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Les Cahiers nouveaux N° 82 Août 2012 45 45-48 Jean Michel Degraeve Architecte La cité-jardin, un modèle durable ? La publication « Habiter en quartier durable 01 » présentée dans Les Cahiers nouveaux n° 78 ana- lyse dix expériences novatrices d’habitat en quar- tier durable. La recherche mène à la conclusion suivante : la mise en place d’un habitat durable doit résulter d’une dynamique collective, à l’image de ce qu’a été la cité-jardin pour les problèmes engendrés par la Révolution industrielle. Si durant le 20 e siècle, d’autres modèles d’urba- nisation, comme les ensembles modernistes ou les lotissements de maisons individuelles, ont progressivement remplacé le mode d’urbanisation du début du siècle, la cité-jardin reste d’une éton- nante actualité. À l’heure où de grands ensembles modernistes sont démolis, des cités-jardins sont classées ou recherchées pour leurs avantages. Les lignes suivantes proposent de revenir sur les principes des cités-jardins qui répondent aux questions d’habitat durable. La ville-jardin d’Ebenezer Howard Comme le détaille le livre de Robert Fishman « L’utopie urbaine au XX e siècle » 02 , le concept de ville-jardin a été développé par le Britannique Ebenezer Howard (1850-1928). Véritable inven- teur au sens du 19 e siècle sans être urbaniste, il a développé un projet global visant le bien-être des habitants par la transformation pacifique du cadre économique et social. Sa vision planificatrice ori- ginale a été publiée en 1898 dans le livre « Garden Cities of Tomorrow » traduit en français, selon les éditions, en « Villes-jardins de demain » ou « Cités- jardins de demain ». Conçue comme une alternative à la concentration de populations ouvrières dans les villes industrielles polluantes et aux conditions de vie inacceptables, la ville-jardin veut marier les avantages de la ville, avec ses services et équipe- ments, et ceux de la campagne par la constitution d’unités de vie autonomes, à bonne distance des centres industriels mais reliées à ceux-ci par des lignes de chemin de fer et des canaux. Cette « ville à la campagne » est conçue pour accueillir environ 30.000 personnes ainsi que les activités et services nécessaires. Elle est organisée en quartiers d’un millier de maisons avec des équipements de proximité : école, bibliothèque, salle de réunion… Ces quartiers sont reliés par de larges avenues plantées d’arbres à un centre civique au cœur d’un grand parc central. Ce centre est composé de bâtiments publics et de loisirs ceinturés par une galerie commerciale. Les usines et les locaux d’activités sont situés à la périphérie de la ville en bordure de la ligne de chemin de fer circulaire marquant la lisière de la zone verte. L’originalité d’E. Howard est d’avoir traduit l’orga- nisation de la ville-jardin dans des diagrammes précis et exhaustifs. Ces dessins aux formes géométriques parfaites se veulent le symbole de la coopération entre les membres de la ville-jardin Diagramme d’un quartier de la ville-jardin d’Ebenezer Howard. Extrait du livre : Ebenezer HOWARD, Garden Cities of Tomorrow, S. Sonnenschein & Co. Ltd, London, 1902 01 J. M. DEGRAEVE, Habiter en quartier durable, Ed. Wallonie/Maison de l’Urbanité (commande à l’adresse degraeve.jm@ gmail.com), Namur, 2011. 02 R. FISHMAN, L’utopie urbaine au XX e siècle, éd. Mardaga, Liège,1979.

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45-48Jean Michel DegraeveArchitecte

La cité-jardin, un modèle durable ?

La publication « Habiter en quartier durable01 » présentée dans Les Cahiers nouveaux n° 78 ana-lyse dix expériences novatrices d’habitat en quar-tier durable. La recherche mène à la conclusion suivante : la mise en place d’un habitat durable doit résulter d’une dynamique collective, à l’image de ce qu’a été la cité-jardin pour les problèmes engendrés par la Révolution industrielle.

Si durant le 20e siècle, d’autres modèles d’urba-nisation, comme les ensembles modernistes ou les lotissements de maisons individuelles, ont progressivement remplacé le mode d’urbanisation du début du siècle, la cité-jardin reste d’une éton-nante actualité. À l’heure où de grands ensembles modernistes sont démolis, des cités-jardins sont classées ou recherchées pour leurs avantages. Les lignes suivantes proposent de revenir sur les principes des cités-jardins qui répondent aux questions d’habitat durable.

La ville-jardin d’Ebenezer Howard

Comme le détaille le livre de Robert Fishman « L’utopie urbaine au XXe siècle »02, le concept de ville-jardin a été développé par le Britannique Ebenezer Howard (1850-1928). Véritable inven-teur au sens du 19e siècle sans être urbaniste, il a développé un projet global visant le bien-être des habitants par la transformation pacifique du cadre économique et social. Sa vision planificatrice ori-ginale a été publiée en 1898 dans le livre « Garden Cities of Tomorrow » traduit en français, selon les éditions, en « Villes-jardins de demain » ou « Cités-jardins de demain ». Conçue comme une alternative à la concentration de populations ouvrières dans les villes industrielles polluantes et aux conditions de vie inacceptables, la ville-jardin veut marier les avantages de la ville, avec ses services et équipe-ments, et ceux de la campagne par la constitution d’unités de vie autonomes, à bonne distance des centres industriels mais reliées à ceux-ci par des lignes de chemin de fer et des canaux.

Cette « ville à la campagne » est conçue pour accueillir environ 30.000 personnes ainsi que les activités et services nécessaires. Elle est organisée

en quartiers d’un millier de maisons avec des équipements de proximité : école, bibliothèque, salle de réunion… Ces quartiers sont reliés par de larges avenues plantées d’arbres à un centre civique au cœur d’un grand parc central. Ce centre est composé de bâtiments publics et de loisirs ceinturés par une galerie commerciale. Les usines et les locaux d’activités sont situés à la périphérie de la ville en bordure de la ligne de chemin de fer circulaire marquant la lisière de la zone verte.

L’originalité d’E. Howard est d’avoir traduit l’orga-nisation de la ville-jardin dans des diagrammes précis et exhaustifs. Ces dessins aux formes géométriques parfaites se veulent le symbole de la coopération entre les membres de la ville-jardin

Diagramme d’un quartier de la ville-jardin d’Ebenezer Howard.Extrait du livre : Ebenezer HOWARD, Garden Cities of Tomorrow, S. Sonnenschein & Co. Ltd, London, 1902

01J. M. DEGRAEVE, Habiter en quartier durable, Ed. Wallonie/Maison de l’Urbanité (commande à l’adresse [email protected]), Namur, 2011.

02R. FISHMAN, L’utopie urbaine au XXe siècle, éd. Mardaga, Liège,1979.

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pour mettre en place une société harmonieuse. La ville se présente sous la forme d’un cercle de 1.100 m de rayon facilitant les déplacements. D’une superficie d’environ 400 ha, elle est consti-tuée de maisons implantées sur des parcelles disséminées dans la verdure. Le cercle bâti est au cœur d’une campagne de 2.000 ha couvrant en bonne partie l’alimentation des habitants. Pour élargir les services offerts aux habitants, une agglomération de plusieurs villes-jardins reliées par des chemins de fer et canaux forme une « Cité sociale » de 250.000 habitants.

Synthèse de différents courants de pensée de la fin du 19e siècle, la ville-jardin réunit des intérêts contradictoires. Pour les libéraux, elle est une manière de sortir les ouvriers de la décadence des villes et augmenter leur niveau de vie sans mettre en danger le capitalisme. Les réformateurs agraires y voient, eux, un moyen de faire revivre les campagnes vidées par l’industrialisation et les radicaux, la pos-sibilité de mettre en place un projet social coopéra-tif. Les grands propriétaires fonciers y trouvent les moyens financiers nécessaires à leur participation au développement économique et les industriels, un moyen de loger leurs travailleurs en évitant le caractère paternaliste des cités patronales. Enfin, les autorités publiques voient dans la ville-jardin un moyen pour remédier à la surpopulation urbaine.

La première ville-jardin fut réalisée en 1906 à Letchworth au nord de Londres. Elle fut érigée sur base des plans des architectes Barry Parker et Raymond Unwin qui serviront de référence pour la réalisation de nombreuses cités-jardins dans l’Europe entière03. Dès 1910, les idées d’E. Howard étaient ainsi concrétisées à Letchworth. Ce proto-type d’un nouveau modèle urbanistique devint vite « La Mecque » urbanistique de l’époque.

De la ville-jardin aux cités-jardins

Les difficultés financières rencontrées pour réa-liser la première ville-jardin ainsi que la Première Guerre mondiale empêchèrent la reproduction de Letchworth pour répondre à l’extraordinaire boum démographique londonien. Les nouveaux habitants furent accueillis dans des extensions urbaines à la périphérie de Londres. Certaines de celles-ci ont été réalisées selon les principes des quartiers de la ville-jardin, comme à Hampstead au nord-ouest de Londres. En 1919, une opportu-nité foncière permit la réalisation d’une deuxième ville-jardin à Welwyn entre Londres et Letchworth. Il faudra cependant attendre l’intervention de l’état anglais après la Seconde Guerre mondiale pour voir se développer les villes nouvelles selon les principes de la ville-jardin.

La Belgique ne compte pas de ville-jardin au sens des « garden-cities » anglaises mais a vu éclore, autour des villes et dans les banlieues indus-trielles, de nombreux « faubourgs-jardins04 ». Le mot cité-jardin est aujourd’hui communément uti-lisé pour désigner ces réalisations, le mot cité étant pris dans le sens d’un groupement de logements présentant une unité et non dans celui de ville.

La première cité-jardin belge fut érigée en 1912 à Genk-Winterslag, à proximité d’un charbonnage du groupe Coppée dans le bassin carbonifère campinois nouvellement mis en exploitation. Elle fut conçue par l’architecte Adrien Blomme (1878-1940) qui, comme le rappelle Françoise Blomme dans son livre sur son grand-père05, s’enthou-siasma lors de voyages en Angleterre pour la cité-jardin de Letchworth. A. Blomme s’associa par ailleurs avec les architectes B. Parker et R. Unwin pour certaines de ses réalisations bruxelloises.

Mais le développement des cités-jardins en Belgique sera surtout l’œuvre d’émile Vinck (1870-1950). Sénateur socialiste, il est à l’origine de la création de l’Union internationale des villes, struc-ture de réflexion sur le développement des villes, créée en juillet 1913 dans le cadre de l’exposition universelle de Gand. Avec ses partenaires français Henri Sellier et néerlandais Florentinus Wibaut, émile Vinck fit de cette Union le lieu d’échange de méthodes de gouvernement des villes sur base des principes de la ville-jardin. Outre son action comme directeur de l’Union internationale des villes, émile Vinck présida l’Union des villes et communes de Belgique et la Société nationale des habitations et logements à bon marché.

La Première Guerre mondiale avait vu la formation d’un gouvernement d’union nationale en exil, ce rapprochement des forces vives se poursuivra après l’armistice. À l’image de la synthèse d’idées qui a permis l’éclosion de Letchworth, la cité-jardin deviendra après 1918 le modèle d’urbanisation partagé par l’ensemble des acteurs concernés et la forme d’habitat d’un productivisme social visant à améliorer la rentabilité et à mieux rémunérer les travailleurs. Cette époque vit ainsi de grands industriels se rapprocher de membres du Parti ouvrier belge. Cette convergence d’intérêts s’est traduite par la réalisation de près de 23.000 habi-tations à bon marché entre 1919 et 1923.

Ce rythme des constructions fut cependant ralenti dans les années suivantes par de nombreuses crises économiques et politiques. La priorité donnée initialement à la construction de logements locatifs fut réduite et l’accession à la propriété renforcée, notamment par l’obligation de vente du parc existant d’habitations à bon marché pour financer la création de nouveaux logements. Sur les 62.000 habitations à bon marché construites en Belgique durant l’Entre-deux-guerres, près du tiers furent vendues.

Caractère durable des cités-jardins

Sur base d’informations recueillies lors de la constitution d’une base de données des cités-jar-dins wallonnes, il me semble intéressant de revenir sur leurs caractéristiques durables à partir de la grille d’analyse des quartiers durables utilisée dans la publication « Habiter en quartier durable ».

Sans être des parties d’une ville-jardin selon le schéma d’E. Howard, les cités-jardins en re-prennent certains objectifs, notamment la création de centres urbanisés denses à proximité d’une

03R. UNWIN, L’étude pratique des plans de villes, éd. L’équerre, Paris, 1909.

04A. VAN BILLOEN, Le problème de la construction dans les faubourgs-jardins, dans L’habitation à bon marché, n° 1, 1921, p. 4-26.

05F. BLOMME, A la rencontre d’Adrien Blomme, éd. Civa, Bruxelles, 2004.

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campagne verte. Leurs principes de réalisation font qu’elles se situent souvent à proximité de noyaux agglomérés facilement accessibles. Conçues pour rapprocher les ouvriers de leur travail, les cités-jar-dins sont généralement implantées à proximité de lieux d’activités, même si ceux-ci sont aujourd’hui en léthargie à la suite de la crise de l’industrialisa-tion. De nombreux espaces verts de proximité per-mettent d’offrir des produits frais aux habitants par la mise en place de circuits courts de production.

Les groupements de logements mitoyens, sur des parcelles individuelles de deux à trois ares, per-mettent des densités nettes de 25 logements par hectare qui économisent le terrain utilisé. Bien qu’essentiellement constituées de logements, les cités-jardins sont complétées par des infrastruc-tures de quartier : école, salle communautaire et commerce de proximité. Afin de compenser la di-mension réduite des jardins individuels, des parcs publics et des plaines de jeux offrent des espaces communs de plus grandes dimensions.

Dans les premières années de réalisation des cités-jardins, les habitations étaient louées aux classes laborieuses et majoritairement consti-tuées de maisons avec trois chambres. Le principe de vente d’une partie des logements va engendrer une diversité sociale par le mélange de maisons locatives pour les ménages à faibles revenus et de maisons en accession aidée à la propriété pour les travailleurs plus aisés et les employés. Cette diversité sera également renforcée par la réali-sation de maisons pour les travailleurs âgés et de petits immeubles à appartements.

La mobilité est organisée pour faciliter l’accès aux logements tout en décourageant le trafic de tran-sit. Les voiries sont partagées entre les différents utilisateurs et utilisées pour d’autres usages : jeux pour enfants, rencontres… Les venelles internes au quartier facilitent la mobilité douce et de nom-breux espaces disponibles permettent le station-nement des véhicules.

Sur le plan énergétique, si les qualités thermiques des logements sont inférieures aux productions actuelles, l’utilisation d’un poêle à charbon central permet d’optimiser les consommations énergé-tiques. Les matériaux utilisés pour les construc-tions sont majoritairement locaux : briques et tuiles en terre cuite ; planchers, charpentes, menuiseries

De haut en basLogements de la ville-jardin de Letchworth.© Jean Michel Degraeve

Espace central de la cité-jardin de Ressaix conçue par l’architecte Adrien Blomme.© Jean Michel Degraeve

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intérieures et extérieures en bois indigènes. Pour de nombreuses cités-jardins, les briques ont été fabriquées à partir de l’argile extraite pour les caves et fondations. Des nombreuses recherches furent également menées sur les matériaux de récupération, comme les blocs de cendrées.

Les maisons sont généralement équipées d’une citerne d’eau pluviale et certaines cités-jardins offrent une alimentation en eau potable au départ d’un forage local. Une bonne biodiversité est obtenue par l’implantation des logements dans la verdure constituée de jardinets en voiries, de po-tagers à l’arrière des logements et d’espaces verts publics. Les principes hygiénistes d’éloignement des usines polluantes, d’offre d’espaces aérés, de recherche d’un bon ensoleillement des logements et de complémentarité logement/verdure forment un cadre de vie contribuant à la santé physique et mentale des habitants.

Le paysage bâti des cités-jardins se caractérise par des ensembles à échelle humaine, équilibrant rationalisme ascétique et diversité d’aspects. Un pittoresque spontané est obtenu par des varia-tions de briques, des soubassements différen-ciés, des lignes continues de seuils et linteaux ; éléments qui différencient les façades et évitent une répétition monotone. Cette recherche de qua-lité architecturale s’est traduite par l’organisation de concours d’architecture et l’assistance d’archi-tectes-conseils de la Société nationale. Bon nombre de grands noms de l’architecture belge ont participé à la construction des cités-jardins : A. Blomme, V. Bourgeois, H. Derée, A. Puissant…

Comme rappelé ci-avant, la convergence d’inté-rêts sur le modèle de la cité-jardin s’est concré-tisée par une gouvernance de type partenariat public-privé. Le capital des sociétés de logements créées provenait tant des autorités locales que des chefs d’entreprises. D’autres cités-jardins sont nées à l’initiative de coopératives de loca-taires et mettent en place une forme de pro-priété collective. Cependant, vu la nécessité de vente des logements pour financer les nouvelles constructions, la création de ces coopératives de locataires a été stoppée.

Pour ne pas conclure…

Bien entendu, le contexte socio-économique et politique à l’origine de la cité-jardin a fortement évolué. Les questions de villes industrielles pol-luantes, de concentration de la propriété foncière et d’actions d’hommes de biens sont remplacées aujourd’hui par celles de villes-territoire, de fragmentation de la propriété et de participation citoyenne. Cependant, comme synthétisés ci-avant, les principes des cités-jardins répondent à nos préoccupations actuelles d’habitat durable. Au-delà de l’évocation historique ou d’un regard en arrière, les cités-jardins peuvent nous servir d’inspiration pour nos projets d’habitat durable.

Leurs principes de coopération et d’équilibre entre les aspirations individuelles et collectives

reprennent de l’actualité pour répondre aux enjeux du développement durable, à l’exemple des éoliennes citoyennes ou de la propriété partagée de biens et équipements. La souplesse de leur concep-tion fait des cités-jardins un modèle urbanisé durable au sens premier du terme, car elles se sont adaptées aux besoins des habitants. Ainsi, et même si cela est parfois regrettable, une place a été don-née à la voiture par la transformation des jardinets avant en places de stationnement. De même, l’offre de pièces multifonctionnelles a permis d’adapter l’organisation intérieure des logements.

Mais la leçon principale des cités-jardins porte sur les conditions de son succès, à savoir la convergence des intérêts politiques, écono-miques, sociaux en vue d’améliorer le bien-être des habitants. Cette union de l’ensemble des acteurs concernés – décideurs, experts architectes/urba-nistes et industriels – a permis l’éclosion de la cité-jardin comme la concrétisation d’une idéologie partagée de mise en place d’une société nou-velle. Cette situation favorable a été soutenue par l’action volontaire de personnalités et d’organismes utilisant des moyens de communications simples, tels que la revue « L’habitation à bon marché » qui a mis à disposition de ses lecteurs les informations nécessaires pour créer des cités-jardins.

Espérons que ces leçons des cités-jardins nous aideront à faire du concept d’habitat durable « la » référence partagée en matière d’habitat en vue de transformer durablement notre cadre de vie !

Projet d’urbanisation de l’architecte Crollaer pour la cité-jardin de Seraing.Extrait de la revue L’Habitation à Bon Marché, avril 1922

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