mieux-êtreI P S Y C H O L O G I E

Le bonheur est dans le « FLOWMême dans le tourbillon quotidien, nous sommes tous capables d'atteindre cet état psychologique

optimal qu'on appelle le « flow » . Voici comment insuffler plus de « flow » dans sa vie . . .

Par Michèle Saucier

I maginez . . . Masque et tuba bien enplace, vous flottez au gré d'uneeau tiède et cristalline . Dans un

silence enveloppant rythmé par votrerespiration, vous êtes cerné par labeauté : poissons chatoyants, corauxéclatants et plantes ondoyantes . Plusrien n'existe : envolés, les problèmesde bureau, les émotions négatives,le blablabla intérieur. Happé par cemonde parallèle, vous flottezlittéralement . Et vous souhaitez que cemoment dure et dure encore . Bref,vous êtes en état de « flow » .

Le « flow », c'est cet état de profondbien-être, de concentration et demotivation intenses qui survientquand on relève un défi correspondantà ses capacités . Ces momentsexceptionnels peuvent se produirequand vous jardinez, marchez enforêt, chantez dans une chorale oumême quand vous lisez un livrefascinant. C'est l'état de zone vécu parles athlètes ou la transe de certainsartistes dans le feu de la création .

Dans ces moments où tout notreêtre est sollicité, les problèmess'évanouissent : on se sent vivant,voire vibrant . Même notre ego a priscongé ! C'est ce que ressentent lejoueur d'échecs en pleine partie ou lawebmestre en train de construire unsite. Leurs actions sont aisées, tout

« Au travail comme ailleurs,l'idéal est d'être en amouravec ce qu'on fait

coule, ils oublient tout ce qui n'est pasle moment présent. Comme s'ilsétaient transportés . Et ces instants deplaisir intense leur procurent une tellesatisfaction qu'ils n'ont qu'une seuleenvie : les revivre .

Pourquoi le « flow » nous transporte-t-il autant ? Parce que « par contrasteavec la vie normale, ces activités nouspermettent de nous concentrer sur desobjectifs précis qui fournissent unfeed-back immédiat », explique MihalyCsikszentmihalyi, le psychologue,découvreur du « flow ». On ressent le

OCTOBRE 2003 1 styles de vie 9

mieux-êtreI P S Y C H O L O G I E

flow » quand on relève un défijuste assez difficile pour solliciter noscompétences et qu'il requiert toutenotre attention . Et plus on maîtrisecertaines actions, plus on a envie deprogresser. Ainsi, on peut désirerpasser à l'escalade après quelquesrandonnées stimulantes en forêt .

Dépendance douceLes enfants vivent beaucoup demoments de « flow » . Pour eux,chaque apprentissage est uneaventure . Observez un enfant quiapprend à lire. La concentration sevoit sur son visage et la joiel'illumine quand il reconnaît les sons,puis les mots . Il a envie d'aller plusloin, de repousser ses limites .

Mais nous, adultes raisonnables etstressés, pourquoi avons-nous tantde mal à vivre ces instants deplénitude ? Peut-être parce que letourbillon des obligations efface toutsur son passage. Entre les devoirsdes enfants, les dossiers à boucler,les attentes de la famille ou des amis,il reste bien peu de plages où le« flow » pourrait s'abattre .

Le quotidien USA Today souligneque la théorie du « flow » s'appliqueparticulièrement aux adolescents .Au cours de cette période rock & roll,les jeunes les plus heureux sont ceuxqui considèrent leurs activitésquotidiennes « à la fois comme dutravail et du jeu » . Plus l'activité colleà ce que l'individu sait le mieux faire,et qu'on n'exige pas qu'elleoutrepasse ses capacités, plus il serespecte tout en se donnant deschances de progresser.

Qui a envie de vivre sa vie auneutre ? Les gens dont la vie n'estpas enrichie par le « flow » se

ratatinent, se recroquevillent commedes escargots . Contrairement à des

CONSEILS POUR SE RÉALISER AU TRAVAIL

O Faites le point . Examinez objectivement votre situation professionnelle .Est-elle source d'anxiété, de stress ou encore d'ennui ou d'indifférence ?Votre emploi vous procure-t-il du plaisir, êtes-vous motivé ? Les réponsesà ces questions vous permettront de savoir si vous êtes en bonne santéémotionnelle au travail .

•

Visez le plaisir. Si les défis posés par votre emploi ne vous stimulent pasassez, haussez la barre . Vous retrouverez le « flow » . Si, au contraire, cesdéfis sont sources d'anxiété, suivez une formation qui vous permettra deles relever avec confiance, ou déléguez les tâches pour lesquelles vousvous sentez moins qualifié .

•

Enrichissez votre emploi . Pour vitaminer un job monotone, il suffit souventd'établir des priorités et de faire coïncider nos compétences avec des défiscorrespondants. Même si on ne peut modifier sa description de tâches,il est possible, avec un peu de stratégie, de trouver du positif dans ce qu'onaccomplit . « Le travail ne doit pas être une source de souffrance, maisd'épanouissement », rappelle M . Amherdt .

•

Communiquez l'évaluation annuelle est le moment idéal pour suggérer ànotre patron de mieux utiliser nos compétences . Soyez précis et positif .Mettez l'accent sur les tâches qui vous plaisent, puis apportez despropositions concrètes pour réduire celles qui vous pèsent . Un employémotivé dynamise la productivité (un concept clef pour les employeurs !) .

•

Chers patrons . Oubliez « un peu » les salaires, bonis et autres « bonbons » .Plutôt que de pointer les faiblesses de vos salariés, pensez à reconnaîtreleurs forces . Un employé valorisé est plus heureux, plus performant,et l'entreprise aussi en retire des bénéfices .

•

Allez de l'avant . Si votre emploi ne vous fait pas vivre d'émotionspositives, songez à démissionner. « Si vous restez en pensant ainsi gagnervotre vie (sur le plan financier), vous risquez plutôt de la perdre (sur leplan de la santé), souligne M . Amherdt . Plus on est heureux au travail,plus les autres sphères de notre vie sont en harmonie . »

plaisirs ponctuels, le « flow » est unplaisir qui transforme . Après y avoirgoûté, non seulement on désirerecommencer, mais on a envie des'améliorer. Et si on y arrive, on sesent compétent et fier de soi . C'est uncercle non vicieux .

Comment insuffler plus de « flow »dans sa vie ? En étant à l'écoute desoi . Facile à dire . . . « La vie est toujoursune invention, nous dit FrançoisRoustang, psychanalyste, mais, pour

inventer, il faut se laisser inspirer . »

Bref, être en état de conscience . DireStop à la folie du monde et Bonjourà ce qui nous touche vraiment . Car le« flow » peut survenir sans prévenir :en parlant avec une amie, en jouant ausoccer, et même en travaillant .L'important est d'être assez disponiblepour reconnaître ces flashs de bien-être . Et pour en profiter .

Dans le « flow » de l'actionCurieusement, bien que 80 % desemployés se disent insatisfaits autravail, les études montrent que le

10 styles de vie I OCTOBRE 2003

mieux-être

travail fournit plus d'occasions de « flow »que les temps libres ! Pas étonnant, rétorqueM. Csikszentmihalyi : « Le travail ressemblebeaucoup plus à un jeu que la plupart denos autres activités quotidiennes . »Habituellement, les règles et les objectifssont clairs, le feed-back, présent . Au travail,nous sommes concentrés, sans trop dedistractions et, idéalement, nos compétencesnous permettent de relever les défis quinous sont proposés, toutes conditions quifavorisent l'émergence du « flow » .

Alors, pourquoi sommes-nous sinombreux à vivre du stress au travail,et même à tomber malades ? Peut-êtreparce que l'obsession de l'excellence, cettecourse à la performance, nous force àrepousser constamment nos limites .Plusieurs ne se sentent pas valorisés par letravail et se perçoivent comme des employésjetables . « Il faudrait une véritable révolutionculturelle de l'entreprise », dit le psychologueCharles-Henri Amherdt, directeur du Centrede recherche interuniversitaire surl'éducation et la vie au travail à l'Universitéde Sherbrooke et PDG d'InterQualia .

Jusqu'à présent, les compagnies avaientle gros bout du bâton . Mais dans trois ans,après les départs massifs à la retraite, aumoins 600 000 nouveaux emplois devrontêtre comblés. La balle sera alors dans lecamp des candidats . Ceux qui auront lescompétences recherchées par le marché

pourront choisir entre au moins deux emplois .« Pour recruter les meilleurs salariés, lesgarder et même inciter les seniors à rester,les patrons devront changer leur fusild'épaule, dit M . Amherdt . Et penser aubonheur de leurs employés . »

Alors, trouver le « flow » au travailmission impossible ? « On peut ressentirle « flow » dans tous les types d'emplois,à condition qu'il y ait une plage de liberté »,affirme M. Amherdt. Ce qui tue le « flow »,

c'est une surdose de consignes,un manque de dialogue. Quand on ale sentiment qu'on est à la hauteur,quand on se sent utile, on ressent plusde plaisir. Des études ont montré quemême les ouvriers travaillant à lachaîne pouvaient ressentir du « flow » .Il suffit que l'entreprise les valorise,les invite à prendre des initiatives etlaisse une place à la liberté .

Bref, patrons, ayez l'esprit ouvert !Et valorisez le « flow » au travailc'est dans l'intérêt de l'entreprise .Comment ? En favorisant la santéémotionnelle de vos employés .« Une personne confrontée à unesituation émotionnelle négative dansson travail est moins motivée, ne peutfaire face à certaines situations, vit un

CONNAIS-TOI TOI-MÊMES'appuyant sur la théorie psychologique du « flow », le Bilan InterQualia® dedéveloppement professionnel est un mentor virtuel . Ce test pointu permet auxpersonnes qui occupent un emploi de déterminer si elles « sont à leur place » .Validé auprès de 16 000 personnes et fruit de quatre années de recherches,le bilan fait ressortir nos compétences clefs et détermine si notre emploi actuelnous permet d'exploiter sainement notre savoir-être . Très juste, « intelligent »,le bilan mesure vraiment notre degré de satisfaction au travail . À nous ensuited'appliquer les solutions qui nous rapprocheraient d'un état optimal de« flow » . Le Bilan InterQualia® de développement professionnel est offert pourun temps limité à un tarif préférentiel de 75 $ (50 % de rabais) sur monemploi.com

stress nuisible et peut tombermalade », rappelle M . Amherdt. Uneentreprise dont le climat émotionnelest négatif vivra immanquablementdes problèmes de performance,de créativité et de rentabilité .

Au travail comme ailleurs, l'idéal

est d'être en amour avec ce qu'on fait .Les psychologues sont unanimes .Les gens les plus heureux s'entourentd'amis, se soucient peu des relationsformelles, évitent l'affrontement etl'envie et s'investissent à fond dans lequotidien. Beau programme, non ?

OCTOBRE 2003 1 styles de vie 13