L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque...

143
L E D É V E L O P P E M E N T À L ’ O E U V R E Maîtriser l’épidémie L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme

Transcript of L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque...

Page 1: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

L E D É V E L O P P E M E N T

À L ’ O E U V R E

Maîtriser l’épidémieL’État et les aspects économiques

de la lutte contre le tabagisme

Page 2: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication
Page 3: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

BANQUE MONDIALEW A S H I N G T O N

Maîtriser l’épidémieL’État et les aspects économiques

de la lutte contre le tabagisme

Page 4: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

© 2000 Banque internationale pour la reconstructionet le développement/BANQUE MONDIALE1818 H Street, N.W.Washington, D.C. 20433 (États-Unis d’Amérique)

Tous droits réservésFait aux États-Unis d’Amérique

Premier tirage : avril 2000

Les constatations, interprétations et conclusions figurant dans le présent rapport n’engagent queleurs auteurs et ne sauraient être attribuées en aucune manière à la Banque mondiale ou auxmembres de son Conseil des administrateurs, ni aux pays qu’ils représentent. La Banque mondialene garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication et décline touteresponsabilité quant aux conséquences de leur usage, quelles qu’elles soient.

Le contenu de cette publication fait l’objet d’un dépôt légal. La Banque mondiale encou-rage la diffusion de ses études et, normalement, accorde sans délai l’autorisation d’en reproduiredes passages.

La Banque mondiale accorde l’autorisation de photocopier des passages pour un usageinterne ou personnel, pour l’usage interne ou personnel de clients donnés ou à des fins scolaires,à condition que la commission prescrite soit réglée directement au Copyright Clearance Center,Inc., Suite 910, 222 Rosewood Drive, Danvers, Massachusetts, 01923 (États-Unis d’Amérique) ;tél. : + 1 978-750-8400 ; fax : + 1 978-750-4470. Veuillez prendre contact avec le Copyright Clear-ance Center avant de photocopier des passages.

Si vous désirez imprimer des articles ou chapitres particuliers, veuillez en faire la demandepar fax, en fournissant tous les renseignements nécessaires, à Republication Department, Copy-

right Clearance Center, fax : + 1 978-750-4470.Pour tous renseignements sur les droits et licences, s’adresser au Bureau des publications

de la Banque mondiale, à l’adresse ci-dessus, ou par fax, au 202-522-2422.

Maquette de la couverture : Dr Joe Losos, Santé Canada

ISBN 0-8213-4728-4

Page 5: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

v

Table des matières

AVANT-PROPOS ix

PRÉFACE xiii

RÉSUMÉ 1

1 Les tendances mondiales du tabagisme 13

Augmentation de la consommation dans les paysà revenu faible et intermédiare 13

Répartition régionale du tabagisme 15Tabagisme et statut socio-économique 16Âge et initiation au tabagisme 17L’arrêt de la cigarette dans le monde 18

2 Les conséquences du tabagisme pour la santé 21Le caractère addictif du tabac 21La charge de morbidité 22La maladie survient longtemps après l’exposition au risque 23Comment le tabac tue-t-il ? 24L’épidémie varie dans l’espace et dans le temps 25Le tabagisme et le désavantage des pauvres

en matière de santé 25Les risques du tabagisme passif 27Les bienfaits du sevrage 28

3 Les fumeurs savent-ils quels risques ils courent etassument-ils leurs coûts ? 29Connaissance des risques 30

Page 6: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

vi MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

La jeuness, la toxicomanie et l’aptitude à prendredes décisions saines 31

Coûts imposés à autrui 32Que doivent faire les pouvoirs publics ? 35Comment faire face à la toxicomanie? 37

4 Réduire la demande de tabac 39Majorer la fiscalité des cigarettes 39Mesures de réduction de la demande autres que les prix :

information des consommateurs, interdiction de la publicité etdes promotions et restrictions sur le tabagisme 48

Les substituts nicotiniques et autres traitements de sevrage 57

5 Réduire l’offre de tabac 61La plupart des interventions sur l’offre sont relativement

peu efficaces 61Lutte contre lav contrebande 67

6 Les coûts et les conséquences de la luttecontre le tabagisme 71La lutte contre le tabagisme est-elle préjudiciable

pour l’économie ? 71

7 Programme indicatif d’action 85Surmonter les obstacles politiques au changement 86Les priorités de la recherche 90Recommandations 91

APPENDICE A LA FISCALITÉ DU TABAC : LA PERSPECTIVE

DU FONDS MONÉTAIRE INTERNATIONAL 93

APPENDICE B DOCUMENTS DE RÉFÉRENCE 95

APPENDICE C REMERCIEMENTS 97

APPENDICE D LE MONDE PAR NIVEAU DE REVENU ET PAR RÉGION

(NOMENCLATURE DE LA BANQUE MONDIALE) 101

NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE 107

BIBLIOGRAPHIE 111

Page 7: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

viiTABLE DES MATIÈRES

INDEX 125

FIGURES

1.1 Le tabagisme progresse dans le monde en développement 141.2 Le tabagisme est plus répandu chez les gens peu éduqués 171.3 Le tabagisme commence tôt 182.1 Les niveaux d’absorption de nicotine progressent rapidement

chez les jeunes fumeurs 222.2 L’éducation et le risque de décès attribuable au tabac 262.3 Le tabagisme et l’élargissement de l’écart de santé entre riches

et pauvres 274.1 Moyenne du prix des cigarettes et des taxes, et taxes en pourcentage

du prix du paquet, par catégorie de revenu (nomenclaturede la Banque mondiale, 1996) 41

4.2 Le prix des cigarettes et la consommation évoluent en sens inverse 424.2.a Le prix réel des cigarettes et la consommation annuelle

par habitant, Canada, 1989–1995 424.2.b Le prix réel des cigarettes et la consommation annuelle

par adulte (15 ans et plus), Afrique du Sud, 1970–1989 424.3 Une mise en garde explicite 504.4 L’interdiction totale de la publicité réduit la consommation

de cigarettes 545.1 La contrebande de tabac tend à croître avec le degré

de corruption 686.1 La hausse de la fiscalité du tabac fait augmenter les recettes 777.1 Si les fumeurs actuels ne cessent pas de fumer, le nombre des

décès liés au tabac augmentera considérablement au coursdes 50 prochaines années 87

TABLEAUX

1.1 Répartition régionale du tabagisme 152.1 Nombre actuel de décès attribuables au tabac et projections 234.1 Nombre potentiel de fumeurs qui cesseraient de fumer et nombre

de vies épargnées par une hausse des prix de 10 % 464.2 Nombre potentiel de fumeurs qui cesseraient de fumer et nombre

de vies sauvées par un ensemble de mesures autres que de prix 574.3 Efficacité de différentes méthodes de sevrage 585.1 Les 30 premiers producteurs de tabac brut 636.1 Effets sur l’emploi de la réduction ou de l’élimination

de la consommation de tabac 746.2 Rentabilité des mesures de lutte contre le tabagisme 83

Page 8: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

viii MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

ENCADRÉS

1.1 Combien de jeunes commencent-ils à fumer chaque jour ? 194.1 Comment estimer l’impact des mesures de lutte sur la consommation

mondiale de tabac : les paramètres du modèle 454.2 L’interdiction de la publicité et de la promotion du tabac

dans l’Union européenne 546.1 Comment aider les agriculteurs les plus défavorisés 757.1 L’Organisation mondiale de la santé et la Convention-cadre sur la

lutte anti-tabac 887.2 La politique de la Banque mondiale dans le domaine du tabac 89

Page 9: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

ix

SELON les tendances actuelles, environ 500 millions depersonnes en vie aujourd’hui mourront des suites du tabagisme. Plus de lamoitié d’entre elles sont actuellement des enfants ou des adolescents. D’icià 2030, on estime que le tabac tuera environ 10 millions de personnes paran, ce qui en fera la première cause de décès dans le monde. L’Organisationmondiale de la santé (OMS) et la Banque mondiale ont décidé d’intensifierleur action contre ce fléau dans le cadre de leur mission respectived’amélioration de la santé et de lutte contre la pauvreté. En contribuant auxefforts menés pour définir et mettre en œuvre des politiques efficaces demaîtrise du tabagisme, surtout chez les enfants, les deux organisationsrempliront leur mission et aideront à atténuer les souffrances et à réduireles coûts associés à l’épidémie de tabagisme.

Le tabac n’est pas un problème de santé comme les autres. En effet, lesconsommateurs veulent des cigarettes et fumer fait partie de la vie de tousles jours dans de nombreuses sociétés. Le commerce des cigarettes estextrêmement actif et rentable. Leur production et leur consommation ontdes répercussions sur les ressources économiques et sociales des paysdéveloppés et en développement. C’est pourquoi il est indispensable detenir compte des paramètres économiques de l’usage du tabac dans laréflexion sur la lutte contre le tabagisme. Pourtant, on commence à peine às’y intéresser à l’échelon mondial.

Nous nous proposons, par ce rapport, de combler cette lacune. Nousnous penchons sur les questions essentielles auxquelles la plupart dessociétés et des dirigeants sont confrontés lorsqu’ils engagent une réflexionsur le tabac et sur la maîtrise du tabagisme. Ce rapport est un élémentimportant du partenariat entre l’OMS et la Banque mondiale. L’OMS,

Avant-propos

Page 10: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

X MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

principal organisme international chargé des questions de santé publique,a pris la tête du mouvement de lutte contre le tabagisme en lançant sonInitiative Se libérer du tabac. La Banque mondiale prévoit de travailleren partenariat avec elle, et en particulier de mettre à sa disposition sesservices d’analyse économique. En 1991, consciente des méfaits du tabac,la Banque mondiale a adopté une politique officielle dans ce domaine,qui lui interdit d’accorder des prêts à la filière tabac et encourage lesactivités de lutte.

Ce rapport vient à point nommé. Devant l’augmentation du nombre dedécès causés par le tabac, de nombreux gouvernements, organisations nongouvernementales, et institutions des Nations Unies, telles que l’UNICEFet l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture,examinent leur propre politique de maîtrise du tabagisme. Ce rapports’inspire des nombreux travaux réalisés en collaboration dans le cadre deces examens, aux niveaux national et international.

Il vise principalement à répondre aux préoccupations des dirigeantsquant aux retombées économiques des mesures de lutte contre le tabagisme.D’un côté, les avantages pour la santé publique, et surtout pour les enfants,de la lutte contre le tabac, sont évidents mais, de l’autre, cette actionimplique des coûts dont les dirigeants doivent tenir compte. Lorsque lesmesures contre le tabac imposent des coûts aux personnes les plusdéfavorisées, il incombe manifestement à l’État de les atténuer, par exempleau moyen de programmes de transition en faveur des cultivateurs de tabacpauvres.

Le tabac est l’une des premières causes de mortalité évitable etprématurée de l’histoire de l’humanité. Pourtant, on pourrait d’ores et déjàprendre des mesures relativement simples et peu coûteuses pour en réduirel’impact catastrophique. Pour les pays décidés à améliorer la santé publiquetout en suivant de bonnes politiques économiques, la maîtrise du tabagismeest une option particulièrement attrayante.

David de Ferranti Jie ChenVice-président Directeur exécutifRéseau du développement humain Maladies non transmissiblesBanque mondiale Organisation mondiale de la santé

Page 11: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

XIAVANT-PROPOS

Équipe chargée du rapport : Ce rapport a été rédigé par une équipe dirigéepar Prabhat Jha, comprenant Frank J. Chaloupka (codirecteur), Phyllida Brown,Son Nguyen, Jocelyn Severino-Marquez, Rowena van der Merwe et AydaYurekli. William Jack, Nicole Klingen, Maureen Law, Philip Musgrove, Tho-mas E. Novotny, Mead Over, Kent Ranson, Michael Walton et Abdo Yazbeckont apporté des idées et des conseils précieux. Les auteurs ont utilisé avecprofit des études de fond sur le tabac réalisées à la Banque mondiale par HowardBarnum. Derek Yach et Michael Eriksen étaient les correspondants de l’équipe,le premier à l’Organisation mondiale de la santé, et le second aux Centers forDisease Control and Prevention des États-Unis. Les travaux ont été réaliséssous la direction générale de Helen Saxenian, Christopher Lovelace et Davidde Ferranti. Richard Feachem a été l’un des initiateurs du rapport. L’équipechargée de la rédaction est responsable de toute erreur qui pourrait s’y trouver.

Les services de production comprenaient Dan Kagan, Don Reisman etBrenda Mejia.

Le rapport a été considérablement enrichi par de nombreuses consulta-tions (voir les remerciements à l’appendice C). Il a bénéficié du soutien duRéseau du développement humain de la Banque mondiale, de l’Institut demédecine sociale et préventive de l’Université de Lausanne, et du Bureau dutabac et de la santé des Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis. Les auteurs leurs sont très reconnaissants de leur concours.

Page 12: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication
Page 13: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

xiii

Préface

CE rapport est le fruit des efforts convergents menés par plusieurspartenaires pour résoudre un problème commun : le peu d’attention accordéaux aspects économiques dans le débat sur la maîtrise du tabagisme. En 1997,lors de la 10e Conférence mondiale sur le tabac tenue à Beijing (Chine), laBanque mondiale a organisé une séance de consultation sur les aspectséconomiques de la lutte contre le tabac. Cette réunion s’inscrivait dans le cadred’un examen des politiques de la Banque dans ce domaine. Les participantsont admis sans ambages que les experts internationaux avaient jusqu’alorsnégligé les aspects économiques de l’épidémie tabagique. Ils ont égalementnoté que rares étaient les pays qui appliquaient les lois du raisonnementéconomique dans leur réflexion sur la lutte contre le tabac, et que même là oùl’on utilisait une approche économique, la qualité des méthodes était inégale.

Pendant que la Banque mondiale s’apprêtait à revoir sa politique, deséconomistes de l’Université du Cap (Afrique du Sud) entreprenaient un projetconcernant les aspects économiques de la maîtrise du tabagisme en Afriqueaustrale. Ces initiatives ont été fusionnées, en partenariat avec des économistesde l’Université de Lausanne (Suisse) et d’autres chercheurs, et leur portée aété élargie. Les travaux ont débouché sur une conférence, organisée au Cap enfévrier 1998. Les actes de la conférence seront publiés séparément1. Cette col-laboration a permis d’adopter une approche plus large des aspects économiquesde la maîtrise du tabagisme et de faire appel à des économistes et autres ex-perts venus de pays et d’institutions très divers. Certaines des études résultantde ces recherches seront publiées prochainement2. Le présent rapport a tiré deces études les informations qui intéressent les dirigeants et les a résumées.

Page 14: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

xiv MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Notes

1. Abedian, Iraj, R. van der Merwe, N. Wilkins et P. Jha, directeurs de publication,1998. The Economics of Tobacco Control: Towards an Optimal Policy Mix. Universitédu Cap (Afrique du Sud).2. Tobacco Control Policies in Developing Countries. Jha, Prabhat et F. Chaloupka,directeurs de publication. Oxford University Press, à paraître.

Page 15: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

1

Résumé

LE tabac tue déjà un adulte sur dix dans le monde. D’ici à 2030,peut-être un peu plus tôt, la proportion passera à un sur six, soit 10 millionsde décès par an, plaçant le tabac en tête de toutes les causes de mortalité.Jusqu’à présent, cette épidémie de maladies chroniques et de décès prématuréstouchait principalement les pays riches. Or, elle commence à se répandrerapidement dans le monde en développement. D’ici à 2020, la proportion desvictimes du tabac habitant dans les pays à revenu faible et intermédiaire serade sept sur dix.

Pourquoi ce rapport ?

Aujourd’hui, rares sont ceux qui contestent les ravages exercés par le tabac surla santé dans le monde entier. Pourtant, de nombreux gouvernements se refusentà prendre des mesures de lutte contre le tabagisme, telles qu’un relèvement dela fiscalité, l’interdiction complète de la publicité et des promotions, ou desrestrictions sur l’usage du tabac dans les lieux publics, de crainte que leursinterventions n’aient des conséquences préjudiciables pour l’économie. Certainscraignent, par exemple, qu’une baisse des ventes de cigarettes ne cause la pertedéfinitive de milliers d’emplois, qu’une majoration des taxes sur le tabac neréduise les recettes publiques et qu’une hausse des prix n’encourage lacontrebande à grande échelle.

Nous étudions dans ce rapport les questions économiques sur lesquellesdoivent se pencher les dirigeants qui envisagent de limiter l’usage du tabac.

Page 16: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

2 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Nous demandons si les fumeurs connaissent les risques et assument le coût deleurs choix de consommation, et nous examinons les options offertes auxresponsables qui décident qu’une intervention se justifie. Nous analysons lesconséquences prévisibles de la maîtrise du tabagisme pour la santé, l’économieet l’individu. Nous démontrons que les craintes économiques qui dissuadentles dirigeants d’intervenir sont en grande partie sans fondement. Les politiquesqui réduisent la demande de tabac (telles que le relèvement des taxes) neprovoqueraient pas de pertes d’emplois durables dans l’immense majorité despays. Par ailleurs, une majoration des taxes ne ferait pas baisser les recettesfiscales, au contraire (sur le moyen terme). En résumé, ces politiques pourraientse traduire par des avantages sans précédent pour la santé, sans pour autantporter préjudice à l’économie.

Tendances actuelles

Environ 1,1 milliard de gens fument dans le monde. En 2025, ce nombredépassera probablement 1,6 milliard. Dans les pays à revenu élevé, le tabagismeva généralement en diminuant depuis plusieurs dizaines d’années, sauf danscertaines catégories de population. Dans les pays à revenu faible et intermédiaire,au contraire, la consommation de cigarettes progresse, en partie grâce à lalibéralisation du commerce entreprise dans ces pays au cours des dernièresannées.

La plupart des fumeurs commencent jeunes. Dans les pays à revenu élevé,environ huit fumeurs sur dix commencent durant l’adolescence. Dans les paysà revenu faible et intermédiaire, la plupart des fumeurs n’acquièrent cette habi-tude qu’après 20 ans, mais l’âge auquel le plus grand nombre de genscommencent à fumer est en baisse. Dans la plupart des pays, les pauvres fumentgénéralement plus que les riches.

Conséquences pour la santé

Elles sont de deux ordres. La première est que le fumeur devient rapidementdépendant à la nicotine. Les propriétés addictives de la nicotine sont bienconnues, mais elles sont souvent sous-estimées par le fumeur. Aux États-Unis,il ressort d’enquêtes menées auprès des élèves des classes terminales que, surcinq fumeurs qui pensent s’arrêter de fumer dans les cinq années à venir, moinsde deux y parviennent. Dans les pays à revenu élevé, sur dix fumeurs adultes,sept déclarent regretter d’avoir commencé et souhaiteraient arrêter. Avec letemps (plusieurs dizaines d’années) et grâce à l’amélioration des connaissances,les pays à revenu élevé comptent à présent un nombre substantiel d’anciensfumeurs qui ont réussi à s’arrêter, mais les taux de succès au niveau individuelsont très bas. Parmi ceux qui essaient d’arrêter seuls, environ 98 %

Page 17: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

3RÉSUMÉ

recommencent à fumer dans l’année. Dans les pays à revenu faible etintermédiaire, rares sont les gens qui arrêtent de fumer.

La cigarette provoque des maladies mortelles et débilitantes et, encomparaison d’autres comportements à risque, s’accompagne d’un risque dedécès prématuré extrêmement élevé. La moitié de tous ceux qui fument depuislongtemps seront victimes du tabac, et la moitié d’entre eux mourront dans laforce de l’âge, abrégeant leur existence de 20 à 25 ans. On connaît bien lesmaladies liées au tabagisme : cancer du poumon ou d’autres organes,cardiopathie ischémique et autres maladies circulatoires, et affections des voiesrespiratoires (emphysème). Dans les régions touchées par la tuberculose, lesfumeurs risquent davantage que les non-fumeurs de mourir de cette maladie.

Étant donné que les pauvres fument plus que les riches, ils courent un plusgrand risque de mourir prématurément du tabagisme. Dans les pays à revenuélevé et intermédiaire, les hommes appartenant aux catégories socio-économiques les plus basses ont deux fois plus de chances de mourir à l’âgemoyen que ceux des catégories socio-économiques les plus élevées. Cettedifférence s’explique pour moitié par le tabagisme.

Le tabac est également nuisible pour la santé des non-fumeurs. Lesnouveau-nés dont les mères sont fumeuses ont un poids plus faible à lanaissance, sont davantage sujets aux maladies respiratoires et risquent plus demourir du syndrome de la mort subite que ceux dont les mères ne fument pas.L’inhalation de la fumée des autres accroît (légèrement) les risques pour lesnon-fumeurs de contracter des maladies mortelles et débilitantes.

Les fumeurs connaissent-ils les risqueset en supportent-ils le coût ?

Selon la théorie économique moderne, les consommateurs sont généralementles mieux placés pour décider comment dépenser leur argent en biens et ser-vices. Ce principe de la souveraineté du consommateur repose sur certaineshypothèses. La première est que le consommateur fait des choix rationnels etéclairés après avoir pesé les coûts et les avantages de ses achats, et la deuxièmeest que le consommateur assume tous les coûts liés à ses choix. Lorsque tousles consommateurs exercent ainsi leur souveraineté, en connaissant les risqueset en assumant les coûts, les ressources de la société sont, en théorie, affectéesde la manière la plus efficace possible. Nous examinons dans ce rapport lesraisons qui incitent les consommateurs à fumer, nous posons la question desavoir si ce choix est identique aux autres choix de consommation et s’il aboutità une affectation efficace des ressources de la société, avant d’en venir auximplications pour les autorités.

Il est certain que les fumeurs trouvent des avantages au tabac, tels que leplaisir et l’absence de symptômes de retrait, et qu’ils les comparent aux coûts

Page 18: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

4 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

privés de leur choix. Selon cette définition, les avantages perçus l’emportentsur les coûts perçus, sinon les fumeurs ne payeraient pas pour fumer. Il semblecependant que le choix de fumer pourrait différer d’autres choix deconsommation à trois égards.

En premier lieu, on sait que de nombreux fumeurs ne se rendent paspleinement compte des risques élevés de maladie et de décès prématuréqu’implique leur choix. Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, beaucoupde fumeurs ignorent ces risques. En Chine, par exemple, 61 % des fumeursinterrogés en 1996 pensaient que le tabac était « peu ou pas dangereux ». Dansles pays à revenu élevé, les fumeurs savent qu’ils courent des risques accrus,mais ils jugent l’importance de ces risques plus faible et moins certaine que nele font les non-fumeurs, et ils minimisent en outre l’importance des risquespour eux-mêmes.

En deuxième lieu, les individus commencent généralement à fumer durantl’adolescence ou au début de l’âge adulte. Même lorsqu’ils sont informés, lesjeunes ne sont pas toujours capables d’utiliser l’information pour prendre desdécisions judicieuses. Ils sont souvent moins au courant des risques dutabagisme pour leur santé. La plupart des nouveaux fumeurs et de ceux quisont tentés de fumer sous-estiment en outre le risque de devenir dépendants àla nicotine, et donc sous-estiment sérieusement les coûts futurs du tabagisme(ce qu’il leur en coûtera plus tard de ne pas pouvoir revenir sur la décision defumer prise dans leur jeunesse). La société reconnaît généralement que lescapacités de décision des adolescents sont limitées, et restreint leur liberté defaire certains choix, par exemple en leur refusant le droit de voter ou de semarier avant un certain âge. De même, la société peut juger bon de restreindrela liberté des jeunes de choisir de devenir dépendants à la nicotine,comportement qui s’associe à un risque de décès beaucoup plus élevé que laplupart des autres activités à risque auxquelles se livrent les jeunes.

Enfin, le tabagisme comporte des coûts pour les non-fumeurs. Étant donnéqu’une partie des coûts est supportée par autrui, les fumeurs sont peut-êtreencouragés à fumer plus qu’ils ne le feraient s’ils assumaient la totalité descoûts. Les coûts pour les non-fumeurs comprennent, bien entendu, desdommages pour la santé ainsi que les nuisances et l’irritation provenant de lafumée environnementale. De plus, les fumeurs peuvent imposer des coûts fi-nanciers à des tierces parties, coûts qui sont plus difficiles à définir et à évaluer,et varient selon le lieu et le temps, de sorte qu’on ne peut pas encore déterminercomment ils influent sur le désir de fumer plus ou moins au niveau individuel.Nous examinons néanmoins brièvement deux de ces coûts : ceux de la santépublique et des retraites.

Dans les pays à revenu élevé, les soins associés au tabagisme vont de 6 à15 % du total des dépenses annuelles de santé publique. Ces chiffres ne sontpas forcément valables pour les pays à revenu faible et intermédiaire, où les

Page 19: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

5RÉSUMÉ

épidémies de maladies attribuables au tabagisme ont atteint un stade moinsavancé et peuvent présenter d’autres différences d’ordre qualitatif. Les dépensesannuelles sont très importantes pour l’État mais, pour les consommateursindividuels, ce qui compte c’est de savoir dans quelle mesure ces dépensessont à leur charge ou à la charge des autres.

Au cours d’une année donnée, les dépenses de santé publique des fumeursdépassent en moyenne celles des non-fumeurs. Si les soins de santé sont payésen partie par la fiscalité générale, les non-fumeurs supportent alors une partiedes dépenses de la population des fumeurs. Cependant, certains experts avancentque, puisque les fumeurs meurent plus jeunes, leurs dépenses de santé sur latotalité de leur existence ne sont peut-être pas plus élevées, et pourraient mêmeêtre plus faibles, que celles des non-fumeurs. Cette question est controversée,mais certaines enquêtes menées récemment dans les pays à revenu élevémontrent qu’en définitive, bien qu’ils vivent moins longtemps, les dépenses desanté des fumeurs sont légèrement plus élevées. Quoi qu’il en soit, la mesuredans laquelle les fumeurs imposent des dépenses aux autres dépend de nombreuxfacteurs, tels que la fiscalité des cigarettes et le niveau de soins de santé assurépar la collectivité. Ces questions n’ont pas été analysées de manière fiabledans les pays à revenu faible et intermédiaire.

La question des retraites est tout aussi complexe. Certains spécialistes despays à revenu élevé soutiennent que les fumeurs « paient leur part », dans lamesure où ils cotisent aux régimes publics de retraite et meurent plus jeunes,en moyenne, que les non-fumeurs. Toutefois, la question ne se pose pas dansles pays à revenu faible et intermédiaire, où vivent la plupart des fumeurs, carpeu de gens y bénéficient d’une retraite de l’État.

En résumé, les fumeurs imposent des coûts matériels aux non-fumeurs,notamment des problèmes de santé, des nuisances et de l’irritation. Peut-êtreimposent-ils aussi des coûts financiers, mais leur étendue n’a pas encore étédéterminée.

Que faire ?

Puisque la plupart des fumeurs ne connaissent sans doute pas tous les risquesqu’ils prennent ou n’en assument pas le coût intégral, les pouvoirs publics sonten droit d’estimer qu’une intervention de leur part se justifie, principalementpour dissuader les enfants et les adolescents de fumer et pour protéger les non-fumeurs, mais aussi pour donner aux adultes les renseignements dont ils ontbesoin pour choisir en toute connaissance de cause.

Il conviendrait, de préférence, que les interventions des pouvoirs publicssoient axées sur chacun des problèmes reconnus. Par exemple, s’agissant dujugement défectueux des enfants quant aux effets nocifs du tabac, les mesuresà prendre doivent viser à mieux les informer, ainsi que leurs parents, ou à les

Page 20: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

6 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

empêcher de se procurer des cigarettes. Mais les adolescents font peu de casde l’éducation sanitaire, les parents sont rarement parfaits et les formes actuellesde limitation des ventes de cigarettes aux jeunes sont peu efficaces, mêmedans les pays à revenu élevé. En fait, le meilleur moyen de dissuader les enfantsde fumer consiste à majorer la fiscalité du tabac. Le coût empêche quelquesenfants et adolescents de commencer à fumer, et encourage les fumeurs juvénilesà réduire leur consommation.

Cependant, la fiscalité n’est pas un instrument de précision et, si on relèveles taxes sur les cigarettes, les fumeurs adultes fumeront généralement moinset paieront plus cher leurs cigarettes. Pour atteindre l’objectif consistant àprotéger les enfants et les adolescents, la fiscalité imposerait par conséquentun coût aux adultes. On peut toutefois juger ce coût acceptable, selon la valeurqu’attache la société à la prévention du tabagisme juvénile. En tout état decause, limiter la consommation des adultes pourrait avoir pour effet, à terme,de décourager encore davantage les enfants et les adolescents de fumer.

Les pouvoirs publics doivent également s’attaquer au problème de ladépendance à la nicotine. Pour les fumeurs réguliers désireux de cesser, le coûtdu sevrage est considérable. Les autorités peuvent envisager d’intervenir pouren assumer une partie dans le cadre d’un programme global de maîtrise dutabagisme.

Mesures visant à réduire la demande de tabac

Nous passons ensuite à l’examen des mesures de lutte contre le tabagisme, quenous évaluons une à une.

Majorer les taxes

On a observé dans les pays de tous les niveaux de revenu que la hausse du prixdes cigarettes est un moyen efficace de réduire la demande. Une majorationdes taxes conduit certains fumeurs à s’arrêter et empêche d’autres gens decommencer. Elle réduit également le nombre d’anciens fumeurs quirecommencent à fumer et fait baisser la consommation de ceux qui continuent.En moyenne, on compte qu’une hausse de 10 % sur le prix d’un paquet decigarettes se traduit par une baisse de la demande qui atteint 4 % dans les paysà revenu élevé et 8 % dans les pays à revenu faible et intermédiaire, où les genssont généralement plus sensibles aux variations de prix. Les enfants et les ado-lescents réagissant davantage à une hausse des prix, ce type d’interventionaurait sur eux un effet marqué.

Les modèles utilisés dans la préparation de ce rapport indiquent qu’unemajoration de la fiscalité ayant pour effet de relever de 10 % le prix réel descigarettes dans le monde entier conduirait 40 millions de fumeurs vivant en

Page 21: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

7RÉSUMÉ

1995 à cesser de fumer, et préviendrait au moins 10 millions de décès dus autabac. La hausse du prix découragerait en outre d’autres gens de commencer àfumer. Étant donné que ces modèles sont fondés sur des hypothèsesdélibérément prudentes, ces chiffres doivent être considérés comme des esti-mations minimales.

Quel est le niveau de taxation qui convient ? Comme le savent beaucoupde responsables, la question est complexe. Ce niveau dépend de faits empiriquessubtils que l’on ignore encore, notamment l’échelle des coûts pour les non-fumeurs et les niveaux de revenu. Il dépend aussi des valeurs de la société, enparticulier de la mesure dans laquelle elle estime que les enfants doivent êtreprotégés et de ce qu’elle espère accomplir par le biais de la fiscalité (par exemple,une augmentation donnée des recettes publiques ou une réduction donnée dela charge de morbidité). Pour l’instant, nous conseillons aux dirigeants désireuxde lutter contre le tabagisme de se référer aux niveaux de taxation adoptésdans le cadre de la politique générale de maîtrise du tabagisme dans les paysoù la consommation de cigarettes est tombée. Dans ces pays, les taxesreprésentent entre les deux tiers et les quatre cinquièmes du prix de vente audétail. À l’heure actuelle, les taxes imposées dans les pays à revenu élevéreprésentent en moyenne les deux tiers ou plus du prix de vente au détail d’unpaquet de cigarettes. Dans les pays à revenu moins élevé, les taxes nereprésentent pas plus de la moitié du prix au détail.

Mesures autres que la hausse des prix

Il existe toute une panoplie de méthodes efficaces, notamment l’interdictioncomplète de la publicité et des promotions ; des mesures d’information tellesque des campagnes de contre-publicité dans les médias, des mises en gardebien visibles affichées sur les paquets de cigarettes, la publication et la diffu-sion d’études sur les conséquences du tabagisme pour la santé, et des restric-tions sur le tabac au travail et dans les lieux publics.

Nous prouvons que chacune de ces mesures peut réduire la demande decigarettes. Ainsi, les informations de choc, telles que la publication d’étudesfournissant de nouvelles informations importantes sur les effets du tabac sur lasanté, réduisent la demande. Leurs effets semblent les plus nets dans les paysoù la population est relativement peu informée des risques sanitaires.L’interdiction totale de la publicité et des promotions peut réduire la demanded’environ 7 %, indiquent les études économétriques réalisées dans les pays àrevenu élevé. L’interdiction de fumer dans certains lieux est sans contestebénéfique pour les non-fumeurs, et il semble qu’elle puisse faire baisser laconsommation en général.

Selon les modèles établis pour ce rapport, les mesures ci-dessus, appliquéessimultanément dans tous les pays, pourraient convaincre quelque 23 millions

Page 22: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

8 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

de fumeurs vivant en 1995 de cesser de fumer et prévenir 5 millions de décèsimputables au tabac. Comme les estimations relatives au relèvement de lafiscalité, ces chiffres sont des minima.

Traitements de substitution et de sevrage

Le troisième type d’intervention consiste à aider ceux qui veulent cesser defumer en leur permettant de suivre un traitement de substitution nicotinique oud’autres traitements de sevrage. Les substituts nicotiniques renforcentnotablement l’efficacité des tentatives de sevrage et réduisent également lescoûts de retrait pour l’individu. Pourtant, ces substituts sont difficiles à obtenirdans de nombreux pays. Selon les modèles établis en préparation de ce rap-port, la généralisation des traitements de substitution pourrait contribuer àréduire fortement la demande.

On ignore l’effet combiné de toutes ces mesures de réduction de la demandede tabac, car les pays qui appliquent des mesures de lutte contre le tabagismeen utilisent plusieurs simultanément et il est impossible d’étudier leurs effetsisolément. Il apparaît toutefois que les interventions se renforcent mutuellement,ce qui conforte l’idée qu’il faut attaquer le tabagisme sur plusieurs frontssimultanés. Prises ensemble, ces mesures pourraient éviter des millions de décès.

Mesures visant à réduire l’offre de tabac

S’il est possible de réduire notablement la demande de tabac, en revanche, lesmesures de limitation de l’offre ont moins de chances de succès. En effet, si unfournisseur cesse ses opérations, un autre sera encouragé à prendre sa place.

La mesure extrême consistant à interdire la culture du tabac n’a pas dejustification économique, et elle est aussi irréaliste qu’hasardeuse. D’aucunsproposent de remplacer le tabac par d’autres cultures comme moyen de réduirel’offre, mais rien ne prouve que cela ferait diminuer la consommation étantdonné que les incitations à la culture du tabac sont beaucoup plus fortes quecelles des autres cultures. À défaut de réduire la consommation, la substitutiondes cultures peut être une bonne stratégie lorsqu’il faut aider les cultivateursde tabac les plus défavorisés à diversifier, dans le cadre d’un programme plusgénéral de diversification.

De même, jusqu’ici, tout tend à prouver que les restrictions commerciales,telles que l’interdiction d’importer, n’auraient guère d’effet sur la consommationmondiale de cigarettes. Les pays auront plus de chances de réussir à limiter letabagisme en adoptant des mesures efficaces de réduction de la demande et enles appliquant à égalité aux cigarettes d’importation et d’origine nationale.Dans le même ordre d’idées, il n’est pas logique de subventionner la produc-tion de tabac, comme le font principalement les pays à revenu élevé, si l’on

Page 23: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

9RÉSUMÉ

prétend suivre de bonnes politiques commerciales et agricoles. Quoi qu’il ensoit, l’élimination des subventions aurait un faible impact au niveau du prix dedétail.

S’agissant de l’offre, la répression de la contrebande a une importanceindéniable dans la réduction du tabagisme. Les mesures à prendre comprennentl’apposition de timbres fiscaux et d’avertissements bien visibles sur les paquetsde cigarettes, ainsi que l’application volontariste des règlements et de sanc-tions sévères pour décourager les contrebandiers. La limitation de la contrebandeaméliore la rentabilité de l’augmentation des taxes sur le tabac.

Les coûts et les conséquences de la lutte contre le tabagisme

Les dirigeants objectent à la lutte contre le tabagisme à plusieurs titres. Ilscraignent en premier lieu que les restrictions n’entraînent la disparitionpermanente d’emplois dans l’économie. Mais la baisse de la demande de tabacne signifierait pas une réduction du nombre total d’emplois au niveau national.Au lieu de cigarettes, les gens achèteraient d’autres biens et services, créantainsi de nouveaux emplois qui compenseraient les pertes dans le secteur dutabac. Les études réalisées pour ce rapport indiquent que, si le tabagisme baissait,la plupart des pays ne subiraient pas de perte nette d’emplois, et que certainsenregistreraient une progression nette.

Il existe toutefois un très petit nombre de pays, surtout en Afriquesubsaharienne, dont l’économie est fortement tributaire de la culture du tabac.Une réduction de la demande intérieure les affecterait peu, mais une chutemondiale de la demande provoquerait le chômage. Il serait impératif, dans cescirconstances, que l’État aide les catégories de travailleurs touchés à s’adapter,mais il convient de souligner que, même si la demande baissait sensiblement,cela prendrait au moins une génération.

Certains craignent également qu’un alourdissement de la fiscalité ne réduiseles recettes publiques. Il a été prouvé empiriquement qu’il aurait au contrairepour effet d’accroître les recettes fiscales du tabac. L’une des raisons en estque, comme les consommateurs toxicomanes ne réagissent que lentement auxhausses de prix, la baisse de la demande n’est pas proportionnelle àl’augmentation des taxes. Selon le modèle élaboré pour la réalisation de cerapport, des hausses modestes des taxes indirectes prélevées dans tous les payssur les cigarettes, atteignant en moyenne 10 %, se traduiraient par une aug-mentation d’environ 7 % des recettes fiscales procurées par le tabac, lepourcentage effectif variant suivant les pays.

Les responsables pensent également qu’une majoration de la fiscalitéstimulerait fortement la contrebande, ce qui réduirait les recettes publiquestout en permettant à la consommation de rester élevée. La contrebande est unproblème sérieux, mais nous concluons que, même lorsqu’elle se pratique à

Page 24: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

10 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

grande échelle, la hausse de la fiscalité stimule les recettes et réduit laconsommation. Par conséquent, au lieu de renoncer à augmenter les taxes, lesautorités feraient mieux de lutter contre la contrebande.

Enfin, d’aucuns objectent qu’un relèvement des taxes sur les cigarettespénaliserait particulièrement les consommateurs pauvres. Certes, les taxes envigueur sur le tabac absorbent une part plus élevée du revenu des consommateurspauvres que de celui des riches, mais ce dont les dirigeants doivent se préoccuperavant tout, c’est l’impact distributif de l’ensemble du régime fiscal et desdépenses publiques, et non pas de l’effet d’une taxe isolée. Il convient de noterque les consommateurs pauvres sont généralement plus sensibles aux haussesde prix que les consommateurs riches, si bien que leur consommation de ciga-rettes tombera plus nettement à la suite d’une augmentation des taxes, et queleur fardeau financier relatif pourra s’en trouver allégé. Pour autant, ils pourrontestimer que la perte des avantages du tabagisme est relativement plus importante.

La lutte contre le tabagisme en vaut-elle la peine ?

Les responsables qui envisagent d’intervenir doivent se demander par ailleurssi les mesures de maîtrise du tabagisme ont un rapport coût-efficacité compa-rable à celui d’autres interventions dans le domaine de la santé. On a effectuédes estimations préliminaires en préparation de ce rapport, en pondérant lescoûts publics de la mise en œuvre des programmes de maîtrise du tabagismepar le nombre potentiel d’années de vie en bonne santé économisées. Lesrésultats correspondent à ceux d’études antérieures, démontrant que la maîtrisedu tabagisme est une intervention très rentable si elle s’inscrit dans le contexted’un programme de santé publique de base dans les pays à revenu faible etintermédiaire.

Mesurée en fonction du coût par année de vie en bonne santé économisée,la majoration de la fiscalité est rentable. Selon les hypothèses retenues, le coûtde cette méthode s’élève à 5-17 dollars1 par année économisée dans les pays àrevenu faible et intermédiaire, soit moins que bien d’autres interventionssanitaires communément financées par l’État, telles que la vaccination desenfants. Les mesures autres que de prix sont elles aussi rentables dans denombreuses circonstances. Celles qui visent à libéraliser l’obtention de substitutsnicotiniques, par exemple, en modifiant les conditions de vente, seraient sansdoute d’un bon rapport coût-efficacité dans de nombreux cas. Cependant, ilappartient aux pays intéressés d’évaluer soigneusement la situation avant dedécider de subventionner les substituts nicotiniques et d’autres aides au sevrageà l’intention des fumeurs défavorisés.

On ne saurait négliger les capacités de recettes exceptionnelles de la fiscalitédu tabac. Ainsi, on estime au bas mot qu’en Chine, une hausse de 10 % destaxes sur les cigarettes réduirait la consommation de 5 %, accroîtrait les recettes

Page 25: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

11RÉSUMÉ

de 5 % et que cette augmentation suffirait à financer un programme de ser-vices de santé essentiels pour un tiers des 100 millions de Chinois les plusdémunis.

Programme indicatif d’action

C’est à chaque société de déterminer les politiques qu’elle entend suivre en cequi concerne les choix individuels. Dans la pratique, la plupart des politiquesseront fondées sur plusieurs types de critères, et non pas seulement sur descritères économiques. La plupart des sociétés souhaiteraient réduire lessouffrances et les pertes psychologiques incalculables causées par la charge demorbidité et de décès prématurés due au tabac. Pour le responsable désireuxd’améliorer la santé publique également, la maîtrise du tabagisme est une op-tion attrayante. Des réductions même modestes d’une semblable charge demorbidité se traduiraient par des progrès sanitaires très sensibles.

Certains responsables estimeront que le principal motif d’interventionconsiste à empêcher les enfants de fumer. Cependant, une stratégie qui ne viseraitqu’à dissuader les enfants serait peu rationnelle et, du point de vue de la santépublique, n’apporterait pas d’avantages substantiels avant plusieurs dizainesd’années. Sachant que la plupart des décès dus au tabac prévus pour les50 prochaines années surviendront chez les fumeurs actuels, les pouvoirs pu-blics soucieux d’améliorer la santé publique plus rapidement auront intérêt àenvisager des mesures plus générales afin d’aider les adultes à cesser de fumer.

Nous présentons deux recommandations :

1. Les pays où les pouvoirs publics décident de prendre des mesuresvolontaristes pour maîtriser le tabagisme doivent adopter une stratégiepolyvalente visant à dissuader les enfants de commencer à fumer, àprotéger les non-fumeurs et à informer tous les fumeurs des méfaitsdu tabac. Cette stratégie, qui doit être adaptée aux besoins de chaquepays, comportera : 1) une majoration de la fiscalité, fondée sur lestaux pratiqués dans les pays qui ont réussi à faire baisser laconsommation (entre les deux tiers et les quatre cinquièmes du prixde vente des cigarettes au détail) ; 2) la publication et la diffusion desrésultats des recherches effectuées sur les effets du tabac sur la santé,l’apposition de mises en garde bien visibles sur les paquets de ciga-rettes, l’interdiction totale de la publicité et des promotions, et la limi-tation du tabagisme au travail et dans les lieux publics ; et3) l’élargissement de l’accès aux substituts nicotiniques et auxtraitements de sevrage.

2. Il conviendrait que les organisations internationales, telles que lesinstitutions des Nations Unies, réexaminent leurs programmes et

Page 26: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

12 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

politiques en vigueur afin de donner la priorité à la lutte contre letabagisme, qu’elles parrainent des recherches sur les causes, lesconséquences et les coûts du tabagisme et sur la rentabilitéd’interventions données au niveau local, et qu’elles se penchent surles aspects internationaux de la lutte contre le tabagisme. Il estrecommandé, en particulier, qu’elles travaillent avec la Convention-cadre sur la lutte anti-tabac. Les grands domaines d’actioncomprennent la promotion d’accords internationaux sur la répressionde la contrebande, des pourparlers sur l’harmonisation des taxes envue de réduire les incitations à la contrebande, et l’interdiction de lapublicité et de la promotion par le canal des moyens de communica-tion mondiaux.

La menace posée par le tabagisme pour la santé publique est sans précédent,mais les opportunités de réduction de la mortalité liée à ce fléau grâce à desinterventions officielles bien conçues sont également sans précédent. Nousmontrons dans ce rapport ce qui peut être accompli, et que des interventionsrelativement limitées pourraient avoir des conséquences bénéfiques pour lasanté au XXIe siècle.

Note

1. Tous les montants en dollars sont exprimés en dollars courants des États-Unis.

Page 27: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

13

C H A P I T R E 1

Les tendances mondiales du tabagisme

VOICI des siècles que les gens s’adonnent à la consommation detabac, mais ce n’est qu’au XIXe siècle que l’on a commencé à fabriquer descigarettes en grande quantité. Depuis, l’usage de la cigarette s’est répandudans le monde entier à une échelle colossale, puisqu’un adulte sur trois, soit1,1 milliard de personnes, fume. Sur ce nombre, les quatre cinquièmes environvivent dans les pays à revenu faible et intermédiaire. On compte que, par suitede la croissance démographique et de l’augmentation de la consommation, cetotal atteindra quelque 1,6 milliard d’ici à 2025.

Autrefois, beaucoup de gens mâchaient ou fumaient le tabac au moyen depipes diverses. Ces pratiques n’ont pas disparu, mais elles sont en recul. Lescigarettes industrielles et différents types de cigarettes roulées à la main, tellesque les bidis, communes en Asie du Sud et en Inde, représentent de nos joursjusqu’à 85 % de la consommation mondiale de tabac. Étant donné que la ciga-rette semble beaucoup plus nocive pour la santé que les autres formes detabagisme, nous avons axé ce rapport sur les cigarettes industrielles et les bidis.

Augmentation de la consommation dans les paysà revenu faible et intermédiaire

La consommation de cigarettes de la population des pays à revenu faible etintermédiaire augmente depuis 1970 (figure 1.1). La consommation par habi-tant a progressé régulièrement entre 1970 et 1990, mais la tendance sembles’être ralentie légèrement depuis le début des années 90.

Page 28: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

14 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

500

1000

1500

2000

2500

3000

1970–72 1980–82 1990–92Année

Con

som

mat

ion

annu

elle

de

ciga

rette

s pa

r adu

lte (u

nité

s)

Pays développés

Pays en développement

Tous pays

FIGURE 1.1 LE TABAGISME PROGRESSE DANS LE MONDE EN DÉVELOPPEMENTTendances de la consommation de cigarettes chez les adultes

Source : Organisation mondiale de la santé. 1997. Tobacco or Health: a Global StatusReport. Genève (Suisse).

Si le tabagisme augmente chez les hommes des pays à revenu faible etintermédiaire, il est au contraire en recul chez ceux des pays à revenu élevé.Par exemple, alors qu’aux États-Unis, plus de 55 % des hommes fumaientlorsque le tabagisme a atteint son point culminant vers les années 50, au mi-lieu des années 90, ce pourcentage était tombé à 28 %. La consommation parhabitant des pays à revenu élevé dans leur ensemble a également diminué mais,dans certaines catégories, telles que les adolescents et les femmes jeunes, laproportion de fumeurs a augmenté au cours des années 90. Le tabagismedéborde donc de son cadre traditionnel, les hommes des pays à revenu élevé,pour toucher les femmes de ces pays et les hommes des régions à faible revenu.

Depuis quelques années, le commerce international de nombreux biens etservices a été libéralisé à la suite d’accords internationaux. Les cigarettesn’échappent pas à la règle. L’élimination des barrières au commerce intensifiela concurrence, ce qui se manifeste par une baisse des prix, une intensificationde la publicité et des promotions et autres activités qui stimulent la demande.Dans une étude, on faisait observer que, dans quatre économies d’Asie quiavaient ouvert leur marché sous la pression des États-Unis pendant les années 80— le Japon, la Corée du Sud, Taïwan et la Thaïlande —, la consommation de

Page 29: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

15LES TENDANCES MONDIALES DU TABAGISME

TABLEAU 1.1 RÉPARTITION RÉGIONALE DU TABAGISMEEstimations de la prévalence du tabagisme par sexe, et nombre de fumeurs dans lapopulation âgée de 15 ans ou plus, par région de la Banque mondiale, 1995

Nombre total de fumeursRégion de la Prévalence du tabagisme (%) (% desBanque mondiale Hommes Femmes Total (millions) fumeurs)Afrique subsaharienne 33 10 21 67 6Amérique latine et

Caraïbes 40 21 30 95 8Asie de l’Est et Pacifique 59 4 32 401 35Asie du Sud (cigarettes) 20 1 11 86 8Asie du Sud (bidis) 20 3 12 96 8Europe orientale et

Asie centrale 59 26 41 148 13Moyen-Orient et Afrique du Nord 44 5 25 40 3

Rev. faible et interméd. 49 9 29 933 82Revenu élevé 39 22 30 209 18Monde 47 12 29 1,142 100

Note : Les chiffres ont été arrondis.Source : Calculs effectués par les auteurs d’après Tobacco or health: a Global Status Report. Organisationmondiale de la santé. 1997. Genève, Suisse.

cigarettes par personne en 1991 était supérieure de près de 10 % à ce qu’elleaurait été si ces marchés étaient restés fermés. Selon un modèle économétriqueélaboré en préparation de ce rapport, la libéralisation du commerce asensiblement contribué à stimuler la consommation, en particulier dans lespays à revenu faible et intermédiaire.

Répartition régionale du tabagisme

L’Organisation mondiale de la santé a réuni des statistiques sur le nombre defumeurs dans chaque région en se fondant sur plus de 80 études différentes.Nous nous sommes servis de ces chiffres pour estimer la prévalence dutabagisme dans chacun des sept groupes régionaux de la Banque mondiale1.Comme on le voit au tableau 1.1, il existe de grandes variations entre les régionset, en particulier, dans la prévalence du tabagisme chez les femmes. Par exemple,en Europe orientale et en Asie centrale (principalement les anciennes économiessocialistes), 59 % des hommes et 26 % des femmes fumaient en 1995, plusque dans toute autre région. Pourtant, en Asie de l’Est et dans le Pacifique, oùla prévalence du tabagisme chez les hommes est tout aussi élevée, seules 4 %des femmes fumaient.

Page 30: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

16 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Tabagisme et statut socio-économique

Historiquement, lorsque le revenu de la population augmentait, le nombre defumeurs augmentait aussi. Durant les premières décennies de l’épidémie detabagisme, les fumeurs se trouvaient surtout parmi les gens aisés, dans lespays à revenu élevé. Depuis 30 ou 40 ans, au contraire, cette distribution sembles’être inversée, au moins chez les hommes, pour lesquels on dispose de donnéesabondantes2. De plus en plus, les hommes de milieux aisés des pays à revenuélevé cessent de fumer, mais ce n’est pas le cas chez les hommes de milieuxplus modestes. Ainsi, en Norvège, le pourcentage de fumeurs hommes à revenuélevé est tombé de 75 % en 1955 à 28 % en 1990. Pendant la même période,celui des fumeurs hommes à faible revenu a beaucoup moins baissé, puisqu’ilest passé de 60 % à 48 % seulement. Dans la plupart des pays à revenu élevé,il existe aujourd’hui des différences substantielles dans la prévalence dutabagisme entre les différents groupes socio-économiques. Au Royaume-Uni,par exemple, seuls 10 % des femmes et 12 % des hommes des groupes socio-économiques les plus élevés s’adonnent au tabac. Dans les groupes socio-économiques les plus faibles, les chiffres correspondants sont trois fois plusélevés : 35 et 40 %. On note le même rapport inverse dans le domaine del’éducation (marqueur de statut socio-économique). D’une manière générale,les individus d’un niveau d’éducation faible ou nul fument davantage que lesindividus éduqués.

Récemment encore, on pensait que la situation était différente dans lespays à revenu faible et intermédiaire, mais les dernières recherches indiquentque, là aussi, les hommes d’un niveau socio-économique faible fument plusque les autres. Le niveau d’éducation est un facteur très net à Chennai (Inde)(figure 1.2). Les études menées en Afrique du Sud, au Brésil, en Chine, au VietNam et dans plusieurs pays d’Amérique centrale confirment cette observation.

S’il est donc avéré qu’à l’échelle mondiale, la prévalence du tabagismeest plus élevée chez les gens pauvres et peu éduqués, on est moins renseignésur le nombre de cigarettes fumées quotidiennement par les différents groupessocio-économiques. Dans les pays à revenu élevé, à quelques exceptions près,les hommes défavorisés et peu éduqués consomment plus de cigarettes parjour que les hommes plus aisés et plus éduqués. Alors qu’on pourrait s’attendreà ce que les hommes pauvres des pays à revenu faible et intermédiaireconsomment moins de cigarettes que les autres, il ressort des chiffres disponiblesqu’en général, les fumeurs d’un faible niveau d’éducation consomment unnombre égal ou légèrement plus élevé de cigarettes. L’Inde est une exceptionimportante à cette règle, puisque, comme cela parait logique, les fumeursdiplômés de l’université fument plus de cigarettes, qui sont relativement pluschères, et les fumeurs peu éduqués consomment plus de bidis, qui sont bonmarché.

Page 31: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

17LES TENDANCES MONDIALES DU TABAGISME

FIGURE 1.2 LE TABAGISME EST PLUS RÉPANDU CHEZ LES GENSPEU ÉDUQUÉSPrévalence du tabagisme chez les hommes à Chennai (Inde), par niveau d’éducation

Source : Gajalakshmi, C. K., P. Jha, S. Nguyen et A. Yurekli. Patterns of Tobacco Use,and Health Consequences. Document de référence.

64 %

58 %

42 %

21 %

0 %

20 %

40 %

60 %

Illettrés <6 ans 6–12ans

>12ans

Années d'études

Prév

alen

ce d

u ta

bagi

sme

Âge et initiation au tabagisme

Les individus qui ne commencent pas à fumer pendant l’adolescence ou audébut de l’âge adulte ont peu de chances de devenir un jour fumeurs. De nosjours, l’immense majorité des fumeurs commencent avant l’âge de 25 ans,souvent pendant l’enfance ou l’adolescence (encadré 1.1 et figure 1.3). Dansles pays à revenu élevé, huit fumeurs sur dix commencent à l’adolescence.Dans les pays à revenu faible et intermédiaire pour lesquels des chiffres sontdisponibles, il apparaît que la plupart des fumeurs commencent peu après 20 ans,mais l’âge commence à diminuer. En Chine, par exemple, entre 1984 et 1996,on a noté une progression significative du nombre de jeunes hommes de 15 à19 ans qui ont commencé à fumer. On observe une baisse analogue de l’âgeauquel les jeunes commencent à fumer dans les pays à revenu élevé.

Page 32: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

18 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Chine (hommes, 1996)

Inde (hommes, 1995)

États-Unis(hommes et femmes

nés en 1952–61)

États-Unis (hommes et femmes

nés en 1910–14)

0

20

40

60

80

100

15 20 25Âge

Initi

atio

n cu

mul

ée e

n po

urce

ntag

e

FIGURE 1.3 LE TABAGISME COMMENCE TÔTRépartition cumulée de l’âge de l’initiation en Chine, aux États-Unis et en Inde

Sources : Académie chinoise de médecine préventive, 1997. Le tabagisme en Chine :Enquête nationale sur la prévalence du tabagisme. Beijing, Imprimerie scientifique ettechnologique ; Gupta, P.C., 1996. « Survey of Sociodemographic Characteristics ofTobacco Use Among 99,598 Individuals in Bombay, India, Using Handheld Comput-ers. » Tobacco Control 5:114–20, et rapports du Surgeon General des États-Unis, 1989et 1994.

L’arrêt de la cigarette dans le monde

On sait que les fumeurs commencent jeunes dans le monde entier, mais laproportion des fumeurs qui arrêtent de fumer semble varier fortement entre lespays à revenu élevé et le reste du monde, jusqu’à présent tout au moins. Dansles pays où la population est de mieux en mieux informée des méfaits du tabac,la prévalence du tabagisme diminue progressivement et on compte un nombre

Page 33: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

19LES TENDANCES MONDIALES DU TABAGISME

ENCADRÉ 1.1 COMBIEN DE JEUNES COMMENCENT-ILS À FUMER CHAQUE JOUR ?

Les individus qui commencent à fumerjeunes ont des chances de devenirgros fumeurs et ont en outre unrisque accru de mourir plus tard d’unemaladie liée au tabac. Il est donc im-portant de savoir combien d’enfants etde jeunes commencent à fumerchaque jour. Nous essayons ici derépondre à cette question.

Nous avons utilisé 1) des chiffresde la Banque mondiale sur le nombrede jeunes, garçons et filles, qui ontatteint l’âge de 20 ans en 1995 danschaque région de la Banque mon-diale, et 2) des chiffres de l’Organi-sation mondiale de la santé surla prévalence du tabagisme dans tousles groupes d’âge, jusqu’à l’âge de30 ans, dans chacune de ces régions.Pour obtenir le haut de la fourchette,nous avons supposé que le nombrede jeunes qui commencent à fumerchaque jour est un produit de 1*2 parrégion pour chaque sexe. Pour calculerle bas de la fourchette, nous avonsréduit ce ratio en fonction des estima-tions spécifiques pour la région dunombre de fumeurs qui commencentaprès l’âge de 30 ans.

Nous avons fait trois hypothèsesprudentes : 1) il n’y a pas eu de grandschangements, au cours des années,

dans l’âge moyen de l’initiation autabac. La tendance moyenne sembleêtre en baisse chez les jeunes Chinois,mais notre hypothèse signifie tout auplus que nos chiffres sont en deçà dela réalité ; 2) nous n’avons considéréque les fumeurs réguliers, excluant lenombre beaucoup plus élevé d’enfantsqui essaient la cigarette mais ne de-viennent pas fumeurs ; 3) nous avonssupposé que ceux qui fument régu-lièrement cessent rarement avant l’âgeadulte. Un nombre substantiel d’ado-lescents fumeurs réguliers arrêtent defumer dans les pays à revenu élevé,mais c’est encore une chose rare dansles pays à revenu faible et inter-médiaire.

Compte tenu de ces hypothèses,nous avons calculé qu’entre 14 000et 15 000 enfants et jeunes genscommencent à fumer chaque jourdans l’ensemble des pays à revenuélevé. Pour les pays à revenu faible etintermédiaire, la fourchette va de68 000 à 84 000. Cela signifie que,chaque jour, entre 82 000 et 99 000jeunes commencent à fumer etrisquent de s’accoutumer rapidementà la nicotine. Ces chiffres concordentavec les estimations actuelles relativesaux pays à revenu élevé.

Page 34: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

20 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

substantiel de fumeurs repentis. En revanche, seuls 2 % et 5 % des fumeurshommes respectivement avaient cessé de fumer en Chine et en Inde en 1993 et,au Viet Nam, ce pourcentage n’atteignait que 10 % en 1997.

Notes

1. Ces catégories sont présentées à l’appendice D. En résumé, ce sont les suivantes :1) Afrique subsaharienne, 2) Amérique latine et Caraïbes, 3) Asie de l’Est et Pacifique,4) Asie du Sud, 5) Europe orientale et Asie centrale (groupe qui comprend la plupartdes anciens pays socialistes), 6) Moyen-Orient et Afrique du Nord, et 7) pays à revenuélevé, soit en gros les membres de l’Organisation de coopération et de développementéconomiques (OCDE).2. Les recherches sur le tabagisme des femmes sont beaucoup plus limitées. Dans lespays où les femmes fument depuis de nombreuses décennies, le lien entre le statutsocio-économique et le tabagisme est analogue pour les femmes et pour les hommes.Ailleurs, on ne possède pas assez d’informations fiables pour tirer des conclusionsvalables.

Page 35: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

21

C H A P I T R E 2

Les conséquences du tabagisme pour la santé

L’IMPACT du tabac sur la santé a fait l’objet de nombreuses études.Notre propos n’est pas de répéter en détail ce que l’on sait, mais simplementde résumer les faits. Ce chapitre se divise en deux parties : la première consisteen un rapide examen de la dépendance à la nicotine, la deuxième en unedescription de la charge de morbidité imputable au tabac.

Le caractère addictif du tabac

Le tabac contient de la nicotine, substance dont le caractère addictif a été reconnupar les organisations médicales internationales. La dépendance tabagique fi-gure dans la Classification internationale des maladies. La nicotine remplittous les principaux critères de toxicomanie ou de dépendance, notamment laconsommation compulsive, en dépit du désir et des tentatives répétéesd’abandonner ; effets psychoactifs produits par l’action de la substance en ques-tion sur le cerveau ; et comportement motivé par les effets de renforcement dela substance psychoactive. À la différence du tabac à mâcher, la cigarette permetà la nicotine d’arriver rapidement au cerveau, quelques secondes aprèsl’inhalation, et le fumeur peut régler la dose bouffée par bouffée.

La toxicomanie peut survenir sans tarder. Chez les jeunes adolescentsrécemment initiés à la cigarette, les concentrations dans la salive de cotinine,un produit de la décomposition de la nicotine, progressent rapidement, pourrejoindre, à terme, les taux constatés chez les fumeurs établis (figure 2.1). Lestaux moyens de nicotine inhalée suffisent pour exercer un effet pharmacologique

Page 36: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

22 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

FIGURE 2.1 LES NIVEAUX D’ABSORPTION DE NICOTINE PROGRESSENTRAPIDEMENT CHEZ LES JEUNES FUMEURSConcentration de cotinine dans la salive d’un groupe de fumeuses adolescentesau Royaume-Uni

Source : McNeill, A. D. et al. 1989. « Nicotine Intake in Young Smokers: LongitudinalStudy of Saliva Cotinine Concentrations ». American Journal of Public Health 79(2):172–75.

0

50

100

150

200

250

1985 1986 1987Année

Taux

de

cotin

ine

dans

la s

aliv

e

Fumeurs en1985

Non-fumeurs en1985 ; devenusfumeurs en1986–1987

et pour aider à renforcer le tabagisme. Pourtant, nombreux sont les jeunesfumeurs qui sous-estiment leur risque de devenir toxicomanes. Entre la moitiéet les trois quarts des jeunes fumeurs américains déclarent avoir essayé aumoins une fois de s’arrêter sans succès. Les enquêtes menées dans les pays àrevenu élevé semblent indiquer que, dès l’âge de 16 ans, une proportionsubstantielle de fumeurs regrettent de fumer, mais ne pensent pas pouvoir cesser.

Bien entendu, il est possible de s’abstenir définitivement, comme c’est lecas pour les autres substances addictives, mais sans traitement de sevrage, lestaux de réussite individuels sont faibles. Selon les dernières recherches, sur100 fumeurs qui tentent de cesser de fumer seuls, 98 recommencent dansl’année.

La charge de morbidité

On compte qu’au cours de l’année à venir, le tabac aura tué quelque quatremillions de personnes dans le monde. Il est déjà responsable du décès d’un

Page 37: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

23LES CONSÉQUENCES DU TABAGISME POUR LA SANTÉ

TABLEAU 2.1 NOMBRE ACTUEL DE DÉCÈS ATTRIBUABLES AU TABACET PROJECTIONS(millions de personnes par an)

Nombre de décès dus Nombre de décès dus au tabac en 2000 au tabac projeté pour 2030

Pays développés 2 3Pays en développement 2 7

Source : Organisation mondiale de la santé. 1999. Making a Difference. Rapport sur la santé dans le monde.1999. Genève, Suisse.

adulte sur dix ; d’ici à 2030, ce chiffre atteindra probablement un sur six, soit10 millions de décès par an, ce qui fera du tabac la première cause de mortalité,surpassant cette année-là la pneumonie, les maladies diarrhéiques, la tuberculoseet les complications obstétricales combinées. Si les tendances actuelles semaintiennent, environ 500 millions de gens actuellement en vie seront un jourou l’autre victimes du tabac ; la moitié d’entre eux seront dans la force del’âge et verront leur existence abrégée de 20 ou 25 ans.

Les décès liés au tabac, autrefois limités en grande partie aux hommes despays à revenu élevé, touchent à présent les femmes de ces pays et les hommesdu monde entier (tableau 2.1). En 1990, sur trois décès attribuables au tabac,deux sont survenus soit dans les pays à revenu élevé soit dans les anciens payssocialistes d’Europe orientale et d’Asie centrale. Par contre, en 2030, sept décèsattribuables au tabac sur dix frapperont les pays à revenu faible et intermédiaire.Sur le demi-milliard de décès projetés parmi la population actuellement envie, environ 100 millions seront des hommes chinois.

La maladie survient longtemps après l’exposition au risque

Cependant, la rançon du tabagisme, sous forme de mortalité et de morbidité,n’est pas encore connue dans toute son ampleur en dehors des pays à revenuélevé, car les pathologies provoquées par le tabac peuvent prendre plusieursdizaines d’années pour se déclarer. Même lorsque le tabagisme est très répandudans une population, les dommages pour la santé peuvent rester encoreinvisibles. C’est ce que démontrent très clairement les tendances du cancer dupoumon aux États-Unis. C’est entre 1915 et 1950 que la consommation decigarettes a progressé le plus rapidement aux États-Unis, mais les taux de can-cer du poumon n’ont commencé à augmenter en flèche qu’aux environs de1945. Les taux normalisés par âge ont triplé entre les années 30 et les années 50mais, après 1955, ils ont augmenté encore plus vite : pendant les années 80,les taux avaient été multipliés par 11 par rapport à 1940.

Page 38: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

24 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

En Chine, où vivent le quart des fumeurs du monde, la consommation decigarettes atteint actuellement le même niveau qu’aux États-Unis en 1950,période où la consommation par habitant a culminé. À ce stade de l’épidémieaux États-Unis, 12 % de tous les décès survenant à l’âge moyen étaientimputables au tabac. Quarante ans plus tard, alors que la consommation decigarettes avait déjà baissé, environ le tiers des décès de cette tranche d’âgeétait dû au tabac. Aujourd’hui, dans un parallèle saisissant, on estime que letabac est la cause d’environ 12 % des décès survenant parmi les hommes d’âgemoyen en Chine. Les observateurs s’attendent à ce que cette proportion passeà un tiers d’ici quelques dizaines d’années, comme cela s’est produit aux États-Unis. Chez les jeunes Chinoises, en revanche, le tabagisme n’a pas sensiblementprogressé depuis 20 ans et la plupart des fumeuses sont des femmes plus âgées.Si les tendances actuelles se maintiennent, il est donc possible que le nombrede décès imputables au tabac chez les femmes en Chine passe de son niveauactuel d’environ 2 % du total à moins de 1 %.

Même dans les pays à revenu élevé, où la population est exposée autabagisme depuis de nombreuses décennies, il a fallu au moins 40 ans pourqu’on commence à avoir une idée claire des pathologies dues au tabac. Leschercheurs calculent l’excès de risque de mortalité des fumeurs par des étudesprospectives comparant les perspectives de santé des fumeurs et des non-fumeurs. Au début des années 70, après 20 ans de suivi, ils pensaient que lesfumeurs avaient une chance sur quatre de mourir des suites du tabagisme. À lalumière des informations les plus récentes, ils pensent à présent que cette chanceest de une sur deux.

Comment le tabac tue-t-il ?

Dans les pays à revenu élevé, des études prospectives à long terme telles que ladeuxième Étude sur la prévention du cancer de l’American Cancer Society, quia suivi plus d’un million d’Américains adultes, fournissent des élémentsd’information fiables sur la façon dont le tabac tue. Aux États-Unis, les fumeursont 20 fois plus de chances de mourir du cancer du poumon à l’âge moyen queles non-fumeurs, et trois fois plus de chances de mourir d’une pathologie cardio-vasculaire, dont l’infarctus du myocarde, les accidents vasculaires cérébraux etautres pathologies circulatoires. Étant donné la fréquence des cardiopathiesischémiques dans les pays à revenu élevé et l’excès de risque des fumeurs, untrès grand nombre sont victimes de ces pathologies, ce qui en fait la principalecause de décès liés au tabac dans ces pays. La cigarette est aussi la premièrecause de bronchite chronique et d’emphysème. Elle est également associée aucancer de divers organes (vessie, reins, larynx, bouche, pancréas, estomac, etc.).

Davantage que le nombre quotidien de cigarettes, c’est la durée de laconsommation qui est la principale variable de risque dans le cancer du poumon.

Page 39: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

25LES CONSÉQUENCES DU TABAGISME POUR LA SANTÉ

Ainsi, l’excès de risque est 100 fois supérieur pour une durée de consommationtrois fois plus longue, tandis que le risque est trois fois plus élevé seulementpour une consommation triple. Par conséquent, ceux qui commencent à fumerà l’adolescence et ne s’arrêtent pas sont ceux qui ont l’excès de risque le plusimportant.

Depuis plusieurs années, les fabricants de cigarettes commercialisent desmarques « à faible teneur en goudron » et « à faible teneur en nicotine »,caractéristiques qui font croire à de nombreux fumeurs qu’elles sont moinsdangereuses. Cependant, la différence entre le risque de décès prématuré desfumeurs de ces marques de cigarettes et les fumeurs de marques ordinaires estde beaucoup inférieure à la différence de risque entre les non-fumeurs et lesfumeurs.

L’épidémie varie dans l’espace et dans le temps

Parce que la plupart des études à long terme se sont limitées aux pays à revenuélevé, on dispose de peu de données sur les effets du tabac sur la santé dans lesautres pays. Cependant, il ressort d’études majeures menées récemment enChine et de nouvelles études réalisées en Inde que, contrairement à ce que l’onobserve dans les pays à revenu élevé comme les États-Unis et le Royaume-Uni, où l’ensemble des risques du tabagisme persistant sont à peu prèsidentiques, il en va tout autrement dans ces deux pays. Il ressort des statistiqueschinoises que les décès attribuables aux cardiopathies ischémiques formentune proportion beaucoup plus faible du nombre total de décès dus au tabac quedans les pays occidentaux, et que les maladies respiratoires et le cancer sont àl’origine de la plupart des décès. Il est à noter que la tuberculose est la caused’une minorité substantielle de décès. D’autres différences peuvent apparaîtredans d’autres populations. En Asie du Sud, par exemple, les proportions peuventêtre modifiées par la forte prévalence sous-jacente des maladies cardio-vasculaires. On voit donc qu’il importe de surveiller l’épidémie dans toutes lesrégions. Pour autant, il semble que la proportion totale de fumeurs tués par lacigarette soit généralement d’environ un sur deux dans de nombreuses popula-tions, même si le type et la répartition des pathologies varient.

Le tabagisme et le désavantage des pauvresen matière de santé

De même que le tabagisme, ses effets nocifs pour la santé sont associés à lapauvreté et à un faible niveau socio-économique. Les analyses effectuéesen préparation de ce rapport illustrent les effets du tabagisme sur la duréede vie des hommes de différents groupes socio-économiques (d’après lerevenu, la classe sociale ou le niveau d’éducation), dans quatre pays où

Page 40: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

26 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

FIGURE 2.2 L’ÉDUCATION ET LE RISQUE DE DÉCÈS ATTRIBUABLE AU TABACDécès chez les hommes d’âge moyen de niveaux d’éducation différents, Pologne,1996

Note : Les chiffres ont été arrondis.Source : Bobak, Martin, P. Jha, M. Jarvis et S. Nguyen. Poverty and Tobacco.Document de référence.

19 %

21 %22 %

28 %

9 %5 %

1 %

4 %

1 %

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

Supérieur Secondaire PrimaireNiveau d'éducation

Ris

que

de d

écès

(%)

Autres causes

Attribué au tabac mais seraitsurvenu de toutes manièresentre l'âge de 35 et 69 ans

Attribué au tabac

l’épidémie de tabagisme est établie : le Canada, les États-Unis, la Pologneet le Royaume-Uni.

En Pologne, les hommes ayant fait des études universitaires avaient, en1996, un risque de mourir à l’âge moyen de 26 %. Pour les hommes qui n’avaientfait que des études primaires, le risque était de 52 % (deux fois plus grand). Enanalysant la proportion de décès dus au tabac dans chaque groupe, les chercheursont estimé que le tabac est responsable d’environ les deux tiers de l’excès derisque des hommes du deuxième groupe. En d’autres termes, si l’on élimine letabac, l’écart de la durée de vie des deux groupes se réduirait fortement, puisquele risque de mourir à l’âge moyen tomberait à 28 % chez les hommes du groupele moins instruit, et à 20 % chez ceux du groupe le plus instruit (figure 2.2).On obtient des résultats analogues dans les autres pays étudiés, ce qui indiqueque le tabac est à l’origine de plus de la moitié de la différence dans la mortalitédes hommes adultes de statut socio-économique supérieur et ceux de statutinférieur. De même, le tabagisme contribue fortement à l’élargissement del’écart de survie dans le temps entre hommes aisés et hommes défavorisésdans ces pays (figure 2.3).

Page 41: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

27LES CONSÉQUENCES DU TABAGISME POUR LA SANTÉ

FIGURE 2.3 LE TABAGISME ET L’ÉLARGISSEMENT DE L’ÉCART DE SANTÉENTRE RICHES ET PAUVRESLa cigarette et la différence des risques de décès pour les hommes d’âge moyen entreniveaux socio-économiques favorisés et défavorisés au Royaume-Uni

Note : Au Royaume-Uni, il existe cinq niveaux socio-économiques, classés entre I (leplus élevé) et V (le plus bas). La figure examine la différence de risque entre les hommesdes groupes I et II et les hommes du groupe V dans le temps.Source : Bobak, Martin, P. Jha, M. Jarvis et S. Nguyen. Poverty and Tobacco. Docu-ment de référence.

0

5

10

15

20

25

1970–72 1980–82 1990–92

Année

Diff

éren

ce d

es ri

sque

s de

déc

ès à

l'âge

moy

en p

our l

es h

omm

es d

e ni

veau

x so

cio-

écon

omiq

ues

favo

risés

et d

éfav

oris

és (%

)

Attribuable à la cigarette

Autres causes

Les risques du tabagisme passif

Les fumeurs nuisent non seulement à leur propre santé, mais également à cellede leur entourage. Les femmes enceintes qui fument risquent davantage de perdrele fœtus par avortement spontané. Dans les pays à revenu élevé, les enfants nésde mères fumeuses ont beaucoup plus souvent un faible poids à la naissanceque les enfants des non-fumeuses, et ils ont un excès de risque de mourir peuaprès la naissance jusqu’à 35 % supérieur. Ils ont également un risque plusgrand de contracter des infections des voies respiratoires. Des chercheurs ontobservé récemment la présence d’un carcinogène trouvé exclusivement dans lafumée de tabac dans l’urine de nouveau-nés dont la mère est fumeuse.

L’exposition à la fumée de cigarette est à l’origine d’une grande partie dudésavantage sanitaire des enfants nés de femmes défavorisées. Chez les femmesblanches des États-Unis, le tabagisme est à lui seul responsable de 63 % de ladifférence de poids à la naissance entre les enfants nés de femmes ayant faitdes études supérieures et des enfants nés de femmes qui n’avaient qu’un niveaud’éducation secondaire ou inférieur.

Page 42: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

28 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Les adultes exposés chroniquement à la fumée de tabac des autres ontégalement un risque faible mais réel de cancer du poumon et des risques accrusde maladie cardio-vasculaire, tandis que les enfants de fumeurs présentent diverstroubles de santé et des limitations fonctionnelles.

Les fumeurs passifs sont les enfants et les conjoints de fumeurs,principalement au domicile familial. Par ailleurs, un nombre substantiel denon-fumeurs travaillent aux côtés de fumeurs ou dans une atmosphère enfuméeoù, avec le temps, leur exposition au risque devient assez importante.

Les bienfaits du sevrage

Plus on commence à fumer jeune, plus on court un risque de maladie débilitante.Dans les pays à revenu élevé, où l’on dispose de données à long terme, leschercheurs sont parvenus à la conclusion que ceux qui commencent tôt et fumentrégulièrement risquent davantage d’avoir le cancer du poumon que ceux quicessent encore jeunes. Au Royaume-Uni, les médecins hommes qui cessent defumer avant l’âge de 35 ans vivent à peu près aussi longtemps que ceux quin’ont jamais fumé. Pour ceux qui cessent entre 35 et 44 ans, l’arrêt est égalementtrès bénéfique, et ceux qui arrêtent plus tard y gagnent aussi.

En résumé, l’épidémie de pathologies liées au tabagisme n’est plusconcentrée parmi les hommes des pays à revenu élevé, mais affecte à présentles femmes de ces pays et les hommes des pays à revenu faible et intermédiaire.Le tabagisme est de plus en plus lié à un statut social désavantagé, en fonctiondu niveau de revenu et d’éducation. La plupart des nouveaux fumeurs sous-estiment le risque de s’accoutumer à la nicotine. Nombreux sont les jeunesfumeurs adultes qui regrettent d’avoir commencé à fumer et se jugent incapablesde cesser. La moitié des fumeurs à long terme mourront un jour d’une maladieliée au tabac, et la moitié d’entre eux mourront à l’âge moyen.

Page 43: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

29

C H A P I T R E 3

Les fumeurs savent-ils quels risques

ils courent et assument-ils leurs coûts ?

DANS ce chapitre, nous examinons ce qui pousse les gens à fumer.Le tabagisme est-il un choix de consommation comme les autres ? Permet-ild’allouer efficacement les ressources de la société ? Après avoir examiné cesquestions, nous en étudions les implications pour les pouvoirs publics.

Selon les théories de l’économie moderne, le consommateur individuelest le mieux placé pour décider comment dépenser son argent, que ce soit pouracheter du riz, des vêtements, ou pour voir un film. Ce principe de lasouveraineté du consommateur repose sur certaines hypothèses. La premièreest que le consommateur fait des choix rationnels et éclairés, après avoir peséles coûts et avantages de ses achats, et la seconde est que c’est le consommateurqui assume la totalité des coûts de sa décision. Lorsque tous les consommateursexercent leur souveraineté de cette manière, en toute connaissance de cause eten assumant les coûts, les ressources de la société sont, théoriquement, allouéesde la façon la plus efficace possible.

Manifestement, le fumeur perçoit les avantages du tabagisme, sans quoi ilne payerait pas pour fumer. Ces avantages sont le plaisir et la satisfaction, unemeilleure image de soi, une réduction du stress et, pour le fumeur dépendant,l’absence de symptômes de retrait de la nicotine. Faisant pendant à cesavantages, les coûts privés sont la dépense, les dommages pour la santé et ladépendance à la nicotine. Ainsi définis, il est bien certain que les avantagesperçus l’emportent sur les coûts perçus.

Cependant, la décision d’acheter du tabac diffère de la décision d’acheterd’autres biens de consommation à trois égards :

Page 44: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

30 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

■ On sait que beaucoup de fumeurs ne sont pas pleinement informés dela forte probabilité de morbidité et de décès prématuré qu’entraîneleur décision. C’est là le principal coût privé du tabagisme.

■ On sait également que les enfants et les adolescents ne sont pas toujourscapables d’évaluer correctement les informations qu’ils peuventposséder sur les méfaits du tabac. Tout aussi important, on sait que lesnouveaux initiés peuvent sous-estimer gravement les coûts futursassociés à la dépendance à la nicotine. On peut considérer ces coûtsfuturs comme les coûts de l’impossibilité pour le fumeur adulted’inverser la décision de fumer prise dans sa jeunesse, même s’il ledésire, parce qu’il est devenu dépendant.

■ Enfin, on sait que les fumeurs imposent des coûts à autrui, tantdirectement qu’indirectement. Les économistes supposentgénéralement que l’individu ne mesure correctement les coûts etavantages de ses choix que lorsque c’est lui qui supporte ces coûtset jouit des avantages. Si ces coûts sont supportés par autrui, ils’ensuit que le fumeur peut fumer plus qu’il ne le ferait si c’étaitlui qui supportait la totalité des coûts.

Examinons à présent les faits à l’appui de ces affirmations.

Connaissance des risques

Les gens semblent méconnaître les méfaits du tabagisme, surtout dans les paysà revenu faible et intermédiaire, où ils disposent de peu d’information à cesujet. En Chine, par exemple, 61 % des fumeurs adultes interrogés en 1995 ontdéclaré que la cigarette leur faisait « peu ou pas de mal ».

Dans les pays à revenu élevé, la population est généralement plussensibilisée aux méfaits du tabac qu’il y a 40 ans. Cependant, l’unanimitéest loin d’être faite quant à l’exactitude avec laquelle les fumeurs des paysà revenu élevé perçoivent leur risque de morbidité. Plusieurs études réaliséesdepuis une vingtaine d’années aboutissent à des conclusions contra-dictoires : selon certaines, les fumeurs surestiment les risques, selond’autres, ils les sous-estiment, ou bien encore ils en ont une idée juste. Lesméthodes employées pour réaliser ces études ont été critiquées à maintségards. Un examen récent de la documentation concernant les rechercheseffectuées indique que les fumeurs des pays à revenu élevé saventgénéralement qu’ils courent un risque de morbidité plus élevé, mais que cerisque leur paraît moins grand et moins sérieux qu’aux non-fumeurs. Deplus, même lorsque les individus ont une perception raisonnable du risqueque courent les fumeurs en tant que groupe, ils minimisent l’importancepersonnelle de cette information et pensent que les autres fumeurs sontplus en danger qu’eux.

Page 45: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

31LES FUMEURS SAVENT-ILS QUELS RISQUES ILS COURENT ?

Enfin, selon des informations recueillies dans différents pays, certainsfumeurs semblent méconnaître les risques du tabac pour la santé par opposi-tion aux autres risques de santé. En Pologne, par exemple, des chercheurs ontdemandé en 1995 à des adultes de classer les « principaux facteurs qui influentsur la santé humaine ». Le facteur le plus fréquemment cité est l’environnement,suivi par le régime alimentaire et le stress ou un mode de vie frénétique. Letabagisme, qui suit en quatrième position, n’est cité que par 27 % des adultesinterrogés. En réalité, le tabagisme est à l’origine de plus d’un tiers des risquesde décès prématuré chez les hommes d’âge moyen en Pologne, ce qui le placeloin en tête de tout autre risque.

La jeunesse, la toxicomanie et l’aptitude à prendredes décisions saines

Comme nous l’avons dit au chapitre 1, la plupart des fumeurs commencentjeunes. Or, les enfants et les adolescents sont sans doute moins bien renseignésque les adultes sur les effets du tabac sur la santé. Il ressort d’une étude menéerécemment parmi les 15-16 ans à Moscou que la moitié d’entre eux neconnaissaient aucune maladie liée au tabac ou ne pouvaient en nommer qu’uneseule : le cancer du poumon. Même aux États-Unis, où l’on s’attendrait à ceque les jeunes soient mieux informés, près de la moitié des adolescents de 13 anspensent encore aujourd’hui qu’il n’est pas très dangereux pour eux de fumer unpaquet de cigarettes par jour. Étant donné ces lacunes, il est plus difficile auxadolescents qu’aux adultes de décider en toute connaissance de cause.

De plus, les jeunes sous-estiment le risque de devenir dépendants à lanicotine, si bien qu’ils sous-estiment grossièrement le coût futur de leurtabagisme. Aux États-Unis, sur tous les élèves de classe terminale qui fumentmais pensent cesser dans les cinq années à venir, moins de deux sur cinq lefont effectivement. Les autres fument toujours au bout de cinq ans. Dans lespays à revenu élevé, environ sept fumeurs adultes sur dix disent regretter leurdécision de commencer à fumer. Selon des modèles économétriques du lienentre le tabagisme présent et le tabagisme passé, et en se fondant sur desstatistiques américaines, les chercheurs estiment que la dépendance à la nico-tine explique au moins 60 % de la consommation au cours d’une année donnée,voire même jusqu’à 95 %.

Même lorsqu’on leur a parlé des risques du tabagisme, les adolescentssont peu aptes à utiliser cette information judicieusement. Il est difficile à laplupart des adolescents de s’imaginer à 25 ans, et encore moins à 55 ans, sibien que les avertissements qu’on peut leur donner sur les ravages que le tabacpourra infliger à leur santé dans un avenir lointain n’ont guère de chances dediminuer leur désir de fumer. La plupart des sociétés savent que les jeunes sontenclins à prendre des décisions peu judicieuses, et que celle de fumer n’est pas

Page 46: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

32 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

la seule. La plupart des sociétés limitent le pouvoir des jeunes de prendrecertaines décisions, qui varient suivant les cultures. Ainsi, la majorité desdémocraties empêchent les jeunes de voter avant un certain âge ; d’autresrendent l’éducation obligatoire jusqu’à un âge donné ; et beaucoup leurinterdisent de se marier précocement. Dans la plupart des sociétés, on s’accordeà reconnaître qu’il vaut mieux attendre l’âge adulte pour prendre certainesdécisions. De même, les sociétés pourraient estimer qu’il convient de limiterle droit pour les jeunes gens de décider de devenir toxicomanes.

On peut avancer que les jeunes sont attirés par toutes sortes decomportements à risque, tels que les excès de vitesse ou la consommation degrandes quantités d’alcool en peu de temps, et que le tabagisme n’est pasdifférent. En réalité, il y a plusieurs différences. D’abord, dans la plupart despays, le tabagisme est moins strictement réglementé que la plupart des autrescomportements à risque. Les automobilistes sont généralement pénalisés pourexcès de vitesse : ils doivent payer de fortes amendes et peuvent même se voirretirer le permis de conduire. Les comportements dangereux associés à laboisson, tels que la conduite en état d’ivresse, sont également sanctionnés. Ensecond lieu, le tabagisme est beaucoup plus dangereux, à terme, que la plupartdes autres activités à risque. En extrapolant à partir des données relatives auxpays à revenu élevé, sur 1 000 jeunes de 15 ans de sexe masculin vivantactuellement dans les pays à revenu faible et intermédiaire, 125 seront tués parle tabac à l’âge moyen s’ils continuent à fumer régulièrement, et 125 autres leseront pendant la vieillesse. Par comparaison, une dizaine mourront à l’âgemoyen d’un accident de la route, une dizaine mourront de mort violente et unetrentaine mourront à cause de l’alcool, y compris par suite d’un accident de laroute ou d’un acte de violence. Enfin, peu d’autres comportements à risqueentraînent un risque de toxicomanie comme le tabagisme, de sorte qu’il estplus facile de renoncer à la plupart d’entre eux et que les adultes d’âge mur yrenoncent effectivement.

Coûts imposés à autrui

Les fumeurs imposent des coûts matériels aux autres, ainsi qu’éventuellementdes coûts financiers. Théoriquement, les fumeurs fumeraient moins s’ils tenaientcompte de ces coûts, car le niveau de consommation optimal pour la société,celui auquel les ressources sont réparties efficacement, est atteint lorsque tousles coûts sont supportés par le consommateur. Si les non-fumeurs assumentune partie des coûts, il se peut que la consommation de cigarettes soit plusforte que l’optimum social. Nous allons examiner à présent les différents typesde coûts assumés par les non-fumeurs.

En premier lieu, les fumeurs imposent des coûts sanitaires directs auxnon-fumeurs. Les effets sur la santé décrits au chapitre 2 comprennent un faible

Page 47: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

33LES FUMEURS SAVENT-ILS QUELS RISQUES ILS COURENT ?

poids à la naissance et un accroissement des risques de maladie pour les enfantsde mères fumeuses, et des maladies pour les enfants et les adultes exposés defaçon chronique à la fumée de cigarette. Les autres coûts directs sont l’irritationet les nuisances dues à la fumée, et le coût du nettoyage des vêtements et dumobilier. En outre, bien que les données soient fragmentaires, on pense qu’ilexiste un coût dû aux incendies, à la dégradation de l’environnement et à ladéforestation, en raison de la culture et du traitement du tabac et desconséquences du tabagisme.

Les données dont on dispose ne permettent pas réellement de détermineret de quantifier les coûts financiers imposés aux autres par les fumeurs. Nousn’essayons pas ici d’en fournir une estimation, mais de décrire quelques-unsdes principaux domaines où ils peuvent survenir. Nous examinerons tout d’abordle coût des soins de santé pour les fumeurs et le dossier des pensions.

Dans les pays à revenu élevé, on estime que le coût global des soins desanté qui peut être attribué au tabac représente tous les ans entre 6 et 15 % desdépenses totales de santé. De nos jours, dans les pays à revenu faible etintermédiaire, les dépenses de santé annuelles imputables au tabac sont plusfaibles, en partie parce que l’épidémie de maladies liées au tabagisme n’estpas aussi avancée, et également par suite d’autres facteurs, tels que le type demaladies liées au tabac les plus répandues et les traitements qu’elles exigent.Cependant, ces pays vont sans doute voir augmenter leurs dépenses de santépublique annuelles associées au tabac. Selon les projections effectuées pour laChine et l’Inde en préparation de ce rapport, les dépenses annuelles de santégénérées par les maladies dues au tabac absorberont dans les années à venirune plus forte proportion du produit intérieur brut (PIB) qu’elles ne le fontaujourd’hui.

Pour les dirigeants, il est essentiel de connaître le montant de ces dépenseset la proportion assumée par la collectivité, car il représente des ressourcesréelles qui ne peuvent pas être utilisées pour acheter d’autres biens et services.Pour le consommateur individuel, la question fondamentale est celle de savoirdans quelle mesure les coûts sont à sa charge ou à celle d’autrui. Encore unefois, s’il semble qu’une partie de ces coûts soit supportée par les non-fumeurs,cela encourage les consommateurs à fumer plus qu’ils ne le feraient s’ilscomptaient assumer eux-mêmes la totalité des coûts. Comme le montre l’analyseci-dessous, cependant, ces coûts sont difficiles à calculer et il n’est donc pasencore possible de tirer des conclusions sur la façon dont ils peuvent influersur les décisions de consommation des fumeurs.

Au cours d’une année donnée, le coût des soins de santé d’un fumeur estsans doute plus élevé, en moyenne, que le coût des soins d’un non-fumeur dumême âge et du même sexe. Cependant, étant donné que les fumeurs décèdentgénéralement plus jeunes que les non-fumeurs, il est possible que le coût dessoins de santé des fumeurs et des non-fumeurs soit identique sur la durée de

Page 48: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

34 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

leur vie. Les études réalisées sur le coût des soins de santé des fumeurs et desnon-fumeurs sur toute la durée de leur vie dans les pays à revenu élevéaboutissent à des conclusions divergentes. Aux Pays-Bas et en Suisse, parexemple, on a observé que les coûts étaient comparables, tandis qu’au Royaume-Uni et aux États-Unis, certaines études montrent que les dépenses de santé desfumeurs sont en fait plus élevées sur la durée de leur vie. Des études récentes,qui tiennent compte du nombre croissant de maladies attribuables au tabac et àd’autres facteurs, concluent que, dans l’ensemble, dans les pays à revenu élevé,les dépenses de santé des fumeurs sont plus lourdes que celles des non-fumeurssur la durée de la vie, bien qu’ils meurent plus jeunes. Il n’existe pas d’étudesfiables de ce type sur les dépenses de santé sur la durée de la vie dans les paysà revenu faible et intermédiaire.

Dans toutes les régions du monde, il est clair que les fumeurs qui assumentla totalité des coûts des services médicaux qu’ils reçoivent n’imposent aucuncoût à autrui, même si ces coûts sont beaucoup plus élevés que ceux des non-fumeurs. Mais une grande partie des soins de santé, surtout ceux qui sont fournisen milieu hospitalier, sont financés soit par le budget de l’État, soit par desassurances privées. Dans la mesure où les contributions à l’un ou l’autre de cessystèmes, sous forme de taxes et de primes d’assurance, ne sont pas plus fortespour les fumeurs, la hausse des frais médicaux attribuable aux fumeurs estsupportée en partie par les non-fumeurs.

Dans les pays à revenu élevé, par exemple, les dépenses de santé publiquereprésentent environ 65 % du total des dépenses de santé, soit environ 6 % duPIB. Par conséquent, si le coût net des soins de santé des fumeurs est plusélevé sur la durée de la vie, les non-fumeurs subventionnent les soins de santédes fumeurs. La nature exacte de la subvention est aussi complexe que va-riable, selon le type de couverture et la source de recettes fiscales utilisée pourrégler les dépenses publiques. Si, par exemple, l’État ne finance que les soinsde santé des plus de 65 ans, les fumeurs n’utilisent qu’une petite partie (nette)des recettes publiques, dans la mesure où beaucoup d’entre eux décèdent avant65 ans. De la même manière, si l’État finance ses dépenses de santé par destaxes sur la consommation, y compris des taxes sur les cigarettes, les fumeursn’imposent pas nécessairement de coûts aux autres. Encore une fois, la situa-tion est différente dans les pays à revenu faible et intermédiaire, où la part del’État dans le total des dépenses de santé est inférieure en moyenne à ce qu’elleest dans les pays à revenu élevé, et tourne autour de 44 % du total, soit 2 % duPIB. Cependant, plus les pays consacrent de ressources à la santé, plus la partdes dépenses totales financée par l’État augmente.

Si l’évaluation des dépenses de santé relatives des fumeurs et des non-fumeurs est complexe, le dossier des pensions s’avère au moins aussicontroversé. Selon certains observateurs, les fumeurs des pays à revenu élevécontribuent davantage que les non-fumeurs au financement des régimes

Page 49: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

35LES FUMEURS SAVENT-ILS QUELS RISQUES ILS COURENT ?

publics de retraite, car nombreux sont ceux qui cotisent jusqu’aux environs dela retraite puis décèdent avant d’avoir reçu une part substantielle des prestationsauxquelles ils auraient eu droit1. Cependant, le quart des fumeurs régulierssont tués par le tabac à l’âge moyen, et peuvent donc mourir avant d’avoirversé la totalité de leurs cotisations au régime de retraite. On ne sait pas,actuellement, si, dans l’ensemble, les fumeurs des pays à revenu élevécontribuent plus ou moins que les non-fumeurs au financement des régimespublics de retraite. Quoi qu’il en soit, ce problème n’intéresse guère les pays àrevenu faible et intermédiaire. En effet, dans les pays à faible revenu, seul unadulte sur dix a droit à une retraite de l’État et, dans les pays à revenuintermédiaire, cette proportion va du quart à la moitié de la population, selonle niveau de revenu du pays considéré.

Les fumeurs imposent incontestablement des coûts directs, tels que lesdommages pour la santé, aux non-fumeurs. Il existe probablement aussi descoûts financiers, comme les dépenses de santé, mais ils sont plus difficiles àdéterminer ou à chiffrer.

Que doivent faire les pouvoirs publics ?

Étant donné les trois problèmes que nous signalons, il semble peu probableque la plupart des fumeurs connaissent toute l’ampleur des risques qu’ilscourent, ou qu’ils assument tous les coûts associés à leur décision, de sorte queleurs choix en matière de consommation peuvent se traduire par une affecta-tion de ressources peu efficace. C’est pourquoi les pouvoirs publics peuventêtre fondés à intervenir pour modifier les incitations des consommateurs, et lesinciter à moins fumer.

La société peut estimer que le meilleur motif d’intervention pour lespouvoirs publics est de dissuader les enfants et les adolescents de fumer,étant donné la multiplicité des facteurs qui influent sur le tabagismejuvénile : manque d’information sur les dangers du tabac, risque detoxicomanie et aptitude limitée à prendre des décisions rationnelles.L’intervention des pouvoirs publics en vue d’empêcher les fumeursd’imposer des coûts physiques directs aux non-fumeurs se justifieégalement. Dans le domaine des coûts financiers, cette intervention estmoins justifiée, car la nature de ces coûts reste imprécise. Enfin, certainessociétés peuvent estimer que les autorités ont un rôle d’information à joueret doivent donner aux adultes tous les renseignements nécessaires pour qu’ilsprennent des décisions éclairées en matière de consommation.

Dans l’idéal, chaque problème devrait faire l’objet d’une interventionspécifique. Cependant, cela n’est pas toujours possible et certaines interven-tions peuvent avoir des effets plus larges. Par exemple, s’agissant du jugementdéfectueux des jeunes quant aux effets du tabac sur la santé, les mesures à

Page 50: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

36 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

prendre doivent viser à mieux les informer, ainsi que leurs parents. Mais lesadolescents font peu de cas de l’éducation sanitaire et les parents sont desagents imparfaits, qui n’agissent pas toujours pour le bien de leurs enfants. Enfait, la fiscalité, quoiqu’elle manque de précision, est le moyen le plus efficaceet le plus pratique de dissuader les enfants et les adolescents de fumer. Plusieursétudes ont démontré que ceux-ci sont moins enclins à commencer de fumer, etque leurs camarades fumeurs ont plus de chances de cesser, si le prix des ciga-rettes augmente.

Pour protéger les non-fumeurs, la mesure la plus adaptée consiste à li-miter les espaces où il est permis de fumer. Cela permet de protéger les non-fumeurs dans les lieux publics, mais ne réduirait pas leur exposition à la fuméeenvironnementale chez eux. Par conséquent, la fiscalité est un moyensupplémentaire de faire assumer par les fumeurs les coûts qu’ils imposent auxnon-fumeurs.

Eu égard aux coûts financiers imposés aux non-fumeurs, tels que le surcoûtdes soins de santé, le mécanisme le plus direct consisterait à tenir compte dutabagisme dans le système de financement des soins de santé. Par exemple, lesprimes versées par les fumeurs devraient être plus fortes que celles des non-fumeurs, ou bien les premiers pourraient être tenus d’ouvrir des comptesd’épargne santé reflétant la probabilité d’un surcoût. Dans la pratique, il estplus facile d’obtenir des fumeurs une contribution supplémentaire par le biaisde la fiscalité du tabac.

En théorie, si les taxes sur les cigarettes ont pour objet de dissuader lesenfants et les adolescents de fumer, ceux-ci devraient acquitter une taxe plusélevée que les adultes. Cette différenciation serait toutefois quasiment impos-sible à mettre en œuvre, mais un taux unique pour les enfants et les adultes,option plus réaliste, pèserait plus lourdement sur les adultes. La société peuttoutefois considérer que c’est là le prix à payer pour protéger les enfants. Deplus, si les adultes réduisent leur consommation de cigarettes, peut-être lesenfants aussi fumeront-ils moins, car on sait que la propension des enfants àfumer varie suivant que leurs parents, ou autres adultes de référence, fumentou non.

On pourrait appliquer un régime fiscal différent aux enfants et aux adultesen limitant la possibilité pour les enfants de se procurer des cigarettes.Théoriquement, ces limites aboutiraient à renchérir le prix du tabac pour lesenfants, sans affecter le prix payé par les adultes. Dans la pratique, cependant,les restrictions en vigueur dans les pays à revenu élevé ne semblent guère donnerde résultats. Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, où il serait plusdifficile d’administrer et de faire respecter ces restrictions, elles seraient en-core plus malaisées à appliquer. Pour dissuader les enfants de fumer, nouspréconisons donc le deuxième instrument, quoiqu’il soit moins bien adapté,une majoration de la fiscalité.

Page 51: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

37LES FUMEURS SAVENT-ILS QUELS RISQUES ILS COURENT ?

Comment faire face à la toxicomanie?

Non seulement la collectivité doit remédier aux inefficacités découlant desdécisions de consommation des fumeurs, mais il lui faut également s’attaquerau problème de la toxicomanie. C’est en effet à cause d’elle que les adultesdésireux de revenir sur une décision prise, la plupart du temps, dans leurjeunesse, doivent supporter des coûts élevés. La société peut choisir d’aiderles fumeurs à réduire ces coûts par différents moyens, notamment en améliorantl’accès à l’information, de manière à faire prendre conscience aux fumeurs dece qu’il leur en coûte de continuer et de ce qu’ils gagneraient à cesser, et enélargissant l’accès aux traitements de sevrage, afin d’abaisser les coûts del’opération. Certes, le relèvement des taxes encourage certains fumeurs à cesser,mais il leur impose également des coûts, à savoir la perte des avantages perçusdu tabagisme et les coûts physiques additionnels associés au retrait de la nico-tine. La collectivité peut réduire ces coûts en aidant les fumeurs à suivre destraitements de sevrage. Nous examinons plus en détail la question des coûts deretrait au chapitre 6. Pour les enfants qui ne sont pas encore dépendants à lanicotine, la fiscalité est une arme efficace, car la décision de ne pas fumer nes’accompagnerait pas de coûts de retrait.

Dans les chapitres suivants, nous étudions tour à tour des mesures qui ontdéjà été appliquées dans certains pays pour maîtriser le tabagisme. Au chapitre 4,nous abordons les mesures visant à réduire la demande de tabac et, au chapitre 5,nous évaluons celles qui tentent d’en réduire l’offre.

Note

1. Même si les fumeurs réduisent les coûts nets imposés aux autres en décédant jeunes,il serait spécieux d’affirmer que ces décès prématurés sont souhaitables, car celareviendrait à dire que l’absence d’adultes plus âgés est bonne pour la société.

Page 52: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication
Page 53: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

39

C H A P I T R E 4

Réduire la demande de tabac

LES pays qui ont réussi à maîtriser le tabagisme combinentdifférentes méthodes. Nous les examinons les unes après les autres et nousrésumons les faits démontrant leur efficacité.

Majorer la fiscalité des cigarettes

Depuis des siècles, on considère le tabac comme l’une des meilleures sourcesde recettes fiscales parmi les produits de consommation : ce n’est pas un ar-ticle de première nécessité, il est largement consommé et sa demande estrelativement peu élastique, ce qui en fait une source de recettes publiques sûreet facile à administrer. Adam Smith écrivait en 1776 dans La Richesse desnations qu’une telle taxe permettrait de « soulager les pauvres de quelques-unes des taxes les plus lourdes ; celles qui frappent soit les nécessités del’existence, soit les biens manufacturiers ». Une taxe sur le tabac, soutenaitSmith, offrirait aux pauvres la possibilité « de vivre mieux, de travailler pourmoins cher et d’envoyer des biens à moindre prix sur le marché1 ». La demandepour leur travail augmenterait, améliorant ainsi leur revenu et profitant à toutel’économie.

Deux siècles après, presque tous les pays taxent le tabac, parfoislourdement, par toutes sortes de méthodes. Ils sont presque toujours motivéspar le désir de se procurer des recettes mais, depuis quelques années, ilscherchent de plus en plus à réduire les dangers de la cigarette pour la santé.

Page 54: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

40 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Dans ce chapitre, nous étudions comment la hausse de la fiscalité influesur la demande de cigarettes et autres produits du tabac. Nous concluons quel’augmentation des impôts ne réduit pas sensiblement la consommation de tabac.Il est important de noter qu’un relèvement des taxes exerce sans doute des effetsplus marqués sur les jeunes, qui sont plus sensibles aux hausses de prix queleurs aînés. Fait également important, il ressort de notre analyse quel’alourdissement de la fiscalité réduirait surtout la demande de tabac dans lespays à revenu faible et intermédiaire, où les fumeurs réagissent plus aux aug-mentations de prix que ceux des pays à revenu élevé. Cependant, même si lademande baisse, il ne s’ensuit pas que les recettes publiques soient affectées.De fait, comme nous le montrerons au chapitre 8, sur le moyen et court terme,le relèvement des taxes peut se traduire par un accroissement notable des recettes.

Nous récapitulons d’abord les types de taxes sur le tabac les pluscouramment utilisés et nous évaluons l’effet des hausses de prix sur la demande.Nous comparons les chiffres relatifs aux pays à revenu faible et intermédiaireà ceux des pays à revenu élevé, et nous examinons les implications de nosobservations pour les pouvoirs publics.

Les types d’impôts sur le tabac

Ils prennent plusieurs formes. Les impôts spécifiques sur le tabac, représentantun montant fixe ajouté au prix des cigarettes, offrent le maximum de souplesseet permettent aux gouvernements de majorer l’impôt tout en limitant la mesuredans laquelle les fabricants peuvent agir pour que le coût total pour leconsommateur reste faible. Les taxes ad valorem, telles que les taxes à la valeurajoutée ou les taxes sur les ventes, représentent un pourcentage du prix de baseet sont appliquées par la quasi-totalité des pays, souvent en sus de l’impôtspécifique. Les taxes ad valorem peuvent être appliquées au point de vente ou,comme dans beaucoup de pays africains, sur le prix de gros. Elles peuventvarier suivant le lieu de fabrication ou le type de produit. Par exemple, certainsgouvernements taxent plus lourdement les cigarettes étrangères ou à forte teneuren goudron. De plus en plus de pays affectent les recettes fiscales du tabac auxactivités de lutte contre le tabagisme ou à d’autres activités spécifiques. Dansl’une des plus grandes villes chinoises, Chongqing, et plusieurs États des États-Unis, les autorités réservent une partie des recettes des impôts sur le tabac àdes campagnes d’éducation sur les effets du tabac, à des contre-offensivespublicitaires et autres activités de lutte contre le tabagisme. D’autres paysaffectent ces recettes aux services de santé publique.

Le montant des taxes varie suivant les pays (figure 4.1). Dans les pays àrevenu élevé, les taxes représentent les deux tiers ou plus du prix de vente audétail du paquet de cigarettes. Dans les pays à faible revenu, en revanche, lestaxes ne constituent pas plus de la moitié du prix au détail.

Page 55: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

41RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

FIGURE 4.1 MOYENNE DU PRIX DES CIGARETTES ET DES TAXES, ET TAXESEN POURCENTAGE DU PRIX DU PAQUET, PAR CATÉGORIE DE REVENU(NOMENCLATURE DE LA BANQUE MONDIALE, 1996)

Source : Calculs des auteurs.

0,00

0,50

1,00

1,50

2,00

2,50

3,00

3,50

Revenuélevé

Revenue intermédiaire(tranche supérieure)

Revenu intermédiaire(tranche inférieure)

Faiblerevenu

Pays par catégorie de revenu

Moy

enne

du

prix

ou

des

taxe

s pa

r paq

uet (

USD

)

0

10

20

30

40

50

60

70

80

Taxe

s en

pou

rcen

tage

du

prix

Prix moyen en USDTaxe moyenne en USDTaxe en pourcentage du prix

L’effet de l’augmentation des taxes sur la consommation decigarettes

L’une des lois fondamentales de l’économie veut qu’à mesure que le prix d’unproduit augmente, sa demande baisse. Autrefois, les chercheurs affirmaientqu’en raison du caractère addictif du tabac, celui-ci ferait exception à la règle :les fumeurs, selon eux, sont tellement dépendants au tabac qu’ils paierontn’importe quel prix pour continuer à fumer la quantité de cigarettescorrespondant à leurs besoins. Cependant, un nombre croissant d’étudesindiquent que cet argument est faux et que, bien que la demande de tabac soitpeu élastique, elle n’en est pas moins très sensible au prix. Au Canada, parexemple, les hausses de la fiscalité intervenues entre 1982 et 1992 ont fortementmajoré le prix réel des cigarettes et la consommation a sensiblement baissé(figure 4.2a). De même, la hausse des taxes a réduit la consommation de ciga-rettes en Afrique du Sud, (figure 4.2b), au Royaume-Uni et dans plusieurs autrespays. Tous les chercheurs ont constaté que les augmentations de prixencouragent certains fumeurs à cesser, qu’elles empêchent d’autres personnes

Page 56: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

42 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

FIGURE 4.2 LE PRIX DES CIGARETTES ET LA CONSOMMATION ÉVOLUENT ENSENS INVERSE4.2a Le prix réel des cigarettes et la consommation annuelle par habitant, Canada,1989–1995

Note : Consommation calculée d’après les chiffres de vente.Sources : 4.2a : Calculs des auteurs. 4.2b : Saloojee, Yussuf. 1995. « Price and In-come Elasticity of Demand for Cigarettes in South Africa », dans Slama, K., directeurde publication, Tobacco and Health. New York, NY: Plenum Press ; et Townsend, Joy.1998. « The Role of Taxation Policy in Tobacco Control », dans Abedian, I., et al.,directeurs de publication. The Economics of Tobacco Control. Le Cap (Afrique du Sud) :Centre de recherche fiscale appliquée, Université du Cap.

0

1

2

3

4

5

6

7

1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995

Prix

réel

du

paqu

et (U

SD)

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

Con

som

mat

ion

annu

elle

par

hab

itant

(paq

uets

)

Prix réel Consommation

Réduction des taxespour faire échec à

la contrebande

4.2b Le prix réel des cigarettes et la consommation annuelle par adulte (15 ans et plus),Afrique du Sud, 1970–1989

0,05

0,06

0,07

0,08

0,09

1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988Année

Con

som

mat

ion

annu

elle

par

adu

ltes

(paq

uets

)

0,7

0,8

0,9

1

1,1

1,2

1,3

Prix

réel

Consommation paradulte

Prix réel

Page 57: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

43RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

de commencer et qu’elles réduisent le nombre d’anciens fumeurs quirecommencent à fumer.

L’effet de la toxicomanie sur la sensibilité à la hausse des prix

Les modèles établis pour calculer l’impact de la dépendance à la nicotine surles effets de la hausse des prix se fondent sur différentes hypothèses quant àl’attitude des fumeurs au sujet des conséquences de leurs actes. Cependant,tous les modèles sont d’accord sur le fait que, pour une substance addictive telleque la nicotine, le niveau de consommation d’un individu à un moment donnéest déterminé par son niveau de consommation antérieur, ainsi que par le prixdu produit au moment considéré. Ce lien entre la consommation passée et laconsommation actuelle a des implications importantes pour la modélisation del’impact des hausses de prix sur la demande de tabac. Si les fumeurs sontdépendants, ils réagissent relativement lentement aux hausses de prix, mais leurréaction est plus accentuée sur le long terme. Selon les recherches économiques,une augmentation réelle et permanente du prix a sur la demande un impactenviron deux fois plus important sur le long terme que sur le court terme.

Les variations des réactions aux hausses de prix dans les paysà faible revenu et dans les pays à revenu élevé

Lorsque le prix d’un bien augmente, les consommateurs des pays à faible revenusont généralement plus enclins à réduire leur consommation de ce bien queceux des pays à revenu élevé et, inversement, lorsque le prix baisse, ils sontplus enclins à accroître leur consommation. La mesure dans laquelle la demandedes consommateurs pour un bien varie en fonction du prix est dénommée« l’élasticité-prix de la demande ». Par exemple, si une hausse du prix de 10 %fait tomber la demande de 5 %, l’élasticité de la demande est de –0,5. Plus lesconsommateurs sont sensibles aux prix, plus l’élasticité de la demande est forte.

Les estimations de l’élasticité varient d’une étude à une autre, mais il estraisonnablement prouvé que la demande est plus élastique dans les pays àrevenu faible et intermédiaire que dans les pays à revenu élevé. Aux États-Unis, par exemple, les chercheurs ont noté qu’une hausse de 10 % du prixd’un paquet de cigarettes fait baisser la demande de 4 % (élasticité de –0,4).Selon des études réalisées en Chine, une augmentation de prix de 10 % réduitdavantage la demande que dans les pays à revenu élevé. Les estimations del’élasticité vont de –0,6 à –1,0 selon les études. Les chercheurs ont obtenu desordres de grandeur analogues au Brésil et en Afrique du Sud. Pour l’ensembledes pays à revenu faible et intermédiaire, il semble donc raisonnable d’estimerque, sur la base des chiffres dont on dispose, l’élasticité moyenne de la demandeest de –0,8.

Page 58: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

44 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

D’autres raisons font que les habitants des pays à faible revenu réagissent defaçon plus marquée à la hausse du prix des cigarettes que ceux des pays à revenuélevé. En particulier, la pyramide des âges de la plupart des pays à faible revenuest plus jeune et les recherches effectuées dans les pays à revenu élevé indiquentque, dans l’ensemble, les jeunes sont plus sensibles aux prix que leurs aînés, enpartie parce que leur revenu disponible est plus faible, ou que certains peuventavoir une dépendance moins forte à la nicotine, que leur comportement est plusaxé sur le présent et qu’ils sont sensibles à l’influence de leurs pairs. C’est pourquoisi un jeune cesse de fumer parce qu’il n’en a plus les moyens, il est plus probableque ses camarades en fassent autant que dans les groupes d’âge plus élevés. Selonune étude réalisée par les Centers for Disease Control des États-Unis, l’élasticitéde la demande s’élève à –0,6 chez les jeunes adultes de 18 à 24 ans aux États-Unis, soit plus que pour l’ensemble des fumeurs. Les chercheurs en concluentque lorsque les cigarettes sont chères, non seulement plus de jeunes fumeurss’arrêtent de fumer, mais en outre moins de jeunes commencent.

Les chiffres dont on dispose actuellement permettent donc de tirer deuxconclusions claires : d’une part, les majorations fiscales sont un moyen trèsefficace de réduire la consommation de tabac dans les pays à revenu faible etintermédiaire et, d’autre part, l’effet de ces majorations est plus marqué dansces pays que dans les pays à revenu élevé.

L’impact potentiel des augmentations d’impôtssur la demande mondiale de tabac

Aux fins de ce rapport, des chercheurs ont modélisé l’impact potentiel d’unéventail de hausses fiscales sur la demande mondiale de cigarettes. L’élaborationdu modèle et les paramètres utilisés sont décrits dans l’encadré 4.1. Leshypothèses sur lesquelles il repose, concernant l’élasticité-prix, les effets surla santé et d’autres variables, sont très prudentes, de sorte que les résultats sontsans doute en deçà des potentialités. Le modèle révèle qu’une augmentation deprix même modeste pourrait avoir un impact majeur sur la prévalence dutabagisme et sur le nombre de décès prématurés dus au tabac parmi les fumeursvivant en 1995. Les chercheurs calculent que, si le prix des cigarettes enregistraitune hausse réelle durable de 10 % par rapport au prix moyen estimatif danschaque région, 40 millions de gens cesseraient de fumer dans le monde, et unnombre encore plus élevé de gens qui auraient fumé y renonceraient. Tous lesfumeurs repentis n’éviteraient pas de décéder du tabagisme, mais le nombrede décès prématurés qui seraient évités n’en demeure pas moins extraordinaireà tous égards : 10 millions de décès, soit 3 % de tous les décès liés au tabac,seraient évités grâce à cette seule hausse des prix. Neuf des 10 millions dedécès évités intéresseraient les pays en développement, et 4 millions l’Asie del’Est et le Pacifique (tableau 4.1).

Page 59: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

45RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

ENCADRÉ 4.1 COMMENT ESTIMER L’IMPACT DES MESURES DE LUTTE

SUR LA CONSOMMATION MONDIALE DE TABAC : LES PARAMÈTRES DU MODÈLE

Les chercheurs ont d’abord pris desestimations du chiffre de la populationdans chaque région, ventilées pargroupe d’âge et par sexe, en se ser-vant des projections types de laBanque mondiale pour ses septrégions (voir appendice C). Ensuite, ilsont estimé la prévalence du tabagismepar sexe pour chacune des septrégions, au moyen d’une compilationportant sur plus de 80 études relativesà des pays spécifiques, utilisée parl’Organisation mondiale de la santé(les chiffres figurent au tableau 1.1 duchapitre 1). Dans le cas de l’Inde, oùbeaucoup de gens fument des bidisau lieu de cigarettes, on s’est servid’études locales pour calculer laprévalence de ces deux types detabagisme. Dans un troisième temps,en se basant sur les chiffres dis-ponibles, l’équipe a estimé le profild’âge des fumeurs de chaque région,en extrapolant à partir d’études degrande envergure menées dans despays particuliers, et elle a estimé lerapport des fumeurs adultes auxfumeurs jeunes. La quatrième étapea consisté à estimer le nombre totalde fumeurs et le nombre de décèsattribuables au tabac, par région, parsexe et par âge. Pour cela, les cher-cheurs ont supposé que, dans les paysdéveloppés, seul un fumeur sur troisfinit par être victime du tabac. C’estune hypothèse prudente, puisque

cer taines études réalisées auRoyaume-Uni, aux États-Unis etailleurs indiquent que le rapport est enréalité d’un sur deux. En outre, cetteestimation est probablement en des-sous de la réalité, car les dernierschiffres en provenance de Chinelaissent à penser que la proportion defumeurs victimes du tabac sera bientôtégale à celle qu’on observe dans lespays occidentaux.

Ensuite, les chercheurs ont estiméle nombre quotidien de cigarettes oude bidis fumées par chaque fumeurdans chacune des régions, en se fon-dant sur les chiffres de l’OMS et surdiverses études épidémiologiquespubliées. Ils ont aussi effectué uneestimation du nombre de cigarettes oude bidis fumées par les adultes et parles jeunes de chaque région pourobtenir le ratio de consommationquotidienne entre adultes et jeunes.

Les chercheurs ont alors essayé dejuger l’élasticité-prix de la demande decigarettes dans chaque région, aumoyen des chiffres fournis dans plusde 60 études. Pour les pays où plusd’une étude avait été effectuée, ils ontfait la moyenne des résultats obtenus.Ils ont combiné les chiffres pourtrouver les moyennes des régions àfaible revenu et à revenu élevé. Ceschiffres ont en outre été pondérés parl’âge, puisque les jeunes réagissentdavantage aux prix que leurs aînés.

(suite page suivante)

Page 60: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

46 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Ils ont trouvé que l’élasticité-prix àcourt terme était assez faible dans lespays à revenu élevé (–0,4), tandisqu’ils ont obtenu une élasticité de–0,8 dans les pays à faible revenu.

Les chercheurs ont supposé que,conformément aux conclusions d’uneimportante étude, la moitié de l’effetde la hausse des prix influerait sur lenombre de fumeurs, et l’autre moitiésur le nombre de cigarettes fuméespar ceux qui continueraient à fumer.Conformément aux observationsd’autres chercheurs, ils ont supposéque les jeunes fumeurs repentisauraient plus de chances d’éviter un

ENCADRÉ 4.1 (suite)

TABLEAU 4.1 NOMBRE POTENTIEL DE FUMEURS QUI CESSERAIENTDE FUMER ET NOMBRE DE VIES ÉPARGNÉES PAR UNE HAUSSEDES PRIX DE 10 %Effet sur les fumeurs vivant en 1995, par région de la Banque mondiale (millions)

Variation du nombre Variation du nombreRégion de fumeurs de décès

Afrique subsaharienne –3 –0,7Amérique latine et Caraïbes –4 –1,0Asie de l’Est et Pacifique –16 –4Asie du Sud (cigarettes) –3 –0,7Asie du Sud (bidis) –2 –0,4Europe orientale et Asie centrale –6 –1,5Moyen-Orient et Afrique du Nord –2 –0,4Revenu faible et intermédiare –36 –9Revenue élevé –4 –1Monde –40 –10

Note : Les chiffres ont été arrondis.Source : Ranson, Kent, P. Jha, F. Chaloupka et A Yurekli. Effectiveness and Cost-effectiveness of Price In-creases and Other Tobacco Control Policy Interventions. Document de référence.

décès attribuable au tabac que les plusâgés et que le risque de décès lié autabac persisterait pour tous ceux quicontinueraient à fumer, même s’ilsréduisaient leur consommation.

Toutes les variables du modèle ontété soumises à des analyses desensibilité pour tenir compte de l’incer-titude, dans une fourchette de 75 à125 % des valeurs de référenceutilisées dans les calculs. Il convient desouligner que les hypothèses surlesquelles repose le modèle sonttoutes de caractère prudent et que, parconséquent, les résultats sont pro-bablement en dessous de la réalité.

Page 61: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

47RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

Comment calculer le niveau de taxation optimal des cigarettes ?

On a maintes fois essayé de décider quel était le « juste » niveau de taxationdes cigarettes. Pour parvenir à une décision, les responsables doivent être enpossession de certains faits empiriques, dont certains ne sont peut-être pasencore connus, tels que l’ampleur des coûts pour les non-fumeurs. Ce niveaudépend également des revenus et d’hypothèses formulées compte tenu de valeursqui diffèrent entre les sociétés. Par exemple, dans certaines sociétés, la protec-tion des enfants a plus d’importance que dans d’autres.

D’un point de vue économique, le niveau optimal de fiscalité est celuiqui égalise le coût social marginal de la dernière cigarette consommée etses avantages marginaux pour la société. Toutefois, comme nous l’avonsvu au chapitre précédent, on ne connaît pas l’ampleur des coûts et desavantages pour la société, qui est presque impossible à mesurer et fait l’objetactuellement de multiples controverses. Rares sont ceux qui doutent queles fumeurs imposent des coûts physiques aux non-fumeurs qui sont obligésd’aspirer leur fumée, les enfants et les conjoints des fumeurs supportant lamajorité du fardeau du tabagisme passif. Cependant, la famille étant, auxyeux de certains économistes, l’unité fondamentale de prise de décisionsdans la société, ceux-ci considèrent l’exposition des conjoints et des enfantsà la fumée de tabac comme un coût interne, dont la famille tient comptedans les décisions sur le tabagisme, et non pas comme un coût externeimposé à autrui par les fumeurs. Parallèlement, comme nous l’avons vu,l’ampleur des autres coûts, tels que ceux des soins de santé pris en chargepar la collectivité dans le traitement des maladies liées au tabagisme, estdifficile à mesurer. Les études effectuées aux États-Unis, dans lesquelleson s’efforce de calculer le niveau optimal de fiscalité pour l’économie,aboutissent à une large fourchette d’estimations, qui vont de quelques centsà plusieurs dollars.

Une autre méthode consiste à fixer un taux de fiscalité qui produise unpourcentage donné de réduction de la consommation de cigarettes, c’est-à-dire qui vise à réaliser un objectif de santé publique donné, laissant de côté laquestion des coûts sociaux du tabac. On peut encore calculer le niveau de taxa-tion de manière à maximiser les recettes publiques produites par ce type defiscalité relativement efficace.

Au lieu de faire des suggestions sur le niveau optimal de taxation, nousproposons une approche plus pragmatique : observer le niveau de la fiscalitéen vigueur dans les pays qui ont adopté des mesures efficaces et de grandeenvergure pour maîtriser le tabagisme. Dans ces pays, les taxes représentententre les deux tiers et les quatre cinquièmes du prix de vente au détail du paquetde cigarettes. On peut utiliser ces niveaux comme repères pour fixer des haussesde prix proportionnelles dans les autres pays2.

Page 62: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

48 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Mesures de réduction de la demande autres que les prix :information des consommateurs, interdiction de la publicitéet des promotions et restrictions sur le tabagisme

Dans les pays à revenu élevé, on a observé que, si l’on informait lesconsommateurs adultes sur la nature addictive du tabac et sur sa charge demortalité et de morbidité, cela pouvait les aider à réduire leur consommationde cigarettes. Nous analysons ici ce que l’on sait sur l’efficacité de différentstypes d’informations de ce genre, y compris des recherches sur les méfaits dutabagisme qui ont été rendues publiques, des mises en garde affichées sur lespaquets de cigarettes et sur les publicités et des contre-offensives publicitaires.Nous résumerons également ce que l’on sait sur les effets de la publicité et desactivités de promotion du tabac, et sur ce qui se produit lorsque ces activitéssont interdites. Étant donné que ces différents types d’information sont souventprésentés simultanément aux consommateurs, il est difficile de distinguer l’effetqu’ils peuvent avoir séparément, mais les indications accumulées au fil desans dans les pays à revenu élevé donnent à penser que chacun peut avoir unimpact substantiel. Il est important de noter que cet impact semble varier selonles groupes sociaux. D’une manière générale, les jeunes semblent moinssensibles que leurs aînés aux informations concernant les effets du tabac sur lasanté, et les gens plus instruits réagissent plus rapidement aux nouvelles infor-mations que les gens peu ou pas instruits. Il est bon que les dirigeants aientconnaissance de ces différences lorsqu’ils préparent un programmed’intervention adapté aux besoins de leur pays.

La diffusion des résultats des études sur les effets du tabagismesur la santé

La tendance longue à la baisse de la prévalence du tabagisme notée dans lespays à revenu élevé depuis une trentaine d’années coïncide avec une tendancelongue à la hausse du niveau de connaissance des effets nocifs du tabac parmila population. En 1950, aux États-Unis, seuls 45 % des adultes savaient que lacigarette était un facteur de cancer du poumon. En 1990, cette proportion étaitpassée à 95 %. Sur la même période, en gros, la proportion d’Américainsfumeurs est tombée de plus de 40 % à environ 25 %.

À maintes occasions, la population des pays à revenu élevé a reçu des« informations de choc » sur les méfaits du tabac, lors de la publication derapports officiels largement médiatisés, par exemple. On a étudié leur impactdans des pays aussi divers que l’Afrique du Sud, les États-Unis, la Finlande, laGrèce, le Royaume-Uni, la Suisse et la Turquie. En règle générale, les résultatssont le plus évidents et le plus durables dans les pays où l’épidémie de mala-dies liées au tabagisme en est à un stade relativement peu avancé et où les

Page 63: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

49RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

risques du tabagisme pour la santé sont peu connus. Plus la population estsensibilisée, moins les nouvelles informations de choc sont efficaces.

Selon une analyse réalisée aux États-Unis sur la base de donnéeschronologiques allant des années 30 à la fin des années 70, trois vaguesd’informations de choc, dont la publication en 1964 d’un important rapport duSurgeon General, ont provoqué une réduction de la consommation qui seraitallée jusqu’à 30 % sur l’ensemble de la période. Plus récemment, il ressortd’études effectuées dans plusieurs pays à revenu élevé que la diffusiond’informations sur les effets du tabac sur la santé se traduit par une baissesoutenue de la consommation. Aux États-Unis, par exemple, entre 1960 et 1994,les parents ont réduit leur consommation de cigarettes beaucoup plus rapidementque les adultes célibataires vivant sans enfants. Les chercheurs en ont concluqu’une meilleure connaissance des risques du tabagisme passif pour leursenfants a conduit les parents à fumer moins.

Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, il n’y a guère eu à ce jourde recherches visant à suivre l’impact des informations de choc. En Chine,cependant, où viennent d’être publiées d’importantes études sur les effets de lacigarette sur la santé, on a commencé à suivre les tendances du tabagisme.Pour pouvoir publier des données décrivant les conséquences du tabagisme,on doit évidemment commencer par en recueillir. Des mesures prises récemmenten Afrique du Sud et en Inde pour compter les « victimes du tabac », selon uneméthode peu coûteuse qui consiste à noter sur le certificat de décès si le défuntfumait ou non, devraient fournir les données dont on a besoin pour décrire laforme et l’ampleur de l’épidémie de tabagisme dans chaque région.

Les mises en garde imprimées

Même dans les pays où les consommateurs peuvent se renseigner assezfacilement sur les effets de la cigarette sur la santé, les faits laissent à penserque l’information est souvent mal comprise, en raison notamment de la façondont les cigarettes sont conditionnées et étiquetées. Par exemple, depuis unevingtaine d’années, les fabricants produisent des marques de cigarettes dites« à faible teneur en goudron » et « à faible teneur en nicotine ». Dans les paysà revenu élevé, nombreux sont les fumeurs qui croient que ces marques sontmoins nocives, quand bien même les rapports de recherche concluent que lacigarette sans danger n’existe pas. Les études ont montré que beaucoup deconsommateurs ne savent pas ce que contient la fumée de tabac, et que lesemballages ne fournissent pas suffisamment de renseignements sur les produitsqu’ils achètent.

Depuis le début des années 60, de plus en plus de gouvernements imposentaux fabricants d’afficher sur leurs produits des mises en garde contre les dan-gers de la cigarette. En 1991, ces mises en garde étaient obligatoires dans 77 pays,

Page 64: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

50 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

FIGURE 4.3 UNE MISE EN GARDE EXPLICITEPrototype d’emballage générique proposé pour les cigarettes en Australie

Source : Institut de médecine. Growing Up Tobacco Free: Preventing Nicotine Addic-tion in Children and Youths. 1994. National Academy Press. Washington.

mais rares étaient les pays qui exigeaient des avertissements précis et unealternance des messages communiqués, tels que ceux qu’illustre la figure 4.3.

En Turquie, une étude montre que les mises en garde ont fait tomber laconsommation d’environ 8 % en six ans. En Afrique du Sud, l’adoption d’unemise en garde sévère en 1994 a été suivie d’une baisse sensible de laconsommation. Plus de la moitié (58 %) des fumeurs interrogés pour cetteétude ont déclaré que les avertissements affichés sur les paquets de cigarettesles avaient incités à cesser de fumer ou à fumer moins. Malheureusement, cesavertissements ont pour gros défaut qu’ils ne touchent pas certains individusparticulièrement démunis, surtout les enfants et les adolescents des pays à faiblerevenu, qui achètent souvent leurs cigarettes à l’unité plutôt que par paquets.

D’aucuns affirment que, parmi les populations mieux informées, où letabagisme se pratique communément depuis plusieurs dizaines d’années, lesmises en garde placées sur les paquets de cigarettes risquent de ne guère avoird’effet. Pourtant, on a constaté en Australie, au Canada et en Pologne que cesmises en garde pouvaient rester efficaces, à condition qu’elles soient impriméesen gros caractères bien visibles et qu’elles contiennent des informations brutales

Page 65: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

51RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

et précises. En Pologne, on a constaté à la fin des années 90 que les nouvellesmises en garde, qui occupent 30 % de la surface de chacun des deux plus grandscôtés des paquets de cigarettes, sont fortement liées à la décision de cesser defumer ou de réduire leur consommation chez les fumeurs. Parmi les fumeurshommes, 3 % ont dit qu’ils avaient cessé de fumer à la suite de l’introductionde ces avertissements. En outre, 16 % ont déclaré qu’ils avaient essayé derenoncer à la cigarette et 14 % ont dit qu’ils comprenaient mieux les effets dutabac sur la santé. Chez les femmes, on a noté des effets analogues. En Australie,les mises en garde ont été renforcées en 1995. Elles semblent avoir davantageencouragé les gens à cesser de fumer que les avertissements antérieurs, moinsclairs. Au Canada, une enquête menée en 1996 indiquait que la moitié desfumeurs qui comptaient cesser de fumer ou réduire leur consommation étaientmotivés par ce qu’ils avaient lu sur leurs paquets de cigarettes.

Les contre-offensives publicitaires dans les médias

Plusieurs études ont été effectuées sur l’impact sur la consommation de ciga-rettes des messages négatifs sur le tabagisme. Il ressort d’études réalisées auxniveaux national et local en Amérique du Nord, en Australie, en Europe et enIsraël, que ces messages négatifs, ou contre-publicité, qui sont diffusés par lespouvoirs publics et les services de promotion de la santé publique, avaientimmanquablement pour effet de réduire la consommation générale. Deschercheurs suisses ont conclu, à la suite d’une étude menée entre 1954 et 1981sur la consommation de tabac des adultes, que la publicité contre les cigarettesdiffusée dans les médias avait réduit durablement la consommation de 11 %pendant cette période. En Finlande et en Turquie, on a également jugé que lescampagnes anti-tabac ont contribué à faire baisser la consommation.

Les programmes éducatifs de maîtrise du tabagismeen milieu scolaire

Ces programmes sont très courants, surtout dans les pays à revenu élevé, maisils semblent moins efficaces que beaucoup d’autres types d’activitésd’information. Même les programmes qui réduisent initialement le nombre denouveaux fumeurs n’ont, semble-t-il, qu’un effet provisoire : ils peuvent re-tarder quelque peu l’initiation, mais pas la prévenir. L’inefficacité apparentedes programmes en milieu scolaire tient peut-être moins à leur nature qu’aupublic auquel ils s’adressent. Comme nous l’avons vu, les adolescents neréagissent pas de la même manière que les adultes aux informations qu’on leurdispense sur les conséquences de leurs actes pour leur santé, parce que leurcomportement est plus axé sur le présent, d’une part, et parce qu’ils ont tendanceà rejeter les conseils des adultes, d’autre part.

Page 66: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

52 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

La publicité pour les cigarettes et les promotions

Les dirigeants désireux de maîtriser le tabagisme doivent chercher à savoir sila publicité et les promotions influent sur la consommation. La réponse estpresque certainement affirmative, encore que les données ne soient pas claires.La principale conclusion est que l’interdiction de la publicité et des promo-tions est efficace, mais seulement si elle est totale, c’est-à-dire si elle s’appliqueà tous les médias et à toutes les utilisations des marques de fabrique et deslogos. Examinons brièvement les faits.

L’impact sur les consommateurs de la publicité pour les cigarettes faitl’objet d’un vif débat. D’un côté, les défenseurs de la santé publique affirmentque la publicité stimule effectivement la consommation. De l’autre, lesfabricants de tabac rétorquent qu’elle n’incite pas les gens à commencer àfumer, mais ne fait qu’encourager les fumeurs confirmés à rester fidèles à unemarque donnée ou à l’adopter. À première vue, les études empiriques réaliséessur le lien entre la publicité et les ventes concluent généralement soit que lapublicité n’a pas d’effet positif sur la consommation, soit que son effet positifest très modeste. Cependant, ces conclusions peuvent être fallacieuses pourplusieurs raisons. En premier lieu, la théorie économique veut que la publicitéait un impact marginal décroissant sur la demande ; autrement dit, lorsque lapublicité pour un produit s’intensifie, la réaction des consommateurs à chaquenouvelle publicité diminue progressivement si bien qu’en fin de compte,l’augmentation de la publicité n’a plus aucun effet. Dans le secteur du tabac, lapublicité occupe une place relativement importante, soit environ 6 % du chiffred’affaires, ou 50 % de plus que la moyenne des autres secteurs. Par conséquent,si une augmentation de la publicité fait monter la consommation, la différenceest très faible et très difficile à déterminer. Il ne faudrait pas en conclure que,sans publicité, la consommation serait forcément aussi élevée qu’avec publicité,mais que l’impact marginal d’une intensification de la publicité est négligeable.En deuxième lieu, les chiffres relatifs à l’impact de la publicité sur les ventessont souvent très généraux et portent sur des périodes relativement longues,pour toutes les marques, tous les médias, et souvent pour des groupes de popu-lation importants. Les variations subtiles qui pourraient être détectées à unniveau d’analyse moins général sont donc occultées. Dans les études quiportent sur des données moins globales, les chercheurs observent davantagede signes prouvant un effet positif de la publicité sur la consommation, maisces études sont coûteuses et longues à réaliser et, par conséquent, rares.

Étant donné les problèmes que soulèvent ces approches, les chercheurspréfèrent analyser ce qui se produit lorsque la publicité et la promotion dutabac sont interdites pour mesurer indirectement leur effet sur laconsommation.

Page 67: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

53RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

L’impact de l’interdiction de la publicité

Si les autorités interdisent de faire de la publicité sur un type de média, latélévision par exemple, les fabricants peuvent y substituer d’autres médiaspour un coût analogue ou très voisin, de sorte que les chercheurs qui ontétudié l’effet sur la consommation d’une interdiction partielle de la publicitépour les cigarettes ont constaté qu’il était faible ou nul. Cependant, lorsquele gouvernement impose des restrictions multiples sur la publicité danstous les médias et sur les activités de promotion, les fabricants ontrelativement peu d’options de rechange. Depuis 1972, la plupart des pays àrevenu élevé ont adopté des limites plus strictes sur un plus grand nombrede médias et sur différentes formes de parrainage. Il ressort d’une étudeeffectuée récemment dans 22 pays à revenu élevé, basée sur des chiffresallant de 1970 à 1992, que l’interdiction générale de la publicité et de lapromotion peut réduire la consommation de cigarettes, mais que les res-trictions plus limitées ont un effet faible ou nul. Si l’on imposait une inter-diction absolue, concluent les auteurs de cette étude, la consommation detabac tomberait de plus de 6 % dans les pays à revenu élevé. Les modèlesfondés sur ces estimations indiquent que l’interdiction de la publicitéimposée par l’Union européenne (encadré 4.2) pourrait réduire laconsommation de cigarettes de près de 7 %. D’autres chercheurs ontcomparé, dans 100 pays, les tendances de la consommation dans le tempsselon que la publicité et la promotion étaient presque entièrement interditesou qu’elles ne faisaient l’objet d’aucune restriction. Ils ont constaté que,dans les pays où l’interdiction est presque totale, la consommation baissebeaucoup plus rapidement (figure 4.4). Il est important de noter que, danscette étude, d’autres facteurs ont peut-être contribué à la baisse de laconsommation dans certaines pays.

En dehors des recherches économiques, il existe d’autres types d’études,par exemple des enquêtes sur la mémorisation des messages publicitairespar les enfants, qui concluent que la publicité et la promotion influenteffectivement sur la demande de cigarettes et attirent de nouveaux fumeurs.Ces publicités attirent l’attention des enfants, qui retiennent leur message.En outre, on remarque depuis peu que les fabricants orientent une partcroissante de leurs activités publicitaires et promotionnelles vers les marchésqu’ils jugent en expansion ou prometteurs, notamment parmi certains jeuneset certains groupes minoritaires particuliers, chez qui la cigarette était peurépandue jusqu’à ces derniers temps. Ce corpus de recherches nonéconomiques pourrait être particulièrement intéressant pour les responsablesgouvernementaux que préoccupent les tendances du tabagisme parmicertains groupes de population.

Page 68: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

54 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

En 1989, dans le cadre d’une initia-tive plus large de lutte contre le can-cer, la Commission européenne aproposé une directive visant à limiterla publicité pour les produits du tabacdans la presse et par voie de pan-neaux publicitaires et d’affiches. LeParlement européen a modifié laproposition de la Commission en 1990

et a voté en faveur de l’interdiction dela publicité.

La Commission a indiqué qu’àl’époque, elle n’avait été en mesured’obtenir qu’une interdiction partielle,en ajoutant toutefois qu’elle pourraitproposer ultérieurement une interdic-tion complète, compte tenu desprogrès réal isés par les pays

FIGURE 4.4 L’INTERDICTION TOTALE DE LA PUBLICITÉ RÉDUITLA CONSOMMATION DE CIGARETTESTendances de la consommation pondérée de cigarettes par habitant dans les paysoù la publicité est totalement interdite et dans les pays où elle ne l’est pas

Note : L’analyse porte sur les variations de la consommation de cigarettes par adultede 15 à 64 ans, pondérée par le chiffre de la population, entre 1980-82 et 1990-92,dans 102 pays. Les pays où l’interdiction est complète ont initialement un niveau deconsommation plus élevé que les autres pays, mais, en fin de période, leur niveau deconsommation est plus bas. Cette différence est due au fait que la consommationdiminue plus fortement dans les pays où la publicité est interdite que dans les autres.Source : Saffer, Henry. The Control of Tobacco Advertising and Promotion. Documentde référence.

1450

1500

1550

1600

1650

1700

1750

1981 1991Année

Con

som

mat

ion

annu

elle

de

ciga

rette

spa

r hab

itant

Pas d'interdiction

Interdiction

ENCADRÉ 4.2 L’INTERDICTION DE LA PUBLICITÉ ET DE LA PROMOTION DU TABAC

DANS L’UNION EUROPÉENNE

(suite page suivante)

Page 69: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

55RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

ENCADRÉ 4.2 (suite)

membres particuliers. En juin 1991,la Commission a présenté une propo-sition modifiée de directive sur letabac.

Entre 1992 et 1996, rien n’a été faitpour mettre la proposition en œuvre, enraison de l’opposition d’au moins troisÉtats membres : l’Allemagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Au Royaume-Uni, toutefois, l’opposition a disparu en1997, lorsque le parti travailliste, quiavait promis dans son manifested’interdire la publicité pour le tabac,remporta les élections. Le texte de ladirective proposée a finalement étéadopté par la Commission en juin 1998.La directive stipule que toute publicitédirecte et indirecte (y compris leparrainage) pour les produits du tabacsera interdite à l’intérieur de l’Unioneuropéenne, toutes les dispositionsdevant être appliquées et contrôléesd’ici à octobre 2006. Ses principales dis-positions sont les suivantes :

■ Tous les pays membres del’Union européenne doiventadopter une législation nationalele 30 juillet 2001 au plus tard.

■ Toutes les publicités dans lapresse écrite doivent cesser auplus tard un an après cette date.

■ Les parrainages (à l’exceptiondes activités ou manifestations

de portée mondiale) doiventcesser au plus tard trois ansaprès cette date.

■ Le parrainage par les marquesde cigarettes d’événementsmondiaux telles que les coursesautomobiles de formule 1 peutse poursuivre pendant cinq ansaprès cette date, mais doitprendre fin le 1er octobre 2006au plus tard. Pendant la périodeallant du 31 juillet 2001 au1er octobre 2006, le niveau glo-bal de parrainage doit baisser etles fabricants doivent limitervolontairement la publicité pourle tabac qui entoure les mani-festations en question.

■ Des informations peuvent êtrefournies sur les produits auxpoints de vente.

■ Les publications profession-nelles du secteur du tabacpeuvent contenir des publicitéspour le tabac.

■ Les publications des pays dutiers monde qui ne sont pasexpressément destinées aumarché de l’Union européennene sont pas touchées par cetteinterdiction.

Cette directive est à présent envigueur.

Page 70: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

56 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Les restrictions sur le tabagisme dans les lieux publicsou au travail

Les pays et les États sont de plus en plus nombreux à limiter la cigarette dansles lieux publics, comme les restaurants et les transports. Dans certains pays,par exemple aux États-Unis, certains lieux de travail sont soumis aux mêmesrestrictions. Manifestement, ce sont les non-fumeurs qui en bénéficient le plus,puisqu’ils ne sont plus exposés aux risques sanitaires et aux nuisances de lafumée de tabac environnementale. Cependant, comme nous l’avons vu, ce n’estpas dans les lieux publics ni au travail que les non-fumeurs sont le plus exposés,mais chez eux. Ces restrictions ne sont donc qu’un moyen imparfait de répondreaux besoins des non-fumeurs.

Le deuxième effet de ces restrictions est qu’elles se traduisent par uneréduction de la consommation de cigarettes chez certains fumeurs, et qu’ellesen amènent même certains à cesser de fumer. Aux États-Unis, ces restrictionsont fait baisser la consommation de tabac de l’ordre de 4 à 10 %, selon diversesestimations. Pour que ces restrictions soient appliquées, il semble qu’elles doiventêtre approuvées par la société en général et que la population doit être informéedes conséquences pour la santé de l’exposition à la fumée de tabacenvironnementale. En dehors des États-Unis, on dispose de relativement peu dedonnées sur l’efficacité des restrictions sur le tabagisme dans les lieux couverts.

L’impact potentiel des mesures autres que les prixsur la demande mondiale de tabac

Nous avons présenté les faits indiquant l’efficacité d’un certain nombre demesures autres que de prix, à savoir l’information des consommateurs, la dif-fusion de rapports et d’études scientifiques, l’affichage de mises en garde, lacontre-publicité, les interdictions totales de la publicité et de la promotion, etles restrictions sur le tabagisme. Dans le cadre des recherches menées enpréparation de ce rapport, nous avons utilisé le modèle décrit dans l’encadré 4.1pour évaluer l’impact potentiel sur la consommation de cigarettes dans le monded’un programme comprenant l’ensemble de ces mesures. Étant donné que,jusqu’à présent, peu de chercheurs avaient essayé d’estimer l’impact total deces mesures, le modèle a été élaboré sur la base d’hypothèses prudentes. Ilsuppose, en se fondant sur les chiffres disponibles concernant l’efficacité desmesures autres que de prix, qu’à elles toutes, elles persuaderaient entre 2 et10 % de fumeurs de cesser. Jouant la prudence, le modèle prend commehypothèse qu’elles n’auraient aucun effet sur la consommation quotidienne decigarettes de ceux qui continueraient à fumer.

Comte tenu de cela, l’application d’un ensemble de mesures autres que deprix pourrait réduire le nombre de fumeurs vivant dans le monde en 1995 de

Page 71: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

57RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

TABLEAU 4.2 NOMBRE POTENTIEL DE FUMEURS QUI CESSERAIENTDE FUMER ET NOMBRE DE VIES SAUVÉES PAR UN ENSEMBLEDE MESURES AUTRES QUE DE PRIX(millions)Fumeurs vivant en 1995

Variation du nombre de fumeurs Variation du nombre de décès si le programme réduit si le programme réduit la prévalence du tabagisme de la prévalence du tabagisme de

Région 2 % 10 % 2 % 10 %

Afrique subsaharienne –1 –7 –0,4 –2Amérique latine et Caraïbes –2 –10 –0,5 –2Asie de l’Est et Pacifique –8 –40 –2 –10Asie du Sud (cigarettes) –2 –9 –0,3 –2Asie du Sud (bidis) –2 –10 –0,4 –2Europe orientale et

Asie centrale –3 –15 –0,7 –3Moyen-Orient et

Afrique du Nord –0,8 –4 –0,2 –1Revenu faible et intermédiaire –19 –93 –4 –22Revenu élevé –4 –21 –1 –5Monde –23 –114 –5 –27Note : Les chiffres ont été arrondis.Source : Ranson, Kent, P. Jha, F. Chaloupka et A Yurekli. Effectiveness and Cost-effectiveness of Price In-creases and Other Tobacco Control Policy Interventions. Document de référence.

23 millions, même selon l’hypothèse basse, c’est-à-dire si le nombre deconsommateurs ne diminuait que de 2 % (tableau 4.2). En se fondant sur leshypothèses antérieures relatives au nombre de fumeurs repentis qui éviteraientun décès prématuré, le modèle indique que 5 millions de vies pourraient êtresauvées.

Les substituts nicotiniques et autres traitements de sevrage

Outre le relèvement des taxes et les mesures autres que de prix, il existe encoreun type d’intervention qui peut contribuer à réduire la consommation de tabac.Il s’agit des traitements de sevrage et de différents types de programmes, telsque l’éducation du fumeur, les traitements en milieu hospitalier, les programmesde psychothérapie et la gamme croissante de produits pharmacologiquesdestinés à faciliter le sevrage, comme les substituts nicotiniques (SN) et unantidépresseur au non générique de bupropion. Les substituts nicotiniques, sousforme de timbre transdermique (patch), gommes, aérosols et inhalateurs,fournissent de faibles doses de nicotine sans apporter les autres éléments nocifsen présence dans la fumée de tabac. Utilisés à bon escient, ils sont considérés

Page 72: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

58 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

comme sûrs et efficaces par les grandes organisations médicales des pays àrevenu élevé. Une abondante documentation conclut qu’ils doublent le taux desuccès des autres tentatives de sevrage, que d’autres interventions soient utiliséesparallèlement ou non (tableau 4.3). Le bupropion a également fait la preuve deson efficacité dans les essais effectués aux États-Unis. L’un des principauxavantages des substituts nicotiniques est qu’ils peuvent être auto-administrés,et sont donc plus commodes pour les fumeurs qui souhaitent cesser de fumerdans les pays où il est difficile d’obtenir un soutien médical intensif.

Les substituts nicotiniques sont prescrits uniquement pour traiter lessymptômes de retrait des fumeurs qui tentent de cesser de fumer. On ne leur apas encore découvert de lien avec les maladies cardio-vasculaires ourespiratoires, et on s’accorde à reconnaître qu’ils sont une source de nicotinebeaucoup plus sûre que le tabac. Certes, la nicotine produit des effetsphysiologiques, tels que l’augmentation de la tension, mais en comparaison dela cigarette, les doses apportées par les substituts sont plus faibles et sont fourniesplus lentement. Pour les fumeurs réguliers, les substituts nicotiniquesreprésentent un moyen de réduire le coût du sevrage.

Il est plus facile d’obtenir des substituts nicotiniques dans certains paysque dans d’autres. Dans certains pays à revenu élevé, ils se vendent sans or-donnance, dans d’autres non. Les modèles fondés sur les données relatives auxÉtats-Unis montrent que le nombre de gens cessant de fumer augmenteraitsignificativement, et qu’un plus grand nombre de vies seraient épargnées, siles substituts nicotiniques étaient en vente libre. Selon le modèle, en cinq ans,près de 3 000 décès seraient évités, rien qu’aux États-Unis. Il semble aussi quec’est le type d’aide que désirent les fumeurs : aux États-Unis, les ventes desubstituts nicotiniques ont augmenté de 150 % entre 1996, année où la ventelibre a été autorisée, et 1998.

En dehors des pays à revenu élevé, les substituts nicotiniques ne sont pastoujours disponibles, sous quelque forme que ce soit. Par exemple, ils sont en

TABLEAU 4.3 EFFICACITÉ DE DIFFÉRENTES MÉTHODES DE SEVRAGE

Augmentation du pourcentage de fumeursIntervention et comparaison s’abstenant pendant 6 mois ou plus

Brève conversation (3 à 10 minutes) avec un professionnel,par comparaison avec aucune conversation 2 à 3

SN et brève conversation, par comparaison avec brèveconversation, avec ou sans placebo 6

Soutien intensif (consultations, par exemple) plus SN,par comparaison avec soutien intensif ou soutienintensif plus placebo 8

Source : Raw, Martin et al. 1999. Les chiffres proviennent de l’Agency for Health Care Policy and Research,et de la Bibliothèque Cochrane.

Page 73: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

59RÉDUIRE LA DEMANDE DE TABAC

vente en Afrique du Sud, en Argentine, au Brésil, en Indonésie, en Malaisie, auMexique, aux Philippines et en Thaïlande, mais, dans certains de ces pays, onne les trouve que dans quelques grandes villes. Ils sont introuvables dans certainspays à revenu intermédiaire et dans de nombreux pays à faible revenu. Unedose journalière de substitut nicotinique coûte à peu près le même prix qu’unedose de tabac, mais comme les substituts nicotiniques sont généralement vendusdans la quantité nécessaire à un traitement, ils paraissent relativement pluschers à l’achat. En comparaison de la cigarette, la vente des substitutsnicotiniques est strictement réglementée.

Informés des faits, de nombreux responsables envisageraient sans douted’élargir l’accès aux substituts, sachant qu’ils constituent un élément précieuxdes politiques de maîtrise du tabagisme, par exemple en assouplissant les règlesde vente, en augmentant le nombre des points de vente et les horaires de vente,et en levant certaines restrictions sur le conditionnement des produits.

Étant donné que les substituts nicotiniques semblent contribuer à réduirele coût du sevrage, les dirigeants pourraient également songer à lessubventionner ou à les fournir gratuitement aux fumeurs de condition modestequi souhaitent cesser, pendant des périodes de durée déterminée. Cette approcheest en cours d’expérimentation dans certains contextes. Au Royaume-Uni, parexemple, on a proposé que les fumeurs les plus démunis soient admis à recevoirgratuitement une quantité donnée de substituts nicotiniques s’ils décidentd’arrêter de fumer. Le ciblage de ces services sur les pauvres soulève desproblèmes dans tous les pays.

Il est certain que les autorités doivent réfléchir soigneusement avantd’élargir l’accès aux substituts nicotiniques, car la plupart des pays sont peudésireux de promouvoir la vente d’un produit addictif quelconque aux enfants.Toutefois, les professionnels de la santé des pays à revenu élevé s’accordent àreconnaître que, s’ils sont utilisés à bon escient, les substituts nicotiniquessont utiles et doivent être recommandés aux fumeurs adultes qui veulents’arrêter. On ne dispose guère d’études sur la rentabilité des traitements desubstitution nicotinique, principalement dans les pays à revenu faible etintermédiaire, où vivent la plupart des fumeurs. Il serait utile, pour les dirigeantslocaux, de recevoir plus d’information sur la rentabilité des traitements, tantpour déterminer s’il est judicieux d’affecter une partie des rares ressourcespubliques à de tels produits que pour donner aux responsables un terrain d’actionplus sûr.

Dans le cadre de la préparation de ce rapport, nous avons modélisé l’impactpotentiel de l’élargissement de l’accès aux substituts nicotiniques selon lesméthodes décrites précédemment. Pour obtenir des résultats prudents, nousavons supposé que des traitements pourraient être moins efficaces que nel’indiquent les études disponibles sur les pays à revenu élevé. Dans cet esprit,nous avons pris pour hypothèse prudente que le taux de succès des

Page 74: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

60 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

consommateurs utilisant des substituts nicotiniques atteindrait le double decelui des autres fumeurs tentant de cesser, mais que seulement 6 % des fumeursrecourraient aux substituts nicotiniques. Nous avons estimé ainsi que 6 mil-lions de fumeurs vivant en 1995 seraient capables de s’arrêter et que 1 millionde décès pourraient être évités. Si 25 % des fumeurs utilisent un substitutnicotinique, nous obtenons 29 millions de fumeurs vivant en 1995 parvenant às’arrêter et 7 millions de décès évités.

Notes

1. Smith, Adam. La Richesse des nations. 1776. Version revue par Edwin Canaan,1976. University of Chicago Press, Chicago.2. Par exemple, pour que la taxe représente les quatre cinquièmes du prix au détail, ilfaut que le prix de gros (avant la taxe) du paquet soit multiplié par quatre. Ainsi, si leprix avant la taxe est de 50 cents, le taux de taxation sera 0,5 x 4 = 2 dollars. Le prix audétail sera égal à 2 dollars (la taxe) + 0,50 (prix de gros) = 2,50 dollars. L’effet sur leprix au détail varierait suivant les pays, bien entendu, en fonction de facteurs tels quele prix de gros. D’une manière générale, une majoration de cet ordre ferait augmenterle prix pondéré par la population d’environ 80 à 100 % dans les pays à revenu faible etintermédiaire.

Page 75: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

61

C H A P I T R E 5

Réduire l’offre de tabac

SI beaucoup d’éléments tendent à prouver qu’on peut réduire lademande de tabac, il est moins sûr qu’on puisse en limiter l’offre. Dans lapremière partie de ce chapitre, nous analysons brièvement ce qui se produitdans les pays qui s’efforcent de restreindre l’accès au tabac et d’en réduirel’offre par des restrictions commerciales ou par leur politique agricole. Dansla deuxième partie, nous examinons un moyen efficace de limiter l’offre : lalutte contre la contrebande.

La plupart des interventions sur l’offre sont relativementpeu efficaces

L’un des constats les plus élémentaires, sur les marchés, est que si l’on empêcheun fournisseur d’opérer, il est rapidement remplacé par un autre, dès lors queles incitations sont assez puissantes. Or les incitations à fournir du tabac sontévidentes, comme nous le montrons ci-dessous.

Interdiction du tabac

Étant donné que le tabac est l’un des produits les plus nocifs pour la santé,quelques défenseurs de la santé publique demandent que sa culture soit interdite,avançant que le problème ne tenait pas à la consommation mais à la produc-tion. Ils font état de la réduction marquée des maladies liées à l’alcool durantles périodes où l’offre d’alcool s’est trouvée limitée au XXe siècle. Ainsi,

Page 76: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

62 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

lorsqu’il était difficile de se procurer de l’alcool à Paris (France) pendant laDeuxième Guerre mondiale, la consommation est tombée de 80 % par habi-tant. Les décès dus aux maladies hépatiques ont diminué de moitié en un an, etdes quatre cinquièmes après cinq ans. Après la guerre, l’offre d’alcool estredevenue normale et la mortalité due aux maladies hépatiques a retrouvé sonniveau antérieur.

Néanmoins, un certain nombre de raisons font que l’interdiction du tabac apeu de chances d’être réalisable ou efficace. En premier lieu, même lorsqu’unesubstance est interdite, elle reste largement consommée, comme c’est le caspour de nombreuses drogues illicites. En second lieu, la prohibition engendretoute une série de problèmes : elle encourage l’activité criminelle et coûte cherà faire appliquer. En troisième lieu, d’un point de vue économique, le niveauoptimal de consommation de tabac n’est pas nul. Enfin, l’interdiction du tabacrisque d’être fort impopulaire dans la plupart des pays. En Inde, les autoritésont récemment tenté en vain d’interdire un type de tabac à mâcher dénommégutka, déclenchant un mouvement d’opposition politique contre la prohibition.

Restrictions sur l’achat de tabac par les jeunes

Plusieurs pays à revenu élevé essaient d’imposer des restrictions sur la ventede cigarettes aux adolescents. Sous leur forme actuelle, ces restrictions sontinefficaces. D’une manière générale, elles sont difficiles à appliquer, d’autantplus que les jeunes adolescents se font souvent approvisionner par leurs aînéset, parfois, par leurs parents. En outre, dans les pays à faible revenu, où laconsommation est en hausse, les systèmes, infrastructures et ressourcesnécessaires pour assurer l’application de ces restrictions sont beaucoup moinsdisponibles que dans les pays à revenu élevé.

Substitution et diversification des cultures

Plus d’une centaine de pays cultivent le tabac, dont 80 sont en développement.Quatre pays produisent les deux tiers de la récolte mondiale : en 1997, le pre-mier producteur mondial de tabac était la Chine (42 % du total), suivie par lesÉtats-Unis, l’Inde et le Brésil, qui produisaient chacun environ 24 %. Les 20 plusgros producteurs représentent plus de 90 % du total (tableau 5.1). Depuis unevingtaine d’années, la part des pays à revenu élevé dans la production mondialeest tombée de 30 à 15 %, tandis que celle des pays du Moyen-Orient et d’Asiepassait de 40 à 60 %. La part de l’Afrique est passée de 4 à 6 %, et celle desautres régions a peu varié.

Si la Chine vend la majeure partie de sa production sur le marché intérieur,d’autres gros producteurs exportent une proportion élevée de la leur. Le Brésil,la Turquie, le Zimbabwe, le Malawi, la Grèce et l’Italie exportent tous plus de

Page 77: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

63RÉDUIRE L’OFFRE DE TABAC

TA

BLE

AU

5.1

LE

S 3

0 P

RE

MIE

RS

PR

OD

UC

TE

UR

S D

E T

AB

AC

BR

UT

Chi

ffres

de

1997

, par

vol

ume

décr

oiss

ant

Rec

ette

sVa

riat

ion

Part

du

Part

du

d’ex

port

atio

nP

rodu

ctio

nde

la p

rod.

tota

lSu

perf

icie

tota

lR

atio

Rat

iodu

taba

c en

(mil

lier

spa

r ra

ppor

tm

ondi

al(m

illi

ers

mon

dial

des

expo

rt.

des

impo

rt.

% d

u to

tal

Pays

de to

nnes

1994

(%)

d’ha

)(%

)(%

)(%

)(1

995)

Chi

ne3

390,

051

,542

,12

1 88

0,0

38,4

2,9

4,7

0,68

Éta

ts-U

nis

746,

44,

09,

2732

8,4

6,7

35,5

7,4

0,55

Inde

623,

718

,17,

7542

0,2

8,6

23,2

c0,

44B

rési

l57

6,6

30,5

7,16

329,

56,

777

,00,

22,

55T

urqu

ie29

6,0

57,7

3,68

323,

06,

689

,30,

51,

17Z

imba

bwe

192,

18,

02,

3999

,32,

010

9,7

c23

,05

Indo

nési

e18

4,3

15,2

2,29

217,

54,

410

,227

,60,

42M

alaw

i15

8,6

61,7

1,97

122,

32,

574

,2c

60,6

4G

rèce

132,

5–2

,21,

6567

,31,

474

,512

,82,

05It

alie

131,

40,

31,

6347

,51,

078

,718

,30,

04A

rgen

tine

123,

250

,31,

5371

,01,

560

,65,

10,

59Pa

kist

an86

,3–1

4,0

1,07

45,9

0,9

1,6

c0,

08B

ulga

rie

78,2

124,

30,

9748

,51,

053

,558

,35,

40C

anad

a71

,1–0

,50,

8828

,50,

624

,012

,60,

04T

haïl

ande

69,3

17,4

0,86

47,0

1,0

48,5

15,3

0,11

Japo

n68

,5–1

3,8

0,85

25,6

0,5

0,5

145,

40,

04P

hili

ppin

es60

,98,

70,

7629

,40,

617

,218

,30,

17C

orée

du

Sud

54,4

–44,

80,

6827

,20,

68,

426

,20,

02M

exiq

ue44

,3–3

5,1

0,55

25,4

0,5

31,8

8,3

0,11

Ban

glad

esh

44,0

–26,

70,

5550

,31,

0c

16,1

0,03

Esp

agne

42,3

0,1

0,53

13,3

0,3

53,9

126,

70,

06P

olog

ne41

,7–3

,30,

5219

,00,

46,

966

,40,

12

(sui

te p

age

suiv

ante

)

Page 78: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

64 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Rec

ette

sVa

riat

ion

Part

du

Part

du

d’ex

port

atio

nP

rodu

ctio

nde

la p

rod.

tota

lSu

perf

icie

tota

lR

atio

Rat

iodu

taba

c en

(mil

lier

spa

r ra

ppor

tm

ondi

al(m

illi

ers

mon

dial

des

expo

rt.

des

impo

rt.

% d

u to

tal

Pays

de to

nnes

1994

(%)

d’ha

)(%

)(%

)(%

)(1

995)

TA

BLE

AU

5.1

(su

ite)

Cub

a37

,011

7,6

0,46

59,0

1,2

13,5

0,8

n.c.

Mol

dova

35,8

–15,

80,

4517

,20,

461

,46,

76,

90V

iet N

am32

,0n.

c.0,

4036

,00.

7n.

c.n.

c.0,

04R

ép. d

omin

icai

ne30

,341

,70,

3821

,20,

458

,12,

25,

26M

acéd

oine

30,0

n.c.

0,37

22,0

0,4

n.c.

n.c.

5,44

Kir

ghiz

ista

n30

,0–3

3,3

0,37

12,0

0,2

76,7

3,3

6,96

Afr

ique

du

Sud

29,0

–1,4

0,34

14,9

0,3

41,5

55,5

0,31

Tanz

anie

25,1

15,1

0,31

n.c.

n.c.

55,8

c4,

53To

tal m

ondi

al8

048,

425

,910

0,0

4 89

3,8

100,

025

,324

,4

a. R

atio

des

exp

orta

tion

s pa

r ra

ppor

t à la

pro

duct

ion

inté

rieu

reb.

Rat

io d

es im

port

atio

ns p

ar r

appo

rt à

la p

rodu

ctio

n in

téri

eure

c. M

oins

de

0,1

%.

n.c.

= N

on c

onnu

.So

urce

: va

n de

r M

erw

e, R

owen

a et

al.

The

Sup

ply-

side

Eff

ects

of T

obac

co C

ontr

ol P

olic

ies.

Doc

umen

t de

réfé

renc

e. (

Les

chi

f fre

s pr

ovie

nnen

t du

Dép

arte

men

t de

l’ag

ricu

ltur

e de

s É

tats

-Uni

s, d

e l’

Or g

anis

atio

n de

s N

atio

ns U

nies

pou

r l’

alim

enta

tion

et l

’agr

icul

ture

et d

’aut

res

sour

ces.

)

Page 79: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

65RÉDUIRE L’OFFRE DE TABAC

70 % de leur récolte. Seuls deux pays sont fortement tributaires de leurs recettesd’exportation de tabac brut : le Zimbabwe (23 % des recettes) et le Malawi(61 %). Plusieurs autres pays — Bulgarie, Moldova, République dominicaine,Macédoine, Kirghizistan et Tanzanie — tirent une bonne partie de leurs de-vises du tabac, même si leur part de la production mondiale est faible. Le tabacest une source majeure de recettes pour quelques pays à économie fortementagraire, notamment le Malawi, le Zimbabwe, l’Inde et la Turquie.

Au plan historique, le tabac est une culture très attractive pour lesexploitants, car il fournit un revenu net plus élevé par unité de superficie que laplupart des cultures de rapport, et sensiblement plus que les cultures vivrières.Dans les régions les plus productives du Zimbabwe, par exemple, le tabac estenviron 6,5 fois plus rentable que la deuxième culture la plus rentable. Il y aaussi des raisons pratiques à l’intérêt des cultivateurs pour le tabac. La premièreest que le cours mondial de ce produit est relativement stable par rapport àd’autres cultures. Cette stabilité permet aux exploitants de planifier sur plusieurscampagnes et d’obtenir du crédit pour d’autres entreprises, en même tempsque pour le tabac. La deuxième est que l’industrie du tabac fournit généralementun soutien en nature énergique aux producteurs, notamment sous forme dematériaux et de conseils. La troisième est que les industriels accordent souventdes prêts aux producteurs. La quatrième est que les autres cultures peuventsoulever des problèmes de stockage, de collecte et de livraison. Or le tabac estmoins périssable que beaucoup de cultures et les industriels fournissent parfoisune assistance pour la livraison ou la collecte, tandis que pour les autres cul-tures, la collecte et le paiement peuvent être effectués tardivement et que lesprix peuvent fluctuer.

Un certain nombre de programmes expérimentaux ont été lancés en vuede substituer d’autres cultures au tabac mais, hormis l’exception reconnue duCanada, il n’y a pas de preuves fermes que ces programmes permettent deréduire la consommation de tabac, car les cultivateurs ne sont guère motivéspour y participer tant que le cours du tabac reste soutenu et parce que d’autresfournisseurs se tiennent prêts à les remplacer. La substitution des cultures peutcependant trouver sa place dans des programmes de diversifications plus larges,si elle aide les cultivateurs de tabac les plus démunis à trouver d’autres moyensde subsistance. Nous examinerons cette question plus en détail au chapitresuivant.

Soutien des prix et subventions en faveur de la culture du tabac

Si les pays en développement préfèrent taxer les recettes d’exportation du tabac,les pays à revenu élevé ont pour tradition de soutenir les prix et de fournird’autres types de subventions aux cultivateurs. C’est le cas en particulier desÉtats-Unis et des membres de l’Union européenne, ainsi que de la Chine. Les

Page 80: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

66 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

raisons à cela sont le désir de stabiliser les prix à un niveau élevé, de soutenirles petites exploitations familiales, de limiter les importations de tabac afind’économiser les devises, et de conserver l’appui politique du secteur. Cessubventions vont souvent de pair avec des restrictions sur les importations.

Ces politiques ont pour effet de relever artificiellement le cours mondialdu tabac et des produits du tabac. Les économistes affirment que, chaque foisque le prix augmente de cette manière, les fumeurs peuvent réagir en réduisantleur consommation. Cependant, les faits indiquent que si cet effet sur laconsommation existe, il est très limité. Dans la plupart des pays à revenu élevécomme les États-Unis, le prix au producteur du tabac-feuille ne représentequ’une faible partie du prix des cigarettes. En outre, les importations de tabacmeilleur marché augmentent, de sorte que les aides gouvernementales ne setraduisent que par une différence négligeable dans le prix du paquet. Aux États-Unis, selon une analyse effectuée récemment, ces programmes majorent lesprix de 1 %. Une hausse de cet ordre n’a quasiment aucun effet sur laconsommation et, inversement, l’élimination des subventions ne risque guèred’entraîner une augmentation de la consommation.

Il est difficile d’évaluer comment la suppression des aides influerait sur laproduction mondiale. La hausse des prix intérieurs aux États-Unis peutcontribuer à relever le cours mondial du tabac-feuille, améliorant la rentabilitéde ce produit pour les cultivateurs des pays à faible revenu, mais les effets pources derniers seraient mitigés si on éliminait à la fois les subventions et lesrestrictions à l’importation. Par exemple, si le cours du tabac produit aux États-Unis baissait à la suite de l’élimination des subventions, les fabricants de ciga-rettes américains pourraient en acheter de plus grandes quantités sur place,réduisant de ce fait leurs importations de tabac de moins bonne qualité enprovenance des pays à faible revenu. D’un autre côté, la libéralisation du com-merce pourrait stimuler les importations de ce tabac.

Mis à part leur impact minime sur la consommation, ces aides n’ont pasleur place dans une bonne politique agricole et commerciale. Leur principalrôle est sans doute de caractère politique, et elles accroissent le nombre desgens qui ont un intérêt personnel dans la production de tabac.

Restrictions sur le commerce international

Il est démontré que le libre-échange élargit les options du consommateur etaccroît l’efficacité de la production. Plusieurs études ont reconnu qu’il stimulela croissance dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Si les arguments enfaveur du libre-échange en général sont valables, il est bien certain cependantque le tabac est plus nocif pour la santé que la plupart des autres biens deconsommation exportés. La grande question qui se pose aux responsables estdonc celle de savoir comment limiter le commerce du tabac sans entamer les

Page 81: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

67RÉDUIRE L’OFFRE DE TABAC

effets bénéfiques du libre-échange. Comme nous l’avons signalé au chapitre 1,la libéralisation des échanges a contribué à accroître la consommation de tabacdans les pays à revenu faible et intermédiaire. Logiquement, les restrictionscommerciales devraient avoir l’effet inverse. En fait, de telles restrictions auraientdes conséquences indésirables pour diverses raisons, dont la principale estqu’elles déclencheraient probablement des mesures de représailles quiralentiraient la croissance économique et la hausse des revenus. Entre-temps, lalibéralisation du commerce a amené la communauté internationale à prendreposition, par l’intermédiaire de l’Accord général sur les tarifs douaniers et lecommerce (GATT), reconnaissant aux pays le droit d’adopter et de faire appliquerdes mesures visant à protéger la santé publique, à condition qu’elles s’appliquentau même titre aux articles importés et à ceux produits localement. L’article XXdu GATT déclare expressément que les règles du libre-échange n’interdisentpas les mesures nécessaires à la protection de la santé.

En 1990, la Thaïlande a tenté d’interdire les importations de cigarettes etla publicité, tentative qui a été contestée par les fabricants de tabac américains.Une commission du GATT a fait une enquête et a rendu un arrêt suivant lequella Thaïlande ne pouvait pas interdire les importations de cigarettes, mais qu’ellepouvait imposer des taxes, interdire la publicité et appliquer des restrictionssur les prix, et qu’elle pouvait exiger que tous les fabricants dont les produitsétaient vendus en Thaïlande affichent de sévères mises en garde et une des-cription des ingrédients sur les paquets. Cet arrêté a été interprété commesignifiant que la Thaïlande pouvait interdire la vente de tous les produits dutabac, à condition que l’interdiction s’applique aussi bien aux cigarettesproduites localement qu’à celles d’origine étrangère. La Thaïlande a mis enœuvre des mesures énergiques de réduction de la demande, notammentl’interdiction générale de la publicité et des promotions, et la mention sur lespaquets des graves risques de santé posés par la cigarette. Cette décisionhistorique, et la réaction rapide et ferme de la Thaïlande, a créé un précédentautorisant les pays à intervenir pour réduire la demande de tabac pour desraisons de santé publique, sans porter atteinte aux principes du libre-échange.

Lutte contre la contrebande

La contrebande de cigarettes pose un problème sérieux. Selon les experts,environ 30 % des exportations, soit quelque 355 milliards de cigarettes, sontécoulées en contrebande. Ce pourcentage est beaucoup plus élevé que pour laplupart des biens de consommation vendus sur les marchés mondiaux. Leproblème est particulièrement aigu là où il existe de grandes différences dansla fiscalité imposée par des États ou des pays voisins, là où la corruption estgénérale et où les ventes d’articles de contrebande sont tolérées. Nous allonsdécrire rapidement l’ampleur du problème et examiner les options dont on

Page 82: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

68 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

FIGURE 5.1 LA CONTREBANDE DE TABAC TEND À CROÎTRE AVEC LE DEGRÉDE CORRUPTIONLa contrebande en fonction de l’indice de transparence

Source : Merriman, David, A. Yurekli et F. Chaloupka. « How Big Is the WorldwideCigarette Smuggling Problem? » Document de travail du NBER. Cambridge, Massa-chusetts: National Bureau of Economic Research, à paraître.

Brésil

Pakistan

Cambodge

Pour

cent

age

de la

con

treba

nde

dans

la c

onso

mm

atio

n

Indonésie

Suède

Autriche

y = - 0,02x + 0,2174R 2 = 0,2723

0,00

0,05

0,10

0,15

0,20

0,25

0,30

0,35

0,40

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10Indice de transparence des pays

dispose pour le maîtriser. L’avantage principal de la lutte contre la contrebanden’est pas qu’elle réduit la demande mais qu’elle aide à appliquer les haussesde prix qui réduisent la demande.

Les écarts de prix entre les pays ou les États sont de puissantes incitationsà la contrebande, mais le prix n’est pas le seul facteur en jeu. Une étude sur lamesure dans laquelle d’autres éléments, tels que la prévalence de la corruptiondans un pays, contribuent à amplifier l’ampleur du problème a été réalisée enpréparation de ce rapport. Selon des indicateurs standard des niveaux de cor-ruption basés sur l’Indice des pays de Transparency International, l’étude amontré qu’en dépit d’exceptions notables, la contrebande tend à augmenter enproportion du degré de corruption existant dans les pays (figure 5.1).

La contrebande à grande échelle s’appuie sur des organisations criminelles,des réseaux relativement sophistiqués de distribution dans les pays destinataireset l’absence de contrôle des mouvements internationaux de cigarettes. La plupartdu temps, la contrebande porte sur des cigarettes de marques internationalesconnues. C’est une activité très lucrative : une organisation de contrebandiers

Page 83: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

69RÉDUIRE L’OFFRE DE TABAC

achète, par exemple, un conteneur de 10 millions de cigarettes, sans acquitterles taxes, pour 200 000 dollars. La valeur fiscale de cette quantité de cigarettesdans l’Union européenne est d’au moins 1 million de dollars, compte tenu desdroits de consommation, de la taxe à la valeur ajoutée (TVA) et des droitsd’importation. L’ampleur des bénéfices est telle que les contrebandiers peuventabsorber le coût de l’expédition dans des pays éloignés.

La contrebande intervient généralement durant le transit entre le paysd’origine des cigarettes et leur lieu de destination officiel. Pour encourager leséchanges commerciaux entre pays, un régime dit « de transit » est en vigueur,qui suspend provisoirement les droits de douane et de consommation et laTVA à acquitter sur les marchandises en provenance du pays A à destinationdu pays B pendant qu’elles transitent par les pays C, D, etc. Or, de grandesquantités de cigarettes ne parviennent jamais à leur lieu de destination, carelles ont été achetées et vendues par des commerçants non officiels. Une autreforme de contrebande, « l’aller-retour », se pratique lorsqu’il existe desdifférences de prix relativement importantes entre deux pays voisins. On aobservé que des cigarettes exportées d’Afrique du Sud, du Canada et du Brésil,par exemple, arrivaient dans un pays voisin pour réapparaître dans leur paysd’origine à un prix réduit, net de taxes.

Pour que la contrebande soit possible, il faut que les cigarettes passent parun grand nombre de propriétaires en peu de temps, ce qui interdit pratiquementde suivre leurs mouvements. De plus, l’impuissance à empêcher les ventesillicites et la difficulté de distinguer entre les produits licites et illicites peuventréduire les risques courus par les contrebandiers. En Russie, par exemple, etdans de nombreux pays à faible revenu, la majorité des cigarettes sont venduessur le trottoir.

Selon les théories économiques, les fabricants de tabac eux-mêmes profitentde l’existence de la contrebande. Des études réalisées sur l’impact de lacontrebande font apparaître que, lorsque les cigarettes de contrebandereprésentent un pourcentage élevé des ventes totales, le prix moyen de toutesles cigarettes, taxées et non taxées, diminue, stimulant les ventes en général.La présence de cigarettes de contrebande sur un marché qui avait jusqu’alorsété fermé aux marques importées aide à faire augmenter la demande de cesmarques, et donc à élargir leur part du marché. La contrebande incite égalementles pouvoirs publics à réduire la fiscalité.

On dispose encore de très peu d’expérience et de données de recherchesur l’efficacité de différentes mesures de lutte contre la contrebande. Cependant,plusieurs options s’offrent aux autorités. En premier lieu, le caractère licite ouillicite des paquets de cigarettes pourrait être plus facile à distinguer pour leclient et pour les agents de la loi si, par exemple, un timbre fiscal bien visible,et difficile à contrefaire, était apposé sur les paquets dédouanés et si les paquetsimportés en franchise avaient un emballage différent. Des mises en garde

Page 84: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

70 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

énergiques, rédigées dans la langue locale, signaleraient également la différence.En deuxième lieu, la contrebande pourrait être sanctionnée de manière assezsévère pour décourager ceux qui se croient actuellement à l’abri des poursuites.En troisième lieu, on pourrait délivrer une licence à tous ceux qui font partiede la chaîne allant du fabricant au consommateur, comme cela se fait déjà enFrance et à Singapour. En quatrième lieu, les fabricants pourraient être tenusd’imprimer un numéro de série sur chaque paquet de cigarettes, afin qu’onpuisse suivre son trajet. Grâce aux perfectionnements constants de latechnologie, le marquage des paquets pourrait aussi donner des informationssur le distributeur, le grossiste et l’exportateur. En cinquième lieu, on pourraitexiger des fabricants qu’ils assument la responsabilité d’améliorer la tenue deleurs écritures, afin que la destination finale de leurs produits soit bien cellequi était officiellement prévue. Des systèmes de contrôle informatiséspermettraient aux autorités de suivre individuellement chaque expédition et dela localiser à tout moment. Ce système existe déjà à Hong Kong. Enfin, lesexportateurs pourraient être tenus d’indiquer sur l’emballage le pays de desti-nation des cigarettes et d’imprimer des avertissements dans la langue de cepays. Quand des compagnies internationales fabriquent les cigaretteslocalement, cela pourrait être indiqué sur le paquet afin de faciliter le dépistageet de sensibiliser les consommateurs à la contrebande. Un certain nombre depays ont intensifié leurs activités de lutte contre la contrebande. Le Royaume-Uni, par exemple, vient d’annoncer un programme de plus de 55 millions dedollars contre le trafic de cigarettes et d’alcool, qui prévoit notamment la créationde postes spéciaux. Plus on acquerra d’expérience, plus les contrôles devraientse renforcer dans tous les pays touchés.

Page 85: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

71

C H A P I T R E 6

Les coûts et les conséquences de la lutte

contre le tabagisme

EN dépit de la menace évidente que le tabac représente pour la santémondiale, de nombreux gouvernements, en particulier dans les pays à revenufaible et intermédiaire, n’ont pas pris de mesures notables pour y parer. Parfois,c’est parce qu’ils sous-estiment le danger, ou parce qu’ils pensent à tort qu’onne peut pas faire grand-chose pour réduire la consommation. Cependant, denombreux gouvernements hésitent à agir, car ils craignent que la lutte contre letabagisme n’ait des conséquences économiques préjudiciables. Dans ce chapitre,nous examinons certaines des idées les plus répandues sur les conséquences dela lutte contre le tabagisme pour les pays et pour les individus, avant d’évaluerla rentabilité des interventions.

La lutte contre le tabagisme est-elle préjudiciablepour l’économie ?

Nous allons analyser brièvement les unes après les autres certaines des craintesles plus fréquemment exprimées, sous forme de réponses aux questions lesplus couramment posées.

Une chute de la demande de tabac provoquera-t-elleune montée du chômage ?

L’unes des grandes raisons de l’inaction des pouvoirs publics tient à la crainted’éliminer des emplois. Cette crainte est alimentée principalement par les

Page 86: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

72 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

arguments du lobby du tabac, qui affirme que la lutte contre le tabagismesupprimerait des millions d’emplois dans le monde. Pourtant, si l’on se penchede plus près sur ces arguments et sur les données les justifiant, on constate queles effets négatifs sur l’emploi de la lutte contre le tabagisme sont largementexagérés. La culture du tabac tient une place peu importante dans la plupartdes économies. Mis à part un tout petit nombre de pays agricoles fortementtributaires de la culture du tabac, non seulement il n’y aurait pas de suppres-sion nette d’emplois, mais il pourrait même y avoir création d’emplois si laconsommation mondiale de tabac baissait. Comment cela ? Parce que l’argentconsacré auparavant au tabac servirait à acheter d’autres biens et services, créantainsi des emplois. Les quelques pays tributaires du tabac conserveraient desmarchés suffisants pour ne pas perdre d’emplois pendant des années, mêmeface à une baisse progressive de la demande.

La branche professionnelle du tabac estime à 33 millions le nombre desgens employés dans la culture du tabac dans le monde. Ce total comprend lestravailleurs saisonniers, à temps partiel et les familles de cultivateurs. Il en-globe aussi les exploitants qui produisent également d’autres cultures. Sur cetotal, 15 millions vivent en Chine et 3,5 millions en Inde. Le Zimbabwe compteune centaine de milliers de travailleurs agricoles employés dans les exploita-tions de tabac. Le tabac fait vivre un nombre relativement faible, mais néanmoinssubstantiel, de travailleurs dans les pays à revenu élevé : aux États-Unis, parexemple, il existe 120 000 exploitations productrices de tabac, et dans l’Unioneuropéenne, il en existe 135 000, surtout petites, en Grèce, Italie, Espagne etFrance. Dans le secteur manufacturier, le tabac ne représente qu’un petit nombred’emplois (moins de 1 % des emplois manufacturiers dans la plupart des pays),car la fabrication est largement mécanisée. On note cependant quelques ex-ceptions à cette règle : le tabac représente 8 % de la production manufacturièreen Indonésie, et entre 2,5 et 5 % en Turquie, au Bangladesh, en Égypte, auxPhilippines et en Thaïlande. Toutefois, d’une manière générale, il est évidentque la production de tabac constitue une faible partie de l’activité économiquedans la plupart des pays.

L’argument suivant lequel la lutte contre le tabagisme provoquera des sup-pressions d’emplois massives est généralement fondé sur des études financéespar la branche industrielle du tabac, qui estiment le nombre d’emploisattribuables au tabac dans chaque secteur, les revenus associés à ces emplois,les recettes fiscales générées par les ventes de tabac et la part du tabac dans labalance commerciale du pays, le cas échéant. Ces études estiment égalementl’effet démultiplicateur de l’argent gagné dans la culture et la manufacture dutabac sur le reste de l’économie. Cependant, les méthodes utilisées dans cesétudes sont contestables. En effet, elles évaluent la part brute du tabac dansl’emploi et dans l’économie. Elle tiennent rarement, voire jamais, compte dufait que si les gens ne dépensent pas d’argent pour acheter du tabac, ils s’en

Page 87: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

73LES COÛTS ET LES CONSÉQUENCES DE LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME

servent généralement pour acheter d’autres biens, créant ainsi des emploiscompensatoires. En outre, ces méthodes surestiment l’impact de toute inter-vention visant à réduire la demande, car leurs estimations de certaines va-riables, telles que les tendances du tabagisme et celles de la mécanisation de laproduction de cigarettes, sont généralement statiques.

Les études indépendantes de l’impact du tabac sur l’activité économiquedes pays particuliers aboutissent à des conclusions différentes. Au lieu deconsidérer la part brute du tabac dans l’économie, elles retiennent sa part nette,c’est-à-dire les avantages pour l’économie de toutes les activités liées au tabac,après la prise en compte de l’effet compensatoire des emplois qui seraientcréés par l’argent non consacré au tabac. Ces études concluent que les mesuresde lutte contre le tabagisme auraient un effet faible ou nul sur l’emploi total,sauf dans un très petit nombre de pays producteurs de tabac.

Selon une étude effectuée au Royaume-Uni, le nombre d’emplois auraitaugmenté de plus de 100 000 équivalents plein temps en 1990 si les anciensfumeurs avaient consacré leur argent à l’achat de produits de luxe, et si un reculdes recettes fiscales survenu à la suite de mesures non fiscales de réduction de lademande avait été compensé par une taxe sur d’autres biens et services. Uneétude menée aux États-Unis a abouti à la conclusion que 20 000 emploissupplémentaires seraient créés entre 1993 et 2000 si la totalité de la consommationintérieure était éliminée. Il y aurait suppression nette d’emplois dans la régionproductrice de tabac, mais le total national augmenterait, car l’argent économisésur les achats de tabac serait injecté dans d’autres secteurs de l’économie. Il estcertain que les transitions dans un secteur peuvent être douloureuses et souleverdes problèmes sociaux et politiques sur le court terme, mais les transitions sontdes phénomènes courants et celle-ci n’aurait rien d’exceptionnel.

Ces observations ne concernent pas uniquement les pays à revenu élevé :de fait, certains pays à faible revenu pourraient bénéficier d’avantagessurprenants. Ainsi, selon une étude réalisée en préparation de ce rapport, leBangladesh, qui importe la presque totalité de sa consommation de cigarettes,serait nettement gagnant si toute la consommation intérieure disparaissait. Dansle secteur structuré de l’économie, la création nette d’emplois pourrait atteindre18 % si les fumeurs consacraient leur argent à l’achat d’autres biens et services.

L’impact économique d’une chute mondiale de la consommation de tabacvarierait suivant les types d’économie. À cet effet, on peut grouper les pays entrois catégories. La première comprend ceux qui produisent plus de tabac brutqu’ils n’en consomment, autrement dit, les exportateurs nets, tels que le Brésil,le Kenya et le Zimbabwe. La deuxième est formée des pays où la consommationest à peu près égale à la production, c’est-à-dire les pays « en équilibre ». Dansla troisième catégorie, on trouve les pays qui consomment plus qu’ils neproduisent, soit les importateurs nets, comme l’Indonésie, le Népal et le VietNam. C’est la catégorie la plus nombreuse.

Page 88: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

74 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Dans ce dernier groupe, ce sont les consommateurs qui supportent la ma-jeure partie de l’impact des mesures de lutte contre le tabagisme, et le nombred’emplois créés devrait l’emporter sur le nombre d’emplois perdus (tableau 6.1).Cependant, les quelques pays agricoles qui sont fortement tributaires du tabacpourraient subir une perte nette d’emplois. Parmi les plus touchés seraient ceuxqui exportent la plus grande partie de leur récolte, comme le Malawi et le Zim-babwe. Selon un modèle, si la culture du tabac disparaissait entièrement du jourau lendemain au Zimbabwe, la perte nette d’emplois atteindrait 12 %. Il convienttoutefois de souligner que ce scénario extrême a peu de chances de se réaliser.

TABLEAU 6.1 EFFETS SUR L’EMPLOI DE LA RÉDUCTION OU DE L’ÉLIMINATIONDE LA CONSOMMATION DE TABAC

Variations nettesde l’emploi

Catégorie, en pourcentage nom du de l’économie pendantpays et année l’année indiquée Hypothèses

Exportateurs netsCanada (1992) 0,1 % Élimination de toutes les dépenses de consommation

intérieures, dépenses conformes aux schémas de dépense« moyens »

États-Unis (1993) 0 % Élimination de toutes les dépenses de consommationintérieures, dépenses conformes aux schémas de dépense« moyens »

Royaume-Uni (1990) +0,5 % Réduction de 40 % des dépenses de consommation detabac, dépenses conformes aux schémas « nouveauxex-fumeurs »

Zimbabwe (1980) -12,4 % Élimination de toute la consommation intérieure de tabacet redistribution de la production selon les schémasentrée-sortie « moyens »

Économies en équilibreAfrique du Sud (1995) +0,4 % Élimination de toutes les dépenses de consommation

intérieures, dépenses conformes aux schémas des« nouveaux ex-fumeurs »

Écosse (1989) +0,3 % Élimination de toutes les dépenses de consommationintérieures, dépenses conformes aux schémas de dépense« moyens »

Importateurs netsÉtat du Michigan (E.U.)(1992) +0,1 % Élimination de toutes les dépenses de consommation

intérieures, dépenses conformes aux schémas de dépense« moyens »

Bangladesh (1994) +18,7 % Élimination de toutes les dépenses de consommationintérieures, dépenses conformes aux schémas de dépense« moyens »

Sources : Buck, David et al., 1995 ; Irvine, I. J. et W. A. Sims, 1997 ; McNicoll, I. H. et S. Boyle, 1992 ; van derMerwe, Rowena et al., document de référence ; Warner, K. E. et G. A. Fulton, 1994 ; Warner, K. E. et al, 1996.

Page 89: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

75LES COÛTS ET LES CONSÉQUENCES DE LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME

Au niveau des ménages et des petites communautés rurales, cet ajustemententraînerait une perte de revenu, des bouleversements et éventuellement l’exode,et de nombreux gouvernements auraient à cœur de faciliter le processus detransition (encadré 6.1)

Il serait surprenant qu’on assiste à uneréduction importante et immédiate dela production de tabac. Comme nousl’avons montré au chapitre 5, il est fortpeu probable que les politiques visantà limiter la production de tabac soientapplicables ou politiquement accep-tables dans la majorité des pays.Parallèlement, si la demande de tabacbaisse, elle le sera lentement, ce quipermettra aux plus directement tou-chés de s’adapter au même rythme.

Il est évidemment essentiel pour lespouvoirs publics d’évaluer exactementla manière dont une baisse progres-sive de la demande affectera lesrégions productrices de tabac. Selonles études qui ont été effectuées dansla plupart des pays à revenu élevé,l’économie de ces régions se diversifiepeu à peu. Dans ces pays, les pro-ducteurs de tabac procèdent à desajustements économiques depuisplusieurs dizaines d’années et, dansde nombreuses régions productrices,l’économie est plus diversifiée que parle passé. De nombreux cultivateurssouhaitent poursuivre la diversifica-tion. Selon une enquête effectuéeauprès des producteurs de tabacaméricains, par exemple, la moitié despersonnes interrogées avaient au

ENCADRÉ 6.1 COMMENT AIDER LES AGRICULTEURS LES PLUS DÉFAVORISÉS

moins entendu parler d’exploitants deleur comté qui poursuivaient d’autresactivités agricoles rentables. Lesproducteurs jeunes et plus éduquéss’intéressaient plus à la diversifica-tion que leurs aînés et estimaient lachose plus réalisable que ces der-niers. De même, une impor tanteminorité savaient que des change-ments étaient possibles, mais recon-naissaient qu’ils seraient lents. Huitsur dix ont déclaré qu’ils pensaientpersonnellement continuer à cultiverle tabac, mais un sur trois a réponduqu’il déconseillerait à ses enfants depoursuivre cette activité.

Néanmoins, les autorités pour-raient vouloir aider les producteurs lesplus démunis à faire face aux coûtsde la transition, cela pour plusieursraisons. En effet, les exploitationsagricoles sont une source d’emploismajeure en milieu rural, et de nom-breuses sociétés leur attribuent unegrande importance sociale. En outre,les exploitants peuvent représenterune opposition politique importantedans la maîtrise du tabagisme. Plu-sieurs mesures peuvent être en-visagées : encourager de bonnespolitiques agricoles et commerciales,élaborer de vastes programmes de

(suite page suivante)

Page 90: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

76 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

ENCADRÉ 6.1 (suite)

développement rural, aider les pro-ducteurs à diversifier leur production,offrir des possibilités de formation etdivers programmes de protectionsociale. Certains gouvernements ontproposé de financer ces activités aumoyen des recettes fiscales du tabac.Les réussites locales peuvent être unebonne source d’enseignements. AuxÉtats-Unis, par exemple, certaines

communautés rurales qui sont delongue date tributaires du tabac ontformé des coalitions avec des groupesactifs dans le domaine de la santépublique, et se sont entendues sur unensemble de principes régissant lespolitiques de nature à réduire laconsommation de tabac et à pro-mouvoir en même temps la pérennitédes communautés rurales.

Le relèvement de la fiscalité du tabac réduira-t-illes recettes publiques ?

Les pouvoirs publics sont fréquemment opposés au relèvement de la fiscalitédu tabac, persuadés que la baisse de la demande qui en résulterait ferait perdredes recettes importantes à l’État. En réalité, c’est l’inverse qui est vrai sur lecourt et moyen terme. Sur la longue période, les choses sont moins claires.L’augmentation des recettes fiscales sur le court et moyen terme s’expliquepar le fait que la demande de cigarettes est relativement inélastique. Il estévident que la hausse des prix fera baisser la consommation, mais dans uneproportion inférieure à celle de l’augmentation du prix. Au Royaume-Uni,par exemple, les taxes sur les cigarettes ont augmenté à plusieurs reprises aucours des 30 dernières années. Par suite de ces augmentations, et égalementdu développement des connaissances sur les conséquences du tabagisme pourla santé, la consommation a fortement baissé pendant la même période, puisquele nombre des ventes annuelles de cigarettes est tombé de 138 milliards à80 milliards d’unités. Pourtant, les recettes continuent d’augmenter. Pourchaque hausse de 1 %, les recettes publiques s’accroissent de 0,6 à 0,9 % auRoyaume-Uni (figure 6.1). Un modèle mis au point en préparation de ce rap-port montre que des majorations modestes de 10 % des droits de consommationsur les cigarettes appliquées dans tous les pays feraient progresser les recettesfiscales provenant du tabac d’environ 7 % en moyenne, les chiffres variantsuivant les pays.

Page 91: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

77LES COÛTS ET LES CONSÉQUENCES DE LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME

6000

6500

7000

7500

8000

8500

9000

1971 1974 1977 1980 1983 1986 1989 1992 1995Année

Rec

ette

s fis

cale

s (m

illion

s de

livr

es)

£ 1,40

£ 1,60

£ 1,80

£ 2,00

£ 2,20

£ 2,40

£ 2,60

£ 2,80

£ 3,00

Prix

(en

livre

s de

199

4)

RECETTES FISCALES

PRIX

FIGURE 6.1 LA HAUSSE DE LA FISCALITÉ DU TABAC FAIT AUGMENTERLES RECETTESPrix réel et recettes fiscales du tabac au Royaume-Uni, 1971–95

Source : Townsend, Joy. « The Role of Taxation Policy in Tobacco Control. » DansAbedian, I. et al., directeurs de publication. The Economics of Tobacco Control. LeCap, Afrique du Sud, Centre de recherche fiscale appliquée, Université du Cap.

Certaines mesures autres que la hausse des prix, comme l’interdiction dela publicité et des promotions, les campagnes d’information publiques et lesvignettes de mise en garde, devraient entraîner une baisse des recettes, de mêmeque la libéralisation de la vente des substituts nicotiniques et autres aides ausevrage. Cependant, l’effet de ces actions sur les recettes publiques seraitprogressif et compensé par la majoration de la fiscalité prévue dans lesprogrammes généraux de maîtrise du tabagisme.

Il importe bien entendu de reconnaître que, si la lutte contre le tabagismea pour objectif ultime de protéger la santé des individus, les pouvoirs publicsdevraient souhaiter voir la consommation de tabac baisser à tel point qu’en finde compte, les recettes fiscales provenant du tabac commenceraient elles aussià diminuer. On pourrait considérer cette perte de recettes comme l’aune àlaquelle mesurer le succès de la prévention du tabagisme, ou la disposition dela société à payer les avantages sanitaires du recul du tabagisme. Mais c’est làune possibilité théorique plutôt qu’un scénario probable. Selon les tendancesactuelles, le nombre de fumeurs continuera sans doute à augmenter dans les

Page 92: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

78 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

pays à faible revenu au cours des 30 prochaines années. Tout aussi important,les autorités auraient toute latitude pour adopter un impôt sur le revenu ou uneautre taxe à la consommation qui remplacerait les recettes fiscales du tabac.

L’augmentation des taxes sur le tabac stimulera-t-ellela contrebande ?

D’aucuns affirment que ce serait le cas et que l’intensification de la contrebandes’accompagnerait d’un surcroît d’activités criminelles. Dans ce scénario, letabagisme demeure élevé et les recettes fiscales tombent. Cependant, les ana-lyses économétriques et autres effectuées dans un grand nombre de pays àrevenu élevé indiquent que, même en présence d’une contrebande importante,la hausse des taxes fait augmenter les recettes et baisser le tabagisme. Parconséquent, si la contrebande constitue indéniablement un problème sérieux,et si des écarts importants entre les taux de fiscalité encouragent la contrebande,ce n’est pas en réduisant les taxes ni en renonçant à les augmenter qu’il convientde réagir, mais en réprimant la criminalité. Par ailleurs, il est logique de penserque la contrebande serait moins attractive si les pays s’entendaient avec leursvoisins pour harmoniser la fiscalité des cigarettes.

C’est ce qu’illustre clairement le cas du Canada. Au début des années 80et 90, ce pays a fortement majoré les taxes sur les cigarettes, si bien que leurprix réel a sensiblement augmenté. Entre 1979 et 1991, le tabagisme des ado-lescents a baissé d’environ deux tiers, celui des adultes a diminué et les recettesfiscales ont enregistré une hausse substantielle. Pourtant, préoccupé par lamontée de la contrebande, le gouvernement a fortement réduit les taxes sur lescigarettes. Il en est résulté une progression du tabagisme chez les adolescentset dans l’ensemble de la population, tandis que les recettes fédérales provenantdes taxes sur le tabac diminuaient dans une mesure deux fois plus importantequ’on ne l’avait prédit.

Le cas de l’Afrique du Sud est également instructif. Pendant les années 90,l’Afrique du Sud a considérablement relevé les droits de consommation sur lescigarettes (plus de 450 %). En pourcentage du prix de vente, les taxes sontpassées de 38 à 50 %. Comme il fallait s’y attendre, la contrebande a aussiaugmenté, passant de 0 à 6 % du marché, soit la moyenne mondiale. Les ventesont reculé de plus de 20 %, signalant une baisse nette substantielle de laconsommation en dépit de la contrebande. Entre-temps, les recettes fiscalesont plus que doublé en valeur réelle.

Des chercheurs ont évalué au moyen d’une étude économétrique l’impactpotentiel de divers scénarios fiscaux sur l’incitation à la contrebande entrepays européens. Ils ont conclu que, même si les taux de contrebande étaientdes multiples des taux officiels, les recettes fiscales n’en augmenteraient pasmoins. Ils ont également conclu que la contrebande induite par la hausse des

Page 93: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

79LES COÛTS ET LES CONSÉQUENCES DE LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME

prix serait sans doute un problème plus sérieux dans les pays où les cigarettessont déjà chères. Dans les pays où elles sont relativement bon marché, la haussedes prix n’aurait que peu d’effet sur la contrebande.

Les consommateurs défavorisés seront-ils les plus touchéspar la charge financière ?

Dans de nombreux pays, il est généralement admis que le régime fiscal doitêtre équitable, en ce sens que l’impôt doit peser plus lourdement sur ceux quisont le plus en mesure de payer. C’est sur ce principe que reposent les régimesd’impôts progressifs, dans lesquels les taux marginaux s’élèvent à mesure quecroît le revenu. La fiscalité du tabac, au contraire, est régressive, dans la mesureoù, comme les autres taxes de consommation, elles imposent une chargefinancière disproportionnée aux économiquement faibles. Ce caractère régressifest encore accentué par le fait que le tabagisme est plus fréquent parmi lesménages défavorisés que parmi les ménages aisés, en sorte que les fumeurspauvres dépensent une part plus élevée de leur revenu sous forme de taxes surles cigarettes.

Certains craignent que, par suite de l’augmentation des taxes, les pauvresne consacrent une part croissante de leur revenu aux cigarettes, grevant encoredavantage le budget familial. Même si la demande fléchit, il n’en est pas moinsvrai que les consommateurs défavorisés qui continueront à consommer plus detabac que les riches, acquitteront plus de taxes. Cependant, de nombreusesétudes montrent que les personnes à faible revenu sont plus sensibles aux varia-tions de prix que les personnes à revenu élevé. Si leur consommation baisseplus rapidement, leur charge fiscale relative diminue en comparaison de celledes consommateurs aisés, même si elles continuent à payer davantage dansl’absolu. Deux études réalisées aux États-Unis et au Royaume-Uni confortentl’idée que l’augmentation des taxes sur le tabac est progressive, même si ensoi la fiscalité du tabac est régressive. Il faudrait disposer également d’étudesconcernant les pays à revenu faible et intermédiaire pour confirmer cette ob-servation. Bien entendu, tous les fumeurs individuels doivent renoncer auxavantages perçus de la cigarette et subir le coût du retrait, pertes qui sontrelativement plus importantes pour les consommateurs défavorisés.

La fiscalité du tabac, comme toutes les autres taxes, doit s’exercer comptetenu de la nécessité de veiller à ce que l’ensemble du régime des impôts et desdépenses soit proportionnel ou progressif. À l’heure actuelle, le régime fiscalde la plupart des pays est composé de taxes nombreuses et variées, l’objectifgénéral étant qu’il soit progressif ou proportionnel, même si des taxesparticulières ou certains éléments du système ont un caractère régressif. Pourcompenser le caractère régressif de la fiscalité du tabac, l’État peut adopter desimpôts plus progressifs ou d’autres programmes de transfert. Des services

Page 94: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

80 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

sociaux bien ciblés, notamment des programmes d’éducation et de santé, iraientdans ce sens.

En principe, il convient de financer les avantages publics au moyen desrecettes générales. Pour autant, on ne saurait négliger les capacités de recettesexceptionnelles de la fiscalité du tabac. On estime qu’en Chine, une hausse de10 % de la taxe sur les cigarettes réduirait la consommation de 5 % et accroîtraitles recettes de 5 %, ce qui produirait suffisamment de recettes pour financer unprogramme de services de santé essentiels pour un tiers des 100 millions deChinois les plus démunis.

La lutte contre le tabagisme imposera-t-elle des coûtsaux particuliers ?

En réduisant la consommation de cigarettes, les mesures de lutte contre letabagisme réduiront la satisfaction, ou avantages, du fumeur, tout comme lesrestrictions imposées à la consommation de tout autre bien réduit le bien-êtredu consommateur. Le fumeur régulier doit soit renoncer au plaisir de fumer,soit supporter les coûts du sevrage, ou les deux à la fois. Cela représente uneperte d’excédent du consommateur, qui contrebalance les avantages procuréspar la maîtrise du tabagisme.

Cependant, comme nous l’avons vu plus haut, le tabac n’est pas un biende consommation ordinaire, offrant des avantages ordinaires, car il soulèvedes problèmes de toxicomanie et d’information. Pour le fumeur toxicomanequi regrette de fumer et souhaiterait cesser, les avantages de la cigarettecomprennent sans doute l’absence de symptômes de retrait. Si les mesures delutte contre le tabagisme réduisent la consommation individuelle, ces fumeursdevront supporter des coûts de retrait substantiels.

Étant donné que la plupart des fumeurs se disent désireux de cesser, maisque peu d’entre eux y parviennent, on peut penser que les coûts perçus dusevrage sont plus grands que les coûts perçus de l’absence de sevrage, parexemple les méfaits pour la santé. Si l’augmentation de la fiscalité inverse cerapport, certains fumeurs peuvent en venir à renoncer à la cigarette. Cependant,eux aussi auront à supporter des coûts de retrait. Mieux informés des risquesdu tabac pour la santé, les fumeurs percevraient que le coût de continuer àfumer est plus élevé et se rendraient compte des avantages du sevrage.L’élargissement de l’accès aux substituts nicotiniques et à d’autres traitementscontribuerait à faire baisser les coûts du sevrage.

Certains diront que les mesures de lutte contre le tabagisme imposent descoûts plus lourds aux individus défavorisés qu’aux individus aisés. Mais sicela est vrai pour le tabac, la situation n’a rien d’exceptionnel dans le domainede la santé publique. La décision de subir des interventions sanitaires de toutessortes, comme la vaccination des enfants ou le planning familial, est souvent

Page 95: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

81LES COÛTS ET LES CONSÉQUENCES DE LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME

plus coûteuse pour les ménages pauvres. Par exemple, une famille pauvre peuthabiter loin du dispensaire, et pendant qu’elle s’y rend, elle renonce à un cer-tain revenu. Cependant, les responsables de la santé publique n’hésitentgénéralement pas à affirmer que les avantages de la plupart des interventionspour la santé valent le sacrifice, tant que celui-ci n’est pas assez importantpour décourager les individus démunis.

Lorsqu’on examine la perte d’excédent du consommateur subie par lesfumeurs, il importe de faire une distinction entre les fumeurs réguliers et lesautres. Pour les enfants et les adolescents qui sont soit débutants soit simplementfumeurs en puissance, le coût de ne pas fumer est certainement moins élevé,puisque la dépendance n’est peut-être pas encore établie et que le coût du retraitdevrait être minime. Parmi les autres coûts, on peut citer le rejet par une partiedes pairs, une réduction de la satisfaction de se rebeller contre les parents et laperte des autres plaisirs qu’apporte la cigarette.

Les restrictions sur l’usage du tabac dans les lieux publics et au travailimposent aussi des coûts aux fumeurs, en les obligeant à sortir pour fumer ouà fumer moins. Ces interventions transfèrent comme il se doit les coûts dutabagisme des non-fumeurs aux fumeurs. Là encore, cette hausse des coûtssera ressentie par tous les fumeurs et en amènera certains à modifier leurcomportement tabagique. Pour les non-fumeurs, en revanche, les mesures delutte contre le tabagisme se traduiront par un bien-être supplémentaire. Onpeut penser que les pertes de bien-être des fumeurs sont minimisées si lesmesures de lutte contre le tabagisme font partie d’un programme complet.

La maîtrise du tabagismes en vaut-elle le prix ?

Nous analysons à présent la question de savoir si la lutte contre le tabagismeest rentable en comparaison d’autres mesures de santé publique. Pour lesgouvernements qui envisagent leurs options, cette information pourraitconstituer un facteur de décision important.

On peut estimer la rentabilité de différentes interventions de santé publiqueen estimant les gains en années de vie en bonne santé que chaque interventionpermettra de réaliser moyennant les coûts publics requis pour la mettre enœuvre. Selon le Rapport sur le développement dans le monde de 1993 de laBanque mondiale, Investir dans la santé, les mesures de maîtrise du tabagismeont un bon rapport coût-efficacité et méritent de figurer dans un programmeminimum de soins de santé. Selon plusieurs études, les programmes d’actionpublics coûtent entre 20 et 80 dollars par année actualisée de vie en bonnesanté de plus (une année de vie corrigée du facteur invalidité, ou AVCI)1.

Pour ce rapport, nous avons estimé la rentabilité de chacune des mesuresde réduction de la demande examinées au chapitre 4 : accroissement de lafiscalité, programme de mesures autres que de prix, comprenant l’interdiction

Page 96: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

82 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

de la publicité et des promotions, une meilleure information sanitaire et desrestrictions sur le tabagisme public, et accès aux substituts nicotiniques. Lesrésultats peuvent aider particulièrement les pays à revenu faible et intermédiaireà évaluer les domaines sur lesquels doivent porter principalement leurs inter-ventions, compte tenu de leurs besoins propres.

Les estimations ont été obtenues au moyen du modèle décrit dansl’encadré 4.1. On trouvera une description détaillée des hypothèses et desparamètres utilisés dans un document de référence établi en préparation de cerapport. Certaines interventions, comme le relèvement des taxes ou l’interdictionde la publicité et des promotions, ont un coût minime ou nul, puisqu’elles necoûtent qu’un « trait de plume ». Par prudence, le modèle a attribué des coûtsde mise en œuvre et d’administration importants, ainsi que le coût desmédicaments dans le cas de la substitution nicotinique. Toutefois, nous n’avonspas tenu compte des coûts éventuels pour les individus. Les résultats (ta-bleau 6.2) indiquent que les majorations fiscales ont de loin le meilleur rapportcoût-efficacité et que leurs avantages sont comparables à ceux de nombreusesinterventions sanitaires. S’agissant des frais administratifs liés à la majorationet au suivi des taxes sur le tabac, suivant les hypothèses retenues, le coût de lamise en œuvre d’une hausse des taxes de 10 % pourrait être inférieur à cinqdollars par AVCI (et ne dépasserait certainement pas 17 dollars par AVCI) dansles pays à revenu faible et intermédiaire. Ces valeurs sont comparables à cellesde nombreuses interventions sanitaires financées par l’État, telles que la vacci-nation des enfants. Les mesures autres que de prix peuvent également être trèsrentables pour les pays à revenu faible et intermédiaire. Suivant les hypothèsesretenues, certains programmes ne coûteraient pas plus de 68 dollars par AVCI,soutenant raisonnablement la comparaison avec plusieurs types d’interventionssanitaires bien établies, tels que le programme de traitement intégré de l’enfantmalade, dont le coût a été estimé entre 30 et 50 dollars par AVCI dans les paysà faible revenu et entre 50 et 100 dollars dans les pays à revenu intermédiaire.

Nous avons également évalué la rentabilité probable d’un élargissementde l’accès aux substituts nicotiniques. À cet effet, nous avons supposé que lecoût des substituts nicotiniques serait assumé par la collectivité. Les résultatsindiquent que les pouvoirs publics devront procéder avec toute la prudencevoulue et effectuer des analyses de rentabilité au niveau local avant d’envisagerde fournir ces nouveaux traitements aux frais de la collectivité. Il est importantde noter que la simple libéralisation de l’accès aux substituts nicotiniques abeaucoup plus de chances d’être rentable, et que la rentabilité de ces traitementss’améliorerait à mesure que leur efficacité et le nombre d’adultes désireux decesser augmenteraient.

Il faut de toute évidence poursuivre les recherches pour déterminerl’efficacité de ces programmes, leur rapport coût-efficacité probable dans despays ayant des niveaux de revenu différents et leur coût pour les individus.

Page 97: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

83LES COÛTS ET LES CONSÉQUENCES DE LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME

TABLEAU 6.2 RENTABILITÉ DES MESURES DE LUTTE CONTRE LE TABAGISMEValeur de différentes interventions (dollars par AVCI gagnée), par région

Hausses des Mesures autres SN (fournis par la prix de que de prix, collectivité) 25 %

Région 10 % efficacité 5 % de couverture

Afrique subsaharienne 2 à 8 34 à 136 195 à 206Amérique latine et Caraïbes 10 à 42 173 à 690 241 à 295Asie de l’Est et Pacifique 3 à 13 53 à 212 338 à 355Asie du Sud 3 à 10 32 à 127 289 à 298Europe orientale et Asie centrale 4 à 15 64 à 257 227 à 247Moyen-Orient et Afrique du Nord 7 à 28 120 à 482 223 à 260Revenu faible et intermédiaire 4 à 17 68 à 272 276 à 297Revenu élevé 161 à 645 1 347 à 5 388 746 à 1 160Note : Pour tous les calculs, nous avons utilisé un taux d’escompte de 3 % et nous avons projeté les avantagessur une période de 30 ans ; pour les interventions autres que de prix, les coûts ont été projetés sur une périodede 30 ans. Les fourchettes résultent des variations du coût de fourniture des services, qui vont de 0,005 % à0,02 % du PNB annuel.Source : Ranson, Kent, P. Jha, F. Chaloupka et A. Yurekli. Effectiveness and Cost-effectiveness of Price In-creases and Other Tobacco Control Policy Interventions. Document de référence.

Le coût de la mise en œuvre d’un programme global de lutte contre le tabagismen’a été estimé que de manière approximative. Les faits observés dans les pays àrevenu élevé semblent indiquer que ce coût serait très modique. En effet, les paysà revenu élevé qui ont des programmes très complets y consacrent annuellemententre 50 cents et 2,50 dollars par habitant. Dans cette perspective, le coût de lalutte contre le tabagisme dans les pays à revenu faible et intermédiaire devrait êtreabordable, même dans les pays où les dépenses de santé publiques par habitantsont extrêmement faibles. Les auteurs du Rapport sur le développement dans lemonde de 1993 de la Banque mondiale, Investir dans la santé, estimaient que pourappliquer un programme d’interventions de santé publique essentielles comprenantdes mesures de lutte contre le tabagisme, il en coûterait 4 dollars par habitant dansles pays à faible revenu, et 7 dollars dans les pays à revenu intermédiaire. La luttecontre le tabagisme ne représenterait qu’une fraction du total.

Note

1. Une année de vie corrigée du facteur invalidité (AVCI) est une mesure temporellequi permet aux épidémiologistes de saisir, au moyen d’un indicateur unique, le nombred’années de vie perdues à la suite de décès prématurés (par décès prématuré on entendun décès survenant avant l’âge jusqu’auquel le défunt aurait pu compter vivre s’il étaitmembre de la population modèle normalisée, où l’espérance de vie à la naissance estégale à celle de la population ayant la durée de vie la plus longue, à savoir la popula-tion japonaise) et les années d’invalidité d’une gravité et d’une durée données. UneAVCI est une année de vie en bonne santé perdue.

Page 98: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication
Page 99: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

85

C H A P I T R E 7

Programme indicatif d’action

SEULES deux causes de mortalité sont importantes et en progrèsdans le monde : le VIH et le tabac. Si la plupart des pays ont au moins commencéà réagir face au VIH, il n’en est pas de même dans le cas de l’épidémie mondialede tabagisme, face à laquelle la réaction est jusqu’à présent limitée et sporadique.Nous examinons dans ce chapitre certains des facteurs qui pourraient déciderles autorités à agir et nous proposons un programme indicatif d’action.

Tous les gouvernements savent qu’ils ont à tenir compte non seulementdes facteurs économiques, mais de nombreux autres également pour élaborerleurs grandes orientations. Les mesures de lutte contre le tabagisme ne fontpas exception à la règle. La plupart des sociétés sont soucieuses de protégerleurs enfants, encore qu’à des degrés variables selon les cultures. Ellessouhaiteraient aussi atténuer les souffrances et les dommages affectifs causéspar la charge de morbidité et de décès prématurés du tabac. Les étudeséconomiques n’ont pas encore permis de former un consensus sur la manièred’évaluer cette charge. La lutte contre le tabagisme est une option attrayantepour les dirigeants qui tiennent à améliorer la santé publique. Étant donnél’ampleur de la charge de morbidité, une réduction même modeste se traduiraitpar des avancées sensibles sur le plan de la santé. Les sociétés sont d’accordsur le fait qu’il est souhaitable d’accomplir des progrès dans le domaine de lasanté, comme en témoignent les politiques et les mesures de lutte contre letabagisme prises par l’OMS et d’autres organisations internationales(encadrés 7.1 et 7.2 et appendice A).

Page 100: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

86 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Beaucoup de sociétés pourraient penser que la meilleure raison de pren-dre l’offensive contre le tabagisme consiste à dissuader les enfants et les ado-lescents de fumer. Or, comme nous l’avons vu au chapitre 3, les interventionsaxées précisément sur les consommateurs les plus jeunes n’ont guère de chancesde réussir, tandis que les interventions réellement efficaces, la fiscalitéessentiellement, affectent aussi les adultes. De même, les interventions visantexpressément à protéger les non-fumeurs sont sans effet pour la plupart d’entreeux et, encore une fois, la fiscalité est l’option la plus efficace. En situationréelle, de nombreuses sociétés jugent acceptable, voire souhaitable, que leseffets des mesures prises ne se limitent pas aux populations cibles. En tout étatde cause, les politiques qui auraient pour seul effet de décourager les enfantsde commencer à fumer n’auraient aucun impact sur le nombre mondial dedécès liés au tabac avant plusieurs dizaines d’années, puisque la plupart desdécès projetés pour la première moitié du XXIe siècle concernent les fumeursactuels (figure 7.1). Par conséquent, les autorités désireuses d’obtenir desavancées sanitaires à moyen terme voudront aussi encourager les adultes àcesser de fumer.

Surmonter les obstacles politiques au changement

Pour être efficaces, les gouvernements qui décident d’appliquer des mesuresde lutte contre le tabagisme doivent s’assurer auparavant que cette décisionjouira d’un large soutien de l’opinion. On pourrait penser que les fumeurs sontfarouchement opposés à la lutte anti-tabac, mais la réalité est tout autre : leschercheurs qui ont effectué des études dans les pays à revenu élevé dotés deprogrammes efficaces de lutte contre le tabagisme ont noté que la plupart desfumeurs adultes sont favorables à certaines mesures, telles qu’une large diffu-sion de l’information. Le gouvernement ne peut pas, à lui seul, assurer la réussitede ces programmes sans la participation de la société civile, du secteur privé etde différents groupes d’intérêts. Les programmes ont de plus grandes chancesde réussir s’ils ont été entérinés par des intérêts sociaux très divers, qui enassument le pilotage et ont le pouvoir de mettre en œuvre les changements etd’assurer leur pérennité.

Peu de chercheurs ont tenté de mesurer l’impact combiné de différentesinterventions. Comme nous l’avons montré au chapitre 4, chaque interventiondistincte peut sauver des millions de vies, mais on ne sait pas encore si unprogramme comportant plusieurs mesures en sauverait encore plus que lasomme de chaque intervention particulière. Les pays où existent desprogrammes accordent sans doute une importance différente à chacun de leurséléments, compte tenu du contexte national. Par exemple, un pays où la fiscalitédu tabac est plus faible que dans les pays voisins notera sans doute qu’unehausse de la fiscalité exercera un effet particulièrement marqué sur la

Page 101: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

87PROGRAMME INDICATIF D’ACTION

FIGURE 7.1 SI LES FUMEURS ACTUELS NE CESSENT PAS DE FUMER,LE NOMBRE DES DÉCÈS LIÉS AU TABAC AUGMENTERA CONSIDÉRABLEMENTAU COURS DES 50 PROCHAINES ANNÉESNombre cumulé des décès liés au tabac entre 1950 et 2050, pour différentes stratégiesd’intervention (estimation)

Note : Peto et al. estiment à 60 millions le nombre de décès dus au tabac survenusentre 1950 et 2000 dans les pays développés. Nous estimons que 10 millions de décèsadditionnels auront eu lieu entre 1990 et 2000 dans les pays en développement. Nousavons pris pour hypothèse que les pays en développement n’ont aucun décès dû autabac avant 1990 et que le nombre mondial de ces décès est resté minime jusqu’en1950. Les projections relatives aux décès à compter de 2000 reposent sur Peto (com-munication personnelle [1998]).Sources : Peto, Richard et al. 1994. Mortality from Smoking in Developed Countries1950–2000. Oxford University Press ; et Peto, Richard, communication personnelle.

70

520

70

340

500

220

190

0

100

200

300

400

500

1950 2000 2025 2050Année

Déc

ès li

és a

u ta

bac

(milli

ons)

Référence

Si la proportion de jeunes adultescommençant à fumer diminuede moitié d'ici 2020Si la consommation des adultesdiminue de moitié d'ici 2020

consommation de cigarettes. De même, dans un pays où la population estrelativement éduquée et aisée, une hausse des prix aura moins d’effet, tandisqu’une campagne d’information sera plus efficace. Les facteurs culturels,comme un passé totalitaire, peuvent influer sur la façon dont certaines mesures,par exemple l’interdiction de fumer dans les lieux publics, seront acceptées.Ces généralisations sont quelque peu simplistes, mais elles peuvent constituerun bon point de départ pour les responsables.

Page 102: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

88 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

ENCADRÉ 7.1 L’ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ ET LA CONVENTION-CADRE

SUR LA LUTTE ANTI-TABAC

À l’Assemblée mondiale de la santé,en mai 1996, les États membres del’OMS ont adopté une résolution de-mandant à la directrice générale del’OMS, Gro Harlem Brundtland, delancer la mise au point d’une Conven-tion-cadre sur la lutte anti-tabac. Aussil’OMS a-t-elle donné la priorité à larelance des activités de lutte contre letabagisme et créé un nouveau projet,l’Initiative Se libérer du tabac. L’un despiliers de cette initiative est la Conven-tion-cadre de l’OMS sur la lutte anti-tabac (CCLA).

La CCLA sera un instrument juri-dique international visant à maîtriserl’expansion de la pandémie mondialede tabac, principalement dans lespays en développement. Lorsqu’elleentrera en vigueur, la Conventionmarquera un précédent pour l’OMS etpour le monde. En effet, ce sera lapremière fois que les 191 Étatsmembres de cette organisation exer-ceront l’autorité constitutionnelle del’OMS lui permettant de servir deplate-forme pour l’élaboration d’uneconvention. En outre, ce sera lapremière convention multilatéraleconcernant expressément un dossierde santé publique. La formulation dela CCLA sera facilitée par la con-naissance du caractère addictif et fa-tal du tabagisme, et par le désiréprouvé par de nombreux pays d’amé-liorer la réglementation du tabac aumoyen d’instruments internationaux.

La stratégie réglementaire inter-nationale utilisée pour promouvoir unaccord et un programme d’actionmultilatéraux sur la maîtrise du taba-gisme est fondée sur la méthode desconventions-cadres et des protocolesafférents. Elle favorise le consensusinternational par une démarche pro-gressive, en essayant d’obtenir desaccords distincts sur chaque dossier.Elle comprend les étapes suivantes :

■ Les États adoptent une conven-tion-cadre prévoyant qu’ils co-opéreront pour atteindre desobjectifs généraux et établissantles institutions essentielles d’unestructure juridique mul-tilatérale.

■ Des protocoles distincts, con-tenant des dispositions précisesvisant à atteindre les objectifsgénéraux prévus par la conven-tion-cadre, sont conclus.

Cette méthode a déjà été utiliséedans d’autres domaines, par exemplelors de l’adoption de la Convention deVienne sur la protection de la couched’ozone et du Protocole de Montréal.

La négociation et la mise en œuvrede la CCLA contribueront à limiter letabagisme en sensibilisant l’opinionnationale et internationale, et enmobilisant des ressources techniqueset financières qui assurerontl’efficacité des mesures nationales delutte contre le tabagisme. La conven-tion renforcera également lacoopération internationale sur les

(suite page suivante)

Page 103: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

89PROGRAMME INDICATIF D’ACTION

Consciente des méfaits du tabac, laBanque mondiale a adopté en 1991 unepolitique sur ce produit qui s’articuleautour de cinq grands axes : 1) lesactivités menées par la Banque dans lesecteur de la santé, telles que le dia-logue de politique générale et les prêts,découragent l’utilisation des produits dutabac ; 2) la Banque ne consent aucunprêt, n’effectue aucun investissement, nine garantit directement d’investissementou de prêt en faveur de la production,du traitement ou de la commercialisationdu tabac. Cependant, dans un petitnombre de pays agricoles qui tirentl’essentiel de leurs revenus ou de leursrecettes en devises du tabac, la Banques’efforce de traiter la question enrépondant le plus efficacement pos-sibles aux besoins de pays en déve-loppement des intéressés. Elle les aideà diversifier leurs cultures et à réduire lapart occupée par le tabac dans leuréconomie ; 3) la Banque n’accorde pasdirectement de prêts en faveur d’ac-tivités de production du tabac, dans lamesure où cela est réalisable ; 4) lespays ne peuvent pas inclure de tabac nide machines ou de matériel de

ENCADRÉ 7.2 LA POLITIQUE DE LA BANQUE MONDIALE DANS LE DOMAINE DU TABAC

traitement du tabac dans les importa-tions financées par des prêts de laBanque ; et 5) le tabac et les importa-tions liées au tabac peuvent ne pas êtrevisés par les accords signés parl’emprunteur et la Banque pour libé-raliser le commerce et réduire les droitsde douane.

La politique de la Banque estconforme aux arguments avancésdans ce rapport à l’appui de l’éli-mination des subventions. Cependant,l’accent mis sur les mesures de limi-tation de l’offre n’a pas eu d’effetmesurable sur la consommation detabac depuis 1991. Dans l’intervalle,la Banque a donné la priorité à la pro-motion de la santé et à l’informationdans ses activités de lutte contre letabagisme, qui portent sur environ14 pays et font partie de projets d’uncoût total de plus de 100 millions dedollars. Le rapport de la Banque surla stratégie sectorielle de 1997 aétendu en principe aux prix et à laréglementation la por tée de cesactivités. L’efficacité des mesures deprix dans la réduction de la demandeest confirmée par ce rapport.

aspects de la lutte contre le tabagismequi débordent les frontièresnationales, tels que la commer-cialisation et la promotion à l’échellemondiale des produits du tabac et lacontrebande. Bien que la négociation

de chaque traité ait un caractèreindividuel et dépende de la volontépolitique des États, le Plan de travailaccéléré de l’OMS pour la CCLAprévoit que la convention sera adoptéeen mai 2003 au plus tard.

ENCADRÉ 7.1 (suite)

Page 104: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

90 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Les gouvernements qui envisagent de prendre des mesures de lutte anti-tabac sont confrontés à des obstacles politiques majeurs. Cependant, s’ilsparviennent à identifier les principales parties prenantes, tant du côté de l’offreque du côté de la demande, ils pourront évaluer le poids relatif de chaquecamp, s’il s’est dispersé ou concentré, et les autres facteurs susceptibles d’influersur la manière dont les différents camps réagissent au changement. Par exemple,les responsables pourront constater que le camp avantagé, celui des non-fumeurs, forme une catégorie éparpillée et dispersée, tandis que le camppénalisé, celui des producteurs de tabac, par exemple, a de l’entregent et saitfaire vibrer la corde sensible. Pour que la transition entre la dépendance etl’indépendance par rapport au tabac se fasse sans heurts, il faut planifiersoigneusement les interventions et avoir une bonne connaissance de la cartepolitique, quels que soient la nature de l’économie et le cadre politique na-tional. C’est ce qu’a fait le Viet Nam, par exemple.

Les priorités de la recherche

On sait déjà que les mesures de limitation de la demande (majoration de lafiscalité et interdiction de la publicité et des promotions, par exemple) donnentde bons résultats dans les pays à revenu élevé, et on en sait assez pour mettreces mesures en œuvre sans attendre. Parallèlement, toutefois, les pays devrontmettre en œuvre des programmes de recherche à la fois épidémiologiques etéconomiques, qui aideront les responsables à ajuster le tir pour avoir lesmeilleures chances de succès. Nous indiquons ci-dessous certains des principauxdomaines de recherche.

Recherches sur les causes, les conséquences et les coûtsdu tabagisme, aux niveaux national et international

Ces recherches sont nécessaires si l’on veut compter les victimes du tabac etclasser les décès selon leur cause. Il existe des méthodes simples et bon marchépour cela : on peut, par exemple, placer sur les certificats de décès des ques-tions sur l’usage du tabac, ce qui permet de comparer le nombre de décès dusau tabagisme et à d’autres causes. Ces recherches n’ont pas seulement pouravantage d’informer les autorités sur l’avance de l’épidémie de tabac ou defournir des points de référence pour suivre l’effet des mesures de lutte, ellespermettent également de stimuler l’action des pouvoirs publics et peuvent avoirun impact substantiel sur la consommation de tabac.

Les pays à revenu élevé ne sont désormais plus les seuls à effectuer desrecherches épidémiologiques, mais la recherche sur les causes du tabagisme,le caractère addictif du tabac et les facteurs comportementaux associés àl’initiation reste principalement axée sur l’Amérique du Nord et l’Europe

Page 105: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

91PROGRAMME INDICATIF D’ACTION

occidentale. Parallèlement à la mise en œuvre des mesures de contrôle, ilpourrait être utile d’entreprendre des recherches sur ces questions pour affinerle ciblage des interventions, par exemple de celles qui visent à améliorerl’information sanitaire pour les pauvres, afin d’en maximiser l’effet.

Pour les économistes, il est urgent d’analyser le rapport coût-efficacité dechaque type d’intervention au niveau national. Il serait bon d’obtenir desdonnées plus précises sur l’élasticité-prix dans les pays à revenu faible etintermédiaire, ainsi que des estimations des coûts pour la société et la santépublique du tabagisme dans ces pays.

La recherche sur le tabagisme ne reçoit pas autant de fonds qu’on s’yattendrait vu l’ampleur de la charge de morbidité qu’il engendre. Au début desannées 90, dernière période pour laquelle des données sont disponibles, lesinvestissements dans la recherche-développement sur le tabagisme se montaientà 50 dollars par décès survenu en 1990 (148-164 millions de dollars au total).Pour le VIH, en revanche, la recherche-développement a reçu environ 3 000 dol-lars par décès survenu en 1990 (919-985 millions de dollars au total). Ce sontessentiellement les pays à revenu élevé qui financent les recherches sur cesdeux maladies.

Recommandations

Nous présentons deux recommandations :1. Les pays où les pouvoirs publics décident de prendre des mesures

volontaristes pour maîtriser le tabagisme doivent adopter une stratégiepolyvalente visant à dissuader les enfants de commencer à fumer, àprotéger les non-fumeurs et à informer tous les fumeurs des méfaitsdu tabac. Cette stratégie, qui doit être adaptée aux besoins de chaquepays, comportera : 1) une majoration de la fiscalité, fondée sur lestaux pratiqués dans les pays qui ont réussi à faire baisser laconsommation (entre les deux tiers et les quatre cinquièmes du prixde vente des cigarettes au détail) ; 2) la publication et la diffusion desrésultats des recherches effectuées sur les effets du tabac sur la santé,l’apposition de mises en garde bien visibles sur les paquets de ciga-rettes, l’interdiction totale de la publicité et des promotions, et la limi-tation du tabagisme au travail et dans les lieux publics ; et3) l’élargissement de l’accès aux substituts nicotiniques et auxtraitements de sevrage.

2. Il conviendrait que les organisations internationales, telles que lesinstitutions des Nations Unies, réexaminent leurs programmes etpolitiques en vigueur afin de donner la priorité à la lutte contre letabagisme, qu’elles parrainent des recherches sur les causes, lesconséquences et les coûts du tabagisme et sur la rentabilité

Page 106: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

92 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

d’interventions données au niveau local, et qu’elles se penchent surles aspects internationaux de la lutte contre le tabagisme. Il estrecommandé, en particulier, qu’elles travaillent avec la Convention-cadre sur la lutte anti-tabac. Les grands domaines d’actioncomprennent la promotion d’accords internationaux sur la répressionde la contrebande, des pourparlers sur l’harmonisation des taxes envue de réduire les incitations à la contrebande, et l’interdiction de lapublicité et de la promotion par le canal des moyens de communica-tion mondiaux.

La menace posée par le tabagisme pour la santé publique est sans précédent,mais les opportunités de réduction de la mortalité liée à ce fléau grâce à desinterventions officielles bien conçues sont également sans précédent. Nousmontrons dans ce rapport ce qui peut être accompli, et que des interventionsrelativement limitées pourraient avoir des conséquences bénéfiques pour lasanté au XXIe siècle.

Page 107: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

93

A P P E N D I C E A

La fiscalité du tabac : la perspective

du Fonds monétaire international

LES programmes de stabilisation appuyés par le FMI dans les paysqui ont besoin d’accroître leurs recettes fiscales pour réduire le déficit desfinances publiques comprennent souvent des hausses de la fiscalité du tabac.Si une majoration des droits de consommation des produits du tabac est surtoutmotivée par la nécessité d’augmenter les recettes, elle engendre néanmoinsdes avantages pour la santé en réduisant la consommation de tabac.

Lorsqu’ils fixent les taux d’imposition, les pouvoirs publics doivent tenircompte de plusieurs facteurs, notamment l’impact de la contrebande, les achatsà l’étranger et les achats hors taxes sur les ferries et dans les avions. Lesgouvernements ont intérêt à réduire la contrebande de tabac non seulementpour améliorer les recettes des droits de consommation, mais également pourlimiter les pertes des recettes fournies par les autres taxes, telles que l’impôtsur le revenu et la taxe à la valeur ajoutée, qui leur échappent lorsque lesopérations clandestines se substituent aux transactions licites. En dernièreanalyse, les droits de consommation du tabac doivent tenir compte du pouvoird’achat des consommateurs locaux, des taxes en vigueur dans les pays voisinset, surtout, de la mesure dans laquelle les autorités fiscales ont les moyens et lavolonté d’en assurer la perception.

Pour ce qui est de la structure des droits de consommation du tabac, ilconvient de taxer tous les types de tabac : cigarettes, cigares, pour pipe, à priser,à mâcher et à rouler. La pratique optimale, sur le plan international, consiste àappliquer les droits de consommation en fonction de la destination, c’est-à-dire que les importations sont taxées, mais les exportations exonérées.

Page 108: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

94 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Les droits de consommation peuvent être fixes (fonction de la quantité)ou ad valorem (fonction de la valeur). Si l’un des objectifs principaux de lafiscalité est de décourager la consommation de tabac, il est alors tout à faitjustifié de prélever des droits fixes qui frappent également chaque cigarette etqui sont en outre plus faciles à administrer, car il suffit de déterminer la quantitématérielle de produit, sa valeur n’entrant pas en ligne de compte. Cependant,les droits ad valorem suivent mieux l’inflation que les droits fixes, même lorsqueces derniers sont relevés assez souvent.

Pour administrer les doits de consommation intérieurs, il convientd’appliquer une stratégie intégrée comprenant l’inscription des contribuables ;la déclaration et la perception ; le recouvrement des arriérés ; l’audit ; et desservices pour les contribuables. Il peut arriver que les pays en développementet en transition doivent traiter les installations de production de tabac commedes entités extraterritoriales et administrer les droits de consommation de lamême manière que les droits de douane, c’est-à-dire que le fisc contrôle alorsles expéditions à destination et en partance des installations de production.

Les timbres fiscaux peuvent faciliter l’administration du paiement des droitset empêcher d’expédier ailleurs les marchandises ayant acquitté les droits dansune juridiction donnée. L’adoption du timbre implique toutefois des coûtsconsidérables pour les producteurs de la marchandise taxée. Il ne contribueque médiocrement au contrôle si son utilisation ne fait pas l’objet d’une sur-veillance au niveau de la vente au détail.

Page 109: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

95

A P P E N D I C E B

Documents de référence

CERTAINS de ces documents de référence seront publiés dans unouvrage à paraître à Oxford University Press, intitulé Tobacco Control Poli-cies in Developing Countries, préparé sous la direction de Prabhat Jha et FrankChaloupka.

Bobak, Martin, Prabhat Jha, Son Nguyen et Martin Jarvis. Poverty and To-bacco.

Chaloupka, Frank, Tei-Wei Hu, Kenneth E. Warner, Rowena van der Merwe etAyda Yurekli. Taxation of Tobacco Products.

Gajalakshmi, C.K., Prabhat Jha, Son Nguyen et Ayda Yurekli. Patterns of To-bacco Use, and Health Consequences.

Jha, Prabhat, Phillip Musgrove et Frank Chaloupka. Is There a Rationale forGovernment Intervention?

Jha, Prabhat, Fred Paccaud, Ayda Yurekli et Son Nguyen. Strategic Prioritiesfor Governments and Development Agencies in Tobacco Control.

Joossens, Luk, David Merriman, Ayda Yurekli et Frank Chaloupka. Issues inTobacco Smuggling.

Kenkel, Donald, Likwang Chen, Teh-Wei Hu et Lisa Bero. Consumer Infor-mation and Tobacco Use.

Lightwood, James, David Collins, Helen Lapsley, Thomas Novotny, HelmutGeist et Rowena van der Merwe. Counting the Costs of Tobacco Use.

Merriman, David, Ayda Yurekli et Frank Chaloupka. How Big Is the World-wide Cigarette Smuggling Problem?

Page 110: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

96 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Novotny, Thomas E., Jillian C. Cohen et David Sweanor. Smoking Cessation,Nicotine Replacement Therapy, and the Role of Government in SupportingCessation.

Peck, Richard, Frank Chaloupka, Prabhat Jha et James Lightwood. Cost-Ben-efit Analysis of Tobacco Consumption.

Ranson, Kent, Prabhat Jha, Frank Chaloupka et Ayda Yurekli. Effectivenessand Cost-effectiveness of Price Increases and Other Tobacco Control PolicyInterventions.

Saffer, Henry. The Control of Tobacco Advertising and Promotion.Sunley, Emil M., Ayda Yurekli et Frank Chaloupka. The Design, Administra-

tion, and Potential Revenue of Tobacco Excises: A Guide for Developingand Transition Countries.

Taylor, Allyn L., Frank Chaloupka, Emmanuel Guindon et Michaelyn Corbett.Trade Liberalization and Tobacco Consumption.

Van der Merwe, Rowena, Fred Gale, Thomas Capehart et Ping Zhang. TheSupply-side Effects of Tobacco Control Policies.

Woollery, Trevor, Samira Asma, Frank Chaloupka et Thomas E. Novotny. OtherMeasures to Reduce the Demand for Tobacco Products.

Yurekli, Ayda, Son Nguyen, Frank Chaloupka et Prabhat Jha. StatisticalAnnex.

Page 111: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

97

A P P E N D I C E C

Remerciements

CE rapport a considérablement bénéficié des idées, des apports tech-niques et des lectures critiques de nombreuses personnes et organisations. Lesauteurs dont les travaux ont été utilisés dans le texte sont cités dans la Noticebibliographique. Les évaluateurs des documents de référence ou du rapportrécapitulatif sont indiqués ci-dessous. Enfin, une série de consultations ontfourni aux auteurs des informations utiles.

A. Évaluateurs des documents de référence ou du rapportrécapitulatif

Iraj Abedian, Samira Asma, Peter Anderson, Enis Baris, Howard Barnum, EdithBrown-Weiss, Neil Collishaw, Michael Ericksen, Christine Godfrey, RobertGoodland, Ramesh Govindaraj, Vernor Griese, Jack Henningfield, Chee-RueyHsieh, Teh-Wei Hu, Gregory Ingram, Paul Isenman, Steven Jaffee, DeanJamison, Michael Linddal, Alan Lopez, Dorsati Madani, Will Manning, JacobMeerman, Cyril Muller, Philip Musgrove, Richard Peck, Richard Peto, MarkkuPekurinen, John Ryan, David Sweanor, John Tauras, Joy Townsend, AdamWagstaff, Kenneth Warner, Trevor Woollery, Russell Wilkins, Witold Zatonski,Barbara Zolty et Mitch Zeller.

Page 112: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

98 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

B. Consultations

1. Examen du projet de rapport préliminaire et des principauxaspects économiques

Le 27 aout 1997, à la 10e conference sur le Tabac ou la santé, Beijing (Chine),organisée avec le concours de la Banque mondiale.

Président de séance : Thomas Novotny

Participants : Iraj Abedian, Frank Chaloupka, Simon Chapman, KishoreChaudhry, Neil Collishaw, Vera Luisa da Costa y Silva, Prakash Gupta,Laksmiati Hanafiah, Natasha Herrera, Teh-Wei Hu, Desmond Johns, PrabhatJha, Luk Joossens, Ken Kyle, Eric LeGresley, Michelle Lobo, Judith Mackay,Patrick Masobe, Kathleen McCormally, Zofia Mielecka-Kubien, RafaelOlganov, Alex Papilaya, Terry Pechacek, Milton Roemer, Ruth Roemer, LuRushan, Cecilia Sepulveda, David Simpson, Paramita Sudharto, Joy Townsend,Sharad Vaidya, Rowena Van Der Merwe, Kenneth Warner, Shaw Watanabe,David Zaridze et Witold Zatonski.

2. Examen initial du plan et du contenu des documents de référence

Le 20 février 1998, à la conférence de l’Université du Cap sur « L’économiedu tabac : vers une gamme d’interventions optimales », le Cap (Afrique duSud), organisée avec le concours de l’Institut de médecine sociale et préventivede l’Université de Lausanne et de l’Université du Cap.

Président de séance : Paul Isenman

Participants : Iraj Abedian, Judith Bale, Enis Baris, Frank Chaloupka, David Collins,Neil Collishaw, Brian Easton, Helmut Geist, Chee-Ruey Hsieh, Teh-Wei Hu, PrabhatJha, Luk Joossens, Kamal Nayan Kabra, Pamphil Kweyuh, Helen Lapsley, JudithMackay, Eddie Maravanyika, Sergiusz Matusia, Thomas Novotny, Fred Paccaud,Richard Peck, Krzysztof Przewozniak, Yussuf Saloojee, Conrad Shamlaye, Timo-thy Stamps, Krisela Steyn, Frances Stillman, David Sweanor, Joy Townsend,Rowena Van Der Merwe, Kenneth Warner et Derek Yach.

3. Réunion d’examen technique pour les économistes

Les 22–24 novembre 1998, à Lausanne (Suisse), organisée par l’Institut demédecine sociale et préventive de l’Université de Lausanne et la Banquemondiale.

Page 113: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

99REMERCIEMENTS

Co-présidents de séance : Felix Gutzwiller et Fred Paccaud

Participants : Iraj Abedian, Nisha Arunatilleke, Martin Bobak, Phyllida Brown,Frank Chaloupka, David Collins, Jacques Cornuz, Christina Czart, Nishan DeMel, Jean-Pierre Gervasoni, Peter Heller, Tomasz Hermanowski, Alberto Holly,Teh-Wei Hu, Paul Isenman, Dean Jamison, Prabhat Jha, Luk Joossens, JimLightwood, Helen Lapsley, David Merriman, Phillip Musgrove, Son Nguyen,Richard Peck, Markku Pekurinen, Thomson Prentice, Kent Ranson, Marie-France Raynault, John Ryan, Henry Saffer, David Sweanor, John Tauras, AllynTaylor, Joy Townsend, Rowena van der Merwe, Kenneth Warner, TrevorWoollery et Ayda Yurekli.

4. Examen par les experts extérieurs

Le 17 mars1999, à Washington (États-Unis). Réunion parrainée par l’Officeon Smoking and Health, Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis.

Président de séance : Michael Ericksen

Participants : Iraj Abedian, Samira Asma, Judith Bale, Enis Baris, PhyllidaBrown, Frank Chaloupka, Peter Heller, Paul Isenman, Prabhat Jha, NancyKaufman, Thomas Loftus, Judith Mackay, Caryn Miller, Rose Nathan, SonNguyen, Fred Paccaud, Anthony So, Roberta Walburn, Kenneth Warner, TrevorWoollery, Derek Yach et Ayda Yurekli.

Page 114: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication
Page 115: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

101

A P

P E

N D

I C

E D

Le

mon

de p

ar n

ivea

u de

rev

enu

et p

ar r

égio

n (n

omen

clat

ure

de la

Ban

que

mon

dial

e)Pa

ys à

Afr

ique

Am

ériq

ue la

tine

Asi

e de

l’E

stA

sie

Eur

ope

etM

oyen

-Ori

ent e

tre

venu

éle

véA

utre

s pa

ys à

subs

ahar

ienn

eet

Car

aïbe

set

Pac

ifiq

uedu

Sud

Asi

e ce

ntra

leA

friq

ue d

u N

ord

OC

DE

rev

enu

élev

é

Faib

le r

even

uA

ngol

aG

uyan

aC

ambo

dge

Afg

hani

stan

Arm

énie

Rép

. du

Yém

enB

énin

Haï

tiC

hine

Ban

glad

esh

Aze

rbaï

djan

Bur

kina

Fas

oH

ondu

ras

Mon

goli

eB

hout

anB

osni

e-B

urun

diN

icar

agua

Mya

nmar

Inde

Her

zégo

vine

Cam

erou

nR

DP

lao

Nép

alM

oldo

vaC

omor

esV

iet N

amPa

kist

anR

ép. k

irgh

ize

Con

go, R

ép.

Sri

Lan

ka d

ém. d

uTa

djik

ista

nC

ongo

, Rép

. du

Côt

e d’

Ivoi

reÉ

ryth

rée

Éth

iopi

eG

ambi

eG

hana

Gui

née

Gui

née-

Bis

sau

Gui

née

équa

tori

ale

Ken

yaL

esot

ho

(sui

te p

age

suiv

ante

)

Page 116: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

102 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIELE

MO

ND

E P

AR

NIV

EA

U D

E R

EV

EN

U E

T P

AR

GIO

N (

NO

ME

NC

LAT

UR

E D

E L

A B

AN

QU

E M

ON

DIA

LE)

(sui

te)

Pays

à

Afr

ique

Am

ériq

ue la

tine

Asi

e de

l’E

stA

sie

Eur

ope

etM

oyen

-Ori

ent e

tre

venu

éle

véA

utre

s pa

ys à

subs

ahar

ienn

eet

Car

aïbe

set

Pac

ifiq

uedu

Sud

Asi

e ce

ntra

leA

friq

ue d

u N

ord

OC

DE

rev

enu

élev

é

Faib

le r

even

u (s

uite

)

Lib

éria

Mad

agas

car

Mal

awi

Mal

iM

auri

tani

eM

ozam

biqu

eN

iger

Nig

éria

Oug

anda

Rép

. cen

traf

rica

ine

Rw

anda

Sao

Tom

é- e

t-P

rinc

ipe

Sén

égal

Sie

rra

Leo

neS

omal

ieS

ouda

nTa

nzan

ieTo

goZ

ambi

eZ

imba

bwe

Rev

enu

inte

rméd

iair

e, tr

anch

e in

féri

eure

Bot

swan

aB

eliz

eC

orée

,M

aldi

ves

Alb

anie

Alg

érie

Cap

-Ver

tB

oliv

ie

Rép

. dém

. de

Bél

arus

Cis

jord

anie

et

Dji

bout

iC

olom

bie

Éta

ts f

éd. d

eB

ulga

rie

Gaz

aN

amib

ieC

osta

Ric

a

Mic

roné

sie

Est

onie

Égy

pte

Page 117: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

103LE MONDE PAR NIVEAU DE REVENU ET PAR RÉGION

Sw

azil

and

Cub

aF

idji

Géo

rgie

Iran

,D

omin

ique

Indo

nési

eK

azak

hsta

n R

ép. i

slam

ique

d’

El S

alva

dor

Îles

Mar

shal

lL

etto

nie

Iraq

Équ

ateu

rÎl

es S

alom

onL

itua

nie

Jord

anie

Gre

nade

Kir

ibat

iM

acéd

oine

,L

iban

Gua

tem

ala

Papo

uasi

e-

ER

Y d

eM

aroc

Jam

aïqu

e

Nel

le- G

uiné

eO

uzbé

kist

anR

ép. a

rabe

Pana

ma

Phi

lipp

ines

Rou

man

ie s

yrie

nne

Para

guay

Sam

oaR

ussi

e, F

éd. d

eT

unis

ieP

érou

Tha

ïlan

deT

urqu

ieR

ép. d

omin

icai

neTo

nga

Tur

kmén

ista

nS

aint

-Vin

cent

-et-

Van

uatu

Ukr

aine

les

Gre

nadi

nes

You

gosl

avie

,S

urin

ame

R

ép. f

éd. d

eV

enez

uela

Rev

enu

inte

rméd

iair

e, tr

anch

e su

péri

eure

Afr

ique

du

Sud

Ant

igua

-et-

Mal

aysi

eC

roat

ieA

rabi

e sa

oudi

teG

abon

B

arbu

daPa

laos

Hon

grie

Bah

reïn

Mau

rice

Arg

enti

neS

amoa

Île

de M

anL

ibye

May

otte

Bar

bade

am

éric

aine

sM

alte

Om

anS

eych

elle

sB

rési

lP

olog

neC

hili

Rép

. slo

vaqu

eG

uade

loup

eR

ép. t

chèq

ueM

exiq

ueS

lové

nie

Por

to R

ico

St-

Kit

ts-e

t-N

evis

Ste

-Luc

ieT

rini

té-e

t-To

bago

Uru

guay

(sui

te p

age

suiv

ante

)

Page 118: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

104 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

LE M

ON

DE

PA

R N

IVE

AU

DE

RE

VE

NU

ET

PA

R R

ÉG

ION

(N

OM

EN

CLA

TU

RE

DE

LA

BA

NQ

UE

MO

ND

IALE

) (s

uite

)

Pay

s à

A

friq

ueA

mér

ique

lati

neA

sie

de l’

Est

Asi

eE

urop

e et

Moy

en-O

rien

t et

reve

nu é

levé

Aut

res

pays

àsu

bsah

arie

nne

et C

araï

bes

et P

acif

ique

du S

udA

sie

cent

rale

Afr

ique

du

Nor

dO

CD

E r

even

u él

evé

Rev

enu

élev

éA

llem

agne

And

orre

Aus

tral

ieA

ntil

les

Aut

rich

e

néer

land

aise

sB

elgi

que

Aru

baC

anad

aB

aham

asC

orée

, Rép

. de

Ber

mud

esD

anem

ark

Bru

néi

Esp

agne

Chy

pre

Éta

ts-U

nis

Ém

irat

s ar

abes

uni

sF

inla

nde

Gro

enla

ndF

ranc

eG

uyan

eG

rèce

fr

ança

ise

Irla

nde

Gua

mIs

land

eH

ong

Kon

gIt

alie

(C

hine

)Ja

pon

Îles

ang

lo-

Lux

embo

urg

nor

man

des

Nel

le-Z

élan

deÎl

es C

aïm

ans

Nor

vège

Îles

Fér

oéPa

ys-B

asÎl

es M

aria

nnes

Por

tuga

l

sept

entr

iona

les

Roy

aum

e-U

niÎl

es v

ierg

esS

uède

am

éric

aine

sS

uiss

eIs

raël

Kow

eït

Page 119: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

105LE MONDE PAR NIVEAU DE REVENU ET PAR RÉGION

Lie

chte

nste

inM

acao

Mar

tini

que

Mon

aco

Nou

vell

e-

Cal

édon

ieP

olyn

ésie

fran

çais

eQ

atar

Réu

nion

S

inga

pour

Sou

rce

: Ban

que

mon

dial

e, 1

998

Page 120: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication
Page 121: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

107

Notice bibliographique

Chapitre 1. Les tendances mondiales du tabagisme

L’analyse de la consommation et de l’épidémiologie s’inspire de Gajalakshmiet al., document de référence ; Lund et al., 1995 ; Ranson et al., document deréférence ; Wald et Hackshaw, 1996, et World Health Organization, 1997. Lapartie relative au statut socio-économique s’inspire de Bobak et al., documentde référence ; Académie chinoise de médecie préventive, 1997 ; Gupta, 1996 ;Jenkins et al., 1997 ; Obot, 1990 ; Hill et al., 1998 ; Rapports du Surgeon Gen-eral des États-Unis, 1989 et 1994 ; Gouvernement britannique, 1998 ; Wersallet Eklund, 1998 ; et White et Scollo, 1998. L’analyse de la libéralisation ducommerce s’inspire de Chaloupka et Laixuthai, 1996 ; et Taylor et al., docu-ment de référence.

Chapitre 2. Les conséquences du tabagisme pour la santé

L’analyse de la dépendance nicotinique s’inspire de Charlton, 1996 ; Foulds,1996 ; Lynch et Bonnie, 1994 ; Kessler, 1995 ; McNeill, 1989 ; et Rapports duSurgeon General des États-Unis, 1988, 1989 et 1994. L’examen de la chargede morbidité attribuable au tabagisme s’inspire de Bobak et al., document deréférence ; Doll et Peto, 1981 ; Doll et al., 1994 ; Agence de protection del’environnement, 1992 ; Gajalakshmi et al., document de référence ; Gupta,1989 ; Jha et al., à paraître ; Liu et al., 1998 ; Meara, à paraître ; Niu et al.,

Page 122: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

108 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

1998 ; Parish et al., 1995 ; Peto et al., 1994 ; Peto, Chen, et Boreham, 1999 ; etFaculté royale de médecine, 1992.

Chapitre 3. Les fumeurs savent-ils quels risques ils courentet assument-ils leurs coûts ?

L’analyse de la connaissance des risques pour la santé s’inspire de Ayanian etCleary, 1999 ; Barnum, 1994 ; Chaloupka et Warner, sous presse ; Académiechinoise de médecie préventive, 1997 ; Johnston et al., 1998 ; Kenkel et al.,document de référence ; Kessler, 1995 ; Levshin et Droggachih, 1999 ;Schoenbaum, 1997 ; Viscusi, 1990, 1991, et 1992 ; Weinstein,1998 et Zatonski,1996. L’examen des coûts imposés aux autres s’inspire de Lightwood et al.,document de référence, Manning et al., 1991 ; Pekurinen, 1992 ; Viscusi, 1995 ;Warner et al., sous presse ; et Banque mondiale 1994b.

Chapitre 4. Réduire la demande de tabac

Ce chapitre s’inspire de Abedian et al., 1998 ; Chaloupka et al., document deréférence ; Chaloupka et Warner, sous presse ; Townsend, 1996 ; Jha et al., docu-ment de référence ; Kenkel et al., document de référence ; Laugesen et Meads,1991 ; Novotny et al., document de référence ; Pekurinen, 1992 ; Ranson et al.,document de référence ; Raw et al., 1999 ; Reid, 1996 ; Saffer et Chaloupka,1999 ; Saffer et al., document de référence ; Tansel, 1993 ; Townsend, 1998 ;Département de la santé du Royaume-Uni, 1998 ; Rapport du Surgeon Generaldes États-Unis, 1989 ; Warner et al., 1997 ; et Zatonski et al., 1999.

Chapitre 5. Réduire l’offre de tabac

Ce chapitre s’inspire de Altman et al., 1998 ; Berkelman et Buehler, 1990 ;Chaloupka et Warner, sous presse ; Crescenti, 1992 ; Organisation pourl’alimentation et l’agriculture, 1998 ; Ginsberg, 1999 ; IEC, 1998 ; Joossens etal., document de référence ; Maravanyika, 1998 ; Merriman et al., documentde référence ; Reuter, 1992 ; Taylor et al., document de référence ; Thursby etThursby, 1994 ; Département de l’agriculture des Etats-Unis 1998 ; Van derMerwe, document de référence ; Warner, 1988 ; Warner et Fulton, 1994 ; Warneret al., 1996 ; et Zang et Husten, 1998.

Chapitre 6. Les coûts et les conséquences de la luttecontre le tabagisme

Ce chapitre s’inspire de Altman et al., 1998 ; Buck et al., 1995 ; Centers forDisease Control et Prevention, 1998 ; Chaloupka et al., document de référence ;

Page 123: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

109NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE

Doll et Crofton, 1996 ; Efroymson et al., 1996 ; Irvine et Sims, 1997 ; Jones,1999 ; Joossens et al., document de référence ; McNicoll et Boyle, 1992 ;Murray et Lopez, 1996 ; Orphanides et Zervos, 1995 ; Suranovic et al., 1999 ;Townsend, 1998 ; Van der Merwe, 1998 ; Van der Merwe et al., document deréférence ; Warner, 1987 ; Warner et Fulton, 1994 ; Warner et al., 1996 ; etBanque mondiale, 1993.

Chapitre 7. Programme indicatif d’action

Ce chapitre s’inspire de Jha et al., document de référence ; Abedian et al.,1998 ; OMS 1996a ; U.S. Surgeon General 1999 ; et Samet et al., 1997.

Page 124: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication
Page 125: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

111

Bibliographie

Abedian, Iraj, Rowena van der Merwe, Nick Wilkins, and Prabhat Jha, eds.1998. The Economics of Tobacco Control: Towards an Optimal Policy Mix.Cape Town, South Africa: Applied Fiscal Reseach Centre, University ofCape Town.

Agro-economic Services, Ltd, and Tabacosmos, Ltd. 1987. The Employment,Tax Revenue and Wealth that the Tobacco Industry Creates.

Altman, D. G., D. J. Zaccaro, D. W. Levine, D. Austin, C. Woodell, B. Bailey,M. Sligh, G. Cohn, and J. Dunn. 1998. “Predictors of Crop Diversification:A Survey of Tobacco Farmers in North Carolina.” Tobacco Control 7(4):376–82.

American Economics Group, Inc. 1996. Economic Impact in the States of Pro-posed FDA Regulations Regarding the Advertising, Labeling and Sale ofTobacco Products. Washington, D.C.

Atkinson, A. B., and J. L. Skegg. 1973. “Anti-Smoking Publicity and the De-mand for Tobacco in the UK.” The Manchester School of Economic andSocial Studies 41:265–82.

Atkinson, A. B., J. Gomulka, and N. Stern. 1984. Household Expenditure onTobacco 1970-1980: Evidence from the Family Expenditure Survey. Lon-don: London School of Economics.

Ayanian, J., and P. Cleary. 1999. “Perceived Risks of Heart Disease and Can-cer Among Cigarette Smokers.” Journal of the American Medical Associa-tion 281(11):1019–21.

Page 126: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

112 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Barendregt, J. J., L. Bonneux, and P. J. van der Maas. 1997. “The Health CareCosts of Smoking.” New England Journal of Medicine 337(15):1052–7.

Barnum, Howard. 1994. “The Economic Burden of the Global Trade in To-bacco.” Tobacco Control 3:358–61.

Barnum, Howard, and R. E. Greenberg. 1993. “Cancers.” In Jamison, D. T,H. W Mosley, A. R. Measham, and J. L. Bobadilla, eds., Disease Con-trol Priorities in Developing Countries. New York: Oxford Medical Pub-lications.

Becker, G. S., M. Grossman, and K. M. Murphy. 1991. “Rational Addictionand the Effect of Price on Consumption.” American Economic Review81:237–41.

———. 1994. “An Empirical Analysis of Cigarette Addiction.” American Eco-nomic Review 84:396-418.

Berkelman, R. L., and J. W. Buehler. 1990. “Public Health Surveillance ofNon-Infectious Chronic Diseases: the Potential to Detect Rapid Changes inDisease Burden.” International Journal of Epidemiology 19(3):628–35.

Booth, Martin. 1998. Opium : A History. New York: St. Martin’s Press.British American Tobacco. 1994. Tobacco Taxation Guide: A Guide to Alter-

native Methods of Taxing Cigarettes and Other Tobacco Products. Woking,U.K.: Optichrome The Printing Group.

Buck, David, C. Godfrey, M. Raw, and M. Sutton. 1995. Tobacco and Jobs.York, U.K.: Society for the Study of Addiction and the Centre for HealthEconomics, University of York.

Capehart, T. 1997. “The Tobacco Program—A Summary and Update.” To-bacco Situation & Outlook Report. U.S. Department of Agriculture, Eco-nomic Research Service, TBS-238.

Chaloupka, F. J. 1990. Men, Women, and Addiction: The Case of CigaretteSmoking. NBER Working Paper No. 3267. Cambridge, Mass.: NationalBureau of Economic Research.

———. 1991. “Rational Addictive Behavior and Cigarette Smoking.” Journalof Political Economy 99(4):722–42.

———. 1998. The Impact of Proposed Cigarette Price Increases. Policy Analy-sis No. 9, Health Sciences Analysis Project. Washington D.C.: AdvocacyInstitute.

Chaloupka, F. J., and A. Laixuthai. 1996. US Trade Policy and Cigarette Smok-ing in Asia, NBER Working Paper No. 5543. Cambridge, Mass.: NationalBureau of Economic Research.

Chaloupka, F. J., and H. Saffer. 1992. “Clean Indoor Air Laws and the De-mand for Cigarettes.” Contemporary Policy Issues 10(2):72–83.

Chaloupka, F. J., and H. Wechsler. 1997. “Price, Tobacco Control Policiesand Smoking Among Young Adults.” Journal of Health Economics16(3):359–73.

Page 127: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

113BIBLIOGRAPHIE

Chaloupka, F. J., and K. E. Warner. In press. “The Economics of Smoking.” InNewhouse, J., and A. Culyer, eds., The Handbook of Health Economics.Amsterdam: North Holland.

Chaloupka, F. J., and M. Grossman. 1996. Price, Tobacco Control Policiesand Youth Smoking. NBER Working Paper No. 5740. Cambridge, Mass.:National Bureau of Economic Research.

Chaloupka, F. J., and R. L. Pacula. 1998. An Examination of Gender and RaceDifferences in Youth Smoking Responsiveness to Price and Tobacco Con-trol Policies. NBER Working Paper No. 6541. Cambridge, Mass.: NationalBureau of Economic Research.

Chalton, A. 1996. “Children and Smoking: The Family Circle.” British Medi-cal Bulletin, 52(1):90–107.

Chase Econometrics. 1985. The Economic Impact of the Tobacco Industry onthe United States Economy in 1983. Bala Cynwyd, Penn.: Chase Econo-metrics.

Chinese Academy of Preventive Medicine. 1997. Smoking in China: 1996National Prevalence Survey of Smoking Pattern. Beijing: China Scienceand Technology Press.

Coalition on Smoking or Health. 1994. Saving Lives and Raising Revenue:The Case for a $2 Federal Tobacco Tax Increase. Washington D.C.

Collins, D. J., and H. M. Lapsley. 1997. The Economic Impact of TobaccoSmoking in Pacific Islands. Wahroonga, NSW, Australia: Pacific Tobaccoand Health Project.

Collishaw, Neil. 1996. “An International Framework Convention for TobaccoControl.” Heart Beat 2:11.

Crescenti, M. G. 1992. “No Alternative to Tobacco.” Tobacco Journal Interna-tional 6, November-December 14.

Doll, Richard, and R. Peto. 1981. The Causes of Cancer. New York: OxfordUniversity Press.

Doll, Richard, R. Peto, K. Wheatley, R. Gray, and I. Sutherland. 1994. “Mor-tality in Relation to Smoking: 40 Years’ Observations on Male British Doc-tors.” British Medical Journal, 309(6959):901–11.

Doll, Richard, and John Crofton, eds. 1996. “Tobacco and Health.” BritishMedical Bulletin Vol. 52, No. 1.

Douglas, S. 1998. “The Duration of the Smoking Habit.” Economic Inquiry36(1):49–64.

Duffy, M. 1996. “Econometric Studies of Advertising, Advertising Restric-tions, and Cigarette Demand: A Survey.” International Journal of Advertis-ing 15:1–23.

The Economist. 1995. “An Anti-Smoking Wheeze: Washington Needs a Sen-sible All-Drugs Policy, Not a “War’ on Teenage Smoking.” 19 August, pp.14–15.

Page 128: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

114 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

———. 1997. “Tobacco and Tolerance.” 20 December, pp. 59–61.Efroymson, D., D. T. Phuong, T. T. Huong, T. Tuan, N. Q. Trang, V. P. N.

Thanh, and T Stone. Decision Mapping for Tobacco Control in Vietnam:Report to the International Tobacco Initiative. PATH Canada. Project 94-0200-01/02214.

Ensor, T. 1992 “Regulating Tobacco Consumption in Developing Countries.”Health Policy and Planning, 7:375–81.

EPA (Environmental Protection Agency). 1992. Respiratory Health Effects ofPassive Smoking: Lung Cancer and Other Disorders. EPA, Office of Re-search and Development, Office of Air and Radiation. EPA/600/6-90/006F.

Evans, W. N., and L. X. Huang. 1998. Cigarette Taxes and Teen Smoking: NewEvidence from Panels of Repeated Cross-Sections. Working paper. Depart-ment of Economics, University of Maryland.

Evans, W. N. and M. C. Farrelly. 1998. “The Compensating Behavior of Smok-ers: Taxes, Tar and Nicotine.” RAND Journal of Economics 29(3):578–95.

Evans, W. N., M. C. Farrelly, and E. Montgomery. 1996. Do Workplace Smok-ing Bans Reduce Smoking? NBER Working Paper No. 5567. Cambridge,Mass.: National Bureau of Economic Research.

FAO (Food and Agriculture Organization). 1998. Food and Agriculture Orga-nization of the United Nations Database (http://apps.fao.org).

Federal Trade Commission. 1995. “Cigarette Advertising and Promotion inthe United Sates, 1993: A Report of the Federal Trade Commission.” To-bacco Control 4:310–13.

Foulds, J. “Strategies for Smoking Cessation.” British Medical Bulletin52(1):157–73.

Gajalakshmi, C. K., and R. Peto. Studies on Tobacco in Chennai, India. In Lu,R., J. Mackay, S. Niu, and R. Peto, eds. The Growing Epidemic, proceed-ings of the Tenth World Conference on Tobacco or Health, Beijing, 24–28August 1997. Singapore: Springer-Verlag (in press).

Gale, F. 1997. “Tobacco Dollars and Jobs.” Tobacco Situation & Outlook. U.S.Department of Agriculture, Economic Research Service, TBS 239(Septem-ber):37–43.

———. 1998. “Economic Structure of Tobacco-Growing Regions.” TobaccoSituation & Outlook. U.S. Department of Agriculture, Economic ResearchService, TBS 241(April): 40–47.

General Accounting Office. 1989. Teenage Smoking: Higher Excise Tax ShouldSignificantly Reduce the Number of Smokers. Washington D.C.

Ginsberg, S. “Tobacco Farmers Feel the Heat.” Washington Post January 2,1999.

Glantz, S. A., and W. W. Parmley. 1995. “Passive Smoking and Heart Disease:Mechanisms and Risk.” Journal of the American Medical Association73(13):1047–53.

Page 129: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

115BIBLIOGRAPHIE

Gong,Y. L., J. P. Koplan, W. Feng, C. H. Chen, P. Zheng, and J. R. Harris.1995. “Cigarette Smoking in China: Prevalence, Characteristics, and Atti-tudes in Minhang District.” Journal of the American Association of Medi-cine 274(15):1232–34.

Goto, K., and S. Watanabe. 1995. “Social Cost of Smoking for the 21st Cen-tury.” Journal of Epidemiology, 5(3):113–15.

Gray, Mike. 1998. Drug Crazy : How We Got Into This Mess And How We CanGet Out. New York: Random House.

Grise, V. N. 1995. Tobacco: Background for 1995 Farm Legislation. Agricul-tural Economic Report No.709. Washington: U.S. Department of Agricul-ture, Economic Research Service.

Gupta, P. C. 1989. “An Assessment of Morbidity and Mortality Caused byTobacco Usage in India.” In Sanghvi, L. D. and P. Notani, eds., Tobaccoand Health: the Indian Scene. Bombay: International Union Against Can-cer and Tata Memorial Center.

———. 1996 “Survey of Sociodemographic Characteristics of Tobacco UseAmong 99,598 Individuals in Bombay, India, Using Handheld Comput-ers.” Tobacco Control 5:114–20.

Hackshaw, A. K., M. R. Law, and N. J. Wald. 1997. “The Accumulated Evi-dence of Lung Cancer and Environmental Tobacco Smoke.” British Medi-cal Journal 315(7114):980–88.

Harris and Associates. 1989. Prevention in America: Steps People Take—or Fail toTake—For Better Health, cited in U.S. Department of Health and Human Ser-vices. 1989. Reducing the Health Consequences of Smoking: 25 Years ofProgress: a Report of the Surgeon General, DHHS Publication No. (CDC) 89-8411, Office on Smoking and Health, Center for Chronic Disease Preventionand Health Promotion, Centers for Disease Control, Public Health Service,Washington, D.C.: U.S. Department of Human and Health Services.

Harris, J. E. 1987. “The 1983 Increase in the Federal Cigarette Excise Tax.” InSummers L. H., ed., Tax Policy and the Economy. Vol. 1. Cambridge, Mass.:MIT Press.

———. 1994. A Working Model for Predicting the Consumption and Revenue Im-pacts of Large Increases in the U.S. Federal Cigarette Excise Tax. NBER Work-ing Paper No. 4803. Cambridge, Mass.: National Bureau of Economic Research.

Hill, D. J., V. M. White, and M. M. Scollo. 1998. “Smoking Behaviours ofAustralian Adults in 1995: Trends and Concerns.” Medical Journal of Aus-tralia 168 (5):209–13.

Hodgson, T. A. 1998. “The Health Care Costs of Smoking.” New EnglandJournal of Medicine 338(7):470.

Hodgson, T. A., and M. R. Meiners. 1982. “Cost-of-Illness Methodology: AGuide to Current Practices and Procedures.” Milbank Memorial Fund Quar-terly 60:429–62.

Page 130: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

116 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Hsieh, C. R., and T. W. Hu. 1997. The Demand for Cigarettes in Taiwan: Do-mestic Versus Imported Cigarettes. Discussion Paper No. 9701. Nankang(Taipei): The Institute of Economics, Academia Sinica.

Hu, T. W., H. Y. Sung, and T. E. Keeler. 1995a. “Reducing Cigarette Consump-tion in California: Tobacco Taxes vs. an Anti-Smoking Media Campaign.”American Journal of Public Health 85(9):1218–22.

———. 1995b. “The State Antismoking Campaign and the Industry Response:the Effects of Advertising on Cigarette Consumption in California.” Ameri-can Economic Review 85(2):85–90.

Hu, T. W., H. Y. Sung, and T. E. Keeler, M. Marcinia, A. Keith, and R. Man-ning. Forthcoming. “Cigarette Consumption and Sales of Nicotine Replace-ment Products.”

Hu, T. W., J. Bai, T. E. Keeler, P. G. Barnett, and H. Y. Sung. 1994. “TheImpact of California Proposition 99, A Major Anti-Cigarette Law, on Ciga-rette Consumption.” Journal of Public Health Policy 15(1):26–36.

Hu, T. W., T. E. Keeler, H. Y. Sung, and P. G. Barnett. 1995. “Impact of Cali-fornia Anti-Smoking Legislation on Cigarette Sales, Consumption, andPrices.” Tobacco Control 4(suppl):S34–S38.

IEC. 1998. IEC Foreign Trade Statistics, World Bank Economic and SocialDatabase, Washington D.C.: The World Bank.

Irvine, I. J., and W. A. Sims. 1997. “Tobacco Control Legislation and ResourceAllocation Effects.” Canadian Public Policy 23(3): 259–73.

Jenkins, C. N., P. X. Dai, D. H. Ngoc, H. V. Kinh, T. T. Hoang, S. Bales, S.Stewart, and S. J. McPhee. 1997. “Tobacco Use in Vietnam: Prevalence,Predictors, and the Role of the Transnational Tobacco Corporations.” Jour-nal of the American Medical Association 277(21):1726–31.

Jha, P., O. Bangoura, and K. Ranson 1998. “The Cost-Effectiveness of FortyHealth Interventions in Guinea.” Health Policy and Planning 13(3):249–62.

Jha, P., R. Peto, A. Lopez, W. Zatonski, J. Boreham, and M. Jarvis. Forthcom-ing. “Tobacco-Attributable Mortality by Socioeconomic Status.”

Johnston, L. D., P. M. O’Malley, and J. G. Bachman. 1998. Smoking AmongAmerican Teens Declines Some. Monitoring the Future Study. Universityof Michigan Institute for Social Research. Press release. December 18.Washington D.C.

Jones, A. M. 1999. “Adjustment Costs, Withdrawal Effects, and Cigarette Ad-diction.” Journal of Health Economics 18:125–37.

Joossens, L., and M. Raw. 1995. “Smuggling and Cross-Border Shopping ofTobacco in Europe.” British Medical Journal 310(6991):1393–97.

Jorenby, D. E., S. J. Leischow, M. A. Nides, S. I. Rennard, J. A. Johnston, A. R.Hughes, S. S. Smith, M. L. Muramoto, D. M. Daughton, K. Doan, M. C.Fiore, and T. B. Baker. “A Controlled Trial of Sustained-Release Bupropion,

Page 131: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

117BIBLIOGRAPHIE

a Nicotine Patch, or Both for Smoking Cessation.” New England Journal ofMedicine 340(9):685–91.

Keeler, T. E., M. Marciniak, and T. W. Hu. Forthcoming. “Rational Addic-tion and Smoking Cessation: An Empirical Study.” Journal of Socio-Economics.

Keeler, T. E., T. W. Hu, P. G. Barnett, and W. G. Manning. 1993. “Taxation,Regulation and Addiction: A Demand Function for Cigarettes Based onTime-Series Evidence.” Journal of Health Economics 12(1):1–18.

Kenkel, D. S. 1991. “Health Behavior, Health Knowledge, and Schooling.”Journal of Political Economy 99(2):287–305.

Kessler, D .A. 1995. “Nicotine Addiction in Young People.” New England Jour-nal of Medicine 333(3):186–89.

Laugesen, M., and C. Meads. 1991. “Tobacco Advertising Restrictions, Price,Income and Tobacco Consumption in OECD Countries, 1960-1986.” Brit-ish Journal of Addiction 86(10):1343–54.

Leu, R. E., and T. Schaub. 1983. “Does Smoking Increase Medical Expendi-tures?” Social Science & Medicine 17(23):1907–14.

Levshin, V., and V. Droggachih. 1999. “Knowledge and Education RegardingSmoking Among Moscow Teenagers.” Paper presented at the workshop on“Tobacco Control in Central and Eastern Europe.” Las Palmas de GranCanaria. February 26, 1999.

Lewit, E. M., and D. Coate. 1982. “The Potential for Using Excise Taxes toReduce Smoking.” Journal of Health Economics 1(2):121–45.

Liu, B. Q., R. Peto, Z. M. Chen, J. Boreham, Y. P. Wu, J. Y. Li, T. C. Campbell,and J. S. Chen. 1998. “Emerging Tobacco Hazards in China. I. Retrospec-tive Proportional Mortality Study of One Million Deaths.” British MedicalJournal 317(7170):1,411–22.

Longfield, J. 1994. Tobacco Taxes in the European Union: How to Make ThemWork for Health. London: UICC and Health Education Authority.

Lu, R., J. Mackay, S. Niu, and R. Peto, eds. The Growing Epidemic, proceed-ings of the Tenth World Conference on Tobacco or Health, Beijing, 24–28August 1997. Singapore: Springer-Verlag (in press).

Lund, K. E., A. Roenneberg, and A. Hafstad. 1995. “The Social and Demo-graphic Diffusion of the Tobacco Epidemic in Norway.” In Slama, K., ed.,Tobacco and Health. New York: Plenum Press.

Lynch, B. S., and R. J. Bonnie, eds. Growing Up Tobacco Free: PreventingNicotine Addiction in Children and Youths. Washington D.C.: National Acad-emy Press.

Mackay, Judith, and J. Crofton. 1996. “Tobacco and the Developing World.”British Medical Bulletin 52(1):206–21.

Mahood, G. 1995. “Canadian Tobacco Package Warning System.” TobaccoControl 4:10–14.

Page 132: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

118 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Manning, W. G., E. B. Keeler, J. P. Newhouse, E. M. Sloss, and J. Wasserman.1991. The Costs of Poor Health Habits. Cambridge, Mass.: Harvard Uni-versity Press.

———. 1989. “The Taxes of Sin: Do Smokers and Drinkers Pay Their Way?”Journal of the American Medical Association 261(11):1604–09.

Maravanyika, Edward. 1998. “Tobacco Production and the Search for Alterna-tives for Zimbabwe.” In Abedian, I., and others, eds., The Economics ofTobacco Control. Cape Town, South Africa: Applied Fiscal Research Cen-tre, University of Cape Town.

Massing, Michael. 1998. The Fix. New York: Simon & Schuster.McNeill, A. D., and others. 1989. “Nicotine Intake in Young Smokers: Longi-

tudinal Study of Saliva Cotinine Concentrations.” American Journal of PublicHealth 79(2):172–75.

McNicoll, I. H., and S. Boyle, 1992. “Regional Economic Impact of a Reduc-tion of Resident Expenditure on Cigarettes: A Case Study of Glasgow.”Applied Economics 24:291–96.

Meara, E. “Why Is Health Related to Socioeconomic Status?” Ph.D. disserta-tion. Department of Economics. Harvard University, forthcoming.

Merriman, David, A. Yurekli, and F. Chaloupka. “How Big Is the WorldwideCigarette Smuggling Problem?” NBER Working Paper. Cambridge, Mass.:National Bureau of Economic Research, forthcoming.

Miller, V. P., C. Ernst, and F. Collin. 1999. “Smoking-Attributable MedicalCare Cost in the USA.” Social Science & Medicine 48:375–91.

Moore, M. J. 1996. “Death and Tobacco Taxes.” RAND Journal of Economics27(2):415–28.

Murray, C. J., and A. D. Lopez, eds. 1996. The Global Burden of Disease: AComprehensive Assessment of Mortality and Disability from Diseases, In-juries, and Risk Factors in 1990 and Projected to 2020. Cambridge, Mass.:Harvard School of Public Health.

Musgrove, Philip. 1996. Public and Private Roles in Health. Discussion PaperNo. 339, Washington, D.C.: The World Bank.

National Cancer Policy Board. 1998. Taking Action to Reduce Tobacco Use.Washington, D.C.: National Academy Press.

Niu, S. R., G. H Yang, Z. M. Chen, J. L. Wang, G. H Wang, X. Z. He, H.Schoepff, J. Boreham, H. C. Pan, and R. Peto. 1998. “Emerging TobaccoHazards in China 2. Early Mortality Results from a Prospective Study.”British Medical Journal 317(7170):1423–24.

Non-Smokers’ Rights Association/Smoking and Health Action Foundation.1994. The Smuggling of Tobacco Products: Lessons from Canada. Ottawa:NSRA/SHAF.

Obot, I. S. 1990. “The Use of Tobacco Products Among Nigerian Adults: AGeneral Population Survey.” Drug Alcohol Dependence 26(2):203–08.

Page 133: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

119BIBLIOGRAPHIE

Orphanides, A., and D. Zervos. 1995. “Rational Addiction with Learning andRegret.” Journal of Political Economy 103(4):739–58.

Parish, S., R. Collins, R. Peto, L. Youngman , J Barton, K. Jayne, R. Clarke, P.Appleby, V. Lyon, S. Cederholm-Williams, and others. 1995. “Cigarette Smok-ing, Tar Yields, and Non-Fatal Myocardial Infarction:14,000 Cases and 32,000Controls in the United Kingdom. The International Studies of Infarct Survival(ISIS) Collaborators.” British Medical Journal 311(7003):471–77.

Pearl, R. 1938. “Tobacco Smoking and Longevity.” Science 87:216–7.Pekurinen, Markku. 1991. Economic Aspects of Smoking: Is There a Case for

Government Intervention in Finland? Helsinki: Vapk-Publishing.Peto, Richard, A. D. Lopez, and L. Boqi. “Global Tobacco Mortality: Monitor-

ing the Growing Epidemic.” In Lu R., J. Mackay, S. Niu, and R. Peto, eds.,The Growing Epidemic. Singapore: Springer-Verlag (in press).

Peto, Richard, A. D. Lopez, J. Boreham, M. Thun, and C. Heath, Jr. .1994.Mortality from Smoking in Developed Countries 1950–2000. Oxford: Ox-ford University Press.

Peto, Richard, Z. M. Chen, and J. Boreham. 1999. “Tobacco: the GrowingEpidemic.” Nature Medicine 5 (1):15–17.

Price Waterhouse. 1992. The Economic Impact of the Tobacco Industry on theUnited States Economy. Arlington, Virginia.

Raw, Martin, A. McNeill, and R. West. 1999. “Smoking Cessation: Evidence-Based Recommendations for the Healthcare System.” British Medical Jour-nal 318(7177):182–85.

Reid, D. 1994. “Effect of Health Publicity on Prevalence of Smoking.” BritishMedical Journal 309(6966):1441.

———. 1996. “Tobacco Control: Overview.” British Medical Bulletin52(1):108–20.

Reuter, P. 1992. The Limits and Consequences of U.S. Foreign Drug ControlEfforts. RAND Cooperation Publication No. RP-135.

Rice, D. P., T. A. Hodgson, P. Sinsheimer, W. Browner, and A. N. Kopstein.1986. “The Economic Costs of the Health Effects of Smoking, 1984.”Milbank Quarterly 64(4):489–547.

Rigotti, N. A., J. R. DiFranza, Y. C. Chang, and others. 1997. “The Effect ofEnforcing Tobacco-Sales Laws on Adolescents’ Access to Tobacco andSmoking Behavior.” New England Journal of Medicine 337(15):1044–51.

Roberts, M. J., and L. Samuelson. 1988. “An Empirical Analysis of Dynamic,Nonprice Competition in an Oligopolistic Industry.” RAND Journal of Eco-nomics 19(2):200–20.

Robson, L., and E. Single.1995. Literature Review of Studies of the EconomicCosts of Substance Abuse. Ottawa: Canadian Center on Substance Abuse.

Roemer, R. 1993. Legislative Action to Combat the World Tobacco Epidemic.2nd ed. Geneva: World Health Organization.

Page 134: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

120 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

Royal College of Physicians. 1962. Smoking and Health. Summary andReport of the Royal College of Physicians of London on Smoking in Relation toCancer of the Lung and Other Diseases. New York: Pitman Publishing Co.

———. 1992. Smoking and the Young. London.Rydell, C. P., and S. S. Everingham. 1994. Controlling Cocaine: Supply Ver-

sus Demand Programs. RAND Cooperation Publication No. MR-331-ONDCP/A/DPRC

Rydell, C. P., J. P. Caulkins, and S. S. Everingham. 1996. “Enforcement orTreatment? Modeling the Relative Efficacy of Alternatives for ControllingCocaine.” Operations Research 44(5):687–95

Saffer, Henry, and F. Chaloupka. 1999. Tobacco Advertising: Economic Theoryand International Evidence. NBER Working Paper No. 6958. Cambridge,Mass.: National Bureau of Economic Research.

Saffer, Henry. 1995. “Alcohol Advertising and Alcohol Consumption: Econo-metric Studies.” In Martin, S. E., ed., The Effects of the Mass Media on theUse and Abuse of Alcohol. Bethesda: National Institute on Alcohol Abuseand Alcoholism.

Saloojee, Yussuf. 1995. “Price and Income Elasticity of Demand for Ciga-rettes in South Africa.” In Slama, K., ed., Tobacco and Health. New York,NY: Plenum Press.

Samet, J. M., D. Yach, C. Taylor, and K. Becker. 1998. Research for effectiveglobal tobacco control in the 21st century working group convened during the10th World Conference on Tobacco or Health. Tobacco Control; 7(1):72–7

Schelling, T. C. 1986. “Economics and Cigarettes.” Preventive Medicine15(5):549–60.

Schoenbaum, M. 1997. “Do Smokers Understand the Mortality Effects ofSmoking? Evidence from the Health and Retirement Survey.” AmericanJournal of Public Health 87(5):755–59

Scitovsky, T. 1976. The Joyless Economy: An Inquiry into Consumer Satisfac-tion and Human Dissatisfaction. Oxford: Oxford University Press.

Silagy, C., D. Mant, G. Fowler, and M. Lodge. 1994. “Meta-Analysis on Effi-cacy of Nicotine Replacement Therapies in Smoking Cessation.” Lancet343(8890):139–42.

Single, E., D. Collins, B. Easton, H. Harwood, H. Lapsley, and A. Maynard.1996. International Guidelines for Estimating the Costs of Substance Abuse.Ottawa: Canadian Center on Substance Abuse.

Slama, K., ed. 1995. Tobacco and Health. New York, NY: Plenum Press.Smith, Adam. 1776. Wealth of Nations. Edition edited by Canaan, Edwin, 1976.

University of Chicago Press. Chicago.Stavrinos, V. G. 1987. “The Effects of an Anti-Smoking Campaign on Ciga-

rette Consumption: Empirical Evidence from Greece.” Applied Economics19(3):323–29.

Page 135: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

121BIBLIOGRAPHIE

Stigler, G., and G. S. Becker. 1977. “De Gustibus Non Est Disputandum.”American Economic Review 67:76–90.

Stiglitz, J. 1989. “On the Economic Role of the State.” In A. Heertje, ed., TheEconomic Role of the State. Cambridge, Mass.: Basil Blackwell in associa-tion with Bank Insinger de Beauford NV.

Sullum, J. 1998. For Your Own Good: The Anti-Smoking Crusade and the Tyr-anny of Public Health. New York: The Free Press.

Suranovic, S. M., R. S. Goldfarb, and T. C. Leonard. 1999. “An EconomicTheory of Cigarette Addiction.” Journal of Health Economics 18:1–29.

Sweanor, D. T., and L. R. Martial. 1994. The Smuggling of Tobacco Products:Lessons from Canada. Ottawa (Canada): Non-Smokers’ Rights Associa-tion/Smoking and Health Action Foundation.

Tansel, A. 1993. “Cigarette Demand, Health Scares and Education in Turkey.”Applied Economics 25(4):521–29.

Thursby, J. G., and M. C. Thursby. 1994. Interstate Cigarette Bootlegging:Extent, Revenue Losses, and Effects of Federal Intervention. NBER Work-ing Paper No. 4763. Cambridge, Mass.: National Bureau of Economic Re-search.

Tobacco Institute. 1996. The Tax Burden on Tobacco. Historical Compilation1995. Vol. 30. Washington D.C.

Townsend, Joy. 1987. “Cigarette Tax, Economic Welfare, and Social ClassPatterns of Smoking.” Applied Economics 19:355-65.

———. 1988. Price, Tax and Smoking in Europe. Copenhagen: World HealthOrganization.

———. 1993. “Policies to Halve Smoking Deaths.” Addiction 88(1):37–46.———. 1996. “Price and Consumption of Tobacco.” British Medical Bulletin

52(1):132–42.———. 1998. “The Role of Taxation Policy in Tobacco Control.” In Abedian,

I., and others, eds., The Economics of Tobacco Control. Cape Town, SouthAfrica: Applied Fiscal Research Centre, University of Cape Town.

Townsend, Joy, P. Roderick, and J. Cooper. 1994. “Cigarette Smoking by So-cioeconomic Group, Sex, and Age: Effects of Price, Income, and HealthPublicity.” British Medical Journal 309(6959):923–27.

Treyz, G. I. 1993. Regional Economic Modeling: A Systematic Approach toEconomic Forecasting and Policy Analysis. Boston, Mass.: Kluwer Aca-demic Publishers.

Tye, J. B., K. E. Warner, and S. A. Glantz. 1987. “Tobacco Advertising andConsumption: Evidence of a Causal Relationship.” Journal of Public HealthPolicy 8:492–508.

U.S. Centers for Disease Control and Prevention. 1994. “Medical-Care Ex-penditures Attributable to Cigarette Smoking—United States, 1993.” Mor-bidity and Mortality Weekly Report 43(26):469–72.

Page 136: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

122 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

———. 1998. “Response to Increases in Cigarette Prices by Race/Ethnicity,Income, and Age Groups—United States, 1976-1993.” Morbidity and Mor-tality Weekly Report 47(29):605–9.

U.K. Department of Health. 1998. Smoking Kills: A White Paper on Tobacco.London: The Stationary Office. ( http://www.official-documents.co.uk/docu-ment/cm41/4177/contents.htm)

U.S. Department of Health and Human Services. 1988. The Health Conse-quences of Smoking: Nicotine Addiction. A Report of the Surgeon General.Rockville, Maryland: U.S. Department of Health and Human Services, Pub-lic Health Service, Centers for Disease Control, Center for Health Promo-tion and Disease Prevention, Office on Smoking and Health. DHHSPublication No.(CDC)88-8406.

———. 1989. Reducing the Health Consequences of Smoking: 25 Years of Progress.A Report of the Surgeon General. Rockville, Maryland: U.S. Department ofHealth and Human Services, Public Health Service, Centers for Disease Con-trol, Center for Chronic Disease Prevention and Health Promotion, Office onSmoking and Health. DHHS Publication No.(CDC)89-8411.

———. 1990. The Health Benefits of Smoking Cessation: A Report of the Sur-geon General. Rockville, Maryland: U.S. Department of Health and Hu-man Services, Public Health Service, Centers for Disease Control, Centerfor Chronic Disease Prevention and Health Promotion, Office on Smokingand Health. DHHS Publication No. (CDC) 90-8416.

———. 1994. Preventing Tobacco Use Among Young People. A Report of theSurgeon General. Atlanta, Georgia: U.S. Department of Health and HumanServices, Public Health Service, Centers for Disease Control, Center for ChronicDisease Prevention and Health Promotion, Office on Smoking and Health.

USDA (U.S. Department of Agriculture). 1998. Economic Research ServiceDatabase. (http://www.econ.ag.gov/prodsrvs/dataprod.htm)

Van der Merwe, Rowena. 1998. “Employment and Output Effects forBangladesh Following a Decline in Tobacco Consumption.” Population,Health and Nutrition Department. The World Bank.

Viscusi, W. K. 1990. “Do Smokers Underestimate Risks?” Journal of PoliticalEconomy 98(6):1253–69.

———. 1991. “Age Variations in Risk Perceptions and Smoking Decisions.”Review of Economics and Statistics 73(4):577–88.

———. 1992. Smoking: Making the Risky Decision. New York: Oxford Uni-versity Press.

———. 1995. “Cigarette Taxation and the Social Consequences of Smoking.”In Poterba, J. M., ed., Tax Policy and the Economy. Cambridge, Mass.: MITPress.

Wald, N. J., and A. K. Hackshaw. 1996. “Cigarette Smoking: An Epidemio-logical Overview.” British Medical Bulletin, 52(1):3–11.

Page 137: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

123BIBLIOGRAPHIE

Warner, K. E. 1986. “Smoking and Health Implications of a Change in theFederal Cigarette Excise Tax.” Journal of the American Medical Associa-tion 255(8):1028–32.

———. 1987. Health and Economic Implications of a Tobacco-Free Society.”Journal of the American Medical Association 258(15):2080–6.

———. 1988. “The Tobacco Subsidy: Does it Matter?” Journal of the Na-tional Cancer Institute 80(2) 81–83.

———. 1989. “Effects of the Antismoking Campaign: An Update.” AmericanJournal of Public Health 79(2):144–51.

———. 1990. “Tobacco Taxation as Health Policy in the Third World.” Ameri-can Journal of Public Health 80(5):529–31.

———. 1997. “Cost-Effectiveness of Smoking Cessation Therapies: Interpre-tation of the Evidence and Implications for Coverage.” PharmacoEconomics11:538–49.

Warner, K. E., and G. A. Fulton. 1994. “The Economic Implications of To-bacco Product Sales in a Non-tobacco State.” Journal of the American Medi-cal Association 271(10):771–6.

Warner, K. E., and others. The Medical Costs of Smoking in the United States:Estimates, Their Validity and Their Implications, forthcoming.

Warner, K. E., F. J. Chaloupka, P. J. Cook, and others. 1995. “Criteria forDetermining an Optimal Cigarette Tax: the Economist’s Perspective.” To-bacco Control 4:380–86.

Warner, K. E., G. A. Fulton, P. Nicolas, and D. R. Grimes. 1996. “Employ-ment Implications of Declining Tobacco Product Sales for the RegionalEconomies of the United States.” Journal of the American Medical Asso-ciation 275(16):1241–6.

Warner, K. E., J. Slade, and D. T. Sweanor. 1997. “The Emerging Market forLong-term Nicotine Maintenance.” Journal of the American Medical Asso-ciation 278(13):1087–92.

Warner, K. E., T. A. Hodgson, and C. E. Carroll. 1999. The Medical Costs ofSmoking in the United States: Estimates, Their Validity and Implications.Ann Arbor, MI: University of Michigan, School of Public Health. Depart-ment of Health Management and Policy. Working Paper.

Watkins, B. G. III. 1990. “The Tobacco Program: An Econometric Analysis ofIts Benefits to Farmers.” American Economist 34(1):45–53.

Weinstein, N. D. 1998. “Accuracy of Smokers’ Risk Perceptions.” Annals ofBehavioral Medicine 20(2):135–40.

Wersall, J. P., and G. Eklund. 1998. “The Decline of Smoking Among SwedishMen.” International Journal of Epidemiology 27(1):20–6.

WHO (World Health Organization). 1996a. Investing in Health Research and De-velopment, Report of the Ad Hoc Committee on Health Research Relating toFuture Intervention Options (Document TDR/Gen/96.1.), Geneva, Switzerland.

Page 138: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

124 MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE

———.1996b. Tobacco Alert Special Issue: the Tobacco Epidemic: a GlobalPublic Health Emergency. Geneva, Switzerland.

———. 1997. Tobacco or Health: a Global Status Report. Geneva, Switzer-land.

———. 1999. Making a Difference. World Health Report. Geneva, Switzer-land.

World Bank. 1990. Brazil: the New Challenge of Adult Health. Washington,D.C.

———.1992. China: Long-term Issues and Options in the Health Transition.Washington, D.C.

———.1993. The World Development Report 1993: Investing in Health. NewYork: Oxford University Press.

———.1994a. Chile: the New Adult Health Policy Challenge. Washington,D.C.

———.1994b. Averting the Old Age Crisis. Washington, D.C.———.1996. China: Issues and Options in Health Financing. Report No.

15278-CHA, Washington, D.C.———. 1997. Confronting AIDS: Public Priorities in a Global Epidemic. World

Bank Policy Report. Washington, D.C.———. 1998. World Development Indicators. Washington, D.C.Zatonski, W. 1996. Evolution of Health in Poland Since 1988. Warsaw: Marie

Skeodowska-Curie Cancer Center and Institute of Oncology, Departmentof Epidemiology and Cancer Prevention.

Zatonski, W., K. Przewozniak, and M. Porebski. 1999. The Impact of EnlargedPack Health Warnings on Smoking Behavior and Attitudes in Poland. Paperpresented at the workshop on “Tobacco Control in Central and Eastern Eu-rope.” Las Palmas de Gran Canaria. February 26, 1999.

Zhang, Ping, and C. Husten. 1998. “The Impact of the Tobacco Price SupportProgram on Tobacco Control in the United States.” Tobacco Control7(2):176–82.

Zhang, Ping, C. Husten, and G. Giovino. 1997. The Impact of the Price Sup-port Program on Cigarette Consumption in the United States. Atlanta: Of-fice on Smoking and Health, Centers for Disease Control and Prevention.

Page 139: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

125

Index

AAccord général sur les tarifs douaniers

et le commerce (GATT), 67adolescents, 4, 17

salive, 21, 22adolescents, risques, 30, 31–32Afrique du Sud

fiscalité, 40, 41, 78mises en garde, 49

âge, 19taux de morbidité, 23voir également adolescents

Asie du Sud, morbidité, 25avantages, 3, 29

lutte contre le tabagisme, 80

BBanque mondiale, politique sur le

tabac, 89bidis, 45Brundtland, Gro Harlem, 88bupropion, 58

CCanada

fiscalité, 40, 41, 77mises en garde, 49–50substitution des cultures, 65

cancer du poumon, 24, 28cardiopathies, 24, 25charge de morbidité, 22–23Chine, 17, 18, 19

délai entre l’exposition aurisque et la maladie, 24

employés, 72fiscalité et, 80hausses de prix, 43, 46morbidité, 25production de tabac, 62

conséquences pour la santé, 2–3,21–28

consommateurs défavorisés, 10,25–26

fiscalité et, 78–79contrebande, 9, 10, 67–70

Page 140: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE126

fabricants de tabac et, 69fiscalité et, 78–79

contre-offensive publicitaire,médias, 51

Convention-cadre sur la lutteanti-tabac, 11–12, 88

coûts, 4–5, 30, 32–35, 90–91des substituts nicotiniques, 59imposés aux autres, 32–35soins de santé, 4

cultivateurs, aide, 74

Ddélai entre l’exposition au risque

et le décès, 23–24demande

mesures de réduction, 39–60mesures de réduction autres que

de prix, 48, 56–57dépenses, 72–73dépenses de santé, 32–35

financement, 36sur la durée de vie, 33–34

dissuasion, 5–8intervention des pouvoirs

publics, 35–36droits de consommation, 93–94

voir également fiscalité

Eéducation, 16, 17éducation sanitaire, 36emploi, 72

lutte contre le tabagisme et,67–71

enfantsde fumeurs, 28éducation sanitaire, 35publicité, 53risque, 30, 31–32

enfants santé, 27

épidémiologie, 90États-Unis

adolescents, 21–22, 31délai entre l’exposition au risque

et la maladie, 23–24dépenses de santé, 34employés, 71, 72hausse des prix, 43, 44, 45–46informations de choc, 48

exportateurs, 70exposition des non-fumeurs à

la fumée.Voir tabagisme passif

Ffabricants, 70faible teneur en goudron, 25

marques, 49faible teneur en nicotine, 25

marques, 49famille, 47fiscalité, 6–7, 35–36, 39–40, 92

consommateurs défavorisés et,79–80

contrebande et, 75–79coût-efficacité, 10–11demande mondiale et, 44, 45droits, 93–94effets sur la consommation, 41fixation des taux, 93harmonisation, 78niveau optimal, 47recettes publiques et, 9, 76, 77régime fiscal différent, 36taxes ad valorem, 40types, 40

Fonds monétaire internationalfiscalité, 93–94

fumeursnombre potentiel de fumeurs qui

cesseraient de fumer, 57

Page 141: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

127INDEX

réguliers, 31

Ggrossesse, 27

Iimpôts spécifiques sur le tabac, 40incitations. Voir avantagesinformation, 48

de choc, 7initiative Se libérer du tabac, 88–89institutions internationales, 11–12interdiction. Voir restrictionsinterventions axées sur l’offre 61–67,interventions individuelles, 86

Jjeunes, restrictions sur l’accès aux

cigarettes, 62

Llieu de travail, 56lieux publics, 56lutte contre le tabagisme, 8–11

conséquences, 71–83coût, 9–10, 71–83coûts de mise en œuvre, 83coûts pour l’individu, 80–81rentabilité, 10–11, 81–83

Mmaladies cardio-vasculaires, 25, 28maladies vasculaires, 24Malawi, production de tabac, 62mesures de lutte contre le tabagisme,

impact estimatif, 45–46mesures de réduction de la demande

autres que de prix, 7–8, 77demande mondiale, 56

méthode de la Convention-cadre etdes protocoles, 88

mises en garde, 49–51morbidité, 24mortalité, 23, 87

Nnicotine

dépendance, 2, 6, 21–22retrait, 58

niveau de consommation, 43nombre de cigarettes fumées, 16Norvège, 16

Oobstacles politiques au changement,

86–87offre, réduire l’, 61–70Organisation mondiale de la santé,

Convention-cadre sur la lutteanti-tabac, 11–12

Pparties prenantes, 90pays à faible revenu, 13–15

âge, 17dépenses de santé, 33–34hausse des prix et, 43–44mortalité, 23

pays à revenu élevé, 14, 16, 30délai entre l’exposition au risque

et la maladie, 23, 24dépenses de santé, 32–33,

34–35fiscalité, 48fiscalité et recettes publiques, 78hausses de prix et, 43–44interdiction de la publicité, 53mortalité, 23résultats de recherches publiés,

48–49substituts nicotiniques, 58–59

pays à revenu intermédiaire, 13–15

Page 142: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

MAÎTRISER L’ÉPIDÉMIE128

âge, 17dépenses de santé, 33–34mortalité, 3

pays en développement, 14production de tabac, 62

pays producteurs de tabac, enéquilibre, 73

pays producteurs, employés, 73Pays-Bas, dépenses de santé, 34Plan de travail accéléré, 88poids à la naissance, 27politique, 11–12, 85–86, 93–94

dépenses de santé, 33Pologne, 26

éducation, 26mises en garde, 49risques, 30–31

pouvoirs publics, 11intervention, 35–36recettes, 76, 77

prévalence, 16prévention, 35priorités de la recherche, 90–91prix

contrebande et, 67toxicomanie et réaction, 43–44,

45–46programmes de maîtrise du

tabagisme en milieu scolaire, 51promotion. Voir publicitépublication, résultats des recherches,

48–49, 91publicité, 52

interdiction, 53voir également contre-publicité

RRapport de stratégie sectorielle

(1997), 89recettes publiques, 40, 41, 77recommandations, 91–92répartition régionale, 15

restrictions, 36, 56, 61–62, 82restrictions commerciales, 8–9, 14

internationales, 66–67résultats des recherches, publication,

48–49, 91risques, 3–5, 29–32, 33Royaume-Uni, 16

adolescents, 22dépenses de santé, 33employés, 73fiscalité, 41hausse des prix, 45–46

Ssalive, 21–22schémas régionaux, 15sevrage, 28, 80

arrêt de la cigarette dans lemonde, 18–19

efficacité, 58soutien des prix, 65–66statut socio-économique, 16substitution et diversification des

cultures, 8, 62–65substituts nicotiniques, 8, 57–60

rentabilité, 82subventions, 65–66Suisse, dépenses de santé, 34Surgeon General, 49

Ttabagisme passif, 27–28, 47taxes ad valorem, 40tendances, 2, 13–20Thaïlande, interdiction, 67timbres fiscaux, 69toxicomanie, 37Turquie, mises en garde, 50

UUnion européenne, interdiction de la

publicité, 53, 54–55

Page 143: L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme · 2014. 8. 27. · La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cette publication

129INDEX

VViet Nam, 20

ZZimbabwe

employés, 72production de tabac, 62, 65