Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés...

29
Le rachis thoracique : ce méconnu ! Sous la coordination de S. ROZENBERG et M. MARTY avec la collaboration de 11, bd Henri IV - 34000 Montpellier e-mail : [email protected] S. AUNOBLE, R. BASTIN, J. BODIN, R. BONACCORSI, P. CHASTANET, B. CORTET, C. DEMOULIN, A. FEYDY , C. HA, P. KHALIFA, R. KHAYAT, J.D. LAREDO, J.C. LE HUEC, F. LE MAREC, J.Y. MAIGNE, C. MARTY-POUMARAT, M. NORBERG, H. PASCAL-MOUSSELLARD, A. PETIT LE MANACH, A. RAMOND, Y. ROQUELAURE, P. ROUSSOULY , R. SADDIKI, F. SIBILLA, M. VANDERTHOMMEN

Transcript of Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés...

Page 1: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

Sous la coordination deS. ROZENBERG et M. MARTY

avec la collaboration de

11, bd Henri IV - 34000 Montpelliere-mail : [email protected]

S. Aunoble, R. bAStin, J. bodin, R. bonAccoRSi, P. chAStAnet, b. coRtet, c. demoulin, A. Feydy, c. hA, P. KhAliFA, R. KhAyAt, J.d. lARedo, J.c. le huec, F. le mARec, J.y. mAigne, c. mARty-PoumARAt, m. noRbeRg, h. PAScAl-mouSSellARd, A. Petit le mAnAc’h, A. RAmond, y. RoquelAuRe, P. RouSSouly, R. SAddiKi, F. SibillA, m. VAndeRthommen

Rachis thoracique.indb 3 16/12/11 18:05:22

Page 2: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

S. Aunoble : Service Orthopédie Rachis 2 - CHU Pellegrin Tripode - 33076 Bordeaux cedex - France

R. Bastin : Département des Sciences de la Motri-cité - Université de Liège - Institut Supérieur d’Edu-cation Physique et de Kinésithérapie (ISEPK) - Bât. B21 - Allée des Sports 4 - 4000 Liège - Belgique

J. Bodin : Statisticienne - Laboratoire d’Ergonomie et d’Epidémiologie en Santé au Travail (LEEST), LU-NAM - Université d’Angers, EA 4336 - Unité asso-ciée à l’Institut de veille sanitaire - France

R. Bonaccorsi : CCA, service d’Orthopédie et Trau-matologie du Pr Catonne, GHU Pitié-Salpêtrière - 75013 Paris - France

P. Chastanet : Département Universitaire de Radio-logie Ostéo-Articulaire - Université Lille 2 - 59045 Lille cedex - France

B. Cortet : Département Universitaire de Rhumato-logie & EA 4490 - Université Lille 2 - 59045 Lille ce-dex - France

C. Demoulin : Département des Sciences de la Mo-tricité - Université de Liège - Institut Supérieur d’Edu-cation Physique et de Kinésithérapie (ISEPK) - Bât. B21 - Allée des Sports 4 - 4000 Liège - Belgique

A. Feydy : Radiologie B, Hôpital Cochin - APHP - Université Paris Descartes - 75679 Paris Cedex 14 - France

C. Ha : Epidémiologiste, Département Santé Travail, Institut de veille sanitaire - Saint-Maurice - France

P. Khalifa : ACCA, 79 avenue de Breteuil - 75015 Paris - France

R. Khayat : Radiologue - Ancien interne des Hôpi-taux de Paris - Ancien assistant des Hôpitaux - France

J.D. Laredo : PU Paris 7 - Service de Radiologie Ostéo-articulaire - Hôpital Lariboisière, APHP - 75116 Paris - France

J.C. Le Huec : Service Orthopédie Rachis 2 - CHU Pellegrin Tripode - 33076 Bordeaux cedex - France

F. Le Marec : Statisticien, Laboratoire d’Ergonomie et d’Epidémiologie en Santé au Travail (LEEST), LUNAM ; Université d’Angers, EA 4336 ; Unité as-sociée à l’Institut de veille sanitaire - France

J.Y. Maigne : Médecine Physique - Hôtel-Dieu de Paris - 75181 Paris cedex 04 - France

M. Marty : PA, service de Rhumatologie - Hôpital Henri Mondor - 94000 Créteil - France

C. Marty-Poumarat : Groupe Rachis Garches - Pôle Neuro-Locomoteur - Hôpital Raymond Poincaré - Garches - France

M. Norberg : DAL, CHUV (Lausanne, Suisse) - Cen-tre médical de Lavey-les-Bains (Lavey-les-Bains, Suisse)

H. Pascal-Moussellard : PU-PH, service d’Ortho-pédie et Traumatologie du Pr Catonne, GHU Pitié-Salpêtrière - 75013 Paris - France

A. Petit Le Manac’h : AHU Médecine et Santé au Travail, Laboratoire d’Ergonomie et d’Epidémiologie en Santé au Travail (LEEST), LUNAM - Université d’Angers, EA 4336 - Unité associée à l’Institut de veille sanitaire - CHU Angers - France

A. Ramond : CCA Médecine Générale, Université d’Angers, Laboratoire d’Ergonomie et d’Epidémiolo-gie en Santé au Travail (LEEST), LUNAM ; EA 4336 - Unité associée à l’Institut de veille sanitaire - France

Y. Roquelaure : PU-PH Médecine et Santé au Tra-vail - Laboratoire d’Ergonomie et d’Epidémiologie en Santé au Travail (LEEST), LUNAM - Université d’Angers, EA 4336 - Unité associée à l’Institut de veille sanitaire - CHU Angers - France

P. Roussouly : Service Orthopédie Rachis 2 - CHU Pellegrin Tripode - 33076 Bordeaux cedex - France

S. Rozenberg : PH, service de Rhumatologie - GHU Pitié Salpétrière - 75013 Paris - France

R. Saddiki : Service Orthopédie Rachis 2 - CHU Pellegrin Tripode - 33076 Bordeaux cedex - France

F. Sibilla : Service Orthopédie Rachis 2 - CHU Pelle-grin Tripode - 33076 Bordeaux cedex - France

M. Vanderthommen : Département des Sciences de la Motricité - Université de Liège - Institut Supé-rieur d’Education Physique et de Kinésithérapie (ISEPK) - Bât. B21 - Allée des Sports 4 - 4000 Liège - Belgique

Liste des auteurs

Rachis thoracique.indb 4 16/12/11 18:05:22

Page 3: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Les dorsalgies communesJ.Y. Maigne ..................................................................................................................................................................9

Les dorsalgies d’origine viscéraleP. Khalifa ..................................................................................................................................................................17

Diagnostic d’une lésion vertébrale thoracique ostéolytique d’allure tumoraleJ.-D. lareDo, r. KhaYat .......................................................................................................................................27

Les nouveaux paramètres de l’équilibre rachidienJ.C. le hueC, P. roussoulY, s. aunoble, f. sibilla, r. saDDiKi ...........................................................49

Apport du système EOS à l’étude du rachis dorsala. feYDY .....................................................................................................................................................................63

Cyphose de l’adulteC. MartY-PouMarat ...............................................................................................................................................69

La vertébroplastie et cyphoplastie dans l’ostéoporose, état des lieux en 2012b. Cortet, P. Chastanet ......................................................................................................................................83

Traitement chirurgical de la fracture dorsale ostéoporotiqueM. norberg ..............................................................................................................................................................93

Dorsalgies, un problème en médecine du travail : apports du réseau de surveillance épidémiologique des troubles musculo-squelettiques dans les Pays de la LoireY. roquelaure, f. le MareC, a. Petit le ManaC’h, J. boDin, a. raMonD, C. ha ......................103

Rééducation de la dorsalgie et de l’hypercyphose dorsaleM. VanDerthoMMen, r. bastin, C. DeMoulin ...........................................................................................117

Souffrance médullaire dorsale par rétrécissement canalaire : étiologies et traitementh. PasCal-MoussellarD, r. bonaCCorsi ......................................................................................................123

Sommaire

Rachis thoracique.indb 5 16/12/11 18:05:22

Page 4: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le Groupe RACHIS (ou Section RACHIS) de la Société Française de Rhumatologie a été créé en 1993. De nombreux travaux ont été initiés et publiés sous l’égide de ce groupe.

Des réunions bisannuelles, en alternance avec la Belgium Back Society, sont depuis plusieurs années l’occasion de faire le point sur un thème ayant trait au rachis et ont fait l’objet de publications.

Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu-nion du groupe Rachis se tient à Paris pour la première fois, la chance nous étant donnée de nous réunir dans les locaux du prestigieux Institut du Cerveau et de la Moelle épinière (ICM) à l’Hôpital Pitié-Salpêtrière ; la deuxième nouveauté est la publi-cation des textes de la Journée dans un livre qui sera, nous l’espérons, le premier d’une longue collection.

Le thème choisi est “Le rachis dorsal, ce méconnu”. En effet, peu de travaux sont publiés sur cette région du rachis qui pose cependant d’importants problèmes au quotidien des praticiens. Cet ouvrage aborde le démembrement des principales pa-thologies non spécifiques et spécifiques (inflammatoires, osseuses) atteignant le ra-chis dorsal, y compris les déformations rachidiennes, y compris les scolioses. Il est aussi l’occasion de s’instruire sur les nouveaux concepts biomécaniques de l’équili-bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie en 3D. Les thérapeutiques de la rééducation à la chirurgie, en passant par les techniques percutanées sont également traitées.

Nous remercions vivement tous les acteurs et auteurs qui ont contribué à la réussite de cette Journée.

Sylvie ROzENBERG, Marc MARTy

Editorial

Rachis thoracique.indb 7 16/12/11 18:05:22

Page 5: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

9

Les dorsalgies communes dites aussi non spécifiques sont fréquentes en pra-tique quotidienne, mais il n’existe que très peu de recherche dans ce domaine. Différentes causes ont été évoquées : douleurs musculaires, discales, articulai-res vertébrales ou costales, neurologi-ques ou psychologiques, douleurs réfé-rées à partir du rachis cervical… Nous nous proposons de revoir ces différentes étiologies possibles et de les discuter à la lumière des données de la littérature et de nos propres travaux.

Définition et prévalence

Il n’existe pas de définition précise de la dorsalgie. Dans la littérature, on la trouve souvent associée à la notion de rachis thoracique [1], ce qui pourrait être consi-déré comme une misconception : les douleurs dorsales ne viennent pas tou-tes du rachis (la fibromyalgie en est l’il-lustration la plus simple) et certaines douleurs dorsales pourraient être des douleurs référées à partir du rachis cer-vical. Il est donc préférable de s’en tenir à une définition topographique : toute

douleur ressentie entre des lignes hori-zontales passant par T1 et T12. L’asso-ciation avec une cervicalgie est relative-ment fréquente (cervico-dorsalgie), celle avec une lombalgie beaucoup plus rare.La prévalence sur un an des dorsalgies communes serait comprise entre 15 et 27,5 %, avec une plus grande fréquence chez la femme et l’adolescent [1].

Dorsalgie et syndrome canalaire des rameaux cutanés dorsaux thoraciques

Astvatsaturov fut le premier à décrire, en 1934, ce qu’il appela “notalgie paresthé-sique” [2]. Il s’agissait d’une douleur dorsale unilatérale située dans un terri-toire dermatomal de T2 à T6 associée à une démangeaison et à une perte de sensibilité discrète. Il l’attribuait à une névrite d’un rameau dorsal. La notion de démangeaison fait qu’actuellement, seule la littérature dermatologique traite de cette affection… Elle nous semble plus fréquente qu’on ne le pense en pa-thologie musculo-squelettique et nous pensons avoir apporté une contribution

Les dorsalgies communes

J.-Y. Maigne

Rachis thoracique.indb 9 16/12/11 18:05:22

Page 6: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

10

décisive à sa compréhension en étudiant le trajet des rameaux cutanés dorsaux thoraciques [3]. De T1 à T6, ils sont en situation paramédiale, devenant superfi-ciels après un trajet en zig-zag à travers les muscles spinaux au cours duquel ils peuvent être sévèrement comprimés par des formations tendineuses (fig. 1, 2 et 3). En dessous de T6, les rameaux cu-tanés deviennent latéraux et n’ont pas ce trajet à risque car ils ne cheminent plus à travers les muscles paraverté-braux. La notalgie paresthésique est donc très probablement un syndrome canalaire et non pas une névrite. L’hy-poesthésie est inconstante ; en revan-che, la compression digitale du nerf sur la face latérale du processus épineux correspondant est régulièrement dou-loureuse, pouvant même reproduire la douleur spontanée (J.y. Maigne). Il s’agit

Fig. 1 : Organisation des rameaux nerveux rachidiens de T1 à T6 inclus. Le nerf rachidien donne naissance à un rameau ventral, le nerf intercostal, et à un rameau dorsal qui se divise après quelques millimètres en un rameau latéral et un rameau médial. Le rameau latéral est exclu-sivement à destinée musculaire. Son trajet est sans parti-cularité. Le rameau médial chemine, de la profondeur vers la superficie, au travers des muscles paravertébraux et de leurs attaches tendineuses. Il gagne la pointe du processus épineux qui est un point fixe de son trajet, obli-que à 90° pour devenir superficiel et innerver la peau.

Fig. 2 : Aspect comprimé d’un rameau dorsal médial au cours de son trajet intramusculaire (flèches noires). Les doubles flèches marquent la ligne des processus épineux.

Fig. 3 : Emergence superficielle des rameaux cutanés dor-saux au travers de la lame tendineuse d’insertion du mus-cle splénius du cou. Les deux muscles, droit et gauche, forment un V ouvert vers le haut en s’attachant sur T4.

Rachis thoracique.indb 10 16/12/11 18:05:23

Page 7: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Les dorsaLgies communes

11

là d’un point fixe dans son trajet, qui marque son émergence superficielle [3]. La zone précise où le nerf subit une striction est beaucoup plus difficile à dé-terminer car elle est probablement située au sein des muscles paravertébraux, plus ou moins profondément.

Dorsalgie et douleur discale

Cyriax attribuait les douleurs dorsales à une protrusion discale d’un disque tho-racique [4]. Il considérait qu’il s’agissait d’une douleur de la dure-mère, provo-quée par la pression de la protrusion d’un disque intervertébral thoracique exercée sur la dure-mère en regard, et pouvant se projeter plus ou moins à dis-tance. Parmi les caractéristiques clini-ques, il accordait de l’importance à la reproduction de la douleur par la flexion du cou, qui étirerait la dure-mère cervi-cale et thoracique, contrastant avec la liberté et l’indolence des autres mouve-ments cervicaux, à la limitation de la flexion du rachis thoracique (éventuelle-ment de la latéro-flexion) et à l’augmen-tation de douleur lors de la toux et de l’éternuement. Il traitait ces patients en

combinant manipulation et traction ra-chidienne ou par des injections scléro-santes ligamentaires.

L’IRM du rachis thoracique révèle par-fois une dégénérescence discale ou une protrusion chez ces patients, à un niveau correspondant à celui de la douleur, mais ces anomalies sont également fréquen-tes chez les sujets asymptomatiques, surtout lorsqu’ils avancent en âge [5]. De ce fait, elles pourraient avoir plus de va-leur chez un sujet jeune, à condition que soit respectée cette règle de correspon-dance entre les données de l’examen palpatoire (notion d’un étage douloureux à la pression) et celle de l’IRM (dégéné-rescence au même niveau). La discogra-phie thoracique a été proposée pour identifier les disques symptomatiques [6, 7]. Une récente méta-analyse a conclu à l’existence de preuves limitées (“limi-ted evidence”) en faveur de son utilisa-tion comme outil diagnostique [8], sans parler de ses risques. Sans aller jusqu’à la discographie, l’IRM peut parfois mon-trer des images évocatrices d’une origi-ne discale à la douleur, comme par exemple des modifications des plateaux vertébraux adjacents (Modic 1, fig. 4) ou

Fig. 4 : Signe de Modic 1 affectant le disque T8-9.

Rachis thoracique.indb 11 16/12/11 18:05:24

Page 8: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

12

une hernie intra-spongieuse. Les deux meilleurs arguments en faveur de la res-ponsabilité de ces lésions dans le ta-bleau clinique sont la concordance en-tre l’étage trouvé sensible à la palpation et le disque atteint à l’IRM d’une part et la sensibilité aux anti-inflammatoires d’autre part.

Dorsalgie et douleur articulaire zygapophysaire ou costo-vertébrale

R. Maigne a été le premier auteur à sus-pecter la possibilité de douleurs dorsa-les à partir d’une articulation zygapo-physaire thoracique [9]. La douleur se caractérise par une irradiation latérale en bande plus ou moins étendue, référée le long du trajet de la branche postérieure cutanée. Les études visant à établir une cartographie de la douleur zygapophy-saire thoracique chez des volontaires sains montrent des aires de projection superposables à la distribution de ces nerfs [10, 11], mais la fréquence de cette étiologie, chez les dorsalgiques, reste à déterminer. Notre expérience est qu’elle est très rare, peut-être en raison de la très faible mobilité de ces articulations, d’où de faibles contraintes.

Les douleurs d’origine costo-vertébrale (costo-corporéale surtout) justifient les mêmes remarques. R. Maigne en décri-vit une forme particulière d’origine post-traumatique sous le nom d’entorse cos-tale [12]. Elle peut aussi être liée à une arthropathie dégénérative [13, 14]. La fréquence n’en est pas connue. Il faut aussi évoquer la difficulté de repérer l’étage potentiellement responsable avec précision sur un scanner, d’où la

nécessité d’une vue de profil compre-nant le rachis soit cervical, soit lombaire pour pouvoir compter les vertèbres.

Dorsalgie et douleur myo-fasciale

J. Travell et D. Simons ont développé le concept de douleur myofasciale, pre-nant naissance essentiellement au sein des muscles ou de leurs aponévroses, à partir de points-gâchette [15]. Un point-gâchette est un point très sensible à la pression, capable de reproduire, sous l’effet de cette même pression, la dou-leur spontanée du patient avec ses irra-diations à distance, ce dernier point étant fondamental. Les autres signes sont la perte d’extensibilité du muscle et une discrète perte de force. Ces points-gâchette apparaissent, d’après Travell et Simons, lors de la sur-utilisation d’un muscle (mauvais gestes, mauvaises postures, traumatismes ou modification du patron d’activation du muscle pour protéger une articulation douloureuse par exemple). Ils en ont dressé une car-tographie complète, intéressant chacun des muscles du corps, avec leur situa-tion et leurs irradiations, qui seraient re-lativement fixes pour un point donné. Au niveau thoracique, ils ont décrit des points-gâchette dans des muscles com-me le longissimus dorsalis, l’iliocostal, le semispinalis, les rhomboïdes, le levator scapula, etc. L’un de ces points se trou-ve dans le multifidus, se projetant sur le corps vertébral de T5, et nous paraît d’un intérêt tout particulier (cf. infra). Le traitement inclut des injections locales d’anesthésique ou la vaporisation d’un réfrigérant cutané, suivies d’un étirement répété du muscle.

Rachis thoracique.indb 12 16/12/11 18:05:24

Page 9: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Les dorsaLgies communes

13

Dorsalgies de tension

Une “tension musculaire augmentée” est un mécanisme souvent invoqué, sous le terme générique de dorsalgie de tension. Les causes en seraient la ten-sion nerveuse accumulée et/ou de mau-vaises postures fatiguant les muscles du dos. L’augmentation de tension alléguée n’a, à notre connaissance, fait l’objet d’aucune investigation destinée à la mettre en évidence ; néanmoins, ce mé-canisme est plausible. On le rencontre-rait aussi dans les dorsalgies de la jeune fille liées à une hypertrophie mammaire. La notion de tension nerveuse est à l’in-terface entre le psychique et le physique. Une tension musculaire augmentée si-gnifie concrètement une augmentation de la pression intramusculaire donc une diminution de l’apport sanguin et des étirements permanents sur les rameaux nerveux cutanés qui cheminent entre ces muscles et leurs tendons (fig. 3) [3], deux facteurs physiques qui pourraient concourir à la douleur.

Douleur référée à partir du rachis cervical (1) : l’algie interscapulaire

Les douleurs référées à partir du rachis cervical sont probable-ment assez fréquentes. Une des causes possible serait la conti-nuité des masses musculaires paravertébrales de la base du crâne jusqu’au rachis thoracique aussi bas que T6. La forme la plus commune de ces douleurs a été décrite par R. Maigne sous le nom d’algie inter-scapulaire d’ori-gine cervicale. La lésion d’origine

est cervicale basse (discale ou zygapo-physaire), mais la douleur est ressentie plus bas, entre les omoplates, au niveau d’un point douloureux paravertébral se projetant en regard de T5, le point inters-capulaire. Ce point était considéré par R. Maigne comme l’émergence superfi-cielle du rameau dorsal cutané du 2e nerf thoracique, ce qui avait conduit cet auteur à faire l’hypothèse de connec-tions neurologiques entre les segments médullaires C5, C6 et C7 et le segment T2 [16]. Nous avons pu constater nous-même la grande constance de ce point dans sa localisation, en recourant au re-pérage radiologique. Il est au contact du processus épineux de T4, débordant parfois sur l’espace interépineux sus ou sous-jacent, rarement plus loin (fig. 5). La fixité de ce point n’est pas compati-ble avec une situation dans le muscle multifidus, dont les insertions se répè-tent selon un même schéma à chaque étage. La seule structure anatomique qui peut lui correspondre est la lame tendi-neuse d’insertion caudale du muscle splenius cervicis, car elle s’attache sur ce processus et sur les ligaments interé-pineux adjacents [17] (fig. 6). Le splénius

Fig. 5 : Palpation du point interscapulaire. Le doigt appuie sur la face latérale des épineuses. C’est au niveau de celle de T4 que ce point est retrouvé. Il correspond anatomiquement au tendon du splénius du cou et témoigne d’une origine cervicale probable de la douleur.

Rachis thoracique.indb 13 16/12/11 18:05:24

Page 10: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

14

cervicis est un muscle d’origine cervica-le, dont l’innervation est également cer-vicale et l’on peut admettre qu’il consti-tue une voie de projection de la douleur. D’autre part, le fait que cette lame tendi-neuse soit souvent traversée par des ra-meaux nerveux sensitifs pourrait ajouter un second mécanisme de douleur : un étirement de ces nerfs sous l’effet d’une tension musculaire augmentée (fig. 3). Les causes de ces dorsalgies rejoignent les causes de cervicalgie. La pathologie discale est au premier plan. C’est ainsi que beaucoup de NCB débutent, avant l’apparition de la radiculalgie, par une douleur interscapulaire. La pratique de la discographie cervicale avait amené

Cloward à remarquer cette irradiation particulière dès 1960 [18]. Une origine zygaphysaire cervicale est aussi possi-ble comme en témoigne les patrons de distribution de la douleur chez des vo-lontaires sains : la stimulation des articu-lations zygapophysaires cervicales infé-rieures déclenche des douleurs situées dans la région interscapulaire [19].

Douleur référée à partir du rachis cervical (2) : le syndrome du levator scapula

Le muscle levator scapula (ancienne-ment muscle angulaire de l’omoplate) s’insère caudalement sur l’angle supéro-médial de l’omoplate et cranialement sur les transverses des premières vertèbres cervicales. Une douleur peut provenir de son insertion caudale, et être ressentie autour de cette zone, réalisant une dor-salgie latérale, souvent désignée par les patients comme une douleur “d’épaule”. La douleur remonte parfois vers le cou, suivant en cela le trajet du muscle. Elle a été primitivement décrite par un méde-cin uruguayen, F. Herrera-Ramos en 1962, sous le nom de syndrome du leva-tor scapulae (ou syndrome de l’angulai-re), qui ajoutait au tableau clinique des irradiations douloureuses dans le bras. La cause était pour lui une douleur d’in-sertion de type tendinopathie et il propo-sait, comme traitement, une infiltration de ce point douloureux, à l’angle supéro-interne de l’omoplate. La littérature est restée très pauvre sur ce syndrome. Tra-vell et Simons décrivirent la présence d’un point gâchette au sein de ce mus-cle, qui serait responsable d’irradiations le long du bord médial de l’omoplate.

Fig. 6 : Le muscle splénius cervicis (sc) s’attachant sur l’épineuse de T4 (flèche) et sur les ligaments interépi-neux sus et sous-jacents.

Rachis thoracique.indb 14 16/12/11 18:05:25

Page 11: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Les dorsaLgies communes

15

R. Maigne pensait qu’il s’agissait de douleurs irradiées à partir de l’étage C3-C4. Cette opinion est confortée par no-tre travail montrant que la présence d’un point douloureux sur l’insertion du mus-cle est plus souvent associée à une dou-leur segmentaire intéressant le rachis cervical supérieur ou moyen [20] et par le travail de Hsueh et al, qui notent que des points gâchette dans ce muscle et à son insertion basse sont associés à la présence d’anomalies discales en IRM prédominant aux étages C3-4 et C4-5 [21]. Nous avons nous-même parfois constaté la présence d’une sténose fo-raminale C3-4 (fig. 7) ou C4-5 homolaté-rale chez ces patients et considérons alors ce syndrome comme une radiculal-gie C3 ou C4, que nous traitons comme une NCB [22]. Bien souvent cependant,

la sensibilité de ce muscle ou de son in-sertion accompagne une cervicalgie ou une vraie NCB et doit alors être vue comme la conséquence d’une hyper-esthésie locale.

Fibromyalgie et douleurs liées à un dysfonctionnement des voies centrales de la douleur

Il est inhabituel de faire figurer la fibro-myalgie dans la liste des étiologies des dorsalgies. Nous pensons que c’est une erreur, car les douleurs de dos sont fré-quentes dans cette affection, voire révé-latrices. De plus, à côté de la fibromyal-gie dans sa forme typique, existent de nombreux cas de syndrome douloureux dorsaux répondant à la définition de la dorsalgie que nous avons donnée (cf. su-pra), mais où la diffusion de la douleur et sa permanence plaident en faveur d’un rôle dominant d’un dysfonctionnement des voies centrales de la douleur. Il en est ainsi des douleurs associées à la dé-pression ou au stress. On comprend donc l’importance de ne pas définir la dorsalgie comme une douleur provenant du rachis thoracique, d’autant que le plus souvent, la preuve du lien causal manque, mais comme une douleur inté-ressant la région dorsale haute.

Conclusion

La longueur de cette liste ne doit pas ca-cher le fait que la dorsalgie reste dans bien des cas un mystère, dans l’impossi-bilité que nous sommes d’en trouver l’origine avec une certitude raisonnable.

Fig. 7 : Sténose foraminale C3-C4 (flèche).

Rachis thoracique.indb 15 16/12/11 18:05:25

Page 12: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

16

Bibliographie

[1] BRIGGS AM, SMITH AJ, STRAKER LM, BRAGGE P Thoracic spine pain in the general population: Pre-valence, incidence and associated factors in children, adolescents and adults. A systematic review. BMC Musculoskelet Disord. 2009;10:77. Published online 2009 June 29. doi: 10.1186/1471-2474-10-77.[2] ASTVATSATUROV MI. Über parestethische Neu-ralgien und eine besondere Form derselben Notalgia paresthetica. Dtsch Z Nervenh 1934 133: 188-96.[3] MAIGNE Jy, MAIGNE R, GUéRIN-SURVILLE H Upper thoracic dorsal rami: anatomic study of their medial cutaneous branches. Surg Radiol Anat. 1991; 13: 109-12.[4] CyRIAx JH, CyRIAx PJ. Cyriax illustrated ma-nual of orthopedic medicine. Butterworth & Heine-mann, Oxford. 2nd edition, 2000.[5] MATSUMOTO M, OKADA E, ICHIHARA D et al. Age-related changes of thoracic and cervical inter-vertebral discs in asymptomatic subjects. Spine 2010; 35: 1359-64.[6] SCHELLHAS KP, POLLEI SR, DORwART RH. Thoracic discography. A safe and reliable technique. Spine 1994; 19: 2103-9.[7] wOOD KB, SCHELLHAS KP, GARVEy TA, AEP-PLI D. Thoracic discography in healthy individuals. A controlled prospective study of magnetic resonance imaging and discography in asymptomatic and symptomatic individuals. Spine 1999; 24: 1548-55.[8] BUENAVENTURA RM, SHAH RV, PATEL V et al. Systematic review of discography as a diagnostic test for spinal pain: an update. Pain Physician 2007; 10: 147-64.[9] MAIGNE R. La séméiologie clinique des dérange-ments intervertébraux mineurs. Annales de Médeci-ne Physique 1972; 15: 275-92.[10] DREyFUSS P, TIBILETTI C, DREyER SJ. Thora-cic zygapophyseal joint pain patterns. A study in normal volunteers. Spine 1994, 19: 807-11.

[11] FUKUI S, OHSETO K, SHIOTANI M. Patterns of pain induced by distending the thoracic zygapophy-seal joints. Reg Anesth 1997, 22: 332-6.[12] MAIGNE R. Les entorses costales. Rhumatolo-gie 1957; 1: 35-41.[13] BENHAMOU CL, ROUx C, TOURLIèRE D, GERVAIS T, VIALA JF, AMOR B. Pseudovisceral pain referred from costovertebral arthropathies. Twenty-eight cases. Spine 1993; 18: 790-5. [14] VIALA JF, DUMONT F. Imagerie des arthropa-thies costovertébrales. Revue de médecine manuel-le ostéopathie 2011 (sous presse).[15] TRAVELL JG, SIMONS DG. Myofascial pain and dysfunction. The trigger points manual. Baltimore, Wiulliam and Wilkins, 1983.[16] MAIGNE R. A propos du mécanisme de la dou-leur dans les dorsalgies. Le point inter-scapulo-ver-tébral. Rev Rhum Mal Osteoartic. 1967; 34: 636-41.[17] MAIGNE Jy, MAIGNE R. Muscle splenius du cou et dorsalgie commune. Etude anatomique et clinique. Rhumatologie 1990; 42: 301-5.[18] CLOwARD R. The clinical significance of the sinuvertebral nerve of the cervical spine in relation to the cervical disk syndrome. J Neurol Neurosurg Psy-chiat 1960; 23: 321-6.[19] DwyER A, APRILL C, BOGDUK N. Cervical zygapophyseal joint pain patterns. I: A study in nor-mal volunteers. Spine 1990; 15: 453-7.[20] MAIGNE Jy, CHANTELOT F, CHATELLIER G. Interexaminer agreement of clinical examination of the neck in manual medicine. Ann Phys Rehabil Med 2009; 52: 41-8.[21] HSUEH TC, yU S, KUAN TS, HONG Cz. Asso-ciation of active myofascial trigger points and cervi-cal disc lesions. J Formos Med Assoc. 1998; 97: 174-80.[22] MAIGNE Jy. Soulager le mal de dos. Masson ed, Paris, 2008.

Rachis thoracique.indb 16 16/12/11 18:05:25

Page 13: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

17

Introduction

Si certaines affections du rachis dorsal sont responsables de douleurs donnant le change avec une pathologie viscérale, comme une angine de poitrine ou une pleurésie [1], une dorsalgie, bien plus qu’à l’étage lombaire, peut être d’origine vis-cérale. Il faudra savoir évoquer une affec-tion cardio-vasculaire, pleuro-pulmonaire, digestive ou urologique selon le siège de

la douleur (fig. 1) d’après E. Klineberg [2], si la mobilisation du rachis ne l’exacerbe pas, en présence d’un signe fonctionnel inhabituel ou d’une donnée inattendue de l’examen physique (tableau 1), si les ra-diographies sont normales ou ne mon-trent que des altérations dégénératives banales ou quand elle résiste au traite-ment, pour ne pas laisser passer une pa-thologie plus urgente, grave, susceptible de mettre en jeu le pronostic vital.

Les dorsalgies d’origine viscérale

P. Khalifa

Fig. 1 : Localisation des dorsalgies de cause viscérale (d’après Klineberg E1)

Angor, infarctusPéricardite

Lithiase biliaire

PyélonéphriteLithiase rénaleCancer du reinHydronéphrose

Dissection aortiqueUlcère, cancer gastrique

Pancréatite, cancer du pancréas

Affection pleuraleLithiase biliaire

Colite, cancer colique

Dissection aortiqueAngor, infarctus

Œsophagite

Embolie pulmonairePneumothorax

PneumonieCancer broncho-pulmonaire

Rachis thoracique.indb 17 16/12/11 18:05:26

Page 14: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

18

Une fréquence mal connue

La fréquence des causes viscérales de douleurs thoraciques, souvent rappor-tée comme importante quand elle concerne les douleurs antérieures et les services d’urgence, est, de fait, peu étu-diée en ce qui concerne les douleurs postérieures et la médecine ambulatoire. Dans une étude prospective observa-tionnelle menée à Lausanne auprès de 59 médecins généralistes, portant sur 24.620 patients vus pendant une pério-de de 5 semaines, 672 (2.7 %), dont 52 % de femmes d’âge moyen 55 ans, ont consulté pour une douleur thoraci-que (…et non dorsale !) d’apparition ré-cente dans 1.8 % des cas et motif de consultation dans 1.4 % des cas ; 5 % des patients ont été hospitalisés et 17 % adressés à un spécialiste. Le diagnostic retenu (mais non validé) était une patho-logie musculo-squelettique dans 49 % des cas, psychogène chez 11 % des pa-

tients, cardiovasculaire, pleuro-pulmo-naire et digestive chez 16 % (dont 12 % de maladies coronariennes), 10 et 8 % des malades, respectivement. Les trois étiologies les plus graves (dissection aortique, insuffisance coronaire et em-bolie pulmonaire) représentaient moins de 2 % des cas mais sur les 25 décès enregistrés après un an de suivi, 12 étaient liés à la douleur thoracique (7 cancers et 5 causes cardiaques) [3].

Douleurs viscérales “vraies” et douleurs référées

Les messages douloureux d’origine vis-cérale partent de nocicepteurs et par-viennent au système nerveux central par l’intermédiaire de protoneurones spi-naux empruntant le sympathique (le nerf vague transmet les messages sensitifs inconscients ou non douloureux) puis de deutoneurones médullaires [4].

Signe clinique

Terrain

Facteurs de risque cardio-vasculaireAlitement, intervention chirurgicale ou grossesseTraumatisme (AVP, thoracotomie)Exposition professionnelle à l’amiante

HabitusIntoxication tabagique ou alcooliqueToxicomanie

Particularités de la douleur

Douleur diffuse, “coup de poignard” ou “point de côté”Douleur sévère, intolérable, angoissanteDouleur non déclenchée par la mobilisation du rachisDouleur augmentée par l’inspiration profonde, la toux, les changements de positionDouleur soulagée par la position penchée en avant

Signes fonctionnels

associés

Fièvre, AEGPalpitations, malaiseSignes pulmonaires : dyspnée, blockpnée, toux, hémoptysieSignes digestifs : nausée, vomissement, hoquet, dysphagie, rectorragie ou mélénaSignes urinaires : brûlures mictionnelles, hématurie

Signes physiques

Abolition d’un pouls, asymétrie de la pression artérielleSignes auscultatoires cardiaques ou pleuro-pulmonairesAnomalie palpatoire de l’abdomen et des fosses lombaires

Tableau 1 : Signes cliniques évocateurs d’une pathologie viscérale devant une douleur thoracique postérieure

Rachis thoracique.indb 18 16/12/11 18:05:26

Page 15: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Les dorsaLgies d’origine viscéraLe

19

Le muscle cardiaque est sensible à l’anoxie et à l’inflammation. La plèvre pariétale est sensible à une irritation, une inflammation ou une invasion tumorale, alors que la plèvre viscérale et les alvéo-les n’ont pas d’innervation sensitive [5-6]. Les viscères pleins (foie, pancréas, rate) sont peu sensibles à la douleur, en dehors de la distension de leur capsule par une tumeur ou d’une inflammation de leur parenchyme. Les viscères creux (tube digestif, voies biliaires et urinaires, tractus broncho-pulmonaire) sont dou-loureux en cas de distension, traction des mésos, contraction musculaire, is-chémie et/ou inflammation. Les récep-teurs à seuil bas, les plus nombreux (70 %), réagissent pour une distension quasi nulle, ceux à seuil de réponse éle-vé (les 30 % restants) codent les stimu-lations à partir d’un “seuil douloureux” [7]. Ils répondent aussi à des stimula-tions chimiques et/ou thermiques.

La douleur viscérale “vraie” n’est res-sentie qu’au cours du premier épisode douloureux et passe parfois inaperçue. Elle est sourde, le plus souvent ressen-tie au niveau de la ligne médiane, anté-rieure ou postérieure, car la plupart des organes internes ont une innervation sensitive bilatérale, localisée de façon imprécise, du fait de la densité limitée de l’innervation viscérale. Elle s’ac-compagne de manifestations neurové-gétatives bien plus intenses que lors des douleurs musculo-squelettiques (sueurs, nausées, vomissements, trou-bles du rythme ou de la fréquence car-diaque, miction, diarrhée) et d’une in-tense réaction psychique.

La douleur “référée” aux tissus cutanés succède à la douleur viscérale “vraie”.

Elle est ressentie dans les régions soma-tiques en rapport avec le viscère où se produit la stimulation nociceptive, ré-pondant au phénomène de “convergen-ce viscéro-somatique” qui fait converger sur le même neurone sensitif, afférences viscérales et cutanées. Elle s’accompa-gne moins souvent de réactions neuro-végétatives et de réactions émotives.

Une afférence sensitive viscérale don-née projette sur plusieurs segments mé-dullaires, ce qui explique la diffusion et la localisation imprécise des douleurs. Les afférences cardiaques sont principale-ment transmises par les fibres sympathi-ques qui pénètrent la corne dorsale de la moelle au niveau de C8-T9. Le péricar-de, peu innervé, l’aorte ascendante et la crosse aortique, les artères et veines pulmonaires projettent sur les myéloto-mes de T1 à T4. L’aorte descendante est innervée par des nerfs empruntant la chaîne sympathique entre T3 et T8. Les grosses bronches dépendent du sympa-thique entre T3 et T5. La plupart des douleurs d’origine péricardique ou pleuro-pulmonaire résultent d’une irrita-tion ou d’une inflammation de la plèvre pariétale car la plèvre viscérale est in-sensible. La partie inférieure de l’œso-phage dépend des nerfs sympathiques entre T4 et T8. Les viscères abdominaux de l’étage sus-mésocolique dépendent des nerfs splanchniques issus de T7 à T9 [8]. Ainsi, les neurones médullaires thoraciques reçoivent les stimuli cardia-ques, ceux issus de l’œsophage ou de la vésicule biliaire et les influx cutanéo-musculaires provenant de l’hémithorax et du bras, ce qui explique les douleurs dorsales postérieures de cause viscérale et les douleurs pseudo-angineuses d’origine rachidienne.

Rachis thoracique.indb 19 16/12/11 18:05:26

Page 16: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

20

Trois urgences “viscérales” à ne pas manquer

Les douleurs thoraciques postérieures peuvent révéler une pathologie poten-tiellement létale à court terme, dont le diagnostic, s’il est évoqué, est confirmé par l’auscultation cardio-pulmonaire (à condition d’avoir un stéthoscope !) et conduit à une hospitalisation immédiate.

La dissection aortique

La dissection aortique est certes une cause rare de dorsalgies : 5 à 30 cas pour un million de patients [9] et moins de 0.5 % des causes de douleurs thora-ciques en service d’urgence [10]. L’aorte proximale est la plus à risque de dissec-tion principalement due à la dégénéres-cence de la média liée à l’âge et à l’athé-rome. Elle peut aussi compliquer un anévrisme aortique, bien moins fréquent cependant au niveau dorsal qu’au ni-veau lombaire [11].

Une douleur dorsale aiguë médiane, in-terscapulaire ou thoraco-lombaire, est présente chez 74 à 90 % des patients hospitalisés pour une dissection aorti-que alors qu’elle n’est présente que dans 9 % des cas d’insuffisance coronarienne aiguë [12-13]. L’intensité de la douleur, souvent intolérable, oriente rapidement vers le service d’urgence de même qu’un déficit neurologique, une ischémie péri-phérique, un choc ou une hypertension majeure, chez un homme ayant des fac-teurs de risque vasculaire, une hyperten-sion artérielle mal contrôlée.

Le diagnostic est cependant méconnu à sa présentation dans 38 % des cas [14],

notamment chez la femme, car certains tableaux plus chroniques, à l’origine de douleurs dorsales sourdes, peuvent égarer [15]. Il faudra s’alerter de l’aboli-tion d’un pouls radial ou d’une différen-tielle de pression artérielle de plus de 20 mmHg entre les deux côtés, de l’élar-gissement du bouton aortique ou du médiastin si des radiographies ont été pratiquées pour des rachialgies trom-peuses car tout retard diagnostique a des conséquences catastrophiques, la mortalité augmentant de 1 % par heure pendant les 48 premières heures, pour atteindre 70 % à une semaine et 90 % à 3 mois en l’absence de traitement [16].

Le rhumatologue peut être directement concerné par une dissection aortique dans certaines pathologies, rares, qu’il est amené à suivre. La maladie de Hor-ton est la cause la plus fréquente d’aor-tite inflammatoire (72 % des cas) ; 3 à 18 % des patients ont une aortite, pré-dominant sur l’aorte ascendante, parfois révélée par des douleurs dorsales [17-18]. Une maladie de Takayasu peut aussi être en cause chez une femme plus jeu-ne [19-20]. Une aortite et une périaortite sont des complications rares, mais po-tentiellement mortelles, de la spondy-larthrite ankylosante, souvent asympto-matiques, mais à évoquer, après plusieurs années d’évolution, devant des signes d’insuffisance aortique [21]. Chez un sujet plus jeune, une maladie du col-lagène (syndrome de Marfan ou d’Ehler-Danlos), un syndrome de Turner, une toxicomanie à la cocaïne, peuvent être responsables d’une dissection à bas bruit. Des dorsalgies survenues au dé-cours d’un accident de voiture avec dé-célération importante, d’un traumatisme thoracique ou d’une coronarographie doivent aussi y faire penser.

Rachis thoracique.indb 20 16/12/11 18:05:26

Page 17: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Les dorsaLgies d’origine viscéraLe

21

L’insuffisance coronaire aiguë, l’infarctus du myocarde

L’insuffisance coronaire aiguë est la pre-mière cause de mortalité aiguë chez l’homme et chez la femme, en l’absence d’hospitalisation rapide (25 % des cas). Une ischémie myocardique est vite évo-quée chez un homme affecté de facteurs de risque d’athérome devant des dou-leurs thoraciques antérieures aiguës à l’effort, intenses, constrictives, aux irra-diations larges, à la mâchoire, aux épau-les et aux bras, parfois au dos, associées à des nausées, des vomissements, un malaise ou des palpitations. Elle se ré-vèle, dix fois moins souvent, par des douleurs atypiques de siège postérieur, susceptibles d’égarer chez le rhumato-logue quand elles inaugurent la maladie coronarienne et surviennent au repos [22]. Ces douleurs dorsales, souvent as-sociées à un infarctus latéral [23], se-raient plus fréquentes chez la femme, sources de retard diagnostique et de ris-que évolutif vers un infarctus [24-26].

Fait intéressant pour le rhumatologue, de plus en plus concerné par le risque cardio-vasculaire des maladies qu’il suit et de leurs traitements, quelques publi-cations suggèrent un lien entre maladie coronarienne et mal de dos. Certains facteurs de risque d’athérome seraient des facteurs de risque indépendants de mal de dos [27]. Un mal de dos fréquent serait associé à un risque accru de ma-ladie coronaire après ajustement pour les facteurs de risque cardio-vasculaires et l’exercice physique [28].

L’embolie pulmonaire

Au même titre que l’infarctus du myo-carde et la dissection aortique, l’embolie pulmonaire est un diagnostic à ne pas manquer, avec une mortalité précoce, en l’absence de traitement, estimée entre 5 et 20 %. Une douleur basithoracique ou latérale, d’apparition brutale, associée à une dyspnée, des palpitations, une hé-moptysie, une angoisse surtout, est évo-catrice dans un contexte de phlébite, de thrombophilie ou d’antécédents throm-bo-emboliques, de voyage en avion, d’alitement, d’intervention ou d’accou-chement [29-30]. Quand la douleur est modeste et trompeuse, la dyspnée an-cienne ou absente, notamment chez le sujet âgé, les signes cliniques sont insuf-fisants pour orienter et un angioscanner pulmonaire doit être demandé au moin-dre doute [31-33].

Le rhumatologue devra toujours y pen-ser devant des douleurs thoraciques postérieures apparues après un alite-ment prolongé motivé par une poussée d’arthrose ou un rhumatisme inflamma-toire invalidant, dans le suivi d’un cancer sans s’arrêter au diagnostic de métas-tase osseuse, chez une patiente lupique affectée d’un syndrome des antiphos-pholipides, en cas d’ostéoporose, sans s’arrêter au diagnostic de fracture, chez un patient traité par le ranélate de stron-tium ou le raloxifène, après une verté-broplastie percutanée [34-36]. Dans une étude prospective de cohorte, une dou-leur basithoracique était en rapport avec une embolie pulmonaire dans 5.4 % des cas [37], en faisant un des principaux diagnostics différentiels des douleurs musculo-squelettiques [38].

Rachis thoracique.indb 21 16/12/11 18:05:27

Page 18: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

22

D’autres causes viscérales de douleurs postérieures aiguës sont à évoquer

En dehors des trois urgences suscitées, d’autres pathologies viscérales, péricar-diques, pleuro-pulmonaires, digestives ou urinaires peuvent être en cause, dont le diagnostic sera orienté par la localisa-tion des douleurs.

Les dorsalgies aiguës latéro-thoraciques, non rares, de cause pleuro-pulmonaire

Le pneumothorax se présente dans 90 % des cas par une douleur brutale, en coup de poignard, augmentée par l’inspiration profonde et la toux, asso-ciée à une dyspnée aiguë. Le diagnostic, rapidement évoqué chez un homme jeu-ne, tabagique, est confirmé par le silence auscultatoire et la radiographie pulmo-naire demandée en urgence [39]. Le dia-gnostic de pneumothorax est parfois plus difficile pour le rhumatologue quand la douleur est sourde, et qu’elle compli-que une séance d’acupuncture motivée par une douleur rachidienne [40].

Une pleurésie aiguë se révèle fréquem-ment par une douleur augmentée par la toux, l’inspiration profonde et les chan-gements de position, associée à une toux sèche et à une dyspnée, quand l’épanchement est abondant. Le rhuma-tologue doit y penser en cas de connec-tivite, de lupus notamment, et vite confir-mer le diagnostic par une radiographie pulmonaire en cas de matité et de silen-ce auscultatoire à la base du poumon.

La pneumopathie infectieuse est rare-ment douloureuse mais une douleur en point de côté, d’intensité modérée, est possible qui, associée à de la fièvre, une toux grasse et une expectoration sou-vent purulente, un foyer de crépitants à l’auscultation, appelle à la confirmation radiographique du diagnostic.

Les douleurs scapulo-thoraciques d’une péricardite aiguë

Le péricarde étant peu innervé, son in-flammation ne se traduit par des dou-leurs que lorsque la plèvre pariétale ad-jacente est irritée, en pratique surtout dans les péricardites infectieuses, dans un contexte de fièvre, de syndrome grip-pal, ou d’infection ORL. Les douleurs antérieures, précordiales, augmentent à l’inspiration profonde et en position al-longée, irradient largement aux épaules et au dos, où elles ne sont qu’exception-nellement isolées.

Le rhumatologue devra toutefois y pen-ser devant des dorsalgies inexpliquées, soulagées par la position assise, pen-chée en avant, chez une femme affectée d’une connectivite (lupus, sclérodermie) ou d’une polyarthrite rhumatoïde.

Les dorsalgies aiguës médianes basses de cause digestive sont souvent trompeuses

L’ulcère gastro-duodénal peut se révé-ler par des douleurs dorsales basses iso-lées. Il est fréquemment associé, chez le rhumatologue, à la prise itérative d’un anti-inflammatoire non stéroïdien admi-

Rachis thoracique.indb 22 16/12/11 18:05:27

Page 19: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Les dorsaLgies d’origine viscéraLe

23

nistré pour une arthrose rachidienne ou un rhumatisme inflammatoire axial, éton-namment rebelle au traitement proposé [41]. Le retard à la réalisation d’une en-doscopie, la poursuite du traitement ou la mise en route d’une corticothérapie, augmente le risque d’hémorragie ou de perforation, elle-même à l’origine de dou-leurs dorsales basses dans le classique mais rare ulcère perforé bouché [42].

Une œsophagite par reflux gastro-œso-phagien est généralement responsable de brûlures rétrosternales associées à des régurgitations acides et un pyrosis. Des douleurs dorsales médianes sont plus rarement révélatrices. Le rhumato-logue ne doit pas ignorer le risque d’œsophagite iatrogène sous bisphos-phonate oral prescrit pour une fracture vertébrale dorsale ostéoporotique et doit demander, au moindre doute, une en-doscopie [43].

La pancréatite aiguë se manifeste par des douleurs épigastriques transfixian-tes, intenses, soulagées par la position penchée en avant. Le diagnostic, difficile quand le tableau se résume à l’irradia-tion postérieure, doit être évoqué en cas de lithiase biliaire connue ou d’intoxica-tion alcoolique, et conduire rapidement au dosage de la lipase. De rares cas de pancréatite aiguë sont rapportés au cours du rhumatisme psoriasique [44] et du lupus [45].

Les douleurs de la lithiase biliaire siè-gent à l’hypochondre droit ou à l’épigas-tre, augmentant à l’inspiration. Si elles peuvent irradier vers l’omoplate et l’épaule droite, elles sont exceptionnel-lement trompeuses. L’association à des nausées ou des vomissements, une dys-

pepsie, doivent attirer l’attention chez une femme âgée, en surpoids.

Les dorsalgies aiguës de cause urinaire sont très rares

La pyélonéphrite aiguë peut se révéler par des douleurs thoraciques basses, au niveau de l’angle costo-vertébral. Une fièvre, des brûlures mictionnelles condui-sent rapidement à la demande d’un ECBU voire à un uroscanner, nécessaire en cas d’abcès périnéphrétique.

En cas de lithiase urinaire, l’irradiation suivant le trajet de l’uretère oriente rapi-dement.

Devant des douleurs postérieu-res chroniques, certaines causes viscérales égarent

Les dorsalgies latérales de cause pleuro-pulmonaire

Les pleurésies malignes, primitives ou métastatiques, se révèlent fréquemment par des douleurs postérieures latéro-thoraciques. Une dyspnée, une toux sè-che, favorisée par les changements de position, orientent vers une pathologie pleurale [46]. Une douleur dorsale peut être la seule manifestation d’une asbes-tose pleurale bénigne [47]. L’intensité de la douleur est un facteur pronostique in-dépendant dans le mésothéliome [48].

Une douleur thoracique postérieure peut conduire un patient affecté d’un cancer broncho-pulmonaire chez le rhumato-logue. Une toux rebelle, une altération

Rachis thoracique.indb 23 16/12/11 18:05:27

Page 20: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

24

de l’état général, une hémoptysie conduisent à la prescription d’une radio-graphie pulmonaire chez un homme (75 % des cas), tabagique (90 % des cas). Il n’est pas rare qu’un hippocratis-me digital, une ostéoarthropathie de Pierre Marie amènent à poser le dia-gnostic avant la radiographie [49].

Une fibrose médiastinale idiopathique peut se révéler par des douleurs dorsa-les comme la fibrose rétro-péritonéale peut se révéler par des douleurs lombai-res [50].

Les dorsalgies chroniques médianes ou latérales de cause digestive

Des douleurs dorsales basses peuvent révéler une pathologie pancréatique. El-les seraient plus fréquentes en cas de pancréatite chronique d’origine alcoo-lique que non alcoolique, notamment biliaire, secondaire à une hyperparathy-roïdie primitive ou idiopathique [51]. El-les doivent faire évoquer un cancer du pancréas, parfois retrouvées 6 mois avant que le diagnostic ne soit posé de-vant une altération de l’état général, une anorexie majeure avec perte de poids, un ictère ou l’apparition d’un dia-bète [52].

Il n’est pas rare qu’une colopathie fonc-tionnelle amène à consulter en rhuma-tologie pour des douleurs basithoraci-ques bilatérales ou alternantes, après épuisement des gastro-entérologues. Les troubles fonctionnels digestifs avec alternance de diarrhée et de constipa-tion, les flatulences et le ballonnement abdominal ne trompent pas. Il faut sur-

tout se méfier d’un cancer de l’angle colique, droit ou gauche, dont les dou-leurs, haut placées et très latérales, peu-vent être trompeuses, en cas d’altération de l’état général, de troubles du transit, de rectorragies, a fortiori, qui doivent conduire à une coloscopie.

Les dorsalgies chroniques de cause urinaire sont rares mais trompeuses

En l’absence d’hématurie, le cancer du rein peut conduire chez le rhumatologue devant des douleurs latéro-thoraciques longtemps isolées. Une hydronéphrose peut être méconnue si une douleur chro-nique et rebelle, ne conduit pas à la pra-tique d’une imagerie rénale.

Conclusion

Le diagnostic d’une douleur thoracique postérieure repose sur le recueil détaillé de l’anamnèse, l’analyse de la douleur et un examen clinique complet. Les progrès de l’imagerie médicale ont mal-heureusement conduit à reléguer l’exa-men clinique au second plan, alors qu’une analyse séméiologique de la douleur permettrait, dans certains cas, de mieux cibler les examens complé-mentaires, voire de s’en passer. En pré-sence d’une douleur thoracique posté-rieure aiguë, il faut éliminer trois urgences qui mettent en jeu le pronos-tic vital : une dissection aortique, non rare dans certaines affections rhumatis-males, et une insuffisance coronarien-ne, notamment chez la femme, devant des douleurs médianes ; une embolie pulmonaire, dont le diagnostic reste

Rachis thoracique.indb 24 16/12/11 18:05:27

Page 21: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

116

Bibliographie[1] ExPERTISE COLLECTIVE. Lombalgies en milieu professionnel. Quels facteurs de prévention. Paris, Les éditions INSERM, 2000, 151 p.[2] BRIGGS AM, BRAGGE P, SMITH AJ, GOVIL D, STRAKER LM. Prevalence and associated factors for thoracc spine pain in the adult working popula-tion: a litterature review. J Occup Health 2009a; 51: 177-192.[3] BRIGGS AM, SMITH AJ, STRAKER LM, BRAGGE P. Thoracic spine pain in the general population: pre-valence, incidence and associated factors in chil-dren, adolescents and adults. A systematic review. BMC musculoskeletal disorders 2009b;10:77.[4] HA C, ROQUELAURE y, LECLERC A, TOURAN-CHET A, GOLDBERG M, IMBERNON E. Troubles musculo-squelettiques d’origine professionnelle en France. Où en est-on aujourd’hui ? Bull Epidémiol Hebd. 2010 ;5-6: 35-56.[5] HAGBERG M, SILVERSTEIN B, wELLS R, SMITH MJ, HENDRICK Hw, CARAyON P, et al. work related musculoskeletal disorders (wMSDs): a reference book for prevention. London: Taylor & Francis, 1995.[6] HA C, ROQUELAURE y. Réseau expérimental de surveillance épidémiologique des troubles muscu-lo-squelettiques dans les Pays de la Loire - Proto-cole de la surveillance dans les entreprises (2002-2004). Saint-Maurice : Institut de veille sanitaire : 2007 ; 84p.[7] BURDORF A, SOROCK G. Positive and negative evidence of risk factors for back disorders. Scand J Work Environ Health. 1997; 23(4): 243-56.[8] BERNARD BP (eds). Musculoskeletal disorders and workplace factors. A critical review of epidemio-logic evidence for work-related musculoskeletal di-sorders of the neck, upper-extremity, and low back. NIOSH, Cincinnati, 1997, DHHS (NIOSH) publica-tion, pp 97-141.[9] OzGULER A, LECLERC A, LANDRE MF, NIED-HAMMER I. Individual and occupational determinant of low back pain according to various definitions of low back pain. J Epidemiol Community Health 2000;54 :215-220.[10] KUMAR, editor. Biomechanics in ergonomics. London: Taylor & Francis; 2008.[11] MARRAS wS. Occupational low back pain di-sorder causation and control. Ergonomics 2000; 43: 880-902.[12] NIEDHAMMER I, CHASTANG JF, GENDREy L, DAVID S, DEGIONANNI S. Propriétés psychométri-ques de la version française des échelles de la de-mande psychologique, de la latitude décisionnelle et du soutien social du “Job Content Questionnaire” de Karasek: résultats de l’enquête nationale SU-MER. Santé Publ 2006; 18 :113-427.[13] MESSING K, STOCK SR, TISSOT F. Should stu-dies of risk factors for musculoskeletal disorders be

stratified by gender? Lessons from the 1998 Que-bec Health and Social Survey. Scand J Work Environ Health. 2009; 35(2): 96-112.[14] ROQUELAURE y, HA C, LECLERC A, TOURAN-CHET A, SAUTERON M, MELCHIOR M et al. Epide-miological Surveillance of Upper Extremity Muscu-loskeletal Disorders in the working Population: the French Pays de la Loire Study. Arthritis Rheum 2006; 55: 765-78.[15] GOLDBERG M, LUCE D. Les effets de sélection dans les cohortes épidémiologiques Nature, causes et conséquences. Rev Epidemiol Sante Publique. 2001; 49(5): 477-92.[16] EKMAN M, JONHAGEN S, HUNSCHE E, JONS-SON L. Burden of illness of chronic low back pain in Sweden: a cross-sectional, retrospective study in primary care setting. Spine. 2005; 30(15): 1777-85.[17] PLOUVIER S, LECLERC A, CHASTANG JF, BO-NENFANT S, GOLDBERG M. Socioeconomic posi-tion and low-back pain--the role of biomechanical strains and psychosocial work factors in the GAzEL cohort. Scand J Work Environ Health. 2009; 35(6): 429-36.[18] DIONNE CE, DUNN KM, CROFT PR, NACHEM-SON AL, BUCHBINDER R, wALKER BF et al. A consensus approach toward the standardization of back pain definitions for use in prevalence studies. Spine. 2008; 33(1): 95-103.[19] MIRANDA H, GOLD JE, GORE R, PUNNETT L. Recall of prior musculoskeletal pain. Scand J Work Environ Health. 2006; 32(4): 294-9.[20] HOOGENDOORN wE, BONGERS PM, DE VET HC, HOUTMAN IL, ARIENS GA, VAN MECHELEN w, et al. Psychosocial work characteristics and psy-chological strain in relation to low-back pain. Scand J Work Environ Health. 2001; 27(4): 258-67.[21] STOCK SR, FERNANDES R, DELISLE A, VEzI-NA N. Reproducibility and validity of workers’ self-reports of physical work demands. Scand J Work Environ Health. 2005; 31(6): 409-37.[22] CASSOU B, DERRIENNIC F, MONFORT C, NORTON J, TOURANCHET A. Chronic neck and shoulder pain, age, and working conditions: longitu-dinal results from a large random sample in France. Occup Environ Med. 2002; 59(8): 537-44.[23] KRAUSE N, RAGLAND N, GREINER BA, FISHER JM, HOLMAN BL, SELVIN S. Physical workload and ergonomic factors associated with prevalence of back and neck pain in urban transit operators. Spine 1997; 22(18): 2117-26.[24] BONGERS PM, IJMKER S, VAN DEN HEUVEL S, BLATTER BM. Epidemiology of work related neck and upper limb problems: psychosocial and perso-nal risk factors (part I) and effective interventions from a bio behavioural perspective (part II). J Occup Rehabil. 2006; 16(3): 279-302.

Rachis thoracique.indb 116 16/12/11 18:06:04

Page 22: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

117

Introduction

La rééducation constitue une technique de choix dans l’arsenal thérapeutique de la dorsalgie ou dans la prise en charge d’une simple exagération de la courbure dorsale. Elle peut se suffire à elle-même ou constituer un complément indispen-sable à une correction orthopédique par corset ou chirurgicale. Que l’hypercy-phose dorsale soit idiopathique ou qu’el-le s’inscrive dans un contexte pathologi-que particulier (maladie de Scheuermann, spondylarthrite ankylosante…), la réédu-cation permettra d’améliorer la statique et la mobilité rachidienne notamment à l’aide de manœuvres d’étirement et par une éducation et un renforcement de la musculature paravertébrale.

Bilan

Préalablement à la rééducation, le kiné-sithérapeute réalisera un bilan fonction-nel afin d’apprécier, d’une part, la stati-que rachidienne du patient et, d’autre part, ses éventuels déséquilibres mus-culaires. Ce bilan permettra de person-

naliser la prise en charge rééducative et de juger de son efficacité.

Bilan morphostatique

Cette évaluation du maintien concerne non seulement la quantification des cour-bures vertébrales mais également l’éva-luation de la bascule et de la translation du bassin et de l’obliquité du tronc. Une somme des flèches cervicale et lombaire supérieure à 10 cm, confirmera l’hyper-cyphose dorsale observée sur le vivant et vraisemblablement quantifiée radiolo-giquement. Le kinésithérapeute évaluera le caractère réductible ou irréductible de l’hypercyphose dorsale de même que la localisation et l’importance d’une éven-tuelle composante douloureuse.

Dans les formes réductibles, l’observa-tion minutieuse et complète du patient en position debout, permettra de distin-guer les hypercyphoses asthéniques (avec hyperlaxité et hypotonie générale, hyperlordose lombaire, épaules enrou-lées, tête antéprojetée et affaissement thoracique) des hypercyphoses atypi-ques pour lesquelles la tonicité muscu-

Rééducation de la dorsalgie et de l’hypercyphose dorsale

M. VanDerthoMMen, r. bastin, C. DeMoulin

Rachis thoracique.indb 117 16/12/11 18:06:04

Page 23: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

118

laire est souvent non déficitaire. L’obser-vation du patient dans le plan frontal permettra d’objectiver la présence d’une éventuelle scoliose.

Bilan dynamique

Le rééducateur appréciera la mobilité ra-chidienne, notamment en flexion anté-rieure (distance doigts-sol), en extension, en inclinaison latérale et en rotation.

Bilan musculaire

Cette analyse débutera par la palpation des masses musculaires paravertébrales afin de débusquer la présence de contractures musculaires. Elle se pour-suivra par une exploration de la tonicité musculaire avec une attention particuliè-re pour les muscles paravertébraux dor-saux, interscapulaires et abdominaux. Le kinésithérapeute appréciera également la souplesse des grands pectoraux (dont la raideur contribue à l’enroulement des épaules et à l’attitude cyphotique) et des pelvi-fémoraux (psoas-iliaque, droit antérieur du quadriceps, ischio-jambiers) qui influen-cent l’équilibre du bassin dans le plan sagittal et donc la sta-tique lombaire et dorsale.

Rééducation

La prise en charge rééducative comprend généralement 4 par-ties (des étirements, des mobi-lisations actives, un renforce-ment musculaire et un travail de la fonction respiratoire) dont l’importance respective dépen-

dra du bilan initial et évoluera avec le sta-tut algique et fonctionnel du patient.

Etirements

Etirements de la colonne dorsale en extension

La réduction ou la stabilisation de la courbure dorsale implique la réalisation d’étirements de la colonne dorsale en extension qui respectent un certain nombre de principes :- La participation systématique de l’arti-

culation scapulo-humérale : l’étirement du grand pectoral en antéflexion d’épaule contribue en effet au redres-sement vertébral et à la lutte contre l’enroulement des épaules.

- La correction des éléments sus et sous-jacents : le rééducateur portera une at-tention particulière au positionnement adéquat des colonnes cervicale et lom-baire en évitant à leur niveau une ac-centuation de la lordose.

Exemple 1 : position à genoux (fig. 1)

Fig. 1 : Mains aux espaliers, genoux avancés afin de contrôler la lordose lombaire : le kinésithérapeute réalise des poussées verticales du haut vers le bas sur le sommet de la courbure en accentuant la manœuvre sur la phase expiratoire du patient.

Rachis thoracique.indb 118 16/12/11 18:06:05

Page 24: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

rééducation de La dorsaLgie et de L’hypercyphose dorsaLe

119

Exemple 2 : position assise au sol (fig. 2)

Etirements des muscles pelvi-fémoraux

Dans l’hypothèse d’une hypercyphose dorsale avec hyperlordose lombaire compensatrice, il est vraisemblable que le rééducateur sera amené à étirer les muscles psoas iliaque et droit antérieur du quadriceps. Pour un patient présen-tant une cyphose dorso-lombaire avec bassin en rétroversion, une attention particulière sera accordée à l’étirement de la chaîne musculaire postérieure et des ischio-jambiers en particulier.

Mobilisations actives

Alors que les étirements impliquent une action de la part du kinésithérapeute sur un patient généralement confiné dans une attitude passive, les mobilisations actives permettront également d’étirer la colonne dorsale en extension notam-ment en combinant cette extension ra-chidienne avec des mouvements rotatoi-res ou de latéroflexion. La composante active de ces mobilisations contribuera ainsi à la tonification musculaire.

Exemple 1 : position quadru-pédique (fig. 3)

Fig. 2 : Membres inférieurs écartés et bras levés : le kinésithérapeute après avoir placé ses mains sur les omoplates du patient réalise une triple action : 1) poussées manuelles vers l’avant (exten-sion de la colonne dorsale) ; 2) écarte-ment des coudes vers l’arrière (étire-ment des grands pectoraux) et 3) traction axiale vers le haut à l’aide des membres supérieurs et inférieurs.

Fig. 3 : Rotation du tronc avec élévation du membre supérieur homolatéral (la position quadrupédique favorise l’ac-tion décyphosante de la pesanteur et le contrôle de la lordose lombaire).

Rachis thoracique.indb 119 16/12/11 18:06:05

Page 25: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

120

Exemple 2 : position à genoux (fig. 4)

Renforcement musculaire

La tonification musculaire constitue de toute évidence l’élément principal de la rééducation de l’hypercyphose dorsale et se focalisera sur les paravertébraux dorsaux. Ce renforcement se réalisera de manière analytique, à l’aide d’auto-agrandissements ou d’exercices glo-baux sur ballon de rééducation. Quelle que soit la technique utilisée, la correc-tion posturale optimale sera toujours re-cherchée.

Exercices analytiques

Les principes de ce travail musculaire sont les suivants :- Impliquer les muscles fixateurs de

l’omoplate de manière à favoriser le re-dressement vertébral et le positionne-ment adéquat des épaules.

- Verrouiller la colonne lombaire dans une position de lordose physiologique (à ce titre un positionnement avec flexion de hanche permet de protéger le patient d’une potentielle hyperlordo-se lombaire).

- Le travail musculaire sera intensifié lors d’une flexion antérieure du tronc et lors d’une élévation des membres supé-rieurs.

Exemple : debout, tronc fléchi en avant (lordose lombaire physiologique), mains aux épaules : extensions lentes et contrôlées des membres supérieurs

Auto-agrandissements

Ce type d’exercice vise la décyphose dorsale par un travail minutieux d’allon-gement axial et de correction posturale réalisés en position assise ou debout. La présence d’une charge additionnelle sur la tête favorise la correction postu-rale et intensifie la tonification muscu-laire dorsale.

Exercices globaux

De manière additionnelle au travail ana-lytique, il conviendra de réaliser une to-nification plus globale en veillant néan-moins au maintien de la correction posturale. L’utilisation d’un ballon de rééducation permet une grande variété

Fig. 4 : 2 mains à l’espalier, s’asseoir latéralement. L’in-flexion latérale favorise l’ouverture du grill costal (varian-te : surélever la main homolatérale pour intensifier l’étire-ment du grand pectoral).

Rachis thoracique.indb 120 16/12/11 18:06:05

Page 26: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

rééducation de La dorsaLgie et de L’hypercyphose dorsaLe

121

d’exercices à visée trophique mais éga-lement proprioceptive réalisables en chute faciale ou dorsale. L’ajustement de la position du ballon autorise une gra-dation minutieuse de l’intensité des exercices.

Exemple : chute faciale, ballon au niveau du bassin (fig. 5)

A ce stade, le kinésithérapeute pourra également intégrer des exercices inspi-rés de la rééducation selon Klapp : pos-tures et déplacements en position qua-drupédique corrigée avec mouvements associés des membres supérieurs et/ou inférieurs.

Fonction respiratoire

Cet aspect de la rééducation concerne principalement la prise en charge de pa-tients présentant une déformation cy-photique majeure ou en stade avancé d’une maladie de Scheuermann ou d’une spondylarthrite ankylosante avec affais-

sement thoracique et altération de la fonction respiratoire. L’objectif sera de réaliser une expansion thoracique et une ouverture de l’angle de Charpy.

Exemple 1 : décubitus dorsal, kinésithé-rapeute à la tête du patient (fig. 6)

Fig. 5 : Le patient élève les membres supérieurs, ses pieds étant mainte-nus par le kinésithérapeute.

Fig. 6 : A l’expiration : poussée bi-manuelle au niveau thoracique supérieur ; à l’inspiration freinage de la montée.

Rachis thoracique.indb 121 16/12/11 18:06:06

Page 27: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

122

Exemple 2 : décubitus la-téral, kinésithérapeute à la tête du patient (fig. 7).

Fig. 7 : Prise en clé de bras du mem-bre supérieur, contre-appui au ni-veau costal ; à l’inspiration : trac-tion sur le membre supérieur ; à l’expiration : maintien du gain (cet-te manœuvre permet de combiner l’expansion thoracique et l’étire-ment du grand pectoral).

Bibliographie[1] CHARRIèRE L, ROy J. Kinésithérapie des dévia-tions antéro-postérieures du rachis et de l’épiphysite vertébrale. Paris : Masson, 1975.

[2] SIRES A, SIRES M. Rééducation des cyphoses dorsales de l’enfant et de l’adolescent. Chap. 5 : Rééducation. In : Dimeglio A, Hérisson C, Simon L, eds. Paris : Masson, 1995. 117-122.

La règle d’or de la rééducation sera l’in-dolence. Lors des exercices actifs, le ki-nésithérapeute veillera à introduire des périodes de récupération adaptées à la fatigabilité du patient. Les séances se

dérouleront au cabinet du kinésithéra-peute à raison d’une ou deux séances par semaine en invitant le patient à réali-ser des postures et une gymnastique à domicile de manière quasi quotidienne.

Rachis thoracique.indb 122 16/12/11 18:06:06

Page 28: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

123

Nous avons exclu de ce chapitre les lé-sions épidurales évolutives tumorales ou infectieuses, les hernies discales, les frac-tures récentes et cals vicieux, ainsi que les tumeurs osseuses.

Généralités

Les compressions médullaires sympto-matiques liées à une sténose du canal ra-chidien siégeant au niveau du rachis dor-sal sont rares, comme en témoigne une littérature surtout composée de courtes séries ou de cas cliniques. Leurs étiologies sont souvent mal connues et leur diagnos-tic tardif.

Leur présentation clinique est variable en fonction du siège de la sténose et de la section médullaire intéressée.

Neurologiquement, les atteintes motri-ces sont plus fréquentes que les déficits sensitifs, et sont volontiers asymétriques [1-3]. Une irritation pyramidale des deux membres inférieurs est décelable dans la plupart des cas. Les troubles génito-sphinctériens sont rares dans les formes

d’installation lentement progressive [1, 4-6], et comparativement moins fré-quents dans les formes aiguës par rap-port aux compressions médullaires par hernie discale [6, 7].

Le tableau peut être celui d’une claudica-tion neurogène (fatigabilité à la marche, douleurs des deux membres inférieurs, troubles de l’équilibre, paresthésies) dont le caractère médullaire devra être affirmé. La flexion antérieure du tronc soulagerait les facteurs surajoutés d’engorgement veineux [1, 4, 8].

Un syndrome lésionnel peut être présent, sous la forme de radiculalgies en hémi-ceinture.

On peut décrire plusieurs formes cliniques selon l’évolution : - installation aiguë de troubles neurologi-

ques centraux [9] : décompensation de sténose constitutionnelle, traumatisme de faible cinétique ;

- aggravation rapidement évolutive : ap-parition des premiers symptômes depuis 6 mois ou moins ;

- myélopathie lentement progressive.

Souffrance médullaire dorsale par rétrécissement canalaire : étiologies et traitement

h. PasCal-MoussellarD, r. bonaCCorsi

Rachis thoracique.indb 123 16/12/11 18:06:06

Page 29: Le rachis thoracique : ce méconnu · Pour cette Journée de l’année 2012, plusieurs nouveautés sont à souligner : la réu- ... bre pelvien-rachidien et les techniques d’imagerie

Le rachis thoracique : ce méconnu !

124

Le délai entre l’installation des troubles et la prise en charge est d’un an en moyen-ne, avec des durées allant de quelques jours (facteur de décompensation sura-jouté) à plus de deux ans [6].

Etiologies

Sténoses primitives

Elles sont liées à une anomalie de dimen-sions anatomiques du canal rachidien. El-les peuvent être congénitales (achondro-plasie) ou constitutionnelle (“developmental sténosis” des Anglo-Saxons) apparaissant au cours de la croissance.

Sténoses constitutionnelles [1-7, 10-14]

Le seuil du diamètre antéro-postérieur du canal pour définir un rétrécissement canalaire est fixé à 10 mm. A l’étroitesse constitutionnelle (pédicules courts, la-mes épaisses), s’ajoutent des phénomè-nes dégénératifs [14, 15] nécessaire à l’apparition de la symptomatologie, ve-nant “décompenser” la sténose consti-tutionnelle : arthrose facettaire, épaissis-sement des lames, ossifications du ligament jaune, ossifications du ligament longitudinal postérieur, kystes articulai-res, ostéophytes.

Ces rétrécissements constitutionnels du canal rachidien thoracique sont plus souvent associés à des sténoses lom-baires que cervicales.

Il existe une prédominance des atteintes dans le secteur thoracique inférieur [1, 4-6, 14, 16] expliqués par le comporte-ment “lombaire” des vertèbres D10 à D12 (tandis que le mode dégénératif du sec-

teur thoracique crânial est relativement similaire à celui du rachis cervical) [17].

A la charnière thoraco-lombaire, l’orien-tation frontale des articulaires favorise-rait les contraintes en rotation [2, 11], lit de phénomènes dégénératifs accélérés.En dehors des zones charnières, l’attein-te médullaire dans le secteur thoracique moyen (D3 à D9) est secondaire non seulement à une disproportion conte-nant-contenu, mais aussi à une suscep-tibilité à l’hypoperfusion du fait de la ra-reté des suppléances vasculaires [17].

La mobilité du secteur thoracique en flexion/extension étant faible, les dis-ques sont relativement peu sollicités [3, 5, 7].

Sur le plan physiopathologique, la pré-dominance des atteintes motrices s’ex-plique par la précarité de la vascularisa-tion de la substance grise par rapport aux cordons postérieurs [3, 6].

Achondroplasies [34]

L’achondroplasie, forme la plus fréquente de nanisme, a une incidence d’environ 1/25000.

Pour le cas particulier des sténoses thora-ciques, les symptômes surviennent dans la 3e ou 4e décade, et sont d’installation progressive ; 15 % des patients ont des signes de souffrance médullaire. Des fac-teurs mécaniques dégénératifs sont asso-ciés à la dysplasie [35] (protrusions disca-les, ossifications du ligament jaune [36]), et majorés par les déformations en cypho-se thoracolombaire fréquente. Clinique-ment, douleurs et faiblesse motrice des membres inférieurs (parfois claudicante

Rachis thoracique.indb 124 16/12/11 18:06:07