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35 Institut National de la Recherche Agronomique d’Algérie LE POIS CHICHE EN ALGÉRIE : SITUATION, POTENTIALITÉS ET PERSPECTIVES Zine-Zikara F., Bouzid L. et Yekkour A. INRAA, Laboratoire des ressources phytogénétques, CRP Mehdi Boualem, Baraki, Alger. RÉSUMÉ D’après les études archéobotaniques, Cicer arietinum L. communément appelé « Pois chi- che » est l’une des premières légumineuses alimentaires à avoir été domestiquée par l’hom- me à travers les civilisations. Cette culture a réussi à conquérir plusieurs régions du monde dont la partie septentrionale de l’Afrique. Ainsi l’Afrique du nord constitue un centre de diversité important pour cette espèce. En Algérie, le pois chiche est un ingrédient quasi incontournable de la gastronomie locale. Durant la période coloniale, plusieurs travaux d’in- ventaire et de caractérisation ont été entrepris sur les cultivars locaux et introduits. Actuellement, aucune collection n’a pu être préservée et les cultivars, populations ou varié- tés de pois chiche ne sont, malheureusement, plus connus. Parallèlement, les diverses pres- sions anthropiques et environnementales enregistrées dans notre pays, ces dernières années, diminuent chaque jour la diversité génétique de cette espèce ; dont les intérêts nutritionnels liés à sa richesse protéique ne sont plus à démontrer. Ainsi, afin d'essayer de rassembler les collections ‘’perdues’’, qui sont à la base de toutes recherches agronomiques, l’Institut National de la Recherche Agronomique a entrepris, en 1998, des prospections et collectes de semence de cette espèce à travers tout le territoire Algérien. Le matériel collecté a fait l’objet de caractérisation et d’évaluation. Mots Clés : Pois chiche, légumineuses alimentaires, diversité génétique, Algérie. SUMMARY According to several archaeobotanic investigations, chickpea (Cicer arietinum L.) is one of the first pulses domesticated across civilizations and conquer several regions of the world including North Africa. Actually, this area is considered as an important region for genetic diversity of chikpea species. In Algeria, this corp is considered as a key ingredient for culi- nary preparations and is appreciated for its high-protein content. During the colonial period, local and introduced chikpea cultivars were inventoried and characterized. However, at pre- sent, no collection is therefore unknown. In addition, anthropogenic and environmental pressures undergoing in our country since the last decade continuously decrease the genetic diversity within chikpea species. thus, in order to build a body of “lost” collections, which are at the roots for all agricultural research strategy development, since 1998 the National Institute of Agricultural Research, collects assess and characterizes chikpea species tracked throughout the Algerian territory. Key Words : chikpea, pulses, genetic diversity, Algeria.

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LE POIS CHICHE EN ALGÉRIE :SITUATION, POTENTIALITÉS ET PERSPECTIVES

Zine-Zikara F., Bouzid L. et Yekkour A.

INRAA, Laboratoire des ressources phytogénétques, CRP Mehdi Boualem, Baraki, Alger.

RÉSUMÉ

D’après les études archéobotaniques, Cicer arietinum L. communément appelé « Pois chi-che » est l’une des premières légumineuses alimentaires à avoir été domestiquée par l’hom-me à travers les civilisations. Cette culture a réussi à conquérir plusieurs régions du mondedont la partie septentrionale de l’Afrique. Ainsi l’Afrique du nord constitue un centre dediversité important pour cette espèce. En Algérie, le pois chiche est un ingrédient quasiincontournable de la gastronomie locale. Durant la période coloniale, plusieurs travaux d’in-ventaire et de caractérisation ont été entrepris sur les cultivars locaux et introduits.Actuellement, aucune collection n’a pu être préservée et les cultivars, populations ou varié-tés de pois chiche ne sont, malheureusement, plus connus. Parallèlement, les diverses pres-sions anthropiques et environnementales enregistrées dans notre pays, ces dernières années,diminuent chaque jour la diversité génétique de cette espèce ; dont les intérêts nutritionnelsliés à sa richesse protéique ne sont plus à démontrer. Ainsi, afin d'essayer de rassembler lescollections ‘’perdues’’, qui sont à la base de toutes recherches agronomiques, l’InstitutNational de la Recherche Agronomique a entrepris, en 1998, des prospections et collectesde semence de cette espèce à travers tout le territoire Algérien. Le matériel collecté a faitl’objet de caractérisation et d’évaluation.

Mots Clés : Pois chiche, légumineuses alimentaires, diversité génétique, Algérie.

SUMMARY

According to several archaeobotanic investigations, chickpea (Cicer arietinum L.) is one ofthe first pulses domesticated across civilizations and conquer several regions of the worldincluding North Africa. Actually, this area is considered as an important region for geneticdiversity of chikpea species. In Algeria, this corp is considered as a key ingredient for culi-nary preparations and is appreciated for its high-protein content. During the colonial period,local and introduced chikpea cultivars were inventoried and characterized. However, at pre-sent, no collection is therefore unknown. In addition, anthropogenic and environmentalpressures undergoing in our country since the last decade continuously decrease the geneticdiversity within chikpea species. thus, in order to build a body of “lost” collections, whichare at the roots for all agricultural research strategy development, since 1998 the NationalInstitute of Agricultural Research, collects assess and characterizes chikpea species trackedthroughout the Algerian territory.

Key Words : chikpea, pulses, genetic diversity, Algeria.

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En Algérie, le pois chiche est l’une desprincipales légumineuses alimentaires quioccupe une place importante dans l’alimen-tation de la population. Cultivée sur plu-sieurs zones agro écologiques, cette espèceconstitue une source très importante deprotéines avec une teneur qui peut atteind-re, selon Laumont et Chevassus (1956),30% du poids du grain. Le mélange desgraines de pois chiche avec celle des céréa-les peut avoir une valeur nutritive équiva-lente à celle fournie par des protéines ani-males (Kande, 1965 ; Chaux, 1972).

Depuis fort longtemps, la culture du poischiche est présente dans nos systèmesagraires, associée aux céréales auxquelleselle laisse des quantités non négligeablesd’azote dans le sol. Par ses propriétés fixa-trices d’azote atmosphérique, la contribu-tion de cette culture à la fertilité des sols età l’amélioration de leur structure est uneréalité reconnue. Ainsi, elle est une compo-sante incontournable pour les agricultures àfaibles consommations d’intrants (Feliachi,2002). Cependant les contraintes agro-éco-nomiques locales font que la production decette culture reste très faible avec des sur-faces en constante diminution, alors que lesbesoins sont, quant à eux, en constante aug-mentation. Cette situation aboutit à unedépendance quasi-totale vis-à-vis de l’im-portation (Labdi et al., 2007).

Il y’a un peu plus de 50 ans l’Algérie pos-sédait une trentaine de variétés, maisactuellement les cultivars locaux ne sem-blent exister que dans quelques régions

reculées. Le pois chiche ainsi que les autresespèces cultivées de légumineuses alimen-taires n’ont bénéficié que de peu d’intérêten tant que ressources phytogénétiquesstratégiques majeures. Parallèlement à cela,les efforts d’intensification n’ont souventpas permis d’atteindre les résultats escomp-tés, malgré les travaux et les acquis derecherche appréciables accumulés depuisplus d’un demi siècle.

Le regain d’intérêt pour la culture du poischiche ainsi que sa relance passe impérati-vement par la recherche variétale; mettantainsi à la disposition des agriculteurs unepanoplie de variétés adaptées aux contrain-tes locales et qui répondent à leurs attentes.

I. Situation de la culture du pois chiche

I.1. Dans le mondeLa production mondiale du pois chiche aconnu, durant la dernière décennie, une ten-dance à l’augmentation relativement mar-quée avec un taux d’accroissement de 56%,et une production moyenne décennale de 8736 391 tonnes; alors que les superficiesconsacrées n’ont augmentées que de 26%avec une moyenne décennale de 10 662 444ha (Tableau 1, Tableau 2) (FAO, 2001-2010).

L’Inde est le premier producteur mondialavec près de 70% de la production (7 480000 tonnes) et représente à elle seule 2/3des surfaces dédiées à cette culture (8 210000 ha), tandis que la production totale del’Australie, le Pakistan, la Turquie, leMyanmar, l’Ethiopie, l’Iran, le Mexique etle Canada, représentent environ 27% de laproduction mondiale (FAO, 2010).

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Tableau 1 :Superficie moyenne mondiale (ha) du pois chiche pour la décennie 2001-2010.

Source : (FAO, 2001-2010)

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Tableau 2 :Production moyenne mondiale (t) du pois chiche pour la décennie 2001-2010.

Source : (FAO, 2001-2010)

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Tableau 3 :Superficie et production du pois chiche au Maghreb .

Source : (FAO, 2001-2010)

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La superficie du pois chiche a augmentédurant les périodes décennales allant de1961 à 1990 ; par la suite, elle présente unerégression constante passant de 47 061 hadurant la période 1981-1990 à 21 799 hadurant la période 2001-2010.

Concernant les productions, elles fluctuentd’une décennie à l’autre. Les productionsles plus importantes ont été observéesdurant la décennie 1991-2000, avec uneproduction maximum en 1992 (261 320 q).

Ces dix dernières années, la production dupois chiche a enregistré une baisse notableavec notamment une très bonne productionen 2010 (234 737 q). Cette baisse peut êtreexpliquée en partie par la réticence desagriculteurs à semer cette espèce, et cela àcause des faibles résultats enregistrés lesannées précédentes.

Les rendements sont très variables d’unedécennie à l’autre. Ils varient en moyennede 3 à 7 q/ ha. En effet, on observe une ten-dance nette à l’augmentation des rende-ments de 1981 à ce jour (Figure 2).

Selon Labdi (1990), la superficie en poischiche est passée de 18 230 ha en 1964 à 26694 ha en 1974. En 1987, elle a atteint lavaleur de 60 450 ha. L'augmentation dessuperficies est devenue plus prononcée en1983, avec l'exécution du programme dediminution des superficies consacrées à lajachère et d’intensification de la productiondes légumineuses alimentaires. Durantcette période, la superficie consacrée auxlégumineuses alimentaires a excédé les 100

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Figure 2 : Evolution des superficies, des productions et des rendements du pois chiche durant lapériode 1961-2010 en Algérie.

Figure 1 : Superficie des légumineuses alimen-taires en Algérie.

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000 ha et 40 000 ha sont consacrés au poischiche. Les 4 premières années des années80 ont eu un effet négatif sur la surfacetotale semée en pois chiche. Ceci est attri-bué à la sécheresse en ces années. Les ren-dements moyens pendant la période 1974 -1987 sont demeurés bas et sans change-ment. Depuis 1983, la production nationales'est sensiblement améliorée pour atteindreun niveau de 25 140 tonnes en 1987.

I.2.2.2. Répartition régionale du poischiche Selon les données du MADR (2010), ilapparaît que la région Nord de l’Algérieenglobe la majorité des superficies culti-vées en légumineuses alimentaires, avecplus de 52,83% pour la région Nord Ouest.Le pois chiche est cultivé dans les zones lit-torales et les plaines intérieures. Leswilayate qui totalisent plus 90% de lasuperficie cultivée en pois chiche enAlgérie sont respectivement : AinTemouchent (23,98%), Tlemcen (20,48%),

Mascara (12,54%), Mostaganem (8,81%),Chlef (6,48%), Sidi Bel Abbes (5,42%),Skikda (4,11%), Guelma (3,94%), AinDéfla (2,57%), Médéa (1,79%) et Relizane(1,29%). Ainsi on remarque que plus de72% de cette culture se retrouve au niveaude la région Nord Ouest.

I.2.2.3. Evolution des importationsEn 1965, les importations étaient d’environ4 000 tonnes ; depuis, elles sont en perpé-tuelle augmentation sauf pour la période1990-1994 où celles-ci ont diminué pouratteindre une moyenne de 26 861 tonnes.En 2001, elles ont atteint un pic de 70 496tonnes (FAO, 1965- 2009).

Selon Labdi et al., (2009a), la factureannuelle moyenne des importations deslégumineuses alimentaires la plus élevéeest celle du pois chiche avec plus de 40millions de dollars soit 39% de la facturetotale.

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Figure 3 : Evolution des importations du pois chiche de l’Algérie durant la période 1965-2009.

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Les exportations sont quasiment nulles etn’ont concerné que les années 1968,1969,1970, 1973,1998 avec respectivement1 097 tonnes, 2 279 tonnes, 1 044 tonnes,796 tonnes et 103 tonnes (FAO, 1956-2009).

II. Potentialités génétiques de la culturedu pois chiche en AlgérieD’après Ladizinskie (1975), l’aire de distri-bution du Cicer arietinum L. se situeapproximativement au Sud-Est de laTurquie et ses frontières avec l’Iran et l’ex-URSS. Au fil des civilisations, la culture dupois chiche a envahi plusieurs régionsparmi elles, le Nord de l’Afrique (Saxena etSingh, 1978).

Appartenant au bassin méditerranéen, quiest l’un des huit centres d’origine des plan-tes cultivées et de diversité identifiés parVavilov (1926), l’Algérie est caractériséepar un haut potentiel de variabilité géné-tique, et de ce fait, il est considéré commeun grand réservoir génétique à l’échellemondiale. En 1956, Ducellier a donné desindications très intéressantes sur la largegamme de pois chiches cultivées en Algérie(Laumont et Chevassus, 1956). D’aprèsSadiki et Halila (1997), le pois chiche adéveloppé une large diversité et une forteadaptation aux conditions du climat médi-terranéen.

II. 1. Etat des ressources génétiquesEn 1956, Ducellier a recensé 4 variétésbotaniques : Cicer arietinum var edule(pois chiche comestible), Cicer arietinumvar globulosum (pois chiche rond), Cicer

arietinum var commune (pois chiche com-mun), Cicer arietinum var dentatum (poischiche denté) à l'intérieur de l'unique espè-ce cultivée (Citer arietinum L.) (Laumontet Chevassus, 1956).

De 1944 à 1955, le germplasm utilisé étaitconstitué de 31 variétés locales (Abdellys :101/13, 199, 50/13, 499/13. ATEC : 1, 3, 7,10, 28, 126, 161. Cunin : 9, 11. Issers :537/10. Maroc 674. Mogador. Oran :177/34, 219, 425/4, Oran précoce 534/36.Sidi Bel Abbés : 123, 523. Souf etell. Syrie :11, 660/12, 424. Tassalah : 453, 445). Ilfaut cependant signaler que les variétés cul-tivées sont rencontrées le plus souvent enmélange plus ou moins accusé. En effet, lesvariétés à grains fortement colorés ne fontpas l'objet de culture séparée mais sont ren-contrées en proportions plus ou moins for-tes (Zine et Laouar, 1998).

Anthelme et al., (1978) ont évalués ladiversité variétale à 11 cultivars locaux :Cunin 11, Issers 537, ATEC 10, Tessallah,Oran précoce, Misserghin, rabat 57,AinTémouchent 161, Abdellys 494, Abdellys493 et Menerville.

Boughrarou (1992) n’a pu caractériser quesix cultivars locaux (Sebdou, Sidi BelAbbés, Rabat 9, Aïn Témouchent, Abdellyset Oran Précoce) dont trois seulement (AïnTémouchent, Abdellys et Oran Précoce)ont été mentionnées par Laumont etChevassus (1956). Les autres cultivars n’é-taient plus disponibles (extrêmement raresou inexistants).

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En 1981, les services de l’IDGC avaientconstaté que les variétés anciennes n’é-taient déjà plus cultivées à grande échelle àl’exception de Ain Témouchent 161/14 etRabat 9 qui ne restaient cultivées que parquelques agriculteurs (IDGC, 1981). Zineet Laouar (1998) ont rapporté que parmi lessix variétés utilisées en production, l’uneest d’origine locale (Rabat 9), les cinq aut-res sont des obtentions à partir des lignéesICARDA. Les travaux de Zine-Zikara et al., (2005)effectués à partir de prospections et collec-tes de cultivars de pois chiche locaux, ontpu mettre en exergue, une grande hétérogé-néité inter et intra-cultivars, témoignantainsi l’existence d’une forte diversité chezces cultivars.

Labdi et al., (2009a) ont signalé que l’in-troduction et l’utilisation, depuis plusieursannées, de variétés de pois chiche d’hiverimportées de la Syrie, de la Turquie ousélectionnées localement, n’ont pas tou-jours permis d’atteindre les objectifs natio-naux de production. En effet, quoique cesvariétés ont montré un bon potentiel deproduction avec un niveau de tolérance auxmaladies supérieur aux variétés locales,leur petit calibre a fait qu’elles ne soientplus cultivées.

Ainsi, une érosion importante a été remar-quée sur les cultivars locaux de pois chiche.Les introductions massives, d’une part, dessemences étrangères et, d’autre part, desgraines pour la consommation ont contri-bué pour beaucoup dans la perte du maté-riel végétal local.

II.2. Evaluation de l’érosion génétiqueCes quelques travaux mentionnés tradui-sent bien la variabilité génétique du poischiche existante en Algérie. Cependant,cette diversité génétique n'a pas fait l'objetde gestion et/ou de conservation. C'est ainsique depuis les années 90, les anciennesvariétés, du moins la trentaine de variétéscitées par les différents auteurs, ne sontplus cultivées à grande échelle (Zine etLaouar, 1998). Ceci n'exclu pas l'existenceéventuelle de cultivars locaux ou ancienne-ment introduits encore utilisés par quelquesagriculteurs des zones reculées (régionsmontagneuses...).

Conscients des conséquences néfastes quepeut engendrer le déclin de la diversitégénétique sur la production agricole, unprojet de recherche sur les ressources géné-tiques du pois chiche a été initié parl'INRAA en 1996 (Zine, 1997).

A une autre échelle, la création du réseaumaghrébin de recherche sur la fève et laféverole (REMAFEVE) en 1992, a permis,de constituer une collection maghrébine defève (Sadiki et al., 1996). Par la suite, Leréseau a été élargi au pois chiche ainsi quetoutes les autres légumineuses alimentaireset a pris le nom de REMALA.

Les retombées d'un tel réseau sur le plan dela recherche et de la création variétale neseraient concrètes que si chaque pays avaitun programme clair de sélection et de créa-tion variétale pour chaque zone agroécolo-gique et pourquoi pas au niveau de chaqueterroir (Abdelguerfi et al., 1998).

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Par ailleurs, la conjugaison de plusieurscontraintes techniques, économiques etorganisationnelles est à l’origine de l’échecde l’amélioration des productions des poischiches. La principale contrainte relève dumatériel végétal et les semences utiliséesqui sont non performants et ne présententpas les caractéristiques demandées. Cela aeu un effet négatif sur le développement decette culture. En effet, très peu de variétéssont proposées aux agriculteurs ; le maté-riel végétal utilisé se limite aux populationslocales souvent de faible productivité et defaible tolérance aux différents types destress biotiques et abiotiques, et aux géno-types introduits par l'ICRISAT (Inde) etl’ICARDA (Syrie).

III. Acquis de la recherche et perspectivesLes travaux anciens des années 50, ont per-mis de faire un formidable travail de carac-térisation, de sélection et d’introduction devariétés dans les zones à vocation de la cul-ture du pois chiche. Il faudrait noter cepen-dant que la période, où les travaux derecherche appliquée au pois chiche étaientnombreux, était celle des années 80. Eneffet, durant cette période les projets avecl’IDRC et l’ICARDA ont permis de monterdes programmes qui ont abouti a la produc-tion de dizaines de variétés et de promou-voir des programmes de mécanisation et dephytotechnie, principalement, l’introduc-tion de la lutte chimique et la récolte méca-nisée des légumineuses alimentaires(Abdelguerfi et al., 1998).

Dans les années 90, les travaux entreprisconcernaient beaucoup plus les aspects deprotection des cultures (phytopathologie et

entomologie) de physiologie (stress), defixation symbiotique et de caractérisationde populations locales dans le cadre desprogrammes d’institutions comme l’ITGC,l’INRAA, l’INA ou les universités ou dansle cadre de projets du MESRS ou d’institu-tions internationales ou étrangères(REMAFEVE, AQUAHRIZ, PNUD etc..). Depuis plus d’une vingtaine d’années, lestravaux de recherche réalisés par l’INA etl’ITGC, ont porté essentiellement sur desaspects de techniques culturales et de com-portement. Cependant, dans le cadre d'unprojet PNUD, l'accent a été mis sur le poischiche d'hiver résistant à l'anthracnose etquelques lignées étaient en phase de pro-duction de semences en stations et chez lesagriculteurs, il s'agit de : Chetoui 1, Flip :84-92c, 84-79c, 85-17c, 84-54c et 82-150c.Zaghouane (2011) a signalé que la sélec-tion de variétés des légumineuses alimen-taires a été délaissée même si ces légumi-neuses ont bénéficié d’une certaine prise encharge sur le plan technique.

Selon Labdi et al., (2009b), la productiondes légumineuses alimentaires pourrait suf-fire pour la consommation locale et mêmeà l’exportation si les trois principaux gou-lots d’étranglement sont pris en charge àsavoir : la production de semences, l’inten-sification de la production et la commercia-lisation. Concernant le volet production desemences, une voie de recherche qui seraittrès déterminante est celle de l’élaborationd’un programme d’amélioration variétaleclassique et biotechnologique reposant,d’une part, sur la collecte, la préservation etla caractérisation du pool génétique descultivars locaux de légumineuses. En effet

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Compte tenu de la déperdition progressivedes variétés locales au détriment de nouvel-les introductions, il s’avère urgent derechercher les cultivars locaux en vue decréer une large base génétique.

D’autre part, ce programme d’améliorationvariétale reposerait sur l’adaptation de nou-velles variétés de semences, l’améliorationparticipative des légumineuses et l’élabora-tion d’un programme de multiplication dessemences.

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Références bibliographiques

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RECHERCHE AGRONOMIQUE N° 27 - 2015

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Le pois chiche en Algérie : situation, potentialités et perspectives