La question de la liquidité et de sa réglementation ... La question de la liquidité et de sa...

68
Année Universitaire 2012 - 2013 MASTER 2 PROFESSIONNEL EN BANQUES & FINANCE La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle Présenté par : Kalidou Assane THIAM Directeur de Mémoire : Michel SVETCHINE

Transcript of La question de la liquidité et de sa réglementation ... La question de la liquidité et de sa...

Année Universitaire 2012 - 2013

MASTER 2 PROFESSIONNEL EN BANQUES & FINANCE

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

Présenté par :

Kalidou Assane THIAM

Directeur de Mémoire : Michel SVETCHINE

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

2

SOMMAIRE Rubriques Pages

Avant- Propos 4

Sigles et abréviations 5

Introduction 6

Partie I – Contraintes découlant de la complexité de la notion de liquidité 8

1.1 – L’absence de normes supranationales 9

1.2 – Complexité de l’évaluation du risque de liquidité 9

1.2.1 – Les facteurs de risque de liquidité chez les banques 10

1.2.2 – Interactions du risque de liquidité avec les autres risques 11

1.3 – Les outils de gestion de la liquidité 12

1.4 – La réglementation de la liquidité et ses fondements macroprudentiels 13

1.5 – La surveillance de la liquidité bancaire 14

1.6 – Les expériences nationales : le cas de la France 15

Partie II : La crise financière et ses implications sur la liquidité bancaire 22

2.1- Les implications de la crise financière 23

2.1.1 – L’apparition soudaine d’un défaut de liquidité 23

2.1.2 – La dislocation du marché interbancaire 26

2.1.3 – L’impact sur la mise en œuvre de la politique monétaire 28

2.2 – Les enjeux nés de la crise en matière de gestion du risque de liquidité 31

2.2.1 – Le renforcement des dispositifs de gestion du risque de liquidité 31

2.2.2 – La reconnaissance des méthodologies internes 32

Partie III – La réforme des règles prudentielles : Bâle III et ses enjeux 34

3.1 – Présentation détaillée des ratios de liquidité de Bale III 37

3.1.1 – Le Liquidity Coverage ratio (LCR) 37

3.1.2 – Le Net Stable Funding Ratio (NSFR) 40

3.2 – Implications des normes de liquidité sur les acteurs du secteur financier 41

3.2.1 – Implications pour les établissements de crédit 41

3.2.2 – Implications pour la politique monétaire et/ou la Banque Centrale 45

3.2.3 – Implications pour le financement de l’économie 52

3.3 – Contraintes et limites des normes de liquidité de Bâle III 57

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

3

3.3.1 – Au niveau du LCR 57

3.3.2 – Au niveau du NSFR 58

3.4 – Enjeux et Perspectives 58

3.4.1 – Les modalités de publication des ratios 59

3.4.2 – L’harmonisation des actifs éligibles 59

3.4.1 – Le LCR en cas de sortie de crise 60

Conclusion 60

Biographie 62

Annexes 65

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

4

AVANT-PROPOS

« A toutes les belles rencontres que j’ai pu faire au

cours de ce master…professeurs, étudiants…en

espérant que ce travail pourra servir. Merci à mon

Directeur de Mémoire Michel SVETCHINE »

Kalidou Assane THIAM

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

5

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

ABS: Asset backed Securities

ACP : Autorité de Contrôle Prudentiel

BCE : Banque Centrale Européenne

BDF : Banque de France

BFI : Banque de Financement et d’Investissement

BoE : Bank of England

CBCB : Comité de Bâle pour le Contrôle Bancaire

CDC : Caisse des Dépôts et Consignations

CDO : Collateral Debt Obligation

CDS : Credit Default Swap

CEBS : Commitee of European Banking Supervisors

CECB : Comité Européen des Contrôleurs Bancaires

CERS : Comité Européen des Risques Systémiques

CRD : Capital Requirements Directive

CRR : Capital Requirements Regulation

EEE : Espace Economique Européen

FBF : Fédération Bancaire Française

FCC : Fonds Commun de Créances

FED : Federal Reserve Bank

FESF : Fonds Européen de Stabilité Financière.

GHOS : Group of Governors and Head of Supervision

HQLA : High Quality Liquid Assets

IFRS : International Financial Reporting Standards

LCR : Liquidity Coverage Ratio

LDD : Livret Développement Durable

LTRO : Long Term Refinancing Operation

MRO : Main Refinancing Operations

NSFR : Net Stable Funding Ratio

NINJA : No Income No Jobs or Assets

OMO : Open Market Operation

OMT : Outright Money Transaction

OPCVM : Organisme de Placement Collectif en Valeurs Mobilières

RMBS : Residential Mortgage Backed Securities

SPV : Special Purpose Vehicle

UE : Union Européenne

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

6

Introduction

La règlementation de la liquidité bancaire s’est longtemps caractérisée par une insuffisance

d’harmonisation à un niveau supranational. En effet, la liquidité est un concept assez difficile

à appréhender en ce sens où elle est étroitement liée à l’environnement économique,

historique et géographique. C’est ainsi que la liquidité d’actifs identiques est par exemple

éminemment dépendante de la conjoncture, de la structure et de la plus ou moins grande

ouverture des marchés nationaux, ou dans un domaine voisin de la fiscalité applicable.

Ainsi, les actifs sont susceptibles de s’assécher à certaines périodes et devenir

complètement illiquides sur certains marchés. Compte tenu de leur activité de transformation

découlant de l’asymétrie des échéances entre ressources et emplois, les banques sont

structurellement exposées au risque de liquidité. Cette situation a conduit plusieurs pays,

comme la France depuis 1988, à mettre en place une réglementation prudentielle relative à

la liquidité. En raison de la pluralité des dispositifs prudentiels qu’induisait les différences

d’approches et partant, des contraintes juridiques et opérationnelles diverses, en fonction

des pays, notamment dans les groupes bancaires transnationaux, le Comité de Bâle sur le

Contrôle Bancaire (CBCB) a publié en février 2000 un document intitulé « Saines pratiques

de gestion du risque de liquidité dans les Banques1 ». Toutefois, ce document est davantage

un recueil de recommandations car il ne comporte aucune disposition contraignante à

l’endroit des banques.

C’est la crise financière internationale survenue en 2007 qui a mis en exergue les

insuffisances relatives à la règlementation de la liquidité et a rappelé la nécessité de

soumettre les banques à un dispositif prudentiel harmonisé et robuste de suivi du risque y

afférent. La crise trouve en effet pour partie ses origines dans l’imbrication consécutive des

dysfonctionnements de la titrisation qui a eu un effet néfaste sur la liquidité des marchés et a

eu un effet de contagion sur la liquidité bancaire.

Cette crise a permis par ailleurs de comprendre que le développement rapide et la forte

intégration des marchés induisaient de fortes exigences en termes de gestion et de suivi du

risque de liquidité. Le recours quasi-permanent à la titrisation à travers des montages

financiers très sophistiqués, l’orientation progressive des banques vers un financement par

1 “ Sound Practices for Management Liquidity in Banking Organisations” – Comité de Bâle pour le Contrôle Bancaire, Février

2000

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

7

les marchés moins stable que par la transformation bancaire traditionnelle, ainsi que l’usage

des normes IFRS – lesquelles peuvent accentuer la volatilité de la valeur des actifs

financiers en se basant essentiellement sur leur valeur de marché - tous ces éléments sont

autant de facteurs qui ont modifié la structure des bilans des banques, et partant le profil de

leur risque de liquidité. En outre, la crise financière a permis aux Autorités de régulation de

comprendre la nécessité d’accélérer le processus d’harmonisation de la réglementation en

matière de liquidité et de compléter celle de la solvabilité.

Par ailleurs, la crise financière a profondément entamé la confiance sur les marchés

interbancaire et induit une défiance entre les banques, provoquant ainsi des situations

d’illiquidité, indépendamment des fondamentaux de leur bilan..

Le processus d’harmonisation et de réformes réglementaires du secteur bancaire s’est donc

accéléré à l’aune de la crise financière. Ainsi, à l’initiative du G20 de Pittsburgh en

septembre 2009, le Comité de Bâle pour le Contrôle Bancaire (CBCB) a été instruit de

procéder à une révision en profondeur du dispositif prudentiel applicable aux banques. A cet

effet, un premier texte sur les risques de marché a été publié en juillet 2009. Il s’en est suivi

deux projets de texte soumis à consultation publique en vue de recueillir notamment les

observations du secteur bancaire. Il s’agit en l’occurrence du texte intitulé « Basel III : A

global regulatory framework for more resilient banks2 » qui fixe deux (02) ratios relatifs à la

liquidité, l’un à un mois et l’autre à un an. Ces ratios ont des objectifs distincts mais sont

complémentaires. Ces nouvelles normes devraient permettre aux établissements bancaires

de disposer de suffisamment d’actifs liquides pour financer sainement leurs activités et de

réduire les asymétries d’échéances entre leurs actifs et leurs passifs et, partant, de mieux

gérer leur risque de liquidité. Le nouveau dispositif prudentiel introduit ainsi des normes

minimales applicables à toutes les banques internationales. Après deux années de

négociations au cours desquelles, les banques ainsi que les régulateurs nationaux ont

formulé des observations sur les nouvelles normes, le CBCB a publié une version révisée du

LCR au début de l’année 2013.

Au regard de ces évolutions, il paraît pertinent d’aborder la question de la liquidité et de sa

règlementation prudentielle en mettant d’abord en évidence la difficulté de réglementer la

liquidité bancaire à un niveau supra national, en particulier avant la crise, ensuite de montrer

les effets de la crise sur la liquidité des banques et enfin de présenter la réforme des règles

prudentielles en matière de liquidité à travers Bâle III et ses enjeux. A ce titre, les éventuelles

2 « Basel III, a global regulatory framework for more resilient banks and banking systems”, Comité de Bâle pour le Contrôle

Bancaire, Décembre 2010.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

8

conséquences négatives des ratios envisagés sur la situation des banques notamment

françaises seront présentées.

Partie I : Contraintes découlant de la complexité de la notion de liquidité

La notion de liquidité est fortement liée au contexte historique, géographique, économique et

financier dans lequel elle est appréhendée. C’est en cela qu’elle est ambigüe et difficile à

apprécier. Par exemple, le degré de liquidité d’un actif est difficile à maîtriser, notamment sur

la durée. Ainsi, certains actifs peuvent être considérés comme liquides sur certains marchés,

et devenir illiquides à certaines périodes. En outre, certains postes de liquidités du bilan

d’une banque, à l’actif comme au passif, notamment les prêts ou les dépôts peuvent

enregistrer, en fonction des contingences et de la conjoncture économique, des baisses de

volume qui remettent en question toute la stratégie de la Banque.

A cet égard, l’approche de la notion de liquidité nécessite au préalable de la définir, ou a

priori, de présenter ses caractéristiques. Cela permettra de mieux comprendre le risque de

liquidité ainsi que ses outils de mesure, de gestion et de prévention et de suivi.

La définition la plus large qui est donnée à la liquidité est la capacité d’un établissement de

crédit à faire face à ses engagements à court terme. En d’autres termes, il s’agit de disposer

de suffisamment de fonds pour couvrir ses dépenses et décaissements.

Au niveau du bilan d’une banque, les rubriques relatives à la liquidité ont trait notamment aux

opérations interbancaires et de trésorerie et au portefeuille titres qui peut être, en cas de

besoin, converti en « cash » ou « monnaie banque centrale » dans un marché organisé.

Sur la base de la définition qui précède, le risque de liquidité pourrait se définir comme

« l’incapacité dans laquelle une banque pourrait se trouver générer rapidement du cash face

à un besoin non anticipé de liquidité.3 »

Par conséquent, afin d’éviter que cette situation ne se produise, les établissements de crédit

essaient de gérer de manière optimale leur liquidité en anticipant les flux d’entrées et de

sorties afin d’éviter les cas de retrait massif des dépôts par les épargnants, c’est ce qu’on

appelle le « Bank Run ». Il est cependant rare que cette hypothèse se réalise en période

stable. Elle est surtout le fait de rumeurs ou d’information erronées qui sèment la panique

chez la clientèle, d’où la sensibilité de l’information financière. Au niveau systémique, les

chocs de liquidités sont davantage causés par des dysfonctionnements des marchés qui

3 « Réguler la liquidité bancaire », Jean-Paul POLIN, 2012

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

9

entraînent une réduction drastique des volumes en circulation et parfois une méfiance entre

les acteurs qui ont un comportement attentiste face aux turbulences du marché. Le gel

soudain du marché des CDO lors de la crise financière de 2007-2008 en est l’illustration.

Afin de prévenir les chocs de liquidité, les établissements bancaires constituent des coussins

d’actifs liquide ou « liquidity buffer ». Ces actifs liquides se présentent le plus souvent sous la

forme de titres négociables sur les marchés en cas de besoin urgent de liquidité.

Ainsi, la détention du bilan de ces coussins d’actifs liquides devient un enjeu important par

les banques dans la mesure où leur solidité, notamment en période de choc de liquidité en

dépend largement.

Toutefois, il convient de noter que ces actifs liquides détenus par les banques, s’ils sont très

recherchés compte tenu de leur degré de liquidité, ne sont pas forcément les actifs les plus

rémunérateurs sur les marchés, ce qui crée un coût d’opportunité. En effet, il existe des

actifs plus rémunérateurs mais moins liquides, ce qui pourrait créer une situation d’illiquidité

en cas de choc.

1.1 – L’absence de normes supranationales

Plusieurs tentatives d’harmonisation de mesure et gestion de liquidité à un niveau

supranational ont été amorcées par le CBCB au cours des années 80. Toutefois, cet objectif

n’ayant pas été atteint, certains pays ont mis en place leur propre dispositif prudentiel relatif

à la liquidité, sans toutefois qu’il s’agisse là d’une généralité. Ainsi, la France a émis dès

1988 le Règlement n° 88-01 du 22 février 1988 relatif à la liquidité. Ce règlement exige des

banques de respecter un coefficient de liquidité de manière à ce que les exigibilités à Court

Terme soient à tout moment entièrement (100 %) couvertes par les actifs mobilisables. En

outre, les banques sont tenues de calculer trois (3) ratios d’observations de la liquidité

prévisionnelle à des échéances 3 mois, 6 mois et 2 ans.

1.2 – La complexité de l’évaluation du risque de liquidité

La notion de liquidité est assez difficile à appréhender parce qu’étant ambigüe. Compte tenu

de la diversité des métiers bancaires et de leur domaine d’activités stratégiques, la

configuration des bilans est différente. Ainsi, la liquidité générée par les banques de détail

n’a pas les mêmes caractéristiques que celle produite par les banques de financement et

d’investissement (BFI). En effet, les banques de détail tirent leur liquidité principalement des

dépôts qu’elles reçoivent de la clientèle et qu’elles « transforment » en prêts lesquels ont

structurellement une liquidité moindre car dépendant de la capacité des emprunteurs à faire

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

10

face à leurs échéances. En revanche, les BFI tirent essentiellement leur liquidité de la

profondeur, de l’équilibre et de l’animation des marchés des titres qu’elles émettent ou

détiennent. Ces deux formes de liquidités ne peuvent être approchées de la même manière

en termes de mesure, de gestion et de régulation.

La gestion de liquidité constitue un véritable enjeu pour les banques quelles qu’elles soient

parce qu’elles sont toutes caractérisées par une asymétrie des échéances entre leurs actifs

et leurs passifs (cf. infra) mais également les décalages entre les flux entrants et sortants de

cash.

Il convient donc d’examiner les attributs de la liquidité bancaire ainsi que l’incertitude qui la

caractérise ainsi que les instruments de gestion du risque de liquidité chez les banques.

1.2.1 - Les facteurs de risque de liquidité chez les banques

La principale composante du risque de liquidité doit être trouvée dans l’asymétrie structurelle

entre la préférence pour la liquidité chez les déposants, et la préférence pour la maturité

chez les emprunteurs, de sorte que les banques se trouvent par nature contraintes

d’effectuer de la transformation, laquelle peut conduire à un risque d’illiquidité, soit en cas de

retrait massif de ressources, soit en cas d’immobilisation imprévue d’emplois.

Comme indiqué supra, les banques sont ainsi confrontées à une incertitude des masses de

leurs bilans. Au niveau du passif par exemple, la banque n’a aucune maîtrise sur les

demandes éventuelles de retrait des dépôts à vue quelque soit leur volume. C’est d’ailleurs

la raison pour laquelle toutes les banques redoutent un retrait massif et soudain des dépôts

par la clientèle, notamment en période de crise ou de rumeur négative, et qui peut conduire

à un « bank run ».

Concernant l’actif, les échéances sont en principe prévisibles car fixées par la banque en

temps que préteur. Il n’en demeure pas moins qu’il y a une incertitude sur le renouvellement

des prêts, en cas de baisse de la demande de crédit, ou plus fréquemment en cas de

difficultés de remboursement de la part des emprunteurs, conduisant à des renouvellements

contraints, des immobilisations, voire des défauts. En outre, le hors-bilan est également une

source de grande incertitude par rapport au risque de liquidité dans la mesure où en période

de crise, les besoins de liquidité peuvent être considérables pour couvrir notamment les

positions importantes prises sur les marchés des dérivés de crédit comme par exemple les

Crédit Défault Swaps (CDS).

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

11

Par ailleurs, les transferts interbancaires de gros montants de type RTGS (Real Time Gross

Settlements ou Système de Transfert Brut en Temps Réel) sont également des facteurs de

risque de liquidité. Les systèmes de RTGS exigent en effet de fortes quantités de liquidité

ainsi que des collatéraux (garanties) éligibles au refinancement de la Banque Centrale. Un

défaut d’un participant important à ce système, pourrait induire des dysfonctionnements au

niveau du système financier. L’information financière étant sensible et l’impact d’une

éventuelle rumeur négative pouvant être néfaste pour tout le système bancaire, la Banque

Centrale serait dans l’obligation d’intervenir pour assurer la stabilité du système bancaire.

Afin d’éviter qu’un tel évènement se produise, il est impérieux de réglementer la liquidité en

amont.

1.2.2. – Interactions du risque de liquidité avec les autres risques

Il est très difficile d’appréhender le risque de liquidité indépendamment des autres risques

auxquels il est étroitement lié, en l’occurrence les risques de crédit et de marché voire un

risque de réputation. Il existe en effet des interactions entre le risque de liquidité et les

risques susmentionnés, notamment dans les situations suivantes :

en cas de réalisation du risque de crédit, donc de défaut de la contrepartie dans le

cadre d’un prêt, les liquidités attendues du remboursement à effectuer par le client

diminuent. Ainsi, le volume de liquidité attendue diminuant consécutivement au

défaut de la contrepartie, la banque voit ainsi sa capacité de faire face à ses

engagements diminuer ;

le risque de marché est également lié au risque de liquidité dans la mesure où

lorsqu’une opération de titrisation est adossée sur des actifs de crédit de mauvaise

qualité et qu’il s’en suit un défaut, cela entraine de facto un risque de liquidité. La

crise financière a d’ailleurs trouvé ses origines dans les dysfonctionnements de la

titrisation qui a entraîné une forte contraction de la liquidité bancaire ;

la contraction du cash flow entraîne également un risque de réputation au niveau du

marché et augmente donc la méfiance des investisseurs auprès de la banque, et

partant le coût du crédit. En effet, la réputation sur la situation financière d’un

établissement est inversement proportionnelle à sa faculté de lever des fonds sur les

marchés à un coût raisonnable. Ce principe est d’ailleurs valable pour tous les agents

économiques et peut être vérifié en l’occurrence sur le marché de la dette publique

titres souverains ;

enfin, comme nous l’avons déjà indiqué, une crise de liquidité se transforme souvent

en crise de solvabilité. Le meilleur exemple est tiré du cas de la banque franco-belge

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

12

DEXIA qui finançait des achats de titres longs et rémunérateurs (emprunts Grecs, de

la généralité de Catalogne, etc) par des emprunts à court terme. Dans un premier

temps, DEXIA n’a plus trouvé de prêteurs à court terme, donc on a pu croire à une

crise de liquidité. Les ventes de titres initiées par DEXIA, et surtout la crise des dettes

souveraines, ont ensuite montré que les titres détenus s’étaient fortement dépréciés.

La crise de liquidité était en fait devenue une crise de solvabilité avec la détention

d’actifs très dépréciés non couverts par des fonds propres.

Ces interactions entre le risque de liquidité et les autres risques susvisés, et spécifiquement

du risque de marché, découlent principalement de la « marchéisation » croissante des bilans

bancaires avec des établissements qui ont davantage tendance désormais à se financer et à

financer par les marchés. A cet effet, la crise financière de 2008 est une illustration patente

de cette forte imbrication entre les différents risques et l’exposition des banques à la volatilité

des marchés. Par exemple, sur le marché interbancaire, le coût de la liquidité a fortement

augmenté sur les maturités courtes et, dans le même temps, les volumes échangés ont

largement baissés, compte tenu de la méfiance entre les acteurs de ce marché.

1.3. - Les outils de gestion de liquidité bancaire

Outre leur fonction d’intermédiaire financier par lequel elles accordent des prêts aux

entreprises qui ne peuvent se financer directement sur les marchés, les banques collectent

des dépôts dont elles sont fortement tributaires pour assurer leur mission. Toutefois, cette

seconde fonction de collecte peut leur conférer un aléa moral dans la mesure où les clients

qui effectuent des dépôts auprès des banques n’ont pas de maîtrise de l’usage qui en est

fait. Les dysfonctionnements notés au sein du système bancaire Chypriote au printemps

2013 et qui ont conduit les Autorités à devoir ponctionner les comptes de dépôt d’un certain

montant (+ 100.000 euros) en sont une illustration parfaite. Cet aléa moral peut être issu de

l’absence d’une analyse rigoureuse de la situation financière des emprunteurs ou de la prise

de risques inconsidérés. Les situations d’aléa moral peuvent également se manifester lors

de la survenance de chocs exogènes qui conduirait l’Etat à intervenir comme cela a été le

cas aux Etats-Unis pendant la crise financière. En effet, étant conscientes de leur statut de

« Too big too fail », les banques peuvent prendre des risques inconsidérés sachant que les

Autorités procèderaient à leur renflouement en cas de crise. Ainsi, les pertes enregistrées

par les banques sont transférées à la collectivité et sont généralement supportées par le

budget de l’Etat ou par les banques centrales qui procèdent au renflouement ou « bail out. »

Afin d’éviter de telles situations, les banques pourraient recourir à des pools de liquidités,

accompagnés d’engagements sur des lignes de crédit ou un fond de garantie des dépôts

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

13

comme c’est le cas avec le projet d’Union bancaire à l’échelle Européenne. Selon Jean-

Charles ROCHET 4 « L’opacité des actifs bancaires crée en outre une situation d’externalité

négative entre les prêteurs sur les marchés interbancaires, participants à un système de

paiement, ou entre les déposants non assurés La décision de renouveler un prêt

interbancaire à court terme, un plafond de découvert journalier (débit cap) sur un LVPS ou

un dépôt d’un gros montant dépend non seulement de l’incertitude intrinsèque (la qualité des

actifs de la banque) mais aussi de l’incertitude stratégique (ce qui va être fait par d’autres

prêteurs ou déposants. Dans un tel contexte, des critères normatifs de liquidité peuvent

constituer un moyen de limiter le risque systémique. »

Ces critères normatifs permettent à la banque d’avoir une certaine mesure dans l’utilisation

de sa liquidité, et de faire face aux situations d’incertitudes notamment, les retraits massifs

de la clientèle. Il en est de même pour les critères de respect des normes de solvabilité et

l’intervention de la Banque Centrale comme prêteur en dernier ressort. Il convient cependant

de fixer ces normes de manière à ce qu’elles puissent permettre une gestion saine de

l’activité de la banque à travers des fonds propres solides et une liquidité optimale. L’atteinte

simultanée de ces deux objectifs n’est pas cependant évidente.

Ainsi, la Règlementation de la liquidité bancaire par les Autorités de régulation apparaît plus

que nécessaire afin d’assurer la stabilité du système bancaire. Elle permet ainsi de protéger

l’épargne des déposants qui sont souvent les plus vulnérables. A cet égard, le projet d’Union

bancaire a prévu, entre autres, un superviseur unique pour l’ensemble des banques de la

zone euro, un système de garantie des dépôts et un autre de gestion des faillites bancaires.

1.4 - La réglementation de la liquidité et ses fondements macroprudentiels

La règlementation et la supervision bancaire visent à assurer la stabilité du système

financier. En effet, le concept de stabilité financière est devenu si répandu que la plupart des

banques Centrale disposent d’un département ou d’une direction entièrement dédiés à la

stabilité financière. Ces directions sont le plus souvent en charge de l’élaboration des

règlementations et doivent également permettre de protéger l’économie en général, et le

système financier en particulier des chocs exogènes tels que la récession, les dévaluations.

Au niveau macro-prudentiel, la réglementation de la liquidité est étroitement liée à la politique

monétaire dans la mesure où elle complète le rôle de prêteur en dernier ressort de la

Banque Centrale. En l’absence d’une réglementation de liquidité, les banques pourraient mal

4 In « Revue de la stabilité financière – Banque de France – Numéro spécial liquidité - février 2008 », pages 47 à 55

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

14

gérer leur risque de liquidité et s’exposer à des risques les rendant illiquides et insolvables,

et obligeant ainsi la Banque Centrale à intervenir.

Au même titre que la Banque Centrale, l’existence d’une réglementation de liquidité permet

d’éviter à l’Etat d’intervenir en cas de crise bancaire comme ce fut le cas aux USA et en

Angleterre lors de la crise de 2008. En effet, avec l’existence des banques « Too big to fail »

le risque bancaire est fortement corrélé au risque souverain, ce qui oblige les Etats à

renflouer (bail out) certaines banques pour éviter qu’elles aient un effet sur l’ensemble de

l’économie compte tenu de leur taille.

La nécessité d’une réglementation uniforme et harmonisée de la liquidité à un niveau

supranational constitue donc un enjeu important. L’absence d’uniformisation crée de fait une

discrimination envers les banques des pays où la réglementation est plus contraignante. Et

cette situation nuit forcément à la compétitivité des banques de ces pays mais a également

un impact négatif sur le financement de leur économie.

Plus fondamentalement, encadrer le risque de liquidité revient à réduire le risque

d’insolvabilité, dans la mesure où si une situation d’illiquidité perdure elle conduit à des

pertes - par exemple à des ventes d’actifs générant des moins values – pouvant générer une

situation de passif net et donc d’insolvabilité.

1.5 – La surveillance de la liquidité bancaire

Indépendamment de la règlementation de la liquidité bancaire, un suivi permanent s’impose

donc aux Autorités de tutelle du secteur bancaire. Cela passe par la mise en place d’un

système de « monitoring » qui imposerait aux banques de transmettre périodiquement à la

Banque Centrale un certain nombre d’indicateurs sur leur situation comptable et financière.

L’exploitation et le traitement des informations permettent d’ailleurs à l’Institut d’Emission

d’apprécier et de mesurer l’état et l’évolution de la liquidité des banques, de déterminer leurs

besoins et de calibrer le montant des liquidités à injecter dans le cadre de la politique

monétaire. La transmission d’informations statistiques à la Banque Centrale permet aussi à

celle-ci de suivre l’évolution des établissements bancaires présentant certaines difficultés et

de prévoir des interventions ciblées.

Au total, du point de vue de la Banque Centrale, la Réglementation de la liquidité et de la

solvabilité des banques permet d’éviter les prises de risques inconsidérés et, par

conséquent, l’intervention de la Banque Centrale à travers des injections massives de

liquidités en cas de chocs macro-économique exogènes.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

15

1.6 - Les expériences nationales : le cas de la France

La France a été l’un des tous premiers pays à organiser la réglementation de la liquidité. En

effet, les Autorités françaises ont publié dès 1988 le Règlement n°88-01 du 22 février 1988

relatif à la liquidité bancaire. Ce règlement d’une dizaine d’articles fixait un coefficient de

liquidité que les banques françaises étaient tenues de respecter. Le coefficient de liquidité

indiquait en substance que les actifs à court terme des banques françaises devaient être à

tout moment couverts par leur passif à court terme, étant entendus qu’actifs et passifs

n’étaient pas pris de manière brute, mais étaient pondérés selon des taux fixés par le

règlement. Outre le coefficient de liquidité, les banques devaient suivre 3 ratios d’observation

« rendant compte de la situation prévisionnelle de liquidité au cours des deux mois suivant,

du trimestre suivant et du semestre suivant ». Le règlement 88-01 a subi au cours des

années suivantes plusieurs modifications à travers notamment le règlement 97-02 relatif au

contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises d’investissement5 puis

l’arrêté du 5 mai 2009 modifiant le 97-02 relatif au contrôle interne des établissements de

crédit et des entreprises d’investissement a été adopté.

La réglementation de la liquidité en France est motivée par la volonté d’adapter le dispositif

prudentiel adopté en 1988 aux évolutions d’un contexte international devenu plus complexe,

et d’intégrer les nouvelles dispositions prises par le Comité de Bâle à la suite de la crise

financière internationale. Outre les raisons sus-évoquées, la réforme du dispositif relatif à la

liquidité est un impératif en ce qu’elle contraindrait les banques a renforcer leurs liquidités et

faciliterait le suivi par les Autorités de contrôle. Ensuite, ces nouvelles dispositions entre

dans le cadre des orientations fixées lors des rencontres des G20 de 2008 et 2009. Aussi,

permet-elle de transposer la directive 2006/48/CE.

L’objectif visé par cette réforme est de contraindre les banques à mettre en place un

dispositif leur permettant de répondre aux exigences de la nouvelle réglementation. Pour les

établissements de moindre envergure, des normes adaptées à leur taille ont été prévues par

la réforme.

Ainsi, un groupe de travail réunissant des membres du Secrétariat Général de la

Commission Bancaire d’alors, de la Fédération bancaire française et de l’Association des

sociétés financières s’est formé en 2007 et a poursuivi ses rencontres tout au long de

l’année 2008.

5 Règlement 97-02 relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises d’investissement.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

16

A la suite de ces travaux, un arrêté relatif à l’identification, la mesure, la gestion et le contrôle

du risque de liquidité a été adopté le 5 mai 2009 et publié le 20 mai 20096. Ce nouvel arrêté

qui remplace le règlement 88-01 du 22 février 1988 relatif à la liquidité bancaire et modifie le

règlement 97-02 relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises

d’investissement a pour objectif de mieux appréhender le risque de liquidité au sein des

établissements bancaires. Au-delà de son application à l’ensemble des banques, il

s’accompagne également d’un dispositif de régulation de la liquidité bancaire. Cette mise à

jour du règlement 97-02 est indépendante de la mise en application des ratios de liquidité

préconisés par Bâle III (à voir par ailleurs) même si cette mise à jour prend en compte les

leçons de la crise.

L’objectif principal visé par le nouvel arrêté est de déterminer les modalités d’appréciation du

risque de liquidité par les banques de manière à prévenir les chocs de liquidités et éviter les

situations d’illiquidité. En d’autres termes, les dispositions dudit arrêté visent à permettre aux

établissements de crédit de se mettre dans les conditions optimales pour faire face à tout

moment à leurs engagements à court et moyen termes. A cet égard, il convient d’étudier les

conditions d’application, à la mise en œuvre des différentes approches par les

établissements de crédit ainsi que les modalités de contrôle à réaliser par les Autorités

compétentes.

Au même titre que les textes parus dans le sillage de Bâle II, l’arrêté est élargi aux

succursales françaises d’établissements de crédits de l’Eurosystème. Il s’agit donc de

succursales établies en France mais dont la maison-mère se trouve dans un des pays de

l’Union Européenne. Cette nouvelle disposition permet ainsi aux groupes transfrontaliers

issus de l’Union Européenne d’accéder aux opérations de refinancement des Banques

centrales de l’Eurosystème, de diversifier les sources de liquidités et d’optimiser la gestion

de leur trésorerie. Ainsi l’arrêté du 5 mai 2009 entré en vigueur le 30 juin 2010, s’applique

aux établissements ci-après :

« les établissements de crédit ayant leur Siège social en France ;

les succursales françaises d’établissement de crédit ayant leur siège social dans un

autre Etat membre de l’Union Européenne (UE) ou un autre Etat partie à l’accord sur

l’Espace économique Européen (EEE), pour autant qu’elles remplissent certaines

conditions ;

les succursales françaises d’établissement de crédit ayant leur siège social dans un

autre Etat non partie à l’accord sur l’EEE (ensemble les « établissements

6 Arrêté du 5 mai 2009, relatif à l’identification, la mesure, la gestion et le contrôle du risque de liquidité.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

17

assujettis »), la Commission bancaire étant chargée d’apprécier le respect de ces

conditions. 7»

S’agissant de l’application des dispositions de l’arrêté, deux approches ont été retenues :

une approche standard et une approche avancée du risque de liquidité comme le prévoit

l’article 4 de l’arrêté. Ainsi, par défaut, les établissements assujettis sont tenues d’appliquer

l’approche standard « ou à leur demande et après autorisation de la Commission Bancaire,

l’approche avancée ».

A/ Approche standard du risque de liquidité

Détermination du coefficient de liquidité

L’approche standard du risque de liquidité, prévue aux articles 7 et suivants de l’Arrêté,

présente les modalités de détermination du coefficient de liquidité qui est un rapport entre les

actifs liquides et mobilisables à court terme et les exigibilités. L’objectif de cet indicateur est

selon La Commission Bancaire « d’évaluer la capacité de la banque à faire face à ses

obligations tout en restant suffisamment liquide pour garantir la pérennité de son activité ». Il

doit être à tout moment au moins égal à 100%. Il doit également faire l’objet d’un rapport

mensuel communiqué à la Commission Bancaire.

Le numérateur du ratio du coefficient de liquidité est constitué des coussins d’actifs liquides

(ou liquidity buffer) détenus par la banque à courte échéance. Le dénominateur enregistre

cependant les engagements du bilan et du hors bilan à court terme.

Par rapport au dispositif précédent, deux innovations majeures ont été introduites. D’une

part, les fonds propres qui étaient inscrits au dénominateur du ratio sont désormais exclus du

calcul du coefficient. Cette nouvelle mesure permet d’assurer un financement plus sain de

l’activité de l’établissement. D’autre part, conformément aux orientations de Bâle II, les

transferts de risques sont réglementés de manière plus stricte. En outre, les dispositions

relatives aux accords de refinancement sont renforcées dans le nouveau dispositif.

De même, selon les termes de l’article 15 de l’arrêté, les accords de refinancement sont

soumis à l’approbation préalable de la Commission Bancaire qui dispose d’un délai de trois

mois pour valider ou non leur prise en compte dans le calcul du coefficient de liquidité.

7 La refonte du régime prudentiel de la liquidité bancaire, Jérémie DUHAMEL, Banque & Droit n°127 septembre octobre 2009,

pages 15 à 20.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

18

Par ailleurs, le texte mentionne « qu’aucune mesure locale applicable à l’établissement

donnant l’accord de refinancement ne doit s’opposer au transfert de fonds ». Toutefois, en

cas de turbulences majeures pour une banque, la Commission Bancaire peut interdire les

transferts intragroupes des fonds. Mais ces questions ont été traitées dans le cadre de

l’approche avancée avec la fixation d’un périmètre de gestion qui exclut de facto l’entité

concernée.

Les articles 17 à 23 de l’Arrêté prévoient les conditions d’établissement et de transmission à

la Commission Bancaire d’un tableau de trésorerie prévisionnelle qui permet aux banques

d’assurer un suivi au moins hebdomadaire de liquidité. Par ce tableau, les banques sont

tenues de communiquer le détail de leurs prévisions de prévisions de « flux de trésorerie à

sept jours calendaires, en euros et en devises, de leur siège et de l’ensemble de leurs

succursales, en France et à l’étranger. » La Commission Bancaire fixe aussi une série

d’informations relatives au coût et aux sources de financement.

B - Approche avancée du risque de liquidité

Dispositions générales

Sur autorisation de la Commission Bancaire, les grands groupes bancaires présentant un

profil de risque complexe, peuvent appliquer une approche avancée basée sur leurs

méthodologies internes. L’autorisation de l’Autorité de Contrôle est cependant obtenue à

certaines conditions. En effet, l’établissement doit pour ce faire « mettre en place une

politique générale, des procédures, des limites, des systèmes et outils qui répondent aux

critères définis à l’article 25 de l’arrêté » dont entre autres, la prise en compte de l’ensemble

des échéances allant du court terme au long terme, du profil de risque, des répercussions

systémiques pouvant résulter de l’importance de l’établissement sur son marché, du niveau

de tolérance du risque de liquidité.

Une fois autorisés par la Commission Bancaire à utiliser leur méthodologie interne pour la

gestion de leur risque de liquidité, les établissements assujettis ne peuvent revenir à

l’approche standard sauf pour un motif dûment justifié et après autorisation de la

Commission Bancaire.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

19

La gouvernance du risque de liquidité

L’organe exécutif des établissements assujettis à l’approche avancée est tenu d’assurer la

gouvernance du risque de liquidité. A ce titre, il doit conduire la gestion du risque de liquidité

qui consiste à :

fixer le niveau de tolérance au risque de l’établissement ;

définir la politique générale de gestion de la liquidité adaptée à son niveau de

tolérance au risque ;

circonscrire le périmètre auquel la politique s’applique ;

déterminer les procédures limites, systèmes et outils d’identification, de mesure et de

gestion du risque de liquidité.

Cette gestion du risque de liquidité conduite par l’organe exécutif est évaluée par l’organe

délibérant de l’établissement assujetti qui se prononce au moins une fois par an sur la

gestion de l’organe exécutif. Il s’y ajoute que l’entité dédiée au contrôle de l’établissement

est également tenue de procéder au moins une fois l’an au contrôle de la gestion effectuée

par l’organe exécutif. Le Comité d’Audit, lorsqu’il existe est tenu de procéder à un examen

régulier des méthodologies internes.

Le périmètre de gestion du risque de liquidité

Le périmètre de gestion du risque de liquidité est défini, au sens de l’article 31 de l’Arrêté,

comme « l’ensemble des lignes d’activités et des entités juridiques, qu’elles soient ou non

agréées comme établissements de crédit (…) pour lesquels l’établissement demande à être

autorisé à utiliser ses méthodologies internes ». L’établissement est tenu de justifier les

différences entre le périmètre de gestion du risque de liquidité et le périmètre de

consolidation comptable. Il doit en outre indiquer la méthode de suivi de la liquidité du

groupe, notamment en cas de choc de liquidité. Pour ce faire, il doit élaborer une

cartographie dudit périmètre qui fait ressortir les besoins et apports en liquidités de chacune

des entités juridiques du groupe, de chaque métier ainsi que la procédure de transmission

(reporting) de l’information relative à la liquidité des entités et métiers du groupe. La

cartographie doit également faire ressortir les contraintes juridiques et opérationnelles qui

peuvent affecter le transfert des fonds ou le remboursement des passifs.

Toutefois, certains établissements de crédit peuvent être exclus du périmètre de liquidité

lorsque le groupe auquel ils appartiennent parvient à justifier leur autonomie en matière de

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

20

mesure, de gestion et de suivi du risque de liquidité. Dans ce cas, ledit établissement de

crédit est soumis à la méthode avancée ou méthode standard.

Les méthodologies internes : indicateurs, limites, stocks d’actifs liquides

Dans le cadre de la gestion et du suivi de leur risque de liquidité, les établissements

assujettis doivent mettre en place un système d’information leur permettant de disposer de

l’ensemble des éléments concourant à une maîtrise de leur liquidité et leur assurant une très

bonne visibilité sur son évolution. A cet effet, les dispositions de l’article 34 de l’Arrêté

requièrent des établissements assujettis le suivi « d’indicateurs et de limites et selon des

hypothèses suffisamment prudentes, les flux entrant et sortants, tant certains que probables,

résultant de l’ensemble des éléments d’actifs, de passifs et de hors-bilan, notamment des

engagements envers des entités ad hoc… ».

Ainsi, les indicateurs mis en place par l’établissement doivent lui permettre d’apprécier la

qualité et le degré de liquidité de ses actifs, notamment en période de crise. Cette évaluation

des actifs à travers la série d’indicateurs est effectuée en intégrant plusieurs paramètres

dont, entre autres, leur éligibilité au refinancement des banques centrales, de la faculté à les

rendre liquides rapidement tout en tenant compte des actifs comptabilisés dans une entité

située en dehors de l’eurosystème. L’établissement doit également procéder régulièrement à

la révision de la pertinence des critères d’appréciation de la qualité des actifs. Il reste

entendu que les indicateurs retenus doivent être adaptés au profil de risque de

l’établissement, couvrir l’ensemble du périmètre de gestion de la liquidité, établis à la fois de

façon statique et dynamique et permettre d’apprécier les coûts et la nature des financements

et leur évolution ainsi que le risque de liquidité intra-journalier.

Sur la base de l’échéancier des encaissements et décaissements courants et prévisionnels,

l’établissement assujetti doit élaborer des impasses de liquidité afin d’avoir une meilleure

visibilité sur l’évolution de sa trésorerie. Une impasse de liquidité est « le solde, cumulé ou

non, des encaissements et décaissement courants et prévisionnels ». Elles sont calculées

selon les échéances contractuelles ou attendues ainsi que pour chaque devise significative.

Enfin, en fonction du contexte du marché dans lequel il évolue, de la qualité de sa signature,

et des scénarios de crise, l’établissement est tenu de fixer des limites objectives couvrant

son périmètre de gestion, chaque limite devant être déclinée en sous-limites par entité et par

métiers. La fixation des limites doit s’accompagner d’un dispositif d’alerte permettant d’attirer

l’attention en cas de dépassement, ainsi que de plans d’action. L’autorisation de l’ACP est

bien entendu requise pour toute modification des limites.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

21

Scénarios de crise et plans d’urgence

En vue de prévenir les chocs exogènes, l’établissement doit définir des scénarios de crise

adaptés à son profil de risque. Pour ce faire, elle mesure les effets d’une éventuelle

réalisation du risque de liquidité et la résilience de l’établissement notamment pour ce qui

concerne la corrélation entre les engagements hors-bilan, confirmés et non confirmés, et le

niveau de ses actifs liquides. Les scénarios spécifiques à certaines entités ou certains

métiers du périmètre de gestion doivent être justifiés et suffisamment documentés. En outre,

des tests de résistance doivent être effectués de manière périodique « afin de s’assurer que

l’exposition au risque de liquidité reste compatible avec la tolérance au risque définie par

l’établissement ».

L’analyse des résultats des tests doit permettre à l’établissement d’en tenir compte dans sa

gestion du risque de liquidité et d’élaborer des plans d’urgence incluant la stratégie et les

procédures qui lui permettent de prévenir les crises de liquidité.

C - Contrôle de la Commission Bancaire sur la gestion du risque de liquidité

Les obligations d’information des établissements assujettis

Le système d’information mis en place par la Commission Bancaire pour assurer la

surveillance du dispositif de gestion du risque de liquidité bancaire ne peut être efficace que

s’il est basé une communication interactive et permanente avec les établissements

assujettis. Ainsi, les établissements autorisés à utiliser leurs méthodologies internes sont

tenus d’informer immédiatement la Commission Bancaire de toute modification ou évolution

de son profil de risque de liquidité actuel ou prévisionnel ainsi que des dépassements des

limites autorisées. Aussi, toute modification notoire des éléments sur la base desquels

l’autorisation a été accordée devra être portée à la connaissance de l’Autorité de contrôle. A

cet égard, l’établissement assujetti « les informations relatives à ses indicateurs, limites,

stocks d’actifs liquides, plans d’urgence et les résultats des scénarios selon la liste et la

fréquence fixées par la Commission Bancaire dans sa décision d’autorisation. »

Dans le cadre de l’élaboration du rapport de contrôle interne adressé périodiquement à

l’Autorité de contrôle, les établissements sont tenus de retracer l’ensemble des hypothèses

sur les bases desquels les scénarios ont été conçus et les indicateurs retenus.

Les mesures à la disposition de la Commission Bancaire et son pouvoir de

sanction

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

22

Après la collecte, traitement et analyse qualitative et quantitative des informations transmises

par les établissements assujettis, la Commission Bancaire peut, si besoin, solliciter des

informations complémentaires ou formuler des recommandations à leur endroit afin qu’ils

prennent des mesures correctives, et le cas échéant, prendre des sanctions à leur encontre.

En effet, les régulateurs doivent disposent de toutes les informations leur permettant de

contraindre les établissements assujettis à observer les exigences prévues par la

réglementation. Pour assurer un suivi efficace, notamment au niveau supranational, pour ce

qui concerne les groupes transfrontaliers, le Comité Européen des Contrôleurs Bancaires

(CECB) encourage les régulateurs à davantage d’échange d’information et au

développement d’outils communs afin d’harmoniser les pratiques et les indicateurs de suivi

des établissements de crédit.

Au total, il convient de retenir que le risque de liquidité est un des risques majeurs

qu’encourent les banques en ce sens qu’il peut mener à leur défaillance. Compte tenu de la

difficulté à mettre en place une réglementation, il n’y avait pas d’accord au plan international

avant les leçons de la crise et les exigences de l’opinion et des Autorités politiques. En la

matière, l’expérience de la France est restée relativement isolée.

Partie II : La crise financière et ses implications sur la

liquidité bancaire

La crise financière internationale a mis en lumière l’insuffisance des fonds propres des

banques et leur impréparation aux chocs d’une grande ampleur sur la valeur de certains

actifs – tels les CDO subprimes ; par ailleurs, elle a provoqué un assèchement important de

la liquidité bancaire obligeant les banques centrales, dans le cadre d’une politique monétaire

très accommodante, à des interventions massives et sans précédent afin de sauver le

système bancaire. La contraction de la liquidité bancaire qui s’est manifestée notamment

par une forte baisse des volumes échangés a eu pour cause la perte de confiance entre les

acteurs de ce marché. Elle s’est en outre traduite par un resserrement du crédit avec comme

corolaire un ralentissement économique ayant conduit plusieurs pays dans la récession

pendant les années suivantes.

A cet égard, il convient de s’interroger sur l’impact de la crise financière sur la liquidité

bancaire mais également ses différentes implications. A ce titre, il s’agira d’identifier

l’augmentation du besoin de financement des banques, l’accroissement du risque de

transformation, l’effondrement du marché interbancaire et l’effet sur la mise en œuvre de la

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

23

politique monétaire. Nous aborderons enfin les enjeux nés de la crise financière en matière

de gestion du risque de liquidité.

2.1 – Les implications de la crise financière

Au cours des trente dernières années, le secteur financier a connu une accélération du

processus de dérèglementation des marchés financiers qui s’est accompagnée

principalement d’une plus forte intégration des marchés ainsi que d’un désencadrement du

crédit. La déréglementation a eu comme corolaire la désintermédiation ou « marchéisation »

avec le recours de plus en plus fréquent aux marchés plutôt qu’aux établissements de crédit

pour financer le développement des entreprises. Parallèlement, des détenteurs d’une

épargne croissante hors le système bancaire – compagnies d’assurance, fonds de pension

et d’investissements – se sont trouvés à la recherche de placements. Ainsi, des produits

financiers complexes sont apparus sur les marchés et ont contribué à la diversification de

l’offre de financement des entreprises qui, pour les plus grandes d’entre elles, voire pour

certaines PME, ne se limitent plus essentiellement aux concours bancaires. Toutefois, le

développement de produits financiers sophistiqués au cours des années 1990 et 2000,

l’essor des produits dérivés de crédit avec notamment les techniques de titrisation, et la

multiplication des marchés de gré à gré ont eu comme effet le développement de pratiques

très risquées qui échappaient au contrôle des Autorités de régulation et de surveillance – car

conduites par des établissements ou des marchés non soumis à la régulation bancaire-

pratiques qui ont contribué au développement de la crise financière internationale de 2007-

2008.

Les banques n’ont pas été en reste au cours de ce processus de désintermédiation. Elles

ont su se diversifier en quittant leur modèle traditionnel pour devenir des banques

universelles présentes dans tous les métiers de la finance et offrant des services financiers

très sophistiqués. Ainsi, compte tenu de leur forte exposition aux risques de marché, de

crédit et de liquidité, les banques ont été sévèrement frappées par la crise financière qui a

induit chez elles, une forte contraction de leur liquidité qui s’est traduite notamment par une

apparition soudaine d’un défaut de liquidité, la dislocation du marché interbancaire et une

politique monétaire accommodante des banques centrales.

2.1.1 – L’apparition soudaine d’un défaut de liquidité

Au titre des effets immédiats de la crise figurent l’apparition brutale d’un besoin de liquidité

par les banques dans la mesure où la plupart des véhicules utilisés pour en disposer avant la

crise n’étaient plus opérationnels. En effet, les banques refinançaient massivement des actifs

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

24

notamment les Collateralized debt Obligations (CDO) par des ressources courtes provenant

de l’interbancaire. Toutefois, La composition des CDO était mal connue par les acheteurs du

fait des spécificités du marché hypothécaire américain et de leur structuration, de sorte que

le risque de crédit était mal connu. Donc il était devenu difficile de connaître le vrai prix de

certains CDO lorsque les taux de défaut ont augmenté. Il s’y ajoute que les acheteurs de

CDO, ou les banques qui les montaient, se finançaient à court terme sur le marché

interbancaire ou auprès de fonds disposant de liquidités (en donnant souvent les CDO en

garantie). Lorsque la valeur des CDO est devenue incertaine, les banques et investisseurs

n’ont pas trouvé de preneurs pour les nouveaux CDO émis et il est difficile voire impossible

d’émettre ces produits à vil prix. La crise de liquidité s’est donc transformée en crise de

solvabilité. Ces opérations étaient traitées par des techniques de titrisation. D’aucuns

indexent cette technique avec notamment ses abus, ses dysfonctionnements et ses limites

comme l’un des principaux faits générateurs de la crise.

La titrisation est une technique par laquelle une banque émet des titres qui sont adossés à

des actifs sous-jacents (asset-backed securities), qui sont pour l’essentiel des créances

figurant dans son bilan et qui en sont ensuite sorties, en vue d’obtenir de la liquidité, d’alléger

l’actif du bilan et les exigences de fonds propres, et enfin, d’offrir des produits de placement

à des investisseurs.. A la base, les créances figurant au bilan d’une banque sont par

essence des actifs non immédiatement liquides. Mais dans le cadre d’une opération de

titrisation, elles sont réunies dans des blocs (pool d’actifs sous-jacents) de manière à

constituer des actifs plus facilement négociables. Ces pools de créances peuvent être

constitués de prêts hypothécaires, de créances commerciales, de prêts particuliers et divers

autres types de crédits (encours de cartes de crédit, prêts à la consommation, etc).

L’opération est généralement effectuée par le biais d’une entité juridique spécialement créée

pour émettre les titres aux investisseurs finaux. Cette entité est un Special Purpose Vehicule

(SPV), ou Fonds Commun de Créance (FCC). Il est aussi appelé dans certains cas

« conduit ».

Le SPV n’intervient pas essentiellement dans une opération de titrisation mais sa création

est déterminante dans la mesure où c’est un artifice juridique qui permet de décoreller le

risque de l’originateur et celui des investisseurs.

Au total, les banques ont donc réduit leurs expositions aux risques de marché. Aussi, ont-

elles cherché à réduire une partie de leur portefeuille de crédit pour réduire leurs besoins de

fonds propres réglementaires et respecter les normes plus sévères imposées par les

régulateurs. C’est la technique « deleveraging » qui consiste à améliorer le ratio de levier.

Parallèlement, la demande de crédit s’est contractée (effets de la récession) et leur besoin

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

25

en fonds propres durs s’est lui accru, mais pas par appel à l’interbancaire mais par appel aux

actionnaires ou à des préteurs acceptant d’être subordonnés.

Schéma de titrisation

Ce schéma de titrisation est l’un des plus classiques, mais avec le développement des

marchés, des techniques plus complexes se sont vulgarisées. La titrisation présente

plusieurs avantages en ce sens qu’elle permet notamment à l’originateur d’alléger son bilan

(delaveraging) et de respecter les dispositions réglementaires relatives aux fonds propres et

de disposer de la liquidité immédiate. Elle permet également aux investisseurs de disposer

d’un rendement intéressant par rapport aux classes d’actifs habituels.

Toutefois, la crise des subprime sur le marché américain des crédits hypothécaires, à

l’origine de la crise financière internationale, a démontré que la réussite des opérations de

titrisation dépend dans une large mesure de la qualité des actifs sous-jacents ou ABS. En

effet, le marché des titres hypothécaires aux Etats-Unis a été caractérisé pendant longtemps

par une véritable asymétrie d’information entre les émetteurs et les investisseurs au sujet

notamment de la qualité des titres émis mais surtout des actifs sur lesquels ils ont été

adossés.

Source : Fi Market

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

26

Les dysfonctionnements de la titrisation peuvent être extrapolés pour d’autres types d’actifs

ou de produits financiers comme par exemple les dérivés de crédits des produits

synthétiques. Tous ces produits et les risques y assortis se sont cumulés lors de la crise

pour conduire à une crise de liquidités qui s’est manifesté par une matérialisation du risque

de liquidité. Ce risque de liquidité est d’autant plus grand que le schéma de financement

classique des banques portait sur une transformation de ressources à court termes pour des

emplois longs. Il s’y ajoute que la valeur des actifs financés est difficile à apprécier à un

instant t, surtout si les conditions en vigueur au moment de l’émission se sont modifiées.

Plus précisément, pour les CDO, lors de l’émission, on dispose du rendement des actifs

sous jacents (par exemple un paquet de crédits hypothécaires) et un taux de défaut estimé

(dont les porteurs seniors sont protégés par les parts equity et junior dans le cas d’un produit

structuré). Donc on peut calculer la valeur du CDO soit : rendement nominal des crédits

diminué du taux de défaut estimé, et comparer ce rendement avec le taux normal obtenu en

moyenne pour la même catégorie de risque. Or quand le taux de défaut s’accroît, mais sans

être connu du porteur et du marché, on ne peut plus calculer la valeur du CDO. Donc il

devient pratiquement sans valeur de marché même s’il conserve une valeur intrinsèque,

mais laquelle est inconnue. Par ailleurs, le nombre d’intermédiaires entre celui qui a pris le

risque (le prêteur initial par exemple) et celui qui détient le titre est élevé. Toutes ces

conditions se sont réunies lors de la crise de 2007, sur les CDO au départ des subprime,

puis progressivement sur l’ensemble des CDO, sur la plupart des dérivés de crédit.

2.1.2 – La dislocation du marché interbancaire

La crise financière a mis en évidence la réalité de la situation financière des banques et leur

véritable capacité à faire face à leurs engagements. Autant dire qu’elle a révélé le niveau de

liquidité réel des banques dans une situation de stress. C’est là tout le problème de la

gestion de la liquidité. Comment apprécier la liquidité des actifs lorsque les conditions

initiales se dégradent ? Cette incertitude vaut pour pratiquement tous les actifs. Ainsi, les

dettes souveraines de pays comme l’Espagne ou l’Italie (sans évoquer la Grèce) étaient

considérées comme sans risque en 2006 ; or, brusquement, du fait du ralentissement de la

croissance un risque est apparu, d’abord mal évaluable, d’où la hausse brutale des taux de

rendement et la baisse de leur valeur sur les marchés. Il s’en est suivi des tensions de

liquidité au niveau des banques qui détenaient de tels titres en tant que réserve (avant la

prise de mesures non conventionnelles par la BCE).

La faillite de Lehman Brothers évoquée plus haut a créé un profond « traumatisme » dans le

secteur bancaire et financier et installé une grande méfiance entre les établissements

bancaires, dans la mesure où des établissements jugés protégés soit par la qualité de leurs

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

27

actifs, soit par leur qualité de « too big to fail » se sont trouvés soit en situation de défaut, soit

dans une situation financière difficile à apprécier. En effet, l’incertitude sur la qualité des

actifs de chacune des banques combinée à la méconnaissance des engagements de bilan et

hors-bilan ont donné lieu à des craintes asséchant le marché interbancaire conduisant à

certaines périodes l’ensemble des banques, même les plus solides, à se trouver sans

contrepartie autres que les banques centrales.En effet, les services en charge des risques

de marché dans chaque banque se trouvaient dans l’ignorance de l’existence ou de

l’importance des pertes subies par leurs contreparties. L’asymétrie d’information entre

banques se traduit donc par une réticence à se prêter entre elles. Cette situation a induit une

forte volatilité des taux interbancaires parce que les rares banques qui parvenaient à se

refinancer auprès de leurs confrères obtenaient leurs prêts à des taux historiquement élevés.

Ainsi, à partir du mois de d’août 2007, l’Euribor 3 mois qui est le taux de référence du

marché interbancaire européen, a connu a enregistré une forte hausse pour poindre à 4,96%

pour un taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne (BCE) ressortant à 4,00%

d’où un spread de 96 points de base alors que l’écart habituel ne dépassait guère 20 points

de base. Ce taux a même atteint 5,29% en octobre 2008. De manière plus extrême le

marché interbancaire a quasiment disparu pendant plusieurs semaines et s’est durablement

fermé pour la plupart des banques autres que les plus grandes.

En outre, en raison de la confiance qui régnait entre banques avant la crise, le marché

interbancaire fonctionnait pratiquement en pension simple (non livrée, sans collatéral). Les

principales garanties, quand elles existaient portaient sur les asset backed commercial

papers (ABCP) qui étaient titrisées par les banques à travers des SPV et leur permettaient

de disposer de liquidités supplémentaires et de dégager une marge d’intérêt. Ces opérations

étaient récurrentes avant la crise et se réalisaient autant que de besoin pour les banques.

Toutefois, la survenance de la crise a réduit l’appétence au risque et renforcé le sentiment

de méfiance des investisseurs pour ce type de produits. Les banques se sont donc trouvées

dans une impasse où elles étaient contraintes de trouver d’autres solutions de refinancement

avec l’intervention des banques centrales.

Dans leur rôle de garant de la stabilité financière, les banques centrales ont été contraintes

de prendre des mesures non conventionnelles afin d’apaiser les marchés et surtout d’éviter

une crise systémique. A ce titre, elles ont procédé à des injections massives de liquidités en

direction des établissements de crédit afin de leur permettre de disposer de ressources à un

coût raisonnable pour financer leurs activités. Dans ce cadre, la BCE et la FED ont injecté

des sommes record dans le secteur bancaire au cours de l’été 2007. Par exemple, le

montant des ressources mises à la disposition des banques le 9 août 2007 s’est élevé à 95

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

28

milliards d’euros, dépassant les 69,3 milliards d’euros injectés temporairement à la suite des

évènements du 11 septembre 2001.

Au total, la crise financière qui a provoqué de fortes turbulences sur le marché interbancaire

a eu pour effet de faire intervenir les banques centrales qui ont dû adapter leur politique

monétaire afin d’assurer la stabilité du secteur bancaire, et partant, celle de l’ensemble du

système financier.

2.1.3 – L’impact sur la mise en œuvre de la politique monétaire

Si la crise financière a fait ressortir les difficultés et insuffisances des banques prises

individuellement en termes de gestion de leur risque de liquidité, elle a surtout permis de

mettre de rappeler deux évidences qui n’auraient jamais dû être perdues de vue : d’abord

que la réglementation prudentielle qui avait cherché à contrôler le risque de solvabilité n’avait

pas appréhendé le risque de liquidité (comme nous l’avons vu plus haut) tandis que

pratiquement aucune surveillance de ce risque n’existait sur le plan macro économique. La

seconde évidence est que sauf à accepter les risques d’une fuite des dépôts, seules les

banques centrales sont en mesure d’affronter la situation d’illiquidité d’une banque

systémique ou du système bancaire lui-même en période de stress, comme nous allons le

voir.

Pour ce faire les mesures « traditionnelles » de politique monétaire deviennent rapidement

insuffisantes, notamment faute d’actifs mobilisables en quantité adaptée Aussi, très tôt, les

banques centrales ont dû recourir à une série de mesures non conventionnelles, lesquelles

ont permis de réduire la contraction de la liquidité bancaire à court terme, et tenter de

promouvoir des conditions moins instables sur le marché monétaire. Par exemple, la BCE,

très active pendant la crise, a pris des décisions qui ont été salutaires pour le système

bancaire européen. La FED et la Banque d’Angleterre (BoE) ont également apporté aux

banques de leurs pays respectifs le soutien nécessaire permettant d’assurer la stabilité du

secteur financier. Il reste entendu que ces mesures ont été complémentaires de celles déjà

prises par les Etats pour sauver leurs économies. En effet, au regard de la taille des

banques et de leur poids dans l’économie, le risque bancaire dans plusieurs pays est

fortement corrélé au risque souverain. Au titre des mesures non conventionnelles de

politique monétaire, nous traiterons principalement le cas de la BCE à titre d’illustration.

Depuis l’avènement de la crise financière et les tensions de liquidités apparues sur les

marchés interbancaire et monétaire européens, la BCE a mis en œuvre une politique

monétaire accommodante qui s’est articulée autour de cinq grands axes à savoir :

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

29

l’injection massive de liquidités : c’est l’une des principales caractéristiques de

la politique monétaire accommodante de la BCE depuis 2007 et qui pourrait être

résumée ainsi : servir aux banques autant de liquidités qu’elles en ont besoin

pour se refinancer. Cette méthode, quelque peu critiquée, a tout de même permis

aux banques de la zone euro de disposer de liquidités abondantes à des

conditions concessionnelles et de pallier ainsi l’assèchement des marchés ;

la baisse des principaux taux directeurs : au-delà de l’objectif de permettre aux

banques d’accéder à la liquidité à un coût raisonnable et de leur permettre de

continuer à porter des actifs à la valeur incertaine sans coût prohibitif. De plus des

taux bas visaient à empêcher une contraction de l’offre de crédit et, partant, de

soutenir l’économie. Au cours des dernières années, la BCE a régulièrement

utilisé ce canal par lequel ses taux directeurs ont atteint à plusieurs reprises des

niveaux historiquement bas depuis la création de la zone euro. A titre

d’illustration, le taux principal de refinancement de l’Institut d’émission européen

est passé de 4,25% l’an en juillet 2008 pour ressortir, après une série de baisses

au cours des dernières années, à 0,5% l’an au 2 mai 2013. Bien entendu, les

deux autres taux directeurs à savoir le taux de prêt marginal et le taux de facilité

marginal de dépôt ont suivi la même tendance avec une amplitude variant entre

0,75 et 1 point de pourcentage.

Fig. 1 - Evolution du taux des de refinancement des principales Banques Centrales

le lancement d’opérations de refinancement à long terme (LTRO) : c’est l’une

des mesures les plus originales prises par la BCE au cours de la crise. En effet,

les opérations courantes d’open market (OMO) portent généralement sur des

Source : Reuters

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

30

maturités de court terme (1 semaine, 3 mois ou au maximum 1 an). Après 3 ans

de crise et une politique monétaire accommodante, la BCE a compris que la

baisse des taux directeurs et l’injection massive de liquidités étaient des solutions

nécessaires mais insuffisantes pour résorber les problèmes de liquidités des

banques de la zone euro. Toujours dans le souci de préserver la stabilité du

système financier et de trouver des solutions structurelles, l’Institut d’émission a

pris la décision, à partir de l’année 2011, de mettre à la disposition des

établissements de crédit des liquidités sur des échéances plus longues, en

l’occurrence 3 ans. A cet égard, deux opérations de ce type dénommées Long

term Refinancing Operations (LTRO) ont été lancées en décembre 2011 et mars

2012 pour des montants respectifs de 489 et de 529 milliards d’euros, soit au total

plus de 1.000 milliards d’euros servis à 800 banques européennes en l’espace

d’un trimestre. Ces opérations, saluées par les marchés, ont permis aux banques

de disposer de la liquidité sur une longue période et de réduire l’incertitude sur

leur refinancement.

l’allègement des conditions d’accès au marché monétaire : Afin de faciliter

l’accès des banques de la zone euro à ses guichets, la BCE a élargi la gamme

des collatéraux acceptés en échange de ses prêts. Cette mesure a permis aux

banques les plus frappées par la crise qui ne disposaient pas de collatéraux de

haute qualité de se refinancer auprès de la BCE. Plus récemment, en juillet 2013,

la liste des actifs acceptés en collatéral s’est allongée pour accélérer le

financement des PME, moteurs de la croissance dans la zone euro et 4 banques

centrales dont la Banque de France ont encore élargi leurs conditions

d’admission de collatéraux. Ainsi, les ABS des banques adossés sur les prêts

accordés aux PME sont acceptés par la BCE ;

le rachat massif de titres de dettes publiques : Cette mesure dénommée

« Outright Money Transaction (OMT) » a été conçu pour permettre au Fonds

Européen de Stabilité Financière (FESF) de prêter directement à des banques

nécessitant d’être recapitalisées sans passer par l’intermédiaire des Etats. Elle

consiste pour la Banque Centrale en un programme illimité d’achat de titres

publics d’Etat en difficultés afin de faire refluer les velléités spéculatives de

certains investisseurs et orienter les taux à la baisse. L’OMT présente l’avantage

de n’être lancée que si le pays concerné sollicite au préalable le FESF dont

l’intervention est subordonnée à la mise en œuvre par le pays demandeur d’un

programme de réformes notamment sur le plan budgétaire. La BCE n’en a jamais

fait usage mais l’a évoqué à plusieurs reprises afin de donner un signal aux

marchés. Elle a cependant déjà lancé un programme similaire intitulé Securities

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

31

Market Programme (SMP) en 2010 au début de la crise grecque. Toutefois, ce

programme était fortement critiqué dans la mesure où il n’imposait pas

suffisamment de réformes structurelles au pays bénéficiaire.

In fine, la BCE a montré au cours de la crise financière internationale, sa capacité à conduire

dans l’urgence une politique monétaire visant fondamentalement à éviter une crise de

liquidité des banques8 et au-delà à empêcher le développement d’un « credit crunch ».

D’autres banques Centrales, comme la FED, la Banque d’Angleterre ou la Banque du Japon

ont su également mettre en œuvre des mesures du même ordre. La banque centrale

américaine a par exemple pris des mesures assez proches de celles de la BCE qui se

résument dans le cadre d’un programme d’assouplissement quantitatif ou « quantitative

easing Au total, la FED a effectué, entre le déclenchement de la crise en août 2008 et le

mois de juillet 2013, des achats de titres de plus de 3.500 milliards de dollars.

2.2 – Les enjeux nés de la crise financière en matière de gestion de la liquidité

La crise financière a mis en exergue les insuffisances de l’ensemble du système financier,

c'est-à-dire aussi bien au niveau des régulateurs que des acteurs, en matière de prévention,

de gestion et de suivi du risque de liquidité. Il convient toutefois d’indiquer que les instances

internationales et/ou européennes de supervision avaient, bien avant la survenance de la

crise, pris quelques initiatives allant dans le sens d’un renforcement de la liquidité.

2.2.1 – Le renforcement des dispositifs de gestion du risque de liquidité

En février 2008, le Comité de Bâle pour le Contrôle Bancaire avait produit un document

intitulé « Liquidity Risk Management and Supervisory Challenges 9» portant sur la gestion et

la surveillance du risque de liquidité. Ce document présente en substance les principales

causes de matérialisation du risque de liquidité qui ont trait notamment a un recours accru

des techniques de financements structurés, à une préférence du financement par le marché

plutôt que par la transformation des ressources en emplois créant ainsi une forte

dépendance à l’égard des marchés financiers. L’absence d’un cadre réglementaire de

surveillance de la liquidité à l’échelle internationale a également été relevée comme une

grande insuffisance. En effet, la pluralité de réglementations nationales qui sont davantage

orientées vers des indicateurs quantitatifs de suivi du risque de liquidité constitue une

difficulté majeure sur les plans juridique, comptable voire et opérationnel, notamment pour

les établissements transfrontaliers qui sont soumis à des normes qui diffèrent en fonction

8 Que peut faire la BCE pour soutenir l’économie en zone euro tout en respectant ses principes ? Patrick ARTUS, Flash

Economie NATIXIS n°266, 4 avril 2013 9 Liquidity risk Management and Supervisory Challenges, Comité de Bâle pour le Contrôle Bancaire, Février 2008

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

32

des pays. Cette situation rend difficile les techniques de consolidation et ainsi les analyses

comparatives entre établissements.

Par ailleurs, le rapport du CECB fait également ressortir les leçons qui pourraient être

retenues dès les premiers mois de la crise financière internationale notamment en matière

de surveillance de la liquidité bancaire. A ce sujet, le manque de fiabilité des scénarios de

crise et des plans de continuité d’activité ont été relevées comme des faiblesses majeures.

Les conclusions de ce rapport ont permis à l’instance bâloise de procéder à une révision de

ses recommandations publiées en 2000 dans un document intitulé « saines pratiques de

gestion du risque de liquidité dans les banques10 ». Ainsi, le Comité de Bâle a décliné 17

principes relatifs à la gestion du risque de liquidités dont 13 concernent directement les

banques et 4 sont adressés aux superviseurs. Les 8 principes majeurs qui se distinguent de

cette liste sont présentés ci-après :

la nécessité de fixer un seuil de tolérance au risque de liquidité ;

le maintien d’un niveau adéquat de liquidité grâce au coussin d’actifs liquides ;

la prévision de scénarios de crises (stress tests) et de simulation de chocs de

liquidité ;

l’identification des coûts, avantages et risques liés à la liquidité pour l’ensemble des

lignes de métier ;

le recensement des risques liés aux engagements potentiels ;

la conception d’un plan de financement d’urgence opérationnel ;

le suivi de la liquidité à une périodicité intrajournalière ;

la communication à l’endroit des marchés de toute information relative au risque de

liquidité afin de faire observer la discipline de marché ;

Les recommandations adressées aux Autorités de contrôle ont essentiellement trait à

l’amélioration des méthodes de contrôles et au renforcement de leur coopération avec les

banques centrales.

2.2.2 – La reconnaissance des méthodologies internes

Dans le cadre du projet d’harmonisation des cadres réglementaires relatifs à la gestion et au

suivi de la liquidité, un groupe de travail placé sous la présidence française a été constitué à

la demande de la Comité Européen des Contrôleurs bancaires (CECB) au début de l’année

10

Cf. note n°1 , page 6

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

33

2007 avec comme objectif de dresser un état des lieux des réglementations nationales dans

l’Union Européenne.

Il ressort des travaux du groupe de travail qu’il existait une convergence des objectifs

poursuivis en matière de règlementation de la liquidité. Toutefois, les différences d’approche

sont apparues pour ce qui a trait à la surveillance du risque de liquidité. Ainsi, contrairement

aux dispositions prises dans le cadre du risque de solvabilité, la directive 2006/48/EC ne fixe

pas régime d’application unique au sein de l’espace européen. La latitude en matière

d’interprétation est laissée aux Autorités de contrôle nationales, y compris pour les entités

implantées hors du territoire concerné.

En dépit du manque d’harmonisation des textes et des pratiques en matière de suivi, de

gestion et de contrôle du risque de liquidité, le groupe de travail commis a dressé une liste

de principes communs pour une bonne gestion du risque de liquidité. Il a en outre remis

CECB un rapport contenant une trente recommandations liées à la liquidité bancaire et dont

dix-huit concernent directement les établissements de crédit. Ces recommandations

recoupent pour l’essentiel celles édictées par le Comité de Bâle dans le cadre de son

rapport intitulé « Principes de saines gestion et de surveillance du risque de liquidité » paru

en septembre 2008. En effet, les travaux du groupe de travail ont été menés en étroite

collaboration avec le Comité de Bâle.

Le rapport élaboré par le groupe de travail introduit cependant quelques innovations, en

l’absence de normes supranationales. Il propose en effet aux superviseurs nationaux de

reconnaître et de prendre en compte les méthodologies et procédures internes de mesure,

de gestion et de suivi du risque de liquidité développés par les banques. Cette proposition

sera d’ailleurs prise en compte par les Autorités françaises lorsqu’il s’est agi de publier le 5

mai 2009 l’arrêté relatif à l’identification, la mesure, la gestion et le contrôle du risque de

liquidité.

Pour sa part, la Commission Européenne avait entrepris de procéder à la révision de la

directive 2006/48/EC dans le cadre des Capital Requirements Directive (CRD)11 relatives à la

supervision de la liquidité à l’effet d’intégrer la recommandation du CECB portant sur

l’utilisation des méthodologies internes.

Au total, la crise financière internationale a d’abord révélé des risques inconsidérés pris par

les établissements financiers au sens large ainsi que l’attention insuffisante portée par ceux

–ci à la gestion de leur risque de liquidité, du fait notamment de défaillances dans l’analyse

11

Capital Requirements Directive 2006/48/EC, http://ec.europa.eu/internal_market/bank/regcapital/repealed-legislation

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

34

des risques sous-jacents de leurs actifs et de la quasi absence de scénarios de stress. De

plus, la crise a mis en exergue les graves lacunes des dispositifs prudentiels tant au niveau

réglementaire qu’au niveau macro-économique ou systémique. Seules les interventions des

États et surtout des banques centrales par le biais de mesures totalement non

conventionnelles, et parfois contraires à leurs statuts, ont permis de contenir la crise, en

dépit des pertes subies par les établissements et leurs clients et de la récession dont les

pays occidentaux ont été les victimes. Aussi une refonte de la réglementation portant

notamment sur l’instauration de normes de liquidité s’est-elle révélée indispensable.

III. La réforme des règles prudentielles : Bâle III et

ses enjeux sur la liquidité bancaire

La récente crise financière internationale s’est traduite par un ralentissement économique

sans précédent qui fait dire qu’elle est la plus grave que le monde ait connu depuis la grande

dépression des années 1929-1930. Elle s’est par la suite transformée en crise économique

caractérisée entre autres par une grave récession, un recul de la production industrielle, une

hausse continue du chômage et une crise des dettes souveraines.

Le secteur financier, en particulier le système bancaire, s’est trouvé au centre de la crise qui

a provoqué un sentiment de défiance à l’égard des marchés, mais surtout une forte

contraction de la liquidité bancaire qui a fait prendre aux banques centrales et même aux

Etats, des mesures non conventionnelles afin d’éviter une crise systémique.

L’un des « points positifs » de cette crise est qu’elle a fait comprendre et prendre conscience

aux Autorités des pays concernés l’urgente nécessité de renforcer les règles prudentielles

dans le secteur financier. Elle a en outre permis de susciter une convergence des vues

autour de la nécessité d’accélérer le processus d’harmonisation du cadre réglementaire

d’identification, de mesure, de gestion et de suivi du risque de liquidité à un niveau

supranational.

Ainsi, à la demande du sommet du G20 de Pittsburgh des 24 et 25 septembre 2009, le

Comité de Bâle a été instruit de mener une révision en profondeur du dispositif prudentiel

applicable aux banques afin de présenter un dispositif global dénommé Bâle III. Déjà en

juillet 2009, deux textes intitulés respectivement « Enhancements to the Basel II

framework 12» et « Revisions to the Basel II market risk framework 13» avaient été produits

12

Enhancements to the Basel framework, Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Juillet 2009 13

Revisions to the Basel II market risk framework, Comité de Bâle sur le contrôle Bancaire, Juillet 2009

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

35

dans ce cadre. Toutefois, ils étaient plutôt axés sur le risque de marché et le risque de

solvabilité. En décembre de la même année, deux nouveaux textes sont publiés par le

Comité de Bâle. Ils s’intitulent en l’occurrence « Strenthening the resilience of banking

sector14 » et «International framework for liquidity risk measurement, standard and

monitoring15 ».

Quasiment en parallèle, le rapport du groupe de travail présidé par Jacques de Larosière et

produit en février 2009 contient un certain nombre de recommandations phares au titre

desquelles figure la mise en place d’un Comité Européen des risques systémiques (CERS)

au niveau européen. Cette entité aurait la charge de surveiller les risques de ce type et en

particulier le risque de liquidité.

Pour ce qui est des suites du G20, le Comité de Bâle a publié le 16 décembre 2010, soit

après une année de consultation qui a permis recueillir les observations des acteurs et

superviseurs du secteur bancaire et financier, une version révisée du texte intitulé

«International framework for liquidity risk measurement, standard and monitoring ». Ce

document a introduit deux normes complémentaires dont la combinaison devrait permettre

de mesurer et de suivre le risque de liquidité au sein des banques :

le liquidity coverage ratio (LCR), qui est un ratio de court terme couvrant un horizon

d’un mois ;

le net stable funding ratio (NSFR) qui est un ratio structurel qui couvre un horizon

d’un an.

L’introduction de ces deux nouvelles normes répondait au double objectif de conférer aux

établissements la capacité d’amortir des chocs de liquidités soudains en leur exigeant de

disposer d’un certain niveau d’actifs liquides, et d’améliorer la qualité de la transformation en

en réduisant l’asymétrie des échéances entre l’actif et le passif. Ce nouveau cadre

réglementaire qui fixe des normes de liquidité applicables de manière uniforme à tous les

établissements constitue une nouveauté en termes de réglementation financière

internationale dans la mesure où seule la solvabilité faisait l’objet d’une réglementation

harmonisée.

Les normes de liquidité de Bâle III visent essentiellement des objectifs microprudentiels

même si elles peuvent avoir, dans certaines circonstances, des caractéristiques

14

Strenthening the resilience of banking sector, Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Décembre 2010 15

International framework for liquidity risk measurement, standard and monitoring, Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire,

Décembre 2010

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

36

macroprudentielles. Le respect simultané et rigoureux des deux normes devrait permettre

aux banques de réduire l’exposition au risque de transformation et d’améliorer la résilience

aux chocs systémiques. Sur le plan international, l’harmonisation des règles en matière de

gestion du risque de liquidité permet une concurrence plus saine entre les banques,

l’efficience des marchés monétaires et un meilleur financement des économies.

Un calendrier d’adoption des normes de liquidité est alors élaboré par le Comité de Bâle. Le

programme initial prévoyait en effet une entrée en vigueur du LCR en janvier 2015 et celle

du NSFR en janvier 2018. Le 6 janvier 2013, après une période d’observation qui a duré

deux ans (2011 et 2012) au cours desquels le secteur bancaire les régulateurs nationaux ont

formulé des observations sur les ratios de liquidité de Bâle III, le Groupe des Gouverneurs

de Banques Centrales et des responsables du contrôle bancaire (GHOS), instance de

gouvernance du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, a adopté à l’unanimité les projets

d’amendements proposés par le Comité de Bâle après intégration des observations

formulées par l’industrie bancaire et les superviseurs.

Au niveau européen, la mise en application des normes de liquidité édictées dans le cadre

de Bâle III était subordonnée à l’adoption par la Commission Européenne de la Capital

Requirements Directive IV /Capital Requirements Regulation (CRD IV /CRR). Cette directive

qui permet de transposer les normes mondiales en droit européen et de les rendre

obligatoires pour toutes les banques de l’Union Européenne est entrée en vigueur le 17 juillet

2013.

Calendrier d’adoption des nouveaux ratios de liquidité de Bâle III

Publication du

document de

consultation du Comité

de Bâle

Publication du

document final du

Comité de Bâle dit Bâle 3

Publication prévue du

projet CRD4 de la

Commission européenne

Fin de la période

d’observation du LCR

Entrée en vigueur

prévue du LCR

Fin de la période

d’observation du NSFR

Entrée en vigueur

prévue du NSFR

12/09 12/10 Été 2011 BCBS : mi-2013

UE : fin 2013 01/15

BCBS : mi-2016

UE : fin 2016 01/18

1er QIS complété par des remises en septembre

(données au 31 décembre 2009)

2ème QIS (données

au 31 décembre

2010)

3ème QIS (données

au 31 décembre

2011)

Poursuite probable des QIS

après 2011

07/10 06/11 Automne 2011

Source : ACP

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

37

3.1 – Présentation détaillée des ratios de liquidité de Bale III

Les ratios de liquidité (LCR et NSFR) ont été la grande nouveauté des dispositifs prudentiels

de Bâle qui étaient avant la crise davantage axés vers les instruments de couverture des

risques de solvabilité et de marché. L’urgence d’accélérer le processus d’harmonisation des

normes de liquidité au plan international s’est donc imposée avec la survenance de la crise

financière internationale qui est d’abord et avant tout une crise de liquidité. Le calendrier

d’application des deux normes place l’entrée en vigueur du LCR avant celle du NSFR. En

outre, les règles qui s’appliquent au LCR étant à ce jour plus développées, ces deux normes

seront donc successivement présentées selon leur chronologie d’entrée en vigueur.

3.1.1 – Le liquidity coverage ratio (LCR)

Le LCR est un ratio qui permet de mesurer la capacité d’un établissement à faire face à un

choc de liquidité inattendu qui se traduirait par une augmentation soudaine des flux de

paiements sortants dans un horizon de 30 jours.

Ce type de choc de liquidité peut être causé par des raisons internes provoquant une perte

de confiance à l’égard de l’établissement et externes résultant par exemple de tensions sur

les marchés. Afin d’amortir ces chocs, l’établissement doit disposer de suffisamment d’actifs

liquides de haute qualité (High quality liquid assets - HQLA) pouvant être mobilisés en cas

d’urgente nécessité pour face aux engagements à très court terme. Au sens du Comité de

Bâle, les actifs à ranger dans cette catégorie sont « ceux qui sont susceptibles de conserver

une valeur substantielle en période d’illiquidité de marché ». Ainsi, le montant de l’encours

des actifs liquides de haute qualité qui se situe au numérateur du ratio doit entièrement

couvrir celui des sorties nettes de trésorerie potentielles que l’établissement aurait dû

effectuer dans un délai de 30 jours si elle se trouvait en situation de choc de liquidité. La

formule du LCR est donc présentée ci-après :

Encours des actifs liquides de haute qualité >=100%

Total des sorties de trésorerie nettes sur les 30 jours

Il convient de s’interroger sur la nature, les critères et les hypothèses de choix des actifs

liquides pouvant être considérés de « haute qualité » pour être pris en compte au

numérateur du ratio. A cet égard, le Comité de Bâle a retenu deux catégories d’actifs :

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

38

les actifs liquides de niveau 1 qui sont pris en compte pour leur valeur de marché

sans décote ni plafond. Il s’agit de :

o l’encaisse de l’établissement,

o les réserves à la banque centrale,

o les titres souverains ou assimilés (incluant les titres émis ou garantis par des

Etats ou Organismes publics, banques centrales ou banques multilatérales de

développement) bénéficiant d’une pondération de risque de 0% au sens de

Bâle II (notés au moins AA). Ces titres doivent être émis par le pays ou dans

la devise ou le risque de liquidité est pris.

les actifs liquides de niveau 2 qui sont pris en compte à condition d’être plafonnées

à 40% de l’encours total des HQLA et après application de certaines décotes. Cette

catégorie d’actifs est elle-même décomposée en 2 sous-catégories :

o niveau 2A : les titres de dette publique représentatifs de créances sur – ou

garantis par – des émetteurs souverains et assortis d’une pondération de 20%

au sens de Bâle II, les obligations sécurisées (covered bonds) et les

obligations d’entreprises non financières notées au moins AA. Ces titres

doivent subir une décote de 15%,

o niveau 2B : les titres adossés à des créances hypothécaires (Residential

Mortgage Backed Securities – RMBS) notées au moins AA et assortis d’une

décôte de 25%, les titres de créances émis par les entreprises non financières

(billets de trésorerie) notés au moins BBB avec l’application d’une décote de

50% et certaines actions avec une décote de 50%.

Au titre des critères additifs, le Comité de Bâle recommande que les actifs retenus doivent

« être échangés sur des marchés actifs (repo ou achat/vente), être libres de tout

engagement et effectivement disponibles pour l’établissement16 »

Au dénominateur du ratio sont enregistrés les décaissements nets auxquels l’établissement

devra faire face l’établissement au cours des 30 premiers jours de choc de liquidité. Ces

décaissements correspondent aux sorties de trésorerie dont sont soustraits les entrées de

trésorerie qui sont toutefois limitées à 75% des sorties et ce quel que soit le profil du risque

de liquidité de l’établissement. Ce plafonnement permet d’éviter que les établissements ne

se basent sur les entrées pour respecter les exigences de liquidité. Chaque catégorie

d’entrée et de sortie est pondérée en fonction de leur degré de retrait ou de disponibilité en

période de stress.

16

Réglementation de la liquidité et mise en œuvre de la politique monétaire, Bulletin mensuel de la Banque Centrale

Européenne, Avril 2013, pages 73 à 90

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

39

L’examen de la formule, en particulier de son dénominateur suscite la question de savoir

quelles sont les entrées dont l’établissement pourrait bénéficier en période de stress de

liquidité ? Il s’agit en l’occurrence des entrées contractuelles notamment les

remboursements de prêt, et les retraits de dépôts à vue constitués par l’établissement

auprès de confrères, auxquels est appliquée une décote au titre de la production nouvelle. A

cet égard, le montant des remboursements des crédits aux particuliers, aux PME et aux

entreprises subit une décote de 50% parce que l’on considère que durant les 30 jours de

stress, la production nouvelle ne dépasserait pas 50% des remboursements contractuels. Le

montant des remboursements des institutions financières subit cependant une décote de

100%.

Par ailleurs, les hypothèses relatives aux chocs de liquidités sont basées essentiellement

sur deux critères :

le type de contrepartie pour les financements non sécurisés qui permet

d’apprécier la réaction probable de la contrepartie selon sa sensibilité au risque de

crédit subi par l’établissement et à la probabilité qu’elle lui retire soudainement ou ne

lui renouvelle pas ses financements en cas de choc de liquidité voire de risque de

réputation. En fonction du type de contrepartie, des pondérations sont appliquées

pour estimer la probabilité de reconduction ou non des financements dont

bénéficierait l’établissement en cas de choc de liquidité sur un mois ;

le caractère sécurisé ou non des financements dont bénéficie l’établissement.

Si l’on considère que la reconduction des financements dont bénéficie l’établissement

dépend de la qualité des actifs donnés en collatéral, les actifs n’étant pas

suffisamment liquides ne donnent donc pas lieu à une reconduction du financement.

Toutefois, les financements accordés par les organismes publics comme les banques

centrales sont exceptionnellement reconduits à 75% quand bien même les actifs

présentés en garantis ne sont pas suffisamment liquides au sens du LCR. Cette

exception est une manière de soutenir la trésorerie de l’établissement en période de

stress de liquidité.

Le tableau suivant présente les taux de reconduction du LCR pour le financement de banque

centrale et le financement interbancaire.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

40

Tableau 1 : Taux de reconduction du LCR pour le financement de banque centrale et le financement interbancaire

Type de

financement

Financement de banque

centrale adossé à des HQLA ou

des actifs autres que HQLA

Financements de gros adossés à des actifs de

niveau 1

Financements de gros adossés à des actifs de

niveau 2A

Financements de gros adossés

à des RMBS (actifs de

niveau 2B)

Financements de gros adossés d'autres actifs de niveau 2B

Financements de gros non garantis ou

adossés à des actifs autres que HQLA

Taux de

reconduction 100 100 85 75 50 0

Source : BCE

3.1.2 – Le Net Stable Funding Ratio (NSFR)

Le NSFR est un ratio qui permet de mesurer la qualité de la transformation exercée par

l’établissement assujetti en réduisant l’asymétrie des échéances entre les actifs et les passifs

à un horizon d’un an. Pour ce faire, les besoins de financements stables (Required Stable

Funding, ASF) de l’établissement doivent être entièrement et à tout moment couverts par ses

ressources stables (Available Stable Funding, ASF). A l’inverse du LCR qui ne prend en

compte que certains éléments du bilan, le NSFR a une approche plus globale en termes de

prises en compte d’éléments de bilan.

Au numérateur du ratio, une pondération des éléments des ressources stable est effectuée

en fonction de leur stabilité. Il convient cependant de mentionner que la stabilité de chaque

élément varie en fonction du produit ou de la contrepartie concernée.

Au dénominateur, les éléments du bilan et du hors bilan sont pondérés par ordre de liquidité

décroissant en fonction du niveau de liquidité des actifs considérés. En effet, les actifs ayant

les maturités les plus longues ont une pondération plus élevée alors que les actifs les plus

liquides auront une pondération proche de 0%. La formule du ratio est présentée ci-après :

Ressources stables >=100%

Besoins de financement stables

Au total, le Communiqué du 6 janvier 2013 du Groupe des Gouverneurs de Banques

Centrales et de Responsables de Contrôle Bancaire (GHOS) a montré la prise en compte

des observations formulées par l’industrie bancaire et les superviseurs nationaux sur la

version présentée en 2010. Les révisions portent essentiellement sur :

l’élargissement de la gamme des HQLA éligibles au numérateur du ratio ;

la mise en application graduelle de la norme ;

la possibilité d’utiliser l’encours d’actifs liquides en période de chocs de liquidités ;

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

41

la poursuite des travaux entrepris par le Comité de Bâle sur l’interaction entre le LCR

et la politique monétaire.

Le communiqué du GHOS indique en effet que l’entrée en vigueur du LCR serait maintenue

au 1er janvier 2015. Cette entrée en vigueur se fera cependant de manière graduelle avec

une norme minimale qui sera initialement fixée à 60% pour évoluer annuellement de 10

points de pourcentage et atteindre 100% au 1er janvier 2019. Cette approche graduelle a

pour but selon le GHOS de « faire en sorte que la mise en œuvre du LCR ne perturbe en

rien le processus de renforcement des systèmes bancaires, ni le financement continu de

l’activité économique ». En outre, le GHOS permet aux banques de passer sous le seuil

minimal requis en période de tensions en précisant qu’il appartiendra aux Autorités

nationales de contrôle bancaire d’ajuster leur recommandations et instructions en fonction de

la situation des établissements. Par ailleurs, après accord obtenu sur le LCR, le Comité de

Bâle va consacrer ses travaux des deux prochaines années à un examen approfondi du

NSFR.

3.2 – Implications des normes de liquidité sur les acteurs du secteur financier

Dans le souci de mettre en place des normes consensuelles qui prendraient en compte

l’ensemble des préoccupations des acteurs du secteur financier, le Comité de Bâle pour le

contrôle bancaire a eu une démarche consultative. Ainsi, les premières moutures des projets

de normes publiées en décembre 2009 ont été adressées aux acteurs et ont fait l’objet d’une

étude d’impact quantitatif (QIS) en juillet 2010 complétée par des remises complémentaires

en septembre 2010. Ainsi, l’adoption des normes de liquidité de Bale III auront forcément

des implications pour les banques, les superviseurs nationaux et les Banques Centrales.

3.2.1 – Implications pour les banques et établissements de crédit

Dans le cadre de procédure d’adoption des nouveaux ratios de liquidité, les banques

françaises, en tant qu’intervenants majeurs du financement de l’économie et du

fonctionnement des marchés, ont été consultées par le Comité de Bâle sur le contenu de la

réforme. A ce titre, la Fédération bancaire française (FBF) qui réunit l’ensemble des banques

de l’Hexagone a produit le 16 avril 2010, une note dans laquelle, elle a formulé ses

observations quant aux propositions du CBCB en matière de régulation du risque de

liquidité.

Sur la base de la première mouture introduite par le Comité de Bâle, la FBF indique que les

nouvelles normes de liquidité « aurait un impact disproportionné, incompatible avec ce que

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

42

peut absorber le secteur bancaire français sans mettre en péril sa capacité à financer

l’économie17 ». En outre, l’interprofession française avait estimé que « l’approche consistant

à fonder cette régulation avant tout sur deux ratios définis de façon identique pour tous les

acteurs est contestable. La régulation devrait davantage reposer sur les modèles internes,

prévus par les régulateurs, ce qui d’une part permettrait de mieux tenir compte des

spécificités des différents modèles bancaires, d’autre part favoriserait une meilleure mesure

et un meilleur encadrement des risques de liquidité ». Le document poursuit que « les ratios

proposés relèvent d’une approche excessivement conservatrice, aussi bien sur les

ressources mobilisables que sur les emplois prévus18 ».

Outre ces réserves générales, la FBF avait formulé ses observations spécifiques sur chacun

des ratios de liquidité proposé par le Comité de Bâle.

Au sujet du LCR, la FBF avait souhaité l’élargissement de l’éventail des actifs liquides

mobilisables. En effet, la structure interprofessionnelle estimait qu’en situation de crise

systémique, les actifs éligibles au refinancement de la banque centrale seraient forcément

mobilisables. Elle ajoute que certains actifs comme les actions, qui sont d’ailleurs restées

liquides pendant la crise financière de 2007-2008, méritaient d’être intégrées dans le calcul

du ratio. De plus, l’exclusion des titres émis par les institutions financière suppose la non-

prise en compte du marché interbancaire. Au dénominateur, la FBF relevait que les

hypothèses de sorties nettes de trésorerie conservatrices.

S’agissant du NSFR, l’analyse d’impact effectué par les FBF sur le cinq plus grandes

banques françaises a montré que le ratio était trop restrictif. En effet, en souhaitant réduire le

risque de transformation, l’interprofession française indiquait que le NSFR, tel qu’il était

présenté initialement par le Comité de Bâle éliminait toute possibilité de transformation, qui

se trouve être le cœur de métier de l’activité bancaire. Il s’y ajoute que l’intégration des

emplois à moins d’un an au niveau du calcul des emplois stables, en raison du fait qu’ils sont

systématiquement renouvelés, induirait une transformation inverse. En effet, les banques se

trouveraient dans une situation où elles financeraient des emplois de moins court terme que

les ressources, ce qui provoquerait un recul de l’intermédiation bancaire qui aurait à terme

un impact négatif sur le financement de l’économie.

Par ailleurs, les banques françaises avaient souhaité que les ratios de liquidité soient exigés

à un niveau consolidé plutôt que par filiale afin de pouvoir « optimiser l’allocation des

17

Réforme des règles prudentielles, Position des banques françaises sur les projets en cours, Fédération Bancaire Française,

16 avril 2010 18

Bâle III : La Position de la FBF, Fédération Bancaire Française, Présentation Powerpoint, 20 avril 2010.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

43

ressources et ne pas revenir sur les principes de la libre circulation des capitaux en

Europe. »

Le Comité de Bâle a été attentif aux observations formulées par les banques et les Autorités

de contrôle dans la mesure où les ratios de liquidité publiés en janvier 2013 ont été assouplis

et leur mode de calcul a été jugé plus réaliste par le secteur bancaire.

Stratégies d’ajustement des banques en vue de respecter le LCR19

Les banques de la zone euro qui ne sont pas encore en conformité avec les exigences du

LCR peuvent développer plusieurs stratégies afin de faire évoluer le ratio. Une étude de la

Banque Centrale Européenne développe six stratégies permettant aux banques de s’ajuster

pour se mettre en conformité avec les exigences du LCR. Ainsi, les mesures suivantes

peuvent être prises :

la restructuration de l’actif du bilan par :

o l’augmentation du portefeuille d’actifs liquides de haute qualité (HQLA) de

niveau 1 (titres de dette émis par des organismes publics) ou de niveau 2

(obligations d’entreprise, obligation sécurisées, RMBS ou actions) par la vente

d’autres actifs,

o l’augmentation des réserves constituées auprès de la banque centrale par un

emprunt auprès de celle-ci garantie par des actifs non HQLA ;

la restructuration du passif du bilan par :

o l’allègement des flux sortants sur une période de 30 jours en substituant un

financement de marché à plus long terme au financement de marché à très

court terme,

o l’allègement des flux sortants sur une période de 30 jours en substituant un

financement par la banque centrale au financement de marché à court terme.

Les quatre stratégies susvisées sont internes aux banques qui souhaitent ajuster leur bilan. Il

existe également deux autres stratégies qui font intervenir la banque centrale. Il reste

entendu que les banques peuvent associer plusieurs stratégies dans le cadre de leur

ajustement.

Afin de mieux expliquer l’impact des stratégies, la BCE a présenté un bilan-type d’une

banque ne respectant pas les exigences du LCR. Ce bilan est conçu de manière à afficher

19

Réglementation de la liquidité et mise en œuvre de la politique monétaire, Bulletin mensuel de la Banque Centrale

Européenne, Avril 2013, pages 73 à 90

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

44

les principales rubriques entrant dans le calcul dudit ratio. Sur la base de ce bilan de départ

dont le calcul du LCR ressort à 91,2%, l’application des différentes stratégies d’ajustement a

permis d’apprécier l’impact sur l’évolution du bilan et la mise en conformité avec le LCR (Cf.

annexe II).

A – Restructuration de l’actif du bilan

La première stratégie d’ajustement pour une banque consiste à augmenter son encours

d’HQLA. Si une banque substitue ses « d’autres actifs » et achète par des HQLA de niveau 1

comme les emprunts publics, elle peut atteindre un LCR de 100,4%. Il reste entendu qu’elle

pourrait également augmenter ses HQLA de niveau 2. Toutefois, compte tenu des décotes

appliquées, les volumes devraient être légèrement plus importants.

Dans la deuxième stratégie de restructuration de l’actif, la banque peut également accroître

le montant des réserves constituées à la banque centrale par en augmentant ses emprunts

auprès de celles-ci 20, en présentant des actifs non HQLA comme garantie21. On considère

que l’établissement accroit le niveau de son emprunt auprès de la banque centrale d’une

unité et enregistre la liquidité ainsi obtenue dans la facilité de dépôt de la banque centrale

(cf. tableau B – annexe II). Cette stratégie permettrait d’augmenter le bilan de la banque

d’une unité et de porter le LCR à 100,4%.

Si l’on considère que la banque centrale augmente ses opérations de refinancement et la

facilité de dépôt (cf.tableau C – annexe II) comme c’est le cas en période de crise ou de

tension de liquidité, cela peut avoir un effet positif sur le LCR des banques souscriptrices qui

augmenteraient leurs réserves et amélioreraient de facto leur ratio. La facilité de prêt

marginal pourrait autrement être utilisée.

B - Restructuration du passif du bilan

L’ajustement peut également être effectué par le passif. Il consisterait à réduire le volume

des sorties nettes de trésorerie sur une période de 30 jours calendaires. Si l’on considère

que l’établissement prolonge les échéances de ses emprunts interbancaires non garantis de

durée inférieures à 30 jours en les portant à une durée supérieure (Cf. tableau D – annexe

II), elle pourra donc porter son LCR à 100,4%.

20

L’échéance de l’opération de refinancement de la banque centrale n’a aucune incidence dans la mesure où le taux de

reconduction pour le refinancement auprès de la banque centrale est de 100%. Ainsi, le LCR l’échéance dans le cadre du refinancement n’est pas un facteur déterminant dans la stratégie d’ajustement de la banque. 21

L’éventail des collatéraux acceptés par la BCE est plus large que la gamme d’HQLA entrant dans le calcul du LCR. A titre exemple, les obligations bancaires non sécurisées, les titres adossés à des actifs (hors RMBS) et les créances privées ne font pas partie des HQLA, mais sont admis par la BCE. En effet, l’on considère que la banque détient suffisamment de garanties non HQLA pour couvrir ses besoins supplémentaires de liquidités auprès de l’Eurosytème.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

45

Dans la deuxième stratégie d’ajustement par le passif (b) (ii) , la banque prolonge l’échéance

son emprunt interbancaire non garanti à moins de 30 jours en se refinançant auprès de la

banque centrale avec des actifs HQLA (cf. tableau E – annexe II)22. Cette stratégie lui permet

également d’obtenir un LCR de 100,4%.

Au niveau de la banque centrale, l’aboutissement de cette stratégie suppose une

augmentation d’une unité des opérations de refinancement (cf. tableau F – annexe II).

Au total, les banques mettront en œuvre forcément une des stratégies recensées par la

BCE, ou combineront plusieurs d’entre elles pour se mettre en conformité avec le LCR. Le

choix de la stratégie dépendra certainement du profil de risque de liquidité de chaque

établissement qui est lui-même étroitement lié à son type d’activité et/ou ses domaines

d’activités stratégique. Certaines stratégies seront toutefois plus difficiles à mettre en œuvre

que d’autres. Ainsi, il ne sera pas aisé de prolonger des échéances de prêts interbancaires

qui pourraient d’ailleurs être interprété comme un indicateur d’alerte. En tout état de cause,

la plus avantageuse serait d’avoir recours au financement de banque centrale en utilisant les

actifs non HQLA comme garanties. Toutefois, si elle est intéressante dans un contexte de

taux planchers, elle peut s’avérer couteuse en cas de relèvement des taux.

3.2.2 – Implications pour les banques centrales et/ou pour la politique

monétaire

La mise en œuvre de la politique monétaire et la réglementation de la liquidité sont

étroitement liées. Cette corrélation est fondée principalement sur trois raisons principales.

D’abord, la réglementation de la liquidité a forcément un impact sur le comportement des

établissements assujettis lesquels déterminent la configuration et le fonctionnement des

marchés monétaires. A ce titre, elle permet d’orienter les actions mises en œuvre dans le

cadre de la politique monétaire.

Ensuite, la mise en œuvre de la politique monétaire étant essentiellement axée sur la

régulation de la masse monétaire optimale pour l’économie par l’apport ou le retrait de

liquidités au système bancaire, il y a forcément un lien entre les exigences de liquidité et

l’action de la banque centrale. Au sein de la zone euro, les banques sont tributaires de la

politique monétaire de la BCE dans la mesure où dans un contexte de post crise elles

évoluent davantage dans un contexte de déficit de liquidité et se font refinancer auprès de

22

Concernant la stratégie(a) (ii), l’on considère que la banque détient suffisamment de garanties non HQLA pour couvrir ses

besoins supplémentaires de liquidités auprès de l’Eurosytème. .

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

46

l’Institut d’émission. C’est la raison pour laquelle, l’évolution des taux directeur et en

particulier, le taux de refinancement constitue un véritable enjeu pour les banques. A ce titre,

c’est, outre la masse de liquidité injectée, l’un des principaux instruments de la politique

monétaire. La réglementation de la liquidité a donc une influence sur la politique monétaire.

Enfin, en sa qualité de prêteur en dernier ressort, la banque centrale apporte aux banques

confrontées à des chocs de liquidités soudains, la liquidité nécessaire à leur stabilité et à la

poursuite de leurs opérations. A ce titre, les banques centrales sont indispensables dans

l’exercice du métier de transformation bancaire et de financement de l’économie qui sont

assis sur la disponibilité d’une liquidité optimale.

Au regard de ces interactions, il est évident que la réglementation de la liquidité bancaire et

la mise en œuvre de la politique monétaire ne peuvent être abordées séparément. A cet

égard, il serait intéressant pour les banques centrales de mesurer l’impact de la

réglementation de la liquidité sur le comportement des établissements assujettis et le

fonctionnement des marchés monétaires.

3.2.2.1 – L’incidence des ratios de liquidité de Bâle III sur les marchés monétaires

La mise en œuvre de la politique monétaire par la BCE est essentiellement basée sur le

pilotage des taux d’intérêt à court terme. Avec l’entrée en vigueur du LCR, il importe

d’évaluer son interaction avec chacun des compartiments du marché monétaire.

a/ Incidences sur le compartiment non garanti

Si l’on considère qu’un choc de liquidité subi par un établissement de crédit se traduit par un

tarissement des prêts interbancaires dont elle bénéficiait compte tenu de la perte de

confiance des autres banques, les financements interbancaires en blanc arrivant à échéance

ne sont pas reconduits.

Les opérations interbancaires non garanties ayant une période inférieure à 30 jours, compte

tenu de leur nature et de leur maturité, ont forcément une incidence sur l’évolution du LCR,

particulièrement lorsque le ratio n’est pas respecté. En revanche, lorsque la norme du LCR

est initialement respectée, les opérations interbancaires infra-mensuelles n’ont pas d’impact

sur le ratio dans la mesure où elles ont un effet similaire sur le numérateur comme au

dénominateur. Prenons l’exemple de deux banques A et B qui interviennent sur le même

marché monétaire. Si la Banque A octroie à la banque B un prêt en blanc à une maturité

d’une semaine, la banque A enregistre une baisse de ses actifs liquides, donc du

numérateur du LCR. Dans le même temps, les sorties de trésorerie baissent également sous

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

47

l’effet du remboursement du prêt (à condition que le plafond de 75% des sorties ne soit

atteint). Au niveau de la banque B, le LCR demeure également invariable puisque ses actifs

liquides augmentent avec l’enregistrement du prêt au même titre que les sorties qui

s’accroissent du fait du décaissement contractuel devant intervenir la semaine suivante

(moins de 30 jours).

Afin de se conformer aux exigences du LCR, les banques qui ne respectent pas le ratio

doivent prendre les mesures en vue de raccourcir les échéances de financement de manière

à les rendre négociables et liquides dans un délai inférieur à un mois. Ainsi, elles peuvent

substituer les financements à plus d’un mois à des financements à court terme mais

également remplacer les actifs illiquides en HQLA au sens de la définition du Comité de

Bâle. Si le montant de l’encours des HQLA demeure constant, la banque devra réduire sa

proportion de financement à court terme. En effet, la prolongation de l’échéance de

financement conduirait à réduire le montant des opérations sur le marché interbancaire en

blanc. Toutefois, compte tenu des contraintes de constitution de réserves obligatoires auprès

de la banque centrale, les banques devront poursuivre les opérations de court terme non

garanties.

Pour ce qui a trait aux opérations non garanties à plus d’un mois, l’impact sur le numérateur

et le dénominateur du ratio est différent. Ainsi, sur une échéance de six mois, lorsque la

banque A octroie un prêt interbancaire en blanc à la banque B, le numérateur de la banque

A diminue à hauteur du montant prêté. En revanche, le dénominateur demeure inchangé

dans la mesure où le remboursement du prêt intervient à plus de 30 jours et ne donc être

considéré comme une entrée contractuelle. Il en résulte donc une dégradation du ratio. Dans

le même temps, le LCR de la banque B s’améliore dans les mêmes proportions en raison de

l’amélioration de son numérateur qui enregistre l’entrée de nouvelles liquidités.

Ainsi, sur le long terme ou tout au moins les échéances supérieures à 30 jours, la mesure de

l’impact des opérations interbancaires en blanc sur l’évolution du ratio n’est pas aisée. En

effet, au regard du dernier exemple, l’incidence sur le LCR n’encourage pas les banques à

accorder des prêts interbancaires non garantis sur des échéances supérieures à 30 jours. Il

n’en demeure pas moins que certaines banques justifiant d’un LCR suffisamment

« confortable » pourront engager des opérations à long terme sur le compartiment non

garanti si celles-ci s’avèrent attractives. A cet égard, ce compartiment pourrait devenir à

termes, un « marché secondaire » des HQLA pour échanger des actifs nécessaires au

respect du ratio. Cette perspective permettra aux banques de développer le marché

interbancaire à long terme, en particulier lors des périodes de stress, afin que chacune

d’entre elles puisse respecter le ratio. Le compartiment non garanti à long terme pourrait

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

48

également connaître un dynamisme à mesure que l’asymétrie d’information entre prêteurs et

emprunteurs se réduira. D’ailleurs, le développement du marché interbancaire non garanti

est subordonné à deux conditions sine qua non à savoir :

la réduction voire la suppression de l’asymétrie d’information entre banques ;

l’existence d’un nombre suffisamment élevé de banques présentant un LCR

« confortable » ou le respectant a minima.

Toutefois, la configuration actuelle du marché n’est pas favorable au développement des

prêts à long terme. En effet, si la plupart des banques de la zone euro respectent les

exigences LCR tel qu’il a été présenté par le Comité de Bâle dans la version du 6 janvier

2013, certains établissements poursuivent les efforts d’ajustements pour améliorer leur profil

de risque de liquidité et se mettre en conformité avec lesdites exigences. L’approche

graduelle choisie par le GHOS pour le respect du ratio offre davantage de temps et de

flexibilité pour les banques qui présentent encore des difficultés.

Par ailleurs, les stratégies d’ajustement en vue de respecter le LCR pourraient entraîner une

baisse des volumes échangés sur le compartiment non garantis à court terme. Cette

situation pourrait impacter à la baisse le volume global du compartiment non garanti, si elle

n’entraîne pas une hausse du compartiment à long terme. Ainsi, le LCR pourrait induire une

baisse des volumes des financements en blanc du marché monétaire et altérer ses fonctions

dans le cadre de la politique monétaire. Il pourrait en résulter une volatilité des taux qui

surtout sur le marché à long terme. Ainsi, une baisse des volumes sur le compartiment non

garanti combinée à la volatilité des taux freinerait la correcte transmission de la politique

monétaire.

Concernant les prix, les cas traités plus haut, s’ils se confirment induiront une segmentation

du marché monétaire en blanc entre les échéances inférieures à 30 jours et celles plus

longues. En outre, le marché à plus 30 jours devenant très attractif pour le respect du LCR, il

en résultera certainement l’application d’une prime de terme supplémentaire avec des taux

plus élevés sur le segment du compartiment en blanc à long terme. Toutefois, le respect du

LCR et, par ricochet, la réduction du risque de liquidité se traduirait par une baisse de la

prime de risque de liquidité supportée par les banques emprunteuses. Ces cas de figure ne

seront cependant vérifiables qu’après entrée en vigueur du ratio.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

49

b/ Incidences sur le compartiment garanti

A l’inverse des prêts en blanc de très courte maturité, les financements interbancaires

garantis ayant une échéance inférieure à 30 jours ont forcément une incidence sur le LCR.

Cette incidence dépend cependant de la prise en compte de plusieurs paramètres

notamment :

le niveau initial du LCR ;

le type de garanties mobilisées ;

les décotes appliquées ;

la prise en compte de certaines contraintes.

Au même titre que les opérations à court terme terme, les financements garantis ayant une

échéance supérieure à 30 jours ont également un impact sur le niveau du LCR. Par

exemple, dans le cadre d’une opération de pension livrée, un établissement peut recevoir à

titre de collatéral des actifs autres que des HQLA. Cela se traduira donc dans son bilan par

une diminution du numérateur du LCR sous l’effet de la substitution d’actifs HQLA par des

actifs non HQLA. Le dénominateur demeure cependant invariable puisque le remboursement

qui aurait pu constituer une entrée contractuelle intervient dans un horizon supérieur à 30

jours. In fine, pour les banques prêteuses, les opérations à plus de 30 jours sur le

compartiment garanti du marché monétaire adossés sur des collatéraux non HQLA

entraînent une diminution du ratio. Les établissements emprunteurs verront leur ratio

s’améliorer.

Les décotes pratiquées dans le cadre des prêts garantis peuvent également avoir un impact

sur la détermination du LCR. Ainsi, le LCR de l’établissement prêteur s’améliore lorsqu’il

applique une décote supérieure à la norme sur les garanties présentées par l’établissement

emprunteur alors que l’inverse se produit pour ce dernier.

Au total, l’analyse comparative de l’incidence du LCR sur les deux compartiments (garanti et

non garanti) du marché monétaire fait apparaître que l’entrée en vigueur du ratio pourrait

orienter le marché vers une nette préférence du compartiment des prêts garantis au

détriment de celui des prêts en blanc. Un tel cas de figure pourrait contribuer à creuser

l’écart entre les taux des deux compartiments. Par conséquent pour respecter le ratio, les

établissements bancaires ne respectant pas les exigences du LCR privilégieront les

financements à plus de 30 jours assortis de garanties non HQLA. Cette opération aurait

pratiquement le même effet que les emprunts à long terme sur le compartiment non garanti.

Il reste entendu que cette opération serait moins avantageuse en termes de coût pour les

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

50

banques emprunteuses mais elle peut contribuer à améliorer leur niveau initial de LCR

comme indiqué plus haut. Outre le taux, les établissements emprunteurs subiraient

également de fortes décotes appliquées sur leurs actifs.

En définitive, l’entrée en vigueur du LCR se traduira par la préférence du compartiment

garantie au détriment du compartiment en blanc, comme cela a été le cas depuis le début de

la crise financière. Cette situation pourrait ralentir la fluidité du marché interbancaire même si

elles permettent de réduire le risque de liquidité.

3.2.2.2 – L’incidence des ratios de liquidité de Bâle III sur les instruments de politique

monétaire

Dans le cadre des stratégies d’ajustement mises en œuvre par les établissements de crédit

en vue de se mettre en conformité avec les exigences du LCR, les banques ont la double

possibilité d’agir soit sur le numérateur du ratio en augmentant les HQLA, soit sur le

dénominateur en diminuant les flux sortants, ou de combiner les deux méthodes. La politique

monétaire mise en œuvre par la banque centrale et les opérations de refinancement qui en

découlent peuvent également influencer le niveau du ratio.

A cet égard, la participation d’une banque mobilisant des garanties non HQLA à une

opération de refinancement de la banque centrale se traduit par une amélioration de son

LCR. En effet, les remboursements découlant des opérations de refinancement auprès de la

banque centrale ne sont pas considérés comme des sorties car bénéficiant d’un taux de

reconduction de 100%. Il s’y ajoute que la présentation d’un collatéral non HQLA n’a aucun

effet sur le numérateur. En cas de mobilisation d’HQLA au titre des garanties, l’effet et nul

sur le numérateur dans la mesure où l’augmentation induite par l’entrée de cash sera

neutralisée par la réduction des HQLA. La fixation du taux de reconduction des opérations

de refinancement à 100% assure une transparence et une égalité de traitement entre les

banques centrales qui mettent en œuvre la politique par des prises en pension livrée et

celles qui procèdent à des achats fermes.

Outre le taux repo, les banques qui ne présentent pas un profil de risque de liquidité crédible

ou qui ne disposent pas de suffisamment d’HQLA peuvent se refinancer par la facilité de prêt

marginal pour améliorer leur LCR. Bien entendu, cette méthode induit un coût d’opportunité

surtout en période de fonctionnement normal des marchés monétaires puisque ce taux est

toujours supérieur au taux repo. Le recours à ce type de refinancement doit donc être utilisé

exceptionnellement en situation d’extrême urgence.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

51

S’agissant de la gestion des excédents de liquidité, les banques peuvent effectuer des

dépôts interbancaires ou constituer des réserves auprès de la banque centrale. Cette

seconde option présente le double avantage de bénéficier du taux de facilité de dépôt de la

banque centrale mais aussi d’être éligible aux HQLA. Cependant, les deux types de dépôts

se neutralisent dans la mesure où la constitution réserves auprès de la banque centrale

permet d’améliorer le numérateur du LCR alors que le dépôt interbancaire diminue le

numérateur d’égal montant. L’incidence est donc pratiquement similaire.

L’enjeu pour les trésoriers des banques et les gestionnaires de bilan serait donc de disposer

de ressources de la banque centrale en présentant un collatéral non HQLA. En effet, comme

indiqué plus haut, la fourniture de garantie HQLA n’a aucun effet sur le niveau du ratio.

Toutefois, une telle démarche doit prendre en compte l’évaluation du coût d’opportunité

relatif à l’obtention de liquidités à un coût plus compétitif. En effet, certains établissements

disposent d’un éventail d’actifs non HQLA mais éligibles au refinancement de la BCE. Ces

garanties seront donc présentées aux opérations de refinancement au cas où lesdits

établissements ne parviennent pas à se refinancer sur les compartiments du marché

monétaire.

En revanche, il reste entendu que cette dernière remarque sera plus pertinente dans le

cadre d’une politique monétaire mise en œuvre « hors crise » où l’éventail des garanties

serait moins élargi et les taux seront orientés à la hausse dans un contexte de retour à la

normale.

3.2.2.3 – L’incidence des ratios de liquidité de Bâle III sur la fonction de prêteur en

dernier ressort

L’objectif principal de la réglementation de la liquidité est de fournir aux établissements

assujettis les moyens d’amortir les chocs de liquidité, de renforcer leur résilience en période

de stress et d’éviter les coûts d’opportunité en bradant leurs actifs. Aussi, la réglementation

vise-t-elle à prévenir l’aléa moral qui s’est produit lors de la crise financière et qui a obligé les

Etats et/ou les Banques Centrales à procéder à des renflouements sans précédent. En effet,

cette crise qui a induit la perte de confiance au niveau des acteurs du marché monétaire a

pratiquement transformé les banques centrales en « prêteur de premier ressort » alors que

dans un contexte de fonctionnement normal des marchés, elle devrait être le prêteur en

dernier ressort.

La mise en place des nouveaux ratios de liquidité dans le cadre de Bâle III répond à ces

objectifs et en particulier de renvoyer les banques centrales à leur fonction de prêteur en

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

52

dernier ressort. Cette fonction est étroitement liée à la réglementation de liquidité en vigueur

en ce sens que les établissements assujettis tiennent compte des contraintes et opportunités

pour définir leur stratégies de financement et les mettre en œuvre. Il s’y ajoute que le

financement par la banque centrale fait partie intégrante de la réglementation de la liquidité.

Cependant, il convient de relever que les objectifs visés sont légèrement différents, tout au

moins sur l’horizon. Si la réglementation de la liquidité permet d’assurer une stabilité à long

terme des établissements assujettis et du secteur financier, la fonction de prêteur en dernier

ressort concerne plutôt le très court terme pour aider les banques à surmonter les périodes

de stress. A cet égard, la perception de la BCE sur les ratios de liquidité introduits dans le

cadre de Bâle III est que l’efficacité de la réglementation de la liquidité doit se mesurer par la

raréfaction voire l’inexistence des interventions de la banque centrale. Elle a d’ailleurs

suggéré que le taux de reconduction des refinancements de la banque centrale à 0% afin de

réduire la dépendance du système bancaire à ce type de ressources. Bien entendu, il y aura

toujours des banques en difficultés que la banque centrale serait obligée d’accompagner

mais tout au moins, une application rigoureuse des normes de liquidité devrait permettre à

terme une réduction des interventions de l’Institut d’émission.

Comme indiqué plus haut, les interactions entre la réglementation de la liquidité et la fonction

de prêteur en dernier ressort seront davantage appréciables dans le cadre d’une politique

monétaire plus conventionnelle. En effet, le calibrage actuel du LCR avec les taux de

pondération, de décote et de reconduction des financements qui l’accompagnent encourage

les banques à s’orienter vers le refinancement par la banque centrale. La gamme des

garantie éligible au refinancement banque centrale est plus large que celle des HQLA - si

bien que les banques sont en mesure de se refinancer avec du collatéral non HQLA.

3.2.3 – Implications des normes de liquidité pour le financement de l’économie

La nouvelle réglementation de la liquidité bancaire aura forcément une incidence sur le

financement de l’économie. Si la plupart des banques et des superviseurs ont salué

l’assouplissement des conditions initiales des ratios de liquidité dans leur version révisée

publiée par le GHOS le 6 janvier 2013, quelques préoccupations demeurent notamment au

sujet de la capacité des banques à poursuivre le financement de l’économie comme par le

passé. En effet, d’aucuns y voient l’arrivée de nouvelles contraintes qui risquent de ralentir

l’activité d’intermédiation des établissements de crédit, en particulier des banques

françaises.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

53

A titre d’information, le Comité Européen des Superviseurs bancaires avait évalué en

décembre 2010, lors des échanges sur la version initiale du LCR, à 1.000 milliards d’euros la

contraction de la liquidité bancaire sous l’effet de l’entrée en vigueur du LCR.

Il convient de retenir que la première incidence de l’entrée en vigueur du LCR induira,

comme indiqué par ailleurs, une restructuration du bilan des banques et surtout de l’actif. En

privilégiant la détention des HQLA, les banques auront une nette préférence pour la

constitution de réserves auprès de la banque centrale ou l’investissement dans des titres

d’Etat ou organismes publics au détriment des créances sur des particuliers et entreprises.

Cette situation reviendrait à considérer que le ratio de liquidité à court terme de Bâle III

privilégie le financement de la dette publique par les banques.

Même si l’élargissement des HQLA consentie par le Comité de Bâle en janvier 2013 prend

en compte les obligations d’entreprise notées au moins AA dans le cadre des actifs liquides

de niveau 2A, celles-ci subissent une décote de 15%. Le total des actifs de cette catégorie

est limité 40% du montant global de l’encours des HQLA, ce qui en fait des actifs de moindre

importance. Il en est de même pour les titres de créances émis par les sociétés comme les

billets de trésorerie, qui pour être éligibles au HQLA de niveau 2 B, doivent subir des décotes

de 50% et être notées au moins BBB. L’activité de titrisation, ralentie par la crise financière

est également fortement limitée. Seuls les RMBS notés au moins AA sont acceptés à

condition qu’ils subissent une décote de 25%. L’Association for Financial Markets in Europe

(AFME) a d’ailleurs souhaité l’élargissement des actifs titrisés éligibles aux crédits à la

consommation, aux prêts automobile et aux PME.

Cette hiérarchisation des actifs éligibles aux HQLA pourrait fortement limiter le financement

de l’économie au moins à l’égard des entreprises les moins bien cotées. Toutefois, si les

HQLA sont réputés plus surs et plus liquides, ils sont moins rentables en termes de coût et

peuvent présenter, à certains égards, des coûts d’opportunité pour les banques.

Pour ce qui a trait au NSFR sensé améliorer la qualité de la transformation bancaire,

l’exigence de disposer de passifs de maturité au moins équivalentes aux actifs va limiter

métier d’intermédiation des banques.

Ce ratio qui privilégie des ressources longues induira une hausse générale des coûts de

collecte. En effet, l’épargne à long terme est assez difficile à capter et les banques devront

afficher des conditions plus attrayantes pour en disposer, ce qui sous-entend un relèvement

des taux d’épargne sur ces maturités. Au-delà de l’effet sur le coût, l’obligation pour les

banques de disposer de ressources longues pour financer leurs emplois longs pourrait

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

54

contraindre certaines d’entre elles à réduire les échéances des prêts à moyen ou long terme.

Il pourrait en résulter une contraction des volumes d’emplois longs comme les prêts

immobiliers ou le financement d’infrastructures. A ce sujet, le financement des collectivités

locales qui, depuis les difficultés de DEXIA, ont davantage recours aux concours bancaires

pour le développement de leurs infrastructures risque d’échapper aux établissements

bancaires. Les collectivités seront donc obligées de s’orienter vers des emprunts obligataires

ou des partenariats public privés pour satisfaire leurs besoins de financement non couverts

par les banques. Cette situation pourrait cependant constituer une opportunité pour les

intermédiaires financiers non bancaires notamment les fonds monétaires, les compagnies

d’assurance et autres investisseurs institutionnels, ce qui pourrait s’assimiler à du shadow

banking. Ainsi, les projets de réglementation de la Commission Européenne sur la finance

parallèle permettront probablement d’éviter aux établissements bancaires une concurrence

de ce type.

Au regard des contraintes susvisées, l’incidence de l’introduction des normes de liquidité de

Bâle III sur le financement de l’économie pourrait se traduire par un recul de l’intermédiation

et de la transformation bancaires. Les établissements seront donc contraints de procéder à

des opérations de titrisation complexes pour palier l’insuffisance de liquidité.

Outre la restructuration des bilans qui découlerait des différents ajustements, cette

perspective pourrait implicitement orienter le modèle européen de financement vers le

modèle anglo-saxon où l’essentiel de l’économie est financé par les marchés. Par exemple,

aux Etats-Unis, le financement des entreprises est assuré à 75% par les marchés et

seulement à 25% par les crédits bancaires. D’ailleurs, les crédits bancaires n’y représentent

que 50% du PIB. En revanche, le modèle de financement européen est caractérisé par un

recours plus fréquent au crédit bancaire dont les encours représentent près de 130% du PIB

de la zone euro à fin 2011. 80% de la dette des entreprises correspond à des emprunts

bancaires. Le modèle européen est en outre caractérisé par une maîtrise des risques

inhérents à l’intermédiation en ce sens que la plupart des établissements bancaires

disposent d’une information de qualité sur leur clientèle. Cette configuration du modèle

européen est donc basée sur une forte interaction entre l’activité bancaire et l’activité

économique.

Le cas spécifique des banques françaises

Les établissements bancaires français ont émis de vives préoccupations sur les ratios de

liquidité de Bâle III compte tenu de leurs implications profondes notamment sur leur modèle

économique. Ces inquiétudes découlent principalement du cadre institutionnel de l’activité

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

55

bancaire en France qui comporte des contraintes qui ne sont pas forcément adaptées à

l’application des normes de liquidité de Bâle III et qui isolent les banques françaises même

en Europe. Plus généralement, ces inquiétudes tiennent à la remise en cause du modèle

économique du secteur financier français, dans lequel l’épargne ne se retrouve que

partiellement dans les bilans bancaires. D’abord, le dispositif français d’épargne réglementée

est caractérisé par des produits d’épargne très populaires (comme les livrets A) mais qui

échappent très largement aux banques au profit de la puissance publique.

Traditionnellement, trois réseaux historiques en l’occurrence La Banque Postale, la Caisse

d’Epargne et le Crédit Mutuel détenaient l’exclusivité de la collecte du livret A. Depuis 2009,

la collecte de l’épargne réglementée a été élargie à l’ensemble des banques exerçant en

France.

En outre, les établissements de crédit collectent une épargne importante qui constitue une

bonne source de liquidités mais dont les deux tiers (65%) ne sont pas comptabilisées dans

leur bilan. Par conséquent, seul le tiers (35%) de l’épargne collectée par les banques est

enregistré dans leur bilan et leur est utile pour leur activité de crédit. Les 65% sont reversés

à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) qui est une institution financière publique qui

centralise l’épargne réglementée en France à savoir le livret A et le livret de développement

durable (LDD) qui sont les produits d’épargne défiscalisés par excellence des ménages

français. A titre d’exemple, le nombre de livrets A ouverts en France à fin 2012 se chiffrait à

63,3 millions soit autant que la population française, pour un encours de 250 milliards

d’euros environ. Cette manne dont les deux tiers échappent aux banques est reversée à la

CDC et sert principalement à financer pour le compte de l’Etat et des collectivités locales des

missions d’intérêt général comme l’habitat social (et à la CDC à acquérir des emprunts

d’Etat). Le relèvement de 1,5% du plafond de ce livret depuis le 1er janvier 2013 soit à 22.950

euros par épargnant devrait permettre d’augmenter le niveau de collecte pour les prochaines

années et, partant, accroître le manque à gagner pour les établissements bancaires français.

En effet, selon l’Institut National de Statistique et des Etudes Economiques (INSEE), les

ménages français sont des agents épargnants nets. A fin 2011, le taux d’épargne des

ménages français ressortait à 16,8% de leur revenu disponible brut, soit le 3ème taux le plus

élevé d’Europe. Cette culture de l’épargne, combinée à l’appétit des ménages pour les

produits défiscalisés tels que le livret A et LDD ne contribue donc pas à l’amélioration du

volume des ressources bancaires nécessaires au financement de l’économie. Par exemple,

le montant des dépôts hors CDC (1.292 milliards d’euros) est structurellement inférieur à

celui des encours de crédits (2.295 milliards d’euros). En effet, l’écart entre les encours de

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

56

dépôts et de crédit de l’ensemble du secteur bancaire français était à fin 2011 de 803

milliards d’euros. Cet écart n’a cessé de se dégrader au cours des années 200023.

Ensuite, si les ménages français sont agents épargnant net, les entreprises non financières

françaises sont agents emprunteurs nets. Ainsi, les dépôts constitués par les entreprises

auprès des banques sont faibles par rapport aux emprunts contractés, ce qui accroît le

déficit de ressources pour les banques et réduit la marge de manœuvre pour le financement

de l’économie.

Enfin, les banques françaises sont dans une situation de déficit structurel de ressources

internes car l’épargne de leurs clients a été longtemps orientée vers des fonds de placement

collectifs (OPCVM) crées par ces même banques ou de l’assurance vie drainée elle aussi

par des compagnies filiales de groupes bancaires. Ainsi, même l’épargne des clients des

banques ne se retrouve que partiellement placée directement dans des comptes de dépôts à

vue et surtout à terme figurant dans leurs bilans. Certes les fonds de placement et les

compagnies d’assurance vie captives prêtent ensuite aux banques de leur groupe, et ce de

manière constante, mais de tels fonds figurent alors dans les bilans des banques au passif

en tant qu’emprunts, et non en tant que dépôts. Cela change bien évidement l’appréciation

de la liquidité des banques françaises à l’aune des nouveaux ratios et notamment du LCR.

C’est pourquoi la FBF s’est insurgée contre le LCR en évoquant le fait que les banques

françaises ne souffrent pas vraiment d’un manque de liquidité –encore que le circuit du Livret

A soit critiquable – mais que leur véritable liquidité est mal prise en compte par les ratios

Bâle III.

Par ailleurs, la FBF regrette que les compagnies d’assurance-vie et les OPCVM qui

collectent une partie importante de l’épargne des ménages français à travers l’assurance-vie,

très prisée parce que fiscalement avantageuse, n’investissent que dans des proportions

limitées dans l’économie française. En 2010, sur près de 1.500 milliards de placement des

ménages français en assurance-vie, ces intermédiaires financiers n’avaient en effet investi

que près de 250 milliards d’euros de dette française contre 800 milliards d’euros environs de

dettes de non résidents24, notamment des emprunts obligataires. In fine, les placements des

ménages français servent à couvrir des financements non domestiques.

23

« Les enjeux économiques de Bâle 3 et le financement de l’économie française », Alain TOURDJMAN, BPCE, Présentation

Powerpoint du 20 décembre 2012. 24

« Les enjeux économiques de Bâle 3 et le financement de l’économie française », Alain TOURDJMAN, BPCE, Présentation

Powerpoint du 20 décembre 2012.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

57

Au total, les banques françaises sont confrontées à un déficit structurel de ressources

bancaires - et notamment celles à même d’élever leurs ratios de solvabilité - combinées à un

cadre institutionnel contraignant et inadapté aux nouvelles normes de liquidité. Cette

situation qui parait paradoxale au regard du contexte de liquidité des marchés fragilise les

établissements bancaires français et réduit leur compétitivité par rapport à leurs homologues

européennes et anglo-saxonnes. A ce sujet, l’attention des Autorités françaises à été attirée

par la FBF sur cette « exception française » qui desservait le financement de l’économie

hexagonale. Une rencontre entre l’interprofession et l’Etat français s’est tenue le 19 juillet

2013 à cet effet et a abouti à la rétrocession au secteur bancaire français de 50 milliards

d’euros issus des réserves centralisées à la CDC.

3.3 – Contraintes et limites des normes de liquidité de Bâle III

Outre les limites relevées par rapport au financement de l’économie et à la mobilisation des

ressources, un certains nombre de limites ont été relevés pour chacun des ratios de liquidité

de Bâle III

3.3.1 – Au niveau du LCR

S’agissant du ratio à court terme, il a déjà été relevé plus haut que l’application de taux de

pondération, de décote et de reconduction créait de facto un biais en faveur du financement

de la dette publique. En outre, la hiérarchisation des HQLA privilégie la constitution de

réserves auprès de la banque centrale plutôt que le financement de l’économie réelle.

Au dénominateur du ratio, les taux de pondération et de reconduction sont jugées très

restrictifs et parfois injustifiés pour les raisons suivantes25 :

la limitation des entrées à 75% des sorties suppose que l’établissement détienne des

actifs liquides à hauteur de 25% des sorties. Cette estimation ne paraît pas justifiée ;

l’insuffisante prise en compte des ressources des relations de clientèle stables de

leur reconduction. En effet, les dépôts des entreprises hors PME subissent des taux

de reconduction 25% et celle des banques de 0%, à moins qu’il ne s’agisse de

placements de trésorerie. Ces conditions restrictives que ces types de dépôts ne sont

presque pas reconduits en période de stress ;

Les hypothèses susvisées, qui ne sont pas exhaustives, démontre l’extrémité des scénarios

de stress anticipés par la Comité de Bâle. Ces hypothèses ne paraissent pas réalistes en

25

« Les ratios de liquidité dans Bâle III », La Revue de l’Autorité de Contrôle Prudentiel, n°2, juin-juillet 2011

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

58

période de chocs de liquidité. Elles consistent en effet à demander aux banques de se

prémunir contre une forte hausse des flux sortants sous l’effet des retraits massifs des

entreprises financières et non financières, et même des particuliers. Cependant, la faiblesse

de ces hypothèses réside dans le fait que dans le même moment, les HQLA peuvent perdre

leur liquidité en période de stress général, ce qui rendrait le ratio impertinent.

3.3.2 – Au niveau du NSFR

Les limites identifiées au niveau du NSFR portent sur les points ci-après :

le renforcement des règles qui encadrent l’activité traditionnelle de transformation

bancaire qui pourrait se traduire par un ralentissement du financement de l’économie

réelle comme mentionné par ailleurs. Cette perspective tendrait à orienter le

financement de l’économie par les marchés plutôt que par le financement bancaire.

Cette « américanisation » du modèle de financement de l’activité économique

pourrait induire des pertes d’opportunités pour les banques ;

l’inadaptation du ratio avec la structure du passif des banques qui seront obligées de

renforcer leurs ressources stables ou se retirer de l’activité de financements à long

termes, ce qui provoquerait également d’autres pertes d’opportunités.

En définitive, l’esprit des ratios pourrait être biaisé dans la mesure où il conduirait à des

banques plus sures, moins enclines aux risques mais qui assureraient leurs missions

d’intermédiation et de financement de l’économie réelle dans une moindre mesure.

3.4 – Enjeux et Perspectives de la liquidité bancaire

L’insertion des normes de liquidité du dispositif prudentiel de Bâle III dans l’attelage de la

réglementation prudentielle des établissements de crédit se fera dans le cadre d’un

compromis dynamique. En effet, la version du LCR amendée et publiée le 6 janvier 2013 est

le fruit d’une large consultation des banques par les Autorités de régulation en vue de

prendre en compte leurs observations et préoccupations. Il en sera de même pour le NSFR

ainsi que les quelques points qui restent à élucider au sujet du LCR. En effet, malgré le

consensus sur l’élargissement de la gamme des HQLA et l’entrée en vigueur graduelle du

LCR saluée par l’ensemble des acteurs, certaines questions demeurent en suspens et

constituent des enjeux important pour les futures échéances.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

59

3.4.1 – Les modalités de publication des ratios

Le communiqué du GHOS du 6 janvier 2013 mentionne que « …en période de tensions, il

serait tout à fait approprié pour les banques d’utiliser leurs encours d’actifs liquides de haute

qualité, et donc de passer sous le seuil minimum requis. De plus, en la matière, il revient aux

autorités nationales de contrôle bancaire d’adapter leurs recommandations en fonction de la

situation… 26». Cette possibilité offerte aux établissements de ne pas observer les exigences

du ratio en période de stress est une mesure d’assouplissement qui vise à les aider à mieux

amortir les chocs de liquidité. Toutefois, cette disposition pourrait desservir les banques qui

en feraient usage, en particulier lorsqu’elles seront contraintes de publier le niveau de leur

ratio. En effet, les modalités de publication et de reporting des ratios n’ont pas encore été

définies et constituent à cet égard un véritable enjeu. Les marchés et même la clientèle

pourraient réagir négativement à la publication de ratios en deçà de la norme et qui

pourraient refléter un risque de liquidité certain. En outre, il convient de s’interroger sur la

forme et la périodicité du ratio. Il se posera donc forcément un problème de standardisation

de la production du ratio. En tout état de cause, même sans exigence de publication et de

reporting fixée par le régulateur, les banques s’y plieront implicitement dans un souci de

transparence financière pour rassurer les marchés.

3.4.2 – L’harmonisation des actifs éligibles

Plusieurs éléments ont permis de démontrer plus haut les incidences et implications de

l’entrée en vigueur du LCR sur la politique monétaire. Il a été indiqué supra qu’il existe une

asymétrie entre les HQLA et les actifs éligibles au refinancement de la BCE. L’harmonisation

des actifs éligibles s’imposera à l’avenir comme un enjeu stratégique. En effet, les conditions

de refinancement des banques centrales, y compris à l’intérieur de l’eurosystème ne sont

pas identiques, notamment en termes de collatéral. Par exemple, la Banque de France est

l’une des seules banques centrale à admettre la présentation de créances privées. Ces

disparités entre critères à l’intérieur même de la zone euro peuvent être source de

déséquilibre et d’inégalité de traitement entre les banques. Pour le Comité de Bâle, admettre

en HQLA des actifs pour la simple raison qu’ils sont acceptés par une banque centrale

encouragerait les banques à ne pas consentir d’effort pour améliorer la qualité de leurs actifs

liquides.

26

Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Communiqué de Presse du Groupe des gouverneurs de banque centrale et des

responsables du contrôle bancaire, 6 janvier 2013

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

60

3.4.3 – Le LCR en cas de sortie de crise

Les premières estimations effectuées au début de l’année 2013 ont permis d’établir que la

plupart des banques internationales respectaient le LCR. Il convient toutefois de rappeler

que ces estimations interviennent dans un contexte où la liquidité bancaire est abondante

sous l’effet de l’ensemble des mesures de politique monétaire non conventionnelles mises

en œuvre par les banques centrales. En effet, l’injection massive de liquidités et le

lancement des deux LTRO ont certainement contribué à gonfler les bilans bancaires en

réserves de banque centrale. Toutefois, la perspective de remboursement de ces deux prêts

exceptionnels qui arriveront à échéance en fin 2014 et début 2015 (pratiquement au même

moment de l’entrée en vigueur du LCR) pourrait entraîner une profonde restructuration du

bilan des banques qui y avaient souscrit et une modification de leur profil de risque de

liquidité.

Conclusion

En définitive, la crise a fait redécouvrir le caractère crucial de la liquidité bancaire, qui a été

très longtemps négligée par les régulateurs au profit de la solvabilité. Lors des crises

financières de 2007 à 2011, les systèmes bancaires n’ont été sauvées que par les actions

résolues et non conventionnelles des banques centrales sans compter les interventions des

Etats. Les responsables politiques ont également exercé une forte pression notamment peu

après la crise avec le G20 de Pittsburgh pour que la réglementation bancaire soit resserrée.

L’accord dit de Bâle III prévoit ainsi, outre de nombreuses autres mesures destinées à

assurer une plus grande stabilité du secteur bancaire, deux ratios internationaux. Ces ratios

ne sont pas neutres pour le fonctionnement des établissements bancaires, des marchés et

les actions des banques centrales.

Dans le cas français, les ratios de liquidité de Bâle III, en particulier le LCR, tendent à

fragiliser la situation comparative des banques françaises au regard de l’observation des

ratios de Bâle III, en raison des spécificités du cadre institutionnel de la collecte de l’épargne

en France et du business model des banques françaises.

Toutes ces mesures, de même que l’Union Bancaire Européenne, sont de nature à renforcer

la stabilité bancaire notamment en renforçant la situation de liquidité des établissements. Il

n’empêche qu’en période de stress, comme cela est apparu pendant la crise des subprime

et celle des dettes souveraines, certains actifs présumés liquides peuvent perdre

brusquement cette qualité. C’est notamment le cas des dettes souveraines pourtant

destinées à constituer l’essentiel du coussin mis en place par le LCR. C’est dire que sauf à

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

61

imposer aux banques de ne plus immobiliser d’actifs, la question de la liquidité du système

bancaire en période de stress, notamment en cas de stress d’un acteur systémique ou de

stress du système lui-même, ne peut être résolue en dehors d’interventions massives et non

conventionnelles des banques centrales.

Une autre limite au renforcement de la liquidité via les nouveaux ratios se trouve dans

l’existence d’un important secteur non régulé, le shadow banking. Or, celui-ci porte

indirectement des risques bancaires et simultanément se trouve en partie financé par les

banques, lesquelles, par ricochet, pourraient être affectées par une crise de liquidité dans cet

ensemble non régulé.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

62

BIBLIOGRAPHIE

Textes normatifs (Lois, Directives, Règlements, Arrêtés)

Règlement n°88-01 du 22 février 1988 relatif à la liquidité ;

Arrêté du 5 mai 2009 relatif à l’identification, la mesure, la gestion et le contrôle du risque de liquidité.

Communications et Documents émanant d’institutions

Règlementation de la liquidité et mise en œuvre de la politique monétaire, Banque Centrale Européenne, Bulletin mensuel avril 2013 ;

Communiqué de presse du 06 janvier 2013 du Groupe des Gouverneurs de banque centrale et responsables du contrôle bancaire relatif à l’adoption de la version révisée de la norme de liquidité applicable aux banques ;

Le Ratio de liquidité, La Revue de l’Autorité de Contrôle Prudentiel n° 9, oct – nov. 2012, page 18 ;

Basel III, A global regulatory framework for more resilient banks and banking systems, Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Décembre 2010 ;

Enhancements to the Basel framework, Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Juillet 2009 ;

Revisions to the Basel II market risk framework, Comité de Bâle sur le contrôle Bancaire, Juillet 2009 ;

The High-level group on financial supervision in the EU, Chaired by Jacques de Larosière, 25 February 2009

Révision du régime prudentiel français à l’aune de la crise financière : Liquidité bancaire, Rapport annuel de la Commission Bancaire 2008: Pages 151 à 170 ;

Déficits de liquidité : fondements théoriques, Jean TIROLE, Revue de la stabilité financière – Numéro spécial liquidité – N° 11 Février 2008 – Banque de France, Pages 57 à 69 ;

La Réglementation de la liquidité et le prêteur de dernier ressort, Jean Charles ROCHET, Revue de la stabilité financière – Numéro spécial liquidité – N° 11 Février 2008 – Banque de France, Pages 47 à 55 ;

Liquidity risk Management and Supervisory Challenges, Comité de Bâle pour le Contrôle Bancaire, Février 2008 ;

Liquidité bancaire et stabilité financière, Natacha VALLA, Béatrice SAES-ESCORBIAC et Muriel TIESSET, Revue de la stabilité financière - N° 9 Décembre 2006, Pages 93 à 110 ;

Sound Practices for Management Liquidity in Banking Organisations – Comité de Bâle pour le Contrôle Bancaire, Février 2000.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

63

Périodiques

Liquidity Coverage Ratio (LCR) : le Comité de Bâle fait un pas en avant, Séverine Leboucher – Banque & Stratégie n°311 ;

De Bâle III à la CRD 4, ce qui pose problème dans les ratios de liquidité, Séverine Leboucher, Revue Banque n°737 ;

Révision du LCR : les banques ont été entendues, Jean-Michel STRA et Mehdi BOULHIMEZ – Revue Banque n°757 ;

Les options des banques pour se conformer aux ratios bâlois, Yves Grégoire et Benoît MENONI, Revue Banque n°737 ;

Les banques françaises mauvaises élèves sur la liquidité, Christophe NIJDAM, Revue Banque n°737 ;

Sur la liquidité, Bâle III est une réforme en trompe-l’œil, Jean Bernard CAEN, Revue Banque n°737 ;

Bâle III et la résilience du secteur bancaire, Gautier Bourdeaux, Revue de Droit bancaire et financier, n°2, Mars 2012 ;

Les Banques Centrales face à la crise, Guilhem Bentoglio & Guillaume GUIDONI, Revue de l’OFCE n°110, Juillet 2009.

Ressources internet

www.senat.fr, La régulation bancaire à l’épreuve de la crise financière / P. 1-10 ;

http://opee.u-strasbg.fr - OPEE, L’Europe face à la crise – La grande crise systémique de 2008 : causes, conséquences et mesures politique ;

La BCE pourrait revoir ses règles de collatéral, Agefi.fr – Solenn POULLENNEC. Autres documents

Que peut faire la BCE pour soutenir l’économie de la zone euro tout en respectant ses principes ? Patrick ARTUS, Flash Economie Natixis n°266, 4 avril 2013, pages 1 à 7 ;

Les enjeux économiques de Bâle 3 et le financement de l’économie française Alain Tourdjman, BPCE, 20 décembre 2012 ;

Réguler la liquidité bancaire, Jean-Paul POLLIN, 2012 ;

Bâle III : Décryptage, impacts et limites des nouvelles exigences réglementaires AUREXIA Conseil, juillet 2011 ;

Bâle III : La position de la FBF, Fédération Banque Française, – 20 avril 2010 ;

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

64

La refonte du régime prudentiel de la liquidité bancaire, Jérémie DUHAMEL, Banque et Droit n° 127 Sept-oct. 2009, pages 15 à 20.

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

65

ANNEXES

I - Communiqué de Presse du GHOS du Comité de Bâle du 6 janvier 2013 ;

II - Stratégies d’ajustement élaborées par la BCE pour respecter le LCR

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

66

Tableau A : Stratégie d'ajustement (a) (i) : augmentation des HQLA de niveau 1 par la vente d'autres actifs (en

milliard d'euros)

Actif Passif

Prêts Dépôts

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, non garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, non garantis 7

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, garantis 7

Prêts aux institutions financières, > 30 jours 5 Dépôts des institutions financières > 30 jours 5

Autres prêts 40 Autres dépôts 32

HQLA Engagements auprès de l'eurosystème

HQLA de niveau 1 5+1 Emprunts auprès de l'Eurosystème 7

Réserve auprès de la banque centrale et encaisse 2

HQLA de niveau 2 4

Autres Autres

Autres actifs 34-1 Autres Engagements 42

Total 100 Total 100

Source : BCE Sorties provenant des engagements hors bilan 3

Stratégie d'ajustement : vente d'une unité d'autres actifs, achat d'une unité d'HQLA de niveau 1 (emprunts publics)

LCR initial (selon les hypothèses stylisées) : 91,2%

LCR après ajustement (selon les hypothèses stylisées) : 100,4%

Tableau B : Stratégie d'ajustement (a) (ii) : augmentation des réserves à la banque centrale par la hausse de

l'emprunt obligataire auprès de la banque centrale (en milliard d'euros)

Actif Passif

Prêts Dépôts

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, non garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, non garantis 7

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, garantis 7

Prêts aux institutions financières, > 30 jours 5 Dépôts des institutions financières > 30 jours 5

Autres prêts 40 Autres dépôts 32

HQLA Engagements auprès de l'eurosystème

HQLA de niveau 1 5 Emprunts auprès de l'Eurosystème 7+1

Réserve auprès de la banque centrale et encaisse 2+1

HQLA de niveau 2 4

Autres Autres

Autres actifs 34 Autres Engagements 42

Total 101 Total 101

Source : BCE Sorties provenant des engagements hors bilan 3

Stratégie d'ajustement : augmentation d'une unité de l'emprunt auprès de la banque centrale et détention sous forme de réserves ou

placement en facilité de dépôt

LCR initial (selon les hypothèses stylisées) : 91,2%

LCR après ajustement (selon les hypothèses stylisées) : 100,4%

Annexe II :

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

67

Tableau C : Incidence de la stratégie d'ajustement (a) (ii) sur la banque centrale (en milliard d'euros)

Actif Passif

Facteurs autonomes Dépôts

Réserves nettes de change 555 Billets en circulation 822

Actifs nets libellés en euros 461 Dépots des administrations publiques 83

Autres facteurs autonomes (nets) 380

Instruments de politique monétaire Autres dépôts 32

Opérations principales de refinancement 89+1

Opérations de refinancement à plus long terme 343 Comptes courants 206

Facilité de prêt marginal 3 Opérations de retrait de liquidité 78

Portefeuille d'actifs de politique monétaire 137 Facilité de dépôt 19+1

Total 1 589 Total 1 589

Source : BCE

Pour simplifier l'illustration, on suppose que la taille du bilan est de banque est de 100 milliards d'euros, une augmentation d'une unité

correspondant à 1 milliard d'euros

Tableau D : Stratégie d'ajustement (b) (ii) : diminution des sorties nettes en passant d'un financement de marché à court terme à

un financement de marché à plus long terme (en milliard d'euros)

Actif Passif

Prêts Dépôts

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, non garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, non garantis 7-1

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, garantis 7

Prêts aux institutions financières, > 30 jours 5 Dépôts des institutions financières > 30 jours 5+1

Autres prêts 40 Autres dépôts 32

HQLA Engagements auprès de l'eurosystème

HQLA de niveau 1 5 Emprunts auprès de l'Eurosystème 7

Réserve auprès de la banque centrale et encaisse 2

HQLA de niveau 2 4

Autres Autres

Autres actifs 34 Autres Engagements 42

Total 100 Total 100

Source : BCE Sorties provenant des engagements hors bilan 3

Stratégie d'ajustement : passage d'une une unité d'émprunt interbancaire non garanti <30 jours à une unité d'emprunt interbancaire >30 jours

LCR initial (selon les hypothèses stylisées) : 91,2%

LCR après ajustement (selon les hypothèses stylisées) : 100,4%

La question de la liquidité et de sa réglementation prudentielle

68

Tableau E : Stratégie d'ajustement (b) (ii) : diminution des sorties nettes en passant d'un financement de marché à

court terme à un financement par la banque centrale (en milliard d'euros)

Actif Passif

Prêts Dépôts

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, non garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, non garantis 7-1

Prêts aux institutions financières, < 30 jours, garantis 5 Dépôts des institutions financières, <30 jours, garantis 7

Prêts aux institutions financières, > 30 jours 5 Dépôts des institutions financières > 30 jours 5

Autres prêts 40 Autres dépôts 32

HQLA Engagements auprès de l'eurosystème

HQLA de niveau 1 5 Emprunts auprès de l'Eurosystème 7+1

Réserve auprès de la banque centrale et encaisse 2

HQLA de niveau 2 4

Autres Autres

Autres actifs 34 Autres Engagements 42

Total 100 Total 100

Source : BCE Sorties provenant des engagements hors bilan 3

Stratégie d'ajustement : passage d'une une unité d'emprunt interbancaire non garanti <30 jours à une unité d'emprunt interbancaire >30 jours

LCR initial (selon les hypothèses stylisées) : 91,2%

LCR après ajustement (selon les hypothèses stylisées) : 100,4%

Tableau F : Incidence de la stratégie d'ajustement (b) (ii) sur la banque centrale (en milliard d'euros)

Actif Passif

Facteurs autonomes Dépôts

Réserves nettes de change 555 Billets en circulation 822

Actifs nets libellés en euros 461 Dépots des administrations publiques 83

Autres facteurs autonomes (nets) 380+1

Instruments de politique monétaire Autres dépôts 32

Opérations principales de refinancement 89+1

Opérations de refinancement à plus long terme 343 Comptes courants 206

Facilité de prêt marginal 3 Opérations de retrait de liquidité 78

Portefeuille d'actifs de politique monétaire 137 Facilité de dépôt 19

Total 1 589 Total 1 589

Source : BCE

Pour simplifier l'illustration, on suppose que la taille du bilan est de banque est de 100 milliards d'euros, une augmentation d'une unité

correspondant à 1 milliard d'euros.