Guide pratique de procédure à l'usage de l'avocat

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GUIDE PRATIQUE DE PROCÉDURE à l’usage de l’avocat Sous la direction d’Aliénor Kamara-Cavarroc Avocat au barreau de Paris LA BIBLIOTHÈQUE DE L’AVOCAT 2021 Avec plus de 200 modèles d’actes d’avocat et de procédure À jour de la réforme de la procédure devant le JAF

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GUIDE PRATIQUEDE PRocéDUREà l’usage de l’avocat

Rédaction d’écritures ..................................... p. 9

Procédure au fond devant le tribunal judiciaire ........................................ p. 33

Référés ................................................................ p. 103

Procédures sur requête................................. p. 161

Procédure devant le juge des contentieux de la protection ............... p. 213

Procédure devant le juge de l’exécution . p. 251

Immobilier ......................................................... p. 323

Construction ..................................................... p. 343

Baux commerciaux ......................................... p. 373

Propriété intellectuelle : l’action en contrefaçon et la saisie-contrefaçon .. p. 393

Procédure devant le JAF ............................... p. 413

Procédure pénale ............................................ p. 557

L’application des peines ................................ p. 627

Procédure au fond devant le tribunal de commerce .............................. p. 651

Procédures collectives .................................. p. 673

Procédure devant le conseil de prud’hommes ............................................. p. 759

Procédure devant la cour d’appel juridiction du premier président de la cour d’appel ............................................ p. 797

Avec plus de 200 modèles d’actes d’avocat et de procédure

2021

GUIDE PRATIQUE DE PRocéDURE à l’usage de l’avocatSous la direction d’Aliénor Kamara-CavarrocAvocat au barreau de Paris

Le guide pratique de procédure à l’usage de l’avocat a été conçu comme un vade-mecum (étymologiquement « viens avec moi »). De nombreux magistrats, avocats et anciens avoués ont confronté leur expérience pour dégager la quintessence des différentes procédures civiles, commerciales, sociales et pénales qu’un avocat doit maîtriser.Il présente de manière chronologique et stratégique l’ensemble des démarches à suivre et les questions à se poser à chaque étape de la procédure. Il est enrichi de plus de 200 modèles d’actes d’avocat et de procédure.Il accompagne les élèves avocats dans leur formation, les jeunes avocats pour leurs premiers pas devant les juridictions et les avocats plus expérimentés sur de nouveaux champs d’expertise.Cette nouvelle édition, actualisée, fait la part belle à la réforme de la procédure de divorce contentieuse issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, aux nouvelles dispositions en matière d’application des peines, au décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 portant diverses dispositions relatives notamment à la procédure civile et à la procédure d’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions, sans oublier l’arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d’appel.

Avec plus de 200 modèles d’actes d’avocat et de procédure

Rédaction d’écritures

Procédure au fond devant le tribunal judiciaire

Référés

Procédures sur requête

Procédure devant le juge des contentieux de la protection

Procédure devant le juge de l’exécution

Immobilier

Construction

Baux commerciaux

Propriété intellectuelle : l’action en contrefaçon et la saisie-contrefaçon

Procédure devant le JAF

Procédure pénale

L’application des peines

Procédure au fond devant le tribunal de commerce

Procédures collectives

Procédure devant le conseil de prud’hommes

Procédure devant la cour d’appel juridiction du premier président de la cour d’appel

ISBN 978-2-275-02953-5

www.efb.frwww.lgdj-editions.fr

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GUIDE PRATIQUEDE PRocéDUREà l’usage de l’avocatSous la direction d’Aliénor Kamara-cavarroc Avocat au barreau de Paris

la BiBliothèquede l’avocat

2021

Avec plus de 200 modèles d’actes d’avocat et de procédure

à jour de la réforme de la procédure devant le JAF

Dans la même collection

la BiBliothèquede l’avocat

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GUIDE PRATIQUEDE PROCÉDUREà l’usagede l’avocat

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Liste des auteurs

Aliénor KAMARA-CAVARROCAvocat au barreau de Paris,directrice de la pédagogie de l’EFB

Jacques BELLICHACHAvocat au barreau de Paris

Hakim BERRAHAvocat au barreau de Paris

Mélanie BINOCHEAvocat au barreau de Pontoise

Nathalie BOURGEOIS DE RYCKConseiller à la Cour de cassation

Jean-Claude BOUVIERJuge de l’application des peines au tribunaljudiciaire de Paris

Odette-Luce BOUVIERConseiller à la Cour de cassation

Anne-Laure CASADOAvocat au barreau de Paris

Philippe CAVARROCAvocat au barreau de Paris

Fanny DESCLOZEAUXAvocat au barreau de Paris

Antoine GUITTONAvocat au barreau de Paris

Françoise KAMARA-RIBETTESDoyen de chambre honoraire à la Courde cassation

Olivier LAFOURCADEAvocat au barreau de Paris

Alexandre M-BRAUNAvocat au barreau de Paris

Jean-Claude MAGENDIEPremier président honoraire de la cour d’appelde Paris

Stéphane MEYERPrésident de chambre à la cour d’appel de Douai

Thierry MONTÉRANAvocat au barreau de Paris

Élodie MULONAvocat au barreau de Paris

Charles-Hubert OLIVIERAvocat au barreau de Paris

Agnès PICMaître des requêtes en service extraordinaireau Conseil d’État

Isabelle ROHART-MESSAGERConseiller à la cour d’appel de Paris

Dominique SALVARYConseiller à la cour d’appel de Paris

Pierre SÉGUINAvocat au barreau de Paris

Julien SERVADIOAvocat au barreau de Paris

Marine SIMONNOTAvocat au barreau de Paris

Jean TAMALETAvocat au barreau de Paris

Laure TOUTENUVice-président au tribunal judiciaire de Paris

Myriam TURJMANAvocat au barreau de Paris

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Sommaire

1 • RÉDACTION D’ÉCRITURES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

2 • PROCÉDURE AU FONDDEVANT LE TRIBUNAL JUDICIAIRE . . . . . . . . . . . . 33

3 • RÉFÉRÉS. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103

4 • PROCÉDURES SUR REQUÊTE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161

5 • PROCÉDURE DEVANT LE JUGEDES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION . . . . . 213

6 • PROCÉDURE DEVANT LE JUGE DEL’EXÉCUTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251

7 • IMMOBILIER. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323

8 • CONSTRUCTION. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 343

9 • BAUX COMMERCIAUX. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 373

10 • PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE :L’ACTION EN CONTREFAÇONET LA SAISIE-CONTREFAÇON. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 393

11 • PROCÉDURE DEVANT LE JAF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 413

12 • PROCÉDURE PÉNALE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 557

13 • L’APPLICATION DES PEINES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 627

14 • PROCÉDURE AU FOND DEVANT LE TRIBUNALDE COMMERCE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 651

15 • PROCÉDURES COLLECTIVES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 673

16 • PROCÉDURE DEVANT LE CONSEILDE PRUD’HOMMES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 759

17 • PROCÉDURE DEVANT LA COUR D’APPELJURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENTDE LA COUR D’APPEL. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 797

Index. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921

Liste des modèles d’actes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 929

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1 • RÉDACTION D’ÉCRITURESFrançoise Kamara-Ribettes, doyen de chambre honoraire à la Cour de cassation

Aliénor Kamara-Cavarroc, avocat au barreau de Paris, directrice de la pédagogie de l’EFB

Avec la participation de :

Nathalie Bourgeois De Ryck, conseiller à la Cour de cassation

INTRODUCTION

PRÉCEPTES GÉNÉRAUX

1.

• Doctus cum libro : savant avec le livre

Il faut toujours lire et relire les textes de procédure ou de fond dont on se prévaut, ainsi que les articlesqui précèdent et suivent.

Il est également nécessaire de toujours vérifier l’actualité des textes les plus récents et de la jurispru-dence la plus récente.

Toutefois, il ne faut pas s’interdire d’œuvrer à un revirement de jurisprudence ou à l’application nouvelled’un texte ancien.

Enfin, il est toujours possible de faire preuve d’imagination, à condition de la fonder sur des moyens dedroit sérieux et solides (constitutionnel, conventionnel, interne).

• L’on peut gagner une affaire grâce à la procédure... ou la perdre.

Connaître la procédure civile, pénale est une nécessité absolue pour un avocat.

• Les termes génériques employés par le code de procédure civile, notamment dans ses dispositionscommunes : « jugement », « juge » peuvent s’appliquer à toutes les juridictions et à toutes les décisions.Il ne faut pas croire, notamment, que le juge ne signifie pas le tribunal ou la cour d’appel, ou que lejugement ne signifie pas l’arrêt.

De même, la « loi » peut signifier le « décret » : les délais, les formes, les conditions « légalement »prévues, ou que « la loi » prévoit (en réalité, souvent le décret).

• Attention à la précision des termes en matière de procédure, car elle peut entraîner des conséquencesgraves. Par exemple :

– selon l’article 125 du code de procédure civile, il existe une distinction entre les fins de non-recevoir quidoivent (al. 1er) et celles qui peuvent (al. 2) être soulevées d’office par le juge ;

– les exceptions de procédure ne sont pas des fins de non-recevoir (régime procédural différent). Ainsi,les fins de non-recevoir sont des moyens d’irrecevabilité, et non des « exceptions d’irrecevabilité » ;

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– l’autorité de la chose jugée (CPC, art. 480 – C. civ., art. 1355) s’attache seulement au dispositif, non auxmotifs, d’une décision dès son prononcé, par exemple, un motif qui justifie une mesure d’expertise,mais qui ne figure pas dans le dispositif sous forme de chef de décision, n’est pas assorti de l’autoritéde la chose jugée et pourra être remis en cause lors de la poursuite de l’instance après le dépôt durapport de l’expert ;

– l’autorité de la chose jugée d’un jugement se distingue de la force de chose jugée (CPC, art. 500) :celle-ci assortit toute décision insusceptible d’un recours suspensif ;

– un jugement définitif s’oppose à un jugement provisoire ou avant-dire droit ; il se distingue d’un juge-ment irrévocable, qui n’est plus susceptible d’une voie de recours ordinaire (seulement tierce opposi-tion ou recours en révision). À noter : au contraire, en matière pénale, la chambre criminelle de la Courde cassation emploie « définitif », plutôt qu’irrévocable ;

– on ne doit pas écrire : il a « loué à » (qui est le bailleur, qui est le preneur ?), ni il a « acheté à » (il aacheté de ou pour ?) : l’on donne en location ou à bail à..., l’on prend en location ou à bail auprès de... ;l’on acquiert de... ou l’on achète auprès de...

▪ Distinguer la compétence et le pouvoir du juge

• La compétence relève du régime procédural de l’exception de procédure. Un autre juge sera compétent.L’incompétence doit être soulevée in limine litis.

Selon l’article 484 du code de procédure civile, le pouvoir est la limite de ce que peut faire un juge.L’ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ouappelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonnerimmédiatement les mesures nécessaires. Le défaut de pouvoir peut être soulevé en tout état de cause.En ce cas, il sera demandé au juge de dire n’y avoir lieu à référé, les conditions requises pour l’exercicede son pouvoir défini par les textes régissant le référé n’étant pas réunies.

La distinction est parfois délicate : par exemple, l’appel formé devant une cour d’appel dans le ressort delaquelle n’est pas située la juridiction dont émane la décision attaquée est irrecevable (Cass. 2e civ.,9 juillet 2009, nº 06-46220). Il ne s’agit donc pas d’une incompétence, mais d’une absence de pouvoir.

• L’emplacement d’un texte, qui relève d’une mise en forme législative ou réglementaire, ne déterminepas nécessairement sa catégorie. Ainsi, le sursis à statuer est analysé par la Cour de cassationcomme une exception de procédure à soulever in limine litis, alors que les textes qui le régissent(CPC, art. 378 et s.) se trouvent dans le chapitre III relatif à la suspension de l’instance, et non dans lechapitre II consacré aux exceptions de procédure.

▪ La détermination de la partie qui a la charge de la preuve est fondamentale.

• Il faut toujours se demander sur quelle partie pèse le fardeau de la charge de la preuve. Après la procé-dure, c’est le droit de la preuve qui permet de gagner, ou perdre, un procès.

En vertu de l’article 1353 du code civil, celui qui agit, qui engage la procédure ou forme la demande, doitprouver ce qu’il avance (existence d’un contrat, d’un prêt : remise de fonds avec obligation de restituer,preuve des obligations pesant sur l’adversaire). À l’inverse, celui qui se prétend libéré pour avoir exécutéses engagements ou ses devoirs, doit le démontrer.

De nombreuses exceptions sont à examiner avec précision. Ainsi, lorsqu’il existe une présomption définiepar la jurisprudence, le demandeur peut avoir à apporter la preuve contraire pour la combattre. Par

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exemple, si l’on considère que la réception sans protestation de relevés bancaires fait présumer qu’on lesa acceptés, celui qui demande le remboursement de sommes qu’il prétend prélevées à tort sur ce comptedoit renverser cette présomption en établissant qu’il n’avait pas donné son accord.

• La règle prétorienne de la concentration des moyens – et, partant, des demandes (Cass. ass. plén.,7 juillet 2006, nº 04-10672) a, en principe, pour corollaire le devoir du juge de requalifier les faits etactes ainsi que son pouvoir de soulever d’office l’application des règles de droit permettant d’apporterla juste solution au litige (CPC, art. 12).

Il faut donc s’attendre à voir les magistrats rouvrir les débats, afin de respecter le principe de contradic-tion (CPC, art. 16) : il s’agit d’un procédé normal, auquel un avocat doit être préparé.

OBJECTIFS

CONVAINCRE LE JUGE

2. Les écritures doivent avoir comme but de convaincre le juge, de ne laisser la place à aucun doute aprèsleur lecture, afin d’emporter la conviction du magistrat et obtenir gain de cause pour son client. Lessituations qui donnent lieu à des contentieux sont rarement simples. L’avocat qui aura procédé à l’analysela plus poussée des textes et des pièces du dossier (tant les siennes que celles de son contradicteur) et quien aura tiré le raisonnement le plus structuré et le plus précis aura plus de chances de voir le juge adopterson analyse que celle de la partie adverse.

En effet, il n’y a pas une vérité, mais plusieurs vérités qui peuvent se confronter, en particulier parce queles parties en cause peuvent, de bonne foi, être intimement convaincues de leur position, de leur(s) droit(s) et de la justesse de leur analyse, et parce que différentes lectures, interprétations et compréhensionstant des faits, que des actes ou des intentions peuvent coexister.

Le contentieux qui sera soumis au juge donnera lieu à l’énoncé de la vérité judiciaire, qui sera déter-minée à partir des dossiers qui seront remis au juge. Il s’agit donc d’une vérité relative dont les avocatssont les artisans puisque le juge est lié par leurs arguments et par les pièces qui lui sont soumises : resjudicata pro veritate habetur (« La chose jugée est tenue pour la vérité »).

Le juge peut aussi ordonner la réouverture des débats pour inviter les parties à s’expliquer sur l’applica-tion d’un texte ou d’une qualification juridique auxquels elles n’avaient pas pensé (CPC, art. 12), ou leurdemander des éclaircissements de droit ou de fait (CPC, art. 444).

Il est donc nécessaire, pour gagner un procès, de préparer un dossier qui contienne une démonstrationparfaitement efficace et claire.

Et il faut garder à l’esprit que le juge a de nombreux dossiers et donc que, plus le travail qui lui est confiélui est facilité par la présentation d’un dossier clair, structuré et précis, plus il sera enclin à lire ce dossieravec attention, ce qui aura nécessairement pour corollaire de « formater » sa vision et son analyse dudossier.

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En somme, il faut qu’un avocat incite le juge à lire son dossier avec plus de bienveillance que celui de lapartie adverse : Cicéron rappelait que le premier temps de la plaidoirie est la captatio benevolentiae(obtention de la bienveillance de l’auditoire).

Pour atteindre cet objectif, le rédacteur doit impérativement veiller à ce que ses écritures remplis-sent à la perfection trois critères : la présentation, la qualité rédactionnelle et la qualité du raisonne-ment juridique qui est nécessairement sous-tendu par un raisonnement factuel clair, précis et orienté.

À noter : La qualité des écritures et leur efficacité ne dépendent en aucun cas de leur longueur, d’autantque le travail à l’écran induit de nouvelles méthodes de lecture et de travail pour tous, magistrats etavocats.

OUTILS

PRÉSENTATION DES ÉCRITURES

3. Les écritures sont adressées à une juridiction, non à une personne : le juge n’est pas pris en tant quepersonne physique mais est une autorité et les écritures ne sont pas des correspondances mais desactes judiciaires : les écritures ne sont donc pas adressées à Madame ou Monsieur le Juge ou encore àMadame ou Monsieur le Président et à Mesdames et Messieurs les conseillers, elles sont déposées devant :

• le tribunal (quel qu’il soit) ou devant la cour d’appel : le numéro de la chambre est précisé, soit en haut àgauche des écritures, auquel cas il est ensuite écrit « conclusions devant le tribunal de (préciser l’inti-tulé) de (ville) », soit en précisant, par exemple, « conclusions devant la Xe chambre du tribunal de(préciser l’intitulé) de (ville) » ou ;

• le président du tribunal (quel qu’il soit) ou le premier président de la cour d’appel lorsque la juridictionest le président (ex. : référés ou requête) ou ;

• le juge de l’exécution du tribunal judiciaire lorsque la juridiction est le juge de l’exécution.

Les écritures doivent être aérées et justifiées.

Les paragraphes doivent, si possible, ne comporter qu’une phrase.

Pour passer d’une idée à une autre, il est, par exemple, possible d’utiliser des sous-titres, de sauter deuxlignes là où l’on n’en saute qu’une à l’intérieur de chaque idée, d’utiliser les formules « en premier lieu, ensecond lieu », « premièrement, deuxièmement, troisièmement »..., ou encore d’utiliser des ** au milieu dela page.

La typologie et la typographie doivent être uniformes, la taille de la typographie également par classe detexte : les titres (i, ii, iii puis a, b, c, puis 1, 2, 3, puis a, b, c... par exemple) et les corps de texte doivent, àl’intérieur de chacune de ces classifications, comporter la même typographie, le même alignement, lesmêmes retraits et les mêmes soulignements.

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Afin de faciliter la lecture, le corps de caractère (Times New Roman, Garamond, Arial, Calibri) sera detaille 12 au minimum.

L’on peut utiliser les caractères gras, le soulignement et l’encadrement pour les éléments sur lesquelsl’on souhaite voir l’œil du juge attiré.

De même, il convient d’éviter toute faute d’orthographe, de syntaxe et de grammaire, qui contrarierait lalecture et disperserait l’attention.

Il faut encore systématiquement introduire ce que l’on va écrire, au moyen d’une présentation en deuxou trois phrases du litige avant le I, puis d’une annonce de plan, le cas échéant, après le I si les faits sontcomplexes et, en tout cas, après le II s’il y a plusieurs paragraphes (a, b, c) et après chaque titre de para-graphe (a, b, c ; 1, 2, 3 ; a, b, c...), de façon à faciliter et à diriger la lecture du juge qui sait ce qu’il vadevoir analyser : la concentration est, en effet, plus forte lorsque le cerveau est ouvert à ce qu’il va rece-voir et est, au contraire, moins importante lorsque le cerveau doit rechercher ce qu’il doit comprendre.

Enfin, il ne faut pas oublier de paginer les écritures et de numéroter et dater les jeux successifspour permettre au juge de reconstituer facilement les écritures au cas où elles s’éparpilleraient et des’assurer que c’est le bon jeu d’écritures qu’il analyse.

QUALITÉ RÉDACTIONNELLE DES ÉCRITURES

4.

• Le style journalistique, les phrases sans verbe et l’absence de ponctuation sont à proscrire.

Les phrases doivent être structurées, les bons temps doivent être utilisés et la concordance destemps doit être impérativement respectée pour permettre une lecture claire et logique du texte.

Par exemple, lorsque l’on cite un événement qui s’est déroulé en 2010, l’on ne rédige pas au présent, maisau passé composé : « M. X et la société Y ont signé un contrat de prestation de services le 21 mars2010 » ; lorsque l’on parle d’un fait actuel, l’on emploie le présent et, lorsque l’on évoque un événement àvenir, l’on utilise le futur.

De même, les temps doivent être accordés : « M. X et la société Y ont signé un contrat de prestation deservices le 21 mars 2010 aux termes duquel le premier s’était engagé à rémunérer la seconde àhauteur de xxx € lorsque celle-ci aurait rempli ses obligations telles que définies à l’article 3 duditcontrat ».

Lorsque des éléments appartiennent, pour les uns, au passé, pour les autres, au présent et, pour lesderniers, au futur, l’on doit employer l’éventail complet des temps afin de permettre au lecteur decomprendre à quel plan temporel appartiennent les uns et les autres et faciliter ainsi la compréhension(attention, ici, le focus ne porte que sur la concordance des temps : les pièces sont exclues de cetexemple) :

« M. X et la société Y ont signé un contrat de prestation de services le 21 janvier 2010 aux termesduquel le premier s’était engagé à rémunérer la seconde à hauteur de xxx € lorsque celle-ci auraitrempli ses obligations telles que définies à l’article 3 dudit contrat.

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Après une mise en demeure délivrée à M. X, le 10 décembre 2010, et demeurée infructueuse, lasociété Y a assigné M. X, le 3 janvier 2011, aux fins de le voir condamné à lui verser la somme dexxx € en exécution du contrat litigieux.

Or, ainsi qu’il va être démontré ci-après, la société Y n’a, à ce jour, accompli aucune des prestationslui incombant aux termes de ce contrat et le tribunal la déboutera donc de sa demande.

L’obligation de M. X étant, en effet, subordonnée à l’exécution de ses propres obligations par lasociété Y, cette obligation ne naîtra que le jour où la société Y aura elle-même effectué... ».

• Il faut à tout prix éviter les formulations ampoulées, emphatiques, superlatives et surannées, lesinsultes ou moqueries relatives aux analyses formulées par la partie adverse ou aux écritures dépo-sées par les contradicteurs, les triples points d’exclamation, voire tous les points d’exclamation : lestyle doit être mesuré et concis, les critiques doivent être opérées sans emphase et doivent elles-mêmes être justifiées.

• L’orthographe et la syntaxe sont primordiales.

• Les conclusions rédigées sous le format « attendu que..., que... » ou « considérant... » sont à éviter carelles ne favorisent pas l’insertion des mots de liaison (conjonctions de coordination, de subordination,prépositions, locutions adverbiales) qui sont indispensables pour permettre au lecteur de suivre lalogique du raisonnement exposé.

• Enfin, les citations, soit de textes, soit d’arrêts, soit d’articles de doctrine, soit de pièces, doivent figurerentre guillemets et peuvent également être rédigées en italique ; les locutions latines doivent êtreécrites en italique.

RAISONNEMENTS FACTUELS ET JURIDIQUES

■ Le raisonnement factuel

5. Les faits et la présentation que l’on en fait sont primordiaux. En effet, le juge appliquera le droit aux faitsqui lui sont soumis et ne pourra retenir la solution qu’il lui est demandé d’adopter qu’à la condition que lesfaits à lui présentés permettent l’application du ou des textes soulevés et qu’ils aient été prouvés.

En conséquence, les faits doivent être orientés, c’est-à-dire tournés vers la seule application du droiten cause dans le litige, et prouvés : ainsi, à chaque affirmation factuelle doit correspondre au moinsune pièce, identifiée par son numéro de bordereau et son intitulé, pour que le juge soit convaincu dela véracité du fait allégué.

À noter : L’article 768 du code de procédure civile, issu du décret nº 2019-1333 du 11 décembre 2019, préciseque, dans les écritures, l’indication des pièces invoquées au soutien de chaque prétention doit figurerexpressément après chacune de ces prétentions.

Par exemple, si l’on fonde sa demande sur l’article 1231-1 du code civil, l’on ne peut se contenter d’affirmer :« La société Y n’a pas rempli ses obligations contractuelles, ce qui a causé un préjudice à M. X ».

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Pour mémoire, cet article précise que : « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement dedommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exé-cution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ».

Il faudra, au contraire, exposer, d’abord, quel était le contenu de ses obligations, ensuite, qu’elles ont étémal ou non exécutées, enfin, que la faute ainsi commise a causé un préjudice à celui qui en est lavictime.

Ainsi, dans notre exemple, si M. X forme une demande reconventionnelle tirée du préjudice qu’il a subi dufait de l’inexécution de ses obligations par la société Y, son avocat devra, dans son exposé factuel, écrire,a minima :

« Aux termes de l’article 3 du contrat du 21 janvier 2010, la société Y s’était engagée à fournir un logiciel degestion de cabinet à M. X qui devait comporter les spécificités suivantes : (énoncer les spécificités attendues) :

« Recopier ici l’article 3 » (Pièce nº 1 : Contrat du 21 janvier 2010, p. 2).

Ce logiciel devait être installé sur trois postes du cabinet de M. X, celui de ce dernier, celui de son colla-borateur et celui de son secrétariat (Pièces nº 1, art. 4).

M. X avait insisté auprès de la société Y sur le caractère urgent et indispensable au bon fonctionnementde son cabinet de ce logiciel pour telle et telle raison, en particulier en raison de la maladie de M. X, qui lecontraint à passer X jours par mois à l’hôpital, et de l’afflux de clientèle lié au rachat du cabinet de M. Zauquel M. X avait procédé avant le déclenchement de sa maladie (Pièce nº 2 : Certificat médical de M. Xdu 10 janvier 2010 ; Pièce nº 3 : Contrat de cession de clientèle entre MM. X et Z du 22 décembre 2009).

La société Y avait parfaitement acté ces besoins particuliers ainsi qu’en témoigne la rédaction du préam-bule du contrat litigieux :

« Recopier ici le préambule » (Pièce nº 1, p. 1).

Or, malgré trois relances effectuées le 29 mars, le 13 mai et le 12 octobre 2010, la société Y n’a jamais livréles prestations convenues contractuellement (Pièce nº 4 : LRAR de M. X à la société Y du 29 mars, du10 juin et du 12 octobre 2010).

Elle a ainsi commis une faute contractuelle qui a causé un préjudice à M. X.

En effet, à cause du défaut d’installation du logiciel à son cabinet, M. X a pris énormément de retard dansla gestion de ses dossiers, au moment où il pouvait les traiter et, en raison de ces retards et défauts detraitement, a perdu une partie de sa clientèle (Pièce nº 5 : Ensemble de lettres de clients mécontentsretirant leurs dossiers au cabinet de M. X).

Cette situation a occasionné à M. X une perte de 25 % de son chiffre d’affaires (Pièce nº 6 : Attestation del’expert-comptable de M. X du 1er mars 2011) ».

C’est la même chose quel que soit le fondement textuel : l’avocat devra analyser les conditionsd’application du texte évoqué et devra faire état, en les prouvant, des faits permettant de jugerque ce texte doit être appliqué et dans quelles conditions.

Il est inutile d’évoquer les faits que le client aurait expliqués à son avocat si ces faits ne viennent pas ausoutien des demandes juridiques formées, sauf à les relater de manière brève s’ils permettent de dresserun tableau général des relations entre les parties ainsi que du contexte dans lequel est survenu le litige.

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Pareillement, l’avocat ne doit jamais exposer l’histoire que lui a racontée son client si cette histoire n’estpas corroborée par des pièces et si une partie de cette histoire risque d’être contre-productive.

Quid des faits affirmés et non contestés ?

Pendant longtemps, la jurisprudence était hésitante : la partie adverse n’avait pas contesté un faitaffirmé, mais non prouvé, c’est donc qu’elle en acceptait l’existence (l’avocat devait donc faire attentionà tout discuter).

C’était l’application du principe dispositif : le procès est la chose des parties ; elles en définissent lescontours et les éléments à prendre en considération.

Une autre partie de la jurisprudence retenait qu’un fait non prouvé n’était pas acquis.

De nos jours, l’on retient habituellement que le juge ne peut tenir pour constant un fait allégué par unepartie au seul motif qu’il n’a pas été expressément contesté par son adversaire et qu’en ne tenant pas untel fait pour acquis, le juge ne méconnaît pas les termes du litige (Cass. 2e civ., 5 avril 2007, nº 06-10947 ;Cass. 2e civ., 10 mai 1991, Bull. nº 142 ; Cass. 1re civ., 31 mai 2005, nº 02-18220 ; Cass. 1re civ., 4 juillet 1995,Bull. nº 294).

Néanmoins, il est conseillé de contester ce qui n’est pas établi, ne serait-ce que pour l’éclairage généralde l’affaire (la juridiction pourrait retenir, sans l’exprimer formellement, les faits non discutés).

En principe, après la lecture de l’exposé des faits, le juge doit avoir compris quelles demandes juridiquesvont lui être soumises.

Enfin, l’exposé factuel est généralement chronologique, mais il peut arriver qu’un exposé thématique soitplus adapté.

■ Le raisonnement juridique

6. Le raisonnement juridique doit, tout comme le raisonnement factuel, être structuré, logique et servir unedémonstration.

Il convient de reprendre les textes, d’analyser, le cas échéant, leur interprétation jurisprudentielle et dedémontrer que les faits du dossier autorisent l’application de ces textes.

En effet, le raisonnement juridique procède d’un syllogisme :

– le texte énonce que...

– le cas échéant, la Cour de cassation a jugé que ce texte signifiait que... ou en a tiré...

– en l’espèce, les faits sont les suivants...

– le tribunal jugera donc que... et condamnera...

En outre, le raisonnement doit être complet et poussé au bout afin de convaincre le lecteur. Il est souventnécessaire de développer plus que le simple syllogisme pour emporter la conviction du juge et de démon-trer, au-delà des torts de la partie adverse, les éléments relatifs à la rectitude du comportement de lapartie pour laquelle les écritures sont déposées.

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Par exemple (la rédaction est simplifiée mais a pour objet de montrer les différents éléments du raisonne-ment) :

« Aux termes de l’article 1147 du code civil ancien, toute personne qui commet une faute contractuelleengage sa responsabilité et doit réparer le préjudice subi par son co-contractant à raison de cette faute.

La première chambre de la Cour de cassation a, au visa de ce texte, dégagé, au profit de l’emprunteurnon averti une obligation de mise en garde à la charge des banquiers :

«Mais attendu qu’après avoir analysé les facultés contributives des époux X..., en tenant comptenotamment des revenus produits par la location de la maison achetée au moyen du prêt litigieux, lacour d’appel, constatant que les emprunteurs ne pouvaient faire face aux échéances de ce prêt avecleurs revenus locatifs, non plus qu’avec leurs très modestes ressources, a retenu que la banque avaitméconnu ses obligations à l’égard de ces emprunteurs profanes en ne vérifiant pas leurs capacitésfinancières et en leur accordant un prêt excessif au regard de leurs facultés contributives, manquantainsi à son devoir de mise en garde ; qu’elle a légalement justifié sa décision de ce chef »(Cass. 1re civ., 12 juillet 2005, nº 03-10921).

La Cour de cassation a confirmé en chambre mixte l’existence de cette obligation le 29 juin 2007 :

« Qu’en se déterminant ainsi, sans préciser si M. X... était un emprunteur non averti et, dans l’affirma-tive, si, conformément au devoir de mise en garde auquel elle était tenue à son égard lors de laconclusion du contrat, la caisse justifiait avoir satisfait à cette obligation à raison des capacitésfinancières de l’emprunteur et des risques de l’endettement né de l’octroi des prêts, la cour d’appel aprivé sa décision de base légale » (Cass. ch. mixte, 29 juin 2007, nº 05-21104).

Il n’existe pas de définition de la notion d’emprunteur averti, mais des critères tels que ceux relatifs àl’éducation, à la profession, aux habitudes et aux revenus de l’emprunteur sont analysés par les juridic-tions pour évaluer si cet emprunteur doit être qualifié de profane ou d’averti.

En l’espèce, M. X est enseignant en classe de CE1 à l’école d’Orbec-en-Auge (Pièce nº 1 : Contrat de M. Xavec l’école primaire d’Orbec-en-Auge), petite commune de 3 000 habitants du Calvados (Pièce nº 2 :Extrait Wikipédia) ; il ne dispose d’aucune expérience dans le domaine bancaire ni d’un quelconque patri-moine financier ou immobilier (Pièce nº 3 : Extrait de situation bancaire de M. X).

Il doit donc être qualifié d’emprunteur profane.

Par ailleurs, les revenus annuels de M. X s’élèvent à la somme de 20 000 € nets (Pièce n 4 : Avis d’imposi-tion 2009, 2010 et 2011 de M. X), si bien que le prêt lui consenti par la banque Y le 15 avril 2013 (Piècenº 5 : Contrat de prêt du 15 avril 2013), d’un montant de 80 000 €, en vue du financement d’un véhiculeRange Rover, est manifestement disproportionné au regard de son patrimoine et de ses capacités deremboursement, en particulier compte tenu du montant des mensualités de remboursement chiffrées à1 000 €.

La banque était donc tenue à une obligation de mise en garde à l’égard de M. X.

Or elle ne lui a fourni aucune information susceptible de l’éclairer sur ses capacités financières etd’attirer son attention sur les risques de l’endettement consécutif au prêt au moment où il a sous-crit cet emprunt.

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M. X est aujourd’hui dans l’incapacité de rembourser son emprunt et se trouve en état de surendettement(Pièce nº 6 : Déclaration de surendettement), ce qui est la conséquence de la souscription de l’empruntlitigieux.

La banque a donc clairement manqué à son obligation de mise en garde et sera condamnée, sur lefondement de l’article 1147 du code civil ancien, à indemniser M. X de la perte de chance qu’il a subiede ne pas souscrire l’emprunt litigieux et ce, à hauteur de xxx € (ici, penser à justifier le calcul) ».

Il ne faut pas hésiter à formuler des demandes principales, subsidiaires, plus subsidiaires, encoreplus subsidiaires, infiniment... (infra nº 9).

Il faut veiller à la concentration des moyens... et des demandes (Cass. ass. plén., 7 juillet 2006, nº 04-10672) qui a pour conséquence qu’une nouvelle instance ne pourra pas être réintroduite sur la base desfaits objet d’une première instance éteinte, même sur le fondement de nouveaux moyens ou comportantde nouvelles demandes, dès lors que celles-ci tendent aux mêmes fins que celles formulées lors de lapremière procédure ou qu’elles constituent des moyens de défense qui n’ont pas été opposés au coursde la première procédure.

En conséquence, tous les moyens, y compris la coexistence de moyens tirés d’une faute contractuelle etd’une faute quasi-délictuelle, doivent être soulevés dans une seule et même instance (que ce soit austade de la première instance ou au stade de l’appel).

Attention

L’article 566 du code de procédure civile issu du décret nº 2017-891 du 6 mai 2017 précise que « lesparties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui ensont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire » : il faut donc penser, dès lapremière instance, à soulever toutes les demandes qui peuvent être formées dans le litige en cause.

Il faut toujours viser les textes sur lesquels la demande est fondée. Lorsque les textes sont parfaite-ment connus, il est inutile de les citer in extenso, mais cela est indispensable pour les textes mal connusou peu utilisés.

DONNER AU JUGE LES OUTILS NÉCESSAIRES À LA CONSTRUCTION DE SA DÉCISION

7. Les dossiers qui sont remis aux magistrats doivent leur permettre de rendre une décision.

Ils doivent donc comporter tous les éléments permettant cette prise de décision et, en particulier, sansque cette liste soit exhaustive :

– les pièces venant au soutien des faits : contrats, photographies, procès-verbaux de constat (le caséchéant, judiciaires), lettres, e-mails, attestations, témoignages oraux, mises en demeure, statuts,sommations interpellatives ou de communiquer... Si les faits ne sont pas suffisamment prouvés, nepas hésiter à faire usage des articles 145 (avant tout procès) et de l’article 138 du code de procédure

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civile (pièces détenues par un tiers) – cf. vade-mecum TJ, référés et requêtes, infra nº 20 et s., 66 et s.,114 et s.) ;

– les faits venant au soutien de l’application du droit (supra nº 5) ;

– les éléments permettant de chiffrer les préjudices ou les condamnations demandées : rapportsd’expertise. Là encore, il est possible de demander des expertises judiciaires, soit que l’expertise noncontradictoire qui est produite soit contestée par la partie adverse, ou qu’elle constitue l’uniquemoyen de preuve (ce qui n’est pas admissible : Cass. ch. mixte, 28 sept. 2012, nº 11-18710 ; Cass. 2e civ.,13 sept. 2018, nº 17-20099), soit que l’on ne dispose ni des éléments matériels ni des connaissancestechniques pour proposer au juge une solution chiffrée et précise.

PARTICULARITÉ DES ÉCRITURES EN RÉPONSE

8. Les écritures en réponse, qu’elles émanent du défendeur ou du demandeur dans ses écritures enréplique, sont, comme leur nom l’indique, des réponses. Les arguments de la partie adverse doiventdonc être relevés et contestés.

Pour permettre au juge de comprendre ce à quoi le concluant répond et pour qu’il sache si tous les argu-ments adverses seront analysés, il est utile de dresser l’inventaire des arguments du contradicteur à lafin du rappel des faits, avant d’entamer le point « Discussion » : « Dans ses conclusions du xxx, M. Xsoutient que... et que... Il demande, en conséquence, que... L’ensemble de ces arguments (ou demandes)sera rejeté pour les motifs qui suivent ».

Lorsqu’il s’agit de contester ou d’annihiler les moyens adverses, il faut reprendre ces moyens pour yrépondre :

« M. X soutient en page 4 de ses conclusions que la société Y aurait failli à ses obligations contractuellesen ne lui délivrant pas le logiciel convenu et en ne l’installant pas sur les trois postes de son cabinet.

Or, la société Y a proposé à M. X à diverses reprises de venir à son cabinet installer le logiciel dont elle luiavait fait la démonstration dès qu’il avait été personnalisé selon les critères définis au contrat du21 janvier 2010 (Pièce nº 1 : E-mails adressés par la société Y à M. X les 28 février, 15 mars, 28 juillet et10 novembre 2010), sans que M. X n’y réponde jamais.

La société Y a, par ailleurs, systématiquement répondu aux documents intitulés « relances » de la partieadverse des 29 mars, 13 mai et 12 octobre 2010 en s’étonnant du contenu des missives reçues et enoffrant de venir installer le logiciel (Pièce nº 2 : LRAR des 30 mars, 28 mai et 22 octobre 2010).

Malgré l’ensemble de ces envois, M. X n’a jamais indiqué à la société Y la date à laquelle elle pourrait inter-venir in situ.

C’est donc par la faute exclusive de M. X que la société Y n’a pu remplir la dernière partie de sa mission etce, alors que M. X avait validé le logiciel qu’elle avait conçu (Pièce nº 3 : E-mail de validation de M. X à lasociété Y du 25 février 2010).

La société Y sera donc réputée avoir accompli ses obligations ou en avoir été empêchée par la seule fautede M. X et le tribunal jugera qu’elle-même n’a commis aucune faute.

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En toute hypothèse, si le tribunal retenait une quelconque faute à l’encontre de la société Y, il débouteraitM. X de sa demande d’indemnisation.

En effet, M. X expose, en page 6 de ses écritures, que la prétendue faute commise par la société Y auraitcausé une diminution de son chiffre d’affaires de 25 %.

Or, M. X, ainsi qu’il le souligne lui-même, est atteint d’une maladie grave le contraignant à passer X jourspar mois à l’hôpital.

Cette maladie semble affecter les compétences professionnelles de M. X, ainsi que les faits du présentlitige le démontrent puisque, malgré de nombreuses offres de rendez-vous formulées par la société Y,auxquelles M. X n’a jamais répondu, il a saisi le présent tribunal pour se plaindre de l’absence d’installa-tion du logiciel litigieux dans son cabinet alors qu’il est seul responsable de cette situation puisqu’il n’apas permis ladite installation.

Dès lors, quand bien même le tribunal estimerait que la société Y aurait failli à ses obligations contrac-tuelles (quod non), il débouterait M. X de sa demande indemnitaire puisque la perte de sa clientèle est laconséquence de sa seule maladie ».

En somme, il faut, là encore, systématiquement garder à l’esprit que le travail du juge doit être faci-lité et que, plus le dossier qui lui sera remis sera clair, bien construit et structuré, plus, il fautl’espérer, le juge sera enclin à accueillir les demandes.

Si, au contraire, l’avocat répond sans structure aux arguments adverses en disséminant les éléments deréponse au sein de ses écritures et sans jamais préciser ce à quoi il répond, le juge sera contraint de sereporter sans cesse aux écritures adverses pour comprendre ce qu’il est en train de lire, ce qui aura poureffet de lui faire porter son attention sur les écritures et les moyens adverses plus que sur les siens.

Attention

L’ordre des écritures en réponse ne suit pas forcément celui des demandes, soit parce que l’ordredes écritures en demande serait illogique, auquel cas il est indispensable de restructurer le débat,soit parce que les demandes formées à titre principal et subsidiaire doivent être combattues sur lemême plan et avec la même force, et non en suivant le plan de la demande.

À noter : Dans les écritures d’appel, conformément à l’article 542 du code de procédure civile, « l’appeltend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou àson annulation par la cour d’appel », ce qui implique qu’en sus d’une réponse aux arguments adverses,il faut également partir du jugement, soit pour le critiquer négativement, soit pour le critiquer positive-ment et que soit clairement dit/écrit en quoi la décision de première instance est critiquable(cf. vade-mecum appel, infra nº 684 et s.).

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