encore pour

Il est de tradition de prtendre que Marx se raillait des ides de morale et de justice, quil les considrait comme des chimres idalistes : et cest lui pourtant qui a crit cette phrase. Ce paragraphe des considrants prendra un caractre moins vague et moins abstrait, et paratra plus raliste , si on le rapproche dun passage du Manifeste de 1864, crit au mme moment. Les vnements dAmrique et ceux de Russie, y est-il dit, ont appris aux travailleurs quil leur fallait se mettre au courant des mystres de la politique internationale, surveiller la conduite diplomatique de leurs gouvernements respectifs, la combattre, au besoin, par tous les moyens en leur pouvoir, et enfin, lorsquils seraient impuissants rien empcher, sentendre pour une protestation commune, et revendiquer les lois de la morale et de la justice, qui doivent gouverner les relations des individus , comme la rgle suprme des rapports entre les nations . On comprend, par ce rapprochement, quelle proccupation spciale rpondait cette proccupation solennelle, que lInternationale et ses adhrents reconnatraient la Vrit, la Justice et la Morale comme base de leur conduite envers tous les hommes. 45 Aprs le mot internationale , Fribourg supprime les mots des travailleurs, tenu Genve le 3 septembre 1866 . 46 Tolain et le carnet parisien font une transposition dans la phrase, et placent les mots la Vrit, la Justice, la Morale entre le mot reconnatront et le mot comme . 47 Tolain, lgalit , et Fribourg donnent : les droits de lhomme et du citoyen : le carnet parien : les droits de lhomme et de citoyen .

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pour tous les droits Pas de devoirs sans for himself but for every droits, pas de droits sans dhomme et de citoyen. devoirs. man who does his duty. No Pas de devoirs sans rights without duties, no droits. duties without rights. And in this spirit they Cest dans cet esprit quils have drawn up the followont rdig le rglement ing provisional rules of the provisoire de lAssociaInternational Association. tion internationale. Cest dans cet esprit quils ont rdig le rglement provisoire de lAssociation internationale

quiconque accomplit ses devoirs. Pas de devoirs sans droits, pas de droits sans devoirs 48.

Cest dans cet esprit 49 que le Congrs a adopt dfinitivement les suivants statuts de lAssociation internationale des travailleurs.

48 49

Tolain : Pas de droits sans devoirs, pas de devoirs sans droits . Tolain et le carnet parisien : dans ce but .

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STATUTS1. This association ART. 1er. Une association is established to afford a est tablie pour procurer central mdium of communun point central de commucation and co-operation benication et de coopration tween Working Mens Socieentre les ouvriers ties existing in different coundes diffrents pays tries and aiming at the same aspirant au mme but, saend : vis., the protection, voir : le concours mutuel, advancement, and complete le progrs et le complet afemancipation of the working franchissement de la classe classes. ouvrire. 2. The name of the ART. 2. Le nom de cette Society shall be : The InART. 1er. Une association est tablie pour procurer un point central de communication et de coopration entre les ouvriers des diffrents pays aspirant au mme but, savoir : le concours mutuel, le progrs et le complet affranchissement de la classe ouvrire, ART 1er. Une association est tablie 55 pour procurer un point central de communication et de coopration entre les ouvriers des diffrents pays aspirant au mme but, savoir : le concours mutuel, le progrs et le complet affranchissement de la classe ouvrire.

ART. 2. Le nom de cette association sera : Association internationale des

ART 2. Le nom de cette association sera 56 Association internationale des

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association sera : Associaternational Working Mens tion internationale des Association . Travailleurs. 3. In 1865 there shall ART. 3. En 1866 50 aura meet in Belgium a general lieu la runion dun Working Mens Congress, conCongrs gnral. sisting of reprsentatives of such working mens societies as may have joined the International Association. The Congress will have to proCe Congrs devra faire conclaim before Europe the natre lEurope les comcommon aspirations of the munes aspirations des ouworking classes, dcide on vriers ; arrter le rglement the dfinitive rules of the dfinitif de lAssociation50

travailleurs.

travailleurs

57

.

ART. 3. En 1865 aura lieu en Belgique la runion dun Congrs gnral. Ce Congrs devra faire connatre lEurope les communes aspirations des ouvriers ; arrter le rglement dfinitif de lAssociation internationale ; examiner les meilleurs moyens pour assurer le succs de son travail, et lire le Conseil gnral de lAssociation. Le Congrs se runira une fois lan.

ART. 3. Le Conseil gnral se composera douvriers 58 reprsentant les diffrentes nations faisant partie de lAssociation internationale. Il prendra dans son sein, selon les besoins de lAssociation, les membres du bureau, tels que prsident, secrtaire gnral, trsorier, et secrtaires particuliers 59 pour 60 diffrents pays. Tous les ans, le Congrs runi indiquera le sige du Conseil central 61, nommera ses membres, et choisira le lieu de la prochaine runion. lpoque fixe par le Congrs, et sans quil soit ncessaire dune convocation spciale, les dlgus se runiront de plein droit aux lieu et jour dsigns. En cas dimpossibilit 62, le Conseil central 63 pourra changer le lieu du Congrs, sans en changer 64 toutefois la date.

La version de Longuet a naturellement remplac la date de 1865 par celle de 1866. et supprim les mots en Belgique , puisquelle a t publie en 1866, peu avant le Congrs de Genve.

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International Association, internationale ; examiner consider the means required les meilleurs moyens pour for its successful working, assurer le succs de son traand appoint the Central Counvail, et lire le Conseil Central cil of the Association. The de lAssociation. Le general Congress is to meet Congrs se runira une once a year. fois lan. 4. The Central CounART. 4. Le Conseil Cencil shall sit in London, and tral sigera Londres et se consist of workingmen becomposera douvriers reprlonging to the diffrent sentant les diffrentes nacountries represented in the tions faisant partie de lAsInternational Association. It sociation internationale.

ART. 4. Le Conseil gnral sigera Londres et se composera douvriers reprsentant les diffrentes nations faisant partie de lAssociation internationale. Il prendra dans son sein, selon les besoins de lAssociation, les membres du bureau, tels que prsident, secrtaire gnral, trsorier, et secrtaires particuliers pour les diffrents pays

ART. 4. chaque Congrs annuel, le Conseil gnral fera un rapport public des travaux de lanne. En cas durgence il pourra convoquer le Congrs avant le terme fix.

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Il shall from its own members prendra dans son sein, selon elect the officers necessary les besoins de lAssociation, for the transaction of busiles membres du bureau, tels ness, such as a prsident, a que prsident, secrtaire treasurer, a general secregenral, trsorier, et secrtary, corresponding secretaires particuliers pour les taries for the diffrent coundiffrents pays. tries, etc. 5. On its annual meetART. 5. chaque Congrs ings, the general Congress annuel, le Conseil gnral shall receive a public account fera un rapport public des of the annual transactions travaux de lanne. of the Central Council.Art. 5. chaque Congrs annuel, le Conseil gnral fera un rapport public des travaux de lanne. En cas durgence, il pourra convoquer le Congrs avant le terme fix. ART. 5. Le Conseil gnral tablira des relations avec les diffrentes associations ouvrires, de telle sorte que les ouvriers de chaque pays soient constamment au courant des mouvements de leur classe dans les autres pays ; quune enqute sur ltat social soit faite simultanment et dans un mme esprit ; que les

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The Central Council, yearly appointed by the Congress, shall have power to add to the number of its members 51 In cases of urgency, it may En cas durgence, il pourconvoke the general Conra convoquer le Congrs gress before the regular term. avant le terme fix.

questions proposes par une socit, et dont la discussion est dun intrt gnral, soient examines par toutes, et que lorsqu'une ide pratique ou une difficult internationale rclamerait l'action de l'Association, celle-ci puisse agir d'une manire uniforme. Lorsque cela lui semblera ncessaire, le Conseil gnral prendra l'initiative des propositions soumettre aux socits locales ou nationales.

On voit que cette phrase du texte anglais des Statuts provisoires, qui donnait au Conseil gnral le droit de sadjoindre des membres, a t omise non seulement dans le texte parisien de 1864, mais aussi dans la version de la Rive gauche en 1866. Le texte franais des Statuts dfinitifs vots Genve lomet galement. Par contre, le texte franais publi en 1867 par le Conseil gnral a rtabli la phrase supprime, on la plaant dans larticle 3 : le Conseil a cru pouvoir faire cette addition parce quune rsolution spciale vote Lausanne le 6 septembre 1867 lavait autoris sadjoindre de nouveaux membres, sil le trouvait ncessaire . 64 Le texte publi par le Conseil gnral en 1867 dit reculer au lieu de changer , ce qui est plus clair et plus logique ; lventualit laquelle les statuts ont voulu parer, cest celle dun retard que le Conseil gnral pourrait tre tent dapporter louverture du Congrs. 63 Carnet parisien et Fribourg : Conseil gnral . 62 Carnet parisien : En cas de force majeure . 61 Carnet parisien et Fribourg : Conseil gnral au lieu de Conseil central . 60 Le carnet parisien, aprs pour , ajoute les . 59 Fribourg : secrtaire particulier (au singulier). 58 Dans le carnet parisien, les six premiers mots de larticle sont remplacs par ceux-ci : Il est tabli un Conseil gnral se composant de travailleurs... 57 Tolain na pas lu les statuts au tribunal au-del de larticle 2. 55 Tolain et le carnet parisien : constitue . 56 Tolain et le carnet parisien : est .51

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Il publiera un bulletin pour faciliter ses communications avec les Sections 65. 6. The Central Council ART. 6. Le Conseil gnshall form an international ral tablira des relations agency between the different entre les diffrentes associaco-operating associations : tions douvriers, de telle so that the working men in sorte que les ouvriers de one country be constantly chaque pays soient constaminformed of the movement au courant des mouments of their class in every vements de leur classe dans other country ; that an inquiles autres pays ; quune enry into the social state of the different countries of Europe qute sur ltat social soit be made simultaneously, and faite simultanment et ART. 6. Le Conseil gnral tablira des relations avec les diffrentes associations douvriers, de telle sorte que les ouvriers de chaque pays soient constamment au courant des mouvements de leur classe dans les autres pays ; quune enqute sur ltat social soit faite simultanment et dans un mme esprit ; que les questions proposes par une socit, et dont la discussion est dun intrt gnral, soient examines par toutes, et que lorsqu'une ide pratique ou une difficult internationale rclamerait l'action de l'Association, celle-ci puisse agir d'une manire uniforme. Lorsque cela lui semblera ncessaire, le Conseil gnral prendra l'initiative des propositions soumettre aux socits locales ou nationales. ART. 6. Puisque le succs du mouvement ouvrier ne peut tre assur dans chaque pays que par la force rsultant de l'union et de l'association ; que, d'autre part, l'utilit du Conseil gnral dpend de ses rapports avec les socits ouvrires, soit nationales, soit locales, les membres de l'Association internationale devront faire tous leurs efforts, chacun dans son 66 pays, pour runir en une association nationale les diverses socits ouvrires existantes. Il est bien entendu, toutefois, que lapplication de cet article est subordonne aux lois particulires qui rgissent chaque nation. Mais, sauf les obstacles lgaux, aucune socit locale nest dispense de correspondre directement avec le Conseil gnral Londres.

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dans under a common direction 52 ; un mme esprit ; que les that the questions of general questions proposes par une interest moved in one sosocit,et dont la discussion est dun intrt gnral, ciety be ventilated by all ; soient examines par toutes, and that when immediate practical steps should be et que, lorsqu'une, ide praneeded, as, for instance, in tique ou une difficult intercase of international quarnationale rclameront l'acrels, the action of the assotion de l'Association, celleciated societies be simultaci puisse agir d'une52

Le texte anglais dit : under a common direction (sous une direction commune) ; le texte franais dit (et Longuet a suivi ici la traduction parisienne : dans un mme esprit . Il y a l une nuance trs sensible et trs caractristique : on voit dj la tendance centraliste, qui veut diriger , et la tendance fdraliste, qui pense que lidentit des besoins produira spontanment un mme esprit , sopposer lune lautre.

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manire neous and uniform. Wheneuniforme. Lorsque cela lui ver it seems opportune, the semblera ncessaire, le Central Council shall take Conseil central prendra the initiative of proposals to l'initiative de propositions be laid before the different soumettre aux socits national or local societies. locales ou nationales.7. Since the success of ART 7. Puisque le succs the working men's movement du mouvement ouvrier ne in each coimtry cannot be sepeut tre assur dans chacured but by the power of que pays que par la force union and combination, rsultant de l'union et de while, on the other hand, l'association; que, d'autre the usefulness of the Inter-

Art. 7. Chaque membre de lAssociation internationale, en changeant de pays, ART. 7. Puisque le recevra lappui fraternel succs du mouvement des membres de lAssoouvrier ne peut tre ciation. Par cet appui, il a assur dans chaque pays droit : a) aux que par la force rsultant renseignements relatifs de l'union et de sa profession dans la l'association ; que, localit o il se rend ; b) d'autre part, l'utilit du au crdit, dans les Conseil gnral dpend conditions dtermines de ses rapports avec les par le rglement de sa socits ouvrires, soit Section 67 et sous la nationales, soit locales, garantie de cette mme les membres de Section 68. l'Association internationale devront faire tous leurs efforts, chacun dans son pays, pour runir en une association nationale les diverses socits d'ouvriers existantes, ainsi que pour crer un

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part, l'utilit du Conseil national Central Council Central dpend de ses rapmust greatly dpend on ports avec les socits outhe circumstance whether vrires, soit nationales ou it has to deal wilh a few national centres of working men's associations, or with a great number of small and disconnected local societies ; the members of the Inlocales, les membres de l'Asternational Association shall sociation internationale deuse their utmost efforts to vront faire tous leurs efforts, combine the disconnected chacun dans son pays, pour working mens societies of

organe spcial. Il est bien entendu, toutefois, que lapplication de cet article est subordonne aux lois particulires qui rgissent chaque nation. Mais, sauf les obstacles lgaux, aucune socit locale nest dispense de correspondre directement avec le Conseil gnral, Londres 54.

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runir en une association their respective countries nationale les diverses sociinto national bodies, reprets douvriers existantes, sented by central national ainsi que pour crer un organs 53. organe spcial. It is selfunderstood, howIl est sous-entendu cepenever, that the appliance of dant que lapplication de this rule will dpend upon cet article dpendra des lois the peculiar laws of eachToute cette premire partie de larticle 7 des Provisional Rules a t trs imparfaitement traduite, tant Paris en 1864 que par Longuet ensuite ; le rdacteur de la Rive gauche a mme laiss subsister cotte grossire erreur du premier traducteur qui, dans la phrase anglaise national bodies, represented by central national organs , avait cru voir la cration dun journal l o il sagissait du la cration dun comit. Le texte franais de Genve a du moins fait disparatre cette mprise. 54 Le texte parisien de 1864, qui est devenu le texte dfinitif franais, prsente la correspondance des socits locales avec le Conseil gnral comme une obligation, dont aucune socit nest dispense. Le texte des Provisional Rules, correctement reproduit cette fois par la version de la Rive gauche, prsente au contraire cette correspondance comme un droit dont aucune socit locale ne peut tre prive, la condition pourtant quelle soit une socit indpendante . 65 Carnet parisien : avec les bureaux correspondants . 66 Carnet parisien : leur au lieu de son . 67 Carnet parisien : par le rglement du bureau dont il fait partie . 68 Carnet parisien : de ce mme bureau .53

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particulires de chaque country, and that, apart from pays, et que, abstraction lgal obstacles, no indepenfaite des obstacles lgaux, dent local society shall be chaque socit locale aura precluded from directly corle droit de correspondre diresponding with the London rectement avec le Conseil Central Council. central de Londres.

Art. 8. Quiconque adopte et dfend les principes de lAssociation 69 peut en tre reu membre ; mais cela, toutefois 70, sous la responsabilit de la Section 71 qui le recevra.

ART. 8. Jusqu la premire runion du Congrs ouvrier, le Conseil lu en septembre agira comme Conseil gnral provisoire. Il essaiera de mettre en communication les socits ouvrires de tous pays. Il groupera les membres du Royaume8. Until the meeting Uni. Il prendra les ART, 8. Jusqu la pre- mesures provisoires pour of the first Congress, the la convocation du mire runion du Congrs gnral, il Congrs discutera Committee chosen on avec les socits locales Sepou nationales les ouvrier, le Conseil lu en questions qui devront tember 28 th, 1864, will tre poses devant le act as Congrs. septembre agira comme a Provisional Central Council, Conseil central provisoire.

69 70 71

Carnet parisien : de lAssociation internationale . Fribourg supprime le mot toutefois . Carnet parisien : du bureau .

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try to connect the different Il essaiera de mettre en national working mens communication les socits associations, enlist members ouvrires de tous pays. Il in the United Kingdom, take groupera les membres du Royaume-Uni. Il prendra the steps preparatory to the les mesures provisoires pour convocation of the general la convocation du Congrs Congress, and discuss with gnral, il discutera avec the national and local socioles socits locales au natioties the main questions to nales les questions qui debe laid before that Congress. vront tre poses devant le Congrs.72 73

Art. 9. Chaque Section est souveraine 72 pour nommer ses correspondants au Conseil central 73.

ART. 9. Chaque membre de lAssociation internationale, en changeant de pays, recevra lappui fraternel des membres de lAssociation. Art. 10. Quoique unies par un lien fraternel de solidarit et de coopration, les socits ouvrires nen

Carnet parisien : Chaque bureau est souverain . Carnet parisien et Fribourg : au Conseil gnral .

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9. Each member of ART. 9. Chaque memthe International Associabre de lAssociation internation on removing his domicil tionale, en changeant de from one country to another, pays, recevra lappui fraterwill receive the fraternal support of the Associated worknel des membres de lAssoing men. ciation. 10. While united in ART. 10. Quoique unies a perptual bond of frapar un lien fraternel de soternal co-operation, the lidarit et de coopration, working mens societies, jointes socits ouvrires nen ing the International Assocontinueront pas moins ciation , will prserve their dexister sur les bases qui74

continueront pas moins dexister sur les bases qui leur sont 74 particulires.

Art. 10. Quoique unies par un lien fraternel de solidarit et de coopration, les socits ouvrires nen continueront pas moins dexister sur les bases qui leur sont propres. Pour le Conseil gnral de lAssociation ART. 11. Tout ce qui internationale des nest pas prvu par les travailleurs : statuts sera dtermin par les rglements, rvisibles chaque Le prsident Congrs. ODGER Le trsorier WHEELER Le secrtaire gnral, CREMER

Fribourg : seront .

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existant organizations intact. leur sont particulires.

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Les rglements quannonce le dernier article des statuts, et pour llaboration desquels une commission de quatre membres avait t nomme, furent prsents par celle-ci en trois langues le vendredi matin, daprs le compte-rendu du Commonweatlh ; ils furent ensuite discuts et adopts dans la dernire sance, le samedi. Le Commonwealth dit :

Le travail de la commission fut lu en trois langues dans la sance du matin du vendredi : il fut adopt aprs une chaude discussion. Nonobstant les difficults de la tche, les dbats eurent lieu dans les trois langues.Voici comment la brochure Congrs ouvrier , etc.. rapporte la discussion, quelle fait suivre du texte des rglements (pages 25-27) :

Le temps pressait et lassemble a pass la discussion et au vote des rglements que la commission lui prsentait. Un point seulement des rglements tait cause dune longue et vive discussion, et notamment larticle qui disait que tout membre de lAssociation peut tre lu comme dlgu aux Congrs. Comme les statuts ont admis dans lAssociation tout homme qui partage ses principes. la dlgation parisienne demandait quau moins la facult dtre ligible pour la dlgation aux Congrs soit limite aux ouvriers, dans la crainte que des hommes appartenant aux professions librales ou des capitalistes ne pussent taire prvaloir dans les Congrs des ides contraires aux intrts de la classe ouvrire ; les dlgus suisses et les dlgus anglais ont combattu trs nergiquement cette demande. Elle pourrait priver lAssociation du secours dhommes clairs et dvous. Elle enchanerait la libert daction des Sections. Elle tablirait deux degrs dexistence dans lAssociation, lun de simple associ, lautre dligible aux fonctions de dlgu. La dputation parisienne persiste. M. Fribourg dit quil pourrait arriver un beau jour que le Congrs ouvrier ft compos en majeure partie d'conomistes, de journalistes,||51||

d'avocats, de patrons, etc., chose ridicule et qui anantirait l'Association. M. Tolain , Parisien. Autre chose est faire simplement partie de l'Association, autre chose est, et bien plus dlicate, remplir le rle de dlgu au Congrs. Ceci demande des garanties suprieures au point de vue de la cause qu'il s'agit de servir. Nous ne hassons personne ; mais, dans les conditions prsentes, nous devons considrer comme des adversaires tous les membres des classes privilgies soit au nom du capital, soit au nom d'un diplme. On a assez longtemps accus la classe ouvrire de s'en remettre aux autres de son salut, de compter sur l'tat, etc. Aujourd'hui elle veut chapper ces reproches ; elle veut se sauver elle-mme, sans la protection de personne. Il faut donc que ses dlgus n'appartiennent ni aux professions librales ni la caste des capitalistes. Cette doctrine n'est point accepte par les opposants. Les ouvriers de l'esprit sont aussi mritants que les ouvriers manuels et peuvent apporter autant de dvouement au service de la cause. La dputation anglaise dit que cet esprit d'exclusivisme ne serait pas compris de leurs commettants, et que ceux-ci ne se soumettraient point la rsolution du Congrs. Les associations existantes ont reu plus d'une fois des services immenses d'h