Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

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En partenariat avec JE mSÊ Le 2 e BIP saute s u r L u c B i Entretien: général de Saint Chaînas Les origines d e l a Légion JANV. / FÉV. / MARS 2012 M 01196-1 H - F: 9,90 - RD lui il 1 Belgique, DOM, Italie : 11,30 € - Suisse : 14 CHF

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E n p a r t e n a r i a t a v e c

JE mSÊ L e 2 e B I P s a u t e s u r L u c B i

E n t r e t i e n : g é n é r a l d e S a i n t C h a î n a s

L e s o r i g i n e s d e l a L é g i o n

J A N V . / F É V . / M A R S 2 0 1 2

M 01196-1 H - F: 9,90 € - RD

lui il 1 Belgique, DOM, Italie : 11,30 € - Suisse : 14 CHF

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i é t r a n g è r e J HISTOIRE • PATRIMOINE . TRADITIONS

JANVIER-FÉVRIER-MARS 2012

unita ires pu r ia France mstiire d'une lai

Conçu avec l'ambition d'un regard différent sur l'histoire, les traditions et le patrimoine des bérets verts, Légion étrangère est un nouveau venu dans le pavsage des revues historiques.

EoauJe par Képi-Blanc, le magazine des Mjégmmaires, Légion étrangère a choisi de proposer les faits et les documents «•décryptage des travaux scientifiques en conviant auteurs et chercheurs autour de 180 ans d'une histoire qui se confond avec celle de la France.

Mais parce que le sujet est atypique comme l'est tout autant le légion-• - -. '.;:::n étrangère a choisi égale-ment de vous faire découvrir cette Institution à travers ceux qu'elle a accueillis et qui en sont devenus ses plus fidèles ambassadeurs : les

on étrangère, histoire, patrimoine et 'itions vous invite à voyager au ir de notre Histoire avec le regard 140 nationalités différentes...

ine lecture !

Jean-Luc Messager Conseiller de la rédaction

ACTUALITES Un nouveau monument pour les légionnaires parachutistes

HOMMAGE Le père François Casta

Par le sang versé, histoire d'une loi par Marcela Feraru

ENTRETIEN Christophe de Saint Chamas, commandant de la Légion étrangère par Marcela Feraru

FOCUS Le commandement de la Légion étrangère

VU DE L'INTÉRIEUR Le commando parachutiste par Jean Alfonsi

HISTOIRE DES UNITÉS La section CRAP du 2e REP, 1965-1999 par Jean Alfonsi

COMDATS L'opération « Col-vert » par Alexis Neviaski

UNIFORMES Lieutenant du 2e régiment étranger, El Moungar 1903 par Raymond Guyader

HISTOIRE

La naissance de la Légion étrangère par Frédéric Guelton

PORTFOLIO Le 1er REC au Maroc, 1943 par le Pôle des archives de l'ECPAD

TÉMOIGNAGE Saut opérationnel sur Loc Binh par Salih Gusic

ARCHIVES La Légion au secours des États-Unis par Jean-Luc Messager

CINÉMA Un de la Légion par Jean-Luc Messager

PUBLICATIONS

Crédits couverture : Légionnaire de la 2 e Cie du 3 e REI - Guyane © Centre documentaire Légion étrangère. Crédits sommaire (de haut en bas) : Sarajevo, 1993. Le caporal-chef Nowakowski vient d'être touché par l'éclatement d'un obus. © Centre documentaire Légion étrangère. - Régiment de Hohenlohe. Aquarelle de Ponomarev. © Centre documentaire Légion étrangère - Commando parachutiste en approche. © Centre documentaire Légion étrangère - Évacuation sanitaire en Indochine. © ECPAD. 3

er ëes lecteurs : JT de la rédaction - Légion étrangère \4S/50 Bld Sénard - 92210 Saint Cloud

vrefa'.honimell.com

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Un n o u v e a u monui les légionnaires pai

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ment p o u r rachutistes

Lettres d'or - f

-_ résultat, la mission est remplie et c'est en iclBres d'or sur un marbre vert que s'alignent i s m s de ces valeureux soldats. Une liste qui «. « t e l'histoire 3*un engagement jusqu'au

acrifioe comme en fémoignent les deux derniers nos , ceux du capj#al-chef Kisan BahadurThapa - du caporal Gefhadus jansen, tombés en

wdanLstan au njq|B raoût dernier. En participant . une inauguration, les plus anciens des parti­

cipants se sont sans doute remémoré les paroles du colonel Gardy lors du départ du 3e BEP pour l'Indochine: «Officiers,Wous-officiers, gradés et légionnaires du 3' BEP. LorMu'ily a 18 mois, j'ai eu

'e monument élevé par des BEP, je vous ai dit

r. occasion d'inaugurer vous à la mémoire de no. 3e BEP, vous qi actuellement au combi des bataillons d'E.Oi venu. Ce jour est ven le chemin de gloire t,

•s à relever les unités iers de vos camarades dignes d'eux le jour ri suivre è votre tour

et 2e BEP». M

M o n u m e n t

Ange Santini, maire de Calvi et membre du Conseil économique, social et

environnemental, en compagnie du général d 'Armée Benoît Puga, chef

d'état-major particulier du Président de la Républ ique et du général de brigade

Christophe de Saint Chamas, commandant la Légion étrangère devant le mémorial

des légionnaires parachutistes. © Centre documentaire Légion étrangère.

Le monument aux morts des légionnaires parachutistes inauguré à Sétif

en octobre 1952. © Centre documentaire Légion étrangère.

lin

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L e p è r e F r a n ç o i s C a s t a

rconnu dans les Armées, non seu-Linnent en raison de son passé militaire légalement pour la force de ses convictions, •are Casta est inhumé à Pietrosella où i l •a son ministère durant trente ans avant ae admis au sein de l'institution nationale •Bolides. BasÉer militaire de 1944 à 1962, i l a participé «acoa^ne de libération du territoire national, mars de laquelle i l a été blessé en 1945. Vo-

pour les troupes aéroportées, il rejoint le en 1947 et y effectue deux séjours,

t au sein de plusieurs unités de chasseurs ieponnaires parachutistes, i l poursuit ses

en Algérie comme aumônier de la n parachutiste. En 1960, i l rejoint te à la 1 I e demi-brigade parachutiste

ac Il quitte l 'armée en 1962 et gagne le d'Ajaccio.

cinquantenaire des combats de la Route n" 4, il avait su, une fois de plus,

=- -jne homélie qui rendait la souffrance • brutale. En hommage à l'auteur du Drame tdiel'.\rmée, nous avons retranscrit certains aas de ce discours.

mtte du père Casta

TZIS: donc réunis, le cœur un peu lourd, en : Saint-Louis des Invalides, citadelle pacifique

et des deuils de nos armées, pour faire i le: tous ceux qui ont vécu les terribles semaines

-octobre 1950, sur la RC4:6 500 hommes ient 1 S00 seulement ont pu échapper à la

i à la captivité. Un demi-siècle de notre

: '-: m'adresse aux familles éprouvées de nos t KD< aux survivants qui ont eu cette initiative.

iu à leur invitation, avec émotion et recon-tvur l'exemple qu'ils entendent donner de M oubliée. Oubliée, peut-être, mais par • nous savons que souffrir passe, mais avoir

• demeure. "Paix aux hommes de guerre", t j r^r : Péguy. C'est donc dans cet esprit que cette

; devient invitation à mettre de l'ordre dans a, afin d'y apporter un supplément d'âme

que le conseillait saint Augustin, effectuer longée en soi-même pour savoir ce que : par rapport à son passé". [...]

eu en écoutant les témoignages des uns et . on a peine à imaginer tout ce qu'il a fallu

• Se force morale insoupçonnée et d'esprit de r rcur refuser de capituler et pour permettre à enne plus ou moins réduite, de s'engouffrer ! brèches ouvertes dans les rangs serrés des as-LÂu risque de sa vie ou de sa liberté, il fallait

— Tassage hasardeux pour évacuer les blessés cr.mj nombre furent achevés sur leurs brancards e. En langage chrétien, de telles actions s'ap-

: charité dépensée en pure perte, du moins aux E hemmes, mais de grande richesse aux yeux de

Le père Casta, pendant une pause lors d'une opérat ion Tonkin en 1952. © ECPAD.

Dieu. Il s'agit bien là d'une page d'évangile, vécue en esprit et en vérité, où il est écrit qu'il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Mais, pourrions-nous soupirer, que faire pour passer notre message? Il faut avouer qu'il n'est pas facile de nos jours d'affronter la formidable crise morale que nous traversons. Il n'y a là rien d'autre qu'une crise du courage, de la générosité et de la responsabilité quotidienne. 11 faut du courage en effet, pour lutter contre tout ce qui est à la recherche de la mollesse et

du plaisir frelaté du moment. Le secret du courage — vous l'avez expérimenté sur la RC 4, sans jamais l'avoir formulé— c'est savoir recommencer un assaut après l'échec et, surtout, ne jamais accepter un compromis bâtard ou lâche, semeur pour demain de maux beaucoup plus grave que ceux devant lesquels on capitule aujourd'hui. Nous savons par dure expérience, où cela a conduit ce malheureux pays et bien d'autres. C'est à ce prix que les motivations des uns et des autres sont au rendez-vous. Puisse cette plongée en nous-mêmes nous remettre sur la route dont nous nous sommes parfois écartés, de cette loi fondamentale à toutes les religions, la loi de la prière. Elle seule est à même de nous aider à retrouver le sens de nos combats d'hier et à ne pas sombrer dans la désespérance; avec toutefois une différence, à savoir qu'aujourd'hui ce sont uniquement des armes spirituelles et morales qui se croisent pour défendre d'égale manière l'èminente dignité de la personne humaine, dans son corps, dans son esprit et dans son âme. Au-delà de toutes les sophistications de l'électronique, c'est à un réarmement moral qu'il faut procéder, car il n'y a de valeur que d'hommes. Dans ce combat, c'est le corps de la France, c'est l'esprit de la France, c'est l'âme de la France qui sont en cause. Une France qui a grand besoin de retrouver conscience des mille ans qui V ont fondée. Savoir rester "toujours au cœur de la mêlée, Souvent vain­queurs, Parfois vaincus, Jamais domptés". C'est la raison pour laquelle, pendant près de vingt ans, au milieu de vous, avec vous, l'un de vous, ayant partagé vos illusions et vos espoirs d'hommes, je voudrais tellement vous faire partager mon espérance. Mon intime conviction est que "Notre secours est dans le Nom du Seigneur" ». •

L'hommage rendu dans la cour des Invalides par les parachutistes du 1 e r régiment de chasseurs parachutistes. © ECPAD.

LEGÏIN ÊTRANIÈRE — HQ1

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Marcela Feraru

Ni argent, ni médailles, sim­plement d'être français ! Voilà comment l'histoire a com­mencé. C'était en 1993 et Ma-riusz Nowakowski venait de perdre sa jambe gauche sur l'aéroport de Sarajevo. Marius a été fait français, peu de temps après, grâce à des me­sures dérogatoires car, il y a bientôt vingt ans, aucun dis­positif légal ne permettait de devenir « Français par le sang versé» hormis la procédure de naturalisation appliquée à n'importe quel étranger qui en faisait la demande. Il a fallu attendre 1999 pour qu'une loi soit promulguée rendant l'acquisition de la nationalité française «par le sang versé» automatique pour un légionnaire «blessé en opération et à condition que celui-ci en fasse la de­mande».

Légionnaires au défi lé du 14 Juillet. © ECPAD.

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H i s t o i r e d ' u n e l o i

r e d ' u n e lo i C omme toute loi, elle a fait l'objet d'âpres

batailles politiques et i l faut reconnaître que, fait sans précédent, elle a été votée à l'una­nimité après une forte mobilisation de la Légion étrangère, de ses Anciens et d'un certain nombre d'élus de tous bords. Si le cas de Mariusz Nowakowski a valeur de symbole, le projet avait déjà été initié dès 1988 à la suite d'auditions menées par Marceau Long"' dans le cadre de la commission chargée de rédiger un livre blanc en prévision de la mo­dification du code de nationalité. Pour les be­soins d'un film documentaire sur ce sujet<2> i l s'exprime sur les motivations qui l'ont conduit à s'y intéresser...

Droit du sang

« En 1987, la France et d'autres pays entament des ré­flexions sur la nationalité. Cette thématique était d'ail­leurs déjà présente dans les discours de campagne dès 1986. Certains partis avaient souhaité que, dans le programme du gouvernement, on étudie justement les questions de nationalité et comme souvent d'ailleurs quand on aborde ce sujet on peut très vite déborder et donc il fallait essayer d'encadré les discussions. Elles ont commencé au parlement où plusieurs auditions ont été faites puisfinalement laissées à des comités de per­sonnalités, des sages ! Le débat opposait les partisans du droit du sol à ceux du droit du sang selon un clivage politique assez tra­ditionnel. L'opposition de Vépoque(1) était très attachée au droit du sol — c'est-à-dire est français celui qui est né en France alors le droit du sang s'attache davantage à la filiation depuis un certain temps et notamment à un consentement de nationalité. Il y avait une diffé­rence de conception qui remonte d'ailleurs à l'histoire très largement. Le comité que j'avais présidé a essayé d'atténuer, même défaire disparaître, cette querelle en disant que ce qui compte en réalité ce n'est pas tellement l'affiliation proprement dite, ni le fait de naître ici où là, mais le fait de recevoir, dès le berceau, une éducation de parents français, d'entendre le français, d'aller à la crèche, puis à l'école avec des Français, en mettant l'accent sur le fait que cette acclimatation à la France se faisait donc progressivement au sein même du milieu familial. Nous avons donc fait un rapport qui devait être assez équi­

libré puisqu'il a été approuvé par la majorité. Il arrive souvent cependant que des rapports ne soient pas ap­pliqués tout de suite. Ces diverses discussions ont soulevé de nombreux pro­blèmes. Nous avons reçu beaucoup de lettres et avons dû, par exemple, nous pencher sur une requête émanant des Canadiensfrancophones qui demandaient que leur soit reconnue une double nationalité canadienne et

française. Cet exemple, très compliqué, nous a conduits à ne pas rentrer tout de suite dans le détail. Problème, dans ce « détail » on retouve les légionnaires, les étran­gers qui s'étaient battus pour la France et qui récla­maient eux aussi que l'on songe aux "Français par le sang versé". C'est à cette époque qu'est née à la fois l'expression, la revendication et les premières proposi­tions de loi. »

Des élus partagés mais... d'accord !

S'attaquer, même hors des enjeux politiques, à une révision complète du code de nationalité va s'avérer techniquement et éthiquement compli­qué mais l'impartialité et le «poids» politique de Marceau Long vont contribuer à initier le processus de la loi de 1999 qui va devenir presque malgré elle, un sujet sociétal. Mais les préjugés sont tenaces... Alors que les premières propositions de loi apparaissent, i l devient évi­dent que le combat va se déplacer dans l'arène politique. Selon les propres termes de Marceau Long, i l y a « au départ, de la part des uns et des au­tres des préjugés [...]. fe crois que tous, dans un souci d'humanité, étaient d'accord avec cette idée de créer un mode spécial d'entrée dans la nationalité française

(1 ) Marceau Long a été pendant plusieurs années président de l'Institut français des sciences administratives, associa­tion reconnue d'utilité publique et ayant pour but de pro­mouvoir le modèle français de sciences administratives par l'organisation de colloques et la participation aux activités de l'Institut international des sciences administratives. En 1987, il préside la réforme de la nationalité française, qui porte son nom. Après une longue carrière au service de l'État, il se retire en 1995 après été vice-président du Conseil d'État. (2) « Français par le sang versé, histoire d'une loi », réalisé par Marcela Feraru, Kilahom Productions / Chaîne Histoire, (3) Les radicaux, les socialistes et les communistes.

UGIIN ÉTRANGÈRE — N° 1

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Sarajevo, 1993, Le caporal-chef Nowakowski vient d'être touché par l'éclatement d'un obus. © Centre documentaire Légion étrangère.

pour des gens morts ou blessés pour la France mais en même temps ils craignaient de relancer ensemble le débat sur la nationalité notamment en y voyant une atteinte au caractère d'automaticité qui leur était cher». Nous sommes en 1998. Intervient alors un inci­dent qui sera largement repris dans la presse et qui entraînera des réactions épidermiques des deux « côtés ». Suite à une incompréhension dans la transmission des textes au ministère de la Jus­tice et une correspondance adressée par Elisa­beth Guigou, alors Garde des Sceaux, aux anciens légionnaires, Pierre Messmer, ancien Premier ministre mais surtout ancien officier de la 13e demi-brigade de Légion étrangère à Bir-Hakeim réagit par des articles dans la presse. Le clivage droite-gauche, contenu par Marceau Long et ses « sages », éclate au grand jour. Pierre Messmer passe d'une posture réservée à un lea­dership de la contestation sur le degré d'attache­ment à la France. De fait, i l apporte une visibilité médiatique inespérée à la Fédération des sociétés d'anciens de la Légion étrangère présidée par le général Jean-Claude Coulon (+ l lui-même très at­taché à ce projet de loi.

Marceau Long fait donc appel au sénateur-maire d'Aix-en-Provence, Jean-François Picheral qui, tout comme Pierre Messmer, a servi avec la Lé­gion mais en Algérie comme médecin militaire au sein du 2 e régiment étranger. Les deux hommes obtiennent un entretien avec la Garde des Sceaux au cours duquel tous laissent de côté les questions de principe, de doctrine, d'idéolo­gie pour se concentrer sur le fonds du dossier. Dès lors, les discussions sur la loi «Par le sang versé » peuvent reprendre en constatant « fina­lement qu'il devait y avoir certainement les moyens d'éviter que cette affaire-là puisse être faite sans bouleverser les règles de la nationa­lité »<5>.

Fils de Légionnaire

L'accord de principe obtenu chez la ministre permet alors de laisser le processus législatif sui­vre son cours au sein des deux chambres. Pour l'Assemblée nationale, c'est Thierry Mariani, ac­tuel ministre des Transports, qui en est le rap­porteur. Les débats, passionnés, seront de haute

MARIUSZ NOWAKOWSKI

« Pendant deux semaines, j'ai été inconscient et le seul moment dont je me rappelle est la venue du capitaine Lantaires*. Il est venu me rendre visite avec des légionnaires de ma compagnie mais, moi, je ne savais pas ce qui s'était passé ! Je croyais que c'était la guerre contre les Russes !... Pendant un moment je croyais que c'était ça ! [...] Ils m'ont rapatrié de Sarajevo dix jours après sur l'hôpital militaire de Sainte-Anne à Toulon et c'est là qu'il a fallu m'amputer de la jambe parce que comme j'avais beaucoup perdu de sang, il n'y avait plus d'oxygéna­tion, donc j'ai eu la gangrène, il fallait am­puter la jambe pour que ça ne se propage plus. Dès que j'ai su que j'allais être am­puté, cela m'a fait un choc. Oui, parce que je me rappelais que chez moi, dans le civil, les gens handicapés, il nefallait pas les montrer., fe ne voulais pas vivre comme ça, caché. Après, de l'hôpital Sainte-Anne de Toulon, j'ai été rapatrié à l'Institution des Invalides à Paris et quelques jours après le ministre de la Défense, François Léotard, est venu me rendre visite etlà,j 'ai saisi ma chance... A l'époque je ne pouvais pas bien réfléchir, j'avais subi un grand choc mais c'est ma conscience qui me disait qu'il fallait que je demande ça.

Je pensais que, peut-être, une fois amputé, on se débarrasserait de moi, parce qu'un étran­ger qui est venu servir pour un autre pays... Je ne savais pas alors comment cela fonction­nait, ni que la pension de guerre existait. Je pensais qu'on allait simplement me dire : ça va, c'est fini, tu rentres. Je ne demandais pas d'argent — pour moi devenirfrançais, c'était ça l'important. »

* Le lieutenant-colonel Xavier Lantaires a quitté la Légion étrangère en août 2011 après y avoir servi pendant plus de vingt ans sans interruption, ce qui est une exception­nelle longévité par un officier supérieur. En 1993, il est au 2e régiment étranger de parachutistes.

(4) Commandement de la Légion étrangère de 1984 à 1985. (5) «Marceau Long - Français par le sang versé, histoire d'une loi », interview complémentaire, avril 2011.

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H i s t o i r e d ' u n e t o i

«arae, ne serait-ce que, parmi les élus, on compte • rïr.emcntaires qui sont fils de légionnaires

—i-:Tif Charles Cova ou d'autres qui avaient été r\-ers dans la Légion ou qui la connaissaient bien,

le Travail de la commission des Lois constitu-ootinelles, de la législation et de l'administration • œ r a l e de la République va consister à rassem-Mer dans un premier temps toutes les proposi-•jnms. Afin que, selon le rapport parlementaire

1961 du 24 novembre 1961, «un débat puisse t'msunirer, le groupe RPR a demandé, le 9 novembre . A; proposition Je loi de M. Charles Cova • c mscrite à la séance du 30 novembre, réservée à For­er: ':c: 'ixe par l'Assemblée nationale». l e 16 novembre, soit quelques jours après la dé-câBtn prise par la Conférence des présidents à •.demande du groupe RPR, M. Robert Gaïa et

: - du groupe socialiste déposaient a 'jexr tour une proposition n° 1922 relative à l'at-«Amtion de la nationalité française à tout étran-; - r.tsse en mission dans l'armée française. Le - - - - - ur. une propositii in en tout point iden-

aÏBK était déposée au Sénat par M. Jean-François : : . -. " les membres du groupe socialiste.

T O O E J O U T S selon le rapport de Thierry Mariani,

« toutes ces propositions ont en commun d'instituer un régime d'acquisition de plein droit de la nationalité

française pour les militaires étrangers engagés dans l'armée française et blessés en mission. Les points com­muns l'emportent, même si les modalités d'acquisition, la définition des circonstances où la blessure a été reçue et les bénéficiaires secondaires de cette procédure sont quelque peu différents». D'une rédaction plus ou moins précise, toutes les propositions visent les étrangers engagés ac­tuellement ou à l'avenir dans les armées fran­çaises. Il n'est pas question d'appliquer rétroactivement la mesure aux 35 000 légion­naires morts pour la France depuis 1831 ou à leurs descendants, ni a fortiori à tout étranger ayant servi dans les armées françaises.

Décret d'acquisition

Toutes les propositions prévoient que la natio­nalité française résulte d'un décret, mais selon un régime différent. Tout en faisant le choix de la naturalisation, les propositions émanant de l'opposition adaptent les principes qui régissent ce mode d'acquisition de la nationalité française :

(suite p. 14)

LA REMISE DU DECRET

La remise de décrets d'acquisition de la nationalité ou de naturalisation obéit à des règles strictes afin d'en préserver le caractère solennel. Elle exige la présence d'un élu et se fait systématiquement devant le drapeau du régiment en présence de l'encadrement du bénéfi­ciaire. Depuis le 13 juillet 2005, à l'initiative du général Bruno Dary*, une cérémonie particulière se déroule en deux temps au Sénat. Tout d'abord, une prise d'armes qui regroupe les unités de Légion étrangère défilant pour la Fête nationale dans les jardins du Luxembourg, présidée par le deuxième personnage de l'État, le président du Sénat. Puis une cérémonie plus intime, dans les salons de la présidence, au cours de laquelle les légionnaires blessés en opération reçoivent leur décret d'acquisition de la nationalité française. Line manière de concrétiser chaque année la reconnais­sance de leur pays d'adoption à ces « Français par le sang versé».

* Commandant la Légion étrangère de 2004 à 2006 puis gouverneur militaire de Paris depuis 2007.

LiGilN ÊTRIKEflE - N°1

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SS

LA COMPOSITION DE LA COMMISSION

M" Catherine Tasca, présidente ; MM. Pierre Albertini, Gérard Gouz.es, M"" Christine Lazerges, vice-présidents ; MM. Richard Cazenave, André Gérin, Arnaud Montebourg, secrétaires ; MM. Léo Andy, Léon Bertrand, Emile Blessig, Jean-Louis Borloo, Patrick Braouezec, Mwe Frédérique Bredin, MM. Jacques Brunhes, Michel Buillard, Dominique Bussereau, Christophe Caresche, Patrice Carvalho,Jean-Yves Caullet, Mme Nicole Catala, MM. Olivier de Chazeaux, Pascal Clément,Jean Codognès, François Colcombet, François Cuillandre, Henri Cuq,Jacky Darne, Camille Darsières, Jean-Claude Decagny, Bernard Derosier, Franck Dhersin, Marc Dolez, Renaud Donnedieu délabres, René Dosiere, Renaud Dutreil,Jean Espilondo, Mme Nicole Feidt, MM. Jacques Floch, Raymond Forni, Roger Franzoni, Pierre Frogier, Robert Gaïa, Claude Goasguen, Louis Guédon, Guy Hascoët, Philippe Houillon, Michel Hunault, Henry Jean-Baptiste, M™ Claudine Ledoux, MM. Jean-Antoine Léonetti, Bruno Le Roux, M"" Raymonde Le Texier, MM. Jacques Limouzy Thierry Mariant, Louis Mermaz, Jean-Pierre Michel, Ernest Moutoussamy MmeVéronique Neiertz, MM. Robert Pandraud, Christian PaufVincent Peillon, Dominique Perben, Henri Plagnol, Didier Quentin, Bernard Roman, José Rossi,Jean-Pierre Soisson, Frantz Taittinger,Jean Tiberi, Alain Tourret, AndréVallini, Alain Vidalies, Jean-LucWarsmann.

REGARDE LA VIE AUTREMENT

Affiche de recrutement des années 80. © Centre documentaire Légion étrangère.

par exception, la décision de l'autorité publique serait liée puisqu'elle ne pourrait pas refuser d'accorder la nationalité française à l'étranger engagé dans les armées françaises et blessé en mission. La proposition socialiste innove égale­ment, mais selon d'autres modalités, en permet­tant à l'étranger d'obtenir la nationalité française par une décision de l'autorité publique qui n'est pas un décret de naturalisation. Le décret de na­turalisation présente l'avantage d'être mieux connu, puisque c'est déjà par ce canal que tout légionnaire peut acquérir la nationalité à l'issue de son engagement, mais le décret d'acquisition permet d'échapper aux contraintes attachées à la procédure de naturalisation (condition de

stage, contrôle de l'assimilation et de l'état de santé, âge . . . ) . La proposition de M. Robert Gaïa présente, en outre, la particularité d'introduire une condition supplémentaire en rendant obligatoire l'inter­vention d'une proposition du ministre de la Dé­fense, la demande du légionnaire blessé n'étant pas à elle seule suffisante pour que la nationalité française lui soit conférée. La qualité de Français ne serait donc acquise de plein droit qu'une fois ce «filtrage» opéré. La définition des circonstances dans lesquelles la blessure a été reçue diffère également d'une pro­position à l'autre, mais l'intention commune est de viser les blessures reçues en mission, lors d'un engagement opérationnel, et non pas toutes les blessures reçues « par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service » ouvrant droit à pension aux termes de l'article 2 du code des pensions militaires d'in­validité. Enfin, trois des propositions traitent de l'acqui­sition de la nationalité française par les enfants mineurs du légionnaire blessé au cours d'un en­gagement opérationnel. Celle déposée par le rapporteur précise que la nationalité française est également conférée aux enfants mineurs du légionnaire blessé : i l s'agit en fait de la reprise d'un principe général posé par l'article 22-1 du code civil, qui dispose que l'enfant mineur, dont l'un des deux parents acquiert la nationalité française, devient français de plein droit s'il a la même résidence que ce pa­rent ou s'il réside alternativement avec ce parent dans le cas de séparation ou de divorce. Son nom doit toutefois être mentionné dans le décret de naturalisation.

En complément, les propositions de MM. Goas­guen et Gaïa envisagent une autre hypothèse : celle où le légionnaire meurt à la suite de ses

blessures et ne peut donc acquérir la nationalité française et en faire bénéficier ses enfants mi­neurs. Nos collègues souhaitent légitimement que ces enfants puissent, en quelque sorte, se substituer à leur père et obtenir de plein droit la nationalité française.

Vers le consensus

Ces précisions ne sont pas inutiles car elles conduisent naturellement vers le consensus, le caractère humain de la loi n'ayant jamais été remis en cause. S'agissant de témoigner la recon­naissance de la Nation à des soldats, certes étran­gers mais qui se sont engagés au service de la France et qui ont été blessés, voire tués, en la servant, i l était particulièrement souhaitable d'arriver à un accord transcendant les clivages politiques. Thierry Mariani va alors travailler à une rédaction «susceptible d'emporter l'adhésion des auteurs des cinq propositions de loi, qui toutes tendent vers un même but : élaborer un mode simplifié d'acqui­sition de la nationalité française pour les étrangers ayant servi le drapeau français dans la Légion étrangère et ayant été blessés en mission». Deux idées principales s'en dégagent : - Afin de simplifier au maximum la procédure d'acquisition de la qualité de Français, i l apparaît préférable de s'extraire complètement du ré­gime de la naturalisation, et d'échapper ainsi aux

(6) Commandant la Légion étrangère de 1999 à 2002. (7) Chef d'état-major du Commandement de la Légion étrangère aux mêmes dates puis commandant la Légion étrangère de 2006 à 2009.

Timbre promotionnel pour l'Institution des Invalides de la Légion étrangère. © Centre documentaire Légion étrangère.

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H i s t o i r e d ' u n e l o i

euses contraintes l'accompagnant, et de « B e c un régime sui generis d'acquisition de la • n 'il française par décret pour les légion-m s blessés.

- - -::lcxion, l'idée d'instituer un filtre, sous i r r r . e d'une proposition du ministre de la Dé-n s c . n'est pas sans intérêt. Comme l'ont sou-Ipne M. Pierre Messmer, le général Coullon, le >»^icril Grail 1 6 1 et le colonel Pichot de Champ-fcjrv-, l'autorité militaire conserve ainsi une narre d'appréciation sur la nature de la blessure, bscwronstances dans lesquelles elle est interve-

• c et la manière de servir de l'intéressé. En «afc , il est arrivé, très exceptionnellement, que • manière de servir d'un légionnaire blessé ait aese a désirer, ce qui aurait fait obstacle à ce que le commandement de la Légion lui remette le rîr-nricat de bonne conduite. En outre, même si ion du recrutement des légionnaires les candi-rar.- avant commis des crimes ou ayant trempé tans des affaires de terrorisme ou de trafic de «aoetîants sont systématiquement écartés, on nr reut jamais exclure à cent pour cent le recru-•soent, par exemple, d'une personne que leTri-sonal pénal international viendrait à déclarer complice de crime contre l'humanité, ainsi que

Ï sculigné le cabinet de la ministre de la Justice.

La victoire de l'unanimité

Compte tenu des difficultés, des imperfections et des rigidités qui pourraient en résulter, le rap­porteur a renoncé à définir la notion de blessure dans la loi en établissant une sorte de barème, au bénéfice de l'appréciation du ministre de la Dé­fense, qui se fondera sur les recommandations du commandement de la Légion étrangère. Toutefois, plutôt que d'imposer une proposition

Prise d'armes du 13 juillet dans les jardins du Luxembourg.

© Centre documentaire Légion étrangère.

systématique du ministre, ce qui pourrait paraî­tre affaiblir le principe de l'acquisition de plein droit de la nationalité française, le rapporteur avait d'abord envisagé que la qualité de Français soit conférée au légionnaire blessé sauf avis contraire du ministre dans un délai d'un mois. Afin d'arriver à un vote consensuel sur un texte d'inspiration humaniste et d'essence éminem-

AUX ORIGINES

Au XVW siècle, c'est au cours de la signature de Vordonnance sur le recrutement militaire voulue par Richelieu en 1629 jusqu'à la nomination de Michel Le Tellier,futur marquis de Louvois, aux fonctions de secrétaire d'Etat à la Guerre, que la France se dote progressivement d'une armée permanente. Son effectif est fixé à environ 55000 volontaires pour un royaume fort d'environ 22 millions d'habitants. Dans cette armée, l'apport des hommes enrôlés hors de France varie jusqu'à avoisiner le quart de l'effectif total. Ces étrangers proviennent de toute l'Europe sans que cela ne pose le moindre problème dans la mesure où le sentiment national n 'existe pas encore dans son acception contemporaine. Allemands, Croates, Ecossais, Irlandais, Hongrois, Polonais, Suédois, Suisses, etc. : leur nombre et leur valeur au combat leur confèrent une place de choix dans l'histoire d'une France dont ils contribuent à façonner l'identité autant que les frontières. *

* Frédéric Guelton, « Editorial », Revue historique des armées,. , 2009.

uEIH i !U - l l i

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D O S S I E R

Christian Poncelet, président du Sénat, remet son décret de nationalité au légionnaire Yakiriev

gravement blessé en Côte d'Ivoire. © Centre documentaire Légion étrangère.

TEXTE ADOPTE PAR LA

COMMISSION

Proposition de loi modifiant les conditions d'acquisition de la nationalité française par les militaires étrangers servant dans l'armée

française.

Article 1" Avant l'article 21-15 du code civil, il est inséré un article 21-14-1 ainsi rédigé : «Art. 21-14-1. - La nationalité française est conférée par décret, sur proposition du ministre de la Défense, à tout étranger engagé dans les armées françaises qui a été blessé en mission au cours ou à l'occasion d'un engagement opérationnel et qui en fait la demande. En cas de décès de l'intéressé, la même procédure est ouverte à ses enfants mineurs qui, au jour du décès, remplissaient la condition de résidence prévue à l'article 22-1 du code civil. »

Article 2 L'article 21-15 du code civil est ainsi rédigé : «Art. 21-15. - Hors le cas prévu à l'article 21-14-1, l'acquisition de la nationalité

française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. »

Article 3 I. — Dans le dernier alinéa de l'article 22-1 du code civil, les mots : « de naturalisation » sont supprimés. II. — Sont insérés, dans l'article 27 du code civil, après les mots : « une demande », les mots : « d'acquisition, ». III. — Il est inséré, dans les articles 27-1 et 27-2 du code civil, après les mots : « Les décrets portant », le mot : « acquisition, ». IV. — Sont insérés, dans la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 28-1 du code civil, après les mots : « retrait du décret », les mots : « d'acquisition, ». V— Sont insérés, dans l'article 30-1 du code civil, après les mots : « par déclaration », les mots : «décret d'acquisition ou de».

ment républicaine, le rapporteur a cependant ac­cepté, sur la proposition de M. Robert Gaïa, de modifier le deuxième alinéa de l'article 1 e r du texte qu'il avait présenté à la commission, pour que la nationalité française soit conférée sur pro­position du ministre à l'étranger engagé dans les armées françaises et blessé au cours ou à l'occa­sion d'un engagement opérationnel. La formulation consistant à préciser que la bles­sure doit être intervenue en mission au cours ou à l'occasion d'un engagement opérationnel pré­sente l'avantage d'écarter clairement les acci­dents sans lien avec une mission, tout en

englobant aussi bien les opérations strictement militaires que les opérations entrant dans le cadre du plan Vigie-Pirate, de la sécurité civile (lutte contre les incendies,...) ou du déminage, par exemple. Par ailleurs, s'il n'est pas indispensable de rap­peler que les enfants mineurs du légionnaire de­venu français à la suite d'une blessure peuvent acquérir de plein droit la nationalité française par effet collectif, i l est vivement souhaitable d'éten­dre ce droit aux enfants mineurs du légionnaire décédé à la suite de ses blessures comme le pré­voient les propositions Goasguen et Gaïa.

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Extrait du livret matricule du commandant Pechkov sur lequel figure sa naturalisation. © Centre documentaire Légion étrangère.

Ut (OH iTUNËÈlE - N° 1

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H i s t o i r e d ' u n e l o i

LE STATUT A TITRE ETRANGER

L'unique spécificité de la Légion étrangère repose sur sa capacité, reconnue par la loi précitée, à recru-:CT. dès le temps de paix, des étrangers à qui l'on va confier les armes de la France. Ce statut particulier a pour objet d'encadrer cette extraordinaire capacité résultant de ce choix poli­tique. Le 16 septembre 2008 a été publié au Journal Officiel de la République Française, le dé­cret relatif aux militaires servant à titre étranger. 11 abroge les deux décrets de 1977 qui l'auront régi

~dant les trente dernières années. Ce corpus de textes, complété par l'instruction ministérielle rela-: à l'organisation du Commandement de la Légion étrangère,fixent les caractéristiques actuelles de Légion étrangère et qui la distinguent du reste de l'armée de Terre et redisent particulièrement que ~ut militaire à titre étranger sert au sein d'une unité de Légion étrangère». Ce principe absolument fondamental et prévoit que le légionnaire sert sous commandement d'officiers de Lé-

étrangère. A titre exceptionnel et sur décision du général commandement la Légion étrangère, il être employé auprès d'autres formations.

LE PROFIL DU LÉGIONNAIRE AUJOURD'HUI

moyenne d'âge des engages est de vingt-trois ans. S'il n'est pas nécessaire de parlerfrançais lors de gagement, il est toutefois essentiel que le candidat à l'engagement dispose de la capacité à appren-la langue française, seule langue utilisée à la Légion étrangère. Pour 85% d'entre eux, ils sont rgers.

Légion compte aujourd'hui près de 146 nationalités dans ses rangs, ce qui fait d'elle laformation plus hétéroclite au monde. Les francophones, essentiellement des Français, représentent près de 20% recrutement. La présence d'un minimum de francophones dans la troupe est indispensable au bon wnnement de la Légion car elle permet, par capillarité, aux étrangers de s'adapter et de s'inté-plusfacilement à la culture française.

Légion recrute environ 1 000 hommes par an parmi les 10 000 candidats qui se présentent à la rte de ses postes de recrutement.

Ces principes étant posés dans l'article premier du texte proposé par le rapporteur, qui insère dans le code civil un article 21 -14-1, les articles 2 et 3 en tirent les conséquences en procédant à différentes coordinations dans les articles 21-15, 22-1, 27 à 27-2, 28-1 et 30-1 du même code. Derrière cette rédaction se cache une véritable victoire, celle de l'unanimité car c'est sur cette proposition qui rallie toutes les sensibilités que la loi sera adoptée. La conclusion revient à Marceau Long qui relie ce projet à un «merveilleux exemple d'intégra­tion. On ne demande pas à tous les gens qui sont intégrés de mourir pour la France ou de s'enga­ger à se battre en Indochine, au Kosovo ou au Moyen Orient. Donc voilà des gens qui venus des quatre coins du Monde, qui n'ont au départ presque rien de commun sinon sans doute pour beaucoup le désir de changer de vie, d'avoir une seconde chance... Mais, qui peu à peu et parfois assez vite acquièrent le sentiment qu'ils peuvent recommencer une vie, qu'ils peuvent en quelques sorte ressusciter et pour certains com­mence même une véritable rédemption. •

Patrouille des GCP en Afghanistan. © ECPAD.

i f c i i N i i B ù - r i

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DOSSIER

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E N T R E T I E N

C h r i s t o p h e d e c o m m a n d a n t l a

Le commandement de la Légion étrangère a changé de chef au mois de septembre dernier. Suc­cédant au général de division Alain Bouquin, le général de bri­gade Christophe de Saint Chamas est maintenant à la tête de 7500 légionnaires venus de cent trente pays au moment où la Légion étrangère fête son 180e anniver­saire. Pour le premier numéro du maga­zine Légion Étrangère, il a accepté de répondre à nos questions.

Cette année, la Légion fête son 180'' anni­versaire, quel est le secret de cette longé­vité ? L'existence de la Légion étrangère, c'est une dé­cision du peuple souverain. Elle a été créée en 1831, par une ordonnance de Louis-Philippe, et une loi en 2009 renouvelle ce choix d'accueillir des étrangers au service de la France. Il y a donc des racines dans les lois françaises. Maintenant, ce qui fait sa longévité, sa spécificité, c'est que la démarche est la même aujourd'hui qu'il y a 180 ans. Le candidat qui arrive abandonne son passé pour rejoindre la Légion étrangère. Ses raisons, multiples, sont en général personnelles et il les garde pour lui. Il choisit un jour de frap­per à la porte et décide de s'engager pour servir la France. Il fait don de sa personne à un pays qui n'est pas le sien et ça, c'est unique ! Il arrive dans ce creuset où les méthodes d'ins­truction ont fait leur preuve : l'amalgame, l'ap­prentissage du français, l'apprentissage du code d'honneur qui fixe à tous des règles simples, des

Le général de brigade Christophe de Saint-Chamas. © Képi-Blanc.

ItlSON FTÎANBIRE - H°

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S a i n t C h a m a s

Saint C h a n t a s , çjion étrangère

es, qui permettent très vite de Jeunes, de les restructurer et d'en

>onaires volontaires, prêts à servir r-ut temps, en tout lieu et si néces-ice de sa vie. : d aujourd'hui, c'est un citoyen du

: 7T des 1 30 pays - ou plus - parmi .e;ionnaires nous rejoignent, un

e son temps qui est un expert en infor-homme moderne qui a juste une

rupture et qui fait ce grand saut pour refaire

Plus de 130 na t iona l i t é s qu i vivent ensem­ble, c'est une r éus s i t e incroyable.. . Je crois que le secret de cette réussite, c'est l'adoption, par tous, de règles de vie commune.

"I l y a un code d'honneur qu'ils connaissent tous par cœur, i l y a une langue imposée —le fran­çais— et un mode de vie qui commence par un

amalgame, c'est-à-dire qu'on vient avec son passé, avec ses convictions, mais on sert la Légion étrangère qui est la clé de voûte dans la vie de ces légionnaires. Ils viennent à la Légion étrangère qui devient leur patrie. C'est pour cela

Passation de commandement entre les deux COMLE à Aubagne

le 1 e ' septembre 2011. À droite le général de division Alain Bouquin.

© Képi-Blanc.

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E N T R E T I E N

que leur devise est « legio patria nostra » (la Légion est notre patrie).

On é v o q u e souvent les tests de sé l ec t ion p a r t i c u l i è r e m e n t s évè re s de la Lég ion é t r a n g è r e , qu'en est-il vraiment ? Les critères de sélection à la Légion étrangère sont identiques à ceux du recrutement de l'ar­mée de Terre. Il y a des tests physiques, des tests médicaux, des tests psychotechniques. A cela, on ajoute une enquête de sécurité pour savoir qui rejoint nos rang. L'image souvent répandue des brigands qui viennent chez nous est un peu surannée. Nous savons toujours d'où viennent nos recrues. En fait, la demande est si forte que nous sommes obligés de faire une sélection stricte (1 sur 7). Nous pouvons ainsi choisir parmi les meilleurs parce que le recrutement est excellent en ce moment.

Que r e p r é s e n t e la Lég ion é t r a n g è r e dans le patrimoine f rança i s ? La Légion étrangère c'est d'abord un patrimoine visible, c'est le musée, qui est ici, à Aubagne, ce

sont les archives qui couvrent toute l'histoire de la Légion, c'est une communauté avec plus de 150 associations dans le monde et un grand réseau d'amitié. Et puis, il y a aussi l'âme de la Légion étrangère, c'est sa culture, le goût de l'effort, l'esprit de Camerone — ce combat que nous fêtons tous les ans ici même et qui nous permet de mettre à l'honneur le sacrifice des légionnaires, cet enga­gement à mourir jusqu'au dernier pour la mis­sion. C'est également l'engagement des officiers, des sous-officiers et des légionnaires, qui, tous, font face à la même menace, courent les mêmes risques. Tout cela, c'est la culture légionnaire, c'est ce patrimoine immatériel qui rayonne dans le monde.

Pour ce 180e anniversaire, vous avez choisi de mettre à l'honneur « Le sang versé» et tout ce que cela suppose dans l'acquisition de la nationalité française. Pourquoi ? Je pense que ce thème du « sang versé » est arrivé à un moment particulièrement opportun.

D'abord, i l est bon de rappeler aux citoyens que les militaires meurent pour la France. Et, ce qui est encore plus surprenant, que des étrangers ac­ceptent de mourir pour la France. C'est ça la r i ­chesse de la Légion étrangère : avoir ces hommes qui viennent chez nous et qui sont prêts à ce sa­crifice. C'est aussi arrivé à un moment où les armées engagées sur les théâtres d'opérations exté­rieures, que ce soient en Côte d'Ivoire, en Afghanistan, au Liban, dans les Balkans ou en Lybie, ont connu de terribles épreuves avec de nombreuses pertes de soldats. Il est important de mettre à l'honneur ceux qui sont devenus «.français par le sang versé » de réfléchir ensemble sur le sens du devoir du militaire : être prêt à mourir, si nécessaire, pour son pays.

On parle souvent de « t roupes d'él i te» quand on décrit les légionnaires, est-ce exact ? Je dirais que moi, je sélectionne, je recrute des candidats pour qu'ils deviennent des légion­naires ; ensuite, quand ils sont dans des régi-

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S a i n t C h a m a s

pe compte sur leur cadre —leur lieute-d v capitaine ou leur chef de corps — pour

- i _ • - r::'- au même niveau. Ce n'est pas :.:\.:::erais de troupe d'élite, c'est tement qui permettra aux observa-

i«fc dire : voilà des soldats excellents, voilà Smr des troupes d'élite. Mais ce n'est

Le piège c'est de croire que st un statut. Soldat d'élite, ça se mérite

jour, et i l ne faut jamais croire que e. C'est ça le premier combat pour les

rnte pour vous ce commande-

us- ;es 7 500 légionnaires c'est une im-iene. j'ai la chance d'être un chef d'en-

"500 hommes qui veulent faire K n que ce que je leur demande. J'ai

d'avoir des soldats qui sont prêts à : extrêmement fiers et pour qui la

• je le disais précédemment, est J'ai donc une grande fierté à être

Quelle est la part de la tradition, 180 ans après l'ordonnance royale ? Je crois que la part de la tradition, c'est un petit peu comme la température dans une maison, ça chauffe l'homme. On ne la voit pas forcément, on n'y pense pas à chaque instant, c'est pourtant le fondement de la culture du légionnaire. I l est formé en apprenant, et ce dès les premiers jours, le code d'honneur, les traditions, l'éthique lé­gionnaire et que l'on ne peut pas aller de l'avant si on ne sait pas d'où l'on vient, si l'on ne connaît pas son patrimoine historique.

Il y a également une envie d'être toujours à la hauteur des Anciens... Il y a aussi, bien sûr, cette culture. Parmi ces Anciens, il y en a 36 000 qui sont morts pour la France tout au long de l'histoire de la Légion étrangère. Le légionnaire, au moment où il s'en­gage,voir ce qu'ont fait ces anciens, ça le motive, ça le stimule et son ambition est d'essayer d'être à leur hauteur si l'occasion se présente. •

Propos recueillis par Marcela Feraru

LE GENERAL DE SAINT CHAMAS

Né le 5 janvier 1959, saint-cyrien de la promotion général Rollet (1978-1980), le général de brigade Christophe de Saint Chamas a pris le commandement de la Légion étrangère le 1a septembre 201 î. Officier de cavalerie, il sert au 12e régiment de chasseurs à Sedan puis au 1er régiment de dragons à Lure d'où il participe à la première guerre du Golfe en 1991 (opération Daguet). Il est affecté à trois reprises à la Légion étrangère. En 1984, chef de peloton puis capitaine au 1er régiment étranger de cavalerie à Orange, il est engagé dans des missions extérieures à Majotte, au Tchad et en République de Centre Afrique. En 199S, lieutenant-colonel et chef du bureau opérations instruction au 1er régiment étranger de cavalerie, il retrouve le Tchad à deux reprises dans le cadre de l'opération Epervier et participe à l'évacua­tion des ressortissants français du Congo Brazzaville en 1997 (opération Pélican). A l'état-major des armées de 1997 à 2000, il prend part aux travaux de planification et de conduite des opérations menées en Bosnie-Herzégovine, au Kosovo et en Macédoine, au sein de la cellule de crise «Yougoslavie » du centre opérationnel interarmées avant de rejoindre le cabinet du ministre de la Défense pour trois ans. A l'été 2003, il prend le commandement du « Royal Etranger » avec lequel il sera engagé au sein de l'opération Licorne en République de Côte-d'Ivoire, de juin à octobre 2004. A l'issue d'une affectation au Centre interarmées de concepts de doctrines et d'expérimenta­tions et au Centre de planification et de conduite des opérations, il est nommé général de brigade le 1er août 2009 et rejoint la force internationale d'assistance et de sécurité (FIAS) à Kaboul de février 2010 à mars 2011.

Le colonel de Saint Chamas, commandant le 1 e r REC, passe son régiment en revue à Orange en 2004. © Centre documentaire Légion étrangère.

U c i i f i i i i - i 0

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Du Dépôt C o m m u n d e l a Légion

Le commandement de la Légion étrangère a été créé le 1er juillet 1984. Le général Coullon en a été le premier attributaire. Il s'inscrivait ainsi dans une longue lignée de colonels et de généraux qui, sous des appellations diverses, ont eu en charge les destinées de la Légion. Le général Rollet, en 1931, avait été le premier d'entre eux. Il y gagna son titre de << Père de la Légion ».

Tusqu'en 1914, i l n'existait à la Légion que I deux régiments ayant les mêmes structures et

les mêmes prérogatives. Les affectations se dé­cidaient dans les dépôts de métropole, puis les légionnaires dépendaient entièrement et unique­ment de leur régiment.

Rollet, le 1e- inspecteur

En 1919, l'étendue des missions de l'armée fran­çaise, engagée sur de nombreux théâtres d'opé­rations extérieurs, et l 'épuisement du pays conduisaient le gouvernement à renforcer les ef­fectifs de la Légion. En 1930, un nouveau régi­ment est formé, le 5e REI, auTonkin. La Légion atteint une telle ampleur (plus de trente mille hommes) qu'il apparaît nécessaire de la doter d'un organe adapté à la mesure de son évolution et au statut particulier du volontaire étranger. On crée donc, en 1931, l'inspection de la Légion étrangère, implantée à Sidi-Bel-Abbès et confiée au général Rollet. L'instruction ministérielle précise ses attributions : conseiller technique du ministre de la Guerre concernant la Légion, son recrutement et son fonctionnement. Il a autorité sur les dépôts d'infanterie et de cavalerie de Sidi-Bel-Abbès mais ne peut intervenir dans le com­mandement des régiments. À quelques variantes près, le schéma est encore en vigueur de nos jours. En 1933,1e dépôt commun des régiments étrangers (DCRE) se substitue aux anciens dé­pôts de Sidi-Bel-Abbès et constitue ce que l'on va bientôt appeler « la maison mère » . Jusqu'à sa mise à la retraite, en 1935, le général Rollet va donner sa pleine mesure dans une fonc­tion taillée pour lui, confortant l'esprit Légion, codifiant les traditions et jetant les bases de

Le colonel Rollet, futur inspecteur de la Légion étrangère.

© Centre documentaire Légion étrangère.

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L e C O M L E

à l ' inspection étrangère

LE CONSEIL DE LA

LÉGION ÉTRANGÈRE

Depuis le 5 juillet 2011, dans le souci défaire valoir les préoccupations des légionnaires servant à titre étranger, un Conseil de la Légion étrangère (CLE) a été créé. C'est une instance consultative chargée à la

fois de fournir aux autorités des éléments d'appréciation sur la situation de la Légion et de leur donner un avis sur les décisions en préparation dès lors qu 'elles ont un impact sur les conditions particulières du service à titre étranger. Le domaine d'attribution privilégié du CLE est bien sûr celui des règles de vie communes à la Légion étrangère ; il inclut tous les sujets ayant des répercussions directes sur les conditions de vie des cadres et légionnaires : recrutement, gestion,formation, service courant, protection et sécurité, solidarité, moral, traditions, patrimoine... C'est pourquoi toutes les catégories de personnels y sont représentées.

l'actuelle politique sociale de la Légion. L'inspec­tion est dissoute lorsqu'il quitte le service actif. De 1948 à 1984, la pérennité de la structure va être assurée sous diverses formes pour aboutir au Commandement de la Légion étrangère tel qu'il est aujourd'hui.

Le COMLE est créé en 1984

Le 1 e r juillet 1984, le groupement de Légion étrangère cède la place au commandement de la Légion étrangère (COMLE). Le général COMLE, directement subordonné au chef d'état-major de l 'armée de Terre, dont i l est le conseiller technique, dispose à Aubagne d'un vé­ritable état-major. Ses attributions en matière de recrutement et d'instruction, comme de gestion des effectifs, s'en trouvent élargies. Et comme ses devanciers, i l est chargé « de maintenir l'unité morale et les traditions, de la Légion étrangère, ainsi que de gérer les oeuvres sociales propres à cette troupe ».

Le général COMLE est toujours choisi parmi d'anciens chefs de corps de Légion ayant suivi l'enseignement militaire supérieur du 2e degré, l ' « École de guerre » et est désigné pour des du­rées variables. Vis-à-vis de l'administration cen­trale, i l est le correspondant de l'état-major de l 'armée de Terre (EMAT), de la direction des

ressources humaines de l 'armée de Terre (DRHAT) et des différentes inspections dont dé­pendent les personnels servant dans les forma­tions de la Légion étrangère pour ce qui concerne la politique d'ensemble de la Légion étrangère, l'emploi et la formation des person­nels, l'affectation des officiers dans les forma­tions de la Légion étrangère, l'adaptation des directives générales et des textes réglementaires aux conditions particulières du service à titre étranger.

Pour l'ensemble des corps de la Légion étran­gère, le général COMLE exerce les préroga­tives que lui confère l'instruction ministérielle 950 du 25 juin 1984. Ces prérogatives s'appli­quent aux domaines concernant la gestion des effectifs et l'administration du personnel, la formation et l'instruction, la protection et la sécurité du personnel servant à titre étranger,le moral, le patrimoine et les traditions, l'action sociale. L'originalité de ce commandement ré­side dans le fait que le général COMLE n'in­tervient en aucune manière dans la chaîne opérationnelle. Les régiments de Légion saufle 1 e r RE et le 4e RE sont sous l'autorité des bri­gades auxquelles ils appartiennent. La 11' bri­gade parachutiste pour le 2e REP ou la 6e brigade légère blindée pour le 2e REI, le 1 e r REC ou le 1 e r REG. •

Prise d'armes dans la cour du Fort Neuf de Vincennes, siège de l'inspection technique de la Légion étrangère jusqu'en 1964 © Centre documentaire Légion étrangère.

Le quartier Vienot, implantation actuelle du COMLE. © Centre documentaire Légion étrangère.

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fi U DE L ' I N T E R I E U

L e c o m m a n d o pa: Jean Alfonsi

Composé de légionnaires sélectionnés et particulièrement entraînés, le Groupe de commandos parachutistes du 2e régiment étranger de parachutistes existe depuis plus de trente ans. Ces hommes jouent un rôle clé dans la recherche et la transmission du renseignement au profit du régiment ou de la brigade parachutiste.

L 'effectif de la section GCP (Groupe de commandos parachutistes) du 2e REP dépasse

la trentaine d'hommes dont plus de la moitié sont des militaires du rang. Pour être intégrés, les légionnaires —dont le grade minimum est celui de caporal—, avec une certaine ancienneté, doivent tout d'abord faire acte de candidature et être désignés par leur commandant d'unité. La seconde étape est une période de présélection d'une durée d'un mois au cours de laquelle les candidats effectuent des tests physiques, techniques et pratiques.

A l'issue de ce mois, et en fonction des besoins en personnel, certains candidats sont affectés à la section GCP. Ils suivent alors une longue période de formation qui comprend le deuxième niveau commando au Centre national d'entraî­nement commando d'une durée d'un mois, le stage de saut opérationnel à grande hauteur (SOGH) à l'école des troupes aéroportées de Pau durant trois mois, et enfin un stage de spécialisation. A l'issue de cette formation «mus-

L'aérocordage est un moyen d'extraction très rapide mais qui requiert des savoir-faire très précis. © Centre documentaire Légion étrangère.

LÉGION ÉTRAN

LES TESTS DE PRÉSÉLECTION

• 2 grimpers de corde en tenue de combat avec sac et arme • Nage en tenue de combat • Parcours d'obstacle • Course d'orientation • 30 km en tenue de combat • Rallye raid • Epreuve d'agressivité

Page 26: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

L e G C P d u 2 e R E P

c h u t i s t e

: ^-ralnement à la manœuvre en chute Dre avec charge et armement.

- "cjmentaire Légion étrangère

s nouveaux brevetés «chuteurs opéra-jnent alors une période de formation

•e sein de la section pendant un mois. • rcK'içrnent une cellule technique dans s poursuivent leur instruction.

de la dualité

Jon de la section est fondée sur de la dualité : la qualification

et l'organisation opérationnelle autonome. Lors des périodes d'ins-

a Calvi (au 2e REP) ou au cours des personnel est regroupé en fonction

salîtes retenues au sein d'une des six mte compte la section. Chaque cellule son instruction spécifique et son en-

. Ces cellules sont très régulièrement : - t : ; t sucres d'organismes de réfé-

cmls ou militaires.

cellule de la section est celle de ~ent. Elle regroupe le chef de section,

chefs d'équipe, les mécaniciens et les 1 Outre son rôle de commandement,

eSale a pour mission de planifier les exer-f instruction dans la troisième dimension

er le suivi administratif et matériel de

comporte également plusieurs autres dont la cellule renseignement photo qui

de toute la recherche et de l'instruction domaine du renseignement. Elle est éga-re<T>onsable du travail photographique

LE BREVET DE CHUTEUR OPERATIONNEL

Créé en juillet 1970, ce brevet permet aux parachutistes qualifiés défaire des sauts à des altitudes comprises entre 1 200 et 4 000 mètres. Ces sauts sont dits à « ouverture commandée retardée » (SOCK), puisque le déclenchement de l'ouverture du parachute est fait à l'initiative du parachu­tiste après une phase plus ou moins longue de chute. 11 a été homologué sous le numéro GS 30 le 8 juillet 1970, à la demande du général de division Guillet directeur technique des armes et de l'instruction, sur l'initiative du colonel Caillaud, chef du Bureau des Techniques Aéroportées. Les cinq étoiles symbolisent la haute altitude à laquelle est largué le chuteur opérationnel, ainsi que lesfeux brillants aux chevilles des cinq hommes d'une équipe, leur permettant de se regrouper de nuit pendant la chute.

[EtlBN EIRMER! - l !

Page 27: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

VU DE L ' I N T É R I E U R

En Afghanistan, les commandos parachutistes assurent la protection du chef de corps pendant une reconnaissance dans un village. Au premier plan, le colonel Éric Bellot des Minières (2009-2011). © ECPAD

de la section, assure les prises de vues et le tirage des épreuves. Elle est équipée d'appareils numériques professionnels et peut transmettre ses prises de vues en temps réel via les satellites de communication. Cette cellule se forme au cours de stages effectués à l'ECPAD (Établissement de Communication et de Production Audiovisuelle de la Défense) ou auprès de spécialistes civils. La cellule santé est dirigée par un sous-officier qualifié dans le domaine médical et regroupe les infirmiers de la section, assure le suivi médical du personnel et l'instruction des équipiers dans ce domaine.

Les cellules transmissions, tir, mines et explosifs

La cellule transmissions a pour mission d'assurer l'instruction des spécialistes de la télécommuni­cation et de tous les équipiers dans le domaine

GCP en observation en Côte d'Ivoire, 2006. © Yves Debay.

Page 28: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

L e GCP d u 2 e R E P

des messages chiffrés et des

ses et explosifs compte six des spécialistes en mines et

: marne d'action est particulière-: Dotamment le tir sous toutes ses

• p b c distance, instinctif, de riposte '«•mict ion rapprochée).

dhaume des mines, elle s'adapte aux r.eb qui jonchent les zones de

_ . : v.iVrri• d'explosifs, elle doit •Uiuction à tout le personnel dans «Winateriel réglementaire, charges

spéciales et de circonstance. Commandée par un sous-officier, elle suit des stages auprès de régi­ments de génie pour être en permanence au tait des dernières innovations. La cellule «techniques opérationnelles» assure la liaison entre les domaines techniques purs et le cadre tactique. Elle s'enquiert des nouvelles techniques d'inter­vention auprès d'unités prestigieuses comme le GIGN (Groupe d'Intervention de la Gendarmerie Nationale) ou les FUMACO (Fusiliers marins commandos). Elle est responsable de tout ce qui concerne les techniques de franchissement (ver­tical, humide ou aérocordage). •

MULTIRÔLES

La section GCP peut être employée sous deux commandements différents. La majeure partie du temps, elle est aux ordres du chef du Bu­reau Opérations et Instruction et travaille au profit direct des compagnies du 2e REP Mais elle peut être aussi intégrée au Groupement de commandos parachutistes de la 1 Ie Bri­gade parachutiste dont Vétat-major est à Balma, près de Toulouse. Ce Groupement réu­nit, en Jonction des besoins opérationnels de la Brigade, les équipes des autres régiments parachutistes. Sur le terrain, la section est organisée en

équipes qui regroupent les spé­cialistes de chaque cellule. Ces équipes, d'environ dix hommes,

sont ainsi en mesure defaire face aux si­tuations les plus variées. Les missions de la section GCP peuvent se classer en trois grandes catégories : les actions de renseigne­ment, les actions offensives, les actions parti­

culières. Les actions de renseignement regroupent plusieurs

types de missions : renseignement d'ambiance ou sur un ennemi.

Grâce à sa souplesse, la section GCP du 2e

REP peut aussi participer à des actions de harcèlement sur

les arrières ennemis, et entretenir ainsi une véritable

insécurité. Dans ce type d'action, sont

également incluses les mis­sions d'aide au déploiement

des unités (repérages, balisage, reconnaissance des zones d'instal­

lation. ..). Enfin, il existe également des actions

particulières comme le « contre-snipping » l'assistance militaire technique comme c'est le cas en Afghanistan au sein des

OMLT ou encore le guidage des ap­puis aériens.

Équipement d'un commando parachutiste. Outre l'armement spécif ique (HK 416, HKMP5 SD et Pâmas G1 ), on distingue le parachute d'arme et la gaine qui servent à la mise en place par aérolargage.

© Centre documentaire Légion étrangère.

lEGIIHnUIGtlI

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L a section CRAP d u Jean Alfonsi

En 1999, la section Commandos de recherche et d'action en profondeur du 2e REP change de nom pour prendre celui de Groupe de commandos parachutistes. Une page se tourne après trente-quatre ans d'existence.

L 'histoire de la section se confond avec celle du 2e régiment étranger de parachutistes

depuis 1965, date à laquelle les unités ont com­mencé à se spécialiser. Dès lors, les opérations succèdent aux opérations. Parallèlement, cadres et légionnaires recherchent de nouvelles tech­niques et expérimentent de nouveaux matériels. Après trente années de travail, la section est arrivée à un niveau technique très élevé dans des domaines aussi variés que ceux de la photo­graphie, du traitement du renseignement par voie informatique ou des transmissions.

Un peu d'histoire

En 1965, la guerre d'Algérie est terminée et le 2e' REP est regroupé à Bou-Sfer, en Algérie. Après les dramatiques événements et la fin des combats, le régiment recherche un souffle nou­veau. Sous l'impulsion du colonel Caillaud, chef de corps, et de ses idées très avant-gardistes, les compagnies se spécialisent chacune dans un do­maine particulier du combat moderne. C'est également pendant cette année-là que sont créés les chuteurs opérationnels, ancêtres

des CRAP. Le premier stage de saut à ouverture à grande hauteur (SOGH) se déroule à Pau, en avril 1965. Treize cadres et légionnaires, aux ordres du lieutenant Delprat, formeront le noyau de la section « chuteurs ». Par la suite, les candidats partent à tour de rôle à Pau pour y suivre le stage SOGH et les effectifs grossissent peu à peu.

Tacaud

Dès 1965, la section est engagée par le régiment dans les exercices et manœuvres. C'est en 1969 qu'a lieu le premier engagement opérationnel au Tchad. Intégrés à la compagnie d'appui et d'éclairage, les chuteurs forment une section d'infanterie (Bleu 2) commandée par l'adjudant Fayolle. L'encadrement de cette première section est complété avec le sergent-chef Volsted, le sous-officier adjoint et les sergents chefs de groupe, Dudas, Valdinger et Jannet ; ce dernier est blessé une première fois à Zouar puis une seconde fois à Fada et obtient, pour cette cam­pagne, quatre citations et la concession de la Médaille militaire.

La section est engagée dans des missions de ren­seignement, notamment le long de la frontière soudanaise, de contrôles d'axes et de nomadisation. Elle s'illustre également au cours de violents

accrochages comme à N'Gama, Goubonne et Oumad'ja. Au terme de cette longue intervention, le bilan est considérable : Bleu 2 s'est montré largement à la hauteur des attentes du comman­dement.

À Kolwezi

Par la suite, la section intervient à de nombreuses occasions au Tchad, comme en 1978 pour l'opé­ration Tacaud, en 1984 pour l'opération Monta et à plusieurs reprises depuis 1986 dans le cadre

L'ENGAGEMENT EN EX-YOUGOSLAVIE

Les CRAT participent à deux reprises à l'aventure yougoslave en 1993, d'abord au sein du Batinf 2 de la Forpronu à Sarajevo puis dans le cadre de l'opération Salamandre avec la FFR et l'IFOR. C'est au cours de ce mandat que la section s'em­pare, par un assaut héliporté, d'un camp d'en­traînement de Moudjahiddins iraniens à Dusina, capturant ainsi des personnels liés à un réseau de terrorisme international.

Prise de vue historique ! Un chuteur « sort » d'un Piasecki H21. © Centre documentaire - Légion étrangère.

Tchad 1969. Les - chuteurs» escortent un convoi pendant l 'opération Tacaud. © Centre documentaire - Légion étrangère.

• LESION ETRANBERE - l°l

Page 30: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

L a s e c t i o n C R A P

2 e R E P

: - zrcrvier. En mai 197S, la section œration Bonite et saute sur Kolwezi

- :m d'éclairage et de renseignement. :ir.- : utes les armées françaises, les

. - ;r upes dans des sections CRAP. • . . les CRAP sont à Beyrouth dans

• T : : . : C L ration Epaulard (évacuation de • - -_-!_-1: >.k ses hommes). L'année 1990

lie voit la section au Gabon (opération je Tchad (intervention consécutive à la pcovoir d'Idriss Deby) et au Rwanda

: i . En 1991, elle participe à la de l'opération Daguet, pendant

déplore trois blessés à As Salman, e La prise du fort. En 1994, la section

i au Rwanda pour l'opération Tur-;_e constitue la seule force de rensei-~ Groupement Sud. Enfin, en 1996, repart à nouveau au Tchad dans le

1 9 6 5 - 1 9 9 9

cadre de l'opération Epervier. Cette liste d'interventions, qui ne comporte que les plus mar­quantes, témoigne du rôle

joué par les CRAP du 2e REP dans le domaine du renseignement et de l'action au profit du régiment. En 1999, le CRAP change de dé­nomination et devient groupe de commandos parachutistes intégré au groupement de commandos parachutistes de

11 e brigade parachu­tiste.

Tenue de combat d'un sergent-chef lors de la guerre du Golfe,

février 1991. © Centre documentaire

Légion étrangère.

Un chuteur opérat ionnel à l 'entraînement au saut avec charge en 1998 au-dessus de la baie de Calvi ê Ce^re documentaire - Légion étrangère

LfSIlN ÉTRANGÈRE - r

gère.

Page 31: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

1 • • • •

L'opération Alexis Neviaski

Sur la place Lyautey d'Ain-Sefra, le colonel Bertrand de Sèze passe en revue son régiment, le 2e étranger d'infanterie. Au cours de la prise d'armes, la médaille militaire est conférée à trois « maréchaux », les adjudants Merkel et Sepikowski ainsi qu'au sergent-chef Buron, chef de la 2e section de la 2e compagnie portée. Le

| lieutenant Lefrançois, chef de la 3e section à la même compagnie, reçoit la croix de la valeur militaire avec une citation à l'ordre de l'armée tandis que trois légionnaires sont aussi cités à l'ordre de la brigade ou du régiment. Enfin, avant le défilé final, le capitaine Jacques Bévalot, chef du 4e bureau du régiment mais surtout héros de Phu Tong Hoa, un autre Camerone, lit le récit du combat. En ce 30 avril 1960, la célébration de la fête de Camerone prend véritablement tout son sens: la fidélité à la parole donnée et le caractère sacré de la mission quelle qu'elle soit et quel qu'en soit le prix.

Autre moment émouvant de la journée, l'inauguration du monument à la mémoire

du capitaine Allombert-Maréchal, commandant d'unité de la 5e compagnie portée, tué au com­bat, il y a un an jour pour jour, dans le Djebel Bou Ahmoud. Hier encore, trois compagnies étaient en opération dans la région de Géryville mais maintenant les légionnaires sont impecca­bles dans leur tenue de parade... pour quelques heures, ils ont rangé leur béret vert pour coiffer le képi blanc. À l'issue de la commémoration du 97e anniversaire du combat de Camerone, les compagnies rejoignent rapidement leur poste. Le calme et la tranquillité de la prise d'armes contrastent avec le quotidien des légionnaires qui sillonnent sans cesse le secteur. Depuis un mois maintenant, l'opération Prométhée est lancée dans le sud algérien. Le 2 e Étranger est en alerte. Effectivement, Camerone n'est qu'une trêve entre deux opérations.

Un renseignement précieux mais tardif

Le 5 mai 1960, vers 16 heures, suite aux recon­naissances aériennes, un renseignement parvient au P.C. du secteur d'Ain-Sefra. Un poste de

: transmission est détecté dans le djebel Mzi, à une cinquantaine de kilomètres au sud d'Ain-Sefra. De l'autre côté, au Maroc, les fellagas font preuve d'une activité intense. Si le mouvement ennemi se fait d'ouest en est, ce poste radio ne signifie pas uniquement la présence des rebelles dans une zone interdite mais surtout le franchissement de la frontière d'un moyen de

Le drapeau du 2 e REI et sa garde, Camerone 1960. © Centre documentaire Légion étrangère.

LifilBM ETllINSERE — N

Page 32: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

L ' o p é r a t i o n « C o l - v e r t »

Col -vert » je .e 2' bureau attend depuis plu-

Ce poste est destiné à la zone ût aux rebelles de mieux coor-operations, notamment le

eu barrage électrifié. Dans cette poste peut être acheminé isolé-

Dooserver la discrétion mais aussi, son importance, être fortement Aucun élément ne permet de pré-

! ennemi mais dans l'hypothèse j est-ouest, « il est raisonnable de

! r ' jçn au minimum d'une katiba » '". cas, ce renseignement jugé

• I'etat-major nécessite une inter-malgré l'heure tardive et le

•••aie... Le porteur du poste radio

. la semaine qui a suivi Camerone nlormement aux habitudes,

marquée par la visite du : Armées. Pierre Messmer, lui-même

se Légion. Durant quarante-huit ••-major tactique n° 1 (EMT 1 ) du

e -ni* aux ordres du sous-secteur Les légionnaires ont arpenté les et Dough.Tandis qu'une partie du

opération, l'autre effectue des _-- r-r.vrr.ent ou s'instruit. Came­

rone n'est pas encore très loin. Dans le cadre des challenges sportifs qui entourent cette fête, les équipes de football des 3e et l r e compagnies portées disputent la demi-finale précisément au moment où le renseignement aérien arrive à l'état-major. Rentrée victorieuse, la 3e compa­gnie n'a pas le temps de savourer sa victoire. Mise en alerte dès son retour, elle part à 20 h 30 pour effectuer « un bouclage sur la piste entre Djerien Bou Rezg et Ain Douis Foukani » <2>, c'est-à-dire au sud du djebel Mzi. De son côté, l'état-major tactique n° 1 se met en place au nord du massif. Toutes les unités ont été renforcées de projecteurs. Sur le barrage électrifié, au sud-est du massif, la surveillance est accrue. Des embus­cades sont mises en place à proximité des points sensibles. La zone est bouclée. La mission et les consignes sont les mêmes pour tous : « Surveil­lance [...]. F)ès l'alerte, tous Jeux allumés pour tous les véhicules et projecteurs. Interception des éléments rebelles tenant le franchissement au cours de la nuit. Destruction de ces éléments à partir du lever du jour » ( J >. En fait, le renseignement est arrivé trop tard pour qu'une action de force soit engagée dans la soirée. Toutefois, la mission traduit l'intention du colonel de Sèze, commandant le secteur d'Ain-Sefra. Le premier temps de l'opé­ration consiste à fixer le poste radio dans

Point de situation après la première dépose par les hél icoptères.

© ECPAD / Marc Flament.

1 , 1 DHPLE, centre de documentation, carton D/1AL/05, note 360/SEF/3/0PE/S, compte-rendu de l'opération Col-vert, 22 mai 1960. 1 2 1 DHPLE, centre de documentation, JMO V70, Journal de marche de la 3e compagnie portée du 2e régiment étranger d'infanterie pendant la période du 1 e r avril au 30 juin 1960, journée du 5 mai 1960. 1 3 1 DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, note 327/SEF/3/OPE/S, ordre de l'opération Col-vert, 5 mai 1960.

; e - : embarquement : Sykorsky H34. © ECPAD.

Page 33: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

Une partie de l'état-major tactique du 2 e REI se tait expliquer la configuration du terrain. © ECPAD.

l'hypothèse où i l sortirait de l'une ou l'autre extrémité du djebel. La manœuvre induit un second temps qui sera exécuté de jour : la des­truction de l'élément rebelle. La nuit du 5 au 6 mai 1960 est calme. L'ennemi n'a pas été décelé. Il n'a pas franchi la frontière et n'est pas sorti du djebel Mzi. La journée s'an­nonce décisive. Préparé de très bonne heure, l'ordre d'opération ne tarde pas à être transmis aux unités. L'idée de manœuvre consiste à coiffer les itinéraires de fuite vers le Maroc et à hélipor-ter sur le sommet du Mzi des éléments qui fouil­leront dans un rayon de plusieurs kilomètres autour du point où le poste a été détecté la veille. Ne sachant pas précisément le volume de l'unité ennemie, prudemment, i l est décidé de mettre en réserve un état-major tactique du 8cRIMa.

Engagement massif pour un choc brutal

Donnés avant 5 heures, les ordres sont rapide­ment mis en œuvre mais nécessitent quelques délais. Dès 6 heures, quatre compagnies du 2 e Étranger dont celles qui ont passé la nuit en surveillance sont héliportées sur les sommets qui culminent à plus de deux mille mètres d'alti­tude. Un peu avant 11 heures, le dispositif est en

place. La fouille du djebel Mzi peut débuter. Les légionnaires s'élancent à l'escalade « de cet énorme massif, vaste ensemble de rochers, d'éboulis et dejalaises abruptes » < 4 ) . La l r c compagnie portée du capitaine Grosjean a été héliportée en tête de l'EMT 1. Elle reçoit l'ordre de fouiller l'est de l'ouedTaleb Ahmed. Le terrain est aride et dur. Truffé de falaises rocheuses abruptes, i l offre des emplacements favorables aux rebelles ( î ) . La progression est difficile mais, vers 13 h 15, les 2 e

et 3e pelotons trouvent des traces fraîches d'un groupe d'environ cent rebelles se dirigeant vers l'ouest. Assurément, il s'agit au moins d'une katiba essayant de se réfugier au Maroc. L'hypo­thèse de l'arrivée du précieux poste radio s'es­tompe. Prudemment, la compagnie reprend sa manœuvre en suivant les traces. Vers 14 h 15, les légionnaires du capitaine Grosjean sont pris sous le feu violent d'armes automatiques et indivi­duelles. Les pertes sont sévères et le 2 e peloton est complètement fixé ; les autres essaient de manœuvrer mais la puissance de feu et le terrain sont trop favorables à l'adversaire. La 1 " compagnie est tombée dans un piège qui peut être mortel. Contre toute attente, le volume de l'ennemi n'est pas une compagnie mais un bataillon à cinq katibas. L'affaire du djebel Mzi

s'avère très importante. Elle ne concerne plus seulement le sous-secteur et le secteur mais aussi la division et la zone qui met en alerte ses unités d'intervention, notamment les commandos marine. En attendant les renforts, la situation est très dif­ficile dans le djebel Mzi. La 4 e compagnie se porte sur les hauteurs et progresse vers la com­pagnie Grosjean par les barrières rocheuses. Elle est également stoppée, pratiquement fixée par les tirs précis et nourris de l'adversaire. Elle ne parvient donc pas à dégager la l r e compagnie. L'état-major du régiment prend désormais le commandement des opérations et reçoit en ren­fort les unités du secteur placées en alerte depuis la veille. Son intention est de dégager la compa­gnie à partir des hauteurs du terrain en interdi­sant aux rebelles tout repli vers la frontière marocaine. Pour cela, i l décide de tenir rapide­ment les lignes de crêtes et le fond de l'oued. Ensuite, le bouclage sera resserré et l'ennemi dé­truit. En attendant la mise en place des unités qui doit se faire par héliportage, l'artillerie et l'aviation appliquent des feux massifs qui ont pour effet de relâcher un peu la pression sur les compagnies fixées. Pendant ce temps, la 6e com­pagnie qui était en réserve est engagée. Elle fouille les lignes de crêtes au sud-ouest de l'oued. Quant à la 2 e compagnie du capitaine Six, elle se porte aussi sur les lieux de l'accrochage. S'installant face aux oueds où se trouvent les re­belles, elle en décèle et applique des feux grâce à ses mortiers de 60 m/m. Vers 16 heures, un EMT à trois compagnies du 8 e RIMa est héli­porté sur les hauteurs et intègre dans son dis­positif la compagnie Six. Les tirs rebelles deviennent plus violents et précis. Les légion­naires du lieutenant Desnos repèrent une résis­tance sous la falaise immédiatement plus basse

Les porteurs de radio supportent une charge plus importante

que leurs camarades. © ECPAD / Marc Flament.

<"> Képi Blanc, juillet 1960, « Les combats du Mzi ». | 5 ) DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, note 360/SEF/3/OPE/S, compte-rendu de l'opération Col-vert, 22 mai 1960.

Page 34: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

or la compagnie. A ce mo-, celui du lieutenant Lefran-Camerone, et le peloton

• se trouvent au centre du • a i t pris a partie. Un légion-

• lp i êvement blessé puis l'offi-: _: .v.r.ir.: Claude Maraine, est

la carotide tandis que le •-urement, les rebelles

au terrain. Le jour baisse et : sont toujours fixées mais

progressivement en place n: laquelle l'ennemi devrait

; l'étreinte dans laquelle i l est A la nuit tombée, le piégeur

1 piège. Les compagnies initia-; fixent a leur tour les katibas.

PC du régiment estime que le i et imperméable même s'il nents difficiles à contrôler,

portée effectue des patrouilles intervalles sans surveillance,

s tard, un groupe de rebelles com-r àsDositif. Il essaie de remonter _.- = r>/ouest. À minuit trente, an tir d'une cinquantaine d'obus

- - rv. :r. mais heureusement, le . Il tombe néanmoins à proxi-

I de la 3e compagnie

Embusqués dans les rochers et ayant l'avantage du terrain, les hors-la-loi sont difficiles à neutraliser. © ECPAD.

portée du capitaine Bouchacourt. Ces tirs annoncent l'imminence d'une action de force d'un ennemi suffisamment nombreux, puissant, organisé et commandé pour manœuvrer. Deux assauts simultanés sont donnés. Au total, les légionnaires repoussent une centaine de rebelles.

Peu de temps après, c'est au tour de la compa­gnie Grosjean de supporter un assaut, lui aussi repoussé. De 2 à 4 heures, la compagnie Bou­chacourt applique constamment des feux sur l'ennemi qui, n'ayant pas pu passer en force, cherche désormais à s'infiltrer par petits groupes,

infiltration par un oued asséché. © ECPAD.

Page 35: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

OMBAT

non plus vers le Maroc qui lui semble difficile à atteindre mais vers le sud-est. Les fellaghas réus­sissent finalement à trouver un cheminement, aussi, des tirs d'artillerie sont délivrés pendant une demi-heure sur le versant sud du massif. Au levée du jour, les forces engagées dans « Col­vert » sont en mesure de débuter le deuxième temps de l'opération : la mise hors de combat de l'adversaire.

Destruction des rebelles

Au cours de la nuit, les renforts de la zone arri­vent. Légionnaires, marsouins, fantassins, artil­leurs, aviateurs et marins combattent dans une même fraternité d'armes. Les éléments du com­mando Montfort, l'un des trois commandos marine mis en alerte depuis le milieu de la jour­née, a même participé au bouclage nocturne. La 5 e compagnie portée, qui était engagée dans une autre opération, est remise à la disposition du secteur. Elle intervient entre le Djebel Mzi et la frontière marocaine. Au côté d'une compagnie du S' Régiment d'infanterie, elle participe à la destruction d'une trentaine de rebelles. En tout début de matinée, le PC du 2 e REI est héliporté au sommet du Mzi pour mieux diriger les opé­rations mais il est violemment pris à partie par des rebelles encore terrés dans les grottes. Les commandos marine sont alors engagés. « Sticks après sticks, Trépel,Jaubert et le PC sont déposés sur une crête à trois kilomètres du groupe de légionnaires tenu en mauvaise posture. Le PC entreprend sa progression derrière Jaubert ;Trépel eévolue dans la même direction. A 10 b 30, Jaubert parvient enfin à rallier le PC du 2' REI. Il était grand temps : "Un légionnaire sourit largement en montrant aux commandos trois cartouches... ses trois dernières" » <6>. Le djebel Mzi est en feu. « Quatre combats sont bientôt en cours, dans quatre compartiments de terrains différents » < 7 ) . La 6 e compagnie est engagée dans la fouille de cuvette de l'ouedTaleb Ahmed Au cours de la matinée, son 2 e peloton fait un prisonnier

de choix: Hamidi, le commandant du bataillon rebelle. La prise est d'autant plus intéressante qu'elle s'accompagne d'un mortier de 81 m/m, de ses accessoires et de douze chasubles porte-obus mais aussi d'un mulet. Le potentiel de l'ennemi est véritablement atteint. La destruction des rebelles est maintenant inéluctable. D'est en ouest et du nord au sud, le djebel est passé au « peigne fin » . Dès qu'ils sont repérés, les hors-la-loi sont systématiquement fixés par des feux, parfois aériens mais toujours très violents, qui les clouent au terrain, puis ils sont débordés et réduits.

Même si les unités les plus éprouvées du régi­ment sont retirées le 7 mai au soir, l'opération Col-vert se poursuit encore le lendemain grâce aux ravitaillements en vivres et munitions appor­tés par les hélicoptères aux compagnies en opé­ration depuis plus de quarante-huit heures. Par ailleurs, « un groupement composé d'unités fraîches [...] est héliporté » ( 8 ) . Cet élément, principale­ment constitué par des compagnies du 8 e et du 66 e RIMa s'empare du poste radio repéré dans l'après-midi du 5 mai. Le renseignement initial était exact et cette opération n'est pas vaine bien que, compliquée depuis le début, elle est finale­ment longue.

Si la mobilité des hélicoptères ou l'appui feu des avions ont été déterminants, plusieurs facteurs

Ce sous-officier porte son foulard de

reconnaissance rouge autour du cou.

À sa ceinture, on distingue une grenade offensive

ainsi que deux chargeurs pour FSA 49.56.

© ECPAD / Marc Flament.

m n i i K i f i f - i

ont aussi rendu difficile l'opération « Col-vert Tout d'abord, le potentiel de l'ennemi a été une véritable surprise car personne ne s'attendait à un tel volume de forces adverses. En fait, le ren­seignement obtenu par les interrogatoires de pri­sonnier a permis d'élucider cet aspect. Deux éléments étaient en instance de franchissement(9). Au fil des heures, l'opération a donc pris de l'im­portance et des éléments très divers ont été engagés. L'organisation des sous-groupements s'est constituée au fur et à mesure des arrivées. Cela n'a pas posé de difficultés pour assembler des unités du même régiment, comme par exemple la 3e compagnie portée de l'EMT 2 qui a été mise au profit de l'EMT 1 ; en revanche, le binôme marsouins et légionnaires a été difficile à employer car les unités ne se connaissaient pas et n'étaient pas du même type. La plus grosse

1 6 1 Matelot Jérôme Souverain, « Un binôme de choc; héli­coptères de l'aéronautique navale et groupement des commandos marines », in Revue historique des armées, n° 200-3/1995, pp. 119 à 126. m Képi Blanc, juillet 1960, « Les combats du Mzi ». w DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, note 360/SEF/3/OPE/S, compte-rendu de l'opération « Col­ver t» , 22 mai 1960.

DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, note 360/SEF/3/0PE/S, compte-rendu de l'opération « Col­ver t» , 22 mai 1960.

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L ' o p é r a t i o n « C o l - v e r t »

gène est venue de la coordination avec la troi­sième dimension. Le vol incessant des aéroneis a souvent empêché l'action des artilleurs qui ne disposaient pas non plus d'une fréquence radio propre. Or, les troupes au sol ont réellement eu besoin d'un appui-feu qui « garde toute sa valeur dans les ravins encaissés du djebel Mzi » < 1 0 J . Les pri­sonniers interrogés confirment. Pris sous le feu de l'artillerie, un aspirant médecin avoue avoir été affolé. « Il s'est précipité droit devant lui et s'est rendu à une unité de la Légion » (">. De même, de nombreux obus sont tombés sur la 5e compagnie tellagha et le rebelle interrogé « a vu une dizaine de camarades touchés, restés à terre. Des blocs de rochers se sont décrochés de la falaise sous l'effet des explosions et un certain nombre d'hommes ont sans doute été écra­sés. » La mise en place d'un officier ou d'un cen­tre de coordination des feux aurait probablement permis de mieux répartir les feux demandés entre l'artillerie et l'aviation | 1 2>. Le 8 mai, en fin d'après-midi, les compagnies du 2'' REI encore présentes regagnent leurs véhi­cules « très fatiguées » '">. La sueur et le sang ne sont pas vains. Le bilan général est éloquent. Au total, l'ennemi dénombre cent huit tués et qua­rante-deux prisonniers soit une mise hors de combat de presque 50 % de ses effectifs. La quantité des armes récupérées est également très importante. Outre le mortier de 81 m/m, les unités engagées se saisissent de quatre mitrail-

Équipages d'une section d'éclairage venus en renfort pour participer au bouclage de la zone d'action. © ECPAD.

La présence de deux radios indique le poste de commandement d'une compagnie. © ECPAD / Marc Flament.

leuses MG, d'un fusil mitrailleur 24-29, de 102 fusils et 14 pistolets mitrailleurs mais aussi de pistolets, explosifs, munitions et documents < 1 4 ) . Le 2e Étranger est particulièrement éprouvé. Il dénombre 18 blessés dont 11 à la compagnie Grosjean. Il a aussi perdu dans cette opération un officier, deux sous-officiers et six légionnaires soit 11 hommes dont 9 pour la seule 1 " compa­gnie. L'office religieux se déroule le 9 mai à Ain-Sefra. Le surlendemain, à la 6e compagnie, « la kermesse traditionnelle qui devait avoir lieu le 30 avril

est réalisée durant 1 après midi » < , 5 ) . Assurément, après les combats du djebel Mzi, Camerone est toujours bien présent dans les esprits. •

<1»> DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, compte-rendu du chef de bataillon Met, officier opération du 2S régiment étranger d'infanterie sur les journées du 7 et du 8 mai 1960, sans date. ( 1 " DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, fiche sur l'interrogatoire des prisonniers, 1/17e régiment d'artil­lerie, 13 mai 1960. fa DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, note 1040/DI.13/3S, du lieutenant-colonel Vaillant, chef d'état-major de la 13e division d'infanterie, 21 mai 1960. ( , î | DHPLE, centre de documentation, JM0 V70, Journal de marche de la 3e compagnie portée du 2e régiment étranger d'infanterie pendant la période du 1 8 ' avril au 30 juin 1960, journée du 8 mai 1960. <"> DHPLE, centre de documentation, carton D/1 AL/05, compte-rendu du chef de bataillon Met, officier opération du 2S régiment étranger d'infanterie sur les journées du 7 et du 8 mai 1960, sans date. <15) DHPLE, centre de documentation, JM0 V70, Journal de marche de la 6e compagnie portée du 2e régiment étranger d'infanterie pendant la période du 1 e r avril au 30 juin 1960, journée du 11 mai 1960.

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1 UNIFORMES

L i e u t e n a n t d u 2 e r q c o m b a t d ' E l 1

Raymond Guyader

Maurice Mahut, peintre et dessinateur, laisse dans ses esquisses le portrait fait d'après nature du lieutenant danois Selchauhansen tué à El Moungar le 2 septembre 1903. Celui-ci / porte un casque colonial, une vareuse kaki clair, une culotte blanche et des bottes de cheval.

Normalement, la tenue de campagne en Algérie devait être

en tunique noire régle­mentaire 1893. La ten­dance de l'époque veut que les officiers se plaisent dans une vareuse de toile kaki, dont la coupe, d'un modèle à l'au­tre, importe peu. Pour cette campagne aux rigueurs climatiques extrêmes, les officiers vont adopter un paque­tage adapté. Comme le prévoit le règlement, les officiers sont armés uniquement de leur sabre modèle 1 de l'officier de l'infanterie, à lame droite, avec la dragonne de cuir noir en tenue de campagne. Le revolver d'ordonnance modèle 1892 com­plète l'ensemble. Mais beaucoup d'entre eux ne quittent jamais leur canne, même au combat. Typique des officiers de l'armée d'Afrique, cette canne a fait son apparition vers 1840.

Une tenue adaptée

Sur sa vareuse dont les devants possèdent chacun des poches à la poitrine et aux basques, ce lieu­tenant porte des galons, tissés en métal doré et cousus sur une bande de drap noir, qui sont cir­culaires autour du dessus de chaque parement de manche. Pour la culotte, i l va préférer se fournir chez le maître tailleur du régiment mais aussi dans le civil. Découpée dans de la toile blanche de cre­tonne de coton croisé, la culotte est de coupe dite «cheval» , c'est-à-dire large du haut, serrée au genou et terminée par une manchette en

toile ; elle se ferme par des petits boutons en os blanc.

Pour se chausser, libre choix est laissé à officier. Les jambières et les bottines sont bien souvent l 'œuvre du maître bottier du régiment, mais aussi de fa­bricants civils. De ce fait, i l existe

un certain nombre de fabrications S toutes différentes par des détails.

L'officier monté peut être égale­ment avec des bottes de forme

| dite «écuyère» en cuir noir. ! Elles sont alors munies d'épe­

rons à la chevalière modèle 1900 de fabrication militaire ou civile.

Pour l'équipement, c'est le cuir qui a la faveur des offi­ciers. Tout est articulé au­tour d'un ceinturon.

En cuir fauve ou verni noir, i l se compose d'une ceinture et

d'une bélière. La ceinture est en deux parties avec un anneau

— trapèze dit trousse sabre. La par­tie antérieure est à boucle à rouleau en

cuivre doré, avec passant en cuir. La par­tie postérieure est percée de dix trous pour l'ardillon de la boucle du devant.

# Un équipement adapté aux co­lonnes

Sous ces températures extrêmes, la tenue fait l'objet d'adaptations qui sont le lot commun de toutes les troupes

françaises et en premier lieu le casque colonial.

En forme de cloche avec l 'arrière moins échancré que le modèle 1878, i l est confectionné de vingt-huit morceaux de lièges recou­verts d'une coiffe exté­

rieure en fort coutil croisé écru, en

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E l M o u n g a r 1 9 0 3

ment étranger, o u n g a r 1 9 0 3

LE LIEUTENANT SELCHAUHANSEN

Officier dans l'armée danoise, le lieutenant Christian Selchauhansen se met au service de la France en 1893. Autorisé à servir à titre étranger avec le grade de sous-lieutenant, il rejoint la Légion en 1894.11 est mortellement blessé au combat d'El Moungar le 2 septem­bre 1903 alors qu'il commande un peloton de la 22e compagnie montée du 2' Étranger du capitaine Vauchez. Adoré de ses hommes en raison de son enthousiasme, il sera à l'origine de la vocation légionnaire du prince Aage de Danemark.

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UNIFORMES

six morceaux cousus solidement par une couture rabattue. L'intérieur de la carcasse est doublé de coton fin croisé vert et possède un pourtour de tête en basane noire ainsi que deux agrafes pour l'accroche de la jugulaire en cuir fauve. La vareuse d'officier est confectionnée en toile kaki cachou ou clair, la vareuse de l'officier, dit aussi paletot, présente un collet haut et se ferme droit sur le devant par une rangée de sept gros boutons d'uniforme. Chaque épaule est

renforcée par une bride dorée ou une patte avec un petit bouton près du collet. Les parements des manches sont ronds. Quant à la culotte, elle possède une braguette, deux poches latérales, une ceinture en toile de fond avec six petits bou­tons de bretelles et un gousset de montre à droite. Au dos, le bas des reins est caractérisé par des martingales de serrage. Les jambières sont manufacturées en cuir ciré noir lesquelles, caractéristiques de l'officier de l 'époque, se

remarquent par la présence d'un certain nombre de crochets. Ceux-ci sont disposés de part et d'autre de chaque devant de jambière de façon à faire passer un lacet. Ce dernier permet ainsi de fermer la jambière une fois celle-ci ajustée au mollet de l'homme. En principe, la bottine ré­glementaire est celle que l'on enfile tout simple­ment, sans lacet. L'équipement se compose du ceinturon d'officier d'infanterie, de l 'étui-revolver, modèle 1876/1893, en cuir noir avec

Reconnaissance d'une compagnie montée de la Légion dans l'extrême sud oranais, à la frontière a lgéro-marocaine, vers 1903-1904. © Centre documentaire Légion étrangère

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Vestiges du combat retrouvés sur les l ieux-mêmes d'EI Moungar en mai 2006 par l'auteur. On distingue des étuis de balle, le reste d'un bidon modèle 1878, une boîte de conserve de type « sardines » (la compagnie montée s'était arrêtée à El Moungar pour une pause et pour manger), un gobelet réglementaire et un petit bouton de bourgeron. © Collection de l'auteur.

bretelle et du porte-cartes d'état-major modèle 1887, complété éventuellement d'un liseur porte-cartes en mica. A cet équipement, s'ajoute un étui à jumelles et un sifflet.

Les particularités Légion

Les boutons dorés du modèle 1875 de l'offi­cier de la Légion portent en exergue, entre deux filets concentriques, la légende «Légion

Etrangère». Les gros ont 23 mm de diamètre, les petits ont 17 mm. Ils sont amovibles par système d'anneau métall ique. L'écusson de collet est en drap noir et caractérisé par une grenade brodée en cannetille et en pail­lettes or avec à l ' intérieur de la bombe le nu­méro 2 du régiment également en cannetille or. Les écussons de collet et les galons sont amovibles par système d'agrafes dit «Duthor t » . •

UNE GRENADE PARTICULIÈRE

SUR LE CASQUE

Le casque colonial de l'officier porte sur le devant, une grenade en cuivre doré. Cet ornement a la forme classique de la gre­nade de l'officier d'infanterie, porté sur le képi de première tenue modèle 1886, mais la bombe est percée à jour du numéro du régiment. Notre officier porte un casque dit colo­nial. 11 est semblable à celui du sous-officier supérieur qui est du modèle 1886 de la troupe. Les bords du casque sont recouverts avec une tresse bordure et le sommet supporte un macaron en zinc à tige filetée recouvert de coutil écru. Une bande ou bourdalou, de coutil écru, est cousue tout autour du corps du casque, ïl est cependant toléré desfabrications civiles dont la conception et la forme générale respectent le modèle réglemen­taire. L'intérieur est généralement plus soigné. En campagne, comme la troupe, le casque de l'officier peut être recouvert de la coiffe kaki cachou formée également de six morceaux de toile avec tresse de serrage.

Arrivée d'une colonne d'artillerie encadrée des éléments d'une compagnie

montée du 2 e Étranger à Forthassa Gharbia vers 1904-1905.

© Centre documentaire Légion étrangère.

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L a n a i s s a n c e de 1< « À toutes les époques de son histoire, les troupes étrangères ont montré une prédi­lection pour la France. Nation chevaleresque entre toutes, les étrangers ont toujours recherché l'honneur de la servir et il n'est pas un seul peuple d'Europe qui n'ait été représenté dans l'Armée française au cours des siècles qui nous ont précédés... », annonce fièrement, dès la première page de son avant-propos, le Livre d'Or de la Légion.

Frédéric Guelton

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A u x o r i g i n e s

a Légion étrangère Partant de ce qui est présenté comme une vé­

rité première, le Livre d'Or crée une filiation directe et ininterrompue du XII e au XIX e siècle, des « bandes de piétons » de Philippe Auguste à • l'Ancienne Légion » de Louis-Philippe. Faut-il prendre cette affirmation pour argent comptant ou au contraire faut-il rejoindre Douglas Porch lorsqu'il écrit que « la France la regarde comme une décharge publique pour les indésirables, un havre pour

les sans-ressources, [et le haut commandement] trop souvent comme destinée à être sacrifiée, voire gaspillée, plutôt que comme un instrument militaire devant être entretenu, exercé, commandé » ? La première démarche, celle du Livre d'Or, ne se veut pas historique au sens actuel du terme. Le Livre d'Or entend raconter une histoire, la Grande Histoire de la Légion. Et il a raison, car l'histoire n'est pas faite de ce qu'elle fut mais de

ce que nous en laisons. La seconde, celle de Dou­glas Porch, se veut scientifique. S'appuyant sur les documents officiels, même s'ils sont, comme i l l 'écrit « peu bavards », et sur la connaissance que nous avons du passé, il cherche à s'approcher le plus possible de la réalité d'une époque, celle du règne de Charles X puis de Louis-Philippe, afin de comprendre dans quels conditions, pour­quoi et dans quels buts fut créée en France — et

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pas ailleurs — une Légion composée essentielle­ment d'Étrangers. Ce faisant, i l s'efforce, ajuste titre, de délimiter les contours d'une certaine « vérité historique ». Peut-on départager le Livre d'Or et Douglas Porch sur ce point? Peut-on donner raison à l'un ou à l'autre ? Peut-on, en d'autres termes, répondre à la question posée par le philosophe Nikos Kazantzakis : « Est-il rien de plus vrai que la vérité? » La réponse est indis­cutablement « Oui ! » Un oui qui donne tout son sens à l'histoire de la Légion. Une Légion où la légende est plus forte que la vérité, car la lé­gende, comme l'écrit Kazantzakis, « donne un sens immortel d l'éphémère vérité ! » Il demeure néanmoins possible de cerner au plus près l'une et l'autre, la légende et la vérité, sans obligatoirement chercher à les séparer, voire à les opposer. Cela passe par l'étude systématique des archives et des documents d'époque. Elle nous montre que la création de la Légion, puis son recrutement initial, furent difficiles. Prenons un exemple. La tradition veut que la formation des premiers bataillons se fît selon une logique implacable avec le 1 e r bataillon, formé à partir des « hommes ayant servi sous la Restauration dans les régiments suisses et dans celui de Hohenlohe ; le 2e et le 3S comportant des Suisses et des Allemands ; le 4e des Espagnols ; le 5e des Sardes et des Italiens ; le 6£ des Belges et des Hollandais ; le 7e de Polonais ». Il n'en est rien. En effet, le 3e bataillon devait ini­tialement être constitué par des Espagnols, mais la situation était tellement désastreuse à Agen, là où avait été créé le dépôt espagnol, que le ministère de la Guerre envisagea un moment de ne pas créer ce bataillon, puis le constitua à partir de « Suisses et d'Allemands » avant de parvenir, un peu plus tard, à constituer — enfin — un ba­taillon espagnol qui se vit attribuer le numéro 4, par défaut !

• • • • • • • • • • • • • • • •

SOULT, LE MÉCONNU

Soult est ministre de la Guerre sous la Monar­chie de Juillet de 1830 à 1834. Son action y est peu connue. Elle est souvent occultée par la mémoire de son rôle sous l'Empire. Pour­tant, comme le remarque Charon-Bordas dans la Revue historique son action « s'est exer­cée avec éclat dans le domaine militaire [et] à son nom sont attachés les grandes lois sur la réorganisation de l'armée, sur l'avancement et le recrutement, sur l'établissement de la Lé­gion étrangère... ».

Nicolas-Jean de Dieu Soult (1769-1851 ), duc de Dalmatie et maréchal de l 'armée de Napoléon Ier. Huile sur toile par Louis Henri de Rudder d 'après Jean Broc. © Iberfoto / Photoaisa / Roger-Viollet.

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: -. : • •• la création (le la ration s'inscrit en tout

_-. . national et inter-- :• : - :-iiricain, agites.

aacatse et internationale

• L n'est alors même pas encore i m i i i i ni i en 1830 par une

— '. — -'- r.ik. soudaine et inat-l^icarmr. pour elle, déterminante.

• i u consul de France i a s «carBete d'un coup de chasse-r k é n . Charles X décide de venger k l k F r a w . donc a sa personne, en tTaKrr cote de la Méditerranée une a û c a r r . A-t-il à ce moment la moin-db - N m! 11 espère plus n redorer son image sur la scène M i in i en obtenant, à l'extérieur, mmrnr- rapide et d'autant plus bril-- . --:_c :ar sans lendemain. En m ne quoi, un corps expéditionnaire H M 0 O hommes est mis sur pied. k p r le gênerai de Bourmont, i l -- - '- —_.r. en luin 1830, défait les

••ejenee qui lui sont opposées à la StaMeh et entre en vainqueur dans

Charles X devrait être heureux. Il l'est proba­blement quelques instants. Mais la prise d'Alger n'a pas suffit, loin s'en faut, pour régler ses pro­blèmes politiques parisiens. Le 25 juillet, il signe une série d'ordonnances « réactionnaires » qui, entre autres, suspendent la liberté de la presse et rétablissent la censure. Le peuple de Paris s'in­surge. Le 27 juillet i l se soulève. Charles X est contraint à l'exil et le duc d'Orléans, celui dont Thiers écrit qu'il « était à Jemmapes », qu'il « a porté au Jeu les couleurs tricolores » et dont Victor Hugo écrit qu'il fut le « compagnon de Dumouriez » et demeure ir l'ami de La Fayette », devient Louis-Philippe I e r , roi des Français par la grâce de Dieu et par la volonté nationale. En devenant roi, i l jure de respecter la Charte, ce qui est important pour l'avenir de la Légion, et « oublie » qu'un corps expéditionnaire fran­çais se trouve toujours à Alger, ce qui l'est tout autant ! Ces deux événements sont donc fonda­mentaux pour la « future » Légion. En effet la Charte, c'est-à-dire la Constitution de la Monar­chie de Juillet, marquée par l'héritage de la Ré­volution française, prévoit que, seuls, les citoyens français peuvent servir dans l 'armée française. Ce qui ferme théoriquement la porte au recru­tement d'étrangers au service de la France. Mais, dans « sa grande sagesse », c'est-à-dire éga­lement animé d'un solide bon sens, le législateur qui, pour l'occasion, connaît l'histoire, sait que

Louis-Philippe, duc d'Orléans, roi des Français. Peinture de Franz Xavier Winterhalter, 1839.

© Centre documentaire Légion étrangère.

Massacre des gardes suisses en 1830. © Centre documentaire Légion étrangère.

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la France n'a jamais pu se priver, au fil des siè­cles, du recours aux troupes étrangères. Il décide donc de ne pas fermer totalement la porte au recrutement étranger. L'article 13 de la Charte stipule bien, pour des raisons idéologiques, eu « aucune troupe étrangère ne peut être admise au service de l'Etat », mais i l ajoute, par pragmatisme, cinq mots essentiels pour la Légion « sauf par une

I loi spéciale » . Quant au corps expéditionnaire, « oublié » par Paris, il est dans l'expectative. Bourmont, fidèle a Charles X, est démis de son commandement et remplacé par le général Clauzel au début du mois de septembre 1830. Clauzel entreprend, comme le ferait tout chef militaire dans sa situa-

; non, de sécuriser son dispositif en attendant d'être rapatrié. Pour ce faire, i l tente, sans succès, de négocier avec les beys toujours en place dans les grandes villes comme Constantine ou Oran, lance de petites opérations dans toutes les directions, crée des postes de surveillance, implante des petites garnisons et finit par... demander des renforts à Paris. A Paris, le nouveau gouvernement serre les cor­dons de la bourse. Les limitations budgétaires et le désintérêt pour la chose militaire poussent le gouvernement, principalement le maréchal Soult, ministre de la Guerre, à chercher une solution originale.

Alors qu'il cherche la solution, le gouvernement est confronté à un problème international nouveau, aux répercussions nationales nombreuses. A l'instar de la France, partout en Europe les peuples s'agitent, se soulèvent, revendiquent plus de liberté et... sont, le plus souvent, ramenés dans le rang à coups de baïonnettes. Fuyant l'oppression et la répression, mais aussi les difficultés économiques et sociales, des ré­volutionnaires, des déserteurs, des bannis, des proscrits, des laissés-pour-compte se dirigent par milliers vers le pays de la liberté, la France, qui les accueille dans des camps de réfugiés or­ganisés par le ministère de l'Intérieur. Ils arrivent d'Espagne, où sévit la guerre civile, mais aussi de nations qui « n'existent pas encore » au sens politique du terme, comme l'Italie ou l'Allemagne, qui ont été rayées de la carte de l'Europe, comme la Pologne, ou d'Etats nouveaux, comme la Belgique.

Cette situation, qui est à l'honneur de la France, est préoccupante pour le gouvernement qui doit faire face à cet afflux de réfugiés qu'il héberge, nourrit, souvent habille et chausse. C'est là que l'article 13 de la Charte entre en jeu. Et que naît l ' idée d'organiser une Légion composée d'étrangers qui pourrait à la fois encadrer mili-

Légion étrangère en 1831. Dessin d 'André Marcy. © Centre documentaire Légion étrangère.

tairement les réfugiés et les déserteurs de tous poils et rassurer la population qui s'inquiète. Et, avantage supplémentaire, cette force militaire, cette Légion étrangère, pourrait être envoyée pour guerrover en Afrique du Nord, là où le maréchal Soult est confronté à des problèmes d'effectif et à la volonté de rapatriement des troupes métropolitaines. Sans négliger que l'Afrique du Nord exerce sur nombre d'intel­lectuels parisiens une attirance particulière comme le rappelle l'historien Jacques Marseille : « Rêvant d'une union mystique entre l'Orient et l'Occident, convaincus de la nécessité de conquérir l'univers inculte par l'humanité, selon la formule d'Etienne Cahet, saint-simoniens et autres utopistes enchantent les soirée moroses des jeunes Français épris

gloire, de vastes horizons et de profits rapides ».

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La création de la Légion étrangère... sur le plateau de Langres?

En fait, et en dépit de la loi qui interdit le recru­tement des étrangers, sauf vote d'une loi spé­ciale, l 'armée française ne se prive du « service étranger » que moins de deux mois, entre le 5 janvier et le 26 février 1831. C'est en effet le S janvier 1831 que le dernier régiment étranger au service de la France, le régiment de Hofien-lohe est dissous et c'est le 26 février qu'est déposé le projet de loi visant à la création d'une légion d'étrangers. Le même jour, le maréchal Soult, ministre de la Guerre, ordonne à tous les généraux commandant les divisions militaires (territoriales), de dresser la liste des « réfugiés et déserteurs étrangers à l'époque du 5 de ce mois » pré­sents dans leur division et officialise la création d'un dépôt, à Langres, placé sous les ordres du chef de bataillon Sicco « ancien des guerres de l'Em­pire, couturé de blessures » nous dit le Livre d'Or.

Rejoignant son poste le 25 février, Sicco constate et rend compte avec étonnement « qu'aucune mesure n 'a été prise par l'Intendance pour assurer le service du dépôt ». Fort heureusement, ajoute-t-il, « jusqu'à présent aucun détachement n'est arrivé ». Qu'en est-il ? L'ordre donné par le ministère de la Guerre de créer un dépôt de réfugiés et de déserteurs à Langres avait probablement été signé, et le commandant Sicco désigné pour le commander, sans l'ombre d'une hésitation pari­sienne : Langres est assez loin de la capitale, 250 km, la caserne locale doit bien pouvoir accueillir les quelques réfugiés qui s'y présente­ront et Sicco saurait faire ! La réalité est, en cette fin du mois de fé­vrier 1831... différente ! La seule caserne exis­tante, constate Sicco dès le 25 février, « ne peut pas contenir au-delà de 385 hommes en employant des lits à deux places » et est occupée par la 3 I e com­pagnie de fusiliers sédentaires. Dans ses murs, i l n'y a que 48 lits de disponibles. Fort heureuse­ment, le maire de Langres se montre coopératif et « les autorités locales [promettent à Sicco] toute sorte d'assistance ». Le maire propose ainsi, comme cela se fait couramment à l'époque d'essayer d'organiser le logement chez l'habitant

et de demander à ses administrés de fournir des couchages supplémentaires. Mais cela pose à Sicco un problème de discipline. Il redoute que les recrues ainsi éparpillées ne se laissent aller à des actes d'indiscipline. Il cherche donc, mais en vain, des logements collectifs « dans les deux séminaires et les quatre couvents qui existent dans cette ville ». En ce qui concerne l'alimentation des ses hommes, i l dispose localement de cuisines de campagne qui permettent de nourrir 400 hommes.

Le 28 février, i l reçoit ses deux premières recrues. Les « deux déserteurs venant de Metz, l'un bavarois, l'autre prussien, [qui sont] les deux premiers que je reçois » sont peut-être bien les premiers Légionnaires de l'histoire. Bientôt suivis de quelques autres, ils arrivent « dans un état complet de dénuement ». Sur place, Sicco est abandonné de tous. Chef du dépôt, i l ne semble avoir reçu ni ordres, ni moyens. Des ordres, i l en réclame surtout quand arrivent à Langres non pas des réfugiés ou des déserteurs étrangers mais « des ouvriers étrangers employés en France [et] des militaires provenant du régiment Hohenlohe, mais non natura­lisés ». Faute d'instructions précises, i l décide de refuser d'engager les « étrangers provenant de

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Premier uniforme de la Légion étrangère. Musée de l'uniforme légionnaire de Puyloubier. © Centre documentaire Légion étrangère.

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Ordonnance de création de la Légion étrangère. fac-similé. © Centre documentaire Légion étrangère.

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l'intérieur ». Il demande également qu'on lui af­fecte quelques officiers et quelques sous-officiers pour encadrer les recrues et surtout qu'on lui fournisse « des effets d'habillement de première né­cessité », quitte à faire parvenir à Langres « des ob­jets hors de service existant dans les magasins de l'Etat [afin de] changer la position précaire de ces hommes ». Le dépôt se remplit avec régularité avant même la création de la Légion. Les hommes arrivent souvent de Strasbourg qui sert de porte d'entrée en France pour tous ceux qui arrivent d'Europe centrale ou du Nord. Le 5 mars, le général qui y commande la 5e division militaire crée dans l'enceinte de la citadelle un dépôt intermédiaire qui permet de regrouper les arrivants avant de les diriger vers Langres. Il en reçoit environ une centaine avant la date officielle de création de la Légion puis une centaine supplémentaire dans les jours qui suivent. Faute d'officiers et de sous-officiers d'activé disponibles, son dépôt est com­mandé et encadré par d'anciens militaires « en retraite ou en réforme ». A Langres, le nombre des candidats au recrutement dépasse rapidement les capacités d'accueil très limitées du dépôt. Ce qui pousse le ministère de la Guerre à en créer un nouveau à Bar-le-Duc.

La création officielle de la Légion étrangère

Alors que le commandant Sicco se démène autant qu'il peut à Langres depuis une quinzaine de jours, la loi du 9 mars 1831 autorise enfin « la formation d'une légion d'étrangers en France et de corps militaires composés d'indigènes et d'étrangers, hors du territoire continental ». Son article 1 précise que cette légion d'étrangers, comme elle la qua­lifie « ne pourra être employée que hors du territoire continental du royaume ». Le lendemain, l'ordon­nance du roi du 10 mars 18 31, ne traite, à la dif­férence de la loi de la veille, que de « Information de la Légion étrangère ». N'évoquant à aucun

LA LEGION DANS

L'ARMÉE ROYALE

L'Etat actuel de la France et de son armée rappelle, qu'à l'époque de la création de la Légion étrangère, l'armée royale compte 320000 hommes organisés en ISO régiments. Lorsque la Légion étrangère atteint les 5 000 hommes organisés en six bataillons, cela représente l'équivalent quantitatif de moins de deux régiments d'infanterie de ligne dans la mesure où le régiment de ligne compte, avec ses à quatre bataillons, 3 000 hommes.

Grenadier de la première Légion étrangère en grande tenue

d'inspection d'été, 1832. par E.Ponomarev.

Centre documentaire Légion étrangère.

moment la question de son implantation géogra­phique, elle lui donne son nom dans son arti­cle 1 : « Art. 1. U sera formé une légion composée d'étrangers. Cette légion prendra la dénomination de légion étrangère. » Son article 2 stipule, quant à lui, que « chaque compagnie sera, autant que possible, composée d'hommes de même nation et parlant la même langue ». Ce qui pose d'emblée à la direction de l'infanterie un problème inattendu, celui de l'en­cadrement en sous-officiers et en officiers et du commandement dans la langue nationale des fu­turs Légionnaires. Officiers et sous-officiers doi­vent-ils être français, peuvent-ils être étrangers

ou les deux et dans ce cas dans quelles propor­tions ? Le cas des officiers est le plus compliqué. Le recrutement des officiers étrangers devient rapidement un casse-tête pour le ministère de la Guerre. Dans tous les dépôts, le commandement voit arriver des déserteurs étrangers qui s'auto-proclament officiers et soumettent leur engage­ment au respect de grades parfois difficiles à justifier. Ainsi, à Paris, le général commandant la l r e division reçoit, le 3 avril, les dossiers de 13 volontaires à l'engagement : 2 Suédois, 6 Suisses, 3 Hanovriens et 2 Piémontais. Parmi eux, trois se prétendent officiers, six sous-officiers et seu-

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lement quatre soldats, « ex-soldats » ou civils. La situation est pire à Limoges. Le général com­mandant la division territoriale y voit arriver 22 pefugiés dont «19 officiers et seulement 1 sous-offi-jntr et 2 soldats » ! Face à cette incongruité, Soult Wanche. Il interdit à tous les généraux comman-Hant les divisions territoriales de diriger vers les tfepôts de la Légion les « officiers étrangers », (aussi longtemps que leur qualité n'aura pas été périnée. Et, lorsqu'elle l'aura été, leur engage­ment sera subordonné à une décision de niveau ministériel. Jusque-là les « officiers-réiugiés » doivent « continuer de recevoir l'application des • dispositions prescrites par le ministre de l'Intérieur ». B décide enfin que les commandants de bataillon et les officiers comptables seront obligatoire­ment français et qu'il y a lieu, pour l'ensemble des postes d'officiers à pourvoir, « de donner au \mcuns les 2/3 des emplois à des officiers français et F autre tiers seulement à des étrangers ». La direction de l'infanterie est satisfaite par la décision du mi­nistre. Manquant d'officiers français, elle n'est pas obligée de dégarnir des unités existantes pour encadrer la Légion, mais elle peut néan­moins offrir des affectations intéressantes à des officiers qui en sont privés par la « rareté des pestes » en période de restriction budgétaire.

La Légion à Bar-le-Duc

Des l'annonce de la création d'un dépôt à Bar-le-Duc, la population s'inquiète. Le préfet de la Meuse en rend compte au ministre de la Guerre le 22 mars : « L'autorité municipale de Bar-le-Duc Kclame vivement contre la formation dans cette ville d un dépôt de déserteurs étrangers ». Mais le préfet, pas plus que le maire, ne peuvent s'opposer à la décision gouvernementale. Le 7 avril, le commandant Clavet Gaubert est désigné pour prendre, à Bar-le-Duc, « le commandement de la

Shako du modèle 1825 en cuir ou modif ié 1828 en carton avec plaque de cuivre du modèle du 11 septembre 1830, estampée d'un coq entouré de drapeaux. Musée de l'uniforme légionnaire de Puyloubier. © Centre documentaire Légion étrangère.

Portrait du colonel Combes, huile sur bois. © Musée de la Légion étrangère, 1 e r régiment é t ranger

EXTRAIT D'UNE LETTRE DE DU CHEF DE BATAILLON CLAVET GAUBERT, COMMANDANT LA PLACE DE

BAR-LE-DUC ET DU DÉPÔT DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE EN DATE DU 17 MA11831

« [...], la dispersion de ces hommes dans les maisons des habitants et dans une ville sans portes et sans enceinte ; pas un fusil, et par conséquent aucun moyen d'établir une bonne garde de police et des patrouilles, ni habillement, ni équipement, ni armement à entretenir, nul service à faire ; d'où naît l'oisiveté qui favorise le penchant naturel des Allemands pour la boisson ; l'absence de presque la moitié des officiers et de la totalité de sous-officiers qui nous ont été annoncés sont autant de cause dont la réunion pourrait produire les résultats les plus fâcheux. Les sous-officiers et les caporaux que nous avons provisoirement choisis ne le sont que de nom ; ils ne portent pas, ils ne peuvent porter les marques distinctives du grade, ils n'ont pas confiance en eux-mêmes, ils sont sans autorité et sans action sur leurs subordonnés, dont quelques-uns n'oublient pas qu'ils étaient revêtus des mêmes grades dans les régiments dont ils proviennent »...

place et du dépôt d'étrangers qui y est établi ». Il trouve, en arrivant le 18 avril un dépôt fort de quelque « 408 déserteurs étrangers qui sont destinés à faire partie de la Légion étrangère » et retrouve le chef de bataillon Salomon de Musis qui vient d'être, peu auparavant nommé par le ministre « au commandement du bataillon ». Ensemble, ils entreprennent d'organiser le 1 e r bataillon en quatre compagnies, comme cela se fait dans les régiments d'infanterie de ligne qui doivent servir de référence à l'organisation de la Légion. L'en­cadrement est formé à partir « d'officiers des dé­partements de l'Est ou d'officiers allemands qui ont fait les campagnes d'Allemagne ». Les premiers, nommés avec le grade de capitaine pour com­mander les quatre premières compagnies sont « MM. Germann Ferdinand, chef de bataillon au 1" Suisse de 1ex-garde, Germann Auguste, au 1" Suisse de l'ex-garde, Bruchez, idem et Verrati, en réforme à Paris ».

Dans les jours qui suivent, le commandant Clavet Gaubert, qui voit l'effectif du dépôt approcher les 600 hommes, rend compte au ministre qu'il dispose, de son point de vue, d'une ressource suffisante en quantité et en qualité pour organiser huit compagnies. Il porte sur les recrues un pre­mier jugement intéressant : « L'espèce d'hommes est généralement fort belle ; le plus grand nombre

façonné à l'instruction et à la discipline. Et malgré l'inconvénient de leur logement chez les bourgeois, l'ordre a été jugé jusqu'à ce jour parfaitement main­tenu ». Et, en dépit des craintes initiales relayées par le préfet de la Meuse, les relations avec la municipalité et avec la population sont excellentes ou du moins est-ce la première impression de Clavet Gaubert.

En effet, le logement chez l'habitant, qui apporte quelques avantages et menus plaisirs aux uns et aux autres, rend l'exercice du commandement délicat. L'indiscipline devient même, au début du mois de mai 18 31, la norme. Clavet Gaubert s'en ouvre sans retenue à la direction de l'Infanterie et au ministre de la Guerre : « La police et la discipline sont ce qu'elles peuvent être dans un amas d'hommes venus de tous les pays, sans sous-officiers et avec 12 officiers dont quelques-uns ont besoin de re­commencer leur apprentissage militaire ». L'ivrognerie, « penchant naturel des Allemands » écrit-il, prend une proportion notoire, constatant que des recrues « vendent leur pain, leurs effets de linge et leurs chaussures pour boire ». En découlent nombres de larcins et de vols chez l'habitant « suite presque inévitable du logement en ville ». L'indiscipline va jusqu'à la désertion collective. Cette désertion collective est intéressante car elle traduit bien la désorganisation du dépôt au début du mois de mai 1831, faute d'encadre­ment et de casernement. Apprenant « qu'une vingtaine d'étrangers avaientformés un complot de dé­sertion dont l'exécution devait avoir lieu dans la nuit » Clavet Gaubert s'organise. Il coordonne son

LÉGION EltftHBfflï - H

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NOTE DE LA DIRECTION DE L'INFANTERIE

AU MINISTRE, ÉTÉ 1831

La proportion de 3/5 d'officiers français pose un problème à la direction de l'infanterie pour les bataillons allemands : « On doit lui faire [au ministre] remarquer que pour les bataillons composés d'Allemands, la proportion indi­quée ci-dessus ne pourra être observée, surtout à l'égard des capitaines, par le défaut de sujets originaires de l'Allemagne ». Dans ce cas, restent les officiers suisses, mais « le maréchal ne paraît pas dans l'intention d'en employer ».

action avec le préfet, le maire, la garde nationale et la gendarmerie. Des patrouilles surveillent les routes dirigées vers le Nord, c'est-à-dire vers la Belgique, et le meneur est arrêté et fortement incité à dénoncer les autres déserteurs. Ce qui pose un problème majeur à Clavet Gaubert car une partie des recrues n'a toujours pas, en raison des lenteurs de l'intendance, « signé d'acte d'enrôlement ». La conséquence en est fâcheuse

pour Clavet Gaubert car, comme il l 'écrit : « Ceux qui n'ont point contracté d'engagement ne peu­vent être traduits devant un conseil de guerre ». Ce qui lui fait redouter que d'autres désertions ne se produisent parmi des soldats qui ne peuvent être qualifiés de déserteurs car ils ne sont pas encore « officiellement » soldats et espérer de pouvoir prendre sur le fait une « vraie » recrue « pour le traduire en conseil de guerre et tâcher d'arrêter les désordres par un exemple ». Toute cette indiscipline ne le perturbe néan­moins pas puisqu'il estime que, dans un contexte difficile, « le bon ordre et la discipline se maintiennent

beaucoup mieux qu'on n'aurait pu l'es­pérer » et qu'il peut

Ci-dessus, bonnet de police du modèle 1822 modif ié 1828. Par E.Ponomarev. © Centre documentaire

* » Légion étrangère

Dépôt de Toulon. Tenue de travail. Par E.Ponomarev. © Centre documentaire Légion étrangère

« se louer du bon esprit des habitants qui montrent beaucoup plus d'indul­gence et d'humanité pour

y^' les étrangers et supportent leur présence avec une rési­

gnation qu'il serait difficile de rencontrer dans d'autres villes ». Et Clavet Gaubert a raison car, en dépit de l'in­discipline latente, l'organisation du 1 e r bataillon va bon train au milieu de mille difficultés régu­lièrement surmontées.

L'organisation du 1e' bataillon

De presque 600 à la fin du mois d'avril, l'effectif du dépôt passe à 784 le 4 mai. Si les recrues abondent, les officiers et les sous-officiers font défaut. Il manque, au 1 e r bataillon, 11 officiers sur un total réglementaire de 23 et 12 sous-officiers sur un total de 15. Sur les 1 3 officiers présents, « deux ou trois connaissent leur métier et montrent du zèle, les autres sont au-dessous du médio­cre de toutes les manières ». En ce qui concerne les sous-officiers, le com­mandant Salomon de Musis n'en dispose donc que de trois pour encadrer son bataillon. La solution adoptée localement pour en augmenter le nombre consiste, ainsi que pour les caporaux, à promouvoir, parmi les étrangers, « les plus

capables et les plus expérimentés ». Ce qui est une bonne solution mais pose de nombreux pro­blèmes, le premier étant lié à la mauvaise volonté du commandement qui semble se désintéresser totalement de ce qui se passe à Bar-le-Duc. En effet, le 25 avril, de concert, Salomon de Musis et Clavet Gaubert demandent au général Simo-neau l'autorisation de nommer définitivement les sous-officiers et les caporaux étrangers qu'ils ont « soigneusement choisi » pour encadrer le 1 e r

bataillon. Puis ils attendent la réponse du géné­ral. Ne voyant rien venir, Clavet Gaubert entre­prend de « tourmenter [le général Simoneau] pour qu'il en autorisât la nomination définitive ». Homme de décision las d'être tourmenté, le général répond le 15 mai, presque un mois plus tard,

« que la demande a été soumise au ministre et, qu'avant d'avoir reçu ses instructions à cet égard, il ne peut rien statuer ». Ce dont Clavet Gau­bert rend compte directement au maréchal Soult... Les promotions finalement obte­nues, les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes. Les promus, choisis par l'encadrement français qui n'a pas tou­jours identifié ceux des sous-officiers étrangers qui dissimulent leur origine, éprouvent beaucoup de difficultés à se

faire obéir de ces derniers qui n'hésitent pas, en retour, à les railler. Qui plus est, la pau­vreté en moyens du dépôt ne permet même pas, dans un premier temps, de donner à chaque nou­veau sous-officier un unilorme distinct, ni même les « marques distinctives de leur grade » ce qui « af­faiblit leur action sur des hommes d'une origine équi­voque prédisposés à l'indiscipline... ». Ainsi les sous-officiers et les caporaux étrangers « presque déconsidérés, ne touchant que la solde du soldat, n'ayant d'autres prérogatives qu'un pouvoir emprunté au nôtre et qu'ils n'ont pas la certitude de conserver »

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BAR-LE-DUC, ÉTAT DES EFFECTIFS AU 16 JUILLET 1831

Le colonel Stqffel rend compte à Paris de sa situation d'effectif: Un colonel, un chef de bataillon, un major, un adjudant-major, deux trésoriers, cinq capitaines, neuf lieutenants et huit sous-lieutenants. Soit : - 29 officiers ; - 54 sous-officiers; - 43 sous-officiers ; -17 tambours ; - 1420 soldats; Soit au total : 1 664 hommes.

ÙGIONKif i f - r

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- apportent que peu à l'encadrement du kauillon. Notons enfin que ces quelque 800 premiers Légionnaires n'ont pas d'armement, car i l n'a •as été livré, ce qui rend l'instruction mais aussi « le service de garde, de police, de patrouille... » dif­ficiles à organiser, qu'ils ne disposent que de r A 1 shakos, et « après réclamations, de 474 redin-pxes « ce qui fait « qu'il y a donc 298 hommes qui x ont que les effets avec lesquels ils sont arrivés et qui e trouvent détériorés par une longue route ». Ce qui r empêche pas l'effectif de croître régulière -—ent, dépassant les 900 en mai, le millier en juin t: atteignant le chiffre de 1 664 hommes le 16 juillet 1831.

En dépit de tout, une instruction rudimentaire *c déroule à Bar-le-Duc. L'encadrement s'ef-: : rce. avec les moyens du bord, « d'exercer tous les femmes aux diverses manœuvres de l'école du soldat r. du peloton ». Et, dès Bar-le-Duc, les légion­naires deviennent des terrassiers à défaut d'être leja des bâtisseurs : « Comme le champ d'exercices qui nous a été affecté est un pré longtemps humide s?res la cessation de la pluie, nous avons employé nos ezrangers à retirer du sable de l'Ornain, qui baigne presque les murs de la caserne et nous avons ensablé . esplanade sur laquelle nous les exerçons ».

Premier bilan, juin 1831

Au début du mois de juin 1831, un bruit court à Bar-le-Duc selon lequel « le bataillon de la Légion étrangère qui s'organise ici, écrit Clavet Gaubert, illait recevoir incessamment l'ordre de partir » ! Face a ce bruit, le chef du dépôt dresse, à l'attention du ministre, un premier bilan de l'état du bataillon au 4 juin. Jugeons. Le bataillon ne possède, à cette date aucun des livres de comptabilité nécessaires au suivi du ma­tériel et de l'armement. Les livres sont « com­mandés et attendus ». Il ne possède pas de registre-matricule pour enregistrer réglementai-

Premier drapeau de la Légion étrangère. © Musée de l 'Armée.

rement tous ses légionnaires. Le registre est, lui aussi, attendu. Sa confection « sera lente et difficile, ayant à constater l'état civil d'hommes parlant une langue étrangère, qui ne sont pourvus ni d'actes de naissance ni de pièces équivalentes et dont la plupart ont changé de noms ». Il manque toujours à l'ef­fectif 8 officiers, dont cinq capitaines, l'officier-armurier et le chirurgien. L'habillement et

l'équipement sont presque complets, sauf les havresacs qui sont attendus pour juillet. L'arme­ment n'a toujours pas été livré mais « l'ordre d'expédier les armes est parvenu à Metz ». L'instruction dispensée est celle qui peut l 'ê t re . . . sans armes. Il faudra donc « un certain temps » pour « obtenir quelque ensemble entre ceux qui savent mal et ceux qui ne savent rien » puis pour entraîner les hommes « à la marche dans un corps réservé sans doute à une destination lointaine ». Néanmoins, « au physique, l'espèce ne saurait être plus belle [et], au moral ils sont animés du meilleur esprit ». En foi de quoi le commandant Clavet Gaubert demande au maréchal Soult juste deux mois supplémentaires « pour achever ce qui a été si bien commencé » et pour créer « cetteforce de cohé­sion que donne l'habitude de la caserne, le lien de la discipline, le sentiment d'honneur et de fidélité qui attache au drapeau ».

En post-scriptum Clavet Gaubert ajoute : « M. le colonel Stqffel vient d'arriver. 11 m'a demandé commu­nication de cette lettre, se proposant, Monsieur le Maréchal de vous écrire sur le même sujet »... Mais ceci est une autre histoire. •

Vue de Langres, gravure. © Roger-Viollet.

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L e 1 e r R E C a u Prise d'armes, défilé et manœuvre près de la forêt de la Mamora sont rappelés dans ce reportage.

Pôle des archives ECPAD

Episode célèbre de la geste légion­naire, la prise d'armes de Mamora

constitue le symbole de la reconstruc­tion d'une Légion étrangère moderni­sée qui adopte les tactiques américaines en constituant des « Combat-command » sur le modèle du binôme char-fantassin. Dans ce reportage, le lieutenant-colo­nel Miquel commandant le 1 e r REC passe en revue le 5e escadron de l'unité, complètement pourvue, depuis peu, de matériel américain. C'est le 15 septembre 1943 que l'es­cadron de reconnaissance du 1 e r RCA (régiment de chasseurs d'Afrique) est affecté au 1 e r REC et prend le numéro 5, tandis que le régiment reçoit son nouveau matériel. L'éten­dard du régiment est présenté à l'unité puis l'escadron, équipé de canons de 57 mm M l , de chars légers M3 Stuart, d'automitrailleuses M8 et d'obusiers automoteurs de 75 mm M8 défile, pendant que la musique du régiment joue. Le 1 e r REC forme désormais le régiment de reconnaissance de la 5e DB (division blindée) dont la devise « France d'abord » est visible sur les différents matériels nouvellement perçus. Le lieutenant-colonel Miquel explique une manœuvre sur une carte étalée sur le pare-brise d'une jeep, devant des officiers rassemblés autour de lui. Le reportage se termine par des portraits de groupe des hommes de troupe et des officiers et par la vue d'une jeep accidentée -délaissée sur le bas-côté de la route. •

FICHE TECHNIQUE Référence du reportage -.TERRE 103 — Date de prise de vues : 15 septembre 1943 — Date d'en­trée dans les archives : 11 octobre 1943 — Nombre de clichés total : 64 — Photographe in­connu. Droits : Service Cinématographique de l'Armée/ECPAD.

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Le colonel Miquel devant son régiment. © E

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Trompette du 1« r e c

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L e 1 e r R E C a u M a r o c

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TEMOIGNAG n

Saut opérationne Salih Gusic

Béret vert vissé sur le crâne et blazer bleu marine ajusté, Salih Gusic ne rate jamais une occasion de rendre hommage à ses camarades de combat en témoignant auprès des jeunes

générations. Une manière pour cet ancien légionnaire parachutiste de per­pétuer le souvenir d'une vie extraordinaire au service de son pays

d'adoption.

S'

KJ C

lih Gusic est né en Yougoslavie, plus pré­cisément en Bosnie-Herzégovine, dans la

ville de Banja-Luka. En 1944, devant la détériora­tion de la situation et l'approche de la fin de la Seconde Guerre mondiale, devant l'avancée des troupes soviétiques à travers les Balkans, une très

grande partie de la population a fui laYougoslavie, la Bosnie, la Croatie et la Slovénie pour échapper aux soldats. A 17 ans, il fait partie de ce flot de ré­

fugiés et il est interné dans différents camps en Italie par les troupes anglaises sous le régime de « displa-ced persons ». Après deux ans on a autorisé un cer­tain nombre de chef d'entreprises à venir chercher des volontaires pour aller travailler à la reconstruc­tion de l'Allemagne. Salih accepte la proposition mais, sur place, l'avenir semble limité. Avec un ca­marade, il rejoint Coblence et préfère un engagement dans la Légion aux mines du Nord de la France. Ra­pidement dirigé sur Marseille puis Sidi-Bel-Abbès, il est remarqué pour sa compréhension du français, appris au lycée comme première langue, et rejoint rapidement le peloton de caporal. En 1 948, il est af­

fecté au 2e bataillon étranger de parachutistes et ef­fectue son premier séjour en Indochine. Ainsi commence une carrière militaire exemplaire qui s'achèvera après la guerre d'Algérie. Pour illustrer le caractère audacieux de l'utilisation des bataillons parachutistes, l'adjudant-chef Gusic a choisi de nous

L'OPERATION HIRONDELLE

Le 17 juillet 1953, le 6e BPC et le 8e bataillon de choc sautent sur Langson. L'opération Hirondelle est déclenchée. Surpris, les

I quelques éléments Viets sur place sont balayés. 1 000 fusils-mitrailleurs, 6 camions dont 2 Molotova, de nombreuses armes légères,

8 machines-outils et d'autres équipements en grande variété et en grande quantités sont détruits par les parachutistes qui décrochent rapidement par la RC4.

Le 2e BEP du capitaine Merglen est largué en recueil près de Loc Binh avec des éléments du génie chargés de préparer le franchissement du Song Ky Kong, 20 kilomètres au sud de Langson. Accompagné de 300 ci­vils, les parachutistes vont marcher 48 heures sans interruption. Le 19 à 5 heures, tous les parachutistes ont été évacués par les camions du GM5 commandé par le lieutenant-colonel Raberin, chef de corps du 5e REI. De Tien Yen à Dinh Lap, le GM5 et ses légionnaires du 2e bataillon ont rouvert 50 kilomètres de routes en 36 heures pour tendre la main aux parachutistes. Sur un effectif largué de 2 001 hommes, les pertes sont de 4 morts — dont 3 d'épuisement—, de 3 disparus et de 21 blessés évacués par hélicoptères.

Portait du sergent Gusic en 1952. © Coll. part. Salih Gusic.

faire revivre la participation du 2e BEP à l'opération Hirondelle. « De retour en Indochine pour mon deuxième séjour, j'eus la chance d'être affecté dans mon bataillon d'origine, le 2e BEP"», dont la base ar­rière se trouvait toujours à Hanoï - Bach M a ï -cité universitaire. Le bataillon était en opération à Na San ; notre renfort armé et équipé fut aus­sitôt dirigé par avion vers le pays thaï. Apres une heure de vol, nous atterrissions dans le camp re­tranché à Na San. Nouvelle satisfaction en ce qui me concerne, nous sommes treize à être affectés

1 1 1 Bataillon étranger de parachutistes.

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S a u t s u r L o c B i n h

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rte simplif iée de l'opération Hirondelle. © Service Historique de la Défense.

à la 5e compagnie, trois sous-officiers dont mon narade Patri, deux caporaux et huit légion-res. Le capitaine Boge, commandant de la

5* compagnie, me confie la fonction de chef de la section de voltige, composée de paras vietna­

miens avec un encadrement légionnaire et vietna­mien, en remplacement du lieutenant Lalet arrivant en fin de séjour. Dans la compagnie se trouvait également le lieutenant de Biré dont j'avais fait la connaissance en Afrique du Nord et qui exerçait la fonction d'officier adjoint. Lors de mon premier séjour j'avais surtout

exercé la fonction de chef de transmission ; aussi éprouvais-je une grande fierté à commander une section de voltige avec laquelle je devais partici­per à de nombreuses opérations dans différentes régions d'Indochine, notamment l'opération Hi­rondelle sur la RC4<2>.

Retour à Hanoï

De retour du Laos où i l était engagé depuis le 18 avril 1953,1e 2' BEP atterrit le 5 juillet à Bach Mai. Les légionnaires parachutistes retrouvent

alors "leur" base arrière et, entre remise en condition du matériel et permissions de sortie, préparent la célébration de la fête nationale. Nous ignorions toujours qu'une grande opéra­tion, le parachutage sur la RC 4, était en prépa­ration. Une importante cérémonie a lieu ce 14 juillet 1953 en présence du général Navarre, comman­dant en chef en Indochine, venu spécialement de Saigon. Des troupes aéroportées et des unités de blindés participent au défilé. À cette occasion, le général Navarre procède à des remises de dé­coration et notre bataillon reçoit une nouvelle croix de guerre avec palme ; le fanion est porté par le capitaine Merglen commandant le 2e BEP. Puis la cérémonie est survolée par des avions qui lâchent des parachutistes au-dessus du petit Lac. Comme d'habitude, les festivités du 14 juillet sont suivies par une grande partie de la popula­tion de Hanoï.

Alerte aérienne

Le lendemain, nous reçûmes l'ordre de nous préparer en vue d'une éventuelle opération. Nous étions à Hanoï depuis déjà dix jours, séjour anormalement long, par conséquent nous nous attendions à un départ proche. Le 16 juillet, à 14 heures, le bataillon est mis en alerte aérienne et consigné au cantonnement. Une réunion pré­paratoire sous la direction du colonel comman­dant les TAP< 5 ) Nord a lieu à 15 heures à la SON.< + ) Y assistent pour le 2e BEP le capitaine

1 2 1 Roule coloniale n34. 1 3 1 Troupes aéroportées Nord. <4' Section Opérations Nord.

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Canon de 75 mm sans recul du 2 8 BEP. © ECPAD.

Patrouille dans les rizières.© ECPAD.

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S a u t s u r L o c B i n h

LA 5e COMPAGNIE DU 2e BEP

f Nous savons déjà que la compagnie était com­mandée par le capitaine Boge et que le lieute­nant de Biré exerçait la Jonction d'adjoint. La 1" section était commandée par le sergent-chef Dalla Costa avec pour adjoint le sergent Mon-tag, la 2" section par le sergent Vrignaud avec pour adjoint le sergent Daniel, la 3" section par le sous-lieutenant Comptât avec le sergent Stad-ler pour adjoint, la 4e par moi-même et mon ad­joint le sergent André. La section lourde avait pour chef le sergent Patri et le sergent Wallisch comme adjoint. Enfin notre adjudant de com­pagnie était le sergent Perusset. La compagnie était composée d'un groupe de commandement, quatre sections de voltige et une section lourde. Cette dernière comprenait une mitrailleuse de 30, un mortier de 60 et un canon de recul de 37. Les sections de voltige étaient formées d'une équipe de commandement et de deux groupes, chacun composé d'une équipe

feu dotée d'un fusil-mitrailleur 24-29 et d'une équipe de voltige. En général l'effectif opération­nel de la compagnie était de 160 hommes. La compagnie comprenait deux sections de paras au­tochtones à encadrement européen et vietnamien, et deux sections d'européens ; dans la section lourde se trouvait également un certain nombre de paras vietnamiens. La compagnie était bien commandée et je m'y sentais à l'aise. »

jusqu'au fleuveYa-Lou au niveau de la frontière entre la Corée du Nord et la Chine. Une « variante » est prévue pour le 2e BEP : si les deux bataillons de tête tombent sur un coup dur ou rencontrent des difficultés imprévues, i l sera largué lui aussi sur Lang Son. Un quatrième bataillon de parachutistes est maintenu en alerte immédiate à Hanoï et pour­rait être largué pour protéger le repli. A 19 heures, a lieu une étude de la mission du 2" BEP en présence de tous les commandants de compagnie et chefs de section. Le saut doit avoir lieu par 1 / 2 stick sur la DZ < ' ) de Khon Chang. Il est prévu que le bataillon soit largué en deux vagues :

— dans la première vague, la 5e compagnie, 4 e compagnie, PC léger et Génie. — dans la deuxième vague, la 6e compagnie, CCB<10>et CIPLEC). Les parachutes susceptibles d'être récupérés ul­térieurement doivent être ramassés et stockés à un endroit accessible aux véhicules, le plus près possible de la RC 4.

Missions des unités

La 5 e compagnie doit se regrouper au sud-ouest de la zone de saut après avoir récupéré ses parachutes ; elle a pour mission de se porter au pont sur la RC 4,

s'en emparer si besoin est, et assurer la protec­tion de l'équipe du Génie qui doit réaliser le franchissement. La 4 e compagnie a pour point de regroupement Ban Tau, elle doit reconnaître le village puis, der­rière la 5° compagnie, atteindre le pont, franchir le Song Ky Cung et, en tête du dispositif, pousser sur Loc Binh, s'v établir et effectuer des recon­naissances face à l'est sur la Route de Chine. La CCB doit aussi se regrouper à Ban Tau et, à l'exception du service de Santé, pousser derrière les 5" et 4 e compagnies pour s'installer à Loc Binh. Le service de Santé se chargera de la récu­pération des blessés au saut. La 6e compagnie se regroupera au sud-est de la zone de saut, puis reconnaîtra les villages de Khon Chang et An Ma ; ensuite elle rejoindra le pont et prendra à son compte la mis­sion de la 5e compagnie qui ira sur Loc Binh en soutien de la 4 e compagnie. La 2' CIPLE, dont le

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Dispositif de recueil 3e l 'opération Hirondelle. 3 ECPAD.

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Page 63: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

I T É M O I G N A G E

LA TENUE OPÉRATIONNELLE

« La tenue opérationnelle comprenait une veste camouflée du genre US Marines du Pacifique 18, un pantalon camouflé plus foncé d'origine britannique (à l'origine c'était un survêtement de camouflage qui servait aussi de tenue de sport ; la tenue était peu commode pour satisfaire ses besoins naturels) qui avait pour inconvénient defaire du bruit une fois mouillé, ce qui était gênant lors des mises en place des embuscades. Aux pieds, nous avions des bottes de saut de fabrication française obligatoires pour les sauts opérationnels. Pour des opérations sans saut nous avions des chaussures de brousse. Les engagements devenant de plus en plus sérieux, nous portions des casques US. Lorsque nous étions au repos, nous avions nos rets verts, les paras vietnamiens avaient pour leur part des bé rets kaki. Au cours de certaines opérations, il nous arrivai! Jj^_ <i ^ ^ [V de porter des chapeaux de brousse. »

point de regroupement est fixé au sud-est de la zone de saut, a pour objectif de ratisser cette zone. Elle doit récupérer les parachutes et le ma­tériel spécial" 2 ' (gaines) et les transporter de Ban Tau vers la RC 4. Le service de Santé opérera avec la 2e CIPLE.

Saut sur les arrières de l'ennemi

Au cours de la réunion nous recevons les instruc­tions opérationnelles détaillées comprenant la description de la DZ de Khon Chang, la fiche de renseignements sur l'implantation ennemie et les possibilités de son intervention, la photo aé­rienne avec la DZ matérialisée, les cartes au 1 : 100 000 de la région de Lang Son, Loc Binh et Tien Yen et comme d'habitude, nous n'avons pas de chance : le secteur opérationnel est situé sur les limites de deux cartes ! Sont joints à ces documents un croquis manuel agrandi de notre secteur opérationnel ainsi qu'un croquis com­portant des zones favorables en cas d'imprévu. De retour au cantonnement, j'ai informé les gra­dés que nous allions effectuer un saut sur les arrières de l'ennemi, et que par conséquent i l fallait vérifier attentive­ment l'état de préparation de la section, en particulier l'armement, les munitions, les ra tions, les équipements, et inspecter soigneuse­ment l'état des bottes de saut en prévision des marches que nous allions faire. En outre, il fallait veiller à ce que les hommes n'apportent que le strict nécessaire et laissent à la base les petits souvenirs, photos, etc. Je prévoyais d'informer les hommes de notre objectif ainsi que des ren­seignements complémentaires à propos de notre regroupement au sol et du déroulement de l'opération uniquement le lendemain, sur le ter­rain, avant d'embarquer dans les avions. Sou­vent, les veilles de départ pour ce genre d'opérations, ceux de nos camarades qui n'y par­ticipaient pas venaient nous taquiner en nous dc-

,12> Gaines de largage pour le matériel collectif. ECPAD / Collection Raymond G.

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S a u t s u r L o c B i n h

Carte d e l à zone d'opérat ion © Coll. part. Salih Gusic

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EMOIGN

Patrouille dans un village du Tonkin. © ECPAD.

mandant de leur laisser nos objets de valeur au cas où nous ne reviendrions pas, étant donné le danger que représentait la mission. Le moral était bon, et comme toujours dans des cas sem­blables, nous avions hâte de partir et de nous re­trouver sur notre objectif. Comme dans un de nos chants, "l'enthousiasme et la vaillance" étaient de mise.

Saut opérationnel sur Loc Binh

Enfin nous connaissons notre mission. Le fait d'être parachutés pour la première fois sur la RC 4 nous rappelle les durs combats de 1950 au cours desquels notre bataillon frère, le 1 e r BEP, avait subi d'énormes pertes. A cette époque, la moitié du 2e BEP était monté de Sai­gon en renfort au Tonkin et s'attendait à être en­gagé sur la RC 4, mais au dernier moment le haut commandement décida de parachuter les renforts beaucoup plus à l'ouest, au nord de Lao Kay, près de la frontière de Chine. Le 17 juillet 1953 à 7 heures, le bataillon est ras­semblé à la cité universitaire avec un effectif opé­rationnel de 693 hommes et 31 gaines. Départ en camions à 7 h 30 pour le terrain de Bach Mai, présentation à 8 heures, perception des para­chutes et équipements. Comme notre bataillon faisait partie de la deuxième vague opération­

nelle, je profite du temps d'attente pour expli­quer à la section le déroulement de l'opération et préciser certains détails sur notre regroupe­ment au sol. Notre compagnie étant en tête de la première vague du bataillon et les avions se présentant au-dessus de la DZ trois par trois, nous procédons au fractionnement des sections pour faciliter le regroupement au sol et éviter ainsi la trop grande dispersion des hommes. Comme d'habitude, l'attente nous paraît longue, il fait déjà très chaud. Nous nous demandons si tout s'est bien passé pour les bérets rouges et quelle va être notre destination. Vers 1 Oh 30, les appareils arrivent et l'ordre d'embarquement est donné à 10h45. L'opération se déroule comme prévu et les conditions sont bonnes. Nous allons être largués sur Loc Binh sans aucun changement en ce qui concerne notre mission. Le bataillon embarque dans les Dakotas ; les décollages com­mencent à 11 heures.

« Debout, accrochez »

La durée du trajet n'est pas bien longue, et compte tenu du fractionnement des sections nous n'essavons pas d'entamer un de nos chants habituels ; de plus, notre harnachement et la cha­leur qui règne dans l'avion ne nous y encoura­gent guère.

À midi, les appareils se présentent sur l'objectif et le parachutage débute. Arrive enfin l'ordre « debout accrochez », le mo­niteur vérifie l'accrochage des mousquetons. Le rouge est mis, encore quelques instants et le vert s'allume et retentit la sonnerie qui l'accom­pagne ; c'est la ruée vers la porte. Ça y estje suis dehors, mon parachute s'est ouvert. Comme à l'accoutumé, je lève la tête pour ins­pecter la voilure ; pas de déchirure, tout va bien. Un coup d'œil à ma droite me permet de voir un de mes paras vietnamiens presque à ma hau­teur, i l ne semble pas non plus avoir de pro­blème. A ma gauche, un autre de mes paras vietnamiens descend normalement. Enfin, je baisse la tête pour voir ce qui nous attend au sol et j'ai alors une désagréable surprise. Alors que je m'attendais à atterrir dans une rizière, j'ai en dessous de moi une canha(13) avec une cour en terre battue, une mare et un arbre en boule de taille moyenne. D'abord, je pense essayer de ma­nœuvrer avec mon parachute afin d'éviter ces obstacles, mais cela présente le risque d'accro­cher les deux paras vietnamiens proches de moi. je décide donc de laisser faire le hasard car le sol

, l 3 ) « Maison » en vietnamien.

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Saut sur Loc Binh

monte vite sous mes pieds : l'air porte moins ivec cette chaleur. Le hasard m'attribue l'arbre ; je le traverse sans r.en de grave et reste suspendu à l'intérieur, mes .imbes le long du tronc. Je dégrafe mon harnais et me retrouve au pied de l'arbre. L'accueil du -•-Jlageois nous surprend agréablement : une cer­taine sympathie persiste malgré l'absence de nos troupes depuis 1950. Après que le paysan nous a ittirmé qu'il n'avait pas vu de Viets dans les en-rirons, nous commençons à nous regrouper comme prévu.

Occuper l'objectif

D après la description de la DZ, nous nous at­tendions à atterrir dans des rizières remplies ; eau, mais le temps très chaud du mois de juil­let les a asséchées, ce qui facilite le regroupe­ment des sections. En revanche, le sol durci par le soleil et plein d'aspérités provoque quelques incidents lors de l'arrivée au sol. Dans l'ensem-~4e le saut s'est bien passé, la compagnie ne dé­core pas de pertes. Quelques hommes sont : jmbés dans le Song Ky Cung mais ils ont réussi * s en sortir.

Une fois les parachutes récupérés et laissés à rr:\imité de la petite route, je reçois immédia­tement l'ordre de me diriger avec la section vers la RC 4. Ma mission est d'occuper le pont qui permet de franchir un petit affluent du Song Ky Cung au sud de Po Loi. Le reste de la 5e compa­gnie doit me dépasser et s'installer sur la rive sud. 500 mètres plus loin, au niveau du pont dé­truit du Song Ky Cung. Ce dernier est l'objectif te .a compagnie qui doit en assurer la protection en attendant l'arrivée des équipes du génie, lar-ruees en même temps que nous, et chargées de réaliser le franchissement du fleuve. Notre compagnie atteint son objectif vers '. 5 heures ; compte tenu de la chaleur, l'affluent es: presque à sec. Enfin nous voici sur cette lé-; r.daire Route Coloniale n° 4 pour laquelle tant de nos camarades et frères d'armes se sont battus jusqu'à fin 1950 et où beaucoup y ont laissé la rie. Je pense aussi à la 516e Compagnie du Train :ont les conducteurs étaient en majorité des lé­gionnaires qui, à force de prouesses sur un ter-ram particulièrement accidenté, continuaient inlassablement à faire arriver leurs camions -osqu'à Cao Bang, lançant comme un défi à l'en­nemi malgré des embuscades répétées ainsi que de nombreuses pertes. Nous sommes rejoints par la 4 e compagnie du lieutenant Gillot qui est la première à franchir le Song Ky Cung, puis à

L'état-major du GAP 1 pendant la planification 3e l'opération « Hirondelle ». Au centre, le général

Gilles commandant des TAPI, à droite le général Cogny et le chef de bataillon Bréchignac (2e bat.

du 1 e ' RCP). © ECPAD.

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Mise en place du dispositif de recueil. © ECPAD.

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Matériel militaire ennemi récupéré dans les grottes de Ky Lua. © ECPAD.

Pause-café dans Lang-Son pour les paras du 6 e BPC. © ECPAD. En bas à droite : évacuat ion d'un blessé par un hél icoptère Vought-Sikorski. © ECPAD.

occuper la localité de Loc Binh et se mettre ejâ garde face à l'est sur la route de Chine. Tout se déroule comme prévu, la surprise a été totale, pas de Viets et nous pouvons « souffler » un peu pendant que le Génie établit un va-et-vient des portières sur le Song Ky Cung.

Sur la route de la Chine

Vers 16 heures, nous sommes relevés par la 6e

compagnie du capitaine Vial qui vient de fouiller deux petits hameaux, Khon Chang et An Ma. A

notre tour, nous rejoignons Loc Binh po mettre à la 4' compagnie de pousser plus a . sur la route de Chine et s'y installer. La pet localité de Loc Binh est comme morte ; on i remarque aucune activité. J'en déduisis qu'« zone Viet-minh le commerce devait être rare. Quelle différence avec les endroits ou na avions opéré auparavant ! Par exemple le se de Ke-Sat, au sud de la RC S Hanoï-Haïph où après un sévère accrochage avec l'ennem alors que nous étions en train de nous regrou près d'une route, nous eûmes la surprise de I

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Saut sur Loc Binh

arriver quelques marchandes ambulantes avec des boissons et même des soupes chinoises. En fin d'après-midi, toutes les compagnies du Z- BEP ont rempli leur mission et tiennent leurs objectifs. La CIPLE du capitaine Bertrand a fini ie ratisser la zone du saut et a récupéré les bles---- a l'aide du service de Santé, ainsi que ramassé _es parachutes et le matériel, puis a rejoint la RC4. Deux sections s'installent sur la rive sud il Song Ky Cung et deux autres se chargent de garder les blessés et le matériel spécial à l'en-<koit où la petite route venant de l'est rejoint la RC4.

Ei recueil des « bérets rouges »

Le 2' BEP s'installe en garde et en surveillance r>: ur la nuit. Les compagnies occupent comme prévu les positions désignées. La 5e compagnie -ent la localité de Loc Binh et est prête à accueil­lir les éléments qui ont sauté sur Lang Son char­ges de la destruction des dépôts d'arme et du niateriel stocké dans les grottes de Ky Lua, petite localité située immédiatement au nord de Lang Son

Vers 1 h 30, nous sommes prévenus de l'arrivée imminente des premiers éléments du 6'' BPC marchant en tête du groupement parachutiste. Peu de temps après, nous prenons contact avec nos camarades « bérets rouges » qui, après toute une journée d'efforts physiques opérationnels, viennent d'effectuer 25 kilomètres en marche forcée ; ils peuvent enfin se reposer après avoir franchi le Song Ky Cung avec l'aide du Génie. Nous voyons ainsi passer le 6e BPC, suivi du PC du groupement, puis le 8e GCP au complet. En­viron trois cents civils suivent les parachutistes, ils ont profité de l'occasion pour s'enfuir de la zone contrôlée par leViet-minh. Malgré la nuit, la chaleur est toujours pesante, 30 voire 35 °C. Au passage de nos camarades, nous apprenons que leurs missions ont été remplies et que d'im­portantes quantités d'armes, de munitions, de matériel et même des véhicules ont été dé­truites.

Jusqu'à 7 heures du matin, les portières et les canots du Génie s'emploient à faire franchir le Song Ky Cung au groupement parachutiste qui, immédiatement après, s'installe au sud du fleuve. Pendant tout ce temps, nous restons en

protection d'arrière-garde au nord du fleuve, de même que les 4 e et

6e compagnies.

Journée du 18 juillet 1953

Au cours de la matinée, nous franchissons le Song Ky Cung à notre tour et accompagnés de la 4 e compagnie. Seule la 6e compagnie reste en protection sur la rive nord du fleuve. Pendant que les bérets rouges récupèrent sous notre pro­tection, le bataillon met à profit tout ce temps pour recevoir un parachutage de ravitaillement, évacuer par hélicoptère les blessés et quelques hommes épuisés par l'effort. Malheureusement, les camions ne peuvent pas arriver jusqu'au fleuve : la RC 4 n'a pas pu être rendue praticable en raison de coupures anciennes pratiquées par lesViets. Les camions ne peuvent dépasser Dinh Lap.

Le Génie et les légionnaires du colonel Raberin ont travaillé sans relâche et fourni un effort ex­ceptionnel ; ils ont réussi à rendre utilisable la portion de la RC4 située entre Dinh Lap et Tien Yen, soit environ 40 km. Sans doute pour per­mettre aux éléments ayant sauté sur Lang Son de récupérer au mieux, le commandement choisit de passer la journée sur place malgré la menace des unitésViet-minh. La chaleur est aussi à pren­dre en compte, il fait près de 40 °C et il est pré­férable d'effectuer de nuit les 35 km qui nous séparent de Dinh Lap.

Sur ordre du commandant de l'opération, le 2e BEP procède à la destruction du matériel in­transportable ainsi que des parachutes. Le travail

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É M O I G N A

est assez ardu car les harnais de parachutes ne brûlent pas facilement. Comme au cours d'une précédente opération, nous n'avons d'autre choix que de faire un brasier, y jeter les para­chutes un par un et attendre qu'ils fondent, ce qui nécessite plusieurs heures.

Le repli

En fin d'après-midi, la 6e compagnie franchit à son tour le Song Ky Cung et rejoint le bataillon. Aussitôt, le Génie procède à la destruction des moyens de franchissement. L'ordre de repli gé­néral arrive. Comme prévu, le 2" BEP ferme la marche et assure l'arrière-garde du groupement para. Lorsque la dernière compagnie s'engage sur la RC 4 vers Dinh Lap, i l est déjà 19 heures. Trente kilomètres de marche de nuit ne sont pas insurmontables pour les parachutistes entraînés, mais i l y a cette vague de chaleur accablante qui rend la respiration difficile. De plus, le tracé de la RC 4 entre Loc Binh et Dinh Lap emprunte souvent un itinéraire encaissé et boisé avec, de chaque côté, des collines de 300 à 400 mètres de haut, ce qui rend l'air encore plus étouffant. Il devient donc absolument nécessaire de s'or­ganiser dans les sections afin d'éviter que les hommes ne s'épuisent. Les recommandations d'usage dans de telles situations sont suivies : surveiller et déceler les éventuels signes de fai­blesse, soulager et aider les hommes fatigués. Après une rapide réunion des gradés, je procède à la première distribution de cachets de sel pour

Le 18 juillet au matin, reprise de la progression pour les légionnaires du 2 e bataillon de la 13e DBLE intégrés au GM 5. © ECPAD.

compenser la transpiration. Plus de mille cachets sont distribués au cours du repli. Nous sommes déjà bien engagés dans notre marche lorsqu'un ordre surprenant nous par­vient du PC par radio : pour que le repli s'effec­tue le plus rapidement possible, tout soldat qui ne peut poursuivre la marche doit être aban­donné, son arme lui être retirée et ses équipe­ments dispersés. Bien entendu, i l n'est pas question pour nous d'abandonner un seul homme. L'entraide doit permettre de ramener tout le monde à bon port. D'expérience, nous savons que, bien souvent, c'est l'appréhension de ne pas pouvoir faire comme ses camarades qui fait flancher un homme ; aussi, pour ne pas ren­forcer cette inquiétude, je garde l'ordre pour moi. Comme d'habitude, la solidarité se mani­feste dans toutes les sections.

Dinh Lap le 19 juillet 1953

Le jour commence à se lever lorsque notre ba­taillon arrive à son tour à Dinh Lap, après avoir recueilli tous ceux qui avaient eu du mal à suivre la marche et à supporter cette chaleur acca­blante. Notre commandant de compagnie nous indique l'emplacement, en bordure de la RC4, où nous pouvons enfin nous reposer, nous res­taurer, remettre de l'ordre dans nos équipe­ments et inspecter l'état de nos hommes. Cette fois, nous sommes sous la protection du GM 5 <14> composé pour l'essentiel du 5e REI<15> com­mandé par le colonel Raberin. Amené par la ma­rine à bord de bateaux de débarquement naviguant tous feux éteints, le GM S a débarqué à l'aube du 17 juillet. Il s'est ensuite déployé dans le secteur en remontant la RC4 jusqu'à Dinh Lap. Nous bénéficions également de la cou­verture aérienne, nous pouvons donc nous dé­tendre en toute tranquillité.

Nous apprenons que les camions ont déjà c mencé à faire les rotations pour transpc jusqu'à Tien Yen, soit sur quarante kilomètre d'abord les bataillons de bérets rouges, puis ja civils, avant de terminer avec nous. Maigre bonne organisation, tout ceci prend un certai temps car l'état de la RC 4 ne permet pas rouler vite et il y a également un bac à passai une dizaine de kilomètres de Tien Yen. Au pour gagner du temps, nous nous remettons marche dans l'après-midi. Il fait moins ch;j nous nous dirigeons vers la mer, nous nous se tons en sécurité et les hommes ont bien reci péré.

Après avoir marché une quinzaine de kilométra nous sommes à notre tour enlevés par les mions et transportés à Tien Yen en pleine m â a de la ville nous ne voyons que les lumières. Tu Yen est située au confluent du Song Tien Yen i du Song Phô Cû, elle est tenue par nos troup depuis toujours. La ville est traversée par la KCi qui continue jusqu'à Mon Cay, localité imp tante à la frontière de Chine.

Un coup d'une ampleur inouïe

Nous quittons les véhicules à environ un kilo tre de la ville, retraversons le Song Phô C-empruntons à pieds la route en direction < Pointe Pagode où la Marine doit nous prend en charge. Il nous reste à faire encore une diz de kilomètres à pieds de nuit ; mais mainten» que nous sommes rodés pour la marche, dernière étape ne nous fait pas peur. Nous sommes le 20 juillet 1953, i l fait enc nuit lorsque nous arrivons au port de Pointe : gode où les bateaux de la Marine nous attende Le bataillon s'installe sur un terrain de foot) en attendant F embarquement prévu pour 7 h i Après un court sommeil, nous nous levonsl 7 heures. Un rapide café et les compagnies : rassemblent pour l'embarquement sur k LCT< 1 6'. Enfin l'opération se termine, no n'avons plus de marche à pied à faire, hommes sont contents et fiers d'avoir réussi i tel effort. Chacun a fait son travail. Notre coi pagnie, la cinquième, embarque sur le mê« LCT que le 6e BPC. Nous apprenons par le -rets rouges que les destructions opérées dans î grottes de Ky Lua sont très importantes : des . mions Molotova, du matériel, des munitions • surtout mille fusils-mitrailleurs de fabricat tchécoslovaque. Ceux-là, au moins, nous ne i quons plus de les trouver en face de nous, ja un coup de cette ampleur n'avait été p ri l'ennemi.

i 1 4 1 Groupe mobile n°5. ( , 5 ) Régiment étranger d'infanterie. (16) Landing Craft Tanks.

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Au moment de l'appareillage, les marins éprou­vent quelques difficultés à manœuvrer les LCT r>:mr quitter le port de Pointe Pagode. Mais tout rentre vite dans l'ordre et la flottille gagne le Large, en direction de Haïphong. La navigation cure toute la journée, nous en profitons pour nous reposer, nous restaurer. Nous avons même La chance de faire du tourisme en naviguant à tra­vers la baie d'Along avant d'accoster au port de Haïphong. Nous débarquons puis gagnons en ca-— ion la BOTA<17 ). pour y passer la nuit. Il est ;eja 23 heures. Demain ce sera Haïphong puis 3ach Mai et... un repos bien mérité jusqu'à la rrochaine... opération. »

Tous mes remerciements vont vers ceux qui ont apporté leur contribution à ce travail par leurs témoignages, le prêt de photographie et/ou leurs conseils. A ceux qui ont participé à l'opération sur Loc Binh avec leur grade de l'époque : le lieutenant René de Bire, le sergent Heinz Bauer, le sergent Johan Wallisch, ainsi que : l'ad­judant-chef (ER) Clément Ragot, ancien du 2e REP, le sergent-chef Ervin Pecnik du 2e BEP, le docteurYves Loi-seau, ancien médecin aspirant au 2e REP à Calvi en

1911-1912, mes petits-enfants Isabelle et Charles Guignard pour leur contribution à la réalisation de ce texte. •

:ase de transit.

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RCHIVE

L a Légion a u seco On connaissait le caractère international de la Légion étrangère mais on savait peu choses de l'utilisation des légionnaires à des fins... promotionnelles. C'est pourta ce qui va arriver à un détachement qui doit accomplir une bien curieuse mission.

Jean-Luc Messager

Nous sommes en août 1918 et le capitaine Jean Chastanet de Géry reçoit le comman­

dement d'une singulière unité. Belle figure d'officier sorti de la réserve et qu'une grave blessure reçue en Champagne le 27 septembre 191S avait condamné à s'occuper de tâches administratives, le capitaine de Géry compense la perte de sa jambe droite par un dynamisme communicatif et la perspective de prendre un commandement, fût-il pour quelques semaines, le remplit de joie. Et quel commandement ! Il s'agit d'aller convaincre la population améri­caine de contribuer à l'effort de guerre en achetant des « Liberty bonds ».

De l'or au sang

Entrés en guerre, officiellement, le 7 avril 1917, les États-Unis avaient pratiquement tout à improviser avant d'apporter un concours effectif aux Alliés. « Il faut jeter dans la balance notre or, nos navires, notre sang » avait proclamé le président Wilson. Le sang viendrait quelques mois plus tard, au moins le sang « officiel » car les volon­taires américains de la première heure s'étaient engagés nombreux dans la Légion étrangère et beaucoup avaient déjà donné leur vie pour la défense de la liberté.

Les navires, eux, entamèrent une sorte de noria ininterrompue entre le nouveau et l'ancien monde, apportant le ravitaillement qui com­mençait à faire défaut, le minerai et le charbon dont l'occupation du nord et de l'est de la France les avait en partie privés.

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Une affiche appelant à acheter des <• Bons de la Liberté ». © Library of Congress - Online catalog.

Quant à l'or, i l fut jeté « d'un coup orgueilleux » : un crédit de sept milliards de c lars, soit près de quarante milliards de francs. I immédiatement voté par le Parlement... « Le de sang qui, coulant sur l'Europe, s'était jusq ebangé en vague d'or déferlant sur l'Amérique » al refluer en sens inverse. Le chiffre semblait tel ment ahurissant qu'un journaliste n'hésita pal parler d'un « défi monstrueux aux précédents hisi riques et aux perspectives économiques de l'av Cependant le Trésor de la nation américaine suffisait pas à régler totalement les énorn dépenses nécessaires. Dès le début, il fit ap aux ressources privées au moyen d'un premi emprunt qui passa presqu'inaperçu au milieu l'effervescence, de l'enthousiasme provoqi par l'entrée en guerre du pays autant que pal visite d'une mission composée des plus haui autorités alliées au premier rang desquel venait le maréchal Joffre.

Des Diables bleus aux légionnaires

Bientôt, en octobre 1917, un second empn ou « Liberty Loan », fut lancé. Sur les sept milli prévus, il en fut récolté péniblement quatre, b* que le Comité responsable eût appelé a rescousse... un sous-marin allemand captui intact. Exposé au Central Parle de New York ne parvint pas à convaincre efficacement souscripteurs éventuels. Au début de 1918, le Trésor américain envisager le lancement d'un troisième empna de trois milliards de dollars cette fois, et

« E l . » -

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Au secours des États-Unis

s des États-Unis

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A R C H I V E S

responsables décidèrent de donner un grand éclat à cet appel aux coffres-forts. Ils connaissaient bien l'influence qu'exerçaient sur l'opinion les meetings, les parades et toutes les manifestations publiques à grand spectacle. Les dirigeants se mirent donc en quête d'une attraction susceptible de drainer les foules. Avec un pragmatisme consommé, les financiers du States Department demandèrent à l'État français de prêter quelques-uns de ces fameux poilus que les jeunes Américains rêvaient d'égaler. Ce qui fut fait. L'emprunt projeté était de trois milliards de dollars. L'affaire fut confiée aux Chasseurs... Et c'est ainsi que, le l e r mai 1918, cent « Diables bleus » débarquèrent à New York pour tendre, moralement, leurs bérets à la foule.

Le résultat fut probant : au lieu de trois milliards, on en récolta quatre, « tant il est vrai qu'en Amérique les manifestations ont leur côté pratique » ainsi que le soulignait, presque nostalgiquement et avec un brin d'envie, un journaliste fran­çais . . . Ces quatre malheureux milliards, de dollars bien sûr, ne firent guère long feu. Un quatrième « Liberty Loan » fut donc organisé qui devait être lancé le 21 septembre. Objectif : six milliards, soit 30 rnilliards de francs de l'époque... La somme semblait fabuleuse. Aussi une gigantesque campagne de publicité fut organisée. Des millions d'affiches portant un seul mot : « LE1\'D ! » — « Prêtez » — furent apposées partout, « sur les autos, les camions, au cou des chevaux de trait, à la roue des poubelles muni­

cipales et jusque sur les corbillards ». Les « GOT les « Stop », équivalents de nos actuels rouges et verts, furent accompagnés de la ph « and buy liberty bonds ! ( 1 ) » A une aussi gigante parade, il restait à trouver une tête de colon son échelle.

Trois légionnaires pour un milliard

Et ce fut là que la Légion intervint, tout si] ment ! Très exactement, à peine trois legi naires par milliard de francs. Et le tour fut si 1 joué qu'à la place de trente, on en récolta un i plus de soixante, ce qui porte la moyenne a] de sept cent millions de francs de l'époque C'est donc dans ce contexte que le ministère i

The French New mand niade

parade, Then Ueava War V é t é r a n . Ptra p r e . , d , n t .

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Article du A/evv Vorfr Tïmes du 21 septembre 1918.

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la Guerre envoie sa demande vers les régiments de Légion. Le commandement du Dépôt du Régiment de Marche de la Légion étrangère de Lvon reçoit un message lui enjoignant de mettre en route pour New York 3 officiers, 5 sous-offi­ciers, 3 caporaux et 42 légionnaires, « le tout en :enue de campagne ». Le commandant de la portion d'Algérie du

Régiment étranger reçoit un ordre semblable mais portant cette fois sur 2 officiers, 5 sous-ofticiers, 1 caporal, 12 légionnaires et... le Dra­peau du régiment. Le tout en tenue de sortie,

Et achetez des bons de la Liberté.

Population dans les rues de New York à l'occasion de l'une des nombreuses « parades ».

© Library of Congress - Online catalog.

UGiNIIMNKHf r i

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-RCHIVE

Le détachement du capitaine de Géry entre en défi lé dans les jardins de la Maison Blanche. © Library of Congress - Online catalog.

sauf la garde du Drapeau demandée « en tenue de campagne... » En cette période de guerre, une demande si par­ticulière peut surprendre et le commandant de la portion centrale du 2e Étranger à Saïda exige quant à lui une confirmation pour laisser partir I officier, 3 sous-officiers, 1 caporal, 11 légion­naires, en tenue de sortie, sur New York, via Oran, Port-Vendres, Bordeaux. Mais en plein effort de guerre, le choix des lé­gionnaires n'est pas facile. Il faut sélectionner les candidats parmi les plus méritants, les plus dé­corés et désigner des hommes « capables de défiler correctement », et parlant quelque peu l'anglais ainsi que le prescrit la dépêche ministérielle. II faut également habiller tout ce monde avec des uniformes neufs, autant que possible. Le minis­tère avait pensé à tout, prescrivant même de changer les rubans des décorations mais oubliant que les magasins étaient pauvres, surtout en Algérie. La question des finances est tout aussi délicate. La solde, bien sûr, reste la même et les sergents-fourriers n'ont qu'à ouvrir un registre de prêt. Mais les indemnités ? Francs ? Dollars ?(2) Et quel

n i w i E - N ° i

taux ? Le voyage vers la lointaine Amérique va être l'occasion de mettre à l'épreuve la débrouil­lardise légionnaire. L'ensemble des troupes venues d'Algérie se retrouve à Bordeaux le 3 septembre bientôt complétées le 4 par celles de Lyon. Les 89 du « détachement d'Amérique » sont ensuite rejoints par 26 interprètes parmi lesquels 2 professeurs, 4 employés de banque dont le directeur de la succursale du Crédit Lyonnais à Montauban, 2 journalistes, 3 com­merçants, 1 artiste peintre, sans oublier 4 ecclé­siastiques.

12000 kilomètres et 40 villes

Le 7 septembre, dûment constitué, habillé, or­ganisé, l'ensemble, fort de 7 officiers et de 108 sous-officiers, légionnaires et interprètes, prend place à bord de la Lorraine. La traversée se passa sans autres incidents que la disparition d'un canon et... d'un membre de l'équipage, perdus tous deux à la suite d'un coup de mer. Onze jours plus tard, la Lorraine longe et accoste dans le port de New York et les légionnaires apprennent que leurs camarades du Régiment de Marche ont percé la ligne Hindenburg'3'. Le lendemain, après un premier défilé à Broad­way, le détachement va être confronté à une foule en liesse qu'il retrouvera tout au long d'un parcours de plus de 12 000 kilomètres, passant par 40 villes différentes !

Vingt-deux équipes s'égaillent ainsi sur Fi mense territoire des États-Unis. Entre le 1-le 20 octobre, les légionnaires sont de retour^ New York, juste à temps pour la « fournée . Alliés ». Le 7 novembre, c'est sur le Chicago qu'une pa du détachement embarque à destination de 1 deaux, apprenant la signature de l'armist en plein océan tandis que l'autre part Montréal où le drapeau du 1 e r Étranger « splendidement acclamé au milieu d'un enthousia indescriptible ». Après une brève escale à Tro Rivières, un court séjour à Québec, les « Ca diens » reviennent à New York le 16 novembr embarquent aussitôt sur le Niagara qui appa trois jours plus tard. Sept légionnaires, ayant obtenu l'autorisation < séjour aux États-Unis, devaient être démobilise sur place.

Entre Capitole et Maison Blanche

À bord, chacun a bien du mal à croire ce qui vient de vivre. Les souvenirs se bousculent entre les défilés ; tomobiles, les foyers duYMCA*4' où « ils fui surpris de trouver lits, douches, salle de billard et I nographe », l'ovation des membres du Congrès 1 de leur réception au Capitole ou encore la de la Maison Blanche au cours de laquelle président Wilson tint à serrer la main de chac

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Au secours des États-Unis

accueillis au son de Sombre et

• de tous les souvenirs fut peut-• :-: - nient quasi unanime qui

: 1 annonce de la suppression de cer-locales prévues : Cincinnati, Colombus et

Pittsburg. La fatigue des légionnaires était telle qu'un repos dût leur être accordé à Dayton ! C'était sans doute la première et l'unique fois que les légionnaires capitulaient devant la bonne chère et courbaient la tête sous les acclamations. Ce premier séjour d'une unité de Légion dans le

LE SERGENT TEMPERLI INHUME A ARLINGTON

:-.:rc. sers d'une étape à Kansas City, le sergent Temperli, épuisé par son travail dejourrier, MWÊÊ i ii 11 la grippe espagnole. Les médecins du Christian Church Hospital se relaient à son chevet, émaant chaque jour des nouvelles de leur patient par télégramme au reste du détachement qui pour-: -:: • veriple. Le 2 octobre, le capitaine de Géry est avisé de l'état très grave du malade et décide

de le rejoindre mais il apprend la mauvaise nouvelle en gare de Saint-Louis. Les autorités civiles et milrtaires se chargent alors d'organiser des funérailles grandioses et le général qui commande Camp Funston, siège de la 89e Division d'Infanterie, reçoit l'ordre deWashington de donner à la cérémonie * le maximum d'éclat et d'honorer l'Armée française dans la personne du sergent Temperli ». Le 6 octobre, porté en grande solennité sur une prolonge d'artillerie, le corps, embaumé et escorté par un régiment au grand complet, arrive au Colisée où se pressent plus de 10 000 personnes. Transporté rsjr train spécial, il sera veillé jusqu'au cimetière national d'Arlington par 4 soldats américains en srmes.Au passage à Indianapolis, ses camarades lui rendent un dernier hommage.

Nouveau Monde depuis la campagne du Mexique, cinquante et un ans plus tôt, fut un succès et des dirigeants du Département du Trésor résumaient ainsi la réussite de cette mis­sion peu ordinaire : « Vous avez contribué non seulement directement au succès de notre Emprunt de la Liberté, mais votre visite a été d'une importance considérable en renouvelant encore l'admiration, le respect et l'amour qu'éprouvent tous les Américains pour la France ». •

, 2 ) Officiers : 10 dollars ; sous-officiers: 2,5 dollars ; capo­raux : 1,5 dollar ; légionnaires : 1 dollar. Il s'agit là d'indem­nités journalières. À titre d'indication, la solde d'un légionnaire était à l'époque d'environ 0,75 francs par jour et le dollar valait un peu moins de 5 francs. , 3 ) La percée de la Ligne Hindenburg le 14 septembre 1918 vaudra au RMLE du général Rollet sa 6e citation à l'ordre de l'Armée. (4) Young Men's Christian Association.

À chaque étape, les autorités civiles tiennent à recevoir les légionnaires avec faste.

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I N É M A

II

Un d e l a L é g i o n

Jean-Luc Messager

Un de la Légion est le premier des six films que Fernandel tourna avant guern sous la direction de Christian-Jaque: il sera suivi, la même année, de Joseth puis de François Les dégourdis de la Onzième (1937), Raphaël le Tatoué Ernest le rebelle (1938). Le scénario de Paul Fékété s'inscrit dans la traditio très en vogue à l'époque, des films sur la Légion, qui avait déjà donné Morocc ou Le Grand Jeu et inspiré La Grande Inconnue de Jean d'Esme (1939).

Antoinette Espitalion, veuve d'un restaura­teur marseillais établi au Canada, a hérité

d'une vieille tante phocéenne une somme ron­delette. Avant épousé en secondes noces son cousin Fernand, elle rentre avec lui au pavs pour toucher l'héritage. C'est une maîtresse femme qui traite rudement son second mari, docile aux caprices de sa «Toutoune», comme il l'appelle. Alors que celle-ci fait antichambre chez le notaire, Fernand est allé s'offrir un pastis dans un bistrot proche du lieu de rendez-vous. Il y lie connaissance avec un aventurier en rupture de ban. Ce dernier le saoule à mort et, troquant ses papiers d'identité contre les siens, le transforme en Pierre Durand, natif de Lille et engagé volon­taire dans la Légion étrangère. Et voilà Fernand entraîné malgré lui dans une rocambolesque aventure. Des douaniers complaisants l'embar­quent, à demi-inconscient, à bord d'un bateau de légionnaires en partance pour

Oran. Il se retrouve, sous l'uniforme, à Sidi-Bel-Abbès, où la 9e compagnie de la Légion a son cantonnement.

Souci de réalisme

Après des débuts difficiles, Fernand prend goût à sa nouvelle vie. Il accomplit les marches d'épreuve dans la bonne humeur et oublie faci­lement Toutoune dans la compagnie de Maryse, une Algéroise qui noie son chagrin dans l'ac­cueillant cabaret « À la mort du cafard ». Le sort de Fernand est désormais scellé. Il a pris goût à

la liberté, il ne peut plus s'en passer. Alors sa compagnie est envoyée dans le Sud, p relever un détachement de tirailleurs encen par des dissidents, il découvre le combat et dangers mais sa décision est prise : il ne rés pas à l'appel et rempile dans l'enthousiasme Dans un souci de réalisme, les extérieurs fur tournés à Marseille, Oran, Sidi-Bel-Abbès dans le bled algérien avec la participation d compagnie de Légion formée à partir du dep commun des régiments étrangers. Certai scènes furent également tournées au col d< Madone qui surplombe Nice.

S llN

BELA. 6101

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Un de la Légion

# FERNANDEL U N D E LA L É G I O N

«*Lis*r»N DE CHRISTIAN-JAQUE

On y découvre de fait un environnement rigou­reusement exact tant dans le rendu du quotidien légionnaire que dans le jeu des figurants. Sur un scénario tiré de la nouvelle de John Dimmock Newsom Comment Forbes Smith partit pour la Légion, on retrouve tous les ingrédients du mythe légionnaire tel qu'il est perçu dans les années 50 : la perspective d'une nouvelle vie, les per­sonnages inamovibles de la Légion - le colonel, -e médecin-chef, le sergent «gaulois» et les lé­gionnaires aux destins incroyables dont l'un est interprété par Eugène Struber que l'on a vu dans j Bandera de Julien Duvivier l'année précédente.

Un style lyrique prononcé

La critique va accueillir favorablement le film qui 5 inscrit parfaitement dans la perspective ciné-— atographique des maîtres français de l'époque : récits pessimistes qui racontent les destinées tragiques de héros populaires dont Jean Gabin est la parfaite incarnation ou encore lumière en clair-obscur, artifice des décors, verve des répliques et du jeu qui donnent un style lyrique prononcé. René Clair (Sous les toits de Paris, !930), Pierre Chenal (L'Homme de nulle part, 1936), Julien Duvivier (Pépé le Moko, 1937) et Marcel Carné (Quai des brumes et Hôtel du Nord, 1938) en sont les maîtres incontestés. Cette

.egionnaires à l'instruction = Sidi-Bel-Abbès à la fin des ï t - é e s 30. © Roger-Viollet.

Fernandel - Fernand à l'instruction et en goguette. © DR.

période se caractérise par son unité et une parenté esthétique entre les différentes formes de réalisme, qui rattache les unes aux autres les œuvres les plus importantes de cette décennie. Comme le souligne Jacques Lorcey dans Fernandel (1981), le travail consciencieux de Christian-Jaque, le souci d'apporter à l'histoire un maxi­mum d'authenticité, de crédibilité, les souffrances réelles des comédiens pendant les extérieurs, ont porté leurs fruits : un peu trop cocardier, parfois grandiloquent, le film reste toujours intéressant. Son meilleur atout est évidemment la pathétique incarnation de Fernandel, pauvre tvpe à la merci de tous, qui découvre la mâle camaraderie des armes et devient un héros. À ce personnage falot, dont le texte est insignifiant, l'admirable interprète apporte une profondeur, une présence désenchantée, bouleversante. A l'anecdote, ses partenaires, très bien employés, sont excellents, notamment Suzy Prim et Thérèse Dorny, qui trouvent peut-être dans Un de la Légion leur meilleure interprétation à l'écran. •

FICHE TECHNIQUE

G E \ R £ COMÉDIE DRAMATIQUE 1"' DIFFUSION

18 SEPTEMBRE 1936 (PARIS) - PELLICULE 35 MM -

NOIR ET BLANC TOURNAGE MAI ET JUIN 1936

DISTRIBUTION FERNANDEL (FERNAND, ESCU-

UPE, SIMÊON ESPITALION), ROBERT LE VIGAN

(LEDUC, LE SERGENT),JACQUESVARENNES (PIERROT

DURAND), PAUL AZAIS (TURLOT), DANIEL MEN-

DAILLE (CHARLIN), ARTHUR DEIÈRE (JOSEPH

VAN DER CLEEF), SUZY PRIM (MARYSE), THÉRÈSE

DORNY (ANTOINETTE ESPITALION, DITE « TOU­

TOUNE »), ROLLA NORMAN (LE CAPITAINE CARRON),

JEAN KOLB (LE MÉDECIN-CHEF), RÉGINE DANCOURT

(L'AMIE DE PIERROT), PAUI AMIOT (IE COLONEL),

GEORGES MALKINE (IE LÉGIONNAIRE RUSSE),

EUGÈNE STUBER (LE LÉGIONNAIRE MULLER),

MARCEL VIDAL (ALAÎTRE TROUBE). EQUIPE

TECHNIQUE: RÉALISATEUR CHRISTIAN-JAQUE ;

ASSISTANTS RÉALISATEURS FK\NÇOIS CARRON,

JEAN MANSE ; SCÉNARIO, ADAPTATION ET DIA­

LOGUES PAUL FÉKÉTÉ ;MUSIQUE MAHIEDDINE,

CASIMIR OBERFELD; IMAGES FRED LANGENFELD,

CHARLES SUIN, ANDRÉ GERMAIN; MONTAGE

WILLIAM BARRACHE, ANDRÉ VERSEIN; DÉCORS

PIERRE SCHILD ; SON :JACQIJES HAWADIE ; DIREC­

TEUR DE PRODUCTION GÉO FRANCIS PRO­

DUCTION CALAMY DISTRIBUTION GRAY FILM.

DVD DISPONIBLE SUR : HTTP: I I BOUTIQUE. FRANCETV.COM/Drn-aLU-MY/aNEMA/FENilAKDEL-UK-DE-LA-tEG10K.HTML PRIX 29,99 €

lieilD ETIfiHEÉK - N I 9

Page 79: Legion etrangere N°1,2012.jan-márc.

I

HOMME DE DIEU... HOMME DE GUERRE.

LE DRAME SPIRITUEL DE L'ARMÉE, D U PÈRE

F R A N Ç O I S C A S T A , Esprit du Livre Édi­tions, 22 €. Infos : www.espr i tdul ivre-editions.com Cette biographie d'un aumônier parachutiste, engagé volontaire au 1"BPC qui, sous l'anonymat de la tenue de combat camouflée, a été confronté aux dures réalités de la guerre des neiges de l'Alsace aux djebels d'Algérie, en passant par les rizières indochinoises rappelle que ses cinq années en Indochine et en Algérie l'ont conduit à une réflexion profonde sur l'usage de la force pour maîtriser le cycle infernal et vicieux de la violence. Né à Calenzana, en Corse, en 1919, engagé volontaire au 1 e r BPC en novembre 1944, le père Casta est désigné aux fonctions d'aumônier parachutiste au 19e BPC en 1945. Après l'Indochine

et l'Algérie, il obtiendra son doctorat de Théologie et exercera son culte en Corse. La modernité de son témoignage n'échappera pas au lecteur en dépit des mutations du contexte actuel. Au­jourd'hui, la lutte contre le terrorisme s'est substituée aux conflits entre Etats. Le guerrier destructeur d'hier est devenu un fréquentable soldat de la paix. Pourtant, les méditations du père Casta sur la maîtrise de la force comme sur le caractère non seulement intrinsèquement per­vers, mais inefficace à terme, voire gravement contreproductif, de certaines méthodes violentes d'extorsion du renseignement ou de lutte anti­terroriste, sont rendues plus utiles encore par la complexité croissante des opérations militaires, et par le relativisme ambiant qui érode les normes, dénature les références et banalise les repères éthiques et déontologiques. Par la lecture appro­fondie du Drame spirituel de l'Armée, nos officiers susceptibles d'être appelés à des fonctions de commandement à Kaboul, à Naqura, à Pristina, à N'Djamena ou à Bouaké, apprendront l'im­portance de s'être préalablement armés spiri­tuellement et moralement pour se préparer à réagir avec justesse et discernement à des situations de crise inattendues, pour la pertinente résolution desquelles il est essentiel d'être parfaitement formé à la déontologie du métier de soldat, comme aux règles de la profession des armes exercée au profit d'un gouvernement démocratique, respectueux du droit international, mais aussi nourri de convictions éthiques fermes et éclairées.

HISTOIRES DE L'HISTOIRE DE LA LÉGION, D E

E M I L I O C O N D A D O M A D E R A , Publibook, 26 € Infos : www.publ ibook.com Du mythe à la réalité, i l y a parfois un gouffre. Qui n'a jamais imaginé la vie au sein de la Légion étrangère ? Combien sont intimement convaincus de détenir la vérité sur la question ?

Par-delà le fantasme et les idées reçues, mystères sont ici levés et la Légion mise i nue. De l'histoire du corps d'armée en anec personnelles, ce témoignage authentique : fait voyager au cour d'un surprenant cosme. À travers ce témoignage criant vérité, Condado Madera nous ouvre granaI porte de la Légion étrangère et nous fait : de sa propre expérience au sein de 1' L'auteur raconte, sans jamais porter de ment, laissant ainsi au lecteur la possib d'apprécier les faits. Un récit où les ta et la langue de bois n'ont pas lieu d'être, témoignage qui apporte de nombreuses rep sur un univers éminemment fantasmé.

Emiîio Condado Madera

Histoires de l'Histoire de la Légion

LÉGION ÉTRANGÈRE

Siège social .-48/50, boulevard Sénard, 92210 Saint-Cloud.Tél. : 01 47 11 20 00 Fax : 01 47 11 21 06 (pour joindre votre correspondant, composez le 01 47 11 suivi des quatre chiffres figurant à côté de chaque nom). Directeur de la publication : Michel Hommcll. Directeur de la rédaction : Christian Castellani. Assistante .Sylvie Philippon (21 27). Rédacteur en chef .David Chanteranne (22 65). Conseiller de la rédaction .Jean-Luc Messager. Secrétaire de rédaction : Emmanuelle Papot. Maquette : Hervé Jordan. Ont collaboré .Jean Alfonsi, Marcela Feraru, Frédéric Guelton, Salih Gusic, Raymond Guyader, Alexis Neviaski, le pôle des Archives de l'ECPAD. Abonnements : Arnaud de Boissièrc — Josiane Dion : directrice du service abonnements. Annie de Bujadoux : directrice adjointe du service abonnements. Mvriam Mascarade : responsable du service abonnements (22 86). Vente anciens numéros (22 86). Vente en kiosque : Christelle Pierre (20 05). Informatique éditoriale .-directeur des systèmes d'information : Jean-Yves Coatanoan assisté de Franchie Barrillet ; responsable systèmes et réseaux : Dominique Leblay ; chefs de projets éditoriaux DamienThizy et Patrick Surbled assistés de Pierre-YvesTsen ; responsable du support technique : Christophe Denis. Fabrication : Loïc Rossigneux (2263). Promotion : Frédéric Pommiès et Mathieu Sadacca. Internet : Hélène Regnaud et Sabine Gros La Faige.Contacts publicité : VLODICOM - 1, rue Emmanuel Chabrier 78330 Fontenay-le-Fleury tél. : 06 69 56 80 00 (Audreyi - [email protected] Légion étrangère est édité par SOTECA, société du Groupe de presse Michel Hommell. SARL au capital de 8000C-RCS Nanterre B 384.581.278 Gérant : Michel Hommell. Impression .Centre Impression - 11, rue Marthe Dutheil 87220 Feytiat. Distribution France : Presstalis. Distribution export : Export Press. Dépôt légal à parution. N° de commission paritaire en cours. Principaux associés : SFEP. ISSN : en cours. IMPRIME EN FRANCE.

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liïr fil

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| SOMMAIRE DU N°2 Entretien avec Geneviève de Galard

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