Érysipèle et fasciite nécrosante : prise en charge

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Méd Ma) Infect 2000 ; 30 Suppl4 : 245-6 0 2000 Editions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés Conférence de consensus Président de la SFD M.F. Avril (Paris) Président de la SPILF D. Peyramond (Lyon) Érysipèle et fasciite nécrosante : prise en charge Faculté de médecine de Tours - mercredi 26 janvier 2000 Bureau des consensus de la Spilf 1999 Coordonnateur : D. Peyramond (Lyon) - C. Chidiac (Lyon) - F. Lucht (Saint-Étienne) - C. Perronne (Garches) - A.G. Saimot (Paris) - C.J. Soussy (Créteil) - J.P. Stahl (Grenoble) 2000 Coordonnateur : C. Chidiac (Lyon) - B. Byl (Bruxelles) -P. Choutet (Tours) - J. Luciani (Coligny) - C. Perronne (Garches) - P. Pothier (Dijon) -B. Quinet (Paris) - C.J. Soussy (Créteil) - J.P. Stahl (Grenoble) - P. Weinbreck (Limoges) Avec la participation : - de l’Association française des chirurgiens maxillo- faciaux, - de l’Association des professeurs de pathologie infectieuse et tropicale, - du Collège français de pathologie vasculaire, - de la Société française d’anesthésie et de réanima- tion, - de la Société française de chirurgie plastique reconstructive et esthétique, - de la Société française de lymphologie, - de la Société française de médecine générale, - de la Société francophone d’urgences médicales, - de la Société nationale française de médecine interne, - de la Société de réanimation de langue française. Comité d’organisation Président : D. Christmann, maladies infectieuses et tropicales (Strasbourg) Membres - P. Bernard, dermatologie (Reims) - F. Denis, microbiologie (Limoges) - M. Dupon, infectiologie (Bordeaux) - M. Kopp, médecine générale (Illkirch-Graffenstaden) - P. Meyer, médecine générale (Reims) - D. Peyramond, infectiologie (Lyon) -J. Revuz, dermatologie (Créteil) - J.L. Schmit, infectiologie (Amiens) - L. Vaillant, dermatologie (Tours) Experts - B. Becq-Giraudon, infectiologie (Poitiers) - P. Bernard, dermatologie (Reims)

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Méd Ma) Infect 2000 ; 30 Suppl4 : 245-60 2000 Editions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés

Conférence de consensus

Président de la SFDM.F. Avril (Paris)

Président de la SPILFD. Peyramond (Lyon)

Érysipèle et fasciite nécrosante : prise en charge

Faculté de médecine de Tours - mercredi 26 janvier 2000

Bureau des consensus de la Spilf

1999Coordonnateur : D. Peyramond (Lyon)- C. Chidiac (Lyon)- F. Lucht (Saint-Étienne)- C. Perronne (Garches)- A.G. Saimot (Paris)- C.J. Soussy (Créteil)- J.P. Stahl (Grenoble)

2000Coordonnateur : C. Chidiac (Lyon)- B. Byl (Bruxelles)-P. Choutet (Tours)- J. Luciani (Coligny)- C. Perronne (Garches)- P. Pothier (Dijon)-B. Quinet (Paris)- C.J. Soussy (Créteil)- J.P. Stahl (Grenoble)- P. Weinbreck (Limoges)

Avec la participation :

- de l’Association française des chirurgiens maxillo-faciaux,- de l’Association des professeurs de pathologieinfectieuse et tropicale,- du Collège français de pathologie vasculaire,

- de la Société française d’anesthésie et de réanima-tion,- de la Société française de chirurgie plastiquereconstructive et esthétique,- de la Société française de lymphologie,- de la Société française de médecine générale,- de la Société francophone d’urgences médicales,- de la Société nationale française de médecineinterne,- de la Société de réanimation de langue française.

Comité d’organisation

Président : D. Christmann, maladies infectieuseset tropicales (Strasbourg)

Membres- P. Bernard, dermatologie (Reims)- F. Denis, microbiologie (Limoges)- M. Dupon, infectiologie (Bordeaux)- M. Kopp, médecine générale (Illkirch-Graffenstaden)- P. Meyer, médecine générale (Reims)- D. Peyramond, infectiologie (Lyon)-J. Revuz, dermatologie (Créteil)- J.L. Schmit, infectiologie (Amiens)- L. Vaillant, dermatologie (Tours)

Experts

- B. Becq-Giraudon, infectiologie (Poitiers)- P. Bernard, dermatologie (Reims)

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246s Conférence de consensus

- A. Bouvet, microbiologie (Paris)- C. Brun-Buisson, réanimation (Créteil)- 0. Chosidow, médecine interne (Paris)- B. Crickx, dermatologie (Paris)- F. Denis, microbiologie (Limoges)- A. Dupuy, dermatologie (Villejuif)- E. Grosshans, dermatologie (Strasbourg)- M. Kopp, médecine générale (Illkirch-Graffenstaden)- A. Lortat-Jacob, chirurgie orthopédique (Boulogne)- F. Lucht, infectiologie (Saint-Étienne)- D. Mathieu, réanimation (Lille)- J.L. Perrot, dermatologie (Saint-Étienne)- G. Rémy, médecine interne, infectiologie (Reims)- J.C. Roujeau, dermatologie (Créteil)- J.L. Schmit, infectiologie (Amiens)- L. Vaillant, dermatologie (Tours)

Groupe bibliograpbique

- C. Cazorla, dermato-infectiologie (Saint-Étienne)- C. Derancourt, dermatologie (Reims)- F. Granier, médecine interne (Mantes-la-Jolie)- Y. Hansmann, infectiologie (Strasbourg)

Modérateurs des sessions

- C. Auboyer, anesthésie-réanimation (Saint-Étienne)-J. Baudet, chirurgie plastique (Bordeaux)- P. Bourrier, urgences (Le Mans)- P. Choutet, infectiologie (Tours)- 1. Lazareth, pathologie cardiovasculaire (Paris)- F. Lecomte, médecine interne (Rouen)- G. Lorette, dermatologie (Tours)- P. Meyer, médecine générale (Reims)

Jury

Président : J. Revuz, dermatologie (Créteil)

Membres du jury- B. de Barbeyrac, bactériologie (Bordeaux)- N. Basset-Seguin, dermatologie (Paris)- P. Berbis, dermatologie (Marseille)- F. Bricaire, infectiologie (Paris)- F. Cartier, infectiologie, réanimation (Rennes)- G. Fournier, réanimation (Lyon)- B. Garo, réanimation (Brest)- D. Gras, médecine générale (Strasbourg)- J.P. Lacour, dermatologie (Nice)- M. Lévêque, médecine générale (Thann)-J. Reynes, infectiologie (Montpellier)- P. Riegel, microbiologie (Strasbourg)- F. Schernberg, chirurgie orthopédique (Reims)- M. Vergos, chirurgie viscérale et vasculaire (Saint-Mandé)

L’organisation de cette conférence a été rendue pos-sible grâce à l’aide apportée par les laboratoires sui-vants que la Spilf tient à remercier : Abbott, BayerPharma, Bristol-Myers Squibb, GlaxoWellcome,Hoechst Marion-Roussel, Institut SmithklineBeecham, Merck Sharp & Dohme-Chibret, Pfizer,Pharmacia Upjohn, Produits Roche, LaboratoiresRhône- Poulenc Rorer, Wyeth Lederle.

La Société française de dermatologie remercie leslaboratoires suivants de leur soutien : Galderma,Laboratoires Leo, Pierre Fabre Dermatologie, Labo-ratoires Rhône-Poulenc Rorer, Produits Roche.

Coordination logistique : 2M2, 7, rue Bastienne,95160 Montmorency, France. Tél. : 01 39 64 88 83 ;fax : 01 39 89 77 56.

AVANT-PROPOS

Cette conférence a été organisée et s’est déroulée conformément aux règles méthodo-logiques préconisées par l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé(ANAES) qui lui a attribué son label de qualité.Les conclusions et recommandations présentées dans ce document ont été rédigées parle Jury de la Conférence, en toute indépendance. Leur teneur n’engage en aucunemanière la responsabilité de 1’ANAES.

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Conférence de consensus

Érysipèle et fasciite nécrosante : prise en charge

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RAPPEL ANATOMIQUE

Il y a dans la graisse hypodermique (synonyme : hypo-derme) une structure très grêle de faible consistancequi ne constitue pas une barrière à l’infection etqui n’est pas individualisée partout : le « fascia super-ficialis ». En dessous de la graisse hypodermiquese trouve une aponévrose dite « aponévrose super-ficielle », qui est fermement adhérente au musclequand le sous-sol est musculaire. Cette aponévrosesuperficielle est donc profonde par rapport au fasciasuperficialis avec lequel la confusion terminologiqueest facile compte tenu de la similitude des noms, alorsqu’au contraire aucune confusion n’est possible pour lechirurgien. Il s’agit d’une véritable aponévrose, extrê-mement résistante, et c’est elle qui est le siège électifde la nécrose dans les fasciites, ce qui contribue encoreun peu plus à aggraver la confusion terminologique.

Selon les zones anatomiques le fascia superficialisest :- soit en-dessous de la graisse hypodermique et doncséparé de l’aponévrose superficielle par un espacevirtuel que peut décoller la main du chirurgien ;- soit situé au sein de la graisse hypodermique, doncavec du tissu adipeux sur ses deux faces.

Le terme de « tissu cellulaire sous-cutané » doitêtre abandonné car il ne correspond à aucune struc-ture anatomique : le tissu adipeux, associé à desfibrocytes que l’on peut trouver sous le fascia super-ficialis quand celui-ci existe et se trouve en positionhaute, est une partie de l’hypoderme, donc de lapeau. Les tissus véritablement « sous-cutanés » sontl’aponévrose superficielle, les muscles, etc.

MISE AU POINT TERMINOLOGIQUE

Le terme de « cellulite » (anglais : cellulitis) e s tsource de confusion car il est utilisé pour des affec-tions variées :- des dermo-hypodermites bactériennes (DHB)impossibles à distinguer de l’érysipèle ;

- des dermo-hypodermites bactériennes nécrosantes(DHBN) proches des fasciites nécrosantes ;- des dermo-épidermites microbiennes : cellulitestreptococcique périanale ;- des dermo-hypodermites non infectieuses : cellu-lite éosinophile de Wells ;- enfin, dans le langage courant, l’adiposité encapiton, surtout observée chez les femmes.

En outre, ce terme est anatomiquement impropre,il fait référence à un tissu cellulaire sous-cutané quin’existe pas : sous la couche profonde de la peau,c’est-à-dire l’hypoderme, on trouve l’aponévrosesuperficielle (voir rappel anatomique).

L’abandon de ce terme permet de clarifier laterminologie : selon la nature de la structure anato-mique atteinte, on peut parler de DHB non nécro-sante assimilée à l’érysipèle ; et pour les formesnécrosantes de DHBN sans atteinte de l’aponévrose,de fasciite nécrosante caractérisée par la nécrose del’aponévrose, de myosite et globalement de gan-grène infectieuse.

Débridement : les auteurs de langue anglaise utili-sent ce terme français pour désigner les excisions detissus nécrotiques au cours des DHBN et des fasciitesnécrosantes. La transposition en français de ce terme« anglofrench » est source de mauvaise compréhen-sion de la nature de l’acte chirurgical. Nous pro-posons de l’abandonner au profit d’excision.

Qms~10Ns i ET 2 : ÉRYSIPÈLE

Question 1 - De weiles données a-t-on besoinauiourd’hui pour prendre en charge un érvsipèle ?

Données épidémiologiques

L’érysipèle est une dermo-hypodermite aiguë (nonnécrosante) d’origine bactérienne essentiellementstreptococcique, pouvant récidiver [l, 21.

L’érysipèle est une maladie sporadique d’acquisi-tion communautaire dont le recrutement est à la fois

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hospitalier et ambulatoire. Il n’est pas certain que lesdonnées acquises par les études cliniques, hospita-lières dans la majorité des cas, et peu nombreuses,reflètent l’ensemble des érysipèles.

C’est une pathologie commune, dont l’incidenceestimée est de dix à 100 cas pour 100 000 habitantspar an, qui serait en augmentation ; mais l’absencede données fiables sur son incidence et sur les fluc-tuations de celle-ci au cours du temps n’autorise pasà affirmer cette recrudescence.

Historiquement, l’érysipèle a d’abord été décrit auvisage [3-51. Actuellement, l’érysipèle est dans plusde 85 % des cas localisé aux membres inférieurs sansque ce phénomène soit expliqué [6-161.

Deux enquêtes récentes, effectuées dans le cadrede la conférence de consensus, non publiées, ont étéréalisées de mai à juillet 1999, une en ville auprès demédecins généralistes et l’autre hospitalière (ser-vices de dermatologie, de médecine interne, demaladie infectieuse et d’urgences). Elles ont montréque l’âge moyen des patients était équivalent(61,46 ans en ville et 62,7 ans à l’hôpital) et corres-pondait aux données de la littérature (55 à 65 ans)[2, 171. Le sex-ratio (H/F) des patients hospitalisésétait de 0,92 alors qu’il était de 0,53 pour les patientsvus en ville. La localisation aux membres inférieursétait observée dans 90,9 % des cas de la série hospi-talière et 89,6 % de la série de ville.

L’incidence de l’érysipèle calculée par l’extra-polation des données de ces enquêtes serait de190/100 000 habitants par an. Ce résultat doit êtreinterprété avec précaution. L’incidence réelle del’érysipèle mériterait d’être évaluée par d’autresétudes.

Facteurs de risqueUne seule étude [18] cas-témoins effectuée dansplusieurs hôpitaux français (service de dermato-logie) portant sur 129 sujets admis pour un premierépisode d’érysipèle de jambe et 294 témoins appa-riés a mis en évidence des facteurs de risques(tableau 1) :-locaux : lymphœdème et existence d’une ported’entrée cliniquement identifiée (intertrigo inter-orteils 66 %, ulcère de jambe 14 %) ;- généraux : l’obésité.

Cette étude avait une puissance suffisante pourécarter les hypothèses souvent alléguées d’une asso-ciation avec le diabète et l’éthylisme chronique.

Données microbiologiques

Bactéries responsablesLes bactéries les plus souvent rencontrées sont lesstreptocoques P-hémolytiques dans toutes les étudeset quelle que soit la technique utilisée.

Streptococcus pyogenes du groupe A est le plus sou-vent cité parmi les bactéries pouvant provoquer unérysipèle, sa fréquence d’isolement est de 58 à 67 %des cultures positives. Streptococcus dysgalactiae dugroupe G vient en deuxième position (14 à 25 %).Streptococcus agalactiae du groupe B et S. dysgalactiaedu groupe C sont plus rarement isolés (< 10 %).

D’autres bactéries ont été plus occasionnellementisolées à partir des échantillons cutanés, notammentStaphylococcus aureus et des bacilles à Gram négatifcomme des entérobactéries et Pseudomonas aeru-ginosa, seules ou associées à des streptocoques. Laresponsabilité de ces autres bactéries dans l’érysi-pèle reste à démontrer. En effet S. aureus est uncommensal de la peau et des muqueuses, et son isole-ment à partir d’échantillons cutanés est difficile àinterpréter. Dans l’étude multicentrique incluant69 patients conduite par Bernard [19], S. aureus a étéisolé, seul chez 12 patients et associé chez dix patients.Ces associations microbiennes streptocoque-staphy-locoque ne sont pas exceptionnelles [20], et l’hypo-thèse d’une possible synergie entre les deux a étéavancée. Toutefois, aucune série d’érysipèles résis-tants à la pénicilline G avec isolement de S. aureus nerapporte de guérison spectaculaire après l’utilisationd’un antistaphylococcique [19]. Un argument pourune origine staphylococcique pourrait être l’existenced’abcès dans 3 à 12 % des cas d’érysipèle. Cependant,dans ces cas, S. aureus peut être considéré comme unagent de surinfection [7].

Au total, il n’existe pas d’argument formel en faveurde l’étiologie primitive staphylococcique de l’érysi-pèle, seule l’étiologie streptococcique est démontrée.

Place des examens bactériologiques

Techniques utiliséesLe diagnostic bactériologique des érysipèles est dif-ficile. Il repose classiquement sur des techniquesbactériologiques directes et sur des examens séro-logiques.

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À partir des biopsies cutanées ou d’écouvillonnagedu fond de biopsies à l’emporte-pièce (punch),l’examen direct au Gram est le plus souvent négatif[21], mais peut être amélioré par l’utilisation d’anti-corps fluorescents dirigés contre les structurespariétales (sensibilité 64 à 70 %).

La recherche d’antigène extractible du polyo-side C des streptocoques, directement à partir de ceséchantillons, est de sensibilité médiocre : 47 à 58 %.

L’utilisation d’un coffret commercialisé pourla détection oropharyngée des streptocoques dugroupe A a montré une spécificité de 96 % et unesensibilité de 94 % à partir de lésions superficiellesde pyodermites [22]. Une étude prospective pourévaluer cette application aux biopsies et aspirationsserait intéressante à mettre en place dans l’érysipèle.

La culture, qui seule permet l’isolement de la bac-térie et l’étude de sa sensibilité aux antibiotiques, estpeu sensible (14 à 41 %).

Le faible rendement des techniques bactério-logiques directes serait en lien avec la faible densitémicrobienne (moins de 1000 bactéries/g de tissu) [23].

La détection du génome bactérien par desméthodes de biologie moléculaire, intéressante dansson principe, n’a pas été pour le moment utiliséedans le cadre de l’érysipèle.

La recherche directe de S. pyogenes, effectuée àpartir de la porte d’entrée cutanée, est positive dansprès de la moitié des cas [7, 111. Contrairement àl’isolement d’un Staphylococcus aureus dans un pré-lèvement cutané, la présence de S. pyogenes a unesignification pathogène. Dans la gorge, la recherchede S. pyogenes est positive dans moins de 5 % descas [14]. Les hémocultures sont peu sensibles(positives dans 2 à 3 % des cas) mais permettentd’affirmer l’origine streptococcique de l’infection.

La sérologie streptococcique a un intérêt pratiquemodeste du fait de son manque de spécificité et dudélai nécessaire pour objectiver la séroconversion.Bien que les antistreptodornases soient classique-ment plus sensibles que les antistreptolysines 0(ASLO) dans les infections cutanées, une meilleuresensibil i té de ces dernières est généralementobservée dans le cas particulier de l’érysipèle, avecdes résultats variant de 36 à 58 % de positivité.

Intérêt des examens bactériologiquesDu fait de leur manque de sensibilité ou de leurpositivité tardive, l’intérêt des examens bactério-logiques est plus d’ordre épidémiologique que diag-nostique. Dans les formes typiques et en l’absencede signe(s) de comorbidité, aucun examen bactério-logique n’est nécessaire. La recherche directe de labactérie dans les lésions d’érysipèle et dans la ported’entrée entre davantage dans le cadre de larecherche clinique.

Données physiopathologiquesPeu de chose est connu sur la physiopathologie del’érysipèle. L’érysipèle est une maladie originale dufait de son caractère toxi-infectieux et de la faibledensité bactérienne dans les lésions. Streptococcuspyogenes possède de nombreux facteurs de virulencecomme des exoenzymes et des exotoxines variées(toxine érythrogène, exotoxine pyrogène strepto-coccique SPE). Ces toxines SPE sont responsablesde l’éruption mais aussi du choc toxique. Elles secomportent comme des superantigènes provoquantune cascade de réactions inflammatoires. L’hypo-thèse d’une hypersensibilité au Streptococcus pyo-genes n’est pas démontrée.

Données cliniques

Diagnostic

Diagnostic positifLe diagnostic d’érysipèle est facile et clinique, maisrepose sur des critères encore non validés. Le débutest souvent brutal. Il associe des signes généraux,volontiers annonciateurs et des signes locaux.

Les signes généraux : fièvre, frissons, malaise, syn-drome pseudogrippal. La fièvre est habituellementélevée atteignant au moins 38,5 “C, voire 39 ou 40 “C[24]. Cependant, 15 % des patients hospitalisés sontapyrétiques avant tout traitement.

Les signes locaux : un placard inflammatoire(érythème chaud, douloureux et œdémateux),s’étend en quelques jours. Plus de 85 % des érysipè-les siègent aux membres inférieurs, pour moins de10 % au visage et 2 à 12 % aux membres supérieurs[SI. La topographie actuelle a rendu le diagnosticmoins aisé du fait de la disparition du bourrelet péri-phérique classiquement mais inconstamment décritau visage. Par ailleurs, la frontière nosologique estfloue avec les « cellulites » décrites par les Anglo-Saxons [25]. Les critères cliniques et bactério-logiques utilisés pour différencier « cellulites » etérysipèle ne sont pas significatifs et les deux affec-tions étant dans la plupart des cas liées au strepto-coque, nous proposons que l’érysipèle et la« cellulite » aiguë chez l’adulte soient la mêmemaladie [193.

La porte d’entrée doit être recherchée. Elle estprésente dans trois-quarts de ces cas. Elle peutêtre minime (piqûre d’insecte, intertrigo inter-orteils) ou plus évidente (ulcère de jambe, plaie trau-matique...).

Ce placard inflammatoire est généralement isolé,et il n’a pas tendance à la guérison centrale mais plu-tôt par les bords. Il peut exister des bulles (suivantl’importance de l’œdème), un purpura pétéchialmais pas de nécrose.

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Il existe une adénopathie satellite sensible dans46 % des cas et/ou une lymphangite dans 26 % descas [SI.

Diagnostic différentielLe problème majeur est de savoir différencierl’érysipèle des dermo-hypodermites nécrosantes oude la fasciite nécrosante dont les signes initiaux peu-vent être proches, bien que ces affections soient pro-bablement des maladies distinctes dont la gravité etla prise en charge sont radicalement différentes. Ceséléments seront discutés dans la question 3.

Certains diagnostics différentiels sont aisés àéliminer : la phlébite profonde et superficielle, lesautres dermo-hypodermites bactériennes aiguësnon streptococciques (Erysipelothrix rhusiopathiae,Hemophilus influenzae (type b), Aeromonas hydro-phyla, Pasteurella multocida) et l’érythème migrant àBorrelia burgdorferi, qui devront être suspectés surl’anamnèse et l’échec de l’antibiothérapie.

D’autres diagnostiques différentiels ont des limitesimprécises avec celui d’érysipèle :- la dermite de stase responsable d’une grosse jamberouge parfois fébrile, souvent bilatérale sur un ter-rain veineux pathologique et évoluant par pousséesinflammatoires souvent spontanément régressives.Il n’existe pas d’argument bactériologique (carl’absence de détection du streptocoque n’est pas raredans l’érysipèle) ni évolutif ou thérapeutique (larégression spontanée pouvant se voir dans l’érysi-pèle) pour formellement éliminer le rôle du strepto-coque dans ces formes ;- les dermo-hypodermites sur cicatrice d’interven-tion (prothèse de hanche, réduction mammaire,prise de greffon saphène) donnant un placardinflammatoire sur la cicatrice, souvent fébrile, quipeuvent relever de plusieurs mécanismes (infectieux,allergique...).

Enfin, on élimine la cellulite de Wells et la maladiepériodique.

Examens complémentairesCes examens ne sont pas indispensables. L’existenced’une hyperleucocytose à polynucléaires qui confortele diagnostic n’est trouvée que dans la moitié des cas.Les hémocultures sont recommandées en présenced’une fièvre élevée avec des facteurs de comorbiditéWI-Évolution

Évolution sous traitementL’évolution est favorable sous traitement antibio-tique dans huit à neuf cas sur dix en pratique hospi-talière ou en médecine ambulatoire, tous traitementsconfondus [27].

L’apyrexie est obtenue avant l’amélioration dessignes locaux. Quatre-vingts pour cent des patientsont une température inférieure à 38 “C en 72 heures113,191, mais 20 % ont encore un œdème et 40 % unérythème au septième jour. La durée d’hospitalisa-tion, variable selon les études, les traitements et lapopulation étudiée, est de cinq jours à plus de22 jours, la durée moyenne étant de dix à 13 jours[28, 291.

Critères de gravité initialeLa mortalité a chuté de 20 % à 0,5 % selon lesétudes rétrospectives depuis l’avènement des traite-ments antibiotiques et est actuellement liée à lacomorbidité [7, 131.

La gravité initiale d’un érysipèle est fonction duterrain (âge élevé, diabète, alcoolisme, surpoids,maladies cardiovasculaires) et de la sévérité dutableau local et systémique.

Les complicationsElles sont exceptionnelles.

Les complications locales : 1) les abcès, apparais-sant dans 3 à 12 % des cas suivant les séries, sontd’évolution favorable après drainage, sans modifica-tion de l’antibiothérapie. Staphylococcus aureus estparfois retrouvé dans l’abcès, mais la preuve de saresponsabilité dans ces complications n’est pasétablie. Les nécroses superficielles résultent del’élimination des toits de bulles et doivent êtredistinguées des nécroses profondes caractéristiquesdes DHBN ; 2) les thromboses veineuses profondes(cf. Question 3).

Les complications générales sont exceptionnelles[2, 29-321 ; les toxidermies à la pénicilline sont lesplus fréquentes : 5 % [13] ; de rarissimes septicémiessont décrites ; des décompensations de tares sonttoujours à craindre [29].

1 Hugo-Persson M, Nolin K. Erysipelas and group G strepto-cocci. Infection 1987 ; 15 : 184-7.

2 Jorup-Ronstrom C. Epidemiological, bacteriological andcomplicating features of erysipelas. Stand J Infect Dis 1986 ;18 : 519-24.

3 Brat ton RL, Nesse RE. St Anthony% Fire: diagnosis andmanagement of erysipelas. Am Fam Phys 1995 ; 51 : 401-4.

4 Bisno AL, Stevens DL. Streptococcal infections of skin andsoft tissues. N Engl J Med 1996 ; 334 : 240-5.

5 Hiehet AS. Hav RJ. Roberts SOB. Cellulitis and ervsioelas. In:Champion’RH: Burton JL, Eblings FJG, Eds. Rook-WilkinsonEbling: textbook of dermatology, 5th ed. Oxford: BlackwellScientific Publications; 1992. p. 968-73.

6 Hammar H, Wanger L. Ervsipelas and necrotizing fasciitis. BrJ Dermatol 1977 y96 : 409-19:

7 Chartier C, Grosshans E. Erysipelas. Int J Dermatol 1990 ; 29 :459-67.

8 Leppard BJ, Seal DV, Colman G, Hallas G. The value of bac-teriology and serology in the diagnosis of cellulitis and erysi-pelas. Br J Dermatol 1985 ; 112 : 559-67.

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Question 2 - Quelle prise en charge pour I’éwsipèle ?

Traitement antibiotique

Rationnel microbiologique et molécules utilisablesLe traitement de première intention de l’érysipèledoit faire appel à une antibiothérapie active sur lesgermes habituellement incriminés, c’est-à-dire enpratique les streptocoques B-hémolytiques (strepto-coque de groupe A : Streptococcus pyogenes, etstreptocoques des groupes B, C ou G).

Les antibiotiques utilisables dans ce traitement, engénéral présomptif, appartiennent à la famille desp-lactamines ou à celle des macrolides et apparentés(lincosamides et synergistines).

Les alactaminesIn vitro, les streptocoques impliqués dans les érysi-pèles restent très sensibles aux B-lactamines.

Les pénicillines G et V ont un spectre antibacté-rien étroit incluant les streptocoques et certainsgermes anaérobies.

La pénicilline G injectable est l’antibiotique deréférence du traitement de l’érysipèle, en grandepartie validé par des études rétrospectives [l, 21 etseulement par deux études prospectives [3, 41. Lesdoses, modalités d’administration et durée de traite-ment sont variables. La plupart des auteurs [2,5] uti-lisent la pénicilline G par voie intraveineuse, à ladose de 12 millions d’unités par jour sur une duréede cinq à dix jours. Dès l’obtention d’une apyrexiestable et l’amélioration des signes locaux, un relaisoral est effectué soit par pénicilline V (4 à 6 MU/j)[2, 51, soit par les macrolides (érythromycine 2 g/j)[5, 61 ou la clindamycine [3] en cas d’allergie à lapénicilline, soit par la pristinamycine (3 g/j) [7].D’autres auteurs [2, 71 prennent d’emblée un relaispar la benzathine-pénicilline par voie intramus-culaire.

L’administration de pénicilline V (4 à 6 MU/j) entraitement oral d’emblée a été comparée à la péni-cilline G dans une seule étude avec des résultatssimilaires, mais sur un petit nombre de patients [3].

Les pénicillines du groupe A, notamment l’amoxi-cilline, n’ont pas donné lieu à des essais spécifiques.Cependant leur spectre, leur pharmacocinétique etleur usage en pratique courante actuelle permettentd’envisager leur utilisation dans l’érysipèle. Elles ontl’avantage d’une bonne tolérance et d’une adminis-tration possible par voie orale (3 à 45 g/j en troisprises) ou intraveineuse (3 à 6 g/j en trois ou quatreadministrations quotidiennes).

Les autres P-lactamines ont des spectres anti-bactériens élargis en particulier au Staphylo-CO~CUS aureus méthicilline-sensible (pénicillines dugroupe M avec l’oxacilline et la cloxacilline, associa-

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Érysipèle et fasciite nécrosante 257s

tion amoxicilline-acide clavulanique, céphalospo-rines), à certains anaérobies et bacilles Gram négatif.Le rôle étiopathogénique de Staphylococcus aureusdans l’érysipèle typique de jambe restant incertain, ilest impossible, dans l’état actuel des connaissances,de recommander en première intention un antibio-tique actif à la fois sur le staphylocoque et le strep-tocoque. Ces autres /3-lactamines trouvent leur placeen deuxième intention, en cas d’évolution non satis-faisante.

Les macrolides et apparentés(lincosamides, synergistines)Le taux de résistance de Streptococcus pyogenes àl’érythromycine est stable en France de 1995 à 1998,se situant entre 5 et 9 % [8, 91. Il peut s’agir d’unerésistance liée à une modification de la cible ribo-somale avec une résistance croisée entre macrolides,lincosamides et composé B des synergistines (phéno-type de résistance MLSb). Un mécanisme de résis-tance par efflux touchant des macrolides dont lastructure comporte 14 ou 15 atomes (érythro-mycine, roxithromycine, clarithromycine, azithro-mycine) s’est récemment répandu dans certains payscomme l’Espagne [lO]. Ces souches, à phénotype derésistance M, restent sensibles aux lincosamides(clindamycine) et aux synergistines.

Macrolides et lincosamides sont également actifssur une partie des souches de Staphylococcus aureus,mais seules les synergistines restent actives sur laquasi-totalité des souches de cette espèce.

Deux études prospectives françaises, l’une compa-rant la roxithromycine à la pénicilline G [4] et uneétude ouverte, non comparative avec la pristinamycine(3 g/j) [ll] apportent des arguments d’usage de cescomposés. L’utilisation d’un macrolide est sous-tenduepar la sensibilité de l’agent en cause ; l’incertitudeactuelle sur l’évolution des phénomènes de résistancedes streptocoques aux macrolides justifie une sur-veillance épidémiologique des résistances et ne permetpas de les recommander en première intention. Lapristinamycine a un spectre adapté au streptocoque enfaveur de son utilisation, mais sa tolérance digestivevariable peut rendre son observance difficile. L’usagede la clindamycine est limité par les effets indésirablesdigestifs (diarrhée, colite pseudomembraneuse).

Les glycopeptidesIls sont toujours actifs sur Streptococcus pyogenes[12]. Leur usage n’est habituellement pasrecommandé pour ce germe parce qu’ils n’offrent pasde supériorité sur les B-lactamines ou les macrolideset apparentés, ni en terme d’activité antibactérienne,ni en terme de diffusion tissulaire. En revanche, ilssont actifs contre les Staphylococcus aureus résistantsaux p-lactamines et aux macrolides.

La nécessité d’une administration parentérale etleur coût sont des éléments défavorables.

Indications thérapeutiquesLes indications thérapeutiques dans les érysipèlesdépendent de la décision d’hospitalisation ou demaintien à domicile, de la gravité du tableau cliniquelocal et général, de l’incertitude diagnostique devantun tableau atypique, de la notion d’allergie auxp-lactamines, de l’observance attendue d’un traite-ment par voie orale et des maladies associées.

La posologie choisie doit tenir compte des condi-tions d’élimination, notamment rénale, mais aussi dupoids, particulièrement chez les sujets obèses.

En cas d’hospitalisation initialeUn tableau clinique local ou général initial gravejustifie le choix du traitement de référence parpénicilline G en quatre à six perfusions par jour (dixà 20 millions d’unités par jour). Les contraintes etrisques iatrogéniques de perfusions répétées justi-fient la validation par des essais comparatifs denouvelles approches d’administration parentérale(administration courte, administration uniquoti-dienne par voie intramusculaire ou intraveineusedirecte d’un antibiotique à demi-vie longue [cef-triaxone], et de traitements oraux d’emblée).

L’obtention de l’apyrexie permet le passage à uneantibiothérapie orale (pénicilline V, amoxicilline)jusqu’à la disparition des signes locaux, avec unedurée totale de traitement comprise entre dix et20 jours.

Devant un érysipèle typique, sans signes de gra-vité, un traitement oral est justifié (amoxicilline). Iln’y a pas de consensus au sein du jury pour l’utilisa-tion de la pristinamycine en première intention. Lasortie précoce d’hospitalisation (3e-5e jour) estpossible dès l’apyrexie sous réserve d’un relais parle médecin extra-hospitalier qui doit s’assurer del’absence de complications locales et de l’obser-vance.

En cas de maintien à domicileUn traitement oral par amoxicilline (3 à 4,5 g/j entrois prises quotidiennes) est initié avec une sur-veillance attentive des signes généraux (apyrexiehabituellement obtenue après 72 heures de traite-ment) et des signes locaux. Il n’y a pas de consensusau sein du jury pour l’utilisation de la pristinamycineen première intention. La persistance de la fièvre,l’apparition de nouveaux signes locaux ou généraux,la décompensation d’une maladie associée doiventconduire à une hospitalisation. Le traitement esthabituellement de 15 jours, avec contrôle en fin detraitement de la guérison et mise en place d’une pré-vention secondaire si nécessaire.

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2.58s Texte long

En cas d’allergie aux /%lactaminesLe choix se porte sur la pristinamycine ou la clinda-mycine. Certains antibiotiques disposent d’une for-mulation parentérale intraveineuse.

Les glycopeptides, en cas d’intolérance digestiveou veineuse à ces antibiotiques, peuvent trouver iciune indication.

Évolution défavorable sous traitementLe suivi de l’évolution sous traitement initial exigeune attention particulière. En cas de non-améliora-tion ou d’aggravation, il faut penser à la possibilitéde lésions profondes et/ou nécrosantes ou à celle degermes résistants. Il faudra alors reconsidérer le trai-tement antibiotique et, dans certains cas, décider ungeste chirurgical.

Critères d’hospitalisation primaire et secondaire

Aucune étude clinique prospective n’a tenté de validerdes critères d’hospitalisation primaire et secondaire aucours de ces 20 dernières années. Les études concer-nant l’érysipèle étant exclusivement hospitalières, il estimpossible de déterminer les motifs de l’hospitali-sation autrement que de façon indirecte.

Une étude de pratique multicentrique prospectiveextra-hospitalière réalisée à l’occasion de cetteconférence de consensus a analysé les motifsd’hospitalisation : elle montre qu’au moins 50 % despatients ne sont pas hospitalisés en première inten-tion. En l’absence de données validées, cette pra-t ique répandue autorise à proposer les cri tèresd’hospitalisation suivants.

Critères d’hospitalisation initialeL’hospitalisation d’emblée doit se faire chaque foisqu’un traitement parentéral ou une surveillance rap-prochée sont nécessaires : existence d’un doutediagnostique, de signes généraux importants, d’unecomorbidité ou d’un contexte social rendant le suivià domicile impossible.

Critères d’hospitalisation secondaireSi le maintien à domicile est décidé, le médecin doitassurer une surveillance quotidienne des signesgénéraux et des signes locaux. La persistance de lafièvre après 72 heures de traitement, l’apparition denouveaux signes locaux ou généraux, la décompen-sation d’une maladie associée doivent conduire àenvisager une hospitalisation.

Traitement local

Aucune étude n’a évalué l’effet d’un traitement localantiseptique ou antibiotique à visée étiologique surl’érysipèle ou sur la porte d’entrée. Compte tenu de

la physiopathologie de l’érysipèle, il est raisonnablede penser qu’un tel traitement n’a aucun intérêt.L’application de topiques anti-inflammatoires estcontre-indiquée. Le traitement adapté de la ported’entrée (éradication d’un intertrigo interorteils,soins d’ulcère de jambe...) est en revanche nécessaire.

Risque de thrombose veineuse profondeet place des anticoagulants

Il y a une tendance actuelle à rechercher systémati-quement une thrombose veineuse profonde ou à uti-liser un traitement anticoagulant préventif au coursde l’érysipèle. Elle est due à la crainte que l’érysipèlepuisse favoriser la thrombose veineuse profonde, àla confusion de la séméiologie de ces deux affectionset à la difficulté d’appréciation clinique d’une throm-bose veineuse profonde sur un membre at teintd’érysipèle. Cependant, le risque de survenue d’unethrombose veineuse profonde au cours de l’érysipèledes membres inférieurs est faible : il peut être estiméentre 0,7 et 4,9 % [ll, 13-161. Le risque de throm-bose des sinus caverneux ne paraît pas augmenté encas d’érysipèle du visage [17]. Ce risque, considérécomme faible selon les critères d’estimation durisque de maladie veineuse thrombo-embolique ensituation médicale [18]. ne justifie pas l’utilisationsystématique d’anticoagulants à but prophylactiqueau cours de l’érysipèle des membres inférieurs. Il n’ya pas non plus de justification pour l’emploi d’anti-agrégants. Un traitement anticoagulant préventifdoit être discuté seulement en cas de facteur derisque thrombo-embolique associé, comme danstoute maladie infectieuse aiguë [18, 191. Ce risquefaible ne justifie pas non plus la recherche systé-matique de thrombose veineuse profonde paréchodoppler. En revanche, un échodoppler et éven-tuellement une phlébographie doivent être pratiquésen cas de doute clinique pour une thrombose vei-neuse profonde associée. Sa survenue reste rare enpratique. La persistance d’un œdème n’est pas unélément discriminatif en faveur d’une thromboseveineuse profonde car il disparaît tardivement aucours de l’érysipèle non compliqué [4].

La mise en place d’une contention veineuse et lelever précoce n’ont pas été évalués. Ils pourraientcontribuer à limiter la survenue de thrombose vei-neuse profonde chez les malades à risque et à luttercontre le lymphœdème induit ou aggravé par l’érysi-pèle. De telles études devraient être entreprises.

AINS et corticoïdes

Aucune étude ne justifie l’utilisation d’anti-inflam-matoires non stéroïdiens (AINS) ou de corticoïdesau cours de l’érysipèle. Il n’y a pas de raison de

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Érysipèle et fasciite nécrosante 259s

penser qu’ils soient capables d’écourter les signesinflammatoires locaux ni qu’ils aient un intérêt dansla prévention des complications ou des séquelles del’érysipèle. Ces médicaments n’ont donc pas d’indi-cation au cours de l’érysipèle.

A l’inverse, de nombreuses observations publiéesdans la littérature rapportent des complications àtype de fasciites nécrosantes, survenues lors de I’uti-lisation d’AINS au cours de dermo-hypodermitesaiguës bactériennes. Des études plus rares font étatd’une association entre la survenue de fasciite nécro-sante et la prescription d’AINS dans des cir-constances favorisantes de dermo-hypodermitesaiguës bactériennes, en particulier la varicelle chezl’enfant [20-221.

Les données actuellement disponibles ne permet-tent pas d’établir de façon certaine une relation decause à effet. L’utilisation des AINS est donc décon-seillée. En cas de fièvre élevée ou mal tolérée, desantipyrétiques et/ou des antalgiques comme le para-cétamol doivent être utilisés préférentiellement.

Il n’y a pas de données laissant supposer que lescorticoïdes prescrits en phase aiguë de l’érysipèlepuissent favoriser la survenue de fasciite nécrosante.A l’inverse, leur action immunosuppressive propreou les affections pour lesquelles ils sont prescrits,parfois en association à d’autres immunosuppres-seurs, augmentent vraisemblablement le risque decomplications, en particulier septiques, de l’érysi-pèle.

Chez un malade traité au long cours par AINS oupar corticothérapie générale, il n’y a pas lieu demodifier ce traitement de fond lorsqu’il est indispen-sable.

Prévention primaire et secondaire de l’érysipèle

Prévention primaireAucune étude ne s’est intéressée à ce problème. Ilest possible que la prise en charge adaptée de lastase veineuse et lymphatique puisse représenterune prévention efficace. De même, le traitementdes intertrigos interorteils est nécessaire dans lapopulation générale et particulièrement chez lesmalades présentant une stase veineuse ou lym-phatique. Ces mesures sont probablement àrecommander aussi aux malades ayant ou devantavoir une prothèse articulaire des membresinférieurs, après saphénectomie pour pontage coro-narien ou en cas de lymphœdème postradiothé-rapique ou postchirurgical.

Prévention secondaireL’érysipèle est une affection dont le taux de récidive,évalué dans des études de suivi, est de 12 % à sixmois et 30 % à trois ans [3,23]. Les récidives peuvent

être nombreuses chez un même malade ; elles ne sur-viennent pas forcément dans le même territoire [24].

Elles sont favorisées par la persistance ou la récidivedes facteurs initiaux ayant favorisé le premier épisode :lymphœdème, persistance ou récidive de la ported’entrée. Le rôle d’un traitement initial trop court outrop tardif a été évoqué, mais aucune étude ne permetactuellement de retenir un tel facteur [2, 51.

L’impact des mesures curatives de ces facteurs derisque de récidive n’a jamais été évalué. Cependant,la fréquence des récidives conduit à penser qu’ellessont indispensables à mettre en œuvre dès le pre-mier épisode d’érysipèle. La connaissance des fac-teurs favorisants suggère qu’elles doivent reposersur :- l’identification et le traitement efficace de la ported’entrée, surtout quand elle est chronique. C’est lecas, en particulier, de la prise en charge adaptéed’un intertrigo interorteils et de ses facteurs favori-sants ;- la prise en charge au long cours d’un lymphœdèmeou d’un œdème de cause veineuse par contentionet/ou drainage lymphatique manuel.

La prophylaxie des récidives par traitement anti-biotique prolongé a été évaluée dans quelquesétudes comparatives, certaines de méthodologiediscutable. Les populations de malades concernés,l’antibiothérapie choisie et sa durée sont diffé-rentes [25-281. La benzathine-pénicilline G parvoie intramusculaire, l’érythromycine et la pénicil-line V per os ont été utilisées pour des durées dequatre à 18 mois. Ces antibiothérapies paraissentefficaces, diminuant le nombre ou empêchant lesrécidives dans le groupe traité. Les études suffisam-ment prolongées montrent que les récidives réap-paraissent à l’arrêt du traitement. La tolérance dela prophylaxie antibiotique est satisfaisante. Soncoût est moindre que celui de la prise en charge desrécidives [23]. Ses modalités (prise orale quoti-dienne ou injections intramusculaires répétées, trai-tement au long cours) imposent cependant descontraintes aux malades.

Une antibiothérapie préventive des récidivess’adresse donc préférentiellement aux malades ayantdéjà eu plusieurs récidives ou chez qui les facteursfavorisants sont difficilement contrôlables.

Elle fait appel aux pénicillines : pénicilline V, 2 à4 g par jour en deux prises quotidiennes par voieorale ou benzathine-pénicilline, 2,4 millions d’unitéstoutes les deux à trois semaines par voie intramus-culaire. Cette deuxième modalité peut être le garantd’une bonne observance.

En cas d’allergie aux P-lactamines, le traitementfait appel à un macrolide par voie orale.

Elle doit être très prolongée, voire définitive carson effet n’est que suspensif.

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260s Texte long

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QUESTIONS 3 ET 4 : FASCIITE NÉCROSANTE

Question 3 - De quelles données a-t-on besoinauiourd’hui pour prendre en chargeles dermo-hypodermites bactériennes nécrosanteset fasciites nécrosantes (DHBN-FN) ?

Introduction

Ces termes désignent des formes d’infection raresmortelles dans près de 30 % des cas, dont un agentcausal important est Streptococcus pyogenes, fré-quemment associé à d’autres pathogènes. L’infectionprovoque une nécrose de l’hypoderme et de l’apo-névrose superficielle sous-jacente et secondairementdu derme.

Dans les formes dites subaiguës, la nécrose restelimitée. Dans les formes aiguës ou suraiguës, elle sepropage de façon parfois foudroyante dans l’apo-névrose superficielle ou même en profondeur dansles fascia intermusculaires.

Plusieurs points méritent attention :- la terminologie quelque peu obscurcie par l’abon-dance des termes anglais et français qui ne recou-vrent pas tous la même réalité ;-les rapports de cette affection avec l’érysipèle.L’érysipèle est une dermo-hypodermite aiguë nonnécrosante, fréquente, devenue bénigne grâce àl’antibiothérapie. Les deux maladies peuvent êtresémiologiquement t rès proches. Nous pensonsqu’elles sont différentes, mais on ne peut exclure desformes de passage de l’une vers l’autre ;- la signification et le rôle des pathogènes fréquem-ment associés notamment dans certaines formestopographiques de la maladie, tels que S. aureus,

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anaérobies divers, entérobactéries ou Pseudomonasaeruginosa.- l’accord est fait sur la nécessité d’une exérèse pré-coce des tissus nécrosés, mais la difficulté d’affirmercliniquement la nécrose rend la décision chirurgicaledifficile dans les formes subaiguës et pose le pro-blème d’explorations complémentaires d’imagerie etde prélèvements microbiologiques ou biopsiques,dont l’intérêt doit encore être évalué.

Terminologie - nosologie

Le problème est de regrouper sous un vocable sipossible unique des termes aussi différents que : cel-lulite nécrosante (necrotizing cellulitis, necrotizingsoft tissue infections), gangrène synergistique oumaladie de Meleney, gangrène gazeuse, fasciitenécrosante, gangrène de Fournier. Ce vocable doitégalement être capable de prendre en compte desformes topographiques, évolutives ou microbio-logiques.

Le mot gangrène fait trop explicitement référenceà la myonécrose à Clostridium perfringens.

Le terme de cellulite paraît inapproprié et lesraisons en ont été exposées plus haut.

Le terme de fasciite nécrosante semble trop limi-tatif pour une affection qui intéresse l’aponévrosesuperficielle mais aussi l’hypoderme.

A l’inverse, l’expression dermo-hypodermitenécrosante n’évoque pas suffisamment l’atteinte pos-sible des fascia profonds.

Pour ces raisons, le consensus se porte sur l’appel-lation un peu compliquée mais globale de dermo-épidermite nécrosante avec ou sans fasciite nécro-sante, désignée par l’acronyme DHBN-FN dans lasuite de ce texte.

Incidence

La maladie se rencontre à tout âge, mais son inci-dence augmente avec l’âge. Il existe une certaineprédominance masculine.

Le nombre de publications qui la concernent a étémultiplié par cinq au cours des dix dernières années.Malgré cela, son incidence n’est pas connue avecprécision notamment en France. Le taux annuelserait de 500 à 1500 cas aux Etats-Unis en 1994 [l].On connaît mieux par plusieurs études la prévalencedes infections streptococciques sévères : une étuderétrospective canadienne entre 1987 et 1991 évaluaità 0,3 pour 100 000 par an le nombre de chocs strep-tococciques dont la moitié avait une infection desparties molles [2]. L’incidence d’infections sévères àstreptocoque était de 4,3 pour 100 OOO/an dans unecommunauté d’Arizona avec 8 % de fasciites nécro-santes [3]. La seule étude prospective émane d’une

surveillance de la population de l’Ontario de 1991 à1995 [4] qui a montré un taux de fasciites nécro-santes streptococciques de 0,085 pour 100 000 en1991 et de 0,4 pour 100 000 la dernière année. Cettetendance à l’augmentation des infections gravesstreptococciques avait aussi été observée en Suède.

Données bactériologiques générales

La recherche de l’étiologie bactérienne et la déter-mination de la sensibilité aux antibiotiques des bac-téries isolées sont essentielles pour guider lathérapeutique antibiotique d’une DHBN-FN.

Cette infection bactérienne est souvent plurimicro-bienne, et seul un prélèvement bactériologiqueeffectué dans de bonnes conditions permet [5]d’identifier les germes responsables.

Le streptocoque P-hémolytique du groupe A(Streptococcus pyogenes) est un agent causal impor-tant de la DHBN-FN. L’implication prépondérantede S. pyogenes est confirmée par sa mise en évidencedans 50 % des hémocultures effectuées chez despatients avec une DHBN-FN associée à un syn-drome de choc toxique [6,7].

Les principaux facteurs bactériens de pathogéni-cité de cette espèce sont la présence d’une capsule etde la protéine M, impliquées respectivement dans laphagocytose et l’adhérence bactérienne aux cellules.

D’autres produits élaborés par S. pyogenes ont unrôle pathogène : les streptodornases, streptokinaseset hyaluronidase facilitent la progression bacté-rienne dans les tissus [8]. Les streptolysines 0 et Sparticipent à la nécrose tissulaire. L’exotoxine pyro-gène A a une structure comparable à celle de latoxine responsable du choc toxique staphylococ-cique (TSST-1) [7].

D’autres streptocoques des groupes G et C (S. dys-gaiuctiae, S anginosus), plus exceptionnellement dugroupe B (S. agaluctiae) peuvent aussi être impliqués[9]. De même, S. aureus est parfois isolé.

Des associations plurimicrobiennes mixtes (aéro-bies et anaérobies) sont mises en évidence dans 40 à90 % des fasciites nécrosantes [5, 101, toutes locali-sations confondues.

Ces associations sont souvent décrites commesynergiques (ou « synergistiques »), et se retrouventmajoritairement chez des patients présentant desfacteurs de comorbidité (interventions chirurgicales,immunodépression). Les espèces en cause sont desanaérobies, des entérobactéries, des streptocoques,du S. aureus, des entérocoques. S. pyogenes estretrouvé dans environ 50 % des prélèvements. Onnote dans 20 % des cas des hémocultures positives àentérobactéries, et quelques unes à anaérobies [5].

Il est cependant difficile d’avoir une bactériologieexhaustive pour ces prélèvements plurimicrobiens.

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Les espèces anaérobies se répartissent différem-ment selon la localisation de la porte d’entrée et dufoyer de nécrose.

Ainsi, les Bacteroides sp. et les Clostridium sp. pré-dominent dans les fasciites nécrosantes siégeant endessous du diaphragme, alors que Porphyromonassp. et Fusobacterium sp. sont retrouvés dans des fas-ciites nécrosantes du cou, de la tête et du thorax [5].

La présence de gaz et de crépitation est égalementassociée à la présence de Clostridium sp. et d’entéro-bactéries, et survient en général à la suite d’une plaietraumatique ou d’une intervention chirurgicale [ 111.Une origine hématogène est possible à partir d’unfoyer digestif [12].

D’autres bactéries ont pu être, plus rarement,impliquées tels Pseudomonas aeruginosa chez lepatient neutropénique, Aeromonas sp. et Vibrio sp.acquis après un contact avec des eaux contaminées,ou des bactéries de la flore buccale (Eikenella corro-dens) après une morsure ou une injection de dro-gues.

Activité des antibiotiques

In vitro, tous les streptocoques fi-hémolytiques(S. pyogenes, S. dysgalactiae, S. agalactiae, S. angi-nosus) sont très sensibles aux P-lactamines. Ils sonten particulier sensibles in vitro à un taux depénicilline G inférieur ou égal à 0,06 g/mL. Deuxphénomènes décrits in vivo et in vitro diminuentl’activité bactéricide de la pénicilline G : l’effet ino-culum et la tolérance bactérienne [13]. Les amino-pénicillines (ampicilline, amoxicilline) montrent uneactivité équivalente. La pénétration tissulaire et lapharmacodynamie des pénicillines, notamment enmilieu mal perfusé et à densité bactérienne élevée,sont médiocres [9]. L’érythromycine, la clindamycineet les synergistines sont souvent utilisées commeantistreptococciques pour traiter les infections noninvasives chez les malades allergiques à la pénicil-line. En cas de nécrose tissulaire, elles procurent uneactivité antitoxine agissant par inhibition de la syn-thèse des protéines [14]. Le taux de résistance pourS. pyogenes en France en 1999 était de 5 à 7 % pourl’érythromycine et de 3 % pour la clindamycine.

Le staphylocoque doré (Staphylococcus aureus)provenant d’infections communautaires reste majo-ritairement sensible à l’oxacilline et à l’associationamoxicilline-acide clavulanique. La résistance vis-à-vis de la pénicilline est très fréquente. Plus de 70 %des souches résistantes à l’oxacilline sont résistantesaux macrolides et à la clindamycine.

La sensibilité des anaérobies vis-à-vis des pénicil-lines varie suivant les espèces. Bacteroides fragilis estrésistant à l’amoxicilline dans plus de 90 % des cas.Cette fréquence n’est que de l’ordre de 10 % pour

l’association amoxicilline-acide clavulanique [15]. Laclindamycine est active sur plus de 80 % des espècesanaérobies (72 % pour Bacteroides fragilis) et sur lamajorité des souches de Clostridium. La présence deB-lactamase est notée par ordre de fréquencedécroissante pour : Bacteroides fragilis (93 %), Pre-votella (61 %), Fusobacterium (30 %), Clostridium(6 %) et Porphyromonas (< 1 %). L’imipénème et lemétronidazole (sauf pour les bacilles à Gram positif)montrent la meilleure activité in vitro avec moins de5 % de souches résistantes.

Dans un modèle de myosite expérimentale àstreptocoque de la souris, qui reproduit la myositestreptococcique humaine, l’érythromycine et la clin-damycine ont montré un effet supérieur à la pénicil-line.

D’autres molécules telles que l’azithromycine, leskétolides et le linezolide pourraient être utiliséesdans l’avenir.

Physiopathologie

Il est probable que des facteurs de virulence liés àl’équipement enzymatique et toxinique des germeset des facteurs propres à l’hôte interviennent dans ledéterminisme des DHBN-FN. Un certain nombre defacteurs de risque sont décrits plus loin, mais aucuneloi générale ne s’en dégage. Il n’existe pas à notreconnaissance de modèle animal reproduisant fidèle-ment la maladie humaine.

Une porte d’entrée est retrouvée dans la majoritédes cas chez les sujets immunocompétents. L’infec-tion se développe dans l’hypoderme, et l’intensitédes phénomènes thrombotiques locaux rend comptede la nécrose du derme. Le choc septique, lorsqu’ilexiste, ne présente aucune spécificité.

Anatomopathologie

L’exploration chirurgicale met en évidence unefonte de l’hypoderme qui prend l’aspect d’unecrème verdâtre, mais l’absence de pus franc liquideest notée de façon constante [16, 171. La peau pré-sente de vastes zones de décollement qui doiventêtre repérées et explorées au stylet ou au doigt.L’aponévrose superficielle peut être intacte (hypo-dermite nécrosante) ou nécrosée (fasciite nécro-sante) et la nécrose peut at teindre les fasciaprofonds. La rareté des saignements témoigne del’extension des thromboses vasculaires. Le muscle,en l’absence d’inoculation directe ou de lésion trau-matique, est longtemps protégé par la barrière apo-névrotique, mais on peut observer des zoneslocalisées de myosite.

Au microscope, l’hypoderme est le siège d’uneinflammation œdémateuse intense riche en poly-

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nucléaires et d’une nécrose qui peuvent s’étendre àl’aponévrose musculaire, voire aux fascia pro-fonds intermusculaires. L’oedème et l’inflammations’accompagnent d’une thrombose extensive des vais-seaux cutanés.

DHBN-FN des membres dans sa forme aiguë

La caractéristique de la DHBN-FN est la discor-dance entre l’apparente discrétion des signes locauxet l’importance des lésions sous-jacentes, quis’exprime par des signes généraux graves.

Circonstances de survenueUne effraction cutanée est retrouvée dans 60 à 80 %des cas [18,19]. L’origine peut en être une plaie trau-matique ou chirurgicale, une brûlure ou une ulcéra-tion cutanée, soit chronique : ulcère de jambe, soitoccasionnelle : varicelle [18,20,21].

La varicelle est, chez l’enfant, le principal facteurde DHBN-FN streptococcique, en cause dans 30 à50 % des cas pédiatriques.

Facteurs de risque de survenueL’âge est en moyenne supérieur à 50 ans. Un âge deplus de 65 ans est un facteur de risque établi.

Le diabète est présent dans 25 à 30 % des cas[18, 221. Dans les DHBN-FN streptococciques, ilaugmente le risque de survenue : risque relatifRR = 4 [4] et 7 [23].

Un traitement par AINS au début de la maladiepourrait accroître le risque de survenue d’uneDHBN-FN (cf. Question 2). Particulièrement dans letraitement de la varicelle, il convient d’éviter touteadministration d’AINS, même si une confirmationde son effet néfaste paraît nécessaire.

D’autres facteurs de risques ont été identifiés,soit dans des séries de DHBN-FN de tous types[18, 22, 241, soit plus récemment dans les deuxétudes de DHBN-FN streptococciques avec le calculde risque relatif :- infection par le virus de l’immunodéficiencehumaine (VIH) : RR = 9 et 49 ;- hémopathies, cancer : RR = 7 ;- chimiothérapie, traitements immunosuppresseurs ;

maladies cardiovasculaires (RR = 8) et pulmo-naires (RR = 3) ;- alcoolisme : RR = 2.

Le risque de fasciite nécrosante streptococciqueest augmenté dans l’entourage familial d’un cas :RR = 100 [23], ou dans son entourage hospitalier :RR = 14 [4] et RR = 8 [23]. Ce risque nettementaccru reste toutefois très faible, compte tenu de lagrande rareté de l’infection. Il n’y a pas d’argumentpermettant de recommander une antibiothérapieprophylactique.

Signes locauxLa douleur est intense, croissante, souvent dispro-portionnée par rapport aux signes locaux.

L’œdème est induré, diffus, dépassant les limitespeu précises de l’érythème.

Les bulles peuvent être hémorragiques.Fait capital, il existe des lésions de nécrose : il faut

cependant différencier la nécrose superficielle peuspécifique (souvent secondaire à des ulcérationspostbulleuses) et la nécrose profonde, beaucoup plusévocatrice, avec ses aspects à type de taches cya-niques, bleu grisé, mal limitées, en carte de géo-graphie. Une hypoesthésie et un aspect livedoïdepeuvent s’y associer.

Une crépitation à la palpation est inconstante. Elletraduit le plus souvent une infection à Clostridiummais peut aussi être le fait d’autres germes [l].

Signes générauxLa fièvre est habituelle mais non constante lors del’examen. Une tachycardie, une polypnée sont habi-tuelles. Une hypothermie, de l’agitation, un étatconfusionnel, une hypotension avec une tensionartérielle systolique inférieure à 90 mmHg ou infé-rieure de 40 mmHg par rapport aux chiffres habi-tuels, une oligoanurie confirmée après la mise enplace d’une sonde vésicale (inférieure à 30 mL/h)sont des signes de gravité. La présence d’un seuld’entre eux, ou encore d’une hypoxémie ou d’unethrombopénie inférieure à 100 000 définissent l’exis-tence d’un « syndrome septique grave » . L’évolutionrisque de se faire rapidement vers un état de chocseptique marqué en outre par une hypotension per-sistante malgré le remplissage vasculaire [25].

L’ensemble des anomalies est reflété par un scorede gravité (SAPS II ou APACHE II) qui résumebien les dysfonctions d’organe et dont la valeur estcorrélée au risque de mortalité [26].

Signes biologiques - bactériologie

Signes biologiquesIl existe fréquemment une hyperleucocytose, uneanémie, une hypoalbuminémie, une augmentation del’urée, une hypocalcémie et une coagulopathie detype coagulation intravasculaire disséminée.

Signes bactériologiquesDans les formes aiguës, le diagnostic bactériologiqueest le plus souvent effectué lors du temps opératoire.

Lorsque le foyer nécrosé n’est pas ponctionnable,il faut utiliser une curette qui sera placée dans unmilieu de transport, ou utiliser des écouvillons d’algi-nate de calcium placés ensuite dans un tube de trans-port type Portagermm ou dans un milieu anaérobiePGY. Dans le cas d’une ponction de sérosité à la

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seringue, il est préférable d’ensemencer directementun flacon de type Portagerm@. La seringue bouchée(sans aiguille) peut être cependant envoyée au labo-ratoire.

Il est demandé un examen direct en urgence, enprécisant une recherche par culture de germes anaé-robies.

Des hémocultures sont prélevées, si possible avantl’antibiothérapie.

Évaluation globale de la gravitéUne DHBN-FN est évidemment grave lorsque lessignes locaux sont extensifs avec une nécrose avéréeet que les signes généraux décrits ci-dessus sont pré-sents. Dans des cas extrêmes, il s’agit d’une véritable« gangrène infectieuse » extensive à flore polymicro-bienne. Cela est observé plus rarement aux membresqu’en d’autres sites (cf. infra). L’existence d’uneartérite n’est pas une condition nécessaire. L’infec-tion par des anaérobies rend compte de la percep-tion d’une crépitation neigeuse à la palpation, de laprésence de bulles de gaz à la radiographie et parfoisd’une odeur fétide. L’urgence thérapeutique médico-chirurgicale et de réanimation est extrême. 11 y a lieucependant de mentionner la possibilité de cas moinsévidents, mais tout aussi graves, où les signes locauxsont relativement frustes et limités en surface, maisoù un seul signe de gravité d’ordre général a étéobservé : l’évolution peut se faire sans délai vers unétat de choc septique, quels que soient le ou lesgermes en cause.

Enfin, l’âge avancé, le diabète, un état d’immuno-dépression ne peuvent qu’accentuer la fragilité desmalades atteints de DHBN-FN.

Formes subaiguës

La question de savoir si les dermo-hypodermitesbactériennes nécrosantes constituent une entité(autrement dit, si elles sont toujours nécrosantesd’emblée) ou si elles peuvent compliquer l’évolu-tion de dermo-hypodermites bactériennes initiale-ment non nécrosantes n’est pas formellementtranchée.

Sur le plan pratique, et quelle que soit la réponse,la problématique est la même pour le clinicien àsavoir :- de reconnaître, face à une dermo-hypodermite quin’est pas un érysipèle typique ni une fasciite nécro-sante constituée, les signes cliniques qui vont tra-duire la nécrose débutante (et donc conduire àl’indication chirurgicale) ;- de porter l’indication d’examens complémentairesvisant à objectiver la réalité de la nécrose tissulaireet à en apprécier l’étendue, sans pour autantretarder l’heure de la chirurgie.

L’expérience plaide en effet en faveur d’une trèsforte corrélation entre la précocité du diagnostic (etdonc du traitement chirurgical) et l’amélioration dupronostic [20,27].

A l’inverse, compte tenu du risque qu’une inter-vention intempestive ferait courir à un patient àl’état général parfois précaire, il paraît tout aussiimportant d’éviter un abord chirurgical systématiquede toute dermo-hypodermite bactérienne dont l’évo-lution n’est pas immédiatement favorable.

Signes cliniques

Signes locorégionauxAucun n’est spécifique, ce qui fait toute la difficultédiagnostique. La présentation habituelle est celle d’une«jambe rouge aiguë fébrile » devant laquelle il fautdécider s’il s’agit d’un érysipèle ou d’une DHBN-FN.

Il faut insister sur la nécessité d’une surveillancerapprochée, pluriquotidienne, exercée par uneéquipe médicochirurgicale expérimentée.

Les contours des lésions doivent être soigneuse-ment soulignés au feutre afin d’évaluer de façonobjective la progression des lésions, qui constitue unélément défavorable de premier ordre lorsqu’elle estobservée sous traitement antibiotique adapté à latopographie mais probabiliste.

Il ne semble y avoir dans la littérature qu’uneseule tentative (limitée) de standardisation dessignes cliniques permettant de différencier un érysi-pèle et une dermo-hypodermite nécrosante [28]. Cesréserves étant faites, il est cependant possible demettre en relief les signes cutanés qui doiventéveiller l’attention, surtout lorsqu’ils sont associés(cf. supra) : douleur croissante, œdème induré diffus,caractère purpurique et/ou bulleux (cependant nonspécifique), nécrose, hypoesthésie, aspect livedoïde.

La présence de pus et d’abcédation n’est pasconsidérée comme des indices d’une forme nécro-sante. En effet, tous les auteurs s’accordent pourdire que les constatations chirurgicales montrentun œdème, une nécrose des tissus dermo-hypo-dermiques, un exsudat sérosanglant, mais ni pus, niabcès [lO, 291.

Signes générauxDans les cas où les signes locaux ne permettent pasd’emporter la conviction du caractère nécrosant, laprésence d’un ou plusieurs signes généraux de sepsissévère constitue un argument majeur pour préco-niser une exploration chirurgicale et/ou des investi-gations complémentaires (cf. infra).

L’échec d’une antibiothérapie initiale, l’indurationdes tissus au-delà des lésions visibles et la présencede signes systémiques sont des éléments présomptifsforts [30, 311.

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Il convient donc, dans la surveillance rapprochéedes formes douteuses, d’accorder toute leur impor-tance aux éléments suivants : absence de déferves-cence rapide (48 heures) ; confusion, agitation,désorientation (bien que ces éléments soient parfoisdifficilement évaluables dans leur spécificité chez dessujets âgés plus ou moins déshydratés) ; tachypnée ;tachycardie dissociée de la température ; oligurie ;teint terreux ; hypotension.

Examens complémentairesLeur mise en œuvre ne devra pas retarder la déci-sion chirurgicale, d’autant qu’aucun d’entre eux n’estvalidé en tant qu’élément décisionnel formel.

Examens biologiquesEn pratique, outre les examens destinés à apprécier lagravité du syndrome septique et son retentissementsur les grandes fonctions vitales (NFS, plaquettes, créa-tininémie, gazométrie sanguine), un dosage des CPK(dont l’augmentation franche témoigne d’une myo-nécrose associée) est considéré comme nécessaire.

Examens bactériologiques

l RationnelPlusieurs travaux concordant indiquent le contrasteentre une charge bactérienne locale faible dansl’érysipèle (ponctions sous-cutanées négatives dansplus de 80 % des cas) et forte dans les formes nécro-santes (ponctions sous-cutanées positives dans 80 à95 % des cas) [18,32]. Dans les cas douteux, la miseen évidence d’une charge bactérienne forte pourraitdonc constituer un argument présomptif de nécrose,cet élément méritant cependant d’être validé parune étude prospective.

Il en est de même du polymorphisme des bactéries.

l TechniquePlusieurs techniques sont possibles : ponctions dephlyctènes fermées, cultures de biopsies. Plusieurséquipes privilégient la technique de ponctionsous-cutanée [32,33] : après une antisepsie cutanée,la ponction est réalisée à l’aide d’une seringue àusage unique contenant 1 à 2 mL de sérum physio-logique stérile (certains font simplement le vide dansla seringue). Le liquide est ensuite injecté par voiesous-cutanée en pleine zone pathologique (lésionbien active). Si nécessaire, l’injection-réaspirationpeut être utilisée à plusieurs reprises.

Il est indispensable de réaliser en peropératoiredes prélèvements à visée bactériologique [34].

Quelle que soit la technique, l’analyse bactério-logique doit comporter systématiquement un exa-men direct après coloration de Gram et des cultures(aérobies + anaérobies).

Les sérologies antistreptodornases B et antihyalu-ronidases sont élevées de manière importante dansles infections nécrosantes, contrairement aux anti-streptolysines 0 [35]. Leur intérêt dans une situationde diagnostic d’urgence apparaît extrêmementréduit, voire nul.

La technique de PCR a été uniquement utiliséepour rechercher des exotoxines streptococciques tis-sulaires [36]. Son intérêt mériterait d’être évaluédans les formes décapitées par une antibiothérapiepréalable.

l ImagerieLa radiographie est toujours utile car elle peutmettre en évidence la présence de gaz [37,38].

Quelques études prospectives peu nombreuses[39, 401 ont évalué l’intérêt de l’imagerie par réso-nance magnétique (IRM) avec injection de gado-linium. Les aspects évocateurs de DHBN-FN sontdes zones bien définies d’hypersignal hypodermiqueprofond, homogènes, renforcées par le gadolinium.L’IRM permet en outre d’apprécier l’extension enprofondeur de la nécrose [41], particulièrement utilesur le plan chirurgical. La sensibilité de I’IRM estexcellente. Sa spécificité est imparfaite, expliquantla surestimation fréquente de l’extension. Il fautcependant insister sur le caractère « opérateur-dépendant » de la performance de cet examen. Lescanner peut également apporter des éléments inté-ressants, mais aucune série importante n’a évalué saperformance par rapport à I’IRM.

l Place de la biopsieIl est tout à fait licite de penser que l’analyse ana-tomopathologique puisse constituer un apport utiledans ces formes douteuses, en montrant une nécrosedu fascia et/ou de l’hypoderme, associée à une infil-tration par des polynucléaires. Le problème de latechnique est important, la biopsie devant êtrechirurgicale, profonde, allant jusqu’au fascia. L’ana-lyse anatomopathologique doit être très rapide.

Une étude portant sur 43 patients suspects clini-quement de DHBN-FN a confirmé la nécrose dans12 cas, 20 autres cas correspondant à des DHB nonnécrosantes et 11 cas à des abcès sans atteinte nécro-sante [38]. La biopsie permettrait en outre d’obtenirun matériel tissulaire satisfaisant pour une analysebactériologique.

Des études complémentaires doivent confirmer lafaisabilité de la biopsie, son intérêt diagnostiquedans ces cas douteux et son innocuité.

Diagnostic différentielLes gangrènes ischémiques par insuffisance artérielledécompensée sont assez facilement rattachables àleur cause et imposent une stratégie thérapeutique

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bien différente, visant avant tout à évaluer la faisabi-lité d’une reperméabilisation artérielle plus qu’à uneexcision des nécroses cutanées. Elles peuvent enoutre être surinfectées, rendant le problème pluscomplexe. C’est sur ce terrain artériel que peut sedévelopper ce qui a pu être appelé « érysipèlenécrosant ».

Le pyoderma gangrenosum se discute principale-ment lorsqu’une nécrose cutanée se développe surune cicatrice opératoire récente. La nécrose est alorsplus superficielle, et l’examen attentif pourra noterla bordure extensive purulente caractéristique.

La gangrène synergistique postopératoire décritepar Meleney pourrait être dans certains cas un pyo-derma gangrenosum.

Formes topographiquesLes membres inférieurs représentent la topographiela plus fréquente, mais toutes les localisations ont étédécrites : membres supérieurs [42], région faciale etpériorbitaire [43, 441, ORL [45, 461, ombilicale chezles nouveau-nés [47, 481, organes génitaux externes[49,50]. Lorsqu’une intervention chirurgicale consti-tue la porte d’entrée, des atteintes du thorax et del’abdomen s’ajoutent à la liste 1511.

Formes cervicofaciales [52]

l Formes cervicalesC’est une localisation rare qui survient à la suited’infection buccodentaire ou cervicale (abcès den-taire, extraction dentaire...), d’infection de la sphèreORL (sinusite, otite, pharyngite), après une chirurgiecervicofaciale ou après un traumatisme.

Elle s’accompagne d’une mortalité élevée :38-50 % surtout s’il existe une médiastinite. Le diag-nostic précoce est difficile. Les anaérobies sont fré-quemment retrouvés [53] : 25 cas145 : 56 %, 28 à65 % dans la littérature. Il s’agit le plus souventd’une flore polymorphe. Cliniquement, elle évoluesouvent en deux phases : une première phase avecdes signes modérés (douleur, œdème, gêne locale),suivie d’une seconde phase « explosive » avec l’appa-r i t ion de s ignes cutanés évocateurs pouvants’étendre jusque sur la paroi thoracique antérieure.

L’extension peut s’accompagner d’une thrombosedes sinus caverneux, de médiastinite qui reste lacomplication la plus redoutée. L’examen tomodensi-tométrique présente un intérêt pour l’évaluation del’extension vers le médiastin.

l Formes périorbitaires [43,44]Elles surviennent plus souvent chez les enfants. Ellesfont suite à un traumatisme ou à une infection dutractus respiratoire supérieur ou sont secondaires àune chirurgie périorbitaire. Les germes le plus

souvent retrouvés sont Staphylococcus aureus etStreptococcus pyogenes pour les formes post-trauma-tiques, Haemophilus influenzae en l’absence de trau-matisme.

l Formes thoraco-abdominales [51,54]Elles surviennent après des interventions chirurgi-cales de tout type : abdominale avec l’ouverture dutube digestif, laparotomie pour des plaies péné-trantes de l’abdomen ; gynécologiques [55] ; thora-ciques ; pariétales (abdominoplasties).

La mortalité est très élevée, 30 à 70 %, car laDHB-FN est souvent associée et secondaire à unecomplication postopératoire (péritonite par lâchageou fistule anastomotique...). La contamination estfacilitée par les effractions pariétales (cœlioscopie,thoracoscopie, drainages, stomies). Dans 80 % descas, il s’agit d’une atteinte polymicrobienne par desgermes d’origine gastro-intestinale : entérobactéries(Escherichia coli, Proteus mirahilis), anaérobies dontl’isolement est difficile, streptocoque B.

Il est très important de repérer les premiers signes(érythème, œdème) au voisinage ou à distance desincisions, qui dans un contexte postopératoire pré-coce doivent faire rechercher une complicationchirurgicale sous-jacente (désunion anastomotique,abcès profond). Ces signes peuvent précéder dessignes d’irritation péritonéale d’interprétation déli-cate en postopératoire immédiat.

La tomodensitométrie avec injection et opacifica-tion digestive à l’aide d’hydrosolubles renseigne à lafois sur la complication abdominale et les lésionspariétales.

l Forme périnéale [50, 56, 571Elle est classiquement appelée gangrène de Four-nier. C’est une DHBN-FN des régions périnéale,génitale et périanale. Elle est rare et peut se voirquel que soit l’âge. Les facteurs favorisant sontidentiques. Elle se caractérise par une évolutionplus progressive, un retentissement général plusmodeste au début, une flore mixte et variée enrapport avec une porte d’entrée particulière. Larecherche de la porte d’entrée est fondamentale :urogénitale (45 % : traumatisme urétral ou prosta-tique..., bartholinite, épisiotomie, hystérectomie,césarienne...) [55, 58, 591. anorectale (33 % : infec-tion de la région anale, exploration anale instrumen-tale, pathologie colique, diverticulite, néoplasie...),cutanée (21 %).

Il s’agit d’une atteinte souvent polymicrobienne :aérobies (Escherichia coli, staphylocoque, strepto-coques...), anaérobies (Bacteroides, Clostridium).

Les signes locaux sont souvent minimes au début,rendant le diagnostic difficile [60, 611 ; elle débutecomme une bulle ou une zone de nécrose du

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Érysipèle et fasciite nécrosante 267s

périnée, des bourses ou de la vulve, rapidementaccompagnée d’un œdème considérable et de signesgénéraux de sepsis qu’il faut savoir ne pas attendre.

Des examens complémentaires sont utiles dans lesformes de début : radiographie simple (présence debulles d’air dans les tissus mous), échographie(œdème diffus, épaississement tissulaire, présenced’air, épanchement). La tomodensitométrie permetde préciser l’extension de l’infection, et de diagnos-tiquer une cause sous-jacente rétropéritonéale ouintrapéritonéale.

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Question 4 - Quelle mise en charge pourles dermo-hvpodermites bactériennes nécrosanteset fasciites nécrosantes (DHBN-FN) ?

Les DHBN-FN sont une urgence médicochirurgicalecar elles mettent en jeu le pronostic vital [l, 21. Laprécocité du diagnostic et du geste chirurgical initialsont les deux principaux déterminants du pronostic[L 4.

Le diagnostic d’état septique associé à uneDHBN-FN probable doit faire admettre le malade enréanimation pour une prise en charge médico-chirurgicale qui repose sur trois objectifs prioritaires :- commencer sans délai le traitement symptoma-tique de l’état septique ;

- prescrire l’antibiothérapie appropriée ;-décider avec le chirurgien des modalités du gestechirurgical initial.

La prise en charge de l’état septiqueest symptomatique

Ce traitement est celui d’un état septique grave etn’est pas spécifique. La correction de l’hypovolémiepar remplissage vasculaire préopératoire est indis-pensable, parfois gênée par la pathologie sous-jacente des malades, souvent atteints de pathologiecardiovasculaire. L’hypovolémie est souvent intensedu fait de l’importance de l’œdème et s’accentue enpostopératoire, volontiers aggravée par des phéno-mènes hémorragiques secondaires aux troubles dela coagulation. Elle nécessite une compensationadaptée en peropératoire et un suivi précis en post-opératoire, éventuellement à l’aide d’un cathété-risme cardiaque droit. Le maintien d’une pression deperfusion adéquate nécessite d’utiliser des aminesvasoactives, mais l’effet vasoconstricteur de certainesdrogues peut majorer les lésions ischémiques locales.

Les autres mesures de réanimation

Pour les cas les plus graves, la ventilation assistée estsouvent indiquée dès la période préopératoire poursoulager le travail diaphragmatique, réduire laconsommation d’oxygène et améliorer l’hémodyna-mique, et pour traiter un œdème lésionnel débutant.Elle doit être poursuivie pendant plusieurs jours enraison de la sédation, de l’analgésie et des panse-ments itératifs.

L’alimentation par voie parentérale ou entéraledoit être adaptée à l’état hypercatabolique intense.Ces malades ont fréquemment une pathologiesous-jacente qui compromet leur équilibre nutri-tionnel (diabète, malnutrition, hypoalbuminémie) ;le traitement chirurgical provoque de vastes zonesde décollement, à l’origine de pertes de substancesimportantes. Les malades atteints de fasciite nécro-sante ont des besoins nutritionnels qui sont simi-laires à ceux des brûlés.

Les anomalies hydroélectrolytiques associées doi-vent être prévenues et traitées, notamment l’acidosemétabolique et l’insuffisance rénale secondaire ausepsis, à l’hypovolémie, et/ou à la rhabdomyolyse.

Un traitement anticoagulant efficace doit êtreentrepris précocement car ces malades sont à hautrisque de thrombose du fait de l’inflammationintense, de l’immobilisation prolongée ; les compli-cations thrombo-emboliques sont une cause de mor-talité dans les fasciites nécrosantes. Bien qu’il puisseaccroître les difficultés techniques chirurgicales et lesdéperditions sanguines au début, ce traitement doit

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être maintenu jusqu’à la période de mobilisation.Enfin, les autres complications non spécifiques d’uneréanimation prolongée doivent être prévenues.

Le traitement antibiotique

Exceptionnellement employé seul, le traitementantibiotique n’est le plus souvent qu’adjuvant autraitement chirurgical radical. D’ailleurs, au momentde l’apparition des antibiotiques dans les années1950, le pronostic de ces infections s’est aggravé enretardant l’heure de la chirurgie [3]. Sauf peut-êtredans les formes frontières entre DHB superficiellessans nécrose franche, et DHBN-FN vraies, le traite-ment antibiotique seul n’a guère de chance d’obtenirla guérison de l’infection locale. Ces lésions sont eneffet caractérisées par des thromboses vasculaires,responsables de la nécrose des plans profonds [4],avec pour corollaire une pénétration locale des anti-biotiques insuffisante ou nulle. Le traitement anti-biotique a donc essentiellement pour objectif delimiter la progression de l’infection et sa dissémina-tion hématogène. Pour autant, le choix antibiotiquen’est pas aisé, en raison de la multiplicité des germespotentiellement impliqués dans les différentesformes de ces infections, des difficultés d’interpréta-tion des résultats microbiologiques revenant tardive-ment.

Le choix de PantibiothérapieIl est par conséquent essentiellement probabiliste,tenant compte de la localisation donc des germespotentiellement prédominants :- DHBN-FN des membres, où la responsabilitémajeure des streptocoques et notamment de Strepto-CO~CUS pyogenes impose le choix d’une antibiothéra-pie principalement et très certainement bactéricidesur ce germe, mais également active à l’encontre desgermes anaérobies ;- DHBN-FN cervicofaciales, où l’antibiothérapiedoit être à la fois active contre les streptocoques etles anaérobies en règle générale sensibles à la péni-cilline ;-DHBN-FN de l’abdomen et du périnée, où doitêtre tenu compte de la présence d’anaérobies sensi-bles à la pénicilline (Clostridies) mais aussi résistantsà la pénicilline (Bacteroides) et d’entérobactéries.

Choix antibiotiqueLa pénicilline G est le traitement de référence desDHBN-FN à streptocoques A qui sont constammentsensibles in vitro à cet antibiotique.

Etant donné la pharmacodynamie médiocre despénicillines notamment en milieu mal perfusé, cetteréférence a pu être discutée pour les formes les plusgraves associées à un choc toxique. Il a donc pu être

recommandé [5] une association bêtalactamine-clin-damycine dans les formes invasives sévères avecchoc même si l’activité de la pénicilline pourrait enêtre réduite (indifférence ou même antagonisme) ouune association bêtalactamine-rifampicine théori-quement plus régulièrement synergique sur lesgermes à gram positif.

La pénicilline G est également le traitement deréférence des DHBN-FN clostridiennes. Les mêmestravaux in vitro ou expérimentaux [6] suscitentcependant les mêmes interrogations que pour lesDHBN-FN streptococciques. Dans ce cadre, l’asso-ciation de pénicilline et de clindamycine s’est avéréeplus active que la pénicilline seule.

Dans les DHBN-FN où la responsabilité d’anaéro-bies du groupe Bacteroides, ainsi que celle d’entéro-bactéries, existe, il est conseillé de recourir à uneassociation d’une pénicilline à large spectre et d’uninhibiteur de bêtalactamase ou d’un nitro-imidazolé.Ce dernier doit être privilégié en raison de la pré-sence constante d’anaérobies de sensibilité variableaux pénicillines et de sa meilleure pénétration etactivité dans le foyer infectieux. Les aminosides sontici sans grand intérêt sauf en cas de DHBN-FN post-opératoire avec risque de sélection de bacilles àGram négatif résistants ou de DHBN-FN à Pseudo-monas.

En pratique il paraît licite de proposer :-dans les DHBN-FN des membres et de la régioncervicofaciale, une association par voie intraveineusede pénicilline G et de clindamycine ou éventuelle-ment de rifampicine ;- dans les DHBN-FN de l’abdomen et du périnée, uneassociation d’une pénicilline à spectre large (type uréi-dopénicilline) et d’un imidazolé (métronidazole) éven-tuellement associé à un aminoside (type amikacine)dans des cas particuliers (voir plus loin). Cette antibio-thérapie sera éventuellement adaptée aux résultats descultures des prélèvements peropératoires, en gardant àl’esprit que les anaérobies, toujours difficiles à isoler,doivent être systématiquement pris en compte surtoutsi l’examen montre une flore polymorphe.

Les cas particuliers :-la DHBN-FN du toxicomane. Elle atteint essen-tiellement le membre supérieur et il est nécessairede prendre en considération la responsabilité nonseulement du streptocoque, mais d’un staphylo-coque. On peut proposer l’emploi de l’associationamoxicilline-acide clavulanique, d’une pénicilline M(oxacilline), voire d’une céphalosporine de premièregénération ou d’un glycopeptide avec un aminoside(type gentamicine) [7] ;- la DHBN-FN de l’immunodéprimé. La responsabi-lité de Pseudomonas aeruginosa peut conduire à uneassociation intégrant une activité antipyocyanique,une céphalosporine de troisième génération (la cef-

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270s Texte long

tazidime) associée à un aminoside ; ou l’associationpipéracilline-tazobactam (Tazocilline@) avec un ami-noside (type amikacine) .

Le traitement chirurgical

Base du traitementDans le cas de la dermo-hypodermite bactériennenécrosante avec atteinte de l’aponévrose superfi-cielle, la nécrose cutanée est secondaire à la throm-bose des microvaisseaux hypodermiques. Il n’existepas d’abcédation ni de collection purulente. Lesmuscles ne sont initialement pas concernés. Toute-fois, ils peuvent être touchés lors du traumatisme ini-tial ou des excisions chirurgicales [g, 91.

IndicationLa précocité de l’intervention chirurgicale est le fac-teur pronostic majeur [l, 4, 10-121. En effet, dans lasérie de 65 malades traités entre 1989 et 1994 ana-lysés par McHenry et al. [l], le délai entre l’admis-sion et l’intervention était de 2.5 heures chez lessurvivants et de 90 heures chez les patients décédés.Ainsi dans les formes aiguës, l’intervention s’imposesans aucun délai. C’est dans les formes subaiguësqu’il est plus difficile de décider du moment del’intervention. En cas de doute, il est préférabled’envisager l’exploration chirurgicale.

Les modalités opératoires

Les principes généraux

l IncisionElle confirme l’existence de lésions nécrotiquesenglobant l’aponévrose superficielle ; aspect gris dis-crètement verdâtre avec présence de sérosité sanspus franc.

En cas d’absence de lésions nécrotique macrosco-piquement évidente, il est possible de faire des pré-lèvements biopsiques pour examen histologique etétude bactériologique [4, 131.

l ExplorationLa limite avec les tissus sains peut être difficile àtrouver. L’exploration seule permet de bien identifierl’étendue de la lésion par le clivage facile au doigt dela peau du plan aponévrotique. Pour Wilson [14], il fauttester au stylet d’éventuels décollements qui n’apparaî-traient pas spontanément ou pratiquer des incisionsexploratrices. Il ne faut pas oublier d’explorer la ported’entrée, sachant que parfois elle ne sera pas retrouvée.

l ExcisionL’excision est le maître geste ; elle doit être largequelle que soit l’étendue des lésions. Tout geste ini-tial trop limité serait insuffisant. Il ne faut en aucun

cas se laisser impressionner par l’étendue de larésection. Il n’y a pas de guérison sans excisiontotale des lésions.

L’excision des plans cutanés doit être poursuiviejusqu’à l’apparition d’un saignement de la tranche.Dans la mesure du possible, il faut préserver leszones du plan cutané superficiel encore vascularisées.

11 faut également exciser l’ensemble du tissunécrosé du plan aponévrotique. Tout aspect dépolidoit être considéré comme nécrosé. Il faut aussisuivre et examiner les cloisons profondes pour lesréséquer au moindre doute.

Les muscles sont en principe sains, néanmoins toutaspect nécrotique impose d’étendre la résection deces tissus.

Il faut toujours faire des prélèvements multiples àvisée bactériologique.

Les pansements doivent être légèrement compres-sifs pour limiter les pertes sanguines postopératoires.

l Les reprisesLe lendemain, il faut contrôler de principe la régionopérée car l’excision initiale est rarement complète,le processus nécrosant pouvant également se pour-suivre. Il faut ainsi refaire quotidiennement lepansement et compléter selon le cas l’excision.L’excision est complète, en moyenne, au bout de troisà quatre jours. Parfois cela peut nécessiter 15 jours.

l La chirurgie reconstructriceElle doit être envisagée secondairement et compor-tera le plus souvent des greffes, voire des lambeaux.

Les variantes selon le siège

l Les membresL’utilisation d’un garrot, temporairement, estconseillée pour limiter les pertes sanguines.

Dans les formes très étendues ou devant l’impossi-bilité de maîtriser un état septique menaçant le pro-nostic vital, l’amputation peut s’imposer.

l CervicofacialCette forme a été particulièrement étudiée parMathieu et al. [15]. L’abord chirurgical doit être faitle plus souvent par une incision le long du musclesterno-cléido-mastoïdien. En cas de médiastinite, ilfaut associer un drainage médiastinal ou une thora-cotomie. Parfois même, il est nécessaire d’envisagerun drainage péricardique. Il est impératif de traiterdans ces cas la cause infectieuse réalisant la ported’entrée (infection dentaire le plus souvent).

l AbdomenDans cette localisation, il est impératif de traiterconjointement la cause qui est le plus souventune complication postchirurgicale intrapéritonéale :

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lavage péritonéal, drainage et dérivation digestive.La préservation du capital pariétal est ici une pré-occupation permanente.

l Périnée (gangrène de Fournier) [16]Chez l’homme, il faut à tout prix assurer la conser-vation des organes génitaux externes qui peuventêtre réimplantés temporairement dans une zonegraisseuse sous-cutanée abdominale dans l’attented’une cicatrisation complète. Il faut également trèssouvent réaliser des dérivations urinaires ou diges-tives pour éviter la contamination du foyer d’exci-sion. Il ne faut pas méconnaître des causes cachéestelles les diverticulites sigmoïdiennes ou abcès péri-anaux qu’il faut traiter dans le même temps.

Traitements adjuvants

L’oxygénothérapie hyperbareSelon les modèles expérimentaux, l’oxygénothérapiehyperbare (OHB) est bactéricide sur certaines bacté-ries anaérobies (Clostridium perfringens) ; elle inhibe lacroissance de certains Pseudomonus et E. coli, restaurele pouvoir bactéricide des polynucléaires neutrophiles,favorise l’angiogenèse et la cicatrisation [17-191. Denombreuses publications font état de l’utilisation de1’OHB dans le traitement des DHBN-FN depuis plu-sieurs années [12, 1.5, 18, 20-311. Les résultats quant àson efficacité sont variables : la mortalité était de 13à 30 % dans les études associant antibiothérapie-chirurgie-OHB, et de 25 à 71 % dans les études sansOHB. L’hétérogénéité des formes anatomocliniquestraitées (gangrènes gazeuses, fasciites nécrosantes), dela gravité de l’état des patients et des protocolesd’OHI3 utilisés ne permet pas de conclure à l’efficacitéde 1’OHB en termes de survie et de morbidité Iln’existe pas d’étude comparative méthodologiquementsatisfaisante démontrant l’efficacité de 1’OHB encomplément de l’antibiothérapie et de la chirurgie pourles fasciites nécrosantes. Si la décision de recourir à1’OHB est prise, elle doit être envisagée selon la dispo-nibilité locale d’un matériel et d’une équipe médicaleappropriés, mais ne peut être considérée que commeadjuvant d’un protocole thérapeutique associant réani-mation, chirurgie et antibiothérapie. Dans tous les cas,les risques liés à un éventuel transfert d’un patient dontla gravité est patente doivent être confrontés au béné-fice thérapeutique attendu [19]. L’indication préféren-tielle de 1’OHB pourrait être la gangrène gazeuseclostridienne. Les autres indications et les modalitésthérapeutiques de 1’OHB restent à définir.

Immunoglobulines polyvalentesL’administration d’immunoglobulines polyvalentesintraveineuses (IgIV) a été récemment proposéepour le traitement des chocs toxiques streptococ-

tiques ou staphylococciques [32-411. Dans une étuderétrospective portant sur des fasciites nécrosantes etmyonécroses à streptocoque, le bénéfice de ce traite-ment n’a pas été démontré comme complément thé-rapeutique de l’antibiothérapie et de la chirurgie[42]. Les incertitudes quant au mécanisme d’actionet à l’efficacité des IgIV font que cette modalité thé-rapeutique reste à valider. Elles pourraient être uti-lisées en cas de choc streptococcique [36,37].

Pronostic

La mortalité hospitalière des fasciites nécrosantessemble avoir été progressivement réduite à mesureque ces affections étaient mieux connues, et leurprise en charge plus rapide et plus efficace. Lesséries anciennes font état d’une mortalité moyennede l’ordre de 40 % [43-461 ; les séries publiées depuisles années 1980 indiquent une mortalité hospitalièremoyenne inférieure à 30 % [l, 10-12, 15, 21, 23, 31,47-491. La gravité initiale de l’état septique, l’âge etl’existence d’une comorbidité sont les principauxfacteurs de mortalité ; la présence d’un choc initialaccroît la mortalité à environ 40 %, et les formesgravissimes avec choc toxique streptococcique sontassociées à une mortalité de l’ordre de 50 % à 60 %[37, 461. Les gangrènes clostridiennes, notamment« spontanées » du tronc, ont le pronostic le plussévère ; à l’inverse, les fasciites streptococciqueslimitées des extrémités apparaissent associées à unmeilleur pronostic [12,50].

La précocité de l’intervention chirurgicale, dans lespremières 24 heures suivant l’admission, est undéterminant majeur du pronostic [l, 4, 10-121 ; lesautres éléments pronostiques étant l’âge, les comor-bidités, une pathologie vasculaire périphérique, et laprésence d’une acidose métabolique [l]. Dans cettemême étude, les décès précoces avant le dixièmejour étaient la conséquence du syndrome septique,les décès tardifs étaient expliqués par l’apparitiondes défaillances viscérales [l]. Le retard au diag-nostic, un attentisme sous traitement médical, voirela prolongation de traitements dangereux (anti-inflammatoires), peuvent expliquer pour partie uncertain nombre d’évolutions défavorables.

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