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Nicole Vedrès

MicroclimatsChroniques choisies

Le Dilettante-, rue du Champ-de-l’Alouette

Paris e

le dilettante, rue Racine

Paris e

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© Le Dilettante, ISBN ---

Couverture : Anne-Marie Adda

978-2-84263-458-2

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Nicole à sa Place

Tout fait événementpour qui sait frémir

Jean Follain

Elle habitait place Furstenberg (Paris e) etcette adresse magique lui convenait au-delà detoute mesure. Nicole Vedrès, en ce lieu, c’estl’accord parfait. Colette au Palais-Royal. Unécrivain « en résidence », comme Sartre parlaitde l’homme « en situation ».

Sartre ? Ce n’était sans doute pas son auteurde prédilection, mais elle aimait l’homme, quiapparaît dans son film La vie commencedemain (Nicole fut aussi cinéaste). Souventelle devait croiser, en voisine, le germanopratinillustre, dans le périmètre sacré, entre Flore et

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rue Bonaparte, à deux pas de notre placeFurstenberg…

On voit Nicole Vedrès sur une photo célèbre

des folles années existentialistes, accoudée auBar du Montana en compagnie d’AlexandreAstruc et de quelques autres rats de cave. Beauvisage intelligent, aigu, un peu distant, portaltier, lèvres boudeuses, regard lointain, maisattitude et accoutrement estampillés d’époque.À la fois bien présente et ailleurs. Proche etlointaine. Elle a alors un peu plus de trente anset participe sans vergogne à la fête de Saint-Germain-des-Prés, sans aller jusqu’à en deve-nir une muse ou une égérie comme Cazalis,Gréco ou Michèle Vian.

… Il y eut un «après », Saint-Germain finitpar passer de mode, tout en demeurant le quar-tier des écrivains, des éditeurs. Nicole restafidèle à la petite place d’où rayonne on ne saitquel charme délicat, suranné, provincial. Il

. Photographie de Doisneau reproduite p. de l’ou-vrage Saint-Germain-des-Prés -, éd. Paris-Musées, . Autre photo de Nicole Vedrès p. dumême ouvrage.

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faudrait les fines antennes d’un Léon-PaulFargue pour capter le microclimat propre àcette enclave secrète, bordée par l’atelier deDelacroix et le balcon de Théroigne deMéricourt, ornée en son centre par les troisarbustes et le lampadaire immuable.

Proche et lointaine place Furstenberg . S’yétablir, c’est partager la vie intime de Saint-Germain-des-Prés, tout en faisant chambre àpart. Poste d’observation idéal pour la chroni-queuse quêtant d’un même mouvement la par-ticipation et le retrait. Un ami, Robert Kanters,cerne tout cela d’un trait : « [Nicole Vedrès]appartenait à un certain Saint-Germain-des-Prés intérieur » …

Et si Nicole dut se résoudre à quitter un jourson havre du VIe arrondissement, parce que leslivres avaient envahi le petit logement, parceque la trépidation urbaine l’y avait rejointe

. Ni proche, ni lointaine, les puristes du cadastre lajugeront… inexistante puisque les plans officiels nesignalent qu’une rue Furstenberg. Mais que lesflâneurs aillent y voir…. Robert Kanters, À perte de vue, Seuil, , p. .

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– en raison, aussi, d’un second mariage –, cefut pour aller vers une autre place, sur l’autrerive, et y mourir bientôt, prématurément.

k

Nicole Vedrès était née à Paris le septembre dans une famille de la bourgeoisie intellec-tuelle. Son père, Jules Rais, est bibliothécaire dela Chambre des députés et fin lettré; dans sa jeu-nesse il fut un familier de Verlaine âgé. Sa mère,Ludmila Savitzky, d’origine ukrainienne etaristocratique, est connue comme une éminentetraductrice de l’anglais. Elle a donné en françaisdes œuvres de Virginia Woolf, ChristopherIsherwood, Ivy Compton-Burnett et beaucoupd’autres, au premier rang desquels James Joyce,dont elle traduit Dedalus dès , grâce à FélixFénéon. Enfant, Nicole vit de ses propres yeux,chez sa mère, à Clamart , Ezra Pound et JamesJoyce. (Étonnez-vous, après cela, que ses propresromans ne soient pas toujours d’un accès facile !)

. Épisode relaté dans Point de Paris, Mercure deFrance, , p. .

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Le couple se sépare alors que Nicole n’a quequatre ans. On ne sait pas grand-chose de sesannées d’apprentissage, sinon qu’elle fréquentela très chic École alsacienne puis qu’elle suit desétudes de lettres, d’allemand et… de droit inter-national.

Il semble que le cinéma et l’histoire de l’artsoient devenus très tôt ses passions prépondé-rantes, avec l’écriture. Dans un entretien avecDenise Bourdet, Nicole confie avoir écrit dès saplus tendre enfance : «Ma mère écrivait, monpère écrivait. (…) Écrire, c’est ma seule tradi-tion de famille. »

En revanche, elle n’aura pas publié très préco-cement – en partie à cause de la guerre. Son pre-mier livre, l’album illustré Un siècle d’élégancefrançaise, paraît cependant sous l’occupation, en (elle a trente-deux ans). Plus significative-ment, son premier roman ,Le Labyrinthe ou le

. Denise Bourdet, Encre sympathique, Grasset, ,p. .. Selon Henry Muller, cité par D. Bourdet, unenouvelle de jeunesse aurait paru avant guerre dansla Revue européenne.

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Jardin de sir Arthur, paraît en , en pleineeffervescence germanopratine, grâce à Max-PolFouchet. On remarquera qu’un personnage de ceroman initial se nomme Furstenberg…

Succès d’estime sans plus. On cite parmi lesinfluences Virginia Woolf, Radiguet, Girau-doux. Mais Nicole Vedrès devait connaître sonheure de gloire un an plus tard grâce à son filmde montage très personnel, Paris , quiobtient le prix Jean-Vigo. Ce patient et mali-cieux assemblage d’images d’époque est relevépar un commentaire « corrosif et attendri » (G. Sadoul). Au passage, on note que l’un desassistants de Nicole Vedrès n’est autre que lejeune Alain Resnais.

Nouvelle heure de célébrité au tournant des années -, quand Nicole participe àl’émission télévisée devenue légendaireLectures pour tous, en compagnie de PierreDesgraupes, Pierre Dumayet et Max-PolFouchet. Ce dernier se révèle décidément sonbon génie : après avoir publié son premierroman, il ouvre à Nicole, une dizaine d’annéesplus tard, les portes des studios de la rueCognacq-Jay (Pierre Dumayet précise pour la

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petite histoire qu’il s’agissait du studionuméro ).

Contrairement aux deux Pierre, NicoleVedrès ne s’entretient pas, le mercredi soir, avecun écrivain.Non, elle vient soliloquer à l’écran,elle tient chronique (nous y voilà) « de ce quiavait enchanté sa semaine » (P. Dumayet). Etil faut croire qu’elle sait toucher le cœur etl’esprit des téléspectateurs puisqu’au lendemainde sa mort Pierre Dumayet lui consacre unarticle d’hommage dans un hebdomadairepopulaire, comme s’il s’agissait d’une ex maisauthentique vedette du petit écran .

Cette gloire médiatique, comme on ne disaitpas encore, effraie un peu Nicole. Elle renonceà ses apparitions télévisées vers . On lareconnaissait dans la rue, des solliciteurs laharcelaient, on téléphonait à son domicile pourquémander un passage à Lectures pour tous(le téléphone intempestif, sa hantise. Encore neconnut-elle pas l’ère du «portable » !).

. P. Dumayet, Mon amie Nicole Vedrès, in Télé Joursdu novembre .

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Le cinéma puis la télévision lui apportèrentdonc la notoriété. Mais Nicole ne s’y sentait nià son aise, ni à sa place. C’est de gloire litté-raire qu’elle rêvait.

k

Portrait de Nicole par Max-Pol Fouchet :«… cette mélancolie soudaine qui prenait toutson visage. Grande femme pathétique ettendre.»

Autre portrait (admirable) par MatthieuGaley : «Une grande araigne aux cheveux d’ar-gent, avec un sourire de gosse espiègle qui auraiteu des malheurs. Séductrice, mais aussitôtmaternelle et complice ; je fonds. De ces écorchéesqu’on voudrait câliner, consoler, si cette souf-france nécessaire ne faisait partie de leur être –et de leur charme.Une souffrance qu’on retrouvedans ce qu’elle appelle joliment le “brisé” de sesphrases.» (Journal du juin .)

. Matthieu Galey, Journal ( vol.), Grasset, -

, tome I, p. .

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Pourquoi cette écorchure, pourquoi cettemélancolie, pourquoi cette souffrance ?

Difficile à dire. Chacun a mille motifs d’in-satisfaction ou d’angoisse, on a tous l’embarrasdu choix.

Cependant, le fait que la notoriété soit venueà Nicole Vedrès pour de mauvaises raisons, à sesyeux, et qu’au contraire son œuvre littéraire– surtout romanesque – soit restée quasi ignoréedevait la tarauder douloureusement.

D’une lucidité ravageuse, elle constatait aussique le personnage de Parisienne brillante etdiserte qu’il lui fallait bien jouer, nuisait à lavérité de ses rapports avec autrui. MatthieuGaley relate ce passage d’une lettre de oùNicole, se brocardant elle-même,soupire :«Il fau-drait que je vous voie, mais… mais “la Vedrès”va encore nous empêcher de nous parler.»

Elle tenait tellement à ses romans parcequ’elle y parlait vrai, y exprimait sanscontrainte sa part d’ombre, ses zones profondeset obscures. Les redécouvrira-t-on un jour ?

Les chroniques témoigneraient, elles, de lapart lumineuse de Nicole Vedrès, de la vivacitéet de la chaleur de son intelligence, de l’acuité

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de son regard, de sa malice, de son brio – de soninsolent génie.

Qui dispose des six volumes de chroniques deNicole Vedrès sur sa table de chevet en perma-nence depuis plus de vingt ans, emboîtera sanshésiter le pas de Max-Pol Fouchet qui ose pro-noncer le nom qui brûle les lèvres : « Il y a duMontaigne dans cet écrivain, chez cettefemme. »

Un classique d’aujourd’hui, de toujours.Nicole à sa place, juste à sa place.

Thierry Noroit

. Max-Pol Fouchet, Un jour, je m’en souviens,Mercure de France, , p. .

NOTA – D’aucuns, et jusqu’aux édiles, écriventaujourd’hui Furstemberg, avec un m, ce que Nicolejamais ne fit. Nous avons maintenu l’orthographehabituelle de notre auteur.

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Note sur l’établissement du texte

La présente anthologie est composée de chroniques d’abord publiées dans la revueMercure de France sous la rubrique« Mémoire d’aujourd’hui ». Ces chroniquesfurent recueillies en cinq volumes édités entre et , et aujourd’hui épuisés. Nousreproduisons le texte de la publication envolume, qui fut revu et corrigé par l’auteur.

La préface est extraite de Paris, le…(Mercure de France, ), de même que« … Mais nous sommes nos livres »,« Dialogue des statistiques », « Souvenir deParis », « De Pise à Babel ».

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«Portrait de l’artiste à bicyclette», «Micro-climats», «Contre le souvenir» et «Réouverture»sont extraits de Suite parisienne (id., ).

« Une minute quatorze » est extrait desAbonnés absents (id., ).

«Vient de disparaître» et «Le docteur P.» sontextraits de L’Horloge parlante (id., ).

«La voleuse de cygnes » et «Le valet deSicile », enfin, sont extraits de Point de Paris(id., ).

Un sixième volume de chroniques, Paris e,pareillement épuisé, a été publié au Seuil en, quelques mois avant la mort de l’auteur.Les textes qui le composent n’avaient pasconnu de première publication en revue, NicoleVedrès ayant perdu entre-temps sa rubrique duMercure de France.

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Préface

AU FOND, me dit la voisine, vous avez une vienocturne...

Je n’y avais pas pensé, mais c’est sansdoute vrai. À quoi pourtant s’en est-elle avi-sée ? Ce ne peut être à cette unique soirée de lasemaine qui me voit rentrer un peu aprèsminuit de la Télévision où je tiens unerubrique… Les autres jours, je dîne chez moiet n’en sors pas. Serait-ce donc qu’elle, et lesgens du dessous, du dessus, et de droite et degauche, et ceux de l’immeuble à côté m’enten-dent ? On n’entend pas écrire… Le bruit demes pas alors ? Car il arrive, surtout depuisque sous le titre « Mémoire d’aujourd’hui » jerédige chaque mois une chronique pour leMercure de France, il arrive – mais je suis

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alors en pantoufles ou nu-pieds – que je merelève la nuit, pour une virgule, un tiret, unmeilleur adjectif, plus souvent une invective,un vocatif qui, m’éveillant, me met tout aus-sitôt debout. C’est à tâtons et sans presquedonner de lumière que je vais jusqu’à certainradiateur, tiède l’hiver et frais l’été, sorte depetit autel à Mercure justement où s’écha-faudent livres de témoignages, mémoires,documents, récits vécus, dont je suis désormaiscensée, douze fois par an, rendre compte. Sureux trônent l’inestimable Petit Larousse et ledivin glossaire analogique couleur de laurieret d’or où maintenant je trouve, pour décriresans monotonie cette équipée nocturne, les suc-cédanés convenables : crépuscule, ombre, nyc-tage, ténèbres, sommeil, blanche (nuit), noire(nuit)… Puis, le mot écrit – ou rayé –, laphrase corrigée, et l’étymologie revue, jeretourne à mon lit, convaincue – c’est là untrait commun à tous les somnambules –qu’aucun parfum de l’Arabie ne saurait effa-cer cette encre-là.

Comment en suis-je arrivée à ce point ? Queldiable me poussa, quand Samuel de Sacy me

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proposa cette collaboration, à lui dire oui alorsque je pensais non – puisque je n’avais pas letemps, puisque même les personnages d’unroman que je désespérais d’achever retour-naient, troglodytes, à leur propre préhistoire, àleurs nyctages justement…, puisque j’étaiscomme tous ces gens de plume que la vie peu àpeu déplume, contraints qu’ils sont de s’ébarberdans un second métier, bientôt métamorphoséen troisième, en quatrième – vagues artisanatsdes ondes, de la presse et de la pellicule…Accepter cette chronique… c’était la goutteultime qui fait déborder le vase, le fétu finalsous quoi succombe, et pour jamais, le vaisseaudu désert… Je n’avais plus mes journées…

J’avais encore mes nuits.Et bientôt ce qui aurait dû être corvée, sur-

croît de préoccupation, terreur aussi de ne pastenir le délai, devint inexplicable loisir, délec-table rumination, secrète halte. Il me semblaitque j’avais non pas un sujet à trouver et untexte à fournir, mais une grande chambre videque je pouvais meubler à ma guise, où je fai-sais asseoir, avant de m’endormir, des gensmorts ou vivants, Auguste Comte, un chirur-

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gien esthétique, Friedmann le sociologue etRoland Barthes et l’abbé Pierre ou M. deFouquières. Et les héros aussi des faits divers,ou de la politique. Sur eux – il faudra bienqu’ils me le pardonnent – j’accrochais des élé-ments qui n’avaient, comme on dit, rien àvoir : mes humeurs du jour, mes sentimentsd’autrefois. Il m’arriva de planter des arbresdans cette chambre, d’y faire passer desmétéores, apparaître cet homme du futur dontJean Rostand parfois nous entretient…

Et la nuit déborda sur le jour. Les incidents,menus faits, choses de rien qu’à longueur desemaine je remarquais, et qui eussent dû, nor-malement, me fournir le prétexte à d’autreschroniques, articles, ou simples conversations, jeles mis justement au secret, pour Mémoire, megardant donc d’en parler à mon entourage, leslivres méritants je les cachai jusqu’au jour d’enécrire ou d’en rêver, les bruits ou les odeurs quim’avaient séduite ou bien importunée je lesstockai, tiroir Mercure – gouttelettes d’un vifargent que je me refusais à monnayer.

Délaissant peu à peu le compte rendu desouvrages d’autrui, j’en suis venue à prendre un

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CE e TITRE DU DILETTANTE

A ÉTÉ ACHEVÉ D’IMPRIMER À

EXEMPLAIRES LE OCTOBRE PAR L’IMPRI-MERIE FLOCH, À MAYENNE

(MAYENNE).

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