Langage et communication Cours I....

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Dr. Germaine Gremaud 1 Langage et communication – SA 1 Langage et communication Gremaud Germaine (SA) - Laura Herzog (SP) Plan Semestre d’automne 1. Introduction - définitions 2. Communication basale 3. (suite) Précurseurs du langage - méthodologie de l'observation 4. De la communication non intentionnelle à C intentionnelle 5. (suite) - Evaluation de l'intentionnalité 6. (suite) - Intervention – Médiation 31 octobre (congé université) 7. Communication améliorée et alternative (CAA): Moyens 14 novembre Dies Academicus (pas de cours) 8. CAA – CF – soutien gestuel (exercices) 9. Modèle d'implantation d'un moyen de CAA 10. Téléthèses: Intervention 11. Développement phonétique et phonologique 12. Evaluation et intervention L'objectif du cours est d'apporter les connaissances nécessaires à l'évaluation du langage et de la communication des personnes présentant une déficience intellectuelle (DI), afin de planifier une intervention permettant à ces personnes de mieux fonctionner dans leur environnement. Pour atteindre cet objectif, nous présenterons le développement du langage et de la communication chez l’enfant normal (jusqu’à 4-5 ans), pour ensuite mettre en évidence des aspects spécifiques (autiste - surdité). Le polycop: Il constitue la lecture obligatoire, aussi tout ne sera pas traité en détail dans le cours. En complément, nous expliquerons et illustrerons certains aspects à l’aide d’exemples pratiques, de vidéos ou d’analyses de séquences interactives. Bibliographie: Dans chaque cours, vous trouverez les références des auteurs cités et des lectures permettant d’approfondir certains aspects mentionnés dans le texte. Je vous incite vivement à lire quelques livres et articles, car le cours ne peut pas développer tous les aspects. Examen : Il a lieu à la fin du semestre de printemps, lors du dernier cours. Il est constitué de questions précises sur les cours des semestres d’automne et de printemps. En cas d’échecs, la procédure déterminée est la même. Adresse mail : [email protected] Dr. Germaine Gremaud 2 Langage et communication – SA 1 Cours I. Introduction Introduction : Présentation du programme 1. DEFINITIONS: 2. Les théories du langage 3. Les caractéristiques des langues naturelles 4 Le signe linguistique 5. Situations de communication et fonctions du langage Synthèse et discussion Bibliographie (* lectures conseillées) Beaudichon; J. (1982). La communication sociale chez l'enfant. Paris: PUF. Bernicot, J. (1994). L'acquisition du langage: étapes et théories. In R. Ghiglione et J.F. Richard (sous la direction de) Cours de psychologie , Tome 3 (pp. 408-426). Paris: Dunod. * Bernicot, J. et Bert-Erboul, A. (2009). L’acquisition du langage par l’enfant. Paris : Editions In Press Brin, F., Courrier, C., Lederlé, E. et Masy, V. (2004). Dictionnaire d’orthophonie. Isbergues : Ortho Edition. Bronckart, J.P. (1977). Théories du langage. Bruxelles: Mardaga, (Chap. IV: F. de Saussure, pp. 83-118 ). Brunner, J. (1983). Savoir faire, savoir dire. Paris : PUF. * Demont, E. (2009). La Psychologie. Paris: Dunod (pp. 11-17 Le Langage) Gérard, J. (1987). Savoir parler, savoir dire, savoir communiquer. Neuchâtel: Delachaux Niestlé (IPC: Bea 1123). Gremaud, G. (1991). Aspects de la communication référentielle et de la prise de rôle en handicap mental. Cousset (CH) : Delval. (voir chapitre 1). Le Normand, M.-T. (1999). Modèles psycholinguistiques du développement du langage. In C. Chevrie-Muller et J. Narbona (Eds.). Le langage de l’enfant, aspects normaux et pathologiques. 2 e édition. (pp. 28-43). Paris : Masson. Lust, B. (2006). Child Language. Acquisition and Growth. Cambridge : Cambridge University Press, Textbooks in Linguistics. Mazet, Ph. et Stoléru, S. (2003). Psychopathologie du nourrisson et du jeune enfant. Développement et interactions précoces. (3 e édition). Paris : Masson. Robert-Tissot, C. (2008). L'enfant en situation de handicap à la rencontre de ses pairs Récupéré de http ://www.credas.ch/2008_06_06/index.htm Rondal, J. R. et Seron, X. (sous la direction de), (1982). Troubles du langage. Bruxelles: Mardaga (IPC: Cf. 353). Saussure, F. (de) (1978). Cours de linguistique générale. Lausanne: Payot. Schneuwly, B. (1985). Vygotsky aujourd’hui. Neuchâtel : Delachaux et Niestlé. Introduction Ce premier cours a pour objectif de présenter quelques définitions: linguistique, langage, langue, parole, communication, afin de faciliter la compréhension du cours durant l'année. Puis, nous présenterons les caractéristiques des langues naturelles pour illustrer les possibilités que nous offre les langues ou notre langue. Ensuite, la présentation du signe linguistique a pour objectif de vous sensibiliser à la construction active du sujet (la personne) et au rôle de la société dans cette construction. Ce premier cours constitue une introduction très générale qui ne fera pas l'objet d'une évaluation dans le contrôle de connaissances. Les personnes intéressées peuvent approfondir les aspects présentés ici par la lecture des livres cités en référence, en particulier, Bernicot (1994) et Bronckart (1977). D’une manière plus globale: Rondal et Seron (1982).

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Dr. Germaine Gremaud 1 Langage et communication – SA 1

Langage et communication

Gremaud Germaine (SA) - Laura Herzog (SP)

Plan Semestre d’automne

1. Introduction - définitions 2. Communication basale 3. (suite) Précurseurs du langage - méthodologie de l'observation 4. De la communication non intentionnelle à C intentionnelle 5. (suite) - Evaluation de l'intentionnalité 6. (suite) - Intervention – Médiation 31 octobre (congé université) 7. Communication améliorée et alternative (CAA): Moyens 14 novembre Dies Academicus (pas de cours) 8. CAA – CF – soutien gestuel (exercices) 9. Modèle d'implantation d'un moyen de CAA 10. Téléthèses: Intervention 11. Développement phonétique et phonologique 12. Evaluation et intervention

L'objectif du cours est d'apporter les connaissances nécessaires à l'évaluation du langage et de la communication des personnes présentant une déficience intellectuelle (DI), afin de planifier une intervention permettant à ces personnes de mieux fonctionner dans leur environnement. Pour atteindre cet objectif, nous présenterons le développement du langage et de la communication chez l’enfant normal (jusqu’à 4-5 ans), pour ensuite mettre en évidence des aspects spécifiques (autiste - surdité). Le polycop: Il constitue la lecture obligatoire, aussi tout ne sera pas traité en détail dans le cours. En complément, nous expliquerons et illustrerons certains aspects à l’aide d’exemples pratiques, de vidéos ou d’analyses de séquences interactives. Bibliographie: Dans chaque cours, vous trouverez les références des auteurs cités et des lectures permettant d’approfondir certains aspects mentionnés dans le texte. Je vous incite vivement à lire quelques livres et articles, car le cours ne peut pas développer tous les aspects. Examen : Il a lieu à la fin du semestre de printemps, lors du dernier cours. Il est constitué de questions précises sur les cours des semestres d’automne et de printemps. En cas d’échecs, la procédure déterminée est la même. Adresse mail : [email protected]

Dr. Germaine Gremaud 2 Langage et communication – SA 1

Cours I. Introduction

Introduction : Présentation du programme 1. DEFINITIONS:

2. Les théories du langage

3. Les caractéristiques des langues naturelles 4 Le signe linguistique

5. Situations de communication et fonctions du langage

Synthèse et discussion

Bibliographie (* lectures conseillées)

Beaudichon; J. (1982). La communication sociale chez l'enfant. Paris: PUF.

Bernicot, J. (1994). L'acquisition du langage: étapes et théories. In R. Ghiglione et J.F.

Richard (sous la direction de) Cours de psychologie , Tome 3 (pp. 408-426). Paris: Dunod.

* Bernicot, J. et Bert-Erboul, A. (2009). L’acquisition du langage par l’enfant. Paris : Editions

In Press

Brin, F., Courrier, C., Lederlé, E. et Masy, V. (2004). Dictionnaire d’orthophonie. Isbergues : Ortho Edition.

Bronckart, J.P. (1977). Théories du langage. Bruxelles: Mardaga, (Chap. IV: F. de Saussure,

pp. 83-118 ). Brunner, J. (1983). Savoir faire, savoir dire. Paris : PUF.

* Demont, E. (2009). La Psychologie. Paris: Dunod (pp. 11-17 Le Langage)

Gérard, J. (1987). Savoir parler, savoir dire, savoir communiquer. Neuchâtel: Delachaux

Niestlé (IPC: Bea 1123). Gremaud, G. (1991). Aspects de la communication référentielle et de la prise de rôle en

handicap mental. Cousset (CH) : Delval. (voir chapitre 1).

Le Normand, M.-T. (1999). Modèles psycholinguistiques du développement du langage. In C. Chevrie-Muller et J. Narbona (Eds.). Le langage de l’enfant, aspects normaux et

pathologiques. 2e édition. (pp. 28-43). Paris : Masson.

Lust, B. (2006). Child Language. Acquisition and Growth. Cambridge : Cambridge University Press, Textbooks in Linguistics.

Mazet, Ph. et Stoléru, S. (2003). Psychopathologie du nourrisson et du jeune enfant.

Développement et interactions précoces. (3e édition). Paris : Masson.

Robert-Tissot, C. (2008). L'enfant en situation de handicap à la rencontre de ses pairs Récupéré de http ://www.credas.ch/2008_06_06/index.htm

Rondal, J. R. et Seron, X. (sous la direction de), (1982). Troubles du langage. Bruxelles: Mardaga (IPC: Cf. 353).

Saussure, F. (de) (1978). Cours de linguistique générale. Lausanne: Payot. Schneuwly, B. (1985). Vygotsky aujourd’hui. Neuchâtel : Delachaux et Niestlé.

Introduction

Ce premier cours a pour objectif de présenter quelques définitions: linguistique, langage, langue, parole, communication, afin de faciliter la compréhension du cours durant l'année.

Puis, nous présenterons les caractéristiques des langues naturelles pour illustrer les

possibilités que nous offre les langues ou notre langue. Ensuite, la présentation du signe linguistique a pour objectif de vous sensibiliser à la construction active du sujet (la personne)

et au rôle de la société dans cette construction. Ce premier cours constitue une introduction

très générale qui ne fera pas l'objet d'une évaluation dans le contrôle de connaissances.

Les personnes intéressées peuvent approfondir les aspects présentés ici par la lecture des livres cités en référence, en particulier, Bernicot (1994) et Bronckart (1977). D’une manière

plus globale: Rondal et Seron (1982).

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1. DEFINITIONS

La linguistique étant la science qui traite du langage humain, nous lui emprunterons les principales définitions qui suivent (Cf. F. De Saussure, Cours de Linguistique Générale,

Payothèque, 1978, de Mauro)

Le langage est une notion purement théorique. C’est l’instance ou la faculté qui est

invoquée pour expliquer le fait que les hommes se parlent. Le langage est ce qui est commun à toutes les langues naturelles. On parle de faculté

humaine du langage dans la mesure où l’on observe de profondes similitudes dans les

modes d’expression. Cependant, les sociétés humaines ont développé des variétés de langages appelées langues naturelles (Bronckart, 1977). Le langage est donc une faculté

humaine.

Brin, Courrier, Lederlé et Masy (2004) définissent le langage comme : « un système de signes propre à favoriser la communication entre les êtres » (p. 133).

La langue n’est qu’une partie du langage. C’est à la fois un produit social de la faculté du

langage et un ensemble de conventions nécessaires, adaptées par le corps social, pour

permettre l’exercice de cette faculté chez les individus. Autrement dit par Rondal et Seron (1982) : « la langue est un système de règles qui spécifie

la façon d’utiliser le matériel verbal pour signifier ou symboliser la réalité extérieure ou

imaginaire » (p. 25). La langue est donc une convention entre les individus parlant cette langue. C’est un code,

c’est-à-dire un ensemble de signes.

La parole. Le langage se manifeste par la parole qui est une suite de sons, les phonèmes, qu’on émet lorsqu’on parle. La parole est le comportement de l’individu qui met en pratique

sa langue. C’est la forme que prend la langue chez un individu donné.

"La communication est une conduite dont le but est d’agir sur autrui, en assertant, créant

ou modifiant une opinion ou attitude, faisant faire, etc. Elle comporte un enjeu qui règle la motivation. Elle se réalise dans le cadre de conventions pertinentes en une circonstance

donnée de règles sociales plus générales, modulées par les caractéristiques personnelles

des individus en présence (statut, âge ..) et par la situation. (...) Elle est déterminée par la situation et les circonstances de l’énonciation et d’abord, par les caractéristiques

personnelles respectives des interlocuteurs" (Beaudichon, 1985, pp. 135-140).

La relation dans les interactions: « Les relations se réfèrent aux significations, attentes,

émotions engendrées par la succession des interactions entre deux individus qui se connaissent (rôle de la culture)... La nature et l'évolution de chaque interaction est influencée

par l'histoire des interactions passées entre ces deux individus et par leurs attentes quant

aux interactions futures » (Robert-Tissot, 2008, p.5)

2. Les théories de l’acquisition du langage

Il n’existe pas une théorie unifiée sur la manière dont les enfants acquièrent le langage, nous

allons en évoquer trois ci-dessous.

Théorie innéiste : Selon Chomsky (1957, 1965, 1972, cité par Le Normand, 1999), il existerait chez l’être humain, une prédisposition innée pour apprendre et utiliser le langage.

Les structures cérébrales nécessaires à l’acquisition et à la mémorisation du langage

seraient présentes dès la naissance (Mazet et Stoléru, 2003), mais l’acquisition du langage implique un environnement offrant des opportunités d’interactions et donc d’apprentissage

(Brunner, 1983, notamment). Deux notions centrales chez Chomsky (Cité par Brin et al.

2004) sont: 1. La compétence : « connaissance intuitive de la langue et de sa structure (lexique et

règles grammaticales), (p. 56).

2. La performance : « manifestation observable de la compétence linguistique d’un

locuteur au travers de ses productions verbales (p. 192).

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La créativité de la langue résulte de l’interaction entre ces 2 composantes. Elle renvoie à l’aptitude de l’enfant à s’approprier la langue de manière intuitive (Le Normand, 1999).

Théorie sociocontructiviste : Selon Vygotsky (1934, cité par Schneuwly, 1985) le

développement du langage se réalise en situation interactive. Le langage est utilisé comme outil social de communication (pour un développement voir aussi Gremaud, 1991).

Théorie constructiviste : Selon Piaget (1923), le développement du langage découle de l’acquisition de la fonction symbolique (fin du stade sensori-moteur). Jusqu’à l’âge de 24

mois, Piaget considère que l’enfant est dans une phase prélinguistique car il n’utilise pas

encore les mots de manière symbolique (capacité d’évoquer des objets et des situations non présentes en se servant de signes ou de symboles).

Pour les aspects historiques, voir Bernicot et Bert-Erboul (2009), livre conseillé pour

approfondir certaines questions (par exemple, les théories de l’acquisition du langage ou les méthodes de recherche) que nous ne pourrons pas développer et comme synthèse pour

d’autres aspects (étapes du développement).

3. Les caractéristiques des langues naturelles

Les langues naturelles n'imposent pas de limites à l'expression de tout ce que nous

pensons, imaginons, concevons, etc. L'individu au niveau de sa parole peut avoir des limites dans l'utilisation de la langue. Le langage humain est indépendant de l'état émotionnel de

l'individu. Cette indépendance de la langue est la source de la diversité des langues

humaines et de leurs dialectes, mais toutes ces langues présentent des caractéristiques

communes (Cf. Gérard, 1987).

1. La communication passe du locuteur, par les organes phonatoires, au récepteur, par le

canal auditif. Ceci, lorsque la communication est orale. 2. Un feed-back total est nécessaire, c'est-à-dire, s'entendre parler et se sentir parler et

produire les sons de la langue. Ceci suppose une absence de privations sensorielles,

l'audition en particulier. 3. Le langage humain se fait en alternance. Le locuteur peut devenir récepteur et vice-

versa. Il y a interchangeabilité dans le sens que tout ce que dit l'un peut être dit par

l'autre, sauf dans le cas des bébés.

4. Le langage transmet un sens. Il y a sémancité parce que les sons que nous produisons veulent dire quelque chose. Cette sémancité est arbitraire, car il n'y a pas de lien entre le

son et le sens.

Cette caractéristique n'est pas évidente pour un enfant. Johanna Berthoud cite un exemple de ses recherches. Lorsqu'on demande à un enfant s'il connaît un mot

long, un répond train et pour un mot court locomotive. Il fait une confusion avec les

propriétés de l'objet. Dans une période de compris, un autre enfant dit machine à

écrire, car il y a beaucoup de lettres dedans. En plus, les langues exploitent la polysémie. Les différents sens des mots peuvent

s'expliquer par des extensions de signification par analogie (tête d'un clou) ou par

métonymie (boire un verre), etc.. 5. Le caractère discontinu ou séparable des phonèmes. Les phonèmes sont les plus petites

unités de la langue, qui soient séparables. Ils présentent un caractère économique, car

avec une trentaine de sons de base, on obtient un vocabulaire très étendu. Ce caractère discontinu fait qu'il suffit de changer un phonème pour que le sens du mot change.

Le nombre d'unités peut varier entre 10 et 70 selon les langues. Par exemple avec 10

unités phonématiques, il est possible de réaliser 10.000 séquences distinctives de 4

phonèmes (10 à la puissance 4), mais toutes ces combinaisons ne sont pas acceptées dans une langue, car l'alternance des consonnes et des voyelles est définie. Par

exemple, il est impossible de trouver la suite aamlz en français.

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Certaines langues ont également des tons pour différencier le sens d'un même mot (par exemple les langues africaines comme le ngambay, le mbum etc., le chinois, etc.).

Ces unités discontinues, les phonèmes, se combinent selon des règles en mot, en

fonction de la langue. D'autres règles déterminent ensuite l'ordre des mots dans la

phrase, par exemple, la place du verbe dans la phrase diffère en allemand et en français. 6. La langue est un système ouvert qui donne une immense souplesse qu'aucun autre

genre de communication ne peut donner, si ce n'est le système de signes des sourds. La

langue ou les langues permettent qu'on invente tous les jours de nouveaux mots: des noms, des verbes, des adjectifs, etc. (classe ouverte), chacune ayant ses propres lois de

composition, mais pas de conjonctions, de prépositions, de pronoms (classe fermée).

C'est à partir d'un nombre fini d'éléments (phonèmes, morphèmes) que l'être humain est capable de comprendre un nombre infini de phrases et de générer toutes les phrases

possibles. Selon Chomsky (1965) cette créativité est le caractère le plus fondamental du

comportement langagier de tout être humain. Il n'est pas possible de mettre une limite

théorique à la longueur d'une phrase. 7. Le langage est atemporel. On peut rapporter des événements survenus à n'importe quel

moment, année, etc., tandis que chez les animaux, le langage s'applique au présent.

Cette capacité a permis la transmission des connaissances antérieures et de ce fait de les dépasser. L'écriture n'a fait que faciliter cette transmission qui se faisait oralement.

8. Le langage permet l'imaginaire et donne la possibilité de mentir car il n'est pas lié à la

réalité. Par contre, les autres moyens de représentation ont généralement une certaine

ressemblance ou lien avec la réalité représentée; tels signaux de la route, un cours d'eau sur une carte de géographie. La langue possède des mécanismes morphologiques et

grammaticaux qui permettent de distinguer le possible, le probable et l'hypothétique du

réel. La langue permet l'argumentation grâce aux liens logiques entre propositions. 9. Le langage permet une réflexion sur la langue elle-même. C'est la fonction

métalinguistique.

La langue est un outil que l'être humain ne possède pas à la naissance. Cependant, l'être humain a une capacité innée d'acquérir le langage, mais cette capacité doit être actualisée,

mise en oeuvre, ce qui est une première condition. L'enfant doit acquérir des compétences

linguistiques, c'est-à-dire un ensemble de règles qui régissent la bonne forme des énoncés

de la langue et des compétences communicatives, c'est-à-dire l'ensemble des règles qui régissent l'utilisation de la langue (Gérard, 1987).

4. Le signe linguistique

La langue est un système de signes. Par exemple, un mot peut être constitué d’un ou

plusieurs signes. On dira par exemple, que re-venir contient 2 signes, le re qui indique une

idée de répétition et venir. Ex.: refaire, redire etc. Chacun de ces re a la même signification, par contre la deuxième partie a à chaque fois une signification différente.

Le signe linguistique unit non une chose à un nom comme une sorte de nomenclature ou

d’étiquetage, mais un concept et une image acoustique (Saussure, 1978, pour une synthèse,

voir Bronckart, 1977 et Demont, 2009). Concept

______________

image acoustique

C’est "une entité psychique à deux faces" (op. cit. p. 98) élaborée par l’individu. On parle

d’image acoustique, parce que sans remuer les lèvres, ni parler, on peut se représenter

mentalement une poésie, par exemple. La production sonore et l’acte moteur liés à l’émission vocale ne sont donc pas nécessaires à l’image acoustique, mais bien la parole qui

est subordonnée à l’image acoustique.

La construction du signe linguistique demande de traiter deux domaines de la réalité qui requièrent deux activités psychologiques.

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Comme le concept de l'arbitrarité du signe linguistique fut souvent mal compris, Bronckart (1977) le présente en utilisant un vocabulaire psychologique contemporain, celui du

constructivisme piagétien:

Le concept se crée ainsi: le sujet placé devant un objet chaise par exemple, dégage un

certain nombre d’indices perceptifs qui serviront à construire une image mentale, une représentation (connaissance que le sujet à de l’objet chaise) qui s’affine et s’insère dans les

réseaux de choses, de hiérarchie (tabouret, canapé, fauteuil etc.). En effet, toutes les

propriétés ne sont pas pertinentes pour l’identification de l’objet. Ce sont les propriétés discriminatives qui permettent d’identifier un objet parmi d’autres, qui sont importantes. En

aucun cas, il ne s’agit d’une description exhaustive.

Pour la construction de l’image acoustique, le sujet élabore, sur la base des caractéristiques physiques et matériels des sons, un certain nombre d’indices perceptifs qui

servent à constituer cette image acoustique (différencier par exemple: chaise, pèse).

Arbitrarité du signe linguistique. L’opération essentielle de la langue ou de la création du

signe consiste à mettre en relation ces deux images: image mentale - image acoustique. Cependant, cette construction du signe n’explique pas le fait que les individus se parlent et

se comprennent. Il faut une convention de la société, et c’est en ce sens que la langue est

un phénomène social qui se manifeste par l’arbitrarité du signe linguistique qui fait qu’à tel signifiant corresponde tel signifié. C’est pour cette raison que les termes de signifié et de

signifiant seront préférés aux termes d’image mentale et d’image acoustique qui

renvoient à des images individuelles.

image mentale signifié

Individuelle _______________ Sociale ________

image acoustique signifiant

Image mentale et image acoustique sont construites par l’individu. Chaque individu a sa

propre image mentale de la chaise par exemple: en bois, en inox, etc. On comprend bien que cette image n’entre pas en considération dans le signe linguistique qui est une

abstraction, une sorte d’aboutissement du travail effectué par la société et réorganisé par

elle. Ce travail n’est d’ailleurs jamais fini, puisqu’il se poursuit dans le temps. La langue est

vivante. En effet, cette correspondance entre signifié et signifiant n’est pas acquise une fois pour toute, mais subit un glissement au fil du temps. Pour le comprendre, il suffit de voir la

valeur accordée à un adjectif comme étonnant qui servait jadis à décrire des événements

étranges, bizarres, inaccoutumés. La valeur était donc plus forte qu’aujourd’hui où d’autres adjectifs comme phénoménal, faramineux, fantastique, ont été introduits dans la hiérarchie.

Le signe ne prend donc un sens que par rapport aux autres signes de la langue à un

moment donné de son développement (Bronckart, 1977). Ces modifications dans la hiérarchie se produisent par la société, par l’usage qu’elle fait de la langue et du caractère

créatif de celle-ci. La construction du signe linguistique est une activité complexe qui débute

vers les 12 mois chez l’enfant normal pour se poursuivre jusqu’à la fin de la vie. Pensez

seulement à la quantité de signes nouveaux que vous avez à créer ces jours-ci en débutant des études dans un domaine nouveau pour vous. Dès lors, on comprend la difficulté qu’une

telle construction représente pour l’enfant handicapé mental.

De plus, de nouveaux sont créés, certains finissent par entrer dans le dictionnaire Larousse, prenons comme exemple "barjaquer (parler pour ne rien dire) qui fait son entrée dans

l'édition de 1997, mot tiré du "Dictionnaire des mots suisses de langue française". Entre

également dans l'édition 1997 du Larousse, les mots suisses suivants: "baboler" (parler de

manière indistincte), "caluger" (se renverser avec la luge", "frouiller" (tricher), "défunter" (être sur le point de mourir), la "rebuse" (retour du froid), "vigousse" (vif) (Michel Beuret dans "Le

Nouveau Quotidien" du 3.9.97).

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Cours 2 - 3: Communication basale – Précurseurs du langage Introduction

1. La communication "basale" (Mall, 1984)

1.1. Canaux de communication 1.2. Moyens d'expression de la PP

1.3. Contenu de la communication basale

1.4. Instructions

2. Les précurseurs du langage (Bruner, 1985) 2.1. Attribuer une intention de communication

2.2. Orienter le regard comme processus de référence

2.3. Développer les prises de tours 2.4. Développer l'attention conjointe: de la modalité d'exigence à la modalité de

réclamation

3. Analyse d'une observation (vidéo R.) 3.1. Méthodologie et résultats

3.1.1. Prises de tours: vocalisations

3.1.2. Mouvements de bouche

3.1.3. Bouche relâchée 4. Intervention

5. Exercice d'observation

Conclusion

Bibliographie

Barat, C., Bartschi, M., Battistelli, F., Baudry, C., Calvet, F. Maussion, E., Mazeau,M., Mazerolle, M. et Svendsen, F., (sous la direction de), (1985). L'enfant déficient mental

polyhandicapé: quelle réalité, quels projets. Paris: Ed. ESF. (IPC: Ceb 27).

* Bruner, J. (1983). Le développement de l'enfant: savoir faire, savoir dire. Paris: P.U.F. (Chapitre 5 en particulier).

Boutin, A.-M. (1997). Reflexions "actuelles" autour des différents thèmes concernant

l'accompagnement de la personne polyhandicapée. CESAP, 32, 25-46. Chauvie, J.M. Iribagiza, R. & Musitelli, Th. La communication, un inventaire des modes

d’expression et une approche « basale ». Aspects, 1994, 57, 8-23 (Editions SPC,

Lucerne)

Fröhlich, A. La stimulation basale: Aspects pratiques. Lavigny: Institut de Lavigny, 1987. Georges-Janet, L. Avec l'enfant polyhandicapé, communiquer à travers les expériences

sensorielles et motrices: quelques pistes venues d'ailleurs. CESAP Informations, 1995,

mars, n. 30, p. 5-11. Gremaud, G. (1988). Actes communicatifs et handicap sévère. In J. L. Lambert (Ed.),

Enfants et adultes handicapés mentaux, Cousset (CH): Delval.

Gremaud, G. (2002). Mises en place des premières conduites de communication dans des situations de stimulations sensorielles. In G. Petitpierre (Ed.), Enrichir les compétences,

pp.91-107. Lucerne : Edition SPC

Gremaud, G. et Lambert, J.L. (1997). Niveaux d'éveil et interactions avec l'enfant

polyhandicapé: implications éducatives. CESAP, 32, 55-61.

Wilder, J. & Granlund, M. (2003). Behaviour style and interaction between seven children

with multiple disabilities and caregivers. Child : Care, Health and Development, 29,(6),

559-567. http://www3.interscience.wiley.com/cgi-bin/fulltext/118882192/PDFSTART Mall, W. (1984). Basale Kommunikation ein Weg zum andern. Geistige Behinderung, 1984,

1, 1-16 (Praxis), (Traduit en partie in Chauvie et al. 1994 et par GG dans ce cours).

Sugarman, S. (1984). The development of preverbal communication: Its contribution and

limits in promoting the development of langage. In R.L. Schiefelbusch and J. Pickar (Eds.), The acquisition of communication competence. Baltimore: University Park Press.

Dr. Germaine Gremaud 8 Langage et communication – SA 1

Trevarthen, C. (1993). The function of emotions in early infant communi- cation and development. In J. Nadel, & L. Camaioni, (Eds.). New perspectives in early

communicative development, (pp. 49-81). London: Routledge.

2 sites polyhandicap : www.CREDAS.ch (articles téléchargeables) et www.CESAP.fr.

Introduction

"Avant de s'occuper de la personne polyhandicapée (personne retardée mentale "PRM"

profonde polyhandicapée), il s'agit d'abord de la rencontrer; c'est d'abord l'attitude

intérieure qui détermine cette rencontre" (Boutin, 1997). C'est avec cette attitude intérieure que je vous propose de rencontrer la personne RM profonde polyhandicapée, dans le cadre

de ce cours consacré à la communication basale.

Définition de la population RM profonde polyhandicapée1.Comment entrer en communication

avec un enfant qui ne présente aucun signe évident de communication? Dans ce premier cours, nous développerons l'émergence de la communication en

considérant la période allant de 0 à 4-5 mois de développement, que je considère comme

niveau "basal" (l'enfant n'a pas encore développé la préhension). Ce niveau "basal" me paraît particulièrement utile en polyhandicap, car ce niveau caractérise une partie de la

population polyhandicapée avec un RM profond qui restera durant plusieurs années à ce

niveau ou ne le dépassera guère, ce qui est le cas pour de nombreux adultes aujourd'hui,

n'ayant pas bénéficié d'une intervention appropriée. Néanmoins, cette présentation constitue également une base de référence pour des handicaps plus légers ou des enfants autistes,

dans l'installation des premières conduites de communication. Cependant dans ce cours

nous utiliserons le terme de personnes polyhandicapées (PP), enfants ou adultes, pour plus de facilité.

Mon objectif est de vous sensibiliser à l'observation des comportements de la PP., car sans

cela, aucune communication ne peut émerger. Le principe de base est d'observer les comportements de l'enfant afin de leur attribuer une intention communicative et d'agir en

conséquence. De cette manière, l'enfant va peu à peu découvrir que par ses

comportements, il peut agir sur son environnement et donc mieux fonctionner dans son

environnement.

1. Communication "basale" (Winfried Mall, 1984)

Niveau « basal »: Tout d'abord, je considérerai la population qui atteint un niveau inférieur à 4-5 mois dans l'échelle de Fröhlich et Haupt, c'est-à-dire, des personnes qui n'ont pas de

préhension. Pour cette population, la communication basale et les stimulations basales de

Fröhlich (1987) sont tout à fait indiquées.

1.1 Canaux de communication

1"Handicap grave à expressions multiples, le polyhandicap présente toujours deux versants

principaux: une infirmité motrice et cérébrale et une déficience mentale, qui résultent d'une

déficience cérébrale précoce grave survenue avant, pendant ou peu après la naissance, en tous

cas avant l'âge de 3 ans. L'altération de diverses fonctions cérébrales constitue le handicap

primaire qui, outre la déficience mentale et l'infirmité motrice peut comprendre des

déficiences sensorielles (visuelles et auditives) et une épilepsie. Celui-ci s'accompagne

fréquemment de handicaps secondaires: orthopédique, digestif, pulmonaire, cardio-

vasculaire".

Dr. Germaine Gremaud 9 Langage et communication – SA 1

Etablir une communication avec une personne polyhandicapée (PP) est un problème crucial pour la prise en charge de cette personne. La difficulté réside dans le décryptage des

messages envoyés par la PP. Certes, l'adulte attentif parvient à savoir comment se sent la

PP, ce qui lui plaît, etc., par les cris, les comportements moteurs, mais l'impression reste

diffuse et subjective et laisse l'impression d'une certaine distance. La PP donne l'impression de vivre dans son monde et cet isolement ne peut qu'aggraver sa situation et entraîner des

comportements agressifs ou dépressifs, la maladie, etc.

En fait, la communication ne peut s'établir à cause d'un décalage entre les modes

d'expression de la PP et l'adulte, situation que Mall (1984) illustre ainsi.

Figure 1 : Communication basale de Mall (1984, figure 1)

La figure 2 illustre les canaux de communication utilisés par la PP et l'adulte. Ce dernier, utilisant le regard, le langage, la mimique et des gestes, ne peut entrer en communication

avec la PP qui utilise le rythme respiratoire, les émissions vocales, le toucher et le

mouvement comme canaux. Les canaux utilisés sont différents et nous ajouterons que le re-gistre sensoriel diffère. La PP communique par des moyens plus primaires (d'où l'expression

communication basale), moyens que l'adulte a "oubliés", ayant perdu l'habitude de

communiquer par ces canaux.

Figure 2

Dr. Germaine Gremaud 10 Langage et communication – SA 1

La figure 3 représente la communication entre la PP et l'adulte lorsque ce dernier se met en

"phase" avec les canaux utilisés par la PP, ce qui demande un apprentissage ou au moins

une sensibilisation.

Figure 3

1.2 Moyens d'expression de la PP

Comment respirons-nous? La respiration n'est pas seulement un état momentané, mais reflète mon état, ma personnalité, etc. Chez la PP, l'observateur remarque rapidement qu'il

en est de même, bien que souvent le rythme respiratoire prend la forme d'une

hyperventilation, d'une respiration irrégulière, encombrée, compressée, retenue.

Néanmoins, quel qu'il soit, le rythme respiratoire est le moyen d'expression le plus

élémentaire dont toute personne vivante dispose. Aussi la communication basale va utiliser

ce moyen pour entrer en contact avec la PP, ce qui crée la base pour l'introduction d'un programme de stimulations appropriées à la PP.

Dans la communication basale, les autres canaux de communication correspondent à ce que fait une mère avec son nourrisson pour lui "parler", à travers les émissions vocales, le

toucher et le mouvement. Nous soulignons le fait de parler, car il nous semble que trop

souvent, l'éducateur est muet durant ses interactions avec la PP. Imaginez une mère qui

changerait son enfant, ou lui donnerait à manger sans lui parler!

1.3 Contenu de la communication basale

L'établissement d'une communication avec la PP fait référence à un échange non pas

intellectuel ou rationnel, mais fait appel aux aspects les plus profonds de la personnalité.

En principe, la communication basale ne se limite pas à la séance. La rencontre peut avoir

lieu partout, chaque rencontre s'installe sur le mode d'une communication basale.

Néanmoins, lorsque l'adulte ne s'est pas totalement familiarisé et n'a pas dépassé ses

défenses, la communication basale peut se limiter à une séance pour s'étendre par la suite à d'autres moments:

- salutation: s'approcher de la PP, le laisser me ressentir, faire avec elle quelques

respirations sur son rythme, et peut-être dire un mot de salutation sur son expiration. - contact à distance: sur les modes exposés plus haut, voir si la PP perçoit ces

recherches de contact.

Dr. Germaine Gremaud 11 Langage et communication – SA 1

- l'état de la PP: ses cris, ses pleures, son mécontentement, etc. peuvent être une indication pour réinstaller une communication basale.

La commucation basale de Mall (1984, traduit par GG) comprend:

- la création d'une situation de communication, d'un échange réciproque entre la PP et

l'adulte, au niveau émotionnel, - l'intervention d'expériences de "compréhension", d'"acceptation", d' "affection" et

d'"intérêt",

- le ressenti des états d'âme de la PP, de ses besoins, de ses désirs en mettant l'accent sur l'aspect sentiment,

- la réduction de la peur, de l'incompréhension, de la panique, chez les deux partenaires,

- l'ouverture de la relation en vue de nouvelles expériences dans le monde social et le

monde des choses (Mall, 1984, p. 6 traduit par nous).

Instructions

- prendre du temps pour soi (10 à 20 minutes, plus ou moins) pour se libérer des

tensions, se retirer régulièrement (1 à 2 fois par jour),

- aller avec la PP dans une pièce calme, plus ou moins sombre,

- s'asseoir confortablement avec la PP, si possible derrière elle ou à côté. Souvent, il est bon de prendre la PP entre les jambes avec le dos appuyé contre soi,

Parler très peu, doucement et calmement. Parler seulement de l'instant présent: ce que je fais, ce que je sens, ce que je vis avec la PP, ce qu'elle ressent comme sentiments et

impulsions. Ne pas se perdre dans la parole. Ce qui est important est le ressenti

réciproque. Rythme respiratoire: tenir compte de la respiration de la PP, sentir son rythme, par

exemple, en posant les mains sur son ventre. Essayer de respirer à son rythme, aussi

"fou" que celui-ci puisse être. Prêter attention au changement de rythme. (Ne pas

entrer dans un halètement; s'il n'est pas aisé de prendre le rythme, ne pas s'entêter, reprendre plus tard).

Expiration audible: rendre la respiration audible (grogner, bourdonner, résonner, chanter,

etc.) à l'unisson avec l'expiration de la PP (2 à 3 fois de suite). Ne faire ressortir que les expirations longues et calmes.

Rester détendu: être soi-même détendu, calme et tranquille. S'observer: comment suis-je?

Suis-je calme, détendu? Où suis-je tendu? Est-ce que ça va? Etre le miroir: relever les éléments d'expression de la PP (expiration, sons, bruitages,

mouvements), les imiter, les lui refléter (les réactions courtes comme les longues) sans

que cela soit des stéréotypes. Jouer avec ces éléments d'expression et chercher si un

changement minime est possible. Contact corporel: avec précaution, chercher le contact corporel, s'asseoir corps à corps,

toucher la PP avec la main (si possible à l'expiration), sur le rythme de la respiration,

passer la main sur les parties du corps (ventre, dos, bras, jambe, tête; de haut en bas, de l'intérieur vers l'extérieur).

Mouvement: la PP contre les épaules ou le haut du corps entouré, se mouvoir avec elle, se

balancer (chercher d'autres possibilités de mouvement: en avant, en arrière, en rond;

régulièrement, irrégulièrement au rythme de la respiration). Jouer avec l'impulsion du mouvement de la PP: suivre, aller contre, agrandir, freiner. Pas trop longtemps.

Vibration/agiter: sur les épaules, le bassin, la colonne vertébrale, effectuer de légers

mouvements de vibration sur le rythme respiratoire, avec sa main ou son propre corps (2 à 3 fois à un endroit, éventuellement recommencer plus tard). Observer si la PP

réagit par un relâchement.

Expérimenter la marge de mouvements ("Spielraum"): avec toutes les articulations (doigts, mains, coudes, épaules, orteils, chevilles, genoux, hanches, cou, tête, colonne

Dr. Germaine Gremaud 12 Langage et communication – SA 1

vertébrale) sonder la marge de mouvements, sentir les limites, chercher quels mouvements peuvent être amplifiés.

Défenses/Résistances: remarquer chaque réaction de défense de la PP. Au cours du

temps, réunir les indications de défense et de contentement. Contourner les défenses,

par exemple, se retirer provisoirement, diminuer le contact; ne pas totalement lâcher prise, mais exiger quelque chose de la PP. Elle doit sentir que j'ai l'intention de faire

quelque chose avec elle, qui doit être bon pour nous deux.

Arrêt d'une séance: déterminer la fin d'une séance soi-même; si possible quand la personne est encore calme, se séparer d'elle avec ménagement, diminuer le contact et la

relâcher. Si la personne veut absolument arrêter, continuer encore un peu et l'inviter à termi-

ner.

Ce type d'intervention a été pratiqué à L'Institut de Lavigny par Chauvie, Iribagiza et

Musitelli, (1994) et les observations démontrent que la communication basale est un moyen

efficace pour: - atteindre la PP profonde,

- créer un climat de confiance réciproque,

- diminuer les comportements défensifs, agressifs ou dépressifs, - procurer un bien-être et une détente visible,

- stimuler l'émergence d'expressions vocales plus riches.

La formation du personnel à la communication basale, sous forme de cours intensif

comprend trois phases: - expérience sur soi,

- expérience de la communication basale avec une PNRM,

- expérience de la communication basale avec une PP sous supervision.

Une préparation à la communication basale peut s'envisager par la participation à des stages

ou des cours exigeant une prise de conscience du corps propre, puis une relation avec le corps de l'autre. Ce qui peut constituer une base pour entrer en contact corporel et

émotionnel avec la PP.

Selon Wilder et Granlund (2003), l’analyse des interactions dans cette population montre que

la perception du professionnel est plus déterminante que les capacités communicatives et habiletés fonctionnelles de l’enfant polyhandicapé. Exemple cité : « Je commence à jouer et

quand je vois qu’il répond avec un sourire et s’il aime le jouet et montre clairement qu’il

l’aime, je continue (p. 563) ».

2. Les précurseurs du langage

Notre conception de l'approche de la communication chez la PP, se base sur les principes de Mall et les stimulations basales de Fröhlich, mais également sur les données concernant

le développement de la communication chez l'enfant normal, en particulier les apports de

Bruner (1983, chapitre 5) sur les précurseurs du langage. Dans notre exposé, nous

utiliserons parfois le terme d'"adulte" au lieu de celui de "mère", pour faire référence à la personne intervenant auprès de l'enfant handicapé ou non.

2.1 Attribuer une intention de communication

C'est durant la première année de vie que l'enfant, en interaction avec son environnement

physique et social, acquiert les mécanismes de base de la communication.

"... la communication présuppose une intention ou un objectif à l'acte de communiquer en ce sens que l'acte de communiquer atteigne ou non un but" (Bruner, p.168).

Dès les premiers mois, l'enfant donne l'impression de communiquer, que ce soit par ses cris ou ses productions vocales, mais sans qu'il soit possible de lui attribuer une intention de

Dr. Germaine Gremaud 13 Langage et communication – SA 1

communiquer. C'est l'adulte qui donne une signification communicative aux comportements de l'enfant et leur attribue une intention. Cette attribution d'une intentionnalité aux

productions de la PP. est un principe fondamental.

Dès la naissance, le nouveau-né émet des signaux (cris et pleurs) qui peuvent être interprétés par l'adulte. Ce sont les aspects de l'énoncé qui comprennent les contours

intonatoirs qui suggèrent l'insistance, le plaisir, la protestation.

"Ce qui importe, c'est que l'adulte interprète de façon systématique l'usage que fait l'enfant

de l'intonation, lui permettant ainsi d'apprendre ce qu'est la convention du langage (Ryan,

idem)".

En 1969, Wolf (idem) est le premier à démontrer que les cris des enfants pouvaient être

interprétés par les parents. En 1971, Ricks (idem) montrent que les cris des bébés normaux

peuvent être catégorisés par les mères comme des expressions d'accueil, de surprise, de frustration et de requête, sans que les expressions de leur propre enfant soient reconnues

d'une manière sûre.

La personne polyhandicapée produit également des signaux (productions vocales, n'importe

lesquels), mais il est nécessaire de prendre en compte l'ensemble des comportements de la

PP., afin d'y déceler le plaisir, le contentement ou le mécontentement.

Cependant, pour attribuer une intention communicative à l'enfant, l'adulte se base également

sur les circonstances de l'énoncé, c'est-à-dire le contexte dans lequel survient un

comportement. Les vocalisations des enfants sont comprises en fonctions des contextes: - le babil de satisfaction au réveil matinal,

- les pleurs de faim avant l'heure des repas,

- les vocalisations pour attirer l'attention au réveil de la sieste, - les pleurs de contrariété quand ils ne peuvent atteindre un objet, etc.,

Ce sont les échanges habituels et réguliers (les rituels) qui fournissent un cadre pour

l'interprétation des comportements de l'enfant. Si dans ses réponses, l'adulte fait preuve d'un minimum de cohérence et de régularité, les signaux qu'émet l'enfant auront un effet de plus

en plus prédictible et développeront des attentes chez l'enfant. Ainsi, ces échanges,

organisés dans le temps et hautement répétitifs vont peu à peu permettre à l'enfant de prévoir la séquence suivante (Cf. plus loin les différentes modalités).

Avec une PP., l'attribution d'une intention communicative se base également sur les contours de l'énoncé et les circonstances, mais d'une manière plus générale, nous parlerons de

comportements. En fait, il s'agit d'observer les réactions de la PP., ce qui est déjà tout un

programme, et de leur attribuer une intention communicative.

Exemple: Un enfant polyhandicapé aveugle de 6 ans, ayant 3 mois de développement,

écoute de la musique. La musique s'arrête et après un délai, a un mouvement global du

corps (se tourne, lève les membres). A ce comportement, nous attribuons l'intention: "Tu veux encore de la musique!" et on remet de la musique. L'enfant se détend, reprend la

position de départ. L'épisode se renouvelle après un délai, 3-4 fois. Le problème ici, c'est

que le comportement de l'enfant est pathologique, car le corps part en extension. Dans cet

exemple, même si la communication ne peut pas être définie comme intentionnelle, elle démontre l'importance de l'attribution d'une intention à l'enfant qui peut découvrir que par

son comportement, il peut agir sur son milieu, ce qui constitue une base pour l'émergence

d'épisodes interactifs.

L'adulte a le rôle primordial dans l'émergence des comportements communicatifs. Au début,

les comportements de l'enfant ne sont pas orientés; aussi l'objectif durant cette première période est d'amener l'enfant à orienter ses comportements vers l’adulte et/ou l’objet

Dr. Germaine Gremaud 14 Langage et communication – SA 1

(orientation simples de Sugarman, 1984, stade SM III et Gremaud, 1988). La proximité dans l’espace et l’orientation de l’attention visuelle vers l’adulte et/ou l’objet, sont deux conditions

requises pour faciliter l’émergence d’épisodes interactifs.

L'apprentissage de tels épisodes repose sur :

- l'émission d'un comportement par l'enfant, - l'interprétation par l'adulte de ce comportements (à l'aide d'indices) = Rép. de la M

- E accepte ou refuse cette réponse, ou tente de la modifier.

Pour arriver à développer des orientations simples sur l'objet ou la personne, il faut développer

l'orientation du regard, ce que Bruner appelle la référence.

2.2 Orienter le regard comme processus de référence

L'enfant développe peu à peu des procédures qui vont lui permettre d'indiquer à l'interlocuteur,

ce sur quoi il porte son attention, c'est-à-dire le référent. Cette procédure de référence débute par le regard pour aboutir à l'utilisation du langage pour identifier le référent. La question est de

savoir comment faire référence à un objet précis.

Bruner (1983) distingue 3 aspects de la référence: la désignation, la déixis et la dénomination. Dans cette première étape du développement, c'est la désignation qui est

notre préoccupation.

2.3 La désignation

Le regard. La forme la plus primitive de désignation est le regard. Dès la naissance, la mère

suit le regard de l'enfant pour mieux interpréter ce sur quoi l'enfant porte son attention, pour identifier le référent, pour déterminer ce à quoi il s'attend, etc.

Quant à l'enfant, dès l'âge de 2 mois, il parvient à suivre les déplacements de sa mère dans

une pièce. Dès 4 mois, mais le plus souvent à 9 mois, l'enfant est capable de suivre le regard de l'autre. Il découvre où il faut regarder pour faire coïncider son regard avec le regard de

l'autre et avoir ainsi le même centre d'attention, c'est-à-dire une attention conjointe.

Avec la PP., on est bien souvent confronté au fait que l'on ne sait pas si l'enfant voit ou pas. Il est alors conseillé de se référer à des spécialistes pour effectuer un examen, par exemple au

Centre Pédagogique pour Handicapés de la Vue à Lausanne où vous pouvez également vous

procurer le manuel des tests utiles à l'évaluation de la vision fonctionnelle2. La moindre réaction différenciée chez l'enfant est à prendre en compte et peut conduire à des

hypothèses qui seront à vérifier par la suite par une évaluation plus systématique. Même si la

réaction n'a été observée qu'une fois, elle est un indicateur d'une capacité de l'enfant. L'éveil et l'attention étant très fluctuants, on ne peut bien souvent pas s'attendre à la même réaction une

minute plus tard. En effet, des études réalisées dans la population des PP. montrent que les

changements d'un état à l'autre sont rapides, approximativement toutes les 30 secondes

(Guess, 1995). Ces questions d'évaluation des états d'éveil seront développées dans le cours de 2e année « Polyhandicap » (voir aussi Gremaud et Lambert, 1997).

2.4 Développer les prises de tours

Dans la référence, Bruner parle également de déixis qui s'observe dès le 3-4e mois, dans les

échanges vocaux M-E qui présentent un caractère de proto-conversation (Bateson, 1975)

2 Bodmer, P., Carrard, C., Farine, M. Mathez, A.-L., Mathis, I. et Troillet, M. (1994). Répertoire. Tests

utiles à l'évaluation de la vision fonctionnelle (un exemplaire chez G. Gremaud ou commander

au: CPHV, Centre Pédagogique pour Handicapés de la Vue, Av. de France 30, 1004 Lausanne).

S'adresser à ce centre pour un examen de la vue d'une PP.

Dr. Germaine Gremaud 15 Langage et communication – SA 1

dans le sens que la structuration temporelle et leur fonction (phatique: de maintenir un contact social) semblent déjà celles de la conversation: la prise de tours.

Bien qu'au départ, la production des vocalisations soit à l'unisson, peu à peu elle s'organise sur

les principes de succession et de réciprocité. M et E vocalisent à leur tour en maintenant un

intervalle de temps de 2 à 3 secondes entres leurs productions, laissant ainsi la place pour la réponse.

En RM, de nombreuses collusions peuvent apparaître dans les protoconversations: l'enfant

n'attend pas son tour, fait des pauses plus courtes et des vocalisations plus longues. Selon Mainardi et Lambert (1984) ces collusions pourraient être attribuées à un manque d'inhibition

des comportements de l'enfant RM. Cette alternance de tour requiert une attention particulière

dans l'intervention auprès des mères. Avec la PP., cette prise de tours peut se développer en appliquant les principes de Mall:

reprendre les productions sonores de la personne, être le miroir. Naturellement, les productions

de la PP. n'ont pas nécessairement une ressemblance avec les productions sonores d'un bébé,

c'est peut-être pour cette raison que pendant longtemps elles ont été ignorées. Cependant, même un soupir, un grognement, n'importe quel son peut être repris par l'adulte. C'est aussi le

moyen de montrer à l'enfant que nous avons pris note de son comportement. Parfois cette

émission peut entraîner un commentaire sur l'intention que nous lui attribuons. Il s'agit de parler du "ici et maintenant" selon un autre principe de Mall. Nous aurons l'occasion de voir une vidéo

pour illustrer ces différents aspects.

2.5 Développer l'attention conjointe: de la modalité d'exigence à la modalité de réclamation

Notre approche de la communication chez la personne PP. se réfère également à l'attention conjointe considérée par Bruner (1983) comme un précurseur du langage. Bruner (1983, pp.

190-193) distinguent 4 modalités qui évoluent au cours de la première année de l'enfant:

1. la modalité d'exigence, 2. la modalité de réclamation,

3. la modalité d'échange,

4. la modalité de réciprocité.

Ce sont les deux premières qui nous intéressent particulièrement pour le développement des premières conduites de communication. Nous développerons les modalités d'échange et de

réciprocité dans le prochain cours.

Modalité d'exigence

Dès le départ, l’enfant dispose de routines de communication. Par exemple, il crie ou s’agite jusqu’à ce que l’adulte réponde. Celui-ci généralement y répond en essayant de comprendre ce

que veut l’enfant.

Dès 2 mois, les M sont capables de distinguer le cri de: - contentement: son relâché, non nasalisé, profond,

- mécontentement: son tendu, nasalisé, aigu.

Au 3-4e mois, les M distinguent plusieurs formes de satisfaction exprimée par les vocalisations de plaisir: après le réveil, pendant les jeux solitaires à ce moment et les interactions avec un

inconnu.

Les cris manifestant qu'il y a un "problème", sont insistants et ne comportent pas de pause dans l'attente d'une réponse, ce qui caractérise bien la modalité d'exigence. En d'autres termes, les

cris du jeune enfant expriment un malaise (il a faim, il est mouillé, il est malade etc.) cris que la

mère parvient à interpréter. Ces cris peuvent évoluer vers des cris de détresse s'il n'y a pas de réponse. Comme généralement la mère y répond, cette réponse va créer une attente qui va

faire progresser l’enfant de la modalité d’exigence à la modalité de réclamation.

Dr. Germaine Gremaud 16 Langage et communication – SA 1

Modalité de réclamation

Selon Bruner (1983, p 191), trois changements interviennent:

- réduction de l'intensité de bande large et de "l'insistance",

- contraction de l'appel dans le champ temporel, avec pause dans l'attente d'une réponse,

- si la réponse ne vient pas, retour à la modalité d'exigence.

Ce dernier point est fondamental pour l'intervention auprès des enfants RM. L'absence de

réponse de l'adulte ne conduit-elle pas l'enfant à se taire et à ne plus manifester de demandes

plus élaborées; l'enfant régresse alors vers des comportements plus rudimentaires. Ceci dé-montre l’importance que joue l’adulte dans cette transition de la modalité d’exigence à celle de

réclamation. La constance des réponses et leur régularité favorise le développement d’attentes

chez l’enfant, ce qui constitue la base des interactions communicatives.

En polyhandicap, des études (Green3) démontrent que les PP sont capables d'avoir des

manifestations de joie (des rires, des sourires, des ébauches de sourires), comme des

manifestations de mal-être. Ici encore, il s'agit d'observer les réactions de la PP., afin de leur attribuer une intention communicative, de parler du "ici et maintenant": "Tu es content, ça te

plaît", ou :"ça ne va pas, qu'est-ce que tu as?". Vous me direz qu'il est inutile de parler, puisque

l'enfant ne comprend pas. Mais avez-vous déjà vu une mère être muette avec son bébé? Il faut

accepter le principe qu'une communication est possible au-delà des mots. Ces études sur les manifestations de joie qui découlent de celles effectuées sur les préférences

et la capacité de faire des choix chez les PP. montrent qu'il n'y a pas besoin d'un arsenal de

moyens, car savez-vous ce qui entraîne le plus souvent des manifestations de joie? Les chatouilles, souffler sur les bras, pour certains des stimulations vestibulaires, alors allez-y! Très

souvent c'est aussi le meilleur moyen d'obtenir l'orientation du regard sur l'adulte, comme si

l'enfant voulait voir cette personne qui lui crée du plaisir! Pour installer une communication, nous préconisons, quelle que soit la stimulation, d'introduire

des arrêts, pour laisser à la PP. le temps de réagir, de montrer si oui ou non elle veut que la

stimulation reprenne (Comme dans l'exemple plus haut concernant la musique). Par réaction,

nous entendons n'importe quel changement ou apparition de comportements, aussi minime soit-il. Cependant, cette observation des comportements s'accompagne de l'évaluation des

niveaux d'éveil et d'attention, car un changement de comportement peut indiquer une

habituation chez l'enfant, une perte d'intérêt. L'absence de réaction doit nous conduire à changer de stimulation, tout en attribuant une intention à cette absence de réaction ou cette

diminution de l'éveil: "Ca ne t'intéresse plus! On va changer". Les auteurs ayant travaillé sur les

manifestations de joie préconisent de changer de stimulation après une minute, si l'enfant ne montre pas de l'intérêt. On dit généralement que les bébés sont avides de nouveautés, alors les

PP. pourraient être tout aussi avides de nouveautés! Seuls inconvénients pour vous, c'est qu'il

va falloir être créatifs, inventifs et savoir exploiter l'instant présent en vous y adaptant. La

préparation du matériel est à faire en fonction de la personne. On n'utilisera pas le même matériel avec des enfants ou des adultes. Ne proposez pas un hochet à un adulte, mais

3 Green, C.W. & Reid, D.H. (1996). Defining, validating and increasing indices of happiness among

people with profound multiple disabilities. Journal of Applied Behavior Analysis, 29, 67-78.

Green, C.W., Gardner, S.M. & Reid, D. H. (1997). Increasing ndices of happiness amog people with

profound multiple disabilities: A program replication and component analysis. Journal of Applied

Behavior Analysis, 30, 217-228

Ivancic, M.T., Barret, G.T., Simonov, A. & Kimberley, A. (1997). A replication to increase happiness

indices among people with profound multiple disabilities. Research in Developmental

Disabilities. 18, 79-89.

Jordan, J., Singh, N.N. & Repp, A.C. (1989). An evaluation of gentle teaching and visual screening in

the reduction of stereotypy. Journal of Applied Behavior Analysis, 22, 9-22.

Dr. Germaine Gremaud 17 Langage et communication – SA 1

proposez plutôt une boîte avec des objets dedans. Le matériel est choisi en fonction de l'objectif et de la personne.

3. Analyse d'une observation (Gremaud, 2002)

Présentation de l'enfant. Névio est âgé de 14 ans. A 5 mois et demi, il est hospitalisé; les médecins diagnostiquent une hydrocéphalie grave. A 13 mois et demi, le diagnostic d'IMC

grave de type tétraplégique et de retard mental profond est posé. Actuellement, Névio

présente un niveau de développement ne dépassant pas 8 mois. Son canal préférentiel est auditif, on ne sait pas s'il voit ou ce qu'il voit.

Situation de stimulation. L'éducatrice se propose d'observer les réactions de l'enfant en ra-

contant une histoire dans laquelle les personnages sont signalés par des cloches de tailles différentes. La séquence est ponctuée de balancements. Afin de favoriser les prises de

tours, l'éducatrice planifie d'interrompre l'histoire, lorsque l'enfant vocalise, pour reprendre les

vocalisations en miroir.

3.1. Résultats

A partir de la vidéo analysée seconde par seconde, le répertoire des comportements de l'enfant a été établi. Nous présenterons ici les résultats de l'analyse du contexte d'apparition

de quelques comportements, laissant par exemple de côté les comportements visuels, plus

aléatoires vu le handicap visuel de l'enfant. Néanmoins, il est important de relever que

l'éducatrice a identifié un contact oculaire, lorsque le visage de l'enfant était tout près du sien. Elle l'a explicité en disant à l'enfant: "Tu me regardes Névio!".

Mouvements de la bouche. Ce comportement d'ouvrir et de fermer la bouche est très lié au

comportement vocal ou verbal de l'adulte, mais apparaît nettement plus souvent durant des épisodes où l'enfant vocalise. Ce comportement peut précéder comme terminer un épisode

de prise de tours, s'insérer entre les vocalisations ou apparaître quand l'adulte parle, mais de

manière moins systématique. Bouche bée. Ce comportement se différencie du comportement habituel de l'enfant qui a en

général la bouche ouverte. Par "bouche bée", nous entendons une ouverture plus grande de

la bouche. Ce comportement s'observe durant le 19 % du temps total. Il apparaît dès le

début, durant une séquence d'une minute de balancement (40 sec.), puis durant des stimulations auditives: lorsque les cloches sonnent et l'adulte parle (46 %) ou vocalise (22%).

Vocalisations. Sur les 15 minutes analysées, les vocalisations occupent le 10 % du temps. A

10 occasions, elles se produisent en même temps que celles de l'adulte et 18 fois durant les balancements. Mais ce qui est intéressant à noter, c'est que dans les 2/3 des cas, les

vocalisations apparaissent en dehors des temps de stimulations de l'adulte, c'est-à-dire sans

chevauchement. Le tableau 1, représente la 13e minute durant laquelle les prises de tours

sont les plus manifestes. Un seul chevauchement apparaît, à la 34e seconde. Deux sourires sont d'ailleurs observés après des vocalises de plus forte intensité.

Tableau 1: Episode de prise de tours avec les vocalisations de l'adulte et de l'enfant durant la 13e minute.

Sourire ou ébauche de sourire. Leur identification requiert une observation plus longue que la seconde, car ce comportement apparaît à partir de la bouche ouverte, par une légère

modification aux commissures des lèvres et dans l'expression du visage et des yeux. Ils

s'observent 15 fois dont 8 durant des épisodes de vocalisations de l'adulte ou de l'enfant,

10'' 20'' 30'' 40'' 50'' 60''

Enfant x xx x xx xx xx xx xx x Xx

Adulte x xx x xx x x xx x xx x

Dr. Germaine Gremaud 18 Langage et communication – SA 1

mais également lorsque l'adulte parle à l'enfant, le balance dans les bras ou fait sonner les cloches.

Discussion

L'entrée auditive est particulièrement investie chez cet adolescent, si bien qu'une

communication peut s'établir par ce canal. La capacité de prendre son tour dans des

séquences de vocalisations montre qu'une première conduite de communication se met en place. Ceci est particulièrement manifeste, lorsque l'enfant augmente l'intensité de ses

productions vocales à mesure que l'adulte les reprend, démontrant ainsi un plaisir évident.

Quant au comportement de "bouche bée", il est possible de l'interpréter comme un signe "d'écoute" aux stimuli auditifs, révélant un niveau d'attention particulièrement élevé,

supérieur à l'état habituel où la bouche est moins ouverte. Ce constat révèle l'importance de

tenir compte des fluctuations des niveaux d'éveil pour interpréter les comportements de

l'enfant et adapter les stimulations en conséquence. Par contre, le comportement d'ouvrir et de fermer la bouche est plus difficile à interpréter en termes de communication, mais montre

que l'enfant réagit au fait que l'adulte parle ou vocalise. Est-ce un comportement imitatif ou

manifestant un désir de parler? L'adulte l'interprète-t-il inconsciemment, sans l'expliciter verbalement, comme une invitation à communiquer? Que faire dans de tels cas? Bien que la

discussion reste ouverte sur d'autres comportements difficilement interprétables, nous

proposons de formuler cette question en termes d'hypothèse et de la vérifier. Il peut alors

être important de passer à une verbalisation explicite de l'hypothèse et de demander une réponse à l'enfant. L'objectif étant que l'enfant découvre que par ses comportements, il peut

agir sur son environnement.

En dernier lieu, nous tenons à souligner, que la communication facilitée permet certes, d'aller nettement plus loin dans la communication et qu'elle ne doit pas être négligée, mais si elle

n'est qu'à un stade expérimental. Cependant, la mise en place des conduites de

communication reste nécessaire dans la vie quotidienne.

4. Intervention

La présentation théorique, comme la présentation de la vidéo donnent déjà quelques pistes

pour l'intervention, mais concrètement, il s'agit d'opérationnaliser ces aspects, de les intégrer dès la première rencontre. Par exemple en orthophonie, la plupart du temps, les enfants sont

signalés en raison de bavage ou de troubles de la motricité rendant l'alimentation difficile. L'idée

de consulter pour la mise en place des premières conduites de communication n'est pas encore rentrée dans les moeurs. Généralement on dira: "Cet enfant ne parle pas, pourquoi aller chez

l'orthophoniste?". D'ailleurs, si je consacre autant de temps à la communication prélinguistique,

c'est bien parce que trop peu de spécialistes (éducateurs et enseignants spécialisés compris) interviennent durant cette période et encore moins auprès d'enfants polyhandicapés. Certains

attendent même que les premiers mots apparaissent pour intervenir. J'ai entendu une

orthophoniste dire: "Un enfant trisomique, je ne le prends pas avant 4 -5 ans". J'ose espérer

que c'est une exception!

Avec un enfant polyhandicapé, dès le premier contact, l'objectif est de rechercher une entrée

en contact par le canal sensoriel préféré de l'enfant. Cela peut être le somatique (contact corporel, cutané, etc.): le porter naturellement, le caresser, le cajoler tout en essayant de lui

procurer du plaisir. Cela peut être le vestibulaire: le balancer, l'auditif: objets faisant du bruit,

instruments de musique. Le vibratoire: vibrations de la voix quand on lui parle, par exemple, le

ballon Bobath, les vibrations de la musique, etc. (voir Fröhlich, 1987 pour un développement). Mais généralement, le contact se fait dans le corps à corps, car l'objectif est également que

l'enfant se sente en sécurité, ce qui est primordial pour établir la relation qui pourra se

consolider au cours des mois. Naturellement, nous parlons à l'enfant selon les principes de Mall, mais aussi en lui attribuant des intentions communicatives que l'on verbalisera.

Dr. Germaine Gremaud 19 Langage et communication – SA 1

En proposant des stimulations basales, il est important de faire des arrêts pour voir si l'enfant

manifeste par son comportement son désir que la stimulations se poursuivent. C'est à ce

moment-là qu'il est important de verbaliser pour l'enfant et d'attirer l'attention de la mère sur ce

que vous avez observé qui permet d'attribuer cette intention. Il est important de développer un partenariat avec les parents et la mère en (particulier, car la communication se développe à

deux et peut prendre des mois, pour ne pas dire une année ou plus pour s'établir. Il est

important alors que tous les intervenants collaborent ensemble et partagent leurs expériences et observations.

Conclusion

A ce premier niveau de communication que nous qualifions de "basale", l'objectif est

d'obtenir des comportements qui peuvent servir à la communication. Les stimulations basales de Fröhlich, comme les principes de Mall (1984) sont des moyens pour tenter

d'obtenir des réactions ou comportements. Il revient alors à l'adulte d'attribuer une intention à

ces comportements et d'agir en conséquence, de manière à ce que l'enfant découvre que

par ses comportements, il peut agir sur son environnement. Durant cette période, l'objectif est d'amener l'enfant à l'orientation de ses comportements vers l'adulte ou l'objet, du regard

en particulier et de mettre en place des prises de tours, ce qui représente les premiers

acquis pour passer à la période suivante caractérisée par l'émergence de la préhension et de la coordination oeil-main qui permet le développement d'autres moyens de

communication.

Dr. Germaine Gremaud 20 Langage et communication – SA 1

Cours 4 - 5 - 6 De la communication non intentionnelle à la communication intentionnelle

Introduction 1. Evaluation du développement global

2. Les apports des théories sur le développement de la communication

2.1. Les accompagnants de l'énoncé 2.2. La désignation

2.3. Les modalités d'échange et de réciprocité dans l'attention conjointe

2.4. La prédication dans les interactions prélinguisitiques

2.5. La dénomination comme processus de référence 3. Evaluation

3.1. Evaluation de l'intentionnalité

3.2. Catégories d'analyse (Sugarman, 1984) 3.2.1. Les orientations simples vers l'objet ou la personne

3.2.2. Les orientations complexes vers l'objet ou la personne

3.2.3. Les orientations coordonnées personne-objet 3.3. Actes communicatifs et développement cognitif.

3.4. Chez les enfants RM

4. Développement de l'intentionnalité

4.1. Les stades de Camaioni (1980) 4.2. Les performatifs: impératif et déclaratif

4.3. Réinterprétation de l'intentionnalité (Camaioni, 1993)

4.3.1. "tool-use" hypothèse 4.3.2. "joint attention" hypothèse

5. Evaluation des comportements communicatifs et fonctions

6. Aménagement du milieu social et physique

7. Médiation - intervention 8. Analyse d'une vidéo

Conclusion

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Introduction

La communication "basale" que nous avons présentée dans le premier cours concernait plus

particulièrement les personnes RM profondes polyhandicapées. Dans ce cours, nous allons aborder la communication qui concerne également les personnes polyhandicapées, mais qui

ont atteint un développement de la préhension. Ce cours concerne également les enfants

RM profonds, sévères et modérés (Syndrome de Down) et les enfants ayant un retard de développement. En d'autres termes, il fournit des pistes d'intervention pour tous les enfants

n'ayant pas atteint une communication linguistique.

Ce deuxième niveau qui fait suite à la communication basale, débute vers 4-5 mois par la coordination vision-préhension. Avec le développement de la préhension, d'autres moyens

de communication peuvent se développer. Il s'agit alors d'offrir des stimulations, des

situations, du matériel qui puissent favoriser l'émergence et le développement de cette coordination qui va conduire au comportement exploratoire. A ce stade, l'intervention est

globale et comprend la stimulation basale, les jeux d'exploration, la stimulation des conduites

de communication et l'alimentation.

Dans le cadre de ce cours, nous ne pouvons guère présenter en détail l'émergence de la

coordination oeil-main et de la préhension. Aussi nous vous renvoyons en particulier à Streri

(1991) pour un développement sur la relation vision-préhension. Pour le développement

Dr. Germaine Gremaud 22 Langage et communication – SA 1

cognitif en général, pour cette période sensori-motrice, nous vous conseillons vivement la lecture des deux livres de Lécuyer, Pêcheux et Streri (1994 et 1996). On lira également avec

profit le livre de Piaget (1937, "La construction du réel") qui donne de bonnes descriptions de

ses observations.

Dans ce cours, nous allons aborder la période allant du début des orientations simples sur

objet ou personne au début des orientations coordonnées adulte-objet (Sugarman, 1984;

Gremaud 1988) qui marquent le début de l'intentionnalité dans la communication (émergence vers 9 mois, dominante dès 13 mois). Cette période est caractérisée par le jeu

avec un objet et se termine par l'émergence du jeu fonctionnel avec les objets, autour d'une

tâche (plusieurs objets impliqués).

5. Evaluation du développement global

Toute intervention auprès d'un enfant RM requiert une évaluation de son développement

global qui peut d'ailleurs être fait par un autre intervenant. Cependant, cette évaluation est

souvent absente ou incomplète, aussi nous allons-nous commencer par un bref rappel. Pour l'évaluation du développement global, il est encore possible d'utiliser l'échelle de Fröhlich et

Haupt (1986), tout en attirant votre attention sur le fait que les stimulations basales de

Fröhlich (1987) sont conçues pour un niveau allant jusqu'à 6 mois et comprennent quelques pistes pour favoriser l'émergence de la préhension. Ensuite, il est possible d'utiliser l'échelle

de Uzgiris et Hunt, afin d'obtenir un profil de développement dans les différentes sous-

échelles, tout en soulignant que chez l'enfant polyhandicapé, le profil sera très hétérogène.

Nous insistons sur la nécessité de cette évaluation, car elle évite que les activités proposées dans l'intervention ne soient trop simples ou trop complexes.

Pour la période qui nous concerne aujourd'hui, rappelons qu'un enfant non RM de 5 mois du point de vue de la communication est capable de:

• rester en communication à distance (environ 2 mètres)

• il y de plus en plus de communication visuelle et auditive et de moins en moins de communication corporelle (ou "basale"),

• il peut distinguer ceux qu'il connaît de ceux qu'il ne connaît pas,

• il répond à l'attention reçue par des "gr" et des "r".

Au niveau de la manipulation, il peut toucher, porter à la bouche, rejoindre la ligne médiane

avec ses deux mains, tenir son biberon, porter ses mains à sa bouche, porter les objets

reçus à sa bouche en les explorant (mord, suce).

En polyhandicap comme chez les IMC, en raison des difficultés motrices, ce niveau de 5

mois est une étape difficile à atteindre, aussi tout sera étudié pour favoriser ces

comportements aussi rudimentaires qu'ils paraissent. Ces comportements sont dépendants de la motricité globale: la capacité de tenir la tête, de

se redresser, de prendre appui sur les avant bras, d'étendre un bras, de le diriger. Ils sont

fortement conditionnés par la spasticité de certains sujets ou l'hypotonie chez d'autres. Le positionnement de l'enfant est un aspect particulier à étudier avec un physiothérapeute ou un

spécialiste Bobath quand il y en a un. Nous développerons plus en détail ces aspects dans

la présentation concernant les enfants IMC.

6. Les apports des théories sur le développement de la communication

Les apports de Bruner constituent des jalons pour développer la communication chez l'enfant

RM. En ce qui concerne la relation communication et développement cognitif, nous verrons

Dr. Germaine Gremaud 23 Langage et communication – SA 1

les apports de Sugarman (1984, Gremaud, 1988) et vous renvoyons également à Camaïoni (1993 et Bates et al. 1979), Pêcheux (1995) pour un développement.

6.1. Les accompagnants de l'énoncé

L'attribution d'une intentionnalité est facilitée par l'apparition d'accompagnants de l'énoncé qui s'ajoutent aux aspects et aux circonstances de cet énoncé que nous avons développés

dans le cours précédent. Ces accompagnants dont parle Bruner (1983) comprennent des

gestes, montrer du doigt, chercher, jouer avec des objets, spécifiques, refuser. Avec le développement de la préhension, dès le 6e - 7e mois, l'attention de l'enfant est

dominée par ses efforts pour atteindre, prendre, échanger des objets, etc. Quant au geste de

montrer du doigt, qui s'observe à partir de 9 - 13 mois chez l'enfant non RM (Bruner, 1987), il peut s'accompagner d'une vocalisation spécifique à l'enfant. En RM, ce comportement est

plus difficile à observer en raison des difficultés motrices de l'enfant.

Aussi, en RM ces accompagnants de l'énoncé peuvent être n'importe quel comportement

auquel l'intervenant attribue une intention communicative (cf. 1er cours). Toutefois, à titre indicatif, nous verrons plus loin dans l'évaluation, une grille de comportements qui peuvent

s'observer ainsi que les fonctions communicatives qu'il est possible d'attribuer à ces

comportements.

6.2. La désignation

Dans la première période, nous avons vu le rôle du regard dans le processus de référence. Si le regard continue de jouer ce rôle dans cette période, accompagné de geste, Bruner (1983)

relève que vers 10-11 mois, les mères nomment les objets au moment où elles remarquent que

les enfants les regardent (Collis, 1977). Cette attention conjointe sur les objets est considérée comme un précurseur du langage dans le sens que vers 16 mois, les enfants regardent plus

longuement les objets ou les actions qui viennent juste d'être nommés pour eux (Golinkoff et al.

1987). D'ailleurs, Tomasello et al. (1986) obtiennent des corrélations positives entre le temps passé à regarder ensemble le même objet ou événement à 15 mois et la taille du vocabulaire

produit à 21 mois. En d'autres termes, le fait de nommer l'objet, refocalise l'attention de l'enfant

sur l'objet.

Cette correspondance entre le regard de l'enfant sur un objet et le fait que la mère nomme

l'objet est le résultat des routines de communication construites dans les épisodes interactifs M-

E. On comprend mieux comment le regard sert à établir un référence conjointe qui constitue une base pour ensuite de nommer l'objet identifié. Ce processus est fondamental pour la

construction du signe linguistique.

En RM, les déficits visuels et les fluctuations de l'attention requièrent des adaptations de cas en

cas (adaptation du matériel, limitation des distracteurs), (Cf. Affolter, 1991).

Procédure de mise en vedette. Kaye (1976, in Bruner) a démontré que la mère utilise un "marquage" pour identifier le référent sur lequel est porté l'attention. Ce "marquage" fait appel à

des procédés de "mise en vedette" qui consiste à approcher l'objet, à exagérer les actes à

accomplir (en démontrant les conduites à suivre). L'attention est attirée non seulement sur l'objet, mais également sur son utilisation (programmes moteurs), ce qui favorise la constitution

de catégories crées sur le critère de l'utilisation qui débouchera sur le jeu fonctionnel.

En RM, ces procédures de mises en vedette comprennent le développement de la poursuite visuelle des objets, de leur saisie et de leur manipulation (porter à la bouche, les taper, lâcher,

etc.). Les principes de Mall de faire en miroir les activités spontanées de l'enfant peuvent

contribuer à maintenir l'attention de l'enfant sur l'objet. La guidance selon les principes d'Affolter est aussi envisageable à ce stade. On tiendra compte du niveau de développement de l'enfant

et de ses intérêts dans le choix des objets et des actions proposées. Très tôt, on proposera des

choix en mettant à la disposition différents objets, ce qui permettra de voir vers quel objet

Dr. Germaine Gremaud 24 Langage et communication – SA 1

l'enfant oriente son attention et d'identifier ses préférences. Au cours de l'interaction, l'objet peut être éloigné pour voir si l'enfant manifeste par ses comportements, le désir d'obtenir l'objet. Cet

aménagement permet d'évaluer les comportements dont dispose l'enfant.

Les vocatifs individualisés prennent la forme du prénom pour attirer l'attention et vers 5 mois, s'ajoutent à ces moyens ordinaires des éléments du genre: "Oh, regarde" ou "Regarde ce que

moi j'ai". Vers l'âge 7 mois, Bruner (1987, pp. 65-66) montre que les enfants ont acquis une

sensibilité aux "déictiques indifférenciés", sorte de captateurs d'attention qui signalent qu'il y a quelque chose à regarder à quelque part dans l'environnement. Ces déictiques sont

caractérisés par accentuation rapidement montante qui ont le pouvoir d'attirer l'attention.

En RM, on observe généralement que l'enfant passe plus de temps à regarder sa mère que

l'objet de l'activité, à cause d'une exploration visuelle restreinte. Si à 12 mois, un enfant non RM

interrompt l'attention conjointe, c'est pour jouer avec un nouvel objet ce qui permet à la mère de

le suivre et de comprendre son exploration. Chez un enfant RM l'attention conjointe est moins longue et la séquence de jeu est interrompue sans orientation vers un nouvel objet. L'enfant est

plus passif et peut rentrer dans ses stéréotypies. Généralement, l'enfant a au moins un objet

favori qui dès qu'il est pris en main conduit au même geste constamment répété, par exemple, secouer près de l'oreille ou devant les yeux un objet qui fait du bruit ou bouge. Dans de tels cas,

on peut tenter de présenter d'autres objets ayant des propriétés similaires à l'objet favori pour

sortir l'enfant de ses stéréotypies. Que l'enfant puisse utiliser le même schème, mais sur

d'autres objets.

Ces procédures de mise en vedette et de capture d'attention constituent un moyen d'obtenir

l'attention conjointe et peuvent déclencher l'orientation du geste pour atteindre l'objet. Avec des personnes ayant des difficultés motrices, le choix de l'objet doit correspondre aux capacités de

l'enfant et parfois, il faudra s'ajuster à la trajectoire de la main pour faciliter la saisie. Ce n'est

que dans un deuxième temps qu'il est possible de jouer sur l'éloignement de l'objet, afin que l'enfant oriente son geste en fonction de l'objet ou de sa trajectoire. Cependant, attirer l'attention

sur l'utilisation d'un objet peut être insuffisant; dans ce cas, le recours à la guidance développée

par Affolter (1991) sera nécessaire.

Cette forme de désignation implique que lorsque l'enfant indique par son comportement

(orientation du regard, du bras, du corps, vocalisations, etc.), qu'il veut un objet hors de sa

portée, l'adulte le lui donne. La constance de la réponse de l'adulte à la demande de l'enfant va peu à peu créer des attentes chez l'enfant ce qui va conduire aux transformations dont parle

Bruner (1983) dans la désignation:

La décontextualisation: pour désigner l'objet à atteindre, l'enfant n'effectue plus un geste

exagéré, mais un geste plus péremptoire qui semble accentuer la direction du regard, ce qui

conduit à l'aspect suivant.

L'aspect économique apparaît quand l'enfant, vers 8 mois, tend la main vers l'objet, dans un geste directionnel mais sans esquisse de préhension.

L'aspect conventionnalisation apparaît dans la seconde moitié de la première année de

l'enfant, quand la mère et l'enfant semble vérifier par un regard, si leur geste ou leur marquage sont efficaces pour l'autre, comme s'il y avait un accord mutuel sur une façon cor-

recte de signaler (Bruner, 1983, p. 182).

Le geste de pointer qui est plus tardif, peut être utilisé comme déictique spatiale en l'absence d'un objet concret. L'enfant pointe en haut en disant "zo" pour évoquer de mémoire dans son

espace présent un oiseau vu précédemment (Bruner, 1987). En RM, ce geste de pointer est

parfois difficile à obtenir en raison des difficultés motrices. Aussi, on se contentera dans un premier temps d'obtenir l'orientation du corps et des yeux en attribuant à ces comportements

une fonction communicative: le désir d'obtenir l'objet qu'on approchera de l'enfant.

Dr. Germaine Gremaud 25 Langage et communication – SA 1

6.3. Modalités d'échange et de réciprocité dans l'attention conjointe

Faisant suite aux protoconversations, la déixis se développe dans "l'échange mutuel". Dans

un premier temps, l'enfant tend la main pour demander et recevoir un objet (d'abord bras tendu

comme pour atteindre, mais par la suite: paume ouverte). Ce n'est que par la suite que l'enfant accepte de recevoir et de redonner l'objet; l'acceptation d'un objet se marquent par des

vocalisations spécifiques. C'est ce que Bruner (Bruner 1983, p. 191) envisage dans la modalité

d'échange qui commence avec l'indication gestuelle pour demander un objet, souvent accompagnée d'une vocalisation. Comme dans la déixis, cette modalité implique une inversion

de rôle. L'enfant demande et reçoit un objet, mais dès 8-10 mois, il le redonne, le redemande,

le redonne. L'action conjointe porte sur un objet.

L'ébauche d'un concept de réciprocité apparaît dans les épisodes interactifs M-E dans

lesquels l'enfant apprend à "prendre son tour" et à "jouer des rôles", d'agent de patient, rôle qui

préfigurent ceux de locuteur et de récepteur. Vers un an, les interactions s'organisent autour d'une tâche qui implique l'extériorité, la contrainte, la division du travail. Les rôles sont

réciproques, mais non identiques.

Par exemple, la mère soutient une boîte à formes et l'enfant introduit les formes. La tâche se

structure, les rôles deviennent réciproques (chacun introduit une forme) en une succession de

"tours". L'action conjointe porte sur la tâche et non plus sur un objet. L'attention et les variations

introduites sont vérifiées fréquemment par des échanges de regards et de vocalisations.

Dans le cas d'un RM sévère, les interactions mère-enfant se caractérisent par une plus grande

passivité par rapport à des enfants non RM et une capacité réduite à initier des séquences interactives. De ce fait une mère d'enfant RM serait plus directive et aura tendance à anticiper

les besoins de l'enfant. Souvent, l'intervention consiste à aménager des opportunités de

communication: ne pas tout mettre à la portée de l'enfant, laisser à l'enfant le temps de montrer ce qu'il veut, de prendre son tour. Nous aurons l'occasion de voir une vidéo à la fin du cours

pour illustrer ces aménagements.

En RM, la période durant laquelle l'enfant n'interagit qu'avec un objet peut être particulièrement longue et parfois peut se limiter à ce stade. L'enfant va porter les objets à la bouche (qui est

une forme d'exploration), les prendre, les lâcher aussitôt, les taper, etc.. Les intervenants

accordent généralement peu d'importance à ces activités qui sont pourtant révélatrices d'un stade de développement, certes bas, si l'on considère l'âge réel de l'enfant. La question est de

savoir comment faire évoluer l'enfant vers des comportements plus élaborés et conventionnels.

Il s'agit d'abord de partir du niveau et des intérêts de l'enfant et de lui proposer des objets variés sur lesquels il peut appliquer ses schèmes. S'il tape, on lui montrera qu'on peut taper

différents objets sur une surface, deux objets les uns contre les autres, etc. Il peut ainsi

découvrir la propriété des objets. L'objectif est de développer le comportement exploratoire et

de faire découvrir à l'enfant les propriétés des objets, aspects importants pour le développement initial du lexique.

Exemple (vidéo M.-L.): Au début de l'année, on se demandait si M-L, polyhandicapée de 5 ans, voyait. En novembre, on observait un début de poursuite visuelle et un essai d'attraper

les objets, le bras tendu. Mais en février, qu’est-ce qu’on observe? M-L est capable d’enlever

un linge pour prendre le sachet de grelots qu'on avait caché, ce qui correspond à un niveau

de 7 mois (stade SM IV). Avant cette observation, nous n'avions aucun élément nous permettant de supposer un tel niveau. En mai, quand une éducatrice a essayé de filmer la

même scène, M-L s'est intéressée au linge, mais il n'était plus blanc comme la première fois,

mais jaune. Je venais de lire qu'à partir de 8 mois, le changement de couleur peut augmenter la manipulation et l'intérêt pour un objet. Comme cet objet était plus nouveau que

l'objet caché, il est normal qu'elle s'intéresse au linge. Cette observation me permet d'insister

sur la nouveauté; lorsque l'enfant ne manifeste plus d'intérêt pour un objet, autant abandonner et lui en présenter un autre.

Dr. Germaine Gremaud 26 Langage et communication – SA 1

A ce niveau, c'est la diversification des objets et des actions qui est importante. L'enfant ne fera

peut-être que prendre, lâcher, taper, laisser tomber, jeter, manipuler, porter à la bouche, c'est

tout à fait normal et en polyhandicap, c'est déjà pas mal. A ce stade, l’enfant manipule un objet

ou fait des actions dirigées sur son corps. Pour évaluer les actions sur les objets, on consultera avec profit Sinclair et al. (1981).

L'objectif à ce niveau est de développer les orientations complexes sur l'objet ou la personne (stade SM IV). L'enfant ne se contente plus comme dans les orientations simples de diriger son

regard ou sourire vers l'objet ou la personnes (Sugarman, 1984, Gremaud, 1988, voir plus loin

dans l'évaluation).

6.4. La prédication dans les interactions prélinguistiques

Durant ces activités sur les objets, il est possible d'observer ce que Bruner considère comme un précurseur du langage, la prédication qui d'un point de vue linguistique: "est l'affirmation ou

l'assertion de quelque chose sur le, ou à propos du, sujet d'un proposition" (Wall, 1974, in

Bruner, 1983, p. 194). La prédication consiste à mettre en correspondance une certaine organisation que l'enfant

découvre dans la réalité extérieure et une organisation langagière.

Dans les actions conjointes développées entre la M et l'E, le thème est partagé, connu des deux. Ces actions conjointes structurées constituent des formats dont le thème est

suffisamment connu pour qu'il soit possible de faire un commentaire sans le mentionner. Avec

le développement des différentes modalités, ces formats, au stade de la modalité de réciprocité, se caractérisent par la division du travail, l'extériorité et la contrainte. Quel

commentaire est-il alors possible de faire au sujet de ce thème? Pour y répondre, considérons

d'abord la prédication dans un acte communicatif.

En ce qui concerne la période prélinguistique (Bruner, 1983, pp. 198- 200) la prédication se

manifeste ainsi:

a. le commentaire consiste à signaler qu'il y a un thème commun dans l'action conjointe

qui se traduit par l'orientation du regard de l'enfant.

Ex.: L'E au cours d'une interaction lève les yeux vers la M, établit un contact visuel et sourit.

Le commentaire apparaît sous la forme de contrôles visuels du maintien de la

participation des deux protagonistes.

Cette forme de commentaire s'élargit et s'accompagne à 9 mois d'une forme de vocalisation

"proclamatoire" qui apparaît en deux points des séquences d'action conjointe:

- au moment où l'enfant va prendre part à l'action conjointe, - lorsque l'acte est achevé.

Par la suite, en plus de vocaliser et établir un contact visuel, l'enfant peut montrer à sa M l'objet impliqué dans l'action.

b. Séparation thème-commentaire: Le jeu prend 2 formes possibles:

- un objet est intégré successivement à autant de schèmes d'action que l'enfant peut utiliser.

Ex.: une balle est successivement portée à la bouche, pressée, frappée

contre une table, etc. - ou bien une action accommode autant d'objets différents que possible,

Ex.: l'E frappe successivement une tasse, une cuillère, une poupée etc..

Dr. Germaine Gremaud 27 Langage et communication – SA 1

Cette séparation entre objet et action est vue comme précurseur de la relation sujet-prédicat. Cette distinction s'observe également plus tard lorsque les enfants utilisent les expressions

linguistiques. En effet, Sinclair (1968, p.170) démontre que des enfants de 3-4 ans à qui l'on

demande de décrire des une action, nomment tantôt l'objet (thème), tantôt l'action

(commentaire).

Exemple: Arif lâche des billes sur un xylophone, le résultat qui s'ensuit fait que l'enfant

regarde l'adulte, lui sourit et oriente à nouveau son regard vers le xylophone et lâche à nouveau des billes. C'est ce que nous pourrions appelé un commentaire sur une action.

6.5. La dénomination comme processus de référence

Elle implique des items lexicaux standards qui désignent des événements de l'univers commun

à la M et à l'E (Bruner, 1983, p. 178). En d'autres termes, l'enfant apprend à référer, par les

procédures qu'il a développées en interaction avec la M., même s'il ne peut discriminer les pro-priétés auxquelles font référence hochet ou orange.

Avec l'apparition du geste de pointer du doigt accompagnée de formes phonétiques régulières (Ex: "eum" et "da"), les questions du type "où est le X" deviennent une demande réelle de

localisation. Dès 15 mois, ce format apparaît dans les situations de jeux-étiquette (Bruner,

1987).

L'idée de mot-étiquette en tant que moyen de référence est un style que l'on peut reconnaître dans les interactions M - E dans le jeu "Où est ton nez", "montre-moi tes yeux". L'enfant montre

sur lui bien avant de pouvoir produire le mot , ce qui montre bien sa capacité de comprendre le

sens du référent linguistique (Bruner, 1983, pp. 187-188). A cette question de localisation à laquelle l'enfant répond, succède celle de "Qu'est-ce que

c'est", qui entraîne des vocalisations, puis des formes phonétiques régulières en dehors des

normes et enfin des noms. Cette étiquetage se poursuit par la lecture de livre (période initiale du développement lexical), (Bruner, 1987). En RM, on peut commencer par des photos des

personnes de son entourage et constituer pour l'enfant un premier livre de communication.

En RM, les mêmes procédures sont à utiliser. Ce n'est pas parce que l'enfant ne parle pas, pas encore ou ne parlera probablement pas qu'il ne faut utiliser le mot-étiquette et procéder à ces

jeux. Il est nécessaire d'accepter le principe d'une intervention basée sur les données

développementales de l'enfant NRM.

7. Evaluation

Ce chapitre consacré à l'évaluation a pour objectif de présenter quelques grilles qui serviront de base pour situer l'enfant dans son développement par rapport à la communication et de

fixer des objectifs: savoir vers quelles acquisitions orienter l'intervention.

7.1. Evaluation de l'intentionnalité

La question de la présence d'une intention de communiquer est secondaire, en particulier

pour les personnes RM profondes qui restent ou sont en déca de cette possibilité. La question est surtout de savoir comment les faire évoluer vers une communication moins

rudimentaire. Pour cela, il est nécessaire d'évaluer à quel niveau l'enfant se situe.

Critères généraux

Pour qu'il y ait comportement intentionnel de communication, il faut que l'enfant et l'adulte

soient engagés ensemble dans une activité partagée. D'une manière générale, les 4 critères

Dr. Germaine Gremaud 28 Langage et communication – SA 1

suivants sont à observer (Bruner, 1974, 1975; Dore 1974; Bates et al. 1975; Coggins et Carpenter, 1983,):

1. direction du comportement

2. proximité A - E engagés ensemble dans une activité

3. alternance du regard entre A et objet 4 persistance du comportement de l'E dirigé vers l'adulte jusqu'à ce que le but soit

atteint), signal approprié à la communication (gestes, vocalises).

Chez la personne RM, Cirrin et Rowland (1985) précisent qu'il faut:

1. Evidence de l'attention sur la personne ou un objet, déterminé par le regard ou

l'orientation du corps, 2. Evidence que le sujet désire obtenir un objet, faire un action ou diriger l'attention

de l'adulte.

3. Evidence de la persistance pour atteindre l'attention de l'adulte.

Situation d'évaluation

Une situation naturelle d'interaction est préférable, mais il est souvent nécessaire d'aménager des situations. Par exemple, on peut choisit l'objet préféré du moment et au

cours de l'interaction, l'objet est éloigné de l'enfant, mais reste dans son champ visuel. Ceci

constitue un aménagement physique (objet mis hors d'atteinte) et social (éloignement

effectué par l'adulte) de la situation, destiné à favoriser l'émergence d'actes ou de comportements communicatifs. L'analyse porte sur les comportements émis par l'enfant

dans cette situation.

7.2. Catégories d'analyse (Sugarman, 1984)

Les séquences interactives sont réparties en 3 catégories qui représentent des niveaux de développement qui peuvent coexister à un certain moment du développement, mais c'est

leur fréquence qui va évoluer: les premières vont diminuer au profit des deuxièmes, puis des

troisièmes. Les séquences qui atteignent la troisième catégorie sont considérées comme des

actes communicatifs intentionnels de la part de l'enfant. On retiendra toujours le niveau supérieur pour qualifier le niveau atteint par l'enfant. Les 3 catégories définies par Sugarman

(1984) sont:

7.2.1. Les orientations simples vers l'objet ou la personne

- actes simples orientés vers la personne: des comportements dirigés vers l'adulte, qui

sont de simples contacts sociaux autres que le regard seulement (par exemple: l'enfant

regarde et/ou sourit à l'adulte, l'adulte regarde l'enfant et vocalise);

- actes simples orientés vers l'objet: l'enfant manipule l'objet ou dirige son attention

exclusivement vers l'objet (par exemple: l'adulte tient un objet devant l'enfant, l'enfant

frappe l'objet).

7.2.2. Les orientations complexes vers l'objet ou la personne

- actes complexes orientés vers la personne: cette séquence comprend une approche ou

une réponse à l'adulte (par exemple: l'enfant regarde et sourit à l'adulte, il touche et

s'agrippe aux vêtements de l'adulte, l'adulte prend l'enfant).

- actes complexes orientés vers l'objet: différents comportements discrets sont combinés

et dirigés exclusivement vers l'objet: L'enfant ne dirige pas son attention vers l'adulte, ni ne sollicite clairement son aide (par exemple: l'adulte donne une boîte et des plots à

Dr. Germaine Gremaud 29 Langage et communication – SA 1

l'enfant, l'enfant prend les objets, l'enfant met les objets dans la boîte). L'enfant ne regarde que la main ou la partie du corps de l'adulte impliquée dans l'action.

7.2.3. Les orientations coordonnées personne-objet

- l'enfant montre clairement son intérêt pour l'objet et approche socialement l'adulte impliqué. Par exemple, l'enfant tend un récipient à l'adulte, regarde l'adulte et vocalise,

l'adulte prend l'objet et vocalise. Dans cette dernière catégorie, un objet est

obligatoirement présent, de même qu'un contact oculaire entre l'enfant et l'adulte à un

moment de la séquence.

A ce 3e stade , Sugarman différencie les orientations coordonnées:

- inadaptée: l'enfant s'oriente vers l'objet avant d'attirer l'attention de l'adulte,

- adaptée: l'enfant obtient l'attention de l'adulte et dirige ses comportements vers l'objet.

Enfant

ObjetMère

1 2

Orientation coordonnée adaptée:

A ce stade, l'enfant établit un contact oculaire avec la mère, ce qui démontre bien une

intention communicative de faire intervenir sa mère dans l'épisode interactif et non plus la

main seulement ou une partie du corps de sa mère pour atteindre l'objet. Les séquences classées dans les catégories 1 et 2 ne sont pas considérées comme intentionnelles de la

part de l'enfant. Cependant, la catégorie 2 comprend des comportements qui deviendront par

la suite communicatifs. L'aspect essentiel de la transformation (catégorie 3) apparaît dans le

contact oculaire avec l'adulte. D’ailleurs Baron-Cohen (1998) souligne l’importance de l’attention partagée ou conjointe dans le développement de la théorie de l’esprit, qui se

manifeste par une relation triadique : Enfant, Adulte et Objet dont les échanges visuels A-E

sont révélateurs de cette triangulation. Ces derniers indiquant le partage d’un sens avec autrui et de l’intentionnalité.

7.3. Actes communicatifs et développement cognitif.

Dans un premier temps, nous présenterons les résultats obtenus par Sugarman (1984), puis

ceux que nous avons obtenus auprès de 4 enfants RM Sévères (Gremaud, 1988). Ces

résultats sont mis en rapport avec l'évaluation du développement cognitif (moyen-but et causalité). Les rapports avec d'autres aspects du développement cognitif seront abordés

dans le point suivant.

Sugarman (1984) établit une relation entre les catégories d'actes communicatifs (orientations

simples, complexes et coordonnées) et le niveau de développement cognitif (évalué au

moyen de l'échelle de Uzgiris et Hunt: moyen-but et causalité).

Dr. Germaine Gremaud 30 Langage et communication – SA 1

Au stade SM III, Sugarman différencie un niveau A, pour catégoriser les orientations diffuses ou l'absence de réaction et un niveau B, auquel correspondent les orientations simples.

Au stade SM IV, correspondent les orientations complexes (niveau C).

Au stade SM V, correspondent, les orientations coordonnées inadaptées (niveau D) et

adaptées (niveau E).

Les orientations simples dominent entre 4;6 et 7 mois, les complexes entre 7;9 et 10;6 mois.

Par contre, les orientations coordonnées émergent entre 8 et 10 mois, pour augmenter plus nettement après 11 mois et dominer à partir de 13 mois, chez les sujets les plus avancés.

7.4. Chez les enfants RM

En retard mental, Gremaud (1988) observent des résultats comparables chez 4 sujets RM

sévères, âgés de 14 à 16 ans.

Nos résultats indiquent que les sujets RM ont un développement comparable à des enfants

NRM en ce qui concernent les actes communicatifs (orientations simples, complexes et

coordonnées). Cependant, leur niveau SM en moyen-but est généralement supérieur, alors que celui en causalité est identique ou inférieur à celui d'enfants NRM.

Ces données sur la relation entre actes communicatifs et développement cognitif sont

présentées pour illustrer l'évolution des 3 catégories d'orientation en rapport avec le niveau SM. Elles mettent en évidence des profils différents selon les enfants, mais des tendances

de développement identiques, quant aux actes communicatifs.

Jusqu'à 3 mois, les interactions M-E sont essentiellement dyadiques (stade de

l'intersubjectivité primaire), c'est-à-dire dirigée vers la personne pour reprendre la

terminologie de Sugarman (1984). La majorité des interactions se font sans objet (Cf. Communication "basale").

Entre 3 et 8 mois, c'est le stade des jeux, avec l'intérêt du bébé centré sur les objets et leur

exploration, l'intérêt pour la mère diminue.

Au-delà de 8 mois, le bébé atteint le stade de l'intersubjectivité secondaire où il parvient à contrôler sa mère et l'objet, ce qui correspondrait à l'émergence approximative des

orientations coordonnées (dominantes vers 13 mois) de Sugarman (1984).

8. Développement de l'intentionnalité

L'intentionnalité placée dans l'optique piagétienne requiert le stade SM V (en particulier en

moyen-but et causalité). Dans cette optique, Camaioni (1980) postule que la capacité de communiquer intentionnellement implique deux processus distincts dans le développement

de l'enfant:

Insérer tableau intentionnalité

1. le processus interpersonnel de construction de schèmes communicatifs se fait au

cours de l'interaction mère-enfant.

2. le développement de la capacité d'utiliser intentionnellement un instrument pour atteindre un but (stade V sensori-moteur) .

8.1. Les stades de Camaioni (1980)

Durant les 15 premiers mois, Camaioni différencie 3 stades d'évolution de la communication

intentionnelle:

Dr. Germaine Gremaud 31 Langage et communication – SA 1

1. Le stade non intentionnel: le bébé a des comportements réflexes et émet des signaux non intentionnels, ce qui permet l'établissement d'un cercle d'actions et de réactions entre le

nouveau-né et l'adulte.

Selon Bruner (1985, pp. 168-175), l'adulte interprète ces signaux comme étant des signaux

intentionnels, à l'aide d'indice (aspects, accompagnants et circonstances de l'énoncé, cf. cours précédent).

2. C'est le stade où l'enfant utilise un moyen simple pour atteindre un but proximal. Il est encore incapable d'utiliser un instrument ou de faire intervenir volontairement l'adulte

pour atteindre un objet hors de sa portée; l'enfant se limite à appliquer les schèmes

connus aux objets qu'il peut atteindre (ex.: tendre la main dans un geste de préhension, tirer la nappe, support, SM IV).

3. Ce stade se caractérise par le développement de la capacité d'utiliser un moyen (Ex.: un

geste) susceptible à son tour de faire intervenir un moyen intermédiaire (l'adulte) nécessaire pour atteindre un but (apporter un objet inaccessible à l'enfant)

(Cf. la notion d'économie dans le processus de référence chez Bruner, 1983).

(Cognitif SM V: ficelle horizontale et verticale, bâton)

8.2. Les performatifs: impératif et déclaratif

A ce 3e stade, on peut vraiment parler d'intention communicative. Entre 12 et 15 mois, cette intention se présente sous deux formes:

1. le performatif impératif: utiliser un signal pour que l'adulte fasse quelque chose (fonction de requête),

2. le performatif déclaratif: émettre un signal pour attirer l'attention de l'adulte sur un

objet ou un événement (Camaioni, 1980).

Pendant plus d'une décennie, on considéra ces deux formes de performatif comme

requérant les mêmes capacités cognitives (stade SM V), d'autant plus qu'elles semblaient

apparaître au même moment. En termes de fonctions communicatives, les "proto-impératives" étaient plus couramment appelées requêtes ou demandes en faisant la

distinction: requêtes d'objet, d'action, d'information ou d'attention et les "proto-déclaratives:

des commentaires sur objet, action, personne, attention, etc.

8.3. Réinterprétation de l'intentionnalité (Camaioni, 1993)

En 1993, Camaioni propose une réinterprétation de l'intention communicative en analysant

l'intention à partir de deux hypothèses (Cf. tableau p. 125, traduit par Pêcheux, 1996):

1. "tool-use" hypothèse, (utilisation d'outil).

2. "joint attention" hypothèse,

8.3.1. "tool-use" hypothèse

Cette hypothèse comprend la conception acceptée jusqu'à ce jour, dans laquelle Camaioni

isole trois formes de "tool-use" se développent durant le stade V sensori-moteur:

A. Le bébé utilise un objet (moyen) pour agir sur un objet (but); B. Le bébé utilise un adulte (moyen) pour agir sur un objet (but);

C. Le bébé utilise un objet (moyen) pour attirer l'attention de l'adulte (but).

- la première forme (A) n'est pas sociale,

- la deuxième correspond au "proto-impérative" (B.),

- la troisième au "proto-déclarative" (C);

Dr. Germaine Gremaud 32 Langage et communication – SA 1

Seules ces deux dernières sont considérées comme intentionnelles, ce qui était considéré à l'époque, par Camaioni également, comme des exemples suffisamment clairs d'intention communicative.

8.3.2. "joint attention" hypothèse

Selon cette hypothèse, les "proto-impératives" (B) et les proto-déclaratives (C) se

différencient de manière structurale. C'est le déplacement de la situation de l'adulte qui passe de "moyen" à "but" à l'intérieur de la séquence.

Dans la requête (B), le comportement n'est pas un acte communicatif intentionnel; en touchant la main de la mère pour lui faire actionner le jouet, le bébé ne communique pas

plus avec elle qu'il ne communique avec la ficelle qu'il tire. Il fait un usage instrumental de

l'adulte.

Dans une déclarative (C), l'enfant influence l'état interne de l'adulte, en relation avec

quelques aspects du monde. L'enfant qui attire l'attention de l'adulte sur un objet, tente d'agir

sur l'état interne de l'adulte "capable de s'intéresser à quelque chose" et de comprendre ses états internes et ceux des autres et non plus utiliser l'adulte comme instrument.

La différence se manifeste également au niveau fonctionnel:

• Dans les "proto-impérative" en une attente sur le fonctionnement humain vu comme un

agent autonome, capable d'utiliser un moyen pour une fin. Cette attente nécessite une

compréhension de la relation entre action et attention activant un comportement manifeste chez un autre individu.

• Les "proto-déclaratives" manifestent une intention communicative dans le sens où elles

impliquent nécessairement une représentation de l'autre comme un individu capable d'avoir des états intentionnels et de comprendre ceux des autres.

Exemple dans le pointage

• Le pointage « directif » (ou proto impératif) désigne l’intention de satisfaire des besoins ou des désirs (l’enfant les utilise pour obtenir quelque chose de l’adulte),

• Le pointage «déclaratif » (proto-déclaratif) désigne l’intention d’attirer l’attention d’une

personne dans le but d’indiquer l’existence d’un objet et/ou d’en partager sa connaissance

avec autrui. • Les pointages déclaratifs arrivent environ 2 à 3 mois après les pointages directifs.

Sans entrer dans l'argumentation avancée par Camaioni, il nous semble intéressant de retenir le décalage temporelle. Quant à ne considérer comme intentionnelle que les proto-

déclaratives, c'est une position théorique soutenable (Cf. théorie de l’esprit) mais guère

opérationnalisable par manque de critères objectifs et vérifiables pour inférer l'existence de

cette intentionnalité. Nous reviendrons sur ces aspects dans le cours consacré aux fonctions communicatives et comportements.

9. Evaluation des comportements communicatifs et fonctions

Pour synthétiser un peu les données exposées jusqu'ici, nous vous proposons une grille des principaux comportements pouvant servir à la communication, ainsi que les fonctions

communicatives qu'il est possible de leur attribuer. Que ces comportements soient

intentionnels ou non n'est pas important, ce qui l'est par contre, c'est que vous, vous leur attribuiez une intention, donc une fonction communicative.

Insérer : tableau comportements et fonctions

Dr. Germaine Gremaud 33 Langage et communication – SA 1

En RM, l'observation des comportements communicatifs peut requérir un aménagement de

la situation, car dans l'environnement l'enfant a trop peu d'occasion de communiquer, car

l'adulte va trop souvent au devant des demandes de l'enfant sans lui laisser le temps de les

initier. Pour l'évaluation de l'environnement, nous vous renvoyons à l'index Rowland et Schweigert (1993, en annexe).

Un autre problème s'observe également, c'est l'aspect moins évident de ces comportements chez les niveaux les plus bas. Par exemple, l'enfant proteste parfois par des conduites de

fermeture à la communication: passivité, stéréotypies, automutilations. Il faut alors amener

l'enfant à montrer son désaccord par le biais de notre relation et par l'action sur son environnement. Nous verrons en fin de cours une vidéo illustrant quelques uns de ces

comportements dans des situations aménagées (Cf. liste des comportements en annexe).

10. Aménagement du milieu social et physique

La première question à se poser et de savoir quelles sont les occasions que la personne RM

a de communiquer durant la journée. Ne va-t-on pas au devant des demandes de cette

personne avant même qu'elle n'ait pu manifester une demande? Par exemple, son verre est rempli avant qu'elle ne se mette à table, ou dès qu'il est vide, simplement parce que

l'éducateur sait que cette personne boit généralement deux verres. On invoquera le manque

de répondant des personnes RM pour justifier l'installation de telles routines dans la vie

quotidienne, routines qui constituent une barrière sociale à la communication. (Cf. Annexe Items d’analyse de l'environnement de la communication de Rowland et Schweigert, 1993).

Aménagement social

L’aménagement social dépend du personnel éducatif qui a un rôle prépondérant pour fournir

des occasions de communiquer. En effet, l’éducateur peut donner à la personne handicapée la possibilité d’initier la communication, de formuler une requête ou de répondre. Ceci

nécessite une attitude spécifique qui se manifeste par l’attention portée sur la personne pour

lui indiquer qu’une réponse est attendue d'elle.

L'imitation contingente peut s'insérer dans des routines de la vie quotidienne dans le sens de

Mall (1984) d'être le miroir de l'autre ou plus tard, quand l'enfant lance une balle ou pousse

une voiture vers l'adulte, ce dernier peut la lui retourner, ce qui permet d'exercer la prise de tour.

La réponse contingente consiste à répondre à l'intérêt de l'enfant, ce qui est plus facile pour obtenir son attention sur l'objet, car l'intérêt part de l'enfant. Ex: l'enfant regarde un objet

éloigné, l'adulte l'approche.

Le délai doit être suffisamment long pour lui permettre de répondre par un comportement. Ensuite, le rôle de l’éducateur est d’interpréter le comportement émis et d’agir en consé-

quence.

Les activités quotidiennes (comme les repas, la toilette, l’habillage etc.) se prêtent bien pour

favoriser la communication, car elles sont répétitives et se déroulent dans un ordre défini, ce

qui développe chez l’enfant des attentes et des possibilités d’anticiper les étapes de l’activité.

Une fois qu'une routine est bien établie, il est possible d'introduire la stratégie de l'interruption

de la chaîne, afin de donner à l'enfant une occasion de communiquer son désir de continuer,

de formuler une question, de faire un commentaire.

Dr. Germaine Gremaud 34 Langage et communication – SA 1

Même si l’enfant ne parle pas, l’éducateur peut nommer le matériel et les actions nécessaires à l'activité (bain, habillage), attendre une participation de l’enfant dans l’habillage en l’incitant

à faire tel mouvement ou en l’amorçant etc. Il est important de marquer le début et la fin

d’une activité et d’annoncer la suivante, par exemple, en montrant une photo ou en effectuant

un geste pour annoncer la promenade qui va suivre (pour développer des attentes et per-mettre une anticipation).

Aménagement physique

Une analyse du déroulement de la journée devrait permettre d’identifier quels aménagements

physiques pourraient augmenter les occasions de communiquer, en rompant justement les routines. Par exemple, Halle (1984) démontre que l’interruption d’une activité, par l’oubli d’un

objet indispensable, comme celui de la cuillère pour boire la soupe, peut donner l’occasion à

l'enfant de la demander. Sans être exhaustif, on peut imaginer de proposer des choix,

provoquer des situations inattendues d’éloigner un objet désirer, d’interrompre la musique ou une activité pour susciter une demande chez l’enfant (cf. vidéo).

Pour illustrer cet aménagement physique, nous verrons en fin de cours une vidéo réalisée avec un enfant de 7 ans, RM sévère (en moyen-but, début SM VI) en s'inspirant des

situations utilisées par Cirrin et Rowland (1985).

11. Médiation - intervention

Les interactions entre un bébé de 3 mois et sa mère se font dans la majorité des cas sans

objets. A 5 mois, la mère propose des objets que son bébé explore. Ces stimulations

proposées par la mère sont non verbales (montrer l'objet, l'agiter, lui faire produire un effet, déplacer l'enfant pour le rapprocher), la mère utilise le verbal qu'en soutien de l'activité ou

pour attirer l'attention de l'enfant.

Pêcheux (1995) se demande alors: les mères suivent-elles l'intérêt de leur enfant ou le font-

elles naître? Pour y répondre, elle donne deux résultats. 1) A 5 mois, un bébé explore deux

fois moins les objets lorsqu'il est seul au milieu de jouets. 2) Une corrélation positive entre la

fréquence des interventions à 5 mois et la durée de l'attention des bébés de 8 mois. Elle conclue ainsi: "les rapports des bébés aux objets sont donc, en partie du moins, médiatisés

par les parents. Dans l'atmosphère chaleureuse d'une situation de jeu, ceux-ci font découvrir

les propriétés des objets, et aident à la construction du contrôle autonome de l'attention, dont le tout petit est d'abord incapable (p. 134)".

Cette médiation parentale se poursuit chez les bébés de 9 à 18 mois. Belsky, Goode et Most (1980) mettent en relation le niveau de jeu des enfants avec le nombre et la nature des

interventions parentales (importance du pointage, des démonstrations et des guidages).

La relation entre interventions parentales et développement à long terme du bébé a une valeur de pronostique des interventions (Cf. Tableau Pêcheux p. 136). Cependant, Pêcheux

(1995) se demande si toutes les stimulations sont bénéfiques. Elle cite le résultat le plus

frappant de Findji et al. (1992) qui observent que: plus la mère mobilise, plus l'enfant s'oriente vers les objets, mais moins il les regarde longtemps; par contre, plus elle soutient

les explorations que l'enfant a commencé de lui-même, plus l'enfant fixe son attention (p.

137).

Ce résultat incite Pêcheux à faire la différence entre "attirer l'attention" et "soutenir

l'attention". Un objet peut attirer l'attention de l'enfant et retenir son attention si son niveau de

complexité correspond aux capacités de traitement de l'information du bébé, s'il intéresse ou est nouveau, mais cet objet ne se manifestera pas si l'attention du bébé fléchit. Ainsi

Dr. Germaine Gremaud 35 Langage et communication – SA 1

Pêcheux définit: "Le rôle constructeur de la mère serait moins d'attirer l'attention de l'enfant vers des objets que de l'aider à maintenir son attention souvent vacillante (p. 137)".

Cette dernière considération nous amène à mettre en évidence, par rapport aux stimulations

que l'on peut proposer à des enfants RM, les aspects de complexité, de nouveauté des objets et l'intérêt de l'enfant et leur rôle sur l'attention de l'enfant (Cf. niveaux d'éveil) et en

particulier de l'habituation à ces objets. Le rôle médiateur de l'adulte se conçoit dans le

maintien de l'attention de l'enfant sur ces objets, en faisant découvrir les propriétés de l'objets et en favorisant leur exploration (Cf. Mainardi et Lambert, 1984 et Mainardi in

Lambert, 1988, pour un exposé plus détaillé). Nous reviendrons sur ces aspects dans le

cours de l'année prochaine sur les stimulations sensorielles.

Dans la deuxième partie de son article, Pêcheux considère les interventions parentales sous

l'angle des ajustements (responsiveness) de la mère aux signaux de l'enfant faisant

référence à Vygotsky (1978, zone proximale de développement) et à Bruner (1983, pour l'étayage). Nous vous incitons vivement à lire ce chapitre en complément.

Durant cette période conduisant à la communication linguistique, l'intervention se fait en situation de jeu dans laquelle l'enfant peut découvrir et explorer son environnement avec

plaisir. Le rôle de l'intervenant est de proposer des objets à explorer (montrer l'objet, l'agiter,

lui faire produire un effet, etc.), le verbal est utilisé pour soutenir l'activité, attirer et surtout

maintenir l'attention de l'enfant sur une activité qu'il a commencé de lui-même.

Dans ces situations de jeux exploratoires, les objectifs peuvent être de stimuler l'enfant pour

développer des intentions de communications, l'action conjointe, la prise de tour, la représentation, l'imitation.

Cependant, avec un enfant RM différents problèmes peuvent interférer: - l'habituation: il ne faut pas persister dans la stimulation, mais en présenter une

nouvelle.

- l'hyperactivité motrice et/ou sensorielle: l'enfant est constamment en mouvement,

touche à tout mais n'explore rien, il ne prend pas conscience de son effet sur l'environnement: ne suit pas la chute des objets, ne réagit pas aux bruits des objets,

etc. (cf. Affolter, 1991). L'enfant ne sélectionne pas les informations, il est ouvert à tout,

tout peut attirer son attention. Dans ce cas, l'espace d'exploration est à limiter et le nombre de stimulation est à contrôler.

- les absences, les crises d'épilepsie.

- les stéréotypies et les comportements automutilatoires.

Par rapport aux stimulations que l'on peut proposer à des enfants RM, il faut tenir compte

également des aspects de complexité, de nouveauté des stimulations, de l'intérêt de l'enfant

et leur rôle sur l'attention (Cf. niveaux d'éveil) et en particulier de l'habituation à ces objets. Le rôle médiateur de l'adulte se conçoit dans le maintien de l'attention de l'enfant sur ces

objets, en faisant découvrir les propriétés de l'objets et en favorisant leur exploration (Cf.

Mainardi et Lambert, 1984 et Mainardi in Lambert, 1988, pour un exposé plus détaillé).

La situation de jeu et les objets ou stimulations sont choisies en fonction de l'observation des

interactions de l'enfant avec son environnement (par quoi est-il intéressé). L'évaluation

globale de l'enfant donne également quelques indications sur les activités qui peuvent être proposées. L'intervention se déroule ensuite dans la "zone proximale de développement"

(Vygotsky, 1983) de l'enfant. Cette zone est la distance entre le niveau actuel de l'enfant tel

que nous pouvons le déterminer à travers sa façon de résoudre des problèmes seul et le niveau de développement potentiel qui est déterminé à travers la façon dont il résout des

problèmes avec l'aide de l'adulte ou en collaboration avec des enfants plus avancés.

Dr. Germaine Gremaud 36 Langage et communication – SA 1

Le soutien fourni par l'adulte pour stimuler l'enfant est appelé "étayage" par Bruner: l'adulte restreint la complexité de la tâche pour permettre à l'enfant de résoudre des problèmes qu'il

peut accomplir seul. Cet étayage consiste en la construction de formats qui encadrent les

actions de l'enfant. Bruner distingue 4 types de formats:

- l'adulte assure la convergence entre son attention et celle de l'enfant dans l'interaction,

- l'adulte choisit une situation dans la zone proximale de développement en assurant

une mesure constante du succès pour l'enfant et pour l'adulte. Il faut absolument limiter les échecs.

- à travers les formats, l'adulte fournit des occasions de créer des conventions

d'interactions par l'utilisation des signes dans le contexte de l'action.

Pour arriver à la reconnaissance de la relation entre moyens et buts, le rôle médiateur de

l'adulte décrit par Bruner est de focaliser l'attention et l'orientation des investigations

perceptivo-motrices sur les éléments de l'objet susceptibles de favoriser l'accomplissement d'un effet, de manière plus autonome.

Dans l'action conjointe avec un enfant RM l'adulte doit être attentif à ne pas intervenir verbalement ou gestuellement, alors que l'enfant ébauche une initiative pour explorer, car il

deviendrait un élément perturbateur de l'attention. L'adulte doit amener l'enfant à ce qu'il

perçoive notre main comme partie de l'adulte agissant et non comme outil indépendant de

l'adulte. L'objectif est d'amener l'enfant des orientations complexes aux orientations coordonnées. Lorsque l'enfant identifie bien d'où vient l'aide, il prend lui-même les mains de

l'adulte pour les faire agir à sa place.

Dans ce rôle médiateur de l'adulte, nous faisons référence également à l'approche d'Affolter

que nous développerons dans le cours de 2e année. Il s'agit de développer "l'intermodalité

sensorielle", puis la "sériation" (succession de séquences perceptives pour l'accomplissement d'une action). La "guidance" permet d'organiser cette sériation en

effectuant avec l'enfant la succession des gestes à accomplir. Par exemple, l'enfant peut

laisser tomber les objets, mais ne pas aller les rechercher; il va réduire son activité à faire

tomber les objets pour le seul plaisir d'entendre le bruit, ce qui peut le conduire à se réfugier dans des stéréotypies. On sortira l'enfant de cette situation, en l'aidant à aller ramasser les

objets et à en faire quelque chose avec. Il s'agit alors de développer le comportement

exploratoire, lui montrer d'autres effets qui peuvent être obtenus avec cet objet.

Dans ces jeux exploratoires, l'objectif est aussi de stimuler la représentation indispensable à

la communication. Pour cela, nous focalisons l'attention de l'enfant sur ce qui est le plus informatif en pratiquant la redondance, avec bien sûr, la référence concrète. Dans ces

situations de jeu, nous essayons d'enclencher de pseudo-dialogues, prémices de la prise de

tour en communication verbale. Dans tous les cas, notre vitesse de parole doit être

contrôlée, ainsi que la longueur des énoncés.

En RM, il faut souligner qu'une attention particulière doit être prêtée à la généralisation des

conduites acquises. Par exemple, un enfant peut très bien parvenir à utiliser un comportement adéquat (prendre la main de l'éducateur) pour formuler une demande (avoir

"encore" du lait) durant le repas, mais ne pas parvenir à utiliser ce même comportement pour

demander à l'éducateur de remettre en marche une voiture téléguidée, à un autre moment et

autre endroit. Il est alors nécessaire de trouver un moyen pour faire découvrir à l'enfant que le même comportement peut être utilisé (l'adulte approche sa main de l'enfant, la bouge pour

attirer son attention, l'enfant peut alors toucher la main pour demander de l'aide).

12. Analyse d'une vidéo

Dr. Germaine Gremaud 37 Langage et communication – SA 1

Vidéo: Arif (RM sévère, 6;4 ans, stade SM V, début du VI en moyen et but) aménagement physique et social: comportements communicatifs et fonctions (Cf. liste des comportements

observés, ci-dessous).

Orientations coordonnées inadaptées (Cf. vidéo) 1 l'E. tient et regarde l'objet, puis regarde l'A. et murmure

2 l'E. tend la main vers l'A., regarde l'objet, puis le tend à l'A. 3 l'E. tend la main vers l'objet, puis regarde l'A. 4 l'E. émet un son, regarde l'objet, puis regarde l'A. 5 l'E. regarde l'objet, puis regarde l'A. et touche l'A. 6 l'E. regarde et touche l'objet, puis regarde l'A.

Orientations coordonnées adaptées 1 l'Et tend l'objet à l'A., et regarde l'A. 2 l'E regarde l'A., puis prend l'objet et le regarde 3 l'E. regarde l'A., puis fait un geste en direction de l'objet 4 l'E. regarde l'A., le touche, puis tend la main vers l'objet, 5 l'E. regarde l'A., marmonne et touche l'objet 6 l'E. regarde l'A., puis prend l'objet et le tend à l'A. 7 l'E. regarde l'A., lui touche la main et touche l'objet 8 l'E. regarde l'A., lui touche le bras, puis tend la main vers l'Objet

Conclusion

Ce cours nous a conduit de la communication "basale" à la communication intentionnelle. Il nous a permis de mettre en évidence l'importance de l'environnement physique et social

dans l'émergence et le développement des comportements communicatifs, comportements

rendus possibles par le développement de la préhension. En effet, la communication à ce

stade ne peut se concevoir sans être intégrée à l'ensemble du développement de l'enfant. Le développement de la préhension élargit le champ d'exploration possible de l'enfant et

procure de nouveaux moyens de communication. Il est donc primordial de bien connaître le

niveau de développement de l'enfant, afin de lui fournir des stimulations et un environnement stimulant (objets, matériaux). Cependant, il est évident que cet environnement n'est pas

suffisant au développement de la communication. Outre son rôle de médiateur, l'adulte est

un "attribueur" de sens aux comportements de l'enfant, il leur attribue une intention communicative, une fonction. Mais en RM, cette attribution de sens requiert une capacité

d'observation des comportements très développée et surtout une sensibilité à toute

manifestation de la personne handicapée. Vouloir développer la communication chez une

telle personne requiert le désir d'entrer en contact avec ces personnes, de les considérer comme des Etres. Et cela, je ne peux pas vous "l'enseigner".

Dr. Germaine Gremaud 38 Langage et communication – SA 1

Définition: Communication fonctionnelle Pour le devenir: "le langage doit influencer le comportement des autres et produire un effet qui soit approprié et naturel dans un contexte social donné "(p. 161)

Pour Rowland et Schweigert (1993), la communication fonctionnelle comprend trois

caractéristiques:

1. La communication doit se dérouler dans une situation naturelle, quotidienne et de vie réelle,

2. Elle résulte en conséquences réelles; l'acte de communication à un effet sur

l'environnement qui y répond en accord avec l'intention, 3. La communication fonctionnelle inclut la spontanéité (Cf. Continuum de Halle, 1987).

Ces auteurs identifient six catégories de variables environnementales qui peuvent influencer

la probabilité d'apparition d'une communication fonctionnelle: 1. La nature de l'activité

2. L'adéquat du système de communication

3. Le style d'interaction de l'adulte

4. Le matériel 5. La dynamique du groupe

Annexe 1 : Fonctions "communicatives"

1. Requête d'objet : Comportements émis afin d'obtenir un objet généralement hors de portée.

2. Requête d'action : Comportements émis afin qu'une action soit réalisée ou répétée.

3. Requête d'information : Comportements émis dans le but d'obtenir une information.

4. Commentaire sur un objet : Comp. émis pour attirer l'attention d'une personne sur un objet.

5. Commentaire sur une action : Comp. émis pour attirer l'attention d'une personne sur

une action. 6. Attirer l'attention sur soi : Comportements émis pour attirer l'attention d'une personne

sur soi.

7. Réponse : Comportements émis en réponse à une demande d'une personne. 8. Imitation : Gestes et vocalisations imitant spontanément les gestes, voc. ou mots

émis par une personne (imitation immédiate),

9. Protestation : Comp. manifestant une protestation contre les comportements d'une personne.

Dr. Germaine Gremaud 39 Langage et communication – SA 1

Annexe 2: Catégories de comportements et fonctions "communicatives" (tiré de Cirrin, F.M. et Rowland, 1985)

Comportements Fonctions

1. Repousser - éloigner: repousser ou éloigner Protestation

un objet ou une personne

2. Atteindre un objet: essayer d'atteindre un Requête d'objet

objet hors de portée, en tendant les bras en

se penchant.

3. Idiosyncrasie: gestes spécifiques non conven- Protestation

tionnels propre au sujet, tels que battements Requête d'action

des mains, frapper sur la table, etc. Diriger l'attention sur soi

4. Main ouverte: tendre la main vers une person. Requête d'objet paume ouverte dans un geste de recevoir.

5. Contact physique: toucher ou manipuler Requête d'objet

physiquement l'interlocuteur. Requête d'action Diriger l'attention sur soi

6. Tendre un objet: tendre un objet vers une Requête d'objet personne. Requête d'action

Diriger l'attention sur O

7. Signe de la tête: mouvement conventionnel Réponse de la tête pour affirmer ou nier ( oui / non).

8. Pointer: pointer l'index vers un objet, Requête d'objet

un endroit. Requête d'action Diriger l'attention sur un

objet

9. Signe: tout signe manuel ou approximation Réponse de signe. Requête d'info.

Dr. Germaine Gremaud 40 Langage et communication – SA 1

Annexe 3. Tâche de communication (Sugarman, 1984)

Sujet : Age : Date :

Enfant assis à une table. Intéresser l’enfant à un objet, s’engager dans le jeu avec l’enfant et

l’objet momentanément. Soudain, éloigner l’objet, hors d’atteinte par l’enfant, mais dans son

champ visuel. Répéter 5 fois durant le jeu.

Réponse de l’enfant 1 2 3 4 5

SM 3 A orientation diffuse ou pas de réaction ____________ B simple, activité orientée simplement (4 ;5-7mois) ____________

B1 regarde l’adulte seulement ____________

B2 regarde l’objet, essaie de l’atteindre seulement ____________

SM4 C complexe, activité orientée simplement (7.75-10.5)

C1 regarde et est orienté vers l’adulte (gestes) ____________

C2 essaie d’atteindre l’O, le pointe, vocalise en direction de l’objet ____________

C3 regarde et prend la main de l’adulte ____________

SM 5 D orientation de l’activité coordonnée, inadaptée

D1 pointe et essaie d’atteindre l’objet et regarde, ____________

(etc.) l’adulte D2 pointe et essaie d’atteindre l’objet et regarde

(etc.) la main de l’adulte. ____________

SM5 E orientation de l’activité coordonnée, adaptée E1 sollicite l’attention de l’adulte et alors pointe, ____________

essaie d’atteindre l’objet

E2 répétition de D1 ou de E1 ____________ (D et E après 11 ;75 mois)

Noter les vocalisations de l’enfant (adapté de Sugarman, 1984)

Dr. Germaine Gremaud 41 Langage et communication – SA 1

Annexe 4 : Items de l'analyse de l'environnement de la communication

(Rowland et Schweigert, 1993)

A. Activité

1. La personne prend la décision de s'engager dans cette activité

2. Avant de commencer l'activité, la P a eu l'opportunité d'en parler 3. l'A parle à la P de l'activité qui suit avant qu'elle commence

4. La P semble aimer l'activité dans son ensemble

5. Les instructions requises et le format de l'activité ne semblent pas frustrer la P. 6. La P est réceptive pour s'engager dans un certain degré d'interaction à ce moment

7. L'A et la P sont capables de s'engager dans une activité sans distraction prolongée due

à un événement survenant en dehors de l'activité

8. Quand il collecte les données, l'A reste attentif et accessible aux interactions avec la P. 9. La manipulation du matériel utilisé dans l'activité n'interfère pas avec la disponibilité de

l'A à interagir avec la P.

10. L'activité est conduite en conséquence de jour en jour, selon une routine standard 11. Certains aspects de l'activité varient systématiquement de jour en jour à un degré

approprié à chaque P

12. La P prend la décision de terminer l'activité

B. Le système de communication de la P

1. La P a un moyen de communication qui est approprié à ses capacités et qui facilite la communication

2. La P a un moyen pour communiquer au sujet du matériel spécifique ou des actions dans

cette activité 3. La P a un moyen efficace et approprié pour obtenir l'attention dans cette activité en

particulier

4. La P a un moyen efficace et approprié pour indiquer "fini"

5. Si la P a un système aidé, il a accès à toutes les composantes tout le temps 6. La P est positionnée de manière à savoir que l'A est présent

7. L'A et la P sont placés de manière à ce qu'il soit facile pour la P de communiquer avec

l'A

C. Interaction de l'Adulte

1. L'A s'engage parfois dans l'activité comme participant, au lieu de prendre strictement un

rôle directif ou facilitateur

2. L'A semble aimer l'activité

3. Quand l'A organise intentionnellement une opportunité pour communiquer, il laisse habituellement un temps adéquat afin que la P réponde à l'opportunité

4. L'A communique avec la P dans un mode que la P peut comprendre

5. Quand c'est approprié, l'A accepte l'intérêt et le désir de la P pour déterminer le rythme de l'activité

D. Dynamique du groupe

1. Le groupe comprend au moins un pair sans handicap dont la fonction est d'interagir

avec la P

2. Ces pairs ont été entraînés adéquatement pour accomplir les rôles attendus 3. Le groupe comprend au moins un pair qui est un communicateur plus compétent que la

P concernée

4. Toutes les P du groupe peuvent comprendre et utiliser un système commun pour parler de cette activité en particulier

Dr. Germaine Gremaud 42 Langage et communication – SA 1

5. L'A change facilement d'un système de communication à un autre, s'il est nécessaire d'agir ainsi

6. La P a un rôle clairement spécifié dans l'activité en regard des rôles des autres pairs

7. La P change de rôle durant l'activité

8. La P est positionnée de manière à ce qu'elle sache que les pairs sont présents et sont accessibles pour communiquer

9. L'activité est conçue de manière à ce que tous les membres du groupe puissent

participer à un certain niveau qui inclut une interaction, quelle que soit la capacité individuelle d'une personne

10. La taille du groupe ne doit pas être un obstacle à l'interaction communicative pour cette

P. 11. La P: aime interagir avec le partenaire désigné dans cette activité

E. Matériel

1. Le matériel entretient l'interaction et est utilisé interactivement

2. Le matériel a des parties détachables et séparables et la P est requise pour les

demander 3. Le matériel est utilisé pour la prise de tours

4. Le matériel offre naturellement des opportunités pour demander de l'aide

5. La P. semble apprécier ce matériel

6. Le matériel fait appel aux pairs impliqués dans cette activité

F. Opportunités spécifiques à la communication

1. L'A ou le pair offre un choix de matériel, de tâches ou de partenaires qui incite à faire un

choix

2. L'A ou le pair rend occasionnellement un item inaccessible à la P pour inciter une requête

3. ou le pair donne à la P une petite portion du matériel ou un tour bref dans une activité, si

bien que la P doit faire une autre requête

4. L'A sélectionne le matériel afin que la P ait besoin d'aide et qu'elle ait à demander de l'aide

5. L'A ou le pair détourne occasionnellement l'attention ou l'activité jusqu'à ce que la P

essaie d'attirer l'attention 6. L'A ou le pair offre occasionnellement un item non préféré pour inciter une protestation

7. L'A introduit une routine familière qui viole les attentes de la P en introduisant un item

faux ou à la mauvaise place pour inciter des protestations ou des commentaires 8. ou le pair pose des questions oui/non à la P pour confirmer ou nier

9. L'A ou le pair salue la P pour lui faire connaître leur présence avant que l'activité

commence pour inciter une salutation ou une réponse anticipée

10. L'A ou le pair informe la P quand l'activité est terminée ou informe la P quand elle part pour inciter une terminaison ou une réponse de séparation

11. L'A ou le pair commente l'activité et la participation de la P pour élever l'intérêt de la

personne et inciter un commentaire ou une étiquette.

in Rowland, C. et Schweigert, P. (1993) Analysing the Communication Environ- nement to

Increase Functional Communication, Journal of Association for Persons with Severe

Handicaps, 18, 3, 161-176 (Traduit par nous)