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Georges Hyvernaud

Carnets d’oflagsuivi de

Lettre à une petite fille

Préface deJean José Marchand

Le Dilettante-, rue du Champ-de-l’Alouette

Paris e

le dilettante, rue Racine

Paris e

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© Le Dilettante, .ISBN ---

Couverture : Anne-Marie Adda

978-2-84263-358-5

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Préface

Il est des cas où l’on hésite à publier les carnetsintimes et les notes personnelles d’un écrivain : parexemple quand il s’agit seulement d’agendas où l’au-teur s’est contenté de fixer rapidement un fait, uneidée, pour ne pas les oublier ou avec l’intention visiblede les développer dans ses livres. Georges Hyvernaudest toujours allé jusqu’au bout de ses réactions ; chezlui la « forme » et le « fond » ne se séparent jamais ; etsi l’on retrouve ici, parmi d’autres, les thèmes traitésdans ses livres, les lecteurs y découvriront, complète-ment élaborés, d’autres états de sa pensée.

Les Carnets d’oflag, que nous communique iciAndrée Hyvernaud, sa veuve, et dont elle racontedans l’avant-propos la genèse, égalent en qualité LaPeau et les Os, avec la liberté d’allure de celui quis’adresse à lui-même. Aussi ne craint-il pas les allu-sions littéraires, les références aux grands classiques,en alternance avec une série de portraits inoubliables.

Hyvernaud connaît de à une expériencefondamentale : l’enfermement au milieu d’une foule.

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Cette situation engendre en lui un intense désir debonheur. Il ne peut prévoir la période - –qu’il vivra cependant – où la France croira trouverdans la « consommation », comme on disait, le secretdu bonheur, et je ne puis m’empêcher de regretter qu’ilne nous ait pas livré la contre-épreuve du camp deprisonniers vingt ans après, la vision au jour le jourdes hommes saisis par l’abondance. On rêve deseaux-fortes qu’il aurait pu graver en regardant sim-plement autour de lui : la « productivité », la télévi-sion, les voitures, les voyages collectifs à l’étranger, etc.« La culture n’est rien, qui nous laisse désarmé,dérouté devant le malheur. » Elle apparaîtra plus tardcomme un hochet du « confort moderne », cher auxhommes politiques de tous bords.

Mais s’agit-il de la même culture ? Le texte desCarnets nous invite à ne pas juger trop vite : la cul-ture selon Hyvernaud n’est pas un ornement de l’es-prit, une connaissance superficielle des auteurs à lamode, mais plutôt le sang de l’esprit, au sens deNietzsche. Avec quelle passion ne dissèque-t-il pas lesécrivains célèbres en , et en particulier Péguy !Les gens dits « cultivés » de cette époque, tel ce jeunepoète prisonnier, disciple édulcoré de Verlaine (dont ilne veut d’ailleurs pas se moquer), sont en réalité desvictimes, bien que consentantes et enthousiastes. Or,selon Hyvernaud, « la culture n’est pas une religion,elle ne se met au secours d’aucune ivresse, elle n’est ni

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catholique ni marxiste, elle ne sait qu’exprimer levrai ». Il précise : « Au lieu de divertir, un livre doitavertir. » Bien plus tard, quand, à la suite de Mal-raux, on imagina qu’on pouvait « dispenser » la cul-ture, j’imagine qu’Hyvernaud a discerné dans toutcela ce qui demeure authentique : une aspirationconfuse à la beauté, s’exprimant à travers le fatras.

Les Carnets sont déjà d’un grand écrivain : il a sonunivers, ses thèses, qu’on peut ne pas partager toutesmais qu’il exprime avec l’autorité de l’homme sûr delui et de son langage. On y sent un infini désir denoblesse doublé d’une lucidité redoutable. Il aconscience d’une métamorphose qui se produit en lui,d’abord d’une manière quasi proustienne : « La cap-tivité semble revaloriser certains de nos souvenirs. »La médiocrité des braves gens qui l’entourent ne l’em-pêche pas, en particulier, de faire un magnifique élogedes instituteurs. Il sait qu’il est enfin maître de lui-même : « Dans la première partie de sa vie, à quinzeans, à vingt ans, on s’emploie à former, à exposer desidées – et c’est seulement après, parfois, qu’on les pen-sera, qu’on les emplira, qu’on les nourrira, qu’onsaura ce qu’on a pensé. »

L’attitude fondamentale d’Hyvernaud est religieuse(ce qu’il appelait « notre religion de l’homme »). Onse tromperait si l’on attribuait la sévérité de ses nota-tions à un penchant nihiliste. Mais il refusait d’être

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dupe et pourchassait tout ce qui était inférieur à sonidéal. On ne peut expliquer ces étonnants portraits auvitriol, à toutes les pages des Carnets, que par ladéception que lui cause chaque jour le spectacle decette humanité dont il avait la religion : « La grandemisère ne vient pas des choses, elle vient deshommes. » Il avait, sans s’en apercevoir, été très pro-tégé : vivant dans ce milieu de l’université qui est tou-jours, en tous pays, un conservatoire de la civilisationpassée – malgré les opinions tournées vers l’avenir,parfois jusqu’à l’utopie, de beaucoup de professeurs –parce que l’enseignement se réfère aux chefs-d’œuvre,et que les chefs-d’œuvre sont, en quasi-totalité, derriè-re nous. Marié et père de famille, il avait connu unesorte d’humanisme intime qu’il transposait sansmême s’en rendre compte à l’échelle de l’humanitéentière. Le passage de ce milieu hautement civilisé aucamp de prisonniers avait été trop brusque. Peut-êtreque s’il avait connu pendant sa jeunesse une sociétéplus rude, la pénurie et la dénonciation, son indigna-tion aurait été moins forte : il y a une accoutumanceà tout. Il craint physiquement la terrible contagiondu médiocre. Ses compagnons deviennent peu à peucomme des barbelés auxquels il se déchire. Il les évitedonc en pensée, puisqu’il est obligé de les rencontrer àtout instant. Le mai , donc à la veille dudébarquement en Normandie ( juin), il ira jusqu’àécrire : « À force d’éviter les rencontres, les contacts,arrivé à ne connaître pratiquement personne –

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M. excepté – des hommes qui vivent avec moi.Par là gagné en liberté, perdu sans doute quelquesoccasions de m’instruire, et encore pas sûr : presquetoutes les expériences ici sont décevantes. » Déce-vantes pour lui, qui se faisait une idée trop haute del’humain ; pas pour nous, lecteurs, qui pouvons main-tenant connaître ces « souvenirs entomologiques »autrement intéressants que ceux de Fabre. On peutmême se demander si cette confrontation carcérale,donc obligatoire, avec des hommes aussi divers dansleur naturelle médiocrité n’a pas été la dure accou-cheuse de l’œuvre d’Hyvernaud !

Quoi qu’il en soit, nous regretterons toujoursqu’Hyvernaud n’ait pas donné une suite à ces Car-nets.L’œuvre, heureusement, a survécu – courte maisd’une telle force que sa pérennité, j’en suis persuadé,est assurée.

JEAN JOSÉ MARCHAND.

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Avant-propos

Ces Carnets d’oflag (le titre n’est pas de l’au-teur) se présentent sous la forme de huit petitscarnets d’un millimètre d’épaisseur sur quinzecentimètres de haut et six de large – usés, décolo-rés, écrits au crayon encre, au crayon vert, aucrayon noir, d’une écriture fine, serrée, souventabrégée, parfois difficile à déchiffrer.

Ils furent commencés à l’oflag II D (Grossborn,Poméranie) le juin (Georges Hyvernaudavait trente-huit ans), poursuivis à l’oflag II B(Arnswalde), à dater du mai , puis sur lesroutes de l’exode – le camp ayant été évacué le janvier , devant l’avance russe – et termi-nés à Soest,Westphalie, lors de la libération de cedernier camp par les Américains, le avril

(Georges Hyvernaud avait quarante-trois ans).Parallèlement à ces carnets, Georges Hyver-

naud, dès le début de , avait commencé àécrire Voie de garage (titre provisoire de La Peau et

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les Os). Il travaillait également à un ouvrage surPéguy auquel il songeait depuis . Et, à partirde la libération de Paris ( août ), il rédigeaun Journal de l’attente, qu’il dut abandonner àArnswalde, avec toute sa documentation surPéguy, trop encombrante et trop lourde à porter.Il ne sauva que ses deux cahiers de Voie de garage,sa correspondance et ses petits carnets.

À la différence des inédits de Lettre anonyme,ces carnets n’étaient pas destinés au public.Mais, vers la fin de , ayant constaté que lecrayon commençait à s’effacer par endroits, j’en-trepris de les recopier. C’est au cours de cettetranscription, page à page, carnet après carnet,qu’il me parut évident que je n’avais pas le droitde garder pour moi seule ce document excep-tionnel, et que cette langue souple et rigoureuse àla fois, parfaite en son genre, devait faire partie denotre patrimoine littéraire. Tel fut aussi l’avis dePaul Fournel, alors directeur littéraire chez Ram-say, qui publia, immédiatement après Lettre ano-nyme, ces Carnets d’oflag à présent épuisés.

Les éditions Le Dilettante les font donc repa-raître, en en détachant, avec mon accord, les Cri-tiques littéraires qui leur faisaient suite et quigagneront à être complétées, mais en leur asso-ciant la Lettre à une petite fille, dont Etiemble a ditque c’était la plus belle lettre qu’un père ait écriteà sa fille.

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Elle fut en effet ébauchée le février , surles routes de Mecklembourg, lors de l’intermi-nable exode du camp d’Arnswalde à travers lenord de l’Allemagne . Reprise et achevée dès leretour de l’écrivain à Paris, elle confirme sesvaleurs et donne une lucide et bouleversantevision de l’homme.

Avec mes remerciements à tous ceux qui m’ontaidée dans cette entreprise.

Andrée Hyvernaud,À Paris, janvier .

. Voir ce texte initial, dans le huitième Carnet d’oflag,p. .

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Prologue

La guerre, en restituant au mot « génération »sa signification concrète et humble, nous enseignecela.

Elle ne nous enseignera peut-être que cela. Il nefaut pas trop attendre d’elle. Certains sont entrésdans la guerre avec cet espoir qu’elle les révéleraità eux-mêmes et tirerait d’eux des chants inouïs.Mais les événements ne peuvent rien pour leshommes. Ce sont les hommes, au contraire, quidonnent aux événements une valeur et desdimensions. Les médiocres auront beau êtremêlés à l’énorme aventure, ils n’en sortiront pasmoins médiocres. Elle n’a pas une once de talentà offrir à ceux qui en manquent. Les fasciculesblancs ou rouges n’ont point tant de vertu.

D’autant plus que cette guerre que nous fai-sons n’a pas été un arrachement brusque à lapaix, une soudaine irruption dans la violence. Iln’y a pas eu la dernière heure de la paix, puis lapremière heure de la guerre : mais un resserre-

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ment, un alourdissement de la tragédie. Quipourrait dire quand les choses ont commencé ? Ily a eu un épaississement de la nuit. Un degré deplus dans le faux et le fou. Depuis des années,nous avons cette chance, oui, cette chance, d’êtreengagés dans une époque de fabuleuse cruauté.S’il en est parmi nous qui mûrissent en eux lesœuvres qui imposeront un visage à notre chaos, iln’a pas fallu les affiches de la mobilisation pourqu’ils perçoivent les suggestions et les somma-tions de cette époque.

Les autres… Pas sérieux, s’abstenir.

Décembre 1939.

. Extrait du texte d’Hyvernaud publié dans Volontés,n° (avril ), pp. -, sous la rubrique « Notre cour-rier du front », sans nom d’auteur, sans titre, amputé de sesdeux premières lignes et comportant quelques erreurs. Le décembre, Hyvernaud annonçait qu’il méditait « un petitessai […] sous le titre : Pas sérieux s’abstenir ».

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