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Le boulet de Salisbury

Guerre mener n'est que damnationEUSTACHE DESCHAMPS.

« Le comte de Salisbury, le troisième jour qu'il était venudevant la cité [d'Orléans], entra en la tour où étaient logés sesgens et là monta haut au second étage et se mit à une fenêtrevers la ville regardant fort attentivement les marches autourde celle-ci pour voir et imaginer comment et de quelle manièreil pourrait prendre et subjuguer cette cité. Et alors, étant àladite fenêtre, vint soudainement de ladite cité, à volant, la

pierre d'un veuglaire qui frappa la fenêtre où était le comte,lequel déjà pour le bruit du coup se retirait dedans; néan-moins il fut atteint très grièvement et mortellement et eutgrand partie de son visage emportée, et un gentilhomme, quiétait à côté de lui, fut de ce coup tué tout mort 1. »

Tel est, raconté par le chroniqueur bourguignon Enguerrandde Monstrelet, le premier épisode du siège d'Orléans. Personne,à l'époque, ne s'est mépris sur son importance. Le sentiment desFrançais assiégés dans la ville nous est fourni très crûmentpar le Journal du siège d'Orléans qui, au récit de ce même épi-sode, ajoute « Ce qui fut un très grand bien pour ce royaume,car il [Salisbury] était chef de l'armée, le plus craint et renomméen armes de tous les Anglais 2. »

Au soulagement des uns correspond la consternation des

1. Monstrelet, Chronique, t. IV, pp. 299-300.2. Éd. Charpentier, p. 10.

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autres. « Pour la blessure du comte tous ses gens généralementeurent au cœur grand tristesse, car d'eux il était fort estiméet aimé et on le tenait pour le plus subtil expert et heureux detous les autres princes et capitaines du royaume d'Angleterre.Toutefois, ainsi blessé, il vécut l'espace de huit jours et, aprèsqu'il eut mandé tous ses capitaines et les eut admonestés depar le roi d'Angleterre qu'ils continuassent à mettre en obéis-sance cette ville d'Orléans sans quelque dissimulation, il sefit porter à Meung et là mourut au bout de huit jours de sablessure 1. »

Ce transfert à Meung, le deuil mené par les Anglais « le plussecrètement qu'ils pouvaient », note le Journal du siège d'Orléans,afin que les habitants de la cité assiégée ne puissent savoir quele plus tard possible la perte subie par l'armée anglaise en lapersonne de son capitaine, les dernières recommandationsde Salisbury à son entourage, tout cela recompose pour nousl'atmosphère de l'événement. L'armée anglaise a établi à Meungson quartier général; le siège proprement dit a été entreprisquelques jours auparavant, le 12 octobre 1428, et l'on en estaux opérations préliminaires. C'est au moment où il vient deshauteurs de la bastille des Tourelles, au bout du pont d'Orléans,sur la rive gauche de la Loire, inspecter les fortifications dela ville afin de décider de la stratégie du siège, que Salisbury estatteint à la tête 2. Devant la mort, sa préoccupation dernièreest d'ordonner qu'on poursuive le siège jusqu'au bout.

Deux cents ans plus tôt, le plus populaire des rois d'Angle-terre, Richard Cœur de Lion, inspectant les murailles du châteaude Châlus dont il a entrepris le siège, est atteint d'une flèche.Et cette flèche que lui-même, en combattant expert, déclareadroitement lancée en fait, on ne pourra pas l'extraire dela blessure va causer sa mort. A Orléans, c'est d'un bouletqu'est atteint le comte de Salisbury. Deux projectiles deuxépoques. Nous avons tendance à considérer le « Moyen Age »

1. Monstrelet.

2. La date exacte de l'événement, selon ce qu'indique le Journal dusiège d'Orléans, serait le 24 octobre 1428; le même texte indique le 27 pourla mort du capitaine; les indications de Monstrelet sont légèrement diffé-rentes Salisbury aurait été blessé trois jours après son arrivée, ce quiferait le 17 octobre, et il serait mort huit jours plus tard, le 24.

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comme un bloc uniforme, une période statique, sans change-ments mais il y a autant de distance de la flèche de RichardCœur de Lion au boulet de Salisbury, que du semblable bouletqui frappa Turenne à la bombe atomique sur Hiroshima.Le xive siècle avait vu l'apparition des armes à feu sur lechamp de bataille et c'était le début d'une autre époque, lesconditions de la guerre avaient changé de façon irréversible;et la guerre avait pris dans la vie des continents européenset même du monde connu en général une place que l'on n'eûtpas pu soupçonner auparavant. Les Chinois eux-mêmes,inventeurs de la poudre et qui jusqu'alors ne s'en étaient servisque pour leurs réjouissances, en feux d'artifice, utiliserontpour la première fois la poudre à canon sur le champ de batailleen 1407, c'est-à-dire à la date même où, à l'autre extrémitédu monde, sur notre sol de France, l'assassinat du duc d'Orléans

va provoquer la plus cruelle série de guerres tant civiles qu'étran-gères qui s'y soient déroulées jusqu'alors.

Monstrelet, toujours précis, nous dit qu'il s'agissait d'unboulet de pierre et qu'il fut lancé d'un veuglaire, c'est-à-dired'un canon léger, car déjà l'artillerie s'est perfectionnée etdifférenciée il y a les grosses bombardes qui sont les piècesd'artillerie lourde; les assiégés à Orléans disposent ainsi d'unebombarde qui lance des boulets pesant 120 livres (environ60 kg) et qu'ils ont fait faire par un « très subtil ouvrier »nommé Guillaume Duisy; plus légers sont les canons propre-ment dits comme ces deux pièces nommées l'une Montargiset l'autre Rifflart, dont disposent aussi les Orléanais, ou celuique les Anglais installent à Saint-Jean-Ie-Blanc et qu'ilsappellent Passe-volant; il y a les couleuvrines, plus légèresencore, qui annoncent déjà les armes à main mousquetsou carabines. On peut facilement se faire une idée des canonsdu xve siècle grâce aux « miquelettes », deux canons anglaisconservés au mont Saint-Michel témoins d'un siège quidura quarante ans et qui datent d'avant 1423 ils sont longsrespectivement de 353 et 364 centimètres; leur calibre atteint36 et 48 centimètres, leur poids 75 et 150 kilogrammes; au piedde la même forteresse ont été ramassés des boulets dont le

poids allait de 4 à 12 livres.Quoi qu'il en soit, l'emploi de ces armes signifie qu'un fait

d'importance capitale est désormais acquis jusqu'alors et

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pendant toute la période féodale, les moyens de défense ontété supérieurs aux moyens d'attaque à l'abri d'une forteressebien munie de vivres, l'homme était pratiquement invulné-rable désormais, et bien que l'évolution ne se soit faite quelentement, que vaudront les murs d'une forteresse ébranléepar les boulets de canon? On continuera néanmoins à enbâtir avec des essais divers pour renforcer le système défensifdes tours plus hautes, des murs plus épais.

Le guerrier lui-même est devenu, cela dès la deuxième moitiédu xive siècle, une forteresse ambulante, avec son armure quitente de le rendre invulnérable. A la cotte de mailles légèreet souple s'est substituée l'armure de « plates » des pièces defer forgées au marteau qui s'emboîtent l'une dans l'autreconstituent cette carapace sous laquelle nous imaginons uni-formément le guerrier médiéval et qui n'apparaît qu'auxxive et xve siècles pour subsister jusque dans la seconde moitiédu xviie complétée selon le cas par le bassinet ou par la salade,elle le protège efficacement, mais non sans une dure contre-partie le poids de l'armure 18 à 22 kg et son caractèrepeu maniable en dépit des multiples articulations permettantles divers mouvements des bras et des jambes rendent lecavalier, une fois tombé à terre, tout à fait incapable d'assurersa défense.

Ainsi au moment même où la guerre va prendre, en Occident,l'aspect d'une institution quasi permanente, les populations,à commencer, naturellement, par le combattant lui-même,seront de plus en plus exposées à en ressentir les effets le canonqui détruit une forteresse menace aussi la ville et ses habitants;le caractère d'hécatombe que prendront les guerres au xixe siè-cle, on aurait pu le prévoir dès le xve.

Les États s'organisent en Europe au moment où la guerredevient institution d'État. Et pourtant, la mentalité resteféodale en ce moment même où les États deviennent monar-

chiques. On en saisit un exemple très typique dans ce sièged'Orléans à propos de la leçon qui se dégage, pour les contem-porains, de l'épisode du boulet de Salisbury « Plusieurs direntque le comte de Salisbury prit telle fin par divin jugement deDieu, note le Journal du siège d'Orléans, et le croient tant pource qu'il avait failli à sa promesse au duc d'Orléans, prisonnieren Angleterre, auquel il avait promis qu'il ne méferait [n'atta-

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querait] en aucune de ses terres, comme aussi parcequ'il n'épargnait monastères ni églises, mais les pilla et fitpiller dès qu'il y put entrer. En particulier fut pillée l'égliseNotre-Dame de Cléry et le bourg aussi pareillement 1. »

Ainsi le boulet qui est venu frapper Salisbury a puni unmanquement aux usages féodaux, ceux de la chevalerie ilsinterdisent de s'attaquer à une terre dont le seigneur est pri-sonnier. Or, Charles, duc d'Orléans, a été fait prisonnier àAzincourt en 1415 et réside depuis ce temps tantôt à la Tourde Londres, tantôt dans diverses forteresses anglaises commecelle de Pontefract, où il compose des poèmes pour distraireson « ennui ». S'en prendre à des terres que leur seigneur nepeut défendre, c'est manquer à l'honneur féodal; la résistancede l'Orléanais sera d'autant plus vive qu'il garde au cœurce sentiment d'une injustice, et que reste profond à l'époquel'attachement personnel au seigneur. En fait, c'est toutel'Europe qui s'est indignée de ce manquement aux usagesde la chevalerie; et cette infraction s'est doublée d'une impiétéscandaleuse puisque, quelques jours avant de venir s'établirdevant Orléans, Salisbury a pillé, comme le raconte le Journaldu siège, le sanctuaire vénéré de Notre-Dame de Cléry, lieude pèlerinage considéré comme inviolable.

Or, ce boulet a été lancé tout fortuitement. On n'a mêmepas su au juste qui avait pointé le canon à cet instant. Sansdoute le coup est-il parti par suite de l'imprudence d'un page« Aucuns disent que le canon partit de Saint-Antoine, les autresdisent qu'il partit de la tour Notre-Dame, et qu'il y eut unjeune page qui jeta ledit canon; et qu'il en soit ainsi, le canon-nier qui avait la charge de ladite tour trouva le page qui s'en-fuyait 2. »

La mort de Salisbury a fait l'effet d'un jugement de Dieu,d'une sanction providentielle. Mais quel effet produira lesiège d'Orléans lui-même? En un temps où l'on juge facile-ment de l'action divine d'après les revers ou les succès, nefaudra-t-il pas, si les Anglais mettent la main sur Orléans etparachèvent ainsi la conquête de la France, y reconnaîtrel'exécution du vouloir divin? Au temps de saint Louis, la foi

1. P. 13.

2. Récit abrégé du siège, éd. Charpentier, p. 143.

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était assez éclairée pour réagir contre cette conception sim-pliste, encore qu'elle ait été très commune; témoin Joinville,qui s'était fait pour cela reprendre par son royal compagnon.Celui-ci avait supprimé le duel judiciaire, lequel n'était d'ailleursque pour partie un « jugement de Dieu ». Au xve siècle, la foitourne en dévotion et la confusion générale ne permet guère deréagir, d'où l'importance cruciale de ce siège d'Orléans en fonc-tion de la mentalité régnante. Il va déterminer de quel côtése trouve le bon droit, la cause que Dieu soutient.

Et l'on apprécie mieux les adversaires en présence lorsqu'onconstate que, pour Salisbury lui-même, aucune de ces valeursqui paraissent encore fondamentales pour les Orléanais n'apesé dans la balance Orléans est une place stratégique depremière importance, c'est la clef de la Loire et de l'outre-Loire,donc il faut prendre Orléans. Tel est son raisonnement, nonmoins simpliste, reconnaissons-le, que la notion de « jugementde Dieu », mais parfaitement adapté aux réalités matérielles,

à elles seules. Avec le choc de deux armées, ce sont deux

conceptions de l'univers qui se heurtent.C'est pourquoi rien n'aura pu arrêter Salisbury dans sa

marche. On a raconté, et cela parmi les Anglais eux-mêmes,qu'il avait eu la nuit précédente un rêve prémonitoire; surtout,on n'a pas manqué de rappeler, dans plusieurs chroniques,l'avertissement qui lui avait été donné avant qu'il n'entreprîtle siège « L'an 1429, lit-on dans l'une des Chroniques de Nor-mandie, le comte de Salisbury assembla les Anglais à Chartresen grande puissance et dit à maître Jean de Meung, magicien,qu'il voulait aller mettre le siège à Orléans. Et maître Jeanlui dit qu'il gardât sa tête [qu'il prît garde à sa tête]. » Cemaître Jean était un « philosophe et bon astrologien » alorsprisonnier des Anglais à Chartres; on sait comment au xve siè-cle et dès la deuxième partie du xive commencent à proliférersciences occultes et astrologie. Charles V lui-même, dit le Sage,n'eut-il pas auprès de lui un astrologue, le père de la fameuseChristine de Pisan 1 ? Mais Salisbury n'était pas de ceux queles dires d'un astrologue peuvent influencer. Seul le bouletactionné par le geste imprudent d'un jeune page a pu mettre

1. Quicherat, Procès, t. IV, p. 345.

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fin à une entreprise qu'il conduisait méthodiquement. Mais lefolklore du temps n'a pas manqué de s'emparer de l'événement,preuve qu'il a frappé les contemporains; une chanson circulaen Normandie, que nous a conservée un livre de raison surlequel elle fut transcrite

Salisbury, prince d'orgueil,De fausseté, de tyrannie,Devant Orléans a perdu VœilEt a ce jour fini sa vie.Dieu a restreint sa grand folieEntreprise avec grand outrage rQui ne craint Dieu, il n'est pas sage.

Autant de témoignages qui concordent à nous montrerl'importance qu'avait l'action entreprise à Orléans en ce moisd'octobre 1428. Les contemporains ont eu les premiers cons-cience de vivre un moment crucial. Effectivement, Orléans prise,les conséquences en eussent été ressenties par le monde entier

ce monde du xve siècle traversé d'angoisses, secoué detempêtes, dans lequel la petite cité qu'on est en train d'investirfait figure de microcosme, d'image en réduction du désarroigénéral.

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« Le cœur m'est troublé de frayeur et les yeux obscurcis delarmes quand je vois sur nous les coups frappés, qui sontsigne de mort et donnent enseigne de la divine indignation,si nous n'y quérons brève médecine », ainsi s'exprimeAlain Chartier à la date de 1422, sept ans avant le sièged'Orléans.

Cette frayeur, ces larmes devant les « signes de mort », chacun,non seulement en France, mais dans l'Europe entière et leProche-Orient, pouvait les éprouver en une époque où semblerégner à l'état endémique le triple fléau la guerre, la pesteet la faim. De ces maux qui sévissent un peu partout et semblents'engendrer l'un l'autre, les contemporains nous ont laissédes tableaux effrayants. Celui que l'évêque de Lisieux, ThomasBasin, trace de la Normandie peut s'appliquer à toutes lesrégions de France « En peu de temps, cette patrie autrefoisnoble, qui abondait en peuples et en richesses, en était venueà une totale dévastation et désolation, tous ces champs immensesdemeurant incultes et laissés déserts. Aussi s'ensuivit une

si terrible famine, et avec elle le fléau de la peste, qu'on peutestimer que plus de deux cent mille âmes furent emportéesen un court intervalle de temps par la faim et la maladie.C'était chose pitoyable de voir la foule d'indigents et demendiants des deux sexes s'entasser sur les places et les hospices

II

Un monde en désarroi

Vent a plein tref en la mer de Fortune,Sans gouvernail, en tempête importune

JEAN DE LORRAINE.

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de la ville de Rouen et de toutes les cités et places fortes deNormandie. Toute la région était frappée et durement affligéedes trois fléaux de la divine justice la guerre, la faim et lapeste, qui sévissaient là très cruellement. Et elle ne fut paspassagère, cette désertion de la terre elle demeura plus dedix ans, tant que tous les champs s'étaient couverts d'osierset d'arbustes de toutes sortes, d'épines et de buissons, commeautant de forêts très denses, et qu'on n'apercevait plus tracede route et de chemin 1. » Il raconte plus loin qu'on ne cultivela terre qu'autour des villes et des châteaux, à portée du sondu cor ou de la cloche annonçant l'ennemi; et les alarmessont devenues si fréquentes, que d'eux-mêmes, quand ilsentendent les sons de cloche ou de corne donnés par le guetteur,les bestiaux fuient en hâte vers les portes de la ville.

La peste s'est étendue à l'Europe entière l'Europe desmarchands; car il est significatif que ce soit un vaisseau marchandqui, en 1348, ait apporté en Occident le premier germe dela peste noire. On sait comment, lors du siège de Caffa, l'un descomptoirs génois sur la mer Noire, par les Mongols, ceux-cijetèrent par-dessus les remparts des cadavres contaminés quirépandirent l'épidémie parmi les assiégés. Que le mal né àCaffa ait pu, de Gênes, gagner l'Europe entière, c'est conformeà la géographie économique du temps; les succursales desgrandes maisons commerciales de Gênes, de Venise, de Florencecouvrent alors l'Occident de véritables réseaux; car, on le sait,la nature même du commerce s'est modifiée au xive siècle;le commerçant type du xne siècle était ce Vénitien, RomanoMairano, qui, pendant vingt-cinq ans, de 1164 à 1189, s'estembarqué chaque année pour Alexandrie; celui du xive siècleest ce Francesco Datini qui, de sa maison de Prato, expédiedes ordres et entretient une correspondance avec ses facteursimplantés sur les diverses places d'Europe à Londres, à Bruges,à Paris, à Barcelone, en Avignon aussi, devenue cité interna-tionale depuis que les papes y ont élu leur séjour.

La peste s'est propagée sur les grandes voies commercialesdu temps, d'Italie en Flandre, des cités méditerranéennes àcelles de la Baltique, fortes de la puissance de la Hanse, qui

1. Thomas Basin, Histoire des règnes de Charles VII et Louis XI, liv. III,chap. v, t. I, p. 117.

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régente tout ce qui compte dans le commerce de l'Europeseptentrionale. Elle s'est infiltrée avec les ballots de cuir et detissus, avec les charges de poivre et d'épices, avec les armes etles tissus précieux; elle a suivi sur les routes les parcours desbêtes de somme et, sur les cours d'eau, celui des innombrablesbarques qui les descendent et les remontent; chaque port,chaque étape sont devenus autant de foyers de pestilences,se répandant à travers villes et campagnes.

Au reste, rien ne donne plus vivement l'impression d'un fléauinstallé à demeure, faisant partie de la vie quotidienne, queles correspondances commerciales du temps. Témoin celle,aujourd'hui fameuse, de Datini, conservée jusqu'à notre tempsen d'énormes archives 500 registres et 420 cartons unensemble de 100 000 lettres ou environ. Figure type, disions-nous, mais carrière type aussi que celle de ce marchand qui, névers 1335, d'origine modeste, et rendu lui-même orphelin par lapeste de 1348, se place chez un commerçant de Florence,s'initie aux affaires, séjourne peut-être en Espagne et s'établiten Avignon en 1354; ses affaires ayant pris rapidement del'extension, des succursales étant nées à Florence, Milan, Gênes,Montpellier et Paris, il rentrera à Prato en 1382 et de là lesdirigera, non sans continuer à les étendre, ouvrant un comptoirà Pise, d'autres à Barcelone et Valence, enfin à Majorque,avec des facteurs qu'il envoie aussi bien en France, en Flandreet en Angleterre qu'en Orient. Or ses divers facteurs enre-gistrent chaque année ou à peu près les retours offensifs de lapeste noire

« Il est mort des gens de la peste ici et il en meurt encore.La mortalité toutefois n'est pas grande de quarante par jour ouenviron. [15 juillet 1383]. Ici, il commence à y avoir de lamortalité et il me semble qu'on redoute la peste. Le pape,pour cette raison, s'en est allé au-delà du Rhône, bien que,pour le moment, je ne voie aucune raison de crainte. [14 juin1384]. La contagion est dans Avignon il en meurt vingt-cinq àtrente par jour. Le pape est à Aramon. Il demeure là sanscardinaux et avec peu de gens par peur de la peste [14 octobre1390]. La mortalité a commencé ici au mois de juillet etn'a cessé d'augmenter. [8 octobre 1397]. Il n'y a personne ici,on dirait un château de petites gens. et Dieu sait combienil en est mort![10 février 1398]. Sachez que la peste a tra-

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vaillé ici depuis vingt jours plus que jamais. Les gens sont viteemportés. Il y a eu des journées de 52, ce qui est excessifétant donné le monde qui est resté ici. [janvier 1399]. »

Partout où l'on a pu traduire en chiffres précis les méfaits dela peste, ils sont accablants. Rappelons le registre paroissial duvillage de Givry en Bourgogne qui, en une année, porte 649décès pour une population de 1200 à 1500 personnes; les GrandesChroniques de France estiment les morts pour Paris à 800 parjour; dans une ville comme celle de Saint-Flour, les registres dela taille consignent 1 300 chefs de famille imposables avantla peste, 769 une dizaine d'années après. Avignon et le ComtatVenaissin perdent 120 000 âmes. Et les retours offensifs du fléaudurent jusqu'au milieu du xve siècle; on les enregistre particu-lièrement entre 1361 et 1363. En 1407 la peste fait 30 000 vic-times à Londres; en 1418, on les évalue, à Paris, à 50 000 il yen aura autant en 1439. « Quand, à la Saint-Crépin et Crépinien,les cordonniers comptèrent les morts de leur confrérie, note leJournal d'un bourgeois de Paris, ils en trouvèrent au moins1 800, maîtres ou valets. Les gens de l'Hôtel-Dieu, chargés decreuser les fosses dans les cimetières, affirmaient avoir enterré

plus de 100 000 Parisiens entre la Nativité de Notre-Dameet la Conception (8 septembre au 8 décembre 1418) 1. »

A cela s'ajoutent les mauvaises récoltes, et la famine quimet les populations en état de moindre résistance. Les années1419-1422 notamment sont désastreuses de ce point de vuetoute la France, celle du Midi surtout, souffre alors de la disette;il en sera de même en 1432 2.

Terreur permanente, qui engendre une complète désorga-nisation dans les cadres de la société d'alors. Des études

récentes en ont montré les répercussions dans le clergé; sesrangs s'éclaircissent; les couvents de Dominicains perdent,selon les lieux, 30 à 95 de leurs effectifs. Le niveau de laformation baisse, faute de maîtres capables dans les universités,

1. Le Journal d'un bourgeois de Paris, année 1418. Les citations précé-dentes sont extraites de Brun (Robert), Annales avignonnaises, dans lesMémoires de l'Institut historique de Provence, XII-XV, 1935-1938; en part.XII, p. 41, 59, 124; XIV, 38, 40; XV, 23, etc.

2. Voir la dernière étude, très complète, parue à ce sujet, par Favreau(Robert), « Épidémies à Poitiers et dans le Centre-Ouest à la fin du MoyenAge », dans la Bibliothèque de l'École des Chartes, t. CXXV, juillet-décembre1967, pp. 349-398.

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de moines eux-mêmes suffisamment instruits et formés; les petitsprieurés, foyers de vie spirituelle jusqu'alors disséminés dans lescampagnes les plus reculées, disparaissent, et de même certainscouvents sont-ils entièrement anéantis, comme ceux des Corde-liers de Marseille et de Carcassonne où tous les moines meurent.

L'une des conséquences de cette terrifiante mortalité pèseralourdement sur l'Église au xve siècle le cumul des bénéfices.

On sait comment, à l'époque, chaque cure, chaque chargeecclésiastique comporte un bénéfice, c'est-à-dire un revenuprélevé sur le rapport d'une terre puisque la terre demeurela principale sinon unique source de richesse qui permetd'assurer l'existence du curé, du chanoine ou de tel autre

membre du clergé en contrepartie de la fonction qu'il exerce;or, les charges et fonctions sont désormais plus nombreusesque ceux qui peuvent les assumer; il se passe alors, sur un pland'autant plus vaste que le rôle du clergé était plus large, cequ'on voit aujourd'hui dans certaines campagnes où un seulprêtre dessert parfois cinq ou six paroisses ou davantage.Et dans bien des cas on verra des clercs se contenter de toucher

les bénéfices dont ils sont titulaires revenus d'ailleurs bien

amenuisés, à cause du recul des terres cultivées et de la baisse

des populations sans plus se préoccuper des fonctionsattachées à ce bénéfice; le pourraient-ils d'ailleurs? Un JeanBeaupère, qui jouera un rôle important tant dans la condam-nation de Jeanne d'Arc que dans le concile de Bâle, touchedes prébendes de chanoine à Rouen, à Besançon, à Sens, Paris,Beauvais, Autun et Lisieux, et un Guillaume d'Estouteville,qui prendra en main le procès de réhabilitation, sera titulairedes évêchés d'Angers, de Digne, de Nîmes, Béziers et Lodève,en même temps que prieur de Beaumont-en-Auge, de Grand-mont près Rouen et Saint-Martin-de-Champs; il sera, enfin,le premier abbé commendataire du mont Saint-Michel.

Au concile de Bâle déjà cité, il avait été question de remédierà cette plaie de l'Eglise. Comme devait l'écrire un témoin,le futur pape Pie II, « la question ne put jamais être introduite,car elle touchait beaucoup de gens ». De là une démorali-sation profonde du clergé, qui ouvre la voie au système de lacommende et au concordat de 1516, lequel devait modifiertotalement les structures de l'Église en mettant les nominationsecclésiastiques entre les mains du roi.

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Notre xxe siècle n'a pas le privilège des grandes mutations.La société qui se forme, ou plutôt se cherche dès la deuxièmemoitié du xive siècle, est en complet contraste avec celle du XIIIe.L'homme né vers 1350 éprouve violemment le sentiment d'insé-curité, traqué comme il l'est par le triple fléau qu'évoque ThomasBasin; il peut entendre évoquer par des vieilles gens des sou-venirs à eux transmis par leurs parents, ceux d'une époqueoù la vie était facile, où les guerres, rares et limitées, se rame-naient au corps à corps ou au siège; où l'on n'utilisait ni l'arcà longue portée, ni surtout le canon; dans les campagnes il voit,retournées à la friche ou au taillis, des pièces de terre dont onlui affirme qu'elles ont été autrefois cultivées et en plein ren-dement on lui désigne un endroit où s'élevait un moulin, unautre où les levées réglementaient jadis un cours d'eau; il saitqu'ici fonctionnait une école, et là un hôpital, dont rien nesubsiste plus. En ville il assiste à un peuplement anarchiqueon s'entasse derrière les remparts lorsque est annoncée une com-pagnie de routiers, et on s'enfuit en hâte lorsque se dessineun retour de l'épidémie. Le cadre de l'existence, son rythme,son déroulement sont rompus et désaccordés. Et la mentalités'en ressent on a souvent fait remarquer que c'est à la date de1375 que s'ouvre à Hambourg le premier asile d'aliénés;jusqu'alors les seuls hôpitaux spécialisés avaient été les mala-dreries, pour les lépreux; les déments étaient trop rares pourqu'on y songeât. Mais le désarroi du monde engendre la folie etil est significatif qu'au xve siècle, la France, puis l'Angleterreaient vu successivement la folie installée sur le trône royal.L'âge médiéval est en complet contraste avec l'âge féodalauquel il succède et qu'il croit prolonger.

Les malheurs des temps trouvent leur reflet dans la forme depiété qui prévaut alors, piété fortement orientée vers les scènesde souffrance, vers la Passion du Christ et les scènes de « déplora-tion ». C'est à cette époque qu'apparaissent les « Sépulcres »,ces scènes, presque toujours grandeur nature, qui montrent,groupés autour du corps du Christ lors de son ensevelissement,la Vierge et les apôtres; le plus ancien en France, celui de l'hôpi-tal de Tonnerre, dû à Jean-Michel et Georges de La Sonnette,date du milieu du xve siècle. Le Christ sur la croix on a

maintes fois fait remarquer ce contraste n'est plus le Christglorieux du xme siècle, les yeux ouverts, triomphant même dans

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LA LIBÉRATION D'ORLÉANS

la mort; c'est un cadavre sur lequel se reflètent toutes les affresde l'agonie et de la torture. Et l'on se penche alors avec prédi-lection sur le thème de la Pietà, la Vierge de Pitié, tenant surses genoux le corps de son fils image touchante devant laquelleon dit les prières du soir on l'appellera, dans les pays germa-niques, la Vesperbild, l'image vespérale celle qui convient àun temps de nuit et de désolation. L'art funéraire prendalors un développement exorbitant, au point que les maîtresde la sculpture sont alors connus surtout par les tombeauxqu'ils exécutent un Claus Sluter par la chapelle funérairede la chartreuse de Champmol et par le tombeau de Philippele Hardi; un Jean de Cambrai par le gisant du duc de Berry.Et l'on a souvent évoqué aussi les formes aberrantes que revêt ladévotion du temps processions de flagellants, pénitents àcagoule, aussi inquiétantes que les mœurs d'une époque déver-gondée. C'est au xve siècle que commencent les premiers procèsen sorcellerie; ils ne se multiplieront, il est vrai, qu'au xvie etsurtout au début du xvme siècle, mais il n'en est pas moinssaisissant de voir, aux côtés mêmes de Jeanne, un personnageaussi effarant que celui de Gilles de Rais qui n'est alors qu'unvaillant capitaine et ne manifestera que plus tard ce mélangede cruauté, de perversion sexuelle et d'un sens mystique com-plètement dévoyé qu'il portait en lui. L'accoutumance desguerres et des pillages, le spectacle quotidien de la mort entre-tiennent alors, avec un découragement latent, cette instabilitédes mœurs comme de l'état mental.

Le fléau de la guerre sévit surtout en France et au Proche-Orient. En France, il est, comme la peste, installé à demeureet de nouveau on peut recourir aux correspondances commer-ciales pour le constater; les facteurs de Datini en Avignonconsignent les faits de guerre comme habituels ce sont ceuxde la vie de tous les jours.

« En raison des hommes d'armes qui sont dans le Venaissinet autour, les chemins sont peu sûrs. [6 mars 1385.] CetteProvence paraît être et est une caverne de brigands à causedes guerres qui ont sévi ici; toute chose y est sauvage. Jesuis allé à Orgon et à Salon où il y avait de votre temps,vous le savez, de si beaux faubourgs et de si belles hôtelleries;aujourd'hui, tout est détruit, ce sont des masures, c'est unecompassion à voir et il en est de même des autres endroits.

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UN MONDE EN DÉSARROI

La route, vous le savez, est coupée d'Avignon à Nice, actuel-lement il n'y passe personne. [25 juin 1388.] Plût à Dieuque ce pays fût en paix, car il y a bien des éléments poury réussir, mais on ne peut aller nulle part si ce n'est à Arles,à Aigues-Mortes qui est dans le royaume, à Bouc et à Marseille.Celui qui s'écarte de ces routes est pris, tué, dépouillé. [5 août1392] », etc. 1.

Les maîtres de l'heure ce sont les routiers, ceux qui fontmétier de la guerre et dont la présence à elle seule perpétue laguerre; des études récentes ont ainsi mis en relief la personneet les méfaits d'un Perrinet Gressart qui, retranché à La Charité-sur-Loire, à la solde tantôt du duc de Bourgogne et tantôt duroi d'Angleterre, finit par se tailler un véritable fief, fait régnerla terreur dans le Nivernais et prend des allures seigneurialesau château de Rosemont dont s'est emparé l'un de ses agents,François de Surienne dit l'Aragonais, qui avait épousé sa nièce;lorsqu'en 1435, le vent ayant tourné, des accords serontconclus entre France et Bourgogne, il faudra un traité particulierpour réduire à l'obéissance du roi de France le capitaine deLa Charité auquel Charles VII donnera ce titre, régularisanten quelque sorte un état de fait devant lequel il se sentait impuis-sant l'ancien routier finira sa vie, possesseur d'une énormefortune que lui aura value son brigandage, et pourvu aussid'un titre officiel décerné par le roi qu'il avait si longtempscombattu.

Quelques années plus tard, d'ailleurs, les ordonnancesmilitaires de Charles VII viendront absorber en corps d'arméerégulière les soudards autrefois enrôlés au hasard des guerreset recrutés tantôt par l'un, tantôt par l'autre adversaire, tandisque les frais de leur entretien retombaient infailliblement surle petit peuple des campagnes, pillé et rançonné par eux àmerci; entre-temps l'époque aura vu son vocabulaire s'enrichirde deux termes celui de brigand qui vient de la brigandine,la tenue du soldat une casaque renforcée de cuir ou de lamesde fer et celui d'écorcheur, qui désigne communément lesgens de guerre, dont le passage laisse le paysan aussi nu etdépouillé qu'un écorché vif.

Christine de Pisan a esquissé en termes saisissants le cycle

1. Brun (R.), Annales avignonnaises, pp. 77, 113, 137, etc.

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