et motivations d’usage à l’adolescence · Etat des lieux épidémiologique: Tabac, alcool,...

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Représentations des drogues et motivations d’usage à l’adolescence Premiers résultats de l’enquête ARAMIS Ivana OBRADOVIC Directrice adjointe Journées de la Fédération Addiction 8 juin 2017

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Représentations des drogues

et motivations d’usage à

l’adolescence

Premiers résultats de l’enquête ARAMIS

Ivana OBRADOVICDirectrice adjointe

Journées de la Fédération Addiction

8 juin 2017

Etat des lieux épidémiologique:

Tabac, alcool, cannabis à l’adolescenceÉvolution des niveaux d’usage à 17 ans

Source : ESCAPAD, OFDT

Expertise collective INSERMConduites addictives chez les adolescents (2014)

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Principaux constats :

-Le rôle des motivations et des représentations par rapport aux trajectoires d’usage reste mal connu.

-Les conduites addictives sont aussi des pratiques sociales.

Recommandation :

Développer la recherche en SHS sur la compréhension des usages chez les jeunes etréfléchir aux conditions d’opérationnalisation pour aboutir à des interventions concrètes

-En mobilisant différentes méthodologies de recueil de données classiques et innovantes, en particulier qualitatives

-En développant des recherches sur les non-consommateurs afin d’identifier les facteurs de non-consommation et les ressources que ces individus mobilisent au sein du groupe social

L’enquête ARAMISAttitudes, Représentations, Aspirations et Motivations lors de l’Initiation aux Substances psychoactives

Objectifs

o Analyser les significations que les adolescents attribuent à leurs pratiques d'usage de drogues et les déterminants des trajectoires de consommation.

o Intégrer dans l’analyse la subjectivité des acteurs, afin de mieux comprendre leurs représentations des drogues, leurs opinions, leurs perceptions et leurs raisons d'agir

Méthode : deux volets d’analyse

o quantitatif : exploitation secondaire de l’enquête européenne ESPAD depuis 1999

o qualitatif : enquête par entretiens individuels et collectifs (focus groups) auprès de mineurs + observation de sessions de prévention sur alcool, tabac, drogues en lycée et CFA (« débats théâtraux »)

o + une revue de la littérature complète (en cours de réalisation)

Calendrier

o Enquête pluriannuelle (2014-2017)

o Premiers résultats en novembre 2017, rapport d’étude en décembre

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Echantillon analysé (n = 173 + 220)

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Entretiens individuels (2014-2017) N = 125

SexeGarçons 57

Filles 68

Age moyen 16,2 ans [13-18]

Critères de diversitéRégion, aire de résidence, filière scolaire, « milieu social », types de consommation/non-consommation…

Entretiens collectifs (2016/2017) N = 48 (6 FG)

SexeGarçons 27

Filles 21

Age moyen 16 ans [15-18 ans]

ProfilsElèves de lycées généraux, technologiques ou professionnels en Ile-de-

France (Paris 20ème, 91, 92, 94)

Sessions de « théâtre de prévention » (2016/2017)

N = 220

SexeGarçons 45

Filles 15

Age moyen 15-25 ans

Profil scolaire

4 séances de "Take Care". Elèves de 2nde du lycée professionnel René Cassin (Paris 16ème), des lycées généraux L.Armand (Paris 15ème) et C.Monet (Paris 13ème) ou scolarisés

dans des établissements d'insertion, EPIDE, écoles de la 2ème chance

Constats généraux

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• Une jeunesse fragmentée et fortement clivée

• Importance des référents familiaux

o Croyance dans la famille

o Référence permanente aux antécédents familiaux (intériorisation de la transmission)

• Prédominance des expérimentateurs / Une minorité de consommateurs réguliers

o Omniprésence des drogues dans la vie quotidienne et l’espace public

o Problématiques émergentes : chicha, médicaments codéinés…

• Focus sur les non-consommateurs

o Ne pas consommer : une « fierté personnelle ». L’auto-héroïsation de l’abstinent

Motivations et représentations a priori

• Les premières fois : une palette d’impressions et de motivations différenciées

• La hiérarchie subjective des risques associés aux produits

o « Génération ‘enfant de fumeurs’ » // Mauvaise image de la cigarette (et de la e-cigarette)

o « L’alcool du bonheur » // Perception nuancée des effets de l’alcool et des « degrés d’ivresse »

o Le cannabis : « plus agréable » la 1ère fois et moins cher, « plus sympa » et presque aussi accessible que le tabac. Risques peu connus.

o La chicha : une représentation des risques floue

• Représentations de l’addiction : la figure négative de l’addict

o Addiction = tabac ou alcool.

o Le cannabis loin derrière (fonction médicinale). Rhétorique de la « drogue douce »

o La chicha : légitimation par le commerce (bars à chicha)

o Les « drogues dures », figure-repoussoir et point cardinal

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Une place pour les expériences…

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• Vouloir tout essayer : un trait générationnel ?

o « Ne pas regretter après » : récurrences thématiques de la tentation (« les drogues et les filles »), de l’hédonisme (« profiter tant qu’on est jeunes ») et du « no future »

o« Etre dans l’ambiance », « ne rien rater » : la peur de manquer quelque chose (Fear of missing out: FOMO)

• Pour des moments suspendus : respirer, prendre une pause, s’arrêter…

o « Se poser »

o A la recherche de l’apesanteur

o Génération no sleep ? Forte prévalence de la problématique du sommeil

Motivations d’usage :

une « mauvaise question de sociologie »?

• Etudier les pratiques (H.S.Becker) et les termes dans lesquels elles sont évoquées

• Revenir au « corps des usagers » et de leurs intérêts à consommer

o Effets recherchés, sensations (ce qui est bon/pas bon), bienfaits, déceptions

o Corps = support d’effets sociaux

• Replacer les rituels sociaux au cœur de l’analyse

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Usages occasionnels ou réguliers :

les « goûts » et les « atmosphères » associées

• Des « produits de convivialité »

o L’alcool, ingrédient incontournable de « la fête » et des soirées

Une pratique majoritaire, sauf parmi les jeunes dont la religion l’interdit Exemple : Conseil d’une aînée : « le tabac, non mais l’alcool, je peux quand même pas lui interdire » (Chloé, 17 ans)

Le carburant des « vraies soirées »

Ce qui permet de distinguer les « grosses soirées » (initiation aux plaisirs de la nuit)

o Le cannabis et le tabac : des compagnons de route (de jour et de nuit)

• Les ambiances et les moments de consommation

• Les « moments où on consomme » et les autres

• Ritualisation

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Fonctions sociales des usages de produits

• Divertissement et fonctions ludiques à l’adolescence (« faire de la chicha », « faire de la fumée »)

• Variabilité des fonctions attribuées aux produits. Approche très fonctionnaliste (produits qui « ne servent à rien »)

o Différenciée selon les produits (« alcool en soirée » ou chicha versus cannabis « tous terrains »)

o Rapport entre l’alcool et le sexe

o Circonstances positives de consommation (us.récréatif, festif, créatif) et négatives (gérer l'anxiété ou l'ennui, trouver le sommeil) : le plaisir versus les inconvénients, à la découverte des frontières

• Des expériences fondamentalement sociales (de socialisation fondamentale)

o Lâcher prise, neutraliser ses propres défenses (ou celles des autres)

o Partage un vécu commun

o Bienfaits les plus cités = une aide plus qu’un rapport de plaisir au produit (sauf cannabis)

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Des « drogues de classe » ?

• Lectures sociales des rapports à l’alcool

o Alcool = passage obligé dans les milieux privilégiés versus la revendication de « s’amuser autrement » dans les quartiers populaires (jeunes de confession musulmane)

o L’alcool : « pratique culturelle ». La « noblesse » du vin, la tradition familiale, la convivialité et le sens du partage.

o Les jeunes comme vecteurs marketing malgré le contraste avec leurs propres pratiques de consommation d’alcool

• La place des médicaments dans les milieux favorisés versus la chicha dans les quartiers populaires

• Une image moins dégradée de la cigarette dans les milieux privilégiés

o Image positive persistante (« on trouve rarement une personne ridicule en train de fumer »)

• Cannabis inter-classes

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Jeux de régulation et de dérégulation

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• Perturber le quotidien, tester l’altéritéo Essayer une identité (« ce qui me va » et « ce qui ne me va pas »)

o Jeux de rôles et apprentissage des limites : ce qu’on s’astreint à faire et ce qu’on fait faire aux autres (« jusqu’où ira-t-il ? »). Jouer à dérégler les camarades

• Jeux autour du risque : des comportements ritualiséso Le risque comme figure positive : s’exposer et se rattraper

o Récits mythifiés de la cuite et de la défonce (« depuis mon bad…. »)

• Analyses croisées des bénéfices/risques liés aux produitso A partir de quelles expériences et de quels signes les adolescents prennent-ils conscience des

risques et de la nocivité des produits psychoactifs ? Déclics et accélérateurs de conscience

o A quel moment le rapport bénéfices/risques s’inverse-t-il ?

• Techniques d’auto-régulation : le chemin vers l’auto-RDR (connaître ses limites)o Seuils de risque auto-définis. Références au ressenti corporel (« quand la tête tourne »)

o Parfois régulation croisée (rôle des pairs aidants, JF)

o Le mythe du contrôle (omniprésent) : entre fantasme et apprentissage

Facteurs de protection

et ressorts d’une prévention efficace

• Les discours sur la liberté, la perte de contrôle et le mépris de la dépendance

• Devenir expert de soi et des effets des produits. Repères pratiqueso Appétit et curiosité de « ce que ça fait » (à soi et aux autres). Enquêteurs enrôlés

o Pertinence de l’approche expérientielle

o Pour des outils d’aide en ligne (auto-administrés)

• Les facteurs de protectiono Une mauvaise expérience personnelle

o Faible accessibilité

o Des pairs non-consommateurs (fréquentations). Rôle des aînés dans les quartiers populaires

o Un parent ou un proche « alcoolique » ou toxicomane

o L’attitude des parents (supervision familiale)

o Activités extrascolaires

o L’appartenance religieuse

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Conclusion

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• « Conduites sans croyance »

• Expériences qui suscitent peu d’adhésion / répondent à un mythe du vécu adolescent

• Faible prévalence des motivations de provocation ou de transgression

• Plaisir de la clandestinité en recul (« boire en cachette ») / attrait pour la continuité (alcool)

• Ce qui est investi et ce qui ne l’est pas : retour aux significations

• La force du social

• Installation dans une consommation habituelle = pratique sociale enchâssée dans un contexte social

• Comment les contraintes (sociales, familiales, culturelles, religieuses, professionnelles) structurent le besoin de consommer