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L’accompagnement de formation individualisé en milieu de travail : rôle, stratégies et compétences de formateurs et de formatrices internes Rapport de recherche Projet no 2658-13521 Brigitte Voyer Sylvie Ouellet Anna Maria Zaidman Université du Québec à Montréal (UQAM) 30 août 2016

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L’accompagnement de formation individualisé

en milieu de travail : rôle, stratégies et compétences

de formateurs et de formatrices internes

Rapport de recherche Projet no 2658-13521

Brigitte Voyer Sylvie Ouellet

Anna Maria Zaidman

Université du Québec à Montréal (UQAM) 30 août 2016

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ÉQUIPE DE RECHERCHE Brigitte Voyer, chercheuse principale Sylvie Ouellet, co-chercheuse Anna Maria Zaidman, assistante de recherche Responsable de la rédaction

Brigitte Voyer Collecte et analyse des données

Brigitte Voyer Sylvie Ouellet Anna Maria Zaidman Collaboratrices à la collecte de données documentaires et à la recension des écrits

Aïcha Ait Lhadj Lahcen, assistante de recherche Marie-Laure Togney, assistante de recherche Collaboratrices à la mise en forme

Marie-Pier Gagnon-Claveau, assistante de recherche Sandra Milena Pinzon, assistante de recherche Collaboratrice au secrétariat

Marie-Ève Depelteau Huguette Limoges Liliana Burjuam Cette recherche a été financée dans le cadre du Programme de subvention à la recherche appliquée (PSRA) de la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT) par le Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre (FDRCMO). Projet no 2658-13521.

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REMERCIEMENTS Nous tenons, tout d’abord, à remercier les représentants de la Commission des partenaires du

marché du travail (CPMT) de nous avoir offert la possibilité d’étudier la question de

l’accompagnement de formation individualisé en effectuant cette étude de terrain. Nos

remerciements vont ensuite aux personnes qui ont collaboré avec l’équipe de recherche au

recrutement des participants et, en particulier, à plusieurs représentants de comités sectoriels de

main-d’œuvre pour leur efficacité. Nous sommes également très reconnaissantes aux personnes

responsables des différentes organisations de travail qui ont gracieusement accepté une

participation à cette étude. Enfin, nos sincères remerciements aux formateurs et formatrices qui

ont pris le temps de faire le récit de leur expérience. Grâce à leur générosité, ces personnes nous

ont permis d’évoluer dans notre compréhension de l’accompagnement individualisé. Elles

permettront à d’autres formateurs et formatrices, de bénéficier de leur expérience.

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SOMMAIRE Cette recherche traite de l’accompagnement de formation individualisé, une pratique ancienne de

développement des compétences qui prend, aujourd’hui, différentes formes, comme le mentorat,

le coaching, le parrainage et le compagnonnage. L’accompagnement est abordé comme une

approche qui vise à développer le savoir à travers la communication interpersonnelle, d’une

personne d’expérience avec une personne moins expérimentée. Cette approche procède par la

centration sur l’expérience concrète de travail ou en référence à une situation réelle.

La problématique met en évidence le fait que l’accompagnement de formation individualisé offre

des avantages, notamment le contact direct de l’apprenant avec la situation de travail, mais

qu’elle repose sur des processus de formation d’une grande complexité, ce qui pose des défis

importants, en particulier pour des formateurs internes. Malgré une bonne connaissance de leur

métier ou de leur profession, ceux-ci ne sont généralement pas des spécialistes de la transmission

du savoir. La formation par accompagnement individualisé pose des exigences sur le plan de la

relation à l’autre, compte tenu de la proximité apprenant-formateur ainsi que du caractère

bidirectionnel de la communication. Dans le cadre d’une organisation de travail, les exigences

sont particulières compte tenu des impératifs liés à la qualité du travail, à la productivité et aux

relations de travail.

La présente recherche a pour objectif de décrire des expériences de formateurs internes qui

pratiquent la formation sous le mode de l’accompagnement individualisé. Elle vise à mettre en

relief leur rôle, leurs stratégies de formation ainsi que les difficultés, contraintes et succès

rencontrés dans leur expérience.

L’accompagnement de formation individualisé est étudié à l’aide d’un cadre d’analyse

multidisciplinaire en privilégiant le point de vue du formateur-accompagnateur. Il s’agit d’une

recherche qualitative réalisée à partir d’études de cas. Neuf formateurs-accompagnateurs

internes, de fonctions professionnelles diverses et de secteurs d’activités différents, ont fait le

récit de leur parcours d’emploi et ont raconté leur expérience. La collecte des données a été

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effectuée à l’aide de questionnaires et d’entretiens individuels et réalisée auprès de représentants

de la direction de l’organisation et de formateurs-accompagnateurs.

En guise de résultats, l’étude fournit neuf récits d’expérience, présentés de manière synthétique,

sous une forme narrative. Chaque formateur-accompagnateur décrit, avec des illustrations

concrètes, le parcours d’emploi, le mandat qui lui a été confié, la compréhension de son rôle, les

ressources mises à sa disponibilité, sa manière de pratiquer l’accompagnement. En plus de

montrer les principales phases de la démarche, chaque récit expose également une situation

typique d’accompagnement. Ensuite, la comparaison des cas met en relief plusieurs

caractéristiques communes et différentes relatives aux expériences individuelles révélant ainsi la

diversité des approches d’accompagnement en milieu de travail.

Parmi les principaux constats, il est indiqué que plusieurs formateurs-accompagnateurs en milieu

de travail profitent positivement de ressources de formation offertes par leur employeur et par les

comités sectoriels de main-d’œuvre – formation préparatoire, méthodes, outils et procédures

d’évaluation – et cherchent à développer les compétences en considérant les caractéristiques des

apprenants et les situations de travail. De plus, il est souligné que, malgré son caractère

individualisé, l’accompagnement de formation ne peut être saisi uniquement par la prise en

compte de la relation formateur-apprenant. L’environnement organisationnel et l’environnement

sectoriel participent à la dynamique collective, ce qui influence significativement

l’accompagnement. En outre, l’étude met en évidence que l’action du formateur-accompagnateur

interne demande la maitrise de plusieurs compétences.

Enfin, la recherche dégage plusieurs pistes de réflexions et d’intervention destinées à différentes

catégories d’acteurs : organisations gouvernementales, organisations de travail, personnel de

formation des comités sectoriels de main-d’œuvre, centrales syndicales et organismes de

formation et enfin, formateurs-accompagnateurs.

Mots clés : accompagnement, formation individualisée, situation de travail, formateur,

compétence, environnement, relation, coach

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TABLE DES MATIÈRES

ÉQUIPE DE RECHERCHE ........................................................................................................................ 3

REMERCIEMENTS .................................................................................................................................... 4

SOMMAIRE ................................................................................................................................................ 5

TABLE DES MATIÈRES ........................................................................................................................... 7

LISTE DES TABLEAUX ......................................................................................................................... 10

LISTE DES FIGURES ............................................................................................................................. 12

GLOSSAIRE ............................................................................................................................................. 13

INTRODUCTION .................................................................................................................................... 14

1. PROBLÉMATIQUE ........................................................................................................................ 15 1.1 Ouverture à la diversité des modes de formation ............................................................................... 15 1.2. Accompagnement de formation individualisé : une pratique courante dans les organisations ................................................................................................................................................................................ 16

1.2.1 Place de la communication dans le processus d’accompagnement individualisé .......................... 16 1.2.2 Stratégies et compétences pour pratiquer l’accompagnement de formation individualisé.......... 17 1.2.3 Mieux comprendre le rôle et la pratique des formateurs-accompagnateurs ..................................... 18

2. OBJECTIF GÉNÉRAL ET QUESTIONS DE RECHERCHE .......................................................... 19

3. CADRE DE RÉFÉRENCE : L’ACCOMPAGNEMENT DE FORMATION INDIVIDUALISÉ ... 20 3.1 Apprenant et accompagnateur mis en relation au sein d’une collectivité de travail .................. 21 3.2 Activité de travail : le matériau de base de l’activité ......................................................................... 22 3.3 Stratégies et compétences de du formateur-accompagnateur ......................................................... 23 3.4 Profil individuel, parcours et rôle du formateur-accompagnateur ................................................ 23 3.5 Conditions organisationnelles et sectorielles : les facteurs d’influence ......................................... 24

4. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ........................................................................................ 25 4.1 Population visée par l'étude ..................................................................................................................... 25 4.2 Stratégie d'échantillonnage: choix des participants ........................................................................... 25 4.3 Recrutement des participants .................................................................................................................. 27 4.4 Échantillon ................................................................................................................................................... 27 4.5 Méthodes et outils de collecte des données ........................................................................................... 30 4.6 Analyse des données ................................................................................................................................... 32

4.6.1 Analyse verticale de chacun des cas ............................................................................................................. 32 4.6.2. Analyse horizontale pour comparaison des cas ....................................................................................... 33

5. RÉCITS D’EXPÉRIENCES DE FORMATEURS-ACCOMPAGNATEURS ................................. 33 5.1 Coach et compagnons pour des métiers de la fabrication et de la conception ............................. 34

5.1.1 Sylvain, coach dans une usine de pièces d’avion (cas C) .................................................................. 34 5.1.2 Récit de Justine, compagnon dans le secteur du textile (cas F) ........................................................... 40 5.1.3 Récit de Serge, coach dans le secteur de l’aménagement paysager (cas E) ............................. 49

5.2. Parrains, marraine et coach qui pratiquent dans des services de télécommunications, financiers, communautaire et commerce de détails .................................................................................. 56

5.2.1 Manuel, un jeune coach qui veut modifier les comportements de vente (cas A) ................... 56 5.2.2 Natacha, une coach du secteur financier (cas B) ................................................................................. 63

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5.2.3 Histoire de Claudie, une marraine d’expérience du milieu communautaire (cas G) ............ 70 5.2.4 Récit de Geneviève qui joue le rôle de parrain dans une pharmacie (cas H) .......................... 77

5.3. Coach et mentor pour développer les compétences en formation ................................................. 85 5.3.1 Histoire de Isabelle, une coach de coach du secteur de l’aéronautique (cas D) ..................... 85 5.3.2 Lisa, une mentor qui aide à développer la compétence des enseignantes en santé (cas I) 93

6. CARACTÉRISTIQUES DES EXPÉRIENCES DE FORMATEURS-ACCOMPAGNATEURS . 101 6.1 Parcours professionnels et position actuelle dans l’organisation ................................................. 101 6.2 Profil académique .................................................................................................................................... 102 6.3. Perception individuelle du rôle de formateur-accompagnateur ................................................. 103 6.4 Mode d’attribution du mandat organisationnel et reconnaissance du rôle .................... 105 6.5. Ressources pour soutenir le formateur-accompagnateur .................................................... 105

6.5.1 Préparation au rôle par la formation ..................................................................................................... 106 6.5.2 Expertise du personnel de l’unité responsable de la formation au sein de l’organisation

........................................................................................................................................................................................... 106 6.5.3 Participation des collègues de travail, des clients ou usager à la mise en œuvre ................ 107 6.5.4 Autres types de soutien ............................................................................................................................... 108

6.6 Contraintes organisationnelles et sectorielles........................................................................... 109 6.7 Compétences d’accompagnement : stratégies, actions et outils d’accompagnement .............. 110

6.7.1 Compétence de planification ......................................................................................................................... 111 6.7.2 Compétence technique, professionnelle ou théorique ........................................................................... 113 6.7.3 Compétence opérationnelle ........................................................................................................................... 113 6.7.4 Compétence relationnelle ............................................................................................................................... 115 6.7.5 Compétence de symbolisation ...................................................................................................................... 117 6.7.6 Compétence éthique......................................................................................................................................... 118

7. DISCUSSION ET CONCLUSION .................................................................................................... 120

8. PISTES DE RÉFLEXION ET D’INTERVENTION ....................................................................... 123 8.1 Pistes pour les organisations gouvernementales ..................................................................... 123 8.2 Pistes pour les organisations de travail........................................................................................ 123 8.3 Pistes pour le personnel de formation des comités sectoriels de main-d’œuvre, de centrales syndicales et d’organismes de formation ........................................................................ 124 8.4 Pistes pour les formateurs-accompagnateurs ............................................................................ 125

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES .............................................................................................. 126

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LISTE DES ANNEXES Annexe II Portrait du secteur p. I

Annexe II Portrait de l’organisation et de la formation dans l’organisation

p. II

Annexe III Questionnaire sur le profil du formateur-accompagnateur p. X

Annexe IV Guide d’entretien p. XIII

Annexe V Critères pour la sélection de la formation individualisée particulière

p. XX

Annexe VI Liste de difficultés rencontrées p. XXII

Annexe VII Cadre de référence opérationnel : analyse verticale de chaque cas

p. XXIV

Annexe VIII Série de neuf tableaux portant sur l’organisation, la structuration de la formation et de la formation individualisée – Cas A à Cas I

p. XXXV

Annexe IX Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas A — Manuel

p. LXIII

Annexe X Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas B — Natacha

p. LXVIII

Annexe XI Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas C — Sylvain

p. LXIX

Annexe XII Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas D —Isabelle

p. LXXII

Annexe XIII Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas E —Serge

p. LXXVI

Annexe XIV Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas F —Justine

p. LXXVIII

Annexe XV Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas G — Claudie

p. LXXXII

Annexe XVI Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas H — Geneviève

p. LXXXV

Annexe XVII Synthèse des compétences et des stratégies utilisées Cas I — Lisa

p. LXXXVIII

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau I Échantillon p. 29

Tableau II Collecte de données : les trois phases et leurs objectifs, méthodes et outils

p. 30

Tableau III Formation académique des formateurs-accompagnateurs

p. 103

Tableau IV Motifs ayant contribués à la désignation au rôle de formateur-accompagnateur selon leur perception individuelle

p. 104

Tableau V Participation à une formation sur l’accompagnement de formation individualisé : durée et instance dispensatrice

p. 106

Tableau Va Tendances relatives aux compétences et aux stratégies mises en place par les formateurs-accompagnateurs

p. 111

Tableaux VI à VIII Cas A : Informations sur l’organisation A et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. XXXVII

Tableaux IX à XI Cas B : Informations sur l’organisation B et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. XXXIX

Tableaux XII à XIV Cas C : Informations sur l’organisation C et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. XLII

Tableaux XV à XVII Cas D : Informations sur l’organisation D et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. XIV

Tableaux XVIII à XX Cas E : Informations sur l’organisation E et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. XLVIII

Tableaux XXI à XXIII

Cas F : Informations sur l’organisation F et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. LI

Tableaux XXIV à XXVI

Cas G : Informations sur l’organisation G et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. LIV

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Tableaux XXVII à XXIX

Cas H : Informations sur l’organisation H et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. LVII

Tableaux XXX à XXXII

Cas I : Informations sur l’organisation I et la structuration de la formation et de la formation individualisée

p. IX

Tableau XXXIII Cas A : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXIV

Tableau XXXIV Cas B : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXVII

Tableau XXXV Cas C : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXIX

Tableau XXXVI Cas D : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXXIII

Tableau XXXVII Cas E : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXXVI

Tableau XXXVIII Cas F : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXXIX

Tableau XXXIX Cas G : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXXXIII

Tableau XXXV Cas H : Synthèse des compétences et stratégies utilisées

p. LXXXVI

Tableau XXXVI Cas I : Synthèse des compétences et stratégies

utilisées

p. LXXXIX

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LISTE DES FIGURES Figure 1 Cadre de référence : Accompagnement de formation

individualisé en milieu de travail

P. 21

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GLOSSAIRE Audit interne Procédé d’évaluation réalisé selon des critères de qualité ou de

performance établis par le département de qualité au sein de l’organisation par des experts de la qualité.

Audit externe Procédé d’évaluation réalisé selon des critères de qualité ou de performance définis par un organisme de surveillance externe

Ingénierie de la formation

Ensemble du processus servant à la mise en place d’une formation, ce qui inclus la planification, la réalisation de l’activité, l’évaluation et le suivi

Méthodes de formation

Façon de faire concrète pour réaliser des activités (Legendre, 1993 : 838)

Responsable de formation

Personne ou unité organisationnelle qui détient la responsabilité de planifier et d’organiser des activités de formation

Stratégie générale de formation

Ensemble de méthodes et techniques planifiées par un formateur (Legendre : 1993. 1187).

Stratégie spécifique de formation

Procédé ou mode de communication précis utilisé par un formateur qui vise un apprentissage

Unité de formation Composante de l’organisation vouée entièrement ou partiellement à l’organisation et à la planification des activités de formation

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INTRODUCTION Cette étude s’intéresse à l’accompagnement de formation individualisé en milieu de travail qui est pratiqué par des formateurs internes. Elle a été préparée à la suite d’un appel de proposition portant sur le thème des formateurs internes provenant de la Commission des partenaires du marché du travail du marché du travail (CPMT), lancé au cours de l’année 2012, dans le cadre du Programme de subvention à la recherche appliquée (PSRA). La démarche entreprise par les chercheures au cours de cette étude voulait principalement répondre aux préoccupations des membres de cette commission et aux questionnements posés par les étudiants dans le cadre de l’enseignement universitaire tout en s’intéressant à certaines interrogations soulevées par la recherche scientifique en éducation et formation des adultes. Le but de cette recherche est de décrire des expériences de formateurs internes qui pratiquent la formation sous le mode de l’accompagnement individualisé, en exposant leur rôle, leurs stratégies de formation et en mettant en relief les difficultés, les contraintes et les succès rencontrés dans leur expérience, notamment ceux qui concernent les aspects relationnels. La démarche entreprise s’appuie sur des études issues de différents domaines complémentaires, l’éducation des adultes, la sociologie du travail et la gestion des ressources humaines principalement. L’étude aborde la pratique de la formation individualisée en milieu de travail à travers des études de cas. Celle-ci a été réalisée auprès de neuf formateurs-accompagnateurs internes, c’est-à-dire des employés œuvrant pour une organisation de travail à qui l’on a déjà confié la responsabilité de transmettre des savoirs professionnels à un autre employé de la même organisation. Ces formateurs internes, de métiers et professions différents, travaillent dans une diversité d’organisations. La démarche méthodologique comprenait diverses étapes. Une part de l’étude visait à collecter des données sur l’organisation de travail du formateur-accompagnateur et le secteur d’activités économiques concerné. L’autre part de la démarche a consisté à collecter des données, tout d’abord, auprès de représentants des ressources humaines et, ensuite, auprès des formateurs-accompagnateurs. Ces derniers ont fait le récit de leur parcours d’emploi et ils ont décrit leur expérience de formateur-accompagnateur en racontant également une situation d’accompagnement particulière. Les résultats de recherche présentent neuf récits d’expérience et une analyse comparative des aspects saillants de l’expérience d’accompagnement de formation individualisé. Le rapport se termine avec la formulation de pistes de réflexion et d’intervention destinés à des représentants d'instances gouvernementales et d’organisations de travail, au personnel de formation d’organisations externes et, enfin, aux accompagnateurs-formateurs.

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1. PROBLÉMATIQUE

1.1 Ouverture à la diversité des modes de formation De plus en plus, on demande à la formation en milieu de travail de contribuer au développement stratégique des organisations en assurant l’accroissement des compétences des travailleurs. Grâce aux initiatives du gouvernement du Québec des dernières années, les milieux de travail disposent de plus en plus de ressources pour planifier, organiser et soutenir le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre (CPMT, 2007; LRQ, 2008). Dans un mouvement où s’opère une « nouvelle régulation de la formation continue » (Doray et Bélanger, 2005) et une diversification de la main-d’œuvre (Bernier et al. 2011), les instances publiques et les organismes privés de formation offrent aux organisations de travail des mesures et outils pour mieux encadrer les activités de formation. Dans plusieurs milieux de travail, la formation est une activité récurrente qui est confiée à des formateurs internes. Depuis l’instauration de la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'œuvre en 2007 (et même, avant, lorsqu’elle portait le titre : Loi favorisant le développement de la formation de la main-d’oeuvre), le volume d’activités de formation augmente dans les organisations de travail québécoises (Bernier, 2011 : 40). Sous l’impulsion de la Politique gouvernementale d’éducation des adultes et de formation continue (Québec et MEQ, 2002a) et des mesures mises en place du Plan d’action qui y est associé (Québec et MEQ, 2002b : 14), plusieurs milieux sont encouragés à diversifier la nature et les modes des formations qu’ils organisent. Au Québec, la formation formelle de type standard – celle qui est donnée en « face à face » à un groupe - est loin de constituer le modèle exclusif pour développer les compétences de la main-d’œuvre. Aujourd’hui, il est connu que les modes informels s’avèrent pertinents et efficaces pour assurer le développement des compétences professionnelles (Barette, 2008; Wenger, 2005; Billet, 2002, 2009 ; Eraut, 2004, 2008 ; Kram, 1988; Haggard et al, 2010). Nombre d’organisations de travail privilégient l’accompagnement individualisé pour développer les compétences de leurs employés (Bélanger, Larivière et 2004 ; Bélanger et Robitaille. 2008). Portées par un mouvement d’ouverture à la diversité des voies de formation (MEQ, 2002), ces organisations confient à des employés expérimentés la responsabilité de former leurs pairs, sous des modes personnalisés et plus concrets, en vue de transmettre les savoirs professionnels. Selon les secteurs, métiers ou professions, on désigne les approches individualisées de formation sous diverses appellations : coaching, tutorat, mentorat, compagnonnage, formation sur le tas, entrainement à la tache notamment. En dépit de la variabilité des termes et de l’imprécision sémantique autour des pratiques de l’accompagnement individualisé – abondamment souligné dans les écrits de nature scientifique – (Frétigné et Trollat, 2009; Éraut, 2008; Fenwick, 2008), ces modes de formation ont beaucoup en commun. Celles-ci visent un transfert du savoir qui s’opère à travers la communication interpersonnelle, d’une personne généralement d’expérience vers une personne moins expérimentée, par la centration sur l’expérience concrète de travail ou sur la situation réelle.

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1.2. Accompagnement de formation individualisé : une pratique courante dans les organisations Bien que l’accompagnement individualisé s’avère une pratique de développement des compétences très ancienne (Forestier, 2002), cette approche a considérablement gagné en popularité au cours de la dernière décennie dans ses formes actuelles (Forestier, 2002 ; Houde 2010). En effet, au Québec, aux États-Unis et ailleurs, de nombreuses associations de coaching ou de mentorat ont vu le jour. Souvent, ces associations, telles Mentorat Québec ou la Fédération internationale des coachs font la promotion de cette forme de transmission et elles vantent son efficacité pour le développement des compétences ainsi que son caractère humain. Le Ministère de l’Emploi et de la solidarité sociale semble y voir également des effets bénéfiques puisqu’il propose le Programme d'apprentissage en milieu de travail aux entreprises, en le présentant comme l’un des moyens efficaces de développer la productivité. Emploi-Québec valorise des pratiques de formation individualisée qui s’y apparentent, comme le parrainage, le coaching, le compagnonnage, etc. Dans le cadre du Programme d'apprentissage en milieu de travail, plusieurs comités sectoriels de main-d’oeuvre1 ont effectivement développé, au cours des dernières années, des programmes, des mesures et des outils de formation. Un examen de l’offre de formation des 29 comités sectoriels de main-d’œuvre nous révèle que 22 d’entre eux proposent des formations ou des programmes de formation individualisée pour développer les compétences des employés et des chercheurs d’emploi, dont le compagnonnage qui s’avère particulièrement populaire. Dans les champs d’études de la gestion, de l’éducation et formation des adultes et de l’ergonomie, diverses formes d’accompagnement individualisé ont été étudiées : le mentorat (Currier, 2001, 2003a, 2003b, 2007 ; Houde, 2010; Guay et Lirette, 2003); le coaching (Pillard, 2002) et le compagnonnage (Balleux, 2002; Ouellet, 2009; Cloutier et al. 2002). Avant le tournant des années 2000, d’autres travaux théoriques se sont intéressés à l’apprentissage par l’action (Barbier, 1996), l’apprentissage par l’expérience (Mezirow, 1978) ou l’apprrentissage des situations (Pastré, 1999). Depuis, ces notions ont continué à être étudiées (Mezirow, 2000, 2001 ; Pastre, 2005) et une partie de cette littérature scientifique s’y intéresse à partir de la notion d’apprentissage situé (Barette, 2008) ou d’apprentissage informel (Marzick et Watkins, 2001). Un certain nombre de ces études envisagent la formation à partir de conceptions valorisant les pratiques souples de développement de savoir (Hager, 2004; Fenwick, 2008)

1.2.1 Place de la communication dans le processus d’accompagnement individualisé En outre, plusieurs études sur le mentorat et le coaching décrivent les caractéristiques de l’accompagnement individualisé : elles soulignent le caractère central de l’interactivité et la communication dans la mise en œuvre de le développement du savoir professionnel (Currier, 2001, 2003, 2007 ; Houde, 2010; Pillard, 2002; Huay et Lirette, 2003; Balleux, 2002). D’autres

1 Au Québec, les comités sectoriels de main-d’œuvre sont des organismes sectoriels – au nombre de 29 au Québec - sont des organismes autonomes qui ont été formalisés dans le cadre de la Politique d’intervention sectorielle. « Leur rôle est de définir les besoins en développement de la main-d’œuvre de leur secteur d’activité économique et de soutenir le développement des compétences de celle-ci» (CPMT, 2015 : 1; CPMT, 2008).

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chercheurs mettent en relief le caractère central de « l’apprentissage par autrui » (Hardy, 2006), de la « médiation » (Britt-Mari, 2004) et de la « participation » (Billet, 2002, 2009). D’autres encore expliquent que la personne expérimentée agit comme médiateur « entre le savoir » et la « personne qui apprend » dans un parcours d’apprentissage jamais véritablement tracé d’avance (Pillard, 2002). On comprend alors que le formateur interne qui pratique l’accompagnement individualisé à des fins de formation a tout intérêt à comprendre les compétences de base de la communication, tels que l’écoute active, l’authenticité ou la suspension du jugement, lesquelles sont beaucoup mobilisées en formation. Or, il faut reconnaitre que les milieux de travail ne sont pas des lieux où chacun maitrisent ce type de compétences. Ceux-ci ne sont pas non plus des espaces aussi « libres » que le sont les écoles de formation (Voyer, 2011). Les formateurs internes ont intérêt à bien considérer les enjeux propres aux organisations de travail et non pas uniquement les caractéristiques individuelles des apprenants. Effectivement, l’organisation de travail n’est ni une école, ni un « espace protégé » au sein duquel l’apprenant peut se tromper, faire des erreurs sous le regard d’un formateur-accompagnateur empathique, sans trop de risques (Bourgeois et Nizet, 2005). L’apprenant n’est pas, non plus, toujours en mesure d’exprimer librement, pendant qu’il apprend, sa pensée personnelle au sujet de son travail. De plus, rarement les formateurs sont complètement dédiés à leur projet, ou libérés de leurs propres responsabilités professionnelles lorsqu’ils forment. La mission première d’un milieu de travail est plutôt centrée sur la production de bien et de services qui fonctionne avec de nombreuses contraintes : impératif de production, limite de temps, enjeux identitaires, lutte de pouvoir, etc. (Osty et al, 2007). Même si l’environnement de travail est le lieu qui féconde le savoir à développer, il présente de nombreux défis au formateur. Selon Maxwell (2011), plus que les formateurs externes, les formateurs internes évoluent dans un réseau relationnel complexe. Ceux-ci doivent composer avec des pressions exercées par les services des ressources humaines et des unités de production. Malgré le caractère individualisé, le formateur agit sous l’influence des autres (Eby, 2007, Kram, 1988) et il vit souvent des pressions de nature « politique ».

1.2.2 Stratégies et compétences pour pratiquer l’accompagnement de formation individualisé Maintenant, l’intérêt grandissant de l’accompagnement individualisé en milieu de travail, nous incite à considérer cette forme de formation dans un cadre didactique (agent/sujet/objet). Cette perspective revêt d’autres enjeux singuliers. En effet, l’action du formateur interne qui œuvre en accompagnement individualisé consiste à se concentrer à la fois sur la tâche de travail (et aussi objet de savoir à acquérir), sur la personne qui en assure la production et sur le cheminement nécessaire pour assurer le « dévoilement progressif » d’une tâche du travail (Balleux, 2002). Contrairement à la formation de groupe, le matériau de base dont se servent le formateur et le travailleur, dans un rapport individualisé, est précisément l’activité de travail (ou le travail à réaliser, l’action dans le travail). Ce matériau n’est, ni plus ni moins, la véritable « matière » avec laquelle et, à partir de laquelle, le formateur et l’apprenant travailleront dans le processus d’acquisition des savoirs et développement de la compétence. C’est là « l’apprentissage situé », généré par le « contexte » (Lave, 1992). Selon les situations, le formateur peut opérer en contact direct avec la tâche. Dans ce cas de figure, le processus de formation s’effectue au cours même de l’accomplissement de ce travail (en simultané). Mais, le contact du formateur avec la matière peut également se faire en différé, c’est-à-dire avant ou après l’accomplissement du travail. Avec

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le mentorat professionnel, par exemple, l’apprentissage se développe à travers la verbalisation et la discussion avant ou après la réalisation du travail (Aumont et Mesnier, 2005). Des études identifient différents types de formateurs internes qui pratiquent l’accompagnement individualisé (Ladyshewsky, 2010, Maxwell, 2011), elles montrent que la formation individualisée ne s’effectue pas dans les mêmes perspectives. Des pratiques s’inscrivant dans des approches centrées sur la personne, d’autres sont plus proches du comportementalisme et d’autres sont centrées sur des solutions pratiques précises notamment. Le succès du formateur accompagnateur repose alors sur son aptitude à mobiliser convenablement des stratégies de communication interpersonnelle et à assumer pleinement son rôle d’accompagnement. Or, nous avons observé que des formateurs les mobilisent avec difficulté : trop grande proximité (parfois physique) de la relation dyadique ; difficulté à corriger un collègue plus âgé et à s’engager réciproquement dans la relation (Billet, 2002) ; difficulté à exprimer les savoirs tacites (Ouellet, 2009 Daniellou et Garrigou, 1995 ; Teiger, 1996;) ; timidité ressentie à former un collègue sous le regard des autres ; difficulté à hiérarchiser les contenus à transmettre de manière spontanée et à les présenter en séquence (Billet, 2002); résistance à partager ses propres connaissances par crainte de perdre son poste au profit du formé ; incapacité à motiver un apprenant résistant à l’apprentissage ; résistance à participer à l’évaluation d’un pair et difficulté à départager « évaluation de la progression des apprentissages » et « évaluation de rendement », etc. C’est à travers l’acte de communication, par des nombreuses interactions de nature verbale, visuelle, auditive, gestuelle, que le formateur peut dévoiler, expliciter la tâche de travail à accomplir et transmettre son savoir. L’accompagnement individualisé s’inscrit dans une relation dyadique. Le savoir professionnel s’élabore à travers une communication personnalisée qui se singularise par son caractère de proximité (Houde, 2010). Or, de l’avis de plusieurs, la relation de formation est toujours inégalitaire compte tenu du pouvoir conféré au formateur qui connait la tâche de travail (Kalbfleisch, 2007). D’ailleurs, des études identifient des dysfonctions relationnelles qui entravent l’apprentissage, le sabotage, la dépendance, l’insuffisance de la délégation, par exemples (Scandura, 1998; Eby, 2007). Au sujet des stratégies de formation, Balleux (2002) en identifie plusieurs en les associant à quatre compétences essentielles : la compétence technique, la compétence opérationnelle, la connaissance du métier et de sa culture (nommée « compétence de symbolisation ») et la compétence relationnelle. Tout comme Billett (2002, 2009) et Hardy (2006), celui-ci insiste sur l’importance pour le formateur de développer la « présence à l’autre » et la « sensibilité à autrui ». Si le formateur accompagnateur permet au travailleur une « participation étendue » aux activités de travail, il favorise de manière optimale le développement des compétences des employés.

1.2.3 Mieux comprendre le rôle et la pratique des formateurs-accompagnateurs Même si nombre d’études ont beaucoup documenté les aspects de la « relation » ou de la « communication » de l’accompagnement de formation individualisé, nous concevons tout comme Eby (2007) que des observations doivent être encore nuancées. Plusieurs écrits offrent

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des prescriptions pratiques aux professionnels de la formation sans associer précisément les opérations de nature plus relationnelles, cognitives ou affectives sous-jacentes au processus de formation (Ammiar et Kokneck, 2012 ; Guay et Lirette, 2003 ; Giffard, 2003 ; Higi-Lang et Gellmam, 2002). D’autres écrits ne permettent pas suffisamment aux formateurs de solutionner concrètement les embuches rencontrées dans leur pratique quotidienne, ni d’anticiper clairement les défis de l’individualisation, ni non plus de s’identifier au rôle qui leur est confié par leur organisation. Il est requis également de poser un regard critique à l’égard de l’accompagnement, notamment pour se prémunir des « risques de psychologisation » de la pratique professionnelle (Salman, 2008) et d’une tendance à la normalisation des comportements sociaux (Gori et Le Coz, 2007). Ceci est important surtout si l’on souhaite que la formation individualisée en milieu de travail soit pratiquée convenablement sur le plan déontologique (Québec, 2014). Cette étude s’intéresse au rôle de formateurs internes qui pratiquent, ou qui ont déjà pratiqué, l’accompagnement individualisé auprès de leurs pairs, dans une perspective de développement des compétences professionnelles. La popularité des différentes formes d’accompagnement individualisé dans les organisations de travail québécoises et l’intérêt manifesté dans les milieux incitent à penser qu’elles se développeront encore davantage dans les années à venir. Si l’accompagnement individualisé offre des avantages (ex : contact direct avec la situation) et des bienfaits (ex : personnalisation des rapports de travail), et qu’il est souvent valorisé, il n’en demeure pas moins que cette approche repose sur des processus d’apprentissage d’une grande complexité, ce qui pose des défis de taille pour les formateurs internes. Or, les formateurs internes à qui l’on confie la responsabilité de former leurs pairs sont d’abord et avant tout, la plupart du temps, des experts de leur métier ou de leur profession. Pour accomplir cette responsabilité, liée à des impératifs organisationnels stratégiques, ces formateurs ont besoin d’éclairages précis et d’indications pratiques pour acquérir cette compétence de développement de savoir. Il y a donc un besoin de documenter les expériences vécues par les formateurs internes qui pratiquent l’accompagnement individualisé d’où notre intérêt à mener a à ce projet de recherche 2. OBJECTIF GÉNÉRAL ET QUESTIONS DE RECHERCHE En réponse à l’appel de proposition du Programme de subvention de recherche appliquée (PSRA) portant sur le thème des formateurs et formatrices internes en entreprise, nous avons établi un objectif général et des questions directrices. Globalement, cette recherche vise, à décrire des expériences de formateurs internes, à partir de leurs récits, qui pratiquent la formation sous le mode de l’accompagnement individualisé, en exposant leur rôle, leurs stratégies de formation et en mettant en relief les difficultés, contraintes et succès rencontrés dans leur expérience. Elle vise également à souligner, les difficultés, contraintes et élément de succès, notamment ceux qui concernent les aspects relationnels. Plus spécifiquement, les questions suivantes ont servi de guides à notre investigation:

Qu’est-ce qui caractérisent le rôle et les pratiques de formateurs internes qui font de la formation sous le mode de l’accompagnement individualisé ? Y a t-il des profils et trajectoires typiques qui influencent la prise en charge de ce rôle dans l’organisation de travail ? Comment ces formateurs ont-ils été sélectionnés ? Comment ont-ils été initiés à

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cette fonction d’accompagnement ? Quel était le profil professionnel de ces accompagnateurs dans l’organisation, leur expérience antérieure de la formation, etc.

Quelles sont les stratégies générales et spécifiques utilisées par des formateurs qui

pratiquent sous le mode de l’accompagnement individualisé pour les situations de travail ? Comment opèrent-ils ? Disposent-ils d’outils ou de ressources particuliers ? Quel mode d’organisation adopte-t-il pour accomplir leur mandat ?

Quels sont les difficultés, contraintes et succès rencontrés par les formateurs internes à qui

l’organisation a confié la tâche d’accompagnement ? Comment ces contraintes et succès se manifestent-ils dans la gestion individuelle du rôle d’accompagnateur ?

3. CADRE DE RÉFÉRENCE : L’ACCOMPAGNEMENT DE FORMATION

INDIVIDUALISÉ

Pour guider l’analyse, un cadre de référence théorique a été élaboré. Ce cadre de référence, de type descriptif, permet de situer les principaux éléments qui contribuent à l’accompagnement individualisé de formation en milieu de travail. D’entrée de jeu, précisons que, sur le plan étymologique, le terme « accompagnement » renvoie à l’idée du « mouvement », celui d’une personne qui se joint à une autre pour « aller où il va » (Legendre, 2005). L’accompagnement se réfère ainsi à l’idée d’une association de deux personnes qui progressent dans une direction commune. Dans le contexte de cette étude, les deux acteurs, sont liés par une intention commune et partagée de formation. Si dans certains contextes, l’accompagnement peut être plus ou moins formel, dans le cadre de cette étude, il s’inscrit dans un projet formel, l’accompagnateur agissant à la suite d’un mandat qui lui a été confié. Ainsi, la personne qui fait de l’accompagnement individualisé intervient dans le but d’aider une autre personne à maitriser une tâche ou une fonction de travail, à connaitre son métier ou à se développer professionnellement. Le formateur accompagnateur est une personne expérimentée, souvent considérée experte dans son domaine. À la page suivante, la figure 1 présente le cadre de référence que nous avons élaboré en nous inspirant de diverses recherches. Il met en relief sept dimensions et leurs relations que nous avons mises en caractère gras dans la figure.

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Figure 1- Accompagnement de formation individualisé en milieu de travail

3.1 Apprenant et accompagnateur mis en relation au sein d’une collectivité de travail Au centre de la figure, se trouvent tout d’abord les deux acteurs principaux, le formateur- accompagnateur et l’apprenant, qui sont mis en présence de manière à développer une relation. Le formateur accompagnateur est défini comme une personne expérimentée qui aide, guide et soutient un autre employé moins expérimenté (Harris et al, 2000, Billet, 2003) en vue de lui permettre d’apprendre. Rappelons qu’il s’agit d’un formateur interne, c’est-à-dire une personne qui travaille pour le compte de la même organisation de travail que la personne formée. L’accompagnement individualisé vise l’apprentissage de l’apprenant, l’autre acteur clef du projet de formation qui lui est spécialement destiné. Ses caractéristiques sociodémographiques et académiques (sexe, âge, scolarité, etc.), les caractéristiques de sa situation professionnelle (poste occupé, fonctions, etc.), ce qui comprend ses conditions de travail, telles que sa charge de travail et ou climat de travail au sein duquel il exerce (Billet, 2002, 2003), peuvent influencer sa relation avec le formateur accompagnateur et son rapport à l’activité de travail. Comme l’apprenant est le premier destinataire de la formation, il tient une place au centre de la figure, une place aussi importante que celle du formateur accompagnateur. Cependant d’un point de vue strictement analytique, et compte tenu de l’objectif général de l’étude, l’attention sera portée sur le formateur accompagnateur et sur sa relation avec l’apprenant.

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Comme cela est indiqué dans plusieurs études théoriques sur l’accompagnement individualisé (Balleux, 2002, 2002; Billet, 2002 ; Currier, 2001; Frétigné et Trollat, 2009; Haggard et al. 2004; Kram, 1988; Ouellet et Vézina, 2008; Trollat et Masson, 2009), le projet de formation se développe à travers la relation établie entre le formateur accompagnateur et son apprenant. Pour illustrer l’importance accordée à cette dimension, autre dimension essentielle par les sept dimensions étudiées, la figure identifie la notion de relation par une flèche avec des traits pointillés. Plusieurs éléments font varier la qualité de leur relation. Dans le cadre d’une formation interne, il est fréquent que les partenaires aient déjà établies une relation avant le début du projet de formation puisqu’ils sont aussi des collègues de travail. De même, la nature et la qualité des interactions entre les deux acteurs (ex : expression d’authenticité, ajustement à l’autre) ainsi que leur capacité à établir un climat de confiance peuvent colorer positivement la relation et influencer le succès de la formation. Nous nous penchons sur quelques caractéristiques de la relation pour indiquer si elles sont contraignantes, empreintes de succès ou de difficultés. En milieu de travail, l’accompagnement de formation, même s’il est individualisé, se développe rarement à travers une relation totalement exclusive entre un formateur et un apprenant. Le formateur-accompagnateur interne pratique souvent en présence d’autres employés (Bachkirova et Jacson, 2011 : Ragins et Kram, 2007 ; Ladyshewky, 2010). De plus, celui-ci peut avoir déjà accompagné plusieurs personnes au cours d’une même période ou avoir déjà eu, dans le passé, d’autres expériences de formation plus ou moins significatives avec ses collègues, ce qui peut influencer l’expérience présente. Alors, il est nécessaire de saisir l’expérience que le formateur accompagnateur a acquise avec d’autres apprenants de la même organisation.

3.2 Activité de travail : le matériau de base de l’activité Une autre des particularités de l’accompagnement de formation individualisé en milieu de travail est sa centration sur l’activité de travail, une autre des dimensions de notre cadre. À l’instar de la définition donnée en ergonomie, l’activité désigne ce que fait le travailleur pour réaliser la tâche qui lui est demandée, c’est-à-dire ses gestes, ses modes opératoires, ses stratégies, etc. (St-Vincent et al. 2011). Cette dimension est aussi centrale que la dimension « relation », elle est donc mise en relief par une ligne pointillée sur le schéma du cadre de référence présentée à la figure 1. En effet, un projet d’accompagnement se concentre à la fois sur l’activité mise en œuvre concrètement - qui dans le cadre d’une formation devient l’objet d’apprentissage à acquérir – et à la fois sur la personne qui la produit/réalise. Avec l’apprenant, le formateur se centre sur l’activité, cheminant ensemble pour assurer le « dévoilement progressif » d’une activité éventuellement bien effectuée (Balleux, 2002). En effet, à la différence de la formation standard (en « face à face », en magistral, devant un groupe), le matériau de base dont se servent le formateur et le travailleur, dans leur rapport individualisé, est précisément l’activité de travail (ou le travail à réaliser, l’action dans le travail). Ce matériau n’est, ni plus ni moins, la véritable « matière » avec laquelle et, à partir de laquelle, le formateur et l’apprenant travailleront dans le processus de développement de savoirs ou compétence. Selon les situations de travail, le formateur peut opérer en contact direct avec l’activité. Dans ce cas de figure, le processus de formation s’effectue au cours même de l’accomplissement du travail (en simultané). Mais, le contact du formateur avec la matière peut également se faire en différé, c’est-à-dire avant ou après l’accomplissement du travail. Avec le mentorat professionnel, par exemple, l’apprentissage se développe à travers la verbalisation et la discussion avant ou après la réalisation du travail (Aumont et Mesnier, 2005). Dans les deux cas, l’activité de travail devient un « apprentissage

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situé » généré par le « contexte » (Lave, 1992). Bref, l’activité de travail – dans l’action et par l’action - est à la fois l’objet d’apprentissage et sa mise en œuvre.

3.3 Stratégies et compétences de du formateur-accompagnateur Le formateur accompagnateur qui souhaite aider un collègue à apprendre tend à structurer ses interactions : pour cela, il utilise différentes stratégies – avec des techniques et des outils qu’il juge les plus appropriés - pour assurer un changement auprès de l’apprenant (Rettinger, 2011). Tout comme le font plusieurs modèles théoriques, notre cadre de référence permet d’identifier des stratégies singulières à l’accompagnement individualisé tels que la démonstration ou la correction de l’erreur. Il peut s’agir de « stratégies générales » employées par l’accompagnateur, c’est-à dire les approches privilégiées qui comprennent « un ensemble des méthodes utilisées par le formateur » (Legendre, 2005) telle que démonstration, la rétroaction ou l’imitation. Le cadre peut déceler des « stratégies spécifiques » c’est-à-dire des actions fines et concrètes qui sont employées, de manière planifiée ou spontanée, lorsque le formateur accompagnateur communique son savoir à son apprenant. Mais, comme l’étude vise principalement à décrire l’expérience de formateurs accompagnateurs, l’analyse cherche à saisir l’utilisation des stratégies, des actions et des outils et qui traduisent les compétences du formateur-accompagnateur comme l’a fait Balleux (2002). Les stratégies et les compétences composent donc une autre dimension analytique qui est identifiée par une flèche dans le schéma. En effet, des stratégies de formation individualisées particulières peuvent être associées à certaines compétences. Balleux en identifie quatre, l’une relève de la « compétence technique » qui concerne la capacité à exposer et à faire preuve de sa connaissance du métier. Une autre, la « compétence opérationnelle », permet au formateur de démontrer avec méthode sa manière de produire. La « compétence de symbolisation » qui révèle son aptitude à donner sens à son métier et à exposer les valeurs et les idéaux qui s’y rattachent alors que la « compétence relationnelle » assure l’établissement d’un lien de collaboration authentique avec l’apprenant. Pour développer davantage ce qu’expose Balleux au sujet de du respect des normes de pratiques par le formateur, nous prenons soin de situer, la compétence éthique qui renvoie également au respect de la confidentialité et à la prudence des interventions dans la formation individualisée (Dupouey, 1998). Dans les milieux de travail, la prolifération de normes et de règles de pratiques impose aux formateurs une attention plus soutenue à certaines règles de précaution. Comme le cadre de référence est ouvert, il permet d’identifier d’autres stratégies de formation qui renvoient à d’autres compétences, telle la compétence de planification qui n’est pas fréquemment indiqué dans les écrits sur la formation individualisée.

3.4 Profil individuel, parcours et rôle du formateur-accompagnateur Notre analyse prend soin d’examiner si les compétences du formateur-accompagnateur font écho à une expérience individuelle particulière. Nous établirons s’ils sont des novices ou des professionnels d’expérience (Donnay et Charlier, 2008) et si leur parcours professionnel et leur profil académique portent des traits singuliers du formateur accompagnateur. Par exemple, nous verrons s’ils ont déjà été formés spécifiquement pour exercer ce rôle, s’ils visent à le légitimer auprès d’autrui en utilisant des moyens qui participent à construire la reconnaissance socioprofessionnelle (Lane, Steler and Roston, 2011 ; Voyer et Ollivier, 2002). Dans un contexte

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où l’accompagnement de formation individualisé gagne en popularité (Trollat et Masson, 2009), il y a une prolifération des moyens pour assurer la crédibilité du formateur (formation, regroupement, certification) et une tendance à professionnaliser cette fonction (Lane, Steler and Roston, 2011 ; Rettinger, 2011). Alors, il s’agit de voir jusqu’à quel point les formateurs accompagnateurs ont eu accès tout le long de leur parcours professionnel et académique à des moyens permettant de les aider à jouer leur rôle d’accompagnement. Il s’agit d’examiner également comment ils interprètent le rôle qui leur a été confié par leur organisation et de voir s’ils sont sensibles aux questions de la définition et de la reconnaissance professionnelle de leur pratique, comme le sont d’autres formateurs (Bierema, 2010; Knox et Fleming, 2010, Laot, 2005, 2006) et s’ils ont tendance se questionner au sujet de leur rôle (Jeris, Rose et Smith, 2005). De plus, nous examinons la dimension du formateur-accompagnateur pour identifier également les motifs organisationnels qui ont contribué à mandater cette personne pour exercer ce rôle. Puisque notre analyse porte un intérêt au parcours, au rôle et aux caractéristiques du formateur-accompagnateur ainsi que pour les compétences et les stratégies mobilisées, ces angles sont identifiés, au sein de la figure 1, par des flèches dirigées vers le formateur accompagnateur.

3.5 Conditions organisationnelles et sectorielles : les facteurs d’influence Enfin, puisque les situations d’accompagnement individualisé étudiées relèvent de mandats organisationnels et concernent des personnes qui œuvrent pour le même établissement, nous prenons en compte l’influence des conditions organisationnelles et sectorielles. Il s’agit d’une autre dimension de notre cadre de référence. Le milieu de travail est un espace relationnel complexe qui influence à la fois le développement de l’identité professionnelle et la perception de son rôle du formateur (Dubar, 2000 ; Osty et al, 2007). La dimension « organisation » englobe complètement le formateur et l’apprenant car ceux-ci ne développent pas leur relation de manière isolée. Tous deux sont en relation avec d’autres collègues et acteurs (Billet, 2002 ; 2009 ; Balleux, 2002, Hardy, 2006) qui influencent la relation tout autant que les stratégies de l’accompagnateur. Il y a lieu d’identifier ces acteurs pour voir leur influence dans l’accompagnement individualisé. L’intérêt porté aux conditions organisationnelles et sectorielles incite à considérer également des facteurs physiques, techniques, professionnels et matériels qui influencent l’accompagnement de formation. Ceux-ci émanent principalement de la dimension « organisation ». Sans indiquer ici tous ces facteurs, signalons, par exemple, que l’accompagnement de formation peut concerner une activité de travail effectuée avec de la machinerie lourde, avec du matériel de pointe ou encore dans des conditions auditives ou sensorielles particulières. Ceci influence nécessairement le travail de l’accompagnateur. Dans le même ordre d’idées, notre cadre de référence permet d’envisager, comme autre exemple, comment la présence syndicale dans l’organisation ou encore le leadership du personnel de direction peut influencer la pratique d’accompagnement de formation (Harris, Simons et Bone, 2000). Bien entendu, les conditions organisationnelles ne sont pas sans lien avec le secteur d’activité économique. Le contexte, les règles et les normes qui prévalent dans chaque secteur influencent la dynamique organisationnelle (Bélanger et Robitaille, 2008 ; Bernier, 2011). Il s’agit donc de saisir comment les conditions organisationnelles et sectorielles influencent également les autres dimensions de l’accompagnement de formation individualisée.

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4. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

Afin de répondre à l’objectif de recherche, nous avons procédé à l’étude de cas de situations de formation individualisée vécues par des formateurs internes. L’étude d’un nombre limité de cas convient bien à la description de portraits et de pratiques professionnelles, surtout lorsque les chercheurs visent la connaissance approfondie d’une situation (Hamel, 2000 ; Roy, 2009 ; Van der Maren, 2014). En plus de spécifier la population visée, cette section indique la stratégie d'échantillonnage et décrit l’échantillon, les méthodes et les outils de collecte des données ainsi que l’analyse privilégiée.

4.1 Population visée par l'étude La population visée par l’étude est constituée de formateurs accompagnateurs, c’est-à-dire des employés œuvrant pour une organisation de travail à qui l’on a déjà confié la responsabilité de transmettre des savoirs professionnels à un autre employé de la même organisation. Il s’agit de formateurs internes, au sens où ces personnes pratiquent des activités de formation pour le compte de l’organisation de travail qui les embauche. Ceux-ci forment leurs pairs sous le mode de l’accompagnement de formation individualisée, qui est désignée sous l’une ou l’autre des appellations suivantes: coaching, mentorat, compagnonnage ou parrainage. Ce type de formation peut être exercé de manière exclusive dans leur fonction de travail, elle peut aussi être partiellement cumulée à d'autres responsabilités de travail au sein d’une fonction non spécifiquement dédiée à la formation. L’étude s’intéresse à des formateurs expérimentés, c’est-à-dire des personnes pour qui l’accompagnement de formation individualisée n’est pas une pratique nouvelle. En plus de vouloir rendre compte de la variété des situations individuelles, la mixité de la population est également recherchée pour ce qui est des professions, des métiers ou des fonctions de travail d’origine, mais également en regard de l’âge et du sexe des formateurs. En outre, les formateurs accompagnateurs visés exercent dans une diversité d’organisations et de secteurs d’activités économiques, dont certains sont en forte croissance et d’autres en progression moyenne (Québec et Direction de l’analyse et de l’information sur le marché du travail, 2011). De plus, des formateurs évoluent en milieu syndiqué et d’autres dans des organisations non-syndiquées, dans de grandes, moyennes et petites entreprises, à Montréal et à l’extérieur.

4.2 Stratégie d'échantillonnage: choix des participants Au début de notre étude, il avait été établi que 12 cas seraient étudiés. Compte tenu des objectifs de l’étude, le nombre de 12 cas a été jugé suffisant au départ pour répondre aux objectifs de l’étude et au contexte de la demande de recherche. Cependant, pour divers motifs qui sont exposés à la section 3.3, nous avons réduit le nombre de cas à neuf lors de la phase de recrutement. Chaque cas étudié correspond à l’expérience d’une personne pratiquant l’accompagnement de formation individualisé. Chaque cas a été choisi, par choix raisonné, pour constituer un

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échantillon de neuf « cas multi-sites ». En effet, chaque expérience de formation individualisée devait se situer dans des organisations de travail différentes. Pour choisir les cas à l’étude, la stratégie d’échantillonnage s’est développée en considérant deux catégories de critères : d’une part, les critères individuels et, d’autre part, les critères organisationnels et sectoriels. En effet, l’ensemble des cas devait répondre à des critères individuels portant sur l’expérience de formation. Chaque formateur accompagnateur devait :

être à l’embauche d’une organisation, soit à titre d’employé, de professionnel ou de cadre

avoir déjà été formellement mandaté par une organisation pour former une autre personne de la même organisation sous le mode individualisé

avoir déjà réalisé au moins trois expériences (ou projets) de formation individualisée d’une durée significative pour le compte de cette organisation. Chaque expérience de formation devait avoir été menée auprès de personnes différentes

avoir réalisé sa dernière expérience de formation individualisée depuis moins d’un an

Considérant la difficulté à bien circonscrire la fonction de formateur et sa dénomination (Laot, 2005, 2006 ; Bierema, 2010 ; Voyer et Ollivier, 2002) ainsi qu'à désigner la nature même de l’activité de formation, d’autres critères précis ont été ajoutés :

la personne retenue peut avoir réalisé, ou non, la formation individualisée dans le cadre d’un programme de formation

le participant(e) peut ou non avoir déjà suivi au préalable une formation portant sur le

mode individualisé (mentorat, coaching, etc.)

le participant(e) peut porter officiellement ou non un titre professionnel associé à sa fonction (formateur) ou à son mandat (mentor, coach, compagnon, parrain, etc.)

L’autre catégorie de critères concernait les aspects organisationnels et sectoriels ainsi que des éléments permettant de diversifier notre échantillon. Voulant un échantillon « diversifié » et « raisonné », il avait été convenu que chacun des cas devait être choisi, au fur et à mesure, après la vérification de la conformité de chacun des cas avec les critères de sélection individuels et uniquement à la suite de l’acceptation formelle de participation du responsable de l’organisation. La diversité recherchée concernait non seulement des aspects individuels, sociodémographiques et professionnels, mais également ceux reliés au secteur d’activité, au type d’organisation, à sa taille ainsi que la dénomination utilisée par l’organisation pour désigner le formation individualisée exercée (ex : coaching versus mentorat). Concrètement, ceci signifie, par exemple, que c’est uniquement après avoir sélectionné le premier cas d’un coach à l’emploi d’une grande usine du secteur de l’aéronautique, que nous pouvions préciser les critères pour la sélection d’un deuxième cas et s’assurer de varier l’une ou l’autre des caractéristiques recherchées (ex : un

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compagnon d’une petite entreprise du secteur des services). En d’autres termes, chaque nouveau cas recruté l’a été en fonction des caractéristiques des cas précédemment retenus.

4.3 Recrutement des participants Les participants à la recherche ont été recrutés à l’aide de diverses sources : des représentants de comités sectoriels de main-d’œuvre, des diplômés de programmes d’études pour formateurs en milieu de travail ainsi que des membres d’associations de formateurs, de coachs ou de mentors. Pour certains cas, l’équipe a sollicité directement la participation d’organisations de travail en utilisant ses propres contacts professionnels. Dans d’autres cas, le recrutement s’est réalisé par l’entremise de représentants qui ont diffusé un communiqué sur leur site web interne ou en identifiant des personnes qui répondaient aux critères établis. Compte tenu de la complexité de l’échantillon visé, le recrutement s’est déroulé sur une période étendue et il a nécessité un nombre important de sollicitations directes et indirectes. La difficulté du recrutement a été si importante que nous avons dû réviser, premièrement, le critère de sélection lié aux secteurs visés et, deuxièmement, le nombre de cas ciblés. En définitive, le recrutement a débuté en octobre 2013 et il s’est terminé en novembre 2014. Après avoir identifié une personne ou une organisation intéressée à participer à l’étude, nous avons informé la personne responsable (direction des ressources humaines ou autre, selon les cas) des objectifs de la recherche, du déroulement de l’étude ainsi que ainsi que des engagements pris par l’équipe de recherche en matière d’éthique. Celle-ci était informée que l’étude concernait directement le formateur accompagnateur, mais qu’elle requérait la participation d’un représentant de l’organisation pour une partie de la collecte de données.

4.4 Échantillon Tel qu’indiqué au tableau I présenté à la page suivante, l'échantillon est constitué de neuf cas de formateurs-accompagnateurs (cas A à I) : six femmes et trois hommes, dont l’âge varie entre 29 et 62 ans. Ceux-ci occupent des fonctions professionnelles diverses. Parmi les neuf participants, trois sont des employés syndiqués et six sont non-syndiqués. Toutefois, les employés de la majorité des organisations de travail sont syndiqués. En effet, des neuf entreprises participantes, cinq sont syndiquées alors que quatre ne le sont pas. Un certain nombre de participants travaille dans le secteur des services (3) et de la fabrication manufacturière (3) tandis qu’un autre groupe pratique dans d’autres secteurs : commerce de détail (1), communautaire (1) et éducatif (1). Plus spécifiquement, ces formateurs œuvrent dans les sous-secteurs suivants : télécommunications, finances, aéronautique, horticulture, textile, défense des droits, produits pharmaceutiques et formation professionnelle. Parmi ces organisations, trois sont des grandes entreprises de 500 employés et plus, deux autres sont de taille moyenne (100 à 499 employés), alors que les autres sont de petite taille. Précisons que trois des participants de notre étude (cas B, G, et I) sont à l’embauche d’organisations de travail de petite ou de moyenne taille. Or, dans les faits, ces organisations sont des succursales ou des unités d’organisations de travail rattachées à une organisation de grande taille (1000 employés et plus).

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Enfin, les entreprises participantes sont établies dans les régions suivantes : Montréal (3), Montérégie (2), Laurentides, Lanaudière, Estrie et Laval.

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Tableau I: Échantillon2

Code du

participant

Terme utilisé pour désigner

le type d’accompagnement

Titre professionnel du formateur-

accompagnateur

Présence syndicale: oui (O) ou

non (N)

Formateur syndiqué: oui (O) ou

non (N)

Sexe Âge Secteur et sous-secteurs

Taille et nombre

d’employés3

A Coaching Spécialiste ventes et développement de la formation

N N H 29 ans

Services

Télécom.

Grande* + de 500

B Coaching Conseillère en ressources humaines

O N F 46 ans

Services Finances

Moyenne* 181

C Coaching Technicien en matériau /Chef de groupe

O O H 39 ans

Fabrication

Aéronautique

Grande + de 500

D Coaching Formatrice technique O N F 42 ans

Fabrication et entretien

Aéronautique

Grande* + de 500

E Coaching Président directeur général

N N H 47 ans

Services

Horticulture

Petite - de 50

F Compagnonnage Opératrice de machine à jet d’air

O O F 59 ans

Fabrication Textile

Moyenne 144

G Parrainage Responsable du financement, promotion et médias

N N F 62 ans

Communautaire

Défense des droits

Petite -de 50

H Parrainage

Chef technicienne N N F 44 ans

Commerce de détail

P. pharmaceutiques Petite*

50

I Mentorat Conseillère pédagogique O O F 57 ans

Éducation Formation prof.

Grande* 104

2 Des informations sur la taille de l’organisation ou sur le titre professionnel sont volontairement omises ou imprécises pour préserver l’anonymat. 3 Taille indiquée selon les critères établis par Industrie Canada : une « micro-entreprise » possède entre 1 et 4 employés, une « petite » entreprise, entre 5 et 99 employés, une « moyenne » entre 100 et 499 employés et une « grande » entreprise (grande) est composée de 500 employés et plus. * Ici, le nombre d’employés concerne l’établissement où travaille le participant : celui-ci est rattaché à un réseau ou une entière de plus grande taille.

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4.5 Méthodes et outils de collecte des données Les données de l’enquête ont été collectées, cas par cas, selon une procédure comprenant trois principales phases. Au total, 12 personnes ont participé à la collecte des données (Cas A à I) dont neufs formateurs accompagnateurs et trois autres personnes représentantes de l’organisation. Deux de ces trois personnes ont un poste de travail relié au département des ressources humaines et l’un est un dirigeant d’une petite entreprise. Ces trois personnes disposaient donc de l’information demandée ou elles y avaient accès facilement et étaient aptes à la transmettre directement.

Tableau II : Collecte de données : les trois phases et leurs objectifs, méthodes et outils

Phase 1 Phase 2 Phase 3

Ob

ject

if

Décrire les caractéristiques du contexte et du fonctionnement du secteur d'activité

Obtenir des informations factuelles sur l'organisation de travail

Recueillir des informations sur l’expérience du formateur accompagnateur

Mét

hod

es

Collecte de données documentaires

Collecte de données documentaires

Entrevues téléphoniques individuelles

Questionnaire sur le parcours académique et professionnel

Entretien individuel sur le cheminement et l'expérience professionnels

Entretien sur « incident critique »

Ou

tils

Matrice de données Questionnaire – questions ouvertes et fermées

Questionnaire sur le profil du formateur-accompagnateur

Guide d'entretien

Liste de difficultés rencontrées

La première phase a consisté à collecter des données qualitatives et quantitatives pour comprendre le contexte et le fonctionnement général du secteur d’activité auquel appartient l’organisation d’appartenance du formateur. Comme l’indique le tableau II, ces informations proviennent de la documentation disponible sur les sites des comités sectoriels de main-d’œuvre (rapport annuel, portrait sectoriel, etc.), d’associations ou d’ordres professionnels; nous les avons

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collectées de manière systématique à l’aide d’une matrice de données sur le secteur intitulé « Portait du secteur » (voir Annexe I). Dans une deuxième phase, des informations factuelles ont été recueillies sur l’organisation de travail. Elles ont été collectées par une recherche sur le site web (données secondaires) et par entrevue individuelle effectuée auprès d’un représentant de l’organisation ; la plupart du temps, il s’agissait de la direction des ressources humaines. L’entrevue téléphonique individuelle, d’une durée d’environ 1 heure, a été effectuée à l’aide d’un questionnaire/matrice intitulé « Portrait de l’organisation et de la formation dans l’organisation » (voir annexe II). L’entrevue a été enregistrée sous format audio. Dans certains cas, des données documentaires complémentaires ont été fournies par le représentant de l’organisation. Les données ont été résumées et condensées dans la matrice. À partir de la troisième phase, toutes les opérations de la collecte de données ont visé le formateur accompagnateur. Tout d’abord, chaque formateur a rempli un bref questionnaire comprenant des questions ouvertes et des questions fermées qui visaient à saisir les données de base sur son profil académique et professionnel. Il était demandé de remplir seul ce questionnaire intitulé « Questionnaire sur le profil du formateur-accompagnateur » et de l’expédier par courriel avant le moment de l’entretien individuel (voir annexe III). Par la suite, nous avons procédé à un entretien individuel, en personne, avec le formateur accompagnateur au cours duquel il décrivait son cheminement professionnel et son expérience de formation en accompagnement individualisé. Les chercheures ont utilisé un « guide d’entretien » qui se trouve en annexe IV. D’une durée de 90 à 150 minutes, selon les cas, cet entretien se déroulait en milieu de travail (7 cas) ou au bureau de recherche (2 cas) selon la préférence du participant. Les entretiens ont été enregistrés en mode audio et retranscrits intégralement. Dans certains cas, des participants ont fourni des guides ou des outils de formation utilisés par eux lors de leur expérience d’accompagnement pour illustrer leur propos. Pour terminer, la collecte de données consistait à interroger les participants sur une situation d’accompagnement particulière. Dans cet entretien visant l’étude d’un « incident critique », il s’agissait pour chaque participant de décrire une situation réelle, typique, concrète et bien circonscrite dans le temps (Pourtois et Demers, 2007) de formation individualisée sous le mode du récit de pratique dans une perspective d’explicitation qui consiste, notamment, à se centrer sur le « comment » (Desgagné, 2005 ; Sanséau, 2005; Vermesrsh, 2004). Celle-ci a été produite à l’aide du guide d’entretien. Le choix des incidents critiques a été établi conjointement par la personne participante et la chercheure en tenant compte de critères précis (annexe V). Précisons que certains entretiens ont été réalisés par la chercheure et d’autre par l’assistante de recherche. La description de la situation particulière durait de 30 minutes à 40 minutes selon les cas. Dans la plupart des cas (7/9), le participant exposait cette situation dans une deuxième phase de l’entretien initial. Dans deux cas, un entretien supplémentaire a été réalisé. Pour terminer notre enquête, il a été demandé aux formateurs de cocher une « liste de difficultés rencontrées » : celle-ci est présentée en annexe VI ». Précisons que, dans quelques cas (3 cas), de courtes entrevues complémentaires (15 minutes à 45 minutes) ont été effectuées quelques mois après le premier entretien, dans une première phase d’analyse, pour préciser des aspects de l’expérience qui avaient été décrits de manière trop superficielle.

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4.6 Analyse des données L’objectif principal de l’étude, les objectifs spécifiques et le cadre de référence ont servi de guide pour notre analyse. Toutes les données ont été analysées à partir d'un cadre opérationnel qui a été élaboré à partir des sept dimensions du cadre théorique lesquelles, rappelons-le, se déclinent comme ce qui suit :

Dimension 1 : Profil, parcours d’emploi et rôle du formateur-accompagnateur

Dimension 2 : Caractéristiques de l’apprenant selon les représentations du formateur- accompagnateur

Dimension 3 : Caractéristiques d’autres apprenants déjà formés selon les représentations du formateur-accompagnateur

Dimension 4 : Activité de travail comme objet ou processus d’apprentissage

Dimension 5 : Compétences du formateur-accompagnateur : actions, stratégies et moyens

Dimension 6 : Relation, transaction et communication avec l’apprenant

Dimension 7 : Conditions physiques, matérielles, organisationnelles, professionnelles et sectorielles

Pour chacune des dimensions, nous avons prévu plusieurs sous-dimensions associées. Au total, les sous-dimensions sont au nombre de 45. Pour chaque sous-dimension, l’équipe avait prévu des indices opérationnels détaillés qui servent à guider l’analyse. Ainsi, nous avons élaboré un cadre de référence opérationnel comportant l’ensemble des dimensions (7), des sous-dimensions (45) et de nombreux indices opérationnels. Le cadre opérationnel se trouve à l’annexe VI. Pour donner une idée du mode d’utilisation que nous en avons fait, nous pouvons préciser, par exemple, que nous examinons les caractéristiques de l’apprenant (dimension 2), notamment, en nous intéressant à ses conditions de travail (D.2.3), et en focalisant l’attention plus particulièrement sur la satisfaction individuelle à l’égard de la charge de travail (un indice), sur le caractère pénible, gratifiant ou monotone de l’activité (un autre) et sur l’appréciation du climat de travail (entraide, solidarité) (autre indice) car ces aspects peuvent influencer l’accompagnement de formation.

4.6.1 Analyse verticale de chacun des cas Chaque entretien retranscrit a tout d’abord été codé manuellement à l’aide des indices du cadre opérationnel, ce qui signifie l’attribution d’un numéro de code (numéro et thème) à des segments de l’entrevue. Par la suite, les entretiens ont été condensés de manière à restreindre le contenu aux thématiques du cadre dans un format réduit d’une douzaine de pages. Dans ce premier travail de condensation, les chercheurs voient à respecter la trame individuelle du récit d’expérience (Burrick, 2010). Cette condensation des données a été effectuée par des relectures et des réductions successives par la chercheure principale. Par la suite, il y a eu incorporation des

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données du questionnaire sur le profil du formateur-accompagnateur et, par la suite, des données sur l’organisation et celles sur le secteur. Ces dernières données ont servi à préciser et à approfondir des éléments des éléments du récit : ils se référaient aux sous-dimensions du cadre de référence. L’analyse des données est effectuée dans une perspective restitutive et illustrative, ce qui consiste à rapporter l’essentiel de l’expérience individuelle (Dubar et Demazière, 2004) de chaque formateur-accompagnateur. Dans un but d’assurer la fiabilité, à la suite de l’incorporation des données, tous les récits condensés ont été relus et examinés par l’assistante de recherche ou par la cochercheure.

4.6.2. Analyse horizontale pour comparaison des cas Au fur et à mesure de l’analyse verticale, les chercheures ont repéré les éléments semblables et les éléments différents liés à chacune des dimensions et des sous-dimensions du cadre de référence opérationnel. Compte tenu du caractère ouvert de notre cadre, nous avons également retenu des sous-dimensions nouvelles qui ont surgit de l’enquête. Une fois chacune des analyses de cas verticales terminées, nous avons systématisé la comparaison des cas. Pour cela, nous avons effectué des extractions de données de manière plus précise et nous les avons classées, catégorisées et résumées. Nous avons donc sélectionné certains éléments à comparer, ceux qui répondaient le plus directement à nos questions de recherche. En vue d’assurer la fiabilité de l’analyse horizontale, la première analyse effectuée par la chercheure principale, à été relue et a été examinée par la cochercheure et par l’assistante de recherche. Cette deuxième lecture a permis des ajustements sur certains points précis de l’analyse et de l’interprétation.

5. RÉCITS D’EXPÉRIENCES DE FORMATEURS-ACCOMPAGNATEURS Avant de présenter nos premiers résultats de recherche, rappelons tout d’abord que notre étude vise à décrire des expériences de formateurs, à partir de leurs récits, qui pratiquent la formation sous le mode de l’accompagnement individualisé, en exposant leur rôle, leurs stratégies de formation et en mettant en relief les difficultés, contraintes et succès rencontrés dans leur expérience. Elle veut également souligner, les difficultés, contraintes et succès rencontrés. Cette première section de la partie consacrée aux résultats présente neufs récits d’expériences de formateurs-accompagnateurs. Nous les présentons en tenant compte des caractéristiques liées aux fonctions de travail exercées dans l’activité de travail et aux compétences visées dans leur pratique d’accompagnement. Ainsi, les neufs récits ont été regroupés en trois catégories. La première sous-section (5.1) s’intéresse aux récits de trois formateurs-accompagnateurs qui ont des fonctions d’opérateurs de machinerie et des tâches de conception lesquelles comportent une forte composante technique. La deuxième section (5.2) met de l’avant quatre récits de personnes dont le métier ou la profession sont liés à des activités de services et de conseils. Ces récits témoignent d’expériences très différentes dans des secteurs d’activités où les clients ou les usagers occupent une place centrale dans l’activité de travail. Quant au deux derniers récits (section 5.3), ils traitent d’expériences consacrées à la formation de formateurs, expériences qui ont beaucoup en commun même si leurs univers professionnels diffèrent, l’une d’entre elles se déroulant en milieu manufacturier et l’autre en éducation.

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Spécifions que chaque récit est présenté sous la forme narrative. Le formateur-accompagnateur décrit et explicite son expérience, en expliquant son parcours d’emploi, les motifs de sa désignation comme accompagnateur, la perception de son rôle, etc., pour ensuite, expliquer comment il procède pour former ses collègues. Chaque description est suivie d’une histoire qui illustre, concrètement, une situation vécue récemment avec un apprenant.

5.1 Coach et compagnons pour des métiers de la fabrication et de la conception Parmi les formateurs accompagnateurs, certains travaillent à des activités où les machines, les opérations et les outils ont une grande importance. Leurs récits portent une attention singulière aux gestes, à leur position physique, à leur espace de travail : il s’agit de ceux de Sylvain4 et de Justine qui œuvrent en milieu manufacturier, puis celui de Serge, issu du domaine de l’horticulture.

5.1.1 Sylvain, coach dans une usine de pièces d’avion (cas C)

Depuis près de 20 ans, Sylvain travaille pour une multinationale du secteur de l’aéronautique, spécialisée dans la fabrication d’avions et de pièces d’avion 5 . Ce technicien en matériaux composites de 43 ans est le plus jeune de son département mais le plus expérimenté dans la spécialisation du composite. Malgré son rayonnement à l’international, cette grande entreprise syndiquée connait, depuis quelques années, une évolution fluctuante des demandes de production. Globalement, le volume de la main-d'œuvre composée de techniciens, d’ingénieurs et autres employés spécialisés est à la baisse. Alors que l’entreprise prend résolument le virage technologique et se démarque par ses activités en recherche et développement, les défis sont grands pour cette organisation dont la main-d’œuvre est vieillissante. Au fil des années, influencées par la technologie, les procédés et les tâches de travail ont énormément évolué. Dans son récit, Sylvain raconte comment il en est arrivé à collaborer avec l’unité responsable de la formation – une équipe avec des pratiques très structurées – et à pratiquer le coaching dans un esprit d’innovation.

* * * J'ai commencé à travailler à 16 ans pendant mes études collégiales. J'ai fait plusieurs « jobs », dont commis dans une pharmacie pendant quelques années. À 21 ans, toujours pendant mes études collégiales en technique de fabrication aéronautique, j’ai débuté ici dans cette entreprise. Je travaillais à mi-temps comme technicien. J’ai facilement obtenu ma probation car je montrais une attitude positive et le goût du travail. J’ai évolué très rapidement en obtenant des postes de travail de plus en plus complexes. Comme j’apprenais vite, on me confiait de nouvelles tâches. Dès ma première année, mon contremaitre me demandait de montrer des choses aux autres employés. C’est un peu comme ça que j’ai commencé à travailler sur le nouveau robot.

4 Tous les prénoms mentionnés dans ce rapport sont fictifs. 5 Les tableaux XII, XIII et XIV, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation.

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Aujourd’hui, je participe à différents procédés robotisés6 très performants pour le laminage, le moulage, le traitement des moules, etc. ce qui sert à la fabrication de pièces d’avion. Contrairement à ce qui se passe dans les autres départements où tout le monde travaille sur un pied d'égalité, ici il y a un poste de « chef d'équipe ». L’obtention de ce poste a été une véritable évolution pour moi. Je suis devenu chef d'équipe et coach

Mon expérience de coach est directement reliée au projet de recherche-développement de fabrication robotisée mené par mon entreprise. Il faut savoir qu’à un moment, les procédés robotisés développés par des fabricants externes évoluaient rapidement et se complexifiaient. Grâce à de nouvelles inventions, nous pouvions développer et adapter la robotisation à notre propre produit. Durant cette période, j’ai été sélectionné par mon contremaitre pour suivre une formation offerte par une entreprise qui fabrique l’ensemble des robots à travers le monde. Il s’agissait, non pas d’une formation externe classique, mais d’une activité très approfondie et très perfectionnée qui consistait à expérimenter et à développer la nouvelle technologie pour l’adapter à notre propre contexte. Cette entreprise a donc participé à la recherche-développement avec nous. Ainsi, j’ai passé trois jours aux États-Unis pour certains aspects et ensuite, cinq semaines en Europe pour la formation pratique. Il faut savoir que mon entreprise a investi des millions de dollars pour assurer l’expérimentation à laquelle j’ai contribué pendant plusieurs mois avec quelques techniciens. Comme nous ne suffisions pas à la tâche, il a été décidé de former des opérateurs à l’interne sous forme de coaching. En effet, à un moment, le projet de fabrication de cet avion imposait la participation de plusieurs personnes : il fallait augmenter la cadence, arrimer les opérations et les différents projets. Or, certains employés n’avaient pas le même rythme et d’autres ne comprenaient pas bien le travail. Comme j’avais une vision claire de l’ensemble du travail, mon contremaitre m’a demandé si je voulais devenir coach. Il n’y a pas eu de sélection officielle, mon « boss » a sélectionné ceux qui avaient le potentiel pour montrer leurs connaissances et assurer le transfert. Évidemment, j’ai été choisi ! Cela s’imposait puisque l’entreprise avait beaucoup investi en moi lors de ma formation d'opérateur robot. Contrairement à des employés qui ont beaucoup de difficultés à travailler, je maitrise parfaitement les procédés autant manuels que robotisés. C’est la principale raison pour laquelle on m’a offert de devenir coach. Mais, mes supérieurs m’ont aussi offert le coaching à cause de mes habiletés techniques, de ma connaissance du département et de mon intérêt pour le développement. Souvent les employés qui ont beaucoup d’ancienneté dans une entreprise, perdent de l’intérêt au travail. Moi, j’ai du leadership et le sens de l’initiative. Je vois et j’anticipe facilement les problèmes à résoudre. Je cherche aussi les solutions et j’ai toujours tendance à aider les autres. En fait, j’ai une vision large de mon travail. Ainsi, au début de 2011, j’ai suivi une formation sur le « coaching à la tâche » donnée par une firme externe. D’une durée de deux jours, cette formation réunissait les apprenants-coachs de mon département : elle traitait de la théorie et de la pratique. Dans le volet pratique, nous

6 La fabrication est en partie robotisée et en partie manuelle. Le technicien doit apprendre à manipuler le

robot, à compléter manuellement la fabrication et à s’assurer de la qualité de la pièce fabriquée.

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faisions des mises en situation. Par la suite, nous apprenions à devenir un bon coach « sur le tas » tout simplement. Avant de débuter le coaching proprement dit avec les opérateurs à l’interne, j’ai travaillé la même année avec le personnel des ressources humaines pour développer un programme de formation et pour rédiger les guides de formation. J’ai donc collaboré à la conception de la formation. Comme il s’agissait de nouveaux procédés de fabrication et de nouveaux produits, il fallait décrire toutes les étapes de fabrication - qui étaient encore en évolution - de manière à concevoir des modules de formation. Au total, nous avons rédigé neuf guides de formation. Nous les avons produits en nous basant sur ce que nous avions nous-mêmes appris avec l’équipe américaine. Nous nous sommes référés également à d’autres éléments puisés « à droite et à gauche ». Pour s’adapter à notre contexte, nous avons nous-mêmes décidé de l’ordre de présentation des contenus. Avant de débuter ma première expérience de coaching, je n’avais jamais donné de formation en classe, ni fait de présentation devant un groupe. Cependant, j’avais souvent montré le travail à un autre, sous forme de « one to one ». Effectivement, on s’est toujours beaucoup référé à moi pour les jobs les plus compliqués, pour aider les autres ou pour résoudre des problèmes. On disait : « Hey, peux-tu venir m’expliquer? » Même si nous ne nommions pas cela du coaching, je leur montrais comment faire : « regarde, prends-toi comme ça, ça va aller mieux ». Je leur donnais mes trucs. Ainsi, c’est principalement en utilisant ma propre expérience d’opérateur que j’ai commencé à coacher. Je dois dire qu’il n’y a pas de règles prescrites pour le coaching – en dehors des règles de production - pas de code de conduite, ni de code d’éthique qui détermine la relation entre le coach et l’apprenant. Bien sûr, il y a l’entente de coaching et une durée de formation déterminée à l’avance : puis, après, j’y vais comme je le pense! Avant d’expliquer comment je procède pour coacher mes collègues, je dois spécifier que mon département est complètement voué à ce modèle d’avion et qu’il m’offre des conditions de coaching très facilitantes. Tout d’abord, lorsque je coache, je ne suis pas moi-même affecté à la production. Ceci signifie que mon temps est entièrement consacré au coaching sans obligation de production, ni évaluation de mon niveau de production, comme c’est le cas habituellement dans ma tâche de travail régulière. Ensuite, l’entreprise s’adapte aux demandes que je peux faire durant le coaching. Lorsque nous avons besoin de ressources supplémentaires - outils, personnel, nouveaux délais ou allongement de la période de coaching - elle répond généralement à nos demandes. Parfois, elle refuse aussi. Comme je connais très bien mon travail et que j’ai une bonne vue d’ensemble, je trouve les bons arguments pour les convaincre. Nous sommes imaginatifs : nous savons présenter les choses ou encore trouver d’autres moyens pour arriver à nos fins !

Le processus du coaching commence avec la décision d’ouvrir un poste de travail d’opérateur robot et la sélection de la personne à former. Comme nous sommes en milieu syndiqué, mon « boss » doit afficher le poste. Selon la règle, les employés les plus anciens ont accès à ce poste. La sélection du candidat se fait selon un processus rigoureux avec affichage, entrevue, etc. En tant que coach, je ne fais pas partie du comité de sélection. Cependant, je suis informé des discussions et je peux donner mon avis avant le choix définitif. Comme j’informe les opérateurs de l’ouverture du poste, j’influence le processus en amont. Bien entendu, c’est le contremaitre qui a le dernier mot. Une fois la personne sélectionnée, nous allons signer l’entente de coaching.

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Toutes les conditions y sont décrites, ce qui simplifie notre relation. À ce moment, la responsable de la formation est présente. Elle explique l’ensemble du fonctionnement en précisant, par exemple, que le coaching dure 2 mois et que nous serons libérés de notre travail respectif pour assurer l’apprentissage. D’ailleurs, tout le long de la formation, la responsable s’assure que le contremaitre respecte cette entente. Le coaching se déroule selon différents volets : nous commençons avec les informations de santé et sécurité. Après, nous y allons avec le fonctionnement du département (cellule). Par la suite, nous voyons l’opération du robot. Un autre volet porte sur la réparation du robot et bien sûr, la qualité de la production. Le coaching commence avec l’utilisation des guides de formation. Je remets le premier guide à l’apprenant et nous allons faire un premier survol ensemble. Je commence avec la base et ce qui est le plus important : la santé et sécurité au travail ! Il faut savoir qu’un robot peut tuer une personne! Puis après, nous allons nous adapter au fonctionnement du département et de la tête de robot. Je vais montrer les différentes parties du robot, les parties physiques, les déplacements, le déplacement de la tête en mode manuel, puis le lancement du programme en mode automatique. Tout cela, je le fais en suivant mon guide écrit, page par page. Autrement, nous risquons de discuter d’autres choses et de dévier. Chacun de nous – coach et coaché - a son guide. Pendant que j’explique, il prend des notes, comme je lui dis de faire. Il faut aussi lui montrer des modes de fonctionnement alternatifs. Dans cette étape du fonctionnement du robot, j’explique vraiment de A à Z en suivant de près les guides de formation. Je vais suivre le guide d’un bout à l’autre pour être certain de ne rien échapper. Pendant ce temps, l’opérateur est assez silencieux : il écoute et il prend des notes. Alors, pour éviter la monotonie, nous arrêtons la lecture du guide de temps en temps, pour « toucher la machine ». Tranquillement, je vais l’amener à déplacer le robot. Je lui montre les axes de déplacement. Tout cela se fait avec l’ordinateur : je montre comment faire en utilisant la souris. Le coaché apprend tranquillement à manipuler le robot : je le laisse un peu s’amuser. C’est important de pouvoir pratiquer un peu. Lorsque j’ai moi-même appris, il y avait une tendance trop théorique. Pour la partie manuelle, c’est différent. Je vais utiliser le matériel qui est disponible. Cette partie manuelle, c’est moins de l’inconnu pour les coachés, alors ils interagissent plus. Ils peuvent confronter un peu leurs points de vue avec moi. Pendant que je forme, certains opérateurs posent beaucoup de questions. Ils disent très souvent : « j’ai une question! J’ai une question! » Pour d’autres, c’est clair. Ils n’ont pas de questions. Comme les coachés sont différents : alors, je m’adapte à eux. En général, j’explique quelque chose au début et je lui montre après. En effet, après une explication, je laisse l’opérateur essayer par lui-même tout en le « surveillant ». Tranquillement, je lui donne plus de liberté. Souvent, pour lui expliquer une tâche bien en détail, j’improvise un exercice. Par exemple, je vais simuler une inspection de qualité. Pour cela, je vais créer des défauts ou des pièges en modifiant une pièce et je vais lui demander : « bon, trouve-moi les défauts là-dedans et dis-moi ce qu’il faudrait réparer ». Vraiment, j’improvise, car je prends ce que j’ai sous la main. Avant d’exposer comment se termine un coaching, j’aimerais préciser que tout le long du coaching, je suis seul avec la personne. Nous sommes dans ce que nous appelons « la cellule », un espace physique d’environ 10 m par 2 m. C’est une grande pièce dans laquelle il y a le robot et un grand rail sur lequel se déplace le robot. Personne ne peut entrer lorsque le robot est en

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opération. La formation se tient aussi à l’extérieur de la cellule, un espace au sein duquel les contrôleurs sont installés : on y trouve des armoires et toute la partie informatique, ce qui comprend l’écran. La plupart du temps, mon coaché et moi sommes assis l’un à côté de l’autre même si, parfois, je me déplace pour lui montrer quelque chose. Avant la fin de la formation, il est nécessaire de valider que la personne maitrise bien certaines tâches spécifiques. On appelle cela : la « validation des tâches ». Le contremaitre doit vérifier si chaque tâche est bien maitrisée.

La fin du coaching : une évaluation en groupe

À la fin, je participe à l’évaluation. En fait, je ne suis pas seul à le faire. Nous allons déterminer l’évaluation en équipe, ce qui inclue la responsable de la formation, le superviseur et la personne formée. Nous lui demandons tout d’abord, si elle se sent prête à être évaluée ou si elle a besoin de plus de coaching. Nous utilisons une grille d’évaluation basée sur un système de notation qui vise à augmenter la polyvalence. Ainsi, nous classons les personnes sur une échelle de 0 à 4 : 0 signifie que l’employé est nouveau et n’a aucune connaissance du travail, 1 correspond à la situation de la personne qui a commencé à travailler sans être encore autonome et qui a besoin d’un suivi. Le chiffre 2 est la cote de l’employé qui est autonome et apte à effectuer les tâches par elle-même. Enfin, la cote 4 est attribuée à la personne qui est capable de faire du coaching.

Illustration : un coaching réussi avec René, un opérateur d’expérience En 2011, René a été choisi pour occuper un nouveau poste d’opérateur de robot. Il devait occuper le poste de nuit, ce qui exige une autonomie complète, l’opérateur n’ayant le support d’aucune autre personne. Compte tenu de cette situation, la période de coaching devait durer 2 mois.

Âgé de 50 ans, René avait environ 20 ans d’expérience dans le composite notamment. Même s’il avait plus d’ancienneté que moi, nous étions au même niveau hiérarchique. Malgré son expérience, il n’avait aucune connaissance de ce robot. C’est un homme très sympathique, très drôle et apprécié de tous. Il était très heureux de ce nouveau poste : il avait le goût d’apprendre et cherchait de la nouveauté au travail. Dans un milieu industriel comme le nôtre, les employés ont beaucoup d’insatisfaction à l’égard de leur travail. Le fait d’avoir la possibilité de travailler avec le robot, c’était valorisant pour René. Dès le début, cela a été facile de créer un lien avec lui. Avant de débuter, je le connaissais un tout petit peu. Je dois dire que René avait exigé que je sois son coach. Il ne voulait pas être formé par l’autre coach pour des raisons d’affinités. Avec le processus du coaching, nous avons discuté ensemble et nous nous sommes raconté nos vies. À force de parler de nos enfants et nos familles, nous avons créé des liens. Au tout début du coaching, nous nous asseyons ensemble à une table avec le guide de formation, assis donc l’un à côté de l’autre. Nous suivions vraiment, page par page, pour éviter de s’éparpiller et pour ne rien oublier. Nous commençons avec la partie théorique, un peu comme je l’ai moi-même appris avec l’entreprise qui a inventé la tête du robot. Nous apprenions tout d’abord les composantes du robot et puis celle de l’espace physique. Nous apprenions à le manipuler. Nous ouvrions une partie de la tête, en examinant des petites composantes, etc. Je lui

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disais de regarder là, de toucher, je le laissais s’exercer, etc. Pour chaque composante, nous regardions cela sur le plan théorique. Par la suite, je me déplaçais pour lui montrer physiquement. Pour chaque composante, j’alternais : « partie théorique, partie pratique, partie théorique, partie pratique ». Jamais plus de 30 minutes pour la théorie ! Autrement, cela devient trop lourd. Même si nous suivions le guide, nous ne restions pas constamment assis à notre table : nous nous déplacions constamment. Je lui montrais une composante une première fois, puis nous la regardions ensemble. Pour certaines parties, je devais lui « montrer le chemin à suivre » de façon très détaillée : nous commencions avec un bouton, puis avec l’autre. Je lui montrais comment faire des manipulations dans le bon ordre. Puis, je le laissais s’exercer. Je me disais : « il doit apprendre à réfléchir par lui-même. C’est important de lui laisser de la liberté ». Je le faisais réfléchir tout haut, devant moi il m’expliquait comment il raisonnait pour ses décisions. Il fallait aussi le rassurer. Par exemple, je lui disais : « Je te laisse aller : réfléchis bien ». Puis, il me demandait : « Si je clique là, est-ce que c’est correct? » Je lui disais : « oui, oui, essaye-le, car de toute façon, si ce n’est pas bien grave, le robot va te le dire ». Je dois admettre que René n’est pas le meilleur technicien que j’ai formé. Son principal défaut c’était qu’il privilégiait trop la vitesse. Il voulait produire au maximum. Il fallait que je le ralentisse un peu pour qu’il réfléchisse plus. Mais, ce n’était pas une personne difficile : je n’ai eu aucun problème avec lui car René est une personne agréable. Avec lui, comme avec d’autres coachés, il fallait le laisser faire des essais-erreurs pour qu’il apprenne. Je pouvais aussi créer moi-même des problèmes de travail pouvant survenir avec le robot pour le forcer à comprendre certaines choses. Même s’il y a des risques d’engendrer des problèmes, cela permet d’aller investiguer la tâche. L’erreur me permettait de refaire le cheminement avec lui et de comprendre ce qui était arrivé. Elle me permettait de lui expliquer au fur et à mesure. Je lui posais un problème et je le laissais chercher lui-même. Je le mettais sur une piste et je l’interrogeais : « Pourquoi le robot s’est arrêté? Qu’est-ce que le message nous dit? Qu’est-ce que tu fais lorsque tu vois ce message? » Par moment, il prenait les outils dans le coffre et il faisait lui-même des manipulations, etc. Et puis, on recommençait avec d’autres. Par exemple, s’il y avait 16 lames à changer, je lui montrais comment procéder avec les deux premières ; puis, je le laissais faire avec les autres. Pendant ce temps, je l’encourageais à prendre des notes dans son guide. Souvent, même s’il comprenait bien ce qui est écrit dans le guide, je lui signalais de prendre des petites notes, de mettre des petites étoiles pour indiquer : « important ». Le guide est très important dans cette formation. Tous les guides sont très détaillés. On y présente toutes les procédures et autre indications sur les commandes avec des photos en couleur, etc. Au début, René et moi avions constamment le guide à la main pour suivre les procédures dans l’ordre. Après quelques semaines, René était moins collé sur son guide, mais il pouvait s’y référer lorsque je n’étais pas à côté de lui. Tous les opérateurs conservent leurs guides, une fois la formation terminée. Ils s’y référent en cas de problème. Ainsi, pendant les deux premières semaines, nous ne faisions aucune production réelle : autrement, nous aurions été tout mélangés. Après avoir assez pratiqué en « mode non réel », vers la 3e ou 4e semaine, nous commencions à produire des pièces. Nous travaillions ensemble. C’est

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à ce moment que René commençait à prendre confiance en lui. Parfois, nous produisions seulement pour nous pratiquer, « pour le besoin de la cause ». Je dois préciser au passage que, durant la formation, je passais toute la journée avec lui : 8 heures de temps! Même les pauses café et le diner, je les passais avec lui! Pendant le diner, on parlait souvent de ce qu’on venait de voir. Comme avec les autres coachés, René profitait du diner pour poser des questions ou pour revenir sur ce qu’il n’avait pas compris. J’en profitais alors pour éclaircir certaines choses. Même si, la plupart du temps, j’étais seul avec René, d’autres personnes intervenaient à l’occasion durant le coaching. Par exemple, nous avons eu recours à l’électrotechnicien pour une vérification à faire pendant la production. Il nous est arrivé de faire appel à un gars de la maintenance pour un problème. Un autre exemple, c’est l’intervention de l’inspecteur certifié du département de qualité qui participe nécessairement à la vérification de la qualité des fibres. Lorsque ces gens intervenaient, nous posions des questions et nous en discutions : avec eux, nous apprenions beaucoup. Selon moi, c’est à travers les problèmes qu’on devient meilleur! Puis, tranquillement est venue la fin de la formation. Lors de la dernière semaine de formation (7e semaine), je laissais René produire tout seul. Je lui donnais les indications de départ, il produisait les pièces et il manipulait le robot. Je lui disais : « aujourd’hui, je te laisse aller. Si tu as un problème, tu me le dis! » Pendant ce temps-là, je m’occupais à autre chose dans une salle à proximité. Même si je le laissais seul, à toutes les quinze minutes, je vérifiais si tout allait bien. Et je restais disponible, s’il avait besoin. En fait, je le surveillais! À un moment, comme il demeurait tout seul dans cette pièce, ceci devenait sa pièce, sa cellule, son robot! À la fin des 8 semaines, nous nous sommes tous réunis pour faire le bilan détaillé : René, la gestionnaire de la formation, le superviseur et moi-même. C’est la gestionnaire de la formation qui a dirigé la rencontre. À l’aide d’une liste, nous avons vérifié si toutes les étapes et tous les contenus avaient été traités. René donnait son avis sur la maitrise des éléments de sa tâche et je confirmais si je le considérais prêt ou non à la réaliser. Il s’agit aussi d’attribuer une cote pour statuer s’il est « apte et autonome » pour chaque aspect. S’il ne l’avait pas été complètement pour un aspect, il aurait fallu compléter la formation. Mais René était véritablement autonome. Puis, à la toute fin, nous avons échangé au sujet de l’appréciation de l’expérience du coaching, toujours à l’aide du guide. Puis, pour me remercier, à ma grande surprise, René m’a offert un cadeau. Je dois dire que j’ai beaucoup apprécié ce coaching. Nous avons développé une belle complicité et il a bien appris. D’ailleurs, ce qui a été le plus positif avec lui, c’est de le connaitre à titre de personne. Selon lui, mes explications toujours claires y étaient pour beaucoup, même si les guides ont beaucoup aidé. Aujourd’hui, alors que René travaille avec le robot, je suis resté sa personne ressource. Lorsqu’il a un problème, c’est moi qu’il vient voir. Comme avec les 14 personnes que j’ai coachées, je ressens beaucoup de satisfaction même si leur performance respective était inégale. Lorsque je pense qu’une personne, qui ne partait de rien et n’avait aucune idée du travail à accomplir, parvient à devenir l’un des meilleurs techniciens et que je réalise que c’est moi qui l’ai formée, je trouve cela vraiment super.

5.1.2 Récit de Justine, compagnon dans le secteur du textile (cas F)

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Le prochain récit est celui de Justine, une opératrice de fileuse à jet d’air dans une entreprise de production de fil7. Située en région, dans le sud de la province, cette entreprise manufacturière existe depuis 16 ans. En dépit de périodes difficiles propres à ce secteur d’activité économique, cette entreprise de 120 employés connait aujourd’hui une certaine stabilité malgré des mises à pied périodiques. Dotée d’un département des ressources humaines bien structuré, cette entreprise syndiquée, avec une main-d’œuvre vieillissante, cherche à fidéliser son personnel et à bien intégrer les nouveaux employés. Les activités de formation visent principalement l’intégration des nouveaux employés et le développement de leurs compétences. Malgré un type de production qui tend à se moderniser, les opérateurs œuvrent dans des conditions de travail difficiles. Le cas de Justine, une femme de 59 ans, illustre bien la complexité du travail en usine et des procédés de formation par compagnonnage. Justine travaille dans cette entreprise depuis 1994, c’est-à-dire depuis 20 ans, toujours dans le même poste. Dans son récit, elle raconte qu’à ses fonctions habituelles s’ajoutent des fonctions de formation. Formée par le comité sectoriel de main-d’œuvre, Justine est aujourd’hui « compagnon ». Elle forme les nouveaux employés ainsi que ceux qui ont changé de poste ou qui ont été « bumpés », comme elle le décrit. Avec son récit, nous découvrons une femme de métier qui aime son rôle de compagnon et qui a développé de nombreuses stratégies de formation pour aider les autres à apprendre.

* * * Je suis opératrice de fileuse à jet d’air. Je travaille pendant huit heures à opérer cette machine. Avant de travailler ici, j’ai occupé un poste semblable dans une autre entreprise mais sur une machine un peu différente. C’était une fileuse à anneaux. La fileuse à anneaux et celle à jet d’air se ressemblent, sauf que celle à anneaux fait plus d’opérations. Mais elle n’est pas plus compliquée à opérer. J’ai commencé à former des opérateurs à ce moment-là, car j’étais déjà compagnon8. J’ai fait ça pendant huit ans. Avant de travailler dans le domaine du textile, j’ai été à l’emploi d’une usine de production de chocolat. J’y suis restée quelques mois seulement parce que je savais qu’après quelque temps, on allait me « slaquer » comme d’autres. Je suis allée travailler pour une usine de textile pendant neuf mois. J’ai changé encore d’entreprise parce qu’il n’y avait plus de travail. Finalement, la compagnie a décidé de fermer. Moi, à ce moment-là, j’ai choisi de retourner aux études pour faire mon cours de camionneur. Mais, je n’ai pas aimé ça. Je faisais des longues heures de travail alors j’ai décidé de quitter. À chaque fois que j’ai changé d’entreprises, c’était pour le même genre de travail. Comme je n’ai pas poursuivi mes études au-delà du secondaire, je n’aurais pas pu occuper, selon moi, d’autres types de postes. Comme je l’ai déjà mentionné, j’ai été compagnon durant huit ans dans une autre entreprise de textile. Durant cette période, j’ai formé environ 20 employés à utiliser la fileuse à anneaux. Lorsque je suis venue travailler ici, j’ai formé encore beaucoup plus d’employés, cette fois sur la fileuse à jet d’air.

7 Les tableaux XXI, XXII et XXIII, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation. 8 Justine utilise le terme « compagnon » au masculin. Tout le long de son récit, elle utilise exclusivement

ce terme.

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J’aime être compagnon : les raisons et l’aide qu’on m’apporte

Environ six mois après avoir commencé à travailler, le directeur des ressources humaines m’a appelée et m’a demandé si je voulais être compagnon. Ce sont des contremaîtres qui travaillent ici qui lui ont parlé de moi. Ces contremaitres me connaissaient du temps où j’étais à l’autre usine et qui savaient comment je travaillais. Ils avaient entendu dire que j’avais laissé tomber le camionnage et ils m’ont appelée chez moi pour me dire qu’on cherchait quelqu’un ici. Ces contremaitres savaient aussi que j’étais capable de bien montrer le travail aux autres. Je mets les personnes à l’aise. Je sais que c’est dur d’être un nouvel employé. Je le sais parce que je suis déjà passée par là : je veux que les employés que je forme se sentent en confiance. Le directeur des ressources humaines m’a donc demandé si je voulais être compagnon et j’ai accepté. Le rôle de compagnon m’intéresse parce que j’aime partager ce que je connais. J’ai connu des gens qui ne montraient pas leur travail comme il faut parce qu’ils voulaient garder leurs trucs pour eux. Je n’aimais pas ça; moi j’aime bien montrer tous les trucs que je connais. Comme ça, si la personne se retrouve toute seule, elle saura quoi faire, elle pourra se débrouiller. Lorsque j’ai débuté mon travail de compagnon, je n’avais aucune crainte. Je l’avais déjà fait. Je savais que si j’avais de la misère avec certains employés, s’il y avait des choses qui ne fonctionnaient pas, je pouvais en discuter avec le contremaître, qui lui en parlerait aux employés. C’est déjà arrivé et finalement les choses se replacent. J’ai aussi suivi un cours avec le comité sectoriel de main-d’œuvre que j’ai trouvé très bon. Le cours dure deux jours et la personne qui le donne est très dynamique. Elle parle beaucoup, elle explique bien. On ne s’aperçoit pas qu’on est assis toute la journée. C’est spécial ! Pour bien jouer mon rôle de compagnon, j’ai été libérée de 50% de ma tâche. Les employés qui acceptent d’être compagnon reçoivent une augmentation de 10% de leur salaire, comme c’est indiqué dans notre convention collective.

Mes apprentis et le travail à apprendre

Je comprends très bien ce qu’on m’a demandé de faire comme compagnon. Je devais former les nouveaux employés et ceux qui étaient dans un autre poste pour qu’ils soient capables d’opérer la fileuse à jet d’air par eux-mêmes lorsque je ne serai pas là. Autrement dit, il faut qu’ils deviennent autonomes. Il arrive quelquefois que certaines personnes ne soient pas intéressées à ce travail. J’essaie d’abord de leur en parler et puis, si rien ne change, j’en parle avec le contremaître. Mais, des personnes comme ça, c’est plutôt rare. La plupart du temps, après quatre semaines, les gens commencent à être capables de se débrouiller. Il y a une période au début, quand je ne suis plus à côté d’eux, c’est comme s’ils avaient tout oublié. Ils ont de la difficulté à tout faire, ils sont fatigués. On dirait que pendant une semaine, ils sont perdus. C’est normal; c’est stressant, c’est énervant aussi. A ce moment, mon rôle c’est de les soutenir, de les encourager. Pour les aider, je rentre au travail plus tôt chaque matin pour aller les voir, pour m’assurer que tout va bien. Ce que j’aime le plus en tant que compagnon, c’est d’aider les personnes à réussir. C’est ça qui est important pour moi. Quand j’ai réussi à montrer du travail à quelqu’un qui voulait apprendre, c’est le « fun », c’est encourageant. Je forme surtout les nouveaux employés. À l’occasion, je forme aussi des personnes, comme je l’ai mentionné tout à l’heure, qui ont été « bumpées » ou qui ont changé de poste. Il y a des

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hommes et des femmes, des personnes plus jeunes et d’autres plus âgées. Ce sont habituellement des gens qui sont à l’aise avec le travail manuel.

Déroulement de la formation : après l’accueil, je montre tous les détails

Habituellement, lorsque je forme un nouvel employé, je l’accueille dès sa première journée. Je vais le chercher dans les bureaux, ensuite je lui montre où est son casier, où se trouve la cafétéria. Habituellement, les gens amènent leur « lunch ». Je montre au nouvel employé où il peut mettre son lunch dans le réfrigérateur. Puis, je vais lui présenter les autres employés qui travaillent dans son département. Au début, la personne n’a qu’à me regarder faire. Elle ne commence pas le travail tout de suite. Comme la première journée, on dit beaucoup de choses, je dis à la personne « tu vas avoir mal à la tête, n’essaie pas de tout apprendre. Tout ce que je t’explique, tu n’as pas besoin de le retenir. Tu vas voir qu’à chaque jour, tu vas t’améliorer ». Comme je connais très bien mon travail, je n’ai pas besoin de planifier la formation que je vais donner. Je connais déjà toutes les étapes. Alors, je me mets à côté d’eux et je procède toujours de la même manière. La formation se fait devant la fileuse à jet d’air. Il y a plusieurs machines et plusieurs personnes qui travaillent l’une à côté des autres. C’est un environnement bruyant, alors il faut mettre des bouchons dans les oreilles. C’est aussi une machine qui peut être dangereuse. Si on ne fait pas attention, on peut se blesser. C’est arrivé à un de mes collègues, il a perdu des doigts. Moi, je me suis fendue trois doigts; j’ai eu 16 points de suture. Quelquefois, durant la formation, il arrive qu’on doive se déplacer : on peut aller faire des amorces sur une autre machine, aller chercher des tubes, aller chercher une palette, aller chercher du filament, mais ensuite, il faut revenir se mettre devant la machine. C’est là que nous sommes la plupart du temps. La première chose à montrer aux nouveaux employés, après les portes de secours et les extincteurs, c’est la feuille d’identification, sur la machine. Il faut regarder si c’est la bonne couleur de tube qui est là, si c’est ciré ou pas. Il faut vérifier la sorte d’emballage. Ensuite, je montre les arrêts d’urgence sur la machine. Ceci, c’est bien important. Puis, je leur montre comment réparer un tube. Avant de commencer à expliquer à mon apprenti comment utiliser la machine, il faut diminuer la production de 50%, c’est-à-dire qu’au lieu d’avoir 60 broches en opération, il faudra en arrêter 30 et en conserver seulement 30 qui fonctionnent. À partir de là, je suis prête à faire voir comment opérer la machine. Durant les premières quatre heures, la personne a juste à me regarder. Pendant qu’elle me regarde, j’explique les différentes procédures. Ensuite, la personne peut commencer à essayer de le faire elle-même, quand elle est habituée. Pendant ce temps, je suis à côté d’elle et si elle a oublié, je vais refaire l’opération devant elle, tout en réexpliquant. Je lui parle tout le temps. La méthode que j’utilise, quand la personne commence, la première journée, c’est de prendre les machines qui fonctionnent le moins bien et de leur expliquer. De cette manière, les gens seront capables de travailler autant avec des machines qui fonctionnent bien qu’avec d’autres qui fonctionnent moins bien. Aussi, les machines qui fonctionnent bien ne bourrent presque pas. Alors, si je travaille seulement avec celles-là, je ne pourrai pas montrer aux employés comment débourrer. Lorsque je prends une machine qui ne va pas bien, je peux montrer tous les trucs du métier. Pendant la première semaine, je dois toujours rester à côté de la personne, pour vérifier

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qu’elle fait bien les choses. Je travaille en même temps mais je regarde aussi comment elle fait. Voici, en gros, comment je procède sur la fileuse à jet d’air. Un travail complexe à montrer

Maintenant, je peux vous expliquer en détail comment je fais. Souvent, je vais dérouler un peu le fil, parce que si c’est un brin faible, ça va lui donner la chance de savoir tout de suite ce qu’il peut y avoir, ou si c’est le fil qui est enroulé. Tandis que si le brin est correct, c’est autre chose qui peut faire que la machine ne fonctionne pas bien. Cela peut être le filament. Il faut regarder si le filament est là. S’il n’est pas là, c’est parce qu’il est à d’autres places. Alors il faut l’enlever. Et là, la buse peut être bouchée. Donc il faut tourner la buse et aller débourrer avec une brosse. Si ce n’est pas bourré là, c’est peut- être la « top-cut » qui est bourrée. On le voit tout de suite en regardant, alors il faut casser l’autre brin à côté pour pouvoir lever la cage. Puis, s’il est enroulé sur le tablier, il faut prendre un crochet pour le dérouler. Si c’est un rouleau d’acier, il faut prendre une lame croche qui ressemble à un exacto. Lorsque le fil est enroulé autour du rouleau d’acier, c’est vraiment dangereux parce que la lame peut casser. Elle peut nous blesser. Sinon, c’est possible de débourrer à côté. J’explique toutes ces choses – et encore beaucoup d’autres - tout au long des quatre semaines de formation. C’est sûr que pour les nouveaux, ça fait beaucoup! Je dois souvent leur réexpliquer comment faire. Je ne le fais pas pour les critiquer. Je dis à la personne que je le fais pour qu’elle ait moins de difficulté quand elle va se retrouver toute seule. C’est rare que les personnes le prennent mal. Habituellement, tout se passe bien. Quelquefois les personnes me demandent « est-ce que je peux écrire ce que tu m’expliques»? Je leur réponds : « après quatre semaines, s’il y a des choses que tu ne comprends pas ou que tu penses oublier, tu les écriras ». Mais la plupart du temps, ça va bien, les gens n’ont pas besoin de rien écrire. C’est juste la méthode de travail qu’ils doivent changer. Souvent les gens sont portés à vouloir faire fonctionner les 60 broches en même temps. C’est le principal problème. Après une semaine de formation, je peux commencer à laisser la personne toute seule, mais pas longtemps. Je continue à faire les mêmes activités que j’ai décrites tout à l’heure durant quatre semaines et puis, après ce laps de temps, normalement, la personne arrive à se débrouiller. Certaines personnes ont plus de difficulté. La plupart du temps, lorsqu’elles ont des difficultés à apprendre, c’est en lien avec leur attitude. Peut-être qu’elles ne sont pas intéressées par le travail. Il arrive quelquefois, s’il y a beaucoup de nouveaux employés, que je doive en former plusieurs. Je suis arrivée à en former trois en même temps. Des fois, je prenais une personne pour une semaine, je lui expliquais, ensuite la semaine suivante, j’en prenais une autre, jusqu’à trois. Nous étions toutes les trois sur la même machine, mais à ce moment, les 60 broches fonctionnaient en même temps. Après quatre semaines, les personnes se trouvent toute seule. Habituellement elles vont être assignées au quart de nuit, puisque ce sont de nouvelles employées. Lorsque les personnes se trouvent toutes seules devant la machine, j’ai remarqué qu’il arrive souvent la même chose, c’est-à-dire que la personne formée a tout oublié! Cet oubli est sûrement causé par l’énervement. Les personnes, lorsqu’elles sont seules se sentent perdues, elles sont nerveuses, tout marche mal.

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C’est particulier, parce que ça arrive à tout le monde et ça dure à peu près une semaine. Le problème, c’est que les personnes n’utilisent pas les méthodes que je leur ai montrées. Ils font les choses à leur manière et ça ne fonctionne pas. J’ai utilisé aussi une autre façon pour former les employés. C’est de laisser la personne aller, de la laisser faire ses erreurs, puis de la questionner pour qu’elle se rende compte de ce qu’elle a fait qui n’a pas fonctionné. On dirait qu’il faut que la personne fasse des erreurs pour arriver à mieux apprendre et à utiliser la méthode que je lui ai montrée. Comme compagnon, je suis seule mais d’autres personnes viennent

En général, je suis toute seule avec l’employé que je forme. Mais, le directeur des ressources humaines participe au compagnonnage. Lui, donne la formation sur les règles de santé et sécurité. Il donne aussi SIMDUT, c’est-à-dire la formation sur les produits dangereux. Il fait passer des vidéos pour expliquer tout ça. À l’occasion, les contremaitres viennent voir comment ça se passe. Ils vont demander à la personne formée si elle aime ça. Lorsque la formation est terminée, ils sont là et ils peuvent répondre aux questions, surtout lorsque les employés sont dans un autre quart de travail, comme ça arrive habituellement à la fin de la formation. Les contremaitres d’équipe vont aussi donner une formation sur les règles d’usine. Ils vont faire venir les nouveaux employés au bureau pour leur expliquer ces règles.

Il arrive des fois que d’autres employés viennent voir ce qui se passe. Ils me font des commentaires. Par exemple, ils vont dire « ah, je pense que cette personne n’est pas vaillante. Elle n’est pas trop bonne ». Si ça arrive, il ne faut pas entrer dans leur jeu, il ne faut rien dire. C’est le respect de la confidentialité. C’est une des choses que j’ai apprise avec la formation donnée par le Comité sectoriel de main-d’œuvre Textile9. Les gens d’Emploi-Québec viennent aussi rencontrer les apprentis, pour leur poser des questions. En effet, les apprentis reçoivent un cahier d’Emploi-Québec qui indique toutes les compétences à réussir. Une fois qu’ils ont terminé, ils reçoivent un certificat de qualification d’Emploi-Québec. Pour terminer, l’évaluation et le suivi

A la fin des quatre semaines de formation, je dois évaluer la personne que j’ai accompagnée. J’ai un questionnaire à remplir, qui décrit toutes les procédures, c’est-à-dire comment opérer la machine, à quel endroit il faut mettre telle chose et ainsi de suite. C’est tout expliqué en détail, mais par écrit. Je dois donner une note, par des lettres : M, c’est « maîtrisé », R, c’est « recul », Q, c’est « qualifié ». Il faut que la personne ait trois « M ». Cela permet d’avoir un « Q » pour « qualifié ». J’ai quatre semaines pour remplir ce questionnaire. Si jamais la personne ne réussit pas à avoir les trois « M », elle ne sera pas qualifiée. Donc, elle ne pourra pas continuer à travailler ici. Cette situation arrive très rarement, il faut vraiment que la personne ne le veuille pas pour ne pas réussir. Il se peut que la personne n’ait pas encore atteint la vitesse désirée à la fin de la formation. La compagnie va la garder quand même, parce qu’on sait qu’elle va prendre de la vitesse avec l’expérience.

9 Le nom exact de l’organisme est le Comité sectoriel de main-d’œuvre de l’industrie textile du Québec.

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Après, je fais le suivi pendant environ deux autres semaines. La première semaine, je vais les voir tous les matins durant leur quart de travail et je passe environ quinze minutes avec eux, chaque jour. Je leur rappelle les méthodes que je leur ai montrées et là, habituellement, avec l’expérience, ça commence à aller mieux. La deuxième semaine, j’y vais encore tous les jours, mais cette fois, ce sera moins long. Je vais peut-être passer cinq minutes avec eux. Il arrive que des personnes, après cette période, aient encore des difficultés. A ce moment, je peux leur donner quelques heures de formation de plus. Avec certains apprentis, ce n’est pas facile

J’ai expérimenté quelques difficultés avec certains de mes apprentis. Je me souviens en particulier d’une personne qui était toujours sur la défensive. Chaque fois que je la reprenais ou que je commençais à lui expliquer quelque chose, elle ne me laissait pas finir, elle se défendait tout le temps. Puis, lorsqu’à la fin de la formation nous nous sommes rencontrées avec le contremaitre, pour lui donner son certificat, elle me dit : « Justine, ça a bien été nous deux ». J’étais surprise et je lui ai répondu « je ne trouve pas, parce que tu t’es souvent fâchée contre moi et moi j’essayais toujours de t’expliquer de prendre telle méthode ». C’est là qu’elle m’a expliqué qu’elle a eu une enfance très dure, qu’elle se faisait toujours piler sur la tête et c’est pour ça qu’elle réagissait comme ça. On dirait qu’elle n’avait pas senti, ou qu’elle avait oublié, que pour moi c’était très dur. Puis, il peut arriver que même si j’explique et je réexplique plusieurs fois, après la formation, la personne a toujours de la difficulté. Généralement les personnes qui n’apprennent pas ne sont pas vraiment intéressées par le travail. J’en ai une actuellement qui a de la difficulté à prévoir ce qui peut arriver. Elle est très travaillante, mais elle ne voit pas loin, ce qui fait que même si je lui explique plusieurs fois, elle apprend difficilement.

Illustration : mon expérience de compagnonnage avec Janine Je vais maintenant présenter Janine, que j'ai formée à l'utilisation de la fileuse à jet d'air. Janine a déjà beaucoup d'ancienneté à l'usine. Elle a environ une vingtaine d'années d'expérience comme opératrice de machine dans l'usine. Elle a déjà été qualifiée pour travailler sur les machines à jet d'air. Elle a travaillé près de deux ans avec ce type de machine. Mais, comme elle a changé de poste, elle n’avait pas touché à cette machine depuis très longtemps. J'ai fait un rappel avec elle de ce qu'elle avait déjà appris par le passé. Ma formation avec elle a duré une semaine. Je lui ai montré comment opérer la machine puisqu’elle avait pas mal tout oublié. Au début, il faut regarder la feuille d'identification, ensuite, il faut voir si c'est le bon filament qui est sur la machine, puis si la couleur du tube est correcte, si c'est ciré ou non. Une fois que ceci est fait, il faut opérer les broches, les brins qui sont cassés doivent être réparés. S'ils sont bourrés, il faut les débourrer et s'il manque un filament, il faut en remettre un autre. La tâche est difficile à faire au début parce qu'il faut surveiller les cassures et les filaments en même temps. On dirait que quand les gens commencent à apprendre, ils ont de la misère à bien regarder l’ensemble de la machine. Il arrive que les personnes soient distraites et regardent seulement en bas, alors qu'il faut regarder en haut aussi. Il y a des journées où le filament casse

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plus et quand ça arrive, les gens sont plus nerveux. Mais quand ça va bien, ils sont moins nerveux. C'est sûr que les apprentis s'améliorent avec l'expérience, mais c'est une tâche qui n’est pas facile. Pour montrer cette tâche à Janine, je me suis installée à côté d'elle et je lui ai montré les gestes à faire qui étaient corrects. Quand il y a des choses qu'elle ne faisait pas comme il faut, je la reprenais tout de suite pour ne pas qu'elle prenne de mauvais plis. Puis, il y a des trucs que je lui donnais tout le temps, pour qu’elle puisse se débrouiller. Et je lui expliquais en lui répétant plusieurs fois la méthode de travail qu'il fallait utiliser. C'est la méthode de travail qu'il faut absolument faire comprendre aux apprentis. Lorsque j'ai travaillé avec Janine, et je fais ça avec tout le monde, j'ai expliqué très très bien pour qu'elle se sente en confiance très rapidement. Je l'ai encouragée tout le temps en lui expliquant qu'il y a des journées où ça va moins bien. C'est normal. Quand on travaille avec la fileuse à jet d'air, il y a une tâche très importante. Les conséquences peuvent être graves si elle n’est pas faite. Il s’agit d’éteindre la « fan » pour la vider et ensuite ne pas oublier de la rallumer. Il y a un bouton rouge qui s’allume pour avertir qu’il faut la vider et ensuite un bouton vert s’allume lorsque la « fan » a démarré de nouveau. Quand je donne ma formation, j’explique ce que les lumières veulent dire et je montre comment arrêter la « fan ». Ensuite, je les avertis que ça arrive souvent que les gens oublient de la redémarrer. La plupart des gens me répondent : « je ne l’oublierai pas ». Mais comme on dit, il faut que ça arrive pour voir ce que ça fait. La plupart du temps, les gens oublient de redémarrer la « fan ». Quand je suis là en tant que compagnon, je peux la rallumer tout de suite. Quelquefois les personnes s’en veulent d’avoir oublié quelque chose d’aussi important. Je les rassure en leur disant : « tant mieux, c’est arrivé quand je suis là, je vais pouvoir t’aider ». Janine aussi a oublié de rallumer la "fan". Quand ça arrive, c’est quelque chose de très stressant pour une personne qui est en apprentissage. Moi, je dis toujours aux personnes « t’as pas besoin d’avoir peur, ça arrive à tout le monde ». Je le dis pour que la personne reprenne confiance en elle, parce que quand on commence et on voit une machine dans cet état, c’est stressant. Avec Janine, ça a été plus dur pour certaines choses. C'était une personne qui n'était pas tellement rapide. Ça a été plus difficile de lui montrer à elle, qui avait de l'expérience sur d'autres machines et qui était déjà dans l'usine. Je pense que c'est parce qu'elle avait beaucoup d'ancienneté, on aurait dit qu'elle s'en foutait. Quand les employés ont leur « séniorité », et qu'ils n'ont pas peur de perdre leur travail, on dirait que c'est plus dur de les motiver. Au début, Janine ne comprenait pas pourquoi je voulais travailler avec elle sur la machine qui fonctionne le moins bien. Elle pensait que je voulais la disqualifier. Je lui ai expliqué qu'elle apprendrait mieux sur cette machine. Je lui ai dit : « quand tu seras sur une machine qui fonctionne bien, tu seras beaucoup plus à l'aise ». Moi, quand je montre l'ouvrage, c'est pour que la personne réussisse, ce n’est pas mon but de la faire échouer. A un moment donné, Janine avait compris. Elle avait pris de la vitesse, et puis, finalement, elle est arrivée à la même vitesse que tout le monde. Il faut dire que le patron est allé la voir aussi et lui a dit qu'il fallait qu'elle soit efficace sinon elle serait disqualifiée. C'est là qu'elle a commencé

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à opérer plus vite et mieux. Le patron est très diplomate; il est aussi très compréhensif. Quand il voit que ça ne fonctionne pas, il va amener l'apprenti dans son bureau, il va questionner la personne pour savoir si elle aime faire le travail. En questionnant la personne, soit qu'elle va réussir, sinon elle va démissionner. Ça arrive qu'il y ait des gens qui ne sont vraiment pas à leur place et qui démissionnent.

Quand Janine a terminé sa formation avec moi, j'allais la voir toutes les semaines, parce qu’elle ne travaillait pas loin de moi et je l'encourageais tout le temps, je lui disais « tu vas réussir ».

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5.1.3 Récit de Serge, coach dans le secteur de l’aménagement paysager (cas E)

Nous présentons la situation de Serge, président directeur général d’une entreprise d’aménagement paysager qui pratique le coaching. Depuis 7 ans, cet homme de 45 ans voit avec ses partenaires au développement de leur entreprise et à la qualité du service. Le cas de Serge permet de voir comment la formation par accompagnement peut se dérouler dans une petite entreprise de services10. Cette jeune entreprise, de la région de Lanaudière, fonctionne avec 10 à 15 employés contractuels, nombre variable compte tenu du caractère saisonnier des services. Dans son récit, Serge décrit comment il vit ce double rôle celui de patron « qui fait tout » dans sa petite entreprise et celui de coach. Il met aussi en relief l’influence du comité sectoriel de main-d’œuvre sur le développement des pratiques et des outils de formation. En portant attention au vocabulaire de Serge, nous sommes amenés à constater quelques ambiguïtés et questionnements au sujet de la différence entre le coaching et le compagnonnage.

* * *

Je suis Président directeur général d'une entreprise d’aménagement paysager, depuis 2007. Je m'occupe de la gestion quotidienne : je fais les commandes, je vais sur les chantiers et je rencontre chaque client chaque fois que nous présentons un plan d’aménagement. Les architectes-paysagistes font les dessins, mais lorsque nous sommes en période de « rush », c'est moi qui fais le contact avec le client. Avant, je faisais pas mal d'activités de paysagement, mais à mesure que l'entreprise grossit, j'en fais de moins en moins. Nous avons embauché une firme externe récemment pour m'aider avec les ressources humaines. Nous avons besoin de les structurer mieux et de rédiger des descriptions de tâches. J’assumais trop de travail : nous voulons donc essayer d'alléger tout le monde pour que les journées soient moins stressantes.

Avant de m'occuper de cette entreprise, j'en ai eu plusieurs autres. Je viens d'une famille d'entrepreneurs qui étaient dans l'industrie de l'automobile. J'ai fait des études en administration et puis j'ai travaillé dans l'entreprise familiale pour un certain temps. Ensuite, j'ai quitté parce qu'à un certain moment, travailler avec la famille, le père, la mère et la sœur, devenait difficile. En 2000, j'ai donc quitté l'entreprise familiale pour fonder ma propre entreprise. J'ai acheté une franchise de restauration rapide que j'ai opérée pendant cinq ans. Puis, je l’ai revendu parce que j'étais fatigué de voyager à Montréal tous les jours. En 2005, j'ai commencé à m'intéresser à l'immobilier. J'ai fondé une compagnie de construction avec un associé. Parallèlement à cela, j'ai rencontré des gens qui m'ont aidé à fonder mon entreprise d’aménagement paysager actuelle. J'avais des bases dans la construction puisque je suis entrepreneur général. Au début, nous voulions simplement ajouter une division à mon entreprise de construction, mais finalement j'ai décidé de revendre cette entreprise à mon associé et je me suis consacré à 100% à celle-ci. Je ne connaissais rien à ce domaine. Mais, comme nous étions une toute petite équipe, je faisais un peu de tout. C'est là que j'ai appris comment ça

10 Les tableaux XVIII, XIX et XX, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation.

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fonctionnait, de A à Z. Nous avons débuté dans le paysagisme résidentiel, ensuite nous avons développé dans le secteur commercial. Pour vendre nos services, il faut tout connaitre du domaine. Moi, à ce moment-là, je ne connaissais rien. Quand j'ai commencé, un de mes associés me disait: « tu ne peux pas vendre ça comme une voiture ». Quand un client demandait: « c'est fait comment? », j'écoutais mon associé parler mais je ne saisissais pas trop. Après l'avoir fait, j'ai mieux compris. Si je me limite à lire de la documentation sur les aspects du métier, sans faire le travail, ce n'est pas suffisant. Je crois que c'est comme ça dans le processus d'apprentissage : tant que tu ne l'as pas fait, c'est difficile à comprendre. Et tu ne peux pas expliquer à quelqu'un « fais cela de telle façon », si tu ne l'as pas fait toi-même. Dans les débuts, l'entreprise était toute petite, puis elle s'est développée, j'ai même ouvert une autre entreprise, il y a deux ans. C'est une entreprise qui fait de la sous-traitance en systèmes de finition intérieure, durant l'hiver. La compagnie d’aménagement paysager et celle-ci sont reliées parce que lorsque les employés qui ont une carte de compétence en construction ne peuvent plus travailler pour l'entreprise d’aménagement paysager, ils sont à l'emploi de l'autre entreprise. Ceci me permet de garder mes bons employés avec des cartes de compétences pour les travaux commerciaux. Dans le domaine, nous travaillons neuf mois. Si je ne leur fournis pas de travail, je peux les perdre. Les jeunes qui travaillent pour nous sont bien contents d'être en chômage l'hiver. Ils font du ski ou n'importe quoi d'autre et ne veulent pas nécessairement travailler. Mais les autres qui ont une famille, veulent travailler toute l'année. Ils peuvent le faire en alternant d'une entreprise à l'autre. Malgré mes atouts naturels, j’ai appris à devenir coach

Dès le début de ma carrière, j'ai commencé à donner de la formation. Lorsque je travaillais pour la concession automobile, je formais les nouveaux employés. Moi, je suis quelqu’un qui aime partir de la base. Je suis fait comme ça ! Si je ne comprends pas tout, je ne serai pas capable de bien performer. Puis, je ne serai pas capable de montrer aux autres comment faire. Alors, lorsque j'ai commencé à travailler dans le domaine de la vente automobile, j’ai quitté la ville pour travailler pour une autre concession. Je voulais faire mes erreurs ailleurs, me « casser les dents », comme on dit, avec des gens qui ne me connaissaient pas. En développant de l'expérience dans les divers départements, je suis devenu longtemps le meilleur vendeur, et ensuite, le gérant des ventes. Dans ce dernier rôle, j'ai fait beaucoup de coaching. J'aime former les gens, parce que pour moi, la qualité du travail est reliée à la formation. Ce n’est pas à travers ma formation universitaire en administration des affaires que j’ai appris à être coach. Dans ce temps-là, le coaching n'était pas à la mode et il n'y avait pas de cours sur ce sujet. Par contre, j'ai suivi une formation de deux ou trois jours avec Horti-compétences11 sur le compagnonnage. On nous a expliqué comment s'adapter à la personnalité de chacun et comment motiver les gens. Mais, j'ai aussi appris « sur le tas ». Comme je disais tout à l'heure, j'aime commencer à la base, c'est donc ce que j'ai fait. J'ai commencé par observer le travail de mes partenaires, voir comment ils faisaient pour ensuite le faire moi-même. Mais, j'ai aussi suivi

11 Il s’agit du Comité sectoriel de main-d’œuvre en horticulture ornementale - commercialisation et

services.

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beaucoup de formations, entre autres avec l'APPQ (Association des paysagistes professionnels du Québec). Il y avait également les normes BMQ (Bureau de normalisation du Québec) qu'il fallait apprendre. En plus des formations suivies et de mon expérience « sur le terrain », j'ai certaines compétences utiles dans mon rôle de coach. Par exemple, de façon naturelle, j’ai tendance à voir tout ce qui ne fonctionne pas sur un chantier. Ainsi, lorsque je fais ce genre de constat, je prends le chef d'équipe à part et je lui dis ce que j'ai observé. Des fois, ce n'est pas nécessairement un travail mal fait mais je peux lui expliquer des meilleures façons de faire, plus faciles. Je suis aussi une personne qui s'adapte aux diverses personnalités des gens. Je suis moins bon pour montrer le fonctionnement de la machinerie lourde. A ce moment-là, je délègue. Par contre, lorsqu'il s'agit de respecter les principes de sécurité, par exemple, je suis pas mal bon. Je vais être capable de voir si les conditions sont sécuritaires pour tout le groupe.

Un coach avec un double rôle

Mon rôle de coach est particulier car je combine le rôle de président-directeur général avec celui de coach ; je porte toujours au moins deux « chapeaux », ce qui fait que je suis toujours soucieux de la qualité du travail et du service offert au client.

Quand j'ai débuté dans ce domaine, j’avais confiance en moi par rapport au coaching, car j'avais déjà beaucoup « coaché » dans le secteur automobile. Cependant, il me manquait le savoir par rapport au domaine. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, je ne connaissais rien du paysagisme. Je savais vendre un bien mais ici c'est du service, ce qui est très différent. Pour bien vendre, comme pour former, il faut que je sache comment c'est fait. Aujourd’hui, je n'ai aucun problème à faire l'un et l'autre. Le coaching assure une bonne qualité de travail et il est garant d'une bonne réputation. En fait tout se tient : un bon coaching permet de ne pas avoir à refaire les choses, de satisfaire le client immédiatement et de faire le travail plus rapidement. Cela participe au succès de l’entreprise ! Si une personne est mal coachée, le client ne sera pas content, il ne te réfèrera pas à d’autres clients et tu perdras d’autres clients, etc.

Les employés et les défis de la communication

Les employés qui travaillent avec moi sont surtout des gars. Il arrive qu’il y ait une ou deux femmes, mais c'est plus rare. En ce moment, j'ai deux femmes qui travaillent seulement l'été: l’une est architecte-paysagiste, l'autre est paysagiste. J'ai aussi plusieurs jeunes : certains travaillent l'été. Durant l'hiver, ils font autre chose. J'ai d'autres employés qui restent à l'année avec moi. Ceux-là travaillent pour l'entreprise de finition de systèmes intérieurs, durant l’hiver, comme je l'ai déjà mentionné. Avant de débuter dans le programme de formation d'Horti-compétences, les employés doivent avoir travaillé un minimum de neuf mois avec moi. Même s'ils ne sont pas encore inscrits dans le programme d'Horti-compétences, lorsque je les coache, je leur montre tout de même les méthodes que j'ai apprises avec eux. En général, le coaching se déroule bien avec les employés. Mais, il arrive que les chefs d'équipe et moi-même subissions de la pression. Il y a des moments où ça va moins bien avec des difficultés qui n'étaient pas prévues, un travail qui prend du temps, etc. Quelquefois, il y a des problèmes familiaux chez les employés ou moi qui vit du stress. Dans ce temps-là, le message

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passe moins bien et je peux être plus direct. Les gens vont dire « qu'est-ce qu'il a lui aujourd'hui ? Est-il est fou? J'étais correct dans ce que je faisais! » Pour moi, c'est un défi de m'adapter au caractère des gens. Mais, parfois ce n’est pas moi le problème : il y a des gars qui ne comprennent pas vite. Nous sommes dans un milieu d'homme : la communication avec les employés ce n'est pas la même chose. Avec les gars, tu peux être raide car cinq minutes après il n'y a plus de rancune. C'est ce qui se passe ici avec nos employés. Quand je fais du coaching, j'essaie de mettre une bonne ambiance. De temps en temps, durant l'été, nous prenons un après-midi off et nous partons tous faire du Go-kart et nous soupons tout le monde ensemble sur une terrasse. Tout ceci contribue à détendre l'atmosphère ! Le déroulement du coaching

Horti-Compétences nous fournit deux guides avec lesquels nous travaillons maintenant. Il y en a un pour le coach et un pour les participants, c'est-à-dire les employés qui ont déjà neuf mois d’expérience avec moi et qui se font « coacher ». En général, la formation est très spontanée : elle se fait « sur le tas » pendant le travail sur les chantiers. En fait, elle se fait toujours dans l’action. En général, je vais coacher mes employés mais je ne suis pas le seul à le faire. Cela va dépendre des habiletés de chacun. Si je suis plus habile sur un aspect du travail, je vais lui montrer moi-même. Si je suis moins habile, je vais laisser cela à quelqu’un d’autre. Comme plusieurs employés sont formés pour être compagnon, je n’ai pas de difficulté à déléguer et ils font eux aussi du coaching12. Il est difficile de dire combien de temps dure un coaching. Je peux passer une journée entière avec un employé et lui dire, de temps en temps, « regardes, fais comme ceci et ça comme cela ». Je lui dis ce genre de chose à l’occasion sans être constamment en train de le former. Le coaching se fait vraiment informellement, sans durée spécifique et sans que cela soit un moment dédié exclusivement à la formation. Par exemple, je peux expliquer une chose à un employé qui travaille ici depuis 2 ans et qui ne faisait pas les choses de la bonne manière. Alors je profite du moment pour lui montrer la bonne façon de faire. Avec un nouvel employé, la formation se passe un peu différemment. Les nouveaux débutent habituellement l'été. D’abord, nous leur donnons une formation de groupe. Avec eux, il y a donc un temps spécialement dédié à la formation en dehors du travail normal. Comme ils ne font pas de tâches, ce n'est pas une période qui est directement rentable : c’est un investissement à long terme. Comme l’été est très occupé, les nouveaux ne travaillent pas dans une équipe fixe : ils sont plutôt « garochés » d'un bord et de l'autre. Ainsi, nous les « promenons » d’un chantier à l’autre pour voir leur facilité à s'intégrer avec les différentes personnes de l’équipe. Nous voulons aussi recevoir le « feedback » de tout le monde. En fait, je demande aux chefs d'équipe de me dire ce qu'ils pensent de la personne. Cela fait partie de leur formation car pour bien voir les tâches où ils sont bons et celles où ils sont moins bons. Si vraiment une personne ne « fait pas l'affaire », je ne serai jamais le seul à décider. Nous décidons en groupe. D'ailleurs, quand nous embauchons quelqu'un, nous sommes toujours deux. De plus, pour les nouveaux, nous avons des rencontres individuelles à chaque vendredi après-midi. 12 Serge réfère au « coaching » et au « compagnonnage » dans la même phrase.

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En plus de la formation sur le travail, plusieurs personnes sont formées pour devenir compagnons avec Horti-compétences. Lorsqu'ils ont terminé, ils obtiennent un certificat et un montant d'argent. À ce sujet, les futurs « compagnons » trouvent que ce titre n'est pas très approprié parce que, contrairement à ce qui se passe dans l'industrie de la construction, le titre de compagnon ne donne accès à aucun des avantages associés à ce titre.

L’évaluation se fait maintenant tout le long de l’année

Nous avons toujours évalué nos ouvriers. Mais, avant nous le faisions seulement une fois par année. Nous regardions comment la personne avait évolué et ce qu'elle avait appris. Depuis que nous avons reçu la formation sur le compagnonnage, donnée par Horticompétences - comité sectoriel responsable de l'aménagement paysager - nous faisons la même chose, mais tout au long de l'année. Dans les faits, ceci se passe en deux étapes: l'employé commence par s'auto-évaluer, puis, dans un deuxième temps, nous l'évaluons sur les mêmes points. Souvent, nous avons une petite discussion au sujet de ce qui est bon. Et puis, nous le quantifions, à l’aide de pourcentages. Par exemple, je peux demander à l’employé : « comment, tu te vois là-dedans? ». La personne peut répondre : « Moi, je suis rendu à 95% ». Alors, moi je peux lui dire : "Ah non. Je ne suis pas d’accord. Je te vois plutôt à 75% ». L’exercice va générer une discussion. Par la suite, nous finissons par nous mettre d'accord sur un pourcentage et sur les aspects à travailler. Avant notre collaboration avec Horticompétences, nous ne faisons rien de tout cela. Ainsi, nous faisons l'évaluation avec le guide d'Emploi-Québec trois ou quatre fois par année. Cela dure environ 10 ou 15 minutes chaque fois. Le coach et l'employé coaché remplissent chacun leur fiche d'évaluation, en complétant chaque section, et ils font une discussion sur les pourcentages alloués par chacun comme je le disais tout à l’heure. Par exemple, il y a une section « implanter des végétaux » et une autre qui est « organiser son travail, prise de connaissance du plan et des directives ». Nous fonctionnons avec deux sortes de plan: un plan à l'ordinateur et des croquis faits à la main. Le plan par ordinateur a des mesures de référence. Dans leur camion, les employés ont une règle à mesurer. Il faut donc qu'ils sachent s'en servir. Alors, à l’aide du guide, le coach va demander : « tu te vois comment avec le plan? Avec la règle?». Je dois spécifier que l'évaluation n'a pas de conséquences sur l’employé même s'il y a des écarts entre l'auto-évaluation et l'évaluation du coach. En fait, cela ne pose pas vraiment de problème. Si l'évaluation était reliée au salaire, par exemple, ce serait autre chose! J’aimerais aussi mentionner qu’Emploi-Québec vient rencontrer les employés qui suivent le programme avec Horticompétences. Ils les regardent travailler lorsqu’ils sont sur le chantier.

Un coaching qui n’est pas fait par humanisme, mais pour l’efficacité

Ce que je trouve particulièrement satisfaisant avec le coaching, c'est de voir qu'à la fin, le travail qui est fait est un travail de qualité. Le client est content et il nous réfère à d’autres clients. Vous savez, je ne fais pas de coaching dans un but humanitaire. Personnellement, ce qui me motive, c'est de savoir qu'après le coaching, la personne va être autonome. C’est de constater que je peux lui faire confiance et que je n'aurai pas peur de la laisser chez un client pour faire une « job ». Je vais savoir que c'est bien fait. Je ne retire pas vraiment de plaisir à dire « j'ai montré quelque chose à quelqu'un ». Ce qui est important, comme je le répète, c'est la qualité du travail

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et les répercussions positives sur l’entreprise. Vous savez, je ne peux pas enlever mon chapeau de PDG!

Illustration : une journée de coaching avec Martin Je vais maintenant raconter comment s'est passée une journée de coaching avec Martin. Martin est un jeune de 18 ans. Contrairement à d’autres jeunes ouvriers, il ne travaille pas seulement l’été mais plutôt d’avril à décembre. C’était une journée où son chef d’équipe était malade. Comme je n’avais pas encore eu la chance de l’évaluer, je me suis dit que j’allais en profiter pour passer la journée avec lui. C’était une journée d’entretien : je suis parti avec lui pour la tonte de pelouse. En même temps, ceci me permettait de voir ce que lui avait montré le chef d’équipe. Tout d'abord, je lui expliqué que je ne ferais pas de travail mais que j'allais simplement l'observer. Je lui ai dit : « regarde je vais t'évaluer un peu aujourd'hui pour voir où t'es rendu ». Martin me disait constamment : « j'suis bon, j'suis bon ». Je voulais voir ce qu'il faisait et vérifier les chemins par lesquels ils passent, lui et son chef d'équipe. La route choisie par une équipe est très importante. Elle peut sauver beaucoup de temps. Nous sommes donc partis avec le camion et avec le « trailer » qui contient les outils. Je lui ai dit : « donne-moi ta run, vous commencez par quoi le matin » ? Pendant ce temps, il m'a expliqué ce qu'ils faisaient. Puis, je l'ai questionné en lui demandant pourquoi il faisait ça. Par exemple, pour tailler les bordures des arbustes, je voyais qu’il taillait les bordures tout de suite sans le faire de façon suffisamment large. De cette manière, il devait repasser une autre fois. Je lui ai donc dit : « ceci n'a pas d'allure, tu repasses deux fois ! Fais-les plus larges tout de suite ». Mais avant de lui dire cela, j'ai commencé par lui poser des questions parce que je voulais d'abord savoir pourquoi il faisait les choses comme ça. Peut-être qu'il a une bonne raison de les faire de cette façon, c'est ce que je me disais. Car, je ne pense pas avoir la vérité absolue. Quand je l'ai vu faire, je constatais bien qu'il travaillait avec le côté « qualité », qu’il vérifiait et qu’il revérifiait bien son travail. Cependant, au point de vue de l'efficacité, ce n'était pas à mon goût. Personnellement, je suis préoccupé par l'efficacité. S’il taillait les bordures plus largement, il pourrait sauver du temps. Je lui ai expliqué pourquoi en lui disant: « regarde, le tracteur a telle largeur, tu le sais que dans les coins comme ça, il ne passe pas. Fais-le donc plus large, peut-être que tu vas repasser quand même mais au moins tu ne repasseras pas deux fois ». En lui expliquant, il a changé sa méthode. Par la suite, j'ai aussi parlé à son coéquipier, qui a changé la sienne lorsqu’il est revenu. Durant cette journée, j’ai également montré le tracteur car j’étais convaincu qu'il ne devait pas l'utiliser tellement souvent. Je lui ai suggéré de ne pas aller trop vite, de prendre son temps, pour bien faire le travail. Il fallait d'abord qu'il apprenne; je voulais aussi m'assurer que le travail soit bien fait. De plus, il arrive que je fasse moi-même les choses et je demande à l'autre de m'observer. Par exemple, quand il s'agissait de conduire le tracteur, j'ai pris moi-même le volant pour montrer à Martin comment faire. Quand j'ai fait mon coaching avec Martin, je lui ai souvent demandé pourquoi il faisait les choses de telle ou telle manière. Par exemple, à un moment, je lui ai posé la question: « pourquoi, pendant que ton coéquipier est sur le tracteur, tu ne fais pas telle partie avec le « weed eater? ». Pendant ce temps, ton coéquipier pourrait utiliser le souffleur pour pousser les herbes?» Il m'a expliqué qu'ils avaient déjà essayé cette méthode mais, qu'à un moment donné,

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l’un d’eux avait les bras croisés n’ayant plus rien à faire. J'ai dit : « c'est bien correct ». Des fois, je donne des idées, croyant que cela peut être bon, mais en réalité ce ne l'est pas toujours ! Parfois, les clients m’aident avec le coaching. Par exemple, un jour, une cliente s’est plainte du fait qu’il y avait des traces de gazon sur son pavé uni. Lorsque j’en ai parlé aux gars, ils ne voyaient pas de problème. J'ai donc décidé d'aller voir moi-même ce qui se passait chez la cliente. A ce moment-là, j'ai remarqué qu'une partie du terrain était toujours humide. Située tout proche d'un boisé, cette section restait constamment humide. Alors, après avoir passé par là avec le tracteur, le gazon coupé restait collé sur les roues ce qui laissait des traces. Je n'ai pas dit tout de suite à Martin que j'avais trouvé la source du problème. Je l'ai laissé couper le gazon comme à son habitude. Une fois le travail terminé, j'ai attendu et j'ai demandé à Martin : « est-ce que c'est fini? ». Il a dit « oui ». Je suis débarqué du camion et j’ai répondu : « viens avec moi ! ». Là, je lui ai montré les deux roues et il a compris tout de suite. Il a dit : ça ne part pas avec le souffleur ! J’ai répondu : « dans ce temps-là, tu prends le balai ». Il était d'accord et il a dit: « ben oui! ». Cette journée-là, je suis intervenu aussi par rapport au trajet. J'ai laissé Martin faire le trajet qu'il prend habituellement. Mais, par la suite, je lui ai fait remarquer qu'il perdait beaucoup de temps dans le trafic. Je lui expliqué qu’à ce moment-là, il faut changer l'ordre avec lequel on voit les clients. C'est sûr qu'il faut aussi tenir compte des demandes des clients mais on ne paye pas les employés pour qu'il reste deux heures dans le trafic. Ce n’est pas tellement efficace! Quand je coache, je questionne souvent les employés parce que je me dis que je n'ai pas la science infuse et que les autres peuvent aussi avoir des idées, meilleures que les miennes. Puis en même temps, en questionnant les employés, cela me permet de voir s'ils ont vraiment le travail à cœur ou s'ils font juste les choses comme ça, sans trop se poser de questions. Des fois, je suis agréablement surpris de voir que les gars avaient déjà essayé ce que je leur proposais et qu'ils en avaient conclu que cela fonctionnait. Avec Martin, il y avait un aspect plus difficile. Lorsque je lui disais quelque chose, il répond continuellement par « oui, mais … ». C’est une personne qui veut toujours avoir raison. Avec lui, je devais souvent répéter. À un moment, je perdais vraiment patience. Dans ce temps-là le ton de ma voix commence à changer. J’avais alors de la difficulté avec moi-même. Quelquefois, je peux être raide avec eux surtout quand je sens de la pression. Comme le frère de Martin travaille avec nous depuis plus longtemps et qu’il est compagnon, il m’est arrivé quelquefois de lui demander de parler avec Martin !

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5.2. Parrains, marraine et coach qui pratiquent dans des services de télécommunications, financiers, communautaire et commerce de détails Parmi les neuf formateurs-accompagnateurs rencontrés, quatre personnes occupent des fonctions de travail surtout centrées sur les services ou le conseil. Contrairement aux récits des personnes présentées précédemment, leur travail n’est pas principalement centrée sur la conception et ou à la fabrication. Il est plutôt centré sur la qualité de l’information et le service, ce qui suppose des habiletés d’interaction et de communication ainsi qu’une connaissance des produits ou des services. Chacun pratique dans un domaine particulier avec ses propres exigences et enjeux.

5.2.1 Manuel, un jeune coach qui veut modifier les comportements de vente (cas A)

Depuis un an, Manuel occupe le poste de « Support aux campagnes des ventes et développement de la formation » dans une entreprise de télécommunications13, qu’on nomme communément un « centre d’appel ». Âgé de 29 ans, il travaille depuis 10 ans pour cette entreprise qui offre des services de soutien à l’une des filiales spécialisées dans la vente et l’implantation de produits de télécommunication. Il s’occupe d’équipes de vente, située en région. Sa fonction de travail, consiste essentiellement à aider les agents14 à connaitre les nouveaux produits et à les vendre.

Manuel a évolué rapidement au sein de différentes divisions et filiales de cette organisation de 500 employés avant d’occuper ce poste. L’entreprise est une filiale d’une organisation plus grande qui a connu plusieurs acquisitions et réorganisations dans le secteur de la téléphonie et des télécommunications, un secteur très compétitif. Les employés de bureaux et les techniciens, associés à deux syndicats, travaillent surtout à temps plein. Alors que le secteur est soumis à plusieurs règles et normes externes, l’entreprise a également établi des indicateurs internes de qualité très stricts pour le service à la clientèle. Nous verrons dans le récit de Manuel combien ces indicateurs sont déterminants pour les agents des centres d’appel qui travaillent dans des conditions de travail difficiles. De concert avec un département des ressources humaines très structuré, Manuel explique comment son coaching vise à garder les agents motivés et productifs.

* * *

Mon parcours d’emploi débute dans une chaine de « dépanneurs » où j’étais vendeur. C’est là que j’ai entendu parler de l’organisation pour laquelle je travaille actuellement. Plusieurs de mes clients y travaillaient et me suggéraient d’y postuler pour un emploi. J’ai suivi leurs conseils. J’ai commencé dans l’entreprise en débutant comme représentant au service à la clientèle. Il s’agissait de répondre aux appels téléphoniques des clients qui demandaient des informations et de leur proposer l’achat de nouveaux produits. Je faisais donc de la vente. Durant cette période, j’ai entrepris des études universitaires. J’ai obtenu un certificat en gestion des ressources humaines. Plus tard, j’ai étudié dans un certificat pour formateur en milieu de

13 Les tableaux VI, VII et VIII, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation. 14 Tout le long de son récit, Manuel utilise les termes agents et représentants.

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travail. Avec un troisième certificat, j’ai obtenu mon baccalauréat alors que j’étais toujours employé par cette organisation. J’ai gravi rapidement les échelons. Après avoir travaillé à la vente, je suis devenu directeur adjoint d’un centre d’appel, puis directeur adjoint d’un magasin de produits de télécommunications et finalement, directeur de magasin. En 2012, j’ai obtenu le poste de responsable de la formation et des ventes que j’occupe actuellement. J’en suis très heureux car ce poste combine mes principales forces, la formation et la vente. Depuis que je suis en poste, j’ai également un petit volet ressources humaines. Mes études universitaires m’ont beaucoup profité car j’ai commencé à donner de la formation dès le moment où je suis devenu adjoint du directeur en Centre d’appel. Je faisais de la formation pour les nouveaux employés. C’était de la formation de groupe, suivie d’un coaching individuel. Dès ce moment, la formation représentait 80 à 90% de ma tâche. Par la suite, dans mes autres fonctions, j’ai continué à faire de l’accompagnement individualisé, auquel s’ajoutaient des responsabilités de gestion. J’avais une obligation de résultats et l’obligation d’assurer la qualité des ventes et je devais effectuer un suivi auprès des employés. Je dois dire qu’au moment où j’ai travaillé au département des ressources humaines, je faisais aussi de la formation en plus de conseiller les gestionnaires au sujet du cheminement de carrière de leurs employés. C’était délicat parce que les gestionnaires n’étaient pas mes employés ! Je suis devenu coach sans être vraiment prêt

C’est lorsque j’occupais les fonctions de directeur-adjoint en centre d’appels que mon directeur m’a confié les activités de coaching. Comme ceci faisait partie de ma tâche, sa demande ne m’a pas du tout surpris. Lorsqu’on m’a confié mes premiers mandats, les attentes de la direction n’étaient pas véritablement claires. En fait, je n’étais vraiment pas prêt ! Mes premiers coaching se faisaient plutôt informellement : je devais écouter l’appel d’un agent et lui expliquer comment s’améliorer. C’était un peu stressant ! En fait, je ne me sentais vraiment pas prêt. J’étais si jeune, j’avais 20 ans ! On m’a confié cette tâche car je me démarquais du lot. Même si je n’étais pas le meilleur vendeur, je connaissais très bien les produits. Puis, je savais vendre en utilisant une bonne approche. On peut donc dire que j’ai appris à coacher « sur le tas » en le faisant et en essayant des choses. Puisque la formation et le coaching m’intéressaient depuis longtemps, j’ai mis les efforts nécessaires. Tout était nouveau pour moi, alors mon directeur m’a aidé. Il m’a donné des directives en m’expliquant dans les grandes lignes comment procéder. Il m’accompagnait pour s’assurer que je faisais les choses correctement. Même s’il m’a supervisé, j’ai dû apprendre par moi-même, surtout pour savoir comment parler aux agents. C’est un peu difficile lorsqu’on a 20 ans et qu’on doit dire à quelqu’un de quarante ans : « tu ne fais pas la bonne chose, je viens pour observer ce que tu fais et ça ne fonctionne pas du tout ». Pour réaliser ce mandat, je n’avais pas de conditions particulières : pas de prime, ni augmentation de salaire ou autre chose de ce genre. Comme je venais d’entrer en poste, j’avais déjà eu une promotion et une augmentation de salaire, je n’avais donc rien à réclamer de plus. Il faut dire que le coaching faisait partie de mon rôle. Quelques années plus tard, mon employeur m’a supporté en m’offrant de participer à une formation sur le coaching : celle-ci a duré 4 jours.

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Je n’ai demandé aucune ressource supplémentaire mais j’ai réclamé un bureau : j’avais besoin d’un bureau! Aujourd’hui, je suis imputable des résultats obtenus en terme de ventes. Mon rôle consiste à aider les représentants à vendre. Lorsque je les coache, je vise une bonne qualité d’appels et la réussite des ventes. Je veux les aider et les accompagner, pour faire bouger les choses. Tout en m’adaptant à leur style personnel de vente, j’aime pouvoir amener ma touche personnelle, changer un petit quelque chose.

Au début, j’ai essayé différentes stratégies de coaching auprès des agents en observant ce qui fonctionnait bien et ce qui fonctionnait moins bien. Mon directeur m’avait donné seulement une idée générale de mon rôle. Avec le temps, je l’ai précisé. Aujourd’hui, je perçois le coaching comme un accompagnement individualisé qui comprend un suivi et une entente à la fin. Je pense que pour être un bon coach, il faut être rassembleur, dynamique et avoir des talents de communication. Même si je n’ai jamais été le meilleur vendeur, je possède ces qualités. Ce qui fait mon succès en tant que coach, c’est que je n’aime pas donner des ordres. Je m’adapte à la personne qui est devant moi, je fais tout pour la mettre à l’aise et j’essaie d’innover. Une partie importante de ma stratégie de coaching est d’aller chercher l’engagement de la personne. C’est la personne elle-même qui s’engage à obtenir certains résultats, après qu’on ait discuté ensemble. Une autre de mes stratégies de coaching est de m’assurer que tous ont le même vocabulaire, les mêmes standards, ce que je fais à travers mes formations de groupe. Ensuite, lorsque je travaille avec eux individuellement, il n’y a pas de surprise. Les employés que je coach

La majorité des personnes que je coach sont des représentants de service à la clientèle. Je les nomme aussi les agents. Dans une proportion de 70 %, il s’agit de femmes dont l’âge varie entre 18 et 50 ans. Je coache également leurs gestionnaires et les coachs réguliers des représentants. Je dois m’assurer qu’ils fassent un bon suivi avec les représentants. Toute l’équipe de vente doit orienter le travail dans le même sens. La planification du coaching

Un vrai coaching doit être bien préparé. Avant de rencontrer un représentant, j’aime me faire une idée objective de son travail. Au début, je n’avais pas les outils pour me préparer mais maintenant nous disposons de plusieurs. J’y reviendrai. Avant de débuter, je fais une petite recherche, en écoutant les appels faits avec les clients. J’évalue la personne sur plusieurs aspects : comment est le ton de sa voix ? Est-ce qu’elle semble à l’aise? Est-ce qu’elle met souvent le client en attente? Pour chaque représentant à coacher, j’écoute environ cinq appels d’une durée de cinq à douze minutes chacun. Je fais ce qu’on nomme ici de l’écoute à distance15.

15 Manuel explique qu’il y trois types d’appels : 1) l’écoute live à distance, c’est-à-dire qu’il écoute le

représentant aux ventes à distance au moment où celui-ci est au téléphone sans qu’il le sache, 2) l’écoute adjacente, qui consiste à écouter la personne pendant qu’elle fait un appel et elle le sait, et 3) l’écoute à distance d’un appel qui a été fait une autre journée, à partir d’un répertoire des appels. Dans ce cas, le représentant n’en est pas informé.

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Je prends toujours soins d’écouter des appels effectués lors de journées différentes pour me faire une bonne idée de la personne. Ensuite, j’analyse les rapports de productivité : j’y vois le nombre moyen d’appels à l’heure, le nombre moyen de secondes par appel, la durée de la mise en attente, le nombre de fermeture de ligne après un appel, etc. Tout ceci influence les indicateurs de qualité. Souvent, je discute avec le coach de l’agent pour vérifier mes perceptions : parfois celui-ci est d’accord, parfois il me dit que je suis dans l’erreur. Une fois que j’ai les informations sur tous les représentants grâce à l’écoute des appels à distance, j’en priorise quelques-uns pour effectuer un coaching. En général, je ne planifie pas mes rencontres avec les représentants : aucun rendez-vous n’est fixé à l’avance. Ceux-ci sont informés du coaching au moment où je suis sur place. Lorsque j’arrive, je me présente et j’explique à la personne qu’elle a été priorisée. Mes rencontres de coaching

Généralement, le coaching se fait dans une grande salle où les employés sont organisés par îlot mesurant cinq pieds par cinq pieds. Comme il y a quatre représentants par îlot, l’espace de travail individuel est très petit. Lorsque j’arrive dans cette salle, les représentants me reconnaissent puisqu’ils ont déjà suivi ma formation de groupe sur les produits et les ventes. Ils savent que je m’occupe des ventes et que je suis là pour les motiver. Ils me surnomment : « la tornade » car j’arrive avec mes cartes-cadeaux et des incitatifs. Lorsque je rencontre une personne coachée pour la première fois, je m’assoie avec elle pour effectuer de « l’écoute adjacente ». J’essaie tout d’abord d’établir une relation de confiance. Comme il s’agit de nouveaux employés et qu’ils ressentent du stress avec « le gars de Montréal » qui vient les écouter, je prends toujours le temps de les rassurer. Je leur dis « bonjour, ça va bien » ? Je leur dis de faire comme si je n’étais pas là, juste pour les calmer un peu. À l’occasion, des personnes sont trop stressées par ma présence. Alors, je les laisse tranquille. Mais je reviens à un autre moment. Lorsque des personnes sont résistantes ou fermées à l’idée d’être coachée, j’essaie de trouver un point précis qui me permettra de créer un lien. Par exemple, si le représentant a une photo de son bébé ou d’un voyage sur son bureau, j’utilise cet élément pour faire ce lien. Puis, l’activité de coaching commence véritablement. Pour cela, je suis assis à côté de la personne coachée pendant qu’elle fait des appels. Malgré la petitesse du lieu, je tente de garder une distance, même si j’empiète sur le corridor. Je regarde l’écran, je prends des notes et j’écoute. Puis, je fais des commentaires sur les appels. Quelquefois, le représentant va mettre son téléphone en attente pour me poser des questions. Si je ne suis pas en mesure de lui répondre, je vais le référer à quelqu’un d’autre. D’autre fois, lorsque la personne est à l’aise, je vais établir avec elle un « plan de match » : on planifie ensemble les choses à dire durant les prochains appels. Une fois ceci établi, elle prend le téléphone pour mettre en pratique ce que nous avons décidé ensemble. Pendant ce temps, je l’écoute. Si elle oublie quelque chose, je vais la corriger. Tout au long de son appel, je prends des notes. Avant de la quitter, je vais prendre quelques minutes pour lui donner une rétroaction. Quelquefois, je lui pose la question: puis, comment t’as trouvé ça? Je veux savoir si elle a aimé son coaching ou si elle était à l’aise de mettre en application les stratégies suggérées.

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Il m’arrive de changer complètement d’approche. En effet, à l’occasion, j’invite un représentant à s’asseoir dans une autre salle – une salle fermée avec des hauts parleurs – et nous écoutons ensemble certains de ses appels. Je lui demande de faire une autoévaluation. Puis, nous en discutons ensemble. Même si j’apprécie beaucoup cette approche, elle comporte des inconvénients. Il faut notamment préparer les aspects logistiques comme la réservation de salle et la préparation des haut-parleurs. Il faut aussi libérer l’employé de sa tâche pendant une plus longue période.

Le meilleur coaching consiste à questionner les gens avec des questions ouvertes qui les aident à réfléchir. Lorsque je fais ça, il arrive que la personne coachée réalise par elle-même de ce qu’elle doit changer. Elle se rend compte qu’elle a oublié quelque chose, ou qu’elle aurait dû dire autre chose. Un coaching se déroule sur une période d’une heure. Dans les faits, une partie de la communication se fait entre les appels avec des clients. La communication avec le représentant se fait principalement au moment où il met un appel en attente : nous prenons deux ou trois minutes pour discuter de ce que j’ai entendu. Dans tous les cas, je suis complètement seul avec la personne que je coache. Bien entendu, les clients sont directement impliqués dans le coaching, sans nécessairement le savoir au moment où ça se passe. Ils savent cependant que l’appel peut être écouté et enregistré pour fin de formation. Les clients jouent un rôle essentiel même si on a tendance à l’oublier. C’est le client qui mène puisqu’on on part de ses besoins pour vendre. Je peux ajouter que les coachs et les superviseurs des agents locaux participent à la formation des représentants avec le suivi. Quelquefois, d’autres personnes (des agents) qui viennent écouter les appels, mais ils ne devraient normalement pas y être car le coaching est un moment privilégié entre moi et l’agent coaché. J’ai déjà spécifié que j’avais peu d’outils lorsque j’ai débuté mon travail. À un moment, j’ai eu un registre de coaching nommé coachlog. Grâce à ce registre, j’inscris la date et la durée de chaque rencontre de coaching ainsi que les actions réalisées avec le représentant. Le coachlog est très utile pour le suivi. Comme tout est indiqué, après mon départ, chaque coach est bien informé de ce qu’il doit faire avec le représentant pour continuer le travail amorcé. Les informations du coachlog sont strictement factuelles : je note ce qui avait été dit, soit par le client, soit par le représentant. Mes autres outils sont les écouteurs, le téléphone du représentant ainsi qu’un cahier des notes. À l’avenir, il est possible que les autres coachs et moi utilisions une grille pour consigner les étapes à réaliser pour chaque appel. Mais, comme je les ai bien en mémoire, ce n’est pas difficile pour moi de les expliquer. Au cours d’une semaine, j’écoute environ 10 heures d’appels par semaine. Une fois mes rencontres de coaching terminées avec les représentants, je fais toujours un suivi les jours suivants. À partir de mon bureau à Montréal, j’écoute les appels à distance pour vérifier si chaque personne coachée fait ce que je lui ai montré. Si elle ne le fait pas, je la rencontre sur son lieu de travail pour lui rappeler ses engagements. Je lui résume l’appel que j’ai écouté et je la questionne à ce sujet : « est-ce que tu penses que tu as fait ce qu’il fallait sur cet appel-là? » Ce type de rencontre peut durer 45 minutes; si j’ai le temps, j’en profite pour regarder avec elle

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l’ensemble de ses résultats. Je fais un résumé de sa progression, de sa productivité pour vérifier si ses ventes ont augmenté avec la nouvelle approche enseignée. Si tout va bien avec un représentant, je la rencontre pour le féliciter.

Illustration : un coaching difficile avec Carina, une employée résistante Je vais maintenant vous parler de Carina une représentante des ventes de 35 ans. Avant de travailler pour notre entreprise, je crois qu’elle avait déjà été adjointe en comptabilité et qu’elle avait étudié dans ce domaine. C’est une grande femme qui dégage beaucoup de confiance en elle. Elle était très à l’aise avec les systèmes et parlait français et anglais. J’avais déjà rencontré Carina alors que je donnais une formation sur la fibre optique, un produit que je devais promouvoir. Je l’avais rencontrée une autre fois, toujours pour une formation en groupe. La décision de la rencontrer pour un coaching a été prise lorsque j’ai vérifié ses rapports de productivité. J’ai constaté qu’elle réalisait beaucoup d’appels dans une seule journée, ce qui n’est pas bien. Habituellement, un agent prend quatre ou cinq appels par heure : Carina en prenait neuf ou dix. Ceci signifie que Carina ne prenait pas le temps requis pour évaluer les besoins de chaque client. Lorsqu’une personne va trop vite avec un client, on nomme cela « bruler les appels ». La première rencontre du coaching de Carina a consisté à analyser ses résultats : c’est là que j’ai remarqué qu’il y avait quelque chose qui n’était pas « normal ». Elle faisait durer ses appels seulement deux ou trois minutes. Même si elle vendait beaucoup de produits, elle prenait le triple des appels des autres. Ses résultats de vente étaient comparables à ceux d’autres représentants qui, eux, ne font que 30 appels par jour. J’ai alors parlé de Carina à l’un de mes collègues qui avait déjà fait de l’écoute avec elle pour lui demander son avis. Ensuite, j’ai fait de l’écoute adjacente. Je me suis assis à côté d’elle pendant qu’elle faisait ses appels. Après l’écoute de deux ou trois appels, je lui ai demandé si elle considérait que sa recherche de besoins était satisfaisante. Elle m’a répondu avoir de la difficulté avec ça. Alors, je lui ai donné des trucs. Puis, nous avons analysé ensemble chacun des appels effectués et avons discuté d’autres manières de faire. Pour cela, je me suis référé à la formation qu’elle avait suivie avec moi. Au cours d’une deuxième rencontre de coaching, j’ai refait avec elle les mêmes étapes. Mais, ensuite, j’ai pris soin d’analyser les nouveaux appels en faisant de l’écoute à distance. Je me suis aperçu que rien n’avait changé ! Alors, j’ai parlé ouvertement à Carina de mes attentes. Je lui ai demandé de s’engager à effectuer les changements. Elle s’est engagée à changer. Mais, malgré cela, rien ne s’est produit. Après avoir discuté avec son coach, mes observations ont été confirmées : il avait aussi remarqué que les résultats de Carina ne s’étaient pas améliorés. Lors d’une troisième rencontre, je lui ai expliqué que je la rencontrais à propos de ses résultats en lui demandant si elle regardait ses rapports de vente. Elle m’a répondu par la négative en disant que les ventes ne la motivent pas. Tout en lui rappelant que la vente des produits faisait partie de son travail, je lui ai proposé de les regarder avec elle à tous les deux jours et non plus à tous les jours. Puisque Carina n’est pas mon employée, je devais faire attention, je ne pouvais pas lui mentionné certaines choses. Compte tenu de cette situation, j’ai décidé d’être beaucoup

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plus précis avec elle. Je l’ai questionnée : « regarde le nombre d’appels et le résultats de tes ventes, et compare-les à ceux des autres représentants. Selon toi, où est-ce que tu te situes ? » Elle m’a répondu : « Moi je prends beaucoup d’appels ». Alors je lui ai expliqué ce que nous voulions en termes de résultats chiffrés, en lui montrant un exemple de rapports de productivité. Ses appels duraient en moyenne 200 secondes alors que ceux des autres employés étaient de 380 secondes. Elle devait donc arriver à effectuer des appels qui ne dureraient pas moins de 400 secondes et s’assurer de réduire son rythme pour passer de 10 appels à cinq appels à l’heure.

Toujours au cours de cette rencontre, je lui ai rappelé son engagement de faire « le tour du dossier » et je lui ai posé la question : « est-ce que tu réalises l’engagement que tu as pris ? ». Selon elle, elle le faisait et ce n’était pas de sa faute si elle était rapide, au contraire, c’est parce qu’elle connaissait très bien tous les systèmes. Je l’ai questionnée sur ce qu’elle pourrait changer pour arriver aux résultats demandés. Alors, nous nous sommes entendus sur le fait de mettre à jour la fiche crédit du client. Je lui ai donné des scripts, des trucs et des formules à utiliser avec les clients. Par exemple, j’ai suggéré de mettre un petit papier de couleur sur son ordinateur, avec le code 515. Il s’agit du code d’identification de la fiche crédit du client, le 515. Après m’avoir écouté, Carina était d’accord avec mes propositions et elle est repartie en étant contente. J’ai rencontré à nouveau Carina : c’est la quatrième rencontre de coaching avec elle. La rencontre consistait à sortir de son poste de travail habituel et, une fois installée dans une salle fermée, à écouter ses appels de manière aléatoire. Nous avons écouté ensemble quatre de ses appels. Or, pour aucun de ces appels, elle n’avait utilisé la fiche de crédit du client 515 comme je lui avais demandé. Certains appels étaient un peu plus longs qu’à son habitude, mais ce n’était pas fantastique. Lorsque nous avons écouté ces appels, Carina n’était pas contente : elle avait les bras croisés ! Elle était déçue parce qu’elle s’était fait prendre. À un moment, elle s’est levée pour partir et je lui ai dit : « tu sais Carina, on n’a pas encore fini ». En lui demandant de se rassoir, je lui ai expliqué que je ne voulais pas que notre rencontre se termine de cette manière. Elle a accepté de se rassoir et nous avons parlé. Dès ce moment, j’ai changé de stratégie et j’ai décidé de la questionner pour savoir si elle aimait son travail. A ce moment, elle m’a dit qu’elle aimait le côté technique, qu’elle aimait effectuer les appels rapidement. Elle m’a signalé qu’elle était comme ça dans la vie de tous les jours. Selon elle, le problème vient du fait que les gens lui disent qu’elle fait du bon travail et que son coach local ne pousse pas nécessairement dans la même direction que moi. Il y avait donc un décalage. Pourtant, moi je travaille fort pour que nous soyons tous orientés de la même manière. Selon moi, on ne peut pas coacher sur des objectifs, il faut coacher les comportements. Ce n’est pas suffisant de dire aux représentants qu’ils doivent atteindre des objectifs de vente : il faut leur dire comment faire et les aider à changer leurs comportements. Après cette rencontre avec Carina j’ai parlé à son coach et je lui ai suggéré de lui permettre d’écouter ses collègues qui traitent les appels des clients comme nous le demandons. J’étais d’avis que ces collègues pouvaient agir comme des modèles, comme des prototypes. J’ai recommandé qu’elle écoute un collègue pendant une période de deux heures, et qu’on procède à un retour avec elle. Je voulais qu’on lui demande ce qu’elle a appris et ce qu’elle pourrait mettre en application avec ses appels. Finalement, mes recommandations n’ont pas pu être suivies : Carina a plutôt changé de poste ! Maintenant, elle a des tâches beaucoup plus cléricales et elle ne répond au téléphone qu’une seule journée par semaine. Si elle était restée en poste, la

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prochaine étape aurait consisté à faire d’autres écoutes. Je ne me serais pas arrêté là parce qu’elle était fâchée, au contraire. Bref, Carina a été une coachée résistante. Elle disait « j’ai fait mon travail » et elle se trouvait bonne compte tenu de sa rapidité, de sa connaissance des systèmes et de sa capacité à passer à travers la liste d’appels des clients. Même si elle n’a pas été la personne la plus fermée que j’ai rencontrée, c’était une représentante arrogante qui ne voulait pas suivre mes propositions. J’aurais aimé continuer mon travail avec Carina mais le département des ressources humaines a pris une autre décision.

5.2.2 Natacha, une coach du secteur financier (cas B)

Conseillère en ressources humaines, Natacha, qui est âgée de 45 ans, occupe ce poste depuis 4 ans dans une coopérative financière de 120 employés16. Cette organisation syndiquée, située en région, fait partie d’un réseau de plus de 100 coopératives communément nommées « caisses ». Natacha exerce sensiblement les mêmes fonctions depuis ses débuts au département des ressources humaines de cette caisse. Elle conseille les gestionnaires en matière de gestion des conventions collectives, de rémunération, de sélection du personnel ainsi que de formation des employés. Même si l’organisation est syndiquée, Natacha ne l’est pas, comme c’est le cas des autres professionnelles de son département. Malgré la stabilité de sa fonction, elle a connu des défis professionnels importants notamment lors d’une fusion de plusieurs succursales. Dans le secteur financier, son entreprise est bien positionnée malgré une forte compétition et les exigences règlementaires. L’évolution de l’entreprise, amène aujourd’hui Natacha à transiger avec une quinzaine de gestionnaires de six succursales (« des points de services ») réparties dans les villes environnantes. Membre de l’Ordre des professionnels en ressources humaines et relations industrielles agrées du Québec, Natacha apprécie son milieu de travail qui met à la disposition du personnel un environnement qui valorise l’apprentissage des employés et leur développement de carrière. Son récit révèle l’expérience d’une coach encore peu expérimentée qui est sensible au besoin individuel mais tout aussi soucieuse de l’éthique du travail.

* * *

Puisque je suis conseillère en ressources humaines, je joue régulièrement un « rôle conseil » auprès des gestionnaires mais je n’ai qu’une seule expérience formelle de coaching. Cependant, j’ai beaucoup d’expérience en formation de groupe – la formation traditionnelle - et j’ai une excellente connaissance de mon domaine. Avant de commencer « à la caisse », j’ai travaillé pendant 13 ans dans le secteur manufacturier. Dès ma sortie du collège, j’ai travaillé dans une usine de textile dans le centre du Québec. J’y travaillais au laboratoire pour la fabrication de vêtement. Je suis restée à ce poste seulement quelque mois, mon employeur m’ayant nommée contremaitre très rapidement. Par la suite, j’ai occupé différents postes au sein de cette entreprise, ce qui m’a amené à me familiariser avec les fonctions liées aux ressources humaines. D’ailleurs, c’est à ce moment que j’ai entrepris des

16 Les tableaux IX, X et XI, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation.

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études universitaires. Or, à un moment, l’entreprise a dû fermer ses portes compte tenu du contexte économique. J’ai alors participé à toutes les opérations liées à cette fermeture. Par la suite, j’ai trouvé un poste de conseillère en ressources humaines dans une entreprise multinationale du secteur de la fabrication alimentaire. Encore là, j’ai gravi les échelons tranquillement. Ainsi, dès le début de ma carrière, mon travail comprenait des fonctions de formation : identification des besoins, développement de projet, conception de matériel de formation pour l’amélioration des pratiques des employés de base, formation des gestionnaires, analyse des besoins de formation, projet de formation aux changements technologiques. Ici aussi, à la caisse, j’ai formé une dizaine de formateurs internes. Une bonne part de ma connaissance de la formation a été acquise par expérience. Mais je dois dire aussi que j’ai une formation universitaire dans ce domaine puisque j’ai un diplôme universitaire de deuxième cycle en éducation et formation des adultes et un certificat de 1er cycle pour formateur en milieu de travail. J’ai suivi ces formations, à temps partiel, en me rendant quelques soirs par semaine à l’université au centre-ville de Montréal. J’y ai développé une connaissance théorique et pratique de la formation. À la même époque, j’ai suivi une formation sur le coaching offerte par mon ordre professionnel. C’était intéressant : on y présentait les différentes formes de formation individualisée (coaching, mentorat) et des démonstrations de coaching de gestionnaire. Je suis même devenue « coach agrée » ! J’avais déjà une formation universitaire en gestion des ressources humaines. C’est ce diplôme qui m’a permis d’entamer ma carrière en ressources humaines. On peut dire que j’ai réorienté ma carrière, car au départ, je me destinais à une carrière plus technique, en coloration chimique, spécialité acquise au collégial dans la jeune vingtaine. Un mandat accepté avec enthousiasme malgré le temps supplémentaire

L’an dernier, mon superviseur me confie le mandat de former une nouvelle conseillère en ressources humaines. Il ne l’a pas fait uniquement en considérant mon expertise en formation, ni pour ma connaissance des ressources humaines. J’ai une vision globale de l’entreprise un bon sens de l’organisation et je suis une personne généreuse. Mon employeur sait que je partage l’information et que je ne me sens pas menacée par la venue d’un nouvel employé. J’étais très motivée par ce mandat : j’aime transmettre mes connaissances et la philosophie du métier. Je ne ressentais aucune crainte : j’avais confiance en moi, et en ma future coachée, en sa capacité à donner et à vivre avec moi cette relation. Le mandat était clair : développer la compétence d’une nouvelle conseillère en dotation et en relations de travail.

Pour ce mon mandat, je n’ai pas été libérée de mes fonctions régulières. Il est clair que je devais parfois faire du travail supplémentaire car le coaching grugeait de mon temps. Pour m’aider, mon gestionnaire a assuré occasionnellement certaines de mes tâches. J’ai d’autant apprécié son support qu’il s’agissait de la seule véritablement compensation puisqu’il n’y a pas de prime salariale pour le coaching. À de nombreuses reprises, j’avais conseillé informellement des collègues de travail mais c’était la seule fois, avec Marie, que j’assumais ce rôle formellement. J’ai appréciée tout de suite ce rôle de coach qui me donne l’impression de donner à autrui. Ayant moi-même profité du savoir

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d’autres personnes au début de ma carrière, je vois l’importance de la transmission par les pairs. À cette étape de mon développement professionnel, je ressens le besoin de le faire. C’est valorisant de voir une personne évoluer dans ses apprentissages et de profiter de la reconnaissance. Je crois que mon succès repose sur ma capacité d’écoute, ma patience, mon sens de l’organisation ainsi que pour l’intérêt pour autrui. Une première expérience de coach

Âgée de 35 ans, Marie travaille à la caisse depuis le début de sa carrière. Avant d’obtenir ce poste, elle était conseillère en financement. Elle a débuté au bas de l’échelle à titre de caissière. Puis, elle a gravi plusieurs échelons. Diplômée en administration, elle souhaitait vivement devenir conseillère en ressources humaines. Malgré une excellente connaissance de l’organisation, Marie n’avait aucune expérience en ressources humaines. Même si elle était déjà familière avec certains outils, et qu’elle connaissait le fonctionnement de l’organisation, Marie avait beaucoup à apprendre car ce poste comporte une plus grande complexité. Avant ce mandat de coaching, je ne connaissais pas Marie. J’avais seulement une idée de son profil professionnel. Je connaissais surtout son enthousiasme pour son nouveau poste. Pour elle, c’était la réalisation d’un rêve. Dès le départ, elle était très positive avec une belle volonté et une soif d’apprendre. Dès le début, je discutais beaucoup avec Marie. Nous parlions de différents sujets et nous sommes devenues amies assez rapidement. Planification du coaching

Avant de rencontrer Marie, j’ai préparé une planification sur plusieurs semaines. Pour cela, je me suis basée sur ma propre expérience. J’ai répertorié et j’ai organisé le matériel utilisé par les conseillers en ressources humaines. J’ai également identifié des mises en situations et des cas concrets liés à la fonction de conseillère en plus de préparer des grilles, des tableaux et des exemples de dossiers. Sachant que Marie est une femme d’action, je voulais la faire pratiquer.

Pour l’essentiel, j’ai préparé moi-même les outils nécessaires au coaching. Bien entendu, j’utilisais le matériel de travail usuel employé par les conseillers en ressources humaines. Mais, j’ai aussi profité de certains outils préparés par des collègues du centre administratif, au niveau national. Ils produisent des documents pertinents : une collègue m’a fourni des mises à jour. À un moment, cette collègue a collaboré au coaching en pratiquant des simulations avec Marie. Un coaching basé sur un processus d’entonnoir

Lors de l’arrivée de ma coachée, nous avons pris soin de faire connaissance autour d’un bon café. Puis, rapidement, on a attaqué l’apprentissage ! J’avais décidé de lui montrer le travail à accomplir selon un processus d’entonnoir en lui donnant, tout d’abord, une idée d’ensemble pour qu’elle voie « largement » le travail à accomplir. Puis, il s’agissait de traiter des « aspects pratiques ou opérationnels » et, ensuite, de me centrer sur la philosophie du travail (art du métier, art du processus, code de déontologie, confidentialité des données, règles et valeurs organisationnelles, services client, etc.) avec les aspects plus analytiques (ex : l’embauche).

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La première phase de mon coaching ressemble à la formation traditionnelle car je présentais les informations, en face à face, sous des aspects plus « théoriques ». Nous n’étions pas encore dans l’action. Ainsi, j’ai débuté en lui expliquant sa fonction : on a regardé sa description de tâches. Puis, j’ai montré comment gérer un dossier de dotation en décrivant les outils qu’elle allait utiliser (canevas, tableau, fiche, cv). Il s’agissait d’ « expliquer » ce qu’est un processus d’embauche en identifiant les étapes, le fonctionnement, les catégories d’acteurs et les outils disponibles, etc. J’avais installé un tableau à feuille, pour faire des illustrations et expliquer les outils en détail : comment manier les outils, l’importance de conserver des copies ou de les faire signer. Il fallait mettre en relief le plus important. Après cette phase de présentation de la fonction, dans une deuxième phase, l’apprentissage se réalise dans les taches régulières. Autrement dit, je me servais des tâches habituelles pour qu’elle apprenne. J’expliquais ce que je faisais ou j’invitais Marie à « assister » aux tâches que j’accomplis normalement, soit seule ou avec des collègues. Pendant que j’effectuais mon travail – par exemple, une entrevue de sélection - Marie observait la scène. Souvent, je provoquais l’apprentissage en interpelant Marie. Si j’avais un tableau de suivi à compléter, j’allais au bureau de Marie et je lui demandais : comment tu verrais ça toi ? Selon toi, quel information cette personne a t-elle besoin ? Sur quoi devrait-elle focaliser ? Selon toi, c’est quoi le mandat exactement ? De cette manière, je suscitais l’échange avec ma coachée et je la faisais participer à mon processus de travail. Cela se faisait également sous forme de questionnement pour que Marie en prenne conscience. Au début, tout ceci se déroulait lors de rencontres planifiées mais, rapidement, notre fonctionnement est devenu plus spontané. On se rencontrait « au besoin », « de manière aléatoire » en fonction de nos disponibilités respectives, selon des dossiers qui se présentaient. Ça se passait aussi « entre deux portes » (p. 24). Je dirais même que j’y allais presque au son sachant que, au besoin, Marie allait me poser des questions. Après quelques semaines, Marie a commencé à effectuer elle-même le travail. Par exemple, elle réalisait des entrevues d’emploi. Bien entendu, au préalable, je prenais soin de lui fournir tous les outils et de lui exprimer mes attentes par rapport à la tâche à accomplir tout en soulignant les actions à accomplir. Dès lors, c’est moi qui l’observais. Par la suite, nous échangions ensemble : souvent, je corrigeais certains aspects. Au début, lorsque Marie réalisait elle-même le travail, elle me questionnait souvent sur les aspects plus complexes ou délicats. Elle me soumettait ses problèmes. Je la questionnais au sujet de divers aspects de son rôle pour l’amener à réfléchir et à raisonner à voix haute. Pour compléter ou pour renforcer, je lui demandais de fournir d’autres situations et je la questionnais à nouveau. Durant toute cette période, je passais souvent d’un rôle à l’autre, passant de celui de conseillère en ressources humaines à celui de coach comme si je « changeais de chapeaux ». Lorsque je remémore cette expérience, je vois bien que ma principale stratégie de coaching est le questionnement. En effet, je questionnais constamment Marie sur ses actions et sur les décisions à prendre. Ainsi, je lui demandais : Tu fais quoi »? Tu proposes quoi ? Lorsque tu présenteras le dossier à la direction, comment est-ce tu le présentes ? Je l’incitais à répondre et j’attirais alors son attention sur des points importants. Évidemment, tout le long du coaching, j’observais l’évolution de mon apprenante : était stimulée et intéressée, elle devenait de plus en plus à l’aise

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dans ses tâches. En l’observant, je voyais que l’apprentissage se faisait : elle développait des réflexes, elle comprenait son rôle ainsi que les interventions à effectuer. Je me disais: C’est bon, elle sait où elle s’en va, elle vient de comprendre, elle développe une finesse, un raffinement. Il était clair pour moi que le fait de montrer les aspects opérationnels ne peut suffire. Il est tout aussi essentiel de montrer à analyser plus largement les situations et de lui permettre de développer une philosophie car mon apprenante devait « penser ressources humaines » ! Comme, une partie de la fonction de conseillère en ressources humaines se pratique avec d’autres collègues, il fallait aussi inciter Marie à collaborer avec les autres. Il fallait permettre à Marie d’identifier les enjeux et contraintes de son travail. Dans mon rôle de coach, je ne travaillais donc pas complètement seule : les futurs collaborateurs de Marie y ont participé aussi. J’ai donc présenté chaque personne à Marie pour qu’elle se familiarise à leur rôle. J’expliquais comment collaborer avec chacun en donnant des conseils et trucs pour faciliter les communications avec les collègues. Il y a également eu des collègues du centre administratif qui sont venus diffuser des compléments d’information sur les aspects plus globaux pour vérifier la compréhension de Marie. En cela, j’ai eu à assurer un soutien et un encadrement à mon coaching. Durée et lieu du coaching

Il est nécessaire de spécifier qu’une expérience de coaching dure plusieurs semaines. Il ne se déroule jamais sur des journées complètes : il s’effectue en fragments. Les périodes de coaching sont plus longues au début, la durée diminuant au fur et à mesure. Après un moment ensemble, ma coachée travaillait seule quelques heures de son côté. Au besoin, elle revenait pour me poser des questions. Souvent, nous faisions le point en fin de la journée. Parfois, nos rencontres ne duraient que 5 minutes. Marie effectuait une tâche et venait me voir pour vérifier seulement quelques aspects. Après avoir validé sa compréhension, elle retournait à sa tâche. Durant cette courte rencontre, je lui posais une série de questions sur les opérations effectuées. On peut donc dire que l’activité de travail n’était que partiellement mise en commun avec elle ; parfois, nous effectuions le travail ensemble, surtout au début, mais, plus le coaching avançait, et plus Marie l’effectuait elle-même en me consultant seulement, soit pendant ou soit, après, avoir effectué sa tâche. J’aimerais dire aussi que Marie et moi avons, chacune, notre propre bureau, situés côte à côte. La proximité de nos bureaux facilite les échanges en cours de coaching et la planification des moments de coaching. Au début, l’activité de coaching s’effectuait principalement dans mon bureau, surtout lorsqu’il s’agissait de présenter les aspects opérationnels. Selon moi, la proximité physique était essentielle car elle me permettait d’interpeler Marie spontanément, au fur et à mesure où des nouveaux mandats, pour lui montrer certains aspects du travail ou pour la questionner au sujet des tâches qu’elle accomplissait seule. Le plus souvent c’est moi qui l’interpelais et l’invitais à mon bureau. Souvent, les explications étaient données en face-à-face, l’une assise à son bureau et l’autre dans la chaise habituellement utilisée par nos clients. Mais, comme nous devions souvent examinés des documents ensemble (sur ordinateur notamment), nous nous installions souvent côte-à-côte. Cette proximité favorisait la confiance et la camaraderie.

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Si le coaching s’est déroulé sur les lieux de travail, il y a eu aussi quelques visites occasionnelles à l’externe comme l’exige le travail réel de la conseillère. L’évaluation réalisée par mon gestionnaire

J’ai déjà mentionné que d’autres personnes ont participé au coaching. La contribution de mon gestionnaire a été certainement la plus évidente, surtout en ce qui concerne l’évaluation de Marie. À un moment, mon gestionnaire et moi avons pris soin de discuter du niveau d’atteinte de Marie. Après quelques jours de coaching, il s’agissait de prendre du recul pour vérifier si elle apprenait bien. Il était clair pour moi qu’elle performait bien sur le plan opérationnel. Cependant, l’acquisition de la philosophie n’était pas encore acquise. Je n’en étais pas surprise car c’est surtout une femme d’action : il fallait qu’elle progresse sur l’autre plan. À la fin du processus, mon gestionnaire a participé à une rencontre de débriefing. Cette fois, celui-ci cherchait à valider si Marie maitrisait bel et bien les fonctions de conseil et s’il pouvait décréter l’embauche dans le poste. C’est donc lui qui a évalué formellement la réussite du coaching. À ce sujet, je dois dire que je me suis sentie moi-même évaluée par mon gestionnaire puisque c’est moi qui a formé Marie.

Illustration : un coaching réussi avec Marie malgré quelques tensions Je peux illustrer ma façon de faire du coaching de façon très concrète en prenant l’apprentissage de l’outil de gestion de sélection du personnel utilisé lors des affichages de postes à l’interne, nommée « tableau des candidatures ». Marie devait apprendre le fonctionnement et l’application de cet outil dans les règles de l’art. Elle n’en avait aucune connaissance. Cette tâche requiert une compréhension des différentes parties, des règles des différentes conventions collectives, des règles pour le personnel non syndiqué d’autres outils et formulaires, des procédures de communications, des pratiques de confidentialité17, etc. Lorsque j’ai montré cela à Marie, je voulais qu’elle travaille avec précision et éthique et qu’elle prenne conscience des conséquences possibles d’un travail mal fait qui peut engendrer des griefs, des contestations ou des coûts financiers. Dans une première phase, j’ai expliqué l’outil à Marie du « tableau des candidats » : j’ai montré et j’ai décrit en détail tout en expliquant la pertinence de chaque ligne et de chaque colonne. J’ai présenté aussi d’autres outils associés (ex : l’organigramme, le système de gestion du personnel). Puis, j’ai expliqué les critères pouvant être utilisés pour compléter chacune des colonnes. Pour moi, il était essentiel que Marie soit en mesure de déterminer elle-même les critères de décision. Dans une deuxième phase, j’ai présenté des exemples concrets d’affichage de poste à partir de cas simples en me limitant à utiliser 4 ou 5 candidats. Je faisais l’exercice devant elle : je procédais à chacune des opérations en lui demandant de m’observer. Pendant ce temps, j’expliquais à voix haute ma façon de procéder en montrant en détails les gestes effectués et en m’assurant que Marie voyait clairement les indications écrites sur les documents. Tout le long, je révélais mon raisonnement. J’opérais donc très lentement et très minutieusement pour qu’elle

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voie comment je procédais. Parfois, je posais des questions pour mettre en relief les opérations ou les pièges à éviter. Je la questionnais aussi sur les opérations pertinentes pour susciter son intérêt, parfois, en répondant moi-même à certaines questions. Par exemple, je lui demandais : selon toi, quelles sont nos autres options ? Est-ce que tu penses que c’est le bon moment de questionner le gestionnaire? Après avoir complété un premier tableau, je reprenais l’exercice avec un autre candidat. Ainsi: je le faisais, je l’expliquais, je le montrais et après, elle pratiquait ». Dans une troisième phase, Marie procédait elle-même à l’exercice. Alors, c’est elle qui expliquait son fonctionnement, qui raisonnait à voix haute, qui cherchait les informations dans les outils, etc. pendant que moi je l’écoutais, j’observais, je la questionnais, je l’orientais tout en la corrigeant au besoin. À cette étape, Marie vérifiait souvent ce qu’elle faisait. Évidemment, ce travail minutieux requiert du temps. J’estime que le fait de compléter cette grille avec ma coachée me prenaient deux à quatre fois plus de temps qu’habituellement. Comme je devais, montrer et expliquer tranquillement chacune des opérations, il fallait ralentir mes gestes et mes réflexes habituels et faire preuve de patience. Pour une bonne part, j’attribue le succès de mon coaching à ma présence, mais surtout à ma générosité dans la transmission d’informations. Je donnais beaucoup de détail. Du reste, j’admets qu’il est risqué de surcharger l’apprenante d’information. Dans cette expérience de coaching, à un moment, j’ai réalisé que Marie avait de la difficulté à comprendre et à retenir toutes les données. Je l’ai perçu à travers son langage non verbal. Mais, je me suis adaptée : j’ai réduit l’information, j’ai focalisé sur les aspects importants pour mieux synthétiser l’information. Il est clair pour moi que cette expérience de coaching avec Marie a été globalement très positive, mais je ne peux nier des moments de tension sont survenus dans la relation. J’attribue cela au fait que je suis de nature analytique. J’apprécie beaucoup le travail minutieux et les précautions d’ordre éthique. Ma coachée, qui a une personnalité plus concrète, tend à travailler plus rapidement, plus spontanément. Mon attitude prudente, qui s’exprime par des explications répétées, pouvait irriter Marie. En effet, Marie se sentait contrainte par mon encadrement ; elle exprimait parfois son besoin d’autonomie. Je sentais que j’étais parfois « un boulet pour elle », que « je la freinais ». J’avais l’impression qu’il y avait des risques de « blocages » dans ses apprentissages mais aussi dans le développement de « la relation de confiance ». Même si Marie ne m’en parlait pas directement, je « sentais » cette tension. Je me questionnais souvent sur ma manière d’exprimer mon rôle. Je me demandais : « est-ce que je vais trop loin ? Quand est-ce que je m’arrête ? Ce que je fais, est-ce toujours du coaching »? À la suite du constat de cette tension, j’ai donc réduit un peu les explications et les gestes de contrôle ; j’ai laissé plus d’autonomie à ma coachée. Je me suis ajustée à elle et Marie l’a fait pour moi. En quelque sorte, nous cherchions toutes les deux l’équilibre entre l’autonomie et l’encadrement. Sans se parler ouvertement de la tension vécue, nous nous sommes ajustées spontanément pour préserver notre lien de confiance. Selon moi, il est important d’écouter sa coachée, de s’adapter à sa personnalité, de continuer à l’encadrer mais tout en s’ajustant. Je dois dire aussi que j’ai trouvé difficile aussi de constater, à un moment, que ma coachée n’avait plus besoin de moi. Alors que pendant toute la durée du coaching, j’avais bénéficié de la reconnaissance de Marie, je constatais que la relation se transformait : Marie devenait une

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collègue, de même niveau, et n’était plus une apprenante. La relation se transformait et je vivais cela comme une perte. C’était un deuil, je n’étais plus la référence ce qui était difficile pour mon égo. Mais, la fin du coaching s’est développée naturellement sans souligner véritablement la fin du processus. Dans une procédure formelle, mon superviseur a évalué la compétence de Marie en vérifiant des « points de rendement précis ». C’est lui qui a déterminé que Marie avait réalisé les apprentissages requis. Même si tout le long du coaching, au sein même de la réalisation des tâches, j’ai apprécié et évalué au fur et à mesure la performance de ma coachée, il ne s’agissait pas d’une évaluation formelle. Indirectement, mon superviseur m’a aussi évalué.

5.2.3 Histoire de Claudie, une marraine d’expérience du milieu communautaire (cas G)

Claudie est responsable du financement et des communications dans un organisme communautaire depuis 25 ans. Financée par Centraide et le Secrétariat à l'action communautaire autonome et aux initiatives sociales, cet organisme sans but lucratif est voué à l’information sur la santé au travail des travailleurs18. Elle embauche 11 employées, des femmes, en majorité dont 6 employés permanents et 5 employés à temps partiel qui travaillent sur appel. A partir du moment où elle a commencé à travailler pour cette organisation19 vouée à améliorer la santé des travailleurs, Claudie a sensiblement toujours occupé les mêmes fonctions malgré quelques changements à son poste de travail. Âgée de 61 ans, elle prendra sous peu sa retraite. Les tâches qu'effectue Claudie sont très variées. En tant que responsable du financement, elle collabore aux demandes de subventions, elle fait le suivi avec les partenaires financiers et elle établit les prévisions budgétaires, en collaboration avec la secrétaire comptable. En tant que responsable des communications, Claudie rédige les communiqués de presse et reçoit les demandes d’informations des médias en dirigeant les journalistes vers les personnes appropriées. En plus de ces tâches, elle voit à l'informatisation des dossiers des travailleurs; elle s'occupe de la formation des jeunes stagiaires en droit ainsi que des nouveaux employés, en collaboration avec les autres membres de son équipe.

* * *

Après avoir terminé un baccalauréat en criminologie et un autre en psychosociologie de la communication, j'ai travaillé une dizaine d'années dans des garderies. Lorsque j'ai débuté dans ce milieu, je m’occupais des enfants de deux ou trois ans, puis, avec des bébés de zéro à 6 mois. Je n'étais pas formée pour faire ce travail. J'ai appris « sur le tas » et je suis devenue une très bonne éducatrice. En tant qu'éducatrice, j'ai participé à la formation des nouvelles employées. À l’époque cela se faisait de façon très informelle. À ce moment-là, le secteur des garderies n'était structuré comme c’est le cas aujourd’hui. Aucune des travailleuses n’avait de formation en pédagogie ou en psychologie de l'enfant. Nous faisions tout et nous travaillions souvent sans être payées. C'est un travail que j'ai beaucoup aimé, même si je trouvais cela difficile.

18 Pour préserver l’anonymat de notre participante et de l’organisation, quelques informations sur le

mandat de l’organisation et sur les catégories de travailleurs visés ont été modifiées volontairement. 19 Les tableaux XXIV, XXV et XXVI, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation.

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Je ne me souviens pas très bien comment je suis arrivée à changer d'emploi. Cela fait si longtemps que je travaille ici. Je crois que je commençais à être fatiguée de travailler avec les bébés. J'ai cherché autre chose et j'ai « atterri » ici. Je suis ici depuis vingt-cinq ans, sans interruption. Toutefois, durant cette période, j'ai entrepris des études de maîtrise en bibliothéconomie. J'étudiais à temps plein et je travaillais ici à temps partiel. Pendant un court moment, j'ai travaillé pour un centre de documentation fédéral : je cumulais cet emploi avec l’emploi à temps partiel ici. Si le centre n’avait pas fermé, j’y serais surement restée car les conditions de travail étaient bonnes. Mis à part le travail dans les garderies et au centre de documentation, je n'ai pas fait autre chose. Compte tenu de ma situation de mère monoparentale, c'était préférable pour moi de poursuivre ici. J'avais des avantages: entre autres, le remboursement des frais de garderie lorsque je devais travailler le soir ou la fin de semaine. Comment est-ce que j’ai débuté mes fonctions de marraine ?

Lorsque j'ai commencé à travailler ici, je n'ai pas eu de formation spécifique sur le marrainage. Cependant, comme j'ai été marrainée moi-même lors de mon arrivée dans le groupe, je connaissais bien les différentes étapes pour former une personne. Ainsi, j'ai commencé à exercer des fonctions de marraine auprès des stagiaires en droit peu de temps après avoir commencé à travailler. Ici, tout le monde marraine : cela fait partie du travail de chacune des membres de l’équipe. La formation des stagiaires et des nouvelles employées par marrainage est un processus très structuré. En fait, le marrainage est véritablement une tradition - nous en faisons depuis plus de 25 ans – ainsi qu’une responsabilité partagée par toute l'équipe. Ceci fait partie des tâches de tout le monde! Notre organisation est dotée d’un plan d'intégration très structuré destiné à chaque nouvel employé et à chaque nouveau stagiaire. Le processus de formation et d'intégration est le même pour tous. Lorsqu'une personne quitte l’organisation, c'est elle qui amorce la formation de sa remplaçante. Comme je suis ici depuis 25 ans, je n'ai évidemment pas encore la responsabilité de former ma remplaçante, mais j'ai collaboré à la formation des nouvelles employées à de nombreuses reprises. Une organisation très outillée pour supporter le marrainage

Nous avons un plan d'intégration pour chaque nouveau stagiaire et nouvel employé ainsi que d’un guide d'intervention décrivant en détail les situations pouvant se présenter au service téléphonique et les réponses à donner aux travailleurs. De plus, comme nous fonctionnons beaucoup en équipe, tous offrent son "feedback" à propos de la personne que nous formons. Cette année le guide d'intervention a été révisé et modifié; ça faisait longtemps que nous ne l'avions pas fait. Nous disposons d’un troisième outil important : un petit guide pour les marraines qui nous rappelle certains aspects dont il faut tenir compte dans notre accompagnement des stagiaires. Tous ces outils ont été conçus par notre groupe. Former complètement une nouvelle employée à son nouvel emploi prend entre six et neuf mois, selon les personnes. La responsable de la formation est, comme je l'ai mentionné tout à l'heure,

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la personne qui quitte son poste et avant de quitter, elle va commencer à former celle qui la remplacera tout en faisant collaborer, par la suite, les autres membres à divers moments. Pour ce qui est des stagiaires, ils sont formés à une fonction précise que nous appelons « faire du service ». Ceci consiste à répondre aux questions - souvent de nature juridique – posées par des travailleurs à propos de leurs droits au travail. Bien que les stagiaires ne donnent pas d'avis juridiques, ils doivent aussi informer les travailleurs et les guider au sujet des procédures à suivre lorsque leurs droits sont lésés. L’une des employées permanentes de notre organisation - la responsable du service - est la superviseure officielle de la formation des stagiaires. Toutefois, les marraines collaborent à la formation par l'accompagnement individualisé qu'elles offrent à chaque stagiaire.

Comment est-ce que je perçois de mon rôle ?

Le marrainage fait partie de mes tâches, comme je l'ai mentionné précédemment. Je crois que j'ai certains atouts pour exercer mon rôle. Tout d’abord, je connais bien la Loi sur la santé et sécurité du travail, même s'il y a des articles de loi que j’aime moins expliquer. C'est mon travail de suivre les dossiers de chaque travailleur qui a reçu de l’information et de rectifier les choses s’il y a des erreurs. Comme c'est moi qui informatise les dossiers, je m'aperçois facilement des erreurs. Par exemple, l'autre jour, j’ai constaté qu’un stagiaire avait confondu la situation d’une agence de recouvrement avec celle d'une agence de placement. Dans un contexte, je vais lui expliquer que ce n'est pas la même chose ; je peux aussi en discuter avec sa marraine attitrée ou avec la responsable du service. De plus, compte tenu de la localisation de mon bureau et parce que je suis attentive à ce qui se passe autour de moi, j'entends les autres et je m'aperçois qu'il y a des erreurs ou des choses que les stagiaires ne font pas correctement. À ce moment-là, je le fais savoir à la marraine attitrée ou à la responsable du service. Il est très important pour moi que les gens aient les bonnes informations et qu'on puisse les aider. Pour toutes ces raisons, je trouve que je suis bien placée pour être marraine. Je collabore à la formation des nouvelles employées, mais ceci est moins fréquent compte tenu de la stabilité de notre équipe de travail. Comme je forme principalement les stagiaires en droit qui participent à notre mission, mon récit portera sur eux. Généralement, il s’agit de jeunes étudiants universitaires en droit qui ont choisi notre organisation comme lieu de stage. Le stage s’échelonne sur plusieurs mois, soit de septembre à avril. Ils sont ici six heures et demie par semaine. Généralement, ces personnes sont au début de la vingtaine. Comme ils n'ont pas d'expérience en droit ou en milieu communautaire, nous devons leur donner des lignes directrices, leur expliquer quoi faire, quoi dire. À l'occasion, nous recevons des stagiaires un peu plus âgés. Par exemple, l'année dernière, notre stagiaire était une femme bilingue âgée de 35 ans, une mère de trois enfants avec beaucoup d'expérience de vie. Elle a appris très rapidement. Lui montrer le travail était un vrai charme!

Déroulement général du marrainage

Généralement, le marrainage se passe à peu près toujours de la même manière avec l’arrivée, à chaque année, de deux nouveaux stagiaires. Chaque nouveau ou chaque nouvelle stagiaire est accueillie par une équipe et non par une seule marraine. Chaque jour, une marraine différente lui montre le travail à faire. De cette manière, l'étudiant en stage peut voir plusieurs façons de travailler car chaque employée a un style particulier.

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La formation du stagiaire se déroule en suivant le plan d'intégration, un outil qui décrit l’ensemble du processus de formation en détail. Il y a un modèle général de plan d’intégration, qui est ensuite adapté pour les stagiaires et pour les employés, et qui est personnalisé selon la fonction occupée par chaque personne. Notre plan d’intégration général prévoit une formation d’une durée de 2 à 3 semaines pour tous, employés et stagiaires. Mais, au total, la formation est plus longue. Comme je l'ai mentionné plus haut, la formation des stagiaires dure le temps de leur année scolaire, c'est-à-dire de septembre à avril, avec une interruption durant la période de Noël. Pour les employées, la formation varie selon l'expérience ou les connaissances, mais je dirais que ça prend environ six mois. Chaque stagiaire - et ceci est vrai aussi pour les nouveaux employés - participe tout d’abord à une formation juridique de trois jours dont le thème est la Loi sur la santé et sécurité du travail. Donnée par une avocate qui est consultante externe, cette formation se passe en groupe. Les participants sont nos stagiaires, des nouveaux employés et des intervenants d'autres groupes communautaires intéressés par le droit du travail. Une fois la formation de groupe terminée, nous voyons à l’intégration de chaque stagiaire. La marraine présente les membres de l’équipe et montre l’espace de travail. Le lendemain, on présente la tâche « du service » proprement dit. C’est la personne responsable du service qui le fait. Puis, on demande au stagiaire de faire de la lecture individuelle sur la loi notamment. Il y a beaucoup de lectures au début de l’intégration car, selon nous, quelqu'un ne peut pas tout absorber d'un coup. La personne qui est marrainée passe donc du temps, seule dans son bureau : en fait, pendant ce temps, elle se forme elle-même. Elle lit, entre autre, notre rapport annuel d'activités et plusieurs autres documents. Ces périodes de lecture se produisent à travers cette étape où nous expliquons le travail fait par chacun des membres de l’équipe et les dossiers importants. Pour cela, nous suivons ce qui est décrit dans notre plan d’intégration. Le plan suggère une démarche à suivre et indique chacun des dossiers essentiels à présenter. Le marrainage en quelques étapes

Lorsque je présente ma tâche ou un dossier au stagiaire, je montre ce que je fais pendant environ deux ou trois heures. Je lui parle du financement, des projets que nous avons, des organismes de subvention, etc. J’explique ce que je fais pour la promotion et les activités que j’organise. Puis, je lui montre les tâches que je fais qui concernent directement le service d’information, notamment l’informatisation des dossiers des travailleurs. Je dis comment on les gère, comment on les classe, comment on fonctionne pour le rappel des messages téléphoniques, les procédures à suivre selon les différents cas. Je donne des explications pour chacun de mes dossiers, même si le stagiaire n’a à y travailler directement ou si elle n’a pas à s’y consacrer immédiatement comme dans le cas de l’informatisation des dossiers. Il y a des tâches qui demandent des connaissances préalables. La personne qui commence ne pourra pas faire cela tout de suite car elle n’a pas encore toutes les connaissances. Ça va lui prendre un certain temps. Parfois, les stagiaires aiment bien informatiser les dossiers des travailleurs, mais ils ne saisissent pas encore le but que nous recherchons, celui de collecter des données pour la production de rapport. Dans l’immédiat, nous souhaitons surtout qu’ils sachent remplir correctement les formulaires. Tout ce que je viens de décrire constitue la première étape de la formation en individuel. Puis, quelqu'un va leur présenter le guide d'intervention au service. C’est une autre étape qui sert à

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préparer les stagiaires à répondre aux appels téléphoniques. La première journée, il est assis à côté de nous et c'est nous qui répondons au téléphone alors que celui-ci est en main libre. Nous prévoyons généralement deux périodes où la marrain écoute le nouveau : chaque période dure au moins deux fois, pendant environ trois heures et demie chaque fois. Le stagiaire peut être avec moi une journée et avec ma collègue la journée suivante. Habituellement la formation se fait un à un, c'est-à-dire une marraine avec un stagiaire. Plus rarement, il arrive, qu'il y ait deux stagiaires et une marraine. Ensuite, dans une autre étape, c'est au tour du stagiaire de prendre le téléphone. La marraine est assise à côté de lui pour au moins deux périodes. A ce moment, le téléphone est toujours en main libre. Bien entendu, les travailleurs qui font appel à notre service sont informés qu'ils parlent à un stagiaire en formation et que la superviseure est là et qu’elle les écoute. Les marraines peuvent intervenir n'importe quand. L’autre étape importante consiste à laisser le stagiaire faire les appels par lui-même. Mais nous verrons un peu plus loin que tout ne se déroule pas toujours sans heurts surtout quand les stagiaires commencent à "faire du service" par eux-mêmes.

Je peux mentionner que l'accompagnement du stagiaire se fait, dans un premier temps dans le bureau de la marraine. Plus tard, lorsque les stagiaires sont plus autonomes, ils reçoivent les appels dans le bureau qui leur est réservé. Au début, nous nous asseyons à côté du stagiaire dans notre bureau et ensuite, nous pouvons aller dans son bureau, selon les besoins. Comme mon bureau est situé près du bureau des stagiaires, j'entends régulièrement ce qui se dit. Je peux ainsi continuer à donner mon "feedback", soit directement aux stagiaires, lorsque je suis la marraine, soit à travers la marraine assignée ce jour-là ou la responsable de l'équipe. Lorsqu'il s'agit de former une nouvelle employée, les activités de formation se passent un peu dans son bureau, dans le bureau de la personne responsable de le formation de la nouvelle employée et un peu dans le bureau de chaque employée. En effet, chacune d'entre nous va expliquer son rôle dans l'organisation. L’évaluation

La durée du marrainage pour être bien formée à « faire du service » varie d’une personne à l’autre. La durée est plus longue pour les stagiaires : c’est une question de maturité, d’âge et de statut aussi. Les nouveaux employés sont moins timides et elles ont plus d’expérience. Les stagiaires craignent beaucoup de donner des avis juridiques. Cette crainte vient de ce qu’ils apprennent à l’université : ils ont peur d’aller trop loin dans les explications données aux travailleurs. Personnellement c’est que je trouve difficile avec les stagiaires : ils ont une façon différente de communiquer les droits et les stratégies de défense aux travailleurs. Ils n’osent pas les informer de toutes les stratégies possibles de peur de verser dans l’avis juridique.

L’évaluation des stagiaires est réalisée par la personne responsable du service. Celle-ci se fait en collaboration avec la personne responsable de l’université à l’aide d’une grille d’évaluation fournie par l’institution. La responsable du service rencontre chaque stagiaire individuellement à trois reprises au cours du stage. Mais, de manière plus formelle, elle le rencontre à deux reprises, en complétant le formulaire.

En ce qui concerne l’évaluation des nouveaux employés, il n’y a pas de distinction entre l'évaluation des acquis de la formation et l'évaluation du "rendement". Il n'y a qu'une seule

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évaluation formelle à travers laquelle les forces et les faiblesses de chacun sont évaluées. Chaque membre de l'équipe est investi dans cette évaluation. Je vous décris ceci plus amplement. Au début, nous demandons de manière informelle et générale comment ça va avec la personne. On demande si elle s’intègre bien et si ça va bien avec ses tâches. Habituellement, nous faisons cela un mois ou deux après son arrivée en poste. Il est déjà arrivé qu’une personne n'aime pas son poste. Celle-ci nous l'a dit elle-même, car elle a reconnu qu'elle n'était pas à sa place. Dans cette situation, ça ne vaut pas la peine d'attendre ! Suite à l'évaluation informelle, nous faisons une évaluation plus formelle et plus systématique. Pour les employées régulières, l'évaluation a lieu une fois par année. Une nouvelle employée sera évaluée formellement après six mois, au terme de sa période de probation. Nous fonctionnons comme ceci: tout d'abord, la personne s'auto-évalue à l’aide d’un guide d’évaluation, après, nous l'évaluons toute l’équipe ensemble. Ce guide de plusieurs pages décrit les forces et les faiblesses, divisés en plusieurs « blocs », décrit l’appréciation de chaque rubrique selon une échelle graduée qui va de « excellent, très bien, bien, etc. Lors d’une rencontre de groupe, nous donnons notre "feedback" à la personne et elle nous dit si elle est d'accord avec nos observations. Ensuite, la personne évaluée quitte la salle où nous nous trouvons tous. À ce moment, nous prenons des notes et ce qui est donné à la personne c'est ce sur quoi nous nous entendons tous. Nous regardons les forces, les faiblesses tant au niveau personnel que professionnel, l'intégration dans l'équipe, les tâches, est-ce que la personne s'implique dans les réunions, si elle fait partie d'une coalition, est-ce qu'elle amène ses idées, est-ce qu'elle est une bonne porte-parole, est-ce qu'elle s'implique dans les réunions d'équipe, est-ce qu'elle est bonne en rédaction, en vulgarisation, nous évaluons à peu près tous les aspects de la fonction de la personne va faire. Est-ce qu'elle a de l'imagination, est-ce qu'elle est créative, ponctuelle, débrouillarde, autonome, nous passons à travers tout. Nous examinons tout cela en détail et nous rédigeons un compte-rendu qui résume ce sur quoi nous nous sommes entendues. Par exemple, nous pouvons dire, c'est une bonne formatrice, elle fait une bonne gestion de ses formateurs, mais elle a plus de difficulté dans tel aspect de ses tâches, etc.

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Illustration : aider Sonia à faire des entrevues téléphoniques avec les travailleurs Pour exposer une expérience typique de marrainage, je vais décrire comment j’ai formé Sonia à réaliser des entrevues téléphoniques avec les travailleurs. Sonia était une très jeune stagiaire, étant âgée d’à peine une vingtaine d'années. C'est une personne très douce et très empathique qui n'aime pas l'injustice. Elle dit que le travail dans le secteur communautaire est « émerveillant ». Comme je l'ai décrit précédemment, une partie du marrainage consistait pour moi à répondre aux demandes téléphoniques des travailleurs pendant que Sonia m'observait. C’est ce qu’elle a fait à quelques reprises. Par la suite, c'était à son tour de prendre le téléphone pour répondre à un travailleur qui cherche de l’aide pour un problème en emploi. Je me souviens qu'elle était extrêmement nerveuse, la première fois. Elle n’était pas seulement nerveuse, elle ne parvenait pas à bien informer les travailleurs et à fournir les bonnes réponses. À un moment, j'ai dû prendre un appel téléphonique qu’elle avait commencé, poursuivre l’entrevue avec le travailleur et même la finaliser parce que Sonia était trop fébrile. Pourtant, juste avant, elle avait déjà écouté deux entrevues téléphoniques. Elle était particulièrement nerveuse. Souvent, elle ne pouvait pas aller très loin dans ses interventions avec un travailleur. Parfois les situations lui semblaient trop complexes. D’autres fois, elle ne connaissait pas assez le sujet abordé par le travailleur. Alors, elle ne savait pas quelles questions poser. Concrètement, lorsque je reprenais une entrevue, ceci se déroulait comme suit: une fois que Sonia avait pris le téléphone et qu’elle était en entrevue, je prenais la parole (le téléphone est en mode "mains libres") en disant au travailleur au bout du dit : "je suis son superviseur et j’ai des questions à vous poser ». Alors, je commençais à poser certaines questions pour pouvoir donner de bonnes réponses. Autrement, l'entrevue de Sonia était trop minimale. Dans la situation que je décris, je voyais qu’elle avait perdu le contrôle, qu’elle ne savait pas quoi demander, ni quoi dire. Elle ne savait pas non plus comment orienter son entrevue. Dans d’autres situations, Sonia entendait les messages téléphoniques laissés par les travailleurs sur le répondeur. Comme ils donnent généralement quelques indications de base sur leur situation, cela lui laissait le temps de faire quelques recherches avant d’entamer l’entrevue téléphonique. Pour s'aider, Sonia prenait des notes avant de rappeler les travailleurs. Elle avait aussi préparé un cartable comprenant des séparateurs pour identifier les thématiques de base. De plus, pour s’aider à mieux repérer l’information juridique à transmettre et pour augmenter sa confiance en elle, elle prenait soin la veille, de lire la documentation chez elle. Tout comme le font les autres stagiaires, elle consultait les notes de service qui décrivent les interventions effectuées par les autres intervenants de notre groupe ou par la responsable de l’information : ceci pouvait l’orienter pour offrir de meilleures informations aux travailleurs.

La difficulté de Sonia à réaliser des entrevues n'est pas exceptionnelle. Tout comme les autres stagiaires qui sont jeunes et qui n’ont pas d'expérience, elle a mis plus de temps pour se sentir à l'aise au téléphone. Puis, je crois que les travailleurs se rendait compte qu'elle est jeune – surtout qu’elle a une voix de petite fille – ce qui peut l'intimider encore plus. De plus, le fait d’être assise à ses côtés n’aide pas les choses. Ce n'est pas toujours facile de composer avec le regard que nous avons sur eux ! Et puis, comme il y a tellement de situations qui ne sont pas prévues dans les lois actuelles, c'est normal de ne pas avoir toutes les réponses.

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C’est ainsi, qu’après quelques heures assises à mes côtés, Sonia est devenue plus autonome et a été capable de réaliser des entrevues plus en profondeur. À un moment, j’ai alors pu me distancier d'elle. Même si je n’étais plus assise à côté, elle savait que j'étais là si elle avait un problème. Elle pouvait venir me voir et savait que c'est toujours possible de dire à une personne qui nous consulte : "Écoutez madame, je vais aller voir ma marraine et je vais revenir avec l'information pour vous donner les meilleures réponses possibles". Je dois spécifier que les situations de travail les plus difficiles, ne sont pas traitées par les stagiaires mais par les employées permanentes. Ce sont, par exemple, des cas de travailleurs qui pensent au suicide ou qui expriment trop d’agressivité. Nous faisons attention à nos stagiaires, c'est pourquoi nous ne leur donnons pas les cas trop difficiles. Sonia, et les autres, peuvent nous parler s'ils ont besoin de soutien. Nous faisons des évaluations, des petits rappels, nous sommes là s'il y a des questions. Bref, nous faisons le maximum pour nos stagiaires et ils l'apprécient. Avec Sonia, j'ai surtout eu à travailler le contrôle des entrevues téléphoniques. Elle prenait beaucoup trop de temps à répondre, environ une heure et demi par personne. Compte tenu du nombre de demandes, nous ne pouvons pas consacrer autant de temps à chaque travailleur. Or, Sonia avait de la difficulté à finaliser ses entrevues. Elle devait apprendre les terminer et à le faire correctement. C'est aussi important de savoir comment amorcer une entrevue, pour bien se diriger soi-même à travers les questions essentielles à poser. Pour cela, il faut poser les bonnes questions, dès le début. Sonia devait connaitre des éléments dès le départ pour contrôler son entrevue. Pour terminer, je dois dire que je n'ai pas eu de difficultés à marrainer Sonia. C'est une personne très agréable, qui a toujours le sourire. C'était facile d'être en relation avec elle. Comme elle tenait compte de ce que nous lui disions, elle s'est beaucoup améliorée depuis le début de son stage. Aujourd’hui, elle prend moins de temps pour chaque personne et elle est plus habile à terminer ses entrevues. Je crois que Sonia ferait une excellente travailleuse communautaire, bien qu’elle aurait besoin de prendre un peu de "recul" face aux situations. Bref, je suis très satisfaite de ma relation de marrainage avec Sonia. Globalement, ce que je considère le plus satisfaisant dans mon rôle de marraine, c'est de constater que les stagiaires font ce que je leur suggère. Lorsque je leur donne des trucs et qu'ils réapprennent et que, finalement, ça sert concrètement à quelque chose.

5.2.4 Récit de Geneviève qui joue le rôle de parrain dans une pharmacie (cas H)

Geneviève est technicienne-chef de laboratoire dans une pharmacie de la banlieue nord de Montréal. Agée de 44 ans, elle occupe ce poste depuis quatre ans. Ce commerce de détail qui compte près de 50 employés, est l’une des succursales d’une importante chaine de pharmacies20. Ce commerce, qui existe depuis 34 ans, est en position de stabilité. Les employés sont majoritairement des femmes et des étudiants qui travaillent à temps partiel qui sont en proportion importante (50%). Le gérant est responsable de la formation, un rôle qu’il partage avec les responsables de chacun des départements qui doivent voir aux besoins de leurs employés.

20 Les tableaux XXVII, XXVIII et XXIX, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait

de l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation.

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Cependant, le gérant peut compter sur l’expertise en formation du siège social, une bonne part de la formation étant centralisée. Une professionnelle du département des ressources humaines du siège social offre un soutien important à ses succursales : une formation en salle, un plan de formation et de nombreux outils. Le soutien du siège social vise, en particulier, les compétences pour le service à la clientèle et les compétences techniques pour les employés de laboratoire. Dans le récit de Geneviève, nous voyons comment la « formation par parrainage » s’allie à des formes d’organisation particulières et comment ce type de commerce se structure avec le soutien de l’organisation centrale. Geneviève montre comment elle accompagne les nouvelles techniciennes de laboratoire à travers son rôle de parrain.

*** Ma carrière de technicienne en laboratoire

Lorsque j'étais étudiante au secondaire, j'ai commencé à travailler comme caissière dans une pharmacie. J’avais l’intention de continuer mes études mais j’aimais tellement mon travail que j'ai décidé de rester à la pharmacie. Lorsqu'une technicienne a pris son congé de maternité, on m’a offert de la remplacer. Ça se passe souvent comme ça : lorsqu'on voit des jeunes caissières débrouillardes et qu’un poste s'ouvre, on va les chercher. Comme le poste au laboratoire était plus varié et mieux rémunéré, j’ai été intéressée. Donc, c'est comme ça que j'ai commencé. Il y avait une personne à remplacer et même si je n’y connaissais rien, j'ai appris « sur le tas ». J'ai travaillé dans cette entreprise pendant 15 ans. Dès le moment où j’ai commencé à travailler dans une pharmacie, j'ai commencé à donner de la formation. À travers toutes mes années de carrière, j'ai formé environ une vingtaine de nouvelles employées. Je faisais du parrainage, c'est-à-dire que je prenais une nouvelle technicienne sous mon aile et je lui montrais le travail à faire. Au début, on n'utilisait pas de guide et il y avait très peu d'outils. En fait, ce n'était pas standardisé. Le parrainage se faisait de manière informelle. Ainsi, je peux dire que j'ai formé plusieurs techniciennes, dès les premières étapes de mon parcours professionnel. Ensuite, lorsque j'ai changé de pharmacie. Mais, j'ai continué à donner de la formation, tout en accomplissant mes tâches de technicienne. Puis, on m’a offert le poste de technicienne en chef. Alors, mes tâches ont changé avec des responsabilités de gestion qui se sont ajoutées à mes autres fonctions.

Parrainer, cela s’est fait naturellement

J'ai commencé à donner de la formation par initiative personnelle. Ça s'est fait naturellement. J'aimais ça, alors que d'autres ne voulaient pas en faire. Suite à cela, j'ai été sollicitée pour le poste de technicienne chef. C'est principalement moi qui formais les nouvelles, sauf les fins de semaine. A ce moment, on jumelait les nouvelles avec des techniciennes d'expérience qui travaillent à temps partiel. Je considère que je possède plusieurs qualités et compétences essentielles pour donner de la formation. Je suis patiente et j'essaie de me mettre à la place de l'autre pour comprendre comment elle vit une situation. Je suis bien protectrice aussi : je ne veux pas que les employées que je forme se fassent engueuler par les clients. De plus, je suis capable de dire les choses de manière correcte sans être trop brusque. Je dirais que c'est là une de mes principales qualités.

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Souvent, lorsqu'il y a un gros problème, je vais prendre la personne à part et je vais être capable de lui parler. Je vais essayer de rendre ça plus humain et éviter de lui faire de la peine. Par exemple, il y a une employée qui travaille ici depuis longtemps mais qui n'est pas tellement rapide; il faut planifier l'horaire sans l’exclure, mais tout en tenant compte des exigences d'efficacité, puisque nous fonctionnons avec le système Kaizen21. Je sais que cette technicienne préfère un poste en particulier. Or, elle ne peut pas y être tout le temps, parce qu’elle va ralentir la chaine de travail. Donc, il faut être capable de lui faire sentir qu'elle fait partie de la « gang » de filles, tout en lui montrant qu’elle est meilleure à d’autres postes de travail. Il faut lui expliquer pour que ça « coule bien ». Dans un milieu de femmes, il faut y aller délicatement ! La perception de mon rôle et le soutien de mon entreprise

Lorsque j'ai commencé à donner de la formation à la pharmacie, je n'avais aucune crainte. Je savais que je connaissais bien le travail que je devais le montrer. Je savais aussi que lorsqu'une fille est bien formée, après quelque mois, c'est un « plus » pour tout le monde. Ici, on travaille beaucoup en équipe. Plusieurs tâches peuvent être déléguées et les journées coulent plus facilement, lorsque le personnel est formé. Lorsque les employés sont polyvalents, cela profite à toute l’équipe. Ceci réduit le stress des pharmaciens, en plus de réduire leur charge de travail et celle des autres employés. Alors, il vaut mieux travailler avec des gens bien formés que de former les gens à moitié ! Pour effectuer mes tâches de formation, j'essaie d'être libérée de mes autres tâches, mais ce n'est pas toujours facile. A l'occasion, je fais un peu de temps supplémentaire pour réussir à tout terminer. Parfois, j'ai de la difficulté à compléter le guide de parrainage, surtout lorsque nous sommes dans une période très achalandée ou s'il y a une nouvelle employée à intégrer. A ce moment-là, il se peut que cette partie de la formation soit un peu bâclée. Comme je l’ai dit plus tôt la formation est devenue plus formelle à la pharmacie à travers les années. Le plan de formation que j’utilise a été conçu par le bureau chef. Depuis quatre ans, nous utilisons un guide de parrainage qui indique les diverses étapes de la formation et le contenu de chacune d'entre elles. La formation est donnée en partie par la succursale et par le bureau chef. La formation donnée en succursale est effectuée sous le mode individualisé, avec un parrain et à l’aide de visionnement de vidéos. Celle qui est offerte par le bureau chef est donnée en groupe et elle peut également être suivie individuellement, à la succursale, avec l'aide de modules. Une fois la formation terminée, les techniciennes ont accès à une certification qui atteste des connaissances et des compétences reliées au poste et qui montrent que les techniciennes sont aptes à travailler dans l’ensemble des succursales de la même bannière. Je tiens à spécifier que la formation de technicienne de laboratoire qui se donne au CEGEP comprend des composantes similaires à celle offerte en milieu de travail. Toutefois, contrairement à celle suivie dans un CEGEP, elle ne donne pas accès aux emplois de techniciens de laboratoire offerts dans les hôpitaux.

21 Le Kaizen est une méthode d'organisation du travail, développée au Japon, dont l'objectif est l'amélioration de la qualité. C'est une amélioration qui s'effectue en changeant de petits aspects et non en effectuant de grandes transformations ou restructurations. Cette amélioration implique tous les niveaux de la hiérarchie, autant les ouvriers que la direction. Elle se fait à partir des suggestions des employés qui identifient des aspects à améliorer et ce, dans tous les secteurs de l'entreprise. Le but du Kaizen est la qualité totale et ce but n'est jamais atteint (Bélanger et Regol, 2003).

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Ce que j'aime particulièrement dans la relation de parrainage, c'est de rendre les gens autonomes. Quand la formation est terminée, que je peux m'en aller après ma journée et que je sais qu'avec la technicienne qui est là, ça va bien se passer. J'aime aussi quand les techniciennes sont très motivées et qu'elles veulent en savoir plus. Ceci se produit avec les étudiantes en pharmacie ou celles qui veulent étudier dans le domaine. Elles posent les bonnes questions, elles veulent apprendre vite, elles veulent visionner tous les vidéos.

Profils des employées que je parraine

Comme je l'ai mentionné précédemment, je parraine surtout les nouvelles employées. À l'occasion, je complète la formation d’autres employés selon leurs besoins. Lorsqu'une nouvelle personne est embauchée au laboratoire, je suis responsable de sa formation. Je décide quelle portion je vais réaliser moi-même et quelle partie je vais déléguer. Les employées du laboratoire sont généralement de jeunes étudiantes, soit des étudiantes en pharmacie ou d'autres domaines. Lorsque je suis chanceuse, les employées restent à l’embauche de la pharmacie tout au long de leurs études. C'est la situation idéale puisque, les ayant formées moi-même, elles n'ont pas de mauvais plis. Lorsqu'elles quittent notre entreprise à la fin de leurs études, nous perdons souvent de très bonnes employées. Nous sommes dans un secteur où il y a beaucoup de roulement de personnel. Les techniciennes sont difficiles à trouver et à maintenir en poste. Plus de 60 % des employés, dans notre pharmacie, travaillent à temps partiel et la grande majorité d'entre eux sont des étudiants. Je devrais dire des étudiantes, parce que 80% des employés de la pharmacie sont des femmes. Au laboratoire, il n’y a que des femmes. De plus, la moitié des employés sont des jeunes de moins de 30 ans.

Le déroulement général de la formation : phases, contenus et lieux

La formation offerte dans notre entreprise est très structurée. Le plan de formation est conçu entièrement par le bureau chef et il est mis totalement en application à la succursale. La formation est décrite dans le guide du parrainage. Celle-ci est composée de cinq parties, intercalées par deux examens. Les cinq parties sont: l’accueil, la formation TP-1, à la suite de laquelle, il y a un examen, la formation RXPRO 1 et la formation TP-2. A la suite de celle-ci, il y a un autre examen et puis finalement, la formation RXPRO 2. A la fin de ces cinq phases, les employées obtiennent leur certification maison qui porte le nom de la bannière de notre pharmacie. Elles sont alors techniciennes de laboratoire. La formation est effectuée en partie par moi et en partie par le bureau chef qui organise les activités en groupe. Nous utilisons une dizaine de vidéos que les employées du laboratoire doivent visionner. Malgré le fait que la formation soit bien structurée, je dois dire que je préfère fonctionner sans règles préétablies. Je donne la formation en m’ajustant aux évènements qui se déroulent durant la journée. Je fais attention de ne pas tout donner en même temps sachant que la personne ne l'a jamais fait. Pour elle, le travail est plus laborieux que pour nous qui le faisons depuis longtemps.

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La formation pour les techniciennes de laboratoire a lieu principalement au laboratoire, dans la section où les clients commandent ou récupèrent les médicaments prescrits par les médecins. Tel que je l’ai mentionné, certaines formations peuvent avoir lieu au bureau chef. Une autre partie de la formation se tient dans un petit bureau de la pharmacie pour le visionnement des vidéos. À ce sujet, mon rôle consiste à vérifier la disponibilité de ce bureau car il n'est pas dédié exclusivement à la formation. La déroulement du parrainage et les outils utilisés

Lorsqu'une nouvelle employée arrive, la première chose à faire, consiste à lui présenter tout le monde dans la succursale. Mais, je dois admettre que souvent je n'ai pas le temps de le faire moi-même. Dans ce cas, c'est le gérant qui fait les présentations et qui fait visiter la pharmacie. Par la suite, la nouvelle employée rencontre la secrétaire pour l’ouverture de son dossier et pour régler divers aspects techniques. Puis, comme je n'ai pas non plus le temps de lui montrer la caisse enregistreuse avec toutes ses particularités, je la jumèle avec une caissière pour quelques heures ou une demi-journée. Le temps varie selon la personne : il y a des employés qui apprennent plus vite que d'autres. Après cela, la caissière va me l'envoyer au laboratoire. Normalement, elle est devenue capable de se débrouiller sur une caisse. Mais, je dois avouer, qu’il y a souvent des périodes très achalandées – des « rush » - avec les clients qui arrivent tous en même temps. Dans ces moments, nous sommes vraiment dans le feu de l'action et la nouvelle employée est carrément « dans nos jambes ». Ceci explique qu’on lui demande de rester à la caisse et non pas au laboratoire. Une fois le "rush" passé, elle revient au laboratoire et elle met en pratique ce qu'elle a commencé à apprendre : elle peut donner les prescriptions et faire des tâches moins techniques. Après, elle peut revenir au laboratoire. Au début, la nouvelle employée ne touchera pas du tout à l'ordinateur. Lorsqu’une personne n’a aucune expérience, il lui prendra quelques jours, une semaine et, parfois deux semaines, pour maitriser l'ordinateur et les prescriptions. Elle va commencer par apprendre à sortir les étiquettes, les mettre dans le bon plateau, s'occuper des reçus, aller chercher les médicaments sur les tablettes et apprendre ce que sont les médicaments génériques. Une fois qu'elle a appris à bien faire ces tâches, il faut lui montrer à répondre au téléphone. Souvent, on dirait que les nouvelles employées ont peur de répondre ! Donc, il faut qu'elles apprennent à répondre au téléphone, utiliser la caisse, faire l'accueil, répondre aux patients à l'accueil, poser les bonnes questions sur les prescriptions, demander s’il y a des allergies, etc. Quand tout ceci est suffisamment maîtrisé, l'employée peut apprendre comment procéder avec les nouvelles prescriptions. Une fois qu’elle maîtrise assez bien tous ces aspects, je la mets sur l'ordinateur et je commence à lui montrer des renouvellements de médicaments qui sont très simples. En effet, les renouvellements, c'est plus facile que les nouvelles prescriptions. Ainsi, elle va faire cette tâche pendant un certain temps. Quand elle est à l'aise avec les renouvellements, je vais lui montrer comment faire les nouvelles prescriptions. Même si les nouvelles employées veulent souvent travailler tout de suite à l'ordinateur, je fonctionne de cette façon lorsqu'il y a beaucoup de patients. Autrement, elles vont ralentir le rythme de travail de préparation des prescriptions. Tous les employés seront obligés de l’attendre et les patients, à l'autre bout, devront attendre aussi. Pour éviter cela, je préfère les faire pratiquer durant les périodes tranquilles. Souvent, je leur assigne une tâche précise et plus facile sur un ordinateur qui n'est pas trop achalandé – par exemple, l’entrée des prescriptions en

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attente – ce qui leur permet tout de même de se pratiquer. Après tranquillement, et pas trop vite, l’employée ira à l'ordinateur pour traiter les nouvelles prescriptions. Mais tout cela dépend aussi du pharmacien en service avec la nouvelle technicienne. Nous travaillons avec trois ou quatre pharmaciens et chacun a sa manière de faire. Je pense qu’il est nécessaire de s'adapter au pharmacien avec lequel nous travaillons. Mes principaux outils pour former les nouveaux employés sont : l'ordinateur, les cahiers, le guide de parrainage, la calculatrice pour effectuer les calculs, les vidéos à visionner, ainsi que l'ordinateur. Il est le plus important outil de formation, puisque c'est notre principal outil de travail. En ce qui concerne les vidéos, je peux préciser qu’il y en a environ une dizaine. La durée du visionnement varie de trois ou quatre minutes pour les plus courts à une heure et demie pour le plus long. À la pharmacie, nous avons aussi élaboré une grille qui permet à chacun de savoir quels vidéos il doit regarder. Prochainement, cette grille ne sera plus utile puisque que le bureau chef a élaboré une application de formation, qui s'appelle « Managing Learning Systems ». Ainsi, nous pourrons attribuer à chaque employé un code et un mot de passe, ce qui permettra à chacun de faire le suivi de son plan de formation, ce qui inclut les vidéos à visionner. Cette application permet également au gérant de la succursale et à moi-même, d’accéder à un rapport. Nous constaterons quels vidéos ont été visionnés et nous saurons où chaque employé en est dans sa formation et quelles sont ses difficultés. À ce sujet, je peux dire que le visionnement de l’ensemble des vidéos prend généralement une année complète aux nouvelles employées. Selon moi, cela devrait se faire le premier mois de travail même si ce n'est pas toujours possible. Avec la nouvelle application, elles pourront les visionner selon leurs disponibilités. L’évaluation et le suivi

Avant de vous dire comment on évalue, je dois préciser que former une employée à temps partiel, pour qu'elle soit autonome, prend environ un an. Le temps alloué spécifiquement à la formation durant cette année est d'environ trois mois. Pour former une employée qui travaille à temps plein, ça prend environ 6 mois, à plus ou moins 35 heures par semaine. La durée peut varier aussi selon les personnes: il y en a qui apprennent vite et d'autres qui ont besoin de plus de temps. Cela dépend aussi du caractère de la personne. De nos jours, les jeunes sont plus rapides avec l'informatique. Lorsque j'étais jeune on y touchait moins. Maintenant, les jeunes sont plus "allumées", elles veulent apprendre plus sur l'ordinateur. Il y a plusieurs types d'évaluations durant la formation. Lorsqu'une employée visionne un vidéo, ses connaissances sont évaluées par des questions, pour s'assurer qu'elle a bien compris. Les vidéos sont interactifs. Le gérant de la succursale et moi-même recevons les résultats, c’est-à-dire sa note. Si jamais il y a quelque chose qu'elle n'a pas saisi, nous essayons de revenir là-dessus. En effet, bien que je sois la personne responsable de la formation des techniciennes, le gérant est en charge de la formation pour toute la succursale et il s'implique aussi auprès des techniciennes. Comme je l'ai déjà mentionné, il y a deux examens, le TP1 et le TP2. Nous avons un cahier avec des modules à étudier. Lorsque l'employée est prête, qu'elle se sent à l'aise, je commande l'examen qui est élaboré par le bureau chef et elle a une heure et demie pour le faire. Si une employée ne réussit pas son examen, il n'y a pas de stress avec ça ! En effet, les résultats n'ont aucune incidence sur son travail. Le résultat nous permet de voir où se situe sa difficulté. Après,

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on essaie de l'aider avec cette difficulté. Par exemple, nous avons eu une employée qui a échoué deux fois son examen. Or, c'est une très bonne technicienne qui avait seulement mal lu les questions. Je dois dire qu’il y a aussi une évaluation plus informelle qui se fait à mesure, durant le travail lui-même. Pour cela, je ne me place pas trop de loin de l'employée et je l'observe tout en lui donnant mes commentaires. Le suivi de la formation se fait aussi de manière informelle et aussi à travers les vidéos et les examens, qui nous permettent de s'apercevoir des difficultés vécues par les employées. Lorsque nous voyons une difficulté, soit le gérant de la succursale ou moi-même, nous revenons là-dessus avec l'employée, comme je l'ai déjà mentionné. Puisque nous travaillons en équipe, si quelqu'un a besoin d'aide ou si une personne ne comprend pas quelque chose, il n'a qu'à demander à une de ses collègues si je ne suis pas là. Sinon, les techniciennes savent que je suis toujours disponible et prête à répondre à leurs questions.

Illustration : parrainer Ariane, une technicienne de laboratoire distraite Je vais maintenant vous parler d'Ariane, que j'ai parrainée il y a deux ans. Ariane est une étudiante de 19 ans qui travaille à temps partiel, à raison de 15 à 20 heures par semaine, durant l'année scolaire. Elle est toujours à l’emploi aujourd’hui.

Nous avons commencé à former Ariane à son arrivée. Elle avait déjà un peu d’expérience, ayant déjà travaillé deux ou trois semaines au laboratoire d’une pharmacie de la même bannière. Elle n'avait jamais touché à l'ordinateur mais elle savait comment les choses fonctionnent dans un laboratoire. Depuis qu'elle est arrivée chez nous, elle a suivi les deux cours qui se donnent au bureau chef. Elle a réussi le premier examen. Il lui reste encore le deuxième examen à faire. Je ne lui en parle pas en ce moment parce que, en tant qu’étudiante au CEGEP, elle a d’autres examens à réaliser. Ces temps-ci, je constate que dès que je mentionne le mot « examen », elle devient stressée. Lorsque je lui en parle, je fais bien attention, puisqu’elle stresse facilement. Je lui dis: regarde, ce sont des choses que tu es capable de faire et si tu n’avais pas la note de passage, tu n’aurais qu’à le refaire : ce n'est pas grave. A part la formation qui se fait au bureau chef, comme je l'ai mentionné précédemment, le reste a lieu ici, au laboratoire. Pour la former, je me place proche d'Ariane, derrière elle. C'est ce que je fais habituellement lorsque je parraine les employées, parce que souvent elles ont des questions ou elles oublient une étape dans le système informatique. J'aime bien pouvoir repérer l'erreur tout de suite. Même si je reste tout proche, je ne suis pas là tout le temps car je ne veux pas la stresser. Il y a des personnes qui n'aiment pas avoir quelqu'un qui les observe. Les techniciennes sont portées à faire plus d'erreurs quand cela arrive. Je me place donc comme ça, surtout dans les premiers temps. Quand j'ai une nouvelle, je vais essayer de toujours l'avoir avec moi, durant mon horaire de travail. Lorsque c'est possible, et s'il y a des erreurs, je vais pouvoir y remédier immédiatement. Je préfère cela plutôt que d’associer une personne nouvelle avec une autre employée ; autrement, je risque d’entendre dire que ça n'a pas bien fonctionné.

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Cependant, c'est rare que je sois seule avec une nouvelle technicienne. Le pharmacien en service et les autres techniciennes sont également présents pour aider les nouvelles. S'il y a des questions toutes les techniciennes d'expérience peuvent y répondre. Dans le laboratoire tout le monde s'entraide ! Puis, il n'y a pas de question niaiseuse, nous sommes toutes passées par là ! Il arrive que des clients jouent un rôle dans la formation. Certains d’entre eux voient des choses et ils viennent me le dire. Par exemple, l'autre jour un client a demandé de faire couper ses médicaments. Ariane a coupé un comprimé en deux sans prendre le coupe-pilule. Elle l'a fait avec ses doigts et un autre client a remarqué l’erreur. Il a demandé à me parler pour me signaler qu'il ne trouvait pas ça correct. Alors, j'ai pris la technicienne à part et je lui ai suggéré d'utiliser le coupe-pilule. Je sais très bien que parfois fois on n'y pense pas. Comme la maison on peut le faire avec nos doigts, on a tendance à faire la même chose au travail, ce qui n’est pas indiqué. Pour en revenir à Ariane, je dois dire que c’est une jeune fille sérieuse mais qui a tendance à rigoler et à ne pas faire attention à la présence des clients. Au laboratoire, il faut être plus structuré qu'à la caisse et il ne faut pas se comporter comme un enfant. Des fois, il y a des clients malades qui viennent: ils ont un cancer, ils sortent de l'hôpital ou ils ont eu une mauvaise nouvelle. Ils vivent des situations difficiles. Comme parfois y a des périodes plus tranquilles, on peut rigoler. Mais quand c'est le temps d'être sérieux, il faut être à son affaire ! Il arrive également qu'il y ait des difficultés dans les relations entre Ariane et les pharmaciens. Certaines journées, elle est distraite et elle peut faire quelques erreurs. Il y a des pharmaciens qui n'aiment pas ça, puisque ce sont eux qui interceptent les erreurs, pour ne pas que celles-ci se rendent jusqu'aux clients. Alors quand ça fait deux ou trois fois qu’elle fait des erreurs, la confiance n'est plus là. Ariane peut avoir un peu de difficulté à comprendre ça. Quelquefois, elle va me dire: Vous ne me faites pas confiance, vous ne me laissez pas aller à l'ordinateur. Je suis capable à l'ordinateur de gérer la situation, je suis capable de le faire. A certaines occasions, je vais lui répondre: pas de problème, quand je suis là, on va te laisser aller Ariane. Mais quand ça fait trois ou quatre erreurs en série que tu fais parce que tu es distraite ou que tu penses à autre chose, le pharmacien n’est vraiment pas satisfait. Alors, il souhaiterait mieux travailler avec quelqu'un qui fait moins d'erreurs. Selon moi, Ariane est capable de faire le travail, même s'il lui arrive de faire des erreurs. Des fois, il arrive que la situation d’Ariane soit difficile à la maison : alors, elle va moins bien et la tête est moins là. J’estime que cette journée-là, il est préférable pour elle de ne pas faire d'ordinateur. Ariane, c'est donc une personne qui est un peu lunatique. Avec elle, le travail se fait, mais quand il n'y a pas de "rush" et quand c'est une petite journée tranquille et ordinaire, il lui arrive de perdre le fil. Comme elle va « placoter » plus que les autres filles, je dois la remettre à l'ordre. Les techniciennes se mettent à parler ensemble et ensuite elles rient, elles sont dans leur « bulle » et elles oublient qu'il y a des clients. Lorsqu’il y a des clients, cela ne fait pas professionnel. Ce que j'apprécie le plus avec Ariane, tout comme avec les autres filles, c'est que nous avons une très bonne communication. Les filles sont toutes très gentilles, quand il y a quelque chose, elles viennent me le dire. Avec Ariane, ça va bien, même si à l'occasion elle fait des erreurs, ce qui est normal. Des fois, on prend pour acquis que les techniciennes ont acquis des notions, mais ce n'est pas toujours le cas. Par exemple, comme dans n'importe quel commerce, il faut faire des dépôts d’argent régulièrement. Pour éviter de laisser beaucoup d'argent dans la caisse, il faut la

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vider de temps en temps. Malgré cela, je voyais que les dépôts ne se faisaient pas : il y avait $600.00 dans la caisse. A un certain moment, Ariane m'a pris à part et elle m'a dit: "Geneviève, il n'y a jamais personne qui m'a montré comment faire les dépôts". A ce moment, j'ai ri et je le lui ai montré. J'étais certaine qu'elle savait comment faire, puisque c’est une tâche de base qui est montrée dès le début de la formation. Or, elle ne le savait pas. Alors je lui ai dit qu'elle avait bien fait de m'avertir. Je l'ai rassurée en lui rappelant que quand elle ne sait pas faire quelque chose, il ne fallait pas attendre avant de le dire. Il est important que les techniciennes me le signalent tout de suite puisque de toute façon il n'y a pas de mauvaises questions.

5.3. Coach et mentor pour développer les compétences en formation Pour terminer la présentation des récits de formateurs-accompagnateurs, nous prenons connaissance des expériences décrites par Isabelle et par Lisa qui ont toutes deux en commun d’accompagner leurs pairs pour assurer des compétences de formation.

5.3.1 Histoire de Isabelle, une coach de coach du secteur de l’aéronautique (cas D)

Spécialisée en technique en structure d’aéronefs, Isabelle, âgée de 42 ans, est aujourd’hui formatrice. Elle travaille dans une entreprise du secteur de l’aéronautique qui est vouée à la fabrication de pièces d’avion et au service d’entretien. Isabelle y avait déjà occupé un poste de technicienne dans les années 90 et elle y effectue un retour en 2007. Cette entreprise syndiquée, existe depuis près de 30 ans, compte plus de 500 employés, majoritairement des hommes. Malgré l’évolution technologique et en dépit du fait que le nombre d’employés a doublé durant les 20 dernières années, l’entreprise connait depuis peu une perte significative de sa main-d’œuvre composée surtout d’ingénieurs et de techniciens de production. Si cette décroissance importante affecte les techniciens de production, elle touche aussi les employés du département des ressources humaines où travaille Isabelle. Malgré un département très structuré, doté de politiques, d’orientations et de plans précis, notamment en matière de formation, ce dernier a perdu la moitié de son personnel. Comme nous l’expose bien Isabelle dans son récit, cette structuration explique qu’une bonne partie de sa fonction de travail soit consacrée au coaching. La lecture de son récit permet de voir une experte en coaching.

* * *

À la fin de mes études secondaires, j’ai occupé un poste pour le gouvernement fédéral. C’est là que j’ai appris mon métier de technicienne en réparation de structures. J’y suis restée six ans. Après cette expérience, j’ai obtenu un Diplôme d’études professionnelles en montage de structures d’aéronefs, en faisant reconnaître mes acquis. Plus tard, j’ai débuté un baccalauréat en enseignement, par cumul de certificats. Prochainement, j’obtiendrai mon certificat pour formateurs en milieu de travail et j’aurai mon diplôme. J’ai débuté ma carrière en faisant quelques petits contrats comme technicienne dans des compagnies d’aviation commerciale. Puis, je suis venue travailler ici à temps plein en tant que

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technicienne « sur le plancher », par la fabrication de ce type d’avions22. J’ai fait ce travail pendant trois ans. Environ deux ans après avoir débuté, j’ai commencé à travailler comme marraine, c’est-à-dire que je faisais l’accompagnement des nouveaux employés techniques. C’est de cette manière que j’ai découvert ma passion pour la formation. Dès 1998, je n’ai pratiquement fait que de la formation. J’ai quitté cette organisation, à la suite d’une mise à pied, car il n’y avait plus assez de travail. J’ai tout de même gardé un lien avec cette entreprise car dès 2001 on me rappelait occasionnellement pour effectuer des contrats. Puis, je suis allée travailler ailleurs, entre autres, dans une compagnie d’avion commerciale et une entreprise du même type que celle-ci, où j’effectuais également des petits contrats. J’y ai fait du coaching mais ce n’était pas très structuré. On me confiait la formation des nouveaux et je montrais ce que je savais, mais sans avoir un plan. Moi, j’appelle cela « faire de l’accompagnement ». J’ai fait aussi des mandats d’enseignement universitaire dans le cadre de la formation continue : je la donnais en entreprise. On m’a offert ce mandat compte tenu de mon expérience terrain. J’y ai enseigné pendant environ sept ans, de 2000 à 2007. Puis on m’a proposé le poste de formatrice en entreprise, dans mon organisation actuelle et j’ai accepté. Bien supportée par mon entreprise, je deviens coach de coach

C’est principalement parce que j’avais cumulé plusieurs années d’expérience en tant que formatrice que j’ai été recrutée pour ce poste. De plus, je connaissais ce type d’environnement très différent d’un environnement commercial. J’avais donc un atout important. Puis je suis une passionnée de la formation. On peut dire que j’avais tout ce qu’il fallait pour le poste! Au début, je donnais beaucoup de formation en groupe et je donnais aussi de la formation par accompagnement. En 2007, la situation de la compagnie a changé. À ce moment, nous étions quatre formateurs tandis qu’aujourd’hui je suis seule. Dans ce contexte, il était clair que je ne pouvais plus faire les choses comme avant. La baisse des effectifs touchait toute l’entreprise. Avec moins de techniciens et plusieurs départs à la retraite, il n’y avait que deux ou trois personnes dans la classe, ce qui n’était pas efficace. Nous nous sommes dit qu’il fallait faire quelque chose et c’est là que j’ai découvert les points positifs du coaching. Dès 2010, l’entreprise a pris le virage coaching ! Depuis, au lieu de former directement les techniciens par moi-même, je forme des accompagnateurs qui vont coacher les techniciens. Je demande qu’ils soient libérés de leurs tâches pour un temps déterminé, de trois à six mois, et je leur enseigne comment concevoir de la formation. Ainsi, je les forme à accompagner et je les accompagne « sur le plancher ». En ce moment, nous sommes en train de développer une nouvelle formation en coaching d’une durée de cinq semaines. Dès que j’ai commencé à travailler ici, j’ai été encadrée et j’ai obtenu tout le soutien nécessaire. Nous avons identifié ensemble, avec les responsables, mes propres besoins. On me disait : « si t’as besoin d’une formation, vas-y! S’il y en a une, on va faire venir un formateur ». Alors, lorsque j’ai voulu commencer à utiliser des outils de coaching, on a recruté une firme pour m’aider. J’ai également suivi des formations techniques avec des fournisseurs, car je ne savais

22 Les tableaux XV, XVI et XVII, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation.

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pas bien le fonctionnement de tout l’équipement. Ainsi, les fournisseurs ou les fabricants me le montraient pour que je puisse en expliquer l’utilisation aux techniciens. Mon rôle de coach me permet de voir cheminer les gens

Au début de mon mandat en tant que formatrice, en 2007, j’avais certaines craintes car je connaissais la complexité du travail. Comme le formateur que je remplaçais était un très bon formateur, j’avais en quelque sorte de grands souliers à remplir ! Tout en voulant vraiment être à la hauteur, j’avais soif d’apprendre et je me disais que j’allais apprécier le fait d’apprendre. Ce dernier aspect m’a motivé à accepter le poste de formatrice en entreprise. Mais ce que j’aime le plus dans mon travail, ce que j’adore, vraiment c’est le cheminement personnel des gens. Les personnes que je coache, sont les techniciens intéressés à devenir des coachs et qui ont les aptitudes pour le faire. A l’occasion, je coache directement aussi les techniciens réguliers, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas intéressés à devenir des coachs mais qui ont besoin de formation sur des thèmes spécifiques, tels que la santé et la sécurité23. Il y a un processus formel pour choisir les coachs. D’abord, nous regardons les compétences des personnes. Nous avons une matrice de compétences qui indique ce que chacun est capable de faire. Si nous avons besoin d’augmenter notre effectif pour une certaine compétence, nous sélectionnons les personnes qui ont ces compétences pour une entrevue. Nous cherchons des personnes qui ont un savoir-être. En plus du savoir-être, il y a aussi un critère d’ancienneté. Nous évitons de choisir de nouveaux employés comme coach car lorsque nous sommes dans l’obligation de réduire nos effectifs, faute de contrat, ils sont les premiers à quitter. Ceci pourrait nous faire perdre nos coachs en même temps. Notre troisième critère, qui n’est pas le moindre, c’est l’intérêt. La personne doit être intéressée à devenir coach et à l’aise de transmettre ce qu’elle sait. Autrement, l’apprentissage ne se fera pas bien. Lorsque les gens répondent à ces critères, nous leur donnons une formation de coach. Nous les mettrons en situation, en classe de coaching, en leur donnant des situations difficiles, avec des personnes plus âgées, ce qui peut quelquefois créer des difficultés. Parfois, mes coachés sont libérés pour faire le coaching des nouveaux ou pour concevoir la formation. Ils sont libérés quarante heures par semaine et ils sont remplacés. Autrement cela ne fonctionne pas, puisque nous sommes en production et lorsque quelqu’un s’en va, ça crée un vide. Une fois leur mandat de coaching terminé, ils retournent à leurs fonctions habituelles. Lorsque je rencontre pour la première fois les techniciens qui sont nouveaux ou ceux qui ont besoin de coaching, j’évalue leurs besoins et je leur explique le but du coaching. Ensuite, je leur demande s’ils croient avoir besoin de ce coaching-là. S’ils n’y croient pas, cela ne sert à rien, et il vaut mieux utiliser une autre stratégie. Une fois cela vérifié, je les réfère à l’un des coachs disponibles, à ceux que j’ai formés, et ce seront eux qui s’en occuperont principalement. Je laisse souvent aux apprenants le choix entre deux ou trois coachs. S’ils sont plus à l’aise avec une personne, l’apprentissage se fera mieux et ils pourront plus facilement dire qu’ils ne 23 Isabelle utilise les termes techniciens, coachés et apprenants de manière interchangeable tout le

long de son récit.

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comprennent pas, si c’est le cas. Le fait de choisir un coach avec lequel on est à l’aise facilite la création du lien de confiance.

Avant de faire du coaching de coach, il faut concevoir, évaluer et former

Il y a plusieurs facettes à mon travail de formatrice. Je gère la formation, je donne la formation de groupe, je conçois les formations et je forme les techniciens intéressés à devenir des coachs à tous les aspects de l’accompagnement, incluant la conception de la formation. À l’occasion, je coache les techniciens directement. Lorsque les techniciens, qu’ils soient ou non des nouveaux employés, ont besoin de coaching, je les rencontre en premier, souvent suite à la demande d’un superviseur. Quelquefois, cela peut également se faire suite à la demande d’un client qui exige la maîtrise d’une compétence en particulier avec une formation à tous les trois ans. Ensuite, après avoir convenu d’un moment spécifique, je leur présente le plan et les outils de coaching afin qu’ils comprennent bien ce que nous allons faire. Pour ce qui est de la formation des coachs, une fois sélectionnés, en fonction des critères mentionnés plus haut, ils vont suivre une formation pour devenir des coachs. La première partie de cette formation est donnée par une firme externe, en classe, et porte sur des mises en situation. Ensuite, je travaille directement avec eux en accompagnement individualisé. Une partie de mon travail de formation des coachs consiste à expérimenter, avec le coach en formation, le plan de coaching que j’ai préparé pour les techniciens. Ceci, je le fais à la suite de l’identification des besoins de formation. La formation pour devenir coach commence en classe par une période de lecture et une période de partage. Nous faisons cela pour que les employés qui suivent la formation de coach ne soient pas dérangés par les autres qui viennent voir ce qui se passe. Parfois, ils posent des questions telles que « Isabelle, qu’est-ce que tu fais sur le plancher aujourd’hui ? Qu’est-ce que tu vas leur montrer? ». Je coach aussi dans des classes-laboratoires, où je peux faire de la pratique sans être sur l’avion, c’est-à-dire sans avoir accès aux composantes d’un avion. Je dois travailler sur une table ou un établi. Les classes-laboratoires sont des ateliers, situés juste à côté du lieu où les techniciens travaillent (le « plancher »). Les ateliers sont utilisés par les techniciens pour faire des retouches sur les pièces : ils peuvent également servir de classes-laboratoire. Ensuite, je vais me déplacer et effectuer mon coaching directement avec les composantes de l’avion, c’est-à-dire « sur le plancher ». Déroulement détaillé du coaching

Avant tout d’expliquer le déroulement, je dois dire que la durée des coachings est variable. Certains durent un mois, d’autres une semaine et d’autres encore seulement quatre heures. Avant de débuter une activité de coaching avec les techniciens, que ce soit le coaching direct ou le coaching pour former les coachs, je vais préparer le plan de coaching. Comme je l’ai mentionné, je vais d’abord en faire l’essai, soit avec un technicien déjà qualifié, soit avec un des coachs en formation. Je vais lui dire : « fais comme si tu ne connaissais rien, je vais te coacher et dis-moi

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ce qui me manque ». Ensuite, nous faisons tous les exercices ensemble. Après cet essai, nous commençons le coaching. Plusieurs des coachings effectués auprès des techniciens réguliers ont une composante technique importante. Il s’agit de leur montrer les techniques de réparation des pièces : il y a beaucoup de procédés spéciaux, des procédés chimiques, mécaniques et des éléments de santé et sécurité très importants. D’ailleurs, nous commençons habituellement par ce thème et si ça ne fonctionne pas, nous ne continuons pas la formation. Il faut que cet aspect soit bien compris puisque c’est le plus important. Nous formons aussi à la fabrication et à l’assemblage de pièces, ce qui est moins complexe. Les personnes qui travaillent dans ce secteur n’ont pas besoin d’avoir un niveau d’éducation aussi élevé, même si dans les faits, elles sont très éduquées. Il s’agit de former ces employés à la fabrication de composantes simples et à l’assemblage de composantes avec des attaches aéronautiques. Nous allons donc les accompagner à travers les diverses séquences, c’est-à-dire en leur expliquant comment lire un dessin technique, comment poser des pièces, comment les attacher ensemble, etc. Mon outil principal de formation est le plan individuel de formation. Il comprend la description de toutes les activités, c’est-à-dire tout ce que fait l’accompagnateur et tout ce que fait l’apprenant. Il y a aussi de petites évaluations écrites pour voir si les coachés vont bien, s’ils ont bien compris. Puis, nous avons des évaluations pratiques. Les coachés peuvent pratiquer tant qu’ils le veulent. C’est seulement lorsqu’ils sont à l’aise que nous passons à l’évaluation. En réalité, la première évaluation a lieu avant le début du coaching. On évalue la maîtrise de la compétence qui est l’objet de la formation, telle que manifestée par le technicien en formation (le coaché) par une série de points. Chacun des points est initialisé par l’apprenant, lorsqu’il est atteint. Puis, le coach va indiquer le niveau de maîtrise de la compétence atteinte par l’apprenant. S’il y a des aspects évalués à 75% ou 80%, je vais revérifier et lui donner du soutien. S’il y a des aspects qui ne fonctionnent pas, je vais intervenir directement. Je peux aussi faire appel à quelqu’un qui est un spécialiste de cet aspect. Cela peut arriver car certains « trucs » du métier acquis sur le « plancher » ne sont pas connus du formateur. Lorsque je suis informée de ces nouveaux « trucs », je les intègre à mes formations ultérieures. En plus du plan individuel de formation, nous avons également développé un plan d’accompagnement à la tâche, très détaillé avec les objectifs de la formation. Nous l’utilisons avec des personnes qui ont acquis leurs compétences dans d’autres entreprises, car nous voulons nous assurer qu’elles utilisent bien nos méthodes. Le plan d’accompagnement est également utilisé lorsque quelqu’un change de poste. Dans ce cas, la personne a développé des compétences mais il y aura des différences avec nos façons de faire. Nous ferons de l’ajustement grâce au plan d’accompagnement. Le plan d’accompagnement remplace le plan de coaching détaillé pour ces personnes car ce dernier serait trop long et mal ajusté à leurs besoins de formation. Le coaching comprend une évaluation élaborée et un suivi

Comme notre processus d’évaluation est assez élaboré, je vais résumer les divers points mentionnés plus haut. Une évaluation est effectuée avant de débuter le coaching, pour connaître le niveau de maîtrise de la compétence sur laquelle sera axée la formation. Ensuite, le coaching est ponctué de courtes évaluations. Puis, à la fin du processus, le coaché s’autoévalue et le coach

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évalue la maîtrise de la compétence par un pourcentage, que je dois approuver. En effet, quelquefois le coach et le technicien ne s’entendent pas sur le pourcentage à accorder et puisque ce sont deux techniciens, c’est moi qui décide ce que je vais mettre comme pourcentage. C’est important parce que suite à la confirmation d’une acquisition de compétences vient l’autorisation, de signer un travail dans le système informatique. Nous avons des évaluations pratiques, des évaluations théoriques, c’est-à-dire des examens, des quiz, des observations pratiques et des examens pratiques. Nos coachés sont aussi évalués par l’extérieur, car nous avons beaucoup d’audits, des audits clients externes, mais aussi des audits clients internes. Moi-même, je suis évaluée par des audits externes, c’est-à-dire que certains de mes clients importants vont vérifier comment je fais les choses et si ma documentation respecte leurs exigences, par exemple. Les audits internes sont des agents d’assurance-qualité qui effectuent ce travail à temps plein à l’intérieur de notre organisation. Ils vérifient si les choses sont réalisées selon les normes de l’organisation. Après l’évaluation, un suivi est effectué. C’est la partie la plus difficile à réaliser pour moi en ce moment. Puisque j’ai à peu près 20 coachings qui se passent en même temps. Même, si la durée varie, c’est difficile de tous les suivre en même temps. J’essaie de faire un suivi un mois et trois mois après la formation. Des fois, tout a l’air d’aller et puis, finalement, il y a des erreurs. Le suivi me permet donc de me rendre compte qu’il y a des aspects qui n’ont pas marché et qu’il faut réajuster. La présence des autres pendant le coaching

Quelque fois, des superviseurs sont aussi présents lors du coaching. Ils veulent voir comment se passe la formation. Mais ils veulent surtout qu’elle se termine rapidement car ils veulent intégrer les employés le plus rapidement et le plus efficacement possible. En général, je demande à mes coachs d’essayer d’intégrer le superviseur dans le coaching, si possible. Si la présence du superviseur nuit, comme c’est arrivé à l’occasion, je demande au coach de ne pas intervenir, pour ne pas se mettre en mauvaise relation avec le superviseur. Dans un tel cas, c’est moi qui interviens à ce moment-là. J’explique au superviseur que le temps consacré à la formation sera récupéré plus tard, en termes de qualité du travail. Cette situation se produit rarement : les superviseurs sont très réceptifs. Nous les rencontrons, nous leur expliquons ce que nous faisons, nous les invitons et les intégrons à notre coaching. Généralement, ils sont très contents. Les chefs d’équipe peuvent aussi être une ressource en coaching. Lorsque les coachs ne sont pas là, ils peuvent dire au technicien en formation : « n’oublie pas, si je ne suis pas là, va voir ton chef d’équipe »! Celui-ci est généralement sur les lieux du coaching. Quelquefois, le chef d’équipe est intégré plus formellement à la formation comme dans le cas où il explique les règles d’équipe ou certains changements de tâche. Les personnes qui font les audits, c’est-à-dire les agents d’assurance-qualité, sont quelquefois présentes aussi pendant la formation, puisqu’elles auditent mon propre travail en observant mes procédés. Nous essayons de les encadrer pour que les apprenants, spécialement les nouveaux employés, ne soient pas stressés en leur présence.

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Illustration : comment j’ai montré à Jacques à développer son savoir-être Je vais maintenant vous parler de mon coaché, Jacques. Je l’ai coaché afin qu’il devienne formateur de coachs. Jacques est un technicien qui a vingt ans d’expérience. Il entretient de très bons liens avec les nouveaux employés; il aime les prendre sous son aile. Nous lui avons donc demandé s’il était intéressé à devenir coach et il a dit être très intéressé. Jacques devait coacher des nouveaux employés dans le secteur de la fabrication et de l’assemblage. La tâche de ces employés consistait à fabriquer un soutien moteur et à mettre toutes les pièces dans le gabarit. Étant donné que c’était le premier que nous fabriquions, nous n’avions pas une procédure de travail très détaillée. Il fallait que les employés consultent les dessins par informatique; il était donc nécessaire d’évaluer l’aisance des personnes par rapport à l’informatique. Puis, il fallait également évaluer toutes les étapes de la composante et des compétences que les personnes devaient acquérir pour cela. Concrètement, ceci voulait dire être en mesure de percer des trous, ajuster les pièces, vérifier le dessin à la pièce et la conformité de l’emplacement de la pièce et, ensuite, attacher les composantes ensemble. Il fallait aussi être en mesure de protéger la pièce pour ne pas qu’elle roule, ce qui est un procédé spécial. Afin de mieux comprendre comment j’ai coaché Jacques, il est important de saisir le processus de coaching que celui-ci a dû effectuer. La première étape du coaching effectué par Jacques a été d’évaluer les compétences initiales des techniciens, en lien avec les étapes mentionnées précédemment. Suite à cette évaluation, il a débuté son accompagnement. Celui-ci a été un défi pour Jacques parce qu’il n’a pas été libéré de sa tâche à 100% pour effectuer son coaching. Il l’a été uniquement à 15 heures par semaine alors que 30 personnes ont débuté leur emploi en même temps, ce qui lui a demandé d’être très efficace. Lorsqu’il le pouvait, il coachait deux personnes à la fois. Mon rôle en tant que formatrice de coach était d’être là avec lui pour l’aider et le soutenir. Nous avons préparé le plan de coaching ensemble et les fois où ça fonctionnait moins bien, nous allions faire le coaching ensemble. Pour assurer le coaching de Jacques, nous nous sommes préparés une semaine à l’avance. Même si j’avais déjà un plan de coaching, je lui ai demandé d’en développer un pour qu’il soit à l’aise. Mon coaching avec Jacques a alors été centré sur trois grands aspects : le langage corporel, le questionnement par questions ouvertes et la mise en place des objectifs de formation. Avec Jacques, nous avons surtout travaillé sur les techniques de questionnement. Nous nous sommes aussi beaucoup attardés au savoir-être, pour bien aborder la personne lorsqu’elle ne fait pas les choses tout à fait correctement. Nous avons travaillé sur les interventions à faire, sur les comportements à avoir en tant que coach lorsqu’on observe quelqu’un pour ne pas que la personne se sente menacée. Effectivement, Jacques n’était pas à l’aise de dire à quelqu’un que ce qu’il faisait n’était pas « correct ». En effet, c’est un piège de rouler les yeux, ou d’exprimer d’autres réactions du même type. Il y a beaucoup d’apprenants qui sont très sensibles et qui vont perdre confiance en eux si leur coach réagit de cette manière. Jacques, lui, avait tendance à baisser les épaules lorsque les techniciens faisaient quelque chose qu’ils ne devaient pas faire et qu’il leur avait montré plusieurs fois. Alors, pour qu’il prenne conscience de son langage corporel, je lui montrais quelque chose de nouveau et là, je baissais les épaules, sans rien dire d’autre. A ce moment, il me demandait : « qu’est-ce qu’il y a ? » C’était l’occasion de lui faire prendre conscience que le langage corporel pouvait affecter l’autre, même sans aucune remarque. Quelquefois je lui faisais des petits signaux lorsque je l’observais ce qui voulait dire

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« ne baisse pas les épaules ». Avec un autre coach, j’ai aussi utilisé un miroir, pour faire un jeu. Je réagissais de manière extrême pour qu’il comprenne bien comment son comportement non-verbal peut affecter ses coachés. Suite au plan de coaching, nous avons fait des mises en situation dans un bureau et après j’ai fait quelques interventions de coaching pendant qu’il m’observait. J’effectuais mon coaching avec des techniciens plus expérimentés ainsi qu’avec des nouveaux pour qu’il voit la différence entre les deux. J’ai fait des démonstrations avec quatre techniciens. Ensuite, il a mis ces observations à l’essai avec un sujet qu’il connaissait bien, avec lequel il était à l’aise, auprès d’un employé qui était moyennement expérimenté. Après avoir fait un premier coaching sur ce sujet, nous en avons discuté avec Jacques dans mon bureau. Il m’a posé des questions à propos d’éléments avec lesquels il avait de la difficulté. Puis, il a essayé avec une deuxième, une troisième et une quatrième personne. Quand il a vu qu’il maîtrisait mieux un sujet, il se disait capable de l’appliquer aux autres. Le coaching de Jacques a duré environ trois semaines. La première semaine, c’était le temps de la préparation. La semaine suivante, il m’observait et il apprenait à coacher les gens. La troisième semaine, il l’a presque fait tout seul. J’y allais de temps en temps mais je dirais qu’à 95%, il a fait le coaching par lui-même. Jacques et moi passions environ une dizaine d’heures ensemble pendant ses 15 heures de libération. Il avait trois heures de coaching par jour à effectuer et nous passions environ une heure et demie dans la même journée à réajuster, pour qu’il soit capable d’effectuer son coaching le jour suivant. Nous nous rencontrions quotidiennement, à la fin de la journée, pour faire le point sur ce qui avait bien été, moins bien été. Il est arrivé que Jacques dise « je ne suis pas capable de lui montrer cet aspect, on dirait qu’il ne me comprend pas ». Alors, le lendemain je suis allée voir et j’ai réalisé que la personne était un apprenant qui ne réussissait pas à comprendre uniquement en regardant quelqu’un d’autre. Il devait faire la tâche lui-même. A partir de ce moment, nous nous sommes adaptés et nous avons décidé de garder près de nous des composantes qui ne sont pas critiques, pour que les gens puissent les utiliser, se pratiquer et exécuter la tâche correctement. Lorsque Jacques effectuait son coaching, il y avait toujours d’autres employés qui observaient. Les plus expérimentés se sont ainsi montrés intéressés à devenir coachs, sans avoir été formés pour le faire. Toutefois, c’est positif parce que ça a suscité de l’intérêt, mais je devais les avertir de ne pas trop stresser Jacques, de le laisser faire son travail. Pour terminer, je dois dire que la relation de coaching avec Jacques n’a pas présenté beaucoup de difficultés. Mais, je peux en nommer trois : le fait qu’il mettait rarement des commentaires écrits sur ses documents, qu’il avait de la difficulté à renforcer positivement un des apprenants ainsi qu’une difficulté à poser les bonnes questions lorsque les apprenants ne comprenaient pas. Un de mes défis avec lui a été de l’aider à comprendre qu’il fallait d’abord parler des points positifs et ensuite des choses à améliorer. Mis à part ces trois aspects, Jacques est une personne très positive et qui aime son rôle de coach. Il aime jaser, il aime partager; je dirais que c’est le candidat idéal pour être coach. Je ne l’ai jamais vu se décourager. Durant sa formation, il a particulièrement apprécié le jeu du miroir. Nous avons beaucoup ri en faisant cet exercice, ce qui a créé une complicité qui perdure lorsque nous sommes ensemble «sur le plancher ». Aujourd’hui, lorsque Jacques rencontre de nouveaux

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aspects dans son coaching, il les partage avec moi. Avec lui, j’ai appris beaucoup et j’ai atteint mon but en très peu de temps. Je voulais former un coach qui ferait l’accompagnement parce qu’il le veut et non parce qu’il y était obligé. D’ailleurs, il est encore coach. J’aime voir les gens réussir, savoir que grâce à mon apport la personne se sent à l’aise et en confiance. C’est ce que je trouve le plus satisfaisant dans mon rôle de coach.

5.3.2 Lisa, une mentor qui aide à développer la compétence des enseignantes en santé (cas I)

Âgée de 58 ans, Lisa est conseillère pédagogique dans un centre de formation professionnelle24 située dans une ville située en Montérégie. Avant d’occuper ce poste, elle a enseigné dans divers programmes d’études liés au domaine de la santé. Lisa a été infirmière pendant plus de 25 ans en milieu hospitalier avant d’enseigner. Depuis cinq ans, elle accompagne ses pairs 25 , des infirmières qui ont décidé, tout comme elle, d’enseigner leur métier. Pour obtenir leur brevet d’enseignement, celles-ci doivent suivre et réussir un programme universitaire qui comprend une formation pratique en milieu de travail. L’accompagnement offert par Lisa se déroule sur les lieux du travail dans le cadre d’une formation gérée conjointement avec le milieu universitaire, selon les règles du ministère de l’Éducation. Le récit de Lisa, une accompagnatrice d’expérience, illustre de la collaboration entre le milieu de travail et l’université qui sert au développement de métiers dans un secteur névralgique, celui de la santé. Il montre aussi l’étendue de ses compétences d’accompagnement.

* * * J’ai débuté ma carrière d’infirmière au début des années 80 après des études collégiales en techniques infirmières (1979) puis en nursing à l’université. À titre d’infirmière, j’ai pratiqué en milieu hospitalier, en réadaptation physique, en chirurgie, à l’urgence, en soins de longue durée, etc. Comme j’aime les défis, je changeais de postes ou de départements. J’avais besoin d’aller plus loin avec plus de responsabilités : j’ai débuté comme aide-soignante, puis assistante chef d’unité et ensuite chef d’unité. Malgré ma stabilité professionnelle – 10 ans en soins de longue durée -, je me suis aussi investie dans des activités de toutes sortes. J’ai été membre de plusieurs conseils d’administration et j’ai organisé maints colloques. En fait, j’ai toujours été une personne très active. Rapidement après l’obtention de mon premier diplôme, j’ai entrepris d’autres études c : un baccalauréat en nursing, un autre en santé communautaire (1983), puis en nursing clinique, un microprogramme sur l’accompagnement des personnes en fin de vie (1991), un certificat en gérontologie sans compter mon baccalauréat en formation professionnelle (2008) et ma maitrise en éducation (2014). Encore aujourd’hui, je suis inscrite à l’université dans un microprogramme en enseignement supérieur. 24 Les tableaux XXX, XXXI et XXXII, qui se trouvent à l’annexe 8, présentent plus en détail le portait de

l’organisation de travail et les caractéristiques de la formation. 25 Lisa explique que dans le milieu de l’éducation, on trouve deux statuts dans l’accompagnement des

enseignants. Celui d’enseignant associé est attribué aux enseignants expérimentés qui accompagnent un collègue d’une même spécialité (ex : soins infirmiers) et qui porte le statut de stagiaire. L’enseignant associé n’est pas le seul à accompagner le novice ; un superviseur de stage désigné par l’université y contribue également. Dans le cas du statut de « mentor », l’enseignant expérimenté n’est pas nécessairement de la même spécialité.

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C’est en 2003, que j’ai commencé à enseigner, à titre de suppléante, ici au Centre de formation professionnelle. J’ai tout de suite eu la piqure pour enseigner. L’année suivante, j’ai été embauchée à contrat ; par la suite, à plein temps. Puis, j’ai fait le grand saut ! J’ai laissé tomber mon poste d’infirmière pour recommencer une carrière d’enseignante un peu précaire. C’est ainsi que j’ai enseigné, pendant 10 ans, dans les programmes destinés à des préposés aux bénéficiaires, à des auxiliaires et à des infirmières. À l’hôpital, j’ai souvent formé du personnel sur les nouvelles techniques de soin, ce qu’on nomme la formation en cours d’emploi. On me jumelait aux nouvelles employées. À ce moment, on me disait souvent : tu devrais enseigner, car tu expliques bien. L’an dernier, on m’a offert d’occuper le poste de conseillère pédagogique, un défi très intéressant et stimulant. Puisque j’avais déjà exercé la fonction « d’enseignante associée » qui consiste à accompagner des enseignants en soins infirmiers et puisque que je terminais ma maitrise, je m’y sentais bien préparée. Les conseillères pédagogiques doivent aider les enseignants dans leurs activités d’enseignement pour qu’ils soient bien outillés, les informer des normes en vigueur, des activités de perfectionnement, des changements liés aux programmes d’études, les soutenir en cas de difficultés avec les élèves, etc. Actuellement, je partage ce rôle avec une autre conseillère. J’accompagne des enseignants dans des programmes précis en formation générale des adultes et en formation professionnelle. Comment je suis devenue officiellement mentor et comment je perçois mon rôle

Tous les centres de formation professionnelle au Québec doivent contribuer à la formation du personnel enseignant. Pour enseigner les soins infirmiers, il faut s’inscrire à une formation universitaire et être accompagné par un collègue d’expérience pour développer sa compétence en enseignement. Ceci est nécessaire pour obtenir une qualification légale. Comme notre centre a toujours besoin de mentors, j’ai été sollicitée par la commission scolaire et la direction de centre. Je n’étais pas très surprise de cette demande, car certaines collègues exprimaient déjà leur souhait d’être accompagnées par moi. En effet, la commission scolaire demande formellement aux novices d’indiquer leur préférence. Je crois qu’on apprécie ma rigueur, mon organisation, ma disponibilité et mon souci de leur bien-être. Même s’il n’y a pas de processus formel de sélection, les mentors doivent avoir l’expérience du métier et un diplôme en enseignement de la formation professionnelle en plus de démontrer leurs aptitudes à l’accompagnement. Une fois que la commission scolaire m’a jugée apte pour ce rôle, j’ai suivi une formation sur le mentorat à l’université. Celle-ci traitait des attentes universitaires et des comportements d’accompagnement requis. Bien que cette formation ait été très courte - 3 heures - l’équipe offrait des ressources d’accompagnement, des outils et un suivi sur l’évaluation des mentorés. Je n’ai jamais eu de crainte à l’égard de ce rôle, sachant que je pouvais compter autant sur mon expérience d’infirmière que sur celle d’enseignante, une double expérience qui me permet de bien donner l’exemple. Au moment où l’on m’a confié cette responsabilité, j’étais consciente de mon aptitude à la relation d’aide et à la communication. Le fait d’avoir été moi-même accompagnée m’aidait aussi à comprendre mon rôle. De plus, je savais que j’aurais une formation offerte par l’université. En fait, lorsqu’on m’a proposé ce mandat, je ressentais

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surtout de la fierté, celle tout d’abord de me joindre à l’équipe des accompagnatrices avec d’autres personnes de grande expérience. Ce qui m’intéressait dans ce rôle, c’est surtout de transmettre ma passion pour l’enseignement. J’éprouvais aussi une fierté de participer à l’accompagnement de mes pairs dans le contexte de la nouvelle formation des enseignants du secteur de la formation professionnelle. Même si ce nouveau mode de formation établi par le Ministère de l’Éducation était contesté dans le milieu, j’avais l’impression de débroussailler le terrain. Le mandat confié par mon employeur

Mon mandat consistait à accompagner un enseignant pendant une période d’une année scolaire pendant sa formation universitaire. Il s’agit de les accompagner dans les activités d’enseignement au fur et à mesure de leur progression à l’université pour assurer le passage du métier d’infirmière à celui d’enseignante. Concrètement, je les aide à connaitre le centre, à planifier un cours en utilisant les ressources et les outils pédagogiques ainsi qu’à dispenser leur cours aux étudiants. Comme il s’agit d’un mentorat26, mon employeur me libère de ma tâche régulière pendant 10 heures par semaine conformément à ce qui est prévu à la convention collective. L’université m’offre également une compensation financière. Même si on utilise le terme mentorat, j’estime que mon rôle consiste à accompagner une personne. Personnellement, je privilégie le terme accompagnement car, il montre mieux qu’il ne s’agit pas de dire à la personne quoi faire, mais plutôt de la soutenir, de lui donner des outils, de l’aider à chercher les meilleurs outils selon ses besoins et ses préférences. Je dois aussi aider les enseignants à prendre conscience des sources de leurs difficultés ou de leurs découragements ainsi qu’à faire des choix parmi les diverses tâches à accomplir. La plus grande difficulté des enseignants du secteur de la formation professionnelle, c’est de concilier l’enseignement en classe et la formation à l’université pendant une longue période. Le mentorat : un déroulement en trois phases avec des rencontres hebdomadaires

Généralement, l’accompagnement se déroule à travers des rencontres hebdomadaires ; parfois les rencontres sont plus espacées. Lors d’une première rencontre, nous discutons de nos attentes respectives et des conditions de la formation. Nous prenons également connaissance des exigences de l’université en regard de l’évaluation et des travaux à réaliser au cours de l’année. Un autre aspect essentiel consiste à planifier nos disponibilités et à signer le code d’éthique qui a été préparé par l’université. À la suite de cette première rencontre, la démarche se déroule en trois phases. La première phase permet à l’enseignante de connaitre les ressources du centre, à faire de l’observation en classe et, progressivement, à consulter la documentation pédagogique, notamment le Référentiel de compétences des enseignants du secteur de la santé. Durant cette

26 Précisons que les règles de libération sont différentes lorsque l’accompagnatrice agit à titre d’enseignant

associé. De plus, dans ce cadre, cette commission scolaire offre aussi une compensation même si elle n’en a pas l’obligation.

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période, l’enseignante novice se familiarise avec le vocabulaire propre à son nouveau métier. À cette étape de leur carrière, des mots comme référentiel ou évaluation formative ne signifient pas grande chose. Durant cette phase, je dois également assurer une bonne connaissance du lieu de travail. Après avoir observé des collègues en classe, mes mentorées doivent produire un travail universitaire. Mon accompagnement consiste à discuter avec elles des aspects observés et à leur permettre de réfléchir à des points précis. Il faut qu’elles puissent anticiper les habiletés à développer pour leur propre enseignement. J’aide l’enseignante à cibler des éléments précis à l’aide d’un questionnaire très détaillé. Par la suite, j’amène mes mentorées à développer leur compétence en « planification de cours ». C’est la deuxième phase du mentorat. Cette compétence va s’acquérir progressivement, toujours à travers des discussions. J’explique, par exemple, comment amorcer un cours ? Comment assurer la synthèse? Comment bien transmettre tel ou tel enseignement ?, etc. Nos discussions se font à l’aide d’outils, de guides, de matériel pédagogique, etc. Pour le nouvel enseignant, il y a beaucoup de notions nouvelles à intégrer. J’entends souvent : Oh mon doux, c’est donc bien compliqué ! Puis, à un moment, vient la troisième phase. Pour l’enseignant, c’est le moment de montrer sa compétence à donner un cours en classe. C’est là qu’il se lancera ! Alors que certains collègues ont déjà enseigné, pour d’autres, ce sont les premières heures d’enseignement de toute leur vie ! Dans un premier temps, j’observe l’enseignement de mes mentorées. Pour cela, je suis carrément assise dans la classe et j’observe ma collègue donner son cours pendant une séance complète, ce qui dure ordinairement 3 heures. L’enseignante est déjà plutôt stressée avec son groupe : il s’agit de la mettre à l’aise. Mon observation porte sur des points précis d’une leçon. Ainsi, je porte attention à ses procédés pour l’amorce de la leçon et pour la sortie de la leçon. Les points observés sont parfois encore plus précis. En effet, je la regarde enseigner et je me demande : est-ce que la position de son corps est trop stationnaire ? Est-ce qu’elle circule dans la classe ? Comment est-ce qu’elle regarde les élèves ? Est-ce qu’elle fixe seulement un élève ou est-ce qu’elle balaie l’ensemble du groupe de son regard ? Pour cette vérification, je me fie beaucoup à mon expérience : est-ce qu’elle se fait bombarder par les questions du groupe ? Est-ce qu’elle perd le contrôle ? Selon les règles universitaires, l’enseignante novice doit dispenser 21 heures de cours, dont 9 heures sont observées par la mentor. Je dois spécifier qu’au cours de cette phase, l’enseignant novice donne également ses cours seul dans sa propre classe sans aucune participation de ma part. À la suite d’une observation, nous discutons ensemble des points forts et des points à améliorer. J’indique toujours à mes mentorées des points à retravailler pour les aider à trouver de la satisfaction dans leur enseignement. De même, avant d’assister à ce cours, je prends soin, au préalable, de regarder et d’évaluer la qualité de son « plan de leçon ». Bien entendu, avant le moment où j’observe l’enseignante devant les élèves, nous prenons soin de discuter de la pédagogie, des façons de transmettre la matière, des outils disponibles, etc. Je vois aussi à réviser certaines conceptions de l’enseignement. Si une partie de l’apprentissage se développe dans la salle de classe, une bonne part de mon accompagnement se déroule en dehors et, surtout, après des heures de cours. Effectivement, le mentorat procède, en grande partie, à travers les discussions qui se tiennent entre deux séances

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de cours, à la fin d’une journée ou lors des journées pédagogiques. Ces rencontres durent environ 1 heure : elles se déroulent dans une salle qui permet la confidentialité. Les autres collègues ne doivent pas entendre nos conversations. Comment est-ce que je procède dans la discussion ? Mon expérience est la matière première de mon accompagnement. Il ne s’agit pas tant de raconter mon expérience ou de dire moi, j’aurais fait comme ça. Il s’agit d’écouter l’enseignante et de lui poser les bonnes questions pour l’aider à cheminer dans sa réflexion et à comprendre sa propre expérience. D’ailleurs, mon propre vécu me permet de comprendre les situations de mes mentorés. Alors, lorsque je constate une situation, je pose des questions. Souvent, les enseignants me demandent si j’ai déjà vécu cela car elles veulent savoir comment j’ai résolu certaines difficultés. S’il peut m’arriver d’exposer ma propre expérience, de raconter ce qui est arrivé et d’expliquer comment j’ai surmonté une situation, je prends toujours soin de retourner la question. Par exemple, je dis: oui, j’ai vécu ça comme ça. Mais, ça ne veut pas dire que tu dois t’y prendre de la même façon. Comment, toi tu penses y parvenir ? Même si mon expérience est essentielle, il arrive qu’elle ne suffise pas. Parfois, les questions posées m’obligent à faire de la recherche et à me pencher sur des lectures. Le mentorat me pousse à me dépasser dans un processus qui n’est pas linéaire. Je n’ai pas toujours la réponse immédiatement : je cherche, je réfléchis et je reviens plus tard à cette question sans jamais donner la réponse complètement. À la fin de la phase trois, nous procédons à l’évaluation des apprentissages. À l’aide de la grille fournie par l’université, j’invite l’enseignant à estimer le niveau d’atteinte des compétences sur une échelle de 1 à 5. Je travaille beaucoup avec le référentiel des 12 compétences en enseignement du ministère. On le regarde ensemble, on identifie les compétences qui sont atteintes et celles à travailler. La personne doit juger différents points de son enseignement et m’expliquer, au cours de la discussion, les bases de son jugement. Cette évaluation veut l’aider à apporter des améliorations. Celle-ci ne porte aucunement sur sa tâche ni sur sa performance. Pour moi, il est clair que mon évaluation ne doit pas servir à justifier un maintien en emploi ou un refus de contrat. C’est la direction qui fait l’évaluation des compétences en suivant les normes ministérielles (les 12 compétences). Si la direction évalue qu’une compétence n’est pas bien maitrisée, je dois de mon côté et à titre de conseillère pédagogique, fournir les outils pour que l’enseignante s’améliore. Le rôle de la direction et celui de l’enseignant associé sont très clairs à ce sujet et bien circonscrits par la convention collective et les règles internes. La personne mentorée est être évaluée, mais elle l’est par un représentant de la direction. Mon accompagnement diffère beaucoup selon le degré d’expérience des mentorées. En fait, je m’adapte à chaque profil d’infirmière, selon l’expérience de travail et selon le cheminement académique. L’infirmière qui a étudié son métier au secondaire est différente de celle issue du collégial ou de l’université. De même, certaines ont déjà donné de la formation en milieu de travail et d’autres, pas du tout. Compte tenu de leur profil, mes mentorées n’ont pas les mêmes conceptions de l’enseignement. Un autre aspect à prendre en compte, c’est l’âge des enseignantes. Les plus jeunes ont parfois le même âge que leurs élèves : je dois les faire réfléchir au statut de l’enseignant, aux notions d’autorité et de distance dans la relation éducative. Il faut dire aussi que, même si mes collègues n’interviennent pas dans mon travail, il arrive que certaines personnes commentent les comportements de mes mentorés. Par exemple, on m’a déjà

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signalé que les jeunes enseignants étaient trop familiers avec les élèves. Lorsque je trouve leurs observations, j’en tiens compte et je vois à mieux encadrer mes mentorés.

Illustration : Annie, une mentorée moins performante Annie est une jeune enseignante en soins infirmiers. Au moment où le mentorat avec elle a débuté, elle travaillait au centre depuis quatre ans. Avant d’être embauchée en 2011, elle savait que pour obtenir un poste régulier, il fallait suivre un programme universitaire en enseignement de la formation professionnelle. En dépit de cette exigence, elle préférait les conditions de travail en enseignement à celles du milieu de la santé27. Avant d’enseigner, cette femme de 27 ans, mère de 3 enfants, avait seulement quelques années d’expérience (5 ans) à titre d’infirmière auxiliaire. Dès le début, avant le mentorat, elle enseignait avec beaucoup de difficulté. À cette époque, j’étais enseignante-chef de groupe : elle m’en parlait souvent. Je lui conseillais des lectures sur l’enseignement et je lui fournissais des conseils. C’est à l’automne 2011 que le mentorat a formellement débuté. Cette expérience s’est déroulée sur plus d’un an et demi, une période plus longue que la normale. Il n’est pas facile pour une mère de trois jeunes enfants de débuter une nouvelle carrière tout en réalisant des études universitaires ! La première phase a été assez longue : dès le début, je voyais qu’elle ne réalisait pas les travaux universitaires demandés. À certains moments, elle répondait aux exigences mais, par la suite, elle se « relâchait ». En général, ses travaux manquaient de rigueur. Lors de la phase suivante (phase 2), je constatais qu’elle avait de la difficulté à planifier ses cours. Elle avait peine à se concentrer, à être attentive. Ses leçons n’étaient pas bien préparées et le contenu à transmettre n’était pas suffisamment approprié. Je lui disais : Pour enseigner, il ne s’agit pas seulement de lire les documents. Il faut être capable de transmettre ce que tu as lu et de préparer des exemples. Parfois, en constatant ce genre de choses, je la sentais motivée par les avantages liés à la profession plutôt que par l’enseignement. Malgré ses lacunes, Annie était une personne dynamique et éveillée. Elle écoutait bien et prenait des notes, mais elle avait tendance à s’accrocher à moi comme si j’étais la bouée de sauvetage pouvant contrer ses difficultés. Souvent, je lui indiquais qu’elle devait se mettre au travail et que mon rôle ne consistait pas à le faire à sa place. Je lui disais : Non, non, non, c’est toi qui travailles, moi je suis là pour t’accompagner. Maintenant prends ce travail, tu reviendras me voir lorsque tu auras terminé. Puis, au moment où mon mentorat était consacré à son enseignement avec les élèves (phase 3), il était clair qu’elle ne maitrisait pas bien la gestion de classe. Elle ne faisait pas non plus preuve de créativité. Elle n’adoptait pas une bonne approche avec les élèves, elle était trop familière avec eux. Contrairement à d’autres enseignants, elle cheminait lentement et prenait son temps. Comme elle se sentait souvent découragée, nous prenions des moments ensemble pour examiner une situation précise ou un point particulier. Pour l’aider face à des difficultés si importantes, je lui proposais de morceler la tâche à affronter, le travail à faire. Ainsi, je lui donnais des objectifs très précis en lui indiquant que je l’observerais ces points en classe. Ceci l’aidait à s’observer elle-même sur des aspects spécifiques, à bien les identifier et y réfléchir. Par la suite, c’est elle

27 En particulier, le salaire plus élevé et la durée des vacances.

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qui devait en faire un point de discussion à partager avec moi. Pour l’aider face à ce découragement, je lui disais également que je la comprenais, que j’avais déjà été dans la même situation. En plus de sa tendance au découragement, Annie était prise de doute. Elle se demandait souvent si elle allait parvenir à bien maitriser son enseignement. Alors, je la renvoyais à elle-même et à sa propre décision : est-ce que tu veux vraiment y arriver ? Elle me répondait : oui, oui, oui, je le veux vraiment. Mais, il y avait du relâchement et une difficulté à persévérer. Je devais l’aider à identifier des repères pour s’accrocher à son choix de carrière. Tout en admettant que les conditions de sa formation étaient particulièrement exigeantes compte tenu de sa situation familiale, il reste que je ne pouvais pas encourager ma mentorée à s’apitoyer sur son sort. Je m’efforçais plutôt de l’aider à faire face concrètement à ses difficultés. Je lui demandais donc : « maintenant, comment on peut faire ? » Il s’agissait vraiment de morceler, de travailler sur des points spécifiques, de lui faire des commentaires précis et de lui proposer des manières de les réorganiser. Même si mes exigences à l’égard d’Annie étaient similaires à celles des autres enseignants, je devais tenir compte de sa personne et de son contexte. Elle trouvait le travail d’enseignement exigeant : je devais accepter qu’elle prenne son temps tout en lui demandant plus de réflexion. Je la faisais donc réfléchir à son choix de carrière et aux conditions de cette profession. Pour cela, j’utilisais un outil pour développer sa capacité réflexive. Cet outil, qui m’a été offert par l’université, c’est une carte d’organisation des idées. J’invitais l’enseignante à inventorier les solutions potentielles à son problème, à les écrire, à sélectionner les plus pertinentes. Par exemple, je lui demandais : Annie, qu’est-ce que tu penses faire face à cette situation ? Selon toi, est-ce la meilleure façon de faire ? Par la suite, il s’agissait de créer un schéma sur papier tout en se représentant elle-même au cœur du schéma. Je lui dis : tu as pensé à des solutions ? Mets ceci par écrit. Décris-moi les avantages et les désavantages de chacune pour toi. Cette démarche permettait à Annie de nommer elle-même ses idées, de les visualiser et de concrétiser les situations qui la préoccupaient. Elle pouvait ainsi focaliser sur le problème, regarder la situation en face avec ses propres critères, à partir de ce qu’elle observait et ce qu’elle pensait être en mesure de faire à partir de ses propres objectifs. À la fin de la discussion, elle disposait d’un document qui retraçait ses idées concrètes, ce qui lui permettait d’y réfléchir non seulement sur le coup, mais aussi par la suite. Je constatais qu’elle devenait capable, par la suite, de réfléchir par elle-même à ses difficultés et de trouver des solutions pertinentes. Ces solutions étaient appuyées sur une réflexion et ne se limitaient pas à des procédures. Durant cette période, mon accompagnement consistait véritablement à amener ma mentorée à réfléchir à ses propres choix, à son mode de fonctionnement et à ses comportements professionnels. J’évitais de lui donner des conseils ou de lui dire comment procéder. Le récit de mon expérience avec Annie peut laisser penser que je suis l’unique source d’influence dans son développement. Or, ce n’est pas du tout le cas. Lorsque j’y pense bien, je dois reconnaitre que ce sont les élèves d’Annie qui ont joué le rôle le plus déterminant dans son apprentissage, l’enseignement leur étant spécifiquement destiné. En fait, ils ont joué le premier rôle ! Ils la critiquaient, la comparaient souvent à d’autres enseignants et se plaignaient de sa manière d’enseigner. Sa sensibilité au jugement d’autrui et sa difficulté à garder une distance critique à leurs égards étaient aussi une grande difficulté.

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Annie se comparait souvent aux autres enseignants du secteur de la santé, surtout à celles du même âge. En particulier, elle se comparait à une enseignante studieuse et travaillante. Elle aspirait à devenir aussi compétente qu’elle, ce qui l’amenait à se décourager. Je discutais avec elle de sa tendance à se comparer à l’autre et je la questionnais au sujet de leurs comportements respectifs. Or, le regard qu’elle portait sur l’autre enseignante était aussi bénéfique: cela lui permettait d’identifier des points à améliorer et de mieux comprendre comment les conditions individuelles contribuent à l’évolution à d’un enseignant. En général, mes collègues n’interviennent pas dans mon travail de mentor. Des enseignantes plus expérimentées ont influencé mon accompagnement avec Annie. En effet, Annie leur demandait souvent conseil. L’une d’elles a joué un véritable rôle de confidente : elle avait besoin de raconter ses états d’âme. D’autres personnes ont aussi influencé mon rôle d’accompagnatrice : la chef de groupe et la directrice adjointe du centre ont voulu discuté avec moi des difficultés d’Annie.

Je souhaite dire une chose importante pour terminer. Face à l’ampleur des difficultés d’Annie, je me remettais parfois en question. Je me demandais si je devais être plus directive avec elle. J’avais tendance à me culpabiliser face à ses difficultés et au regard des autres sur la performance de cette enseignante. Je voyais combien elle était très différente de moi, de ma rigueur en particulier. Au fil de notre relation, je la comparais aux autres et j’étais déçue. Je me disais qu’elle ne devait pas faire l’objet de comparaison, qu’elle n’avait pas à être pénalisée même si elle performait moins que les autres. En même temps, je devais constamment l’amener à réfléchir à ses comportements. Malgré ma tentation de faire le travail à sa place, je devais garder à l’esprit que les lacunes d’Annie n’étaient pas les miennes. Il fallait que je prenne plus de distance, ce qui signifiait d’éviter de jouer à la mère et d’agir plutôt comme une véritable collègue et accompagnatrice. Il faut dire aussi que cette jeune personne était très peu expérimentée : je ne pouvais pas lui donner l’expérience qu’elle n’avait pas. Sa situation m’a fait beaucoup réfléchir sur moi-même. Cette enseignante n’a certainement pas été la plus performante, c’est celle qui m’a le plus apportée, car sa situation comportait plusieurs défis. Elle m’a donc poussé à réfléchir à mon rôle d’accompagnatrice et à me dépasser. En définitive, pour devenir une enseignante compétente, il faut au moins cinq années d’expérience auprès des élèves. Selon moi, cette enseignante n’a pas atteint ce niveau. Même si elle a atteint certains objectifs, elle doit encore développer sa compétence. Pour ma part, je l’ai aidé à choisir la profession enseignante et à apprécier son rôle de transmission des connaissances en soins de santé.

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6. CARACTÉRISTIQUES DES EXPÉRIENCES DE FORMATEURS-ACCOMPAGNATEURS La partie précédente a été consacrée aux récits d’expérience des neuf formateurs-accompagnateurs qui ont révélé l’expérience individuelle de chacun. Nous y avons rapporté leur parcours professionnel, les motifs ayant contribués à leur assignation au rôle de formateur-accompagnateur, la manière d’accompagner leurs collègues, etc. Chacun a également raconté de manière concrète une expérience particulière d’accompagnement, ce qui a permis de mieux apprécier ses stratégies d’accompagnement. Dans cette partie, nous poursuivons toujours l’objectif d’exposer comment les FA jouent leur rôle auprès de leurs pairs en comparant les neuf expériences d’accompagnement et en dégageant les éléments semblables et différents. La comparaison porte sur six aspects de leur expérience : le parcours professionnel et la position actuelle des FA dans l’organisation ; le profil académique ; la perception individuelle de leur rôle; le mode d’attribution du rôle; les ressources internes et externes pour soutenir le FA et enfin, les contraintes organisationnelles. Cette partie est consacrée à divers aspects du rôle et du parcours des formateurs accompagnateurs, ce qui nous mènera, par la suite, à nous intéresser aux compétences mobilisées par les FA et aux stratégies d’accompagnement utilisées.

6.1 Parcours professionnels et position actuelle dans l’organisation Les formateurs accompagnateurs de cette étude avaient tous déjà réalisé l’activité de travail à montrer à leurs collègues avant qu’on leur confie un premier mandat d’accompagnement. Si l’on fait exception d’une personne (cas E), les FA, qui avaient également de l’ancienneté dans l’organisation, avaient donc tous une bonne connaissance de leur métier. Certains des FA ont même occupé plusieurs postes avant de débuter leur mandat d’accompagnement. La portion de leurs récits qui se déroule chez l’employeur actuel montre des parcours d’emploi développés en mobilité ascendante (A, C, H) ou des trajectoires caractérisées par un enrichissement des responsabilités professionnelles au fur et à mesure de leur progression dans l’organisation (D, I). De même, puisque nous nous sommes intéressés à l’expérience des FA dès le début de leur carrière, la présente étude permet de saisir la perception subjective qu’ils en ont. La plupart des FA révèlent que leur carrière est marquée soit, par une mobilité ascendante, par le succès professionnel ou par la polyvalence. Ils ne prétendent pas que leur vie au travail est uniquement teintée par une réussite professionnelle qui serait sans embuche, ni difficulté – quelques-uns ont connu des mises à pied – mais ils disent avoir bien démontré leur sens des responsabilités, leur détermination ainsi que la qualité de leur travail. En outre, il convient de souligner que près de la moitié des personnes (B, D, F, G, I) avait déjà formé des collègues dans une autre organisation de travail avant de le faire pour l’employeur actuel. Certains FA avaient même donné de la formation de groupe en milieu de travail à plusieurs reprises. Ainsi, en plus de posséder une bonne connaissance de leur métier ou de leur profession, ceux-ci avaient acquis une expérience de la transmission des connaissances avant de

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se consacrer à l’accompagnement individualisé. Selon la perception de plusieurs FA, leur profil professionnel passé a contribué au fait que leur employeur actuel leur confie l’accompagnement de leurs pairs. Voyons maintenant comment la position statutaire des FA dans leur organisation se compare à celle de leurs apprenants. À ce sujet, rappelons que tous les FA sont des employés salariés à l’exception d’une personne qui a un statut de cadre (cas E). Dès lors, qu’en est-il pour les autres ? Est-ce qu’ils occupent-ils le même statut et la même position que les personnes qu’ils accompagnent ? Ainsi, les informations obtenues montrent que la plupart des FA occupent la même position que leur apprenant : les deux partenaires de la relation d’accompagnement occupent un poste similaire avec les mêmes fonctions de travail (B, F) ou un poste de travail de même niveau (I). Cependant, dans quatre cas, le FA semble en position hiérarchique supérieure (A, C, E, G, H). Nous constatons les écarts hiérarchiques par deux types de situation. Dans le premier, le titre du poste du FA souligne une responsabilité particulière, qu’on ne trouve pas chez l’apprenant (ex : cas H : une « chef technicienne » avec une « technicienne », cas C : un « technicien chef de groupe » avec un « technicien », un spécialiste des ventes avec des « représentants »). Dans le deuxième type, les statuts d’emploi dans l’organisation sont différents comme dans le cas G qui concerne une salariée jumelée à un stagiaire, et dans le Cas E, où l’accompagnateur est un cadre-propriétaire avec son employé. Par ailleurs, les deux partenaires de la relation d’accompagnement n’ont pas nécessairement la même situation syndicale. Effectivement, il arrive que l’apprenant soit un employé syndiqué alors que le formateur ne l’est pas. Cet écart dans le positionnement s’observe dans deux situations : B et D. Donc, à l’exception des écarts liés à la position hiérarchique et à l’appartenance syndicale, il faut retenir qu’il n’y a généralement pas un décalage très important entre la position de l’apprenant et celle du FA.

6.2 Profil académique Nous venons d’indiquer que les formateurs-accompagnateurs rencontrés au cours de l’étude connaissent bien leur profession ou leur métier. Bien que cette connaissance a été acquise en partie par leur expérience du travail, dans certains cas, la formation académique a également contribué au développement de leurs compétences de formateur ou d’accompagnateur. Comme le montre le tableau X, parmi les neuf FA, six sont des diplômés universitaires au nombre desquels on trouve quatre personnes formées dans des programmes universitaires spécialisés dans le domaine de l’éducation et de la formation. Les autres personnes sont des diplômés du collégial (C) et du secondaire général (F, H).

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Tableau III : Formation académique des formateurs-accompagnateurs

Formateurs- accompagnateurs

Diplômé universitaire spécialisé en éducation ou formation

Diplômé universitaire Autre

Diplômé d’études professionnelles (DEP)

Diplômé d’études secondaires (DES)

Cas A X (1e) Cas B X (2e) X (1e) Cas C X Cas D X (1er) X Cas E X (1e) Cas F X Cas G X (1e et 2e) Cas H X Cas I X (1e et 2e) X X

Légende : 1er :1er cycle universitaire 2e : 2e cycle universitaire Ainsi, certaines personnes ont été formées à l’université dans des programmes spécialisés en formation des adultes ou en enseignement (cas : A, B, D, I). Celles-ci ont donc eu accès à plusieurs heures de formation portant sur des aspects théoriques et pratiques qui se rapportent globalement au rôle de formateur, à la transmission de savoirs et à l’apprentissage. Une personne a également suivi des cours qui traitaient de la formation mais dans un programme en administration (E). Spécifions que les FA ne font pas toujours explicitement référence à leurs études universitaires comme s’il s’agissait d’un élément concret qui les aurait directement aidé à jouer leur rôle ou qui leur aurait procuré des outils ou du matériel de formation qu’ils utilisent aujourd’hui. Ils évoquent plutôt leurs études dans les premières étapes de leur récit en signalant qu’ils connaissent ce « domaine » ou qu’ils ont de l’expérience en formation. Or, l’écoute et l’analyse des récits montrent que certaines personnes qui ont acquis une formation dans le domaine de l’éducation et de la formation maitrisent particulièrement bien le vocabulaire propre à l’accompagnement de formation. De plus, des FA, comme dans le cas de B, D et I, décrivent avec précision leur pratique tout en faisant beaucoup de nuances lorsqu’ils la décrivent. Nous verrons dans une prochaine section (section 6.7) que les FA ont profité d’autres types de formation pour développer leurs compétences en accompagnement individualisé.

6.3. Perception individuelle du rôle de formateur-accompagnateur En général, lorsque les FA sont désignés ou sont sollicités par leur organisation pour former leurs collègues, ils disent avoir confiance en leur capacité pour jouer ce rôle. Même si tous expriment avoir confiance en elles, deux personnes ne se sentaient pas suffisamment prêtes pour accompagner leurs pairs au moment de débuter. Manuel (cas A) a manqué de temps pour se

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préparer et pour concevoir ses outils, en plus de se sentir intimidé à l’idée de corriger les apprenants plus âgés que lui. Il faut dire que ce FA était dans la vingtaine lorsqu’il a débuté dans ce rôle. L’autre personne est Serge qui estimait avoir une connaissance peu approfondie de l’activité de travail qu’il devait montrer aux autres. Cela l’a incité à pratiquer l’activité plus longtemps pour se sentir davantage prêt à la montrer aux employés (cas E). À l’exception de ce qui vient d’être dit, les FA perçoivent qu’ils ont les compétences requises pour accompagner leurs pairs et ils s’y consacrent avec enthousiasme. D’ailleurs, la plupart disent qu’il leur est apparu normal d’être devenu formateur-accompagnateur. Ils expriment facilement les motifs qui y ont contribué : ceux-ci ne sont aucunement nébuleux ou sujet à questionnement. Il est vrai que certains ont une fonction qui les amène naturellement à jouer ce rôle (Cas B, C, G, I) puisque leur poste de travail porte le titre de « chef » ou de « conseillère ». Pour d’autres, telle Claudie (Cas G) qui travaille en milieu communautaire, le mandat confié n’est pas exceptionnel puisque la formation des pairs es figure à sa description de tâches en plus de faire partie de la culture organisationnelle. Lorsque les FA abordent les motifs ayant contribués à leur participation ou à leur désignation comme formateur accompagnateur, ils nomment autant des connaissances ou des compétences de type professionnel que des attributs de nature plus personnelle. Ils les présentent comme des atouts reconnus par l’organisation de travail ou des qualités qui les rendent apte pour accompagner leurs pairs. Selon eux, ces qualités sont requises pour exercer un tel rôle. Le tableau IV indique les 12 éléments les plus fréquemment mentionnés par l’ensemble des FA de l’étude. Quatre d’entre eux se démarquent des autres : les qualités relationnelles (aider les autres, être empathie, avoir le goût de partager), l’expérience en formation, la maitrise de la tâche de travail ou du métier et, enfin, la connaissance de l’organisation, du département ou de l’environnement.

Tableau IV : Motifs ayant contribué à la désignation au rôle de

formateur-accompagnateur selon leur perception individuelle A B C D E F G H I MOTIFS D’ORDRE PROFESSIONNEL • Expérience en formation X X X X • Maitrise du métier, de la tâche X X X X X • Connaissance du département, de

l’organisation, ou de l’environnement X X X X

• Vision du travail X • Formation universitaire en formation X X MOTIFS D’ORDRE PERSONNEL • Aptitude à aider, empathie, écoute X X X X X • Leadership et initiative X X • Patience X X • Qualité de la communication X • Sens de l’organisation X

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6.4 Mode d’attribution du mandat organisationnel et reconnaissance du rôle

Par ailleurs, le mode d’attribution d’un mandat d’accompagnement ou de désignation d’une personne au titre de coach, de compagnon ou de parrain varie beaucoup selon les formateurs-accompagnateurs. Dans la plupart des situations, un représentant de l’organisation – le supérieur hiérarchique ou un professionnel du département des ressources humaines - demande formellement à la personne d’assurer la formation par accompagnement, ce qui est présenté comme un projet dans une période particulière (cas B, C, H, I). Dans certains milieux, former ses collègues est une partie intégrante du travail : l’attribution du mandat se fait plus naturellement (A, D, G). Ceci diffère donc d’autres situations pour lesquelles la personne entreprend son mandat d’accompagnement à la suite d’un processus formel d’identification, de sélection et de formation d’un accompagnateur établi par l’organisation de travail. Les processus les plus formalisés s’observent dans trois grandes organisations syndiquées avec une présence syndicale (cas C, D, I). Selon nous, le fait que la pratique d’accompagnement soit associée à un terme spécifique tel « coach », « mentor », « marraine » ou « compagnon », par l’organisation tend à montrer que le rôle est valorisé et reconnu. Toutes les organisations participantes à notre étude associent un terme particulier au rôle d’accompagnement. Ceci dit, il faut absolument spécifier qu’il n’y a pas une utilisation exclusive de ce terme, du moins chez les FA. Même si les FA font fréquemment usage de termes employés au sein de l’organisation ou au sein du comité sectoriel de main-d’œuvre, ils mentionnent également fréquemment, et de façon interchangeable, le terme « formateur » pour se désigner eux-mêmes ou « formation » pour décrire l’activité réalisée auprès de l’apprenant. Enfin, l’attribution du rôle d’accompagnateur peut aller de pair avec une reconnaissance organisationnelle beaucoup plus tangible. Effectivement, quelques accompagnateurs reçoivent une augmentation de salaire ou une compensation monétaire lorsqu’ils pratiquent la formation individualisée. Trois personnes (B, F, I,), œuvrant en milieu syndiqué, sont dans cette situation. À ce sujet, aucun FA n’a précisé avoir réclamé un autre type de compensation ou des ressources supplémentaires en guise de reconnaissance pour l’accompagnement effectué. Seul Manuel (Cas A) a demandé l’accès à un bureau fermé.

6.5. Ressources pour soutenir le formateur-accompagnateur

En outre, il faut indiquer le fait que les formateurs accompagnateurs de l’étude ne sont aucunement laissés à eux-mêmes pour réaliser leur projet d’accompagnement. La plupart d’entre eux disent recevoir le soutien de leur organisation de travail ce qui les aide à accomplir leur rôle. Plusieurs mentionnent la contribution particulière d’autres acteurs internes et externes, en particulier celle des comités sectoriels de main-d’œuvre dans les étapes situées en amont de l’accompagnement proprement dit pour ce qui est de l’externe. L’interaction des collègues de travail est également fréquemment évoquée. Mais, la nature des ressources et l’ampleur du soutien varie beaucoup selon les situations et la taille de l’organisation. C’est ce que nous voyons dans les pages suivantes, puisque nous décrivons, tout d’abord, la formation offerte pour préparer les FA à leur rôle, puis l’expertise du personnel de l’unité responsable de la formation. Par la

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suite, nous soulignons comment la participation des collègues, des clients ou des usagers est considérée essentielle à la mise en œuvre de l’accompagnement.

6.5.1 Préparation au rôle par la formation

Tout d’abord, huit FA sur neuf ont reçu une formation sur le coaching, le compagnonnage, le parrainage ou le mentorat. Dans la plupart des cas, cette formation n’est pas nécessairement donnée par un représentant de l’organisation mais l’offre de formation est initiée, organisée ou appuyée par celle-ci. Avant de participer au premier projet d’accompagnement, des FA reçoivent une formation donnée soit par un comité sectoriel de main-d’œuvre (E, F,), par le siège social de l’organisation (H), par une firme externe (C, D) ou par une université (I). Le tableau V décrit plus en détail la situation de chaque FA. Dans tous les cas, il s’agit de formation courte : la durée varie de 3 heures à quatre jours. En général, on y traite de la relation formateur-formé, des techniques de communication et de l’évaluation des apprentissages. Au cours de ces formations, le FA reçoit du matériel de formation tel que le cahier du formateur, le cahier du participant, la grille d’évaluation. Au cours de leur récit, les accompagnateurs font abondamment mention de ce matériel qu’il juge très utile.

Tableau V : Participation à une formation sur l’accompagnement de formation individualisé :

durée et instance dispensatrice Formateurs-accompagnateurs

Formation sur l’accompagnement individualisée

Durée Instance dispensatrice

Cas A Oui 4 jours Organisation de travail Cas B Oui 3 heures Ordre professionnel Cas C Oui 2 jours Organisation de travail Cas D Oui 3 heures Consultant Cas E Oui 2 jours Comité sectoriel de la main-d’œuvre Cas F Oui 2 jours Comité sectoriels de la main-d’œuvre Cas G Non -- -- Cas H Oui 1 jour Organisation de travail Cas I Oui 1 jour Université

6.5.2 Expertise du personnel de l’unité responsable de la formation au sein de l’organisation

L’autre type de soutien organisationnel concerne la contribution de l’unité responsable de la formation au projet d’accompagnement. Ce type de soutien varie énormément selon les FA. Dans certains cas (C, D), cette unité a la charge de structurer et de mettre en œuvre le dispositif d’accompagnement28. Dès lors, un professionnel de la formation dirige l’ensemble des opérations nécessaires à la mise en place du dispositif d’accompagnement. Cette personne spécialisée exerce

28 Dans le cas de l’organisation C, le dispositif est d’une grande ampleur et il est structuré à partir d’un projet d’ingénierie de la formation qui se déroule sur plusieurs années.

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un rôle de leadership : elle agit à titre d’expert de l’ensemble du processus, ce qui comprend des étapes allant de l’identification du personnel à former, en passant par la conception du matériel et l’évaluation des apprentissages. Le FA collabore étroitement avec le personnel de l’unité responsable dans toutes les phases de mise en œuvre liée à la planification, à l’organisation et à l’évaluation. Ici, le FA participe à la conception du matériel de formation. Dans ce type de situation, qui concernent surtout des projets d’envergure se déroulant dans de grandes organisations, les ressources organisationnelles s’avèrent très importantes. Dans d’autres situations étudiées (F, H), les ressources offertes par l’unité responsable de la formation n’entrainent pas le FA dans une collaboration aussi imposante. Mais, tout comme dans le cas indiqué précédemment, les spécialistes de la formation dirigent l’ensemble des opérations qui précèdent la mise en œuvre de l’accompagnement dans ou par l’activité de travail. Les récits des FA révèlent diverses activités de planification, de coordination et de suivi auxquelles contribuent des instances internes (autres départements, siège social) et organismes externes (comité sectoriels de main-d’œuvre, Emploi-Québec). Les ressources fournies par l’unité responsable profitent donc directement aux FA, ceux-ci n’ayant pas, à réaliser par eux-mêmes, la conception du projet, le matériel de formation. Ils ne participent pas non plus à l’élaboration du projet comme dans la situation précédente. Dans d’autres cas (A, H), l’unité responsable de la formation ou de la gestion des ressources humaines agit principalement à titre de fournisseur d’outils. Il peut s’agir du matériel de formation portant sur l’entreprise (Guide de l’employé) ou du matériel de formation standard qui concerne l’activité de travail (ex : capsule vidéo sur le service à la clientèle). Il peut s’agir également de données brutes décrivant la performance au travail de l’apprenant, outil servant à cibler les personnes à former et à fixer les objectifs de formation (Cas A). Les FA profitent de ce type de support organisationnel de manière ponctuelle en l’utilisant lors de certaines actions précises nécessaires à l’accompagnement.

6.5.3 Participation des collègues de travail, des clients ou usager à la mise en œuvre

Puisque l’accompagnement de formation individualisé se développe en grande partie au sein de l’activité de travail réelle ou en référence à celle-ci, certains acteurs contribuent de manière directe à l’accompagnement. Dans plusieurs cas, les FA estiment que les collègues de travail, les clients ou les usagers de services sont des ressources incontournables. À leur sujet, les FA mentionnent trois types de contribution. Premièrement, il y a de la part des collègues et des clients, une participation à l’activité de travail. En effet, ces personnes interagissent avec l’apprenant au cours de la réalisation de son activité, ce qui constitue une participation directe aux procédures de travail, au processus d’élaboration d’une tâche à réaliser. La présence naturelle des collègues de travail, des clientes ou des usagers dans la situation réelle est ainsi une ressource intrinsèque de l’accompagnement. Spécifions que la proximité physique peut être totale et continue lorsque le travail est réalisé en équipe comme chez les employés en horticulture (cas E) ; elle peut aussi être partielle et fragmentaire lorsque seulement certains moments de l’activité d’un employé en apprentissage sont partagés avec un collègue ou un client (ex : cas I). Pour donner une illustration de l’importance d’une proximité partielle d’une cliente, pensons aux commentaires que celle-ci peut formuler, spontanément, au

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moment où elle quitte son domicile, au sujet de la tonte du gazon en train d’être effectuée par un employé novice. Lorsque la cliente critique négativement la réalisation de la tonte de gazon et qu’elle suggère ses propres critères de qualité, elle fournit des données sur l’activité de travail qui sont alors récupérées, immédiatement ou par la suite, par le FA pour aider son apprenant à mieux comprendre des savoirs essentiels à ce sujet. La clientèle et les collègues de travail sont donc une composante de la mise en œuvre de l’activité. Ils font également partie, en quelque sorte, de l’objet d’apprentissage sur lequel se cible le formateur accompagnateur. Le FA utilise donc les clients, les collègues et les usagers, pour mobiliser ses propres stratégies : en recourant aux nouvelles données, il montre, il précise, il corrige des erreurs, etc. En outre, dans quelques cas (B, D), à la demande des FA, les collègues de travail sont sollicités pour pratiquer certaines activités de travail avec l’apprenant lesquels sont utiles pour la mise en œuvre de l’apprentissage. Il s’agit du deuxième type de situation où les collègues de travail sont considérés comme des ressources importantes par les FA. Effectivement, dans certains cas étudiés (comme dans le cas B), les collègues participent à des jeux de rôle ou à des simulations de situations qui ont été planifiées à l’avance par le FA pour assurer l’apprentissage de certaines fonctions de travail. Selon les FA, ces collègues répondent positivement à la demande de collaboration du FA lorsque celui-ci planifie et choisit des méthodes d’accompagnement. Un troisième type d’action qui participe à soutenir l’accompagnement du formateur consiste à formuler, à l’attention du FA, un jugement critique sur le travail de l’apprenant. Il faut relever effectivement, qu’en plus de commentaires qui peuvent surgir spontanément dans la mise en œuvre de l’activité compte tenu de la proximité physique des pairs, d’autres collègues moins directement concernés par l’activité de l’apprenant, font parfois également état de leurs observations au FA. Ils le font généralement lorsqu’ils sont en mesure d’observer l’apprenant au travail, lors d’un passage sur les lieux du travail par exemple, ou à la suite d’échanges informels avec lui. Des collègues de travail peuvent exprimer de manière constructive leurs préoccupations à l’égard de l’exécution d’une tâche ou de l’évolution de l’apprenant. Ils peuvent signaler des erreurs ou faire part des insatisfactions par exemple. À ce sujet, il faut donc retenir que des FA ont une attitude d’ouverture à l’égard des avis des collègues : ils les écoutent de manière à valider leur propre perception au sujet de l’évolution de l’apprentissage. Ainsi, des FA disent qu’ils peuvent réviser leurs stratégies de formation lorsqu’ils estiment que les observations des pairs sont fondées. Nous verrons plus loin, à la section portant sur la compétence relationnelle (6.7.4), que certains FA demeurent toutefois très vigilants à l’égard des commentaires critiques de l’entourage.

6.5.4 Autres types de soutien

Les récits des formateurs-accompagnateurs de cette étude mettent en évidence d’autres aspects qui les soutiennent positivement dans leur rôle. Tout d’abord, de l’avis de certains FA, certaines règles de leur convention collective seraient bénéfiques à leur pratique. En effet, parmi les cinq FA qui œuvrent en milieu syndiqué, quelques-uns profitent d’une bonification salariale en guise de compensation pour le travail d’accompagnement. En outre, lorsqu’ils expliquent comment s’effectuent les dernières étapes de l’accompagnement, plusieurs soulignent l’importance pour eux de bien distinguer ce qui relève de l’évaluation des apprentissages ou de l’évaluation de la progression de l’apprenant dans son activité, d’une part, de ce qui relève, d’autre part, de

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l’évaluation des compétences. Selon eux, la convention collective établit clairement ces deux types d’évaluation, ce qui leur permet de bien départager les rôles joués à cet égard par les responsables d’une part et le FA d’autre part. Ils apprécient cette distinction car ils ne souhaitent pas évaluer les compétences de leurs pairs.

Par ailleurs, le personnel associé à l’unité de formation ou au département des ressources humaines participe aussi à des activités complémentaires de transfert du savoir au cours de l’accompagnement. Plus précisément, il arrive que ce personnel forme l’apprenant sur des contenus précis : la santé et sécurité au travail, par exemple. Il s’agit d’une participation formelle, planifiée et organisée. Les FA qui profitent de cette ressource complémentaire pour transmettre ce type de contenu, peuvent consacrer leur travail aux autres aspects de l’activité de travail. Pour terminer, soulignons que quelques FA mentionnent qu’ils reçoivent de l’aide personnelle de la part de leur supérieur hiérarchique à des moments cruciaux de l’expérience d’accompagnement (Cas A, B, D). L’aide est fournie principalement au moment des premières expériences d’accompagnement ou lorsque le responsable veut contribuer à atténuer la charge de travail et le temps supplémentaire effectué par le FA. Ce type de support est de nature plus informelle ; cette aide semble relever d’initiative personnelle des supérieurs hiérarchiques des FA. Nous venons d’exposer un ensemble d’aspects qui contribuent positivement à la pratique d’accompagnement en milieu de travail. Ce qui vient d’être décrit montre que les FA sont en général très bien supportés dans leur rôle. Mais, comme nous l’exposons dans la section suivante leur récit ne manque pas d’indiquer aussi certaines contraintes qui affectent leur pratique.

6.6 Contraintes organisationnelles et sectorielles

Les contraintes rencontrées par les FA sont exposées succinctement par eux au cours de leur récit. Celles-ci sont présentées surtout comme des aspects irritants. Elles ne semblent pas associées à des situations de nature vexatoire pouvant entrainer de leur part des contestations ou des plaintes à l’égard de l’employeur. La contrainte la plus souvent mentionnée par les FA concerne le manque de temps pour assurer un accompagnement qui mènerait l’employé à une autonomie complète ou qui serait pleinement satisfaisante pour eux. En général, la durée du projet d’accompagnement est fixée à l’avance. Mais, certains FA signalent également la tendance de leur supérieur hiérarchique - nommé contremaitre, chef d’équipe ou directeur de production – à chercher à réduire la durée de l’accompagnement. Effectivement, comme ils veulent augmenter la productivité du service, des responsables cherchent à assigner l’employé en formation à l’activité régulière de travail. En cherchant à écourter la durée de l’accompagnement, ils exercent une pression sur les FA qui, pour leur part, souhaitent maintenir une durée suffisante pour bien montrer le travail à l’apprenant. Les FA expliquent que les demandes de réduction du temps d’accompagnement sont formulées, en cours de projet, de manière plutôt spontanée. Dans certains cas, des FA se voient dans l’obligation de négocier la durée du projet. Aucun d’eux n’a cependant mentionné avoir ressenti une pression si importante et qui aurait placé le formateur ou l’apprenant en position d’opposition à leur supérieur hiérarchique.

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L’autre contrainte mentionnée à quelques reprises (cas B, D, I) est l’obligation pour les FA d’effectuer des heures supplémentaires, une pratique considérée inévitable pour effectuer un accompagnement de qualité. Sans se plaindre de la situation ou la déplorer véritablement, des FA disent que le travail d’accompagnement engendre nécessairement du temps supplémentaire pour eux. En outre, deux personnes commentent le fait qu’ils ne s’identifient pas au terme utilisé pour désigner leur rôle d’accompagnement. C’est le cas de Lisa qui préfère l’utilisation du terme « accompagnement » à celui d’enseignant associé ou de mentor. Selon elle, l’accompagnement désigne mieux le véritable sens de sa pratique et rend mieux compte du caractère personnalisé de ce qu’elle fait avec les apprenants. Pour sa part, Serge déplore carrément l’utilisation qui est faite du terme « compagnon » par le comité sectoriel de main-d’œuvre pour désigner ce qu’il fait, un terme comportant un sens précis dans le secteur de la construction. L’utilisation ne serait pas appropriée au contexte de son secteur d’activités.

6.7 Compétences d’accompagnement : stratégies, actions et outils d’accompagnement Nous nous intéressons maintenant à la compétence professionnelle des formateurs accompagnateurs, c’est-à-dire à leur capacité à mobiliser et à maitriser leurs propres ressources pour accompagner leurs pairs dans une perspective d’apprentissage. Plutôt que de chercher à saisir la compétence professionnelle globalement, nous portons attention à ses diverses composantes, comme le font d’autres chercheurs (Balleux, 2002, 2002 ; Harris, Simons et Bone, 2000). Ainsi, nous avons repéré et avons identifié les principales actions, stratégies et outils de formation, décrits dans les récits par chaque personne, en les associant à l‘une ou l’autre de ces six compétences. Ensuite, nous avons comparé la situation de chaque accompagnateur à celle des autres. Ainsi, dans les sous-sections suivantes, nous verrons si les FA mobilisent des stratégies et moyens reliés à : a) la compétence de planification, b) la compétence technique/professionnelle/technique, c) la compétence opérationnelle, d) la compétence relationnelle, e) la compétence de symbolisation et enfin, f) la compétence éthique. D’entrée de jeu, précisons que tous les formateurs-accompagnateurs de l’étude se considèrent globalement « compétent » pour accompagner leurs collègues au travail. Aucun d’eux n’affirme manquer de connaissance ou d’expérience ou dit se sentir inapte à les former. Ainsi, un analyse détaillée de chacun des récits, qui se trouve dans de l’annexe IX à l’annexe XVII, montre que chacun utilise plusieurs actions, stratégies et outils pour aider l’autre à apprendre. La comparaison des récits que nous avons effectuée révèle que la plupart d’entre eux mobilisent une grande variété de stratégies de formation tout au long du processus d’accompagnement. Mais, comme nous le verrons plus loin, ils ont plus de difficulté à mobiliser certains aspects. Le tableau Va, présentée à la page suivante, montre un résumé comparatif de la situation de chacun des FA en regard des compétences mobilisées. Avant d’examiner plus précisément chacune d’entre elles, faisons quelques remarques générales. Tout d’abord, les neuf FA mobilisent des stratégies qui font appel à la plupart des six compétences. Mais l’utilisation de stratégies et d’actions reliées aux compétences de planification et de symbolisation ne concerne pas tous les accompagnateurs.

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Tableau Va

Tendances relatives aux compétences et aux stratégies mises en place par les formateurs-accompagnateurs

Compétences Fréquence

Planification Techniques/ professionnelles théoriques

Opérationnelles

Relationnelles Symbolisation Éthique

Non E, F A, C, D

Oui A, C

Oui – un peu G, I C, D, E, F, H B, C, E F, H, I I

Oui – assez A A A G, H, I B, E B, C, E, H

Oui- Beaucoup

B, C, D, H B, G, I C, D, E, F, G, H, I, B

A D F G D F G

En effet, le récit de deux personnes n’indique aucune action faisant écho à la planification (cas E et F). Dans la même veine, trois autres personnes (cas A, C, D) accompagnent leurs pairs sans recourir à des stratégies faisant appel à la symbolisation, ce qui, rappelons-le, consisterait, notamment, à aider leurs pairs à développer une conscience globale du métier ou à se projeter dans le futur (Balleux, 2002). Ensuite, lorsque nous examinons comment les autres compétences sont mobilisées, nous constatons des différences selon les FA. La narration de leur expérience laisse entendre que des personnes mobilisent certaines actions très fréquemment, tandis que pour d’autres, ceci se fait assez fréquemment ou peu souvent. Les actions des FA liées à la compétence opérationnelle sont celles qui sont les plus mobilisées lors de l’accompagnement. Ces remarques générales étant exposées, nous décrivons ceci plus amplement en examinant chacune des six compétences.

6.7.1 Compétence de planification

Pour plusieurs FA, le rôle d’accompagnement débute bien avant le moment où ils entrent en contact avec leur collègue pour l’aider à développer son apprentissage. Effectivement, ces personnes s’investissent dans le projet d’accompagnement avant la mise en œuvre de l’apprentissage dans ou par l’activité de travail. Spécifions que les travaux de Harris, Simons et Bone (2000) et ceux de Balleux (2002, 2002) qui traitent des formateurs internes ne décrivent pas cette compétence en particulier. Or, sept FA réfèrent à diverses activités de planification au cours de leur récit. Alors que deux personnes sont entièrement responsables de la planification du projet et qu’elles exécutent, de façon autonome, l’ensemble des activités sous-jacentes (cas A, B),

Cas : A, B, C, D, E, F, G, H et I

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d’autres le font plutôt avec la collaboration étroite du personnel de la formation ou des ressources humaines (cas C, D). Trois autres contribuent dans une moindre mesure à la planification, une bonne part des actions étant réalisées par d’autres membres de l’équipe de travail (G, H, I). Quelles sont les actions de planification réalisées par les FA ? Plusieurs formateurs recueillent les besoins de formation, élaborent un plan d’accompagnement (B et D), rédigent des guides de formation et conçoivent des exercices pratiques tels que des mises en situation. Certains d’entre eux participent aussi à la sélection des personnes accompagnées (D) et à la préparation des superviseurs, ce qui consiste à les sensibiliser à maintenir un équilibre entre les besoins de production et les besoins d’apprentissage (D). C’est ce que certains (Harris, Simons et Bone ,2000) nomment l’action de développer un environnement propice à l’apprentissage. De plus, quelques FA indiquent leur investissement dans des activités d’ordre logistique, ce que nous associons à la compétence de planification. En effet, en plus d’être responsable de l’organisation matérielle (B, D, H), ils doivent planifier la structure du travail à accomplir (ex : décider à l’avance de varier des tâches), mettre en place les ressources techniques (ex : enregistrement audio), préparer la documentation de travail (simulation, cahier du participant), réserver une salle pour discuter, planifier les horaires et, enfin, coordonner les horaires de pratique avec ceux de collègues. Même si l’étude ne visait pas à examiner en profondeur chacune des actions de planification, soulignons que l’analyse de besoin se fait toujours à partir de la situation individuelle. Dans certains cas, les accompagnateurs discutent avec l’apprenant pour situer l’écart entre l’expérience professionnelle acquise antérieurement et les activités professionnelles à réaliser (cas B, G). Dans d’autre cas (cas A), l’accompagnateur prend connaissance des habilités manquantes à partir d’un outil de gestion organisationnel pour situer l’objectif de l’accompagnement. Nous voulons signaler ici que l’examen que nous avons fait de la compétence de planification indique que certaines actions sont très similaires à celles accomplies pour la formation de groupe – surtout pour les activités logistiques même si d’autres actions sont plus typiques du contexte d’individualisation. On le voit bien avec l’établissement d’un plan individuel d’accompagnement réalisé dans trois situations (B, D et G). D’autre part, notre analyse ne nous permet pas d’identifier un profil type de FA qui serait plus susceptible de mobiliser leur compétence de planification. Comme on le voit à la figure 2, les FA qui la mobilisent «beaucoup » ou « assez » sont soient des personnes dont la fonction professionnelle est rattachée au département des ressources humaines (cas B, D), soit des personnes avec une position hiérarchiquement plus élevée que celle de l’apprenant (cas A, H). Ces personnes ne travaillent pas dans de petites organisations de travail : elles pratiquent plutôt dans des entreprises de grande taille. Dans la même veine, nous ne décelons pas de profil commun chez les personnes qui n’ont réalisé aucune activité préparatoire à l’accompagnement. Il s’agit du directeur d’une petite entreprise d’horticulture (cas E) et d’une opératrice du secteur manufacturier (cas J), deux personnes qui ont surtout en commun le fait d’utiliser des outils de formation fournis par le comité sectoriel de main-d’œuvre.

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6.7.2 Compétence technique, professionnelle ou théorique

Tous les FA qui ont participé à la présente étude montrent le travail à leurs apprenants en leur expliquant les rudiments de l’activité. Rappelons qu’à l’instar de Balleux (2000), nous référons à cette compétence pour désigner les actions du FA qui visent à donner, à l’apprenant, une vue d’ensemble du travail à réaliser et à en montrer globalement les bases ou les fondements pratiques pour l’aider à l’accomplir. Les actions associées à cette compétence consistent à présenter globalement l’activité de travail, à doter l’apprenant de ses outils, à situer l’activité ou la fonction de travail en lien avec celle des autres travailleurs. De même, on peut dire qu’un accompagnateur qui discute de la performance attendue ou qui présente les critères de qualité en exposant l’ensemble des volets de l’activité est une personne qui fait preuve de ce type de compétence. Tous les FA font appels à des stratégies qui se réfèrent à cette compétence mais ils le font à divers degrés. Si la plupart des FA font mention de ce type d’actions dans leur récit en expliquant qu’ils sensibilisent les apprenants à leur fonction ou à leur activité de travail, tous n’y mettent pas autant d’emphase. Alors que la plupart font peu appel à ce type de stratégies, seuls trois d’entre eux les mobilisent beaucoup (cas B et G, I). Dans ces trois cas, les accompagnateurs cherchent à faire saisir à leurs collègues la fonction professionnelle et non pas uniquement les tâches attendues. Ces personnes ne se limitent pas à montrer les détails de l’activité, elles prennent la peine de donner une vue d’ensemble du travail et mettent de l’avant le but du travail à accomplir. Certains s’emploient aussi à corriger les perceptions erronées que l’apprenant peut exprimer à l’égard du travail. Nathalie (cas B) illustre très bien comment elle fait dans l’exemple suivant : Je voyais qu’elle progressait, je me disais : elle sait où elle s’en va, elle vient de comprendre, elle développe une finesse, un raffinement. Il est clair pour moi que le fait de montrer les aspects opérationnels ne peut suffire. Il est tout aussi essentiel de montrer à analyser plus largement les situations et de lui permettre de développer une philosophie pour qu’elle pense ressources humaines ! À ce sujet, il est opportun de souligner que plusieurs FA accordent une certaine importance aux pratiques sécuritaires en situation de travail en signalant souvent à leur apprenant de manière à s’assurer de pratiquer leur métier.

6.7.3 Compétence opérationnelle Parmi l’ensemble des compétences mobilisées, la compétence opérationnelle est celle qui est révélée de manière la plus saillante par les FA de notre étude. Effectivement, toutes les personnes mentionnent des stratégies - générales et spécifiques - qui consistent à montrer et à dévoiler méthodiquement l’activité de travail à réaliser. Les accompagnateurs les nomment et les décrivent abondamment. En effet, tous les formateurs font usage à plusieurs reprises de stratégies de types suivants :

Mettre l’autre au travail, faire essayer, faire pratiquer Montrer (un exemple, des trucs, les composantes du matériel, etc.) Examiner Faire toucher, faire pratiquer

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Organiser le travail en étapes Observer le travail, faire observer le travail Écouter, faire écouter Évaluer des aspects précis Donner de la rétroaction sur des aspects précis Échanger sur une tâche précise Dévoiler la tâche pour donner une idée d’ensemble Expliquer Simuler (un cas, un problème, un défaut) Faire ralentir Questionner

Nous ne décrirons pas précisément chacune de ses stratégies, les énoncés ci-haut signalant assez bien, selon nous, leur nature et leur utilité pour l’apprentissage. Le lecteur trouvera à l’annexe x, le détail de l’utilisation des actions liées à cette compétence selon les neuf cas étudiés ; ceci est présenté dans une série de tableaux (Tableau 33 à Tableau 41). Cependant, il parait opportun de soulever en trois points importants de cette compétence pour l’accompagnement de formation en milieu de travail et la créativité dont font preuve certains FA. Premièrement, certains FA ne manquent pas d’utiliser les erreurs de travail commises par leurs apprenants (cas A, C, F, E, G) pour mieux expliquer et dévoiler l’activité de travail, ce qui contribue à accentuer l’apprentissage durant la mise en œuvre. Alors que certains se servent d’erreurs déjà commises dans une situation authentique de travail (comme dans le cas G : prendre soin d’expliquer, en détail, la manière de compléter une prescription médicale en pharmacie, mettre l’autre au travail, observer la situation par la suite), d’autres FA prennent soin de planifier une activité qui amène l’apprenant à faire des erreurs en vue, par la suite, de l’aider à la corriger. Pour le FA, comme dans le cas de Sylvain (cas C) il s’agit soit de prendre acte d’une erreur typique, de la susciter ou de la provoquer de manière à faire observer son apprenant les motifs détaillées de cette erreur, à susciter chez lui la verbalisation de son raisonnement sur les différentes opérations (mentales et physiques) qui sont liées à l’exécution de l’activité pour l’aider, non seulement à solutionner l’erreur mais à comprendre les opérations nécessaires pour l’éviter. À partir d’erreurs - réalisées en situation authentique ou lors de simulation - le FA focalise l’attention de l’apprenant et raffine ses propres stratégies de communication. Plutôt que de faire observer ou d’expliquer, il va réajuster le geste de l’apprenant, faire suivre une séquence avec précision, donner des trucs, faire focaliser l’attention sur un détail du geste accompli, etc. Précisons qu’il peut s’agir d’erreurs proprement dites, mais également d’actes non-performants ou de dysfonctionnements survenus lors de l’exécution d’une tâche de travail spécifique. Bref, les propos des FA dans les récits montrent que des FA ont recours systématiquement à une pédagogie de l’erreur. Bien que « la pédagogie de l’erreur » (Astolfi, 1997) ne soit pas exclusive à l’accompagnement de formation en milieu de travail – on l’observe beaucoup en milieu scolaire – elle semble d’usage très commun chez les FA de notre étude. Deuxièmement, nous devons souligner la créativité particulière dont font preuve deux FA dans des aspects qui touchent la compétence opérationnelle. À ce sujet, Isabelle utilise des stratégies peu communes (cas D). Pour aider son apprenant à éviter un mouvement corporel, Isabelle utilise

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la « technique du miroir » une technique qui permet à l’apprenant de visualiser son mouvement. Mais, Isabelle ne se contente pas de lui procurer un reflet de son propre mouvement, elle réalise elle-même le mouvement en le faisant de façon exagérée pour ainsi attirer l’attention de l’apprenant, le déstabiliser et provoquer un questionnement au sujet de mouvement. Isabelle explique bien qu’elle saisit une occasion au cours de l’accompagnement en se donnant comme exemple, dans un effet de miroir, et qu’elle provoque ainsi volontairement un effet de « contraste » pour l’aider à prendre conscience de son propre mouvement. De manière différente, mais avec autant d’efficacité et de pertinence nous semble-t-il, Justine prend le temps au tout début de son accompagnement de faire un rappel des connaissances antérieures de ses apprenantes au sujet des opérations techniques liées au maniement de la machine. Il est intéressant de constater que cette formatrice accompagnatrice prenne soin, en quelque sorte, de stimuler la mémoire de son apprenante au sujet des gestes à poser avant de lui montrer les opérations à réaliser. Le rappel des acquis d’expérience de l’apprenant lors du déploiement d’une opération technique est une action considérée pertinente (Bourgeois et Nizet, 2005). Troisièmement, il convient de souligner que quelques accompagnateurs (C, D, G) ont recours à la lecture individuelle comme un moyen privilégié pour aider l’apprenant à prendre connaissance des éléments de l’activité de travail dans ses aspects procéduraux. Ceci est digne de mention, d’autant que la lecture n’est pas souvent associée à une méthode propre à la formation individualisée en milieu de travail. En effet, des FA prévoient des moments de lecture pour les apprenants. Ces derniers sont incités à lire des documents, qui sont spécialement conçus pour eux (cas C) ou d’ordre plus généraux (cas G). La lecture peut être effectuée de manière autonome ; elle peut aussi donner lieu à un accompagnement direct. Dans ce dernier cas, les deux partenaires font la lecture ensemble, à voix haute, ce qui donne lieu à des échanges, des explications, etc. En général, ce type de lecture est effectué dans les premières phases de l’accompagnement en guise d’introduction à la formation. Par exemple, Sylvain et son apprenant prennent connaissance des différentes composantes du robot qu’ils doivent opérer. La lecture de document est parfois demandée pour que l’apprenant saisisse plus globalement son métier ou son environnement de travail (cas G). Enfin, la recommandation de lecture peut être utilisée comme une stratégie compensatoire pour compléter les explications du FA, comme dans le cas de Lisa qui propose des textes à une enseignante novice.

6.7.4 Compétence relationnelle

Les FA mobilisent plusieurs actions qui visent à établir une bonne relation avec les apprenants. Comme indiqué à la figure 2, la majorité utilise des stratégies se référant « beaucoup » ou « assez » à la compétence opérationnelle. La plupart font mention de l’écoute, de la présence à autrui, du soutien, de l’encouragement, de leur tendance à rassurer, à stimuler la confiance. Ils expliquent également des stratégies mobilisant leur tolérance à l’erreur, leur empathie et leur aptitude à exprimer de l’encouragement. Rappelons à ce sujet, que plusieurs FA pensent que leur capacité relationnelle a contribué, en bonne partie, au fait d’avoir été choisi ou désigné pour jouer ce rôle. Or, lorsqu’ils décrivent leur pratique d’accompagnement auprès de leurs pairs, aucun FA n’omet de mentionner, effectivement, la contribution importante des stratégies de communication qui aident leur collègue à apprendre.

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Il est connu que l’aspect relationnel de l’accompagnement demeure une dimension difficile dans l’accompagnement en situation de travail (Balleux, 2000, 2002). Effectivement, quelques-uns semblent moins portés que les autres sur les aspects relationnels. C’est le cas de Serge (cas E) qui, malgré le fait d’être toujours bien présent à l’autre et de chercher surtout à créer une atmosphère agréable pendant les moments où il accompagne un nouvel employé, ne montre pas une compétence relationnelle aussi marquée que celle des autres. D’autres FA mobilisent moins ce type de compétence relationnelle. Il s’agit de Natacha (cas B), Claudie (cas G) et de Sylvain (cas C) qui utilisent certaines stratégies mentionnées plus haut mais sans faire usage d’une communication visant à « encourager », « à soutenir », à « stimuler la confiance en soi » ou à « féliciter » l’apprenant, des actions associées à la compétence relationnelle (Balleux, 2002) ou à une approche centrée sur la personne (Ladyshewsky, 2010). Ces personnes mobilisent donc d’autres stratégies pour soutenir la relation, mais celles-ci sont moins nombreuses et sont beaucoup moins centrées sur les aspects d’ordre affectif. Or, il faut admettre que toutes les situations ne s’y prêtent pas nécessairement et que tous les apprenants n’ont pas autant besoin d’être l’objet de ce type de stratégies. Ainsi, si nombre d’écrits mettent de l’avant l’importance de la compétence relationnelle dans l’accompagnement individualisé (Kram, 1998 ; Ragins et Kram, 2007), il n’est pas apparu que les FA de notre étude ne l’ont pas suffisamment mobilisée ou qu’ils auraient mal déployées les stratégies y étant associées. Mais, dans la présente étude, il importe de noter que les FA mobilisent la compétence relationnelle selon une ampleur et des modes différents.

Partant de cette remarque, nous voulons exposer deux observations. Premièrement, en examinant de plus près la situation de chacun, nous constatons que lorsque l’activité de travail est pénible, que le rapport individuel à l’activité n’est pas positif, ou que l’activité est considérée particulièrement exigeante, l’appropriation du savoir parait particulièrement ardu pour l’apprenant. Alors, on peut se demander s’il est possible que des FA tendent à accentuer ou à amplifier la compétence relationnelle lorsque les conditions de travail sont difficiles. Dans une étude sur le coaching en entreprise, Salman (2008), tout comme Gori et Goz (2007), constatent que cette approche de formation comporte un aspect psychologisant, ce qui peut servir à contrôler les insatisfactions de certains employés. Pour Salman (2008), la formation a lors une fonction palliative. Selon Billet (2002), l’implantation d’une approche d’accompagnement (guidance learning ») nécessite des conditions de travail de qualité ; sans elles, une pédagogie en milieu de travail s’avère difficile. Dans les conditions difficiles, le formateur-accompagnateur pourra trouver particulièrement pertinent de rassurer, de calmer, de motiver et de féliciter son apprenant régulièrement au cours de l’accompagnement et, même, de le récompenser lorsqu’il effectue correctement ce qui lui est demandé. Nous savons que les stratégies d’ordre affectif qui s’inscrivent dans des approches centrées sur la personne peuvent être efficaces dans l’apprentissage (Ladyshewky, 2010) mais elles doivent s’appuyer sur la réciprocité. L’utilisation pertinente de cette compétence par le FA pourrait donc véritablement aider à maintenir un nouvel employé en poste, un enjeu très important pour plusieurs organisations. L’exemple du cas de Manuel illustre bien cette accentuation de la compétence relationnelle comme facteur de compensation à des conditions de travail difficiles (cas A). On trouve également chez Justine qui travaille en secteur manufacturier une tendance forte à utiliser un très grand nombre de stratégies faisant appel à l’affectivité, ce qui peut s’avérer utile pour amoindrir les aspects de pénibilité. Consciente des difficultés liées au métier d’opérateur, Justine s’y emploie particulièrement : elle prévient à l’avance son apprenante des exigences du métier et elle porte un jugement continu sur

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son état émotif. Elle insiste aussi sur ses intentions bienveillantes auprès de son apprenante. Celle-ci suggère que les stratégies relationnelles, visant l’aspect affectif, peuvent être positives. Mais, si de telles stratégies étaient mobilisées à l’excès, elles pourraient s’apparenter à de la manipulation, de l’abus ou à autres relations dysfonctionnelles, lesquelles seraient plus fréquentes lorsque l’accompagnement est effectué par un employé de l’interne (Haggard, Dougherty, Turban et Wilbanks, 2010). Dans leur récit, aucun FA n’a révélé avoir joué, par exemple, avec les sentiments des apprenants. Un autre aspect de la compétence relationnelle peut également être mis en relief. Il concerne le fait qu’il y a souvent des interventions de collègues de travail au cours de l’accompagnement : elle interfèrent donc dans la relation formateur-apprenant. Ceci est une caractéristique propre au contexte de travail (Billet, 2009). Dans une autre section du présent rapport, nous avons déjà indiqué que lorsque des collègues ou des superviseurs formulent des commentaires au sujet du travail de l’apprenant, des FA ont tendance à être assez ouverts à leurs commentaires. Mais, même s’ils écoutent leurs avis, quelques-uns précisent qu’ils adoptent une attitude vigilante à l’égard des autres. C’est ce que Kram nomme une stratégie de protection qui consiste à mettre à l’abri son protégé des contacts potentiellement dommageables pour lui (1998). Dans cette étude, des FA cherchent à protéger l’apprenant des commentaires désapprobateurs d’autrui. Ils le font notamment pour éviter les effets de la démotivation ou de découragement sur l’apprenant. Ainsi, les actions du FA associées à la compétence relationnelle ne s’inscrivent pas toutes dans le rapport à l’apprenant, elles sont dirigées également vers les collègues de l’environnement de travail. Les FA voient donc à protéger leur apprenant des interventions d’autrui potentiellement nuisibles ou désagréables et pour être en mesure de continuer à développer un bon apprentissage.

6.7.5 Compétence de symbolisation Lorsqu’elle accompagnent leurs pairs, certaines personnes voient à présenter l’activité de travail en la situant plus largement dans son contexte de réalisation et en dégageant ses liens avec la fonction professionnelle, le métier ou le développement professionnel potentiel de l’apprenant (Balleux, 2000, 2002 ; Harris, Simons et Bone, 2000). Ces personnes ne se contentent pas de discuter de l’activité au quotidien, elles aident plutôt l’apprenant à se projeter dans leur rôle professionnel. Parmi les FA rencontrés, Natacha (cas B), Chantal (cas D) et Claudie (cas G) mobilisent ce type de stratégies de manière plus évidente. Contrairement aux autres, et comme le montre la figure 2, elles utilisent beaucoup des stratégies associées. De la sorte, leur apprenants peuvent avoir accès à une vision large de leur métier, développer une conscience du métier à plus long terme en y associant plus facilement des valeurs et des idéaux promus par l’accompagnateur. L’aptitude de ces derniers à mobiliser cette compétence se distingue nettement de celle d’autres FA qui ne mentionnent aucune action ou stratégie pouvant être apparentée à une volonté d’aider l’apprenant, soit à développer la conscience du métier dans ses aspects plus symboliques, à se projeter professionnellement dans l’avenir (cas B) ou encore à percevoir les relations entre l’apprenant avec d’autres travailleurs du même secteur d’activité en se référant à un espace social large (cas G). En effet, dans trois cas (A, C, D) nous n’avons décelé aucun élément pouvant être associé à la compétence de symbolisation au sens où l’entend Balleux (2002). Ces FA qui mobilisent pourtant une très grande variété de stratégies de formation liées à d’autres compétences n’ont pas tendance à envisager l’activité de travail de l’apprenant dans une

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perspective globale ou à partir d’un horizon étendu. Même si Balleux (2002) précise que cette compétence relève surtout d’une dimension personnelle, - sorte de façon d’être et de réfléchir - nous nous sommes demandées ce que ces trois FA avaient en commun. Ainsi, nous avons examiné si ces personnes étaient moins expérimentées que les autres ou si la nature de leur fonction se ressemblait. Or, ce n’est pas le cas. Du reste, ces trois FA font preuve d’une plus grande capacité à mobiliser d’autres compétences. La compétence de symbolisation semble donc très peu développée, un peu comme si, à leurs yeux, le transfert de savoirs visait surtout la maitrise immédiate de l’activité de travail. Nous sommes portées à penser que ceci traduit l’un des enjeux cruciaux de l’accompagnement en milieu de travail, celui ou le formateur est tellement centré sur l’action (…) au détriment de la pensée qui l’accompagne (Balleux, 2000 : 210).

6.7.6 Compétence éthique Au cours de leur récit, la plupart des formateurs-accompagnateurs mentionnent l’importance de la qualité du travail. La plupart expriment clairement que l’apprenant doit effectuer son activité selon les exigences de la tâche ou de la fonction. Ils semblent tous bien connaître les critères de qualité établis par l’organisation de travail, dont certaines le sont formellement. Il est intéressant d’observer que, lorsqu’ils sont questionnés au sujet de la dimension éthique de leur rôle, tous les FA donnent une réponse qui porte sur l’éthique du travail et non sur l’éthique de l’accompagnement ou de la formation. Aucune personne ne dispose non plus d’un code de déontologie qui lui aurait été fourni par son organisation de travail. Aucune n’a mentionné non plus le Règlement sur la déontologie des formateurs et des organismes formateurs (Québec, 2014). Si les personnes accompagnent leurs pairs sans référence à des règles éthiques, cela ne signifie pas pour autant qu’elles n’agissent pas avec prudence ou qu’elles ne s’appuient pas sur leurs valeurs personnelles. Effectivement, tous les FA décrivent des stratégies d’accompagnement pleinement centrées sur l’activité de travail et qui se limitent strictement à des perspectives de développement des compétences de travail. Leurs récits traitent constamment d’actions et de moyens qui concernent l’activité de travail. De plus, les échanges interpersonnels sont centrés sur le rapport de l’apprenant aux différentes facettes de cette activité. Aucune situation décrite ne peut donc être qualifiée d’abusive, ni être associée à des abus de pouvoir. Malgré ce qui vient d’être dit, le cas du FA de l’organisation A (Manuel) incite à se questionner sur quelques aspects d’ordre éthique. Dans son récit, il décrit un accompagnement qui se déroule dans un espace de travail extrêmement restreint où, malgré la présence de panneaux acoustiques, l’apprenante devait échanger avec son coach au sujet de son activité, dans une situation de très grande proximité physique avec de nombreux autres employés. Ces employés ont pu facilement avoir accès à des échanges qui portaient très souvent sur la non-performance de l’apprenante et la non-satisfaction du FA. Rappelons, en effet, que cet accompagnateur a eu des échanges un peu « rudes » avec l’apprenante, situation qui auraient pu nécessiter un espace clos. Nous avons vu que d’autres FA de notre étude, ont été attentifs à cet aspect (Cas F, I). Sur un autre point, nous avons constaté que les employés ne sont pas prévenus à l’avance du fait qu’ils seront « coachés » : ceux-ci se trouvent donc subitement dans la position d’apprenant sans préparation aucune. Alors que l’accompagnement de formation devrait être structuré sur la base de la réciprocité et de la mutualité (Berg et Karlsen, 2013), la situation présentée par Manuel donne

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l’impression que le FA cherchait peut-être à exposer son pouvoir sur les employés à former. Enfin, ce cas illustre la frontière qu’il peut y avoir entre l’accompagnement de formation – nommé coaching dans cette organisation – et la gestion de la performance particulièrement ténue. D’ailleurs, les méthodes et les outils de formations utilisées par le FA, ainsi que sa position d’emploi (« spécialiste ») peut susciter de la confusion chez l’apprenant au sujet de son rôle et des objectifs de l’accompagnement. Quelques faits rapportés par Manuel, - l’espace restreint, la surveillance étroite, l’ambiguïté des rôles - correspondent ce que Harrisson, Cloutier et Béland-Ouellette (2012) ont observé récemment dans une étude portant sur les conditions de travail dans les centres. Pour terminer au sujet de la compétence éthique, il est nécessaire d’aborder le fait que la plupart des FA sont amenés à évaluer les compétences de leurs pairs. Puisque l’évaluation est une activité qui consiste à porter un jugement et à formuler une appréciation personnelle à partir de normes et de valeurs, elle concerne donc la compétence éthique. Ainsi, si une part de l’activité évaluative des FA se fait tout au cours de la mise en œuvre de l’apprentissage – ce qui consiste en une évaluation de la progression générale de l’apprenant -, une autre part se réalise à la fin du projet d’accompagnement. Au sujet de celle-ci, plusieurs FA utilisent des outils de formation développés par leur organisation ou par le comité sectoriel de main-d’œuvre (A, C, D, E, F, G, H). La plupart d’entre eux participent également à des rencontres d’évaluation selon les modalités formelles définies par l’organisation. Dans tous les cas, les activités décrites par les FA se réfèrent à des éléments factuels qui concernent l’activité de travail. De plus, l’évaluation est effectuée à partir de critères organisationnels préétablis. Dans plusieurs cas, l’évaluation finale est effectuée avec la participation active du personnel de direction (B, C, D, E, F, I). En outre, les propos des FA laissent clairement voir que les FA participent à l’évaluation avec des repères observables et identifiables et non à partir d’impressions floues ou subjectives. Si les actions réalisées ne semblent pas poser problème - toujours selon les dires des FA –, nous ne pouvons pas ignorer que leurs propos au sujet de l’évaluation comportent des ambiguïtés, du moins en ce qui concerne l’évaluation finale de l’apprenant. Au cours des entretiens, plusieurs FA disent qu’ils n’évaluent pas leurs collègues, certains précisant que l’activité relève du personnel de la direction et que la convention collective encadre bien cette pratique. Dans un même temps, presque tous les FA exposent les détails de leur participation à l’évaluation finale. Celle-ci consiste à déterminer si l’employé est autonome dans son activité ou s’il maitrise telle ou telle activité. En fait, plusieurs FA affirment « ne pas faire l’évaluation des compétences » mais tout ce que décrivent la plupart d’entre eux (A, B, C, J, G, H) se rapporte, selon nous, à de telles stratégies.

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En effet, une bonne partie des FA participe au processus d’évaluation sous le modèle typique suivant :

écouter l’autoévaluation effectuée par l’apprenant qui utilise une grille critériée portant

sur plusieurs points de l’activité de travail au sujet du niveau de maitrise de cette activité exprimer son avis au sujet de l’autoévaluation, en utilisant aussi la grille critériée, assigner

une note ou un seuil de réussite sur chaque point, et échanger avec l’apprenant sur certains points au sujet du niveau de maitrise de cette activité

apposer sa signature sur la documentation en guise d’approbation au sujet de l’autoévaluation

s’assurer que le personnel de direction appose aussi sa signature pour valider

Sans entrer plus amplement dans les détails, précisons que les points examinés peuvent permettre au FA d’indiquer qu’un tel aspect du travail à apprendre a été vu, traité ou expérimenté avec l’apprenant ; l’examen peut aussi permet d’indiquer que l’aspect de l’activité est maitrisé à tel degré. En plus de ce processus, certaines autres actions liées à l’évaluation sont réalisées par d’autres FA, telle que la prise en compte des commentaires d’autres collègues (E, G) et la planification de la passation d’un examen final (H). Du reste, en dépit des ambiguïtés que nous avons relevées, et qui relèvent surtout du discours des FA sur leur pratique d’évaluation, nous constatons une valorisation organisationnelle et sectorielle des actions d’évaluation et qui aident les FA à développer une compétence éthique. De cette valorisation transparait un investissement dans la conception des outils et de la formalisation des modalités d’évaluation par les unités de formation dans les organisations et par les comités sectoriels de main-d’œuvre. 7. DISCUSSION ET CONCLUSION Cette étude cherchait à décrire des expériences de formateurs internes qui pratiquent la formation sous le mode de l’accompagnement individualisé, en exposant leur rôle, leurs stratégies de formation et en mettant en relief les difficultés, les contraintes et les succès rencontrés dans leur expérience, notamment ceux qui concernent les aspects relationnels. Pour répondre à cet objectif, nous avons procédé à une enquête de terrain pour décrire l’expérience de formateurs-accompagnateurs qui ont formé leurs pairs sous l’un des modes suivants: coaching, mentorat, compagnonnage ou parrainage. Rappelons qu’il s’agissait de six femmes et de trois hommes, âgés entre 29 ans à 62 ans, qui occupaient divers postes de travail. Ces personnes œuvraient dans des organisations de travail, majoritairement avec une présence syndicale, issues de différents secteurs d’activités socioéconomiques situées dans différentes régions du Québec. Pour connaitre l’expérience de ces formateurs-accompagnateurs, nous avons procédé à une collecte de données portant sur l’organisation de travail, sur le secteur d’activités économiques, ainsi que sur l’expérience individuelle de chacun de ces praticiens. Les données ont été recueillies par l’entremise de questionnaires, d’entrevues ainsi que d’entretiens centrés sur des récits de vie professionnelle et des récits de pratique.

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Notre étude a tout d’abord fournit des récits d’expérience, présentés de manière synthétique, ce qui a offert des illustrations d’éléments concrets, des parcours d’emploi de formateurs-accompagnateurs, du contexte de réalisation de l’accompagnement au sein de milieux de travail, ainsi des stratégies de formation déployées auprès de leurs pairs en montrant leurs compétences. Grâce à l’utilisation de la forme narrative, les neufs courts récits dégagent l’expérience subjective de leur rôle d’accompagnateur-formateur et l’appréciation personnelle qu’ils en ont, notamment au sujet de leur rapport à l’apprenant. Le caractère impressionniste des récits révèle, pour la plupart, un enthousiasme et une appréciation positive à l’égard de cette expérience qui semble faire écho, selon nous, à la valorisation de différentes formes d’accompagnement individualisé qui prévaut actuellement dans les milieux de travail et dans la société (Haggard, Dougherty, Turban et Wilbanks, 2010 ; Frétigné et Trollat, 2009; Lane, Setlter et Rostron, 2011). Par la suite, dans une perspective plus analytique, l’étude a dégagé les éléments semblables et les différents de l’expérience d’accompagnement des neufs formateurs-accompagnateurs. D’entrée de jeu, nous avons reconnu que la pratique des formateurs internes en milieu de travail est orientée essentiellement vers le développement des compétences des pairs et l’intégration ou le maintien en emploi. Les organisations de travail ne semblent pas confier à des formateurs internes des mandats avec des visées de développement professionnel à long terme ou de développement personnel. Indiquons aussi que les employeurs désignent des personnes qui ont une bonne connaissance de leur travail et de leur environnement pour assurer l’accompagnement les employés à former. Nous devons souligner également que, tout le long de ces pages, nous avons constaté une grande diversité dans les approches d’accompagnement de formation individualisé malgré la tendance à l’uniformisation des pratiques d’évaluation. Cette diversité est à ce point importante, qu’elle permet difficilement de dresser des portraits typiques d’accompagnateurs-formateurs. Dans leur étude, Harris, Simons et Bone (2010) ne voyaient pas non plus de modèle typique de formateurs internes. Aussi, nous avons évité de présenter, parmi les neuf cas étudiés, un profil exemplaire et que nous aurions valorisé comme un modèle à suivre pour l’accompagnement de formation individualisé en milieu de travail. Nous avons préféré prendre acte de cette diversité et en souligner des traits particuliers. Quels points doivent, selon nous, retenir l’attention ? Au sujet du rôle du formateur-accompagnateur, nous pouvons relever que le terme « coaching » profite actuellement d’une grande popularité dans plusieurs milieux de travail. C’est celui qui a été le plus fréquemment rencontré lors du recrutement et le plus utilisé dans les cas étudiés même si d’autres termes sont employés pour désigner leur pratique d’accompagnement, tel que compagnonnage, parrainage, mentorat. Quelque que soit le terme utilisé par les individus ou par les organisations de travail, les formateurs-accompagnateurs de notre étude semble clairement assimiler leur rôle d’accompagnement à de la formation ainsi qu’à une pratique qui vise l’apprentissage ou le développement des compétences. Ils ne la voient pas seulement comme une aide, une assistance ou une entraide. Et seulement quelques personnes tendent à l’associer plus directement à une pratique de gestion de la performance. Précisons au sujet du vocabulaire employé pour désigner leur rôle, que nous n’avons pu distinguer des pratiques particulières d’accompagnement de formation et les associer directement à l’une ou l’autre des appellations communes tel que le coaching, le mentorat, le compagnonnage, ou le parrainage et ce de manière précise et uniforme. Il y a seulement le cas du mentorat qui

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reflète, comme l’indique plusieurs écrits (Kram, 1988 ; Haggard, Dougherty, Turba et Wilbanck, 2010), une pratique un peu plus orientée vers le développement professionnel à long terme. Alors, nous devons admettre que nous constatons, tout comme d’autres chercheurs, l’ambiguité des termes employés pour désigner les pratiques d’accompagnement de formation (Haggard, Dougherty, Turba et Wilbanck, 2010 ; Laot et Lescure, 2006). Ensuite, nous avons relevé que les FA reçoivent du soutien pour les aider à accomplir leur rôle d’accompagnement. Ceux-ci ne sont pas laissés à eux-mêmes face à leur mandat. Nous avons vu qu’ils reçoivent une courte formation et des ressources importantes offertes par leur employeur (matériel, outils), via l’unité de formation ou le département des ressources humaines) et par les comités sectoriels de main-d’œuvre. La contribution syndicale transparait également par les conditions et les règles de la convention collective. Non seulement les ressources participent à formaliser la pratique d’accompagnement, mais elles contribuent à la valoriser du rôle. Alors qu’il existe d’autres ressources externes disponibles potentiellement pertinentes pour développer une reconnaissance du rôle d’accompagnateur, les formateurs-accompagnateurs semblent rarement y recourir, à l’exception des ressources du milieu universitaire. Bien que certains ont profité d’études universitaires dans le domaine de la formation aux adultes, la participation à des associations ou à des regroupements de formateurs n’est pas fréquente. Il est possible que les formateurs internes aient moins recours que les consultants externes à ces activités et services offerts par ses associations compte tenu des ressources fournies à l’interne. Ceux-ci ne profitent donc pas de toutes les ressources à leur disposition dans l’environnement qui pourraient profiter à la reconnaissance sociale professionnelle de leur rôle (Voyer et Ollivier, 2002). Il faut retenir également de cette étude que la présence et l’intervention des collègues de travail ainsi que celle des clients et des usagers durant l’accompagnement de formation est typique de cette approche en contexte professionnel. Nous savons que l’accompagnement de formation en milieu de travail est fondé sur le recours à la situation de travail réelle et authentique ; ceci rend possible leur contribution. Or, celle-ci est généralement utilisée par les FA de manière fructueuse pour assurer le transfert des savoirs mais elle est parfois considérée comme étant contraignante. Aussi, nous avons vu que la présence d’autrui marque de manière significative la relation d’accompagnement et qu’elle participe directement au développement de l’apprentissage. Notre étude ayant strictement analysée cette relation sous l’angle du formateur-accompagnateur, et uniquement à partir de récits présentant leur perception subjective, elle a permis d’en saisir uniquement certains aspects. Des études portant attention aux deux partenaires de la relation pourraient permettre d’en saisir d’autres encore et elles devraient aussi offrir de le faire de manière encore plus approfondie. Ceci est l’une des limites de notre étude. Notre recherche a montré comment les formateurs-accompagnateurs mobilisent des compétences de divers types. Elle témoigne de l’étendue des stratégies, actions et outils possibles pouvant être utilisés pour l’accompagnement des pairs. Les récits montrent, en particulier, l’importance des activités de planification dans plusieurs situations d’accompagnement ainsi que l’investissement très courant des formateurs-accompagnateurs dans le processus d’évaluation. Du reste, nous avons vu que la plupart des personnes ont un répertoire très vaste de stratégies qu’ils semblent savoir adapter à leur contexte organisationnel, à l’activité de travail et aux caractéristiques de l’apprenant. Mais des formateurs-accompagnateurs profiteraient à ajuster leurs actions et stratégies d’accompagnement. À la suite de ces constations, il est apparu que parmi l’ensemble des six compétences décrites, ce sont la compétence relationnelle, la compétence de

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symbolisation et à la compétence éthique qui mériteraient d’être l’objet d’un regard encore plus attentif, si individuellement et collectivement, un accompagnement de formation individualisé de plus grande qualité est visé. C’est d’ailleurs dans une telle cette perspective que nous formulons des pistes de réflexions et d’actions pour les différentes catégories d’acteurs concernées. 8. PISTES DE RÉFLEXION ET D’INTERVENTION À la lumière de résultats de notre étude, certaines pistes peuvent être formulées à l’attention des personnes et des organisations les plus directement concernées par l’accompagnement de formation individualisé en milieu de travail : les organisations gouvernementales, les organisations de travail, le personnel de la formation d’organismes externes et les formateurs-accompagnateurs. Compte tenu de la variété des situations d’accompagnement examinées, et du nombre restreint de cas étudiés, il sera pertinent d’interpréter ces pistes avec précaution. Celles-ci ont été formulées dans une perspective générale pour cibler quelques aspects saillants au sujet de l’accompagnement de formation individualisé. Les pistes proposées concernent notamment la reconnaissance professionnelle du rôle, des mesures qui encouragent des pratiques d’accompagnement de qualité ainsi que des conditions de réalisation facilitantes pour l’ensemble des acteurs investis dans les projets d’accompagnement.

8.1 Pistes pour les organisations gouvernementales

Assurer une plus grande visibilité du Règlement sur la déontologie des formateurs et des

organismes formateurs qui énonce des principes pertinents pour la pratique de l’accompagnement de formation individualisé de façon à rejoindre les publics concernés dans divers milieux.

Actualiser certaines orientations du Règlement de manière à ce qu’il interpelle plus directement les interventions de formation propres à l’accompagnement individualisé, telles que le coaching, le mentorat, le compagnonnage qui gagne en popularité.

Promouvoir, la formation initiale et continue des formateurs en milieu de travail, ce qui

comprend les formateurs-accompagnateurs qui pratiquent sous diverses appellations, au sein des politiques gouvernementales.

8.2 Pistes pour les organisations de travail

Encourager davantage la participation des accompagnateurs-formateurs aux activités de

planification et de conception du matériel. Leur participation dans les premières étapes du projet pourrait assurer une meilleure appropriation de la démarche d’accompagnement et l’enrichir. Considérant que le niveau de participation des formateurs-accompagnateurs dépend des contextes de travail et de leur niveau d’expérience, elle pourrait consister en une consultation sur le projet, à la validation de points précis ou à un investissement à l’ensemble du processus.

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Éviter de surcharger les FA en leur assignant la responsabilité d’accompagner plus d’un collègue en même temps ou en leur offrant une longue série de mandats d’accompagnement dans une courte période. S’il est vrai que cette approche se caractérise par sa souplesse, l’attribution des mandats d’accompagnement individualisé doit éviter de surcharger les formateurs-accompagnateurs.

Valoriser les activités et les moyens qui peuvent permettent aux FA de se développer

professionnellement dans leur rôle d’accompagnateur ou de trouver des réponses à leurs problèmes et questionnements sur leur pratique.

Sensibiliser les personnes responsables de la production, et les autres responsables de

services à l’interne, de l’importance de respecter la durée des projets d’accompagnement et ainsi éviter de placer les formateurs-accompagnateurs en position de négociation.

Prévoir du temps, pour chacun des projets d’accompagnement, des moments qui seront

consacrés au suivi : les formateurs-accompagnateurs pourront s’y investir plus formellement et ainsi ajuster ou accentuer le transfert de compétences.

8.3 Pistes pour le personnel de formation des comités sectoriels de main-d’œuvre, de

centrales syndicales et d’organismes de formation

Poursuivre l’offre de formation portant sur les différentes formes d’accompagnement

individualisé – coaching, mentorat, compagnonnage, etc. – mais en augmenter la durée afin que les publics visés puissent approfondir leurs connaissances.

Éviter l’uniformisation des modèles d’accompagnement de formation individualisé en

présentant aux organisations de travail une plus grande diversité. Les organisations de travail devraient alors profiter de modèles, d’approches et d’outils plus adaptés à leur culture organisationnelle et aux conditions de travail et de pratique.

Développer une offre de formation spécialement destinée aux formateurs-

accompagnateurs les plus expérimentés qui permettra les échanges d’expertise, la réflexion sur la pratique et toutes autres questions reliées à leurs besoins spécifiques. Des formules telles que les séminaires, les groupes de discussion et les groupes de co-développement seraient particulièrement appropriés pour eux.

Clarifier les orientations en matière d’évaluation des compétences au sein de

l’organisation afin que le personnel le plus concerné puisse bien distinguer les actions de suivi des apprentissages et les actions d’évaluation de la performance.

Promouvoir et encourager les directions d’organisations de travail à adopter des mesures

de reconnaissance professionnelle du rôle de formateur-accompagnateur interne, telles que la libération du temps de travail, le paiement du temps supplémentaire, la compensation monétaire, l’encouragement au perfectionnement professionnel et le remboursement des frais d’adhésion à des associations de coach ou de mentors.

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8.4 Pistes pour les formateurs-accompagnateurs

Permettre aux apprenants d’exprimer leurs préférences à l’égard des modes

d’apprentissage qu’ils privilégient sans ignorer non plus leur expérience professionnelle passée. En tenant compte de leurs préférences, et sans adopter des stratégies trop directives, il sera davantage possible d’adapter la mise en œuvre de l’activité, ce qui favorisera l’apprentissage et le transfert des compétences.

Prendre soin d’exposer son rôle de formateur-accompagnateur dès le début du projet.

Dans le cas de rôles professionnels multiples ou de différences statutaires avec l’apprenant, préciser les limites du rôle de formateur-accompagnateur.

Dans une perspective de développement professionnel, initier et entretenir une réflexion

portant sur le rôle de formateur-accompagnateur ainsi que sur le sens et la portée de ses interventions auprès de l’apprenant. Par diverses activités, développer sa capacité réflexive et de distanciation critique, notamment sur les aspects de l’éthique professionnelle.

Éviter de se sentir soi-même évalué lorsque l’apprenant ne maitrise pas bien les

compétences visées par le projet d’accompagnement. Même s’il est requis que les formateurs-accompagnateurs posent un regard critique sur leurs interventions d’accompagnement, ils devraient omettre de s’attribuer automatiquement la cause d’un échec ou de la non-performance d’un apprenant.

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133

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ANNEXE I

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Cette matrice de données est la propriété des professeures Brigitte Voyer et Sylvie Ouellet, UQAM, (juin 2013).Il est interdit de la transmettre, de la reproduire ou de la photocopier sans autorisation préalable.

ii

L’accompagnement individualisé de formation

Portrait du secteur de XXXXXXX

Préparée par : (nom du chercheur et date)

Description générale du secteur

Catégories et nombre d’entreprises

Nombre d’emplois

Employés syndiqués ou non

Volume des ventes

Répartition géographique des entreprises et des emplois (Montreal vs Régions)

Catégories d’emplois les plus importantes

Taille des entreprises

(petites, moyennes, grandes)

Contexte socioécono du secteur

Présence d’un comité sectoriel

Rôle du comité sectoriel

dans la formation

Place ou importance donnée à AI par le comité sectoriel

Autres

Sources bibliographiques (complètes) :

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ANNEXE II

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iv

Portrait de l'organisation et de la formation dans l'organisation

Personne contact :

Code de l’organisation participante :

Partie 1 : Les données factuelles sur l'organisation

1.1 Nom de l'organisation

1.2 Situation géographique (ville)

1.3 Secteur d’activité

1.4 Situation juridique (ex : franchise, filiale, etc.)

1.5 Date de constitution de l’organisation

1.6 Organisation syndiquée? (O/N)

1.7 Nom(s) du syndicat

1.8. Catégories d'employés couvertes par le syndicat

Nombre d’employés et structure

1.9 Nombre total d’employés

1.10 Nombre par département (en chiffre ou %)

1.11 Le nombre a-t-il varié dans les dernières années? (O/N) De combien? (en %)

1.12 Nombre d’employés dans le département concerné par le participant à l’étude

Profil général de la main-d’œuvre

1.13 Proportion de femmes/hommes (en %)

1.14 Proportion de jeunes (- de 30 ans, en %)

1.15 Proportion de personnes d’origine ethnique autre que canadienne (en %)

Quelles ethnies sont les plus importantes?

1.16 Quelles catégories professionnelles d'employés sont majoritaires? (ex : vendeur à 70%)

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v

1.17 Proportion d’employés à temps partiel (en %)

Quelles catégories professionnelles?

1.18 Proportion importante de pigistes/contractuels? (O/N)

1.19 Y a t-il une grande mobilité/stabilité des employés? Si oui, quelles catégories professionnelles?

Activité de l'organisation

1.20 Classement des activités selon le SCIAN

1.21 Produits vendus

1.22 Produits fabriqués

1.23 Produits distribués

1.24 Marques de commerce, s’il y a lieu (nom, types de produit)

1.25 Territoires desservis

1.26 Normes de qualité ou standard de fabrication? (O/N) Lesquelles?

Structure et fonctionnement

1.27 Les principales composantes de l'organisation (i.e départements) sont...

Organigramme disponible? Si oui, le demander. Si non, le produire en vérifiant la ligne hiérarchique qui concerne le participant à la recherche.

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vi

Partie 2 : Informations de base sur l’organisation (indiquer la source29

si cela

est documenté) 2.1 Brève histoire de l'organisation : principales étapes de développement (max : 1 page) 2.2 Information sur la culture organisationnelle (mission, valeurs, philosophie, style de gestion) (max : ½ page) 2.3 Renseignements sur les priorités de gestion des ressources humaines

Y a t-il des plans écrits de GRH? (O/N)

29 La source peut être un site Internet, un document internet, etc.

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vii

2.4 Informations sur les principaux défis, problèmes et contraintes internes de l'organisation et, en particulier, les défis liés aux ressources humaines (ex : roulement du personnel, recrutement, qualification) (max : ½ page) 2.5 Informations sur le contexte externe (environnement, marché, etc.) : ses défis, problèmes et contraintes, tout particulièrement ceux qui touchent les ressources humaines (max : ½ page) 2.6 Y a t-il des informations essentielles au sujet des ressources, acquis ou installations de l'organisation pour comprendre cette organisation (max : ½ page) 2.7 Autres informations factuelles pertinentes sur l'organisation (max : ½ page)

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viii

Partie 3 : Portrait des activités de formation (depuis janvier 2013)

Politiques (objectifs ou orientations) de formation dans l'organisation

3.1 Y a t-il une politique de formation écrite? (O/N)

3.2 Les principales politiques/orientions de formation sont :

3.3 L’organisation est-elle assujettie à la Loi sur les compétences (Loi du 1%)? (O/N)

3.4 Y a t-il un département (unité) des RH ou de formation? (O/N)

3.5 Sa situation hiérarchique dans l'organisation est :

3.6 Y a t-il des clauses de la convention collective qui concernent la formation? Si oui, les décrire quelque peu.

Fonctionnement et pratiques de la formation dans l'organisation (personne ou département)

3.7 Une personne est responsable de la formation? (O/N)

3.8 Son titre :

3.9 Sa place dans la hiérarchie de l'organisation :

3.10 Ses fonctions sont :

3.11 Globalement, les activités de formation organisées récemment sont (prendre l’exemple de l’année 2013) :

3.12. Globalement, les sous-secteurs de l'organisation (ou catégories d’employés visées) les plus visés en formation sont :

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ix

3.13 Outre le responsable, les autres catégories de personne investies en formation à l'interne sont :

Titre Département d'attache Fonctions

3.14 Y a t-il des formateurs qui ont exclusivement des fonctions de dispensation de la formation (i.e qui y travaillent à plein temps)? (O/N) Décrire. (Qui la donne? Pourquoi? Quel contenu? Quel type de formation? Quel but? Où?)

Formation par accompagnement individualisé (coaching, mentorat)

3.15 Y a t-il plusieurs formateurs-accompagnateurs en individualisé qui dispensent de la formation interne (O/N)? Est-ce seulement le participant? Décrire. (Qui la donne? Pourquoi? Quel contenu? Quel type de formation? Quel but? Où?)

3.16 Y a-il de la formation individualisée donnée par des formateurs-accompagnateurs externes? (O/N) Si oui, la décrire. (Qui la donne? Pourquoi? Quel contenu? Quel type de formation? Quel but? Où?)

3.17 Est-ce le recours à la formation individualisée est une pratique plutôt récente ou ancienne dans cette organisation? (O/N) Depuis quand?

Information sur la collecte de données Titre professionnel du participant qui a fourni les données : ____________________ Date : ______________________________________________________________ Nom de la chercheure : _________________________________________________ Liste des références des sources documentaires (à annexer) :

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ANNEXE III

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xi

Questionnaire sur le profil du formateur-accompagnateur

Code de la personne participante : _______________________________________________ Code de l'organisation : _______________________________________________________

1. Informations sur l’occupation

Quel poste occupez-vous dans cette organisation? ___________________________________ Depuis quand occupez-vous ce poste? (ex : mars 2002) _______________________________ Depuis quand travaillez-vous pour cette organisation? (ex : 1995) ______________________ Êtes-vous syndiqué(e) ou non-syndiqué(e)? Oui � Non �

Si oui: - Quel est le nom de votre syndicat? _______________________________________ - Avec quelle centrale syndicale? __________________________________________

Êtes-vous membre d’une association ou d’une corporation professionnelle? Oui � Non �

- Si oui, laquelle? _______________________________________________________ Dans quelle ville est situé votre lieu de travail? _____________________________________

2. Informations sur votre formation

Quel est votre niveau de formation scolaire le plus élevé? � Secondaire � Cégep � Université Sur le plan académique, dans quel domaine avez-vous étudié? (Quel niveau d’études? Quel domaine? Quel diplôme obtenu ou pas? Quel diplôme? (ex : collégial, DEC en informatique, obtenu) ____________________________________________________________________ Avez-vous déjà participé à une formation sur le XXX30? Oui � Non � Si oui:

- Quelle était la durée de cette formation? ____________________________________ - Quel organisme ou quelle personne vous a offert cette formation? _______________ - En quelle année avez-vous reçue cette formation? ____________________________ - Cette formation a-t-elle été payée par vous? Par votre employeur? _______________ - Quelle était la durée de cette formation (en nombre de jours)? __________________

30 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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xii

Avez-vous déjà participé une formation de formateur (i.e en face à face)? Oui � Non � Si oui: - Quel organisme ou quelle personne vous a offert cette formation? _______________ - En quelle année avez-vous reçu cette formation ? ____________________________ - Par qui cette formation a-t-elle été payée? Par vous � Par votre employeur �

3. Informations sociodémographiques

Quelle est votre année de naissance? _____________________________________________ Quel est votre pays de naissance? ________________________________________________ Quelle est votre langue maternelle? ______________________________________________ Quel est votre lieu de résidence? _________________________________________________

4. Autres informations

Au cours de la dernière année, votre salaire annuel se situait :

� moins de 30,000$ � plus de 30,000$ et moins de 40,000$ � plus de 40,000$ et moins de 50,000$ � plus de 50,000$ et moins de 60,000$ � plus de 60,000$ et moins de 70,000$ � plus de 70,000$ et moins de 80,000$ � plus de 80,000$ et moins de 90,000$ � plus de 90,000$ et moins de 100,000$ � plus de 100,000$

Recevez-vous une bonification de votre salaire lorsque vous avez un mandat de XXX31? Oui � Non � Si vous avez une convention collective, celle-ci prévoit-elle un statut particulier ou des avantages liés à XXX2? Si oui, précisez : Quel est le terme utilisé par votre employeur pour nommer votre rôle durant XXX2? Est-ce que vous utilisez toujours le même XXX2 pour nommer votre rôle? Sinon, quel terme utilisez-vous lorsque vous faites XXX2? ___________________________________________

31 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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ANNEXE IV

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xiv

Guide d’entretien Recherche sur l’accompagnement de formation individualisé

Partie 1 : Situation présente et parcours professionnel passé (environ 30 minutes)

QUESTIONS THÈMES

(SOUS-THÈMES)

1.1 Parcours d’emploi au sein de l’organisation

Vous travaillez dans cette organisation depuis... et vous occupez le poste de...

Quelles sont vos activités de travail dans ce poste (ou emploi)? Décrivez-moi en quoi ce travail consiste. Qu’est-ce que vous faites?

Activités de travail dans le poste actuel

Depuis vos débuts dans l’organisation, avez-vous toujours occupé le même poste (ou emploi)? Avez-vous toujours exercé les mêmes fonctions ?

Fonction du début et changements de poste

Sinon, racontez-moi votre parcours dans cette organisation depuis le début.

• Entrée dans l’organisation, durée de chaque poste ou fonction, niveau de responsabilité, département d’attache

Cheminement dans l’organisation

Type de mobilité (latérale ou ascendante)

1.2 Parcours professionnel passé

Avant de travailler pour cet employeur, qu’est-ce que vous faisiez professionnellement? Racontez-moi votre parcours depuis votre premier emploi.

- Type d’organisation et durée approximative dans chaque organisation

- Poste ou fonction dans chaque organisation et vérification de l’expérience passée (tâche/contenu du travail)

Type de parcours :

stabilité dans le parcours et dans la nature du travail

En travaillant dans ces organisations, avez-vous déjà donné de la formation ou du XXX32?

Si oui, racontez-moi un peu quel type de formation vous avez donné.

- Quel type (traditionnel ou accompagnement individualisé)?

- Quel contenu?

- Quelle fréquence?

Rôle de formation dans le passé

32 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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xv

Partie 2 : Rôle et mandat d’accompagnateur-formateur : origine de la décision et entente (10 minutes)

QUESTIONS THÈMES

(SOUS-THÈMES)

Racontez-moi comment vous avez débuté votre expérience de XXX33. Origine du mandat

À quel moment est-ce qu’on vous a demandé de faire du XXX2?

Quel est l’événement qui a suscité le besoin pour ce XXX2?

Élément déclencheur

Y a t-il un processus formel pour la sélection des XXX2 dans votre organisation?

Si oui, comment ça se passe? Qu’est-ce qui est prévu?

Si non, comment cela s’est-il passé dans votre cas ?

Qui vous l'a demandé? (fonction, niveau de responsabilité du demandeur)

Selon vous, quelles sont les raisons pour lesquelles on vous a confié cette responsabilité? Selon vous, quels étaient vos atouts? Vos qualités?

(Vérification: surtout la communication ou expertise de contenu)

Compétences attribuées pour rôle

Et vous, qu’est-ce qui vous intéressait? Intérêt du formateur et compétences perçues

Face à ce nouveau mandat, comment avez-vous réagi? Est-ce que vous aviez certaines craintes? Vous sentiez-vous suffisamment prêt à relever ce défi?

Conception de sa compétence

Aviez-vous besoin de ressources, d’une certaine préparation? Aviez-vous demandé certaines conditions à votre employeur ?

Conditions organisationnelles

Quel mandat vous avait confié votre employeur exactement? Qu’est-ce que vous deviez faire? Quel est le but des formations en XXX2 que vous donné ?

Est-ce que dans votre milieu, vous vous référez à un code d’éthique?

Rôle ou mandat confié

Est-ce que vous étiez libéré de votre tâche habituelle ou d’une partie de votre tâche?

33 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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xvi

Partie 3 : Exploration de l’expérience d’accompagnement individualisé en général (30 minutes)

QUESTIONS THÈMES

(SOUS-THÈMES)

- Comment se passe un XXX34? Racontez-moi comment vous faites ?

- Combien de temps dure un XXX3?

- Qui formez-vous (fonction, tâche du formé)? Que fait cette personne? Quel est son travail?

- Que devez-vous montrer? Sur quoi devez-vous former? (contenu)

- Quelles ressources (outils de travail, ...) utilisez-vous?

- Où se déroule la formation?

- Décrivez-moi un peu le lieu physique où cela se déroule?

- Votre XXX3 implique-t-il une évaluation de la personne? Un suivi?

Description spontanée du rôle et des composantes générales de l’activité de XXX3

3 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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xvii

Note : Prendre soin de bien sélectionner l’expérience avec le participant (voir grille).

Partie 4 : Situation d’accompagnement individualisé particulière et sélectionnée (Total : 60 minutes)

QUESTIONS THÈMES

(SOUS-THÈMES)

4.1 Caractéristiques de la situation sélectionnée (30 minutes)

Maintenant, j’aimerais que vous m’expliquiez plus en détail une expérience concrète de XXX35? J’aimerais que vous choisissiez une expérience récente (souvenir, ...)

• Nous allons la situer: date, personne, ...

Quel était le travail à montrer? Le but de XXX4? Objet d'apprentissage

Qui est la personne à former? (âge, niveau d’expérience de cette personne dans l'emploi/tâche visé, écart du niveau d’expérience entre le formateur-accompagnateur et la personne à former, connaissance préalable du formé vis-à-vis du contenu à apprendre)

Caractéristiques de la personne à former

Quelle fonction ou tâche la personne à former devait-elle accomplir dans l’organisation? Était-ce une nouvelle tâche pour elle?

Fonction du formé et niveau de connaissance de la tâche à réaliser

Dites-moi quelques mots sur les conditions de travail de cette personne. Est-ce un travail difficile? Satisfaisant? Pénible?...

Conditions de travail du participant

Décrivez-moi l’espace physique dans lequel se situe votre XXX4.

Nous savons que dans les formations traditionnelles, le formateur est placé en face du groupe; dans le cas du XXX4, est-ce différent? Comment êtes-vous placé physiquement par rapport à la personne à former? Décrivez-moi le lieu où se déroule le XXX4.

Êtes-vous seul avec cette personne? Y a-t-il d’autres personnes?

Espace et position

Racontez-moi comment ça se passe. Que faites-vous? Que dites-vous? Mise en œuvre de l’activité et stratégies utilisées (exploration du récit spontané)

35 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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xviii

4.2 Aspects des stratégies et de la communication pour l’expérience particulière

(15 minutes)

J’aimerais maintenant vérifier des choses encore plus précises avec vous.

Quelles sont les actions, les paroles ou les gestes qui vous semblent les plus importants dans cette formation ?

Qu’est-ce que vous dites ou répétez souvent à la personne formée ?

Stratégies utilisées

(précision 1)

J’aimerais avoir quelques précisions au sujet des autres personnes présentes au moment de ce XXX36.

Combien sont-elles? Participent-elles à l’activité? Quels rôles ou fonction jouent-elles? Sont-elles observatrices? Est-ce qu’il arrive que les autres interviennent dans votre XXX5?

Y a-t-il des clients? Jouent-ils un rôle pour la formation? Lequel?

Conditions sociales (les autres dans la mise en œuvre de l’activité)

Lorsqu’on XXX5 une personne, on doit et on choisit de faire toutes sortes de choses pour qu’elle apprenne. Vous m’avez nommé plusieurs de vos actions. Parmi tout ça, qu’est-ce qui l’a le plus aidé à apprendre (à comprendre), selon vous ?

Stratégies utilisées

(précision 2)

4.3 Aspects de la communication et de la relation – expérience particulière (15

minutes)

Il n’est pas facile de communiquer son savoir à une autre personne… On ne connaît pas toujours les réactions de l’autre…

Y a-t-il déjà eu un moment où les choses étaient plus difficiles avec cette personne ? Est-ce que, à un moment, cette personne résistait ou ça n’allait pas comme vous le vouliez entre vous?

Aspects relationnels difficiles

Est-ce qu’il y a eu des aspects plus faciles ou agréables dans votre relation avec cette personne ?

Aspects relationnels positifs

Lorsque vous pensez à ce XXX5, considérez-vous que vous avez atteint votre but? La personne formée a-t-elle compris ou réussi?

Satisfaction: but recherché

36 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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Partie 5 : Conclusion: appréciation personnelle de son rôle

Vous venez de me parler de cette expérience de XXX37 et nous allons bientôt terminer notre entretien.

Lorsque vous pensez à toutes vos expériences de XXX6, y en a-t-il une ou deux qui ont été particulièrement positive (ou satisfaisante)?

À quoi attribuez-vous ce succès? Qu’est-ce qui a fait que c’était positif?

Aspects positifs (spontanément exprimés)

Pour terminer, j’aimerais savoir, pour vous, ce qui est le plus satisfaisant en général dans votre rôle de XXX6.

Aspects positifs du rôle

Note: À la fin, remercier la personne participante et exposer les suites de la recherche.

37 À l'endroit marqué par XXX, utiliser le terme employé par le participant: coaching, mentorat, compagnonnage, etc.

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ANNEXE V

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xxi

Critères pour le choix de la situation de formation individualisée

particulière

Durant une partie de l’entrevue avec la chercheure, il vous sera demandé de décrire dans les détails une situation de formation que vous avez vécue. La chercheure devra être capable de bien la visualiser. SVP choisir cette situation à partir des critères suivants :

Critères

� Vérifier si votre situation correspond au critère mentionné

1. Une situation de formation dont vous avez

gardé un souvenir assez précis, pour pouvoir bien la décrire

2. Une expérience typique, qui reflète ce qui se

passe habituellement et non exceptionnellement

3. Une situation que vous pouvez décrire en

détail, en mentionnant le lieu physique, les personnes présentes et le déroulement

4. Une situation qui peut être simple ou

complexe mais qui a un début et une fin. On peut la circonscrire.

5. Une situation dont l’issue - en termes

d’apprentissage - peut être identifiée, que celle-ci soit positive ou négative.

6. Une situation significative pour vous et qui

vous permettra de parler de votre rôle de coach (ou mentor ou compagnon).

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ANNEXE VI

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xxiii

Participant no : _______ Parmi les énoncés suivants, lesquels peuvent-être associés à votre situation ? Répondez par vrai ou faux Vrai Faux 1. Manquer de temps pour bien former l’apprenant 2. Former un apprenant qui a de mauvaises conditions de travail 3. Parrainer sans avoir une expérience en formation au préalable 4. Ne pas bien connaitre soi-même le travail à montrer à l’apprenant 6. Manquer de temps pour faire son propre travail 7. Parrainer la personne, sans avoir un mandat clair de l’employeur 8. Évaluer la performance de l’apprenant et transmettre le résultat à

l’employeur

Parmi les énoncés suivants, cochez ce que vous considérer comme les principales difficultés pouvant être rencontrées par le parrainage. Cochez un maximum de cinq (5). 1. Ne pas écouter suffisamment son apprenant 2. Ne pas observer assez l’apprenant lorsqu’il pratique 3. Ne pas donner assez de conseil ou de consigne 4. Ne pas laisser l’apprenant se pratiquer 5. Ne pas poser suffisamment de questions à l’apprenant 6. Ne faire confiance à la personne 7. Avoir tendance à critiquer ou à dénigrer l’apprenant qui a de la difficulté 8. Avoir de la difficulté à se faire respecter comme parrain 9. Se sentir intimidé devant son apprenant 10. Faire preuve d’impatience ou d’intolérance 11. S’ajuster à la personne (à son rythme, sa personnalité) 12. Se sentir dérangé par la présence des autres (clients, autres employés)

lorsqu’on forme

13. Se sentir physiquement trop proche de l’apprenant 14. Former une personne peu motivée ou résistante 15. Former des apprenants plus jeunes ou plus vieux 16. Signaler difficilement les erreurs de la personne 17. Ne pas savoir comment faire progresser l’apprenant vers des tâches plus

difficile

18. Avoir de la difficulté à établir une relation de confiance 20. Ne pas dialoguer ou échanger suffisamment avec l’apprenant

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ANNEXE VII

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CADRE OPÉRATIONNEL : ANALYSE VERTICALE DE CHAQUE CAS

Dimension 1 : Accompagnateur-formateur : profil individuel, parcours et rôle. Sous-dimensions Indicateurs opérationnels

D1-1 Caractéristiques sociodémographiques

Sexe Âge Lieu de résidence Lieu de naissance Langue maternelle Rang salarial

D1-2 Position professionnelle actuelle

Poste occupé Durée dans ce poste Fonctions exercées dans ce poste Durée dans l’organisation Département d’attache Situation syndicale Situation associative/corporative Situation associa/coaching

D1-3 Parcours de formation : formation initiale et continue

Niveau de formation Domaines d’études Formation sur A.I. : oui/non Si oui : organisation, année, durée Formation de formateur Si oui : organisation, année, durée

D1.4 Parcours professionnel passé

Autres postes occupés : année, durée, type d’organisation, type d’emploi Type de mobilité dans la carrière : ascendante, latérale, descendante Expérience de formation : oui/non - Contenu - Très fréquent/peu fréquent Expérience en AI : oui/non - Contenu - Très fréquent/peu fréquent

D1.5 Parcours professionnel dans l’organisation Autres postes occupés et durée Type de mobilité : ascendante, latérale

D1.6 Rôle de formateur dans la carrière Rôle en formation : oui/non Si oui : année, fréquence, contenu, type ; dans l’entreprise ou non

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xxvi

D.1. 7 Mandat d’accompagnement confié

Élément déclencheur de la demande Moment de la demande Provenance de la demande, processus de demande Niveau hiérarchique, département Motifs du demandeur Processus du demandeur

D.1.8 Représentation de son rôle et ressources organisationnelles

Représentation personnelle du rôle - avant l’expérience - à la fin de l’expérience

Intérêt pour rôle Clarté du rôle attribué Craintes face au rôle Exigences pour obtention de ressources (compensation, temps, code éthique) Disponibilité pour le rôle (ressources/temps) Compétences perçues pour rôle

D.1.9 Autres sous-dimensions

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Dimension 2. Caractéristiques de l’apprenant selon représentations du formateur

Sous-dimensions Indicateurs opérationnels

D2-1 Caractéristiques sociodémographiques

Sexe Catégorie d’âge Langue maternelle ; langue d’usage Origine ethnique ; récent immigrant ou pas Niveau de scolarité

D2-2 Caractéristiques professionnelles

Poste occupé Écart avec le poste de A.I oui/non - Niveau d’écart Écart : niveau de connaissance de l’activité visée But recherché par AI : insertion en emploi, nouveau poste, développement prof, acquisition de nouvelles compétences, autre

D.2.3 Conditions de travail

Charge de travail satisfaisante ou pas Aspect pénible, gratifiant, monotone, etc. Climat de travail apprécié ou pas : entraide, solidarité

D.2.4 Expérience et disposition à l’apprentissage Expérience préalable Niveau d’engagement/motivation Aptitudes à l’apprentissage

D.2.5 Autres caractéristiques de l’activité à réaliser pour l’apprentissage/du projet d’apprentissage

Seul ou en interaction avec autrui Niveau de complexité

D.2.6 Autres sous-dimensions

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Dimension 3. Caractéristiques des autres apprenants formés selon représentations du formateur

Sous-dimensions Indicateurs opérationnels

D3-1 Caractéristiques sociodémographiques

Sexe Catégorie d’âge Langue maternelle ; langue d’usage Origine ethnique ; récent immigrant ou pas Niveau de scolarité

D3-2 Caractéristiques professionnelles

Poste occupé Écart avec le poste de F-I oui/non Niveau d’écart Écart : niveau de connaissance de l’activité visée But recherché par AI : insertion en emploi, nouveau poste, développement prof, acquisition de nouvelles compétences, autre

D.3.3 Conditions de travail

Charge de travail satisfaisante ou pas Aspect pénible, gratifiant, monotone, etc. Climat de travail apprécié ou pas : entraide, solidarité

D.3.4 Expérience et disposition à l’apprentissage Expérience préalable Niveau d’engagement/motivation Aptitudes à l’apprentissage

D.3.5 Autres caractéristiques de l’activité à réaliser pour l’apprentissage

Seul ou en interaction avec autrui Niveau de complexité

D.3.6 Autres sous-dimensions

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Dimension 4. Activité de travail comme objet ou processus d’apprentissage

Sous-dimensions Indicateurs organisationnels

D4-1 Mise en œuvre de l’activité de travail

Lieu de l’activité AI et ses caractéristiques Disposition physique du TF et de l’A pendant AI Présence/absence d’autres travailleurs et degré d’interaction pendant AI Autres acteurs pendant AI: clients, travailleur Activité effectuée avec le FA : totalement, partiellement ou pas du tout

D4-2 Description/narration de l’activité ou de l’expérience de travail

Activité/expérience est racontée par A : oui/non ; pendant la réalisation du travail/après la réalisation Récit décrit sur une période de …

D4-3 Objet d’apprentissage (but recherché)

Tâche demandée/but de l’activité de AI Procédure/processus Durée du processus Savoirs développés : niveau, type (théoriques, pratique, s/s-f/s-e) Apprentissage atteint ou mandat réalisé; niveau d’atteinte ; avec ou sans satisfaction

D4-4 Autres sous-dimensions

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Dimension 5 : compétences du formateur-accompagnateur : actions, stratégies et moyens

D5.1 Compétences mobilisées dans AI Indicateurs opérationnels : stratégies, ressources, outils, moyens, outils, mots employés, etc.

D5.2 Compétences techniques*/professionnelles/théoriques

- Effectuer le travail avec ou devant l’apprenant

- Expliquer - Conseiller - Corriger

D5.3 Compétences opérationnelles*

- Mettre l’autre au travail : montrer, indiquer, expliquer, démontrer, effectuer en même temps, demander d’effectuer,

- Dévoiler le produit et la tâche : Faire voir, faire faire, dévoiler la matière, organiser travail et ressources en étapes/séquences, supporter au fur et à mesure, reprendre le contrôle si erreur, vérifier

- Observer - Corriger les erreurs - superviser - Évaluer produit et tâche pendant

l’apprentissage - Calibrer travail et apprentissage

D5.4 Compétences relationnelles*

- Écouter - Tolérer les difficultés/erreurs - Rassurer - Encourager - Encourager l’expression - Stimuler la confiance en soi - Se montrer présent - Questionne avec empathie - Fait verbaliser l’autre

D5.4 Compétences de symbolisation*

- Se positionner : s’engager, se rendre disponible, ajuster son rôle au fur et à mesure

- Considérer l’apprenant à long terme - Aider à développer la conscience du

métier (limite et perspective) - S’appuyer sur valeurs et idéaux

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(partager ses connaissances, inculcation à long terme des enjeux, raconter histoire du métier)

D5.5 Compétences éthiques - Évalue à partir de l’action, des faits, de critères

- Agit avec prudence, sans toute puissance, sans favoriser la dépendance

- Évalue pour amélioration, développement

- Confidentialité D.5.6 Moyens de formation - Outils

- Modalités - Méthodes

D.5.7 Autres sous-dimensions Formateur planifie le travail à faire

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D6. Relation, transaction/communication

Sous-dimensions Indicateurs D6-1 Degré de connaissance préalable des

deux partenaires Peu ou pas

D6-2 Climat général (de confiance)

Engagement personnel du FI à la confidentialité Expression de la disponibilité du FI Écoute et accueil manifestés Recherche de compréhension de la structure d’interprétation de l’apprenant Écoute sans jugement Expression d’authenticité et bienveillante Qualité de présence

D6-3 Types d’interaction (mutualité) ou de participation

Écoute mutuelle Échange/questionnement/dialogue/réponses aux questions/ communication active (dans la parole ou dans les gestes) Observation Ajustement à l’autre Réciprocité dans la participation Équilibre autonomie/encadrement Manifestation de proximité Expression d’authenticité

D6-4 Qualité de l’interaction

Aspects positifs (succès) Aspects difficiles Aspects dysfonctionnels (sabotage, trahison, etc.)

D6-5 Perception de l’effet de l’interaction sur d’autres aspects que l’apprentissage

Autre effet de la relation

D6-6 Autres sous-dimensions

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D7. Conditions organisationnelles et sectorielles

D7-1 Conditions physiques du lieu de travail Aménagement de l’espace du travail Conditions auditives (ex : bruit), sensorielles (froid) etc.

D7-2 Conditions physiques du poste de travail Aménagement de l’espace personnel de travail Conditions auditives, sensorielles, etc.

D7-3 Conditions matérielles et temporelles

Outils et équipement de travail de l’apprenant Outils de l’accompagnateur (guide, référentiels, procédure, etc.) Horaire de travail, organisation du temps de l’apprenant

D.7.4

Conditions organisationnelles: a) caractéristiques générales de l’organisation

Taille de l’organisation (grande, moyenne, petite), situation juridique, structure générale et activités Syndiquée ou non ; affiliation, catégories employés couvertes Éléments de l’histoire et culture organisationnelle Type de développement (évolution du nbr yés) Profil de la m-o et stabilité Contraintes internes Contraintes externes Type de GRH

b) Structuration et organisation de la formation à l’interne

Politique de formation Oui/non Quelles orientations ? Présence d’un responsable de la formation Oui/non ; titre, fonction, place dans l’organisation/ lien hiérarchique Autres prof. de formation investis : nombre, titre, rôle Département les plus concernés par formation/catégories d’employés Type d’activité de formation - insertion/intégration - développement professionnel - acquisition nouvelle compétence - développement compétence

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- Normes/qualité - SST Clause formation dans conventions collectives Oui/non Quelles ? Loi sur compétences

c) Organisation de la formation individualisée à l’interne

Formation interne sur AI Oui/non : qui ? But ? Contenu, type où?, depuis quand?

D7-5 Conditions relationnelles

Qui participe à l’AI? Nombre de personnes ? Quels types d’interaction? Rôle d’observateur ? d’acteurs?

D7-6 Conditions professionnelles et sectorielles Code d’éthique : E-Q ou autre Référentiels de compétence sectoriel Valorisation de AI /ou non

D7-7 Autres sous-dimensions

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ANNEXE VIII

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Tableau VI : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas A

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN38 517910 - Autres services de télécommunications

Secteur d'activité Services de télécommunications

Années d'existence 1969, donc 46 ans

Entreprise syndiquée Oui, deux syndicats. Un pour techniciens et un pour employés de bureau

Évolution du volume de la main-d’œuvre

Perte de 50% des employés depuis les années 90

Caractéristiques générales de la main-d’œuvre

Catégories d'emploi majoritaires Agents de centre d'appels

Caractéristiques de la mobilité interne (changement de poste à l’interne, un peu, moyennement, beaucoup)

Beaucoup, notamment par attrition

Caractéristiques de la mobilité externe (un peu, moyennement beaucoup)

Beaucoup

Régime d'emploi principal Temps plein, 71% à plein temps et 28% à temps partiel pour le Service à la clientèle

Normes de qualité Activités des ingénieurs, comptables et électriciens soumis à des normes liées à l’Ordre professionnel ou au corps d’emploi Règles du CRTC pour les tarifs des services, les aspects de concurrence et les aspects promotionnels Indicateurs de qualité établis par l’organisation pour le service à la clientèle (ex : 75% des clients doivent être répondus en 20 secondes)

Indications sur les activités GRH

Restructuration en 2007, mobilité interne par attrition car beaucoup de départs à la retraite. L’entreprise est très structurée. Par exemple, il y a un programme de reconnaissance pour les employés performants. Ils reçoivent un certificat honorifique et des cadeaux. Il y a deux évaluations d’employés par année. Il y a une politique de gestion de la relève et un plan de développement personnel (pour aider les employés à cheminer au sein de l’entreprise). Chaque employé a ses objectifs de performance précis.

38 Le Système de classification des industries de l'Amérique du Nord (SCIAN).

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Tableau VII : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas A

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Oui

Politique de formation écrite Non

Orientations

Ventes, amélioration de la performance. De plus, il y a une orientation générale qui consiste à promouvoir auprès de tous les nouveaux employés la participation à la formation interne pour assurer la capacité de suivre les changements technologiques.

Présence d'un responsable de la formation

Oui, pour l'unité des ventes

Titre professionnel Spécialiste du support aux campagnes des ventes et développement de la formation

Fonction principale du responsable

Décision, en concertation/consultation avec les responsables concernés, des stratégies et moyens de formation Formation des vendeurs Suivi de formation Coaching Encadrement des responsables de l’assurance qualité Rédaction des rapports hebdomadaires

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Rattaché au département des ressources humaines

Autres professionnels de la formation

Oui

Nombre de personnes dans l’unité de formation

2

Titres professionnels Adjointe des directeurs d’équipe dans les centres d’appel

Types d'activité de formation Coaching

Départements les plus concernés par la formation

Département des ventes et du service à la clientèle Département des ressources humaines

Convention collective Deux conventions collectives : l’une pour les employés de bureau et l’autre pour les techniciens

Clauses pour la formation Oui

Nature des clauses Un article porte sur la formation à la préretraite et un autre sur la formation liée au changement technologique.

Clause spécifique pour compensation financière (oui/non)

Une «politique d’assistance éducation» permet aux employés d’obtenir le remboursement des frais de formation suivie à l’extérieur à la condition qu’il y ait un lien entre le cours et l’emploi occupé ou convoité.

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Tableau VIII : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas A

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Non

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisé

Clause spécifique pour compensation financière

Formation interne sur accompagnement individualisé

Non

Catégorie du personnel pratiquant l’accompagnement

Responsable, assistante à la direction

Type d’accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Coaching

Contenu de la formation individualisée

Formation des nouveaux employés en vente Formation sur les nouveaux produits Formation sur les procédures (à la suite du non respect des procédures)

Début de la pratique d’accompagnement individualisé

Pratique ancienne

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Tableau IX : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas B

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN Coopérative de crédit et caisses populaires

Secteur d'activité Financier

Années d'existence Dans son état actuel : 2009

Entreprise syndiquée Oui (affiliation à la FTQ)

Évolution du volume de la main-d’œuvre En diminution

Caractéristiques générales de la main-d’œuvre

Femmes à 87%, homme 13% Jeunes de – de 30 ans : 27%

Catégories d'emploi majoritaires Conseillers à la clientèle

Caractéristiques de la mobilité interne Stabilité interne

Caractéristiques de la mobilité externe Mobilité externe involontaire : moyennement

Régime d'emploi principal Salarié, temps plein

Normes de qualité Oui, pour plusieurs actions (ex : planification financière est sous l’Autorité des marchés financiers)

Indications sur les activités GRH Le plan de gestion des ressources humaines montre un souci de planification de la main-d’œuvre cohérent avec la dynamique interne et externe.

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Tableau X : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas B

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Oui

Politique de formation écrite Oui

Orientations

Les orientations de formation, établies au plan annuel, concernent le développement des compétences et l’augmentation de la performance, la promotion interne, l’application des obligations règlementaire pour certaines pratiques de travail et le support à la planification de la main-d’œuvre (gestion des congés de maternité /retraite).

Présence d'un responsable de la formation

Oui

Titre professionnel Conseillère en gestion des ressources humaines

Fonction principale du responsable

Gestion, conception, coordination et organisation des activités de formation ; gestion du dossier de la loi 5 et application de la convention collective.

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Lien direct avec la direction de la caisse

Autres professionnels de la formation (titre et nombre)

Oui, 4

Nombre total de personnes dans l’unité de formation

5

Titres professionnels Conseillères en ressources humaines (3) Adjointe (1)

Types d'activité de formation Formation annuelle sur les règles de l’AMF Formation de perfectionnement liée à l’emploi Formation sur des projets particuliers (ex : changement informatique)

Départements les plus concernés par la formation

« Unité conseil » (vie active, préretraités et retraités)

Convention collective Oui, pour les employés autres que RH

Clauses pour la formation (O/N)

Oui

Nature des clauses

Orientations et visées de la formation priorisée et catégorisation des activités Liste de cours offerts par le siège social de l’organisation Conditions de remboursement des frais de scolarité Aménagement du temps de travail pour poursuite d’études collégiales et universitaires

Clause spécifique pour compensation financière

Remboursement d’une partie des frais pour la formation externe et du matériel de formation Remboursement des frais de séjour et déplacement pour d'autres formations

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Tableau XI : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas B

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Non

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisée

Clause spécifique pour compensation financière –

Formation interne sur l'accompagnement individualisé

Non

Catégorie du personnel pratiquant l’accompagnement

Les employés déjà en place ainsi qu’un formateur d’une firme externe sur des aspects précis

Type d’accompagnement individualisé

Formation pour l’intégration à l’emploi

Contenu de la formation individualisée

Fonctions et tâches de travail

Début de la pratique de l’accompagnement individualisé

Toujours

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Tableau XII : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas C

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN Fabrication de produits aérospatiaux et de leurs pièces

Secteur d'activité Aérospatial

Années d'existence 1986 (statut actuel) et 1942 (organisation d’origine)

Entreprise syndiquée Oui, syndicat des machinistes pour les employés de production

Évolution du volume de la main-d'œuvre

Tendance à la fluctuation à la baisse

Caractéristiques générales de la main-d'œuvre

90% hommes et main-d’œuvre vieillissante

Catégories d'emploi majoritaires Employés de production

Caractéristiques de la mobilité interne (peu, moyennement, beaucoup)

Mobilité interne pour certaines catégories (ingénieurs)

Caractéristiques de la mobilité externe (peu, moyennement, beaucoup)

Fluctuante, selon les hausses et baisses de production

Régime d'emploi principal Temps plein, régulier

Normes de qualité Plusieurs normes de qualités internes et externes

Indications sur les activités GRH Les activités sont centrées sur l’engagement individuel des employés ainsi que sur le recrutement et l’embauche de la main-d’œuvre qualifiée qui se fait rare.

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Tableau XIII : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas C

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Oui

Politique de formation écrite Pas de politique de formation écrite au sein de l’organisation étudiée mais une « politique de gestion des habiletés » avec des indications sur le respect des nombreuses normes de fabrication.

Orientations Depuis plus de 10 ans, une valorisation formelle de la formation par coaching ainsi que l’établissement et la formalisation de programmes, d’activités et d’outils de formation.

Présence d'un responsable de la formation

Oui

Titre professionnel Chef du Service de l’apprentissage organisationnel

Fonction principale du responsable

Gestion des activités de formation pour l’organisation étudiée, relation de services avec les divers départements selon les demandes et relation avec l’organisation mère.

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Sur le plan hiérarchique, l’unité relève du centre administratif. Sur le plan des services, elle relève du département des ressources humaines de l’organisation

Autres personnes investies dans la formation (titre et nombre)

Oui

Nombre total de personnes dans l’unité de formation

14

Titres professionnels Pa Partenaires d’affaires

Conseiller en apprentissage technique39 »

Types d'activité de formation

- Intégration des nouveaux employés sur les aspects culturels (valeurs, qualité, etc.) et techniques - Mise à jour des connaissances et habiletés techniques - Projets spéciaux sur demandes ponctuelles

Départements les plus concernés par la formation

Différents départements de production

Convention collective Oui

Clauses pour la formation (oui/non)

Oui, deux clauses.

Nature des clauses pour la formation –

Clause spécifique pour compensation financière

Oui

39 Ces individus occupent des fonctions de formation, mais ils sont aussi les chefs de groupe reliés aux travailleurs « sur le terrain ».

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Tableau XIV : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas C

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Oui

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisé

L’une assigne la responsabilité et le rôle de coach au « chef de groupe ». L’autre indique le devoir des employés de partager leurs connaissances au besoin.

Clause spécifique pour compensation financière

Oui

Formation interne sur l'accompagnement individualisé

Non mais participation à la planification

Catégorie du personnel pratiquant l’accompagnement

Une entreprise externe forme les employés désignés sur la pratique du coaching

Type d'accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Coaching

Contenu de la formation individualisée Tâches et procédés de travail

Début de la pratique d'accompagnement individualisé

Pratique ancienne mais, depuis plus de dix ans, formalisation de la pratique

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Tableau XV : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas D

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN Soutien au transport aérien

Secteur d'activité Aéronautique et défense

Années d'existence 29 ans

Entreprise syndiquée Oui

Évolution du volume de la main-d’œuvre

Perte de 20% du nombre total d'employés durant les derniers quatre ans

Caractéristiques générales de la main-d'œuvre

80% d'hommes, 5% de jeunes de moins de 30 ans

Catégories d'emploi majoritaires Ingénieurs et employés des opérations

Caractéristiques de la mobilité interne (changement de poste à l'interne, peu, moyennement, beaucoup)

Peu

Caractéristiques de la mobilité externe (les employés quittent l'entreprise, un peu, moyennement, beaucoup)

Peu sauf pour ingénieurs

Régime d'emploi principal Temps plein: 96%

Normes de qualité Oui, plusieurs Ex.: AS9100

Indications sur les activités GRH Active, cherche à améliorer ses processus

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Tableau XVI : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas D

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Oui

Politique de formation écrite Oui

Orientations La formation de techniciens coachs Le développement personnel orienté vers les priorités d'affaires Un environnement qui favorise l'engagement envers le développement des compétences des employés

Présence d'un responsable de la formation

Oui

Titre professionnel Superviseur, développement des compétences

Fonction principale du responsable

Responsable de la formation

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Dans le département des ressources humaines

Autres personnes investies dans la formation (titre et nombre)

Oui, deux, coordonnatrice de la formation et instructrice.

Nombre total de personnes investies dans la formation

3

Titres professionnels Superviseur, développement des compétences Coordonnatrice de la formation Instructrice

Types d'activité de formation Insertion/intégration Développement professionnel Développement de compétences Conformité aux normes et qualité

Départements les plus concernés par la formation

Département des ressources humaines Différents département des opérations

Convention collective Seulement pour les employés voués aux opérations

Clauses pour la formation (oui/non)

Oui

Nature des clauses Indication sur les catégories de personne aptes à former (les techniciens d'expérience)

Compensation financière Non

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Tableau XVII : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas D

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Non

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisée

Compensation financière Non

Formation interne à l'accompagnement individualisé

Oui

Qui forme? La coordonnatrice de la formation

Type d'accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Coaching

Contenu de la formation individualisée

Varié; ex. : nouvel équipement, santé et sécurité, comment « coacher ».

Début de la pratique d'accompagnement individualisé

Pratique ancienne

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Tableau XVIII : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas E

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN 541320 - Services d'architecture paysagère

Secteur d'activité Horticulture-paysagisme

Années d'existence 8 ans

Entreprise syndiquée Non

Évolution du volume de la main-d'œuvre

Variable annuellement, entre 10 et 15 employés

Caractéristiques générales de la main-d'œuvre

90% d'hommes, beaucoup de jeunes, surtout des étudiants durant l'été

Catégories d'emploi majoritaires Ouvriers en aménagement paysager ou "paysagistes"

Caractéristiques de la mobilité interne (changement de poste à l'interne, peu, moyennement, beaucoup)

Non spécifié, sauf pour des employés avec une carte de compétence de la CCQ (travaillent l'hiver dans une autre entreprise), les étudiants qui travaillent uniquement l'été ne sont pas stables

Caractéristiques de la mobilité externe (les employés quittent l'entreprise, un peu, moyennement, beaucoup)

Beaucoup, car travail saisonnier et beaucoup d'étudiants embauchés pour l'été

Régime d'emploi principal Temps plein durant la haute saison

Normes de qualité Oui, plusieurs. Des normes de santé et sécurité, celles de l'Association des paysagistes professionnels du Québec et celles du Bureau de la normalisation

Indications sur les activités GRH Des consultants externes seront embauchés dans un avenir proche pour analyser et structurer ses orientations en matière de main-d’œuvre.

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Tableau XIX : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas E

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences –

Politique de formation écrite Non

Orientations La formation est orientée sur la qualité du service, la prévention des accidents, l'efficacité et la réduction des coûts

Présence d'un responsable de la formation

Oui

Titre professionnel Président-directeur général

Fonction principale du responsable

Gestionnaire de l'entreprise

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Pas d'unité de formation spécifique

Autres personnes investies dans la formation (titre et nombre)

Oui, chefs d'équipe, compagnons formés par le comité sectoriel et associés

Nombre total de personnes investies dans la formation

Nombre non spécifié

Titres professionnels Partenaires Chefs d'équipe Ouvriers-paysagistes

Types d'activité de formation Insertion/intégration en emploi Développement de compétences de perfectionnement

Départements les plus concernés par la formation

Opérations

Convention collective Non

Clauses pour la formation (oui/non)

Nature des clauses –

Compensation financière –

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Tableau XX : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas E

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Non

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisé

Compensation financière Non

Formation interne à l'accompagnement individualisé

Non

Qui forme? –

Type d'accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Coaching selon PDG (compagnonnage, selon le comité sectoriel)

Contenu de la formation individualisée

Former à la tâche, santé et sécurité, normes du secteur, nouvelles stratégies et façons de faire pour améliorer la qualité et réduire les coûts

Début de la pratique d'accompagnement individualisé

2007, année de fondation de l'entreprise

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Tableau XXI : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas F

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN 13110 - Usines de fibres, de filés et de fils

Secteur d'activité Production de fils spécialisés

Années d'existence Depuis 2004

Entreprise syndiquée Oui

Évolution du volume de la main-d'œuvre

Avant 2008: fluctuation de la main-d’œuvre. Depuis 2008: stabilité.

Caractéristiques générales de la main-d'œuvre

48% de femmes, 52% d'hommes. 5% d’origine immigrante, moyenne d'âge de 52 ans

Catégories d'emploi majoritaires Opérateur de machines

Caractéristiques de la mobilité interne (changement de poste à l'interne, peu, moyennement, beaucoup)

Stabilité, pas de rotation élevée, mise à pied périodique, selon les contrats.

Caractéristiques de la mobilité externe (les employés quittent l'entreprise, un peu, moyennement, beaucoup)

Peu. Selon les contrats.

Régime d'emploi principal Temps plein

Normes de qualité Normes ISO, mais sans certification

Indications sur les activités GRH La main-d'œuvre est vieillissante. Le service des ressources humaines développe des stratégies de recrutement et de fidélisation des employés. L'entreprise est en train de former des réparateurs, à partir des opérateurs intéressés, par une formation maison de 24 semaines.

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Tableau XXII : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas F

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Oui

Politique de formation écrite Non, mais c’est structuré, il y a un comité composé de ces personnes: directeur des ressources humaines, coordonnatrice à la formation, un cadre, un représentant des non-syndiqués et un représentant des syndiqués. Ils se rencontrent au deux ou trois mois, selon les besoins.

Orientations Tous les postes sont documentés avec les journées de formation attribuées pour chaque poste. Formation dure entre 4 et 12 semaines, selon les postes.

Présence d'un responsable de la formation

Oui

Titre professionnel Coordonnatrice de la formation

Fonction principale du responsable

Développer des activités et des outils de formation, travailler avec les compagnons

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Sous la responsabilité du directeur des ressources humaines

Autres personnes investies dans la formation (titre et nombre)

Oui, 30 compagnons, contremaîtres et superviseurs à l'occasion

Nombre total de personnes investies dans la formation

32 et +

Titres professionnels Directeur des ressources humaines Coordonnatrice de la formation Compagnon, superviseur, contremaître.

Types d'activité de formation Insertion/intégration Développement de compétences

Départements les plus concernés par la formation

Production

Convention collective Oui

Clauses pour la formation (oui/non)

Oui

Nature des clauses Il est prévu dans la convention collective une augmentation salariale de 10% pour les compagnons qui forment les nouveaux employés.

Compensation financière Oui

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Tableau XXIII : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas F

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Oui

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisé

10% augmentation de salaire pour les compagnons

Compensation financière Oui

Formation interne à l'accompagnement individualisé

Non, externe,

Qui forme? Comité sectoriel et Centre des entreprises d’une université

Type d'accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Compagnonnage

Contenu de la formation individualisée

Utilisation des fileuses à jet d'air ou autres machines

Début de la pratique d'accompagnement individualisé

Pratique ancienne, mais se donnait "sur le tas" avant d'être formalisée

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Tableau XXIV : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas G

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN 62 - Services d'assistance sociale

Secteur d'activité Communautaire (Education)

Années d'existence 1975, donc 40 ans

Entreprise syndiquée Non

Évolution du volume de la main-d'œuvre

Stable

Caractéristiques générales de la main-d'œuvre

Femmes en très grande majorité. Toutes les employées à temps plein sont des femmes. Âge moyen: 45 ans. Chez les occasionnels, 1 homme (20%) sur cinq femmes (80%).

Catégories d'emploi majoritaires Formateurs, mais occasionnels

Caractéristiques de la mobilité interne (changement de poste à l'interne, un peu, moyennement, beaucoup)

Peu de mobilité

Caractéristiques de la mobilité externe (les employés quittent l'entreprise, un peu, moyennement, beaucoup)

Peu de mobilité

Régime d'emploi principal Temps plein

Normes de qualité Pas explicites, mais souci de bien servir les citoyens qui font appel à l’organisme.

Indications sur les activités GRH Il y a un plan écrit de GRH. Il y a un plan d'activités. Chaque personne a un plan de travail. Il y a des priorités d'équipe, des recommandations, des évaluations, à tous les ans, des contrats de travail, des règlements généraux, des règles de régie interne, une politique contre le harcèlement. Il n'y a pas de plan écrit pour la relève.

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Tableau XXV : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas G

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Non

Politique de formation écrite Non

Orientations Plan d'intégration pour les nouveaux employés, très détaillé. Guide d'intervention très détaillé. Préoccupation constante de formation pour donner un bon service. Formation de groupe offerte.

Présence d'un responsable de la formation

Oui, pour le service d'information juridique.

Titre professionnel Responsable des services d'information juridique

Fonction principale du responsable

Responsable de la formation des stagiaires et du service d'information

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Il y a une unité de formation, mais celle-ci s'occupe uniquement de la formation de groupe

Autres personnes investies dans la formation (titre et nombre)

Oui, 5 personnes. Tous les employés à temps plein font de la formation (marrainage).

Nombre total de personnes investies dans la formation

11

Titres professionnels Responsable de la formation et de la vie associative (1) Formateurs (5)

Types d'activité de formation Insertion/intégration en emploi Développement des compétences Qualité du service

Départements les plus concernés par la formation

Opérations

Convention collective Non

Clauses pour la formation (oui/non)

Nature des clauses –

Compensation financière Non, cela fait partie des tâches de travail de tous les employés à temps plein

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Tableau XXVI : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas G

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisée

Compensation financière Non

Formation interne à l'accompagnement individualisé

Non

Qui forme? –

Type d'accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Marrainage

Contenu de la formation individualisée

Fonctions, tâches et procédés de travail

Début de la pratique d'accompagnement individualisé

Pratique traditionnelle

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Tableau XXVII : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas H

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN 44-55 - Commerce de détail

Secteur d'activité Vente de médicaments, produits de beauté et autres produits

Années d'existence 1981, donc 34 ans

Entreprise syndiquée Non

Évolution du volume de la main-d’œuvre

Peu de croissance

Caractéristiques générales de la main-d’œuvre

Femmes: 80%, hommes: 20%. Jeunes de moins de 30 ans: 50%, 5% origine ethnique autre

Catégories d'emploi majoritaires Commis "au plancher"

Caractéristiques de la mobilité interne (changement de poste à l'interne, peu, moyennement, beaucoup)

Peu

Caractéristiques de la mobilité externe (les employés quittent l'entreprise, un peu, moyennement, beaucoup)

Peu (30% des employés sont là depuis au moins 20 ans sauf pour ce qui est des étudiants ayant terminé leurs études).

Régime d'emploi principal Temps partiel: 63%

Normes de qualité Oui, ex.: système Kaisen

Indications sur les activités GRH Les priorités de gestion de ressources humaines sont: 1) La formation au service à la clientèle. 2) La gestion du service à la clientèle. 3) Le parrainage, la formation des employés pour un poste.

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Tableau XXVIII : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas H

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Oui

Politique de formation écrite Oui, mais au bureau chef

Orientations Il y a un plan directeur de formation fourni par le bureau chef et qui explique la formation, étape par étape. Le plan directeur est conçu par le bureau chef. Ce dernier est centré sur le service à la clientèle en général, mais il est aussi technique et spécifique à chaque poste. Par exemple, le commis de plancher doit écouter la vidéo portant sur le poste de commis de plancher pour comprendre le vocabulaire spécialisé relié à son département.

Présence d'un responsable de la formation

Oui

Titre professionnel Gérant

Fonction principale du responsable

Gérer le commerce

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Il n'y a pas d'unité de formation. Chaque département a un responsable qui est en charge de la formation.

Autres personnes investies dans la formation (titre et nombre)

Pas de nombre exact, les responsables de département mais aussi les travailleurs expérimentés sont investis dans la formation

Nombre total de personnes investies dans la formation

Titres professionnels Technicienne chef Gérant ou responsables de département (titres non spécifiés)

Types d'activité de formation Intégration/insertion en emploi Acquisition de nouvelles compétences

Départements les plus concernés par la formation

Département des caisses, des cosmétiques, du comptoir postal, du "plancher", du laboratoire et de l'administration.

Convention collective Non

Clauses pour la formation (oui/non)

Nature des clauses –

Compensation financière Non

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Tableau XXIX : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas H

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Non

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisée

Compensation financière Non

Formation interne à l'accompagnement individualisé

Non

Qui forme? Oui

Type d'accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Parrainage

Contenu de la formation individualisée

Oui, mais au bureau chef

Début de la pratique d'accompagnement individualisé

Depuis la fondation de l'entreprise mais formalisée avec un guide de parrainage, depuis quatre ans

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Tableau XXX : Quelques caractéristiques de l'organisation – Cas I

Éléments Description

Type d'activité selon SCIAN 6116 - École de technique et métier

Secteur d'activité Service éducatif

Années d'existence 1967

Entreprise syndiquée Oui

Évolution du volume de la main-d'œuvre

Tendance à augmenter

Caractéristiques générales de la main-d'œuvre

40% d’hommes, 60% de femmes

Catégories d'emploi majoritaires Enseignants

Caractéristiques de la mobilité interne (un peu, moyennement, beaucoup)

Beaucoup de mobilité

Caractéristiques de la mobilité externe

Régime d'emploi principal Taux horaire

Normes de qualité Référentiel des compétences établi par le ministère de l’Éducation du Québec

Indications sur les activités GRH Perfectionnement professionnel

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Tableau XXXI : Structure et organisation de la formation de l'organisation – Cas I

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Loi sur les compétences Oui

Politique de formation écrite Oui

Orientations

La formation initiale est établie par le ministère (MELS) mais elle est gérée, pour la dimension pratique, par la commission scolaire et le centre. Elle est aussi régulée par la convention collective nationale, la convention locale et la Loi sur l’instruction publique. En plus de règles précises, il y a un plan et un budget annuels de perfectionnement, géré par la commission scolaire, et sur le plan local, par un comité de perfectionnement.

Présence d'un responsable de la formation

2

Titre professionnel Conseiller pédagogique

Fonction principale du responsable

Identifier les besoins et les ressources de formation continue

Situation de l’unité de formation dans l'organisation

Le personnel responsable de la formation sur le plan local relève de la commission scolaire

Autres personnes investies dans la formation (titre et nombre)

Oui, 2 conseillers pédagogiques pour le centre local

Nombre total de personnes dans l’unité de formation

3

Titres professionnels Tous « conseillers pédagogiques » (niveau local)

Types d'activité de formation Formation annuelle obligatoire pour tous les employés Formations courtes pour le développement professionnel sur des thèmes précis liés à l’enseignement ou au secteur d’enseignement Participation (volontaire) à des congrès

Départements les plus concernés par la formation

Service d’enseignement

Convention collective Oui

Clauses pour la formation Oui

Nature des clauses Conditions de remboursement des frais de formation externe à temps partiel et de libération du temps pour formation interne

Clause spécifique pour compensation financière (oui/non)

Oui

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Tableau XXXII : Caractéristiques de la formation individualisée au sein de l'organisation – Cas I

Éléments vérifiés Présence ou absence des éléments vérifiés et description

Clauses pour l'accompagnement individualisé (oui/non)

Oui

Nature des clauses pour l'accompagnement individualisé

Libération des heures régulières de travail et compensation salariale pour une type d’accompagnement précis

Clause spécifique pour compensation financière

Oui pour le mentorat seulement

Formation interne sur l'accompagnement individualisé

Non

Catégorie du personnel pratiquant l’accompagnement

Enseignants et conseillers pédagogiques

Type d'accompagnement individualisé (coaching, compagnonnage, mentorat, parrainage)

Mentorat et enseignement associé

Contenu de la formation individualisée

Éléments de la tâche professionnelle

Début de la pratique d’accompagnement individualisé

Depuis 2003, depuis nouvelles orientations ministérielles en matière de formation des enseignants

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ANNEXE IX

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lxiv

Tableau XXXIII : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées — Cas A — Manuel Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Oui — Assez Oui — Assez Oui —

Beaucoup Oui — Beaucoup Non Oui — Assez

Stratégies utilisées Planifier son action en faisant une recherche fine sur la performance de son coaché (selon les standards organisationnels et selon le rapport d’évaluation) Ne pas avertir à l’avance de son coaching Planifier les aspects techniques (salle, écoute)

Questionner pour aider à réfléchir à la manière d’effectuer le travail et l’écart de performance Rappeler les objectifs de la tâche générale Questionner sur l’appréciation de son travail

Écouter (à distance) la manière d’effectuer le travail Observer le travail Prendre des notes sur le travail observé Évaluer des aspects précis de la tâche Donner de la rétroaction sur la performance générale Organiser ensemble une tâche précise Faire écouter la personne et lui révéler les erreurs (miroir)

Chercher à établir une relation de confiance Identifier un aspect personnel précis pour créer un lien Rassurer/calmer Prendre des « ententes » sur des modes de fonctionnement (faire adhérer) Motiver Féliciter Récompenser

Évaluer à partir d'éléments observés et d'éléments évalués par d’autres Évaluer sur la progression générale de la performance de la tâche durant le coaching

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Susciter l’autoévaluation sur des aspects précis Échanger sur une tâche précise Montrer un exemple positif Montrer des trucs

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ANNEXE X

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lxvii

Tableau XXXIV : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées — Cas B — Natacha Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Oui — Beaucoup Oui — Beaucoup Oui — Beaucoup Oui — Peu Oui — Assez Oui — Assez

Stratégies utilisées Planifier l’ensemble du processus (durée et outils)

Présenter la fonction professionnelle dans son ensemble Effectuer la tâche avec l’apprenante en verbalisant son raisonnement Effectuer la tâche devant l’apprenante en verbalisant son raisonnement Conseiller Expliquer le travail

Utiliser toutes les stratégies (sauf la reprise de contrôle après une erreur de l'apprenante) Donner une idée d'ensemble pour dévoiler la tâche à l'apprenante Employer un processus d'entonnoir Expliquer à voix haute son raisonnement

Être présente Donner des conseils Faire le point en fin de journée

Inciter à identifier les enjeux professionnels Montrer à analyser les situations plus largement

Aider à prendre conscience d’un travail mal fait Inciter à la précision et à l'éthique

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ANNEXE XI

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lxix

Tableau XXXV : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées — Cas C — Sylvain Compétences utilisées Stratégies

Planification (oui ou non)

Techniques/ professionnelles

théoriques Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Oui — Beaucoup Oui — Peu Oui — Beaucoup Oui — Peu Non Oui- Assez

Stratégies utilisées Contribuer à la conception des programmes et des outils Signer l’entente de coaching Donner avis son sur le choix du coaché Informer les travailleurs de l’ouverture d’un poste

Lire le guide (ensemble) pour faire un survol Simuler une inspection de qualité Consulter et questionner des collègues experts

Montrer les composantes de la machine en suivant guide Examiner chaque composante Montrer la procédure (chemin à suivre) Expliquer (en détails la procédure) Faire prendre des notes au coaché Faire regarder Faire toucher la machine Faire essayer la machine/faire pratiquer

Discuter et se raconter leurs vies au début pour créer un lien Rassurer l’autre pendant qu’il pratique Se montrer disponible pour les questions

Suscite l’autoévaluation en discussion Évalue à partir de critères préétablis et des observations Évalue la progression Incite à la prudence

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Montrer en faisant soi-même Manipuler des composantes et le laisser faire Laisser le coaché pratiquer pour explorer le fonctionnement Surveiller lorsque le coaché manipule Expliquer en détail Simuler un problème ou un défaut et demander au coaché d’expliquer Faire ralentir l’autre dans ses gestes Permettre l’essai-erreur et questionner sur les causes de l’erreur

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Faire réfléchir tout haut : permettre à l’autre d’expliquer le raisonnement sous-jacent à ses décisions Valider la maîtrise de tâches spécifiques Synthétiser et revenir à des étapes précédentes Surveiller le coaché Évaluer l’ensemble du processus (étapes et contenus) Alterner entre les parties théorique/pratique

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ANNEXE XII

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Tableau XXXVI : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées — Cas D — Chantal Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Oui — Beaucoup Oui —Peu Oui — Beaucoup Oui — Beaucoup Non Oui — Beaucoup

Stratégies utilisées Sollicite des personnes potentiellement intéressées Évaluer les compétences initiales Identifier les personnes répondant aux critères Sélectionner les personnes intéressées Rencontrer les personnes au préalable Planifier le moment du coaching Préparer le plan de

Organiser une séance de lecture et de partage du contenu théorique Expliquer le travail Effectuer le travail avec ou devant l’apprenant

Former sur les tâches en suivant les séquences Observer le coaché Assurer un réajustement des méthodes lorsque requis Mettre en situation difficile Vérifier l’atteinte d’objectifs précis Donner des trucs Se référer à un spécialiste pour donner d’autres trucs Démontrer

Être présent pour aider Soutenir le coaché Faire collaborer le coaché au plan de coaching Protéger le coaché des commentaires des autres employés Inciter la personne à préserver une bonne relation avec les superviseurs et les autres employés Sensibiliser les responsables d’audits de l’effet de leur présence sur le coaché (stress)

Limiter les informations techniques dans les documents de formation par respect pour les normes internes : réfère aux documents approuvés Évaluer (ponctuellement) par écrit (lorsqu’il est prêt) à partir des critères Évaluer sur la pratique (lorsqu’il est prêt) à partir des critères Inviter à l’autoévaluation Approuver l’atteinte (finale) de la compétence Assurer un suivi

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coaching et l'adapter les objectifs à la situation Présenter les outils Préparer les superviseurs à la nécessité de consacrer du temps à la formation

visuellement une difficulté par imitation exagérée pour assurer l’identification et la discussion Participer à des mises en situation et faire observer Utiliser des démonstrations de mises en situation contrastées, faire observer les différences et en discuter Discuter des situations et répondre aux questions Observer la personne en situation réelle, en discuter et réajuster Décider de stratégies particulières

de moyen terme (1 et 3 mois après) et réajuster si requis

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ANNEXE XIII

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Tableau XXXVII : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées — Cas E — Serge Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Non Oui — Peu Oui — Beaucoup Oui — Peu Oui — Assez Oui — Beaucoup

Stratégies utilisées Expliquer Effectuer le travail avec ou devant l’apprenant Conseiller Corriger

Effectuer en même temps Observer Faire observer Superviser Montrer la bonne façon de faire Demander d’effectuer Corriger les erreurs Reprendre le contrôle si erreur Vérifier ce que le chef d’équipe a montré Questionner pour vérifier le raisonnement du coaché

Se montrer présent Créer une atmosphère agréable

Aider à développer la conscience du métier S’engager, se rendre disponible Ajuster son rôle au fur et à mesure Témoigner de ses limites et de sa tendance à apprendre de l’autre

Évaluer à partir de l’action, de faits, de critères Évaluer périodiquement pour amélioration et développement Assurer l’auto-évaluation à partir de critères et la discussion Recevoir les commentaires des autres sur le travail du coaché à partir de leur expérience avec lui Décider de la performance du coaché en groupe

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Donner des précisions pour une amélioration Réexaminer un aspect déjà expliqué Répéter les explications non comprises Laisser l’autre faire des erreurs pour attirer l’attention et corriger Déléguer à un autre coach plus compétent pour montrer aspects précis

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ANNEXE XIV

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Tableau XXXVIII : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées – Cas F – Justine Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Non Oui – Peu Oui – Beaucoup Oui – Beaucoup Oui – Peu Oui – Beaucoup

Stratégies utilisées Lui faire visiter les lieux de travail et les ressources Montrer les outils de travail Prévenir à l’avance des exigences du métier

Rappeler à la mémoire ses acquis d’expérience Faire voir l’opération générale de la machine Faire observer l’apprenant lorsqu’elle opère la machine Se positionner à côté de l’apprenant Montrer les gestes à faire Montrer comment réparer les outils Expliquer les procédures pendant l’opération

Parler avec l’apprenant Accueillir le premier jour Rencontrer en début de journée Soutenir (lors de difficulté) Encourager Rassurer lors d’erreurs Stimuler la confiance en soi Porter un jugement (continu) sur l’état émotif Comparer sa performance à celle des autres pour rassurer

Envisager l’autre dans sa tâche réelle à plus long terme : l’aider de se projeter et à assurer l’autonomie demandée

Garder le silence lors des jugements négatifs d’autrui sur évolution de l’apprenant par souci de confidentialité Évaluer (à la fin) en assignant une note Faire un suivi quotidien, après la formation, sur une période de 2 semaines pour rappel des méthodes Participer à la remise du certificat de qualification

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Expliquer Réexpliquer Réexpliquer de manière détaillée Vérifier ce que fait l’apprenant Opérer en même temps tout en observant l’apprenant Vérifier des opérations précise et décider Corriger immédiatement les mauvais gestes Refuser la prise de note pour assurer la mémorisation des procédés Réduire la cadence pour assurer plus de maîtrise

Indiquer le caractère bienveillant de son rôle et justifier son approche de formation

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Laisser faire des erreurs et questionner sur les sources de l’erreur Avertir des dangers

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ANNEXE XV

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Tableau XXXIX : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées – Cas G – Claudie Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Oui – Peu Oui – Beaucoup Oui – Beaucoup Oui – Assez Oui – Beaucoup Oui – Beaucoup

Stratégies utilisées Présenter le plan d’intégration à l'emploi

Présenter la documentation et les outils de travail Montrer l’espace de travail Expliquer les tâches Effectuer le travail avec ou devant l’apprenant Donner ses commentaires à l’autre Donner ses commentaires aux collègues sur l’autre Conseiller Expliquer le travail des autres

Écouter l’autre travailler Dévoiler le produit et la tâche (montrer le travail et le décrire) Effectuer le travail devant l’autre pour faire observer Effectuer en même temps Demander d’effectuer le travail Corriger les erreurs Reprendre le contrôle si erreur

S’informer du bien être de l’autre Laisser du temps Rassurer Tenir compte du niveau difficulté et ajuster la tâche Se montrer présent Se montrer disponible aux questions Tolérer les difficultés/erreurs

Aider à développer la conscience du métier en expliquant l’importance de certains aspects S’appuyer sur ses valeurs et idéaux Présenter les liens du travail avec celui de collectifs externes Faire participer des membres externes à une partie de la formation (théorique)

Évaluer informellement en cours d’apprentissage à partir des observations Évaluer formellement à partir de l’action, de faits, de critères Évaluer pour amélioration et développement

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Expliquer le fonctionnement du service Corriger les erreurs

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ANNEXE XVI

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Tableau XL : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées — Cas H — Geneviève Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Oui — Assez Oui — Peu Oui — Beaucoup Oui — Assez Oui — Beaucoup Oui — Assez

Stratégies utilisées Tenter de se libérer de ses tâches régulières Faire du temps supplémentaire Déléguer des tâches de formation à d’autres employés et se coordonner avec d’autres employés Planifier selon les rythmes de l’organisation (rush) de manière continue

Expliquer le travail Effectuer le travail avec ou devant l’apprenant Présenter l’équipe

Se positionner physiquement à proximité Mettre l’autre au travail Montrer Indiquer Expliquer Suggérer des trucs Corriger Observer l’autre et commenter en même temps Corriger les erreurs Superviser

Rassurer Stimuler la confiance en soi Se montrer présent/disponible Tolérer les difficultés/erreurs Encourager l’entraide avec les autres employés

Souligner l’importance de la qualité du service Préciser l’importance de signaler son ignorance d’une tâche

Évaluer informellement et commenter au fur et à mesure à partir des faits observés Recevoir les résultats d’évaluation de l’autoappren-tissage et commenter Planifier la passation de l’examen final Évaluer pour amélioration et développement

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Calibrer travail et apprentissage (ne pas donner tout le travail en même temps; assurer une alternance entre les tâches) Donner du travail en séquences selon le niveau de difficulté

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ANNEXE XVII

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lxxxix

Tableau XLI : Synthèse des compétences et des stratégies utilisées – Cas I – Lisa Compétences utilisées Stratégies

Planification Techniques/

professionnelles théoriques

Opérationnelles Relationnelles Symbolisation Éthiques

Oui/non; fréquence

Oui – Peu Oui – Beaucoup Oui – Beaucoup Oui – Assez Oui – Peu Oui – Peu

Stratégies utilisées Planifier les disponibilités Signer le code d’éthique

Aider à trouver de la satisfaction dans la profession Se documenter et réfléchir sur un aspect de la profession et transmettre l’info à la mentorée Fournir des outils supplémentaires Conseiller des lectures théoriques Constater l’évolution et les limites de la mentorée et s'ajuster

Discuter des aspects observés Expliquer les modalités Discuter (à l’aide de guide) Observer la mentorée Porter attention sur des points précis (focuser, se questionner et vérifier) Indiquer les points à améliorer Évaluer la qualité Discuter des choix professionnels précis Écouter et poser des questions

Discuter des attentes respectives Mettre à l’aise lors de l’observation S’adapter à chaque profil de mentorée Exprimer son empathie à l’égard des difficultés Garder de la distance dans son rôle de mentor (contrer la tendance à se culpabiliser face aux difficultés) Réfléchir à son propre rôle, à soi-même

Faire réfléchir au statut professionnel

Chercher un local qui assure la confidentialité Évaluer les apprentissages en identifiant les compétences atteintes

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xc

Faire réfléchir Constater des lacunes et poser des questions Retourner une question Proposer de se projeter dans le rôle de la personne desservie Confronter la mentorée à ses difficultés Stimuler à l’amélioration Examiner une situation précise Proposer des trucs en fournissant des outils analytiques (ex : morceler, se donner des objectifs précis, inventorier les solutions possibles)

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xci

Inciter à proposer des points de discussion Responsabiliser la mentorée face aux décisions Comparer la performance de la mentorée à celle des autres et l'exprimer Discuter des différences de performance avec la mentorée (à la suite de la propre comparaison de la mentorée)