Immersion à Notre Dame des Sans abris

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Un sans-abri au quotidien Photo: /HB

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travail réalisé par Héloise Basson, étudiante en deuxième année de journalisme à l'ISCPA Lyon (depuis diplômée) sur son expérience en immersion de 5 jours. reportage primé par le Conseil de l'Europe.

Transcript of Immersion à Notre Dame des Sans abris

Un sans-abri au quotidien

Photo: /HB

Lundi 14 juin 2010 Lundi 14 juin 2010

L’édito d’Héloïse BassonLe foyer a fêté ses 60 bougies cette année. 60 ans de lutte au ser-vice des sans-abri, d’innovation et de mise en place de nouvelle structures afin de s’émanciper. 60 ans de combat pour le de-venir de ceux qui vivent dans la rue, qui sont dans le besoin. 60 ans de fonds débloqués, de quêtes organisées, de commu-nication auprès des lyonnais. 60 ans de lutte sans re-lâche, et de bénévolat.Aujourd’hui, le foyer Notre-Dame est un pillier de l’aide apportée aux SDF dans le rhône. Ses bénévo-les font partie intégrante, au même titre que les salariés, du bon fonc-tionnement des structures. C’est une véritable communauté qui s’est créée, entre différentes personnes, au passé et aux histoires qui parfois se regroupent. Les 60 ans du foyer, c’est surtout 60 ans de générosité et de dons, qui participent à la survie des plus démunis. 60 ans d’exis-tence, c’est surtout des milliers de mains tendues vers les sans-abri.

Le mot du Président Benoît ViannayDepuis quand êtes-vous Président du Foyer Notre-Dame?Cela fait trois ans que je suis Président, et que j’écris sans l’Arche du foyer par la même occasion. Comment en êtes-vous arrivé à ce poste?Je suis devenu Président parce qu’on me l’a demandé. Les anciens Présidents voulaient quelqu’un de disponible. Mais pas à raison d’une demi-journée par semaine ci ou là!Je suis présent toute la semaine! Pour ma femme, je ne suis même plus à la retraite!Quelles qualités pour exercer une telle fonction?Dans la vie active, je dirigeais des entreprises. Avec une formation d’ingé-nieur, j’ai également travaillé dans le marketting, la recherche, le développe-ment, l’étude de marché. Cette expérience me sert beaucoup ici. Il faut gérer un budget, organiser les structures. La gestion du foyer est une machine très bien huilée. Que vous apporte le rôle de Président du foyer?Une richesse sans précédent. Les rencontres que je fais au sein du foyer sont très intéressantes. Je n’ai aucun regret quand à la prise de ce poste il y a trois ans. Je côtoie des personnes que je n’aurais sans doute jamais rencontré autre-ment. Les contacts établis sont tous plsu riches les uns que les autres. Il faut bien sûr être présent pour les SDF, et à leur écoute. C’est la communication qui est la plus difficile avec les passagers du foyer. Quelle est la journée type du Président?Je suis très sollicité! Je commence toujours par saluer tout le monde au foyer. Puis je m’attaque au courriers,aux emails en attente. J’ai beaucoup de réunions

programmées, notamment avec les politiques de la ville. Cet après-midi, je fais visiter le foyer à un donateur.Justement, quelles relations entre la ville et le foyer?Nous sommes très bien acceptés par la ville de Lyon. La mai-rie nous a ouvert ses portes pour les 60ans du foyer. A Lyon, il y a une vraie reconnaissance de ce que nous faisons. Lyon est une ville humanitaire (Abbé Pierre, Père Chevrier). Sans compter que les 1300 bénévoles représentent 1300 électeurs. La ville doit en tenir compte. Que pensez-vous de l’attitude de la presse à l’égard du foyer?La presse aime la nouveauté. Il y a au moins un article par semaine sur le foyer dans la presse locale. Mais les journaux veulent surtout du sensationnel. Et c’est ce que je dénon-cerai dans mon prochain édito. Prenez l’exemple du nuage de cendre: il n’y en avait que pour ces touristes bloqués à l’étranger. Alors que des SDF passent des années entières dans la rue. Mais on en parle surtout l’hiver, quand tout le monde est concerné par le froid.

31 mai 1950: création du foyer par Gabriel Rosset, Georges Belleville et Henri Tour-nissou (association loi 1901)

7 activités: accueil de jour hébergement urgence hébergement insertion atelier d’insertion accompagnement santé bric-à-brac36 structures dans le Rhône3400 personnes accueillies220 000 repas servis215 000 nuités1300 bénévoles192 salariés et personnes en insertion

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Gabriel Rosset /DR

Lundi 14 juin 2010 Lundi 14 juin 2010

De la rue aux structures mi-ses en place par le foyer Notre-Dame, il peut n’y

avoir qu’un pas: l’appel au 115. Ce numéro d’urgence ré-partit les demandeurs de logement pour la nuit sur les différentes as-sociations de la ville (voir encadré). Dès lors, plusieurs voies sont proposées. Au 3 rue du Père Che-vrier, les sans-abri ont la possibilité de passer plusieurs nuits à l’abri (minimum trois.) Un repas le soir, un petit-déjeuner le lende-main, un lit, une douche, des soins à l’infirmerie et une baga-gerie sont mis à leur disposition moyennant la somme de 2€, s’ils la possède. Un carton rouge avec leur nom et leur date d’arrivée leur sont remis. Au terme des trois nuits effectuées, un rendez-vous

est pris automatiquement avec un

travailleur social pour évaluer les besoins de la personne, et envi-sager sa réinsertion sociale. Les affaires placées à la bagagerie sont gardées jusqu’à trente jours

après leur départ. Seul l’héber-gement d’urgence, accueil in-conditionnel, ne recquiert pas de

papiers d’identité, contraire-ment aux autres activités.

Aider sans assister

Pour cohabiter au sein du Père Che-vrier, un minimum de règles sont éta-blies, comme le respect d’autrui, bénévoles, éduca-

teurs ou passagers. Le règlement prohibe

également tout apport de boissons alcoolisées

au foyer. Enfin, le pas vers la réinsertion demande surtout une volonté de s’investir de la part des sans-abri. Pour cela ils doivent ac-cepter leur condition, et vouloir en changer. Si de nombreuses deman-des sont effectuées, toutes n’abou-tissent pas forcément. L’ idée de stabilisation est angoissante, et entraine des efforts à fournir par la suite. Tout est mis en oeuvre pour aider un sans domicile dans le be-soin, sans l’assister pour autant. Les usagers du foyer sont appelés les passagers car les structures doi-vent rester des lieux de passage, et non des solutions définitives. La fi-nalité des structures proposées par le foyer est de trouver un logement autonome ou un endroit adapté aux besoins de chacun. Surtout ne pas rester en retrait de la société.

1 1 5Le 115 est un numéro d’urgence ,au

même titre que le 18 ou le 15, départementalisé. Dans le Rhône, c’est le Foyer No-

tre Dame des sans-abri qui en a la gestion. Le 115 travaille avec les usagers du centre d’hé-

bergement, les travailleurs sociaux, et les financeurs. Chaque jour, environ 670 appels sont reçus par le 115. 90% provien-nent des sans-abri, 5% des travailleurs sociaux, et 5% des particuliers. 10 écouteurs téléphoniques se répartissent la permanence.Les pics d’appels se font entre 9h30 et 11h le matin, après 20h le soir.Le 115 est chargé de répartir les SDF sur les 1400 places d’héberge-ment proposés par la ville. 188 places sont disponibles au foyer du Père Chevrier, dont 40 réservées au Samu social, mais unique-

ment pour les hommes ou les couples. A 19h30, les places qui ne sont toujours pas occupées sont récupérées par d’autres

demandeurs. On peut se présenter au foyer dès 15h.Quelques chiffres: mercredi 02 juin, 118 femmes atten-

daient un logement pour la nuit vers 17 heures.Lundi 31 mai, 140 demandes fu-

rent rejetées.

L’hébergement d’urgence: une solution temporaire et efficaceCinq différents espaces sont à dénombrer pour l’hébergement d’urgence. Tous sont des structures accueillant de manière inconditionnelle les demandeurs d’un endroit chaud pour la nuit.

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Une cabine individuelle au 3 rue du Père Chevrier. /HB

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Il est un peu plus de onze heu-res du matin, et de nombreu-ses personnes attendent dans

le hall du relai SOS de Lyon, rue Marius Berliet. Après la pause café de dix heures, plusieurs at-tendent patiemment le déjeuner dans le cafétéria. Deux hommes allongés sur un banc se reposent, un troisième chantonne, pendant qu’un dernier tapote sur la clavier de son ordinateur. Ici, pas question de mettre tout le monde dans le même panier. Plusieurs personnes possèdent un logement social, une chambre souvent, et viennent faire le point avec le travailleur social

en charge de leur dossier. D’autres avancent petit à petit dans les dé-marches pour obtenir le rsa, ou un possible revenu. Certains viennent pour la première fois, d’autres sont déjà des habitués des lieux. Près de la caféteria, une baga-gerie, des douches individuel-les, une laverie et des toilettes.L’ accueil de jour compte 320 personnes, toutes structures confondues. Familles, hommes ou femmes y sont les bienvenus pour tout renseignement. Les tra-vailleurs sociaux les orientent au mieux,, encore et toujours de manière inconditionnelle.

De l’orientation à l’insertion, un pas de plus vers la société Le relai SOS du 8ème arrondissement de Lyon est d’une des quatre structures d’accueil de jour mise en place par le foyer Notre-Dame. C’est aussi celle qui a la plus grande capacité d’accueil. 120 person-nes s’y rendent tous les jours et sont prises en charge par des assistantes sociales ou des éducateurs.

PORTRAIT

Marie-Claude a 60 ans. Tous les mardis, elle se rend à l’accueil de jour du relai SOS de la rue Marius Berliet, dans le 8ème. Son rendez-vous

hebdomadaire avec une assistante sociale l’attend. Ses cheveux longs et grison-nants retombant sur ses épaules, elle porte un tee-shirt aux motifs colorés. Souriante,

elle avoue aimer la compagnie des bénévoles, contrairement à celle des autres passagers. Comme tous les mardis, Marie-Claude prend son déjeuner à la cafétéria du relai SOS.

Lors de son entretien avec un travailleur social, elle récupèrera son argent de la se-maine, soit 60 euros. Pour elle, cette somme n’est pas suffisante. Sous tutelle, elle résidedans un appartement d’une pièce à Villeurbanne. Elle fait actuellement des dé-marches pour espérer toucher une retraite complémentaire. Ancienne auxiliaire de vie, laborantine et aide-soignante, Marie-claude souffre de dépression nerveu-se depuis plusieurs années. Au fil du temps, sa mémoire lui fait également défaut. Pour elle, c’est l’aggravation de sa maladie qui l’a placée dans cette situa-

tion. Affaiblie, elle ne peut désormais plus exercer son métier correctement. A l’accueil de jour, la majorité des sans-abri présents sont des hommes. « Je

n’ai pas envie de leur parler. Je n’aime pas leurs cris», souligne-t-elle. Encore une demi-heure d’attente et le repas sera servi à la can-

tine. Marie-claude, sereine, prend son mal en patience. Marie-Claude attend son déjeuner à la cafétéria. /HB

Une douche équipée d’un lavabo au relai SOS. /HB

320 personnes sont accueillies tous les jours

dans les quatre structures mises à disposition par le

foyer

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Qu’ils viennent d’Algérie ou de Roumanie, leur accueil à l’hôtel ne fere aucune différence. Les fa-milles peuvent y séjourner pendant un mois, à condition d’avoir des papiers en règle. Le but des tra-vailleurs sociaux est de les pren-dre en charge, et de leur trouver, à terme, un logement autonome.

Encadrement social

Plusieurs projets sont mis en place.L’acquisition d’ un niveau de français correct et une forma-tion pour adultes portant sur différentes thématiques (loge-ment, citoyenneté, parentalité). Au final, un QCM avec 85% de réus-site est exigé. Un comité de p a r e n t s intervient é g a l e -m e n t une fois par mois pour expliquer comment ré-diger un curriculum vitae, et une lettre de motivation.Des sorties culturelles sont fré-quemment organisés par les béné-voles, comme des pique-nique au Parc de la tête d’Or, ou des sorties musée. Ce projet d’accompagne-ment vers l’autonomie marque là

encore les grandes lignes du foyer Notre-Dame: aider sans assister. Les familles ou personnes dans le besoin doivent avoir la volonté de s’en sor-tir. Elles sont prises par la main sans être livrées à el-les-même.

Quelques difficultés

Des problè-mes se po-sent souvent lors des recherches

de logements sociaux. Gé-néralement, les familles p r é f è r e n t rester dans la ville de Lyon, surtout dans le centre.Or, les lo-gements so-ciaux sont f r é q u e m -

ment situés en banlieue, à parfois près d’une heure en transport en commun. De fait, éloignés des écoles des enfants. Au bout de trois propositions de logement, une fa-mille ne peut plus refuser d’offre.

Soutien scolaire

Hassan (à gauche sur la photo) est âgé de dix ans. Il est arrivé en France en févirer, lorsque sa mère et ses cinq frères et soeurs ont quit-

té l’Algérie. Intégré dans une classe de CM2 dans une école primaire de la ville, il a cependant le niveau d’un enfant de CP, puisqu’il ne parle pas le français. Tous les mercredis

après-midis, pendant une heure, une bénévole du foyer, ancienne institutrice à la retraite, lui donne des cours de soutien en grammaire, mathématiques et anglais. «Il pro-gresse très vite! souligne-t-elle. Il faut se mettre à sa place, ce n’est pas évidemment de devoir s’inté-grer dans un pays étranger à cet âge. Surtout quand on n’en parle pas la langue. Mais ce garçon est motivé, je suis ravie de l’aider.»Le matin, elle aide également ses petites soeurs, pendant que les pa-rents suivent à des cours de fran-çais. Si tout va bien, leur père pour-ra passer le QCM nécessaire à la recherche d’un emploi d’ici l’été. Bientôt, cette famille pourra peut-être espérer entamer des recher-ches de logement autonome. Pour eux, c’est une immense opportu-nité de s’intégrer dans le pays.

A l’angle de la gare de Perrache et la brasserie Georges V, l’hôtel le Bordeaux prend en charge des familles avec la volonté de s’insérer dans la vie sociale. Des cours de fran-çais aux notions de citoyenneté, en passant par les garde des enfants et la recherche de lo-gements, tout est mis en oeuvre par le foyer pour prendre en charge parents et enfants.

Résidence le Bordeaux: du logement aux cours de soutien

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Une bénévole révise avec Hassan. /HB

Une garderie pour les plus petits. /HB

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Un regain d’un air frais et de tranquillitéRécente de deux ans,la Chardonnière est une unité de stabilisation pour les sans-abri vieillissants. Située à Francheville, au cœur d’un immense parc, elle est très convoitée des SDF qui l’appellent « le château ».

C’est à la Chardonnière que sont envoyés les SDF les plus abîmés par la vie.

Un sans-abri est considéré com-me vieillissant aux alentours de 45 ans. Il peut faire une deman-de d’hébergement «au château» auprès des travailleurs sociaux du foyer. Mais les places sont chères. 72 hommes peuvent y séjourner.

12 lits de re-pos sont à dis-position des plus malades. La condition première d’ad-mission est

d’avoir ses p a p i e r s d’identité, ainsi qu’un revenu. Ou avoir en-

tamé les d é m a r -ches de demande de res-

sources (retraite, RSA…) Une place à Francheville coûte 30%

de son revenu à un sans-abri. La Chardonnière est une véritableopportunité puisqu’elle assure à ses occupants, au minimum, quinze jours de repos, et de nourriture. Des contrats de deux mois sont établis, et renouvelables jusqu’à la fin de la prise en charge. Logés dans des chambres doubles, les résidents ont droit à trois repas par jours, et possèdent chacun une armoire, un lit et une salle de bain avec la clé

de leur chambre. Cette dernière se révèle d’ailleurs primordiale pour quelqu’un qui n’a plus de logement. En général, les résidents restent au moins six mois au château. Sur pla-ce ils sont pris en charge par Sarah Causse, assistante sociale qui s’oc-cupe de leur dossier, leurs démar-ches, mais aussi, et surtout, écoute.A ses côtés, une vingtaine de bénévoles,un maître de maison, une animatrice, deux éducateurs, une infirmière et des agents de sécurité.

Un petit goût de paradis

Le but est de requinquer les rési-dents sans les couper du monde extérieur. Un parc de quatre hec-tares est accessible à tous les usa-gers qui peuvent s’adonner à des activités champêtres comme la cueillette des cerises. Prochaine-ment, des moutons devraient même faire leur apparition dans les prés. Ancienne bâtisse occupée par des sœurs, l’établissement possède de nombreuses salles d’activités, de jeux et d’ateliers créatifs, ainsi

qu’une chapelle, une laverie, une bibliothèque, deux cuisines et salles de restaurant (une pour le quotidien, l’autre pour les festi-vités). Une salle de vêtements de secours est à disposition de rési-dents qui arrivent sans affaires. Dès le début de la coupe du monde football, une pièce sera réservée à la diffusion non-stop des matchs.Deux à trois sorties par semaines sont organisées par les bénévoles (cinéma, restaurant.) Gilles, agent de sécurité, emmène les locatai-res à la pêche dès qu’il le peut, ou organise des parties de coinche et

de pétan-que. Les résidents sont très réceptifs à ces acti-vités pro-p o s é e s ,

et dès la sieste a c h e -

vée, ils s’adonnent avec joie à des parties de dames ou de Monopoly. Le 12 juin, une grande journée bé-névole-résident est organisée dans le parc. Au programme, barbecue et concert. Le tout at-tendu de pied ferme par les ré-s i d e n t s , ravis de c e t t e initiative.

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Un jeu de cartes après la sieste. HB

Chambre individuelle avec salle de bain.HB

Un vaste espace vert.HB

La salle de lecture. HB

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Du don au bric-à-bracBaraban, Oullins, Croix-Rousse, Vaise, Guillotière et Villefranche, les bric-à-bracs se comp-tent au nombre de six. Des boutiques aux entrepôts d’usine, ils représentent une part importante des ressources du foyer Notre-Dame des sans abri. Et mettent en avant la générosité des donneurs.

PORTRAIT

Seloua est une jeune mère de 31 ans. Vendeuse de formation, elle a trouvé un CUI (contrat unique d’insertion) à l’ate-lier de tri textile du foyer, rue de Tou-lon (8è). Avec 24 autres employés, des femmes majoritairement, elles trient les dons de vêtements. En quatrième posi-tion de la chaîne, elle n’est pas en contact direct avec les habits sales ou abîmés. Deux sélections sont déjà effectuées avant elle, les vêtements qu’elle range sur les portant sont prêts à être vendus.Et c’est précisément pour cela que Seloua s’est montrée réticente en-vers son travail, début décembre. Lorsqu’elle a répondu à l’annonce de «mise en rayon» sur internet, elle ne savait pas qu’elle travaillerait pour le foyer Notre-Dame. Quand elle a ac-cepté le contrat, elle ne l’a dit à per-sonne. Pour elle, « le foyer était syno-nyme de pauvreté. Je n’avais pas honte, mais je me disais qu’en étant en contact avec des affaires données, ce n’était pas neuf, donc pas forcément propre. »Avant de changer rapidement d’avis. «Ce travail me plaît. Je réalise que les gens sont incroyablement géné-reux; les dons affluent sans cesse, et parfois on fait de véritables affaires.»Malheureusement pour Seloua, son CUI expire fin juin, et elle ne sera pas en me-sure de le renouveller avant la rentrée scolaire de septembre. Et un CUI n’est renouvelable que qu’à la suite du pre-mier contrat. Mais qu’importe, la jeu-ne femme est têtue: « je retenterai ma chance dès mon retour de vacances.»

Rue de Toulon, les dons sont triés, les commandes préparées, le tout expédié vers les différents bric-à-bracs du foyer. Les vêtements hors saison sont stockés au centre de tri pour l’année suivante.

A vaise, c’est Henri Rabaglino qui gère le bric-à-brac depuis plus de cinq ans. D’une superficie de 25 000 m2, l’entrepôt comporte 24 bungalows où sont réparés les objets défectueux. Les apports finan-ciers des dons vendus dans les bric-à-bracs re- présentent 20% des finances du foyer. Vais-selle, linge de maison, jouets, bijoux, dvd et meubles sont répartis dans plusieurs allées, avec des prix défiants toute concurrence. A eux seuls, les vêtements re- présentent 50% des ventes. 190 bénévoles sont inscrits au bric-à-brac de Vaise, qui attire sur-tout chineurs, b r o c a n t e u r s mais aussi familles à la recherche d’ aubaines.

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Le prix des

bijoux, argenterie, et tableaux sont défiinis

par un expert. Le reste est vendu à un tiers du prix

en magasin.

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Les sacs de dons empilés. HB

Seloua prépare les habits.HB

Le bric-à-brac de Vaise. HBLes cartons prêts à être triés. HB

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Hygiène, soins ou médicaments : le rôle clé du pôle santéLe pôle santé représente une importante structure au sein du foyer Notre-Dame. Trois espa-ces de soins sont présents dans la ville de Lyon, et peuvent accueillir un total de 7300 consulta-tions à l’année. S’ajoutent à ces sept-milles places les douze lits de repos dans l’hôtel le Bordeaux.

C’est au 3 rue du père Che-vrier que se concentre un point d’hygiène impor-

tant ainsi qu’un espace santé. Au rez-de-chaussée une salle d’at-tente et deux bureaux recoivent les patients. Contre le mur, un immense tableau blanc répertorie les noms de ceux qui recoivent un traitement régulier. Sur les étagères, de nombreux sacs plas-tiques contiennent les ordonnan-ces et médicaments de chacun. En ce lundi 31 mai 2010, un aide-soignant salarié, trois infirmiers(un intérimaire, un bénévole, unétudiant) , et un médecin retraitése partagent la permanen-ce de la matinée (de 8h30 à 11h30) Les après-midi, celle-ci est assurée de 17h à 18h30.Les ordonnances n’y sont pas renouvellées, ce sont les hô-pitaux qui s’en chargent.Birgit Joncheray est la res-ponsable de l’hébergement d’urgence et des activitéssanté du foyer. Elle définir « le pôle santé comme un outil com-plémentaire à l’accompagnement social.» A la différence d’un hô-pital, la santé est un outil. Le but premier reste de prendre soin des personnes accueillies. Ici, le secret médical n’existe pas . On parle de secret partagé entre médecin et éducateurs, ou assistante sociale.» Et c’est cette coopération en-tre travailleurs sociaux, bénévo-les et médecins qui accompa-gne efficacement un sans-abri vers une volonté de changement.

Av e z - v o u s choisit le foyer Notre Dame dans un but social?Je suis un in-firmier di-plômé en Al-banie. Quand

je suis arrivé en France, j’ai pris connaissance du foyer. Dans mon pays, cela ne fonctionne pas du tout comme ça. C’est cela qui me man-quait. Un rôlé social, une expérience dans l’une des structures.

Que vous appor-te le foyer sur le plan relationnel?Le côtoiement est bien différent que celui qu’on pour-rait avoir avec un SDF dans la rue. On doit apprendre à travailler avec lui. Il faut l’approcher, gagner sa confian-ce. Etablir des affinités sans pour autant tomber dans la familiarité. Il y a toujours du respect entre nous.

L’approche est-elle dif-férente dans un hôpital?Bien sûr. A l’hôpital, les toilettes durent une demi-heure environ. Il y a beaucoup de monde. Au foyer, on passe plus d’une heure pour aider chaque patient à faire sa toi-

lette.Certains ont des exigences.Mais il faut avant tout établir un réel contact. Bien plus profond que les rapports bâtis dans un hôpital.

Comment s’organise le suivi d’une personne?A l’infirmerie, nous avons mis en place une aide psychologique. Beaucoup de personnes sont alcoo-lisées, parfois toxicomanes. Il faut agir différemment avec chacun d’entre elles. C’est souvent lors des

d o c u h e s que se c r é é e s les confi-d e n c e s . De même s’il y a des coups ou des b l e s s u -res, c’est là qu’on

s’en rend c o m p t e .

C’est donc un vrai travail d’équi-pe? Exactement. Pour les seuls infirmiers, il est difficile d’avoir affaire aux problèmes d’alcool. Souvent, des sans-abri demandent de l’aide mais ne sont en réalité pas prêt pour une réelle prise en charge. Nous travaillons notamment avec l’Hôtel-Dieu. Le travail d’équipe sans relâche, ni coupures permet d’éviter la rechute.

Un homme a été mordu par un chien .HB

Georges Vata, aide-soignant salarié au foyer Notre-Dame des sans abri depuis janvier 2005.

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Georges Vata. HB