La forge avril 2016

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www.pcof.net “Prolétaires de tous les pays unissez-vous !” Organe central du Parti Communiste des Ouvriers de France 2 e Prochaine parution : le 10 mai 2016 Mensuel n°572 - avril 2016 Retrait de la loi El Khomri !

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Mensuel n°

“Prolétaires de tous les pays unissez-vous !”

Organe central du Parti Communiste des Ouvriers de France

2 eProchaine parution : le 10 mai 2016Mensuel n°572 - avril 2016

Retrait de la loi El Khomri !

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EditorialAvril 2016

L’abandon du projet de constitutionnalisation de l’état d’urgence est une vraie défaite politique pour Hollande et son gouverne-

ment. Certes, la droite y a contribué en refusant d’endosser le texte voté à l’Assemblée nationale. Mais ce projet a surtout fait des dégâts au sein de la majorité, au sein du gouvernement, et a creu-sé davantage encore le fossé entre le gouvernement et le milieu démocratique et d’importants secteurs de la jeunesse. Après des semaines de débats tendus, de mobilisations de rue, Hollande et son gouvernement ont essayé de minimiser leur échec et d’en attri-buer la responsabilité à la droite ; mais la décision du président intervient en plein développement du mouvement contre le projet de loi El Khomri et l’affaiblit encore davantage.C’est Hollande et ce gouvernement impopulaires, affaiblis, qui se sont lancés dans une nouvelle offensive, cette fois contre le mou-vement syndical qui combat sa politique, contre les jeunes qui se débattent dans la précarité et qui se voient encore plus précaires, plus longtemps, avec cette loi.Le mouvement qui se développe depuis plusieurs semaines, met ouvriers, salariés, hommes et femmes, jeunes précaires, étudiants et jeunes salariés, lycéens… dans la rue. Le mot d’ordre qui unifie ce mouvement est celui de retrait de la loi El Khomri.Ce mouvement fait taire la droite et l’extrême droite, qui se retrouvent en réalité du côté du gouvernement, sur cette question, contre le mouvement syndical, ouvrier et populaire. Elles sont « inaudibles », et c’est tant mieux. Quand les travailleurs, les jeunes, prennent leurs affaires en mains, quand ils se battent pour défendre leurs intérêts, quand ils se battent contre un projet qui fait la part belle au patronat, ça change le ton, ça change le cli-mat politique, ça ouvre des champs de discussions et de mobilisa-tions.

« Les jeunes dans la galère, les femmes aux bas salaires, les vieux dans la misère, de cette société là, on n’en veut, on la combat !». C’est un de slogans qui a le plus de succès dans les manifestations. Il affiche la solidarité entre les couches populaires, jeunes et moins jeunes, au travail ou sans emploi et met en avant le combat contre cette société. Cette société des patrons millionnaires – qui empochent des millions, y compris d’argent public, pour licencier et faire grimper les cours des actions.Cette société des riches qui trichent, planquent leur argent dans les paradis fiscaux, et auxquels on propose des « arrangements », une amende, en échange de l’impunité.Cette société basée sur l’individualisme, la précarité « ubérisée », la division, la stigmatisation.Ces grands moments de mobilisation permettent de briser ces car-

cans : le combat collectif permet la discussion, les débats, l’échange des expériences, donne confiance, « remet les pendules à l’heure », pose les questions de fond et les rend compréhensibles et accessibles au plus grand nombre.C’est important pour les salariés et leur organisation syndicale qui se battent pour leurs salaires, contre les licenciements et la flexibi-lité : ils voient des « renforts » venir les aider dans leur résistance à la surexploitation.C’est important pour ceux qui sont victimes de la répression anti syndicale : ils voient des soutiens plus nombreux à leurs côtés.C’est important pour les salariés du commerce, très souvent des femmes salariées à temps partiel, qui voient que leur combat contre le travail de nuit et du dimanche s’inscrit dans celui contre la loi El Khomri, qu’ils ont raison de ne pas lâcher et qu’ils pour-ront compter sur la solidarité de ceux et celles qu’ils retrouvent dans les manifestations.C’est important pour les travailleurs du transport, de la poste, qui ont pu avoir l’impression de se battre contre des montagnes : la politique néolibérale impulsée par l’UE, reprise et amplifiée par le gouvernement. Venez nous parler de votre lutte, qui nous concerne tous.C’est important pour ceux de la santé, qui se battent depuis des mois et des mois, et qui ont besoin du soutien des autres catégo-ries de travailleurs et de celui des usagers….

Il faut rompre avec le systèmeEt on pourrait rallonger la liste. Parler aussi des militants qui posent la question de la rupture avec la politique de guerre, qui s’adressent aux manifestants pour dire que leur combat est aussi le leur et inversement.Les rues, les places, deviennent des lieux de lutte collective et de discussions, de contestation de la société qui écrase, sans autre perspective que de nous enfoncer dans une crise, la sienne, qu’elle nous fait payer, à nous, aux peuples, aux générations futures. Les rues et places deviennent le creuset de ce « front populaire », cette alliance entre nous tous et toutes qui voulons que ça change vraiment.Le retrait de la loi El Khomri nous réunit, et c’est de rupture avec cette société que nous allons discuter, pendant et après la manif. Il faut qu’on se batte pour arracher le retrait du projet de loi, pour pouvoir aller encore plus loin dans la nécessité de la rupture avec cette société. La proposition de notre parti, le front populaire révolutionnaire, c’est un programme et la construction de la force politique et sociale nécessaire pour l’imposer. Les deux doivent avancer ensemble : mettons nous au travail ! ★

Retrait de la loi El Khomri

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La Forge 3Politique Avril 2016Politique

La mobilisation pour le retrait de la loi El Khomri entre dans une nouvelle phase, celle où elle

peut monter de plusieurs crans. En effet, on est passé aux appels sur plusieurs dates successives, autre-ment dit à une certaine planification de la montée en puissance de cette mobilisation. Pour le moment, l’ob-jectif est le nombre : il faut être à chaque fois plus nombreux dans la rue. Et surtout, maintenir le front du « retrait », maintenir cet objectif, par delà les appels pressants à venir négocier, faire des propositions, amender… Les pressions vont être fortes dans ce sens : il est important de ne pas y céder.

Cinq raisons pour amplifier la mobilisa-tion, pour arracher le retrait de cette loiLa première, c’est parce que cette loi est une attaque très grave contre les ouvriers, le mouvement syndi-cal, la jeunesse, les femmes travail-leuses… Nous n’allons pas ici déve-lopper ces aspects, qui sont abordés dans nos numéros précédents et qui sont enrichis par les dernières mobilisations et discussions, débats, etc. dont nous nous faisons l’écho. Mais il faut prendre la mesure des conséquences qu’une telle loi entraînerait, en particulier dans les secteurs les moins organi-sés des salariés : là où le code du travail représente souvent la der-nière et quasi unique protection contre l’arbitraire patronal. Pensons à tous ces salariés, ces femmes tra-vailleuses, dans de petites struc-tures, qui n’ont que « cela » comme protection. Bien sûr, elle est fragile, pleine de trous favorables au patronat – toutes ces dérogations qui gonflent le code de centaines de pages. Bien sûr, à lui seul, le code du travail n’est pas un bouclier solide, mais ce qui est sûr, c’est que sans lui, le patronat se sentira les coudées franches.Cela fait beaucoup de salariés, qui travaillent dans la multitude de PME qui ne sont souvent que des sous-traitants d’un groupe plus grand. Autrement dit, cette bataille, elle se mène aussi pour l’unité de la classe ouvrière. Les ouvriers et les salariés des grandes entreprises ne sont pas à l’abri, même là où il y a des syndicats. La négociation d’en-treprise, avec le chantage constant à la « clé sous la porte » et l’inver-sion des normes, le recours au réfé-rendum donné aux syndicats mino-ritaires (moins ils sont représenta-tifs, plus ils ont de pouvoirs de

destruction des intérêts des sala-riés !), sont la boîte à outils des détricoteurs des droits acquis par la lutte. La deuxième, c’est que c’est la loi anti sociale de trop !Depuis sa prise de fonction, Hollande n’a pas cessé d’attaquer la classe ouvrière et les salariés, tou-jours au nom de la sacro-sainte compétitivité. Du refus de renégo-cier le pacte Merkel-Sarkozy qui fixait le cadre des politiques d’aus-térité au niveau européen, à l’ANI ; du refus de l’amnistie pour les syndicalistes poursuivis pour avoir défendu les droits des travailleurs, à la condamnation des Air France et celle des Goodyear ; de la loi Macron à la loi Rebsamen et aujourd’hui, la loi El Khomri, Hollande et ses gou-vernements, ses ministres du tra-vail qui auront été des ministres du chômage de masse et des conces-sions systématiques au patronat, n’ont cessé de creuser ce sillon. Trop, c’est trop !

La troisième, c’est qu’il faut don-ner un coup d’arrêt aux exigences sans limite du patronat.Le patronat a tenu la plume des ministres, il a anticipé, dans les entreprises, les reculs sociaux qu’il a fait passer dans les lois, les décrets, les décisions de l’adminis-tration. Depuis que Hollande est président, depuis que Valls est pre-mier ministre et que Macron ne cesse d’afficher son amour pour l’entreprise, le Medef, le patronat fait passer ses exigences les unes après les autres. Il continue d’ap-plaudir et de trouver légitime le fait que les grands patrons se versent des millions, pour avoir fait baisser les salaires et augmenter la surex-ploitation des ouvriers.

La quatrième, c’est qu’il faut infli-ger un désaveu cinglant aux diri-geants syndicaux qui collaborent activement à ces attaques. Ceux de la CFDT en premier lieu, qui parti-cipent à l’élaboration de toutes ces lois anti-ouvrières et qui les justi-fient en prétendant arracher de « nouveaux droits » pour les sala-riés.

La cinquième est sans doute celle qui est la plus importante, du point de vue de l’avenir.Il est possible de gagner, d’obliger le gouvernement à retirer cette loi, en faisant croître encore le rapport de force.

Hollande, son gouvernement, sont affaiblis, discrédités, littéralement « vomis » par un très grand nombre de travailleurs. Il suffit d’écouter ce

qui se dit dans les manifs, dans les discussions entre syndicalistes, dans celles qu’on a quand on distri-bue un tract sur un marché, quand les jeunes discutent entre eux. Dans la jeunesse, c’est le « sys-tème », « c’est la société qui ne veut pas de nous », c’est le refus de la précarité à vie, qui sont ciblés.Le mouvement qui s’est mis en marche crée une dynamique, un effet d’entraînement, une force. Elle n’est pas encore suffisante pour obliger Hollande, le gouvernement, le grand patronat, à se dire qu’ils ont beaucoup à perdre en s’obsti-nant à vouloir faire passer la loi. C’est pourquoi, ils prônent le dia-logue, le débat parlementaire pour « améliorer » la loi… bref, gagner du temps, essayer de diviser le front du « retrait », jouer sur la fatigue, tout en usant de la provo-cation et de la répression. Ce mouvement a principalement deux « jambes » : celui des jeunes, étudiants, lycéens, celui des tra-vailleurs, du mouvement syndical. Chacun a ses rythmes et chacun renforce l’autre. Pour que le mouvement global se renforce, la composante ouvrière et syndicale est essentielle. Elle struc-ture les manifestations, elle permet leur élargissement, y compris en direction des milieux populaires (les familles, les quartiers…). Elle donne confiance et permet d’ins-crire le mouvement dans la durée.

En quelques semaines, c’est à nou-veau le mouvement ouvrier et populaire, la jeunesse, qui ont l’ini-tiative. Comme nous l’avons dit, le gouvernement essaie de faire traî-ner, de diviser ; essaie d’allumer des contre-feux. Le premier, c’est celui de la « lutte contre le terrorisme », sur fond de menaces d’attentats. Ceux de Belgique « tombent à pic » pour relancer la machine à faire peur, la machine à faire du terro-risme le principal et quasi unique sujet de débat et de mobilisation des esprits. Mais ça ne marche pas. Aucune manifestation, aucune réu-nion, n’ont été annulées au pré-texte de la « sécurité » et si les autorités ne l’ont pas imposé, les organisateurs ne l’ont même pas évoqué. C’est important de le souli-gner. D’autant que cette question n’est jamais absente des discus-sions. Nous avons pu le vérifier de nombreuses fois : ce mouvement contre la loi El Khomri entraîne une certaine politisation des discus-sions, notamment chez les jeunes. Le recul imposé à Hollande sur son projet de constitutionnaliser l’état d’urgence est à la fois un encoura-

gement à amplifier la mobilisation et une porte d’entrée dans la dis-cussion sur la situation politique, nationale et internationale, en fai-sant le lien entre l’état d’urgence et la politique de guerre. Qu’on est loin des débats sur les primaires ! Ce mouvement remet aussi les choses à leur vraie place : celle de la lutte résolue contre la politique anti-ouvrière et antipopu-laire de ce gouvernement allié au patronat, avec comme angle d’at-taque, le combat pour le retrait de la loi El Khomri. ★

Résister pour gagner

Sur la répression policièreDepuis quelques jours, la présence policière dans et autour des mani-festations de jeunes se renforce. Prenant prétexte de l’état d’ur-gence, on voit même des militaires et des policiers en plus grand nombre près de certains lycées. Mais c’est dans les manifestations que se produisent de plus en plus souvent des interventions vio-lentes de policiers, contre des jeunes. Le prétexte, c’est toujours les « cas-seurs », encagoulés, qui jettent des pierres, cassent des vitrines…On peut d’ailleurs s’interroger quant à l’identité de certains de ces casseurs, qui agissent à visage découvert, devant les caméras de la police, sans parler des dizaines de caméras de surveillance.Ceci dit, la présence policière mas-sive, démonstrative, et souvent au plus près des jeunes manifestants, agit comme une véritable provoca-tion. C’est visiblement voulu. Le but est de provoquer des incidents, pour pouvoir réprimer, tout azimut. Il s’agit de faire peur aux jeunes, et à leurs parents qui voient les images à la télé, pour les dissuader de partici-per aux manifestations.Même si nous sommes dans un autre contexte que celui qui prévalait au moment du CPE, il y a une leçon importante à en tirer : le mouvement syndical a une responsabilité vis-à-vis des jeunes, sur le plan de la pro-tection. Il ne s’agit pas d’alimenter la peur, mais de se donner les moyens de permettre aux jeunes et aux moins jeunes de manifester ensemble. Et nous n’avons pas besoin des brigades de police pour cela, bien au contraire !De plus, il ne faut pas oublier que ces forces de police sont mobilisées depuis des mois, dans la cadre de Vigipirate. C’est une cause supplé-mentaire pour accroître les tensions et pour développer les comporte-ments violents.

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La Forge4Avril 2016 Politique

Après les attentats de Bruxelles L’arrestation en Belgique de Salah

Abdeslam, impliqué dans les attentats de Paris, a été suivie

du double attentat de Bruxelles. Partout dans le monde, les forces politiques réactionnaires se sont à nouveau livrées à une inquiétante surenchère : en Slovaquie, en Hongrie, au Royaume-Uni,… on met en cause l’immigration, la libre circu-lation dans l’espace Schengen, les « contrôles négligents aux frontières ». Le gouvernement israé-lien accuse l’UE d’avoir préféré criti-quer Israël plutôt que de combattre les cellules terroristes islamiques sur son sol. Moscou en profite pour justi-fier son soutien à Bachar Al-Assad. Aux Etats-Unis, le candidat républi-cain D. Trump prône la fermeture des frontières et… l’usage de la torture ! Ce n’est guère mieux dans le camp des Républicains français (LR) où c’est à qui criera le plus fort pour demander l’enfermement des per-sonnes fichées « S » (personnes sur-veillées car jugées potentiellement menaçantes pour la « sûreté de l’État »), et « une perpétuité effective et irrévocable ». C’est le sens de l’amendement proposé par LR, voté début mars en première lecture lors de l’examen du projet de loi sur la réforme de la procédure pénale et la lutte contre le terrorisme, qui porte de 22 à 30 ans la période d’emprison-nement incompressible pour les per-sonnes condamnées pour terrorisme.

Au niveau européen, ces attentats ont encore élargi les contradictions et les divisions. Le ministre Sapin parlant de la « naïveté » des autorités belges face au communautarisme, Valls tentant de rattraper le coup lors d’un déplacement à Bruxelles où il attaque à son tour… Angela Merkel : « Il y a quelques mois, les médias fran-çais demandaient : “Où est la Merkel française ?”, ou voulaient donner le prix Nobel à la chancelière. Aujourd’hui, je constate les résultats. »Pour le journal Le Monde, l’extradition rapide vers la France de Salah Abdeslam est à saluer comme un pro-grès dans la coopération européenne : « Fini le romantisme coupable de François Mitterrand qui ne livrait pas les terroristes des Brigades rouges à l’Ita-lie », peut-on lire sous la plume d’un de ses journalistes qui en appelle à des mesures plus radicales pour répondre à la situation : « la création d’un FBI européen, pour éviter que Bruxelles ne se transforme en plaque tournante puis en victime du terro-risme. Avec la mise en place d’une politique des frontières fédérale, puisque les Grecs ne peuvent garder leurs frontières. Et l’instauration d’une défense commune pour agir sérieusement contre l’organisation État islamique et exercer une réelle pression sur les pays du Moyen-Orient ». Ainsi, qu’ils soient pour « plus d’Europe » ou pour en sortir, socio-

démocrates, socio-libéraux, libéraux ou nationalistes, tous s’accordent sur un point : l’appel au renforcement de la coopération policière au niveau européen et international.En France, Patrick Kanner, nouveau ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, en a profité pour faire sa percée médiatique, en affirmant qu’il y aurait « une centaine de quartiers en France qui présentent des similitudes potentielles avec ce qui s’est passé à Molenbeek ». Selon lui, Molenbeek, « c’est une concentration énorme de pauvreté et de chômage, c’est un sys-tème ultra communautariste, c’est un système mafieux avec une économie souterraine, c’est un système où les ser-vices publics ont quasiment disparu, c’est un système où les élus ont baissé les bras ». Ces déclarations, prétendu-ment « lucides » ont vivement été saluées par la droite et le Front national. Elles s’appuient sur une réalité : le cumul dans de nombreux quartiers populaires de la pauvreté et du chômage, du développement des trafics, de la dégradation de l’habitat et de l’abandon des services publics. Elle s’appuie également sur le fait que les groupes terroristes peuvent espé-rer y trouver un terrain favorable pour fanatiser et embrigader quelques jeunes en déroute. Mais de telles déclarations sont fausses et dange-reuses, car elles accréditent l’idée que les quartiers populaires sinistrés seraient des bastions terroristes et

des menaces « pour la République ». C’est une nouvelle fois une stigmati-sation de ces quartiers qui peut très rapidement conduire à flirter avec la criminalisation de la pauvreté et le basculement dans l’islamophobie. Pour leurs habitants, c’est la double peine !Dans le même temps, alors que l’aus-térité continue ses ravages en matière d’éducation, de santé, de logement, et que ne cesse de grossir les rangs des pauvres, des précaires et des chô-meurs, l’argent ne manque jamais pour renforcer, réorganiser et surar-mer les « forces de l’ordre » : nou-veaux équipements pour la police et la gendarmerie, très forte pression pour l’armement des policiers munici-paux… Pour le justifier, on continuera certai-nement à nous annoncer régulière-ment que tel ou tel attentat majeur en préparation a pu être déjoué, mais tout le monde a compris que ni l’in-tensification de la « guerre contre le terrorisme », ni l’escalade sécuritaire ne seront en mesure de protéger réel-lement les populations. Les seuls vrais barrages que nous pourrons dresser contre le terrorisme, sont l’unité populaire et la solidarité, l’organisation et le développement des résistances ouvrières et popu-laires aux politiques d’austérité, de réaction et de guerre… et la perspec-tive d’un changement radical de société sur des bases progressistes. ★

Le 13 mars, après Bamako en novembre 2015 (22 morts) et Ouagadougou en janvier 2016

(30 morts), la Côte d’Ivoire était à son tour frappée par un attentat revendiqué par Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) : les assaillants ont attaqué trois hôtels sur la plage de Grand-Bassam, à l’est d’Abidjan (18 morts). Dans son communiqué, AQMI a précisé que cette attaque visait la France « et ses intérêts dans les pays participant aux opérations Serval et Barkhane » et qu’elle faisait partie « d’un plan visant les foyers des croisés et leurs lieux de rassemblement ». La Côte d’Ivoire, où sont basés 600 sol-dats français et où vivent 18 000 « expatriés », figurait donc, tout comme le Sénégal, parmi les cibles potentielles d’AQMI. Hollande a immédiatement réagi, promettant d’intensifier la « coopération » de la France dans la lutte contre le terro-risme et précisant qu’elle apportait « son soutien logistique et de renseigne-ment à la Côte d’Ivoire pour retrouver les agresseurs ». Deux jours plus tard,

J.-M. Ayrault et B. Cazeneuve se sont rendus à Abidjan. Le nouveau ministre des Affaires étrangères a, tout naturellement, commencé par l’incontournable couplet sur la guerre de civilisation : « Entre ce qui s’est passé ici et ce qui s’est passé à Paris en novembre, il n’y a pas de différence. Nous sommes la cible de la même vio-lence. Ce qui est en cause, c’est notre modèle de société, que nous devons défendre avec la conviction et les moyens nécessaires. ». Puis notre ministre de l’Intérieur est passé aux choses concrètes : « La France va renforcer la formation et l’appui déjà donnés aux forces d’intervention rapide ivoiriennes pour que l’ensemble du territoire soit quadrillé, aux secours, aux services de renseignement et de police judiciaire. » En contrepartie de cette ingérence grossière, Ouattara a demandé à l’im-périalisme français un soutien devant le Conseil de sécurité des Nations unies pour la levée totale de l’embar-go sur ses importations d’armes (embargo déjà allégé depuis avril 2014). Ce que Paris fera volontiers,

d’autant qu’il n’attend que ça pour encaisser le chèque des hélicoptères et des navires de guerre qu’il veut vendre à la Côte d’Ivoire !Dans l’enthousiasme, B. Cazeneuve a également annoncé, depuis Abidjan, le déploiement d’une équipe du GIGN à Ouagadougou « pour dispenser des conseils en cas d’attaque dans la région et assurer la coordination d’actions anti-terroristes si nécessaire ». Le seul pro-blème, c’est que les autorités burki-nabè, non prévenues, l’ont appris comme tout le monde par la presse ! Cette façon de faire est significative du mépris et de l’arrogance de l’impé-rialisme français qui se croit encore chez lui dans ses anciennes colonies. Elle a suscité indignation et colère au Burkina. La presse française elle-même a dû se faire l’écho de la prise de position du MBDHP et de la décla-ration de son président : « En l’espace de quatre mois, il y a eu trois attaques dans la sous-région : Bamako, Ouagadougou, et maintenant Grand-Bassam. Force est de constater que la présence des troupes étrangères sur nos

sols n’a pas empêché les djihadistes d’attaquer. Cette présence nous crée plus de problèmes qu’autre chose. » La « solidarité » que l’impérialisme fran-çais prétend manifester aux pays du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, loin d’aider les peuples de ces pays, ne fait que les exposer davantage aux attaques des commandos djihadistes.

Voilà pourquoi, avec les organisations révolutionnaires et démocratiques du Burkina et de tous les pays de la région, nous nous mobilisons et appelons les progressistes en France à se mobiliser pour l’arrêt des opérations militaires et le retrait des troupes françaises d’Afrique !

Attentat en Côte d’Ivoire

Visite éclair d’Ayrault - Cazeneuve

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La Forge 5Société Avril 2016

Budgets municipaux : le cas de Montreuil(ou les contradictions d’une mairie de « gauche »)

Seine - Saint - Denis (93)

Professeurs des écoles non remplacés

La question de la réduction des dotations de l’État aux com-munes (1) en même temps que le

transfert à celles-ci de nouvelles charges posent, à toutes, et en parti-culier à celles dont la population est la plus pauvre, la plus fragile, celle qui a le plus de besoins sociaux, d’énormes difficultés. Certaines, et notamment les mairies de droite et d’extrême droite, ont décidé de faire des coupes sombres aux caractères idéologiques bien mar-qués : tentatives de fermeture des bourses du travail, suppression des subventions aux associations antira-cistes, féministes, de solidarité aux étrangers, abandon de construction de mosquée… Mais toutes, les unes après les autres, s’attaquent à la variable d’ajustement que représente la masse salariale. Ce sont donc les communaux, les salariés de la fonc-tion publique territoriale, qui sont les premières victimes de ces budgets de rigueur : jours fériés, primes et autres avantages acquis supprimés, CDD non renouvelés. Par ricochet et dans un deuxième temps, ce seront les usa-gers populaires des services publics de ces communes qui en subiront les conséquences : moins de personnel, donc horaires d’ouverture réduits, attentes, services dégradés, voire pour certains, supprimés.

A Montreuil (93), l’exécutif municipal élu en 2014 l’a été sur une liste Front de gauche, liste qui a fait alliance, au second tour, avec le PS. Succédant à Voynet et aux Verts qui ont, il est vrai, laissé une situation financière désastreuse, le maire et son conseil municipal sont confrontés, comme beaucoup d’autres, à ce problème de

construire un budget à l’équilibre pour 2016. Dans une lettre ouverte adressée au président de la république, parue dans le journal de la ville et publiée sur son site, Patrice Bessac dénonce la responsabilité du gouvernement dans les difficultés que connaît sa commune. Nous pourrions reprendre à notre compte plusieurs de ses argu-ments et soutenir l’exigence qu’il exprime : « que le montant des dota-tions qui nous sont dues nous soit réglé » ; Philippe Lamarche, adjoint au maire en charge des finances, répondant aux questions du Montreuillois (journal municipal) explique même : « L’austérité imposée par le gouvernement est intenable et étrangle l’action de notre ville. Tout cela afin de financer des exonérations pour le patronat, au mépris des dépenses publiques utiles à la vie des citoyens. » Là encore, c’est une dénonciation que nous pourrions reprendre à notre compte. Mais là où nous ne sommes plus d’accord, c’est dans les solutions que l’exécutif municipal a trouvé pour élaborer son budget. Le maire et ses conseillers se targuent de ne pas avoir augmenté les impôts de la commune. Ils insistent égale-ment sur le fait que la part des inves-tissements n’a pas diminué. Mais en voulant rester dans une gestion qui se veut responsable, P. Bessac et son équipe ont décidé de faire des écono-mies sur la masse salariale. C’est ce que les agents municipaux, massive-ment en grève le 23 mars et réunis en intersyndicale, sont venus expliquer à la tribune du meeting du collectif contre la réforme du code du travail tenu dans la salle des fêtes de la

mairie le mercredi 23 mars au soir. « La municipalité applique sur le plan local l’austérité qu’elle condamne au plan national » dénoncent, dans leur tract, les syndicalistes. Et ils ont rai-son ! Les municipalités, et notamment celles qui se disent de gauche, ne peuvent sortir de cette contradiction que si elles rompent avec une gestion communale qui reste dans les cadres institutionnels existants. Dénoncer, dans sa lettre au président, ce qu’a coûté à la municipalité la réforme des rythmes scolaires (un surcoût de 1,5 million d’euros), c’est bien, mais une municipalité de « rupture avec le système » aurait pu refuser cette réforme (et les coûts y afférant) en s’appuyant sur la mobilisation des parents et des enseignants, qui exis-tait et cherchait à se développer, et en fédérant les municipalités qui se retrouvaient dans ce refus. Quand Monsieur Bartelone était encore dans l’opposition, il avait brandi la menace de ne pas payer les intérêts des prêts

toxiques du département, il avait même parlé d’en appeler à la mobili-sation... avant d’être nommé par Hollande à la tête du Parlement. Une politique de rupture avec la politique d’austérité suppose de s’appuyer sur la mobilisation des travailleurs et des usagers populaires pour « désobéir » aux mesures imposées par le gouver-nement. Mais la municipalité de Montreuil, comme le montre la lec-ture attentive de sa lettre, veut rester « dans les clous » et ne s’autorise qu’à des adresses qui risquent fort de res-ter lettre morte. Il lui faudra donc faire face à la mobilisation des agents qui ne veulent pas que cette poli-tique se fasse sur leur dos et sont conscients que ce sont les usagers des services publics municipaux qui en feront également les frais. ★

(1) Baisse de la dotation globale de fonctionnement de l’État sur trois ans (2015-2017) : 11 milliards d’euros décidés dans le cadre d’un plan d’économie de 50 milliards.

Depuis le mois de janvier, nous assistons à une réelle dégrada-tion des conditions de travail

pour les équipes enseignantes de la Seine-Saint-Denis et notamment celles du bassin 1. Ce bassin regroupe les communes les plus pauvres du département : La Courneuve, Stains, Aubervilliers, Epinay-sur-Seine, Villetaneuse, Saint-Ouen, Saint-Denis…En effet, les remplacements des collè-gues en arrêt maladie ne sont plus assurés. Et qui doit supporter ce manque de personnel ? Les élèves ainsi que les collègues présents. Car, en cas d’absence d’un enseignant, les élèves de la classe en question sont répartis dans les autres classes, ce qui signifie surcharge de travail pour les enseignants présents et des enfants moins bien encadrés et pris

en charge. Accumulant de la fatigue, le personnel, ATSEM comme ensei-gnants, n’en peut plus. Certaines écoles ont pris la décision, même en se sachant hors cadre légal, de demander aux parents des élèves des classes non remplacées de garder leur enfant chez eux. Mais cela est-il la solution ? Comment peut-on accepter plus longtemps que des élèves n’aillent pas à l’école pendant des semaines parce que l’Education Nationale n’assume pas son rôle ?Dans plusieurs écoles du départe-ment, et notamment dans le bassin 1, des associations de parents d’élèves (FCPE notamment) ont proposé une journée d’action, le mercredi 30 mars, pour protester d’une manière ou d’une autre contre le non-remplace-ment des professeurs absents. Dans une école de La Courneuve, une

enseignante part en congé maternité sans remplacement sachant qu’il est obligatoire d’informer sa hiérarchie à 3 mois de grossesse et donc que ce remplacement est prévu depuis plu-sieurs mois. Il faut aussi souligner la qualité de ces personnels remplaçants qui ne sont finalement que des victimes du système. En effet, pour beaucoup, ce sont des personnes non formées, juste qualifiées d’un Master (quelle que soit la discipline), qui n’ont par-fois jamais été confrontées à un groupe d’enfants, mais qui se voient obligées d’accepter l’offre de Pôle Emploi sous peine d’être radiées et de ne plus percevoir d’indemnités. On sacrifie nos enfants, souvent ceux des familles les plus en difficulté, dans la précarité, ceux qui ont le plus besoin de l’école, en leur proposant

au mieux un remplaçant « Pôle emploi » et, au pire, personne !Nous pouvons parler d’une Éducation nationale à deux vitesses, d’une réelle DISCRIMINATION des quartiers populaires et d’une sérieuse dégrada-tion des conditions de travail des professeurs dans le 1er degré. Il a été prouvé qu’en Seine-Saint-Denis, un élève perd 1 année entière de scola-rité suite au non-remplacement des professeurs.Nous exigeons le recrutement de per-sonnels formés, sur la base de concours, avec un niveau d’étude de 5 ans minimum (Master) et une for-mation pédagogique adaptée à l’en-seignement à de jeunes enfants. ★

Correspondance

Les exigences de l’intersyndicale (CGT, FSU, FO, CNT) des territoriaux de Montreuil qui refusent que le personnel communal soit la variable d’ajustement budgétaire !- Maintien des congés de pré-retraite (de 1 à 3 mois selon l’ancienneté) - Maintien de la subvention au Comité des Œuvres Sociales (refus de la

baisse de 10 %)- Maintien de la prime d’installation (2055,51 €) pour tous les agents

mis en stage- Que les engagements pris par le maire en septembre 2015 soient mis

en œuvre (plan de titularisation pluriannuel, embauche des emplois d’avenir, remplacement des congés maternité, étude objective de la souffrance au travail,…)

- Transparence des choix budgétaires pour les agents et les usagers

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La Forge6Avril 2016 Société

Une première victoire des mobilisations contre l’état d’urgence

La Constitutionnalisation de l’état d’urgence et de la déchéance de natio-nalité n‘est pas passée ! C’est une victoire à l’actif des mobilisations qui se sont largement expri-

mées contre ces mesures réactionnaires ! Peu après les attentats, le 22 novembre, malgré l’interdiction de la manifesta-tion prévue de longue date pour l’accueil des réfugiés, des centaines de per-sonnes se sont rassemblées à Paris, à Toulouse, à Nantes, et ont dénoncé la politique de guerre et l’état d’urgence. Cette manifestation à laquelle nous avons appelé, combative et unitaire, a brisé l’état de choc et a lancé la résis-tance. Puis, dans plusieurs villes, ce sont des manifestations de retraités qui ont défié le gouvernement et ses mesures d’austérité, ainsi que la chaîne humaine contre l’état d’urgence climatique, de République à Nation. Et au nom de la sécurité nationale, Cop 21 oblige, des militants écologistes, assimilés aux terroristes, ont été la cible d’arrestations et assignations à résidence.Dans ce contexte, il était particulièrement important de manifester contre la criminalisation des syndicalistes qui se battent contre les licenciements et la répression patronale, encouragée par l’État. C’est pourquoi, quelques jours après, le 2 décembre, les rassemblements de soutien des salariés d’Air France, qui passaient en jugement au Tribunal de Bobigny, et qui ont finalement été autorisés, ont rassemblé plusieurs milliers de personnes à Paris et en province.Une fois encore, le mouvement de colère et de soutien a été au rendez-vous, et s’est exprimé avec force, dans plusieurs villes de France, pour soutenir les Goodyear. Leur condamnation est une décision politique du gouvernement : c’est le procureur de la République qui a requis cette condamnation alors que la direction de Goodyear avait retiré ses plaintes.

L’opposition à l’état d’urgence s’est structurée à l’initiative des Collectifs « Stop état d’urgence » et « On ne cèdera pas », organisant un très large front allant des organisations politiques aux syndicats et associations, aux collectifs de quartiers et aux victimes de la répression, aux jeunes des réseaux sociaux et des facs. Ils ont mis des milliers de personnes dans les rues, notamment le 30 janvier, et dans des réunions de discussion et d’information, dans tout le pays.

C’est cette pression de la rue et de l’opinion qui a été décisive, et qui a incité un certain nombre de parlementaires à reculer, même si l’opposition de la droite était plutôt destinée à saper la politique de Hollande.

La loi Urvoas, danger pour nos libertésLa mobilisation est entrée dans une nouvelle phase, avec la présentation, par le gouvernement de la loi « Urvoas ». Les mesures introduites dans cette loi « contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale » comportent des mesures de l’état d’urgence. On peut redouter des mesures sécuritaires introduites qu’elles se généralisent au nom de la lutte contre le terrorisme. La justice sera plus dépendante de l’État au détriment des droits à la défense, et plus de pouvoir est accordé aux policiers : - avec les perquisitions de nuit, les IMSI catcher (dispositifs qui espionnent les téléphones de tout un quartier), les captations d’images et de données informatiques mais aussi la marginalisation des procédures d’informations judiciaires,- avec les fouilles de bagages et les retenues administratives pour vérifica-tions de situation, et une ampleur du contrôle du procureur sans retenue,- avec les assignations à résidence et les réponses judiciaires à l’égard des personnes revenant d’Irak ou de Syrie, les contrôles respectifs des juges admi-nistratifs et juges judiciaires. Ces dispositions signifient la permanence de l’état d’urgence. Et, cerise sur le gâteau, le gouvernement cède aux revendications de certains syndicats de policiers les plus à droite, et au nom de la « légitime défense », leur accorde un permis de tirer et de tuer, en étendant les conditions de l’usage des armes. Engagé en procédure accélérée, le projet de loi sera soumis au vote solennel des sénateurs mardi prochain 5 mars. C’est pourquoi les Collectifs appellent à un rassemblement devant le Sénat de 13 h à 15 h. Contre cette nouvelle loi scélérate, nous continuerons à nous battre, tous ensemble !

Communiqué Abandon de la constitutionnalisation de l’état d¹urgence

et de la déchéance, tant mieux pour nos libertés !

Le collectif « Stop état d¹urgence » se réjouit du renoncement du chef de l’État à constitutionnaliser l’état d’urgence et la déchéance de la nationalité, contre lesquelles le collectif « Stop état d¹urgence » - qui réunit une soixantaine d¹organisations - s’était mobilisé à plusieurs reprises depuis novembre, puisqu¹il avait servit à interdire de nom-breuses manifestations, entraînant dans la spirale de la répression poli-cière de nombreux militant-e-s des mouvements sociaux, des personnes de confession musulmane ou supposées l’être, des habitants des quar-tiers populaires...La lutte contre cette réforme liberticide a donc porté ses fruits.Mais il ne s’agit que d’une première étape, car l’état d¹urgence est tou-jours en vigueur, et le projet de loi Urvoas (Lutte contre le crime orga-nisé et le terrorisme), actuellement au Sénat jusqu¹au 5 avril, introduit dans la loi courante des mesures spécifiques à l’état d¹urgence, telles que les perquisitions de nuit ou les assignations à résidence, sur déci-sion du parquet.Autre exemple, le projet de loi autorisera un policier à tirer hors légi-time défense. Ce pouvoir accru de la police française est éminemment dangereux dans le contexte d¹impunité notoire dont elle bénéficie.L’ensemble de ces mesures menacent d’instaurer un état d’exception permanent, et reste dangereux pour nos libertés.Et c’est pourquoi nous demandons le retrait de ce projet de loi, ainsi que la levée de l’état d¹urgence.Nous appelons, avec le collectif « Nous ne cèderons pas », à un rassem-blement mardi 5 avril de 13 h à 15 h au Sénat (RER Luxembourg) contre le projet de loi Urvoas.

MobilisationsUne belle manifestation, unitaire et dynamique, le 12 mars à Paris, a clamé avec force son refus de l’atteinte aux libertés, sa condamnation de l’état d’urgence et de la déchéance de nationalité.

Le 21 mars, une réunion publique était organisée à la Bourse du Travail, co-animée par le Collectif Stop à l’état d’urgence, une repré-sentante du Syndicat de la Magistrature, et une autre du Syndicat des Avocats. Une réunion riche et argumentée sur ce qui, dans la loi, motive l’inquiétude sur les dérives liberticides. La salle a réagi à ces informations, avec intérêt, en soulignant les dérives déjà existantes, et qui se sont d’autant plus manifestées avec l’état d’urgence.

Départ de la manifestation à Saint-Michel du Collectif « Stop état d’urgence » qui rejoignait le rassemblement organisé le rassemblement devant le Sénat organisé par « Nous ne céderons pas »

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La Forge 7Société Avril 2016

Sortir du nucléaire !

Il y 30 ans, TchernobylLe 26 avril 1986, le réacteur n°4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl explosait. Une quantité considérable de radioéléments fut projetée dans l’atmosphère. Ils ont touché principa-lement le Bélarus (Biélorussie), l’Ukraine et l’Ouest de la Russie, où des millions de personnes vivent encore aujourd’hui dans des zones fortement contaminées. Ils se sont également dispersés sur une grande partie de l’Eu-rope, notamment en Allemagne, Autriche, Suède et Finlande. En France, les régions les plus tou-chées ont été l’Alsace, les Alpes et la Corse. Les éléments radioac-tifs ont pénétré les sols, ils sont entrés dans la chaîne alimen-taire, se sont accumulés dans les organismes multipliant les can-cers - notamment les cancers de la thyroïde et les leucémies -, de nombreuses autres pathologies, provoquant un fort accroisse-ment des malformations congé-nitales et de la mortalité périna-tale. C’est en dizaines, voire en centaines d’années que se mesu-reront les conséquences de cet accident. Il faudra, en effet, attendre 300 ans pour que prennent fin les effets nocifs du Césium 137 et du Strontium 90, massivement répandus par l’explo-sion et le déplacement des nuages radioactifs.La catastrophe et ses suites seraient, à ce jour, responsables de près d’un million de morts (985 000). Entre deux et trois millions de personnes ont dû être évacuées de la zone la plus contaminée. L’économie s‘est effondrée et, trente ans plus tard, la sécurisation du site n’est toujours pas définitivement assurée. Le sarco-phage de béton construit dans l’ur-gence autour du réacteur éventré s’est rapidement fissuré. Vinci, Bouygues et consorts ont profité du marché pharaonique de la construc-tion d’une immense arche, mais des villes, des villages, et les campagnes restent inhabitables. La crise sociale, politique et militaire que vit aujourd’hui l’Ukraine, ne fait qu’ac-centuer les choses : les hôpitaux manquent de moyens et sont totale-ment tributaires des financements internationaux, les opérations mili-taires font planer de graves dangers

sur les autres sites nucléaires ukrai-niens.Catastrophe humaine et écologique, économique et financière, Tchernobyl restera aussi le symbole du mensonge et de la déroute démocratique. En France, responsables politiques et journalistes aux ordres avaient affir-mé de concert que le nuage de Tchernobyl s’était fait refouler à la frontière française !

Pendant des années, on a tenté de nous faire croire qu’un accident de ce type ne pourrait pas arriver ailleurs, qu’il était lié à l’obsolescence des équipements et à l’incurie bureaucra-tique dans une URSS en déliques-cence. Et pourtant, vingt-cinq ans plus tard, un autre accident d’une ampleur tout aussi grave est arrivé à Fukushima, au Japon, dans un pays de haute technologie et dont le sys-tème politique libéral est proche de celui des pays occidentaux. Ces deux accidents ont fait largement la preuve, qu’avec ou sans erreur humaine, les accidents nucléaires sont possibles partout et immaîtri-sables. L’accident sur le chantier de Bure nous rappelle par ailleurs qu’en dehors des conséquences des catas-trophes nucléaires, un autre héritage macabre est laissé aux générations futures : celui des déchets nucléaires qu’à l’heure actuelle personne ne sait traiter. Que faire de ces produits qui resteront radioactifs pendant des

centaines de milliers d’années (plus de 100 000 ans !) ? Le projet de les enfouir à Bure, petit village de la Meuse de 90 habitants, nourrit une légitime et importante opposition. 300 km de galeries souterraines devraient y être creusées pour y enfouir les déchets hautement radioactifs qui transiteraient sur toutes les routes et voies ferrées d’Europe pour y être acheminés. Ce

projet, dont le coût est estimé entre 15 et 35 milliards d’euros selon les sources, fait partie des grands chantiers des années à venir. L’ANDRA (Agence natio-nale pour la gestion des déchets radioactifs) affirme que le sous-sol est d’une stabilité inébran-lable et d’une sûreté totale : l’éboulement qui s’est produit le 26 janvier 2016 dans les galeries souterraines du chantier, provo-quant un mort et un blessé, confirme pourtant, s’il en était besoin, qu’un enfouissement définitif et sans danger est une vue de l’esprit. Nous soutenons les exigences du Réseau Sortir du nucléaire et de la Coordination Bure Stop : « Cher, dangereux et insensé, le projet Cigéo/BURE doit être aban-donné immédiatement et la France doit tout mettre en œuvre pour stopper en urgence sa production de déchets radioactifs ».

Résister au diktat du « lobby » nucléaire ! Depuis les années 70, la filière élec-tronucléaire est une filière straté-gique pour l’impérialisme français. La politique du tout-nucléaire, qui s’est imposée sous Giscard, s’est poursui-vie sous Mitterrand, Chirac, Sarkozy, et aujourd’hui sous Hollande. Leurs gouvernements successifs n’ont jamais pris en compte autre chose que l’intérêt exclusif des monopoles qui font la loi dans ce secteur (EDF, Areva, Alstom, Bouygues, Schneider Electric,…). L’État s’est incliné devant tous leurs diktats : choix techniques, mise à dispositions de milliards de francs puis d’’euros, désinformation, musèlement de la contestation, ouverture au privé du capital des entreprises publiques de l’énergie et développement de la sous-traitance qui accroît les risques, pour les travailleurs du nucléaire eux-mêmes et pour la population…

Parmi les preuves de cette soumission aux impératifs de profit des mono-poles du nucléaire figurent les tergi-versations du gouvernement face à l’exigence de fermeture des centrales les plus anciennes. Alors qu’EDF cherche à obtenir l’autorisation de prolonger de plusieurs dizaines d’an-nées la durée de vie des réacteurs nucléaires, ces tergiversations inquiètent les pays voisins qui montent au créneau. C’est le cas de l’Allemagne, voisine de Fessenheim, mais aussi de la Suisse : le 3 mars 2016, la ville et le canton de Genève ont déposé à Paris une plainte contre X pour « mise en danger de la vie d’autrui et pollution des eaux », visant la centrale nucléaire française du Bugey, particulièrement vétuste. La sortie du nucléaire ne peut certes se faire que progressivement, en lien avec le développement de la produc-tion d’énergies renouvelables, mais le démantèlement des centrales les plus anciennes et les plus dangereuses doit se faire immédiatement, car si toutes sont dangereuses, celles-ci présentent un risque encore plus élevé. Il est impératif d’en exiger l’arrêt ! Les sommes faramineuses que l’État accepte d’engloutir dans la filière électronucléaire est une autre expres-sion de la soumission de la puissance publique aux monopoles qui la dominent. La fuite en avant dans le fiasco technique, économique et financier que représente l’EPR (à l’image de ce qu’avait déjà représen-té, à une moindre échelle, le fiasco du « Superphénix » de Creys-Malville), en donne la mesure. Il n’en reste pas moins que l’impérialisme français, sur ce terrain comme sur bien d’autres, est en difficulté : la chute d’Areva, la démission récente du directeur finan-cier d’EDF affolé par le coût du projet de construction de deux réacteurs EPR en Grande-Bretagne, sont des manifestations de ces difficultés. Nous refusons que les peuples, les travailleurs de ces secteurs et les populations soient mis en danger et qu’ils fassent les frais de cette course effrénée aux profits. C’est pour cela que nous disons qu’il faut arrêter immédiatement les centrales les plus anciennes, ne pas en construire de nouvelles, développer la production d’électri-cité à partir d’énergies renouve-lables et sortir aussi vite que pos-sible de l’électronucléaire ! ★

Qu’il serve à armer des bombes ou à produire de l’électricité, le nucléaire forme avec le capitalisme un mélange létal. Les catastrophes récentes de Tchernobyl et de Fukushima comme hier celles de Hiroshima et Nagasaki en sont de terribles témoignages. L’accident de Bure (Meuse) met le doigt sur la question non résolue du traitement des déchets. Alors que les installations nucléaires sont désignées comme des cibles potentielles d’attentats terroristes, ces menaces réelles ou supposées nourrissent l’escalade sécuritaire, tout en mettant

le doigt sur la dangerosité du nucléaire dans un monde où progressent l’instabilité politique et le chaos... Et que l’on ne nous parle pas « d’indépendance nationale » pour une indus-trie entièrement assise sur le pillage impérialiste : les guerres que mène la France dans le Sahel n’y sont pas étran-gères et le scandale humanitaire et écologique qu’Areva fait vivre à la population nigérienne se double, comme nous pouvons le lire en dernière page de ce journal, d’un soutien criminel aux dirigeants complaisants de ce pays !

A Tchernobyl, dès les premières heures, puis durant des mois, des dizaines de milliers de pompiers et de « liquidateurs » ont sacrifié leur santé et, pour beaucoup, leur vie.

Page 8: La forge avril 2016

La Forge8Avril 2016 Mouvement ouvrier et syndical

Echos des discussions dans les syndicatsEn AG, le débat des syn-dicats pour s’unifier à la base dans la construction du rapport de forceLe 31 mars, l’UD CGT du Cher avait prévu de rassembler les syndicats, après la manif, autour d’un barbecue abrité animé par le camion sono, pour échanger sur le mouvement et renforcer la détermination pour le retrait. Une AG des syndicats du privé, du public et un groupe de jeunes de la CGT s’est donc tenue à l’UD avec, à l’ordre du jour, une seule question en débat : la CGT et l’intersyndicale nationale appellent à deux journées d’action le 5 et le 9 avril. Les inter-ventions ont été très précieuses car elles font remonter l’état d’esprit des salariés de chaque secteur. Elles ont été animées par une volonté de s’uni-fier sur comment ce mouvement se construit dans les conditions d’au-jourd’hui, qui ne sont pas compa-rables aux mouvements précédents. Il est à noter qu’aucun syndicat n’est venu sur les propositions d’un « nou-veau code du travail ». L’unité s’est consolidée sur la néces-sité de mener et d’amplifier la bataille

pour le retrait et la conviction s’est renforcée que seul le rapport de force peut changer la donne et ouvrir des perspectives. Les syndicats présents se retrouvent dans l’appréciation confédérale sur l’importance du 31 avec le cap du million de manifes-tants, ce qui se traduit par l’objectif de 5 000 manifestants dans le Cher. Aux réticences venant de respon-sables de la fédération de La Poste qui ont mis en avant les conditions de préavis de grève pour ne pas par-ticiper au 5 et d’envisager le 9 avec réserve, ce sont les cheminots qui ont répondu : ils ont contourné les limites au droit de grève par des pré-avis locaux et régionaux qui ont permis aux cheminots de contribuer au succès du 31. Ils participeront à l’initiative du 5 pour un mouvement de grève le 9. La discussion a porté sur l’appel du 5 à l’initiative des organisations syndi-cales des étudiants et lycéens. A ceux qui défendaient le point de vue que la CGT participe en soutien aux ini-tiatives des jeunes, qu’elle se met en quelque sorte « derrière eux », des responsables de syndicats sont mon-tés au créneau pour dire leur désac-cord avec cette conception de la construction du mouvement, qui est d’abord un mouvement des salariés et des organisations syndicales de sala-riés. Les jeunes lycéens et étudiants, qui ont compris que cette loi mena-

çait leur avenir, sont venus grossir les rangs du mouvement, tout en mobili-sant les jeunes. D’autres interven-tions ont ajouté qu’on ne peut faire dépendre la suite du mouvement des vacances scolaires. L’intervention pour les Métaux du Cher sur ce qui remonte des boîtes, a mis en avant une mobilisation en hausse mais encore très inégale, avec des difficul-tés de tracter, car les ouvriers, y compris des délégués, sont sous forte pression patronale.

A Bourges, comme partout ailleurs, ce qui est nouveau, c’est la jeunesse ouvrière qui se mobilise et entraîne. On le voit chez Michelin, MBDA, à Auxitrol, avec la grève des jeunes ouvriers qui représentent 90 % de la production, pour les 100 euros.De plus, la jeunesse étudiante d’au-jourd’hui n’est plus celle du CPE, 73 % des étudiants sont obligés de travailler, dans des emplois très pré-caires, et ils partagent cette même

précarité avec les jeunes ouvriers.Ce qui s’est dégagé de ce riche débat, c’est de faire du 5 une journée pour, d’abord et en priorité, ancrer le retrait de la loi dans les ateliers et services, pour réussir le 9, pour amplifier le mouvement en s’ap-puyant sur le fait que c’est un samedi et qu’il est plus facile de faire mani-fester les salariés, leurs familles, et tous ceux et celles pour qui il est très difficile de faire grève. Il faut aussi inscrire le mouvement dans la durée.

Il y a également une opposition à l’objec-tif prioritaire fixé pour le 5, d’aller interpeller les dépu-tés. Ce serait mettre le mouvement sur le temps parlementaire, avec le risque, dénoncé par beau-coup, de cautionner la démarche des

amendements et, en fin de compte, la négociation du texte de loi, ce qui est contraire au mot d’ordre de retrait. La priorité, c’est d’aller vers les salariés dans les entreprises et services. Sur ces bases, l’AG s’est uni-fiée et décision a été prise par l’UD de faire comme le 24 mars un rassemble-ment à 17 h sans appel à la grève, avec un dispositif de distribution de tracts pour faire grandir les manifes-tations du 9 avril. ★

Amplifier la mobilisation pour le retrait de la loi El Khomri

Avec ce qu’ils appellent « la philoso-phie » et « l’architecture », cette « refondation sociale » a pour clef de voûte l’accord d’entreprise étendu à tous les champs du code du travail. L’accord d’entreprise aurait force de loi, en renversant le double principe de la hiérarchie des normes et de l’application de la norme la plus favo-rable au salarié (appelé aussi principe de faveur). En disant que « les clauses d’un accord collectif (entendez accord d’entreprise) s’applique au contrat de travail », la finalité est de dépouiller le contrat de travail des normes sociales protectrices, de l’obligation de compensations, toujours insuffi-santes, en niant le lien de subordina-tion entre l’ouvrier qui est obligé de vendre sa force de travail et le patron qui l’achète et qui l’exploite.

Avec ces accords dans les entreprises s’appliquant au contrat de travail individuel, cette loi constitue une rupture avec le principe d’égalité

devant la loi quand on franchit la porte de l’entreprise. Avec un prin-cipe de faveur au bénéfice de l’entre-prise, les accords d’entreprise, en s’imposant au contrat de travail, transforme celui-ci en contrat de gré à gré fondé sur l’égalité entre per-sonnes comme un contrat de droit civil (voir les articles La Forge), un contrat de mise en concurrence indi-viduelle. La philosophie oppose aux droits collectifs, « ces libertés et droits de la personne au travail »… avec la possibilité d’y apporter des limitations « si elles sont justifiées par l’exercice d’autres libertés ou par la nécessité du bon fonctionnement de l’entreprise ». Tout est dit dans cette dernière phrase : c’est le bon fonctionnement de l’entreprise qui devient le but du code du travail à la sauce El Khomri, alors que le code du travail tel qu’il s’est construit, avec ses manques et ses imperfections, à travers des combats, est basé sur l’idée que le salarié est dans un rap-port de subordination vis-à-vis du

patron et qu’il faut des règles, des compensations, valables pour tous, pour limiter, atténuer les consé-quences de ce rapport de subordina-tion.C’est bien parce que c’est la philoso-phie générale de cette loi, qu’elle n’est ni amendable ni négociable.

La ministre prête à des aménagements… en faveur des patronsLa ministre du travail continue à prétendre que la loi n’entraîne aucun recul pour les salariés, mais elle veut prendre en compte les inquiétudes des PME, qui craignent de ne pouvoir licencier facilement, pour pouvoir embaucher plus facilement…Ainsi, sur la définition du licencie-ment économique, le ministère amorce une distinction entre les PME et les grandes entreprises sur le nombre de trimestre des baisses de commandes et de chiffre d’affaires

pour motiver un licenciement. Plus de 4 pour les groupes, moins de 4 pour les PME. Si, côté PME, les patrons sont satis-faits de cette mesure qui leur permet effectivement de licencier plus facile-ment, les dirigeants des grands groupes ne s’inquiètent guère du rallongement de la période de baisse du chiffre d’affaires. Et l’examen par le juge, pour voir si la difficulté éco-nomique en France n’a pas été créée artificiellement par le groupe euro-péen, ne peut faire illusion. Ces mesures font l’impasse sur une réalité, à savoir qu’un très grand nombre de PME ne sont que des sous-traitants des groupes. Autrement dit, les baisses de commande, les chutes du CA sont des conséquences de choix faits par les grands groupes, donneurs d’ordre. C’est pourquoi, le mot d’ordre d’inter-diction des licenciements dans les groupes et les sous-traitants, reste totalement d’actualité. ★

Loi El Khomri

Ni amendable ni négociable ?

Piquet de grêve à Auxitrol

Page 9: La forge avril 2016

La Forge 9Avril 2016

Amplifier la mobilisation pour le retrait de la loi El Khomri

Echos de la mobilisation du 31 mars

Un cas concret : le temps de travail

Plus d’un million de manifestants, à Paris et dans les grandes villes, pour le retrait de la loi El Khomri. Partout, l’exigence du retrait du pro-jet de loi El Khomri. Partout, plus de monde que le 9 mars, notamment en province. Des manifestations mas-sives, combatives, déterminées. Si la CGT constituait partout le gros des troupes, FO et Solidaires avaient aussi bien mobilisés. L’idée est que l’on doit et l’on peut obtenir le retrait, mais que, pour cela, il faut encore élargir la mobilisation, et il y a des réserves ! La présence dans les cortèges de plusieurs villes de sec-tions ou autres structures d’organisa-tions syndicales de la CFDT, de l’UN-SA, et y compris la CFTC, montre que les directions de ces organisations qui ont avalisé ce projet n’ont pas convaincu l’ensemble de leurs mili-tants et qu’il est possible que ces brèches s’élargissent. Autre élément de ces manifesta-tions : plusieurs provocations poli-cières, avec des arrestations. A Grenoble, notamment, nos cama-rades soulignent : Un pas notable a été franchi dans la violence poli-cière. Alors que la CGT avait programmé, dans la soirée, une projection en plein air du film “Merci patron”, dans le parc où s’était terminée la manif, la préfec-ture, prenant prétexte de la “casse” de

vitrines par quelques groupes en queue de cortège, avait décidé ne plus tolérer le moindre attroupement au-delà de 16 heures. Elle a violemment évacué tous ceux qui n’avaient pas quitté le parc. Jusque dans la soirée, il y a eu des bles-sés et des arrestations. Un militant de la CGT jeunes a été mis en garde à vue. La solidarité s’est immédiatement organi-sée avec un rassemblement devant l’hô-tel de police : “Libérez nos camarades, Police partout, justice nulle part” !Le gouvernement tente de minimiser l’ampleur de la contestation, tout en multipliant les provocations. On ne lâchera pas ! RETRAIT ! Le succès de ces mobilisations par-tout en France (260 villes) qui ont mis plus d’un million de personnes dans les rues est indéniable. Les ministres, des responsables du PS qui sont intervenus, ont essayé de mini-miser ce succès. Le mot d’ordre est qu’il faut à présent passer à la discus-sion parlementaire et qu’il sera pos-sible à ce moment-là d’apporter des améliorations. La première annoncée par El Khomri, c’est de réduire à deux trimestres (au lieu de quatre) la durée de baisse d’activité et de diffi-cultés de trésorerie prise en compte dans les PME pour leur permettre de licencier. On voit dans quel sens le gouvernement entend améliorer la loi ! La bataille aujourd’hui, c’est

celle du nombre : gagner de plus en plus de personnes pour que les mani-festations soient encore plus mas-sives. Nos camarades dans le Cher insistent dans leurs discussions, dans les boîtes et sur les marchés, sur la pour-suite du mouvement jusqu’au retrait et la défiance vis-à-vis de tout ce qui amène à amender ou négocier le texte. Pour les militants de gauche, la question de la rupture avec le PS et la direction de la CFDT est une évidence. L’idée : c’est d’abord le rapport de force pour le retrait qui change la donne, pour les proposi-tions alternatives on verra après. (…) L’unité s’est faite pour ancrer le retrait dans les boîtes et services. C’est l’objec-tif du 5, avec comme orientation : on ne se tourne pas vers les députés et le temps parlementaire, on se tourne vers les tra-vailleurs à mobiliser, pour le 9 amplifier le mouvement et l’inscrire dans la durée, pour arracher le retrait.Il y a une autre dynamique qui s’est mise en branle, chez les jeunes et dans le mouvement syndical : celle d’un mouvement social qui veut obli-ger le gouvernement à retirer cette loi. « Ni amendable, ni négociable : retrait, retrait de la loi El Khomri ». L’activité du parti dans ces mobili-sationsDans toutes les villes où notre parti est organisé, nos camarades ont dif-fusé le tract du parti et vendu son

journal La Forge. Partout un très bon accueil, une grande ouverture pour connaître les analyses et positionne-ments politiques. Nos camarades de Strasbourg relèvent : l’intérêt pour ce que les militants ou les organisations avaient à apporter dans le débat poli-tique. Des personnes venaient spontané-ment nous réclamer La Forge pour connaître nos analyses de la situation. Beaucoup de jeunes étaient intéressés et certains n’ont pas hésité à laisser leurs coordonnées pour être informés ou invi-tés à nos rendez-vous-débats. La situa-tion interpelle ; il y a un réel intérêt à ce que disent les organisations politiques. La vente du journal s’est aussi faite sur la base de notre “UNE“ qui titrait sur le “combat pour une rupture avec le sys-tème capitaliste”. Cet état d’esprit, nos militants l’ont aussi noté dans les manifestations de Grenoble, Bordeaux, Paris… Dans plusieurs cor-tèges également (94, 95, à Grenoble, Toulouse,…) nos camarades, mili-tants syndicalistes, ont contribué à animer les voitures sono pour lancer les mots d’ordre.Quelques éléments spécifiques à noter

A BourgesLe 30 mars, dans le quartier populaire de Bourges nord, le meeting unitaire pour le retrait de la loi travail

Dans la négociation collective sur la durée du travail, les congés, repos, forfait jour, la « primauté de l’accord d’entreprise en matière de durée du travail devient le principe de droit commun », y compris sur les accords de branche qui voient leurs champs se rétrécir d’autant.

Prenons le cas de la durée du tra-vail. La loi prévoit trois niveaux : celui du code du travail actuel qui dit 48 heures maximum, 60 heures

possibles avec autorisation et 44 heures sur 16 semaines.

Elle introduit un deuxième niveau, celui de la négociation d’entre-prise, qui permet de passer à 46 heures sur 16 semaines. Et elle introduit des dispositions supplé-tives, à défaut d’accord, qui per-mettent de dépasser les 46 heures, par autorisation administrative et simple information du CE. L’accord d’entreprise est signé pour une

durée déterminée ou indéterminée avec un maximum de 5 ans. L’accord est public mais le patron peut s’opposer à sa publicité avec une confidentialité sur la stratégie de l’entreprise.

La loi permet aux OS (organisa-tions syndicales) représentant 30 % d’organiser un référendum dont le résultat s’impose aux syndicats majoritaires. Les OS majoritaires, avec une représentativité de 50 %,

perdent leur droit d’opposition.

Les accords d’entreprise portent sur le temps de travail jusqu’en 2019, date de clôture de la com-mission de refondation. A partir de cette date, ils pourront porter sur tous les sujets : baisse de salaire, 13e mois, etc. à travers des « accords de compétitivité » dits offensifs avec pour simple motif « de préserver et développer l’em-ploi ».

Ni négociable, ni amendableRETRAIT, RETRAIT du projet de loi Travail !Loi Travail = loi du CapitalNon, non, non, à la loi du Medef, à la loi des patrons !A ceux qui veulent, nous faire travailler plus et nous faire gagner moins, Nous répondons : RE-SIS-TANCE !Y’en a assez, assez de cette société qui gave les actionnaires et n’offre à la jeunesse que la précarité !

Les jeunes dans la galère, les vieux dans la misère, les femmes dans le précaire De cette société-là, on n’en veut pas, on la combatDes accords d’entreprise pour nous faire payer leur crise Des prud’hommes muselés pour mieux licencier De cette loi-là, on n’en veut pas, on la combat ;La loi El Khomri : 12 heures par jour sans voir le jour Ils pourront licencier sans trop d’indemnités Retrait retrait de la loi El Khomri

Le recul social ne se négocie pasLe recul social on le combat Retrait retrait de la loi El Khomri Une loi comme celle-là les patrons en rêvaient El Khomri l’a faitNous, on n’en veut pas, elle passera pas, elle pas-sera pasLa fin des 35 heures, des journées de 12 heures, des semaines de 60 heures Y’a rien à négocier tout est à jeter Retrait retrait de la loi El Khomri

Nos mots d’ordre

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La Forge10Avril 2016

La fermeture des sites Pôle emploi tous les après-midis semble incompréhensible, tant les

besoins des si nombreux chômeurs sont importants. Et pourtant, cette réforme est au cœur de la nouvelle organisation que veut imposer la direction de Pôle emploi. Les princi-paux syndicats du personnel, aux côtés des usagers, continuent à s’y opposer. Cette mobilisation s’inscrit dans le contexte tendu du projet de loi El Khomri, qui faciliterait les licenciements et aggraverait la préca-rité et le chômage.Après une grève le 22 octobre en Picardie, région qui a initié le proces-sus, le personnel de Pôle emploi s’est mis en grève en Languedoc-

Roussillon-Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes-Auvergne et Ile-de-France, le 8 février, en Aquitaine le 10 mars. En Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, c’est la seconde fois en quinze jours.

A ces occasions, les syn-dicalistes de Pôle emploi ont fait signer des péti-tions aux chômeurs qui ont été chaleureuse-ment accueillies par les usagers de Pôle emploi et plus largement. A Toulouse, la campagne intersyndicale de signa-tures de pétitions a recueilli 5 000 signa-tures remises à la direc-tion.

La mobilisation pour le retrait de la loi El Khomri pose notamment la question des licenciements. L’argument selon lequel les patrons

embaucheraient plus facilement s’ils pouvaient licencier plus rapidement est battu en brèche par la réalité de la montée du chômage. Les agents de Pôle emploi sont bien placés pour le savoir. Comme le souligne la pétition qu’ils font signer actuellement, la fermeture des agences l’après-midi va encore compliquer davantage les démarches des demandeurs d’emploi. Il faut donc poursuivre et amplifier cette mobilisation des syndicats de salariés de Pôle emploi et des deman-deurs d’emploi autour de la pétition ; il faut aussi travailler à mobiliser les personnels de Pôle emploi pour qu’ils participent massivement aux mobili-sations pour le retrait du projet de loi El Khomri. ★

C’est à la mi-mars, à l’occasion du rendez-vous salarial réunissant les organisations syndicales et

les employeurs de la fonction publique, qu’Annick Girardin, nou-velle ministre de la fonction publique, a annoncé une revalorisation du point d’indice de 1,2 %. Celle-ci se fera en deux temps, à hauteur de 0,6 % le 1er juillet 2016, et de 0,6 % au 1er février 2017.Le point d’indice, qui sert de base au calcul de la rémunération des fonc-tionnaires, a été gelé depuis 2010. Cinq années pendant lesquelles le pouvoir d’achat des salariés des trois fonctions publiques (d’État, hospita-lière, territoriale), a subi non seule-ment un coup d’arrêt mais une baisse. Et ce sont les agents de la catégorie C qui en ont le plus souffert avec des

salaires qui sont tombés sous le niveau du SMIC ! La droite et les grands médias sont montés immédiatement au créneau pour fustiger la mesure « électora-liste » et dénoncer ce que l’augmen-tation de 5,2 millions de fonction-naires allait coûter au pays ! A l’in-verse, peu de commentateurs ont calculé et publié les milliards d’éco-nomie faits sur le dos de ces agents pendant plus de 5 ans ! Sans compter que les effets de ce rattrapage déri-soire risquent fort d’être annulés par les attaques tout azimut de la poli-tique gouvernementale. Dotations aux collectivités locales en baisse, hôpitaux à la diète, ministères – à l’exception de celui de la guerre – au régime minceur. Ce qui signifie que le peu qui est donné d’une main risque

fort d’être repris de l’autre. En effet, les baisses des budgets des municipalités se traduisent partout par des suppressions de jours de congé et de primes des agents, les travailleurs hospitaliers sont menacés par le plan Hirsch de perdre 4 jours de repos, et les fonctionnaires d’État sont notamment touchés par les sup-pressions de postes et l’augmentation de l’intensité du travail.

Colère des travailleurs de la fonction publiqueBref, cette augmentation future, à dose homéopathique, non seulement n’a pas satisfait les travailleurs du public, mais elle les a mis en colère ! Grossière manœuvre au moment de la montée dans tout le pays de l’opposi-

tion à la loi El Khomri, le gouverne-ment Valls pensait-il ainsi acheter ces travailleurs et jouer encore une fois de la division public/privé ? C’est tout le contraire qui s’est produit. Cette mesure a provoqué leur colère et leur indignation. Comme le signale un de nos correspondants dans son compte rendu de la mobilisation du 31 mars :

« L’annonce de l’augmentation du point d’indice pour les fonction-naires a eu l’effet inverse à ce que le gouvernement espérait. Non seule-ment il n’a pas provoqué de divisions entre le public et le privé mais il est apparu comme une manœuvre déma-gogique, électoraliste, d’un pouvoir aux abois et qui est loin de compen-ser la baisse du pouvoir d’achat : le compte n’y est pas ! » ★

Pôle emploi

Usagers, personnels contre la fermeture

Fonction publique

Le “relèvement” du point d’indice

Rassemblement intersyndical et associations de chômeurs, le 8 février, devant la direction générale à Paris.

(suite de la p.9) a réuni 300 per-sonnes. Ce meeting avait été appelé par 14 partis, syndicats et mouve-ments qui, pour certains, ont tenu leur stand. Notre parti avait le sien.Après une intervention d’introduction de Jean-Michel Guérineau (PCF), la parole a été donnée aux témoignages qui ont montré que, pour les ouvriers, les travailleurs de la santé, les femmes des milieux populaires, les étu-diants… cette loi, sous tous ses aspects, n’était décidemment ni amendable ni négociable. Notre cama-rade Mathijs Schoevaert, porte-parole du parti, a été chargé de l’interven-tion finale, au nom des 14 organisa-tions, pour dire que la philosophie de ce projet de loi n’est pas une réforme mais « une refondation sociale » en faveur des profits, que le type de société qu’elle crée, on n’en veut pas,

et qu’il n’y a qu’un seul mot d’ordre : se mobiliser pour le retrait. La distribution du tract sur le marché avec appel pour le meeting et pour la manifestation du 31 a montré, dans les encouragements et les discussions avec ceux qui n’en peuvent plus de cette société-là, que l’exigence du retrait pénètre dans nos quartiers populaires. Les jeunes qui, souvent, se défiaient des tracts politiques, les ont pris. On a d’ailleurs vu des groupes de jeunes qui ne se mêlent pas avec les lycéens de ce même quartier, des-cendre le 31 au centre ville pour par-ticiper à la manifestation.

A ToursLes cheminots étaient particulière-ment mobilisés pour cette journée car touchés en avant première par le décret socle. C’est une convention

collective en discussion entre les organisations syndicales et l’Union des Transporteurs publics pour abou-tir à un cadre social minimal qui prévaudra pour les 170 000 salariés de la branche dont 140 000 à la SNCF, lors de l’ouverture du secteur ferro-viaire à la concurrence. Les travail-leurs du rail du public et du privé seraient également concernés. La mobilisation des cheminots, le 9 mars, était déjà une réponse à cette provocation et le lien a bien été fait avec la loi El Khomri. Il prévoit en effet la suppression jusqu’à 14 jours de repos ou RTT, des repos hors rési-dence pouvant aller jusqu’à 3 jours, des délais de prévenance pour les changements d’horaires ou d’ampli-tudes diminués...

A Bordeaux Pour ce qui est des jeunes, leur nombre non seulement n’a pas faibli, par rapport à la première manif’ début mars où ils avaient rejoint le cortège syndical initiateur du mouve-ment de protestation et de grève ; mais en plus, ces jeunes ont trouvé les forces et l’intelligence pour rester soudés, sans peur face aux innom-mables provocations de soi-disant “casseurs” signant de la croix nazie le front d’un poupon abandonné sur les lieux de la faculté Broca, dévastée ce 9 mars après-midi. Ces jeunes étu-diants ont réparé et nettoyé tout ce qu’il pouvait en affirmant : “c’est notre faculté et nous en avons besoin pour étudier”. ★

Mouvement ouvrier et syndical

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La Forge 11Avril 2016

11Jeunesse

Les jeunes contre le projet de loi El Khomri

Après les manifestations du 9 mars, le gouvernement avait annoncé de pseudo reculs qui n’ont rien changé à la dangerosité globale du projet de loi, mais qui avaient donné une porte de sortie à la Cfdt et la Fage, organisation qui joue, au niveau étu-diant, un rôle similaire à celui de la Cfdt chez les salariés. Ni ces pseudo reculs, ni les « explications » du gouvernement, n’ont jusqu’à aujourd’hui entamé la détermination des jeunes qui se mobilisent depuis plusieurs semaines maintenant parce qu’ils ont compris que cette loi allait modifier profondément et durable-ment les conditions dans lesquelles ils devront travailler. D’où le slogan « nous ne voulons pas être de la chair à patron » !Pour désamorcer cette colère, le gou-vernement sort deux armes lourdes : d’une part, il se dit « prêt à regarder » certaines propositions de l’Unef, en vue « d’améliorer l’ensemble des politiques publiques vers la jeunesse » et il promet « d’être à l’écoute de la représentation nationale » ; d’autre part, il intensifie la répres-sion. Il compte aussi sur les vacances scolaires et l’approche des examens pour empêcher que ne se consolide le « front » des mobilisations lycéens-étudiants-travailleurs et il espère que le déchaînement de la violence policière contre des jeunes manifes-tants aura un effet dissuasif chez les jeunes eux-mêmes et chez les sala-riés, au moment où la solidarité et l’élargissement de la mobilisation sont une des clés pour obtenir le retrait du projet de loi Travail.Le sentiment d’impunité et la nervo-sité de la police, tous corps confon-dus, sont manifestement renforcés par l’état d’urgence, mais ces exac-tions, souvent filmées par les télé-phones portables et massivement diffusées sur les réseaux sociaux, finissent par se retourner contre le gouvernement. Qu’une fraction de la jeunesse radicalisée dans sa haine de la société se tourne vers des formes de contestation qui ne servent pas le mouvement est une chose, mais cela ne peut, en aucun cas, justifier ni les limitations au droit d’expression et de manifestation, ni les brutalités policières contre des jeunes systéma-tiquement assimilés à des « casseurs » dès lors qu’ils tardent à rentrer à la maison après une manif ou qu’ils veulent protester contre les provoca-tions policières.

Extraits du tract de l’UJR (Union des Jeunes Révolutionnaires) :

Retrait du projet de loi El Khomri !En s’attaquant au code du travail, ce projet de loi vise à faire tomber tous les remparts contre la surexploita-tion et les abus patronaux. C’est une déclaration de guerre contre la classe ouvrière, l’ensemble des salariés et la jeunesse. Gattaz, Hollande, Valls, Macron… arrêtez de faire croire que licencier plus facilement et allonger les heures de travail va résoudre le chômage et donner un avenir décent à la jeunesse ! […] La réforme du code de travail vise à éterniser la précarité et à couper pour les jeunes tout espoir en une société meilleure. C’est le projet de loi de trop : il faut le faire tomber en nous mobilisant tous ensemble !

Stop à la répression ! Stop à l’État policier ![…] Ce n’est pas d’aujourd’hui que nous crions «Police partout, justice nulle part» et, de Malik Oussekine, tué en 1986 dans une manifestation étudiante, jusqu’à Rémi Fraisse, tué

sur le barrage de Sivens, trop de jeunes ont déjà laissé leur vie dans des manifestations. Mais il est clair qu’aujourd’hui, le contexte de l’état d’urgence favorise encore plus ce genre de dérives dangereuses et anti-démocratiques. Nous pensons que les jeunes et les travailleurs ont le droit de s’exprimer, de contester les politiques qui défendent le grand patronat au détriment de leur digni-té et de leurs droits. Les jeunes ont le droit d’exprimer leurs colères sans qu’ils soient tabassés par la police, parfois jusqu’à la mort ! C’est pour-quoi nous disons également NON à la répression et demandons la levée de l’état d’urgence !

Chômeurs, précaires ou mili-taires : nous ne voulons pas de cet avenir !Hollande, qui prétendait vouloir faire de la jeunesse la « priorité » de son quinquennat, nous donne aujourd’hui le choix entre le chômage et un monde du travail totalement déré-glementé. Si nous voulons échapper à ces perspectives, le gouvernement nous propose l’engagement dans la police ou dans l’armée... Pour aller tabasser des manifestants ? Ou pour aller semer le chaos en Afrique et au Moyen-Orient dans des guerres qui ne font qu’alimenter le terrorisme ? Chair à profit ou chair à canon ? Non merci ! […]

Retrouvez l’intégralité de ce tract sur le site ujr-fr.org

Un code du travail protecteur, les jeunes salariés en ont besoin !TémoignagesRachel vient d’obtenir son statut d’intermittente non sans mal et voilà qu’on lui propose un CDI payée au Smic dans une grosse boîte de post-production de séries d’animation pour faire du montage son ; malgré quelques petites expériences et un niveau licence (Bac+3), elle se voit proposer une rémunération au Smic !« La politique des boîtes dans ce secteur, c’est d’engager des jeunes pour ne pas les payer trop cher et la loi travail ne va pas du tout les encourager à changer leurs pratiques. Suite à mes recherches, on m’a pro-posé un test dans une autre grosse boîte de pos- production son qui a plusieurs studios. Après avoir passé un test de 4 jours non rémunéré chez eux, ils m’ont laissé mariner sans me donner de réponse. Quatre mois plus tard, je les ai recontactés. Ils m’ont demandé mes prétentions salariales. J’ai demandé le salaire minimum en prenant en compte le fait que je débutais et en m’étant renseigné sur les grilles de rémunération de la convention collective de ma branche (150 € brut/ jour). Vu mes préten-tions, “ma candidature n’a pas été retenue” : voilà la réponse que j’ai reçue par mail après 4 mois d’at-tente. Leur argument : en province, les salaires sont moins élevés qu’en

région parisienne, ils étaient prêts à m’embaucher pour 110 € brut et m’ont bien fait comprendre qu’ils préféreraient “collaborer” avec moi en tant qu’auto-entrepreneur ! Les patrons jouent sur le fait qu’on débute pour imposer un salaire au rabais qui ne correspond pas à nos niveaux d’étude et de formation. Pour rafler les contrats des produc-teurs, ils “offrent” à leurs salariés des salaires de misère. Les plus pré-caires, les plus fragiles, ceux qui n’ont plus d’autre choix et doivent absolument travailler, acceptent d’être sous-payés et exploités. »

Déjà 55 heures par semaine et parfois 17 heures par jour !Eric est ouvrier intérimaire sur un chantier de prolongation d’une ligne de métro.« Dans le chantier, les collègues, même ceux qui ne sont pas engagés politiquement ou syndicalement, ont réagi à l’annonce de cette loi. Pour eux, la loi El Khomri, c’est un cadeau de plus à nos patrons, fait par le gouvernement Hollande. Nous nous sentons directement concernés sur la question de la majoration des heures qui doit sauter. Moi, j’en fais pas mal, des heures supplémen-taires. Ce n’est pas une loi qui lutte contre le chômage, c’est une loi qui lutte contre les travailleurs : «Si tu n’es pas content, tu pars, des intéri-maires qui cherchent du boulot, y’en a beaucoup !» Aujourd’hui, je dépasse les amplitudes horaires en travaillant 55 heures par semaine et c’est illégal. Avec la loi Travail, ça deviendra légal. Normalement, il est interdit de dépasser 12 h/jour alors que, sur le chantier, on fait parfois 17 h. Quand on finit à minuit, ils écrivent 23 h 30. Beaucoup d’ou-vriers dorment sur le chantier. Ils viennent de loin (de Calais, du Nord…). Ils dorment dans les four-gons, dans les vestiaires. On reprend le boulot à 7 h 30. Pas de pause avec la pompe à béton : jusqu’à 16 h 30 non-stop, parce que le béton n’attend pas ! A chaque pompe son ouvrier. Ce manque de personnel, c’est nous qui l’assumons au quotidien et tout ça pour plus de profits ! » ★

www.ujr-fr.org

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La Forge12Avril 2016 Militarisation

Les attentats de janvier et ceux de novembre ont mis au centre du débat politique la « guerre

contre le terrorisme » dans laquelle Hollande, le gouvernement et les par-tis qui siègent à l’Assemblée et au Sénat se sont engagés, à quelques exceptions près. L’instauration dans la foulée de l’état d’urgence a provo-qué rapidement des protestations qui sont allées en grandissant. La poli-tique de guerre menée depuis des mois en Irak, puis en Syrie, a, elle aussi, commencé à être mise en cause, d’autant qu’il y avait les précé-dents des guerres de Libye, puis au Mali, qui se sont étendues à une vaste zone de l’Afrique, de Djibouti aux côtes du Sénégal, de Mauritanie…C’est dans ce contexte qu’un certain nombre de voix se sont élevées pour dire qu’il y avait des liens entre les guerres menées dans ces pays par les forces militaires françaises et les attentats terroristes, et qu’il fallait mettre un terme à la politique de guerre. C’est de là qu’est né le collec-tif « Ni guerres, ni état de guerre » auquel notre parti participe. Un de ses axes fondamentaux est de dénon-cer, combattre, la politique de guerre de l’impérialisme français.

L’impérialisme français est militaristeUne des caractéristiques de l’impéria-lisme français, de par son histoire, son développement, ses alliances et les rivalités avec les puissances impé-rialistes, sans oublier les luttes des peuples menées pour briser sa domi-nation, c’est son caractère milita-riste. La puissance de l’impérialisme français repose en partie sur sa puis-sance militaire, qu’il déploie en Afrique, dans l’océan Indien, dans le Pacifique… C’est en Afrique qu’il y a le plus de

bases militaires françaises et que l’impérialisme français a mené le plus grand nombre d’opérations militaires depuis les années 60, après les indé-pendances. C’est une succession d’opérations qualifiées de « maintien de l’ordre », notamment pour venir au secours d’un régime « allié » menacé d’être balayé par des insur-rections populaires, de guerres locales de plusieurs mois, d’implication dans des massacres de masse (Rwanda) ou des opérations s’étalant sur des années (Côte d’Ivoire, Tchad, Mali…). Parallèlement, des centaines d’offi-ciers africains ont été formés dans les écoles militaires françaises, et les armées de plusieurs pays sont entraî-nées, encadrées et équipées par la France. C’est cette réalité multiforme, décrite à grands traits, qui constitue la base de ce qu’on peut appeler la politique de guerre de l’impérialisme français en Afrique. Mais elle ne peut ni ne doit être dissociée de la domination économique, politique, culturelle, diplomatique… exercée par les monopoles et l’État français sur ces pays. Ce sont un certain nombre de monopoles qui sont le fer de lance de cette domination : grandes banques, pétroliers, sociétés d’import-export, grandes compagnies agro-alimen-taires, compagnies de transport, de télécommunication, géants du BTP, cimentiers… la liste est longue des monopoles qui tirent une partie de leurs profits de l’exploitation de la main-d’œuvre de ces pays, du pillage des richesses du sol et du sous-sol…C’est pourquoi, l’exigence du retrait des troupes françaises d’Afrique constitue un objectif central dans le combat contre la politique de guerre de l’impéria-lisme français. Nous savons qu’une telle exigence ne peut être imposée qu’au terme d’un grand travail d’explication et de

mobilisation. Et que cela doit irriguer le mouvement populaire, les organi-sations politiques, syndicales, les associations… Dans certains cas, quand les terribles conséquences de ces opérations militaires, pour les peuples, ne peuvent être cachées, quand les soldats tirent sur des mani-festants qui s’en prennent à des régimes réactionnaires, corrompus, quand des informations tombent sur le comportement sordide de soldats français en Centrafrique (ou ailleurs) et que cela se répète…, l’exigence du retrait des troupes françaises de ces théâtres d’opérations rencontre un écho dans de larges secteurs de notre peuple. Ce sont des occasions où il est important de porter cette exi-gence, mais il faut aussi la marteler de façon systématique, dans la durée, en alimentant la réflexion, en argu-mentant.C’est une des tâches importantes de ce collectif.

La guerre contre le ter-rorisme : militarisation de l’espace public et de la sociétéLes attentats de Belgique et les rami-fications des groupes qui les ont préparés et perpétrés ont relancé la propagande des autorités politiques, policières et militaires sur la guerre contre le terrorisme. Contraint d’abandonner le projet d’inscrire l’état d’urgence dans la constitution, Hollande ne manque pas une occa-sion de rappeler que nous serions sous la menace permanente d’atten-tats. Ses ministres s’activent pour entraîner les autres États de l’UE dans une coopération toujours plus pous-sée en matière de surveillance poli-cière, d’opérations conjointes, trans-frontalières.

Les campagnes de recrutement pour l’armée (voir article) s’intensifient et la fusion police-armée avance à grands pas dans le domaine du « maintien de l’ordre », du « traite-ment des violences urbaines ». La BAC commence à être équipée d’armes de guerre, « pour pouvoir répliquer aux tirs d’armes de type kalachni-kov ». Il ne s’agit plus de tasers ou de flash-ball, dont la dangerosité se vérifie chaque jour, dans les quartiers ou en marge des manifestations. Il s’agit d’armes qui tuent qui, comme le disent des spécialistes, « peuvent traverser plusieurs personnes à la fois ». A cela s’ajoute le fait que des compagnies de CRS (60) vont être intégrées dans le dispositif de lutte contre le terrorisme, armes com-prises. Enfin, la réforme pénale qui reprend l’essentiel des dispositions de l’état d’urgence, a considérablement assoupli les « règles en matière d’ou-verture du feu », autrement dit les conditions dans lesquelles les poli-ciers peuvent faire usage de leur arme, au nom de la légitime défense. C’est ce que certains policiers, avo-cats et syndicats de police appellent de leur vœu depuis des années. Cette escalade dans les moyens de répres-sion touche également la police municipale, où l’équipement d’armes à feu tend à se développer.Cette tendance s’inscrit dans ce que nous appelons la militarisation de l’espace public, dont une des mani-festations la plus visible est la pré-sence de plus en plus importante, numériquement, des militaires dans les rues, les lieux publics, comme les gares, etc. C’est ainsi qu’on a égale-ment vu des déploiements de mili-taires du plan « vigipirate » aux abords de lycées, sous prétexte de les sécuriser, au moment où se dévelop-pait les blocages de lycées, dans le cadre de la mobilisation pour le retrait de la loi El Khomri. ★

Contre les guerres de l’impérialisme français

Miltitarisme et militarisation

Cela n’aura échappé à personne, l’ar-mée française recrute. Depuis 2010, l’État a mis de gros moyens dans des campagnes de communication visant à redorer le blason de l’armée fran-çaise aux yeux d’une jeunesse préca-risée et sans perspective. Dans ces campagnes publicitaires, par ailleurs fort coûteuses et réalisées par des agences de communication recrutées sur appel d’offres, il s’agit de « deve-nir soi-même », d’« aider les autres », de « protéger les populations ». Il s’agit également pour la jeunesse d’ap-prendre un métier, de s’ouvrir à de nouvelles perspectives bien sur inac-cessibles pour les jeunes des quartiers populaires (« vous êtes ici… vous pour-

riez être là »). Il est pratiquement impossible de rater ces campagnes publicitaires qui sont aujourd’hui omniprésentes dans les couloirs des métros et des gares parisiennes comme à la télévision. L’armée pro-fite également des grands médias qui, depuis plusieurs années, n’ont de cesse d’assurer la propagande pour la présence des troupes françaises en Afrique ou au Moyen-Orient en leur donnant un caractère purement humanitaire et émancipateur pour les populations locales. Enfin, le climat actuel d’« état de guerre », conti-nuellement mis en avant par Hollande et son gouvernement, largement légi-timé par les grands médias, est parti-

culièrement propice à cette propa-gande et permet de faire passer l’augmentation des dépenses mili-taires (au détriment des services publics vitaux) comme un mal néces-saire pour la sécurité nationale. Ce contexte, dans son ensemble, rap-pelle très fortement celui des États-Unis au moment de l’invasion de l’Irak après les attentats du 11 sep-tembre 2011. Le suivisme des grands médias et les ressorts de propagande utilisés en sont très proches, l’esthé-tique des campagnes et les slogans sont quasiment identiques, jusqu’au choix de faire figurer sur les affiches ou dans les clips des jeunes issus de l’immigration, largement représentés

dans les milieux populaires, cibles privilégiées des recruteurs. Ce sont ces jeunes des classes popu-laires, privés de toute perspective d’avenir par les politiques néolibé-rales appliquées en France depuis quarante ans, qui sont destinés à servir de chair à canon dans les rangs de l’armée afin de permettre à l’État de mener à bien et de renforcer sa politique impérialiste, au service de l’oligarchie, notamment en Afrique ou au Moyen-Orient. Il est bien entendu vital de dénoncer et de contrecarrer cette campagne massive de recrutement de l’armée française, notamment dans les quartiers popu-laires. ★

L’armée recrute !

Page 13: La forge avril 2016

La Forge 13Avril 2016Europe

Le 18 mars 2016, les membres du Conseil européen ont entériné l’ac-cord UE-Turquie « en vue de remédier à la crise migratoire ». Hormis le petit vague à l’âme des premiers ministres luxembourgeois et belge, aucun diri-geant de l’UE, François Hollande au premier chef, n’a trouvé quelque chose à redire au fait que l’UE remet-tait en cause de facto, temporaire-ment et peut-être définitivement, le droit d’asile. L’accord prévoit en effet que tous les réfugiés et tous les migrants dits économiques débar-quant sur les îles grecques seront renvoyés, sans distinction, vers la Turquie, celle-ci étant devenue, par la grâce de l’UE, un « pays sûr ». C’est elle qui aura dorénavant la charge d’instruire les demandes d’asile des

Syriens. En contrepartie, pour tout Syrien renvoyé en Turquie, un autre Syrien, se trouvant légalement en Turquie, pourra être « réinstallé » dans l’UE, à hauteur de 72 000 places. Les 500 premières expulsions de migrants arrivés depuis le 20 mars sont programmées pour le 4 avril.Quant aux 50 000 personnes bloquées dans le camp d’Idoménie à la fron-tière gréco-macédonienne, personne ne sait quel sera leur sort. Un petit nombre d’entre elles, si elles acceptent de demander l’asile aux conditions fixées par l’UE, se verront « relocalisées » dans un pays de l’UE. Les autres auraient vocation à être expulsées vers la Turquie. Pour l’ins-tant, vu le nombre et l’opposition des organismes en charge des réfugiés à

mettre en œuvre cet accord (Croix-Rouge, Ofpra,…), c’est le statu quo, ou plus exactement, une lente des-cente vers l’enfer tant les conditions de vie et d’insécurité sont devenues effroyables.

Erdogan, grand gagnant de l’accordPour le régime d’Erdogan, l’accord peut être considéré comme une vic-toire politique, alors que le pays tra-verse une crise profonde et qu’il est isolé politiquement de par sa poli-tique de répression des forces sociales et démocratiques et la reprise de la guerre contre les séparatistes kurdes en Turquie mais aussi en Syrie et en Irak… Au final, en dépit de ses « exi-

gences » sur le respect de l’état de droit et du respect de la liberté d’expression, l’UE a « vendu » à la Turquie sa sous-traitance du droit d’asile et d’expulsion pour 3 milliards d’euros d’aide déjà promis auxquels viendront s’ajouter, sous condition, 3 milliards supplémentaires. Avec, en prime, la réouverture des négocia-tions d’adhésion de la Turquie à l’UE (notamment sur les questions budgé-taires) et l’accélération du processus pour l’exemption de visas pour les ressortissants turcs. Peu importe au final que les négociations sur l’entrée dans l’UE aboutissent, pour l’instant Erdogan peut se vanter d’avoir « fait plier l’Europe » qui lui a donné un blanc-seing pour régler, à sa place, « la crise migratoire ». ★

La percée du parti AfD (Alternative pour l’Allemagne) lors des dernières élections des parlements régionaux de trois grands Länder, a provoqué un choc dans l’opinion au niveau du pays et y compris au plan internatio-nal. Arrivant en deuxième position en Saxe-Anhalt (23 % des voix), der-rière la CDU, et réalisant 12 % dans le Bade-Wurtemberg (Stuttgart) et autant dans la Rhénanie-Palatinat, l’AfD s’installe dans le panorama poli-tique du pays. Créé en 2013 par des économistes, des juristes, des cadres de grandes entreprises, il s’est tout d’abord défi-ni comme un parti « opposé à l’euro, mais pas à l’Europe », un parti « ni de gauche, ni de droite », qui dénonçait le « cartel des anciens partis » et qui se démarquait des groupes d’extrême droite néo-nazis, des groupes vio-lents, responsables de milliers d’agressions (13 846), de plusieurs meurtres (180 depuis 1990), d’incen-dies criminels contre des foyers hébergeant des étrangers… Ce parti, clairement de droite, s’est développé sur la rhétorique du déclin de l’Allemagne, du retour au Mark allemand (DM), symbole de la puis-sance économique et d’un certain niveau de vie pour le plus grand nombre, notamment dans les « couches moyennes », dont sont issus ses cadres. En effet, la « réus-site » des grandes banques et des monopoles allemands, l’explosion de leurs profits, se sont faits avant tout sur le dos des travailleurs, des couches populaires… mais les « couches moyennes » ont également été tou-chées par les augmentations d’im-pôts. Une partie d’entre elles est aussi perméable au discours sur le déclin des « valeurs traditionnelles »,

notamment de la famille.L’AfD s’est fortement appuyée sur le sentiment que « nous payons pour les autres », au moment où la crise grecque et la dette grecque étaient au cœur des débats, développant une intense propagande contre les « aides » accordées par l’Allemagne aux « Grecs fainéants », responsables d’avoir voulu vivre aux crochets de l’UE et surtout de l’Allemagne… Une propagande menée quotidiennement par des médias très puissants.Aux élections européennes, ce parti remporte 7 % des voix et envoie des députés qui vont siéger dans le groupe des « eurosceptiques ». Mais c’est en 2015, aux élections dans plusieurs Länder, qu’il va « décol-ler ». Ses affiches de campagne disaient : « Les Grecs souffrent, les Allemands paient et les banques encaissent » ! C’est à ce moment-là que l’aile la plus droitière va prendre la direction de l’AfD, écartant son fondateur. Le discours se radicalise, sur les thèmes de l’opposition à la politique « d’accueil » massif des réfugiés de Merkel. Quand, à la fin de l’année, se sont produites à Cologne, les agressions sexuelles contre des femmes, attribuées à des réfugiés, les leaders de l’AfD se sont déchaînés dans les médias. Des leaders qui « passent bien » à la télé, telle la dirigeante Franke Petry, qui vient de se prononcer pour donner le droit à la police de tirer sur les « migrants menaçants » qui s’entassent aux frontières de l’Allemagne ! La droitisation du discours de l’AfD est en marche, assortie d’un nationa-lisme de plus en plus affiché, qui se traduit, par exemple, par une opposi-tion aux négociations du Traité tran-satlantique (Tafta), trop favorable

aux USA. On retrouve là bon nombre des ingrédients des discours du FN de M. Le Pen.Analysant ce phénomène dangereux, nos camarades d’Allemagne (Arbeit Zukunft) soulignent notamment : « les propagandistes de l’AfD maî-trisent parfaitement la démagogie sociale, ils expriment leur « solidari-té » avec les femmes et les victimes des réformes Hartz-IV, ils excellent dans la rhétorique contre le cartel des vieux partis. C’est un véritable défi pour les antifascistes, les socia-listes, les communistes, car ils risquent de devenir le troisième parti dans le panorama politique ». Nos camarades écrivaient cela juste avant les dernières élections.Et, comme ils le soulignent, on ne combat pas ce parti uniquement en organisant des manifestations à cha-cune de ses apparitions ; cela est nécessaire, mais pas suffisant. Il faut travailler à unir les forces autour d’un programme minimum, por-teur d’exigences faisant l’unité de toutes les couches de la popula-tion, par delà leur nationalité, leurs croyances… Un programme qui pose la question du logement pour tous, du travail pour tous, d’un salaire minimum décent pour tous, de la satisfaction des besoins sociaux pour tous. Ils y ajoutent la nécessité de lutter contre la politique de l’impérialisme allemand, une poli-tique de guerre, d’interventions mili-taires, d’exportations d’armements et de soutien à des régimes comme celui d’Erdogan ou celui d’Arabie Saoudite. Car c’est cette politique qui est la cause des guerres et provoquent les vagues de migrants.Nos camarades insistent sur la néces-sité de faire des pas concrets, dès

maintenant, dans l’unité de toutes les forces qui s’opposent à la montée de cette extrême droite, sur la base des revendications sociales et poli-tiques que nous avons évoquées à grand trait.

Il y a de l’espoir !Plus d’une vingtaine d’organisations ont cosigné un appel à se mobiliser au moment de la tenue du Congrès de l’AfD, du 30 avril au 1er mai, dans les locaux de la foire de Stuttgart. Ce congrès doit adopter un nouveau programme. Dans ce texte, il est notamment dit : « l’AfD se présente comme le bras parle-mentaire de la mouvance d’extrême droite. Elle est un des piliers des mani-festations de masse organisées par Pegida (le mouvement raciste et islamo-phobe). (..) Aucune manifestation ou initiative de l’AfD ou des autres forces d’extrême droite ne se déroule sans qu’il y ait des protestations massives et diver-sifiées, ce qui n’était pas pensable, il y a encore deux ans ».Le tract appelle « tous ceux qui n’ont pas envie de voir la situation se dégra-der, se tendre, à se mobiliser. (…) Vive la solidarité, non à la division. Ensemble contre le congrès de l’AfD ». ★

Note : Arbeit Zukunft est le journal de l’Organi-sation pour la construction du parti com-muniste des travailleurs d’Allemagne qui est membre de la Conférence Internationale de Partis et Organisations Marxistes-Léninistes. Sa manchette pro-clame : « La paix, le travail, le logement, un revenu et les mêmes droits pour tous ! »www.arbit-zukunft.de

UE-Turquie : L’accord de la honte

Allemagne

Percée électorale de l’extrême droite

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La Forge14Avril 2016 Société

Le magazine de la journaliste Elise Lucet, « Cash investigation » du 2 février 2016, consacré à l’utilisation des pesticides dans l’agriculture en France et dans le monde et leurs conséquences sur la santé, a connu un grand retentissement. Diffusé à une heure de grande écoute sur France 2, il a touché un très large public et déclenché pas mal de réac-tions ! Il faut dire que les démonstra-tions faites à travers témoignages, explications, interviewes, étaient accablantes pour les gouvernements successifs et, en particulier, pour les monopoles de l’agrochimie et les lob-bies à leur service. Pourtant, de nom-breuses associations, médecins, cher-cheurs, et y compris la Confédération paysanne, n’ont cessé depuis plu-sieurs années d’alerter les pouvoirs publics sur les dangers pour notre santé et celle des agriculteurs de l’utilisation massive de certaines substances dans le traitement des sols et des cultures.Les multinationales de l’agrochimie qui fabriquent les pesticides pour l’agriculture s’appellent Syngenta (Suisse), Monsanto (USA), Bayer (Allemagne), Dow (USA), BASF (Allemagne). Elles occupent des situations de monopoles sur un cré-neau particulièrement rentable puisque le marché des produits dits

phytosanitaires repré-sente 50 milliards d’euros. Comme cela est dit dans le magazine télévisé, le plus gros vendeur de Folpel dans notre pays, la branche pesticides-semences du groupe Bayer, a connu une crois-sance de 11 % et un chiffre d’affaires de 9,5 milliards d’euros en 2014. Le Folpel, comme

de nombreuses molécules produites par ces industriels, se retrouvent dans les aliments, dans l’eau du robi-net et même dans l’air que nous res-pirons. Certaines sont cancérigènes ou neurotoxiques, d’autres sont des perturbateurs endocriniens particu-lièrement dangereux pour les enfants.La prise de conscience de la dangero-sité de ces produits pour la santé publique, pour nos enfants et les générations futures se développe et alimente les mobilisations. Elles se heurtent aux intérêts de ces firmes particulièrement puissantes et à la logique de profit de leurs action-naires. Une première avancée : l’interdic-tion des insecticides néonicoti-noïdesLe ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll, souffle, lui, le chaud et le froid. Dans l’émission d’Elise Lucet, il affirme que le plan « Ecophyto » des-tiné à réduire de 50 % d’ici à 2025 l’utilisation des produits phytosani-taires dans l’agriculture serait appli-qué et qu’il s’y engagerait, promet-tant également la transparence sur ces questions. Mais quand une loi pour interdire l’utilisation d’un insec-ticide tueur d’abeille vient devant l’Assemblée ce mois ci, il adresse un courrier aux parlementaires pour leur dire de ne pas voter l’article en ques-

tion, arguant de la nécessité de prendre une décision au niveau euro-péen, soucieux avant tout de s’éviter une nouvelle crise du milieu agricole. Malgré son intervention, les députés ont adopté, par 30 voix contre 28 (un vote donc particulièrement serré), l’interdiction, sans dérogation, des insecticides néonicotinoïdes, jugés nocifs notamment pour les abeilles. Par contre, ils ont repoussé au 1er sep-tembre 2018 son application que les opposants mobilisés espéraient pour le 1er janvier 2017. Le diméthoate retiré du marché (pro-duit utilisé dans les vergers pour combattre la Drosophila Suzukii, mou-cheron venu du Japon qui s’attaque à la vigne et à tous les fruits d’été, dont les cerises, par-ticulièrement touchées)Suite à l’interdiction de ce pesticide organophosphoré, très dangereux pour la santé, la Confédération paysanne interpelle le ministre de l’agriculture en ces termes : « Le ministre de l’Agricul-ture dispose maintenant de trois options. Il peut se contenter de prendre acte de la décision de l’Anses : le retrait du diméthoate aura alors consisté à délocaliser la production et la pollu-tion hors les frontières nationales. Il peut aussi accorder une dérogation à l’interdiction du dimé-thoate, comme le lui demande la Fnsea : cela reviendrait à placer la « compétitivité » au-dessus de toute autre considéra-tion et serait un scandale. Enfin, il peut accompagner

la décision de l’Anses, comme nous le lui demandons, par des mesures éco-nomiques et commerciales qui feront du retrait du diméthoate une décision pleinement d’intérêt général : un plan d’indemnisation des pertes et l’arrêt des importations de cerises, le temps qu’un éventuel prédateur naturel prenne sa place et que les investisse-ments de protection des parcelles, qui par ailleurs doivent être soutenus, soient amortis. Le ministre est là face à un cas d’école : aura-t-il le courage d’affronter les dogmes du libéralisme qui méprisent le bien commun et interdisent - si ce n’est pour le pire - toute véritable transformation de l’agriculture ? » (Extrait du site de la Confédération paysanne) ★

Représentations au Théâtre du Point du Jour à Lyon dans le cadre du fes-tival ÉTRANGES ÉTRANGERS puis en avril à Ouagadougou.L’intérêt de ce spectacle repose sur une collaboration artistique et cultu-relle entre des artistes indépendants du Burkina Faso, du Tchad et de France. Le texte a été écrit en deux mois début 2015 entre Ouagadougou et Lyon, et mis en scène par Philippe Vincent. La compagnie Scènes (Lyon) a rencontré le collectif Béneeré du Burkina Faso et la compagnie Djamah Afrik (Tchad) dans une salle de réu-nion improvisée de Ouagadougou.Ce spectacle met en scène un pays

imaginaire proposé à la vente par ses dirigeants politiques à une multina-tionale pour 50 milliards de dollars, de quoi réparer le déséquilibre budgé-taire ! L’accord est sur le point d’être signé, à l’insu de la population. Le pays est au bord du chaos, d’un côté, le peuple indigné et révolté qui pro-teste, et de l’autre, les dirigeants pressés d’en finir !Au-delà de cette représentation, la pièce ouvre le débat sur la souverai-neté des pays en déliquescence de mondialisation, sur la domination des multinationales de connivence avec des gouvernements affairistes, exploitant les ressources et qui s’in-

gèrent dans la gestion politique, économique et sociale des États afri-cains. Il pose le crucial problème des individus et des États dans la société actuelle prise dans les étaux des mul-tinationales où le seul gain du profit est la règle d’or sans aucun égard pour la sauvegarde de l’environne-ment ni même de l’humanité. Il dénonce l’invasion du continent par des produits divers de moindre qua-lité et polluant venus d’Europe, d’Asie, d’Amérique. Total(e) indépen-dance, c’est encore les crises et les guerres au Congo, Mali, Lybie, Centrafrique,… le trafic d’armes par les États, le trafic de stupéfiants et

bien d’autres encore.Les artistes africains se sentent inter-pellés par cette course effrénée vers le profit drainé par les multinatio-nales, eux qui prônent des valeurs morales et sociales où la nature (la terre, l’air, l’eau, les animaux, l’indi-vidu,…) occupe une place impor-tante. Ce spectacle est pour eux l’oc-casion de confronter leur vision d’ar-tistes vivant en Afrique aux points de vue d’autres artistes vivant en Europe afin de dénoncer la mainmise de l’impérialisme sur le continent afri-cain. ★

Contre les pesticides, la mobilisation se développe

Théâtre :

« Total(e) indépendance »

Quelques exemples de molé-cules dangereuses et leurs conséquences sur la santé

FOLPEL, fabriqué par le géant Bayer (allemand) « produit de protection de la plante » qu’on retrouve dans l’air.

ATRAZINE, molécule présente dans les produits phytosanitaires de la firme Syngenta (suisse) dangereuse et présente dans l’eau ; les nappes phréatiques d’un département, l’Eure-et-Loir (Beauce), sont particulièrement polluées et l’eau est impropre à la consommation.

Cancer infantile : deuxième cause de décès en France ; en Gironde, + 20 % par rapport à la moyenne nationale.

CHLORPYRIPHOS, notamment utilisé dans le traitement des vergers d’agrumes californiens, est responsable des cas d’au-tisme. Des études menées sur les femmes enceintes, épouses des ouvriers agricoles mexicains travaillant massivement dans ce secteur, montrent une corrélation évi-dente entre exposition à cette molécule et cas d’enfants autistes.

14/02, 600 manifestants à Bordeaux

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La Forge 15International Avril 2016

Brésil

Pour une issue révolutionnaire à la crise

Depuis des mois, le Brésil est secoué par une profonde crise économique, politique et sociale.Le « géant » économique du conti-nent sud-américain, membre des « BRICS » (pays dits émergents), a connu une croissance soutenue depuis le début des années 2000 (jusqu’à 7 %). Mais, aujourd’hui, il subit une récession brutale et dévas-tatrice. Pendant les années de croissance, c’est Lula, l’ancien syndicaliste sidé-rurgiste, qui était président (de 2003 à 2010). Il a mis en place des pro-grammes sociaux qui ont sorti des millions de personnes de la grande pauvreté. Mais sa politique, foncière-ment réformiste, a prétendu pouvoir assurer une amélioration du niveau de vie des plus pauvres, sans s’en prendre aux riches, sans remettre en cause les intérêts de l’oligarchie. Une illusion qui se fracasse sur la réalité du système capitaliste impérialiste.Comme de nombreux dirigeants au pouvoir dans des pays ayant de grandes ressources, Lula et le PT ont utilisé une partie des sommes liées à la hausse des prix des matières pre-mières – qui a duré quelques années –, pour financer les mesures sociales. Mais ils ont également mené une politique de très grands travaux, à grand renfort d’emprunts : la coupe du monde de football en 2014, les JO pour 2016. Ces grands travaux, qui

ont englouti des mil-liards, ont creusé la dette de l’État, mil-liards qui ont été cap-tés par les grandes entreprises du BTP. Les premières grandes manifestations qui ont dénoncé ces « grands projets » ont eu lieu en 2013, au même moment que celles qui se développaient en Turquie (Taksim).Les grandes entre-prises du BTP sont

« traditionnellement » des machines à corruption. Odebrecht (200 000 salariés) en fait parti. Un de ses diri-geants avait déjà été condamné, il y a dix-neuf ans, pour corruption. Il en va de même pour le géant pétrolier, Petrobras, qui a été lié à tous les pouvoirs (depuis la dictature des militaires jusqu’au gouvernement du PT).Aujourd’hui, les accusations de cor-ruption visent Lula, Dilma Rousseff, qui lui a succédé, et le PT.La droite s’en empare, car elle voit là une occasion de revenir au pouvoir, en se débarrassant de Lula et de Dilma. Depuis les élections gagnées de justesse par Dilma (2014), la droite multiplie les manifestations qui rassemblent des centaines de mil-liers de personnes. Les médias domi-nants (comme la chaîne télévisée du groupe El Globo) alimentent la contestation, à coups de « révéla-tions » quasi quotidiennes. Mais cela ne doit pas occulter la question de fond, qui est l’immense mécontente-ment de larges couches de la popula-tion, des villes et des campagnes, qui dénoncent et combattent les choix néolibéraux faits par Dilma, qui font grimper les impôts, provoquent une inflation de 180 % et aggravent le chômage.C’est dans ce contexte que luttent nos camarades du Parti Communiste

Révolutionnaire (PCR). Nous repro-duisons ci-dessous une synthèse de la prise de position du PCR, du 22 mars.

Non au recul ! Pour une issue à la crise et le pouvoir populaire !L’impeachment (1) de Dilma serait une mauvaise chose, car il permet-trait l’accession de Michel Temer (2) au pouvoir. Les partis de l’opposition, appuyés par les moyens de communi-cation et les grandes entreprises, œuvrent dans ce sens et organisent les manifestations. Du coté du PT et du PCdoB (3), entre autres, ils veulent l’empêcher et appellent également à descendre dans la rue pour défendre « l’État démocratique de droit ».Chaque camp défend la poursuite du bradage des ressources naturelles publiques pour enrichir l’oligarchie financière, le paiement de la dette publique. Ils défendent ouvertement la politique de privatisation et de soutien aux grands monopoles et de l’agro business.

Battre la droite qui veut renverser le gouvernement par un coup d’État et empêcher tout retour en arrièreDans les manifestations pour l’im-peachment, il faut noter l’absence de la classe ouvrière et de la grande majorité des pauvres du pays. On y voit surtout la classe moyenne, des grands, moyens et petits entrepre-neurs, et des bandes fascistes.C’est pourquo,i ceux qui pensent que peu importe l’une ou l’autre (de Dilma et Temer) sont dans l’erreur. Temer va aggraver la situation et n’hésitera pas à réprimer fortement le mouvement social. Dilma ne changera pas de politique mais elle n’osera pas réprimer fortement la classe ouvrière et le peuple. Il est important que les communistes révolutionnaires empêchent un recul des libertés démocratiques dont nous jouissons

encore, même si nous savons que le PT et le PCdoB continueront à trahir les intérêts des travailleurs. Ils ne représentent pas une alternative populaire pour le pays et il faut perdre toute illusion à leur endroit.

Pour une issue à cette crise, le pou-voir populaire et le socialismeLa situation exige que chaque mili-tant du PCR assume son rôle dans ce moment historique. Il faut aller par-tout (dans les entreprises, quartiers, universités, etc.) pour présenter les propositions du parti. Il faut assumer notre rôle d’avant-garde dans la lutte de la classe ouvrière pour ses droits. Il faut diffuser massivement notre journal, A Verdade (4). ★

Liste des revendications et axes de lutte- A bas l’ajustement fiscal

pour le paiement de la dette publique !

- L’argent du peuple pour l’éducation, la santé et pour le logement !

- Non à l’impeachment ! Telmer est pire que Dilma !

- Pour le pouvoir populaire !

Notes(1) La droite veut destituer la présidente Dilma Rousseff, à travers un mécanisme constitutionnel connu sous le nom d’empeachment, repris des pratiques étasuniennes.

(2) Temer est le responsable du parti PMDB, allié au PT dans la majorité gouvernementale. Ce parti de « centre droit » a la particularité de participer systématiquement à toutes les coalitions qui ont dirigé le Brésil. Ses dirigeants sont tout autant corrompus que ceux du PT.

(3) Le PCdB est également membre de la majorité autour du PT.

(4) Site : http://averdade.org.br/

Les « primaires » aux USA sont symptomatiques du pourrissement politique, idéologique du système poli-tique de la première puis-sance impérialiste mondiale, en termes de puissance mili-taire et financière. Certes, ce n’est pas la première fois que les candidats des deux grands partis, tiennent des propos qu’on qualifierait par ailleurs d’irresponsables ; que les meetings tournent au « show » et qu’ils se livrent à une surenchère populiste qui

en dit long sur l’estime qu’ils ont pour leurs propres élec-teurs. Bien sûr, c’est dans le camp des Républicains qu’on trouve les candidats les plus caricaturaux, avec un choix, pour les électeurs de ce camp, entre un milliardaire grossier, mégalomane, qui vocifère contre les « Arabes », rêve de bâtir des murs tout autour des USA et promet le retour de l’Amérique forte, agressive, et des candidats réactionnaires qui ne jurent

et ne pensent qu’à travers la bible et veulent revenir sur toutes les réformes sociales d’Obama Côté « démocrates », Hillary Clinton, la candidate offi-cielle, soutenue par l’appareil du parti, pensait que les pri-maires ne seraient qu’une formalité. Mais elle a dû prendre en compte un candi-dat « sortant du lot », Bernie Sanders, un intellectuel qua-lifié de « socialiste », qui critique le creusement des inégalités sociales, qui parle

de faire payer plus d’impôts aux riches bref, qui tient un discours social-démocrate teinté d’une critique du néo-libéralisme. Le fait que ce discours trouve un écho chez les étudiants, dans certains milieux syndicaux, et de façon plus générale, dans les milieux progressistes, est une bonne chose. Cela parti-cipe d’une certaine politisa-tion. Mais Sanders a annoncé depuis le début qu’il appelle-rait à voter pour le candidat démocrate.

Pendant ce temps, l’oli-garchie continue à s’enrichir et les dépenses militaires augmentent pour faire face aux puissances impérialistes rivales et continuer à répri-mer les mouvements d’éman-cipation. Le prochain pré-sident, quel qu’il soit, sera à l’image de cette politique : martial, nationaliste, tou-jours du côté des régimes réactionnaires, contre les peuples. ★

USA

Des primaires à l’image de la pourriture du système

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La Forge16Avril 2016 International

Dir. publication C. Pierrel - Imprimerie Expressions2, 10 bis rue Bisson 75020 Paris - Commission paritaire - 0413P865753- N°ISSN 0242-3332

TchadLe dictateur Deby est président depuis 26 ans dans un pays qui a toujours occupé une place centrale dans le dispositif militaire français en Afrique et qui abrite aujourd’hui le quartier général du dispositif Barkhane.Le premier tour des élections a lieu le 10 avril et va se dérouler dans un contexte particulier. Dans ce pays, devenu producteur de pétrole, la baisse des cours depuis plusieurs années a provoqué une grave crise économique. Le budget de 2016 donne une place de choix aux achats d’armements, surtout à la France, mais ne prévoit pas de remédier au manque de personnels dans la fonc-tion publique. Or, l’année 2015 a été jalonnée de nombreuses grèves orga-nisées par l’Union des syndicats du Tchad en raison du sous-effectif dans les écoles et les centres de santé et à cause du retard dans le versement des salaires. Face à cette colère crois-sante, le président a fait quelques gestes : il a promis qu’il n’y aurait pas de retards « criants » pour les salaires en 2016 ; il a même démis de ses fonctions de directeur des douanes, son propre frère, connu pour ses pra-tiques sulfureuses. En octobre 2015, le directeur du journal Le haut-parleur avait été arrêté et torturé pour avoir dénoncé ces pratiques. Les élections présidentielles et légis-latives vont se dérouler alors que l’état d’urgence a été proclamé sur une grande partie du territoire. Une armée pléthorique et omniprésente, des opposants qualifiés de traîtres faisant le jeu des ennemis terroristes, des exactions incessantes contre les civils, Deby se donne tous les moyens pour être élu dès le 1er tour. Le prin-cipal opposant, le député Saleh Kebzabo, ayant pointé de nombreuses irrégularités dans le recensement biométrique (inscriptions de mineurs, de réfugiés, d’électeurs fictifs) est sous le coup d’une levée de son immunité parlementaire… pour tra-fic de drogue. Le peuple tchadien n’attend rien de ces élections dont les résultats sont connus d’avance. Il ne fait pas confiance non plus aux 23 prétendants qui ont déposé leur can-didature. Mais il ne se résigne pas, à en juger par le nom significatif des organisations qui sont apparues récemment comme le collectif « Trop, c’est trop ! » ou le mouvement de jeunes « Lyina » (« on est fatigué », en arabe tchadien).

NigerLa principale surprise des élec-tions vient du fait qu’il aura fallu 2 tours à Mahamadou Issoufou pour être réélu président. Pourtant, son principal opposant, Hama Amadou, a mené sa cam-pagne du 1er tour du fond de sa prison où il avait été écroué en novembre 2015 pour un trafic présumé d’enfants. Pour le 2e tour, il a été libéré mais a dû être hospitalisé à Paris à cause des mauvais traitements subis en détention. L’opposition, regrou-pée dans la COPA 2016, a refusé la proposition de dialogue d’Issou-fou car, pour elle, tous les scru-tins, tant législatif que présiden-tiel, doivent être déclarés nuls et non avenus car truqués. Elle a appelé à la « résistance citoyenne ».Effectivement, outre les nom-breuses malversations constatées par la Commission de contrôle, les consultations ont eu lieu alors que l’état d’urgence a été procla-mé sur l’ensemble du pays et que de nombreux opposants ont été emprisonnés ou menacés. D’autre part, à la mi-décembre 2015, une obscure tentative de putsch contre Issoufou a été découverte. Les dirigeants du groupe d’inter-vention des forces spéciales, com-posé d’une centaine d’hommes formés par des instructeurs fran-çais, ont été arrêtés. Le procès aura lieu en avril.

Malgré ces conditions, le ministre de la défense, Le Drian, s’est empressé de féliciter Issoufou, ancien cadre supérieur chez Areva et membre de l’Internationale socialiste, pour avoir fait du Niger un des pays les mieux protégés par la présence des troupes fran-çaises et américaines. Rappelons que, malgré le report de l’ouver-ture de la gigantesque mine d’Imarouren, le Niger est l’un des principaux fournisseurs d’ura-nium de la France et l’une des portes d’accès pour des opérations militaires secrètes menées par nos troupes et l’armée américaine dans la Libye voisine. « Il y a bien une dérive du régime » concède une source officielle française « mais il a reconduit l’accord avec Areva et les frontières sont bien contrôlées. Certaines priorités sont plus prioritaires que d’autres, alors on se tait ».

CongoIl avait fait 2 mandats successifs et avait plus de 70 ans : deux raisons pour que la Constitution ne lui per-mette pas de se représenter. Et pour-tant, Sassou Nguesso l’a fait, et ce avec l’accord tacite de l’impérialisme français. En octobre 2015, à la veille d’un référendum très contesté au Congo sur une modification du texte de la constitution, Hollande a accueil-li le ministre des affaires étrangères congolais avec les mots suivants : « Sassou Nguesso peut consulter son peuple, ça fait partie de son droit et le peuple doit répondre ». Le président sortant avait mis cette phrase sur une grande banderole devant la mairie de Brazzaville, le 22 octobre, trois jours avant le référendum. Alors que le peuple congolais exprimait son ras-le-bol après trente et un ans de pouvoir en s’abstenant massivement au réfé-rendum et en manifestant aux cris de « sassoufit », les dirigeants français multipliaient les petits gestes envers les dirigeants congolais.Le ministre de la défense Le Drian, là comme ailleurs, avait fixé les priori-tés. La nécessité sécuritaire, qui prime sur l’objectif démocratique, passait par l’envoi d’un contingent congolais en soutien aux forces françaises de l’opération Sangaris et par la nomina-tion de Sassou Nguesso comme média-teur dans la guerre en Centrafrique. Ces services supposent que les autori-tés françaises ferment les yeux sur « biens mal acquis » par le clan Sassou Nguesso : argent du pétrole et du bois recyclé dans les paradis fiscaux ou dans l’achat d’immeubles de luxe dans les quartiers les plus huppés de Paris. Et qu’elles fassent silence sur les conditions dans lesquelles la cam-pagne électorale s’est déroulée : arres-tations d’opposants, menaces et voies de fait contre des militants et même contre des journalistes étrangers, communications bloquées… Malgré ces basses manœuvres, Sassou Nguesso n’a été réélu qu’avec 60 % des suffrages exprimés. Le gouverne-ment américain, dont les intérêts au Congo sont moindres que ceux de la France, regrettait « l’environnement médiatique déséquilibré et restrictif, la disparité significative dans l’accès aux ressources de l’État, une période courte pour la préparation des élections et les restrictions sur les libertés d’expres-sion, de communication et d’associa-tion dans la période préélectorale ». Le gouvernement français, lui, a simple-ment protesté contre l’agression d’un journaliste du Monde ★.

La Françafrique aux urnes

La “sécurité” avant la démocratie.

2016 est une année électorale dans les néocolonies françaises

d’Afrique. Dans l’ensemble, pas de surprise : les candidats soutenus par la France sont réélus, souvent dès le 1er tour. Les mécanismes sont bien connus et ont fait leur preuve : une bonne dose de tripatouillages des institutions pour qu’elles permettent la réélection à vie de certains « dinosaures » ; une dose de répression pour empêcher toute opposition sérieuse et pour intimider la population ; enfin, une dose d’achat de voix, de bourrage des urnes, de manipulations des listes électorales… Le bon candidat est celui qui assurera la sécurité : c’est devenu le maître mot ressassé sur tous les tons. Sécurité face à la menace islamiste, sécurité face aux prétentions des rivaux, sécurité également pour garantir ses intérêts face aux peuples qui ne veulent plus de l’exploitation et de l’oppression. C’est en fonction de ces critères que l’impérialisme français choisit son ou ses candidats. Pourtant, si les peuples n’attendent rien de ces élections, on peut noter une certaine évolution qui devrait inquiéter l’impérialisme français. D’abord, les événements imprévus du Burkina Faso, où l’intervention populaire a bousculé les schémas écrits d’avance. Rien ne fait plus peur aux pouvoirs en place et aux impérialistes que l’éventualité d’une réplique des manifestations de Ouagadougou. Ensuite, les candidats réputés pour avoir le soutien de la France n’ont pas la cote. Au Bénin, le premier ministre Zinsou (PDG jusqu’en mai 2015, du fonds d’investissement français PAI Partners) a été écarté au profit d’un autre homme d’affaires aussi peu recommandable, mais moins ostensiblement lié à la France et à son organisation patronale, le Medef.