Journal des debats n°5

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JOURNAL DES DÉBATS DE L’ENCYCLOPÉDIE DES MIGRANTS SAMEDI 10 OCTOBRE 2015 L’Encyclopédie des migrants est un projet d’expérimentation artistique à l’initiative de Paloma Fernández Sobrino, qui vise à produire une encyclopédie rassemblant 400 témoignages d’histoires de vie de personnes migrantes. Il s’agit d’un travail contributif qui part du quartier du Blosne à Rennes et qui rassemble un réseau de 8 villes de la façade Atlantique de l’Europe, entre le Finistère breton et Gibraltar. ON SE RÉUNIT au Triangle, cité de la danse - Quartier du Blosne - Rennes LES SAMEDIS |10 octobre 2015|30 avril 2016| |15 octobre 2016 | de 10h à 12h45 et de 13h45 à 16h30 PROGRAMME |www.encyclopedie-des-migrants.eu| ON PEUT MANGER sur place, en apportant son déjeuner. SAMEDI 10 OCTOBRE 2015 ÉDITO par Thomas Vetier, membre du laboratoire PREFics de l’université Rennes 2 Dans ce numéro, nous voyons des contributions de citoyens, de chercheurs, de personnalités politiques et institutionnelles, d’artistes, venus pour un jour ou à plusieurs reprises faire partie de ce qu’on appelle désormais les « membres du groupe de réflexion ». Autour d’un noyau dur s’est constitué un espace d’échanges et de partages où chacun peut contribuer à sa manière au développement de la réflexion sur le projet. Objet distant au départ, L’Encyclopédie des migrants est devenu pour beaucoup un objet proche, presque palpable tant il est fait d’un peu de chacun d’eux… Mise en débat de manière publique lors de sa phase de conception par l’association qui l’a fait naitre, cette encyclopédie est désormais le fruit d’un travail collectif où chacun est engagé et responsable des règles tranchées (non sans désaccords et mises en doute). Cependant, il me semble que l’attachement au projet de chacun des participants va au- delà d’un simple engagement professionnel ou associatif… Ce projet touche tout à la fois dans sa portée « sensible », artistique, politique, c’est ce que nous allons voir dans cette édition… A cet égard, la présence de chercheurs, ou de jeunes chercheurs dans mon cas, ne relève pas d’autres choses que ce qui est cité précédemment. L’approche en sociolinguistique urbaine qui est la nôtre ne veut se départir de son engagement car elle se définit comme étant « de terrain », concourant avec d’autres acteurs à des réflexions et interventions visant la cohésion sociale, ou en tout cas à intervenir là où elle estime voir s’exprimer une demande sociale. Ce projet relève d’une militance scientifique et sociale pour un projet sociétal visant à dénoncer les inégalités et les exclusions. Ce projet fait ainsi sens pour moi par sa volonté de requestionner par l’humain le rapport à la migration. Dans un contexte de repli identitaire et d’accusation généralisée de la migration comme producteur des maux actuels de notre société, il convient d’interroger les regards portés sur ceux mis sur le banc des suspects. Ce projet me touche car il explore des points de vue sensibles qui permettent d’éclairer le politique dans le sens où l’objectif final est bien de montrer que notre société est traversée de rapports sociaux conflictuels, où les rapports sociaux « de race » (en dehors de toute rationalité si l’on ne prend qu’un point de vue scientifique en la matière) persistent et coproduisent avec d’autres un monde d’inégalités sociales. Contribuer à émanciper (même un tout petit peu) le regard de chacune des personnes qui sera confrontée à sa lecture, voilà l’objectif que l’on construit ensemble… ÉDITION DU MATIN Nous nous sommes réunis pour discuter collectivement DES ENJEUX PARTAGÉS PAR LES ACTEURS DU PROJET DE L’ENCYCLOPÉDIE DES MIGRANTS. Voici quelques extraits des échanges qui ont eu lieu : L’Encyclopédie des migrants se veut être un projet tout à la fois artistique, politique, scientifique et militant qui « engage » toute personne mettant, un jour ou l’autre, le pied dans l’engrenage de ce projet hors-norme : par sa taille encyclopédique, par les territoires qu’elle questionne (de Brest à Gibraltar), par le nombre d’acteurs qu’elle met en synergie… Cette immensité ne doit pas faire oublier l’aspect « sensible » du projet car, en effet, au bout d’un an d’existence (et je ne parle ici que de sa phase de conception), il se trouve que les acteurs en présence partagent un attachement certain à sa future réalisation : en témoignent les interventions et les débats de ce présent numéro… ANDRÉ SAUVAGE Ancien, adopté, du quartier du Blosne, citoyen de la France, de l’Europe, voilà en quelques mots l’attachement d’André Sauvage à ce projet. Ainsi, il fait ressortir trois aspects qui résonnent vis-à-vis de ce projet et qui marquent son lien avec ce quartier d’où part le projet. Premièrement, sa découverte en 1968 d’une baraque d’une trentaine de travailleurs algériens et marocains vivant entassés dans des conditions indignes et son engagement dans l’ASTI (Association de Soutien aux Travailleurs Immigrés proche de La Cimade). Deuxièmement, ses réflexions (par son métier de sociologue) sur les notions de « reconnaissance » et « d’être ensemble » à travers les mutations « demandées » (pour ne pas dire exigées) aux migrants arrivant et les cheminements intimes ainsi réalisés. Troisièmement, ses questionnements territoriaux liés au Blosne et à l’incapacité de la ville à faire du « commun » dans l’espace bâti : « comment se fait-il que dans ce quartier la question du témoignage artistique, de l’expression de la diversité n’apparaisse pas ? » VIOLAINE POUBANNE Travaillant aux Archives de Rennes, Violaine Poubanne nous explique le lien qui peut être établi entre son activité et la collecte de témoignages menée dans le cadre de L’Encyclopédie des migrants. Les Archives de Rennes, établissement culturel de la ville de Rennes, conserve 10km linéaire d’archives du XIII ème siècle à 2015 avec pour fond 80% d’archives publiques et 20% de privées. Les témoignages oraux sont collectés dans l’objectif de médiation et de valorisation des archives : l’intérêt est de communiquer, de partager. Interrogés comme les autres ressources, les témoignages enrichissent les archives publiques et permettent de raconter autre chose que le seul regard de l’administration et compléter les connaissances de la ville et de l’histoire de la ville grâce à des mémoires individuelles. Par leur médiation et leur valorisation, ils permettent de faciliter l’appropriation du patrimoine. Enfin, à l’instar de ce projet, ils valorisent l’expression de la diversité culturelle rennaise, les voix différentes, les parcours différents (responsables politiques, syndicaux, habitants,...). SANDRINE BOULON Pourquoi participer à ce projet et au Groupe de réflexion quand on est « pas migrante », que l’on n’a pas « traversé cette frontière » ? Elle se demande ainsi « ce que ça veut dire de se sentir proche de cette condition ? », qu’elle rapproche de la métaphore d’un arbre- racine aperçu à Ellis Island où les racines apparentes symbolisaient la « mise à nu ». Par deux citations ; « je ne sais ce que je vois qu’en travaillant » d’Alberto Giacometti et « j’écris pour me parcourir » d’Henri Michaux issu du recueil La nuit remue ; Sandrine nous évoque sa sensibilité à la parole mise à l’écrit ainsi que les enjeux de la parole intime en public. Son intervention se finit par la nécessaire vigilance et l’importance du doute et du questionnement dans ce genre de projet quant à sa transmission (conserver la sensibilité), aux différentes temporalités, à l’écrit (car l’écrit reste…), aux questions des frontières et des territoires (frontières intérieures qui ne demandent pas forcément de passer de frontières extérieures)… MONTSERRAT CASACUBERTA Montserrat nous parle ici de son appartenance et de son sentiment du « devoir de restitution », entre la Catalogne et la Bretagne. Catalane, confrontée « par hasard » à la diversité culturelle et linguistique depuis l’enfance, elle a été envoyée enfant dans une école de quartier « avec des petites migrantes économiques internes ». Née en 1967 sous Franco d’une famille catalophone (langue « des vaincues de la guerre civile »), elle se dit aujourd’hui « fille de l’ignorance et petite enfant du silence » : ce n’est qu’en arrivant à Barcelone qu’elle a pu entreprendre sa « démarche d’éveil » sur ce qu’a vécu « son peuple ». Plus tard, avec un poste de jeune attachée à la culture d’aménagement linguistique, elle a travaillé avec des personnes migrantes qui souffraient de conditions d’exploitation économique : « je transmettais le catalan mais ils me transmettaient la vie. » Aujourd’hui, elle se dit parfois qu’elle ne peut s’appeler « migrante » car elle est arrivée avec un contrat de travail, elle décide ainsi de s’appeler « trans » : « transculturelle », « translinguistique », « transnationale », « trans... » ERMIAS LE BRETON Après son adoption, il se voyait comme un « petit français » qui faisait du commerce équitable en pensant que c’était sa vocation, sa rencontre avec Paloma, son agacement face à des questions, des remarques, l’a ramené à son passé d’immigré. Après le premier projet effectué avec L’âge de la tortue, il s’est recentré et s’est accepté « comme quelqu’un d’adopté », « qui a été déraciné ». Ce projet lui a permis de se perdre, d’accepter de se dire « je ne suis pas que français » contrairement à ce que le regard français demande : s’intégrer, s’oublier... L’écriture de sa lettre dans un projet précédent s’est fait pour un frère, un cousin (sans vraiment le savoir) et lorsque le livre a été publié, il s’est mis à la recherche de cette personne : six mois après, cette personne était retrouvée, neuf mois après, le livre était entre ses mains et quatre ans après cette personne a décidé de quitter son pays pour venir le voir. Ce paradoxe, il l’exprime ainsi : « la vie n’a pas de sens : moi qui cherchais mes racines, ma langue, qui cherchais une identité, je me retrouve confronté à ce frère qui a traversé le désert, la mer, a failli mourir plusieurs fois, qui a été torturé, qui a laissé sa famille ». Les questions d’immigration, d’identité sont donc complexes, « on peut créer des ghettos, il n’y a pas de vérité ». GENEVIEVE LETOURNEUX Élue à la ville de Rennes, déléguée aux droits des femmes et à l’égalité, nous offre ici la voix de la ville et sa position dans le projet en tant que partenaire. Ce projet a retenu l’attention de la ville et la maire de Rennes car il y a un porteur (L’âge de la tortue) qui est implanté au long cours dans le territoire, qui a une capacité à faire un travail de collecte qui soit respectueux et qui ne bascule pas dans l’instrumentalisation. Pour la ville, la question de documenter des parcours, des situations est également importante : c’est reconnaitre une place à chacun dans la ville sans enfermer personne dans une histoire ou une origine réelle ou supposée. Cette connaissance sensible est performante dans la construction de la ville qui ne se constitue pas uniquement d’infrastructures, d’aménagements, c’est aussi tout un travail d’appropriation de la ville et de reconnaissance de ses habitants : la richesse d’une ville est ses habitants. Il y a aussi la dimension d’acceptation de la pluralité de notre société, qui n’est pas « difficulté » mais une « partie de la solution » et la simple reconnaissance de la réalité. _ QUELS SONT LES ENJEUX « SENSIBLES » DU PROJET ? DISCUSSIONS « La question qui me vient c’est : en quoi ce projet me touche ? Pour plein de raisons... C’est évident qu’il me touche mais je n’arrive pas à le formuler. Ça va bouger, on a des casquettes différentes mais on n’est pas là par hasard. » (Anne) Pour Thierry en effet, si cette question n’est pas abordée dans L’Encyclopédie, on peut l’exposer à être un observatoire. Pour Sandrine, c’est un des enjeux de L’Encyclopédie : qu’elle fasse miroir de ceux qui la porte afin qu’elle ne soit pas figée. Les débats montrent que ce projet d’Encyclopédie fera masse par sa symbolique forte et devra répondre à une sensibilité sur deux échelles : il touche les membres qui en sont les porteurs et il laisse la part belle aux témoignages et à leur sensibilité. _ DU CROISEMENT DES PARCOURS MIGRATOIRES AUX PASSERELLES L’importance est donnée ici aux notions d’apprentissage et d’émancipation pour tous : des membres du groupe de réflexion aux lecteurs en passant par les personnes témoins. Il est pensé que L’Encyclopédie des migrants peut être une sorte de « passerelle culturelle et linguistique » par l’importance qu’elle porte sur le croisement des parcours migratoires (comme par exemple avec les migrations internes) : « nous avons vécu déjà des migrations internes et c’est ce qui peut permettre de lutter contre tous ceux qui ont une vision négative des migrations, car ils n’ont pas pris conscience qu’eux-mêmes parfois ont été des migrants internes » nous dit ici Christian. Alors que la plupart des projets posent comme question « qu’est-ce que la personne migrante a à gagner dans le projet ? », le projet se demande lui : « qu’avons-nous tous à gagner dans un projet comme celui-ci ? » Antoine rappelle alors « ce qui est défendu par le projet éditorial, c’est une approche kaléidoscopique des parcours des migrations. » C’est par l’accumulation de grandes quantités de témoignages, d’expériences qu’on va donner à voir une diversité de parcours. Joëlle nous dit : « c’est l’émancipation par rapport aux injustices, au souci d’équité, mais c’est aussi vis-à-vis des idées dominantes, des évidences, des attitudes. » _ DÉBAT AUTOUR DE LA NOTION DE «RACINE » La notion de « racine » fait débat ici : a-t-on des racines comme il est usage de le dire ? Le migrant est-il nécessairement porteur des « racines » qu’on veut lui attribuer ? Avec ces questions et de nombreuses autres mais sans réponse, il est à noter que le projet de L’Encyclopédie des migrants renvoie (par l’effet de miroir) à ses propres interrogations sur ses racines de façon caricaturale et binaire : ai-je des racines ou pas ? La métaphore de l’arbre « racine » est ainsi utilisée avec des variantes qui permettent de comprendre que la personne se construit avec son histoire, les évènements de sa vie et ses rencontres. On parle ici d’arbre « en marque-page », « d’arbre-âme », des arbres démultipliés qui permettent de comprendre que les racines sont en nous et qu’elles se sont développées comme on le souhaite et/ou en fonction des évènements de la vie. Celles-ci peuvent avoir un rôle clé : l’expérience de Christian avec la langue gallèse et le Brésil ou encore l’attachement à celle-ci quand on évolue dans un environnement migratoire hostile… ÉDITION DU SOIR Nous nous sommes réunis pour discuter collectivement DU GROUPE BILAN ET PERSPECTIVE AUTOUR DU PROJET DE L’ENCYCLOPÉDIE. Voici quelques extraits des échanges qui ont eu lieu : Pourquoi faire une « évaluation qualitative » dans un projet comme celui-ci ? Si le rejet du terme « évaluation » est collectif car trop clivant, il n’en reste pas moins que le projet, dans sa perspective d’expérimentation artistique et pluridisciplinaire, doit se doter d’un regard réflexif sur sa propre mise en œuvre afin de déterminer ce qui fonctionne ou non, ce qui est à garder ou non dans l’objectif d’autoalimenter sa réflexion et de, surtout, la partager. PRÉSENTATION DU GROUPE BILAN ET PERSPECTIVE (BIPE) par ANNE MORILLON, sociologue, collectif TOPIK, Le groupe de travail « évaluation qualitative » du projet propose de faire évoluer l’appellation de celui-ci en un groupe « Bilan et Perspective » (BIPE), pensé en parallèle du développement du projet : il s’agit de « faire et regarder ce qu’on fait » jusqu’au séminaire final qui aura lieu en juin 2017 à Gibraltar. Trois axes sont proposés à mettre au travail dans ce groupe : l’axe « individuel/ personne » (comment L’Encyclopédie contribue-t-elle à la reconnaissance des personnes migrantes ?), l’axe « structure » (qu’est-ce qu’elles ont retiré du projet ?) et l’axe « territoire » (en quoi ce projet peut-il contribuer à reconnaitre la place des personnes migrantes dans la cité ?). D’autres axes peuvent être ajoutés. Ainsi, Sandrine propose un axe « Encyclopédie » qui permettrait de voir l’évolution de celle-ci. DISCUSSIONS AUTOUR DES MÉTHODES ET DES PERSPECTIVES Interrogé sur les méthodes « d’enquête » que ce groupe pourrait mettre en place pour réaliser son travail, plusieurs solutions ont été proposées : - entretiens semi-directifs ; - « focus groupe » ou entretiens groupés ; - analyse des temps collectifs avec une observation participante, directe (des enjeux, des relations entre les gens, des rapports de pouvoirs). Céline indique ainsi que cette démarche s’inscrit dans une démarche globale de regarder « comment on travaille, comment ça se construit ». Si on réfléchit ici à Rennes sur « comment le projet se construit », rien n’empêche les autres villes de le faire pour avoir un point de vue global. Dans la perspective de Rennes, l’objectif est de réfléchir collectivement à cette démarche. Des doutes ont cependant été émis quant à la nécessité de travailler un « bilan » pendant la prochaine phase : le risque étant que le groupe de réflexion « tourne en rond ». L’idée serait peut-être de voir comment approfondir le projet, l’accompagner vers la suite tout en lui faisant confiance nous dit Françoise. Si le terme porte à ambigüité, il est proposé à la place « suivi » qui paraitrait plus « cumulatif », ce qui donnerait un groupe « Suivi et Perspective » ? PERSPECTIVES DU GROUPE DE RÉFLEXION : DE RENNES AUX AUTRES VILLES La discussion sur le groupe de travail « Bilan et Perspective » a permis d’évoquer l’avenir du Groupe de réflexion en place à Rennes et ses possibles évolutions ailleurs. À Rennes, le prochain Groupe de réflexion aura lieu après la collecte des témoignages, il sera alors possible de voir, par la présence de « témoignants », si ce projet a construit autour ou avec les personnes qui ont témoigné et donc réussi à éviter l’écueil « d’une instrumentalisation des gens » (Joëlle). Il faut qu’ils « puissent faire histoire avec L’Encyclopédie ». Ailleurs, où chaque ville va développer le travail de son côté, les personnes du projet ne pourront faire « l’économie de leur propre groupe de réflexion, car le projet va se construire partout » nous dit François, administrateur de la Maison des Citoyens du Monde à Nantes. Il est intéressant de voir la méthode collective développée dans le groupe de réflexion de Rennes et il serait important de la partager car cela est intéressant pour tous les praticiens, les associations qui travaillent sur ce sujet régulièrement. PARTENAIRES Le projet L’Encyclopédie des migrants est coordonné par l’association artistique L’âge de la tortue (Rennes, France) et co-organisé avec l’Université Rovira i Virgili (Tarragone, Espagne), ASI - Association de Solidarité Internationale (Porto, Portugal), le laboratoire de recherche PREFics de l’Université Rennes 2 (France), le Musée de l’Histoire de l’Immigration (Paris, France), le Ministère des Sports, de la Culture, du Patrimoine et de la Jeunesse de Gibraltar (HM Government of Gibraltar), les villes de Brest, Rennes, Nantes, Gijón, Porto, Lisbonne, Cadix et Gibraltar. Le projet est organisé en partenariat avec l’association ABAAFE (Brest, France), la Maison des Citoyens du Monde (Nantes, France), l’association Tragacanto (Gíjon, Espagne), l’association APDHA (Cadix, Espagne), l’association Renovar a Mouraria (Lisbonne, Portugal), le CREA Centre de Ressources et d’Études Audiovisuelles de l’Université Rennes 2, FRESH Filmer la recherche en sciences humaines (Caen et Rennes, France), le collectif TOPIK (Rennes, France), l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de Rennes (France), le laboratoire de recherche ERIMIT de l’Université Rennes 2 (France), l’Université de Gibraltar, la bibliothèque Garrison de Gibraltar, la Conférence des Villes de l’Arc Atlantique, l’Institut Français de Lisbonne (Portugal), le centre d’art contemporain ECCO (Cadix, Espagne), la bibliothèque des Champs Libres (Rennes, France) le Musée de Bretagne (Rennes, France), les Archives municipales de Rennes (France), le Triangle, cité de la danse (Rennes, France), l’association Un toit c’est un droit (Rennes, France), l’association La Cimade (Rennes, France), Canal B (Rennes, France). Le projet est soutenu par la Commission Européenne (programme Erasmus+), l’Institut Français, la Ville de Rennes, Rennes Métropole, le Conseil régional de Bretagne, le Conseil départemental d’Ille-et-Vilaine et le Ministère de la Culture et de la Communication - Direction Régionale des Affaires Culturelles. OURS Direction éditoriale : omas Vetier et Antoine Chaudet - Rédaction : omas Vetier - Correction : Nicole Galasso-Chaudet - Création graphique : Antoine Chaudet - Photographie : Bertrand Cousseau. Ce journal a été composé en Stuart (Matthieu Cortat) et Clearface, à partir de la maquette du Journal des débats politiques et littéraires paru entre 1789 et 1944. Edité à 1 000 exemplaires - Gratuit Dépôt légal Septembre 2015 - ISSN 2428-2065

description

Pourquoi s'engager dans le projet L'Encyclopédie des migrants ? C'est la question commune qui a été posée à 6 personnes durant le Groupe de réflexion du 10 octobre 2015. Retrouvez le témoignage d'André Sauvage, Violaine Poubanne, Sandrine Boulon, Montserrat Casacuberta, Ermias Le Breton et Geneviève Letourneux.

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Journal des débatsde l’encyclopédie des migrants

samedi 10 octobre2015

L’Encyclopédie des migrants est un projet d’expérimentation artistique à l’initiative de Paloma Fernández Sobrino, qui vise à produire une encyclopédie rassemblant 400

témoignages d’histoires de vie de personnes migrantes. Il s’agit d’un

travail contributif qui part du quartier du Blosne à Rennes et qui rassemble

un réseau de 8 villes de la façade Atlantique de l’Europe, entre le

Finistère breton et Gibraltar.

on se réunit au Triangle, cité de la danse - Quartier du Blosne - Rennes

les samedis|10 octobre 2015|30 avril 2016|

|15 octobre 2016 |de 10h à 12h45 et de 13h45 à 16h30

programme|www.encyclopedie-des-migrants.eu|

on peut manger sur place,en apportant son déjeuner.

samedi 10 octobre2015

éditopar Thomas Vetier, membre du laboratoire

PREFics de l’université Rennes 2

Dans ce numéro, nous voyons des contributions de citoyens, de chercheurs, de personnalités politiques et institutionnelles, d’artistes, venus pour un jour ou à plusieurs reprises faire partie de ce qu’on appelle désormais les «  membres du groupe de réflexion  ». Autour d’un noyau dur s’est constitué un espace d’échanges et de partages où chacun peut contribuer à sa manière au développement de la réflexion sur le projet. Objet distant au départ, L’Encyclopédie des migrants est devenu pour beaucoup un objet proche, presque palpable tant il est fait d’un peu de chacun d’eux… Mise en débat de manière publique lors de sa phase de conception par l’association qui l’a fait naitre, cette encyclopédie est désormais le fruit d’un travail collectif où chacun est engagé et responsable des règles tranchées (non sans désaccords et mises en doute). Cependant, il me semble que l’attachement au projet de chacun des participants va au-delà d’un simple engagement professionnel ou associatif… Ce projet touche tout à la fois dans sa portée « sensible », artistique, politique, c’est ce que nous allons voir dans cette édition…

A cet égard, la présence de chercheurs, ou de jeunes chercheurs dans mon cas, ne relève pas d’autres choses que ce qui est cité précédemment. L’approche en sociolinguistique urbaine qui est la nôtre ne veut se départir de son engagement car elle se définit comme étant «  de terrain  », concourant avec d’autres acteurs à des réflexions et interventions visant la cohésion sociale, ou en tout cas à intervenir là où elle estime voir s’exprimer une demande sociale. Ce projet relève d’une militance scientifique et sociale pour un projet sociétal visant à dénoncer les inégalités et les exclusions.

Ce projet fait ainsi sens pour moi par sa volonté de requestionner par l’humain le rapport à la migration. Dans un contexte de repli identitaire et d’accusation généralisée de la migration comme producteur des maux actuels de notre société, il convient d’interroger les regards portés sur ceux mis sur le banc des suspects. Ce projet me touche car il explore des points de vue sensibles qui permettent d’éclairer le politique dans le sens où l’objectif final est bien de montrer que notre société est traversée de rapports sociaux conflictuels, où les rapports sociaux « de race » (en dehors de toute rationalité si l’on ne prend qu’un point de vue scientifique en la matière) persistent et coproduisent avec d’autres un monde d’inégalités sociales. Contribuer à émanciper (même un tout petit peu) le regard de chacune des personnes qui sera confrontée à sa lecture, voilà l’objectif que l’on construit ensemble…

édition du matinNous nous sommes réunis pour discuter collectivement DES ENJEUX PARTAGÉS PAR LES ACTEURS DU PROJET DE L’ENCYCLOPÉDIE DES MIGRANTS. Voici quelques extraits des échanges qui ont eu lieu :

L’Encyclopédie des migrants se veut être un projet tout à la fois artistique, politique, scientifique et militant qui « engage » toute personne mettant, un jour ou l’autre, le pied dans l’engrenage de ce projet hors-norme :par sa taille encyclopédique, par les territoires qu’elle questionne (de Brest à Gibraltar), par le nombre d’acteurs qu’elle met en synergie… Cette immensité ne doit pas faire oublier l’aspect « sensible » du projet car, en effet, au bout d’un an d’existence (et je ne parle ici que de sa phase de conception), il se trouve

que les acteurs en présence partagent un attachement certain à sa future réalisation : en témoignent les interventions et les débats de ce présent numéro…

ANDRÉ SAUVAGEAncien, adopté, du quartier du Blosne, citoyen de la France, de l’Europe, voilà en quelques mots l’attachement d’André Sauvage à ce projet. Ainsi, il fait ressortir trois aspects qui résonnent vis-à-vis de ce projet et qui marquent son lien avec ce quartier d’où part le projet. Premièrement, sa découverte en 1968 d’une baraque d’une trentaine de travailleurs algériens et marocains vivant entassés dans des conditions indignes et son engagement dans l’ASTI (Association de Soutien aux Travailleurs Immigrés proche de La Cimade). Deuxièmement, ses réflexions (par son métier de sociologue) sur les notions de « reconnaissance » et « d’être ensemble » à travers les mutations «  demandées  » (pour ne pas dire exigées) aux migrants arrivant et les cheminements intimes ainsi réalisés. Troisièmement, ses questionnements territoriaux liés au Blosne et à l’incapacité de la ville à faire du « commun » dans l’espace bâti : « comment se fait-il que dans ce quartier la question du témoignage artistique, de l’expression de la diversité n’apparaisse pas ? »

VIOLAINE POUBANNETravaillant aux Archives de Rennes, Violaine Poubanne nous explique le lien qui peut être établi entre son activité et la collecte de témoignages menée dans le cadre de L’Encyclopédie des migrants.Les Archives de Rennes, établissement culturel de la ville de Rennes, conserve 10km linéaire d’archives du XIIIème siècle à 2015 avec pour fond 80% d’archives publiques et 20% de privées. Les témoignages oraux sont collectés dans l’objectif de médiation et de valorisation des archives : l’intérêt est de communiquer, de partager. Interrogés comme les autres ressources, les témoignages enrichissent les archives publiques et permettent de raconter autre chose que le seul regard de l’administration et compléter les connaissances de la ville et de l’histoire de la ville grâce à des mémoires individuelles. Par leur médiation et leur valorisation, ils permettent de faciliter l’appropriation du patrimoine. Enfin, à l’instar de ce projet, ils valorisent l’expression de la diversité culturelle rennaise, les voix différentes, les parcours différents (responsables politiques, syndicaux, habitants,...).

SANDRINE BOULONPourquoi participer à ce projet et au Groupe de réflexion quand on est « pas migrante », que l’on n’a pas « traversé cette frontière » ?Elle se demande ainsi « ce que ça veut dire de se sentir proche de cette condition ? », qu’elle rapproche de la métaphore d’un arbre-racine aperçu à Ellis Island où les racines apparentes symbolisaient la « mise à nu ». Par deux citations ; « je ne sais ce que je vois qu’en travaillant » d’Alberto Giacometti et « j’écris pour me parcourir » d’Henri Michaux issu du recueil La nuit remue ; Sandrine nous évoque sa sensibilité à la parole mise à l’écrit ainsi que les enjeux de la parole intime en public. Son intervention se finit par la nécessaire vigilance et l’importance du doute et du questionnement dans ce genre de projet quant à sa transmission (conserver la sensibilité), aux différentes temporalités, à l’écrit (car l’écrit reste…), aux questions des frontières et des territoires (frontières intérieures qui ne demandent pas forcément de passer de frontières extérieures)…

MONTSERRAT CASACUBERTAMontserrat nous parle ici de son appartenance et de son sentiment du « devoir de restitution », entre la Catalogne et la Bretagne.Catalane, confrontée «  par hasard  » à la diversité culturelle et linguistique depuis l’enfance, elle a été envoyée enfant dans une école de quartier « avec des petites migrantes

économiques internes  ». Née en 1967 sous Franco d’une famille catalophone (langue « des vaincues de la guerre civile »), elle se dit aujourd’hui « fille de l’ignorance et petite enfant du silence » : ce n’est qu’en arrivant à Barcelone qu’elle a pu entreprendre sa «  démarche d’éveil  » sur ce qu’a vécu «  son peuple  ». Plus tard, avec un poste de jeune attachée à la culture d’aménagement linguistique, elle a travaillé avec des personnes migrantes qui souffraient de conditions d’exploitation économique : « je transmettais le catalan mais ils me transmettaient la vie. » Aujourd’hui, elle se dit parfois qu’elle ne peut s’appeler « migrante » car elle est arrivée avec un contrat de travail, elle décide ainsi de s’appeler «  trans  »  : «  transculturelle  », «  translinguistique  », «  transnationale  », « trans... »

ERMIAS LE BRETONAprès son adoption, il se voyait comme un «  petit français  » qui faisait du commerce équitable en pensant que c’était sa vocation, sa rencontre avec Paloma, son agacement face à des questions, des remarques, l’a ramené à son passé d’immigré. Après le premier projet effectué avec L’âge de la tortue, il s’est recentré et s’est accepté «  comme quelqu’un d’adopté  », «  qui a été déraciné ». Ce projet lui a permis de se perdre, d’accepter de se dire «  je ne suis pas que français  » contrairement à ce que le regard français demande : s’intégrer, s’oublier... L’écriture de sa lettre dans un projet précédent s’est fait pour un frère, un cousin (sans vraiment le savoir) et lorsque le livre a été publié, il s’est mis à la recherche de cette personne : six mois après, cette personne était retrouvée, neuf mois après, le livre était entre ses mains et quatre ans après cette personne a décidé de quitter son pays pour venir le voir. Ce paradoxe, il l’exprime ainsi : « la vie n’a pas de sens : moi qui cherchais mes racines, ma langue, qui cherchais une identité, je me retrouve confronté à ce frère qui a traversé le désert, la mer, a failli mourir plusieurs fois, qui a été torturé, qui a laissé sa famille ». Les questions d’immigration, d’identité sont donc complexes, « on peut créer des ghettos, il n’y a pas de vérité ».

GENEVIEVE LETOURNEUXÉlue à la ville de Rennes, déléguée aux droits des femmes et à l’égalité, nous offre ici la voix de la ville et sa position dans le projet en tant que partenaire.Ce projet a retenu l’attention de la ville et la maire de Rennes car il y a un porteur (L’âge de la tortue) qui est implanté au long cours dans le territoire, qui a une capacité à faire un travail de collecte qui soit respectueux et qui ne bascule pas dans l’instrumentalisation. Pour la ville, la question de documenter des parcours, des situations est également importante : c’est reconnaitre une place à chacun dans la ville sans enfermer personne dans une histoire ou une origine réelle ou supposée. Cette connaissance sensible est performante dans la construction de la ville qui ne se constitue pas uniquement d’infrastructures, d’aménagements, c’est aussi tout un travail d’appropriation de la ville et de reconnaissance de ses habitants  : la richesse d’une ville est ses habitants. Il y a aussi la dimension d’acceptation de la pluralité de notre société, qui n’est pas « difficulté » mais une « partie de la solution » et la simple reconnaissance de la réalité.

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QUELS SONT LES ENJEUX « SENSIBLES » DU PROJET ? DISCUSSIONS

«  La question qui me vient c’est : en quoi ce projet me touche ? Pour plein de raisons... C’est évident qu’il me touche mais je n’arrive pas à le formuler. Ça va bouger, on a des casquettes différentes mais on n’est pas là par hasard.  » (Anne) Pour Thierry en effet, si cette question n’est pas abordée dans L’Encyclopédie, on peut l’exposer à être un observatoire. Pour Sandrine, c’est un des enjeux de L’Encyclopédie : qu’elle fasse

miroir de ceux qui la porte afin qu’elle ne soit pas figée. Les débats montrent que ce projet d’Encyclopédie fera masse par sa symbolique forte et devra répondre à une sensibilité sur deux échelles : il touche les membres qui en sont les porteurs et il laisse la part belle aux témoignages et à leur sensibilité.

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DU CROISEMENT DES PARCOURS MIGRATOIRES AUX PASSERELLES

L’importance est donnée ici aux notions d’apprentissage et d’émancipation pour tous : des membres du groupe de réflexion aux lecteurs en passant par les personnes témoins. Il est pensé que L’Encyclopédie des migrants peut être une sorte de « passerelle culturelle et linguistique » par l’importance qu’elle porte sur le croisement des parcours migratoires (comme par exemple avec les migrations internes) : «  nous avons vécu déjà des migrations internes et c’est ce qui peut permettre de lutter contre tous ceux qui ont une vision négative des migrations, car ils n’ont pas pris conscience qu’eux-mêmes parfois ont été des migrants internes » nous dit ici Christian. Alors que la plupart des projets posent comme question «  qu’est-ce que la personne migrante a à gagner dans le projet ? », le projet se demande lui : « qu’avons-nous tous à gagner dans un projet comme celui-ci  ?  » Antoine rappelle alors « ce qui est défendu par le projet éditorial, c’est une approche kaléidoscopique des parcours des migrations.  » C’est par l’accumulation de grandes quantités de témoignages, d’expériences qu’on va donner à voir une diversité de parcours. Joëlle nous dit : « c’est l’émancipation par rapport aux injustices, au souci d’équité, mais c’est aussi vis-à-vis des idées dominantes, des évidences, des attitudes. »

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DÉBAT AUTOUR DE LA NOTION DE «RACINE »

La notion de « racine » fait débat ici : a-t-on des racines comme il est usage de le dire ? Le migrant est-il nécessairement porteur des « racines » qu’on veut lui attribuer ? Avec ces questions et de nombreuses autres mais sans réponse, il est à noter que le projet de L’Encyclopédie des migrants renvoie (par l’effet de miroir) à ses propres interrogations sur ses racines de façon caricaturale et binaire  : ai-je des racines ou pas ? La métaphore de l’arbre « racine » est ainsi utilisée avec des variantes qui permettent de comprendre que la personne se construit avec son histoire, les évènements de sa vie et ses rencontres. On parle ici d’arbre « en marque-page », « d’arbre-âme », des arbres démultipliés qui permettent de comprendre que les racines sont en nous et qu’elles se sont développées comme on le souhaite et/ou en fonction des évènements de la vie. Celles-ci peuvent avoir un rôle clé : l’expérience de Christian avec la langue gallèse et le Brésil ou encore l’attachement à celle-ci quand on évolue dans un environnement migratoire hostile…

édition du soirNous nous sommes réunis pour discuter collectivement DU GROUPE BILAN ET PERSPECTIVE AUTOUR DU PROJET DE L’ENCYCLOPÉDIE. Voici quelques extraits des échanges qui ont eu lieu :

Pourquoi faire une « évaluation qualitative » dans un projet comme celui-ci ? Si le rejet du terme « évaluation » est collectif car trop clivant, il n’en reste pas moins que le projet, dans sa perspective d’expérimentation artistique et pluridisciplinaire, doit se doter d’un regard réflexif sur sa propre mise en œuvre afin de déterminer ce qui fonctionne ou non, ce qui est à garder ou non dans l’objectif d’autoalimenter sa réflexion et de,

surtout, la partager.

PRÉSENTATION DU GROUPE BILAN ET PERSPECTIVE (BIPE)par ANNE MORILLON, sociologue, collectif TOPIK,

Le groupe de travail « évaluation qualitative » du projet propose de faire évoluer l’appellation de celui-ci en un groupe « Bilan et Perspective » (BIPE), pensé en parallèle du développement du projet : il s’agit de «  faire et regarder ce qu’on fait  » jusqu’au séminaire final qui aura lieu en juin 2017 à Gibraltar. Trois axes sont proposés à mettre au travail dans ce groupe : l’axe « individuel/personne  » (comment L’Encyclopédie contribue-t-elle à la reconnaissance des personnes migrantes  ?), l’axe «  structure  » (qu’est-ce qu’elles ont retiré du projet ?) et l’axe «  territoire  » (en quoi ce projet peut-il contribuer à reconnaitre la place des personnes migrantes dans la cité ?). D’autres axes peuvent être ajoutés. Ainsi, Sandrine propose un axe «  Encyclopédie  » qui permettrait de voir l’évolution de celle-ci.

DISCUSSIONS AUTOUR DES MÉTHODES ET DES PERSPECTIVES

Interrogé sur les méthodes «  d’enquête  » que ce groupe pourrait mettre en place pour réaliser son travail, plusieurs solutions ont été proposées :- entretiens semi-directifs ;- « focus groupe » ou entretiens groupés ;- analyse des temps collectifs avec une observation participante, directe (des enjeux, des relations entre les gens, des rapports de pouvoirs).

Céline indique ainsi que cette démarche s’inscrit dans une démarche globale de regarder «  comment on travaille, comment ça se construit ». Si on réfléchit ici à Rennes sur «  comment le projet se construit  », rien n’empêche les autres villes de le faire pour avoir un point de vue global. Dans la perspective de Rennes, l’objectif est de réfléchir collectivement à cette démarche.

Des doutes ont cependant été émis quant à la nécessité de travailler un « bilan » pendant la prochaine phase : le risque étant que le groupe de réflexion «  tourne en rond  ». L’idée serait peut-être de voir comment approfondir le projet, l’accompagner vers la suite tout en lui faisant confiance nous dit Françoise. Si le terme porte à ambigüité, il est proposé à la place « suivi » qui paraitrait plus «  cumulatif », ce qui donnerait un groupe « Suivi et Perspective » ?

PERSPECTIVES DU GROUPE DE RÉFLEXION : DE RENNES AUX AUTRES VILLES

La discussion sur le groupe de travail « Bilan et Perspective » a permis d’évoquer l’avenir du Groupe de réflexion en place à Rennes et ses possibles évolutions ailleurs. À Rennes, le prochain Groupe de réflexion aura lieu après la collecte des témoignages, il sera alors possible de voir, par la présence de « témoignants », si ce projet a construit autour ou avec les personnes qui ont témoigné et donc réussi à éviter l’écueil « d’une instrumentalisation des gens » (Joëlle). Il faut qu’ils « puissent faire histoire avec L’Encyclopédie ».

Ailleurs, où chaque ville va développer le travail de son côté, les personnes du projet ne pourront faire « l’économie de leur propre groupe de réflexion, car le projet va se construire partout » nous dit François, administrateur de la Maison des Citoyens du Monde à Nantes. Il est intéressant de voir la méthode collective développée dans le groupe de réflexion de Rennes et il serait important de la partager car cela est intéressant pour tous les praticiens, les associations qui travaillent sur ce sujet régulièrement.

partenaires Le projet L’Encyclopédie des migrants est coordonné par l’association artistique L’âge de la tortue (Rennes, France) et co-organisé avec l’Université Rovira i Virgili (Tarragone, Espagne), ASI - Association de Solidarité Internationale (Porto, Portugal), le laboratoire de recherche PREFics de l’Université Rennes  2 (France), le Musée de l’Histoire de l’Immigration (Paris, France), le Ministère des Sports, de la Culture, du Patrimoine et de la Jeunesse de Gibraltar (HM Government of Gibraltar), les villes de Brest, Rennes, Nantes, Gijón, Porto, Lisbonne, Cadix et Gibraltar. Le projet est organisé en partenariat avec l’association ABAAFE (Brest, France), la Maison des Citoyens du Monde (Nantes, France), l’association Tragacanto (Gíjon, Espagne), l’association APDHA (Cadix, Espagne), l’association Renovar a Mouraria (Lisbonne, Portugal), le CREA Centre de Ressources et d’Études Audiovisuelles de l’Université Rennes 2, FRESH Filmer la recherche en sciences humaines (Caen et Rennes, France), le collectif TOPIK (Rennes, France), l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de Rennes (France), le laboratoire de recherche ERIMIT de l’Université Rennes  2 (France), l’Université de Gibraltar, la bibliothèque Garrison de Gibraltar, la Conférence des Villes de l’Arc Atlantique, l’Institut Français de Lisbonne (Portugal), le centre d’art contemporain ECCO (Cadix, Espagne), la bibliothèque

des Champs Libres (Rennes, France) le Musée de Bretagne (Rennes, France), les Archives municipales de Rennes (France), le Triangle, cité de la danse (Rennes, France), l’association Un toit c’est un droit (Rennes, France), l’association La Cimade (Rennes, France), Canal B (Rennes, France). Le projet est soutenu par la Commission Européenne (programme Erasmus+), l’Institut Français, la Ville de Rennes, Rennes Métropole, le Conseil régional de Bretagne, le Conseil départemental d’Ille-et-Vilaine et le Ministère de la Culture et de la Communication - Direction Régionale des Affaires Culturelles.

ours Direction éditoriale : Thomas Vetier et Antoine Chaudet - Rédaction : Thomas Vetier - Correction : Nicole Galasso-Chaudet - Création graphique : Antoine Chaudet - Photographie : Bertrand Cousseau. Ce journal a été composé en Stuart (Matthieu Cortat) et clearface, à partir de la maquette du Journal des débats politiques et littéraires paru entre 1789 et 1944. Edité à 1 000 exemplaires - Gratuit Dépôt légal Septembre 2015 - ISSN 2428-2065

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Groupe de réflexion de L’Encyclopédie des migrants - Rennes, quartier du Blosne - Octobre 2015 - Crédit photographique : Bertrand Cousseau