L’armée et le cinéma dans l’entre-deux-guerres (1920-1939)

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ENTRE INSTRUCTION ET PROPAGANDE l’armée et le cinéma dans l’entre-deux-guerres (1920-1939) par Stéphane LAUNEY

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ENTRE INSTRUCTION ET PROPAGANDE

l’armée et le cinéma dans

l’entre-deux-guerres (1920-1939)

par Stéphane LAUNEY

SOMMAIRE

Le cinéma militaire dans l'entre-deux-guerres

• Une histoire sans archives ?

• Retour aux sources

Pérennisation du cinéma militaire

• Au sein du ministère de la Guerre

• L’œil de l'aviateur et du marin

Regard sur la production

• Entre instruction...

• … et propagande

Conclusion

ECPAD, FT 424

Le cinéma militaire dans l'entre-deux-guerres

Une histoire sans archives ?

• Les travaux historiques se sont appuyés principalement sur quelques documents épars, des témoignages ou la presse cinématographique ;

• Les archives ont connu les affres de la Seconde Guerre mondiale : perdues ou confisquées par les Allemands puis par les Soviétiques.

Retour aux sources

• Le fonds Moscou : les archives du 3e bureau de l’EMA du ministère de la guerre ont permis d’isoler de nombreux documents échangés avec la section cinématographique, créée en 1920 ;

• Possibilité de porter un regard neuf sur cette période en croisant ces sources avec les films encore conservés à l’ECPAD (séries FT, 14.18, SS).

Sources filmiques : état de la question

Du dépôt des films au fort d’Ivry en 1946… à la disparition d’une grande partie de ce fonds.

ECPAD,

reportage

Terre 11246

ECPAD, archives Marcel Cau, dossier 22

Comment expliquer les lacunes dans les collections

actuelles de l’ECPAD ?

Un problème de conservation ?

Une décomposition de la pellicule nitrate stockée dans de mauvaises

conditions, avant que le SCA ne prenne réellement possession des lieux

à l’automne 1948.

Une élimination volontaire ?

Une élimination des films en raison de

leur obsolescence au vu du nouvel

armement, en grande partie américain,

équipant l’armée française et entraînant

des changements radicaux dans la

manière de faire la guerre.

SHD, DBIB Terre 4° 7021

Absence de moyens cinématographiques

communs aux trois armées

La section cinématographique de

l’armée (SCA) n’est pas un

organisme interarmées.

En 1936 est institué un service

cinématographique de la marine

et, l’année suivante, son

équivalent pour l’armée de l’air.

ECPAD, 14.18 A 1347

ECPAD, FT 343

Vers une pérennisation du cinéma militaire (1/2)

1920 - 1922

Septembre 1919 : suppression du SPCG. Les collections demeurent aux Beaux-arts puis aux Archives photographiques d’art et d’histoire.

Juin 1920 : à la demande du 3e bureau (instruction), feu vert pour la mise en place d’une section cinématographique (SCA) au sein du service géographique de l’armée. La SCA a d’emblée une forte dimension éducative. Aussi dénommée « section d’enseignement par l’image », sa première mission est la diffusion du cinéma dans les écoles et les centres d’éducation physique.

Des débuts confidentiels :

– Installation sommaire aux Invalides (cour de Metz) ;

– manque de crédits ;

– un effectif réduit ;

– matériel vieillissant à mettre aux normes.

Vers une pérennisation du cinéma militaire (2/2)

1923 - 1925

En temps de paix, le film est rapidement perçu comme une réponse adéquate à la question de l’instruction militaire

- programme Buat (à partir de 1923) : réalisation de films d'instruction ;

- diffusion à titre d'essai dans quelques corps d'armée ;

- théorisation du cinéma militaire (parution d’articles dans la presse militaire).

SHD, GR 7 N sup. 569, pellicules du film Les gaz de combat

Pérennisation du cinéma militaire

Pierre Calvet dirige la SCA jusqu'à l'été 1940. En 1932,

de nouveaux locaux et équipements avec un personnel

étoffé ; des crédits conséquents mis à disposition :

1926 - 1939

Au sein de l’armée, de nouveaux corps d'armées sont équipés en appareils

de projection avec un personnel qualifié (taux d'équipement régimentaires

de 80 % prévu fin 1938) ; création de dépôts permanents de films dans les

régions militaires (apparition de collections régimentaires en 1936) ; une

note annuelle précise le programme des films à réaliser et leur diffusion.

SHD, GR 8 Ye 39559

L’œil de l’aviateur…

Aéronautique militaire : - des liens étroits avec le cinéma ;

- à la pointe de la technique avec des soldats spécialistes ;

- projet de rattachement de la SCA à la fin des années 20.

Armée de l’air : - l’autonomie de 1934 ne remet pas en cause

le lien avec la SCA ;

- la création du service cinématographique de l’air (1937) conforte ses particularismes (films d’instructions spécialisés, propagande aéronautique).

Revue maritime, mai 1927

…et l’œil du marin !

Le cinéma, un outil en

faveur du recrutement

- une participation maritime aux

films de fiction et aux

documentaires ;

- 1927 : création d’un service

photo-cinéma, sans grands

moyens (le ministère se tourne

alors vers l’industrie privée) ;

- 1936 : un service

cinématographique de la marine

aux compétences élargies

(instruction et propagande) est

institué.

SHD, MV 1 BB8 15

ECPAD, FT 174

Regard sur la production :

entre instruction et propagande (1/2)

1935 : rapport Petsche

- le ministère de la Guerre au premier

rang des crédits consacrés au cinéma ;

- une cinémathèque de 145 films d’instruction et de 115 films de propagande, tous muets.

Typologie des films d’instruction :

- film tactique (étude d’un règlement) ;

- film technique (étude d’un armement) ;

La pédagogie militaire par le cinéma : nombreux cartons explicatifs,

grand usage de schémas et dessins animés, emploi du ralenti

Revue militaire française, juillet-septembre 1926

Regard sur la production :

entre instruction et propagande (2/2)

Les films d’instruction :

de la conception à la diffusion

- élaboration d’un scénario au

sein d’une commission ;

- réalisation par la SCA, en lien

avec un conseiller technique,

puis montage ;

- validation puis diffusion ;

- nouveaux règlements rend

certains films obsolètes

(éliminations ?) : nécessité d’une

nouvelle réalisation.

SHD, DBIB Terre 4° 7021

SHD, GR 9 N 295, répertoire 1934

Les films sur les batailles de 1918

ECPAD, 14.18 A 120, Offensive générale concentrique

Le cinétir

« L’image s’arrête au moment où la

balle frappe l’écran et le point d’impact

apparaît lumineux puis la projection

reprend après un temps d’arrêt »

Note du 18 décembre 1937,

SHD, GR 7 N sup. 568, d. 1

SHD, GR 9 NN1 404

Une production éducative

et de propagande

- une éducation morale et patriotique (montage

de films sur la Grande Guerre) ;

- une propagande coloniale (films vantant la vie

militaire aux colonies pour soutenir les

engagements ; réalisation de courts-métrages pour

l’exposition coloniale de 1931) ;

- une propagande sanitaire (informer les soldats

des risques encourus pendant leur passage sous

les drapeaux mais aussi après leur retour à la vie

civile). L’armée se fait également l’écho du

mouvement nataliste (films sur la prophylaxie

des maladies vénériennes).

ECPAD, 14.18 A 97

ECPAD, FT 507

ECPAD, FT 520

Conclusion

À la veille du second conflit mondial, le cinéma militaire a manifestement réussi à s’imposer au sein de l’institution, notamment grâce à l’action du commandant Calvet.

En dehors de l’armée, ce dernier a contribué à son rayonnement par ses participations à plusieurs manifestations se rapportant au cinéma éducatif.

En 1938, un projet de réorganisation de la SCA évoque timidement, entre autres, la possibilité d’une structure interarmées qui ne pourra aboutir avant septembre 1939.

Toutefois, les méthodes de production et de diffusion du cinéma militaire, pensées et mises en œuvre durant l’entre-deux-guerres, inspireront le fonctionnement du service cinématographique des armées constitué en 1946.

Merci pour votre attention

ECPAD, 14.18 A 1243