La Complémentation Minérale Et Vitaminique Chez La Chèvre Laitière

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La complémentation minérale et vitaminique chez la chèvre laitière Avec des animaux de plus en plus performants et des rations alimentaires de moins en moins diversifiées, il importe de vérifier que la complémentation minérale et vitaminique des chèvres laitières soient correctes. Le raisonnement devra tenir compte des besoins des animaux aux différents stades physiologiques et s’adapter aux divers types de rations. Aujourd’hui, la plupart des rations mises en oeuvre sont correctement pourvues en vitamines et minéraux. Mais un apport mal adapté peut avoir des conséquences multiples: mauvaise utilisation de l’énergie et de l’azote de la ration, diminution des productions, perturbation des phénomènes de reproduction. Les minéraux Pour illustrer l'importance de l'alimentation minérale dans la production caprine, rappelons que le lait de chèvre contient entre 7 g et 8 g de minéraux par litre. Les minéraux sont classifiés en deux groupes : - les macro-éléments qui se chiffrent en grammes, - les oligo-éléments qui se calculent en milligramme Macro-éléments Oligo-éléments Phosphore P Fer Fe Calcium Ca Fluor F Potassium K Zinc Zn Sodium Na Cuivre Cu Magnésium Mg Manganèse Mn Chlore Cl Iode I Soufre S Cobalt Co Sélénium Se 1.1) Les macro-éléments a/Leur rôle Les macro-éléments ont à la fois un rôle dans la constitution du squelette et dans le métabolisme de l’animal. Le calcium et le phosphore étant principalement localisés dans l'os, leur rôle le plus évident est dans la formation du squelette dont ils assurent la dureté et la rigidité. De plus, le phosphore a pour rôle de transférer l'énergie, et intervient dans le métabolisme des glucides et l'équilibre du milieu. 25

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La complémentation minérale et vitaminique chez la chèvre laitière

Avec des animaux de plus en plus performants et des rations alimentaires de moins en moins diversifiées, il importe de vérifier que la complémentation minérale et vitaminique des chèvres laitières soient correctes.

Le raisonnement devra tenir compte des besoins des animaux aux différents stades physiologiques et s’adapter aux divers types de rations. Aujourd’hui, la plupart des rations mises en oeuvre sont correctement pourvues en vitamines et minéraux. Mais un apport mal adapté peut avoir des conséquences multiples: mauvaise utilisation de l’énergie et de l’azote de la ration, diminution des productions, perturbation des phénomènes de reproduction.

Les minéraux Pour illustrer l'importance de l'alimentation minérale dans la production caprine, rappelons que le lait de chèvre contient entre 7 g et 8 g de minéraux par litre.Les minéraux sont classifiés en deux groupes : - les macro-éléments qui se chiffrent en grammes, - les oligo-éléments qui se calculent en milligramme

Macro-éléments Oligo-élémentsPhosphore P Fer FeCalcium Ca Fluor FPotassium K Zinc ZnSodium Na Cuivre CuMagnésium Mg Manganèse MnChlore Cl Iode ISoufre S Cobalt Co

Sélénium Se

1.1) Les macro-éléments

a/Leur rôle Les macro-éléments ont à la fois un rôle dans la constitution du squelette et dans le métabolisme de l’animal.Le calcium et le phosphore étant principalement localisés dans l'os, leur rôle le plus évident est dans la formation du squelette dont ils assurent la dureté et la rigidité. De plus, le phosphore a pour rôle de transférer l'énergie, et intervient dans le métabolisme des glucides et l'équilibre du milieu.

Comme pour l'énergie et l'azote, il convient, en premier lieu, de satisfaire les besoins minéraux des micro-populations ruminales.Tous les minéraux sont probablement essentiels aux micro-organismes du rumen, mais pour nombre d'entre eux, les apports réalisés par la ration sont largement suffisants. Ce n'est pas le cas pour le phosphore, le soufre et peut-être le cobalt.

b/ Le phosphore et le calcium   : besoins des animaux et teneur des aliments Les besoins sont variables d'un animal à l'autre en fonction du poids vif, du stade physiologique et surtout du niveau de lactation.

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Les besoins en phosphore et en calcium

Chèvres de 60 kgde poids vif

Phosphore(en g/jour)

Calcium(en g/jour)

2 derniers mois de gestation

4,5 10,0

1 kg de lait 5,0 8,52 kg de lait 6,5 12,53 kg de lait 8,0 16,04 kg de lait 9,0 19,55 kg de lait 10,5 23,06 kg de lait 12,0 26,5Bouc de 60 kg 4,0 5,0Chevrette 3 mois 1,7 3,6Chevrette 6 mois 1,8 3,5Chevrette 9 mois 2,0 4,0

Les végétaux sont très diversement pourvus en phosphore et calcium ; de plus, la teneur varie en fonction de plusieurs facteurs : nature du sol, conditions climatiques, niveau de fumure, stade végétatif.

Retenons que :* Les légumineuses et crucifères sont riches en calcium et pauvres en phosphore.* L'ensilage maïs est pauvre en calcium et en phosphore.* Les céréales sont riches en phosphore et pauvres en calcium.

Teneur des aliments en phosphore et en calciumCalcium* Phosphore*

Foin de luzerne 15 2,5Foin de trèfle violet 12 2,5Choux 14 3,5Ensilage de maïs 3,5 2,5Orge 0,9 4,0Maïs 0,3 3,5

Les tables de valeurs des fourrages donnent des teneurs moyennes ; dans tous les cas, pour ajuster au mieux la complémentation minérale, l'analyse de votre fourrage permettra une plus grande précision.

c/ Les autres macroéléments* Sodium :Besoins : 1,3 g/kg de MS (MS ingérée)L'apport se fera sous forme de pierre à lécher mise à disposition des chèvres pendant toute l'année. Le sel contenu dans les pierres à lécher permet aux chèvres de régler leur consommation sur leurs besoins.

* Magnésium :Besoins : 1,3 g/kg de MSUn apport de cet élément est recommandé lors de la mise à l'herbe ou du passage à l’affouragement en vert pour éviter les problèmes de tétanie.

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* Soufre :Besoins : 1,5 à 2 g/kg de MSLa complémentation en soufre est obligatoire pour des rations comportant de l'ensilage de maïs. Les crucifères sont très riches en soufre ; avec ces aliments, éviter l'excès qui est toxique.

d/ Les carences et les excès * La carence en phosphore se traduit principalement par une diminution de l'activité cellulolytique des bactéries du rumen qui engendre une mauvaise valorisation des fourrages et a pour conséquence une chute d'appétit. Les carences comme les excès de phosphore peuvent par ailleurs entraîner des problèmes d’infécondité. Avec des rations riches en céréales, on peut rencontrer des problèmes de calculs urinaires sur les jeunes mâles.* Le manque de calcium dans des rations à dominante « graminées » peut provoquer des taux de calcium plus faibles dans le lait.* Lorsque l'apport de soufre est insuffisant, l'activité des micro-organismes du rumen est également perturbée et en particulier la fraction azotée de la ration est mal valorisée.* Lorsque l'apport de magnésium est insuffisant, l'expulsion du foetus est perturbée et retarde l'involution utérine. Une carence en sodium entraîne un léchage systématique et une chute d'appétit.

CAR : Coefficient d'Absorption Réelle des Minéraux

Le CAR représente la part véritablement disponible (c'est-à-dire absorbée au niveau digestif) de l'apport alimentaire pour satisfaire les besoins physiologiques.

D'après F. MESCHY (Laboratoire de Nutrition et Alimentation – INRA INA P-G), le CAR du phosphore semble supérieur chez la chèvre comparé aux autres ruminants. La valeur de 70 % semble réaliste chez les chèvres en lactation.

Pour le calcium, la valeur de 30 %, généralement adoptée, est valide uniquement dans le cas d'un apport proche du besoin. L'efficacité de l'absorption intestinale diminue lorsque l'apport de calcium est excessif.

Pour le magnésium, une valeur moyenne de 20-25 % semble pouvoir être retenue.

Le potassium et le sodium sont absorbés avec une grande efficacité (90 % et 80 % respectivement).

Les recommandations d'apport alimentaire en macro-éléments prennent en compte le CAR des minéraux.

1.2) Les oligo-éléments

a) Quelle forme d'apport   ? De préférence sous forme de sulfates (ou tout autre sel) pour le cuivre, le zinc, le manganèse, le cobalt.Les oxydes sont peu assimilables, sauf l'oxyde de zinc et le peroxyde de manganèse.

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Aucun résultat ne permet d'affirmer que les minéraux chélatés sont mieux assimilés par l'animal que les formes classiques.

b) Les besoins Cuivre : 10 mg/kg de MS. Toxicité à partir de 30 mg/kg de MS.Zinc : 45 à 100 mg / kg de MSManganèse : 60 à 120 mg/kg de MSCobalt : 0,1 mg/kg de MSIode : 0,8 mg/kg de MS. 2 mg/kg pour ration riche en crucifères.Sélénium :0,1 mg/kg de MS. Toxicité à partir de 0,5 mg/kg de MS.

c) Les carences Les symptômes très caractéristiques correspondent à des carences très prononcées (pratiquement inexistantes).

Manganèse : défaut d'aplombCuivre : troubles cardiaques, décoloration des poilsZinc : troubles de la peau, dureté des onglonsSélénium : dégénérescence musculaireIode : goîtreCobalt : anémie

d) Faut-il faire des cures d'oligo-éléments et vitamines? Les cures sont à réserver à des périodes clefs de la physiologie de l’animal : fin de gestation, début de lactation, reproduction… Il n'y a pas de lieu de stockage dans l'organisme pour les oligo-éléments (les excès doivent être éliminés). Le seuil de toxicité peut être rapidement atteint.

Comment choisir un Complément Minéral Vitaminique (CMV) ? Les principales questions à se poser sont les suivantes :- Avec ma ration, un CMV est-il  nécessaire ?- Si oui, quel type de CMV, quelle formule ?- Quel mode de présentation ?Selon la nature de la ration, le complément minéral à adopter sera différent.

3.1) Un CMV adapté à la rationRation « Foin de luzerne » (établie pour une chèvre de 60 kg à 4 kg de lait par jour)

Phosphore Calcium

Besoins 9,0 g/l 19,5 g/l

Apports MS Ingérée

Foin de luzerne 2eme coupeMaïs grainChèvre laitière 18

1,700,680,22

4,22,81,6

22,10,22,2

Total ration 8,6g/l 24,5 g/l

Déficit 0,4 g/l

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Soit  un équilibre en phosphore et un excédent en calcium. Il n'y pas d'apport de complément minéral à prévoir.

Ration « Ensilage de maïs »

Phosphore CalciumBesoins 9,0 g/l 19,5 g/lApports MS IngéréeEnsilage de maïsFoin de ray-grassOrgeConcentrés azotés

0,900,760,340,43

2,22,21,63,0

3,23,40,24,5

Total ration 9,0 g/l 11,3 g/lDéficit 8,2 g/l

Soit un fort déficit en calcium et un équilibre en phosphore. Le complément minéral adapté devra donc comporter une teneur en calcium beaucoup plus élevée qu’en phosphore : type 5-20. En apportant 40 g de 5-20, les chèvres vont recevoir 2 g de phosphore et 8 g de calcium.

Ration « Foin de graminées »

Phosphore Calcium

Besoins 9,0 g/l 19,5 g/l

Apports MS IngéréeFoin de graminéesCéréalesConcentrés azotésDéshydratés de luzerne

1,270,600,260,35

3,82,71,81,0

5,70,32,79,6

Total ration 9,3 g/l 18,3 g/l

Déficit 1,2 g/l

Soit in équilibre en phosphore et un léger déficit en calcium.

3.2) Mode de présentation du CMV : semoulette, poudre, granulés

Il faut s’assurer de l’appétence des minéraux à distribuer. La présentation doit également être adaptée aux caractéristiques de la ration et simple à utiliser. Il importe de veiller, lors de l’incorporation du minéral à la ration, à ne pas générer trop de poussière.

Que lire sur une étiquette de CMV ?

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Il est également fortement conseillé de disposer de la solubilité du phosphore à l’acide citrique à 2 % doit être signalée. Celle-ci doit être supérieure à 95 %.

LE BICARBONATE DE SODIUM

Le bicarbonate de sodium est un sel de sodium. Il ne contient pas de calcium et ne doit pas être confondu avec le carbonate de calcium. Il est utilisé pour son pouvoir tampon important : sa nature chimique permet de stabiliser directement le pH de façon directe, en agissant au niveau du rumen.Le bicarbonate de sodium s'utilise en cas d'acidose (baisse du pH ruminal), qui se caractérise par une baisse d'appétit pour les fourrages et le concentré, une baisse de la rumination, des crottes molles liées à un transit trop rapide, des chutes éventuelles de production, une baisse du TB, un maintien, voire une augmentation du TP.

La perte liée à une acidose est difficile à chiffrer, mais on l'imagine facilement importante puisque cela signifie une mauvaise valorisation de la ration.

La dose d'apport conseillée est de 15 à 25 g de bicarbonate de sodium (à fractionner dans la journée pour éviter des fluctuations trop brutales du pH).L'efficacité du bicarbonate est indéniable en cas d'acidose. Mais son apport ne résoudra pas les problèmes du troupeau. Il faut s’assurer avant tout de la qualité hygiénique de la ration.

3.2) Aspects économiques Pour un même type de minéral (teneurs équivalentes en calcium et phosphore), les prix de vente sont très variables. Un prix élevé ne justifie pas forcément une meilleure efficacité.

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L'analyse des résultats technico-économiques de 180 élevages de Poitou-Charentes montre un coût moyen de minéraux de 6 centimes par litre (Source : Données 1999 recueillies par les Contrôles Laitiers de Charentes-Poitou). La part des minéraux dans le coût alimentaire de l’atelier caprin est d’environ 5 %.Mais certains éleveurs ont des coûts de minéraux pouvant atteindre 15 centimes par litre. Dans ce cas, l'économie possible est importante (10 cts de francs/ litre pour 200 chèvres à 750 kg représentent 15 000 FrF d'économie).

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