Le Spectateur Déluré Octobre

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Journal des prépas littéraires

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Octobre 2012Octobre 2012Octobre 2012Octobre 2012

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(Image tirée du (Image tirée du (Image tirée du (Image tirée du Seigneur des AnneauxSeigneur des AnneauxSeigneur des AnneauxSeigneur des Anneaux))))

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SommaireSommaireSommaireSommaire

P 4 : Introduction (Carole L.)

P 5 : La rubrique du Lièvre de Mars (Johanna L.H.)

P 9 : Lecture critique (Palombella Rossa)

P 13 : Poésie (Carole L.)

P 16 : Feuilleton (Aurore Sorriaux)

P 20 : Cinéma

(« Portrait d’acteur » : Carole L. ; « Actualité cinéma » : Camille Salle)

P 29 : BD (E.M.)

P 30 : Informations de premier choix (Julie G.)

P 31 : Horoscope (Julie G.)

Illustrations parsemées par Alice Rorosheim

(Illustration de la page de couverture par Carole L.)

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Introduction

Savez-vous pourquoi on ne peut pas crever l’œil de la statue d’un philosophe grec ?

Ce n’est pas la résistance du matériau qui s’y oppose réellement, ni la toute-puissance de

l’aura philosophique qui nous en empêche, comme par un sentiment spontané de respect.

La peur de la sanction n’influe pas plus, tout comme l’horreur du vandalisme gratuit ne nous

l’interdit pas tout-à-fait.

Vous pouvez à juste titre vous demander quel serait le but d’une telle manœuvre et

trouver scandaleuse une telle idée à la fois vis-à-vis de l’art, de ce que nous ont laissé les

siècles et de cet immense philosophe que l’on veut éborgner. Mais il ne s’agit ici ni de vous

choquer ni de faire l’apologie d’un acte d’autant plus vil qu’il est destructeur et inutile.

On ne peut d’ailleurs pas répondre à cette interrogation en songeant au vandalisme

seul, car on pourrait s’acharner à érafler l’œil de cette statue par tous les moyens qu’on ne

le crèverait pas pour autant. Non seulement sa forme resterait presque intacte sous la trace

des coups, mais aussi vous rendriez cet œil plus vivant qu’il ne l’était auparavant.

De fait, les vieilles statues grecques n’ont pas de regard. Elles n’ont que des ovales

blancs et vides qui les rendent impassibles et les empêchent d’atteindre une réelle

humanité. Le philosophe grec n’a pas de pupille, comme s’il voyait au-delà des choses sans

même les regarder une seule fois, comme s’il lui était impossible de s’abaisser à avoir un

regard sur la banalité de l’humanité. Comment alors crever l’œil qui ne voit pas et qui ne se

donne pas la peine d’exprimer quoi que ce soit ?

Tout est en effet dans le regard, à la fois pour celui qui observe le monde et pour

celui qui surprend celui-là. Vous pouvez parler à quelqu’un en oubliant complètement

l’existence de ses pieds ou même de sa bouche, qui vous transmet des sons mais dont vous

négligez les mouvements, mais, que vous regardiez cette personne en face ou non, pour

pleinement ressentir son humanité, vous ne pouvez vous empêcher de chercher son regard.

Vous naviguez alors dans les méandres de l’altérité, alors que, quand vous rencontrez des

lunettes noires, vous ne voyez qu’un mur et votre propre reflet.

Et la statue du philosophe grec ne propose même pas de reflet, son œil n’est que le

gouffre qui nous sépare de la réalité cachée par sa stature mythique.

Carole L.Carole L.Carole L.Carole L.

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La rubrique du Lièvre de MarsLa rubrique du Lièvre de MarsLa rubrique du Lièvre de MarsLa rubrique du Lièvre de Mars

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Salade uchronique assaisonnée d’un écrit inédit de la Princesse de Clèves :

Motifs et techniques pour bien tuer son conjoint

Avertissement au lecteur :

Cet article n’a rien de sarkozyste : au contraire, il vient enrichir votre culture sur la douce et sensible

créature de Mme de La Fayette.

entons d’abord de contextualiser notre uchronie en précisant la personnalité de

Caligula (je vous garantis qu’il est intimement lié à la Princesse de Clèves, il vous le dira

lui-même si vous ne me croyez pas). Caligula fut un empereur romain à la réputation

d’un monstre immoral et sanguinolent. Suétone rapporte qu’il fit battre avec des

chaînes et sous ses yeux un homme dont il n’autorisa la mise à mort que parce que l’odeur de la

cervelle en décomposition du prisonnier l’incommodait (c’est bel et bien attesté par Suétone, sans

émerveillement au sujet de la capacité des Romains à vivre sans cerveau). Caligula est en outre

accusé d’inceste avec ses sœurs, de vol de mariée le jour des noces, d’irrespect envers l’institution du

mariage par ses répudiations (le respect de la femme n’a guère d’importance pour Suétone), de

n’aimer en sa dernière épouse que son goût de la débauche, et de bien d’autres choses encore si l’on

voulait dresser une liste exhaustive.

Ce portrait brossé dans la fange, imaginons à présent la rencontre entre Caligula et la

Princesse de Clèves. Les historiens n’ont, jusqu’à ce jour, jamais déterminé ce qui s’est produit

lorsque Caligula, au lieu d’être assassiné, a été précipité dans une faille temporelle. Alors

heureusement pour vous que le directeur du journal distribue toujours des sujets farfelus. Voici donc

Caligula qui tombe dans le trou (c’est la première définition d’une faille), mais ce trou ressemble fort

au terrier d’Alice au Pays des Merveilles. Dans sa chute, il est historiquement probable qu’il heurte

une bibliothèque parmi tous les objets hétéroclites du terrier et renverse le livre de Mme de La

Fayette qui nous intéresse aujourd’hui : La Princesse de Clèves. Alors que le livre reste accroché à une

T

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racine, la Princesse de Clèves s’agrippe aux lettres imprimées mais, à bout de souffle à cause de

l’émotion et de son corset, lâche les pages du livre, suivie immédiatement de son époux, bien décidé

à veiller sur son bien. Le Prince, la Princesse et l’Empereur choient ensemble (comme dans un conte

de fées) pour sortir, dans un épouvantable orage, de la faille temporelle.

Mais voilà les problèmes qui arrivent avec le coup de foudre. La Princesse ressent de

l’attirance pour cet homme viril tant empreint de primitivisme et de bestialité, tandis que Caligula

désire cette belle presque encore vierge, cette âme pure à corrompre. La Princesse oublie

immédiatement M. de Nemours et regrette son mariage. Saisie d’un sentiment féministe original,

elle écrit alors un opuscule philosophico-pragmatique intitulé Motifs et techniques pour bien tuer son

conjoint. Avant de vous présenter des extraits commentés, le directeur du journal, voulant protéger

son gagne-pain bénévole, tient à préciser que le document ci-joint a été retrouvé non dans le tiroir

du bureau du rédacteur, mais dans un tiroir uchronique. Il refuse donc de se plier à toute censure

établie à une époque déterminée.

« Motifs et techniques pour bien tuer son conjoint

A bien des égards, rater sa vie est à la portée de tous. Je souhaite donc, en bonne amie, vous

donner quelques conseils pour vous aider à remonter la pente [ou à parvenir en bas de la pente

selon votre destination]. […] Il est vrai qu’il existe de nombreuses raisons de vouloir mettre fin à

votre vie de couple, mais il est plus avantageux de mettre fin à la vie de votre conjoint, car, comme

ne m’a jamais dit ma mère : « Il vaut mieux suicider les autres plutôt que soi-même ». Selon les

époques, en effet, le divorce est chose pénible ou impossible, tuer son mari permet de mieux

apprécier son départ. […] Un meurtre est-il facile ? Bien sûr que non, mais vous possédez

certainement sans le savoir, une grande partie de l’outillage nécessaire. […]

Dans cette affaire, vous allez devoir maîtriser chaque étape :

1) Rien ne doit pouvoir être soupçonné avant : au contraire, semblez vouloir vous réconcilier, et

même, vous rapprocher de votre conjoint. Son entêtement à détester votre mère [plus que

vous], à vous faire souffrir, à refuser votre amant, vous encouragera pour aller jusqu’au bout

et vous donnera bonne conscience. Mais s’il semble revenir à vous avec amour, méfiez-vous

et reportez-vous au chapitre 3 « Annihiler toute trace de pitié »

2) Le moment clef du meurtre se concentre dans la révélation que vous faites à l’agonisant. En

cas de mort rapide, ne laissant à la victime ni le temps de se retourner ni le temps de

reconnaître l’identité de son meurtrier, l’assassinat est considéré comme raté. Après avoir

usé de poison liquide et/ou verbal (voir chapitre 5 « Techniques à coût modéré

recommandées et expérimentées »), la victime vous DOIT ses derniers regards, mots et

soupirs. Vous pouvez alors lui expliquer, sans trop d’excitation pour ne pas l’effrayer, les

mobiles de votre crime et lui assurer combien votre passion est plus vive que jamais, avec

moult caresses, car l’amour dit-on, se prouve d’abord par les actes. Le plus beau, croyez-en

mon expérience, est l’harmonisation du crime en tuant bien son conjoint grâce à la simple

annonce de votre mobile (le pur aveu de votre attirance pour votre futur amant, par

exemple).

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3) Après le meurtre, tâchez de ne pas être prise et n’oubliez pas que vous êtes une veuve

éplorée. Laissez ensuite l’enquête de police échouer. Après, le choix s’offre à vous : partir

avec votre amant ou, s’il fait défaut, vous dénoncer au tribunal de justice. Dans ce dernier

cas, n’ayant plus rien à perdre, vous êtes libre de vous moquer de tous ces hommes sérieux

en toute occasion [c’est un bon divertissement paraît-il]. […] »

Nous n’avons pas retranscrit le texte dans son intégralité, car nous avons jugé qu’il sera aisé aux

curieux et aux angoissés-avant-leur-premier-meurtre de retrouver les passages qui pourraient les

intéresser et les détails des méthodes d’assassinats conjugaux réussis. Vous pouvez néanmoins

apprécier dès à présent le conseil de la Princesse de Clèves qui vous permet de tomber ni dans le

vulgaire du crime passionnel ni dans le rationalisme anti-sentimental du crime brillant. Il ne nous

reste plus qu’à vous souhaiter bonne chance et à vous proposer un épilogue.

Epilogue :

Un critique contemporain de Suétone commente ainsi la biographie de Caligula dans La vie des

douze Césars : « Ils se marièrent, ne furent pas heureux et n’eurent pas d’enfants »…

Auteur :

Par-le-présent-pseudo-le-rédacteur-décline-toute-responsabilité-devant-la-justice-car-il-ne-tient-pas-à-s-amuser-avec-vous-

lors-du-procès-événtuel-mais-il-reste-à-votre-disposition-pour-toute-critique-sur-son-travail-culinaire

Alias Johanna L.H.

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Lecture critiqueLecture critiqueLecture critiqueLecture critique

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Les Yeux jaunes des crocodiles, Les Yeux jaunes des crocodiles, Les Yeux jaunes des crocodiles, Les Yeux jaunes des crocodiles, ouououou : comment Joséphine devient : comment Joséphine devient : comment Joséphine devient : comment Joséphine devient

écrivain.écrivain.écrivain.écrivain.

Cet été, entre deux préparations de khours,

j’ai vécu une expérience littéraire unique : j’ai

lu de bout en bout Les Yeux jaunes des

crocodiles, le best-seller de Katherine Pancol.

Oui, ne vous frottez pas les yeux, vous ne

rêvez pas. Ce n’est ni de la perversité ni du

masochisme intellectuel de ma part, ni un

signe de grosse fatigue, juste une occasion, à

tous les sens du terme, et une envie de

comprendre, in vivo et au péril de ma

personne, ce qui peut faire le succès de ce

naveton.

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Rassurez-vous, je ne l’ai pas payé son prix – il ne faut tout de même pas exagérer… -- mais je ne

l’ai pas volé non plus : cela ne se fait pas. Je l’ai simplement acquis pour cinquante centimes d’Euro à

la brocante de la paroisse catholique des Issambres (Var), lors de la kermesse du 15 août.

Etait-ce l’effet de l’Esprit-Saint, qui me communiqua ipso facto sa bienveillance ? Toujours est-il

qu’à la surprise générale, à commencer par la mienne, j’ai lu ce roman jusqu’à la fin, et qu’il a laissé

en moi suffisamment de traces pour que me soit venue l’envie, chers étudiants, de vous en toucher

un petit mot.

On peut tout d’abord, en toute objectivité, reconnaître à l’auteur (sans –e, par pitié) une certaine

maîtrise des « ficelles » du métier : le schème de base, celui des sœurs ennemies, est clairement

emprunté à Aristote ; quant à l’évolution personnelle de la protagoniste, la pauvre Joséphine, qui

passe du statut de vilain petit canard à celui de grand beau cygne (alors même que sa sublime sœur

Iris, surdouée mais malhonnête, reçoit de la destinée le châtiment qu’elle a mérité), elle nous

renvoie sans nul doute aux romans moralistes et larmoyants du XVIIIème siècle : les gens modestes,

travailleurs et vertueux sont récompensés par l’amour, l’argent et la notoriété, et les méchants, eux,

bien punis par là où ils sont péché, ce qui constitue pour la lectrice – car ce roman est clairement

ciblé sur le public féminin – un immense réconfort.

Il est également possible de rendre hommage à la totale absence de prétention de la romancière,

qui n’écrit pas pour « faire passer un message » politique ou philosophique, et ne se prend ni pour un

grand auteur ni pour un penseur profond. Mieux vaut une Pancol, simple raconteuse d’histoires, que

les insupportables Zeller, Bégaudeau ou E.-E. Schmidt, ruisselants de prétention et d’autosatisfaction.

Pour le reste, ce n’est pas mauvais, non : c’est très très mauvais. Les personnages sont convenus,

les situations stéréotypées, l’intrigue tellement téléphonée qu’on en devine les rebondissements

quatre chapitres à l’avance, et la psychologie à peine du niveau des magazines féminins, -- somme

toute logique puisque notre romancière fit jadis ses débuts à Cosmopolitan.

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K. Pancol, agrégée des lettres, a sans doute suivi des cours de « creative writing » et cela se sent.

La dimension métalittéraire de l’œuvre n’est pas absente, puisque Joséphine écrit un roman, dont

nous suivons, (par un effet de mise en abyme qui, avouons-le, ne manque pas toujours d’intérêt), la

progression. On peut également relever un embryon de réflexion sur les rapports entre le moi qui vit

et le moi qui écrit, naïvement formulée mais pas entièrement stupide, et, ne barguignons pas, un

propos que n’aurait pas renié Marcel Proust : ce que relate le roman, in fine, c’est comment

Joséphine devient écrivain1, et non comment elle écrit, c'est-à-dire ni bien ni mal, comme Pancol elle-

même. L’avantage de l’agreg, c’est qu’on a au moins appris à manier le français…

Alors, d’où vient que d’une fiction aussi faible on ne puisse se défaire avant de l’avoir terminée ?

Pourquoi, alors qu’à chaque page on s’exclame et on hurle d’indignation devant des ficelles comme

des câbles, des facilités d’écriture, un sens aigu du cliché et des rebondissements de balayeur2, on est

incapable de reposer le roman avant de l’avoir fini ? Pourquoi en arrive-t-on à s’attacher à des

personnages aussi inconsistants ? Difficile de répondre. Contentons-nous humblement d’avouer,

toute honte bue, qu’il y a quelque chose dans ce livre, qui parle à la Bovary qui sommeille en

chacun(e) de nous, et qui fait que, quoi que l’on en pense par ailleurs, il n’est pas complètement

mauvais…

Katherine Pancol, Les Yeux jaunes des crocodiles, Prix des Maisons de la Presse 2006, éd. Albin Michel puis Le

Livre de poche, 7,60 €.

Palombella RossaPalombella RossaPalombella RossaPalombella Rossa

1 La Recherche relate avant tout « comment Marcel devient écrivain », et non comment il écrit (G. Genette, Figures III).

2 Dans l’argot footballistique, une « feinte de balayeur » désigne une astuce de jeu si prévisible qu’elle ne trompe personne.

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PoésiePoésiePoésiePoésie

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L’Horloge des Temps

« Le Temps… Le Temps s’écoule, oui mon maître.

Quant à s’enfuir, si je puis me permettre,

Rien ne se perd, il est motion de l’être.

Une vieille horloge bat tambour en nos cœurs,

Une relique à chérir comme les grands heurs,

Un amant courtisan, toujours fidèle au Temps,

Et, comme il l’admire, il l’imagine sans cesse

Et lui prête les traits qu’inspire la Tendresse

Tandis qu’il en remonte le cours en rêvant.

Revoyez-vous ces jouets en toc sur le plancher

D’aventures éparpillées où vous marchiez ?

Inspirez, le voile se déchire tout seul

Devant la mer déchaînée, les monts enchantés,

Face aux odeurs des sables et des nuits d’été,

Plongez, relevez sur les beautés le linceul.

L’horloge rongée, dans son extase, s’emballe

Et vous entraîne sur les pavés d’une Bâle

Inconnue, que vous avez toujours ignorée,

Qui, à vrai dire, n’est pas vraie mais dont les églises

Se mêlent aux ambres brunes, aux pierres grises,

Et aux remous d’une Loreley amarrée.

Voyagez encore, embrassez l’aube immuable

Des monts silencieux et les pourtours malléables

D’une humanité éternellement mortelle

Aux danses enivrantes comme les lueurs

Qui s’échouent, soulagées, sur les dernières sueurs

Des envolées les plus courtes et les plus belles. »

« Envolée courte, certes,

Brise qui déconcerte,

Dont l’intensité frappe…

Ephémère beauté,

Brève lueur d’été

Que mon cœur seul attrape. »

Ecrit en janvier 2012

Carole L.Carole L.Carole L.Carole L.

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Au-dedans, ténèbres*

Qu’attendez-vous, ainsi appuyé sur la porte ?

Le monde vous attend, mais vous vous enterrez.

Savez-vous, vous perdrez tout, à force d’errer.

Des frivolités, que le diable les emporte !

Avez-vous peur du noir ? ou bien de la lumière ?

Craignez-vous plus d’empoigner en toute ignorance

Ou, surchargé d’éclats, d’accueillir la démence ?

Il s’est envolé, le soleil sur vos paupières.

Que regardez-vous, vous qui n’avez que des yeux ?

Qui vous absorbe, pour que vous n’existiez pas ?

Sur vos chemins, avez-vous vu vos propres pas ?

Vous me semblez bien plus vieux que tous vos aïeux.

Curieux… Vous aimez écouter n’est-ce pas ?

Vous orchestrez, là, depuis votre for lointain.

Dans l’ombre. Vous aimez à le croire du moins.

Il n’y en a qu’un seul que vous ne contrôlez pas.

Le monde est dans votre main, mais lui s’échappe,

Il est le jouet de vos poupées vitreuses,

Il recèle des pierres –sont-elles précieuses ?-

Vous êtes votre Mystère que tous attrapent.

Ecrit en août 2012

Carole L.Carole L.Carole L.Carole L.

.* Expression d’Arthur Schopenhauer : « Nous n’avons de vue que sur le dehors ; au-dedans,

ténèbres ».

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FeuilletonFeuilletonFeuilletonFeuilleton

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HélèneHélèneHélèneHélène

Suite de la 1ère PartieSuite de la 1ère PartieSuite de la 1ère PartieSuite de la 1ère Partie

Le ciel n'était pas encombré de nuages aujourd'hui ; une parfaite cloche de saphir.

Lilian s'était mis à l'abri sous l'ombre d'un arbre du jardin public. Malgré la mélodie apaisante que susurrait le vent il n'arrivait pas à se détendre. D'après sa montre ils auraient déjà dû être là depuis cinq minutes. Son impatience se faisait de plus en plus prégnante d'autant qu'il les attendait déjà depuis un quart d’heure, ou plutôt une semaine. Une silhouette familière entra alors dans son champ de vision. Lilian lui fit signe et Alexandre s'approcha.

« Je ne suis pas le dernier! s'exclama-t-il de surprise. - Tout arrive. répondit Lilian un sourire sur les lèvres. - Tout de même c'est Anna qui a fixé le rendez-vous en insistant sur le fait que c'était de

la plus haute importance, elle pourrait au moins arriver à l'heure, bougonna Alexandre en s'asseyant.

- La voilà justement qui arrive tu vas pouvoir lui exprimer ton mécontentement. La jeune fille s'approcha le visage rayonnant et s'agenouilla face à eux. - C'est bien que vous soyez déjà là tous les deux, je n'aurais pas pu attendre Alexandre. Ce dernier ouvrit la bouche pour protester mais elle ne lui laissa pas le temps de parler.

Elle releva la manche gauche de sa veste de sport jusqu'au milieu du bras, laissant apparaître un hippocampe de huit centimètres tatoué à l'encre noire. Après une seconde de surprise Alexandre fronça les sourcils.

- Ce n'est pas un vrai j'espère? demanda-t-il. - Bien sûr que si, répondit Anna souriante. - Tu t'es fait tatouer sur un coup de tête? - Cela fait plus de trois ans que j'y songeais; et ça y est, enfin il est là, un beau dragon

des mers. Le courage et la force concentrés dans un si petit animal. expliqua-t-elle en regardant son tatouage tendrement.

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- Trois ans! Et tu ne nous as rien dit? s'offusqua Lilian qui s'exprimait enfin. - J'aurais bien aimé le faire, mais je n'avais vraiment pas envie de supporter des

remarques soi-disant préventives mais qui sont juste plus idiotes les unes que les autres.

Le son de sa voix était soudainement devenu cynique. Après un moment de silence Lilian reprit la parole.

- Je le trouve très beau, et c'est vrai qu'il te correspond bien, mais est-ce qu'il te correspondra toujours dans soixante ans?

- Tu vois c'est exactement ce genre de remarque dont je parlais. Ce n'est pas la peine de vous acharner maintenant qu'il est là, aidez-moi plutôt à lui trouver un nom. »

Lilian sourit et se mit à y réfléchir, Anna aurait bien le temps de repenser à son tatouage dans soixante ans, ce n'était pas la peine de lui gâcher son bonheur maintenant. Alexandre eut plus de mal à l'accepter, il se tut pendant un long moment mais Lilian proposa un nom si ridicule qu'il se mit à y réfléchir aussi pour ne pas laisser un tel baptême se produire. Il fut décidé de l'appeler Smok, car, à mi-chemin entre Smaug et smoke la langue polonaise a smok.

Quelques jours plus tard, Lilian reconnut ses amis devant l'entrée de la faculté. Anna attendait patiemment qu'Alexandre finisse sa cigarette. Il les rejoignit et décida de les accompagner à leur amphithéâtre avant de rejoindre le sien.

Une légère brise semblait se lever. Ils entrèrent dans le bâtiment principal et prirent l'ascenseur pour monter jusqu'au troisième étage. La cabine était miteuse et la couleur de ses murs avait disparu sous les multiples couches de tags. Mais Lilian n'y prêtait pas attention, pour lui elle était aussi lumineuse que des rires. Quelques secondes plus tard ils descendirent pour s'engouffrer dans un couloir minuscule. Devant lui Lilian voyait ses deux amis le guider entre des murs qu'il ne voyait jamais. Anna marchait en tête, elle était la plus grande des trois camarades si bien que l'horizon de Lilian s'arrêtait brusquement le long du mur de ses cheveux.

Quand elle se retourna Lilian comprit qu'ils étaient arrivés. Son sourire se ternit légèrement mais il était encore de bonne humeur lorsqu'il prit le chemin inverse. Il parcourut le corridor avec l'impulsion que lui avaient insufflée ses amis, un léger sourire aux lèvres, prit les larges escaliers à contresens de la plupart des étudiants et pour ne pas rater de marches il dut garder son regard concentré sur le sol. Plus il descendait les étages, plus la pierre était devenue sombre du pas des professeurs et des étudiants.

Pendant la descente il ne put échapper à quelques coups de coude, la foule était si dense qu'il eut un léger vertige lorsqu'il se retrouva hors du bâtiment principal. Mais la légère brise était devenue une bourrasque glaciale. Il se fit surprendre par le vent et se recroquevilla avant de commencer à courir pour rejoindre son amphithéâtre isolé à quelques centaines de mètres du bâtiment polarisateur. Même arrivé dans le couloir le froid continuait encore à le hanter.

Il se dirigea vers la salle en espérant que la chaleur humaine d'une multitude d'élèves regroupés en un seul et même lieu suffirait à le réchauffer. En entrant il s'aperçut que le professeur était déjà là et déballait ses affaires. Il regarda affolé les rangs du fond, les plus près de lui, mais ils étaient combles ce jour-là, Lilian dut descendre un bon nombre de marches de l'amphithéâtre avant de trouver une place en extérieur de rangée où il pouvait s'asseoir sans déranger personne. A peine fut-il assis que, sans un bonjour, le professeur commença son cours, regardant parfois l'assemblée qui lui faisait face mais parlant plus pour lui que pour d'autres éventuels auditeurs.

Les heures de cours, les jours et les mois se poursuivirent ainsi. Même s'il changeait de place c'étaient toujours les mêmes bancs, toujours le même brouhaha ambiant parmi lequel aucune voix ne se détachait.

Ses journées étaient monocordes, le temps segmenté, réglé de manière précise pour

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chaque tâche. Se lever, se doucher, s'habiller, se nourrir, s'asseoir et prendre un cours en note, rentrer et mettre en fiche ce même cours, travailler sur un commentaire, dîner, lire et se coucher. Une machine aurait pu effectuer ces tâches aussi bien, même mieux que lui. Bien habillé d'un manteau et d'un chapeau après tout ce ne seraient pas ses professeurs qui feraient la différence.

La seule évolution qui lui prouvait bien qu'un jour était passé, se trouvait dans le récit que son père faisait de son travail à table. Le feuilleton d'un ingénieur à la recherche de plans, c'était ça que l'on appelait « le piment de la vie » ?

Il pensait s'en être accommodé dans l'attente d'un changement radical de sa vie, mais l'homme n'est pas fait pour vivre seul, sinon pourquoi parlait-il? Lilian pouvait rester muet plusieurs jours de suite, pourtant un besoin de s'exprimer revenait immanquablement.

Il essayait alors de voir Alexandre ou Anna, ce qui relevait d'une gymnastique cérébrale car il devait impérativement composer avec les emplois du temps de chacun, sans compter les heures de sport d'Anna et les rendez-vous impromptus décrochés par Alexandre. Une fois tous ensemble, Lilian touchait le bonheur du doigt, il parlait, riait, ce qu'il était incapable de faire seul. Ces moments-là étaient devenus si rares qu'ils étaient comme une soupape de sécurité à ouvrir d'urgence lorsque la machine menaçait d'exploser. Si bien qu'eux aussi, d'une certaine manière, étaient devenus rituels.

Même ses nuits se ressemblaient. Tous les soirs il se réveillait dans la pénombre de sa chambre après avoir affronté en rêve la blancheur de l'hôpital. Mais n'y avait-il rien d'autre après le regard inquiet de ses amis, aucun mot, aucun geste?

Suite au prochain numéro…Suite au prochain numéro…Suite au prochain numéro…Suite au prochain numéro…

Aurore SorriauxAurore SorriauxAurore SorriauxAurore Sorriaux

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CinémaCinémaCinémaCinéma

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Portrait d’acteur

Mads Mikkelsen

Mads Mikkelsen : un nom presque inconnu pour un acteur discret mais au registre

diversifié et au visage reconnaissable entre tous tant il est particulier. Il est ainsi, malgré tout, l’un des seuls acteurs danois que l’on connaît hors de son pays, et on peut le constater aisément par sa présence à l’affiche de deux films qui vont sortir en France au mois de novembre : d’abord La Chasse, pour lequel il a reçu le prix d’interprétation masculine du festival de Cannes, puis A Royal Affair, qui bénéficie de bonnes critiques dans les pays où il est déjà passé à l’écran depuis quelques mois.

Né à Copenhague en 1965, il fait certainement partie des acteurs les plus intrigants et les plus fascinants qui sont à l’affiche, bien qu’il n’ait commencé sa carrière cinématographique qu’à trente ans. Ses rôles ont été très divers et son visage, comme multiforme, prend une nouvelle dimension et une nouvelle ampleur avec chacun d’eux. Pour reprendre un commentaire laissé par un illustre inconnu sur internet suite à une interview qu’il a donnée sur un de ses derniers films, « en plus d’être charismatique, il est intelligent ». En effet, contrairement à certaines actrices qui en viennent à parler de la place de la femme au Xème siècle alors qu’elles jouent des sorcières de la fin du XIVème, Mads Mikkelsen étudie réellement ses rôles et s’attache sensiblement à comprendre ses personnages dans leurs manières de penser et de ressentir les événements.

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On ne peut d’ailleurs pas négliger le fait que certains des personnages qu’il a eu à interpréter exigeaient une certaine performance d’acteur pour être valables. Vous me direz : tous les rôles en réclament une ; mais il faut reconnaître qu’un personnage qui a un minimum de répliques a toujours une contenance, aussi pathétique puisse-t-elle être parfois. Au contraire, un acteur qui, durant tout un film, n’a ni réplique ni le moindre sentiment à exprimer n’a aucun filet auquel se raccrocher. Mads Mikkelsen a dû relever un tel défi dans Le Guerrier silencieux : Valhalla Rising de Nicolas Winding Refn, un film visiblement réservé aux amateurs du genre sanglant (comme il le dit lui-même dans une interview : « Etant donné que ce sont des Vikings ce serait étrange de ne pas les voir tuer ») et silencieux, avec comme objectif de tout de même montrer que l’esprit du personnage travaille constamment.

Mais il ne se limite pas à ce genre de films et a des rôles bien plus « civilisés ».

Notamment, il a joué dans deux œuvres à grand public. La première est Le Roi Arthur d’Antoine Fuqua, dans lequel il est légèrement effacé, surtout face à Clive Owen (dans le rôle d’Arthur), Keira Knightley (Guenièvre) et Ioan Gruffud (Lancelot). Il faut avouer qu’il a, là aussi mais d’une autre manière, un rôle assez « silencieux » puisqu’il interprète Tristan, le chevalier le plus discret du film et qui a l’air parfois trop occupé à parler à son oiseau et à écouter les mouvements du monde pour participer aux débats. Le deuxième film, celui auquel il doit réellement sa reconnaissance internationale, n’est autre que Casino Royal de Martin Campbell, le premier James Bond avec Daniel Craig. Il y interprète le « très français » Le Chiffre (un personnage typique du français dans les films américains dans le sens où il est machiavélique, sombre, arrogant et sophistiqué face à un James Bond direct, gentil - mais désillusionné – et « brut de pomme »). Il ne peut alors pas passer inaperçu en tant que grand

méchant et joueur de poker concentré dont l’œil gauche laisse échapper une larme de sang de temps à autres.

Sa performance dans Casino Royal est

d’autant plus appréciée une fois qu’on a vu Mads Mikkelsen dans d’autres films où il est tout aussi bluffant mais de manière beaucoup plus humaine. On le retrouve ainsi dans After the Wedding de Susanne Bier avec le rôle d’un Jacob bien différent de celui du Paysan parvenu de Marivaux, à commencer déjà par le fait que son nom se prononce « Yacob ». Il s’agit d’un homme voué à l’humanitaire et à son orphelinat

qu’il tient en Inde, qui se voit contraint d’aller à Copenhague pour rencontrer un riche homme

Casino Royal

Le Roi Arthur

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d’affaires. Celui-ci est en effet susceptible de lui fournir les investissements dont il a besoin, mais la situation se complique quand Jacob réalise que la femme de cet homme n’est autre que son amour de jeunesse et que leur fille, dont il assiste au mariage, est en réalité la sienne alors qu’il n’avait nulle conscience de son existence. Est-il nécessaire de souligner à quel point ce rôle est infiniment plus délicat que ceux du Roi Arthur et de Casino Royal ? Et encore, s’il y est le personnage principal, il ne prend pas part au moment le plus difficile du film, d’un point de vue strictement émotionnel, qui est déjà à peine supportable en tant que simple spectateur.

Vous l’aurez compris, Mads Mikkelsen mêle donc films à grand public et films d’auteur, les derniers étant tout de même plus nombreux que les premiers. Les deux œuvres qui arrivent en salle en novembre font justement partie de cette catégorie et ajoutent encore au panel de cet acteur deux rôles assez singuliers.

La Chasse, tout d’abord, fait de lui un homme accusé à tort d’actes de pédophilie sur la fille de son meilleur ami en raison d’un mensonge de la présumée victime. Dans une interview, Mads Mikkelsen déclare que la première fois qu’il a lu le script, il a ressenti la haine du personnage monter en lui, mais une haine qui ne pouvait trouver aucun objet, qui n’était dirigée contre personne. Ce film semble ainsi rendre de manière subtile les ressorts complexes, à la fois psychologiques et sociaux, de tels événements puisque celui qui est accusé à tort ne peut pas prouver son innocence et qu’il est tout à fait humain que tous, y compris le meilleur ami en question, croient les dires de la petite fille et le mettent au ban de la société.

Quel contraste alors entre cet homme brisé, impuissant face au crime dont on l’accuse, et le médecin fort et volontaire incarné dans A Royal Affair ! Ce film-ci, inspiré de l’Histoire danoise, fonctionne autour d’un trio amoureux, mais qui n’en a pas moins l’air atypique. Il semble d’ailleurs bien qu’il n’y ait aucune pure romance qui concerne les personnages interprétés par Mads Mikkelsen jusqu’à présent (le seul film qui serait susceptible d’être critiqué pour un tel petit « défaut » étant Coco Chanel & Igor Stravinsky de Jan Kounen). Il y joue le médecin du roi danois Christian VII qui, inspiré par les Lumières, finit par exercer la réalité du pouvoir et par avoir une relation avec la reine, délaissée par son mari. Il s’agit donc d’un rôle dont on pourrait dire qu’il est plus dans la veine « romantique » que les autres… encore reste-t-il toujours à aller le voir pour en avoir le cœur net.

Carole L. Carole L. Carole L. Carole L.

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Actualité cinémaActualité cinémaActualité cinémaActualité cinéma

«««« Le cinéma c’est un œil ouvert sur le mondeLe cinéma c’est un œil ouvert sur le mondeLe cinéma c’est un œil ouvert sur le mondeLe cinéma c’est un œil ouvert sur le monde »,»,»,», Joseph Bédier Joseph Bédier Joseph Bédier Joseph Bédier

Elle s’appelle Ruby, Elle s’appelle Ruby, Elle s’appelle Ruby, Elle s’appelle Ruby, comédie romantiquecomédie romantiquecomédie romantiquecomédie romantique de Jonathan Dayton et Valérie Faris de Jonathan Dayton et Valérie Faris de Jonathan Dayton et Valérie Faris de Jonathan Dayton et Valérie Faris

((((Little Miss SunshineLittle Miss SunshineLittle Miss SunshineLittle Miss Sunshine), en salle depuis le 3 octobre 2012 ), en salle depuis le 3 octobre 2012 ), en salle depuis le 3 octobre 2012 ), en salle depuis le 3 octobre 2012

Calvin Weir-Fields (Paul Dano) est un romancier à succès qui peine à trouver

un second souffle. Encouragé par son psychiatre à écrire sur la fille de ses

rêves, Calvin voit son univers bouleversé par l'apparition littérale de Ruby

(Zoe Kazan) dans sa vie, amoureuse de lui et exactement comme il l'a écrite

et imaginée. Est-ce une plaisanterie, la folie qui le frappe ou de la magie?

Quoi qu'il en soit, c'est incroyable. Tout en Ruby captive Calvin, et quelque

chose de plus extraordinaire encore se révèle : il lui suffit de s'asseoir devant

sa machine à écrire pour modifier la jeune femme selon sa volonté.

Mon avis sur ce film : Comédie sympathique et originale. J. Dayton et V. Faris s’attaquent aux thèmes

du travail de l’écrivain et de la manipulation littéraire. C’est intéressant de voir l’évolution du film, les

premiers instants sont clairement dans le registre comique mais peu à peu Calvin prend conscience

de son pouvoir immense sur Ruby, il est son créateur et la domine. Le film prend alors une pente plus

dangereuse. Ruby, considérée comme « humaine de papier » est sans cesse modifiée par l’auteur

jusqu’au moment où il dépasse la limite.

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Dans la maisonDans la maisonDans la maisonDans la maison, thriller de François Ozon, en salle depuis le 10 octobre 2012, thriller de François Ozon, en salle depuis le 10 octobre 2012, thriller de François Ozon, en salle depuis le 10 octobre 2012, thriller de François Ozon, en salle depuis le 10 octobre 2012,

Prix Fipresci, Coquillage d'Or du meilleur film.Prix Fipresci, Coquillage d'Or du meilleur film.Prix Fipresci, Coquillage d'Or du meilleur film.Prix Fipresci, Coquillage d'Or du meilleur film.

Un garçon (Ernst Umhauer) de 16 ans s'immisce dans la maison d'un élève de

sa classe, et en fait le récit dans ses rédactions à son professeur de français.

Ce dernier (Fabrice Luchini), face à cet élève doué et différent, reprend goût à

l'enseignement, mais cette intrusion va déclencher une série d'événements

incontrôlables.

Mon avis sur ce film : Le thème de la manipulation littéraire semble plaire au cinéma ces derniers

temps. Dans ce film, étrange mais intrigant, on assiste à une relation maître-élève très particulière.

Les rédactions du jeune Claude deviennent vite indispensables au professeur qui, en voulant donner

des conseils d’écriture à son élève, rentre dans un jeu malsain. Le regard porté sur la littérature est

très gidien, le lecteur fait ce qu’il veut du livre, l’interprète à sa façon et cherche à satisfaire ses désirs

à travers l’acte de lecture. C’est en fin de compte tout le métier de créateur qui est étudié dans le

film. La littérature, le cinéma, l’art (la femme de Luchini, Kristin Scott Thomas, est propriétaire d’une

galerie d’art contemporain).

AmourAmourAmourAmour, drame de Michael Haneke, sortie en salle le 24 octobre 2012, Palme d’Or au , drame de Michael Haneke, sortie en salle le 24 octobre 2012, Palme d’Or au , drame de Michael Haneke, sortie en salle le 24 octobre 2012, Palme d’Or au , drame de Michael Haneke, sortie en salle le 24 octobre 2012, Palme d’Or au

Festival de Cannes.Festival de Cannes.Festival de Cannes.Festival de Cannes.

Georges (Jean-Louis Trintignant) et Anne (Emmanuelle Riva) sont octogénaires,

ce sont des gens cultivés, professeurs de musique à la retraite. Leur fille (Isabelle

Huppert), également musicienne, vit à l’étranger avec sa famille. Un jour, Anne

est victime d’une petite attaque cérébrale. Lorsqu’elle sort de l’hôpital et

revient chez elle, elle est paralysée d’un côté. L’amour qui unit ce vieux couple

va être mis à rude épreuve.

Mon avis sur ce film : Dès les premières secondes du film, le ton est donné et Haneke s’y tient jusqu’à

la fin. C’est un film incroyablement beau et terriblement dur. La mise en scène nous rapproche au

plus près de Georges et Anne, dans l’intimité de cet appartement où ils ont vécu toute leur vie. A

travers le dépérissement d’Anne, à la fois physique et mental, le couple reste soudé, peut- être plus

qu’il ne l’a jamais été. Le film parle de ces deux êtres unis par la vie, unis dans l’épreuve finale. Le

spectateur assiste à ces moments de fin de vie, qui sont ceux de tout un chacun, et admire ces deux

personnages qui, à aucun moment, ne tombent dans le pathétique. Riva et Trintignant sont tout

simplement magistraux. Attention, Amour n’est pas un film sur la mort, au contraire et c’est là toute

la force du film, Amour est un avant tout un film d’amour.

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Into the abyssInto the abyssInto the abyssInto the abyss, doc, doc, doc, documentaire de Werner Herzog, sortie en salle le 24 octobre 2012, umentaire de Werner Herzog, sortie en salle le 24 octobre 2012, umentaire de Werner Herzog, sortie en salle le 24 octobre 2012, umentaire de Werner Herzog, sortie en salle le 24 octobre 2012,

Prix du meilleur documentaire (Grierson Award).Prix du meilleur documentaire (Grierson Award).Prix du meilleur documentaire (Grierson Award).Prix du meilleur documentaire (Grierson Award).

Le 24 octobre 2001, dans la petite ville de Conroe au Texas, Jason Burkett et

Michael Perry, en quête d'une voiture à voler, abattent de sang-froid Sandra

Stotler, son fils Adam et l'ami de ce dernier, Jeremy. Retrouvés puis arrêtés,

les jeunes hommes, à peine âgés de 19 ans, sont condamnés : Burkett à la

prison à perpétuité, Perry à la peine capitale. Le cinéaste Werner Herzog a eu

l'occasion de rencontrer les familles des victimes, mais également le meurtrier

Michael Perry, à quelques jours de son exécution...

Tempête sous un crâneTempête sous un crâneTempête sous un crâneTempête sous un crâne, documentaire de Clara Bouffartique, sortie en salle le 24 , documentaire de Clara Bouffartique, sortie en salle le 24 , documentaire de Clara Bouffartique, sortie en salle le 24 , documentaire de Clara Bouffartique, sortie en salle le 24

octobre 2012octobre 2012octobre 2012octobre 2012.

Au collège Joséphine Baker de Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis, Alice et

Isabelle (Isabelle Soubaigné elle-même) enseignent à la même classe, tour à

tour agitée, timide, joyeuse, turbulente, mélancolique et vivante : la 4èmeC.

La première est professeure de lettres, la seconde d’arts plastiques. Tempête

sous un crâne nous plonge le temps d'une année scolaire au cœur de ce

collège tenu par une équipe énergique et soudée, dans ses couloirs et dans

ses classes où les deux professeures sont bien déterminées à transmettre à

leurs élèves les moyens de s'exprimer.

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Bientôt dans les salles : le cinéma danois à l’honneur

La chasse (Jagten)La chasse (Jagten)La chasse (Jagten)La chasse (Jagten), drame de Thomas Vinterberg. (S, drame de Thomas Vinterberg. (S, drame de Thomas Vinterberg. (S, drame de Thomas Vinterberg. (Sortie le 14 novembre 2012)ortie le 14 novembre 2012)ortie le 14 novembre 2012)ortie le 14 novembre 2012)

Après un divorce difficile, Lucas (Mads Mikkelsen prix d’interprétation

masculine), quarante ans, a trouvé une nouvelle petite amie, un nouveau travail

et il s'applique à reconstruire sa relation avec Marcus, son fils adolescent. Mais

quelque chose tourne mal. Presque rien. Une remarque en passant. Un

mensonge fortuit. Et alors que la neige commence à tomber et que les lumières

de Noël s'illuminent, le mensonge se répand comme un virus invisible. La

stupeur et la méfiance se propagent et la petite communauté plonge dans

l'hystérie collective, obligeant Lucas à se battre pour sauver sa vie et sa dignité.

Royal Affair (En Kongelig AffæreRoyal Affair (En Kongelig AffæreRoyal Affair (En Kongelig AffæreRoyal Affair (En Kongelig Affære), drame historique de Kikolaj Arcel, Ours d’argent ), drame historique de Kikolaj Arcel, Ours d’argent ), drame historique de Kikolaj Arcel, Ours d’argent ), drame historique de Kikolaj Arcel, Ours d’argent

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(Sortie le 21 novembre 2012) (Sortie le 21 novembre 2012) (Sortie le 21 novembre 2012) (Sortie le 21 novembre 2012)

Danemark 1770. La passion secrète que voue la reine Caroline Mathilde (Alicia

Vikander) au médecin du roi, l’influent Struensee (Mads Mikkelsen), va changer

à jamais le destin de la nation toute entière. Royal Affair relate une page

capitale de l’histoire danoise, oubliée des manuels français. La relation

amoureuse et intellectuelle entre Caroline Mathilde et Struensee, fortement

influencé par les philosophes des Lumières, Rousseau et Voltaire en tête, conduira au renversement

de l’ordre social établi, et annoncera les révolutions qui embraseront l’Europe vingt ans plus tard.

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Prévert, restauré et proposé dans les salles depuis le 24 octobre. Prévert, restauré et proposé dans les salles depuis le 24 octobre. Prévert, restauré et proposé dans les salles depuis le 24 octobre. Prévert, restauré et proposé dans les salles depuis le 24 octobre. LeLeLeLessss Enfants du Enfants du Enfants du Enfants du

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centenaire du cinéma en 199centenaire du cinéma en 199centenaire du cinéma en 199centenaire du cinéma en 1995.5.5.5.

Paris, 1828. Sur le boulevard du Crime, au milieu de la foule, des acteurs et des

bateleurs, le mime Baptiste Deburau, par son témoignage muet, sauve Garance

(Arletty) d'une erreur judiciaire. C'est ici que commencent les amours

contrariées de Garance, femme libre et audacieuse, et de Baptiste qu'elle intimide et qui n'ose lui

déclarer sa flamme. Mais aussi ceux de Nathalie, la fille du directeur du théâtre, qui aime Baptiste, et

Frédérick Lemaître, un jeune acteur prometteur, qui entame une liaison avec Garance, tandis que

cette dernière aime aussi Baptiste en secret.

Camille SalleCamille SalleCamille SalleCamille Salle

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Octobre 2012 Page 29

La fascination des élèves de prépaLa fascination des élèves de prépaLa fascination des élèves de prépaLa fascination des élèves de prépa

E.M.E.M.E.M.E.M.

Page 30: Le Spectateur Déluré Octobre

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Informations de premier choix

SCOOP On a trouvé la date de naissance exacte d'Antoine Volodine ! (Mais vous

pensez vraiment qu'on va vous la révéler ?)

******

Les fourmis s'étirent en se réveillant.

******

Les pangrammes sont des phrases comportant au moins une fois les 26

lettres de l'alphabet.

Exemples : Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume.

Le vif zéphyr jubile sur les kumquats du clown gracieux.

******

Les ours polaires sont gauchers. .......................................................................................................................................................

En fait ce n’est pas vrai, nous ne savons toujours rien sur Antoine Volodine, le mystère reste entier...

JulieJulieJulieJulie G.G.G.G.

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Octobre 2012 Page 31

Horoscope (Parce qu’en prépa les planètes, déséquilibrées par le travail,

tournent différemment…)

BÉLIER Suivez le conseil de Voltaire, soyez heureux, c'est bon pour votre santé.

TAUREAU Rappel: Mme Guichard attend toujours son Mojito aux 2 G (avec beaucoup de menthe).

GÉMEAUX N'oubliez pas la date de la bataille de Salamine ! Même en Khâgne ça peut servir.

CANCER Vous laisserez le vent baigner votre tête nue.

LION Mâcher un chewing-gum en épluchant des oignons évitera de vous faire pleurer (véridique !)

VIERGE Le fantôme de votre vie sociale vous hante. Courage, bientôt les vacances !

BALANCE Dissert' pour la rentrée : "Scribe, une bonne situation ?" (3 parties 3 sous-parties of course)

SCORPION Puisque la musique adoucit les mœurs, écoutez la 7° Symphonie, Mouvement 2, Allegretto de Beethoven

SAGITTAIRE Toujours vous chérirez la mer !

CAPRICORNE Par un prompt renfort, vous vous vîtes 3 000 en arrivant au port.

VERSEAU Vous n'avez pas besoin de croire tout ce qui est écrit ici.

POISSON Tout baigne, vous vous la coulez douce.

Julie G.Julie G.Julie G.Julie G.

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(Ceci n’est pas une page blanche

- ou comment définir par le non étant ce qui était pourtant déjà avant de l’annoter ainsi -)