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GUILLAUME BURIGUSA
ETUDE DES FACTEURS DE RETENTION DESMÉDECINS DANS LA RÉGION DU BAS-SAINT-
LAURENT
Mémoire présentéà la Faculté des études supérieures de l'Université Laval
dans le cadre du programme de maîtrise en epidemiologiepour l'obtention du grade de maître es sciences (M.Se.)
FACULTE DE MEDECINEUNIVERSITÉ LAVAL
QUÉBEC
2006
© Guillaume Burigusa, 2006
Résumé
Les objectifs de cette étude étaient d'évaluer l'association entre le temps de
rétention des médecins dans la région du Bas-Saint-Laurent et : 1) l'origine du médecin, 2)
l'enseignement décentralisé et 3) les incitatifs financiers. Les données ont été recueillies
auprès de 347 médecins par questionnaires auto administrés. Les analyses ont été
restreintes aux données des 228 médecins qui se sont installés dans la région à partir de
1985. Chez les omnipraticiens, une association significative a été observée entre l'origine
des médecins et la rétention (RR ajusté 3,75; p = 0,01). Une association négative mais non
significative a été observée entre les bourses de la RAMQ et la rétention (RR ajusté 0,60;
p = 0,1). Chez les spécialistes, une association non significative a été observée entre la
rétention et les stages en régions à la résidence (RR ajusté 5,56; p = 0,09). Les résultats
suggèrent que des mesures visant à favoriser l'entrée en médecine des candidats originaires
des régions désignées pourraient augmenter la rétention des médecins omnipraticiens dans
ces régions.
Avant-propos
Mes remerciements s'adressent à :
- Dr Michel Labrecque
Vous avez accepté de superviser ce mémoire malgré vos nombreuses occupations.
La qualité et la pertinence de vos suggestions, de vos commentaires, ainsi que votre
disponibilité ont largement contribué à la réussite de ce projet. Je vous adresse mes vifs
remerciements.
- Dr Jacques Girard
Vous m'avez proposé ce sujet et avez beaucoup contribué à la conception et à la
réalisation de ce projet. C'est une occasion de vous adresser mes remerciements les plus
sincères.
-Mr Paul-Marie Bernard
Votre présence dans mon jury me fait honneur. J'ai toujours été impressionné par
votre compétence, votre rigueur dans le travail, votre disponibilité, votre courtoisie ainsi
que votre sens de l'humour. Veuillez trouver ici l'expression de mon respect.
- Dr Rénald Bergeron, Dre Suzanne Gagnon et Ray Bustinza
Je me souviendrai toujours de l'excellent climat de travail qui caractérisait notre
équipe de recherche.
Dédicace
Ce mémoire est dédié :
À ma chère conjointe Céline :
Tes encouragements m'ont guidé tout au long de la réalisation du présent travail.
Ton soutien tant moral que matériel m'a rendu la vie agréable. Merci.
À mes chères filles Malaïka et Gaëlle : votre présence me remplit de joie au quotidien.
À mon fils Olivier
À la mémoire de mon père Firmin
À ma mère, à tous mes frères et sœurs ainsi qu'à mes nièces et neveux : merci pour votre
attachement à mon égard.
À ma belle famille.
Table des matièresRésumé iAvant-propos iiDédicace iiiTable des matières ivListe des tableaux vListe des figures viINTRODUCTION 1CHAPITRE I : REVUE DE LA LITTÉRATURE 4
1.1. Recrutement des médecins en régions rurales 41.1.1. Au Canada 51.1.2. Aux États-Unis 6
1.2. Rétention des médecins en régions rurales 71.2.1. Différentes approches dans l'étude de la rétention 71.2.2. Facteurs de rétention 9
CHAPITRE II : MÉTHODOLOGIE 122.1. Objectifs 122.2. Méthodologie 13
2.2.1 Plan d'étude et population 132.2.2 Sources de données 13
2.2.2.1 Base de données de l'Agence de la santé et des services sociaux du Bas-Saint-Laurent 142.2.2.2. Annuaire du collège des médecins du Québec 142.2.2.3. Données d'enquête 14
2.2.3. Les variables à l'étude 152.2.4. Stratégie d'analyse 16
2.2.4.1. Représentativité des répondants 162.2.4.2 Caractéristiques des répondants 162.2.4.3 Facteurs associés à la rétention des médecins dans le Bas-Saint-Laurent... 17
CHAPITRE III : RÉSULTATS 193.1. Données générales 193.2. Représentativité des répondants 193.3. Caractéristiques des médecins participants 20
3.3.1. Caractéristiques sociodémographiques des médecins 213.3.2. Caractéristiques des médecins selon la formation 223.3.3. Caractéristiques des médecins selon les incitatifs financiers et les dettes 233.3.4. Caractéristiques des conjoints des médecins 25
3.4. Facteurs associés au temps de rétention 263.4.1. Chez les omnipraticiens 263.4.2. Chez les spécialistes 28
CHAPITRE IV : DISCUSSION 31CONCLUSION 38BIBLIOGRAPHIE 40
Liste des tableauxTableau 1. Caractéristiques sociodémographiques des médecins 22Tableau 2. Caractéristiques des médecins suivant la formation 23Tableau 3. Caractéristiques des médecins selon les incitatifs financiers et les dettes 24Tableau 4. Caractéristiques des conjoints des médecins 25Tableau 5. Mesures d'association brutes entre la rétention des médecins omnipraticiens
dans le Bas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les stages de médecine familiale enrégions à l'externat, les stages de résidence en régions, les bourses de la RAMQ, ainsique les primes d'installation 27
Tableau 6. Mesures d'association ajustées entre la rétention des médecins omnipraticiensdans le Bas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les stages de médecine familiale enrégions à l'externat, les stages de résidence en régions, les bourses de la RAMQ, ainsique les primes d'installation 28
Tableau 7. Mesures d'association brutes entre la rétention des médecins spécialistes dans leBas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les bourses de la RAMQ, les bourses deformation spécialisée, les primes d'installation, les stages de médecine familiale enrégions à l'externat ainsi que les stages de résidence en régions 29
Tableau 8. Mesures d'association ajustées entre la rétention des médecins spécialistes dansle Bas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les stages de médecine familiale enrégions à l'externat, les stages de résidence en régions, les bourses de la RAMQ, ainsique les primes d'installation 30
Liste des figuresFigure 1. Courbes représentant la rétention des répondants et des non-répondants dans la
région du Bas-Saint-Laurent 20
INTRODUCTION
Le problème de la pénurie des médecins dans certaines régions et ses répercussions
sur le recrutement et la rétention de l'effectif médical sont de plus en plus reconnus. Aux
États-Unis par exemple, 20% de la population réside en milieu rural alors que seulement
9% des médecins y pratiquent (Geyman et coll., 2000 ; Rabinowitz et coll., 1999b). Au
Canada, la situation n'est guère meilleure puisque le tiers de sa population vit dans les
régions rurales alors que seulement 12,8% des médecins de famille et 3% des médecins
spécialistes y pratiquent (Stratton et coll.,1991 ; Szafran et coll., 2001). Cette situation crée
un problème majeur d'accessibilité des soins médicaux pour les populations locales. Aux
États-Unis et au Canada, plusieurs études ont tenté de comprendre ce problème et de
rechercher des solutions.
Pour comprendre la mauvaise répartition des médecins, de nombreuses équipes de
recherche ont orienté leurs efforts vers la décision d'installation initiale, soit, en d'autres
termes, le problème de recrutement (Brazeau et coll., 1990 ; Champion et Olsen, 1971 ;
Cordes, 1978 ; Costa et coll., 1996 ; Hutten-Czapski et Thurber, 2002 ; Kassebaum et
Szenas, 1991). Certains facteurs sont reconnus pour avoir une influence sur le recrutement,
soit le lieu d'origine du médecin, son sexe, le lieu d'origine de son conjoint, le lieu d'études
médicales pré et post-graduées, le domaine de spécialisation ainsi que les incitatifs
financiers.
D'autres études se sont penchées sur le problème de la rétention ; c'est-à-dire si les
médecins restent ou quittent leur lieu d'installation initiale. Ces études ont démontré que
l'échec de la rétention des médecins dans les régions mal desservies est souvent la
principale cause de pénurie des médecins dans ces régions (Cutchin, 1997b). Les
principales variables de la rétention sont le lieu de l'enfance, le lieu d'études prémédicales
et les stages en milieu rural (Horner et coll., 1993 ; Pathman et coll., 1992 ; Rabinowitz et
coll., 1999b ; Rabinowitz, 1993).
À la lumière des résultats de ces études, diverses stratégies de recrutement et de
maintien des médecins dans les régions ont été développées aussi bien dans les facultés de
médecine qu'au niveau des différents paliers gouvernementaux. Par exemple, certains
programmes ont privilégié comme stratégie la sélection prioritaire des candidats originaires
des régions rurales au moment de l'admission en médecine (Moores et coll., 1998) ;
d'autres ont axés le déplacement d'une partie de la formation clinique au sein de
communautés rurales. Le but de cette formation en milieu rural était non seulement de
susciter l'intérêt des étudiants envers la pratique rurale (notamment en dissipant certains
mythes) (Szafran et coll., 2001), mais aussi de mieux les préparer aux particularités de ce
type de pratique (Massicotte, 1989 ; Whiteside et Mathias, 1996). Enfin, des incitatifs
financiers (bourses d'études, frais d'installation, frais de formation continue)
accompagnaient souvent cette démarche.
Au Québec, pour tenter de régler le problème de pénurie dés médecins dans
certaines régions éloignées et/ou isolées, il existe des incitatifs financiers notamment sous
forme de bourses d'études et de primes d'installation (Ministère de la santé et services
sociaux, 1999). De plus, depuis 1985, le Ministère de la santé et services sociaux a
développé un programme de décentralisation de l'enseignement en régions, avec des stages
cliniques d'une durée de un à deux mois. En 1990, le programme a été étendu à la résidence
en médecine familiale, avec possibilité de deux mois de stage. Par ailleurs, un budget
spécifique a été alloué pour supporter ce programme. Depuis l'instauration de ce
programme axé sur la décentralisation de l'enseignement il y a quinze ans, aucune
recherche n'a été entreprise pour évaluer l'impact réel de ce programme sur le recrutement
et la rétention des médecins en régions éloignées et/ou isolées au Québec. Les objectifs de
cette étude étaient d'évaluer l'association entre la rétention des médecins dans la région du
Bas-Saint-Laurent et les facteurs de rétention suivants : l'origine du médecin, les stages de
médecine familiale en régions à l'externat, les stages de résidence en régions, les bourses de
la RAMQ, les bourses de formation spécialisée et les primes d'installation.
Les données analysées dans le cadre de ce mémoire ont été recueillies lors d'une
plus vaste étude conduite en partenariat entre l'Agence de santé du Bas-Saint-Laurent et les
départements de médecine familiale et de médecine sociale et préventive de l'Université
Laval, et ayant pour but d'identifier les facteurs de rétention des médecins dans le Bas-
Saint-Laurent.
CHAPITRE I : REVUE DE LA LITTERATURE
1.1. Recrutement des médecins en régions rurales
La majorité des études visant à comprendre la mauvaise répartition des médecins
dans les régions rurales ont porté sur le problème du recrutement (Brazeau et coll., 1990 ;
Champion et Olsen, 1971 ; Cordes, 1978 ; Costa et coll., 1996 ; Easterbrook et coll., 1999 ;
Hutten-Czapski et Thurber, 2002 ; Kassebaum et Szenas, 1991).
La plupart des études portant sur le recrutement sont basées, tant aux États-Unis
qu'au Canada, sur une définition démographique de la ruralité, le critère retenu étant celui
d'agglomérations de moins de 10 000 habitants (Brazeau et coll., 1990 ; Chaytors et
Spooner, 1998 ; Easterbrook et coll., 1999 ; Hutten-Czapski et Thurber, 2002 ; Kassebaum
et Szenas, 1991). Cependant, dans certaines études évaluatives sur la performance de
programmes visant à recruter des médecins en régions rurales, le terme rural a été utilisé
pour des communautés de moins de 25 000 habitants ou tout simplement non
métropolitaines (Pathman et coll., 1994 ; Stratton et coll., 1991). Or, comme le souligne
Leduc (1997), cette définition de la ruralité n'est pas suffisante car elle cache des réalités
souvent différentes. En effet, les petites agglomérations proches des grandes métropoles
souffrent moins de pénurie en médecins comparativement aux agglomérations plus
éloignées des grands centres urbains. Cet auteur suggère d'utiliser six critères pour mesurer
le degré de ruralité d'une localité, afin d'avoir un meilleur point de départ pour des
comparaisons entre les études. Ces critères sont les suivants : la distance d'un grand centre
régional de référence, la distance d'un centre de référence de base, le bassin de population,
le nombre de médecins généralistes, le nombre de médecins spécialistes et la présence d'un
hôpital de soins de courte durée.
Les études sur le recrutement ont tenté d'identifier les facteurs qui influencent
l'installation des médecins dans les régions rurales ou mal desservies. Certaines se sont
intéressées sur l'origine rurale des étudiants en médecine (Fryer et coll., 1997 ; Kassebaum
et Szenas, 1991 ; Rabinowitz et coll., 2001 ; Rosenthal et coll., 1998), alors que d'autres
étudiaient l'influence du lieu des études médicales ainsi que d'autres facteurs (Brazeau et
coll., 1990 ; Cordes, 1978 ; Hutten-Czapski et Thurber, 2002 ; Rabinowitz, 1993 ; Roberts
et coll., 1991).
1.1.1. Au Canada
Szafran et coll. (2001) ont réalisé une étude visant à examiner les facteurs
influençant le choix du lieu de pratique des diplômés en médecine familiale d'Alberta. Les
participants, au nombre de 702, ont répondu à un questionnaire postal sur les facteurs ayant
influencé le choix de leur lieu de pratique actuel. Le type de pratique, la rémunération, les
efforts de la collectivité dans le recrutement, les besoins en services médicaux de la région
et le remboursement des dettes d'études exerçaient une influence considérable sur les
décisions des médecins de famille de pratiquer en milieu rural. Les autres facteurs de
moindre influence dans le choix du lieu de pratique étaient l'influence du conjoint ou de la
conjointe et la proximité des membres de la famille.
Moores et coll. (1998) ont décrit un programme visant à élargir et à enrichir les
expériences éducatives en milieu rural en Alberta. Ce programme de stages décentralisés
consiste en rotations cliniques en milieu rural durant les études pré-graduées et graduées en
médecine familiale, ainsi qu'une formation supplémentaire d'un an pour l'acquisition de
compétences spécifiques à la pratique rurale. Au moment de la rédaction de l'article (1998),
l'instauration du programme était trop récente pour juger de son efficacité à long terme,
mais les résultats préliminaires étaient encourageants puisque 46 des 49 participants avaient
établi leur pratique en milieu rural.
Hutten-Czapski et Thurber (2002) ont étudié le lien entre le lieu de la formation
postdoctorale et le pourcentage des diplômés exerçant en milieu rural, deux ans après avoir
obtenu leur diplôme. La différence entre les universités était statistiquement significative, le
programme de résidence en médecine familiale de l'Université Mémorial de Terre-Neuve
ayant formé 46% alors que le programme de médecine familiale de l'Université de Toronto
n'en avait formé que 4,6%. Quant à lui, le programme de résidence en médecine familiale
de l'Université Laval a formé 41,7% de médecins ruraux. Seules les variables sexe, âge et
lieu de formation pré-doctorale des diplômés ont été analysées. Il faudrait noter que des
variables potentiellement confondantes comme l'origine des médecins et les stages en
régions n'ont pas été prises en compte. Malheureusement, ces résultats n'apportent pas
d'éléments pratiques pouvant aider à améliorer le recrutement des médecins dans les
régions rurales.
1.1.2. Aux Etats-Unis
Une étude similaire à celle de Hutten-Czapski et Thurber a été réalisée en 1991 par
Rosenblatt et coll. (1992). Le but de l'étude était d'examiner les différences dans la
« production » de médecins ruraux à travers les facultés de médecine aux États-Unis, avec
l'avantage ici d'explorer les raisons. Plus de 570 000 médecins ayant gradué entre 1976 et
1985 dans 121 facultés de médecine ont fait partie de l'étude. La fréquence moyenne de
localisation rurale pour cette période de dix ans était de 12,6%. Les facultés de médecine
variaient considérablement quant à leur pourcentage de finissants embrassant une carrière
médicale rurale (de 2,3% à 41,2%). Les spécialités de première ligne, la médecine familiale
en tête, formaient plus de médecins ruraux. Contrairement à l'étude de Hutten-Czapski et
Thurber (2002), la différence entre les sexes était significative (toutes spécialités
confondues) avec respectivement chez les hommes et les femmes 13,8% et 8,8% de
médecins ruraux. Durant la période couverte par cette étude, la proportion des femmes
parmi les étudiants en médecine n'était que de 23%. L'auteur se demandait si la
féminisation croissante des études médicales ne pourrait pas aggraver le problème de
pénurie des médecins en régions éloignées. Au niveau des caractéristiques des facultés de
médecine, l'association la plus significative avec la pratique rurale était la ruralité de l'état
dans lequel elle était située. D'après l'auteur, cette association peut être expliquée du fait
que les médecins ont tendance à pratiquer tout près du lieu où ils ont été formés.
Dans une étude portant sur plus de cinq milles étudiants de plusieurs facultés de
médecine, Kassebaum et Szenas (1993) ont montré que les étudiants d'origine rurale
avaient quatre fois plus de chances de prévoir pratiquer en milieu rural. D'autre part, les
étudiants qui choisissaient la pratique rurale avaient tendance à se trouver dans les
spécialités générales, principalement en médecine familiale. Cependant, la limite de cette
étude réside dans le faible nombre d'étudiants d'origine rurale dans la cohorte.
1.2. Rétention des médecins en régions rurales
1.2.1. Différentes approches dans l'étude de la rétention
D'après Cutchin (1997b), la rétention des médecins est difficile à définir. Cet auteur
s'interroge sur le temps nécessaire pour juger qu'il y a ou non rétention. Dans le même
ordre d'idées, Pathman et coll. (1992) estiment que la meilleure définition de la rétention
est celle qui tient compte de la durée (mois ou années) pendant laquelle le médecin reste
dans une région rurale. Cette définition permet de répondre à la question : « Quels sont les
facteurs qui influencent le temps de rétention dans une région donnée? », plutôt que de
répondre à la question « Quels facteurs influencent la probabilité que le médecin reste un an
(deux, trois, quatre ans ou plus) dans telle région? ».
L'étude des facteurs de rétention est complexe. Pathman et coll. (1994) ont fait une
critique méthodologique des études portant sur la rétention des médecins dans les régions
rurales. À cet égard, ils distinguent quatre approches méthodologiques dans l'étude de la
rétention : les études où on demande aux médecins pourquoi ils quittent ou restent dans les
régions rurales, les études où on demande les facteurs de satisfaction et de non satisfaction
vis-à-vis de la pratique rurale, les études où on cherche à trouver par inférence statistique
des associations entre certains facteurs et la rétention et enfin les études qualitatives
approfondies.
La première approche consiste à demander aux médecins « ruraux » pourquoi ils ont
quitté ou pourquoi ils sont restés en pratique rurale. Selon ces auteurs, les réponses qu'on
obtient peuvent être exactes dans beaucoup de situations. Cependant, ces réponses peuvent
dérouter dans la mesure où les médecins peuvent ne pas reconnaître avec exactitude les
facteurs qui provoquent leur départ ou leur désir de rester. En se basant sur des théories de
la psychologie, en particulier la théorie de l'attribution, les auteurs suggèrent que les
humains comprennent partiellement les raisons de leurs comportements et qu'il y a des
biais dans cette compréhension. Par exemple, ils affirment que les gens ont tendance à
valoriser leurs comportements lorsqu'ils les jugent positifs et à blâmer le contexte lorsque
ces comportements sont négatifs. Ainsi, selon eux, il ne serait pas surprenant que les
médecins, lorsqu'ils s'installent en région rurale (« comportement positif») disent qu'ils le
font pour influencer (positivement) la communauté et travailler avec des gens dans le
besoin. Parallèlement, on pourrait s'attendre à ce que les médecins qui quittent ces régions
blâment les facteurs extérieurs comme le manque de support professionnel, la surcharge de
travail, la mauvaise rémunération ou d'autres raisons. Les auteurs concluent que cela ne
veut pas dire que les médecins sont totalement inconscients des facteurs qui affectent leur
rétention, mais plutôt qu'ils peuvent surestimer l'importance de certains facteurs, en ne
reconnaissant pas l'importance de certains autres.
La deuxième approche dans l'étude de la rétention consiste à demander aux
médecins les domaines de satisfaction et d'insatisfaction concernant la pratique rurale, en
présumant que les domaines de satisfaction poussent à la rétention tandis que ceux de
l'insatisfaction poussent à quitter. Selon ces auteurs, il faut tenir compte de l'importance
que représente chaque domaine d'insatisfaction pour les médecins en tant qu'individus.
Cependant, les auteurs estiment que les études de la satisfaction peuvent être utiles comme
points de repère pour l'amélioration de la pratique afin de favoriser éventuellement le
recrutement de nouveaux médecins.
La troisième approche consiste à chercher par inférence statistique des associations
entre des facteurs donnés et la rétention. D'après ces auteurs, ce sont les études les plus
solides. L'approche consiste à recueillir de l'information auprès d'un groupe de médecins
sur des facteurs potentiellement explicatifs de la rétention et d'identifier par inférence
statistique, ceux qui sont statistiquement associés à la rétention. L'utilisation d'analyses
multivariées permet d'évaluer l'association entre un facteur et la rétention, tout en
contrôlant divers facteurs potentiellement confondants.
Enfin, la quatrième approche est l'étude qualitative en profondeur où on recueille
beaucoup d'informations à partir d'un nombre restreint de sujets. Selon ces auteurs, cette
approche est idéale pour décrire les joies et les problèmes vécus par les médecins ruraux,
leur compréhension des raisons de rétention, ainsi que pour générer des hypothèses sur les
raisons qui expliquent pourquoi les médecins quittent ou restent dans leur pratique.
1.2.2. Facteurs de rétention
Selon Cutchin (1997b), le succès de la rétention dépend de la réussite de
l'intégration du médecin. Cette intégration est définie selon trois domaines : le médecin en
tant qu'individu, la communauté médicale locale et la communauté locale au sens large.
Dans une étude portant sur la stabilité des médecins au CLSC de Forestville (au Québec),
Massicotte (1989) a constaté que l'intégration à la communauté était un facteur important
de stabilité.
Dans une cohorte de 1947 médecins de première ligne suivie durant neuf ans en
Caroline du Nord, Horner et coll. (1993) ont montré que la durée de la première pratique
était similaire quelque soit la zone géographique (rurale ou urbaine) et était en moyenne de
4,5 ans. Les facteurs prédictifs de la rétention en milieu rural étaient reliés aux
caractéristiques de la pratique. En effet, la pratique en « solo » ou en « partnership »
donnait la meilleure rétention, comparativement à la pratique de groupe.
Pathman et coll. (1992) ont suivi 412 médecins de première ligne (médecine
familiale, médecine interne, pédiatrie et médecine générale) à travers les États-Unis. Le
tiers de ces médecins avaient des obligations de service envers le « National Heath Service
Corps » (NHSC) à travers un programme de bourses d'étude. Au bout de huit ans de suivi,
le taux de rétention était plus élevé dans le groupe non-NHSC comparativement au groupe
NHSC (39% vs 12%). Ceci a démontré l'échec du programme sur la rétention à long terme,
la majorité des médecins ayant quitté les régions rurales dès la fin de leur obligation de
service.
10
Rabinowitz (1993) a réalisé une étude de cohorte rétrospective auprès de 3 414
médecins diplômés entre 1978 et 1993 au Jefferson Médical Collège (Philadelphie). Le but
de l'étude était d'identifier les facteurs prédictifs de la pratique rurale en première ligne
(médecine familiale, médecine interne générale, et pédiatrie générale) et de déterminer les
composantes du « Physician Shortage Area Program » (PSAP)1 influençant la pratique
rurale. Les facteurs étudiés étaient les facteurs démographiques (le sexe, le lieu de
l'enfance, le niveau éducationnel du père et de la mère, l'âge d'entrée à la faculté de
médecine), les études pré-médicales, le plan de carrière, les caractéristiques du programme
de formation, ainsi que les considérations économiques. L'auteur a conclu que les
principaux facteurs prédictifs de l'installation en milieu rural étaient : plan de carrière en
médecine familiale, appartenance au groupe PSAP, être dans le programme des bourses du
NHSC, le sexe masculin, et avoir passé une année de pratique élective en médecine
familiale rurale en tant que résident senior. La rétention en milieu rural quant à elle était
influencée par une enfance en milieu rural, l'appartenance au groupe PSAP, une année de
pratique élective de médecine familiale en milieu rural et des études pré-médicales en
milieu rural. Pour les diplômés du groupe PSAP, une année de pratique élective rurale,
ainsi que le programme de bourses du NHSC se révélaient être des facteurs prédictifs de la
pratique rurale. Fait intéressant, les étudiants qui n'étaient pas dans le groupe PSAP mais
étaient d'origine rurale (et avaient un plan de carrière en médecine familiale) avaient un
niveau de pratique rurale sensiblement égal aux PSAP. Ceci démontre l'importance de
l'admission sélective dans le programme PSAP.
En Australie, deux études qualitatives ont été menées par Hays et coll. (2003) et
Mclsaac et coll. (2000) pour connaître les raisons qui ont poussé les médecins à quitter ou à
rester dans les régions rurales, respectivement. Les auteurs sont arrivés aux mêmes
conclusions. D'après eux, la rétention résulte de l'interaction entre un certain nombre de
facteurs positifs et de facteurs négatifs, interrompue par l'apparition de facteurs
déclenchants ou « trigger factors », qui accélèrent la décision de quitter. Parmi les facteurs
1 Le PSAP est un programme visant à accroître le nombre de médecins de famille ruraux. Il procèdepar une admission sélective des étudiants ayant grandi en milieu rural et manifestant la fermeintention d'y exercer. Le programme octroie une aide financière additionnelle, un suivi régulier par
I l
positifs, on retrouve la qualité de la vie, la diversité de la pratique, la qualité de la relation
avec les patients. Parmi les facteurs négatifs, on retrouve l'isolement professionnel, le
manque de support professionnel, la surcharge de travail. Quant aux facteurs qui accélèrent
la décision de quitter (trigger factors), on retrouve essentiellement le problème de
scolarisation des enfants quand ils arrivent à l'école secondaire et les conflits avec les
collègues.
Le problème des facteurs qui accélèrent la décision de quitter a aussi été évoqué par
Massicotte (1989). Les conflits avec les collègues ont été parfois le facteur qui a incité les
médecins de Forestville à quitter. Scammon et Williams (1994) ont évoqué le problème des
possibilités de carrière pour les conjoints des médecins et de scolarisation pour les enfants.
Bilodeau (1986) suggère que la stabilité des jeunes médecins serait dépendante de la
possibilité réelle pour le conjoint de poursuivre une carrière professionnelle. Mongeau et
coll. (1994) ont montré qu'un plus grand nombre de conjoints des omnipraticiens qui
avaient quitté le Bas-Saint-Laurent semblaient vouloir poursuivre une carrière
professionnelle que ceux qui étaient restés.
des conseillers, eux-mêmes médecins de famille, et permet aux étudiants de faire des stages enmilieu rural (Roberts et coll., 1991).
CHAPITRE II : METHODOLOGIE
2.1. Objectifs
L'objectif général de l'étude a été d'évaluer les facteurs de rétention des médecins
omnipraticiens et spécialistes dans la région socio-sanitaire du Bas-Saint-Laurent de 1985 à
juin 2003.
Les objectifs spécifiques ont été :
Évaluer l'association entre le temps de rétention dans le Bas-Saint-Laurent et
l'origine du médecin.
Évaluer l'association entre le temps de rétention dans le Bas-Saint-Laurent et
l'enseignement décentralisé : stages de médecine familiale en région à l'externat, stages en
région à la résidence.
Évaluer l'association entre le temps de rétention dans le Bas-Saint-Laurent et les
incitatifs financiers suivants : bourses de la RAMQ, bourses de formation spécialisée,
primes d'installation.
13
2.2. Méthodologie
2.2.1 Plan d'étude et population
II s'agit d'une étude de cohorte rétrospective. La population sur laquelle a porté
l'étude est l'ensemble des médecins omnipraticiens et spécialistes qui se sont installés dans
la région socio-sanitaire du Bas-Saint-Laurent à partir de janvier 1985 et y sont restés
jusqu'à la fin de juin 2003 ou qui ont quitté cette région durant cette période. De cette
population ont été exclus les médecins qui ont pratiqué dans la région à titre de médecins
dépanneurs. Les médecins qui se sont installés dans la région avant janvier 1985 ont été
exclus de l'étude pour éviter un important biais de sélection. En effet, l'Agence de
développement de réseaux locaux de santé et de services sociaux du Bas-Saint-Laurent tient
un registre des effectifs médicaux à jour depuis 1985. Les médecins qui se sont installés
dans la région et qui ont quitté avant janvier 1985 ne sont pas répertoriés. Par conséquent,
en incluant dans l'étude les médecins qui se sont installés dans la région avant janvier 1985
et qui y étaient encore après cette date, on aurait introduit un important biais de sélection
puisque leurs collègues qui ont quitté n'auraient pas été représentés.
2.2.2 Sources de données
Les données analysées dans le cadre de ce mémoire ont été recueillies lors d'une
plus vaste étude conduite en partenariat entre l'Agence de santé du Bas-Saint-Laurent et les
départements de médecine familiale et de médecine sociale et préventive de l'Université
Laval. Cette étude avait pour but d'identifier les facteurs de rétention des médecins dans le
Bas-Saint-Laurent. Nous avons eu accès à une banque de données construite à partir des
informations recueillies lors de cette étude. Ces données ont été colligées à partir de trois
sources.
14
2.2.2.1 Base de données de l'Agence de la santé et des services sociaux du Bas-Saint-Laurent
La base de données de l'Agence de la santé et des services sociaux (anciennement
Régie Régionale) du Bas-Saint-Laurent comporte un certain nombre de renseignements sur
tous les médecins qui se sont installés dans la région à partir de 1985 et sur ceux qui se sont
installés avant 1985 et qui y sont restés durant une certaine période par la suite. Les données
compilées sont entre autres le nom et prénom, la date de naissance, le numéro du permis de
pratique, la date d'arrivée dans la région, la date de départ, le cas échéant, et l'établissement
de pratique.
2.2.2.2. Annuaire du collège des médecins du Québec
L'annuaire du Collège des médecins du Québec a été utilisé pour identifier les
adresses de pratique des médecins participant à l'étude. Cet annuaire était indispensable
pour les médecins qui avaient déjà quitté la région du Bas-Saint-Laurent au moment de la
cueillette des données.
2.2.2.3. Données d'enquête
Un questionnaire a été construit afin de tenir compte des facteurs reconnus dans la
littérature comme facteurs influençant la rétention des médecins dans les régions rurales.
Outre les données socio démographiques pertinentes, des questions portant sur les études
médicales, les stages, les incitatifs financiers, les perceptions sur la pratique dans la région
ont aussi été posées. La validation du questionnaire a été effectuée auprès de dix médecins
de Baie-Comeau (Québec) autant sur le contenu que sur la qualité. Les commentaires et
suggestions formulés par ces médecins ont été pris en compte lors de la confection de la
version finale du questionnaire. Le questionnaire a été envoyé par la poste, à partir des
adresses trouvées dans l'annuaire du collège des médecins. Cependant les répondants
avaient la possibilité de répondre par Internet ou par téléphone. Des mesures strictes ont été
prises afin d'assurer la confidentialité des données. Chaque médecin avait un mot de passe
personnel qui lui permettait de remplir et envoyer le questionnaire par Internet. Par ailleurs,
en dehors des membres de l'équipe de recherche, personne ne pouvait avoir accès à des
15
informations qui auraient pu lui permettre d'identifier l'identité du répondant. Deux rappels
par courriel et par téléphone ont été faits aux médecins qui n'avaient pas répondu au premier
appel.
2.2.3. Les variables à l'étude
La variable dépendante principale a été le temps de rétention dans la région du Bas-
Saint-Laurent (nombre de mois passés dans la région à partir de la date d'arrivée jusqu'à la
date de départ ou jusqu'au 30 juin 2003).
Les variables indépendantes principales ont été : l'origine du médecin (Bas-Saint-
Laurent, autre région désignée, région intermédiaire, région centrale/universitaire, extérieur
du Québec, indéterminée), les stages de médecine familiale en régions à l'externat (oui ou
non), les stages de résidence en régions (oui ou non), les bourses de la RAMQ (aucune, une
année, deux années, trois années, quatre années et plus), les bourses de formation spécialisée
(aucune, une année, deux années, plus de deux années), ainsi que les primes d'installation
(aucune, une année, deux années, plus de deux années).
Les variables indépendantes d'ajustement ont été : le sexe du médecin (homme,
femme), l'âge au moment de l'installation (calculé à partir de la date de naissance et de la
date d'arrivée dans la région), le statut matrimonial (célibataires, mariés, conjoints de fait,
séparés), la présence d'enfants (pas d'enfants, un enfant ou plus), l'université de formation
médicale (Laval, Montréal, Sherbrooke, McGill, autre), l'université de formation en
résidence (Laval, Montréal, Sherbrooke, McGill, Canada hors Québec ou États-Unis, autre
pays), les dettes d'étude (pas de dettes, de 10 000 à moins de 20 000$, 20 000 à moins de
30 000$, 30 000 à moins de 40 000$, 40 000 à moins de 50 000$, 50 000$ et plus), l'origine
du conjoint (Bas-Saint-Laurent, autre région désignée, région intermédiaire, région
centrale/universitaire, extérieur du Québec, indéterminée), la scolarité du conjoint (collégial,
premier cycle universitaire, deuxième cycle universitaire, troisième cycle universitaire,
primaire ou secondaire, autre), la profession du conjoint (médecine générale, médecine
spécialisée, à la maison, autre) et le type de MRC du lieu de pratique (rural ou urbain).
16
Certaines variables présentes dans la banque de données n'ont pas été utilisées
comme variables d'ajustement. Il s'agit de variables portant sur la perception des médecins
sur le rôle qu'aurait exercé un facteur donné sur leur décision de rester ou de quitter la
région (sur une échelle de Likert : très positif, assez positif, neutre, plutôt négatif, très
négatif). Il s'agit entre autres du paiement des dettes, la rémunération différenciée, le style
de vie rural, les loisirs, le climat, les caractéristiques géographiques, la carrière du conjoint,
le coût de la vie, l'éducation des enfants, les divertissements, la charge de travail. Ce sont
des facteurs très importants mais dont l'influence est idéalement mise en évidence dans les
études qualitatives approfondies.
2.2.4. Stratégie d'analyse
2.2.4.1. Représentativité des répondants
Dans un premier temps, afin de vérifier si les médecins répondants étaient
représentatifs de toute la population des médecins qui pratiquaient ou qui ont pratiqué dans
le Bas-Saint-Laurent pendant la période de l'étude, nous avons comparé la distribution de
certaines variables du groupe de répondants et du groupe de non-répondants à l'aide du test
du chi-carré pour la variable catégorielle « sexe du médecin » et du test t de Student pour la
variable continue « âge au moment de l'installation dans le Bas-Saint-Laurent ». Pour la
variable « temps de rétention », nous avons appliqué les tests de Wilcoxon et du log-rank.
Nous avons également estimé les courbes de survie des deux groupes selon la méthode de
Kaplan-Meir.
2.2.4.2 Caractéristiques des répondants
Les caractéristiques personnelles des répondants ont été présentées dans des
tableaux de fréquence. Tous les résultats ont été présentés selon deux groupes, soit les
omnipraticiens et les spécialistes.
17
2.2.4.3 Facteurs associés à la rétention des médecins dans le Bas-Saint-Laurent
Pour répondre aux objectifs explicatifs de notre étude, nous avons restreint nos
analyses statistiques à la population de médecins omnipraticiens et spécialistes qui se sont
installés dans le Bas-Saint-Laurent à partir de 1985.
Le modèle des taux proportionnels de Cox a été utilisé pour évaluer l'association
entre les variables indépendantes principales et la rétention dans le Bas-Saint-Laurent.
Comme la validité du modèle de Cox implique que le rapport de risque soit constant dans le
temps, nous avons vérifié que l'hypothèse de proportionnalité était respectée pour toutes les
associations testées dans nos trois modèles explicatifs. Pour ce faire, deux méthodes ont été
utilisées. La première vérifie graphiquement le parallélisme du logarithme de la fonction de
survie pour chaque strate de la variable indépendante et la seconde introduit un terme
d'interaction entre le logarithme de la durée de suivi et la variable indépendante.
L'hypothèse de proportionnalité était respectée pour toutes les variables étudiées.
L'étape suivante a été de vérifier s'il n'y avait pas de problème de multicolinéarité
entre les variables indépendantes. Les outils diagnostics utilisés ont été la tolérance (TOL)
et le facteur d'inflation de la variance (VIF). Le problème de multicolinéarité était suspecté
pour un VIF supérieur à 10 et un TOL inférieur à 0,10.
Ces analyses ont été faites séparément chez les omnipraticiens et les spécialistes
pour toutes les variables à l'exception des bourses de formation spécialisée qui n'étaient
pertinentes que chez les spécialistes. Des analyses univariées ont d'abord été réalisées pour
les variables indépendantes principales et les variables d'ajustement. Au niveau des
variables catégorielles à plusieurs niveaux, nous avons procédé à des regroupements quand
cela était possible (pour éviter des regroupements artificiels avec des catégories à niveau de
risque de rétention différent). Par ailleurs, étant donné que tous les médecins n'avaient pas
des conjoints, certaines variables d'ajustement avaient des valeurs manquantes
structurelles : origine du conjoint, scolarité du conjoint ainsi que la profession du conjoint.
Pour toutes ces variables, nous avons utilisé une variable indicatrice. Les analyses
univariées avaient pour but de mesurer le risque relatif brut de rétention dans le Bas-Saint-
IX
Laurent pour les variables indépendantes principales. En ce qui concerne les variables
d'ajustement, le but était de vérifier si elles étaient significativement ou non associées à la
rétention dans la région. Nous nous sommes appuyés sur le test de Wald et le test du
rapport de vraisemblance. La signification statistique était fixée au seuil de 5%. Le respect
de la condition de proportionnalité a été vérifié pour chacune des variables indépendantes et
d'ajustement. Il était prévu de recourir à une variable indicatrice permettant de faire des
analyses stratifiées dans le temps à chaque fois que la condition de proportionnalité ne
serait pas respectée.
La mesure d'association est le « hazard ratio » qui peut être interprété comme un
risque relatif (RR). Cette mesure représente le rapport du risque de rester dans la région
chez les médecins ayant le facteur considéré (X=l) à ce même risque chez les médecins
non-exposés au facteur (X=0). Ces derniers constituent le groupe de référence. Ainsi, un
RR > 1 représente une probabilité plus élevée de rester dans la région du Bas-Saint-Laurent
chez les exposés.
La construction de modèles explicatifs a été faite en introduisant une à une les
variables d'ajustement dans les modèles univariés des variables indépendantes principales.
Le critère qui a été utilisé pour juger si une variable d'ajustement était confondante est celui
du changement proportionnel au niveau du risque relatif estimé (RRb - RRa) / RRb- Si ce
changement était supérieur à 0,10, la variable était maintenue dans le modèle. La
confondance des variables qui souffraient de valeurs manquantes structurelles a été vérifiée
dans les groupes de médecins qui avaient des conjoints.
CHAPITRE III : RESULTATS
3.1. Données générales
Des 668 médecins à qui le questionnaire a été envoyé, 347 ont répondu, donnant un
taux de réponse de 52%. Trois (3) médecins ont été exclus de l'étude parce qu'ils étaient
dépanneurs dans le Bas-Saint-Laurent. La majorité des répondants soit 320 médecins (93%)
ont répondu sur papier.
Au moment de la cueillette des données, 221 (64,2%) répondants étaient installés
dans le Bas-Saint-Laurent, 111 (32,3%) avaient déjà quitté la région et 12 (3,5%) avaient
déjà pris leur retraite.
3.2. Représentativité des répondants
L'âge moyen au moment de l'installation dans le Bas-Saint-Laurent était de 34,2
ans pour les non-répondants et 30,4 ans pour les répondants. La différence était
statistiquement significative (p <0,0001). La répartition selon le sexe était également
significativement différente : 73,7% des non-répondants étaient des hommes contre 53,9%
chez les répondants (p<0,0001).
Le temps de rétention dans le Bas-Saint-Laurent était également différent selon les
deux groupes de médecins (test de Wilcoxon, p=0,l ; Log-Rank, p=0,01 ; et -2Log,
p=0,03). La rétention était plus grande chez les répondants.
20
Nous pouvons observer graphiquement la rétention des deux groupes à l'aide de
deux courbes de Kaplan-Meier (Figure 1).
1. OO"
T. O. 75
~ O. 5O"
O. 25
O. OO
2 0 3O
Temps de rétention en années
Répondants N=344 (233 censurés)Non répondant N=321 (170 censurés)
Figure 1. Courbes représentant la rétention des répondants et des non-répondants dans larégion du Bas-Saint-Laurent.
3.3. Caractéristiques des médecins participants
L'âge moyen au moment de l'installation dans le Bas-Saint-Laurent chez les 228
médecins installés après 1985 était de 29,1 ans chez les omnipraticiens et 32,6 ans chez les
spécialistes. La majorité des médecins (78,2% chez les omnipraticiens et 68,6% chez les
spécialistes) avait débuté leur pratique dans la région du Bas-Saint-Laurent. La majorité des
omnipraticiens pratiquait ou avait pratiqué dans une MRC de type rural (58,5%), tandis que
la majorité des spécialistes pratiquait ou avait pratiqué dans une MRC de type urbain
(88,4%).
21
3.3.1. Caractéristiques sociodémographiques des médecins
Le tableau 1 présente les caractéristiques sociodémographiques des 228 participants.
La majorité des omnipraticiens était des femmes (54,9%) alors que la très grande majorité
des spécialistes était des hommes (65,1%). Les individus des deux groupes étaient
majoritairement mariés ou avaient un conjoint de fait (68,3% pour les omnipraticiens et
76,7% pour les spécialistes). La majorité des médecins des deux groupes n'avait pas
d'enfants au moment de l'installation (57% des omnipraticiens et 81% des spécialistes).
Moins du quart des omnipraticiens était originaires de la région du Bas-Saint-Laurent
(23,2%). Leur proportion était encore moins grande chez les spécialistes (12,8%).
22
Tableau 1. Caractéristiques sociodémographiques des médecins.
Variable
SexeFemmeHomme
Statut matrimonialCélibataireMariéConjoint de faitSéparé
EnfantsPas d'enfantUn enfant ou plusValeurs manquantes
Origine du médecinBas-Saint-LaurentAutre région désignéeCentrale/univ1
IntermédiaireExtérieur du QuébecIndéterminée
Omnipraticiens(n=142)
N (%)
78 (54,9)64(45,1)
38 (26,8)48 (33,8)50 (35,2)6 (4,2)
115(81,0)25(17,6)
2(1,4)
33 (23,2)15 (10,6)50 (35,2)36 (25,4)6 (4,2)2(1,4)
Spécialistes(n=86)
N (%)
30 (34,9)56(65,1)
18(20,9)43 (50,0)23 (26,7)
2 (2,3)
49 (57,0)35 (40,7)2 (2,3)
11(12,8)7(8,1)
38 (44,2)20 (23,3)9(10,5)1 (1,2)
Total(n=228)
N
108120
5691738
164604
44228856153
Régions centrales/universitaires
3.3.2. Caractéristiques des médecins selon la formation
Le tableau 2 présente les caractéristiques des médecins selon la formation. Environ
la moitié des médecins a obtenu le diplôme d'étude médicale à l'Université Laval (55,6%
chez les omnipraticiens et 51,2% chez les spécialistes). Par contre, au niveau de la
résidence, l'Université Laval a formé plus d'omnipraticiens que de spécialistes (58,5%
versus 46,5%). La très grande majorité des omnipraticiens a effectué des stages de
médecine familiale en régions à l'externat (73,2%). Chez les spécialistes, environ la moitié
d'entre eux a effectué ces stages (51,2%). Par ailleurs, la grande majorité des
omnipraticiens a effectué des stages de résidence en régions (71,8%). Chez les spécialistes,
ceux qui ont fait ces stages ne représentent que 18,6%.
Tableau 2. Caractéristiques des médecins suivant la formation.
Variable
Université de formationLavalMontréalSherbrookeMe GillAutre
Université de résidenceLavalMontréalSherbrookeMcGillCanada1 ou États-UnisAutre paysValeurs manquantes
Stages-MF2 à l'externatOuiNonValeurs manquantes
Stages de résidence enrégions
OuiNonValeurs manquantes
Omnipraticiens(n=142)
N (%)
79 (55,6)30(21,1)25 (17,6)
2(1,4)6 (4,2)
83 (58,5)24(16,9)21 (14,8)4 (2,8)1 (0,7)0 (0,0)9 (6,3)
104(73,2)37 (26,1)
1 (0,7)
102(71,8)31 (21,8)
9 (6,3)
Spécialistes(n=86)
N (%)
44(51,2)25 (29,1)11(12,8)0 (0,0)6 (7,0)
40 (46,5)31(36,1)
6 (7,0)4 (4,7)3 (3,5)2 (2,3)0 (0,0)
44(51,2)41 (47,7)
1 (1,2)
16(18,6)69 (80,2)
1 (1,2)
Total(n=228)
N
1235536212
12355278429
148782
11810010
II s'agit du Canada hors Québec.2Ce sont des stages de médecine familiale.
3.3.3. Caractéristiques des médecins selon les incitatifs financiers et lesdettes.
Le tableau 3 montre la répartition des omnipraticiens et des spécialistes selon qu'ils ont
bénéficié ou pas de bourses de la Régie de l'Assurance-Maladie du Québec (RAMQ), de
bourses de formation spécialisée, de primes d'installation, ainsi que selon leur degré
24
d'endettement. Plus du tiers des médecins omnipraticiens et des médecins spécialistes a
reçu des bourses de la RAMQ durant les études (respectivement 37,3% et 38,4%). La
moitié des médecins omnipraticiens et le quart des médecins spécialistes ont bénéficié de
primes d'installation. Environ le tiers des médecins spécialistes a reçu des bourses de
formation spécialisée (30,7%). La majorité des médecins omnipraticiens et spécialistes a
contracté des dettes au cours des études.
Tableau 3. Caractéristiques des médecins selon les incitatifs financiers et les dettes.
Variable
Bourses de la RAMQAucuneUne annéeDeux annéesTrois annéesQuatre années et plusValeurs manquantes
Primes d'installationAucuneUne annéeDeux annéesPlus de deux annéesValeurs manquantes
Bourses de formation spécialiséeAucuneUne annéeDeux annéesPlus de deux annéesValeurs manquantes
Dettes d'étudesPas de dettesMoins de 10 000$De 10 000 à moins de 20 000$De 20 000 à moins de 30 000$De 30 000 à moins de 40 000$De 40 000 à moins de 50 000$50 000$ et plusValeurs manquantes
Omnipraticiens(n=142)
N (%)
82 (57,8)21 (14,8)16(11,3)10 (7,0)6 (4,2)7 (4,9)
71 (50,0)33 (23,2)20(14,1)18(12,7)0 (0,0)
.
14 (9,9)18(12,7)
38 (26,76)21 (14,8)12 (8,5)
10(7,04)28(19,7)
1 (0,7)
Spécialistes(n=86)
N (%)
50(58,1)13(15,1)13(15,1)3 (3,5)4 (4,7)3 (3,5)
24 (27,9)26 (30,2)12 (14,0)22 (25,6)
2 (2,3)
58 (67,4)12(14,0)11(12,8)4 (4,7)1 (1,2)
13(15,1)17(19,8)19(22,1)11(12,8)2 (2,3)6 (7,0)
17(19,7)1 (1,2)
Total(n=228)
N
1323429131010
955932402
58121141
273557321416352
25
3.3.4. Caractéristiques des conjoints des médecins
Le tableau 4 présente les caractéristiques des médecins qui étaient mariés ou avaient
un conjoint de fait au moment de l'installation dans le Bas-Saint-Laurent. Au total, 21,4%
des conjoints des omnipraticiens étaient originaires du Bas-Saint-Laurent, alors que chez
les spécialistes les conjoints originaires de la région ne représentaient que 15,2%. Plus de la
moitié des conjoints a fait des études universitaires (72,5% chez les omnipraticiens et
66,7% chez les spécialistes). Environ le quart des conjoints des spécialistes (25,8%) et le
tiers des conjoints des omnipraticiens (32,7%) étaient médecins.
Tableau 4. Caractéristiques des conjoints des médecins.
Variable
Origine du conjointBas-Saint-LaurentAutre région désignéeCentrale/univIntermédiaireExtérieur du QuébecIndéterminéeValeurs manquantes
Scolarité du conjointCollégialPremier cycleDeuxième cycleTroisième cyclePrimaire ou secondaireAutreValeurs manquantes
Profession du conjointMédecine généraleMédecine spécialiséeAutreÀ la maisonValeurs manquantes
Omnipraticiens(n=98)
N (%)
21 (21,4)7(7,1)
35 (35,7)19(19,4)8 (8,2)2 (2,0)6(6,1)
6 (6,1)34 (34,7)17(17,4)20 (20,4)
7(7,1)5(5,1)9 (9,2)
25 (25,5)7(7,1)
54(55,1)4 (4,1)8 (8,2)
Spécialistes(n=66)
N (%)
10(15,2)6(9,1)
33 (50,0)7(10,6)8(12,1)0 (0,0)2 (3,0)
13 (19,7)15 (22,7)16(24,2)13(19,7)
1 (1,5)5 (7,6)3 (4,6)
3 (4,6)14(21,2)29 (44,0)17(25,8)3 (4,6)
Total(n=164)
N
311368261628
1949333381012
2821832111
26
3.4. Facteurs associés au temps de rétention
3.4.1. Chez les omnipraticiens
L'association entre les variables indépendantes et la rétention des médecins
omnipraticiens dans le Bas-Saint-Laurent est présentée aux tableaux 5 et 6. Le temps de
rétention des omnipraticiens dans le Bas-Saint-Laurent était positivement associé de façon
significative à l'origine du médecin. Les omnipraticiens originaires de la région du Bas-
Saint-Laurent avaient une probabilité trois fois plus élevée de demeurer dans la région
comparativement à ceux originaires d'autres régions (Tableau 5). L'association était encore
plus marquée après ajustement pour les variables confondantes, à savoir les bourses de la
RAMQ, l'université de formation à la résidence, ainsi que les stages en région à la
résidence (Tableau 6). Par ailleurs, l'obtention des bourses de la RAMQ était négativement
associée à la rétention des omnipraticiens dans le Bas-Saint-Laurent, mais cette association
n'est pas significative (p=0,17). En effet, les omnipraticiens qui ont reçu des bourses de la
RAMQ avaient légèrement moins de chance de rester dans le Bas-Saint-Laurent (Tableau
5). La différence est un peu plus marquée après ajustement pour les variables confondantes
(stages en régions à la résidence, université de formation à la résidence), mais elle n'est pas
significative non plus (Tableau 6).
Le temps de rétention était semblable selon les autres variables indépendantes à
savoir les stages de médecine familiale en régions à l'externat, les stages en régions à la
résidence, les primes d'installation (Tableau 5). Il n'y a pas non plus d'effets confondants
avec les autres variables indépendantes ni avec les variables d'ajustement qui ont été mis
dans tous les modèles : le sexe, le statut marital, l'âge, les enfants, l'université de
formation, les dettes, l'origine du conjoint, la scolarité du conjoint, la profession du
conjoint, le type de MRC.
27
Tableau 5. Mesures d'association brutes entre la rétention des médecins omnipraticiensdans le Bas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les bourses de la RAMQ, les primesd'installation, les stages de médecine familiale en régions à l'externat ainsi que les stages derésidence en régions.
Variables
Origine du médecinAutre région2
Bas-Saint-Laurent
Bourses de la RAMQAucune 2
Une année ou plus
Primes d'installationAucune2
Une année ou plus
Stages-MF3 en régions àl'externatNon 2
Oui
Stages en régions à larésidenceNon2
Oui
N
10933
8253
7171
37104
31102
Censurés
6428
5731
4547
2269
1769
Risquerelatif
13,17
10,67
11,02
11,18
11,18
Valeur-p1
0,004
0,17
0,94
0,59
0,62Test du rapport de vraisemblance.
2Catégorie de référence3Stages de médecine familiale
28
Tableau 6. Mesures d'association ajustées entre la rétention des médecins omnipraticiensdans le Bas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les bourses de la RAMQ, les primesd'installation, les stages de médecine familiale en régions à l'externat ainsi que les stages derésidence en régions.
Variables
Origine du médecinAutre région 2
Bas-Saint-Laurent
Bourses de la RAMQAucune 2
Une année ou plus
N
9330
7551
Censurés
5426
5329
Risquerelatif
13,75
10,60
Valeur-p1
0,01
0,10'TestdeWald.2Catégorie de référence3Ajusté pour stages de résidence en régions, bourses de la RAMQ et université de résidence4Ajusté pour université de résidence
3.4.2. Chez les spécialistes
La variable qui influençait le plus le temps de rétention chez les médecins
spécialistes a été le fait d'avoir fait des stages en régions à la résidence. En effet, les
médecins spécialistes qui ont fait ces stages avaient cinq fois plus de chances de demeurer
dans la région du Bas-Saint-Laurent comparativement à ceux qui n'ont pas fait ces stages.
La deuxième variable était la bourse de la RAMQ. Les médecins spécialistes qui ont reçu
des bourses de la RAMQ avaient deux fois moins de chances de demeurer dans la région du
Bas-Saint-Laurent que ceux qui n'en ont pas reçu. Cependant, cette différence n'était pas
significative (Tableau 7 et 8).
Le temps de rétention était semblable selon les autres variables indépendantes à
savoir l'origine du médecin, les bourses de formation spécialisée, les primes d'installation,
les stages de médecine familiale en régions à l'externat (Tableau 7). Cette absence
d'association persiste malgré le contrôle des effets confondants des autres variables
indépendantes et des variables d'ajustement qui ont été mis dans tous les modèles : le sexe,
29
le statut marital, l'âge, les enfants, l'université de formation, les dettes, l'origine du
conjoint, la scolarité du conjoint, la profession du conjoint, le type de MRC (Tableau 8).
Tableau 7. Mesures d'association brutes entre la rétention des médecins spécialistes dansle Bas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les bourses de la RAMQ, les bourses deformation spécialisée, les primes d'installation, les stages de médecine familiale en régionsà l'externat ainsi que les stages de résidence en régions.
Variables
Origine dumédecinAutre région2
Bas-Saint-Laurent
Bourses de laRAMQAucune2
Une année ou plus
Bourses deformationspécialiséeAucune2
Une année ou plus
Primesd'installationAucune2
Une année ou plus
Stages-MF enrégions à l'externatNon2
Oui
Stages de résidenceen régionsNon2
Oui
N
7511
5033
5827
2460
4144
6916
Censurés
526
3918
3919
1741
2829
4315
Risque relatif
10,72
10,49
10,96
10,91
10,87
15,00
Valeur-p1
0,52
0,07
0,92
0,83
0,72
0,04'Test du rapport de vraisemblance2Catégorie de référence
30
Tableau 8. Mesures d'association ajustées entre la rétention des médecins spécialistes dansle Bas-Saint-Laurent et l'origine du médecin, les bourses de la RAMQ, les bourses deformation spécialisée, les primes d'installation, les stages de médecine familiale en régionsà l'externat ainsi que les stages de résidence en régions.
Variables
Origine du médecinAutre région2
Bas-Saint-Laurent
Bourses de la RAMQAucune2
Une année ou plus
Bourses de formationspécialiséeAucune2
Une année ou plus
Stages-MF à l'externatNon2
Oui
Stages en régions à larésidenceNon2
Oui
N
7411
5033
5626
3944
6716
Censurés
526
3819
3819
2829
4315
Risquerelatif
10,63
10,54
11,67
10,78
15,56
Valeur-p1
0,35
0,13
0,29
0,53
0,09
Test de Wald2Catégorie de référence3 Ajusté pour stages de résidence en régions4Ajusté pour université de formation MD'Ajusté pour bourses de la RAMQ, primes d'installation et sexe6Ajusté pour primes d'installation'Ajusté pour primes d'installation
31
CHAPITRE IV : DISCUSSION
Notre étude démontre qu'il existe une association significative entre l'origine des
médecins omnipraticiens et le temps de rétention dans la région du Bas-Saint-Laurent. Les
médecins omnipraticiens originaires de la région du Bas-Saint-Laurent ont près de quatre
fois plus de chances de demeurer dans la région, en comparaison avec ceux originaires des
régions intermédiaires et des régions centrales/universitaires. Par ailleurs, une association
négative mais non significative a été observée entre les bourses de la RAMQ et le temps de
rétention des médecins omnipraticiens dans la région du Bas-Saint-Laurent. Les
omnipraticiens qui ont reçu des bourses de la RAMQ auraient moins de chances de rester
dans la région comparativement à ceux qui n'en ont pas reçu. En revanche, il n'y avait pas
d'association entre la rétention des omnipraticiens dans le Bas-Saint-Laurent et les stages
de médecine familiale en régions à l'externat, les stages de résidence en régions ainsi que
les primes d'installation. Chez les médecins spécialistes, une forte association mais non
significative sur le plan statistique a été observée entre la rétention des médecins dans le
Bas-Saint-Laurent et les stages en régions à la résidence. Tout comme chez les
omnipraticiens, une association négative mais non significative a été observée entre les
bourses de la RAMQ et la rétention des médecins spécialistes dans la région du Bas-Saint-
Laurent.
Cette association entre la rétention des médecins omnipraticiens dans la région du
Bas-Saint-Laurent et l'origine rurale concorde avec d'autres études. Les médecins
américains inscrits au programme PSAP (Physician Shortage Area Program) avaient une
rétention en milieu rural plus élevée que celle des médecins ne participant pas au
programme (Rabinowitz et coll., 1999b). Dans ce programme, les étudiants en médecine
étaient admis sélectivement s'ils avaient grandi en milieu rural et avaient l'intention d'y
retourner exercer la médecine. Ce programme était multidimensionnel puisque une aide
32
financière, un suivi régulier par des conseillers et des stages en milieu rural étaient offerts
aux étudiants du programme. La rétention en milieu rural des médecins aurait pu être
influencée par un autre volet du programme (autre que l'origine rurale) ou par une
combinaison de tous les volets ; cependant, l'importance de l'origine rurale est suggérée par
le fait que les étudiants non-PSAP d'origine rurale avaient le même niveau de rétention que
les étudiants du programme. Tant les médecins de famille que les médecins spécialistes de
première ligne (médecine interne générale, pédiatrie générale) faisaient partie de l'étude.
Easterbrook et coll. (1999) ont eux aussi observé que les médecins de famille
d'origine rurale avaient 2,5 fois plus de chances de rester en milieu rural. Cependant, il
convient de souligner que la manière dont les auteurs ont évalué la rétention n'est pas très
précise. Dans cette étude réalisée en 1993 auprès de 159 médecins de famille qui avaient
terminé leur formation en résidence au Queen's University (Kingston, Ontario) entre 1977
et 1991, les médecins ont été considérés comme « retenus » s'ils s'étaient installés dans des
régions rurales après la résidence et s'ils y étaient encore installés au moment de l'enquête.
Il s'agit d'une rétention qui ne tient pas compte du temps passé dans la région rurale
considérée.
D'autres études n'ont pas observé d'association entre l'origine des médecins et la
rétention dans les régions rurales. C'est le cas de l'étude de Rabinowitz et coll. (1999a) qui
a montré que l'origine rurale était le meilleur facteur prédictif de l'installation en pratique
rurale, mais qu'elle n'était pas prédictive de la rétention. C'est également le cas dans
l'étude de Sempowski (2002). Dans cette étude réalisée auprès de 234 médecins, la
rétention n'a pas été définie comme nous l'avons fait. L'auteur avait constitué deux groupes
de médecins, l'un dit court-terme et l'autre dit long-terme. Les médecins court-terme
avaient quitté leur région de pratique rurale avant trois ans, tandis que les médecins long-
terme y étaient encore installés au bout de six ans. Il n'y avait pas de différence
statistiquement significative entre les deux groupes selon l'origine rurale. Encore une fois,
la définition restrictive de la rétention dans cette étude rend difficile la comparaison avec
notre étude sur l'effet de l'origine.
33
Dans notre étude, l'exposition des médecins omnipraticiens aux stages de médecine
familiale en régions à l'externat et aux stages de résidence en régions ne semble pas
augmenter leurs chances de rester longtemps dans le Bas-Saint-Laurent comparativement à
ceux qui n'ont pas été exposés. Ces résultats concordent avec ceux de l'étude décrite
précédemment et réalisée en Ontario par Sempowski (2002). En effet, dans cette étude, il
n'y avait pas d'association entre la rétention dans les régions rurales et les rotations en
médecine rurale à l'externat et à la résidence. Au niveau de l'installation en régions rurales,
une association positive était observée, mais elle disparaissait après ajustement pour des
variables confondantes. L'auteur soutient que cette absence d'effet positif des rotations en
régions rurales sur la rétention serait due à la différence d'âge entre les deux groupes de
médecins, ainsi qu'à un effet de cohorte.
Nos résultats concordent également avec ceux de Easterbrook et coll. (1999) qui ont
trouvé que les médecins qui avaient été exposés aux stages en régions rurales à l'externat et
à la résidence n'avaient pas plus de chances de rester longtemps dans les régions rurales,
comparativement aux médecins qui n'avaient pas effectué ces stages.
Par contre, Pathman et coll. (1999) ont réalisé une étude auprès de 456 médecins qui
s'étaient installés dans les régions rurales à travers les États-Unis et ont démontré que les
rotations en régions rurales à la résidence étaient associées à une meilleure rétention dans
ces régions (RR 0,43; p=0,003). Les rotations en régions rurales étaient également
associées à une meilleure préparation à la pratique rurale (p=0,004) et à une meilleure
préparation à la vie dans les petites villes (p=0, 03). D'après les auteurs, c'est la préparation
à la vie dans les petites villes qui était responsable de la meilleure rétention. Il faudrait
souligner que dans le groupe de médecins qui avaient une expérience de pratique
antérieure, les rotations dans les régions rurales à la résidence n'avaient pas d'association
positive avec la rétention. Enfin, les rotations en régions rurales avant la résidence n'étaient
pas associées à une meilleure rétention.
Ainsi, malgré le fait que les rotations en régions rurales à l'externat et à la résidence
aient prouvé leur efficacité au niveau du recrutement des médecins dans ces régions (Fryer
34
et coll., 1997 ; Pathman et coll., 1999 ; Stratton et coll., 1991), leur effet sur la rétention
reste mitigé. D'après Crandal et coll. (1990), les rotations en régions rurales pourraient
assurer du renforcement chez ceux qui ont déjà une affinité envers la pratique rurale, mais
n'auraient probablement pas d'effet sur ceux qui n'ont pas cette affinité. D'après les
auteurs, pour intéresser les étudiants à la pratique rurale, les facultés de médecine devraient
leur offrir la possibilité de développer les aptitudes et attitudes nécessaires à la pratique
rurale, mais ils déplorent que ce ne soit pas valorisé dans les sites de stages métropolitains.
Par ailleurs, nous n'avons pas observé d'association entre les bourses de la RAMQ,
les primes d'installation et le temps de rétention des médecins omnipraticiens dans le Bas-
Saint-Laurent. En fait, les bourses pourraient même avoir un effet négatif sur la rétention.
Ces résultats concordent aussi avec ceux d'autres études. Par exemple, Pathman et coll.
(1992) ont réalisé une étude de cohorte sur 412 médecins de première ligne, dont 36%
avaient reçu des bourses du National Health Service Corps (NHSC) en contrepartie
d'années de service dans des régions rurales ou mal desservies. Au bout de 8 ans,
seulement 12% des médecins du groupe NHSC étaient restés dans leur lieu de pratique
initial, contre 39% dans le groupe ne participant pas à ce programme.
Pathman et coll. (2000) ont réalisé une étude pour évaluer l'effet des dettes et des
incitatifs financiers sur la pratique rurale. Ils ont constaté que les médecins qui pratiquaient
dans le cadre de contrats de pratique en régions spécifiques en contrepartie d'une aide
financière s'installaient plus dans les régions rurales que les autres (33% vs 7%, p<0,001).
Cette conclusion n'est pas surprenante étant donné que ces médecins s'installaient à des
endroits spécifiés dans leurs contrats. Par ailleurs, les auteurs ont conclu que le coût
croissant des études médicales pourrait augmenter l'attrait envers ce type de programmes,
avec des répercussions positives sur les régions rurales. Nos conclusions ne vont pas dans
le même sens étant donné que ces programmes ne s'accompagnent pas d'une augmentation
de la rétention, objectif qui doit être visé au-delà du simple recrutement.
Nous pensons que les programmes d'aide financière en contrepartie d'un
engagement à travailler dans une région rurale peuvent attirer des médecins de famille à
35
court terme, mais réussissent moins bien à les y retenir. Dans le même ordre d'idées,
Sempowski (2004) signale qu'une étude a révélé que les médecins qui s'installent
volontairement dans une région rurale sont plus susceptibles d'y demeurer que ceux qui se
laissent attirer par un programme d'incitatifs financiers. Avec l'exemple des primes
d'installation, Rabinowitz et coll. (1999b) illustrent bien la complexité du problème des
incitatifs financiers. Ces auteurs soulèvent le paradoxe que ce sont les médecins
nouvellement installés qui reçoivent les incitatifs alors que les médecins qui se sont
installés depuis longtemps, c'est-à-dire ceux dont la rétention est la plus forte, n'en
reçoivent pas.
Chez les médecins spécialistes, l'origine du médecin, les stages de médecine
familiale à l'externat, les bourses de la RAMQ, les bourses de formation spécialisée et les
primes d'installation ne semblent pas avoir d'effet sur la rétention dans le Bas-Saint-
Laurent. Seuls les stages en régions à la résidence sont associés à la rétention en analyse
univariée : les médecins spécialistes qui ont fait des stages de résidence en régions ont cinq
fois plus de chances de rester longtemps dans le Bas-Saint-Laurent (RR 5,0 ; p = 0,04).
Cependant, cette association perd sa signification statistique après contrôle des effets
confondants d'autres variables, telles que les primes d'installation (RR 5,6 ; p = 0,09). Ceci
est probablement dû aux faibles effectifs étudiés. Bien que cette association ne soit pas
significative sur le plan statistique, elle est forte et ce résultat est en accord avec l'étude de
Pathman et coll. (1999) qui ont montré un effet bénéfique des stages en régions à la
résidence sur la rétention, puisque les médecins spécialistes de première ligne faisaient
partie de l'étude.
L'absence d'association entre l'origine et le temps de rétention dans le Bas-Saint-
Laurent chez les spécialistes est surprenante. Cependant, il faut souligner que les médecins
spécialistes originaires du Bas-Saint-Laurent ne représentent que 12,8% du total des
spécialistes qui s'installe dans la région, alors que les omnipraticiens originaires du Bas-
Saint-Laurent représentent 23,2% du total. Notre étude est, à notre connaissance, la
première qui ait évalué l'effet de l'origine sur le temps de rétention chez les médecins
spécialistes. Les études que nous avons citées plus haut portaient soit sur les médecins de
36
famille uniquement, soit sur les médecins de première ligne (incluant les spécialistes de
première ligne). Dans notre étude, nous n'avons pas fait de distinction entre les spécialistes
de première ligne et les autres, car la pénurie des spécialistes en général ne leur permet pas
de faire beaucoup de soins de première ligne.
Nous devons également discuter des limites méthodologiques de notre étude et
comprendre comment ces limites ont pu influencer nos résultats. Dans un premier temps,
nous devons mentionner l'existence d'une limite au niveau de la validité externe de l'étude.
La figure 1 montre que les répondants au questionnaire étaient différents des non
répondants tant selon la durée de rétention que selon la variable « sexe du médecin » et
« âge au moment de l'installation ». Ces différences pourraient affecter la validité externe
de l'étude et empêcher la généralisation des résultats à l'ensemble des médecins de la
région. Par ailleurs, la généralisation des résultats aux autres régions désignées du Québec
doit être faite avec prudence. En effet, la région du Bas-Saint-Laurent comporte des aspects
de région éloignée à l'ouest et isolée à l'est, ce qui la rend assez particulière. Les autres
régions ont également des différences tant géographiques que démographiques qui ne
permettent pas de les assimiler à celle du Bas-Saint-Laurent.
Dans un deuxième temps, nous devons considérer la validité interne de l'étude (biais de
sélection, biais d'information, biais de confusion). Au niveau du biais de sélection, il y a eu
un souci de réduction du nombre de non réponses ou de refus (en assurant la confidentialité
des réponses et en recourant à plusieurs rappels). Cependant, le faible taux de réponse au
questionnaire (52%) ainsi que la différence au niveau de la rétention entre les répondants et
les non répondants nous poussent à réfléchir. En effet, si certaines caractéristiques (origine,
exposition aux incitatifs financiers ou aux stages) font que beaucoup de médecins n'ont pas
répondu, cela pourrait entraîner une distorsion de la mesure d'association.
Malheureusement, rien ne permet de l'affirmer. On ne peut pas non plus affirmer que cette
distorsion entraînerait une sous-estimation ou une surestimation de la mesure d'association.
Quant à la possibilité de biais d'information, la qualité du questionnaire et le bon
fonctionnement lors de la récolte de l'information ont probablement permis de le
minimiser. Pour ce, une validation du questionnaire avait été préalablement effectuée
37
auprès d'un groupe restreint de médecins de Baie-Comeau (au Québec). Les commentaires
et suggestions formulées par ces derniers avaient été retenus lors de la confection de la
version finale du questionnaire. L'autre limite potentielle est celle du biais de rappel, qui
peut affecter toutes les études qui reposent sur des questionnaires auto-administrés. Nous
pensons que les variables indépendantes principales, compte tenu de leur nature, n'ont pas
souffert de ce type de biais. En effet, il est peu probable que les médecins aient oublié s'ils
ont effectué des stages ou s'ils ont bénéficié de l'un ou l'autre des incitatifs financiers. Une
autre limite découle des effets potentiellement confondants par des facteurs non contrôlés
(confusion résiduelle). Pour qu'une variable soit confondante, il faut qu'elle soit associée à
la fois à la variable réponse et à la variable indépendante (Bernard et Lapointe, 1987 ;
Rothman et Greenland, 1998). Par exemple, les études qualitatives ont montré que la
surcharge de travail, l'isolement professionnel, le manque de support étaient des facteurs
qui pouvaient précipiter la décision de quitter la pratique rurale. Cependant, même si
certaines de ces variables étaient présentes dans la banque de données utilisée dans le cadre
de ce mémoire, elles n'ont pas été utilisées compte tenu de la difficulté d'interprétation
qu'elles auraient occasionnée.
CONCLUSION
Au Québec, pour régler le problème de pénurie des médecins dans certaines régions
éloignées et/ou isolées, des incitatifs financiers ont été mis en place notamment sous forme
de bourses d'études gérées par la RAMQ, de bourses de formation spécialisée, de primes
d'installation (Ministère de la santé et services sociaux, 1999). De plus, depuis 1985, le
Ministère de la santé et services sociaux a développé un programme de décentralisation de
l'enseignement en régions, avec des stages cliniques de médecine familiale à l'externat
ainsi que des stages à la résidence. L'objectif général de l'étude était d'évaluer l'impact de
ces différentes mesures ainsi que l'effet de l'origine des médecins sur le temps de rétention
dans la région du Bas-Saint-Laurent.
Les résultats de notre étude concordent avec ceux de la littérature (Easterbrook et
coll., 1999 ; Rabinowitz et coll., 1999a) quant à l'effet de l'origine du médecin sur la
rétention dans une région rurale chez les médecins omnipraticiens. En effet, parmi ces
derniers, ceux originaires du Bas-Saint-Laurent avaient presque quatre fois plus de chances
de rester dans la région comparativement à ceux originaires d'autres régions. En revanche,
les stages en médecine familiale en régions à l'externat, les bourses de la RAMQ, les
bourses de formation spécialisée ainsi que les primes d'installation ne semblaient pas
influencer la rétention dans le Bas-Saint-Laurent. Quant aux spécialistes aucun facteur
influençant la rétention dans le Bas-Saint-Laurent n'a été mis en évidence si ce n'est les
stages en régions à la résidence, une association toutefois non significative sur le plan
statistique.
Les résultats obtenus dans le cadre de cette étude pourraient servir à mettre en place
et à évaluer des mesures visant à favoriser la rétention des médecins dans les régions
désignées. L'augmentation des étudiants en médecine d'origine rurale pourrait être parmi
ces mesures. L'une des méthodes fréquemment utilisées pour augmenter le nombre
39
d'étudiants dans les facultés de médecine est le recours à des politiques d'admissions
sélectives (Crandall et coll., 1990). Une autre approche serait d'intéresser les étudiants des
collèges d'enseignement général et professionnel (cégeps) en régions à la carrière médicale.
Cette approche a déjà fait ses preuves en Alabama (Crandall et coll., 1990). Les stages en
régions à la résidence devraient être maintenus, surtout au niveau des spécialités de base.
Quant aux autres mesures (les bourses d'études, les primes d'installation), il faudrait
évaluer leur impact réel dans toutes les régions du Québec.
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